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INDY Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON INDUSTRY

COMITÉ PERMANENT DE L'INDUSTRIE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 2 décembre 1997

• 1532

[Traduction]

La présidente (Mme Susan Whelan (Essex, Lib.)): Je déclare la séance ouverte. Conformément à son ordre de renvoi de la Chambre en date du mardi 25 novembre 1997, nous examinons le projet de loi C-17, Loi modifiant la Loi sur les télécommunications et la Loi sur la réorganisation de l'aliénation de Téléglobe Canada.

Nous allons accueillir plusieurs témoins et nous allons être limités dans le temps à cause d'un vote qui va se dérouler en Chambre vers 16 h 15.

Je propose que nous commencions par l'Association canadienne des télécommunications sans fil, dont la comparution était prévue entre 15 h 30 et 16 heures. Quand ces témoins auront terminé, nous passerons tout de suite aux suivants et poursuivrons jusqu'à ce que la sonnerie nous appelle. Je ne sais pas s'il s'agira d'une sonnerie de 15 minutes ou d'une demi-heure. Cela dépend de ce qui se passera en Chambre, mais nous le saurons dès que la sonnerie commencera à retentir. Nous déciderons à ce moment-là pendant combien de temps nous poursuivrons notre séance, mais nous nous interromprons à temps pour aller voter. Est-ce que cela convient à tout le monde?

En outre, nous allons limiter le nombre de questions et respecter le temps accordé à chacun, dans toute la mesure du possible. Je propose qu'une personne de chaque parti ait la possibilité de poser des questions; cependant, nous allons être très limités. Cela étant posé, je demande à tout le monde d'être aussi bref que possible, mes collègues dans leurs questions, et les témoins dans leurs exposés pour que nous puissions leur poser des questions après coup.

Je ne sais pas qui va commencer. Monsieur Poirier, est-ce vous qui aller faire l'exposé?

M. Roger Poirier (président et chef de la direction, Association canadienne des télécommunications sans fil): Merci, madame la présidente et vous-mêmes mesdames et messieurs les membres du comité. Je m'appelle Roger Poirier et je suis président et chef de la direction de l'Association canadienne des télécommunications sans fil, l'ACTSF. Je suis accompagné de David Farnes, vice-président, Affaires régulatrices, de l'ACTSF. Nous avons aussi avec nous Christopher Taylor, notre conseiller juridique externe.

[Français]

L'Association canadienne des télécommunications sans fil représente le secteur canadien des télécommunications sans fil. Nous comptons parmi nos membres des exploitants de services de téléphonie cellulaire, de communications personnelles, de téléavertissement, de radio mobile et de radio mobile par satellite assurant des services d'un bout à l'autre du pays, ainsi que des fournisseurs de services sans fil fixe, tels des services de télécommunication multipoint locaux.

Nous sommes heureux d'avoir l'occasion de vous faire part de nos observations en ce qui a trait au projet de loi C-17.

Les télécommunications sans fil sont le secteur de l'industrie canadienne des télécommunications à la croissance la plus rapide et l'un des secteurs de l'économie canadienne qui prennent le plus d'expansion. Elles sont la source de milliers d'emplois de haute technicité. Cette année seulement, le secteur a investi plus de 2 milliards de dollars dans la mise en place d'une nouvelle infrastructure de télécommunication au Canada.

• 1535

Plus de 6 millions de Canadiens se servent aujourd'hui de produits sans fil, 4 millions d'entre eux parce qu'ils ont opté pour la commodité, la hausse de productivité et la sécurité que leur procure la téléphonie sans fil.

[Traduction]

C'est le secteur de produit de consommation qui a connu la croissance la plus rapide de toute l'histoire.

Nous appuyons l'intention du gouvernement de modifier la Loi sur les télécommunications et la Loi sur la réorganisation de l'aliénation de Téléglobe Canada, afin de respecter les engagements du Canada à titre de signataire de l'Accord général sur le commerce des services établi par l'Organisation mondiale du commerce. Les engagements que le Canada a pris en février de cette année constituent une autre étape dans le sens d'une libéralisation complète de la concurrence dans l'industrie des télécommunications. Cela est excellent pour le Canada et pour l'ensemble des Canadiens.

Comme le comité le sait, le projet de loi C-17 porte sur diverses questions, dont beaucoup sont très techniques. Nous estimons que, dans l'ensemble, l'approche adoptée à l'égard des questions précises dont il traite est satisfaisante. Nous entretenons, cependant, de graves préoccupations à l'égard de deux aspects particuliers du projet: premièrement, les dispositions instituant un régime d'attribution de licences aux fournisseurs de services de télécommunication et, deuxièmement, les pouvoirs généraux conférés au CRTC par l'alinéa 46.1(1)b) proposé. À notre avis, ces dispositions sont trop générales et ne vont pas dans le bon sens, car elles ouvrent la porte à un resserrement de la réglementation, plutôt que de favoriser le libre jeu des forces du marché. Avant d'en discuter plus en détail, il serait peut-être bon de considérer brièvement le cadre de réglementation qui s'applique aux télécommunicateurs sans fil au Canada.

Au Canada, les membres du secteur des télécommunications sans fil sont à l'heure actuelle réglementés en vertu de deux lois: la Loi sur la radiocommunication et la Loi sur les télécommunications. Conformément à la Loi sur la radiocommunication, Industrie Canada délivre à chaque télécommunicateur sans fil une licence visant la portion précise du spectre radioélectrique et les installations de radiocommunications que celui-ci utilise. Cette licence arrête généralement les conditions d'exploitation particulières imposées à l'entreprise de télécommunication sans fil qui doit, d'autre part, obéir à tous les règlements généraux pris en application de la Loi sur la radiocommunication, qui ont trait à ses activités ou installations.

Le télécommunicateur sans fil est en outre assujetti à la Loi sur les télécommunications. Il est tenu pour une entreprise canadienne aux termes de cette loi, ce qui signifie qu'il doit se plier à toutes les dispositions de cette dernière, à moins que le CRTC ne décide de l'en exempter ou de s'abstenir d'exercer les pouvoirs que lui confère la loi. À ce jour, le Conseil n'a exempté aucun télécommunicateur de l'application de la loi. Il s'est abstenu d'exercer ses pouvoirs à diverses reprises, notamment à l'égard des télécommunicateurs sans fil. Dans la mesure où ces derniers respectent certaines conditions, ils sont donc déchargés de certaines obligations réglementaires, comme celles de déposer des tarifs. Les télécommunicateurs sans fil restent néanmoins assujettis aux autres obligations établies par la loi. De plus, le CRTC peut revenir sur sa décision, quand bon lui semble, et imposer à ces entreprises tous les règlements découlant de la Loi sur les télécommunications.

Étant déjà assujettis à deux cadres de réglementation en vertu de deux lois distinctes, les télécommunicateurs sans fil sont donc particulièrement attentifs à toute proposition susceptible de leur imposer encore plus de règlements. Malheureusement, c'est justement ce que menace de faire le régime d'attribution de licences proposé à l'endroit des fournisseurs de services de télécommunication dans le cadre du projet de loi C-17.

L'article 1 du projet prévoit l'adjonction d'une nouvelle définition: celle de «fournisseur de services de télécommunication», à la Loi sur les télécommunications. L'expression est définie en termes très généraux et est nettement censée englober toutes les entreprises canadiennes ayant leurs propres installations—y compris les télécommunicateurs sans fil— aussi bien que quiconque n'a pas d'installation en propre, mais assure des services de télécommunication de base en revendant les services ou les installations d'entreprises canadiennes.

L'insertion de cette expression ne pose pas de problème en soi. Toutefois, il est également question, à l'article 3 du projet, d'instituer un régime d'attribution de licence à l'intention des fournisseurs de services de télécommunication.

La perspective d'un deuxième régime d'attribution de licences visant les télécommunicateurs sans fil suscite une vive inquiétude chez nos membres. En effet, si le CRTC décidait d'exercer ses pouvoirs d'attribution de licences à l'égard des télécommunicateurs sans fil, ces entreprises pourraient se trouver assujetties à ce régime d'attribution de licences, administrés par deux organismes gouvernementaux distincts en vertu de deux lois distinctes. Elles demeureraient, par ailleurs, assujetties à la réglementation du CRTC en vertu de la Loi sur les télécommunications. À notre avis, il serait tout à fait inapproprié d'adopter une loi permettant une telle multiplication de règlements.

• 1540

Le régime d'attribution de licences proposé vise, si nous le comprenons bien, à permettre au CRTC d'avoir une meilleure emprise sur la réglementation des fournisseurs de services internationaux. Si le Parlement juge nécessaire d'accroître les pouvoirs du CRTC sur ce rapport, il peut le faire d'une façon beaucoup plus spécifique et appropriée qu'on ne le propose dans le projet de loi C-17.

Il suffirait d'amender l'article 3 du projet pour que le nouveau régime d'attribution de licences ne vise que les questions fournissant des services internationaux et s'applique seulement à ces services. Un régime général d'attribution des licences n'est pas nécessaire et ne devrait pas faire l'objet d'une loi.

Le deuxième élément du projet qui nous semble d'une portée trop générale et le nouvel article 46.1, dont l'article 6 du projet de loi C-17 prévoit l'adjonction à la Loi sur les télécommunications.

L'article 6 a pour objet premier d'établir les dispositions voulues pour transférer la responsabilité de la gestion des ressources en matière de numérotage au CRTC. Il s'agit là d'une modification importante de la Loi sur les télécommunications, et nous convenons qu'elle s'impose. Malheureusement, l'article 6 va bien au-delà du numérotage. Selon le libellé actuel de l'alinéa 46.1(1)b), le gouverneur en conseil serait habilité à désigner par règlement «toutes autres activités liées à la fourniture, par une entreprise canadienne, de services de télécommunication» que le CRTC pourrait gérer.

Le libellé de ces dispositions est extrêmement général et il pourrait mener à une augmentation considérable des pouvoirs du CRTC et à l'établissement de nouvelles sphères de réglementation. C'est, à notre avis, une invitation à multiplier les règlements, non à les réduire. Ce n'est pas le message que le Parlement devrait transmettre à l'heure où tous s'accordent pour dire, au Canada comme ailleurs dans le monde, que la réglementation doit céder le pas au jeu des forces du marché.

À notre avis, il n'est ni utile, ni approprié d'adopter des dispositions aussi générales que celles de l'alinéa 46.1(1)b). Il n'y a aucune raison de croire que le CRTC aura besoin de pouvoirs de réglementation encore plus étendus que ceux qu'il a aujourd'hui. Il nous semble donc que, faute d'un tel besoin, il faudrait retirer ces dispositions de l'article 6 du projet.

[Français]

En terminant, nous remercions à nouveau le comité de nous avoir donné l'occasion de lui présenter notre opinion sur le projet de loi C-17.

Nous croyons que ce projet marque un pas de plus vers l'établissement d'un marché des télécommunications véritablement concurrentiel. Les observations que nous avons présentées aujourd'hui portaient sur deux aspects du projet qui, à notre avis, ne concordent pas avec cette orientation générale.

Les amendements que nous proposons sont destinés à empêcher que les avantages engendrés par le projet de loi C-17 ne soient annulés par l'addition d'une réglementation inutile. Modifié comme nous le suggérons, le projet de loi C-17 favorisera la réalisation de l'objectif d'ensemble, qui est d'accroître la concurrence dans le secteur des télécommunications pour le mieux-être de tous les Canadiens.

[Traduction]

En terminant, nous estimons qu'il faudrait apporter d'autres bonifications à la Loi sur les télécommunications pour que le Canada puisse respecter les engagements qu'il a pris envers l'OMC. Ainsi, nous recommanderions au comité d'entreprendre une révision distincte de l'article 133 de la Loi sur les télécommunications, selon lequel SaskTel est à l'heure actuelle exemptée de l'application de celle-ci.

Merci du temps que vous m'avez accordé. Nous serons heureux de répondre à vos questions.

La présidente: Merci, monsieur Poirier.

Monsieur Lowther, voulez-vous commencer?

M. Eric Lowther (Calgary-Centre, Réf.): Madame la présidente, je préférerais poser mes questions plus tard, dans les échanges qui suivront, si cela vous convient. Quelqu'un d'autre pourrait commencer à ma place.

La présidente: Très certainement.

Madame Lalonde, voulez-vous commencer?

[Français]

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Pourquoi au juste ne voulez-vous pas du paragraphe 46.1(1) proposé, notamment son alinéa b)? Ne trouvez-vous pas que dans le monde de la télécommunication, les choses vont tellement vite qu'on peut aujourd'hui ne pas prévoir les services qui seront fournis dans deux ans? Comme les activités dont on parle sont liées à la fourniture par une entreprise canadienne de services de télécommunication, et désignées par règlement du gouverneur en conseil, il est important qu'on se donne cette flexibilité. Je pense qu'il y a peut-être là-dedans une leçon.

• 1545

D'autre part, ne trouvez-vous pas que le CRTC, malgré les pouvoirs qu'il a, a eu tendance à opter pour l'option marché plutôt que pour l'option consommateur et qu'en conséquence, lui donner une plus grande marge de manoeuvre dans ce domaine fort changeant est prudent de la part du législateur, et non le contraire?

M. Roger Poirier: Je pourrais répondre aux deux questions en même temps. Il nous semble que le projet de loi tel qu'il est donne des pouvoirs très larges au Conseil, comme nous l'avons dit plus tôt.

Il nous semble qu'il devrait y avoir un test plus onéreux de leur part quand il s'agit de déterminer pourquoi ces modifications sont nécessaires. On ne change pas la Loi sur les télécommunications tous les jours. Donc, il nous semble que c'est au Parlement de décider quels pouvoirs le Conseil devrait avoir dans ce secteur. Il nous semble que rien n'indique que ces pouvoirs devraient être souples.

Mme Francine Lalonde: Par exemple, les revendeurs, pour autant que je sache, ne sont soumis en ce moment à aucune réglementation. N'était-il pas nécessaire qu'ils le deviennent?

[Traduction]

M. Christopher Taylor (conseiller juridique, Association canadienne des télécommunications sans fil): Je crains de devoir vous répondre en anglais.

[Français]

Mme Francine Lalonde: : Ça va.

[Traduction]

M. Christopher Taylor: Il a été délibérément décidé, à l'époque de l'adoption de la Loi sur les télécommunications, il y a quatre ans, d'en exclure les revendeurs. Le CRTC dispose de différents instruments réglementaires pour exercer un contrôle sur les revendeurs et il s'en sert depuis plusieurs années déjà, en fait depuis plus d'une décennie.

Il n'est pas évident qu'il faille vraiment élargir les pouvoirs de contrôle. Cependant, certains estiment que cela serait approprié dans le domaine international. Selon nous, si Parlement venait à juger qu'une telle chose s'impose, il devrait le limiter au domaine international, et ne pas conférer des pouvoirs très généraux susceptibles d'être utilisés tous azimuts, d'une façon qui n'est pas encore définie.

La présidente: Merci, madame Lalonde. Monsieur Lastewka.

M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): Ma question va dans le sens de celles posée par Mme Lalonde. Je voulais savoir ce qui vous préoccupe surtout dans les deux éléments que vous avez mentionnés. Qu'est-ce qui vous inquiète dans la façon dont cet article est libellé? Pouvez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet? Je pense que nous vous demandons tous deux la même chose.

Nous aimerions savoir en quoi l'inclusion de l'alinéa proposé 46.1(1)b) vous inquiète. Selon moi, cette disposition se retrouve ici pour qu'on suive l'évolution de la technologie, plutôt qu'on ait à revenir devant le Parlement plus tard pour revoir cette question. Nous, nous faisons confiance au CRTC pour prendre ce genre de décision.

Je cherche à comprendre les préoccupations que vous entretenez à propos du libellé actuel. De quoi avez-vous peur?

M. Roger Poirier: Ce que nous craignons—et j'inviterai mes collègues à vous en dire plus long—, c'est le caractère très large de cette disposition, dans l'alinéa en question et dans les exigences relatives à l'émission des licences proposées à l'article 1 du projet de loi. De toute évidence, cela est synonyme d'une réglementation accrue, et pas du contraire.

Nous représentons un secteur d'activité qui évolue dans un marché extrêmement compétitif et nous rêvons du jour où, à toutes fins utiles, tous les règlements concernant notre industrie seront supprimés. C'est d'ailleurs la tendance générale. Comme nous vous l'avons dit, même à l'heure actuelle, nous assistons à un grand nombre de cas où l'organisme de réglementation s'abstient d'exercer son pouvoir de contrôle.

Nous estimons que tout projet de loi conférant des pouvoirs additionnels destinés à réglementer notre industrie, sous la forme de licences, va dans le mauvais sens. Si le gouvernement veut conférer au Conseil les pouvoirs qu'il estime nécessaire de lui donner pour qu'il puisse traiter d'aspects particuliers, comme la question des télécommunicateurs internationaux, il peut le faire en établissant des définitions claires et en s'assurant que les dispositions du projet de loi s'appliquent aux aspects en question. Mais ici, ce sont des pouvoirs réglementaires considérables qu'on confère au Conseil. Nous pourrions nous retrouver dans une situation de double réglementation, avec deux types d'exigence en matière de licence. Notre industrie préférerait qu'on s'oriente dans une direction différente.

• 1550

Voilà, brièvement résumées quelles sont nos préoccupations, mais peut-être que mes collègues vont vous en dire plus long à ce sujet.

La présidente: Merci.

Monsieur Lastewka.

M. Walt Lastewka: Si l'on fait fi des deux éléments que vous avez mentionnés, je suppose que vous êtes d'accord avec la façon dont le reste de la loi est rédigé.

M. Roger Poirier: Nous n'avons pas de gros problèmes en ce qui concerne le reste du projet de loi, comme nous vous l'avons dit.

M. Walt Lastewka: Comme je saisis tout à fait les deux points faisant problème, je n'ai pas d'autres questions à poser à madame la présidente.

La présidente: Merci, monsieur Lastewka.

Monsieur Lowther.

M. Eric Lowther: Merci, madame la présidente.

En fait, j'ai plusieurs questions à vous poser. D'abord, saisissez-vous la raison d'être de l'émission de licences en ce qui vous concerne? Voyez-vous une raison légitime à cela?

M. Roger Poirier: Quand vous dites «en ce qui vous concerne», voulez-vous dire l'industrie des télécommunications sans fil, en particulier?

M. Eric Lowther: Oui.

M. Roger Poirier: Non, nous n'en voyons pas. D'après ce que nous comprenons de cette disposition, elle aurait pour objet de régler certaines de nos préoccupations relativement aux télécommunicateurs étrangers. Or, comme nous l'avons dit, si telle en est la raison, le projet de loi et les changements apportés à la loi devraient être davantage axés sur cela.

Le problème, c'est qu'à la façon dont le projet de loi est actuellement rédigé, il est beaucoup trop vaste. Il se trouverait à étendre les pouvoirs du Conseil qui pourrait décider d'émettre des licences aux télécommunicateurs sans fil. Or, comme nous vous l'avons dit, nous avons déjà une licence en vertu de la Loi sur la radiocommunication et nous sommes déjà soumis aux dispositions de la Loi sur les télécommunications.

M. Eric Lowther: Donc, pour que les choses soient bien claires: les deux parties du projet de loi qui vous posent le plus problème sont celles concernant l'élargissement des dispositions relatives aux licences, dans les articles proposés 16.1 à 16.4, si je ne m'abuse, ainsi que les pouvoirs administratifs élargis que confère l'alinéa proposé 46.1(1)b). Ce sont, essentiellement les deux éléments qui vous préoccupent. N'est-ce pas?

M. Roger Poirier: C'est exact.

M. Eric Lowther: La conclusion de M. Lastewka, que vous n'avez rien d'autre contre ce projet de loi, ne tient pas tant au fait que celui-ci est parfait qu'au fait qu'il n'a aucune répercussion sur votre industrie. N'ai-je pas raison?

M. Roger Poirier: C'est cela. Certaines dispositions, même en ce qui concerne les changements apportés à la Loi sur Téléglobe, par exemple, n'ont aucune incidence sur notre secteur d'activité. Mais pour l'essentiel, ce projet de loi nous convient.

M. Eric Lowther: Merci.

M. Roger Poirier: Je tiens à préciser que nous sommes d'accord avec les dispositions de certaines parties—comme le numérotage, par exemple. Ce sont des aspects à propos desquels nous tenons des discussions depuis...

M. Eric Lowther: Puis-je enchaîner sur ce commentaire, madame la présidente?

S'agissant du numérotage et de la façon dont ce projet de loi propose de régler le problème, estimez-vous que ce qu'on nous propose, autrement dit d'avoir recours au CRTC, à une tierce partie, est la seule manière envisageable de gérer tout cela? Selon vous, est-ce une idée qui émane de l'industrie ou du CRTC, et est- ce alors une proposition à teneur réglementaire?

M. David Farnes (vice-président, Affaires régulatrices, Association canadienne des télécommunications sans fil): Il ne fait aucun doute que c'est quelque chose de nouveau. J'imagine que tous les télécommunicateurs au Canada sont d'accord avec cette approche. En mettant sur pied des comités de travail composés de d'entreprises de télécommunication et d'autres intervenants du secteur des télécommunications, le CRTC a adopté une démarche davantage tournée vers l'industrie.

M. Eric Lowther: Qui va assumer les coûts administratifs associés à ce régime d'attribution des numéros? Le gouvernement ou l'industrie?

M. David Farnes: Je crois qu'on peut affirmer, dans une certaine mesure, qu'il appartiendra au Conseil de le déterminer. Mais je m'attendrais à ce qu'une grande partie de ces coûts soient assumés par les télécommunicateurs participant à cette tribune. J'ai l'impression que c'est la direction que va prendre le Conseil.

M. Eric Lowther: Plus je pose des questions, plus j'en ai à poser.

La présidente: Une dernière question, je vous en prie monsieur Lowther.

• 1555

M. Eric Lowther: Parfait. Certaines parties de ce projet de loi traitent de l'adoption de normes relatives au matériel, au fait qu'il faudra certifier que ce matériel répond à certaines normes, avant qu'on puisse le brancher sur les installations canadiennes. Les représentants du ministère de l'Industrie nous ont dit que cet article du projet de loi était repris, presque in extenso, de la Loi sur la radiocommunication, et que ces mêmes parties de la loi, reprises dans le projet de loi C-17, prévoient la mise sur pied d'une nouvelle catégorie d'inspecteurs. En outre, la loi confère à ces inspecteurs le droit de pénétrer dans n'importe quel lieu d'affaires, sans être annoncés, pour examiner les dossiers et le matériel. Cela est-il conforme au sort qui vous est réservé en vertu de la Loi sur la radiocommunication? Le savez-vous?

M. Roger Poirier: Comme vous le disiez, cela ne change pas beaucoup ce qui existe déjà dans la Loi sur la radiocommunication. On opère, dans une certaine mesure, un transfert de responsabilités au CRTC en ce qui a trait à ce que nous appelons le raccordement du matériel des terminaux et ce n'est pas un aspect qui nous cause grand problème.

M. Eric Lowther: Donc, jusqu'ici, vous n'avez pas eu de problème à cause du raccordement des terminaux ou du matériel ne répondant pas aux exigences de vos réseaux.

M. Roger Poirier: Nous fonctionnons de façon légèrement différente, parce que nos signaux ne sont pas acheminés par fils.

M. Eric Lowther: Très bien.

M. Roger Poirier: Nos clients ne relient pas de matériel à un réseau public, comme c'est le cas pour les systèmes de télécommunication par fil ou par câble. Au Canada, le programme de raccordement des terminaux concerne tous les équipements du genre téléphones, télécopieurs et autres, qui doivent être approuvés avant d'être reliés au réseau public. En ce qui nous concerne, les téléphones sont visés par des exigences complètement différentes.

M. Eric Lowther: Pensez-vous que ce soit une bonne idée de prévoir, dans la loi, ce critère normatif, pour des choses qui n'existent pas encore aujourd'hui? Le matériel qui est branché à vos réseaux doit répondre à certaines...

M. Roger Poirier: Je préfère m'abstenir de tout commentaire à ce propos.

M. Eric Lowther: Parfait.

La présidente: Merci, monsieur Lowther.

M. Eric Lowther: De toute façon, je crois qu'il en est question dans l'autre loi.

[Français]

La présidente: Madame Lalonde, vous avez une autre question?

Mme Francine Lalonde: Vous dites que vous êtes des compagnies fortes et que vous êtes capables de vous défendre sur le marché. N'est-il pas vrai, cependant, que le projet de loi C-17 va transformer considérablement les conditions générales? Il semble déjà qu'il va s'ensuivre une lutte commerciale assez féroce. En conséquence, n'est-il pas nécessaire que le CRTC et le gouvernement conservent des pouvoirs, notamment à l'article 16.1?

La concurrence ou le marché peut régler les problèmes quand il y a un volume, mais quand il n'y a pas de volume, cela ne règle pas les problèmes.

M. Roger Poirier: Notre problème est que le projet de loi, notamment les articles dont nous avons parlé, est tout simplement trop large. Il est possible de répondre aux inquiétudes avec une loi beaucoup plus ciblée, qui définit le problème tel qu'il est. Il n'est pas nécessaire d'avoir un régime de licences pour toutes les compagnies de télécommunication au Canada.

Mme Francine Lalonde: Pourquoi pas?

M. Roger Poirier: Ce n'est pas nécessaire.

Mme Francine Lalonde: Mais tout bouge.

M. Roger Poirier: Oui, mais nous avons déjà une licence en vertu de la Loi sur la radiocommunication. Nous ne voulons pas deux régimes de licences au Canada et deux niveaux de réglementation. C'est le cas pour la plupart des membres des entreprises de télécommunication.

Mme Francine Lalonde: Pour la plupart.

[Traduction]

La présidente: Merci, madame Lalonde.

Je vais maintenant remercier nos témoins de l'Association canadienne des télécommunications sans fil. Je crois savoir que d'autres témoins vont soulever des points semblables aux vôtres.

Merci d'être passés les premiers. Je vous invite à céder votre place à nos prochains témoins qui représentent Stentor.

M. Roger Poirier: Merci.

La présidente: Nous allons entendre la présentation de Stentor. Je crois savoir que la greffière a fait distribuer des copies du mémoire de Stentor. Est-ce que tout le monde en a une?

• 1600

Je ne sais pas au juste qui va commencer. Monsieur Mulder, est-ce vous? Ce serait parfait. Nous sommes prêts à vous entendre quand vous le voudrez.

M. Nick Mulder (président et chef de la direction, Stentor politiques publiques Télécom Inc.): Merci, madame la présidente de nous avoir donné l'occasion de comparaître devant votre comité. Comme vous êtes pressés par le temps, vous voudrez que nous soyons brefs et comme nous avons un mémoire de huit pages à vous présenter, je vais vous en résumer les trois premières pages.

Mais avant cela, je tiens à vous présenter mes deux collègues. Je suis accompagné de Greg van Koughnett, vice-président, Affaires juridiques et générales, et de Robert Tritt, directeur national, Affaires internationales.

Pour ceux d'entre vous qui ne connaissent pas Stentor, sachez que nous sommes une alliance des principales compagnies de téléphone du Canada, plus un certain nombre de compagnies affiliées ou associées. Nous nous chargeons de tout ce qui touche aux grandes politiques pour ces entreprises, et nous assumons aussi les relations et les communications avec le gouvernement.

Nous applaudissons à cette loi et nous tenons à féliciter le gouvernement pour les mesures qu'il a prises jusqu'à maintenant afin de mettre en place un nouveau modèle de concurrence dans l'arène des télécommunications à l'échelle internationale. Le gouvernement a ainsi réalisé un progrès considérable au cours des 18 derniers mois, et sachez que nous avons beaucoup participé à ce processus.

Deuxièmement, nous sommes convaincus qu'il faudrait, pour principaux objectifs politiques... Puis-je poursuivre?

La présidente: Nous allons simplement vérifier s'il s'agit d'une sonnerie de 15 minutes. J'ai l'impression que nous allons en avoir deux. Mais nous allons le confirmer. Vous pouvez continuer, monsieur Mulder...

M. Nick Mulder: Bien.

La présidente: Je vous interromprai si je le dois.

M. Nick Mulder: Je suis certain que vous n'y manquerez pas. En tout cas, les votes en Chambre sont beaucoup plus importants qu'un témoin. J'en suis conscient.

Donc, nous sommes d'accord avec l'objectif essentiel de cette loi qui consiste à instaurer un climat favorisant la concurrence.

Troisièmement, nous sommes tout à fait d'accord avec l'adoption de ce projet de loi et espérons que le comité veillera à ce que cela se fasse dans les plus brefs délais. Comme nous le disions à certains d'entre vous, avant le début de la séance, nous aimons les plans de la Chambre, mais nous voudrions déplacer certains meubles et peut-être créer une ouverture à l'arrière.

La présidente: Excusez-moi, monsieur Mulder. C'est une sonnerie de 15 minutes seulement, ce qui veut dire que nous allons devoir suspendre la séance pour revenir après le vote. Mais comme tout le monde a votre exposé, nous allons l'emporter avec nous pour le lire.

Des voix: Ah, ah!

M. Nick Mulder: Je suis certain que vous le lirez en route vers la Chambre.

La présidente: Excusez-moi, mais nous devons suspendre la séance que nous reprendrons après le vote.

J'apprécierais beaucoup que les députés reviennent le plus vite possible après.

• 1603




• 1641

La présidente: Eh bien, nous reprenons la séance.

Je présente mes excuses aux témoins. Nous allons courir un peu contre la montre. Si nous n'avons pas terminé à 18 h 15, nous allons être interrompus par un autre vote. J'invite donc nos témoins à être le plus bref possible.

J'ai lu le rapport avec grand intérêt, je l'ai trouvé fascinant. Monsieur Mulder, pouvez-vous reprendre là où nous nous en étions arrêtés.

M. Nick Mulder: Merci, madame la présidente, et merci au comité d'être revenu.

Je suis au milieu de la page 4 de notre mémoire. Dans le dernier paragraphe, nous disons que nous voulons maintenant aborder la question des amendements que les compagnies de Stentor aimeraient porter à votre attention. Comme je le disais avant la pause, nous sommes d'accord avec la teneur générale du projet de loi et espérons qu'il sera adopté assez rapidement.

Les amendements que nous proposons visent tous le même objectif: veiller à ce que le projet de loi reste fidèle à son but premier et qu'il évite de créer des règlements risquant d'imposer un fardeau et des risques inutiles.

Ces amendements portent sur trois aspects: l'attribution des licences, les nouveaux pouvoirs accordés au Conseil et les partenariats.

Tout d'abord, madame la présidente, je vais aborder le concept de l'attribution des licences aux télécommunicateurs. Même s'il s'agit d'un concept très répandu sur la planète, l'attribution de licences n'a jamais été le mode de fonctionnement privilégié au Canada. Il est vrai que, dans sa première version déposée à la Chambre des communes en 1992, l'avant-projet de la Loi sur les télécommunications envisageait un régime d'attribution des licences. Mais la Chambre des communes et le Sénat ont eu la sagesse de retirer ces dispositions du projet de loi en faveur d'une substitution de l'autorité directe sur les télécommunicateurs canadiens. L'autorité directe conférée au Conseil de rendre des ordonnances à l'endroit des fournisseurs de services de télécommunication est une mesure efficace, peu coûteuse et dont les délais d'exécution sont rapides.

Madame la présidente, le concept d'attribution de licences en ce qui a trait aux services internationaux est, depuis la conclusion heureuse des négociations de l'OMC à Genève, plus tôt cette année, considéré comme souhaitable, même s'il n'est pas essentiel sur le plan juridique pour permettre l'harmonisation du régime réglementaire canadien avec celui de la majorité de nos principaux partenaires commerciaux. Les États-Unis, par exemple, attribuent des licences aux télécommunicateurs qui offrent leurs services à l'échelle internationale, mais ils ne le font pas sur le marché intérieur.

Toutefois, à notre avis, il n'est pas essentiel de surimposer l'attribution de licences à la Loi sur les télécommunications. Selon nous, l'attribution de licences devrait être limitée aux considérations liées aux réseaux internationaux. Par conséquent, à l'article 3 du projet de loi, nous aimerions proposer que l'expression «services de télécommunication» soit suivie du mot «télécommunications», chaque fois que cette expression figure dans l'article.

Madame la présidente, j'aimerais signaler à votre attention un dernier point concernant l'attribution des licences. Le Comité voudra peut-être envisager l'insertion d'une disposition de temporisation afin que ce nouveau dispositif de surveillance par le CRTC ne survive pas au-delà de sa vie utile. Mes collègues de TELUS traiteront de cette question plus en profondeur, plus tard cet après-midi, quand ils comparaîtront devant vous.

Deuxièmement, madame la présidente, pendant que ce projet de loi prenait forme, il est devenu souhaitable d'aborder plusieurs aspects, en plus des mesures liées à l'attribution des licences. Il s'agit notamment de la gestion, par le CRTC, des ressources en matière de numérotage dont il est question à l'article 6 du projet de loi et qui est prévue par l'addition de l'alinéa 46.1(1)a) à la Loi sur les télécommunications.

Je crois pouvoir dire que nous-mêmes et les autres parties concernées sommes entièrement d'accord avec l'ajout de cette disposition. Nous ne nous y opposons absolument pas. Néanmoins, madame la présidente, on a ajouté un alinéa b) qui permet, au Conseil, de gérer «toutes autres activités liées à la fourniture de services [...] désignés par règlement du gouverneur en conseil».

• 1645

Or, à ce qu'on sache, madame la présidente, il n'existe à l'heure actuelle aucune autre activité envisagée nécessitant l'utilisation de ce nouveau pouvoir statutaire qui, on peut l'affirmer, est très vaste. Nous sommes mal à l'aise avec cette proposition selon laquelle le Parlement délègue au CRTC et au gouverneur en conseil l'autorité nécessaire pour étendre les pouvoirs de la loi dans des domaines entièrement nouveaux concernant les activités des télécommunicateurs canadiens. À notre avis, le Parlement devrait limiter les pouvoirs statutaires accordés au Conseil à ceux qui sont jugés nécessaires pour lui permettre de régler les problèmes qui lui sont actuellement soumis ou que l'on prévoit, raisonnablement, qui pourraient lui être soumis dans un avenir rapproché.

À vrai dire, madame la présidente, il est significatif que la Loi sur les télécommunications précise comme l'un des objectifs de la politique canadienne en matière de communication ce qui suit, et je cite l'alinéa f) de l'article 7 de cette loi:

    favoriser le libre jeu du marché en ce qui concerne la fourniture de services de télécommunication et assurer l'efficacité de la réglementation, dans le cas où celle-ci est nécessaire.

et j'insiste ici sur les mots «où celle-ci est nécessaire».

    Par conséquent, madame la présidente, nous pensons qu'il serait approprié dans le contexte présent et futur qui favorise le libre jeu du marché dans le domaine de la fourniture de services de télécommunication, de supprimer l'alinéa b) du paragraphe 46.1(1), ainsi que d'effectuer les suppressions corrélatives et de corriger la numérotation.

Nous estimons que la suppression de cet alinéa relève de la vision de la présidente du CRTC, Mme Françoise Bertrand, qui plus tôt cet automne a insisté sur la nécessité d'adopter de nouvelles approches. Comme elle l'a déclaré, pour expliquer sa vision du rôle du Conseil à l'Alliance canadienne des télécommunications de l'entreprise, le 16 septembre dernier à Toronto: l'ancien Conseil aurait dit: «nous allons réglementer», mais le nouveau Conseil dira «nous allons réglementer si nécessaire...». Elle a aussi insisté sur le fait que même si la présence du Conseil demeure nécessaire, pour exercer une responsabilité en matière de réglementation, ce dernier n'hésitera pas à se retirer chaque fois que ce sera possible.

Nous pensons donc que les modifications que nous proposons sont tout à fait conformes à la nouvelle orientation du CRTC. Cela conforte en outre notre point de vue selon lequel le CRTC devrait s'efforcer de réduire son rôle actuel en matière de réglementation et qu'il ne devrait pas se voir accorder de pouvoirs additionnels à moins que leurs nécessités aient été démontrées. Mais jusqu'ici, nous n'avons pas entendu parler d'une telle chose.

Troisièmement, et pour terminer, madame la présidente, nous aimerions parler d'une disposition qui a trait aux articles 4 et 5 du projet de loi et qui a pour objet d'élargir la portée des fournisseurs de services autorisés jusqu'aux sociétés, afin d'inclure les partenariats des sociétés. Cela est souhaitable pour les fins de planification financière. À notre avis, ce concept est tellement souhaitable qu'il devrait être élargi au-delà de la portée des licences accordées au réseau de câbles sous-marins. Nous sommes donc convaincus qu'il serait très avantageux pour l'industrie canadienne des télécommunications de permettre l'établissement de partenariats entre sociétés admissibles visées explicitement au paragraphe 16(1) de la Loi sur les télécommunications.

Madame la présidente, pour faciliter le travail du Comité, j'ai joint à titre de référence une annexe présentant les amendements que nous proposons. Je vous remercie, madame la présidente, d'avoir pris le temps de nous écouter et de prendre note des améliorations que nous proposons pour ce projet de loi. Encore une fois, je tiens à souligner que nous sommes d'accord avec son orientation globale, mais nous estimons que certains aspects gagneraient à être améliorés.

Merci.

La présidente: Merci beaucoup, monsieur Mulder.

Monsieur Lowther.

M. Eric Lowther: Merci, madame la présidente.

Je trouve que c'était là un excellent exposé. Les citations de Mme Bertrand et l'orientation que le CRTC semble devoir prendre vont certainement à l'encontre de certaines parties de ce projet de loi, comme vous l'avez souligné, monsieur Mulder.

J'aimerais que vous nous donniez le point de vue de Stentor, par-delà de toute cette question de l'attribution des licences à l'échelon national ou aux fournisseurs de services de télécommunication de base au Canada. Je m'interroge à propos de toute cette idée d'attribution des licences, même à l'échelon international. Si je me souviens bien, l'industrie est venue nous dire que nous devions attribuer des licences parce que les autres le faisaient, à l'étranger, et que nous n'avions pas le choix.

Je suppose que les licences ont pour objet de nous protéger contre quelque chose. Avez-vous une idée de ce contre quoi des licences internationales devraient nous protéger?

M. Nick Mulder: Madame la présidente, M. Greg van Koughnett pourrait certainement vous en parler plus en détail, mais je ne pense pas que cela concerne la protection. Il est plus question de s'assurer que tous les joueurs, au sein du nouveau régime— puisqu'il s'agit là d'un régime entièrement nouveau, dans lequel les services internationaux de télécommunications seront ouverts à la concurrence pour la première fois—que tous les joueurs, donc, soient bien au courant des exigences.

Nous pensons que le régime des licences est une bonne idée dans un premier temps, pour que tout le monde soit bien au courant des obligations à respecter. Mais cela veut dire également que pendant deux à cinq ans, il faudra avoir une disposition de temporisation. À ce moment là, les joueurs sauront de quels régimes il s'agit et il ne sera plus nécessaire d'attribuer des licences.

• 1650

M. Eric Lowther: Que pourrait-il se passer de pire si nous n'avions pas de licence internationale? Cela coûte cher et il faudra bien que quelqu'un absorbe ces coûts. Comme je suppose que c'est le contribuable qui devra assumer la note, j'essaie de voir quels avantages il pourra retirer de ce régime d'attribution des licences à l'échelle internationale. Qu'a-t-on à en retirer? Qu'est-ce qui nous protège là dedans?

M. Nick Mulder: Encore une fois, je ne pense pas qu'il s'agisse d'une question de protection. Il faut simplement s'assurer que tout le monde connaît ses privilèges et ses obligations.

Greg, voulez-vous parler de la question des coûts?

M. Greg van Koughnett (vice-président, Affaires juridiques et générales, Stentor politiques publiques Télécom Inc.): Merci, madame la présidente.

Monsieur Lowther, l'Alliance Stentor trouve un avantage au régime d'attribution des licences internationales parce qu'il est normalement très complexe de régir un pays «franc-tireur», non membre de l'OMC. Il n'y a que 69 signataires de l'OMC, mais bien plus de 69 pays sont concernés. Certains pays pourraient décider de profiter des possibilités d'arbitrage à l'échelle internationale, même si, à strictement parler, les décisions n'ont pas de valeur légale.

Bien qu'il soit possible de contrer ces mauvais joueurs dans le cadre du régime actuel, quand tel est le cas, Stentor se retrouve pris entre le marteau et l'enclume. C'est en effet en fonction du mécanisme de tarification de Stentor que sont actuellement contrôlés ces mauvais joueurs. Dans un régime de licence internationale, le Conseil accorderait une licence à ces joueurs et Stentor se retrouverait sur la touche.

M. Eric Lowther: Êtes-vous en train de dire que ces mauvais joueurs ne tombent pas sous le coup de l'accord de l'OMC?

M. Greg van Koughnett: Tout à fait.

M. Eric Lowther: Donc, selon vous, malgré la Loi sur la concurrence et d'autres véhicules dont nous disposons actuellement au Canada, nous ne pouvons pas refuser à ces mauvais joueurs l'accès au marché canadien en invoquant pour prétexte qu'ils n'ont pas signé l'accord de l'OMC. Peut-on utiliser l'accord de l'OMC en tant que véhicule pour faire la part entre ceux qui respectent les règles et les autres. Nous n'avons pas besoin de ce régime réglementaire à l'échelon international.

Mais plus important encore, j'ai entendu parlé des préoccupations à propos du contournement du Canada par le Canada, mais je pense que ce qui nous préoccupe par-dessus tout, c'est le marché américain. À cause de la concurrence dans l'interurbain, le scénario du contournement du Canada par le Canada, plus rentable aux États-Unis, n'est plus aussi attrayant qu'auparavant et le risque qu'il se reproduise a beaucoup diminué.

Quant à moi, toute cette idée d'un régime international destiné à protéger le marché canadien n'est pas vraiment fondée, à moins que je passe à côté de quelque chose.

M. Nick Mulder: J'espère que nous ne vous avons pas donné l'impression que nous voulons faire tout cela pour protéger quelque chose. C'est simplement qu'au moment de la libéralisation de l'industrie des télécommunications, qui était jusqu'ici un monopole, il faut veiller à ce que tout le monde connaisse bien ses obligations et les règles du jeu. Il nous semble donc logique, pendant un certain temps, d'instaurer un régime de licences, de sorte que tout le monde se retrouve dans la même barque.

Après un certain temps, il sera possible de se dégager de ce régime, qu'on soit ou non signataire de l'OMC, mais surtout, comme M. van Koughnett l'indiquait, si l'on ne fait pas partie de l'accord global.

M. Eric Lowther: J'apprécie votre réponse, mais je ne suis toujours pas convaincu que nous avons besoin de ce régime, si ce n'est pour nous ménager une zone de confort.

Je vais vous poser une dernière question, puis je laisserai la parole à d'autres. Supposons que nous ne puissions pas changer ce projet de loi et qu'il permette l'émission de licences à tout le monde, jusqu'aux fournisseurs de services de télécommunication de base, comme c'est le cas aujourd'hui, en passant par les revendeurs et les télécommunicateurs internationaux. Est-ce que Stentor serait favorable à l'adoption de ce projet de loi, ou préféreriez-vous que nous nous en passions?

M. Nick Mulder: C'est une très bonne question, mais j'ai des difficultés à y répondre parce que cela supposerait que le Comité ne peut y apporter de modifications. J'ai l'impression que si la majorité des députés ici présents estimaient qu'on peut apporter des modifications, le projet de loi sera effectivement modifié. Si je devais choisir entre les deux—et sans consulter mes collègues ici présents—je dirais que, dans l'ensemble, il s'agit là d'un projet de loi important. Il constitue un progrès sensible dans tout le domaine des télécommunications et sur le plan de la concurrence. Donc, l'un dans l'autre, si vous m'obligiez à faire un choix, je dirais que vous devriez adopter ce projet de loi et que nous pourrions revenir plus tard sur les autres aspects.

Mais comme je le disais, j'espère que la majorité des membres estimeront que nos recommandations sont positives et qu'ils les retiendront dans cet esprit.

• 1655

La présidente: Merci, messieurs Mulder et Lowther. Monsieur Murray.

M. Ian Murray (Lanark—Carleton, Lib.): Merci, madame la présidente.

Je me propose de poursuivre essentiellement dans la même veine, c'est-à-dire de vous interroger à propos de la nécessité de ce règlement. Par exemple, comme vous l'indiquez dans votre mémoire, à l'heure actuelle, aucune autre activité envisagée ne nécessite l'utilisation de ce nouveau pouvoir statutaire qui, on peut l'affirmer, est très vaste. Vous citez ensuite Mme Bertrand du CRTC.

Je suppose que, durant la période de gestation de ce projet de loi, Stentor a eu des échanges avec le gouvernement. J'essaie simplement de comprendre ce qui se cache vraiment derrière les pouvoirs réglementaires prévus dans le projet de loi. C'est comme si cela ne venait pas du CRTC. Un fonctionnaire fédéral vous aurait-il donné les raisons impérieuses pour lesquelles cela doit se retrouver dans le projet de loi, alors que le CRTC semble suggérer que le monde s'achemine vers une déréglementation généralisée?

M. Nick Mulder: Ce sont là d'excellentes remarques, monsieur Murray, et je vais essayer de vous répondre.

D'abord, nous avons effectivement eu des échanges avec des fonctionnaires d'Industrie Canada et du CRTC. Nous étions effectivement au courant qu'ils allaient abroger la Loi sur Téléglobe Canada et appliquer un régime d'octroi de licences. En revanche, nous n'avons pas eu le privilège de voir l'ébauche de ce projet de loi. Certains avocats ont été mis au courant des détails du projet de loi, mais ils ont dû promettre le secret, si bien que nous n'avons pas eu la possibilité de faire de commentaires à ce propos.

Comme je le disais, nous aimons la loi dans son ensemble. Nous estimons qu'il faudrait améliorer certaines de ces dispositions, ce dont nous vous avons parlé.

Il s'agit notamment d'améliorer la question que vous avez soulevée, monsieur Murray, à savoir celle des pouvoirs du gouverneur en conseil. Jusqu'à présent, nous ne savons pas quelles fonctions au juste seraient transférées. Nous sommes bien sûr d'accord avec les dispositions relatives au numérotage et à tout ce qui y touche. Nous estimons qu'il est tout à fait justifié de confier le numérotage au CRTC, mais nous n'avons entendu personne réclamer que ces dossiers, actuellement traités par d'autres, soient transférés au CRTC.

Comme je le disais, si nous étions au courant de telles activités, nous serions favorables à l'application du nouveau pouvoir statutaire, mais nous réclamerions qu'on impose certaines limites à ce pouvoir, nous demanderions qu'il s'inscrive dans les cadres actuels de la Loi sur les télécommunications et qu'il soit conforme avec le rôle du CRTC, qui est en train de se profiler. Dans certains cas, le numérotage devrait être effectué en toute indépendance du CRTC et pourrait donc être transféré au secteur privé.

Nous estimons que le libellé actuel de la loi est très large. Je ne veux pas vous paraître cynique, mais selon qui sera ministre ou qui composera le gouverneur en conseil, on pourrait très soudainement se trouver à confier de nouvelles fonctions au CRTC.

Comme nous ne connaissons pas la logique qui sous-tend cette disposition, nous aimerions que celle-ci fasse l'objet de certaines restrictions ou qu'elle soit carrément supprimée. Si, dans l'avenir, on devait estimer nécessaire de confier au Conseil ce genre de fonction, le Parlement pourrait toujours sanctionner la chose à ce moment-là.

M. Ian Murray: Tout cela me semble raisonnable. C'est tout ce que je voulais savoir, madame la présidente.

La présidente: Parfait, monsieur Lastewka, vous vouliez enchaîner sur cela?

M. Walt Lastewka: Oui, je vais enchaîner dans la même veine et j'aimerais

[Note de la rédaction: Difficultés techniques] M. Lowther. C'est une des raisons pour lesquelles nous tenons ces audiences. Nous voulons recueillir l'avis de tous les intervenants avant de faire franchir une étape supplémentaire à ce projet de loi.

Je tiens à vous féliciter pour votre présentation et pour nous avoir parlé sans détour du genre de modifications qu'on devrait apporter au projet de loi. Je n'ai plus de question à vous poser. Je comprends très bien votre position au sujet des changements que vous voudriez y voir. Je suis certain que le Ministère et mes collègues au Comité ont eu l'occasion de mieux comprendre tout cela. Je vous remercie beaucoup.

La présidente: Merci. Madame Lalonde.

[Français]

Mme Francine Lalonde: J'essaie de comprendre. Définissez-moi les fournisseurs de services de télécommunication internationaux. Qu'est-ce que ce serait? Vous avez proposé des articles, mais il devrait y en avoir un autre qui définisse les fournisseurs de services de télécommunication internationaux. Quels seraient-ils?

M. Nick Mulder: Madame Lalonde, je ne suis pas un expert à ce sujet. M. van Koughnett pourrait vous répondre.

Mme Francine Lalonde: Oui, je veux une réponse.

M. Greg van Koughnett: Il s'agit tout simplement des revendeurs et des fournisseurs publics qui ont des installations, comme Bell Canada et les autres membres de l'alliance Stentor. Actuellement, il y a deux types de compagnies aux Canada: les revendeurs et les autres qui ont des installations. Comme on l'a dit il y a 30 minutes, l'intention originale de la Loi sur les télécommunications était de ne jamais faire subir aux revendeurs la réglementation du CRTC.

• 1700

Maintenant, avec le régime du projet de loi qui est devant nous aujourd'hui, les revendeurs seront capturés par le régime des licences, mais pas par les autres dispositions de la Loi sur les télécommunications elle-même.

Mme Francine Lalonde: Je ne comprends pas plus. Excusez-moi.

M. Greg van Koughnett: Je me rappelle que c'était aussi un problème pour M. Michael Binder la semaine passée. Je vais essayer encore une fois de répondre.

Mme Francine Lalonde: Je suis en bonne compagnie.

M. Greg van Koughnett: On commence par cette nouvelle définition de «fournisseur de services de télécommunication». L'idée est de capturer pour la première fois les revendeurs.

Mme Francine Lalonde: Cela, c'est clair.

M. Greg van Koughnett: C'est ce qu'on essaie avec les moyens qu'on donne aux lignes 11 et 12: «y compris au moyen d'un appareil de transmission exclu.» Le mot «exclu» indique que les revendeurs étaient exclus quand on a rédigé la Loi sur les télécommunications. Maintenant les revendeurs ne seront plus exclus.

Quant à la question internationale, il se peut que les revendeurs soient les compagnies qui ont leurs propres installations et qui entrent dans le domaine des télécommunications internationales. Le fait que les installations appartiennent ou n'appartiennent pas à la compagnie qui offre le service n'influence pas la question de savoir si on entre dans le domaine des télécommunications internationales.

Mme Francine Lalonde: L'intention dans le projet de loi est plus large. D'après le ministère, l'intention était vraiment que cela soit plus large.

M. Greg van Koughnett: Ah, oui.

Mme Francine Lalonde: Donc, le fait de limiter cela aux revendeurs aura des conséquences.

M. Greg van Koughnett: Non, l'intention...

Mme Francine Lalonde: Votre intention à vous.

M. Greg van Koughnett: Notre intention est qu'on capture les revendeurs et les compagnies qui ont leurs propres installations, mais juste... Avez-vous notre mémoire?

Mme Francine Lalonde: Oui.

M. Greg van Koughnett: Il s'agit juste d'inclure le mot «international» dans les articles 16.1 et 16.3, afin que des licences soient données tout simplement aux compagnies qui entrent dans le domaine des télécommunications internationales.

Mme Francine Lalonde: Vous l'avez dit. Pourquoi vous opposez-vous à cette définition qui est dans le projet de loi?

M. Greg van Koughnett: Nous n'avons aucune difficulté face à cette définition.

Mme Francine Lalonde: Parfait. Vous pouvez vivre avec cette définition, comme vous l'avez dit plus tôt, même si elle n'est pas réduite...

M. Greg van Koughnett: Oui, il faudrait seulement ajouter le petit mot «international».

Mme Francine Lalonde: Ah, bon! Si on n'ajoute pas le mot «international», est-ce que cela vous causera des problèmes?

M. Greg van Koughnett: Non.

[Traduction]

La présidente: Merci.

M. Lowther m'assure que sa question sera très brève.

M. Eric Lowther: Vous êtes trop bonne avec moi, madame la présidente.

J'ai l'impression que vous avez à peu près la même position que celle de nos intervenants précédents. Je me trompe? Vous entretenez les mêmes réserves au sujet du même article proposé 46...

M. Nick Mulder: Oui. Nous vous recommandons d'envisager—et les gens de TELUS vous en parleront—d'adopter une disposition de temporisation. Nous proposons également un changement technique sur le plan du partenariat, pour permettre à plus de sociétés de participer.

M. Eric Lowther: Pour le bénéfice du comité, monsieur Mulder, pourriez-vous nous dire ce qui vous pousse à recommander une disposition de temporisation. Pourquoi seriez-vous d'accord pour qu'on adopte une telle disposition dans l'article traitant des licences?

M. Nick Mulder: Nous serions d'accord en principe, mais je ne veux pas enlever la primeur à nos amis albertains de TELUS, parce que c'est M. Addy qui va vous en parler.

M. Eric Lowther: Parfait.

M. Nick Mulder: Mais en fin de compte, nous pensons que tout cela pourrait être fait tout comme dans le cadre du régime actuel, c'est-à-dire sans licence. Il conviendrait, au moins, d'envisager la chose. Et cela est tout à fait cohérent avec ce que Mme Bertrand a déclaré, à savoir que le CRTC cesserait d'intervenir chaque fois que son action ne serait plus nécessaire.

• 1705

M. Eric Lowther: Et si vous aviez à choisir—parce que j'ai mal formulé ma question la dernière fois—entre adopter le projet de loi comportant un régime d'octroi de licences ou l'adopter sans régime de licences, que retiendriez-vous? Excusez-moi pour ne pas m'être exprimé correctement la dernière fois.

M. Nick Mulder: Cela me rappelle ce qui se passe quand on est invité à un mariage: on nous demande de quel côté on veut s'asseoir, du côté de la mariée ou de celui du marié; mais il se trouve que je suis ami avec les deux. Ne puis-je avoir les deux?

Je reviendrai sur le principe que j'énonçais tout à l'heure, autrement dit, si la majorité des membres... Je suis intervenu sur suffisamment de textes de loi pour savoir qu'en fin de compte, quand la Chambre et parfois le Sénat, mais certainement la Chambre des communes, veut apporter des améliorations, des changements à un projet de loi, le texte qui en résulte est très souvent bien meilleur. J'en resterai donc sur ce point de vue.

La présidente: Madame Lalonde, pour une brève question.

[Français]

Mme Francine Lalonde: Je viens juste de lire un article du Business Week qui s'intitule What the Free Market Can't Fix. Même Mme Bertrand a une politique canadienne des télécommunications à faire appliquer. Comme on dit ici, «markets do not regulate themselves».

M. Nick Mulder: Non, c'est vrai. En général, il y a plusieurs cas où il est nécessaire d'avoir des règlements, mais pas ici.

Mme Francine Lalonde: On va continuer à regarder cela.

M. Nick Mulder: D'accord.

Mme Francine Lalonde: Merci.

[Traduction]

La présidente: Je vais remercier nos témoins de Stentor. C'était un excellent mémoire et ce fut une discussion très intéressante. J'ai l'impression que ceux qui vont vous suivre vont s'appuyer sur ce que vous nous avez dit. Merci de votre patience pendant le vote et excusez-nous pour le dérangement.

M. Nick Mulder: Merci. Nous avons compris.

La présidente: Je demande maintenant à M. George Addy, de TELUS, de se joindre à nous. Tout le monde devrait avoir reçu les documents de TELUS.

Monsieur Addy, j'espère que vous ne prévoyez pas de nous lire tout cela au complet.

M. George Addy (vice-président exécutif et conseiller juridique en chef, Société TELUS): Non. J'apprécie le temps du comité, madame la présidente. Je vais simplement me présenter. Je suis vice-président exécutif et chef du service juridique du groupe de Société TELUS. Nous sommes un groupe de sociétés de l'Alberta. Je vous ai fait remettre un document que je ne vous lirai pas.

Je suis accompagné de M. Phil Rogers, conseiller juridique de notre compagnie, qui pourra répondre à vos questions d'ordre technique, puisqu'il est beaucoup plus au courant de tout cela que je ne le suis.

Madame la présidente, nous vous avons fait remettre votre mémoire. Je n'envisage pas de le lire et je vais tout de suite vous parler de ce qui nous préoccupe, bien qu'il en a déjà été question aujourd'hui, mais je vais vous parler un peu plus longuement de ce qui nous inquiète dans le régime d'attribution des licences.

Le projet de loi propose d'établir, pour la première fois au Canada, un nouveau système de réglementation des fournisseurs de services de télécommunication. Si les licences d'exploitation d'émetteurs de radiocommunication ou de communication sans fil ont toujours été de rigueur au Canada, c'est la première fois qu'un tel régime est étendu à d'autres fournisseurs. Cette proposition a d'ailleurs été étudiée la première fois, puis rejetée, quand la Loi sur les télécommunications a été examinée et modifiée en 1993. Nous pensons que les considérations retenues à l'époque sont encore valables aujourd'hui.

À notre avis, il faudrait à tout le moins, faire preuve d'une très grande prudence avant de recourir à la réglementation par attribution de licences, en particulier dans un secteur aussi concurrentiel et dynamique que celui des télécommunications. On constate en effet, qu'après avoir été mis en oeuvre, les systèmes de licences ont souvent été difficiles à abolir. Dans mon document, je cite l'exemple intéressant de ce qui s'est passé dans le cas de la presse à imprimer. Mais je ne vous le citerai pas maintenant.

Certes, pendant une période de transition, c'est-à-dire jusqu'au 1er mars 2000, date où prendra fin le dernier des monopoles canadiens dans le secteur des télécommunications, un système temporaire d'attribution de licences pourrait aider le CRTC à surveiller et, s'il y a lieu, à réglementer la conduite des nouveaux fournisseurs de services internationaux présents sur le marché canadien. Ce système pourrait être particulièrement utile pour traiter avec les fournisseurs affiliés à des monopoles étrangers ou qui viennent de pays non membres de l'OMC ou non signataires des accords de l'OMC.

Compte tenu de cet objectif restreint du système d'attribution des licences, nous serions disposés à appuyer une restriction de la portée des licences par l'ajout du terme «internationaux» après l'expression «services de télécommunication», à l'article 3 du projet de loi. En effet, nous estimons que le projet de loi devrait s'appliquer aux seuls services internationaux, qui sont essentiellement visés par ce texte. Nous sommes d'avis que si l'on restreignait ainsi la portée du projet de loi, seuls les services internationaux seraient effectivement visés par cette mesure, ce qui est l'intention recherchée, et que cela traduirait davantage les objectifs du projet de loi.

• 1710

Comme le disait M. Mulder, nous serions favorables à l'adoption d'une disposition de temporisation. M. Lowther a parlé de la question des coûts des régimes de licences et de ceux qui doivent les assumer. Nous croyons que ce régime d'attribution des licences ne devrait pas se prolonger au-delà de sa durée utile qui, selon nous, devrait prendre fin le 1er mars 2000. Nous pourrons toujours vous répondre à propos du choix de cette date et vous en parler plus longuement plus tard, si vous nous posez une question à ce sujet.

[Français]

Compte tenu de la transformation rapide de l'univers des télécommunications, un délai de deux ans est déjà prévu. La concurrence sera alors certainement beaucoup plus vive qu'à l'heure actuelle et, après le 1er mars 2000, s'il estime que le système d'attribution de licences devrait demeurer en vigueur malgré la forte compétitivité du marché, le Parlement pourra adopter une modification appropriée à la Loi sur les télécommunications afin de le prolonger si c'est le cas.

J'aimerais aussi attirer votre attention sur l'alinéa 46.1(1)b) proposé, dont vous avez entendu parler aujourd'hui. Nous sommes d'accord sur les autres commentaires qui ont été formulés à ce sujet aujourd'hui.

[Traduction]

L'alinéa 46.1(1)b) est une disposition imprécise et d'une très grande portée, qui pourrait permettre, aux termes d'une simple ordonnance du Conseil des ministres, la réglementation et l'administration de n'importe quelle activité de télécommunication. On ne trouve aucune mention de la nature des activités visées par cette disposition. De même, la portée de ce pouvoir n'est assortie d'aucune restriction.

À notre avis, dans une industrie aussi dynamique et concurrentielle que celle des télécommunications, le gouvernement devrait préciser clairement les domaines ou les questions pour lesquels il n'estime pas pouvoir laisser libre cours aux forces du marché. Un vaste pouvoir discrétionnaire et illimité de désigner des activités qui pourraient être gérées par le CRTC suscitera un grand sentiment d'incertitude dans notre industrie. Or, cette incertitude pourrait nuire aux fournisseurs de services, à leurs clients et aux investisseurs du secteur des télécommunications.

Des pouvoirs discrétionnaires imprécis touchant à la réglementation ou à l'administration des télécommunications ne sont pas compatibles avec la politique du gouvernement du Canada de s'en remettre principalement à la concurrence. Ils vont aussi à contre- courant de la tendance—une tendance très évidente, selon moi, madame la présidente—à l'assouplissement de la réglementation que nous constatons d'ailleurs chez tous nos principaux partenaires commerciaux. Ils contredisent aussi les engagements du Canada en matière d'ouverture et de transparence, confirmés par le nouvel accord sur les télécommunications de l'OMC.

L'absence d'une disposition de temporisation et le vaste pouvoir discrétionnaire illimité ne sont pas compatibles avec les principes de simplification et de réforme de la réglementation, formulés dans le Rapport sur la réforme de la réglementation publié en mai dernier par l'OCDE puis entériné par le gouvernement au sommet ministériel du même mois.

Si je me fis à mon expérience, le ministre de l'Industrie participe à ces sommets et, s'il l'a fait cette année, le ministre qui se trouve à proposer ce projet de loi est le même qui a avalisé le rapport en question. Je n'en ai pas d'exemplaire ici. J'en ai un et je pourrai le remettre à la greffière, si cela peut vous intéresser, madame la présidente.

Je dois souligner la deuxième recommandation politique au sujet de la réforme réglementaire, par l'OCDE, à savoir qu'il faudrait adopter un système d'examen du règlement visant à s'assurer qu'il répond aux objectifs établis d'efficacité et de rentabilité. L'OCDE propose plusieurs autres choses: que les dispositions proposées, et les dispositions existantes fassent l'objet d'un examen; que les dispositions existantes et les dispositions proposées fassent l'objet d'une analyse d'impact sur le plan réglementaire, à l'étape de la formulation, de l'examen et de la réforme des textes; et que les dispositions, comme les dispositions de temporisation, soient automatiquement mises à jour dans le cadre d'un mécanisme d'examen.

Il est précisé dans ce même document de l'OCDE qu'en mai de cette année, les ministres ont applaudi au rapport et ont convenu d'en appliquer les recommandations dans leurs pays respectifs. C'est donc sur cette base, madame la présidente, que je recommande à votre comité d'envisager l'adoption d'une disposition de temporisation.

Comme j'ai eu l'occasion d'entendre ce que les témoins précédents ont déclaré, afin de gagner du temps, je vais m'arrêter ici. Comme vous avez mon mémoire, je suis prêt à répondre aux questions portant sur des aspects dont je n'aurais pas parlé.

• 1715

La présidente: Merci, monsieur Addy.

Monsieur Lowther.

M. Eric Lowther: Merci, madame la présidente.

Il est intéressant, à mon avis, de voir que les trois intervenants qui viennent de s'exprimer préconisent les mêmes orientations. Je pense que nous pouvons applaudir au fait que ces groupes industriels soient tellement en phase avec un certain nombre des principes préconisés par le document d'orientation du CRTC que j'ai ici, qui préconise le passage d'un cadre de réglementation plus strict à une concurrence plus large et à une réglementation plus souple. Il semble donc que nous soyons sur la bonne voie et il est réconfortant de savoir que notre comité y est effectivement pour quelque chose.

J'ai cependant une ou deux questions à vous poser à titre d'éclaircissement. Pour ce qui est de la disposition d'abrogation dont vous avez parlé, monsieur Addy, et dont a aussi parlé le groupe Stentor, est-ce que ça aide la concurrence ou est-ce que ça la limite et renforce l'industrie? Où est-ce que ça nous mène?

M. George Addy: Les études qui ont été effectuées à ce sujet, et en particulier le rapport de l'OCDE publié en mai dernier, ont cherché avant tout à faire prendre conscience au gouvernement des coûts liés au régime de réglementation et du fait que parfois l'utilité d'un régime de réglementation devient caduque en raison de l'évolution technique ou d'autres situations se présentant dans un pays donné, alors que la libéralisation se fait avec un retard et impose par conséquent un fardeau au marché soumis à ce régime de réglementation. Il est dit essentiellement dans ce rapport que ces coûts n'ont servi à rien, que la valeur économique a été gaspillée, si je peux employer ce terme. On a prévu cette disposition dans d'autres lois au Canada. Je pense à la Loi sur les banques et aussi à la Loi sur la faillite, dans lesquelles figure cette disposition, une révision obligatoire étant exigée au bout d'un certain nombre d'années pour que l'on puisse se demander si elles restent nécessaires.

L'autre solution consiste à dire que l'abrogation se fera à une date fixe, quelle qu'elle soit. On peut prévoir aussi une révision à une date fixe pour que l'on puisse assurer en permanence que l'économie ne souffre pas d'une législation ou d'une réglementation indue ou devenue inadaptée.

M. Eric Lowther: On peut donc logiquement affirmer, compte tenu de ce que vous nous dites ici, que la disposition d'abrogation qui est prévue dans la loi fait comprendre à l'industrie qu'à un moment donné le CRTC n'offrira plus de protection par le biais de l'octroi de licences et que les intervenants doivent donc bien faire attention, qu'un jour cette protection va disparaître. De cette façon, nous leur lançons tout simplement un coup de semonce pour leur faire comprendre que leur environnement ne sera pas toujours protégé afin qu'ils ne soient pas tentés de sous-estimer la nécessité de s'adapter à la présence d'un réseau mondial. C'est juste, n'est-ce pas?

M. George Addy: C'est très juste.

Vous abordez deux questions différentes. La première est celle de l'incertitude, qui peut être source d'inefficacité dans l'activité économique, alors que la certitude conférée par une date fixe permettra à l'industrie de savoir ce qu'elle doit faire et de planifier ses investissements, ses stratégies, etc., en sachant que le cadre ou que le mécanisme qui lui est appliqué va disparaître à un moment donné.

L'un des coûts qu'à mon avis les gens oublient souvent, c'est celui des ressources qui ne sont pas affectées à un secteur réglementaire en raison de l'incertitude. Les entreprises doivent investir de l'argent et, si elles ne peuvent pas le faire dans un cadre qui permette de savoir exactement quels sont les paramètres, les lois et les règlements, par opposition à un cadre dans lequel on est soumis à un pouvoir discrétionnaire et où l'on ne sait pas exactement quelles sont les activités qui vont être visées ou non, la tendance étant d'investir du côté où l'on sait avec plus de certitude quelles sont les règles qui s'appliquent afin que l'entreprise puisse prendre les bonnes décisions en matière de rendements, etc., et faire les bons choix concernant ses activités.

Il y a donc à la fois le coût qui découle du fait qu'à l'intérieur du régime les gens ne savent pas exactement ce qu'il faut faire et n'innovent pas, ne créent pas et ne s'améliorent pas, ne continuent pas à mériter la faveur de leurs clients et ne réussissent pas à garder leur clientèle, et d'autre part le coût que représente par ailleurs les investissements qui seront perdus en raison de cette incertitude.

• 1720

M. Eric Lowther: Je dirais donc au comité, compte tenu des observations faites par M. Addy et de ce que nous avons entendu aujourd'hui, que la disposition d'abrogation qui figure dans la loi nous amène en fait à avancer dans la voie que le CRTC a déjà dit s'être fixée, en nous dotant d'un cadre favorisant la concurrence.

Je vous remercie.

La présidente: Merci, monsieur Lowther. Monsieur Shepherd, c'est à vous.

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Vous avez abordé la question des négociations commerciales. Y a-t-il un avantage—vous allez probablement me répondre que non—à disposer d'un régime de réglementation dont on peut se servir comme levier pour aider éventuellement nos entreprises du secteur des télécommunications internationales qui veulent accéder aux marchés étrangers?

Autrement dit, nous savons qu'il y a des pays qui se servent du régime de réglementation pour limiter artificiellement le commerce. Cela explique-t-il en partie ce régime de réglementation—le fait qu'il ne s'agisse pas tant de discipliner notre réseau national que de s'assurer que les barrières faisant artificiellement obstacle au commerce ne limitent pas notre accès à d'autres pays?

M. George Addy: Je pense que cette question comporte deux volets. Je demanderai à M. Rogers de vous répondre sur le deuxième point, car vous semblez à mon avis vous demander si nous en avons besoin. Je crois que c'est implicite dans votre question.

Sur le premier volet, qui revient à se demander s'il est utile de disposer d'une telle carte à la table des négociations internationales, l'idée est intéressante, mais je dois vous avouer que je préfère ne pas être du tout à cette table. J'ai bien des difficultés à envisager que l'on puisse m'échanger à la table des négociations commerciales contre des bardeaux de cèdre ou d'autres choses de ce genre. Je préfère me tenir bien loin de ce genre de tractations, je puis vous l'assurer.

Quant à savoir si l'on a besoin sur le plan juridique de se protéger contre des concurrents étrangers dans le secteur international des services, je laisserai à M. Rogers, si vous me le permettez, le soin de vous répondre.

M. Philip G. Rogers (conseiller juridique, Gowling, Strathy et Henderson): On peut envisager le cas de certains pays, non signataires de l'accord des télécommunications de l'OMC dont nous parlons, qui seraient en mesure d'abuser de leur position étant donné qu'ils ne se sont pas engagés à ouvrir leur marché, contrairement à ce qu'ont fait tous les autres pays signataires de cet accord. De ce point de vue, un régime d'octroi de licences pendant une période temporaire pourrait s'avérer utile, même s'il convient par la suite de le réviser, comme l'a proposé M. Addy.

Quant à savoir s'il est strictement nécessaire de procéder ainsi, et seulement au moyen de la concession de licences, il y a d'excellents arguments en droit qui permettent de soutenir que l'on n'a pas besoin en fait de l'octroi de licences. Il y a d'autres mécanismes prévus dans la loi dont peut se prévaloir le Conseil pour se protéger contre l'accès au Canada de produits étrangers qui portent préjudice au marché canadien.

C'est donc un outil, mais ce n'est pas nécessairement le seul.

M. Alex Shepherd: Si j'ai posé cette question, c'est que je pensais finalement à certains de nos partenaires commerciaux qui ont eux-mêmes un cadre de réglementation.

M. Philip Rogers: Si l'on parle de nos partenaires commerciaux qui ont signé l'accord de l'OMC, les 69 pays qui ont signé avec le Canada, chacun d'entre eux s'engage à ouvrir son marché selon un échéancier qu'il a fixé. Les États-Unis, par exemple, avaient effectivement un régime, qualifié dans leur jargon de «test écologique», qu'ils ont désormais abandonné en raison de l'accord de l'OMC. Ils opèrent désormais en fonction d'une politique annoncée par la FCC il y a 10 jours et qui présume en fait que des pays comme le Canada ont un accès légitime à leur marché parce qu'ils acceptent les engagements pris par les autres pays dans le cadre du régime établi par l'OMC.

Donc, vis-à-vis de ces pays, nous avons un régime placé sous l'égide de l'OMC qui protège les Canadiens chez nous et ceux qui se rendent à l'étranger pour accéder à d'autres marchés.

M. Alex Shepherd: Cela dit, cependant, étant donné qu'il n'est pas tout à fait certain que les autres pays vont abandonner totalement leur régime de réglementation, n'est-il pas bon que notre pays conserve au moins aujourd'hui celui qui est en place, que l'on pourrait ensuite «retirer de la table des négociations» pour aller dans le sens de la réflexion de M. Addy?

M. Philip Rogers: Tout d'abord, nous n'avons aucunement éliminé notre régime de réglementation au Canada. Le CRTC et le gouvernement prennent des mesures—avec raison, à notre avis—pour réduire l'importance de la réglementation. Nous y sommes favorables et nous souhaitons que ça se poursuive, mais il y a toujours un régime de réglementation en place au Canada. La commission conserve le pouvoir dont elle dispose en vertu de la loi actuelle, la Loi sur les télécommunications, de régler les abus, de délivrer des ordonnances de branchement ou de débranchement contre certaines parties qui n'appliquent pas les règles ou qui détournent les communications contrairement à la réglementation fixée par la commission.

• 1725

Voilà les mécanismes qui sont en place aujourd'hui et, pour ce qui est de l'application à l'avenir du nouveau régime placé sous l'égide de l'OMC, nous disposons aussi des protections accordées à chacun des États membres, qui font partie d'un régime général maintenant la discipline au cas où des États ne s'acquitteraient pas de leurs obligations en vertu de l'accord.

La présidente: Merci, monsieur Shepherd.

Madame Lalonde.

[Français]

Mme Francine Lalonde: Je vais aller à une disposition que les autres présentateurs n'ont pas abordée. À la page 4, vous dites que si l'article 46.6 proposé devait s'appliquer et que si un fonds était créé afin d'appuyer l'accès à un service abordable—ce que nous appuyons—, l'administrateur du fonds devrait être nommé par l'industrie privée. Il me semble que c'est un peu fort, parce que c'est justement pour faire en sorte que la responsabilité qui est confiée au CRTC de voir à l'application de la politique canadienne de télécommunications—j'aimerais qu'elle soit québécoise, mais elle est canadienne—soit appliquée. Donc, rendre abordable l'accès à des services de base ne devrait pas être le fait d'un président choisi par le secteur privé.

M. George Addy: Je pense qu'il y a un malentendu, madame Lalonde. Nous ne disons pas qu'il ne devrait pas y avoir de fonds ou qu'il ne devrait pas y avoir de règlements quant à la levée de fonds, etc. Nous disons que puisque c'est nous qui mettons les fonds sur la table et que c'est à nous qu'on a confié la responsabilité de gérer le fonds, nous aimerions pouvoir choisir celui qui va gérer ce fonds. Cela n'enlève aucunement au CRTC le pouvoir d'établir les règlements pour l'applicabilité du fonds.

Mme Francine Lalonde: Vous voulez parler de la gestion financière?

M. George Addy: C'est cela, l'administration.

Mme Francine Lalonde: «Administrateur» pourrait être un terme plus large.

M. George Addy: D'accord, mais c'est assujetti à des normes établies par le CRTC.

Mme Francine Lalonde: Pour le reste, les arguments s'appliquent. Je ne suis pas convaincue de la nécessité de limiter les fournisseurs internationaux, mais je vais continuer à chercher, à réfléchir et à discuter avec le comité. Merci.

[Traduction]

La présidente: Merci.

Merci, monsieur Addy. Nous avons bien apprécié votre exposé. Le sujet devient de plus en plus intéressant à mesure que nous avançons aujourd'hui et je suis sûre qu'il le sera encore davantage les jours prochains. Nous avons particulièrement apprécié que vous soyez venu témoigner devant notre comité en dépit des limites du temps imparti et du court préavis qui vous a été donné.

M. George Addy: Merci, madame la présidente. Est-ce qu'il serait bon que je laisse à la greffière un exemplaire du rapport que j'ai mentionné?

La présidente: Oui, ce serait une bonne chose. Je vous demanderai maintenant d'échanger votre place avec les représentants de Bell Canada.

À l'intention de Bell Canada et d'ACC TelEnterprises, je précise que je vais diviser en deux la période de 45 minutes qui nous reste. Vous disposerez chacun de quelque 22 minutes et demie. En conséquence, il vous faudrait vous en tenir à des exposés de cinq à sept minutes, ce qui nous laissera 15 minutes pour poser des questions.

Cela étant dit, nous avons ici M. Courtois et Mme Gervais. Je ne sais pas exactement qui va commencer.

M. Bernard A. Courtois (premier vice-président, Réglementation, Bell Canada): C'est moi.

[Français]

Merci, madame Whelan. Bonjour, mesdames et messieurs. Au nom de Bell Canada, je veux vous remercier de nous donner cette occasion d'exposer notre point de vue sur cette mesure législative que nous considérons très importante. Je suis accompagné de Linda Gervais, notre vice-présidente responsable des relations avec le gouvernement fédéral.

Bell Canada se présente ici aujourd'hui pour commenter le projet de loi en s'appuyant sur ses années d'expérience du régime de réglementation canadien à titre du plus important télécommunicateur au Canada.

Bell Canada est aussi membre du groupe des compagnies BCE, dont certaines ont une expérience considérable des régimes de réglementation dans les marchés étrangers, que je pourrais partager avec le comité au besoin.

• 1730

[Traduction]

Je commencerai en affirmant que Bell Canada appuie l'accord de l'OMC et l'adoption rapide du projet de loi C-17 afin de le mettre en oeuvre. Ce sont deux éléments importants de la tendance à l'ouverture de tous les secteurs de l'industrie des télécommunications à la concurrence. Plus particulièrement, Bell croit que la présence de solutions viables pour concurrencer Téléglobe aidera notre industrie à prendre de l'expansion et à offrir des avantages à nos clients—particuliers, entreprises ou gouvernement.

Nous appuyons aussi les amendements proposés par Stentor et nous souhaitons faire valoir notre opinion sur la question du régime d'octroi de licences.

Nous sommes en faveur de ce régime pour le trafic international parce qu'une grande part de cette activité se déroule à l'extérieur de nos frontières et que l'octroi de licences est le moyen généralement accepté pour réglementer ce genre d'activités à l'échelle mondiale. Pour reprendre ce qui a été dit lors d'une discussion antérieure, nous disposons à l'heure actuelle de pouvoirs considérables pour réglementer ce qui se passe au Canada, même au niveau des communications internationales, et l'expérience a montré que cela n'était pas suffisant pour défendre les intérêts du Canada et mettre en oeuvre les règles que notre pays a établies. Un régime d'octroi de licences apparaît comme la solution.

Toutefois, en ce qui concerne la réglementation du marché national, le Canada a rejeté dans le passé la méthode de l'octroi de licences. La formule canadienne s'est avérée plus efficace, plus pertinente et plus avantageuse pour les clients. De plus, l'expérience vécue dans d'autres pays qui ont recours à l'octroi de licences pour leur marché national a prouvé que cette approche peut causer beaucoup de problèmes par rapport à la méthode canadienne.

[Français]

Le marché national des télécommunications au Canada est l'un des plus ouverts au monde. Nous avons atteint des résultats enviables au chapitre des prix et de l'entrée en concurrence. Je vous donne quelques exemples:

-Les prix des services interurbains au Canada comptent parmi les plus bas au monde et sont comparables aux prix américains.

-Presque les mêmes qu'aux États-Unis, les prix de nos services d'affaires locaux s'appliquent à des secteurs d'appels locaux plus larges, sans frais d'utilisation additionnels.

-Les prix des services résidentiels locaux au Canada sont inférieurs aux prix américains, même en tenant compte de la hausse proposée pour la troisième étape du rééquilibrage des tarifs qui doit entrer en vigueur en janvier 1998. Pour ces prix, qui sont beaucoup plus avantageux que les prix américains, nos clients vont continuer à obtenir des secteurs d'appels locaux qui sont beaucoup plus grands qu'aux États-Unis. Il n'y a pas de tarification à l'usage, alors qu'aux États-Unis, on a beaucoup de tarification à l'usage. Nos clients bénéficient d'un réseau de base qui est plus moderne.

-De tous les pays de l'OCDE, le Canada a les tarifs d'accès à l'Internet les plus bas.

-En plus, les prix que nous facturons aux fournisseurs de services interurbains qui utilisent notre réseau pour se raccorder à leurs clients ou à nos clients sont nettement inférieurs à ceux en vigueur aux États-Unis.

L'accès égal, qui est un facteur clé pour le développement de la concurrence dans l'interurbain, a été ordonné par le CRTC en 1992. Nous avons commencé sa mise en application à l'été de 1994 et nous l'avons terminée dans les six mois qui ont suivi. Par comparaison, les États-Unis ont ordonné l'accès égal en 1982 et ont commencé à l'implanter en 1984, mais il leur a fallu huit ans pour accomplir ce qui s'est fait au Canada en quelques mois. Au Royaume-Uni, l'accès égal n'est toujours pas en vigueur même si la concurrence est ouverte depuis 1985.

[Traduction]

Ce ne sont que quelques exemples—je peux vous en donner d'autres—des succès de l'approche canadienne. J'aimerais souligner qu'une bonne part des succès que nous avons connus est due à la coopération et à l'efficacité de l'alliance Stentor, ainsi qu'à la présence d'un unique organisme de réglementation qui a tout pouvoir de régler les différends et de prescrire des solutions à mesure que les défis se posent. C'est la grande différence entre la solution canadienne et celle qui fait appel à l'octroi de licences.

Par contraste, l'approche de l'octroi de licences au Royaume- Uni a entraîné des retards considérables et de l'inaction parce que les conditions propres à cette méthode ne permettent pas de s'adapter aussi bien aux changements. Dans ce pays, l'organisme de réglementation a éprouvé bien des difficultés à régler les différends à mesure qu'ils se présentaient parce que la situation n'était pas prévue dans les conditions d'octroi de licences.

Dans le cas de la Nouvelle-Zélande, le régime d'octroi de licences a causé des conflits sur l'interconnexion de base qui ont été débattus devant les tribunaux—jusqu'au comité judiciaire du Conseil privé—pendant 10 ans, pour aboutir au renvoi des parties à la table des négociations. Il n'est pas étonnant que nous ayons obtenu bien plus de succès avec la méthode d'intervention directe dont nous disposons au Canada, comparativement à celle qui fait appel à l'octroi de licences.

Donc, même si nous appuyons l'octroi de licences pour le trafic international, nous croyons fermement que cette méthode n'est pas indiquée pour les activités nationales.

L'octroi de licences pour les activités nationales suscite une autre préoccupation dans un domaine important pour une entreprise comme Bell Canada: l'incertitude que cette mesure susciterait chez les investisseurs. L'industrie des télécommunications exige des investissements massifs, et Bell Canada en particulier est à la recherche de capitaux sur des marchés mondiaux qui, nous le savons tous, sont particulièrement fébriles en ce moment.

• 1735

Les investisseurs, par nature, fuient le risque et l'incertitude. Nous estimons qu'il serait néfaste pour le secteur canadien des télécommunications d'envisager l'imposition d'un régime d'octroi de licences qui ne ferait que chevaucher, et doubler ou brouiller un régime réglementaire qui est déjà en place pour les activités nationales et qui a si bien servi les Canadiens jusqu'à maintenant.

Enfin, je porte à votre attention une autre partie du projet de loi. C'est celle dont vous avez entendu parler cet après-midi, qui concerne l'administration du numérotage et des subventions.

Nous savons depuis un certain temps maintenant, après nous être penchés sur la concurrence interurbaine et nous être préparés à ce qui allait se passer au niveau de la concurrence locale, qu'il serait utile, dans ces deux domaines précis, de conférer des pouvoirs et de confier la gestion comme le prescrit le projet de loi. Par contre, ce projet de loi comporte aussi l'alinéa 46.1(1)b), qui créerait une juridiction et permettrait la gestion de toute autre activité liée à la fourniture, par une entreprise canadienne, de services de télécommunications désignés par règlement du gouverneur en conseil. La teneur de cette disposition nous inquiète, car nous ne savons pas quelle nouvelle juridiction, non précisée, est nécessaire ou prévue.

Nous considérons que si on ne connaît pas la juridiction supplémentaire ou la nouvelle juridiction qui est prévue, qu'on l'énonce avec clarté et que l'on dise ce qu'elle va être. Nous pourrons tous nous rendre compte, et le comité pourra se rendre compte, s'il convient de l'insérer dans la loi. Si on ne le sait pas, laissons le gouvernement proposer au Parlement une nouvelle juridiction au besoin. Ne laissons pas de zone grise dans la loi.

[Français]

En conclusion, le Canada, doté des politiques et des objectifs de réglementations appropriés, a l'occasion de prendre les devants dans la course qui se joue dans les pays industrialisés afin d'offrir la meilleure infrastructure de télécommunications et un environnement propice à la compétitivité mondiale. Ne freinons pas son élan en lui imposant le régime additionnel fondé sur l'octroi de licences sur le marché domestique.

Merci de m'avoir écouté. Je serai heureux de répondre à vos questions.

[Traduction]

La présidente: Merci. C'est à M. Lowther.

M. Eric Lowther: Merci, madame la présidente. Une seule question.

La présidente: Une seule question?

M. Eric Lowther: Et éventuellement quelques questions subsidiaires.

La présidente: J'en ai l'eau à la bouche.

M. Eric Lowther: J'aimerais aborder une question en particulier, qui se rapporte aux observations que vous avez faites concernant la nécessité d'octroyer des licences internationales, dont nous avons besoin, vous l'avez très bien montré, et avec beaucoup de rigueur, alors qu'au niveau des communications locales, rien ne va plus. Les gens cherchent à savoir qui sont les coupables, il y a des poursuites judiciaires interminables, etc.

D'après ce que nous avons entendu aujourd'hui, il m'apparaît qu'à partir du moment où notre comité accepte le principe d'une disposition d'abrogation dans cette loi, il n'y aura plus à un moment donné de régime d'octroi de licences—on nous a dit que ce pourrait être en mars 2000, soit dans deux ans à peu près—ce régime ne devrait pas s'éterniser. Tout ce qui concerne ce régime d'octroi de licences au niveau international ne durera pas bien longtemps.

Là encore, à partir du moment où l'on s'en va vers une concurrence accrue et vers toutes ces améliorations, qu'est-ce qui vous fait dire que ce scénario d'octroi de licences va donner de bons résultats au plan international? Il ne fonctionne pas bien au plan national et pourtant nous mettons en place toute cette infrastructure pour un simple délai de deux ans. Ne pourrions-nous pas nous en passer, surtout lorsqu'on tient compte du fait que ce projet de loi ne viendra s'appliquer à Téléglobe qu'en octobre 1998 et qu'en l'an 2000 en ce qui a trait à la partie s'appliquant à Télésat?

Nous n'en avons pas vraiment besoin, voilà ce que j'en pense. Je ne vois pas quels sont les avantages. Je prévois beaucoup de dépenses et beaucoup de travail pour nous protéger contre quelque chose que nous ne connaissons pas. Où est la justification de nos efforts? Dites-moi ce que vous en pensez.

M. Bernard Courtois: Un régime d'octroi de licences au plan international répond à un objectif très limité. Au plan national, toutes ces questions complexes que l'on doit régler pour favoriser la concurrence et protéger l'intérêt public lors de cette période de transition relèvent du plan local—il s'agit des clauses d'interconnexion. On réunit les parties et on pose les problèmes, les difficultés se présentent et le responsable de la réglementation peut arbitrer. C'est ce que fait très bien notre régime canadien.

• 1740

L'octroi de licences au plan international obéit essentiellement à la nécessité d'acheminer les communications. Vous pourrez avoir, par exemple, une entreprise qui dispose d'un monopole à l'autre bout, qui achemine les communications canadiennes et qui facture 50¢ chaque minute de communication qui passe par ses circuits. Elle peut toutefois venir au Canada, acheminer les communications par l'intermédiaire de lignes privées, vendre ses propres services de communication aux Canadiens et ne payer que 5¢ pour une ligne privée lorsqu'il s'agit de ses communications tout en facturant 50¢ lorsqu'une entreprise canadienne essaie d'accéder au réseau de son propre pays.

Pour essayer de faire appliquer des règles comparables, d'accorder un traitement équivalent et d'éviter les abus, nous devons essayer de suivre les communications à la trace. Avec l'équipement moderne, lorsqu'il y a des modems et des machines qui numérisent les signaux, il va être en fait très difficile de savoir exactement où a été acheminée la communication. Au plan international, ce que font les différents pays... Avec un régime d'octroi de licences, vous exercez une compétence sur le fournisseur de services et vous pouvez l'obliger à rendre compte régulièrement de l'acheminement de ses communications. En effectuant la vérification, si vous vous apercevez d'un déséquilibre, si vous découvrez des anomalies dans l'acheminement des communications, vous pouvez alors les pointer du doigt et affirmer que quelqu'un ne suit pas les règles.

C'est pourquoi l'octroi de licences, qui confère... Ainsi, au Canada, on ne réglemente pas les revendeurs. Il y a des revendeurs qui exercent leurs activités chez nous et le CRTC n'est pas directement compétent pour les obliger à lui dire où vont leurs communications. On doit alors s'en remettre aux entreprises canadiennes pour essayer de suivre à la trace ces communications. Comme je vous l'ai dit, cela devient très difficile.

Donc, sur le plan international, l'octroi de licences obéit à un objectif très précis. Que l'on n'en voit plus la nécessité en l'an 2000 ou 2002 ou que l'on continue à en avoir besoin après cette date parce que tous les pays n'auront pas signé l'accord de l'OMC et qu'il y aura encore des risques d'abus, il y a là deux questions distinctes. Toutefois, pour ce qui est du régime national, je vous le répète, le cadre de réglementation est bien plus large et l'on doit disposer d'outils plus précis en opérant une intervention plus directe.

À l'échelle internationale, le cadre est bien plus étroit. C'est tout à fait particulier.

M. Eric Lowther: Il me semble quand même que l'on pourrait régler éventuellement ce problème au niveau de l'OMC. C'est une observation et pas une question, parce que j'ai promis tout à l'heure à la présidente de ne poser qu'une question.

M. Bernard Courtois: Tous les pays n'ont pas signé l'accord de l'OMC. Tous les pays ne le signeront pas. Il restera toujours des pays à l'écart.

M. Eric Lowther: Nous pouvons toutefois leur interdire l'accès à notre pays s'ils ne signent pas.

M. Bernard Courtois: Non, nous ne pouvons exclure qui que ce soit. À l'heure actuelle, le marché canadien est grand ouvert. Il suffit d'installer une entreprise et de se mettre à vendre avant d'avoir une autorisation quelconque. Il suffit de s'installer. Aucune autorisation n'est nécessaire pour lancer une entreprise au Canada, que l'on vienne de Tombouctou ou de Hull, au Québec.

La présidente: Merci, monsieur Lowther.

Monsieur Murray.

M. Ian Murray: Merci, madame la présidente.

Monsieur Courtois, nous n'avons pas entendu cet après-midi de nombreux partisans de l'octroi de licences au plan national, mais l'on peut prévoir en toute logique que nous entendrons à mesure que nos audiences vont progresser. Je me demande simplement si vous êtes conscient du fait que l'octroi de licences peut avantager vos concurrents, ou si cette politique d'octroi de licences est justifiée. Si elle n'est pas justifiée d'un point de vue commercial—et je vous répète que je ne veux pas préjuger de ce que nous allons éventuellement entendre, mais il est évident qu'il y a une raison pour laquelle quelqu'un s'est avisé de prévoir ici cette disposition—pouvez-vous nous dire si quelqu'un va bénéficier de votre régime d'octroi de licences?

M. Bernard Courtois: Oui. Il y a un intervenant, l'ACC, qui va passer immédiatement après nous, et la question s'est posée à son sujet. Cette entreprise souhaite être considérée comme un exploitant de centraux urbains concurrentiel, mais ce n'est pas un exploitant de centraux, c'est un revendeur. Les revendeurs n'étant pas visés par la loi, il s'agit de savoir s'ils vont assumer toutes les obligations d'un exploitant de centraux urbains concurrentiel tout en jouissant des droits et des privilèges qui vont avec ces obligations. J'imagine que c'est l'un des usages du régime d'octroi de licences au plan national dont on n'a pas parlé. Mais à notre avis, si vous voulez...

M. Ian Murray: Excusez-moi, mais est-ce que vous vous référez en quelque sorte à un accès au marché par des voies détournées?

M. Bernard Courtois: Oui. Il y a quelqu'un qui a dit que puisqu'on ne pouvait pas contrôler les revendeurs, il fallait éventuellement ne pas les placer sur le même plan que les exploitants de centraux et ne pas nécessairement leur conférer les mêmes droits. Tout cela se ramène à la question des exploitants de centraux urbains concurrentiels et il n'est pas clair que le CRTC en ait vu la nécessité. Simplement, certains intervenants ont déclaré que si la loi nous permettait éventuellement d'octroyer des licences aux revendeurs, on aurait ainsi barre sur eux et on serait en mesure de leur imposer les conditions de protection du public qu'on veut leur faire respecter. Nous considérons qu'à partir du moment où l'on ne veut pas faire violence aux gens... on ne devrait pas surimposer un régime d'octroi de licences sur la scène nationale canadienne pour y parvenir.

• 1745

Il y a déjà un article de la loi, l'article 24, qui autorise le CRTC à fixer des conditions générales pour faire respecter la vie privée et toute autre condition qu'il veut imposer sur le marché. Il vous suffit ici de remplacer l'expression «entreprises canadiennes» par «fournisseurs de service» pour pouvoir imposer des conditions aux revendeurs. On ne pourrait pas réglementer leurs tarifs—c'est une disposition qui figure à l'article 25—mais l'on parviendrait à ce résultat de la même manière que l'on régit l'ensemble de la structure établie par le régime canadien.

Si on choisit plutôt de créer quelque chose d'entièrement nouveau, sur le modèle par exemple d'un régime d'octroi de licences aux fournisseurs de services nationaux, alors, comme je vous l'ai dit, on soulève ce genre de préoccupation, cette incertitude, parce que l'on prend deux régimes qui sont essentiellement différents en les superposant, ce qui va entraîner tous ces problèmes.

Vous pourrez demander à l'ACC si elle préfère relever du projet de loi ou, d'une manière ou d'une autre, de la Loi sur les télécommunications. Dans ce cas, je vous le répète, il vous faut recourir à l'article 24. Ne mettez pas sur pied un régime d'octroi de licences tout nouveau à l'échelle nationale.

M. Ian Murray: Merci.

La présidente: Merci, monsieur Murray.

Madame Lalonde.

[Français]

Mme Francine Lalonde: Les fournisseurs de services de télécommunication internationaux comprennent-ils les Américains?

M. Bernard Courtois: Oui. Nous nous satisfaisons de n'importe quelle définition du dictionnaire. C'est international dès que le trafic traverse les frontières, que ce soit vers les États-Unis ou outre-mer. Donc, le définition de ce qui est international ne posera pas de problèmes.

Mme Francine Lalonde: Cette libéralisation des télécommunications internationales peut-elle amener d'autres jouteurs sur le marché intérieur canadien?

M. Bernard Courtois: Le marché intérieur canadien était ouvert avant l'entente. Donc, peut-être...

Mme Francine Lalonde: Concrètement, cela peut en amener d'autres.

M. Bernard Courtois: Ce pourrait être le cas.

Mme Francine Lalonde: Ce serait le résultat des lois naturelles.

M. Bernard Courtois: Quand les pays, que ce soit la France, l'Allemagne ou le Japon, vont voir leurs propres marchés attaqués par des compagnies étrangères, leurs entreprises vont peut-être essayer de participer davantage sur les marchés étrangers. Mais il faut dire que l'Allemagne et la France sont déjà alliés à Sprint aux États-Unis.

Quant au Japon, c'est incertain. Les Japonais viennent d'obtenir le pouvoir de sortir de leur pays. C'est la plus grande entreprise au monde. Mais je dois dire que les plus grands noms des télécommunications au monde sont déjà ici, sur le marché canadien. On était ouverts avant l'entente. Donc, on ne fera pas de changements appréciables ici.

Mme Francine Lalonde: Il est difficile de vous voir sans penser à ce qui est en train de survenir avec la fin de votre propre monopole. La disparition du monopole crée des problèmes au consommateur, notamment. On a beau lire et relire que les prix au Québec et au Canada sont parmi les plus bas au monde, il reste que les consommateurs, eux, ont subi des hausses qu'ils estiment extrêmement importantes dans le cas des services téléphoniques de base.

Je dis cela pour souligner que le marché ne peut régler à lui seul les problèmes et qu'en conséquence, même si tout le monde souhaite que le rôle du CRTC ne soit plus nécessaire, il me semble que, dans la mesure où on a une politique de télécommunication, que j'aimerais québécoise, il va falloir continuer à avoir une instance réglementaire. Mon premier métier a été l'étude de l'évolution de l'histoire du capitalisme, et l'histoire nous enseigne qu'il y a toujours une concurrence, qui peut même être assez féroce, jusqu'à ce qu'il y ait deux ou trois grands joueurs qui s'installent et qui s'entendent entre eux, même non officiellement. Donc, le consommateur va toujours avoir besoin de protection. L'histoire nous démontre que le marché, ce n'est pas le paradis.

M. Bernard Courtois: Oui, c'est vrai que les gros du monde sont plus gros que nous ici, au Canada. Cependant, il faut se rappeler, comme on l'a dit plus tôt aujourd'hui, que la loi ne disparaît pas et que les pouvoirs du CRTC ne disparaissent pas avec ce projet de loi. Donc, le CRTC sera toujours en mesure d'intervenir quand il le jugera nécessaire.

Cependant, une fois que le CRTC et le gouvernement ont choisi la concurrence pour aller plus vite et favoriser l'innovation, la diversité et l'adaptation aux besoins des clients, c'est un contre-sens que de réglementer les prix, les tarifs, etc. On a plutôt choisi le marché pour réglementer les prix et les tarifs.

Quand on a choisi le marché, on peut faire confiance au marché ou non, mais c'est le marché, à ce moment-là, qui détermine les prix.

• 1750

Il faut aussi dire que les consommateurs, dans l'ensemble, n'ont pas subi une augmentation à cause de ce qui s'est passé, parce que l'indice des prix à la consommation ne comprend pas, par exemple, les services à rabais et les services des concurrents dans le domaine de l'interurbain.

Depuis l'avènement de la concurrence, le prix des télécommunications au Canada n'a pas augmenté. Le prix de base a baissé, si on tient compte de l'interurbain, parce qu'aujourd'hui, il est difficile de dire que l'interurbain n'est pas un service de base. L'interurbain est essentiel aux gens.

Mme Francine Lalonde: Il a été établi qu'il fallait 40 $ par mois pour avoir... Il faudra discuter de cela. Merci beaucoup.

M. Bernard Courtois: Cela nous fera plaisir d'en discuter.

[Traduction]

La présidente: Merci.

Monsieur Bellemare, une question.

[Français]

M. Eugène Bellemare (Carleton—Gloucester, Lib.): Ce sont possiblement les distributeurs canadiens, c'est-à-dire les revendeurs, qui ne sont pas soumis à la réglementation?

M. Bernard Courtois: C'est cela. Quand on a adopté la Loi sur les télécommunications en 1992, on a choisi de ne pas réglementer du tout les revendeurs. Donc, on ne réglemente que les entreprises qui ont des installations de transmission.

[Traduction]

La présidente: Merci, monsieur Bellemare.

Je vous remercie, monsieur Courtois, d'avoir comparu devant notre comité. Nous avons abordé un sujet très complexe aujourd'hui, et nous aurons toute une discussion.

Merci, madame Gervais, même si nous ne vous avons beaucoup entendu.

Nous allons maintenant entendre les représentants d'ACC TelEnterprises. Nous accueillons Mme Barrett et M. Horhota.

Je ne sais pas qui va prendre la parole, mais je vous rappelle que le temps nous est compté. Nous devons nous séparer à 18 h 15. Ce n'est pas la cloche qui va sonner, j'arrêterai moi-même les travaux. Lorsque je suis partie, on m'a dit que la cloche ne sonnerait pas.

M. George Horhota (vice-président, Expansion de l'entreprise, ACC Amérique du Nord, ACC TelEnterprises): Nous allons respecter les délais.

La présidente: Merci, monsieur Horhota.

[Français]

M. George Horhota: Mesdames et messieurs, nous sommes heureux d'être venus aujourd'hui afin de vous présenter notre position sur le projet de loi C-17.

[Traduction]

Nous sommes très heureux de comparaître devant votre comité.

Je tiens à vous présenter Maggs Barrett, notre vice-présidente exécutive chargée du marché du service local au Canada. En ce qui me concerne, je suis responsable de l'expansion de l'entreprise en Amérique du Nord.

L'ACC est un revendeur et appuie résolument le régime d'octroi de licences mis en place par le projet de loi C-17. Nous sommes favorables à l'initiative prise par le gouvernement à ce sujet et dans la suite de notre exposé nous préciserons les raisons pour lesquelles un revendeur doit appuyer les critères d'octroi de licences.

Nous sommes convaincus que le CRTC devrait disposer d'une marge de manoeuvre suffisante pour appliquer les critères d'octroi de licences lorsqu'il le juge dans l'intérêt public. Nous ne proposons pas que l'on octroie des licences en permanence à tous les intervenants. Nous proposons que le CRTC ait ce pouvoir et cette compétence vis-à-vis de nous lorsqu'il le juge bon et lorsqu'il considère que c'est dans l'intérêt public.

En conséquence, nous ne partageons pas les points de vue de certains intervenants qui nous ont précédés. Ces parties s'inquiètent du fait que le CRTC utiliserait le pouvoir d'exiger une licence pour accroître son mandat de réglementation d'une manière inutile et même draconienne. Toutefois, il faudrait s'inquiéter davantage du fait que le CRTC pourrait exclure les revendeurs non réglementés de certaines activités si le CRTC estime qu'il ne peut exercer une surveillance réglementaire suffisante sur ces revendeurs.

Les pouvoirs prévus par le projet de loi C-17 répondent à cette inquiétude en accordant au CRTC tous les outils nécessaires pour superviser les revendeurs afin que ces derniers puissent offrir une gamme complète de services de télécommunications. Je ferais remarquer aux trois intervenants qui m'ont précédé, qui s'opposent à l'octroi de licences au plan national, que les conséquences d'une telle proposition, c'est intéressant à noter, seront finalement de réduire la concurrence sur les télécommunications locales au Canada, et il faut donc replacer leur intervention dans ce contexte.

Je veux aussi reproduire ce qu'a dit M. Mulder concernant l'opinion qu'a le président du CRTC de la réglementation; il a parlé avec raison de «réglementer si nécessaire». Si nécessaire, bien évidemment, mais sans le pouvoir d'octroyer des licences que confère ce projet de loi, le Conseil n'aura pas la capacité de prendre cette décision. Il ne disposera pas des outils lui permettant de réglementer ou de ne pas réglementer.

• 1755

Je ne vais pas vous exposer en détail ce qu'est ACC—vous pouvez le lire dans notre mémoire—sauf pour vous dire que nous sommes au Canada depuis 1984. Nous exerçons en fait notre concurrence dans ce pays depuis plus longtemps que Fonorola ou que Sprint. Nous avons installé nos propres systèmes de commutation en 1990, et en 1992 nous sommes devenus un opérateur offrant toute la gamme des services.

À l'heure actuelle, nous avons 500 employés au Canada et l'une de nos principales réalisations consiste à répondre aux besoins particuliers des collèges et des universités du Canada. Nous dispensons des services à 65 collèges et universités, à leurs élèves, à leurs étudiants, à leur corps enseignant, et nous restituons une partie de nos recettes aux établissements d'enseignement, soit environ 5 millions de dollars ces trois dernières années. Il y a donc en fait un rôle tout à fait fondamental de revendeur à jouer sur le marché canadien, ce qu'a fait l'ACC en excellant dans le secteur de l'enseignement.

Nous avons été en fait les premiers concurrents au Canada à fournir—cette concurrence étant exercée vis-à-vis des membres de Stentor—toute une gamme de services de télécommunications: interurbains, Internet; téléavertissement et, à l'intention des entreprises, Centrex, qui est un service local destiné aux entreprises qui revend les propres services de la société téléphonique.

La principale contribution d'un revendeur à ses clients est d'être en fait axée sur leurs besoins et de faire preuve d'innovation et de souplesse. Nous sommes en fait un revendeur qui apporte une valeur ajoutée aux services que nous achetons. J'insisterai sur le fait qu'en réalité nous appuyons très fortement les entreprises canadiennes. Nous consacrons quelque 100 millions de dollars par an à l'achat d'infrastructure—en l'occurrence, des installations de transmission—aux membres de Stentor, Rogers Network Services, Vidéotron, Fundy Cable, Shaw, etc. Nous investissons aussi au Canada en exploitant et en possédant nos propres installations de commutation et nos propres services de soutien.

Il est important de bien comprendre qu'un revendeur apporte une contribution tout à fait originale à l'environnement canadien des télécommunications et nous voulons nous assurer que les revendeurs pourront continuer à dispenser une gamme complète de services dans ce cadre. Cela nécessite en fait les pouvoirs d'octroi de licences envisagés par cette loi, et Maggs va vous en parler.

Mme Maggs Barrett (vice-présidente exécutive, Marché du service local, ACC TelEnterprises): Je consacrerai quelques instants à la description des articles du projet de loi que nous appuyons en indiquant pour quelles raisons nous les appuyons tels qu'ils sont formulés et en précisant avec quelle souplesse doit opérer un régime d'octroi de licences.

Vous connaissez bien l'article 3 du projet de loi C-17. Il fait état du projet d'octroi de licences s'appliquant aux services de télécommunications. Le Conseil se voit accorder le pouvoir de préciser les catégories de services de télécommunications pour lesquelles une licence est nécessaire. Aucun fournisseur de services de télécommunications ne peut offrir un service dans la catégorie précisée à moins qu'il n'ait tout d'abord reçu une licence du CRTC. Les conditions de licences peuvent être établies individuellement pour un service de télécommunications en particulier ou encore pour toute une catégorie comportant de nombreux services de télécommunications.

L'un des motifs du gouvernement pour établir un régime d'octroi de licences était de permettre au CRTC de réglementer la concurrence au niveau des services internationaux, qu'ils soient fournis par des entreprises de télécommunications canadiennes ou par des revendeurs. Le régime proposé d'octroi de licences vise toutefois plus que les services internationaux et accorde au CRTC de vastes pouvoirs de réglementation sur tous les fournisseurs de services qui selon le CRTC devraient obtenir une licence.

ACC croit savoir qu'un certain nombre de parties désirent limiter les pouvoirs d'octroi de licences du CRTC aux services internationaux uniquement. Elles ne voient pas la nécessité d'accorder au CRTC le pouvoir d'octroyer des licences relativement aux services canadiens de télécommunications. Contrairement au domaine international, elles ne croient pas qu'il y ait un besoin pressant pour l'octroi de licences à l'égard des services canadiens de télécommunications. De plus, elles s'inquiètent du fait qu'accorder au CRTC le pouvoir de donner des licences à l'égard des services canadiens de télécommunications pourrait être intrusif.

ACC appuie au contraire le régime d'octroi de licences prévu au projet de loi C-17. Nous estimons que le CRTC devrait avoir la possibilité d'exiger des licences dans des circonstances pertinentes, que ce soit dans le secteur canadien ou international. Par conséquent, ACC n'est pas d'accord avec les parties qui cherchent à limiter les pouvoirs d'octroi de licences du CRTC aux seules entreprises qui offrent des services internationaux.

Il peut sembler étrange ou paradoxal qu'un intervenant non soumis à la réglementation vienne demander une réglementation à votre comité. Pourquoi serions-nous en fait favorable à une réglementation possible sur des entreprises non réglementées?

La réponse est simple. Un régime d'octroi de licence permettra au CRTC d'imposer une réglementation aux revendeurs dans des circonstances pertinentes, et j'insiste sur cette expression: «dans des circonstances pertinentes». Cela signifie que le CRTC ne se sentira pas obligé d'interdire aux revendeurs d'exercer certaines activités simplement parce qu'il ne peut pas les réglementer convenablement.

• 1800

Si ACC a le choix de ne pouvoir offrir certains services ou de les offrir uniquement sur une base réglementée, elle choisira évidemment la dernière voie. ACC ne veut pas être empêchée d'offrir certains services parce qu'elle n'est pas réglementée.

C'est un problème pratique, comme vous l'a fait probablement comprendre l'intervenant précédent. Le CRTC a récemment refusé d'ouvrir un nouveau domaine d'activités aux revendeurs, soit le marché des télécommunications locales, en raison du fait qu'il ne pouvait réglementer les revendeurs.

La décision du 1er mai 1997 du CRTC, appelée décision 97-8, a été structurée de telle sorte que pour imposer des obligations de protection des consommateurs et d'autres obligations aux fournisseurs de services locaux, seules les entreprises canadiennes réglementées pouvaient entrer sur cet important nouveau marché des télécommunications.

Le CRTC n'a jamais dit que les revendeurs soulevaient des difficultés. Rien ne s'opposait à la participation des revendeurs au marché, mais, en l'absence de réglementation, ces derniers en ont été finalement exclus.

ACC a demandé au CRTC de reconsidérer cet aspect de la décision. Nous avons proposé un mécanisme qui répond aux inquiétudes du CRTC dans ce cas. Nous sommes convaincus que le CRTC répondra de façon positive à notre demande étant donné le désir exprimé par le Conseil d'encourager l'entrée des participants sur le marché local.

La leçon que nous avons cependant tirée de cette expérience, c'est que cette situation peut se produire dans d'autres secteurs de la revente et qu'il convient dans certaines circonstances de réglementer l'activité des revendeurs. C'est la conviction du CRTC. Il nous faut donc un mécanisme pour répondre à cette situation précise.

L'octroi de licences n'est pas toujours nécessaire, et d'ailleurs nous disons que dans bien des cas c'est une démarche absolument inutile, mais il peut y avoir des circonstances dans lesquelles c'est en fait la meilleure solution. ACC considère que le CRTC doit avoir une latitude suffisante pour appliquer les meilleures solutions face aux problèmes qui lui sont posés, ce qui implique qu'il puisse imposer l'octroi de licences lorsque les circonstances l'exigent.

Nous voulons attirer votre attention sur cette éventualité dans un avenir très rapproché. L'industrie du téléphone payant va bientôt devenir non réglementée. On peut se demander comment on va pouvoir accéder à cette industrie. Des questions telles que le prix maximum pouvant être facturé, l'accès à des services comme le 911 ou à des services d'opérateurs devront être négociées. Si l'on estime que la seule façon d'autoriser les gens à accéder à ce marché bien précis est de le réglementer, toute une catégorie de fournisseurs de services en sera alors exclue.

Par conséquent, ACC appuie les dispositions du projet de loi C-17 prévoyant l'octroi de licences. Nous estimons qu'il y a de bonnes raisons d'ordre public d'accorder au CRTC le pouvoir de mettre en place un régime d'octroi de licences pour les fournisseurs de services de télécommunications, notamment les revendeurs, que ce soit dans le domaine international ou canadien.

Je suis prêt à répondre à vos questions.

La présidente: Je vous remercie. Monsieur Lowther.

M. Eric Lowther: Merci de votre exposé. C'est un point de vue intéressant. Je veux être sûr d'avoir bien compris. Parfois, il est bon de paraphraser afin de voir si l'on ne s'est pas trompé.

Je crois vous avoir entendu dire que si vous étiez soumis à un régime de licences, vous seriez alors en mesure de jouer un rôle plus actif et de vous impliquer davantage. Vous ne seriez pas exclus. Cela revient à dire que vous voulez être chapeauté par cette réglementation pour ne pas risquer d'être exclu. C'est bien ce que vous nous dites?

Mme Maggs Barrett: C'est exactement ça. Dans la situation actuelle, on juge que la réglementation est nécessaire pour imposer certaines conditions aux participants au marché. Les clauses et les conditions d'accès doivent donc être déposées avec les tarifs. Les tarifs sont réglementés par le CRTC. En tant que revendeurs, nous pouvons déposer des tarifs, mais le CRTC n'a pas la compétence pour réglementer ces tarifs particuliers. Donc, lorsque les conditions sont fixées de telle manière que l'on présume qu'il faut qu'elles soient remplies pour qu'on puisse accéder à un marché, nous ne pouvons pas y accéder et répondre aux conditions ainsi fixées dans l'état actuel du projet de loi, parce que nous ne sommes pas réglementés. Par définition, nous ne sommes pas réglementés.

• 1805

M. Eric Lowther: Je me demande cependant si ce n'est pas un peu simpliste. Assujettissez-nous à la réglementation et nous pourrons participer au marché. Pour reprendre votre argument précis au sujet de l'accès au marché des télécommunications locales, ce n'est pas simplement en vous délivrant maintenant une licence ou en vous assujettissant à un régime quelconque d'octroi de licences que vous allez automatiquement vous conformer aux critères qui ont été prévus pour être un concurrent sur le marché local. Je crois qu'il y a d'autres facteurs dans ce cas particulier qui ont trait à la propriété, etc., qui font que l'on peut participer au marché local. Vous allez peut-être vous apercevoir qu'il ne suffit pas de réclamer «d'être réglementé pour pouvoir participer» et qu'en plus de cette réglementation, il y a toute une série d'autres paramètres qui empêcheront nombre de revendeurs de participer à ce marché parce qu'ils ne pourront pas prétendre à bénéficier d'une licence, par exemple.

Je pense qu'il y a ici d'autres éléments auxquels vous n'avez peut-être pas pensé.

M. George Horhota: Oui, mais il appartiendrait au Conseil de prendre ces décisions. Le Conseil a décidé d'ouvrir le marché local à la concurrence dans l'intérêt public, en fait dans l'intérêt du consommateur. Il souhaite très fortement qu'un maximum d'intervenants sur le marché fournissent des services, mais il veut veiller à ce que l'intérêt public soit protégé, de sorte que des services essentiels comme le 911 doivent être réglementés.

Il y a un bon nombre de questions touchant le public, notamment l'intérêt des consommateurs, qui ont besoin d'être prises en considération. La seule façon pour le Conseil de les prendre en considération c'est de faire en sorte que le fournisseur du service soit une entreprise de télécommunications. Seule une entreprise dont le contrôle est canadien peut être une entreprise de télécommunications.

La politique du Conseil en matière de concurrence locale ne visait pas à empêcher les entreprises étrangères de revendre des services, parce que les revendeurs ne sont pas exclus de la fourniture des services à l'heure actuelle. Le Conseil voulait simplement disposer d'un levier, de la capacité de réglementer tout fournisseur de services local et, pour ce faire, il a besoin en fait d'un pouvoir de concession de licences pour que les revendeurs à contrôle étranger relèvent de sa compétence.

La présidente: Merci, monsieur Lowther. Monsieur Bellemare.

M. Eugène Bellemare: Merci, madame la présidente.

Combien gagne votre entreprise par année?

Mme Maggs Barrett: Le chiffre d'affaires de l'entreprise canadienne sera cette année d'environ 170 millions de dollars, et celui de la société d'environ 380 millions de dollars US.

M. Eugène Bellemare: Vous nous dites que vous dépensez environ 100 millions de dollars par an, de sorte que vous faites des bénéfices d'environ 70 millions de dollars.

Mme Maggs Barrett: Ce ne sont pas des bénéfices de 70 millions de dollars. Nous disons que nous dépensons 100 millions de dollars que nous versons aux entreprises canadiennes de télécommunications pour louer leurs installations, utiliser leur équipement, leur acheter des minutes de communications, etc.

M. Eugène Bellemare: Est-ce que vous payez la totalité de l'équipement et du matériel appartenant à d'autres entreprises ou est-ce que l'on vous fait des cadeaux quelque part?

Mme Maggs Barrett: On ne nous fait pas de cadeaux.

M. Eugène Bellemare: L'un des témoins s'est demandé s'il ne fallait pas changer l'expression «entreprises canadiennes» pour employer le terme véritable, soit celui de «revendeurs» dans la loi.

Mme Maggs Barrett: Il parlait en fait de «fournisseurs de services», de sorte qu'il voulait changer la définition figurant dans un article de la loi afin d'abandonner l'expression actuelle «d'entreprises canadiennes» pour adopter celle de «fournisseurs de services», qui n'est pas celle qui est employée à l'heure actuelle.

M. Eugène Bellemare: Qu'en pensez-vous?

Mme Maggs Barrett: Je dirais que pour l'essentiel il s'agit ici de faire en sorte qu'un revendeur puisse accéder à tous les marchés qui sont disponibles. Aujourd'hui, nous n'avons pas cette possibilité. Je ne peux pas vous dire si c'est en changeant ces deux mots en particulier que nous obtiendrons ce résultat. Nous savons que c'est ce résultat qu'il nous faut.

La présidente: Merci, monsieur Bellemare. Madame Lalonde.

[Français]

Mme Francine Lalonde: Y a-t-il actuellement un marché gris chez les revendeurs?

• 1810

[Traduction]

Mme Maggs Barrett: Excusez-moi de ne pas pouvoir vous répondre en français.

À l'heure actuelle, il y a deux choses que peuvent faire les revendeurs. Nous pouvons installer des commutateurs et louer nos installations de transmission auprès d'une autre entreprise de télécommunications comme le font en fait AT&T, Sprint et Fonorola. La seule différence, c'est qu'ils ont aussi certaines installations au sol. Nous n'avons pas d'installations et nous les louons donc intégralement auprès d'une entreprise canadienne de télécommunications. Dans ce cas, par conséquent, nous fournissons un service. Il n'y a pas de marché gris.

Il y a une deuxième catégorie. On peut acheter en gros auprès d'une entreprise de télécommunications et, parce que l'on a un énorme pouvoir d'achat, on peut revendre à des clients plus petits, des clients résidentiels, par exemple. Je vais vous donner un exemple tout simple. J'achète des minutes à 7¢ et je les revends à 15¢, et c'est là que réside mon bénéfice. Là encore, il n'y a pas de marché gris.

Me suis-je bien faire comprendre? Je l'espère.

[Français]

Mme Francine Lalonde: Oui. Cependant, vous souhaitez un régime de licences qui vous permettrait de faire plus facilement ce que vous faites actuellement. C'est bien cela?

[Traduction]

Mme Maggs Barrett: Le Conseil a jugé qu'il fallait que certaines garanties soient données aux consommateurs, et nous sommes tout à fait d'accord. Pour que ces garanties soient respectées, on demande aux entreprises de télécommunications canadiennes de déposer un tarif. À l'heure actuelle, nous ne pouvons pas déposer ce tarif et, par conséquent, nous ne pouvons pas faire la preuve que nous sommes prêts à apporter ces garanties aux consommateurs. Nous ne pouvons donc pas accéder à certains marchés.

Nous aimerions disposer d'un régime de licences qui nous permette, en vertu des conditions prévues par cette licence... et il est bien clair qu'il faudrait que cette licence comporte des clauses bien précises prévoyant l'accès à des services d'urgence et autres modalités de ce type. Les garanties protégeant le consommateur y seraient intégrées. Pour pouvoir prétendre à la licence, il faudrait accepter des conditions précises. À ce moment- là, nous pourrions accéder à un marché donné et exercer nos activités.

[Français]

Mme Francine Lalonde: J'aurais aimé, madame la présidente, avoir leur mémoire avant d'entendre les autres témoins, parce que j'aurais eu d'autres questions à leur poser. Donc, s'il était dorénavant possible d'avoir les mémoires avant la séance s'ils sont disponibles, ce serait intéressant.

Pourquoi, d'après vous, ceux qui vous ont précédés s'opposent-ils au fait que vous puissiez bénéficier d'un régime de licences? Est-ce une façon de vous écarter du marché?

[Traduction]

Mme Maggs Barrett: Tout à fait. C'est bien clair. Nous avons bien précisé tout à l'heure qu'en n'autorisant pas cette possibilité et en n'autorisant pas toutes les parties à accéder à un marché donné en fixant les clauses et les conditions s'appliquant à ce marché—ce qui n'obligerait pas d'ailleurs les entreprises de télécommunications canadiennes à demander une licence, parce que les conditions de la licence sont fixées selon les catégories d'entreprises, de sorte qu'elles pourraient s'appliquer à nous sans s'appliquer à elles—en supprimant cette possibilité, on nous écarte du marché.

Sur le plan des communications locales, nous préconisons aujourd'hui qu'on mette en place un mécanisme nous permettant d'accéder au marché local, et il est curieux de constater que seules les entreprises du groupe Stentor se sont opposées à ce que nous accédions ainsi au marché local. Donc, effectivement, je dirais que c'est carrément une façon de restreindre la concurrence.

M. George Horhota: Madame Lalonde, M. Courtois a bien voulu proposer un amendement qui, selon lui, devrait nous faire relever des dispositions de l'article 24. Si cela pouvait aider, nous serions très heureux qu'il nous appuie devant le Conseil lors de notre requête en révision. Je ne pense pas que cet appui se matérialisera, et l'on peut donc en déduire les motivations. En réalité, nous n'avons pas peur du Conseil. Nous nous soumettrons à ses décisions de bon gré, contrairement aux témoins qui nous ont précédés. D'une certaine façon, il est probable qu'ils souhaitent la disparition du Conseil. Nous ne craignons absolument pas le Conseil.

La présidente: Merci, madame Lalonde. Je comprends que vous souhaitiez recevoir les mémoires à l'avance. D'autres témoins vont se présenter devant nous pour évoquer ce sujet et vous pourrez leur poser à ce moment-là ces questions.

• 1815

Merci, madame Barrett et monsieur Horhota. Je remercie tous les témoins d'avoir accepté les contraintes de temps que nous leur avons imposées.

J'ai été informée que la cloche ne sonnerait pas. Il est maintenant 18 h 15 et je déclare que la séance est levée jusqu'à demain. Si la cloche sonne, je vous prie de m'en excuser, mais c'est l'information qui m'a été donnée. Je vous remercie.