Passer au contenu
;

JURI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain

STANDING COMMITTEE ON JUSTICE AND HUMAN RIGHTS

COMITÉ PERMANENT DE LA JUSTICE ET DES DROITS DE LA PERSONNE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 28 avril 1998

• 0907

[Traduction]

La présidente (Mme Shaughnessy Cohen (Windsor—St. Clair, Lib.)): Il y a quorum. Aujourd'hui, nous accueillons Ward Elcock, directeur du Service canadien du renseignement de sécurité.

Soyez le bienvenu. Je sais que vous connaissez la routine, donc nous allons vous écouter calmement.

M. Ward P.D. Elcock (directeur, Service canadien du renseignement de sécurité): Madame la présidente, je n'ai pas d'exposé à faire, donc si vous voulez passer directement aux questions, je serai heureux d'y répondre.

La présidente: Monsieur Lee.

M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.): Merci.

Je suis ravi de vous revoir...

La présidente: Qu'est-ce qui m'a inspirée de vous donner la parole?

M. Derek Lee: J'étais frais et dispos, et d'attaque.

Monsieur Elcock, il y a deux points que j'aimerais aborder. Le premier concerne l'utilisation apparente de ressources au sein du SCRS dans le but d'aider—du moins, c'est ce qu'on me dit, corrigez-moi si j'ai tort... Quelqu'un a eu recours à des protocoles d'entente ou à d'autres arrangements pour que le gouvernement du Canada se fasse aider à réprimer le crime organisé, celui dont l'on dit qu'il vient de l'extérieur du pays. Voilà ce qui m'a été donné de comprendre.

Pouvez-vous nous confirmer que le SCRS, par le biais d'un partenariat, d'un protocole d'entente ou d'un autre arrangement conclu avec d'autres organismes du gouvernement canadien ou d'autres gouvernements dans le monde, se sert de ses ressources pour entreprendre des activités, mener des enquêtes ou réunir des renseignements concernant le crime organisé dont les têtes dirigeantes sont à l'extérieur du Canada?

M. Ward Elcock: Madame la présidente, toute la question du crime organisé se ramène à savoir s'il fait partie de notre mandat. Si l'on peut dire de lui qu'il constitue une menace à la sécurité du Canada ainsi qu'elle est définie dans notre mandat, nous serions autorisés à mener des enquêtes visant le crime organisé.

L'autre question est de savoir bien sûr si nous pouvons intervenir utilement. Un mandat peut permettre d'intervenir dans de nombreux domaines, mais bien sûr il faut s'occuper d'abord des choses qui importent le plus et qui peuvent donner les meilleurs résultats. Il y a certainement des aspects du crime organisé où nous ne pouvons probablement pas faire beaucoup mieux que ce que la police fait maintenant. Il y a d'autres aspects du crime organisé, par exemple le crime organisé russe, où nous pensons que nous pouvons sans doute intervenir utilement.

M. Derek Lee: Donc on peut supposer que le SCRS serait en mesure d'aider dans ce dossier—c'est-à-dire ce que vous appelez le crime organisé russe.

M. Ward Elcock: Il peut nous incomber d'aider à certains égards, mais comme dans tous les autres secteurs d'activité du SCRS, nous sommes chargés de mener des enquêtes et de fournir des renseignements et des conseils au gouvernement du Canada. Notre rôle n'est pas le même que celui de la police. La police est chargée d'appliquer la loi.

Si nous devions intervenir dans de tels dossiers, il faudrait que ce soit dans le contexte de notre action habituelle. Nous pouvons rendre service aux corps de police de toutes les régions du pays en leur confiant des renseignements particuliers qui peuvent leur être utiles, et c'est ce que nous faisons. Mais il nous incombe avant tout de conseiller le gouvernement, et non pas d'essayer de trouver des renseignements utiles pour la police.

• 0910

M. Derek Lee: Très bien. Plutôt que de tourner autour du pot, passons simplement... Nous parlons de crime organisé. Il s'agit de savoir si, oui ou non, en application de son mandat, le SCRS utilise des ressources qui, selon vous, font partie d'une initiative visant le crime organisé et les enquêtes sur le crime organisé.

M. Ward Elcock: Madame la présidente, si nous établissons que ce travail fait partie de notre mandat, et je crois que nous avons bien dit qu'il s'agissait d'un dossier que nous voulons suivre, certaines de nos ressources sont consacrées à certains types de crimes organisés.

M. Derek Lee: Très bien.

Ce type de travail, s'il est entrepris ou s'il a déjà été entrepris, ferait partie selon moi de l'anti-terrorisme ou du contre-espionnage. Il s'agirait d'un secteur d'activité différent, à mon sens. Pourriez-vous m'éclairer là-dessus? Quel secteur du service serait vraisemblablement chargé de s'occuper du travail de collecte de renseignements de cette nature?

M. Ward Elcock: À mon avis, la question de savoir à quel secteur ce travail serait confié importe peu; ce serait probablement le contre-espionnage qui s'en chargerait, mais en fait cela n'a guère d'importance. De notre point de vue, c'est simplement une question de savoir si la sécurité nationale est menacée. Si nous pouvons déterminer que la sécurité nationale est menacée, et nous avons pu le faire dans le cas de certaines activités, nous pouvons alors procéder à des enquêtes, si en fait notre intervention peut être utile.

M. Derek Lee: Très bien, je comprends mieux. Merci.

Le second point que je voulais aborder est un sujet d'actualité. Il s'agit des reproches adressés au Service parce qu'il aurait exercé des pressions indues sur des personnes revendiquant le statut de réfugié, sur des Néo-Canadiens encore assujettis aux formalités d'immigration, pour qu'ils aident le Service à obtenir des réponses dans certains dossiers qu'il mène. Plusieurs personnes se sont exprimées publiquement au cours des dernières semaines, reprochant en général au SCRS d'avoir été injuste, de s'être indûment imposé, d'avoir induit des gens en erreur en leur faisant croire que le Service pouvait intervenir de façon positive ou de façon négative dans le traitement de leurs documents d'immigration. À votre connaissance, le SCRS a-t-il commis des impairs dans ses rapports avec ces gens?

M. Ward Elcock: Madame la présidente, j'ignore qui sont ces gens. Quelqu'un a beau avoir dit que la lettre m'a été envoyée, je n'ai vu aucune lettre et je n'ai reçu aucun nom, donc soit que cette lettre est d'une authenticité douteuse, soit qu'elle chemine encore dans la poste. Je ne sais rien des cas particuliers et je ne peux vraiment pas vous en parler, sauf pour dire que l'ouvrage mentionné pendant les délibérations d'un autre comité de la Chambre ne contient aucun fait concernant des pressions indues que le Service aurait exercées sur des immigrants. Cela étant dit, je suis sûr que ces personnes, si elles estiment que justice doit être faite, finiront pas déposer un avis et le SCRS les entendra.

Le Service est composé d'êtres humains et donc il y aura des erreurs de temps à autre. C'est inévitable. Cela étant dit, il est manifestement interdit à nos agents de promettre aux immigrants ou aux réfugiés qu'ils les aideront à faire avancer leur dossier.

M. Derek Lee: Et qu'en est-il du contraire de l'aide?

• 0915

M. Ward Elcock: En réalité, d'après le livre qui a été mentionné dans l'affaire du CIC, l'entrevue dont parlait une certaine Mme Leddy, je crois, était une entrevue d'immigration à laquelle Mme Leddy participait. Il s'agissait simplement d'un dossier où un agent du SCRS interviewait une personne qui revendiquait le statut de réfugié ou un statut quelconque au Canada.

Il s'agissait d'une entrevue officielle où la personne pouvait certainement être interrogée. Si la personne ne répond à aucune des questions ou n'apporte aucun renseignement au moment de l'entrevue d'immigration, une telle situation n'aide sans doute pas à faire progresser son dossier à l'immigration.

M. Derek Lee: Quoi qu'il en soit, en votre qualité de directeur, vous ne pouvez pas compter sur le type de lettre ou d'introduction à ces affaires qui est à la disposition du public par le biais de la conférence de presse, et je ne suis pas en mesure...

M. Ward Elcock: Je peux vous dire que dans l'affaire des immigrants Kurdes qui prétendent avoir été traités injustement, rien ne m'est encore parvenu. Si jamais je reçois quelque chose, ils auront l'occasion de se faire entendre.

M. Derek Lee: Très bien.

Y a-t-il une directive ministérielle portant précisément sur l'interrogation des Néo-Canadiens ou des Canadiens dont les dossiers sont en cours de traitement? Y a-t-il une directive particulière qui s'applique à ces cas en ce moment?

M. Ward Elcock: Il y a plusieurs directives. Si je ne m'abuse, il n'y a pas de directive particulière portant sur ce point précis. Cela étant dit, il y a tout un lot de directives ministérielles et de politiques qui portent sur toutes ces questions dans le menu détail, et certaines d'entre elles, surtout dans le cas des directives ministérielles, sont publiques, mais il y en a une bonne part, comme vous le savez, qui ne sont pas disponibles.

M. Derek Lee: Conviendriez-vous que les personnes dans une telle situation, qui d'abord sont des Néo-Canadiens qui ne savent pas tout de la loi canadienne du mode de vie canadien et du SCRS, et dont les dossiers sont en instance à l'immigration, pourraient se sentir vulnérables lorsque le SCRS, ou en fait n'importe quelle autre agence gouvernementale, vient frapper à leur porte? Il y aurait peut-être lieu que le Service se penche sur ces situations en vue d'établir des méthodes plus adaptées, soit de façon interne ou par le biais d'une directive ministérielle.

M. Ward Elcock: Nous le faisons déjà, madame la présidente. La politique du Service interdit de promettre de l'aide dans les dossiers d'immigration et, de plus, oblige ceux qui mènent les entrevues d'informer les gens qu'ils sont libres de répondre.

Lorsque l'on procède à une entrevue d'immigration officielle— et ce n'est pas chaque immigrant qui y est convoqué, malgré que de telles entrevues ne sont pas rares—, la personne interviewée peut certainement être appelée à répondre à certaines questions. L'objet de l'entrevue est de déterminer s'il y a en fait des choses à propos d'une personne qui pourraient faire en sorte qu'elle n'a pas le droit de s'établir au Canada. C'est notre travail et, au bout du compte, je ne crois pas que nous ayons à nous en excuser. La marche à suivre est régie par des règles très strictes.

M. Derek Lee: Par entrevue d'immigration, vous entendez une entrevue menée par le SCRS dans le cadre des formalités d'immigration auxquelles un immigrant est astreint.

M. Ward Elcock: Oui.

M. Derek Lee: Il ne s'agit donc pas d'une entrevue menée par le ministère de l'Immigration; il s'agit d'une entrevue menée par le SCRS.

M. Ward Elcock: Le SCRS a un rôle à jouer dans le processus d'immigration.

M. Derek Lee: En effet.

M. Ward Elcock: D'après ce que j'ai pu comprendre en lisant l'ouvrage de Mme Leddy, c'est bien ce qu'elle y décrivait et c'est ce qu'elle a décrit au comité d'une autre façon.

M. Derek Lee: Oui.

Il y a une chose que je n'ai pas mentionnée, et elle se rapporte à la façon dont ces entrevues sont conduites ou à la façon dont le SCRS réunit ses renseignements—et ici je veux faire abstraction de toute la question de la responsabilité.

La tâche du SCRS consiste, bien sûr, à réunir des renseignements. Il s'en acquitte dans le cadre de la loi et rien ne justifie qu'un Néo-Canadien soit moins exposé ou plus exposé qu'un Canadien de souche à être interrogé d'une façon particulière.

M. Ward Elcock: Manifestement, une personne qui passe par les formalités d'immigration peut certainement être interrogée...

M. Derek Lee: Bien sûr.

M. Ward Elcock: ... sur ses antécédents et...

M. Derek Lee: Donc j'aborde la question en faisant abstraction de la responsabilité. Une chose dont vous n'avez pas parlé est le scénario où la personne interrogée... Et la situation ne se limite pas nécessairement à une entrevue d'immigration. Il pourrait s'agir d'un autre dossier où le SCRS va voir une personne qui se trouve être un Néo-Canadien pouvant savoir des choses dans un dossier où le SCRS réunit des renseignements. Dans ce scénario, l'agent du SCRS laisse entendre que le dossier de la personne, au lieu d'avancer, pourrait reculer; si la personne est réticente, le côté immigration du dossier ou peut-être un autre aspect quelconque pourrait avancer moins bien.

Ce n'est pas un scénario où le SCRS pourrait réserver à la personne un traitement spécial plus tard. C'est une situation où le Néo-Canadien pourrait déduire qu'il a un problème sur le plan administratif parce que le SCRS ne va pas collaborer plus tard si le Néo-Canadien ne collabore pas tout de suite. Ici, vous n'avez pas mis les points sur les i.

• 0920

M. Ward Elcock: Je serai heureux de mettre les points sur les i. Une telle chose ne devrait pas se produire et je doute fort qu'elle ne s'est jamais produite. Chose certaine, si une personne refuse de fournir des renseignements pendant une entrevue d'immigration, son dossier va en souffrir. Il n'y a pas de doute là-dessus. C'est une réalité de la vie.

Cela étant dit, si j'ai bien compris, vous songez à un autre scénario.

M. Derek Lee: Vous venez de soulever un autre point intéressant et c'est que l'objet de l'entrevue est la personne elle-même, et le défaut de fournir des réponses honnêtes aurait de ce fait même l'effet de retarder ou de ralentir ou d'entraver le processus d'évaluation, si je puis l'appeler ainsi.

M. Ward Elcock: En effet.

M. Derek Lee: Entendu.

N'empêche qu'il s'agit selon moi d'un aspect qui pourrait mériter plus d'attention plus tard soit à l'intérieur du Service ou, bien que cela ne relève pas de vous, par le biais d'une directive ministérielle qui ne changerait peut-être pas la marche à suivre mais qui pourrait tenir compte davantage des susceptibilités du Service sans égard à la responsabilité.

La présidente: Je vous remercie, monsieur Lee.

À propos de ce que demandait M. Lee, savez-vous si une plainte a été déposée au SCRS ou si le SCRS examine l'affaire?

M. Ward Elcock: De la part des immigrants kurdes?

La présidente: Oui.

M. Ward Elcock: J'ignore si une plainte leur a été soumise directement. Ordinairement, on demanderait aux gens de m'écrire...

La présidente: Oui.

M. Ward Elcock: ... puis je transmettrais le tout au SCRS, qui entreprendrait les démarches nécessaires.

La présidente: Ils entreprennent parfois des démarches sur la foi de déclarations dans la presse.

M. Ward Elcock: En effet. Je ne saurais vous dire si c'est ce qu'ils feront dans ce cas-ci. Pour le moment, il n'y a pas beaucoup d'information sur la table.

La présidente: Je vois. Je vous remercie.

Monsieur Marceau.

[Français]

M. Richard Marceau (Charlesbourg, BQ): Monsieur Elcock, vous étiez là la semaine dernière lorsque j'interrogeais le solliciteur général. J'aimerais que vous expliquiez au comité pourquoi vous avez décidé de ne pas donner de prime au bilinguisme aux employés de votre service.

[Traduction]

M. Ward Elcock: Madame la présidente, la décision concernant la prime au bilinguisme a été prise en 1985, bien avant que je devienne directeur du Service.

[Français]

M. Richard Marceau: N'avez-vous jamais pensé à modifier cette décision prise avant votre arrivée?

[Traduction]

M. Ward Elcock: Madame la présidente, il en a été question, car, comme le député le sait sans doute, il y a plusieurs personnes au Service qui estiment qu'elles auraient dû recevoir la prime au bilinguisme ou qui estiment qu'elles y ont droit. Nous avons examiné la question, mais la réalité est que même si nous décidions de modifier la politique—et ce serait une importante modification, étant donné la façon dont nous gérons le Service—, nous ne pourrions tout simplement pas nous le permettre financièrement, de toute façon.

[Français]

M. Richard Marceau: Et pensez-vous qu'un francophone se sente à l'aide dans votre service, à l'heure actuelle?

[Traduction]

M. Ward Elcock: Je pense que oui, madame la présidente.

[Français]

M. Richard Marceau: Si un employé se sent un peu lésé, en tant que francophone, est-ce qu'il a un droit de recours qu'il peut exercer? Y a-t-il un comité de surveillance auquel il peut s'adresser, par exemple?

[Traduction]

M. Ward Elcock: Absolument, madame la présidente, la personne peut recourir à un grief si c'est ce qu'elle veut faire. Dans certains cas, elle peut même s'adresser au CRTFP. Dans d'autres cas, elle peut s'adresser au CSARS. Quant à l'affaire dont nous parlons, je n'ai pas vérifié si ces recours sont possibles. Elle peut également s'adresser au commissaire aux langues officielles, et il y en a qui le font souvent.

[Français]

M. Richard Marceau: Ils le font régulièrement. Ils doivent avoir une bonne raison.

[Traduction]

M. Ward Elcock: Ce n'est pas souvent dans le sens où il y a beaucoup de plaintes. Mais s'il y a des gens qui estiment qu'ils devraient aller plus loin dans une affaire particulière, ils ont des droits qu'ils peuvent faire valoir, et j'en suis fort aise. Il n'y a pas d'institution qui soit parfaite.

[Français]

M. Richard Marceau: Non, mais il y a des façons de la rendre meilleure.

• 0925

J'ai ici une lettre reçue le 2 février 1998...

[Traduction]

M. Ward Elcock: Et nous nous occupons de ces plaintes et des recommandations lorsque le commissaire aux langues officielles en formule.

[Français]

M. Richard Marceau: J'ai une lettre datée le 2 février 1998, ou reçue par un de mes collègues le 2 février 1998, qui relate que le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité,—le CSARS, prononcé en français «César»,—a tenu une réunion à Québec, le 8 mai 1997, en anglais seulement. Il n'y avait pas d'interprétation simultanée. Trouvez-vous normal qu'une réunion d'un tel service, dans un pays supposément bilingue, se tienne exclusivement en anglais, dans la capitale de ce qu'on appelle le Canada français?

[Traduction]

M. Ward Elcock: Madame la présidente, c'est un point que vous devrez soulever auprès du CSARS. Ce sont des choses qui ne relèvent pas de moi. C'était une entrevue menée par le CSARS.

[Français]

M. Richard Marceau: J'ai une autre lettre, encore une fois datée le 2 février 1998, du Commissariat aux langues officielles, qui donne suite à une plainte d'un de vos employés, selon lequel vous, personnellement, le 22 janvier 1998, avez fait circuler un message électronique, un e-mail en langage courant, rédigé exclusivement en anglais. Encore une fois, dans un pays supposément bilingue, ne pensez-vous pas que le directeur de ce service se devrait de faire au moins l'effort d'envoyer les messages à ses employés en français et en anglais?

[Traduction]

M. Ward Elcock: C'est ce que nous faisons, madame la présidente. Ordinairement, les deux messages sont envoyés en même temps. Dans ce cas-là, il y a eu une erreur, ce qui se produit parfois dans la vie. Un message en anglais et en français a été envoyé une heure plus tard à peu près.

[Français]

M. Richard Marceau: Mais pourquoi y en a-t-il une du 2 février 1998, une autre du 23 décembre 1997 et encore une autre du 19 décembre 1997? Il me semble que cela fait plus d'une erreur. On dit habituellement qu'une fois, c'est une erreur, que deux fois, c'est une coïncidence, et que trois fois, c'est une tradition.

[Traduction]

M. Ward Elcock: Je ne suis pas au courant. Les dates ne me disent rien, madame la présidente. Je ne sais trop de quoi le député parle.

[Français]

M. Richard Marceau: Je vous les ferai parvenir tout à l'heure, et avec plaisir. Je suis convaincu que le Commissariat aux langues officielles a communiqué avec vous. Je trouve extraordinaire que...

[Traduction]

La présidente: Monsieur Marceau, si vous voulez soumettre le témoin à un contre-interrogatoire à partir de documents que vous avez sous les yeux, pourquoi ne lui en faites-vous pas part?

[Français]

M. Richard Marceau: Oui, bien sûr.

[Traduction]

La présidente: Cela aidera peut-être M. Elcock.

[Français]

M. Richard Marceau: Je présume, madame la présidente, qu'il a reçu copie de tout cela.

[Traduction]

M. Ward Elcock: Madame la présidente, il est question ici de choses différentes. Comme je l'ai dit tout à l'heure, parfois on s'adresse au commissaire aux langues officielles, mais je ne vois rien ici, contrairement à ce que le député laisse entendre qui indique que nous avons affaire à un même problème. Toutes ces choses sont différentes, et j'ai signalé...

[Français]

M. Richard Marceau: En tout cas, c'est une langue que je comprends relativement bien. Ce sont des messages électroniques, des messages e-mail, qui sont originaires de votre bureau et qui ont été envoyés aux employés en anglais exclusivement.

[Traduction]

M. Ward Elcock: Madame la présidente, chaque jour le nombre de messages qui passent par notre courrier électronique se chiffre probablement par centaines ou par milliers. Dans certains cas, des gens font des erreurs et la traduction du message n'est pas envoyée au même moment. Nous réglons ces questions lorsqu'elles se posent et nous donnons suite à toute plainte adressée au commissaire des langues officielles.

[Français]

M. Richard Marceau: De votre bureau, il y a des centaines et des milliers de messages qui partent chaque jour. Est-ce bien cela?

[Traduction]

M. Ward Elcock: Madame la présidente, je ne pense pas que tous ces messages émanent de mon bureau.

[Français]

M. Richard Marceau: Il y en a au moins deux sur trois.

[Traduction]

M. Ward Elcock: Je les lirai plus attentivement, madame la présidente. Si le député veut que je consacre du temps à leur lecture, je le ferai volontiers.

[Français]

M. Richard Marceau: Je vais vous en donner copie et il vous sera possible de me revenir là-dessus. Je vais vous donner copie des lettres.

[Traduction]

M. Ward Elcock: Assurément.

[Français]

M. Richard Marceau: D'accord. Dans un autre ordre d'idées, le numéro deux de votre service s'appelait Jean-Louis Gagnon et il a pris sa retraite. Est-ce que je me trompe?

[Traduction]

M. Ward Elcock: Oui, en effet, après une longue et fructueuse carrière.

• 0930

[Français]

M. Richard Marceau: D'accord. Juste avant de prendre sa retraite, à moins que je me trompe, et selon votre propre témoignage l'an dernier à ce comité, il avait entamé une sorte de tour du monde pour aller rencontrer ses contacts. Est-ce que je me trompe?

[Traduction]

M. Ward Elcock: On avait posé une question à cet égard que j'avais trouvée à l'époque plutôt insultante.

M. Gagnon avait entrepris un voyage pour visiter un certain nombre d'autres services. Il s'est fait accompagner d'une personne qui allait travailler pour lui, et plus tard le remplacer dans ses fonctions, afin de le présenter à ses collègues dans un certain nombre de pays avec lesquels nous traitons fréquemment. Laisser entendre qu'il y avait quelque chose d'irrégulier là-dedans, m'a semblé extrêmement insultant.

[Français]

M. Richard Marceau: Est-ce que vous savez combien a coûté ce voyage-là? Quel a été le coût de ce voyage pour les contribuables canadiens?

[Traduction]

M. Ward Elcock: Je n'ai pas ces chiffres présents à l'esprit pour le moment. Les membres du comité doivent comprendre que nous traitons fréquemment avec les services étrangers. Comme on traite sur une base personnelle avec les services étrangers et comme me l'a dit une fois un de mes collègues en France, l'on ne partage pas de renseignements avec les gens qu'on ne connaît pas, nous dépensons nécessairement des sommes assez importantes pour créer et maintenir ces rapports avec les services étrangers.

[Français]

M. Richard Marceau: Mais n'est-il pas particulier que, juste avant de prendre sa retraite, un haut fonctionnaire comme lui fasse un tel voyage?

[Traduction]

M. Ward Elcock: Je ne trouve pas cela bizarre du tout. Je le répète, M. Gagnon était accompagné de son successeur et voulait le présenter à un certain nombre de gens du monde entier. M. Gagnon avait longtemps côtoyé bon nombre de ces gens-là dans pas mal de pays. Présenter son successeur aux gens avec lesquels il allait traiter, aurait dû être jugé, à mon avis, comme une initiative extrêmement utile et je suis un peu consterné par l'attitude du député à ce sujet.

[Français]

M. Richard Marceau: Est-ce que M. Gagnon a eu droit à une prime de séparation avant de prendre sa retraite?

[Traduction]

M. Ward Elcock: Je ne me rappelle pas exactement ce qui s'est passé. Je devrais vérifier.

[Français]

M. Richard Marceau: Est-ce que c'est possible de me le faire savoir?

[Traduction]

M. Ward Elcock: Assurément.

[Français]

M. Richard Marceau: Est-ce que d'autres membres de la famille de M. Gagnon sont employés dans le service?

[Traduction]

M. Ward Elcock: Sa femme travaille dans le service.

[Français]

M. Richard Marceau: D'accord. Quel est le grade de son épouse?

[Traduction]

M. Ward Elcock: Elle occupe une fonction administrative. Elle vient d'accéder à la catégorie des gestionnaires.

[Français]

M. Richard Marceau: Vous avez des chiffres? Cela va de 1 à 15, quelque chose comme cela. Est-ce que je me trompe?

[Traduction]

M. Ward Elcock: Oui, en gros.

[Français]

M. Richard Marceau: Est-ce que vous savez son numéro d'échelon?

[Traduction]

M. Ward Elcock: Je dirais que non. Elle est à l'échelon neuf ou dix.

[Français]

M. Richard Marceau: Est-ce qu'il est possible qu'un employé de votre service puisse sauter un échelon, c'est-à-dire, par exemple, passer du quatrième au sixième sans passer par le cinquième?

[Traduction]

M. Ward Elcock: Dans n'importe quelle organisation, ce genre d'avancement se produit parfois.

[Français]

M. Richard Marceau: D'accord.

[Traduction]

M. Ward Elcock: Une organisation qui n'a pas la souplesse d'agir de la sorte quand la situation l'exige, est pas mal rigide.

[Français]

M. Richard Marceau: Qu'est-ce qui permet à quelqu'un de sauter un échelon? Cela ne doit pas tenir au pouvoir discrétionnaire du directeur, de vous-même?

[Traduction]

M. Ward Elcock: J'aurais certes le pouvoir de le faire.

[Français]

M. Richard Marceau: Quels sont les critères sur lesquels vous vous baseriez pour le faire?

[Traduction]

M. Ward Elcock: La décision serait basée sur les titres, l'expérience et le calibre de la personne en question, notamment.

[Français]

M. Richard Marceau: Est-ce que vous pourriez nous dire si l'épouse de M. Gagnon a eu le droit de sauter un échelon?

[Traduction]

M. Ward Elcock: Je ne pourrais pas vous le dire au pied levé.

[Français]

M. Richard Marceau: Est-ce qu'il serait possible de le vérifier et de me revenir là-dessus?

[Traduction]

La présidente: Pourrait-on attendre un instant? Est-ce qu'un problème concernant la Loi sur la protection de la vie privée ne se pose pas en l'occurrence?

M. Ward Elcock: J'allais soulever cette question, madame la présidente. Je ne saurais dire si un tel problème se pose au pied levé. Si ce n'est pas le cas, je me ferai un plaisir de fournir le renseignement. Dans le cas contraire je m'abstiendrai.

La présidente: Nous vous donnerons un autre tour, monsieur Marceau.

M. Derek Lee: J'invoque le Règlement. Je respecte le fait que l'on veuille protéger la vie privée de l'individu dont on est en train de discuter le cas, mais je n'accepte pas le fait que si notre comité, à la différence des députés... Le député a posé une question et je n'accepte pas l'argument voulant que l'on empêche le comité d'obtenir des renseignements au sujet d'un employé par respect pour sa vie privée. Je voulais le signaler sous forme d'un rappel au Règlement. Cependant, en l'occurrence, je n'ai rien d'autre à ajouter.

• 0935

La présidente: Merci, monsieur Lee. C'est un argument valable. Cela dit, il s'agit d'un employé qui est en droit de s'attendre que l'on respecte sa vie privée, et je voulais simplement m'assurer qu'il en sera fait mention au compte rendu.

Monsieur Marceau, nous reviendrons à vous.

Monsieur Peter MacKay.

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Merci, madame la présidente.

Merci, monsieur Elcock de comparaître devant nous ce matin.

On a appris, l'automne dernier, que la Cour fédérale du Canada, avec le consentement du solliciteur général, avait approuvé des demandes de mandat pour la pose d'écoutes électroniques par le SCRS, et ces mandats étaient de portée assez large. Ils permettaient aux agents du SCRS non seulement d'écouter secrètement les conversations de personnes suspectes mais on a appris au cours de l'enquête que ces mandats incluaient la collecte de données sur des particuliers dont le nom ne figurait pas sur les mandats. Cela permettait à vos agents d'écouter secrètement les conversations de ces gens-là sans devoir s'adresser à nouveau au tribunal pour élargir la portée des mandats.

Dans sa décision sur cette question, Mme le juge de la Cour fédérale Donna McGillis a qualifié d'inconstitutionnelle cette façon d'agir. Les preuves ainsi recueillies pourraient donner lieu à une contestation judiciaire.

Pouvez-vous, à titre de directeur, assurer au comité que le SCRS n'applique plus cette méthode? Pouvez-vous nous dire combien de mandats de ce genre ont été accordés et appliqués?

M. Ward Elcock: Madame la présidente, je crois qu'il y a là un malentendu. Il se peut que le député n'ait pas lu la décision que Mme le juge McGillis a rendue par la suite, ce qui explique assez bien la situation. L'autorité dont il parle est en fait très limitée. Il s'agissait simplement de pouvoir traiter avec des agents de renseignements étrangers d'un pays particulier en visite au Canada, donc il s'agit vraiment d'un pouvoir très limité.

La question dont le tribunal était saisi consistait à savoir s'il y avait eu délégation de pouvoir du tribunal—c'est une question juridique classique: pour savoir si le mandat renfermait ou non cette délégation. D'après nous à ce moment-là ce n'était pas le cas. Mme le juge était d'avis que le libellé du mandat suffisait pour entraîner délégation. Il s'agissait d'une question juridique de portée limitée ayant trait à une disposition juridique très circonscrite. Elle ne correspondait pas du tout à la version donnée à l'époque par les médias.

M. Peter MacKay: Merci de nous avoir éclairés à ce sujet. Pouvez-vous nous dire si cette pratique a cessé?

M. Ward Elcock: Étant donné la décision du tribunal comme quoi il y aurait délégation, de toute évidence la pratique a cessé.

M. Peter MacKay: Merci.

Pouvez-vous nous dire combien de demandes ont été présentées pour ce genre de mandat au cours de l'année 1996-97?

M. Ward Elcock: Dans de telles situations, il n'aurait pas été anormal qu'elles aient renfermé cette disposition.

M. Peter MacKay: Pouvez-vous nous donner un chiffre quant au nombre de ces demandes?

M. Ward Elcock: Pas au pied levé, madame la présidente.

M. Peter MacKay: Ce renseignement existe-t-il et peut-on nous le communiquer?

M. Ward Elcock: Je devrais me renseigner pour savoir en fait si nous disposons de ce renseignement et si nous pouvons réunir ces données parce que c'est peut-être simplement une question d'accessibilité.

M. Peter MacKay: Pouvez-vous nous donner un chiffre approximatif? Combien de demandes pour obtenir ce genre de mandat auraient été présentées? Il ne peut certes pas y en avoir...

M. Ward Elcock: Renfermant ce genre de dispositions, non. Nous n'en gardons pas nécessairement un compte particulier.

M. Peter MacKay: Donc, il n'y en aurait pas eu un grand nombre.

M. Ward Elcock: Il y en aurait eu un certain nombre. Je ne saurais vous dire au pied levé combien, madame la présidente.

M. Peter MacKay: Vous gardez des chiffres assurément concernant le nombre de demandes. S'il n'est pas important...

M. Ward Elcock: Non, nous ne gardons pas de chiffres là- dessus. Il s'agissait simplement d'une disposition de portée étroite dans un mandat. Par suite de la décision de la juge, ces dispositions ne figurent plus dans le mandat.

M. Peter MacKay: Donc, s'il n'y en avait pas beaucoup, vous pourriez nous citer un chiffre.

M. Ward Elcock: Il y en a beaucoup. Au fil des ans, il y a eu un assez grand nombre de mandats, et il faudrait que nous examinions chacun des mandats préexistants pour déterminer s'il renfermait oui ou non cette disposition.

M. Peter MacKay: Je vous ai demandé le chiffre pour une année seulement.

M. Ward Elcock: Nous pouvons le faire. Mais je ne le connais pas au pied levé.

M. Peter MacKay: Donc, si je correspondais avec vous, vous pourriez me donner la réponse.

M. Ward Elcock: Probablement, madame la présidente.

M. Peter MacKay: D'accord. Merci.

Quand le SCRS a pris en charge un certain nombre de dossiers de la GRC, je suppose que tous ces dossiers ont été transmis au SCRS.

M. Ward Elcock: Un grand nombre de dossiers nous ont été transmis. Un grand nombre d'entre eux ont été examinés et détruits et d'autres sont allés aux archives.

M. Peter MacKay: Quand ces dossiers sont examinés et détruits...

M. Ward Elcock: À vrai dire, je crois que nous n'en avons presque plus du tout en ce moment. En fait, nous avons examiné tous les dossiers qui restent et ceux que nous n'avons pas gardés, sont allés aux archives ou ont été détruits.

M. Peter MacKay: D'accord. Mais quand on les détruit, comment procède-t-on? Comment vous y prenez-vous?

• 0940

M. Ward Elcock: Il existe un procédé mis sur pied en accord avec les archives nationales, parce qu'elles auraient eu des craintes concernant la destruction des documents. Donc celle-ci aurait eu lieu en tenant compte de la position des archive nationales pour savoir ceux qui devraient être gardés et ceux qui devraient être détruits.

M. Peter MacKay: Donc le SCRS n'a rien à voir à la destruction des dossiers. Les remet-il simplement aux archives?

M. Ward Elcock: Nous aurions notre mot à dire en ce qui concerne l'examen des dossiers. Nous devons décider si en fait ils renfermaient des détails importants qu'il faudrait garder. Autrement, nous aurions appliqué le procédé, mais nous l'aurions fait de concert avec les Archives nationales.

M. Peter MacKay: D'accord. Quel procédé emploie-t-on pour détruire les anciens dossiers de la GRC?

M. Ward Elcock: Si vous voulez connaître la procédure officielle, je le répète, c'est terminé. Je devrais vous écrire une note pour vous décrire la procédure officielle employée.

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): J'ai un rappel au Règlement. Le renseignement que demande M. MacKay, pourrait-il être fourni au comité au lieu d'être adressé simplement à un membre du comité?

La présidente: Si le comité veut le renseignement je suis sûr que oui. Si c'est le cas, nous demanderons à M. Elcock de nous écrire au lieu de s'adresser directement à M. MacKay.

M. Peter MacKay: Quand la GRC gardait des dossiers en vertu des mêmes directives que celles en vertu desquelles le SCRS recueille les renseignements...

M. Ward Elcock: Nous pouvons recueillir les renseignements et les garder en vertu de directives tout à fait différentes de celles de la GRC.

M. Peter MacKay: D'accord. Pouvez-vous nous expliquer la différence?

M. Ward Elcock: Ce n'est pas une petite affaire. Si le député veut une description des règles qui s'appliquent à la collecte et à la conservation des documents, j'enverrais volontiers une autre note à ce sujet au comité.

M. Peter MacKay: Quels sont les critères de base, au pied levé?

La présidente: Parlez-vous de la collecte ou de la conservation des documents, Peter?

M. Peter MacKay: Je voulais parler de la collecte des renseignements.

M. Ward Elcock: Il faut se reporter à la mesure législative et examiner les dispositions qui prescrivent la méthode de collecte et de conservation des documents.

M. Peter MacKay: Mais quels sont les critères de base? Assurément, à titre de directeur, vous pourriez nous dire quels sont les critères de base qui permettent d'ouvrir un dossier concernant une personne.

M. Ward Elcock: Je ne sais pas au juste où le député veut en venir. Si le député veut que...

M. Peter MacKay: Auriez-vous des dossiers concernant les gens assis autour de cette table? Ouvririez-vous un dossier...

La présidente: Ce matin je lui ai demandé s'il avait le mot de passe de mon ordinateur, et il n'a pas voulu me répondre.

M. Ward Elcock: Non pas à titre d'intervenants autour de cette table. Mais s'il y avait lieu qu'une personne assise à cette table tombe dans le champ de notre mandat parce qu'elle a appuyé une cause politique qui préconisait l'usage de la violence, nous pourrions alors ouvrir un dossier. Mais autrement, je n'aurais pas de dossier sur qui que ce soit siège à cette table.

M. Peter MacKay: D'accord.

M. Ward Elcock: Pas plus que je ne trouverais aucun intérêt à ouvrir un dossier sur quiconque est assis à cette table.

Des voix: Bravo.

M. Peter MacKay: Ce serait peu intéressant.

Les instructions ministérielles que vous recevez, vous impliquent-elles, à un moment quelconque alors que vous rencontrez le ministre ou ses collaborateurs?

M. Ward Elcock: Je rencontre le ministre généralement toutes les semaines.

M. Peter MacKay: Je sais que vous ne pouvez pas révéler l'objet de ces discussions mais quel est le but général de ces réunions?

M. Elcock: Ces réunions visent en général à aborder les sujets que le ministre doit approuver et à l'informer de toutes questions qu'en tant que directeur, je dois lui communiquer.

M. Peter MacKay: Le rapport annuel de 1995-96 signalait qu'il y avait eu une augmentation dans la participation du SCRS aux enquêtes concernant les crimes transnationaux. Comment le service peut-il éviter les conflits et le double emploi avec la GRC, Revenu Canada, ou quelqu'autres organismes fédéraux? Comment veillez-vous à ne pas enquêter sur les mêmes questions?

M. Ward Elcock: La réponse fondamentale à cette question, je crois madame la présidente, c'est que nous travaillons en relations étroites avec la GRC et les autres organismes dont a parlé le député pour veiller justement à ce qu'il n'y ait pas de conflits. À vrai dire, notre rôle, en ce qui concerne le crime organisé, ou n'importe quoi d'autre que nous fassions, diffère énormément du rôle que joue la GRC.

Nos activités peuvent être en conflit avec celles de la GRC dans le cadre d'une question de terrorisme également. Après tout, le terrorisme est un crime et il est donc concevable que nous fassions enquête sur les mêmes gens, à certaines occasions, à des fins différentes. La GRC s'occuperait de l'application des lois tandis que le SCRS fournirait des conseils et des renseignements au gouvernement du Canada ce qui lui permettrait d'agir dans un tas de domaines différents.

En ce qui concerne le crime organisé, il est clairement établi que notre rôle essentiel est de fournir au gouvernement des conseils qui lui permettraient de prendre des décisions qui ne concernent pas nécessairement l'application des lois. Il se peut que nous puissions donner des renseignements à la GRC ou à des forces policières municipales du pays au sujet d'une personne ou d'un groupe mais notre rôle essentiel est de fournir au gouvernement des renseignements qui lui permettent, mettons, de prendre des décisions concernant par exemple quelqu'un qui voudrait entrer au Canada ou de résoudre certaines transactions financières d'une façon différente pour éviter un problème. Voilà le rôle que nous jouons dans ce domaine comme dans n'importe quelle autre.

M. Peter MacKay: Il y a donc probablement pas mal de renseignements qui sont échangés entre ces deux organismes fédéraux.

• 0945

M. Ward Elcock: Il y en a beaucoup et il y a beaucoup de discussions entre tous ces organismes.

M. Peter MacKay: Très bien. En ce qui concerne le rapport de 1995-1996 que j'ai mentionné, où on parle d'une participation accrue du SCRS à la lutte contre le crime international ou transnational, je ne veux pas avoir de chiffres précis mais quel est le pourcentage de temps que votre organisme consacre à ce travail?

M. Ward Elcock: Relativement minime.

M. Peter MacKay: Faible.

M. Ward Elcock: Oui.

M. Peter MacKay: Je vous remercie, madame la présidente.

La présidente: Merci. Monsieur Ramsay.

M. Jack Ramsay: Oui, je vous remercie, madame la présidente. Et je tiens à remercier M. Elcock d'esquiver toutes ces questions.

L'article 13 de la loi vous autorise à faire des enquêtes de sécurité sur les personnes qui ont besoin d'une autorisation de sécurité pour entrer au pays en vertu de nos lois sur l'immigration. L'aspect le plus visible du rôle du Service a trait aux autorisations de sécurité des fonctionnaires ou des employés à contrat. Les chiffres fournis par le SCRS indiquent que le ministère de l'Immigration a demandé une vérification dans moins de 10 p. 100 des demandes d'immigration et de visa.

Des rapports indiquent qu'il existe des centaines de récents criminels de guerre qui résident au Canada. Comment ces criminels arrivent-ils à entrer au pays sans qu'on les détecte? Est-ce parce qu'ils ne font pas l'objet d'une vérification de sécurité? Est-ce parce qu'on n'utilise pas pleinement les services du SCRS pour filtrer les personnes qui entrent au Canada, surtout celles qui viennent de pays ravagés par la guerre où il y a des activités terroristes et ainsi de suite? Comment se fait-il que ces gens entrent au pays?

M. Ward Elcock: Dans la mesure où ces gens entrent au pays, selon notre point de vue et celui du ministère de l'Immigration, dans la mesure où nous pouvons arrêter les gens à la frontière, de toute évidence cela est beaucoup moins coûteux et beaucoup plus productif que d'avoir à nous occuper de leur cas une fois qu'ils sont ici. Nous n'avons pas à les cibler et personne n'a à travailler pour les faire sortir du pays.

Cela dit, dans bien des cas, cela est difficile à savoir. Dans certains cas, nous avons des renseignements à l'avance qui nous permettent de savoir que quelqu'un n'est pas qui il prétend être, et cela nous permet de l'arrêter ou aux gens de l'immigration de l'arrêter. Dans bien des cas, nous n'avons pas cette information et nous-mêmes ou la GRC ne pouvons donc déterminer que cette personne est un imposteur ayant un casier judiciaire qu'après son arrivée. Cette information n'est pas toujours facilement accessible et certains renseignements qu'on peut obtenir ailleurs ne sont pas forcément fiables.

M. Jack Ramsay: Si on ne vous demande pas de faire une vérification de sécurité et qu'aucune vérification n'est faite, dans quelle mesure vous demande-t-on de faire une vérification de sécurité sur les nouveaux arrivants aux Canada?

M. Ward Elcock: En ce qui concerne les nouveaux arrivants au Canada, les immigrants ou les réfugiés, nous faisons un certain nombre de vérifications. Selon essentiellement ce que l'on recherche, à moins d'avoir des renseignements précis sur les gens, nous recherchons des gens qui correspondent à un certain profil.

M. Jack Ramsay: Est-ce 10 p. 100...

M. Ward Elcock: En d'autres mots, on peut nous demander plus précisément de faire une entrevue dans certains cas. Mais qu'on nous le demande ou non, comme il y a un transfert automatique des données, nous examinons les données qui arrivent et nous déterminons en ce qui concerne la personne en question si nous devons faire une recommandation au CIC concernant son admissibilité.

M. Jack Ramsay: Il y a environ 250 000 immigrants qui arrivent au Canada chaque année. Font-ils tous l'objet d'une vérification?

M. Ward Elcock: Dans la mesure où nous recevons une liste informatisée qui contient des renseignements et que nous examinons la liste.

M. Jack Ramsay: Si ces chiffres sont exacts, pourquoi avons- nous des centaines de personnes soupçonnées d'être de récents criminels de guerre dans notre pays?

M. Ward Elcock: Je n'ai aucune information sur les criminels de guerre. Je crois savoir que des travaux sont en cours dans d'autres ministères, à la GRC et au CIC en particulier, ainsi qu'au ministère de la Justice. Mais ce n'est pas un aspect sur lequel nous mettons l'accent à moins que nous ayons de l'information précise à fournir à propos d'un individu. Le problème dans bien des cas, je soupçonne, c'est l'absence d'information au sujet des antécédents d'un individu.

• 0950

M. Jack Ramsay: Est-ce que le SCRS est la première ligne de défense contre les indésirables qui entrent au Canada? Dans ce contexte, par «indésirables», on entend ceux qui ont des casiers judiciaires, particulièrement ceux qui ont commis ce que l'on décrirait comme des crimes de guerre dans d'autres pays. Le SCRS est-il la première ligne de défense à cet égard?

M. Ward Elcock: Le processus d'immigration est la première ligne de défense. Le SCRS, la GRC et d'autres organisations y contribuent. Si nous sommes au courant de certains renseignements— par exemple qu'un individu possède un casier judiciaire—nous les transmettons aux instances compétentes. Toutes les questions ayant trait à la criminalité relèvent principalement de la GRC.

M. Jack Ramsay: Quels renseignements le SCRS aurait-il au sujet des personnes qui présentent une demande d'admission au Canada à partir d'autres pays? Pour poursuivre ce que vous venez de dire, n'est-il pas pratiquement impossible pour le SCRS de savoir qu'un individu avec un casier judiciaire aurait pu participer à des activités terroristes? N'est-il pas pratiquement impossible pour le SCRS d'avoir cette information au moment où il reçoit la demande?

M. Ward Elcock: Je ne dirais pas que c'est impossible. C'est difficile et parfois il arrive que nous n'ayons aucune information et qu'il nous soit impossible d'obtenir de l'information. Dans certains pays—et je pense à la Somalie par exemple—il est très difficile d'obtenir de l'information parce que ces pays ne tiennent pour ainsi dire pas de dossiers.

Il y a donc des endroits où cela est très difficile, mais il existe de nombreux moyens d'obtenir de l'information. Nous déployons beaucoup d'efforts en ce sens et faisons de notre mieux pour nous assurer de repérer ces indésirables.

M. Jack Ramsay: Nous trouvons extrêmement inquiétant d'apprendre qu'il y a des centaines de récents criminels de guerre au Canada. C'est extrêmement inquiétant. Il me semble, d'après les renseignements que vous nous donnez aujourd'hui, que votre organisation ne parvient pas vraiment à lutter contre ce phénomène. Pourquoi? Vous pourriez peut-être me dire, si ces chiffres correspondent à la réalité et si les sources sont raisonnablement fiables, pourquoi, à votre avis, y a-t-il autant d'individus de ce genre qui entrent au pays sans être repérés?

M. Ward Elcock: Madame la présidente, je pense que les chiffres étaient ceux fournis par le député. Comme je ne suis pas personnellement au courant des chiffres en question, j'ignore s'ils sont exacts.

Pour ce qui est du travail que fait le SCRS, nous le faisons très bien, à mon avis. En fait, lorsque les gens examinent la façon dont nous nous occupons de l'immigration, ils sont très impressionnés. Nous avons obtenu de bons résultats dans certains cas. Donc, je ne crois pas que nous présentons un problème. En fait, je crois que nous faisons partie de la solution et que nous sommes efficaces à cet égard. Mais c'est un monde imparfait et nous n'aurons pas dans tous les cas tous les renseignements dont nous aurons besoin, surtout si quelqu'un essaie d'entrer au pays avec de faux papiers ou a détruit tous ses papiers ou qu'il n'existe aucun document. Il arrivera parfois que nous ayons à nous occuper de leurs cas après leur arrivée au pays plutôt qu'avant.

M. Jack Ramsay: Contestez-vous les chiffres? Je pense qu'il y a un an et demi on rapportait qu'environ 300 récents criminels de guerre résidaient au Canada.

M. Ward Elcock: Je ne conteste pas les chiffres. Je ne suis tout simplement pas au courant du nombre de criminels de guerre qui se trouvent au pays.

M. Jack Ramsay: Est-ce une situation qui vous préoccupe?

M. Ward Elcock: Si nous avons de l'information nous indiquant qu'un individu est un criminel de guerre, nous transmettrons cette information aux instances compétentes. Dans ce cas, cette question relèverait principalement de la GRC, pas de nous.

M. Jack Ramsay: Je pensais que vous seriez mieux au courant de cette situation que nous au comité.

M. Ward Elcock: Je suis certainement au courant du problème. Tout ce que j'ai dit, c'est que je ne suis pas au courant du nombre. En ce qui concerne l'article de journal, je ne suis pas au courant d'un nombre précis, ni d'un nombre confirmé.

M. Jack Ramsay: Je vous donnerai un exemple. Un type du nom de Lai Shui Fong, le chef de bande d'une triade de Macao a déménagé à Vancouver l'année dernière. Cet homme a d'abord demandé le statut d'immigrant à Hong Kong en 1994, mais sa demande n'a pas été approuvée. En mars 1996, il a fait une autre demande puis l'a mystérieusement retirée. En mai 1996, cet homme a visité Los Angeles et a présenté une autre demande au consulat là-bas. Sa demande a été approuvée en septembre et il est arrivé à Vancouver le 20 octobre.

• 0955

Le ministre de l'Immigration n'a jamais confirmé si la GRC ou le SCRS avait fait ou ordonné une vérification de la demande de cet homme. Savez-vous si le SCRS a fait une vérification en ce qui concerne cet individu?

M. Ward Elcock: Pas de mémoire. Et que nous l'ayons faite ou non... Nous ne sommes pas un organisme de droit pénal. Si nous avons de l'information de nature criminelle dans nos dossiers, c'est parce que l'individu en question figure dans nos dossiers pour une autre raison; soit qu'il fait partie d'un service de renseignements, soit qu'il est un terroriste. Donc dans notre cas, ce serait accidentel. Dans ce cas, vous parlez d'un membre d'une triade, d'un criminel. Ce serait donc un hasard si nous avions quelque chose dans nos dossiers—ou pour une autre raison.

M. Jack Ramsay: Très bien. Lorsqu'un individu de ce genre présente une demande d'immigration au Canada, quelle est la procédure à suivre? Il présente une demande—et dans ce cas, elle a été présentée par l'intermédiaire du consulat canadien à Los Angeles—quelle est alors la procédure à partir de ce moment-là?

M. Ward Elcock: S'il présente une demande à partir de là-bas, l'agent d'immigration peut nous demander ou non de faire une entrevue, selon les renseignements dont il dispose à propos de l'individu et de sa situation.

M. Jack Ramsay: Vérifiez-vous les antécédents des immigrants uniquement si le ministère de l'Immigration vous le demande?

M. Ward Elcock: Dans ce cas, nous ferions une entrevue à la demande du CIC.

M. Jack Ramsay: Mais ce n'est pas ce que je vous demande. Je vous demande si vous faites des vérifications uniquement au sujet des personnes qui font l'objet d'une demande du ministère de l'Immigration?

M. Ward Elcock: Pour faire une entrevue? Oui, uniquement lorsque le CIC nous en fait la demande.

M. Jack Ramsay: Donc, si le ministère de l'Immigration ne fait aucune demande en ce sens, vous ne faites pas de vérification.

M. Ward Elcock: Nous ne faisons pas d'entrevue, non.

M. Jack Ramsay: Quelle est la différence entre une entrevue et une vérification?

M. Ward Elcock: Nous avons un processus qui nous permet essentiellement de vérifier rapidement les demandes en fonction de nos fichiers et qui peut nous permettre de découvrir certaines choses.

M. Jack Ramsay: Est-ce que cela s'applique à toutes les demandes?

M. Ward Elcock: Pratiquement toutes; je ne dirais pas toutes, mais pratiquement toutes. C'est en majeure partie un transfert électronique de données. Il nous est donc facile de procéder de cette façon maintenant.

M. Jack Ramsay: Donc, tout le monde qui demande le statut d'immigrant ou de réfugié fait l'objet d'une vérification informatique?

M. Ward Elcock: Je pense que la réponse serait la plupart, oui. Il ne fait aucun doute que pratiquement toutes les demandes feraient l'objet d'une vérification par ordinateur. Ici encore, quant à savoir si des renseignements figurent dans nos fichiers, c'est autre chose.

M. Jack Ramsay: En quoi consiste alors une entrevue?

M. Ward Elcock: Nous ferions une entrevue à un bureau à l'étranger si le CIC nous demandait de le faire au sujet d'un requérant qui lui cause certaines inquiétudes ou par suite de certaines indications qui l'incitent à nous demander d'interroger cette personne.

M. Jack Ramsay: Donc, cette demande émanerait du CIC?

M. Ward Elcock: Oui.

M. Jack Ramsay: Et si elle n'émane pas du CIC, alors vous ne...

M. Ward Elcock: Non, nous ne ferions pas d'entrevue.

M. Jack Ramsay: Très bien. Je n'ai rien d'autre à ajouter pour l'instant. Je vous remercie.

La présidente: Merci, monsieur Ramsay.

Madame Finestone.

L'honorable Sheila Finestone (Mont-Royal, Lib.): Je vous remercie, madame la présidente.

Vous dites que le SCRS ne mène pas d'activité à l'extérieur du Canada en vertu de la Loi sur le SCRS, que celle loi ne confie pas au Service de mandat concernant les activités de renseignements sur l'étranger et que seules des mesures très limitées sont prises ici au Canada à l'égard de non-Canadiens. Mais d'après ce que je peux comprendre, vous avez des agents de liaison de sécurité dans certaines ambassades canadiennes. Est-ce exact?

M. Ward Elcock: Pas tout à fait. Permettez-moi de vous expliquer brièvement la situation. Dans le cadre de notre mandat concernant les renseignements sur l'étranger, notre champ d'action se restreint au Canada et nous n'agissons qu'au Canada pour obtenir des renseignements sur l'étranger. En fait, les renseignements sur l'étranger signifient «les choses qu'il est bon de savoir».

Dans le contexte de notre mandat en matière de sécurité nationale, nous menons des activités au Canada et à l'étranger.

Mme Sheila Finestone: Donc, vous menez des activités à l'étranger.

M. Ward Elcock: Oui.

Mme Sheila Finestone: Très bien. Est-ce que vous recueillez des renseignements auprès des instances des pays où vous menez des activités?

• 1000

M. Ward Elcock: Dans le cadre de notre mandat de sécurité nationale, nous avons des agents de liaison de sécurité en poste à l'étranger dont l'unique rôle est d'assurer la liaison avec le service extérieur pour faciliter l'échange de renseignements.

Mme Sheila Finestone: Il s'agit des agents de liaison qui ne font peut-être pas partie du SCRS mais qui travaillent dans les ambassades?

M. Ward Elcock: Non, tous les agents de liaison sont des agents du SCRS.

Mme Sheila Finestone: Je vois. Est-ce que la plupart de ces renseignements servent au filtrage de sécurité dans le domaine de l'immigration et la citoyenneté?

M. Ward Elcock: Ils font une grande partie de ce travail en poste mais ils facilitent aussi la communication à notre organisme de toute information provenant d'organismes étrangers, concernant diverses questions qui relèvent de notre mandat.

Mme Sheila Finestone: Leur assurez-vous une formation quelconque? Offrez-vous une formation particulière à vos agents de liaison de sécurité avant qu'ils soient envoyés en poste à l'étranger?

M. Ward Elcock: Tous nos agents de liaison sont des agents de renseignement d'expérience. Nous leur offrons un cours de cinq à six semaines avant qu'ils aillent à l'étranger pour leur apprendre à traiter avec une ambassade à l'étranger. Dans certains cas, nous leur offrons aussi une formation linguistique puisqu'il est primordial pour nous qu'ils puissent parler la langue, si ce n'est pas déjà le cas.

Mme Sheila Finestone: Est-ce qu'un critère d'embauche serait la connaissance de plusieurs langues ou une compétence dans un certain nombre de langues?

M. Ward Elcock: Il ne fait aucun doute qu'en ce qui concerne les agents de renseignement, nous tâchons d'engager des gens qui parlent plusieurs langues, car c'est un atout pour nous.

Mme Sheila Finestone: Je tiens à revenir sur une question qui a beaucoup préoccupé le Canada. Il s'agit des agents du Mossad qui, en septembre 1997, ont attenté à la vie d'un dirigeant hamas alors qu'il était en Jordanie. Ces agents du Mossad se sont rendus en Jordanie avec ce qui semblaient être des passeports canadiens, authentiques ou faux. J'ai entendu dire que ces passeports avaient été fournis de manière directe ou indirecte par des sources gouvernementales canadiennes. Quel rôle, le cas échéant, les employés ou les agents du SCRS ont-ils joué dans cette opération?

M. Ward Elcock: Comme je l'ai dit dans l'interview de CTV à l'époque, le SCRS n'a joué aucun rôle dans ces événements. Je ne vois pas pourquoi nous leur fournirions de faux passeports car ils étaient effectivement faux. Je ne vois pas pourquoi nous fournirions de faux papiers à qui que ce soit.

Mme Sheila Finestone: J'étais en Israël avec le ministre des Affaires étrangères lorsque cet incident s'est produit. Norman Spector, l'ancien ambassadeur du Canada en Israël, a prétendu que des employés ou des agents du SCRS avaient participé à des opérations conjointes avec les services de renseignements israéliens. Est-ce exact?

M. Ward Elcock: Je ne peux pas commenter les opérations que nous menons conjointement avec un service extérieur qu'il s'agisse du Mossad ou de tout autre service extérieur. Je dirai simplement de façon générale que dans le cadre de toute opération que nous menons avec un service extérieur dans un domaine qui relève de notre mandat, cette opération aurait été approuvée par les ministres. En fait, il aurait été déterminé dans l'intérêt du Canada de le faire. Je ne peux pas commenter davantage la nature de toute coopération ou opération que nous pourrions mener avec un service extérieur.

Mme Sheila Finestone: J'ai trouvé cela tout à fait déconcertant car il a dit que cela s'est produit à l'époque où il était ambassadeur du Canada dans ce pays. Si tel est le cas, en tant qu'ambassadeur, est-il tenu comme vous l'avez dit de s'abstenir de commenter la situation ou est-ce que le rôle d'un ambassadeur n'est pas de dire qu'il s'agit d'une activité qui a été menée par des employés du SCRS dans ce pays?

M. Ward Elcock: Il est préférable de faire preuve de prudence lorsqu'on commente ce genre de choses, car, vu mes antécédents d'avocat, il est toujours dangereux à mon avis de laisser entendre que quelqu'un a commis une infraction. Cela dit, j'aurais certainement préféré qu'il ne dise pas ce qu'il a dit.

Mme Sheila Finestone: Par conséquent, peut-on supposer que les excuses présentées par le gouvernement d'Israël, particulièrement par son premier ministre, Benjamin Netanyahou, et David Levy, qui était à l'époque ministre des Affaires étrangères, étaient exactes? Ils ont dit qu'ils regrettaient cet incident et que ce genre de choses ne se reproduirait pas.

M. Ward Elcock: J'espère assurément que ce genre de choses ne se reproduira pas.

Mme Sheila Finestone: Donc, vous ne pouvez pas me dire si M. Norman Spector avait tort ou raison lorsqu'il a fait ses déclarations. Est-ce ce que vous êtes en train de me dire?

• 1005

M. Ward Elcock: Je ne me rappelle pas assez bien de ces articles pour vous dire exactement qui a dit quoi et à qui. Mais de toute évidence, si à cause de toute coopération ou opération possible de notre part avec le Mossad, on insinue que nous fournirions des documents à des gens qui veulent attenter à la vie de quelqu'un en pleine rue en Jordanie, c'est une insinuation tout à fait injustifiée, inexacte et déplacée.

Mme Sheila Finestone: Mis à part cet incident particulier que je considère regrettable à tous égards, en général, il n'est pas inhabituel pour le SCRS d'envoyer un agent spécial à l'étranger pour s'occuper de certaines questions d'intérêt, avec l'approbation du ministre.

M. Ward Elcock: Nos agents de liaison de sécurité sont envoyés à l'étranger dans un seul but, c'est-à-dire assurer la liaison avec le service extérieur. Habituellement, nous couvrons un certain nombre de pays à partir d'un seul pays. Nous n'avons pas d'agent dans chaque ambassade à l'étranger.

Cela dit, si nous devions mener une opération conjointe dans le cadre de notre mandat de sécurité nationale, cette tâche ne serait pas confiée à nos agents de liaison. Nous partons du principe dans ce pays que tout agent de liaison en provenance de l'étranger qui travaille au Canada est ici uniquement pour assurer la liaison et n'accepte aucune opération sans notre approbation. De même, lorsque nous envoyons nos agents de liaison à l'étranger, leur seul rôle consiste à assurer la liaison.

Mme Sheila Finestone: Donc, ils travailleraient, disons en Grande-Bretagne ou en France, avec ce que nous appelions autrefois la légion étrangère. Je sais qu'ils sont désignés par un autre nom. Je pense aux anciens films. Quoiqu'il en soit, pour ce qui est du Mossad et des services secrets d'autres pays, il ne serait pas inhabituel pour eux de collaborer dans des cas particuliers?

M. Ward Elcock: Nous menons parfois des activités opérationnelles avec d'autres services avec qui nous entretenons des liens.

Mme Sheila Finestone: Et partager de l'information.

M. Ward Elcock: Effectivement.

Mme Sheila Finestone: Ce n'est donc pas inhabituel?

M. Ward Elcock: Non.

Mme Sheila Finestone: Merci beaucoup.

C'est tout, madame la présidente.

La présidente: Puis-je poser une question complémentaire? Est- ce que l'ambassadeur de n'importe quelle ambassade sait ce que font les membres et employés du SCRS? Ces derniers relèvent-ils de lui? Lui disent-ils ce qu'ils font? Ou bien vous font-ils rapport et c'est par hasard que leur bureau se trouve à l'ambassade?

M. Ward Elcock: Non, de toute évidence, c'est quelque chose entre les deux. Nos agents de liaison font bien sûr partie d'une ambassade à l'étranger et, comme tous les autres membres de cette ambassade, sont là pour aider et participer à la mission de l'ambassade.

Notre programme est cependant un peu plus obscur que celui de la plupart des autres ministères. Par conséquent, les ambassadeurs disposent probablement de moins d'information sur ce que nous faisons et sur notre programme, contrairement à ce qui serait normalement le cas.

Ceci étant dit, nous transmettons à l'ambassadeur les renseignements que nous pouvons et devons lui transmettre.

La présidente: À votre connaissance, monsieur Spector s'est-il déjà plaint auprès de vous ou du SCRS au sujet de ces activités?

M. Ward Elcock: Non.

La présidente: Au sujet de ces allégations, monsieur?

M. Ward Elcock: Au sujet des ces allégations particulières? Non.

La présidente: Le SCRS s'est-il penché sur la question?

M. Ward Elcock: Le SCRS est en train d'examiner ce cas particulier, madame la présidente.

La présidente: Qu'est-ce qui l'a incité à le faire? Est-ce à cause de la couverture médiatique?

M. Ward Elcock: Je crois que c'est à cause de cette couverture et des allégations elles-mêmes.

La présidente: Est-ce que M. Spector était ambassadeur lorsque vous étiez directeur du SCRS?

M. Ward Elcock: Non, je crois qu'il était parti de...

La présidente: Quand êtes-vous devenu directeur du SCRS?

M. Ward Elcock: En mai 1993, je crois.

La présidente: Je suis allée en Israël en 1994 et il était là, il était donc l'ambassadeur.

M. Ward Elcock: C'était 1994, désolé.

La présidente: Oh, c'était 1994?

M. Ward Elcock: Oui, il y a quatre ans.

La présidente: Comme le temps passe vite, n'est-ce pas?

Il était là-bas à l'automne de 1994, parce que je l'ai rencontré...

M. Ward Elcock: Il se peut donc que nous ayons occupé nos fonctions respectives en même temps, pendant un court moment.

La présidente: S'est-il plaint auprès de vous à propos d'activités du SCRS en Israël?

M. Ward Elcock: Non. Je crois qu'il tenait en fait à encourager la coopération entre nous et les services de renseignement israéliens.

• 1010

La présidente: Ah bon. Merci.

Monsieur Marceau.

[Français]

M. Richard Marceau: Merci. Monsieur Elcock, combien y a-t-il d'anciens membres de la GRC qui sont maintenant au SCRS?

[Traduction]

M. Ward Elcock: Notre effectif actuel se compose à 30 ou 40 p. 100 d'anciens agents de la GRC. Je n'en ai pas le chiffre exact.

[Français]

M. Richard Marceau: D'accord. Sur combien d'employés?

[Traduction]

M. Ward Elcock: Environ 2 060—2 000 et des poussières.

[Français]

M. Richard Marceau: D'accord. Si je me souviens bien, lorsque votre service avait été créé en 1984, on avait dit que les avantages de la GRC seraient conservés par les gens qui passeraient de la GRC au SCRS. Ai-je raison?

[Traduction]

M. Ward Elcock: C'est exact.

[Français]

M. Richard Marceau: Est-ce que les anciens de la GRC qui sont maintenant au SCRS... Non, pardon, je reviens un peu en arrière. Vous êtes au courant, car on s'en est parlé la semaine dernière, de l'arrêt Gingras portant sur la rétroactivité de la prime au bilinguisme pour les agents de la GRC. Vous connaissez cet arrêt.

[Traduction]

M. Ward Elcock: Oui.

[Français]

M. Richard Marceau: D'accord. Étant donné qu'il y avait eu promesse de maintenir les mêmes avantages pour les anciens de la GRC, êtes-vous d'accord que les agents de la GRC qui sont maintenant passés au SCRS auraient droit à la rétroactivité de la prime au niveau de ceux qui sont restés à la GRC?

[Traduction]

M. Ward Elcock: Bien sûr, par suite de la décision Gingras, plusieurs membres du SCRS, dont M. Gingras en particulier, ont reçu la prime au bilinguisme jusqu'en 1985, date à laquelle il a été décidé de ne plus verser cette prime aux employés du Service. Par suite de la décision Gingras, nous avons versé la prime au bilinguisme à M. Gingras et à tous ceux qui se trouvaient dans la même situation, ainsi que tous les intérêts sur cette prime, comme l'a également fait la GRC. Mais après 1985, non.

[Français]

M. Richard Marceau: Vous me dites, en somme, que les employés qui étaient autrefois à la GRC et qui sont maintenant au SCRS n'ont pas les mêmes avantages que ceux qui sont restés à la GRC.

[Traduction]

M. Ward Elcock: L'avantage dont fait mention le député n'en est pas un dans le contexte des avantages dont il parle.

[Français]

M. Richard Marceau: Un instant. Je suis employé à la GRC. On me dit que je vais maintenant faire partie du SCRS et que je vais conserver les mêmes avantages. Je me dis que cela me convient. J'avais droit, à la GRC, à la prime au bilinguisme. J'arrive au SCRS. Mes copains, avec qui j'ai obtenu mon diplôme et qui sont maintenant à la GRC, ont droit, à la suite de l'arrêt Gingras, à une rétroactivité de la prime au bilinguisme, et moi, à qui on avait promis les mêmes conditions de travail que mes collègues de la GRC, je n'y aurais pas droit. Est-ce bien ce que vous me dites?

[Traduction]

M. Ward Elcock: Selon mes conseillers juridiques, la prime au bilinguisme n'est effectivement pas un avantage selon la définition des avantages et n'est donc pas payable à titre d'avantage dans ce contexte.

[Français]

M. Richard Marceau: D'accord. C'est une promesse intéressante. On entend parfois parler du Centre de la sécurité des télécommunications. Vous le connaissez, n'est-ce pas?

[Traduction]

M. Ward Elcock: Je connais le Centre de la sécurité des télécommunications, puisque j'en ai été responsable pendant quelques années.

[Français]

M. Richard Marceau: D'accord. Quelles sont les relations entre le SCRS et le CST?

[Traduction]

M. Ward Elcock: Très étroites.

[Français]

M. Richard Marceau: D'accord, mais le CST est un organisme distinct du SCRS.

[Traduction]

M. Ward Elcock: Oui.

[Français]

M. Richard Marceau: D'accord. D'où provient le budget du CST?

[Traduction]

M. Ward Elcock: Le CST fait partie du ministère de la Défense nationale.

[Français]

M. Richard Marceau: D'accord. Quand vous dites que vos relations sont très étroites, voulez-vous dire qu'elles sont quotidiennes, hebdomadaires, constantes?

[Traduction]

M. Ward Elcock: Entre les membres du SCRS et du SCT? Bien sûr.

[Français]

M. Richard Marceau: D'accord. Donc, on travaille ensemble tous les jours. C'est vraiment un travail d'équipe.

[Traduction]

M. Ward Elcock: Cela dépend de la question. Nous travaillons ensemble sur des projets particuliers; dans le cas d'autres projets, nous faisons notre propre travail, mais la coopération entre nous et le SCT est constante.

[Français]

M. Richard Marceau: Quelles sont les sphères dans lesquelles vous travaillez avec le CST?

• 1015

[Traduction]

M. Ward Elcock: Il y a coopération surtout au niveau opérationnel et dans les cas où le SCT gère ou traite des renseignements pour nous. Je ne suis pas prêt à en dire plus au sujet de nos rapports avec le CST.

[Français]

M. Richard Marceau: Pourquoi?

[Traduction]

M. Ward Elcock: Pour des raisons de sécurité, de sécurité nationale.

[Français]

M. Richard Marceau: Ce que vous dites, c'est qu'il n'y a aucune possibilité pour les gens élus à la Chambre des communes, donc pour nous en tant qu'élus, de connaître le travail que vous faites avec le CST.

[Traduction]

M. Ward Elcock: Non, je dis simplement que je ne peux pas en parler et que mon travail ne consiste pas à vous fournir ces données.

[Français]

M. Richard Marceau: D'accord. Est-ce que vous pourriez nous dire qui pourrait être en mesure de nous renseigner là-dessus? Si ce n'est pas vous qui devez le faire, mais qu'il y a une autre juncture—c'est le mot que vous avez employé—, quelle est la personne ou l'organisme à qui on devrait s'adresser pour connaître cela?

[Traduction]

M. Ward Elcock: En fin de compte, ce serait au gouvernement de décider s'il faut fournir cette information ou non.

[Français]

M. Richard Marceau: D'accord. Merci.

[Traduction]

La présidente: Voulez-vous invoquer le Règlement, monsieur Lee?

M. Derek Lee: Merci, madame la présidente.

Pour mémoire, la question de la divulgation de l'information relative à la sécurité et au renseignement—au Comité de la justice et au Sous-comité de la sécurité nationale ainsi qu'à d'autres comités—s'est déjà posée. En vertu du droit parlementaire, ce comité et la Chambre sont parfaitement en mesure d'obtenir les renseignements qu'ils souhaitent. Ils doivent pour ce faire, préciser leurs intentions et décider des renseignements qu'ils veulent. Le droit parlementaire est très clair à ce sujet. La réponse de M. Elcock en reflète l'évolution moderne, c'est-à-dire que les organismes sont peu disposés—ce qui est bien compréhensible—à divulguer publiquement des renseignements qui mettraient en péril des opérations ou toute autre question de sécurité nationale.

Tout en acceptant le fait que M. Elcock ne veuille pas aller plus loin aujourd'hui et comme je l'ai indiqué plus tôt, je ne voudrais pas que le comité—moi-même, à tout le moins—se range à l'opinion que nous ne sommes pas en mesure d'obtenir les renseignements si nous tous souhaitons les obtenir.

La présidente: Merci.

Monsieur Maloney.

M. John Maloney (Erie—Lincoln, Lib.): Merci.

Monsieur Elcock, y a-t-il des gouvernements étrangers qui menacent des intérêts canadiens? Je veux parler de l'espionnage économique.

M. Ward Elcock: Je pense que nous avons indiqué dans notre rapport annuel, à plusieurs occasions, qu'il y a effectivement des menaces dans plusieurs domaines. Le Canada jouit d'une bonne réputation dans le domaine de la haute technologie: la technologie nucléaire, l'industrie pétrolière et gazière, l'industrie informatique, bref, les industries de pointe. C'est un fait certain que plusieurs pays cherchent à recueillir des renseignements au Canada ainsi qu'ailleurs.

M. John Maloney: Cela relève-t-il de votre mandat?

M. Ward Elcock: Oui.

M. John Maloney: Comment abordez-vous la question?

M. Ward Elcock: Tout d'abord, permettez-moi de souligner que nous ne nous occupons pas de l'espionnage industriel. En d'autres termes, si, par exemple, Procter & Gamble veut espionner Lever Frères Ltée pour connaître la composition de leur savon-poudre, cela ne nous intéresse pas vraiment. Ce qui nous intéresse par contre, c'est l'intérêt manifesté par un gouvernement étranger. Si un gouvernement étranger, directement ou indirectement, cherche à obtenir de l'information au Canada dans le domaine de la sécurité économique, il s'agit, de notre point de vue, d'une forme d'espionnage; nous réagirions de la même façon que pour n'importe quelle autre affaire d'espionnage; nous ferions enquête et, au bout du compte, nous empêcherions que cela se produise.

Le Service compte également un programme qui lui permet de donner des renseignements génériques aux organisations publiques et privées concernant la nature de certaines des menaces, et non des conseils particuliers sur la sécurité, cela relevant véritablement du secteur privé.

• 1020

M. John Maloney: Est-ce un problème grave? Est-il répandu?

M. Ward Elcock: Ce problème est plus répandu qu'auparavant, ce qui semble être une des répercussions de la fin de la guerre froide.

M. John Maloney: Pouvez-vous nous citer les pays qui font de l'espionnage économique au Canada?

M. Ward Elcock: Plusieurs en font. Je ne suis pas prêt à les citer, madame la présidente, mais plusieurs en font, certains depuis toujours, d'autres s'y sont mis dernièrement.

M. John Maloney: Dans quels secteurs de l'économie?

M. Ward Elcock: Leurs intérêts sont assez vastes et éclectiques. Cela dépend du pays en question, de ce qui l'intéresse et s'il peut trouver quelque chose d'intéressant. L'espionnage vise toute la gamme des industries, de l'industrie pétrolière et gazière, à l'industrie informatique, à l'industrie nucléaire, etc.

M. John Maloney: Pouvez-vous nous citer les entreprises visées?

M. Ward Elcock: Non, je ne le ferai pas, madame la présidente.

M. John Maloney: Vous avez parlé d'unités d'enquête du secteur privé. Vos opérations sont-elles parallèles ou complémentaires? Comment faites-vous le lien avec les unités d'enquête du secteur privé?

M. Ward Elcock: Il peut arriver que l'on se heurte à la police, je suppose, mais pas dans le cas des enquêtes sur l'espionnage industriel effectuées par le secteur privé. C'est quelque chose qui ne relève pas de notre mandat.

M. John Maloney: Merci, madame la présidente.

La présidente: Merci. Monsieur McKay.

M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): J'aimerais revenir sur une question au sujet des réfugiés kurdes, question que j'ai posée au ministre la semaine dernière.

J'ai parlé d'une lettre datée du 19 avril, qui apparemment vous a été envoyée à vous-même, monsieur Elcock, et à Maurice Archdeacon, directeur du Comité de surveillance des activités du renseignement de sécurité, ainsi qu'à deux témoins qui ont comparu devant le comité de l'Immigration, Suleyman Goven et Sami Dargun. Avez-vous reçu cette lettre?

M. Ward Elcock: Non.

M. John McKay: Vraiment?

La présidente: Pouvez-vous la lui montrer?

M. John McKay: Certainement.

La présidente: Elle n'est pas déposée.

Une voix: Elle n'est pas traduite.

La présidente: Pour être présentée, la lettre doit être déposée. M. McKay peut vous en remettre lui-même une copie.

M. John McKay: Vous n'avez donc jamais vu cette lettre?

M. Ward Elcock: Je ne l'ai jamais vue.

M. John McKay: Elle a été remise aux médias.

M. Ward Elcock: J'imagine que s'ils disent qu'ils l'ont envoyée, c'est probablement le cas, mais ils ont dû l'envoyer par courrier lent, car je ne l'ai pas encore vue.

M. John McKay: Le ministre semble l'avoir vue.

M. Ward Elcock: Je ne l'ai pas reçue et de ce fait, je ne l'ai pas envoyée au ministre. Il se peut qu'il en ait reçu un exemplaire des médias.

M. John McKay: Selon l'allégation contenue dans cette lettre— je vais m'en tenir à l'allégation de politique plutôt qu'à la question personnelle—il est courant que vos enquêteurs qui travaillent pour le compte d'Immigration Canada disent simplement au demandeur qu'il ne pourra obtenir le droit d'établissement à moins qu'il ne coopère. Qu'en dites-vous?

M. Ward Elcock: Madame la présidente, le député n'était pas là lorsque la question a été posée. Je vais être clair. D'après la lettre, c'est clair et je ne m'en étais pas rendu compte. Il est clair que l'on parle ici du processus de l'immigration, auquel participe le SCRS. Dans le cadre de ce processus, nous faisons souvent des entrevues avec les immigrants afin de déterminer s'ils répondent aux critères d'admissibilité au Canada.

Grâce à l'information que nous pouvons recueillir dans un cas particulier... Il y a des organisations terroristes au Canada et il y a des terroristes qui cherchent à entrer au Canada. En cas de dénonciation, toute personne qui a une entrevue peut s'attendre à ce qu'on lui pose des questions à ce sujet et on s'attend à ce qu'elle nous aide.

Si elle ne nous aide pas, le processus d'immigration va nécessairement être plus lent. Si elle ne nous donne pas de renseignements sur elle-même et sur ses associations dans le contexte de l'entrevue d'immigration, nous devons aborder la question de non-admissibilité. Si elle ne donne pas d'information, il est évident que notre réponse au ministère de l'Immigration ne va pas accélérer le processus.

• 1025

M. John McKay: Nous avons le même problème ici, monsieur Elcock; si nous n'obtenons pas de réponse du ministère quant à la véracité et la validité de l'allégation, nous devons en conclure que l'allégation est juste.

M. Ward Elcock: Pour l'instant, madame la présidente, puisque je n'ai pas été mis au courant de quelque allégation que ce soit et que je ne sais pas si le SCRS a été mis au courant... Il n'y a pas eu d'enquête et les personnes en question ne se sont pas manifestées. Dès que le tout sera reçu, le SCRS se penchera sur la question. Ils auront accès à tous nos dossiers et seront en mesure de conclure si les allégations sont justes ou si elles révèlent en fait une faute.

M. John McKay: Cela faisait également partie d'un livre publié par Mary Jo Leddy, qui a assisté à l'une de ces entrevues pendant sept heures et qui a fait la même allégation. A-t-on répondu à cette allégation?

M. Ward Elcock: En ce qui concerne cette allégation, après la dernière audience, je suis allé consulter la page du livre en question. Il y est question d'une entrevue d'immigration. Au bout du compte, tout immigrant qui demande l'admissibilité au Canada peut être déclaré admissible ou non.

Dans le cadre de l'aide que nous apportons au CIC à ce chapitre, nous convoquons des immigrants particuliers à une entrevue afin de déterminer s'ils sont admissibles ou non, ou pour aider le CIC à déterminer s'ils le sont. S'ils ne veulent pas répondre aux questions posées, il est alors extrêmement difficile d'en conclure qu'il n'y a pas de problème.

M. John McKay: Attardons-nous sur ce point quelques instants. Prenons l'exemple d'un demandeur qui ne coopère pas, qui ne répond pas à vos questions. Que vous ayez le droit de poser ces questions est une autre affaire, mais s'il ne répond pas, quelle recommandation faites-vous au ministère de l'Immigration?

M. Ward Elcock: Dans ce contexte, à moins d'avoir des renseignements précis d'autres sources—et c'est souvent le cas— évidemment nous n'avons rien... nous en sommes réduits à dire que le demandeur ne coopère pas.

M. John McKay: Je vois. C'est alors au ministère de l'Immigration de décider si la vérification de sécurité de ce demandeur est satisfaisante?

M. Ward Elcock: C'est toujours au ministère de l'Immigration qu'incombe la responsabilité de prendre une telle décision et non à nous. Nous nous contentons de faire des recommandations en fonction de l'information que nous avons obtenue ou que nous pouvons obtenir.

M. John McKay: En ce qui concerne ces particuliers, qui sont ici depuis huit ou dix ans et qui ont eu plusieurs entrevues avec votre ministère, c'est entièrement au ministère de l'Immigration qu'incombe la responsabilité de décider s'ils répondent aux exigences du SCRS en matière de vérification de sécurité, si l'on peut dire?

M. Ward Elcock: La décision finale incombe au ministère de l'Immigration et dépend de... Notre travail, si le demandeur est ici, consiste à recueillir des renseignements et à faire une entrevue, et dans certains cas...

M. John McKay: Faites-vous rapport au ministère de l'Immigration à la fin de chaque entrevue?

M. Ward Elcock: Au bout du compte, nous conseillons le ministère de l'Immigration au sujet de la personne en question.

M. John McKay: Ces conseils sont-ils accessibles en vertu de la Loi sur l'accès à l'information?

M. Ward Elcock: Probablement que non. Dans la plupart des cas, il pourrait s'agir, si vous voulez, de renseignements opérationnels secrets.

M. John McKay: De toute façon, le demandeur y perd. S'il ne répond pas, vous avez une impression négative et il n'est pas possible d'avoir accès à ces renseignements pour déterminer si le raisonnement du SCRS est juste.

M. Ward Elcock: À plus long terme, certains renseignements sont divulgués, lorsque les personnes qui passent par le processus finissent par en appeler devant les tribunaux. Les tribunaux ont approuvé un processus en vertu de la Charte qui permet la divulgation de certains renseignements. Le juge décide des renseignements qui peuvent être transmis à la personne—et des autres.

M. John McKay: Par conséquent, ces plaignants n'ont qu'un seul recours: traîner le SCRS et le ministère de l'Immigration devant les tribunaux pour les obliger à divulguer ces renseignements?

M. Ward Elcock: Ils peuvent également s'adresser au SCRS, comme il semble que ces personnes aient l'intention de le faire. Comme je l'ai dit l'autre jour, le SCRS examine tous nos dossiers et a la possibilité d'interroger tous nos employés et d'arriver à une conclusion en fonction de toutes ces données; j'imagine que nous avons probablement certains renseignements. Ils concluent si la plainte est...

M. John McKay: Parmi les bassins de réfugiés ou de demandeurs, y en a-t-il que vous tenez à interroger?

M. Ward Elcock: Je ne sais pas vraiment ce que vous voulez dire par «bassins».

• 1030

M. John McKay: Dans cet exemple particulier, il y a des Kurdes d'Iran, des Kurdes d'Iraq et des Kurdes de Turquie; si je comprends bien, le SCRS ne s'intéresse pas vraiment aux Kurdes d'Iraq ni aux Kurdes d'Iran, mais plutôt aux Kurdes de Turquie. Est-ce bien le cas ou non?

M. Ward Elcock: Madame la présidente, nous ne nous laissons pas habituellement guidés par l'origine ethnique, mais plutôt par la personne en question. S'il s'agit de quelqu'un qui relève de notre mandat, si vous voulez, parce qu'il est Irakien, Iranien ou Turc, nous allons nous y intéresser.

M. John McKay: Êtes-vous aussi guidés par les intérêts de tel ou tel conflit qui peut avoir lieu dans cette région particulière du monde à ce moment-là?

M. Ward Elcock: Non, madame la présidente. Nous sommes, si vous voulez, régis par les articles de la loi qui, en ce qui concerne le processus d'immigration, traitent de la non- admissibilité de certains particuliers; si ces particuliers sont associés à un groupe terroriste ou en sont membres, il se peut fort bien qu'ils ne soient pas admissibles.

M. John McKay: Prenez-vous vous-même l'initiative de ces entrevues?

M. Ward Elcock: Dans le cadre du processus d'immigration, nous recevons beaucoup d'immigrants aux entrevues; nous ne les recevons pas tous, mais beaucoup.

M. John McKay: En supposant qu'elle soit juste—ou non—cette allégation se résume comme suit: «On a demandé à chacun de nous de donner des informations sur nos compatriotes kurdes et on nous a dit qu'il serait plus facile pour nous d'obtenir le droit d'établissement si nous coopérions.» S'agit-il d'une technique d'enquête acceptable? Est-ce normal ou répréhensible?

M. Ward Elcock: Je ne sais pas exactement ce qu'on leur a demandé. C'est une allégation faite par des personnes au sujet de ce qui leur a été demandé. Il faudrait que je dispose de plus de renseignements avant de porter un jugement à cet égard.

M. John McKay: Cependant, la politique, les directives données aux enquêteurs permettent-elles de faire ce genre d'offre à ceux auxquels on demande de coopérer avec le SCRS?

M. Ward Elcock: Ce genre d'offre?

M. John McKay: De les aider à obtenir le statut d'immigrant.

M. Ward Elcock: J'ignore ce qui a eu lieu au juste durant cet entretien, mais manifestement, les signataires de la lettre prenaient part au processus d'immigration normal si... J'ignore si les questions particulières qu'on dit avoir été posées l'ont été, mais, en fait, si les personnes ne fournissent pas de renseignements, si elles ne coopèrent pas au sujet d'elles-mêmes et de leurs associations avec d'autres, effectivement, elles constateront peut-être que le processus ne va pas plus loin parce que nous n'arrivons pas...

M. John McKay: Votre ministère a-t-il donné des instructions à ses enquêteurs concernant ce genre de situation?

M. Ward Elcock: Oui. De toute évidence, nos enquêteurs ne peuvent pas promettre de les aider à obtenir le statut d'immigrant en retour de certaines informations. De plus, les enquêteurs comprennent bien que toute réponse qui leur est fournie est faite de plein gré.

La présidente: Je vous demanderai simplement...

M. John McKay: Allez-vous m'interrompre?

La présidente: Je vais vous interrompre pour céder la parole au député dont c'est le tour de poser des questions.

N'y a-t-il pas une transcription ou un enregistrement électronique de ce qui se dit lors de ces entrevues?

M. Ward Elcock: Il en existe effectivement. Il existe une transcription de l'entrevue.

La présidente: Par conséquent, si la question est examinée, il y aura une transcription de l'entrevue.

M. Ward Elcock: Tous les renseignements réunis dans le rapport de l'enquêteur seraient certes à la disposition du Comité de surveillance des activités du renseignement de sécurité.

M. John McKay: Pour faire suite à ce qui vient de se dire, car je n'entends pas gaspiller du temps, je serais extrêmement curieux de voir les lignes directrices et de les comparer à l'éventuelle transcription des entrevues. Car, si ces accusations comportent une once de vérité, je crois que notre comité a tout intérêt à se pencher sur la question.

La présidente: D'accord!

Monsieur Hilstrom.

M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Réf.): Tout d'abord, combien de membres de votre organisme venus de la GRC sont encore membres de cet organisme?

Cette question a-t-elle été déjà posée, madame la présidente?

M. Ward Elcock: Oui. Je crois qu'elle a été posée par un bloquiste. Le pourcentage varie entre 30 et 40 p. 100 des effectifs.

M. Howard Hilstrom: Entre 30 et 40 p. 100.

M. Ward Elcock: Oui. Soit qu'ils font encore partie de la GRC ou qu'ils en sont d'ex-membres.

• 1035

M. Howard Hilstrom: Quand vous allez là-bas, dans un pays déchiré par la guerre, une guerre civile peut-être, dressez-vous une liste des principaux protagonistes qui commettent peut-être des atrocités, qui commettent peut-être des crimes de guerre? Assurez- vous une liaison—je ne demande pas si vous vous promenez pour interroger les gens, mais assurez-vous une liaison—avec d'autres services de renseignement de sécurité à ce sujet?

M. Ward Elcock: Si nous recevons des renseignements de cette nature—vous parlez à nouveau de criminels de guerre ou de crimes de guerre—, nous les transmettons de toute évidence aux autorités compétentes. Toutefois, dans ce cas-ci, c'est essentiellement la GRC, pas nous, qui le fait.

M. Howard Hilstrom: Recueillez-vous de pareilles données?

M. Ward Elcock: Ce n'est pas à nous de le faire. Il nous appartient de fournir des renseignements sur toutes ces questions aux autorités compétentes, soit à la GRC, dans le cas qui nous occupe.

M. Howard Hilstrom: Après la Seconde Guerre mondiale, beaucoup de criminels de guerre nazis ont trouvé refuge au Canada. Vous savez où sévissent les conflits dans le monde. Voici ma question précise: examinez-vous ces conflits et les principaux protagonistes en vue de dresser une liste de ces gens et de faire leur profil?

M. Ward Elcock: Non.

M. Howard Hilstrom: Vous ne dressez pas de pareilles listes. Donc, c'est uniquement par hasard, si un autre service de renseignement de sécurité vous dit que M. X a fait creuser des tranchées et qu'il a tué des gens, que vous transmettez peut-être ce renseignement. Cependant, vous ne chercheriez pas par vous-même à l'obtenir.

M. Ward Elcock: En un certain sens, vous sous-estimez nos sources d'information. Il arrive assez souvent que nous obtenions ce genre de renseignement, que nous transmettons aux autorités compétentes. Nous ne les transmettons pas peut-être, mais sûrement.

M. Howard Hilstrom: Vous refusez de répondre à ma question, soit de me dire si vous le faites activement. Je ne me donnerai donc pas la peine de la poser à nouveau, à moins que vous...

La présidente: Monsieur Hilstrom, je n'ai pas entendu M. Elcock dire qu'il refusait de répondre à quoi que ce soit.

M. Howard Hilstrom: Bon. D'accord!

La présidente: N'oublions pas, monsieur, que M. Elcock et les autres personnes qui se présentent devant le comité dans le cadre du processus d'examen du budget des dépenses sont des fonctionnaires. Soyons aussi justes à leur égard qu'ils essaient de l'être avec nous, vous voulez bien?

M. Howard Hilstrom: D'accord!

La présidente: Pourquoi ne posez-vous pas votre question autrement, pour voir si cela ne nous aiderait pas à mieux comprendre?

M. Howard Hilstrom: D'accord!

Est-il déjà arrivé que le SCRS, en posant des questions lors d'une réunion de liaison, arrive à dégager les noms des deux principaux généraux et des autres protagonistes des deux camps, s'il y a deux camps? Est-ce déjà arrivé?

M. Ward Elcock: Nous ne l'avons pas fait dans ce contexte précis. Quand nous nous arrêtons à ces questions, nous cherchons davantage à savoir si la guerre civile a des répercussions sur le Canada, sur le plan du terrorisme, et qui sont les personnes dont il faudrait s'inquiéter. Parfois, tout cela peut coïncider, mais nous ne le faisons pas dans le but particulier de connaître les criminels de guerre.

M. Howard Hilstrom: Je vous remercie.

J'ai une autre petite question concernant les activités ici au Canada. Dans le passé, nous avons certes été préoccupés par la GRC, craignant qu'elle ne fasse de l'espionnage ici au Canada. Depuis votre entrée en fonction en 1994, le SCRS a-t-il été consulté par un ministère, par un groupe ou par qui que ce soit au Canada durant la rédaction et l'adoption de la Loi sur les armes à feu? Le SCRS a-t-il été consulté à cet égard, oui ou non?

M. Ward Elcock: Non, pas que je sache.

M. Howard Hilstrom: D'accord! Le SCRS a-t-il déjà participé à une activité de concert avec un ministère concernant l'entrée au Canada d'armes du genre des fusils d'assaut destinées peut-être à des organismes terroristes? Vous a-t-on consultés à cet égard?

M. Ward Elcock: Dans la mesure où... Notre travail ne consiste pas tant à être consultés qu'à fournir des renseignements. Parfois, nous avons fort bien pu fournir des renseignements sur des sujets comme celui-là.

• 1040

M. Howard Hilstrom: Le fait est que vous seriez, selon moi, consultés également. Le Solliciteur général du Canada peut vous consulter et fournir des renseignements à d'autres composantes de l'appareil gouvernemental. Donc, vous n'avez pas été consultés?

M. Ward Elcock: Tout dépend ce que vous entendez par le mot «consultés».

M. Howard Hilstrom: Être priés de faire des recommandations, entre autres.

M. Ward Elcock: Notre rôle consiste simplement à fournir des renseignements au gouvernement. Nous ne fournissons pas des conseils concernant les questions législatives, en règle générale, à moins qu'elles ne relèvent carrément de notre mandat. Par contre, manifestement, si nous avons des renseignements sur des terroristes qui se trouvent au Canada, sur leurs agissements, sur ce qu'ils importent ou exportent peut-être, nous les transmettons au gouvernement du Canada. Nous manquerions à notre devoir si nous ne le faisions pas.

M. Howard Hilstrom: Je faisais allusion à une activité plus proactive. Je me demandais si l'on vous avait priés d'évaluer le problème de l'entrée au Canada des armes à feu à la frontière des États-Unis. Bien sûr, en Ontario, on a signalé l'entrée d'armes du genre fusil d'assaut. Toutefois, le SCRS ne participe pas à ce travail?

M. Ward Elcock: Dans la mesure où nous avons des renseignements à ce sujet, nous les transmettons périodiquement au gouvernement du Canada. Je n'ai pas besoin qu'on me demande de le faire pour le faire.

La présidente: Monsieur Reynolds, aviez-vous une question à poser?

M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, Réf.): Oui.

La présidente: Vous avez la parole.

M. John Reynolds: Ma question fait suite à ce dont parlait M. McKay, soit que, d'après le solliciteur général, le SCRS n'essaye pas, durant le filtrage des demandes de statut de réfugié, de recruter certaines factions qui espionneraient les autres pour son compte. Seriez-vous d'accord avec cette affirmation?

M. Ward Elcock: Je n'ai pas vu la déclaration et, dans le contexte des entrevues avec les éventuels immigrants, notre but n'est pas de recruter qui que ce soit. L'entrevue a pour objet de simplement interroger celui qui demande à immigrer pour voir s'il est admissible au Canada. Les deux processus sont distincts.

M. John Reynolds: Voilà donc à quoi servent les entrevues. Êtes-vous en train de nous dire qu'aucun de vos employés n'a jamais essayé de recruter qui que ce soit comme espion pendant l'entrevue servant à évaluer la demande d'immigration?

M. Ward Elcock: Dans le cadre du processus d'immigration, non. Vous parlez d'un autre processus particulier et distinct. Si nous souhaitons recruter quelqu'un, nous procédons avec beaucoup plus de soin. Nous ne le faisons pas dans le cadre d'une entrevue aux fins d'immigration.

M. John Reynolds: Vous me dites donc que, si vous vouliez le faire, vous pourriez les rencontrer peut-être avant l'entrevue.

M. Ward Elcock: Plaît-il?

M. John Reynolds: Vous dites que vous recrutez peut-être des personnes qui ont demandé le statut de réfugié, mais que vous ne le faites pas durant l'entrevue.

M. Ward Elcock: Je refuse de dire quoi que ce soit au sujet des personnes que nous recrutons...

M. John Reynolds: Je ne vous demande pas de le faire. Je vous pose simplement des questions au sujet du processus.

M. Ward Elcock: ... ou la façon dont nous nous y prenons, mais je puis vous assurer que la question du filtrage et des entrevues aux fins d'immigration est une question tout à fait distincte. Nous gérons avec grand soin la circulation des renseignements entre ce processus et notre procédure d'enquête.

M. John Reynolds: Vous affirmez donc ne l'avoir jamais fait durant une entrevue de filtrage aux fins d'immigration, mais qu'il est possible que cela se produise à d'autres moments.

M. Ward Elcock: Tout ce que je dis, c'est que nous ne le faisons pas dans le cadre des entrevues avec des candidats à l'immigration. Ce processus est tout à fait distinct de l'autre.

M. John Reynolds: Mais vous le faites à d'autres moments?

M. Ward Elcock: Je refuse de dire quoi que ce soit au sujet de la nature de nos opérations d'enquête ou de la façon dont nous procédons.

M. John Reynolds: Recrutons-nous des personnes qui ont le statut de réfugié?

M. Ward Elcock: Je préfère ne rien dire.

M. John Reynolds: Je crois savoir qu'un rapport secret du gouvernement prouve que le SCRS a fait justement cela et je crois aussi savoir que le solliciteur général a déclaré qu'il avait ordonné au SCRS de modifier sa procédure de filtrage pour faire en sorte de préciser aux éventuels informateurs qu'il ne peut les aider à obtenir le statut d'immigrant. Des mesures officielles ont- elles été prises à un certain moment pour obliger les enquêteurs à le préciser?

M. Ward Elcock: Cela a toujours été la règle. En fait, nos employés comprennent bien qu'ils ne peuvent pas offrir de l'aide aux immigrants en échange de certains renseignements. De plus, tout ce que le candidat à l'immigration donne à l'agent du SCRS comme information est fourni à titre strictement volontaire.

M. John Reynolds: Pourquoi la procédure de filtrage a-t-elle été modifiée?

M. Ward Elcock: Elle n'a pas été modifiée. Nous suivons cette procédure depuis fort longtemps.

M. John Reynolds: Selon vous, la procédure de filtrage n'a jamais été modifiée depuis la création du SCRS?

M. Ward Elcock: Je ne dis pas qu'elle n'a jamais été modifiée. Vous laissiez entendre, dans votre observation, qu'elle avait été modifiée il n'y a pas longtemps afin d'éviter que les gens du SCRS n'offrent d'aider les candidats à l'immigration durant les entrevues. Nous n'offrons pas aux immigrants ou aux réfugiés de leur faciliter l'obtention du statut d'immigrant, et c'est la politique depuis fort longtemps.

M. John Reynolds: La procédure a-t-elle été modifiée depuis la création du SCRS?

M. Ward Elcock: À pied levé, je ne pourrais vous le dire. Cependant, la partie dont je vous parle maintenant est une composante de longue date de la politique en matière d'immigration. Nos énoncés de politique sont longs, détaillés et compliqués. Je ne puis donc pas dire qu'il n'y a jamais eu de changement. La partie de la politique dont il est question est en vigueur depuis fort longtemps déjà.

• 1045

M. John Reynolds: Pourtant, le solliciteur général a dit qu'il avait obligé le SCRS à modifier sa procédure de filtrage de manière à préciser à d'éventuels informateurs qu'il ne peut pas les aider à obtenir le statut d'immigrant. Vous dites que cela s'est toujours fait ainsi.

M. Ward Elcock: Il a certes toujours été...

M. John Reynolds: Pourquoi le solliciteur général estimait-il nécessaire de modifier la procédure?

M. Ward Elcock: Madame la présidente, il faisait peut-être allusion au fait qu'il nous a précisé à nouveau que c'était ainsi qu'il fallait procéder, qu'il fallait faire en sorte, dans le cas qui nous occupe notamment, qu'il en soit ainsi et que les personnes mentionnées tout à l'heure par l'autre député déposeraient une plainte qu'étudiera le SCRS afin de voir s'il y a eu violation de la politique.

M. John Reynolds: Puisque, à pied levé, vous ne pouvez pas nous le dire, serait-il possible de vérifier les dossiers et de nous dire si la procédure a été modifiée depuis la création du SCRS?

M. Ward Elcock: Je le ferai avec plaisir, madame la présidente.

M. John Reynolds: Voilà qui me convient parfaitement. Je vous remercie.

La présidente: J'avais quelques questions à poser, mais le temps file. Je céderai la parole à Mme Finestone, puis à M. McKay. Avez-vous d'autres questions?

M. John McKay: J'ai beaucoup d'autres questions, mais cela peut attendre. Nous les poserons un autre jour.

La présidente: Madame Finestone.

Mme Sheila Finestone: Monsieur Elcock, selon le rapport de performance du solliciteur général, page 19, il a pris part à des pourparlers interministériels visant à rédiger des lois et des procédures plus efficaces pour régler le problème de la fourniture et de la réception non autorisées d'information concernant la sécurité nationale. Savez-vous si le SCRS a pris part à ces pourparlers?

M. Ward Elcock: Oui, madame la présidente.

Mme Sheila Finestone: Savez-vous si d'autres organismes et ministères y prenaient part?

M. Ward Elcock: Le ministère de la Justice et certains autres étaient représentés.

Mme Sheila Finestone: Vous sentiriez-vous à l'aise de me dire si la Loi sur les secrets officiels faisait partie de ces pourparlers?

M. Ward Elcock: Vous ne posez pas la question à la bonne personne, madame la présidente. Cette question s'adresse davantage au gouvernement et aux ministres.

La présidente: Si cela peut vous être utile, je me souviens avoir obtenu une version modifiée de la Loi sur les secrets officiels.

Mme Sheila Finestone: C'est exactement ce que je voulais savoir. Savez-vous si on est en train de préparer un projet de loi remplaçant la loi actuelle?

M. Ward Elcock: Il y a certes longtemps que les questions liées à la Loi sur les secrets officiels n'ont pas été examinées, et il serait bien d'en avoir une nouvelle version.

Mme Sheila Finestone: Vous feriez bon accueil à une nouvelle loi?

La présidente: Le SCRS la réclame depuis longtemps.

M. Ward Elcock: Oui. Je crois effectivement que nous avons besoin d'une nouvelle loi.

Mme Sheila Finestone: Avez-vous une liste des changements que vous aimeriez y voir? Permettez-moi de reformuler ma question. Avez-vous communiqué à notre comité la liste des changements que vous jugeriez constructifs et utiles?

M. Ward Elcock: Non, la question n'a jamais été abordée, madame la présidente.

Mme Sheila Finestone: Si nous vous invitions à revenir nous parler de cette liste, cela vous aiderait-il?

M. Ward Elcock: Une pareille liste entre dans la catégorie des conseils fournis au ministre, madame la présidente. Il ne conviendrait donc pas que je parle à d'autres des conseils que j'ai essentiellement prodigués à mon ministre.

Mme Sheila Finestone: Je crois que je devrai compter sur mon collègue Derek Lee pour lui demander...

Des voix: Bravo!

Mme Sheila Finestone: S'il juge que ça l'est, nous dresserons une liste de questions pertinentes.

La présidente: Il faudrait que nous nous organisions pour pouvoir prendre connaissance des observations de Derek à la fin des...

M. Derek Lee: Je vais laisser passer, madame la présidente.

La présidente: Pour ce que cela vaut, j'ai entendu dire que l'on nous enverrait quelque chose au sujet de la Loi sur les secrets officiels et que M. Gray serait en charge du dossier.

Mme Sheila Finestone: Qu'en est-il de la Loi sur le SCRS?

M. Ward Elcock: Je l'ignore.

Mme Sheila Finestone: Vous ne savez pas non plus au sujet de la Loi sur le SCRS?

M. Ward Elcock: Je ne suis au courant de rien, madame la présidente.

Mme Sheila Finestone: Vous voulez dire que vous n'êtes pas libre d'en parler?

M. Ward Elcock: Je ne suis au courant de rien.

Mme Sheila Finestone: Fort bien, je vous remercie beaucoup.

La présidente: Il peut vous le dire, mais s'il le fait, il faudra vous faire passer par la déchiqueteuse.

Mme Sheila Finestone: Ce ne serait pas une mauvaise idée, aujourd'hui.

La présidente: Y a-t-il d'autres questions?

Monsieur Elcock, je vous remercie. Vous nous avez été très utile.

La séance est levée.