Passer au contenu
;

AAND Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain

STANDING COMMITTEE ON ABORIGINAL AFFAIRS AND NORTHERN DEVELOPMENT

COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES AUTOCHTONES ET DU DÉVELOPPEMENT DU GRAND NORD

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 16 novembre 1999

• 1239

[Traduction]

La présidente (Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.)): Bonjour. Je suis députée de London (Ontario) et présidente de ce comité. Il me fait grand plaisir d'être ici avec vous.

Avant de commencer la séance de cet après-midi, étant donné que certains d'entre vous n'étaient pas ici ce matin, je vais demander rapidement aux députés de se présenter. D'autres vont se joindre à nous sous peu.

J'invite tout membre du public qui souhaite présenter un mémoire à le remettre au greffier—nous avons des aides de bureau dans le couloir—ou à l'envoyer au greffier du comité à Ottawa. Mais toute personne est libre de le faire, qu'elle soit présente ici ou non aujourd'hui comme témoin.

• 1240

Si vous avez un téléphone cellulaire, veuillez le laisser à l'extérieur de cette pièce, afin qu'il n'y ait pas d'interruptions durant les témoignages.

Nous pourrions commencer avec M. Scott comme introduction.

M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Je m'appelle Mike Scott et suis député de Skeena.

M. Jim Gouk (Kootenay—Okanagan, Réf.): Je m'appelle Jim Gouk, député de Kootenay—Okanagan, dans le sud-est de la Colombie- Britannique.

Mme Louise Hardy (Yukon, NPD): Je m'appelle Louise Hardy, députée du Yukon.

M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Je m'appelle Gerald Keddy, député conservateur de South Shore, Nouvelle-Écosse. Je suis le porte-parole pour les Affaires indiennes et le Nord canadien, et pour les Ressources naturelles.

M. John O'Reilly (Haliburton—Victoria—Brock, Lib.): Je m'appelle John O'Reilly, de Haliburton—Victoria—Brock, dans le centre de l'Ontario, environ 80 milles au nord de Toronto. Nous non plus n'aimons pas les Maple Leafs de Toronto.

M. Raymond Bonin (Nickel Belt, Lib.): Je m'appelle Ray Bonin, député de Nickel Belt, qui se trouve dans le nord de l'Ontario.

M. John Finlay (Oxford, Lib.): Je m'appelle John Finlay, député du comté d'Oxford, dans le sud-ouest de l'Ontario, et je suis vice-président de ce comité.

Mme Nancy Karetak-Lindell (Nunavut, Lib.): Je m'appelle Nancy Karetak-Lindell, députée du Nunavut, qui est le nouveau territoire de l'est de l'Arctique.

M. David Iftody (Provencher, Lib.): Je m'appelle David Iftody, député de Provencher, au Manitoba. Je suis également secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien.

[Français]

M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Je m'appelle Claude Bachand. Je suis député de Saint-Jean et critique du Bloc québécois aux Affaires indiennes. Saint-Jean est à 25 milles au sud de Montréal.

[Traduction]

Vous allez avoir besoin de votre dispositif de traduction si vous voulez m'écouter cet après-midi.

[Français]

M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Bonjour. Je m'appelle Daniel Turp. Je suis député de Beauharnois—Salaberry à la Chambre des communes et porte-parole du Bloc québécois pour les Affaires intergouvernementales.

[Traduction]

La présidente: Merci. C'est le projet de loi C-9 qui est à l'ordre du jour, une loi pour la mise en oeuvre de l'Accord définitif nishga. Nos témoins font partie de la Nation gitanyow. Plusieurs chefs et orateurs sont ici aujourd'hui. Nous vous souhaitons la bienvenue à tous, et nous vous sommes reconnaissants d'être présents pour nous aider à comprendre.

Monsieur Williams, veuillez commencer.

Le chef Glen Williams (négociateur en chef, Nation gitanyow): Merci beaucoup, et merci pour l'occasion de pouvoir me présenter devant ce comité. Avant de commencer, je voudrais présenter les membres qui m'accompagnent cet après-midi.

Robert Good est l'un de nos chefs héréditaires du clan de la Grenouille. Son nom de chef est Sindihl. Philip Daniels est un autre chef héréditaire. Il est l'un des principaux chefs du clan du Loup et son nom est Gwass Hlaam. Nous vous indiquerons comment s'écrivent ces noms plus tard, si vous voulez.

Timothy Martin est également membre de la maison de WiiLitsxw. Greg Rush est sous-chef dans la maison de WiiLitsxw.

Notre conseiller juridique est Peter Grant. Debbie Good est membre de l'une de nos maisons—GamLaxyeltw.

Ken Russell est le chef Hizimskue du clan du Loup à Gitanyow.

Nous sommes donc les chefs héréditaires gitanyows. Cet après- midi, nous voudrions vous donner un bref aperçu de la vision du monde des Gitanyows. Nous allons vous parler du peuple des Gitanyows et vous donner des renseignements généraux sur les Gitanyows. Nous allons consacrer au moins dix à quinze minutes à cela.

Par la suite, il y aura des observations préliminaires de Philip Daniels, qui est le chef principal ici, et de Robert Good et Greg Rush. Nous allons ensuite passer en revue le mémoire écrit que nous avons soumis au comité. Ce mémoire est intitulé Submission to the House of Commons Standing Committee from the Gitanyow Hereditary Chiefs. Il s'agit d'un document d'environ vingt pages. Il comprend également quelques annexes et de la correspondance. Nous avons aussi une analyse de l'Accord définitif des Nishgas.

• 1245

Une fois que nous aurons terminé cela, nous reviendrons sur des recommandations précises que nous voudrions vous soumettre cet après-midi au sujet des modifications que nous estimons nécessaires dans le cas du projet de loi C-9.

J'aimerais maintenant passer à un aperçu. Un de nos chefs va le présenter. Darlene Vegh est membre de la maison de Wilksiwitxw.

Mme Darlene Vegh (Global Information System, Nation gitanyow): Merci Glen. Mon nom anglais est Darlene Vegh. Mon nom gitxsan est Haajoan. Je voudrais vous donner un aperçu de la vision du monde des Gitanyows—de ce à quoi ressemble notre société et comment nous voyons le monde dans notre culture.

Cette carte montre les territoires gitxsans dans le Nord, dans la partie supérieure du bassin hydrographique de la Nass. Les territoires des Gitanyows se trouvent dans les parties médiane et supérieure du bassin hydrographique de la Nass, tandis que les terres nishgas sont dans la partie inférieure de ce bassin.

Cette forme polygonale montre la carte Calder de 1969. Je suis certaine que la plupart d'entre vous êtes courant de cela. Dans notre vision du monde, c'est ça le territoire des Nishgas. Cela ne fait pas problème pour nous. La photo montre le chef Gwass Hlaam et le chef WiiLitsxw en 1910. Nos documents d'archives couvrent une période de 120 ans, mais notre histoire orale existe depuis 10 000 ans.

Je veux d'abord vous parler de contenu et de contexte. J'entends par là la culture, le biculturalisme ainsi que les réalités sociales, politiques et économiques des Gitanyows, et ensuite de la question de savoir quelle culture sert de cadre au débat. Dans ce cas, nous avons affaire aux Nishgas, à la Colombie- Britannique et au Canada—avec l'Accord définitif nishga.

Pour interagir avec nous, vous devez avoir un certain contexte concernant nos connaissances, nos relations, nos rôles et nos responsabilités sur nos terres. Ces facteurs vont déterminer le point de référence nécessaire pour comprendre les conséquences qu'aura l'Accord définitif nishga pour la Nation gitxsan.

Il y a une petite carte en médaillon au bas. Encore une fois, c'est ça notre vision du monde et où cela se situe dans la province de la Colombie-Britannique. Debbie va vous renseigner un peu sur les gens.

Mme Debbie Good (coordonnatrice de l'étude sur les usages traditionnels, Nation gitanyow): Au sein de la Nation gitanyow, nous parlons la langue gitxsan. Nous sommes en partie liés aux Gitxsans, bien que nous soyons une nation indépendante. Notre société est gouvernée par la grand-mère, la mère ou la femme présente dans la maison, qui en assure la cohésion. Nous avons huit wilps, ou maisons, qui gouvernent le territoire, comme vous pouvez le voir sur la carte.

Les huit maisons sont indiquées. Gwass Hlaam possède celle- là—Gwanew, Comlayelt, Malie, Heislz, Wilksiwitxw, Biosh et Laurhan. Nous avons donc huit maisons, comme je disais, mais dans notre société, nous avons des liens avec notre Wilksiwitxw, qui est le côté de notre père. Cela nous relie non seulement aux Gitxsans mais également à la Nation nishga.

Notre société est divisée en pdek, c'est-à-dire en clans. À Gitanyow, nous avons les Lax Gibuus et les Ganedas, qui sont deux clans dirigeants. Nous avons des liens biologiques avec les Gisga'asts et les Lax Skiiks. Il y a aussi des Lax Skiiks et des Gisga'asts qui vivent à Gitanyow, et qui y sont par mariage.

• 1250

Darlene.

Mme Darlene Vegh: Comme vient de le mentionner Debbie, il y a huit territoires, indiqués par une série de figures rouges sur la carte accrochée au mur. L'ensemble de figures vertes indique les territoires des Gitxsans.

Nous sommes une culture riveraine. Sur l'image satellite suspendue là-bas, vous pouvez voir les rivières. La plupart des villages sont situés le long de rivières. La plupart des ressources que nous recueillons proviennent des rivières et du réseau hydrographique.

Il existe un certain nombre de tributaires de la Nass qui jouent un rôle très important dans notre histoire et dans notre culture, le plus au nord étant—en anglais—le Surveyors Creek. Il s'agit de la frontière la plus septentrionale entre les Gitanyows et les Gitxsans; c'est là que se trouve cette rivière. Il y a la rivière Bell Irving qui se jette dans la Nass, qui représente également une frontière entre les Gitxsans et les Gitanyows. Nous avons la rivière Kinskuch, qui est la frontière entre les Gitanyows et la Nass. Nous avons de vieux villages le long du réseau hydrographique de la Nass et dans la région du lac Meziadin.

Il arrive que des gens nous posent des questions sur le chevauchement. J'ai essayé de l'expliquer à des non-Autochtones, mais quand vous voyez ces lignes sur une carte et un trait continu qui désigne notre frontière, vous devez tenir compte du fait que cette frontière est une membrane perméable; il s'agit de liens biologiques avec nos voisins. Nous n'avons jamais eu de problèmes de chevauchement jusqu'à ce que le gouvernement nous dise qu'il y en avait un. Bien qu'il y ait eu des guerres et que des territoires aient changé de main dans le passé—et je vais revenir sur ce point un peu plus loin—nous avons toujours reconnu les liens biologiques que nous avons avec nos voisins.

Je vais maintenant parler un peu de leur terres, de leurs territoires anciens. La Nation gitanyow y vit depuis des millénaires. Cette nation est fondée sur le lien avec le bassin hydrographique; chacun des territoires des wilps forme des entités distinctes du réseau hydrographique, et c'est la même chose dans le cas des Gitxsans. Les frontières sont généralement des lignes de crête ou des ruisseaux et des rivières. Il s'agit des entités fondamentales, politiques et économiques des wilps; c'est la façon dont fonctionne la société. C'est la responsabilité de chaque wilp. Au sein d'un wilp, l'autorité est exercée par le chef, par les chefs adjoints et par d'autres personnes au sein de la maison.

Je voudrais expliquer quelque chose au sujet des wilps. Imaginez le wilp comme étant une boîte, c'est comme une société qui existe pour toujours, et au sommet, il y a le nom du chef et les noms des chefs adjoints, et les noms d'autres personnes de la maison inscrits sur le côté. Ces noms ne sont pas attribués à des personnes, ce sont les personnes qui sont attribuées aux noms. Nous traversons le temps, les millénaires, grâce à ces noms. Les noms restent les mêmes pour toujours. C'est comme cela qu'on peut s'imaginer un wilp; c'est semblable à une société.

Le territoire et la famille sont inséparables. Nos totems, nos histoires, nos mythes, nos chansons, tout ce qui se déroule au cours de la fête, tout a trait au territoire. Il contient les ressources provenant de l'eau, du sol, de la faune, des pêches, des forêts, que nous utilisons depuis des millénaires. Ces ressources sont la base des micro-économies et des macro-économies. Nous faisons du commerce avec d'autres nations, nos voisins.

La plupart des non-Autochtones les appellent les «sentiers de troc». En fait, il y a une infrastructure culturelle. J'ai fait beaucoup de cartographie dans le nord-ouest de la Colombie- Britannique et j'ai découvert que la plupart des routes de cette province sont construites le long de pistes indiennes, nos pistes, notre infrastructure.

Nous avons défendu nos territoires avant le contact avec les Blancs et nous les défendons après le contact. Nous avons acquis des terres.

Voici quelques-uns des faits historiques concernant l'acquisition de terres dans la partie supérieure du bassin hydrographique de la Nass. Nous avons eu des guerres avec les Tsetsauts; aujourd'hui, on les appelle Tahltans. Ce territoire-là a été cédé aux Gitanyows pour compenser une mort. Du sang a été versé sur ce territoire. C'est la compensation que les Tahltans ont donné aux Gitanyows pour ces meurtres.

• 1255

Debbie va vous expliquer un peu comment est gouverné un wilp.

Mme Debbie Good: Le dax gyet ou pouvoir sur le territoire est détenu par chacune des maisons, les huit maisons. Le wilp est notre siège du gouvernement. Chaque chef gouverne son propre territoire, mais nos lois sont établies conformément à ce qui a été décidé par tous les huit chefs et leurs sous-chefs. Notre activité gouvernementale se déroule dans le cadre des fêtes. C'est dans ce cadre qu'ont lieu tous les débats.

Concernant les pouvoirs politiques de nos chefs, comme on l'a mentionné au sujet du chevauchement, nos lois relatives à la violation du droit de propriété comptent parmi les lois qui ne peuvent être enfreintes. Un chef acquiert son pouvoir lorsqu'il accède au siège supérieur au sein de la maison de fête. Chacun des chefs, dans chacun des territoires, aura donné son accord à toute décision prise par d'autres chefs. Dans notre système, si un chef viole le droit de propriété relatif au territoire d'un autre chef, les autres chefs ont le pouvoir de traiter cette question.

Parfois, le contrevenant ne se fait pas seulement taper sur les doigts, si on peut dire. Il y a quelque années, un chef a été dépouillé de son titre et des ses droits, et on lui a enlevé son territoire pour le donner à quelqu'un d'autre. Telle est la rigueur de nos lois. Les wilps doivent respecter toutes les lois de la Nation gitanyow.

Il existe divers types de débats qui se déroulent dans la maison de fête. Vous avez entendu Glen présenter Philip Daniels. Lui et son frère viennent tout juste d'être nommés chef au sein de la maison de Gwass Hlaam. Ce genre de fête est une tradition permanente. Elle est toujours vivante. Elle n'a jamais disparu.

Un chef, après avoir acquis un nom, organise une fête dite de la pierre tombale, ou l'élévation d'un mât totémique. Encore une fois, cela indique la fortune qui est répartie entre nos propres chefs et entre les chefs gitxsans qui participent à une fête. Ce chef a acquis le droit de gouverner le territoire en question, d'être celui qui protège ce territoire.

Il s'agit là d'un aspect que je voudrais souligner encore une fois: la fête est un lieu de débat, c'est permanent, et les lois des Gitanyows sont toujours vivantes et se portent bien.

Merci.

• 1300

Mme Darlene Vegh: Je voudrais résumer pour vous les fonctions de fête comme élément de gouvernement.

Lorsque nous faisons une fête, supposons les Lax Gibuus font une fête, et supposons qu'il s'agit d'une fête mortuaire, il y a alors le transfert d'un nom. Des personnes sont désignées pour porter un nom. Ce nom s'accompagne de droits territoriaux.

Je voudrais expliquer brièvement pourquoi nos histoires orales sont si fortes. C'est en raison du système de fêtes.

Des collectivités entières, des nations entières prennent part à une fête. Tous les wilps contribuent à la fête, et la raison pour laquelle on donne des choses est que les témoins sont payés pour se souvenir des affaires qui ont été traitées au cours d'une fête. C'est pourquoi les histoires orales étaient si fortes, et c'est pourquoi nous n'avions pas besoin d'un langage écrit jusqu'au moment du contact avec les Blancs.

Cette image montre ce que les Gitanyows considèrent comme un acte d'agression de la part des Nishgas, de la Colombie-Britannique et du Canada. La ligne noire continue indique la revendication de 1999 des Nishgas pour l'accord définitif, et ce que je vous ai montré précédemment, c'était l'affaire Calder. C'est cela le véritable territoire des Gitanyows dans la vision du monde des Gitanyows, et dans la vision du monde des Gitxsans, et dans la vision du monde des Tahltans. C'est la raison pour laquelle nous considérons cela comme un acte d'agression, parce que cela comporte l'autorité et le droit de propriété sur les territoires des Gitxsans et sur plus de 84 p. 100 du territoire des Gitanyows.

La prochaine carte montre également l'affaire Calder, la revendication des Nishgas. Elle montre aussi la revendication des Gitanyows. Vous voyez des lignes rouges et des lignes bleues. Cela a été fait par un chef gitanyow en 1926. Il a marqué en bleu tous les endroits que les Nishgas ont revendiqués, et marqué en rouge tous les endroits revendiqués par les Gitanyows. Vous pouvez voir clairement où se situe la frontière.

Notre revendication territoriale n'a jamais changé. La seule fois où cette revendication a changé, c'est lorsqu'on a présenté l'Accord définitif nishga.

Ces noms de lieux existent depuis 10 000 ans. Nous connaissons nos frontières. C'est pourquoi nous appelons cela un acte d'agression. C'est très sérieux pour nous.

Je vais souligner et résumer certains des aspects et des répercussions qu'aura l'Accord définitif nishga pour les Gitanyows.

Tout d'abord, je veux faire remarquer que notre titre est fondé sur l'histoire de notre peuple, sur notre système juridique et sur notre lien avec la terre. L'Accord définitif nishga est une violation suprême des ayookw des Gitanyows et des Gitxsans, c'est- à-dire de nos lois. L'Accord définitif nishga va nous obliger à défendre notre terre.

Il y a une carte sur laquelle de petites étoiles montrent où sont situés ces parcelles de terre en fief simple, et que vous pourrez consulter plus tard.

L'autre aspect est que 84 p. 100 de ce territoire sera couvert par un régime de gestion dirigé par les Nishgas et par le gouvernement de la Colombie-Britannique. Ce sont les ressources halieutiques qui font problème ici. Il y a toute une série d'aspects qui vont entrer en conflit avec notre système social, notre culture.

Si nous sommes obligés de nous défendre, il y a une partie de l'accord définitif en vertu de laquelle on peut invoquer le Code criminel contre nous si nous essayons de défendre notre terre.

Nous estimons que l'Accord définitif nishga est une atteinte à notre droit à une patrie.

• 1305

Comme je l'ai mentionné précédemment, les documents d'archives couvrent une période de 120 ans, mais notre histoire orale couvre des millénaires. Les Gitanyows ont mené une campagne ininterrompue pour protéger notre territoire, notre autorité et notre compétence territoriale. Cette campagne est parfois agressive et toujours tenace. C'est une lutte qui se déroule sur les terres, devant les tribunaux, dans des salles de conseils d'administration et dans des bureaux gouvernementaux. Je veux simplement vous dire que nous n'allons pas nous effacer et que nous n'allons pas arrêter le combat pour nos terres.

Merci beaucoup.

Le chef Glen Williams: Maintenant, c'est au tour de notre chef principal de la collectivité, Gwass Hlaam Philip Daniels, qui va formuler quelques observations préliminaires, suivi de Robert Good et de Greg Rush.

Le chef Philip Daniels (chef héréditaire, Nation gitanyow):

[Le témoin s'exprime en gitxsan]

Je m'appelle Gwass Hlaam. Au sein de l'Église anglicane, on m'a baptisé George Philip Daniels. Avant de commencer, je voudrais remercier la Nation wet'suwet'en d'avoir permis aux Gitanyows de marcher sur leur territoire.

[Le témoin s'exprime en gitxsan]

Je remercie la Nation gitxsan.

Merci, madame la présidente.

Honorables membres, que va accomplir le comité permanent? Est- ce qu'on nous emmène dans un autre cul-de-sac pour donner l'impression que le gouvernement a à coeur le sort des Gitanyows et des Gitxsans, pour gagner du temps et laisser croire aux gens qu'Ottawa prête attention et écoute? Est-ce que ce comité permanent n'est qu'un autre écran de fumée pour museler l'opposition? Les Gitanyows ne vont pas se laisser faire. Nous avons des options et nous allons protéger ce qui nous appartient. Notre histoire en est témoin. Nous sommes toujours là. Nous avons toujours notre histoire, notre langue, notre culture, et nos lois pour ceux qui violent le droit de propriété.

Mon oncle, le regretté Gwaas Hlaam, avait déjà averti le ministère des Forêts. Ils savent que les chefs vont utiliser nos lois, parce que nous n'avons jamais cédé nos terres à un gouvernement étranger. Il n'y a jamais eu d'étrangers qui nous ont combattus et qui ont gagné la bataille pour les terres des Gitanyows. Aucun document n'a jamais été signé pour renoncer à nos terres et à nos droits en tant qu'Autochtones. Si Ottawa et ses dirigeants devaient céder officiellement des terres des Gitanyows, ils vont devoir accepter les conséquences.

Il suffit de jeter un coup d'oeil sur les problèmes que connaît l'Europe, les problèmes de la Grande-Bretagne avec les gens de l'Irlande, les problèmes que connaît la Russie avec ses voisins, les récents conflits au Timor oriental, l'invasion du Tibet par la Chine, l'Inde et ses voisins, le coût élevé de la guerre du Vietnam, et aussi, près de nous, les problèmes qu'il y a en Amérique du Sud. Vous connaissez tous les Mohawks et ce qu'ils ont été prêts à faire pour protéger ce qui leur appartient.

Un de mes frères de la maison de WiiLitsxw—son nom est Biiyofxw—a déjà été mis en joue pendant qu'il se trouvait sur le territoire. Les gens qui ont fait ça sont nos voisins. Biiyofxw aura quelque chose à dire plus tard à ce sujet.

En terminant, vous, les membres du comité permanent, aurez l'occasion d'entendre en détail quelle sera l'incidence négative du projet de loi C-9 et de l'Accord définitif nishga sur les Gitanyows. Il faut apporter des modifications avant que le Canada ne ratifie entièrement l'accord et ne lui donne force légale.

• 1310

Vous allez entendre des présentations écrites, que nous allons mettre à votre disposition, ainsi que les modifications que nous proposons.

[Le témoin s'exprime en gitxsan]

Le chef Bob Good (Nation gitanyow): Madame la présidente, honorables députés, vous avez entendu les Gitanyows. Vous pouvez dire que la Nation gitanyow est très petite. J'ai écouté l'exposé des Gitxsans. Nous parlons de la terre. Nous parlons de la terre qui nous appartient.

Quand j'étais petit, ma grand-mère m'a dit qu'il n'y avait pas de Blancs ici. Maintenant ils s'en viennent nous voler notre terre. Ces gens sont arrivés, avec les missionnaires et le livre de Dieu, la sainte Bible. Il y a la loi émanant de Dieu là-dedans, dans ce livre.

C'est de là que vient mon instruction. Je n'ai jamais été à l'école, parce que mon père m'avait dit, «si tu vas à l'école, ces gens-là vont s'approprier notre terre. C'est ce qu'ils veulent. C'est pour cela qu'ils veulent que tu ailles à l'école.» Les missionnaires nous lisaient la Bible tous les dimanches, et voilà qu'il en sort la loi qui est censée être utilisée par toute l'humanité, non seulement pour nous, non seulement pour vous.

Le premier paragraphe dit—peut-être certains d'entre vous l'ont lu ou entendu à l'église:

    Honore ton père et ta mère: que tes jours puissent être longs sur cette terre que le SEIGNEUR ton Dieu t'a donnée.

Que s'est-il passé?

C'est notre terre, et nous n'allons pas y renoncer.

C'est très difficile pour moi. Je n'étais qu'un petit enfant de huit ans lorsque mon père a refusé l'accès à la terre aux arpenteurs. Le gouvernement avait fait appel à la GRC, et ces agents ont jeté mon grand-père en prison.

C'est une honte pour moi. Le gouvernement doit corriger ça, ses erreurs.

Merci, madame la présidente.

M. Greg Rush (Nation gitanyow): Ce que je voudrais faire à ce stade-ci est de parler un peu de l'acte d'agression dont a été victime mon neveu Timothy Martin.

• 1315

Le 5 décembre 1994, lui et ses deux frères étaient sur les terres et exerçaient leur droits, en tant qu'Autochtones, de traquer et de chasser du gibier pour nourrir leurs familles. Ils ont été stoppés par quatre hommes nishgas. J'ai leurs noms. Ces hommes ont menacé de les renverser. Ces hommes ont menacé de les tuer. Ils ont même fait des commentaire sur Glen Williams, qui est ici, et demandé pourquoi il faisait la vie dure aux Nishgas. À l'époque, ils n'avaient pas même une entente de principe, vous pouvez donc vous imaginer ce qui pourrait se passer sur le territoire une fois qu'ils auront signé l'accord définitif.

La GRC possède un dossier sur cet incident à New Aiyansh. L'avocat-conseil de la Couronne détient un dossier sur ce qui est arrivé à Timmy et à ses frères. Cet incident s'est produit à Cranberry, sur la route qui mène à New Aiyansh. Comme vous pouvez voir, où il y a le point rouge sur la carte, c'est là qu'a eu lieu l'incident. J'ai communiqué avec le bureau du Conseil tribal des Nishgas et parlé à Rod Robinson. Je lui ai dit ce qui s'était passé. Il m'a répondu que ce n'était pas la façon de faire des Nishgas d'empêcher une personne appartenant à une autre Première nation d'utiliser le territoire, et pourtant mon neveu a été arrêté.

N'eût été d'un grumier qui passait par là, et n'eût été d'un des hommes, qui s'appelle Eric Clayton, qui a grandi avec Timmy sur la côte à Prince Rupert... s'il n'avait pas connu Timmy, je ne parlerais que de sa mémoire aujourd'hui. Les noms de ces hommes nishgas qui ont fait ça à Timmy, à David, à Brian Martin et à leur ami, Chris Hill, qui est un Tsimshian, sont David Doolan, Rob Eli, Taylor Clayton et Eric Clayton. C'est Tim ici qui les a identifiés sur une photo, en janvier 1995. La GRC était montée à Gitanyow.

C'est ce que nous voudrions éviter. Ce n'est qu'un des incidents isolés qui se sont produits sur notre territoire. Cela a pris pas mal d'années à Tim avant de remettre les pieds dans le territoire; c'est dire à quel point il avait peur, et à quel point avaient peur ses frères.

C'est tout ce que j'ai à dire. Merci.

Le chef Glen Williams: Merci, Gregory, Philip et Robert.

Je ne suis pas sûr si les membres ont le mémoire écrit.

La présidente: Je vais vérifier. Il a été remis et c'était dans une seule langue. Parce que nous avons deux langues au Comité de travail, nous avons convenu hier que les mémoires allaient être traduits et distribués ultérieurement. Apparemment vous souhaitez que votre mémoire soit joint au complet, dans le format présenté. Il sera ajouté à la fin du procès-verbal.

Le chef Glen Williams: Merci beaucoup.

• 1320

Je voudrais simplement que vous le passiez en revue et le résumiez, et ce dont nous voulons parler. Vous avez entendu brièvement ce que nous sommes. Nous sommes les Gitanyows. Nous avons un territoire. Nous avons des lois autochtones, et nous sommes liés à un territoire. Nous avons une histoire orale qui le prouve.

Plus tôt ce matin, j'ai entendu mentionner un livret intitulé Tribal Boundaries in the Nass Watershed, que M. Scott a mentionné. C'est un livret très important qui parle de ce que sont les Gitxsans, les Gitanyows et les Nishgas. Il vous donne une bonne description historique des premiers explorateurs qui étaient présents dans le bassin hydrographique de la Nass au début des années 1830 et qui ils ont rencontré sur le territoire. Nous vous conseillons de le lire. Il confirme où se trouve le territoire des Nishgas et confirme également la présence des Gitxsans dans la partie supérieure du bassin hydrographique de la Nass.

Un autre document auquel je voudrais que vous vous reportiez a également été mentionné par les Gitxsans ce matin. Il s'agit d'un livret rédigé par B.C. Studies. Nous avons joint un chapitre de ce livret au mémoire que nous vous présentons; c'est l'annexe 6. Encore une fois, il s'agit d'un résumé sur les frontières tribales dans le bassin hydrographique de la Nass. Il est plus condensé et beaucoup plus facile à lire. Il traite des preuves concernant les Nishgas au début des années 1900, lorsqu'on a confirmé où se trouve la frontière. Il traite également du territoire des Gitanyows et des Gitxsans du Nord.

Il parle aussi de certains des experts qui ont participé, et non seulement dans le cas de l'affaire Calder de 1969. Il parle d'un professeur de l'Université de la Colombie-Britannique, Wilson Duff, qui a examiné cette affaire. Il était un témoin expert. Lorsqu'il a témoigné dans l'affaire Calder, il a confirmé ce que vous avez vu plut tôt sur la carte, concernant l'emplacement des frontières des Nishgas en 1969. M. Duff avait également témoigné qu'il n'était pas en mesure de prouver qu'il existait un droit ou un titre nishga, ou un document attestant un tel droit ou titre, au-delà de ce point.

Je voulais simplement mentionner cela. Je voulais en parler un peu. Je veux également aborder une partie du mémoire, que je vais résumer. Par la suite nous allons passer à un autre document, intitulé Analysis of the Nisga'a Final Agreement, et nous allons entendre une partie de nos présentations concernant une partie du projet de loi C-9.

Tout d'abord, je voudrais vous citer rapidement certains éléments contenus dans le mémoire. Nous entendons exposer nos préoccupations, nos observations et nos recommandations concernant ce projet de loi. Cependant, ces préoccupations, observations et recommandations doivent être comprises dans le contexte de l'Accord définitif nishga lui-même et de ses répercussions sur les droits et les titres autochtones des Gitanyows. Il est également important que le comité permanent soit au courant de l'histoire et de l'état des négociations de traité des Gitanyows, étant donné que ces négociations sont le plus directement liées à l'Accord définitif nishga. Si vous consultez l'Accord définitif nishga, les articles 33, 34 et 35 parlent de cela.

Les Nishgas et le gouvernement du Canada ont déjà ratifié le traité. Le projet de loi C-9 a franchi les étapes des première et deuxième lectures au Parlement, assez promptement. Apparemment, cela se fera, vous allez avoir terminé votre travail d'ici le 1er décembre. Le projet passera à la troisième lecture et le Sénat l'étudiera, espérant en terminer l'examen avant Noël. Il parviendra à la gouverneure générale avant Noël. C'est ce que nous comprenons. La loi va entrer en vigueur, et vous prévoyez la faire entrer en vigueur avant la fin de l'année.

Tout cela en dépit des nombreux efforts déployés par les Gitanyows en vue de soumettre cette question aux gouvernements fédéral et provincial, et aux Nishgas, dans le but d'obtenir un règlement négocié. Ces démarches ont été ignorées. Nous espérons que ce comité va non seulement nous écouter, mais nous entendre et nous aider, même à ce stade avancé, afin de corriger l'injustice permanente à l'égard de Gitanyows et des Gitxsans que l'on est en train de cristalliser dans le projet de loi C-9.

• 1325

La conclusion à laquelle nous sommes arrivés est qu'il faut apporter des modifications au projet de loi C-9, pour faire en sorte que les droits de Gitanyows soient protégés en vue de nos négociations de traité avec la Colombie-Britannique et le Canada. En définitive, cela voudra dire des modifications ou des clarifications de l'Accord définitif nishga. Vous allez entendre nos recommandations précises plus loin au cours de notre présentation.

Comme je l'ai mentionné lorsque j'ai dit qui étaient les Gitanyows, nous sommes des Gitxsans; nous sommes étroitement liés aux Gitxsans qui ont fait des présentations ce matin. Le régime foncier est le même. Les liens avec le territoire sont les mêmes. Nous somme le peuple gitxsan, mais les Gitanyows ont toujours voulu être un groupe distinct et indépendant—et continuent de l'être. Nous avons beaucoup de membres qui vivent dans des collectivités gitxsans, comme celles de Kitwanga et Gitsegukla. En fait, certains de nos membres vivent dans la vallée de la Nass. Nous comptons environ 2 000 membres de la maison.

Dans le passé, les Gitanyows ont essayé de manière très active et persistante de faire reconnaître leurs droits en tant qu'Autochtones ainsi que leur titre de propriété et leur autorité sur le territoire. Les Gitanyows ont toujours été prêts à négocier une reconciliation de ces droits avec le Canada, avec la Colombie- Britannique et avec les Nishgas. Les Gitanyows ont été très actifs depuis de nombreuses années pour essayer de résoudre les différends avec leurs voisins.

Mais ce que nous avons demandé, ce à quoi nous nous attendons, et ce que nous méritons de la part du Canada, de la Colombie- Britannique et des Nishgas est un règlement négocié—non imposé—en ce qui a trait à la reconciliation de nos droits respectifs. Certaines des démarches que nous avons effectuées dans le passé comprennent une présentation, soumise au milieu des années 70 en vertu de l'ancienne politique sur les revendications globales. Nous avons fait cela et cela a été accepté. Des énoncés ont été formulés par Peter Williams en octobre 1984. Les mots que vous voyez sur les transparents sont ceux qu'il a adressés directement aux Nishgas en deux occasions. La façon dont les Gitanyows et les Gitxsans considèrent ce qui est en train de leur arriver est ce que vous voyez sur les transparents: c'est un acte d'agression.

Nous avons eu de nombreuses rencontres avec nos voisins au début des années 80. Nous avons eu des rencontres depuis 1993: des réunions importantes, de petites réunions, des réunions de groupes de travail, des protocoles. Au cours des deux dernières années, nous avons fait nommer un médiateur par le gouvernement du Canada, mais ce processus-là a été un échec; il n'a donné aucun résultat. Par le passé, nous avons essayé de faire participer la Northwest Tribal Treaty Conference. Nous avons été voir l'Église anglicane à Prince Rupert pour demander l'aide de l'évêque, à ce moment-là, pour qu'il essaie d'agir comme médiateur. Nous avons été voir la Commission des traités de la Colombie-Britannique, afin d'essayer de réunir les gens, d'essayer de trouver une solution ou une mesure corrective.

Les plus récents essais ont eu lieu au cours de la dernière année, concernant le médiateur nommé par le gouvernement. Encore une fois, alors que nous commençons à nous occuper des règles fondamentales, nous constatons que le processus de médiation, tel qu'il a été conçu, ne répondra pas à nos besoins. Ce qui se passait dans le cadre de la médiation est que le gouvernement et les Nishgas essayaient d'étendre la portée de l'Accord définitif nishga sans peut-être se pencher sur certaines des effets précis qu'aurait l'accord en question pour nous et les Gitxsans.

Le processus de médiation est en suspens en ce moment. Nous avons fait appel au tribunal, et le gouvernement a retiré le médiateur. Nous avons eu gain de cause devant le tribunal, plus tôt cette année. Maintenant, nous sommes de retour dans un autre processus, dont je vais parler.

Nous participons au processus de conclusion de traités de la Colombie-Britannique depuis 1993. Nous avons présenté une revendication, la même revendication que vous voyez sur le territoire, indiquée en rose. Je crois qu'on a fait circuler ce document. C'est le même territoire que nous avions identifié en 1830. Nous avons un accord-cadre que nous avons paraphé et signé le 6 février 1996, peu de temps avant que ne soit conclue l'entente de principe avec les Nishgas. Le processus de conclusion de traités de la Colombie-Britannique est le seul mécanisme que la Colombie- Britannique et le Canada reconnaissent pour l'examen et la négociation des droits, du titre de propriété et de l'autorité des Autochtones dans le contexte constitutionnel.

• 1330

Les Gitanyows ont fait preuve d'une coopération extrême pour s'adapter à la politique du gouvernement, et ce, malgré le fait que ce même gouvernement ait signé l'entente de principe avec les Nishgas en février 1996 et paraphé par la suite l'accord définitif sans que l'on ait résolu les questions décisives relatives au chevauchement avec les Gitanyows. Les Gitanyows continuent de mener des négociations de traité avec les gouvernements fédéral et provincial. Ayant donné leur consentement à un processus accéléré, à la lumière du discours sur le traité des Nishgas qui a été prononcé au mois de septembre dernier, les Gitanyows ont soumis une entente de principe aux deux gouvernements. Au début de septembre. Nous avons eu certaines discussions depuis lors, et le gouvernement est engagé à déposer l'offre des Gitanyows le 29 novembre, c'est-à- dire d'ici quelques jours à peine.

Les Gitanyows n'ont pas encore obtenu d'assurances concrètes concernant nos préoccupations au sujet de l'incidence de l'Accord définitif nishga sur nos propres négociations. On ne prévoit même pas que cette question soit abordée dans l'offre finale conjointe fédérale-provinciale.

L'autre démarche que nous avons essayé d'entreprendre, dans le cadre du processus auquel nous participons—nous étions obligés, parce que les choses allaient assez vite—a été qu'au début du mois de mars 1998, nous avons entamé des procédures devant la Cour de la Colombie-Britannique. Je vais céder la parole à M. Grant maintenant, afin qu'il puisse résumer rapidement cette question pour vous.

M. Peter Grant (avocat de la Nation gitanyow): Merci Glen, et merci à vous, les membres du comité.

Cette partie de la présentation des Gitanyows devrait recevoir beaucoup d'attention de la part de tous les membres de ce comité. Il se peut que vous vous demandiez pour quelle raison il y a maintenant ce problème, pourquoi nous y faisons face, et que vous pensiez qu'il a été résolu par les articles 33, 34 et 35 de l'accord, dont le négociateur en chef Glen Williams parlera dans un moment. Mais le gouvernement du Canada a été orienté par les tribunaux, depuis plus de deux ans, pendant qu'il menait les pourparlers avec les Nishgas, avant la conclusion de l'accord définitif, et il n'a rien fait. C'est la raison pour laquelle les Gitanyows se sont présentés devant ce comité.

Tout d'abord, bien sûr, dans le cas de l'arrêt Delgamuukw—et vous avez rencontré le chef Delgamuukw ce matin—la Cour suprême du Canada a dit une chose qui n'a pas été mentionnée par les Gitxsans. Cela a trait à l'arrêt Sparrow, article 35, qui fournit une base constitutionnelle solide sur laquelle pourraient être fondées les négociations, et le juge en chef Lamer a dit, en 1997, que ces négociations devraient inclure également d'autres nations autochtones qui ont un intérêt dans le territoire qui est revendiqué. C'était précisément la question à ce moment-là, parce que le Canada était en pourparlers tant avec les Gitanyows qu'avec les Nishgas.

Les Gitanyows, comme l'a dit M. Williams, ont soulevé cette question et ont été obligés de s'adresser aux tribunaux pour dire que les gouvernements n'agissaient pas de bonne foi, et le Canada et la Colombie-Britannique ont essayé de faire rejeter l'affaire sans qu'on en entende le bien-fondé. Le 17 juin 1998, avant que ne soit paraphé l'accord définitif—et il s'agit là d'un élément important à considérer pour vous—le juge Williamson de la Cour suprême de la Colombie-Britannique a dit, en commentant la présentation des Gitanyows, que les Gitanyows faisaient appel, en particulier, aux remarques du juge en chef Lamer, selon lesquelles ces négociations devraient inclure d'autres nations. Ils font valoir qu'en s'engageant à conclure un accord qui respecte les principes énoncés dans l'entente de principe, le Canada et la Colombie-Britannique «se dirigent vers un précipice». Autrement dit, le Canada et la Colombie-Britannique, en s'engageant vis-à-vis d'un accord qui a déjà empiété d'une manière si importante sur les droits des Gitanyows, dans l'entente de principe, et en affirmant qu'ils ne vont pas modifier cela, se dirigent vers un précipice. Le juge Williamson a dit ceci:

    Par cela ils entendent qu'un accord définitif, cohérent par rapport aux principes envers lesquels les gouvernements se sont déjà engagés, va entraîner inévitablement une contestation de l'accord nishga par les Gitanyows pour le motif que le titre ou les droits de propriété autochtones relatifs aux terres de la vallée de la Nass, qui sont protégés sur le plan constitutionnel par le paragraphe 35(1)... ont été violés.

• 1335

Il a poursuivi et reconnu qu'il y avait une question de droit. Il a dit:

    Vu à la lumière des revendications chevauchantes des Nishgas et des Gitanyows concernant les droits des Autochtones dans la vallée de la rivière Nass, un tel accord signé peut imposer de sérieuses limites aux libertés de toutes les parties en ce qui a trait à la négociation des revendications des Gitanyows.

En d'autres mots, le juge a vu immédiatement le problème. C'est évident lorsqu'on voit ces cartes. Comment le Canada peut-il négocier de bonne foi avec les Gitanyows concernant le même territoire pour lequel il a déjà abandonné ces droits—pour les pêches, la faune et d'autres aspects dont va parler M. Williams? Il les a déjà abandonnés. Il a déjà dit que ce sont des droits conférés aux Nishgas par traité. Comment peut-il faire cela?

Il a dit: «De telles limites ne peuvent être écartées comme étant hypothétiques, conjecturales ou imaginaires.» Et il a émis un commentaire sur l'obligation minimale de la Couronne, bien sûr:

    On peut affirmer que cette obligation consiste à mener des négociations de traités de bonne foi, d'une façon qui tient compte de toutes les nations autochtones qui ont une revendication dans un domaine précis, comme l'a dit le [juge en chef] Lamer [...]

Il a ensuite donné un sérieux avertissement au Canada et à la Colombie-Britannique et essayé de les orienter dans les négociations de traités. Ça c'était toujours en juin 1998. Il a dit:

    [...] une multitude de demandes soumises aux tribunaux semblent inévitables, à moins que le processus de négociation de traités se penche sur les revendications chevauchantes. Je pense que ce sera inévitable, que si les parties ne règlent pas le problème manifeste des revendications chevauchantes, elles pourraient bien faire face à des règlements imposés par les tribunaux qui seront moins susceptibles d'être acceptables pour elles que des solutions négociées.

En juin 1998, il a dit cela.

Ce qui est assez surprenant, la conséquence de cela, ce sont les articles 33, 34 et 35, qui n'ont jamais figuré dans l'entente de principe, et on l'a modifiée. Ce fut la réponse du Canada et de la Colombie-Britannique. Nous allons revenir sur ces problèmes et sur ce que nous voulons que fasse ce comité pour protéger les Gitanyows compte tenu de cet accord.

En mars 1999, concernant le devoir de négocier de bonne foi, la Cour a déterminé que la Couronne avait l'obligation légale de négocier de bonne foi. Elle a dit:

    [...] l'obligation doit comporter au moins l'absence de l'apparence d'une «négociation malhonnête» [...] la divulgation de [tous] les facteurs pertinents [...] et des négociations «sans motif détourné» [...]

Pendant deux ans, avant que cet accord ne soit paraphé, le Canada a été orienté par les tribunaux sur la façon d'aborder cette question. La réponse du négociateur à cette orientation fut celle- ci: «Nous nous en lavons les mains. Allez parler aux Nishgas.» M. Williams vous a parlé des seize ans d'efforts qu'a coûté cela.

J'ai entendu un des membres du comité ce matin, je crois que c'était M. Finlay, dire que cela est si triste. Pourquoi les Nishgas et les Gitanyows ne se parlent pas? Parce qu'il y a une différence. Et la différence est que les Nishgas ont un premier accord définitif, et ils ont l'appui des deux gouvernements. Or, pourquoi un négociateur dégourdi et déterminé—et les Nishgas s'occupent de cela depuis longtemps—ne tirerait-il pas avantage de cette situation? Pourquoi les Nishgas parleraient-ils aux Gitanyows alors qu'ils ont le soutien de la Couronne au Canada? C'est ça le problème, et nous avons quelques mesures correctives que ce comité pourrait utiliser, à notre avis, pour résoudre ce problème.

Quoi qu'il en soit, ce que je voulais dire est que la Commission des traités, et cela figure également dans le mémoire, est... M. Williams a mentionné le fait que nous sommes allés voir la Commission des traités. Vous avez entendu cela ce matin aussi. La Commission des traités s'est penchée sur la question. Dans l'annexe 1 de notre mémoire, vous allez trouver les commentaires de la Commission des traités. Qu'ont-ils fait? À la suite de l'arrêt Delgamuukw, la Commission des traités—et elle est bien sûr la gardienne du processus, la seule instance—a dit ceci:

    Des chevauchements non résolus acquièrent une plus grande importance à mesure que le processus avance [en Colombie- Britannique]. Cette question a été soulevée auprès de la Commission des traités par le Comité consultatif sur la négociation de traités—l'organe consultatif des gouvernements fédéral et provincial pour l'ensemble de la province—l'Union des municipalités de la Colombie-Britannique, le comité permanent et diverses Premières nations en dehors du processus de conclusion de traités.

Ça continue avec l'exemple précis de cette même question:

    Le différend sur le chevauchement entre le Conseil tribal des Nishgas et les chefs héréditaires Gitanyows, qui est maintenant devant les tribunaux, met en lumière le risque de voir des chevauchements non résolus retarder la conclusion d'un traité et favoriser les litiges. Il a également attiré l'attention sur la nécessité d'établir des mécanismes permettant de régler les questions de chevauchement non résolues.

Dans son rapport, la Commission des traités a indiqué qu'elle estimait que:

    [...] l'expérience vécue en Colombie-Britannique et ailleurs conduira les parties à conclure qu'il est essentiel de résoudre les questions relatives à des revendications chevauchantes au début des négociations, c'est-à-dire bien avant que les parties se mettent d'accord sur le contenu d'une entente de principe.

• 1340

La rapport se termine par des recommandations concernant des lignes directrices à l'intention des trois parties—le Canada, le gouvernement provincial, et le Sommet des Premières nations—pour que:

    [...] en l'absence d'une entente relative à un chevauchement ou d'un autre accord pertinent, d'autres Premières nations concernées par un chevauchement joignent la Première nation et les gouvernements du Canada et de la Colombie-Britannique à la table des négociations pour régler les questions relatives à des territoires qui se chevauchent [...]

Ils ont fait ces recommandations. Bien sûr, le Canada a dit, c'est à vous de le faire, les Nishgas n'avaient pas à aller s'asseoir à cette table, et ils ne l'ont pas fait non plus. Pourquoi l'auraient-ils fait? Ils n'avaient pas besoin de négocier au sujet d'une quelconque différence.

Maintenant, je voudrais faire une autre remarque. Vous, les membres du comité, à l'exception de M. Finlay et de M. Turp, et de toute autre personne possédant de l'expérience dans d'autres domaines liés à ces questions, pourriez dire, eh bien, ça c'est nouveau. Or ce n'est pas nouveau, parce qu'il y a vingt-cinq ans les gouvernements du Canada et du Québec ont traité expressément cette question dans le cadre de la Convention de la Baie James et du Nord québécois. Ils avaient eu à se pencher sur un chevauchement et il l'ont réglé. La convention complémentaire I a modifié expressément la Convention de la Baie James et du Nord québécois pour inclure la question du chevauchement.

Il existe une façon de régler ça, mais il faut non seulement la volonté des Premières nations mais également celle des parties. C'est essentiel.

Il existe donc un exemple, et il y a du travail qui peut être fait. Ce comité ne peut évidemment pas modifier l'accord définitif, mais il peut modifier la législation, comme l'a mentionné plus tôt M. Scott, je crois.

M. Williams va parler maintenant d'exemples précis de questions contenues dans l'accord lui-même.

La présidente: Avant de commencer, je voudrais dire simplement que la séance se terminera à 14 h 40. Je voudrais m'assurer que vous gardez un peu de temps, au moins une demi-heure pour une ronde de questions.

Merci.

Le chef Glen Williams: Je veux aborder quelques-unes des questions précises relatives aux répercussions de l'Accord définitif nishga, que nous décrivons dans notre mémoire.

Une partie de la présentation que nous avons soumise est intitulée «Analysis of the impacts of the Nisga'a Final Agreement on Gitanyows Aboriginal Rights and title». Nous désignons ce document par le titre «Faire d'une injustice une loi».

Nous avons parcouru l'Accord définitif nishga un chapitre à la fois et cité les passages marqués. Nous nous sommes penchés sur les questions. Je veux maintenant faire référence, dans ce document, à la section sur les terres. Je vais vous lire brièvement l'article de l'Accord définitif nishga qui nous inquiète. Je vais parcourir rapidement l'accès, les pêches, la faune et la partie relative à la mise en oeuvre. Peter présentera les dispositions générales, et ensuite nous allons soumettre nos recommandations précises.

Dans le chapitre 3 de l'Accord définitif nishga, on peut lire ceci:

    À la date d'entrée en vigueur, les terres nishgas se composent de toutes les terres, y compris les îles situées à l'intérieur des limites énoncées à l'appendice A [...]

Je crois que cette carte-là montre l'appendice A. Celles-ci sont les terres nishgas. Une partie du territoire dont nous parlons est une petite portion d'environ 20 kilomètres carrés, ici.

Il y a un moment, vous avez vu le transparent indiquant tous les sites de pêche. Ça, c'est la petite zone au sujet de laquelle nous inquiétons beaucoup et qui a été incluse dans le territoire des Nishgas. C'est à cela que fait référence cet article.

La question pour nous est que les terres nishgas comprennent des sites historiques de pêche de premier ordre situés sur la rive sud de la rivière Nass, tant en amont qu'en aval de Kinskuch, ainsi que le vieux village de Gitsheoaksit.

Dans cette zone-là, comme vous pouvez le voir sur les transparents, il y a quelques sites de pêche de premier ordre. Il s'agit d'un grand canyon le long de cette rivière, ici, et c'est ici que se trouvent tous les sites de pêche.

Si on prend la clause suivante dans le chapitre sur les terres, sous la mention Désignations des terres nishgas, on lit ceci:

    Les terres privées nishgas comprennent:

    a) les terres dans lesquelles le gouvernement Nisga'a Lisims crée un intérêt exclusif; et

    b) les terres qui sont autrement requises pour des utilisations incompatibles avec un accès public, notamment pour des utilisations commerciales, culturelles ou de développement des ressources.

• 1345

La question pour nous est de savoir si les sites de pêche de Gitanyows que je viens de mentionner ont été déclarés terres publiques, terres de village des Nishgas. De quelle façon va-t-on nous assurer que nous pourrons continuer à avoir accès à ces sites? Voilà une des questions.

Dans l'Accord définitif nishga, toujours dans le chapitre sur les terres, l'article 29 dit ceci:

    À la date d'entrée en vigueur:

    le titre de la Nation nishga à l'égard des terres nishgas est franc et quitte de tous les intérêts [...] chaque intérêt qui, avant la date d'entrée en vigueur, grevait ou s'appliquait aux terres qui sont des terres nishgas cesse d'exister.

Est-ce que cela signifie que vous êtes en train d'éteindre nos droits dans ce cas? Est-ce que c'est cela que dit cet article? Est- ce à cela qu'il va s'appliquer?

Je vais passer au chapitre relatif à l'accès, à la page 86, où l'on peut lire ceci:

    Le gouvernement Nisga'a Lisims fournit au public des possibilités raisonnables de chasser et de pêcher sur les terres publiques nishgas, mais comme la Nation nishga est propriétaire des terres à la date d'entrée en vigueur, seuls les citoyens nishgas ont le droit de chasser et de pêcher sur les terres nishgas.

Encore une fois cette région, les «terres nishgas», où seuls les Nishgas ont le droit de pêcher et de chasser, c'est ce que dit le libellé ici. Quelle certitude cela donne-t-il aux Gitanyows?

Ensuite, dans le chapitre sur les pêches, à l'article 77, on peut lire:

    À la date d'entrée en vigueur, les Parties établissent le Comité conjoint de gestion des pêches pour faciliter la planification et l'exécution coopératives des pêches nishgas et des initiatives de mise en valeur dans la région de la Nass.

Si on considère la région de la Nass dans la section des définitions de l'Accord définitif nishga, elle est une préoccupation importante. Je n'ai pas de carte ici, mais la région de la Nass, c'est tout le bassin hydrographique de la Nass. Encore une fois, cela comprend ce qui a été mentionné précédemment. Je vais aller sur cette carte ici. Voici le territoire des Gitanyows. La rivière Nass passe ici et traverse en plein le territoire des Gitanyows et va jusqu'au territoire des Gitxsans.

C'est un problème. Les Gitanyows et les Gitxsans ne participent pas au Comité mixte de gestion des Nishgas, alors que leurs droits sont touchés.

À la page 125, sous l'article 83 du chapitre sur les pêches, on peut lire:

    Les Parties reconnaissent que la gestion des pêches peut impliquer la considération de questions en fonction d'une région ou d'un bassin hydrographique. Si le Canada ou la Colombie-Britannique proposent d'établir des organismes consultatifs sur la gestion des pêches pour des secteurs qui comprennent toute partie de la région de la Nass, le Canada ou la Colombie-Britannique consultent la Nation nishga [...]

Encore une fois, la question ici a trait au fait que, pour le Canada et la Colombie-Britannique, les Nishgas sont le seul groupe autochtone dans la région de la Nass. C'est ça le problème. Il en va de même concernant la faune. Les Nishgas sont le seul groupe reconnu. Comme l'ont mentionné Greg et Peter, ils sont le seul groupe.

Ils n'ont pas à participer à un processus portant sur le bassin hydrographique, bien que nous ayons lancé ce processus avec les voisins, les Tsimshians sur le côté, et également avec les Gitxsans du Nord. Nous avons signé un protocole d'entente stipulant que nous allons travailler de concert, mais les Nishgas sont peu disposés à participer à ce processus qui, d'après nous, sera une des mesures correctives.

Je voudrais donc attirer l'attention sur elles. Je vais laisser Peter s'occuper du chapitre sur les dispositions générales. Nous allons ensuite passer à nos recommandations précises.

La présidente: Monsieur Grant, avez-vous une idée de combien de temps il vous faudra?

Le chef Glen Williams: Ça lui prendra environ dix minutes.

La présidente: Il me faut au moins une ronde de questions, pour laquelle j'aurai besoin de trente minutes; je vous donne donc encore cinq minutes pour terminer.

Merci.

• 1350

Le chef Glen Williams: D'accord. Merci.

M. Peter Grant: Juste pour attirer votre attention, ce que le chef Williams a soulevé dans le mémoire a trait à l'adoption d'une loi juste.

Je crois que le membre n'est pas ici en ce moment, mais il avait soulevé des questions concernant les articles 33, 34 et 35. C'est décrit dans le mémoire où cela cause des difficultés. Je ne vais pas aborder cela.

Dans le mémoire, nous faisons également référence à certaines des dispositions.

Dans les deux derniers documents du mémoire, nous en arrivons à ce que nous considérons comme crucial, et c'est ce que nous croyons que peut faire ce comité.

Nous proposons que le projet de loi fasse l'objet des modifications et ajouts minimaux suivants, pour faire en sorte que les droits, le titre et l'autorité des Gitanyows en tant qu'Autochtones soient protégés et que les questions relatives aux chevauchements soient résolues une fois pour toutes. Ces modifications constituent un minimum, malgré nos inquiétudes au sujet des articles 33, 34 et 35.

Tout d'abord, nous demandons que vous ajoutiez le libellé de non-dérogation au projet de loi. Dans le projet de loi lui-même, tout l'accord reçoit force de loi en vertu du paragraphe 4(1). Le Parlement a néanmoins jugé nécessaire de mentionner expressément, dans l'article 5, que l'accord définitif est exécutoire pour toute personne, de répéter, dans l'article 6, les dispositions sur les conflits et l'incompatibilité énoncées sous les articles 52 et 53 de l'accord définitif, et de répéter qu'il s'agit d'un accord relatif à un traité et à une revendication territoriale dans la signification des articles 25 et 35, bien que cela soit mentionné dans l'article 3. En d'autres mots, même si le projet de loi mentionne que l'accord a force de loi, vous faites référence à des renvois précis.

Donc, si le Parlement a choisi expressément ces renvois parce qu'ils reflètent des aspects fondamentaux de l'accord définitif qui doivent être répétés dans le projet de loi, nous proposons que le libellé de non-dérogation—que l'un des membres, je crois à notre gauche, a souvent mentionné ce matin—les articles 33, 34 et 35, soient inclus. Il ne s'agit pas d'un cas sans précédent. En effet, dans le cas de la Loi sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs, le Parlement a fait la même chose. Il n'y a donc pas de libellé de non-dérogation et de protection des droits des Autochtones. Notre première recommandation est de répéter les dispositions en question dans le projet de loi.

Cependant, l'inclusion de ces dispositions ne corrige pas entièrement la situation, parce que la prétendue protection mentionnée dans l'article 35 est conditionnelle au fait que le Canada et le Colombie-Britannique acceptent de conclure des traités avec d'autres peuples autochtones, ce qui peut être incompatible ou conflictuel avec l'Accord définitif nishga.

L'accord ne contient aucune disposition qui vous oblige à apporter ces modifications. C'est pourquoi nous proposons dans notre mémoire, que nous pensions serait en votre possession, d'effectuer l'ajout suivant au projet de loi: la ratification de l'Accord définitif nishga ne peut être invoquée par le Canada comme raison de ne pas conclure un traité complet avec tout autre groupe autochtone. En d'autres mots, ce que vous avez endossé dans le cas des Nishgas ne serait pas utilisé comme un empêchement à la négociation avec les Gitanyows, et c'est exactement ce qu'ont recommandé la Cour suprême du Canada et le juge Williamson de la Cour suprême de la Colombie-Britannique.

La dernière recommandation, la troisième, a trait à la suspension de l'entrée en vigueur de l'Accord définitif nishga. Cela veut dire ajouter au projet de loi les paragraphes 27(2) et 27(3), qui ont trait au passage qui dit «jour ou jours à fixer par décret du gouverneur en conseil», qui figure dans l'article 27.

Nous proposons que vous fassiez les ajouts suivants: un décret du gouverneur en conseil prévu au paragraphe 27(1) stipulera que l'entrée en vigueur des chapitres ou articles de l'Accord définitif nishga qui sont visés par le décret soit suspendue jusqu'à ce que les différends relatifs aux chevauchements avec les Gitanyows soient résolus ou jusqu'à la conclusion d'un traité avec les Gitanyows, si cela devait se produire avant.

Deuxièmement, nous ajouterions le paragraphe 27(3): le décret en conseil envisagé dans le paragraphe 27(1) va également établir un processus par lequel les Gitanyows, les Nishgas et la Colombie- Britannique peuvent collaborer avec le Canada en vue de régler des différends survenant entre les Gitanyows et les Nishgas au sujet de l'Accord définitif nishga, processus qui peut inclure, si les parties sont d'accord, un arbitrage exécutoire.

Enfin, si on ne peut trouver une solution aux préoccupations des Gitanyows au sujet des questions relatives au chevauchement, les Gitanyows demandent que le comité permanent recommande fortement dans son rapport que le Canada assume les frais de justice que doivent payer les Gitanyows en étant obligés de continuer à protéger droits et intérêts devant les tribunaux, ainsi que les coûts supplémentaires liés aux questions en litige.

Nous demandons donc des modifications précises, que nous considérons comme minimales, qui ne feront pas dérailler l'accord et qui ne requièrent pas que vous le modifiiez, mais qui vont amener le Canada à protéger à la fois les Gitanyows et ce à quoi il s'est engagé à l'égard des Nishgas, et à faire en sorte qu'il y ait un processus qui permet de régler ces questions.

Voilà nos arguments.

La présidente: Merci.

Monsieur Scott, allez-y, s'il vous plaît. Vous avez cinq minutes.

M. Mike Scott: Merci.

• 1355

J'ai vraiment apprécié l'exposé que vous avez fait ici aujourd'hui. J'estime qu'il est très complet. Je n'ai pas beaucoup de questions à poser, sauf une.

Il me semble que si j'étais dans votre situation, après avoir vécu ce que vous avez vécu pendant un certain nombre d'années, j'aurais fini par avoir l'impression que les deux paliers de gouvernement ont pris une position concernant qui ils allaient appuyer lorsqu'il serait question de chevauchement.

Monsieur Williams, est-ce que c'est ainsi que vous voyez les choses? Est-ce ainsi que les Gitanyows voient les choses? Avez-vous l'impression que le gouvernement fédéral a pris une position concernant le chevauchement qui a porté préjudice à votre propre position?

Le chef Glen Williams: Après toutes les expériences et les tentatives que nous avons faites pour essayer de rencontrer le gouvernement fédéral, c'est clairement notre opinion.

M. Mike Scott: D'accord. À l'intention des membres du comité, monsieur Williams, je ne sais pas grand-chose, mais je sais, pour avoir vécu toute ma vie dans cette région, qu'il y a également certaines relations historiques entre les Gitanyows et les Nishgas. Ces relations doivent être tendues en raison de cette question non résolue du chevauchement. Est-ce que cela cause des difficultés supplémentaires aux individus au sein de ces deux collectivités?

Le chef Glen Williams: Il y a certains conflits. Pour répondre à votre première question, en 1889, la majorité des Gitanyows ont déménagé vers les collectivités de la Nass et sont restés là-bas. D'après ce qu'on nous dit, il y a environ 5 000 Nishgas. Selon nos estimations, environ 40 p. 100 de ces gens qui pensent être des Nishgas pourraient être en fait des Gitanyows ou des Gitxsans. Il existe de très bonnes relations entre certaines gens ordinaires qui vivent au sein des collectivités de Nishgas. Certaines de ces personnes sont des chefs qui soutiennent les Gitanyows et qui jugent qu'ils ont raison concernant l'emplacement des frontières.

M. Mike Scott: J'essaie de décortiquer tout ça pour les membres du comité qui s'y connaissent peut-être moins bien que vous et d'autres qui vivent dans cette région. Avant le commencement des intenses négociations avec les Nishgas pour l'accord définitif, ou pour une entente de principe, je voyais les Gitanyows et les Nishgas comme de bons voisins qui s'entendaient sans trop de difficulté. Je comprends qu'il pouvait y avoir des conflits de temps à autre, mais pour l'essentiel, ce n'était pas une relation difficile jusqu'à ce que cette question ait surgi. Est-ce que c'est assez juste comme description de la situation?

Le chef Glen Williams: C'est exact. Les gens s'entendaient assez bien. La seule vraie prise de bec a eu lieu, je crois, en 1992, lorsque les deux gouvernements ont conclu un accord de protection provisoire avec les Nishgas. Cela a vraiment créé de l'animosité entre les deux nations.

Les tensions se sont aggravées de nouveau en 1996, avec l'entente de principe, et encore au mois d'août 1998. Nous avons entendu les divers chefs dire aujourd'hui qu'ils ont l'impression que c'est vraiment un vol de leur terre. Nous en sommes à ce stade avancé où le gouvernement est sur le point de protéger ce vol sur le plan constitutionnel.

M. Mike Scott: Merci.

La présidente: Monsieur Bachand.

[Français]

M. Claude Bachand: Nous avons écouté avec beaucoup d'attention la présentation de votre mémoire. De notre côté, nous sommes un peu de votre avis. Nous avons aussi entendu la présentation des Gitxsans ce matin.

Notre préoccupation, et je reprends votre expression, monsieur Grant, est de ne pas faire dérailler le traité nisga'a. C'est une préoccupation importante pour nous.

Vous étiez ici ce matin et vous savez qu'on a offert aux Gitxsans de les rencontrer. Vous nous présentez aujourd'hui des textes un peu juridiques qui peuvent s'ajouter aux pistes de solution dont on a discuté avec les Gitxsans pendant l'heure du dîner.

Si, dans vos textes, on ajoutait le nom des Gitxsans à celui de votre nation, votre présentation aurait beaucoup plus de force parce qu'elle serait faite au nom de deux nations qui sont touchées par un traité, qui sont pour l'instant en marge de ce traité et qui veulent participer à ce traité.

• 1400

Nous avons peut-être trouvé d'autres façons de faire. Vous opposeriez-vous à l'inclusion des Gitxsans dans vos textes juridiques? Également, seriez-vous disposés, comme les Gitxsans, à nous rencontrer? S'il le faut, nous pourrons toujours vous rappeler par la suite parce que nous allons faire analyser les textes au plan juridique. Seriez-vous prêts à participer à d'autres rencontres pour que nous puissions vous faire part des pistes de solution que nous avons peut-être trouvées à l'heure du midi?

[Traduction]

Le chef Glen Williams: Oui, nous serions prêtes à avoir des discussions avec les Gitxsans. Nous avons eu des discussions avec les Gitxsans à la fin de la semaine passée, afin de coordonner nos efforts. D'après ce que j'ai entendu ce matin, les Gitxsans ont certainement proposé ce que nous appelons une suspension.

Nous vous avons proposé un libellé précis. Nous leur avons également parlé de non-dérogation, pour protéger nos intérêts. Je crois que cela devrait se faire bientôt, avant la ratification ou l'entrée en vigueur de la loi. Nous voyons le calendrier.

Comme nous l'avons dit plus tôt, nous appuyons beaucoup nos voisins, les Nishgas, pour la conclusion d'un accord. Mais encore une fois, comme l'ont dit nos voisins, les Gitxsans, ce matin, cela doit se faire dans leur territoire. Nous avons dit cela par le passé et nous allons continuer à dire cela. Suspendez ces parties de leur territoire dans l'Accord définitif Nishga. Nous sommes prêts, et cela devrait se faire bientôt.

[Français]

La présidente: Avez-vous une autre question?

M. Claude Bachand: Oui, une question plus spécifique pour M. Grant.

Monsieur Grant, étiez-vous dans la salle ce matin lorsque les Gitxsans ont fait leur présentation?

M. Peter Grant: Oui.

M. Claude Bachand: Pourriez-vous me donner votre avis sur la tentative de piste qu'on examinait pour la mise en oeuvre du traité? Le chapitre de la mise en oeuvre du traité est distinct de l'entente. Autrement dit, il ne fait pas partie de l'entente. Le chapitre 21 ne fait pas partie de l'entente. Vous avez entendu ces questions ce matin. Selon vous, est-ce que cela pourrait être une solution pour aider les deux nations à se sortir de la situation fâcheuse dans laquelle elles se trouvent actuellement?

[Traduction]

M. Peter Grant: Merci beaucoup.

Nous avons considéré faire cela après la mise en oeuvre. Le problème même—et cela est reflété dans cette annexe sur le fait de légiférer et la justice, auquel M. Williams allait se reporter, mais nous avons manqué de temps—est, par exemple, l'accord sur la récolte. Cela arrive immédiatement après la ratification. Ainsi, à moins qu'il y ait une suspension de certaines dispositions, la mise en oeuvre de l'accord empiète sur les droits des Gitanyows et des Gitxsans, comme ils l'ont décrit ce matin, et ce, d'une façon importante dès que l'accord est signé.

D'après ce que j'ai compris lors de l'exposé des Gitxsans, il faut accorder un laps de temps pour résoudre ces questions, durant lequel le gouvernement va endosser cela. Mais ce n'est pas un déraillement du processus; c'est une protection. C'est la raison pour laquelle les Gitanyows—un des membres de l'autre côté a mentionné que c'étaient les Gitxsans—mènent actuellement des négociations de traité accélérées, comme l'indique notre mémoire. Nous essayons de faire ce que nous pouvons pour protéger les intérêts des Gitanyows pendant que se déroule ce processus.

L'accord définitif dit «après la ratification»—il s'agit bien sûr de la ratification finale—«l'accord sur la récolte entre en vigueur». Les permis de guide de pêche sportive auraient immédiatement une incidence sur une partie énorme du territoire des Gitanyows. Comment le gouvernement pourrait-il alors négocier avec les Gitanyows et dire, eh bien, vous pouvez avoir des droits de pêche aussi là-bas? Il les aura donnés à quelqu'un d'autre. C'est ça donc le problème, et il s'agit là du genre de questions complexes qui doivent être résolues.

Je crois qu'à la baie James, dans le Nord du Québec, cela a pris deux ans pour conclure l'accord complémentaire, mais on l'a fait. On l'a fait parce que toutes les parties—les Cris, le Québec et le Canada—ont dit, nous devons le faire, et ils ont donné l'ouverture nécessaire pour que cela puisse se faire.

• 1405

La présidente: Merci.

Madame Hardy.

Mme Louise Hardy: Je voudrais vous remercier d'être venus.

Je pense que ce qui me préoccupe vraiment est qu'il existe déjà un précédent qui va à l'encontre de ce que vous demandez. Je ne sais pas si vous connaissez la vallée du Mackenzie, mais trois des cinq Premières nations dans cette région-là demandaient que l'application extraterritoriale des deux premières bandes ne soit pas appliquée à eux avant que leurs revendications ne soient réglées. Or, cela ne s'est pas produit, et je vois cela comme étant semblable à ce que vous demandez. En fait, l'élaboration de la législation a continué d'après ce qui avait été convenu pour les deux Premières nations, et elle s'est effectivement appliquée aux trois autres. Je m'inquiète donc vraiment, et je n'avais pas appuyé cela.

L'autre chose qui me dérange est que tout ce processus de conclusion de traités arrive au Parlement à la toute fin. Nous voilà, dans le dernier droit, en train d'écouter des témoins qui ont des informations très importantes à communiquer qui auraient dû être entendues par le Parlement. Je n'aurais pas été au Parlement auparavant, mais s'il y avait un quelconque autre processus permettant de se pencher sur ce genre de préoccupations avant la dernière heure, les choses seraient très différentes.

Je sais que vous êtes en faveur du processus de conclusion de traités. Je l'appuie certainement moi aussi. J'ai vu ses avantages au Yukon. Mais je ne suis pas en faveur du fait que vous perdiez vos droits pour que d'autres Premières nations puissent avoir les leurs. Je ne crois pas que cela aide le processus de conclusion de traités.

Voilà mes inquiétudes.

La présidente: Voudriez-vous répondre à cela?

Le chef Glen Williams: Non.

La présidente: D'accord, madame Hardy, vous avez plus de temps, si vous voulez.

Mme Louise Hardy: Non.

La présidente: Merci.

Monsieur Keddy.

M. Gerald Keddy: Merci, madame la présidente.

Je voudrais également souhaiter la bienvenue aux chefs et aux membres aujourd'hui. Vous avez certainement soulevé quelques points extrêmement intéressants, et un certain nombre de points semblables ont été soulevés ce matin.

J'ai demandé certains éclaircissements concernant les articles 33, 34 et 35 avant d'écouter ce que vous aviez à dire, et j'étais particulièrement intéressée à connaître les modifications que vous proposez. Cependant, je voudrais simplement passer en revue encore une fois les articles 34 et 35 et voir quel est le rapport avec les alinéas 34a) et 34b). On dit:

    L'Accord n'a pas pour effet de reconnaître ou de conférer à aucun autre peuple autochtone que la Nation nishga des droits au sens de l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 sur lesquels une disposition de l'Accord a des effets négatifs.

Nous sommes bien conscients qu'il s'agit d'un traité pour la Nation nishga. Ils ne disent pas que c'est un traité qui est censé avoir une incidence sur d'autres droits autochtones ou sur d'autres nations autochtones dans leurs processus de conclusion de traités.

Cela va plus loin encore dans l'article 34, qui établit des lignes directrices pour le règlement de différends devant les tribunaux. Je me rends compte que ce n'est pas la manière parfaite de procéder, mais je veux connaître votre avis sur la procédure judiciaire. On dit:

    Si une cour supérieure d'une province, la Cour fédérale du Canada ou la Cour suprême du Canada statue de façon définitive qu'un autre peuple autochtone que la Nation nishga a des droits au sens de l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 sur lesquels une disposition de l'Accord a des effets négatifs [...]

Il y a deux paragraphes qui ont trait à cette situation. Le premier, l'alinéa a) dit ceci:

      la disposition est opérante et a effet dans la mesure où elle n'a pas d'effets négatifs sur ces droits.

Ce dont on parle ici vraiment est une sorte d'autorité conjointe, une superposition d'autorités pour les deux ensembles de droits qui seraient représentés. Si cela ne peut être accepté, il reste l'alinéa b) qui dit:

      si la disposition ne peut être opérante et avoir effet de manière à ne pas avoir d'effets négatifs sur ces droits, les Parties font de leur mieux pour modifier l'Accord afin de corriger ou de remplacer la disposition.

On poursuit en disant que le gouvernement fédéral est responsable, que si les Nishgas perdent des droits ou des terres ou l'accès à des propriétés, le gouvernement fédéral doit remplacer ces terres soit par d'autres terres, soit par de l'argent, je présume, dans la disposition.

Est-ce que c'est ainsi que vous comprenez cette disposition?

M. Peter Grant: Oui, mais il y a des...

Premièrement, il s'agit d'une disposition à laquelle on a fait référence ce matin, tant de l'autre côté qu'ici. Tout d'abord, ce qui inquiète beaucoup les Gitanyows est que, à la différence d'autres dispositions, comme dans la législation, cette loi-ci s'applique à tous les autres peuples, cet article, d'accord? Le conflit juridique est entre le fait que la disposition de cet accord est exécutoire en droit pour tous les peuples, y compris les Gitanyows, c'est dans la loi, mais ce libellé de non-dérogation, n'y est pas. Un tribunal pourrait dire que le Parlement pensait bien sûr que la disposition exécutoire est beaucoup plus importante que la non-dérogation. Il va falloir résoudre ce conflit parce que seulement un aspect est en accord, et un se trouve tant dans l'accord que dans la loi. Voilà la question.

• 1410

Le deuxième point est que l'article 34 est assez bizarre d'une certaine façon. C'est pourquoi j'ai dit qu'il a certainement surgi après juin 1998, ce qui est intéressant parce que c'est contraire à la politique déclarée du Canada et de la Colombie-Britannique, selon laquelle il devrait toujours y avoir des négociations privilégiées.

C'est ce que cela impose aux Gitanyows. Les Gitanyows vont devoir faire appel aux tribunaux pour faire valoir qu'ils ont des droits, dont a parlé Mme Vegh, leurs droits relatifs à la pêche dans ces tributaires, les droits d'agir comme guides pour la pêche sportive. Ils vont devoir faire tout le parcours juridique devant les tribunaux. C'est une mesure définitive. Ils vont peut-être devoir aller en Cour suprême du Canada concernant toutes ces questions ou pour une affaire importante relative à un titre autochtone, comme dans le cas de l'arrêt Delgamuukw. Ce n'est qu'à ce moment-là que cet article sera déclenché.

Ainsi, le Parlement est ici en train de légiférer. Il dit en fait dans l'accord d'aller devant les tribunaux, de ne pas négocier, ce qui est évidemment contraire à la politique déclarée du Canada. Même après avoir dit cela, si c'était au moins dans la loi, ça protégerait.

M. Bachand s'est informé au sujet des Gitxsans, et les chefs gitxsans sont ici. Par des communications, et avant, ils donnent leur appui—ce n'était pas dans leur présentation, c'était dans la nôtre—et voudraient également cette modification de la loi, pour répondre à cette question-là.

La présidente: Vous avez le temps de poser une petite question.

M. Gerald Keddy: Pour revenir au traité qui est devant nous, nous avons parlé ce matin de la difficulté que comporte la modification de ce document. Il est extrêmement difficile de modifier le document, le traité, et la loi, parce qu'il a déjà été signé par les trois parties, y compris le gouvernement fédéral, signé par le premier ministre. Cela va être très difficile de modifier le processus.

Vous avez dit très clairement que vous avez déjà vécu des années de négociations, que vous êtes passés par le système de tribunaux inférieurs. Je ne sais pas si vous avez été devant les cours supérieures, mais vous avez certainement été devant les tribunaux concernant cette question. Il y a eu pas mal de négociations et de procédures, et vous n'avez pas été en mesure de formuler une entente. Je n'essaie pas de me soustraire aux responsabilités qui sont les nôtres en tant que députés, mais je me demande si cela est faisable ou possible d'éviter la Cour suprême en ce qui a trait à cette question.

M. Peter Grant: Si les modifications que nous avons proposées étaient mises en oeuvre dans le projet de loi—pas de modification de l'accord définitif, mais dans le projet de loi—le Canada favoriserait un processus qui permettrait de dire qu'il n'est pas partial. Je crois que M. Scott a demandé si nous étions d'un côté ou de l'autre. Nous ne sommes pas d'un côté. Nous voulons que vous tous résolviez ce problème, les uns comme les autres, parce que nous faisons partie de cela. Nous soutenons l'Accord définitif nishga et nous soutenons le processus de conclusion de traité des Gitanyows. Cela commencerait à placer le Canada dans une position neutre, d'équité envers les deux parties, permettant de faire avancer l'ordre du jour des deux parties. Il s'agit de modifications minimales. Ce n'est pas tout ce que nous voudrions voir, parce que nous voudrions que l'accord soit modifié, mais c'est quelque chose qu'on ne peut pas faire.

La présidente: D'accord, merci.

Pour la dernière ronde, monsieur Iftody, s'il vous plaît.

M. David Iftody: Merci, madame la présidente, et merci beaucoup, amis, mesdames, messieurs.

Monsieur Good, en particulier, j'ai été une fois de plus impressionné par vos interventions. C'est la deuxième fois que je vous ai entendu. Je crois que je vous ai rencontré dans mon bureau il y a quelques mois, en compagnie d'autres représentants. Nous avons eu ces entretiens, et j'estime que vous avez parlé de manière très éloquente. J'apprécie tout simplement ce que vous êtes et vos convictions. Merci.

Madame la présidente, j'ai quelques questions à passer en revue, et quelques commentaires de nature générale. Bon sang, j'aimerais avoir plus de temps, parce que nous avons entendu tellement d'informations des témoins.

Je vais commencer par une remarque. Je connais très bien la Convention de la Baie James et du Nord québécois. J'ai travaillé comme consultant pour le compte du chef Billy Diamond pendant un certain nombre d'années, de sorte que je connais les dispositions qu'elle contient. Je connais bien les gens qui l'ont rédigée, et je connais très bien le chef Diamond. C'est un bon ami à moi.

Vous savez probablement que lors de la signature de l'accord concernant le Nunavut, il y a eu récemment une action et une inquiétude qui a été manifestée par les Cris de la baie James, et d'autres provenant d'un groupe d'îles qui s'étirent bien au-delà de ce que semblent être les frontières normales du Nunavut. Il y a eu une certaine dispute à propos d'une utilisation en commun law de ces îles pour la pêche et à d'autres fins, par les Cris. Ce cas, bien sûr, est très semblable à celui que nous traitons ici, en ce sens que c'était une intervention de la onzième heure, ou une minute avant minuit, à l'époque, en ce qui a trait à ces dispositions. Je crois qu'on a demandé des injonctions. Je ne suis pas tout à fait sûr.

• 1415

En bout de ligne, cependant, dans mes discussions avec les représentants des Cris-Naskapis et des Cris en général, le Grand conseil des Cris, je ne crois pas qu'ils voulaient pousser l'affaire jusqu'au point où il y aurait eu, comme l'a laissé entendre M. Scott, un affrontement. Je ne crois pas que cette idée ait jamais été présente.

Monsieur Grant, avant de répondre à cette question, je voudrais vous dire ceci. Est-ce que vous dites à vos clients que dans ce genre de situation l'affrontement est soit une bonne chose, soit une chose possible pour eux? Je voudrais que vous répondiez à cette question quand j'aurai terminé avec quelques autres questions.

La deuxième remarque que je voudrais faire est que la question que vous soulevez concernant ces négociations d'après-Nishga est une des questions qui sont en Cour d'appel, comme vous savez. Ainsi, peut-être devrions-nous laisser la Cour d'appel statuer là- dessus, et peut-être que nous aurons d'autres éclaircissements sur ce cas en particulier lorsque la cour se sera prononcée.

Vous avez raison, on a reconnu l'existence d'une obligation fiduciaire de négocier, mais il n'y a toujours pas de réponse claire des tribunaux—et vous citez certains des arrêts—concernant la question de savoir si cela a été réglé ou non. De sorte que nous devons encore attendre des nouvelles à ce sujet.

La troisième chose que je voudrais mentionner est que dans tout l'examen des articles 33 à 35, et vous signalez que l'article 34 a été inclus après les faits, mais il faut reconnaître... et je crois que vous avez parlé du pouvoir de ces articles d'avoir, d'une façon générale, force et effet. Le projet de loi C-9, lorsqu'il arrivera à la Chambre des communes et qu'il entrera en vigueur, aura certainement ces forces et ces effets plus importants, de façon apparente et je crois également concrète, pour protéger vos intérêts ou les intérêts des Gitxsans et des Gitanyows.

Si vous lisez ces dispositions, je crois qu'elles sont tout à fait claires. Je voudrais inverser cette position, si je pouvais, et dire que vous êtes le négociateur en chef et l'avocat principal des Gitanyows. Si après des années de négociations vous aviez accepté 8 p. 100 de ce que vous avez sur cette carte ici, ne voudriez-vous pas inclure l'article 34 pour protéger vos droits et les droits de vos clients? Ne feriez-vous pas une chose sensée en incluant cet article, en tant qu'avocat prudent, pour protéger leurs intérêts dans l'accord en question? Je dirais que vous le voudriez probablement.

Je vous dis ces trois choses, compte tenu du temps limité.

La présidente: Merci beaucoup.

Voudriez-vous y aller le premier? Monsieur Grant.

M. Peter Grant: Je ne sais pas si j'ai le droit d'enfreindre le privilège procureur-client, de sorte que je ne vais pas parler de ce que je dis à tous mes clients. Je suis sûr que vous allez comprendre. Désolé. Pour les quelques-uns d'entre vous qui sont avocats, et pour tous les autres, je suis évidemment lié par certaines règles.

Mais dans l'histoire qui a été décrite, lorsqu'on parle d'affrontement,—je crois que vous étiez ici quand M. Rush a décrit ce qui était arrivé à son neveu—ce sont des choses qui arrivent sur le terrain; il ne s'agit pas de choses que les avocats conseillent à leurs clients.

M. David Iftody: J'ai un rappel au Règlement concernant cette question. J'ai écouté ce témoignage-là également, et il n'y avait rien du tout concernant l'affrontement en question avec ces messieurs, dont on a mentionné les noms, et dont on a de nouveau fait état dans le témoignage ici du policier du conseil de bande, qui reliait cet affrontement, tout malheureux et illégal qu'il ait été, au processus de négociation; que d'une certaine façon les Nishgas envoyaient des gens pour affronter... J'espère que vous ne faites pas ce lien-là.

M. Peter Grant: Non. Ce que je veux dire est qu'il y a une dynamique des attentes des gens en ce qui a trait aux négociations de traités. Les gens ordinaires ont des ententes ou des mésententes. C'est ce qui se produit. Lorsqu'on adopte des lois, les gens ont des attentes. Ce n'est pas que les Nishgas aient envoyé des gens. La question est qu'il s'agit de gens ordinaires qui disent, oh, ça c'est notre terre maintenant.

• 1420

C'est exactement de cela dont nous parlons. Voilà ce qui cause des problèmes.

Pour revenir à la Cour d'appel... selon ce que j'en comprends, la loi est appliquée selon l'exposé que le juge en fait. C'est ce qui est au coeur de la discussion aujourd'hui. M. Williams a mentionné que personne n'avait rejeté ce fait en ce qui a trait au processus accéléré. Pour l'instant, la loi est telle qu'elle a été exposée. C'est ce qui nous lie tous, vous, moi et mes clients.

Le troisième point que vous avez soulevé concerne les 8 p. 100. Si vous aviez écouté attentivement quand Mme Vegh y a fait référence et si vous aviez consulté la carte Calder de 1969, que les Nishgas ont présentée en cour, il s'agit de 25 p. 100 et non de 8 p. 100. C'est 25 p. 100 de leur territoire. Peut-être la différence n'est-elle pas si énorme.

Mais ce n'est pas le point central de la question que je veux vous poser à vous ou aux représentants du gouvernement qui siègent à cette table. Voici: vous avez inclus certaines dispositions de l'accord définitif dans l'avant-projet de loi. Ce matin, nous vous avons entendu parler au chef Delgamuukw et aux Gitxsans, et vous leur avez dit: «Regardez les articles 33, 34 et 35; ils vous protègent.» C'est ce que vous dites maintenant; c'est ce que le gouvernement dit aux Gitanyows. Et les Gitanyows vous disent: «D'accord, mettez-les dans le projet de loi, comme vous l'avez fait pour les autres dispositions.» Pourquoi le gouvernement n'a-t-il pas mis dans le projet de loi C-9 les articles qui sont cruciaux selon vous pour la protection des Gitanyows?

M. Keddy affirme qu'il sera très difficile de modifier même le projet de loi parce que ce serait mal vu. Mais qu'est-ce qui sera pire? C'est la première loi adoptée par le Parlement qui découle d'un traité signé en Colombie-Britannique, et elle servira de modèle. Ce sera beaucoup plus difficile après celle-là, et le Comité peut corriger le tir maintenant.

Les Gitanyows aimeraient savoir s'il serait difficile pour le comité de recommander que les dispositions soient intégrées au projet de loi et qu'elles aient le même poids que les autres dispositions. Ainsi, on pourrait éviter que les ambiguïtés autour de ces articles parce qu'un élément serait présent dans l'accord définitif mais non dans le projet de loi. Les Gitanyows pourraient au moins se dire «qu'ils sont sérieux et qu'ils tentent vraiment de nous protéger».

La présidente: Nous allons nous interrompre. J'en profite pour remercier tous les témoins qui se sont présentés aujourd'hui.

Nous allons suspendre la séance pendant cinq minutes pour permettre aux témoins de quitter; nous entendrons le prochain témoin immédiatement après.

Merci beaucoup. Nous avons apprécié vos témoignages. Je crois qu'ils nous ont permis de mieux comprendre.

• 1423




• 1433

La présidente: Merci beaucoup. Nous nous sommes déjà présentés durant la première partie de la séance. Nous allons donc commencer immédiatement.

J'aimerais accueillir notre deuxième témoin, qui se présente à titre individuel. Il s'agit de M. Jim Davidson, ancien maire de Smithers. Monsieur Davidson, la séance durera jusqu'à 15 h 15. Je vous informe dès maintenant que je souhaite qu'il y ait au moins un tour de questions, pour que vous puissiez bénéficier de certaines réactions. Je vous suggère donc de limiter votre présentation à 10 ou 15 minutes au maximum.

La parole est à vous. Bienvenue.

M. Jim Davidson (témoignage à titre personnel): Merci, madame la présidente et membres de la Chambre du Parlement.

Je me retrouve ici dans une position assez singulière. J'ai en effet le privilège de représenter le peuple de la région, non par choix mais parce que j'ai été désigné. Je tiens à dire à quel point j'apprécie que le comité permanent de la Chambre des communes nous rende visite dans notre région.

Je suis convaincu que vous en avez déjà assez entendu pour comprendre l'importance de votre visite à nos yeux.

Si vous avez compris cette importance pour les Gitxsans et les Gitanyows, je peux vous assurer que c'est tout aussi important pour le reste des gens qui vivent ici.

Je ne sais pas pourquoi j'ai été choisi. Peut-être, tout comme eux, est-ce parce que je peux dire que je suis né ici. Je peux affirmer que c'est mon pays. Je le dis de tout mon coeur. C'est ici que je suis né et c'est ici que je mourrai. C'est ici que mon père et mon fils sont enterrés. Je me sens tout autant l'enfant de ces terres que mes frères et soeurs qui ont témoigné au nom des Gitanyows et des Gitxsans.

• 1435

Je suis content que vous soyez venus, parce que nous parlons du premier traité depuis des années, depuis les traités Douglas, je crois, ou depuis le Traité numéro 8, dépendant du point de vue où l'on se place. L'important est que nous soyons ici, et je tenterai de vous parler avec tout mon coeur, mais aussi au nom des autres personnes, celles que vous n'avez pas entendues, celles qui m'ont dit qu'elles voulaient avoir le droit de parler. Nous faisons aussi partie du paysage. Voilà. Je vais maintenant vous livrer mes remarques.

Je vais citer le chef Joseph Gosnell, alors qu'il s'adressait au Vancouver Board of Trade, le 24 février 1998. Voici les paroles du chef Gosnell à ce moment:

    Ce que nous voulons est simple. Nous voulons participer de façon égale et entière à la vie sociale et économique du Canada.

Il a poursuivi ainsi:

    Nos jeunes insistent de plus en plus pour devenir des partenaires de plein droit de la collectivité canadienne.

Je crois que la plupart des gens qui considèrent les traités sur cette base veulent exactement la même chose: devenir des participants de plein droit et à part entière dans la vie sociale et économique du Canada et de cette partie de la Colombie- Britannique, et faire partie de cette collectivité. Les traités parlent de relations, je suis sûr que vous avez entendu cela toute la journée. Il faut s'inquiéter des relations qui ne sont pas justes. Celles qui sont justes se passent de toute intervention. Qu'est-ce qui ne va pas dans ce qui n'est pas juste?

Nous avons commencé—par «nous», j'entends nous tous ensemble—quand le gouvernement s'est réuni après les premières décisions Delgamuukw et qu'il a rédigé, en juin 1994, de concert avec les Gitxsans et les Wet'suwet'ens, la version provisoire de ce qu'on a appelé un traité de reconnaissance et de respect. Il ne s'agissait pas d'un traité, mais plutôt d'un accord de reconnaissance et de respect. On nous a dit à ce moment que, d'ici 18 mois, nous aurions quelque chose entre les mains. Mais rien ne s'est passé 18 mois plus tard, non? Et rien ne s'est passé depuis, ai-je raison?

Cependant, nous avons mis un processus en branle, et nous avons bel et bien un traité en main. Je ne crois pas qu'il soit parfait, mais je crois qu'il marque certaines réalisations. C'est un début. Il établit une relation entre les Nishgas, la Colombie- Britannique et le Canada, et c'est très bien. Mais les Nishgas vivent dans une vallée, éloignés de la plupart d'entre nous, et ils se sont battus pour cela depuis un siècle. Ce traité aura un impact pour nous tous, pas seulement pour les Nishgas. Si nous isolons le traité des Nishgas en nous disant qu'il concerne seulement les Nishgas et leur vallée, nous pourrions probablement dire qu'il a l'air correct—et je crois que c'est vrai en grande partie.

Mais vous devez vous rendre à l'évidence: les répercussions du traité ne toucheront pas seulement les Nishgas. C'est ce que vous avez entendu aujourd'hui. Les Gitanyows et les Gitxsans aussi subiront des répercussions, de même que le restant d'entre nous, les Wet'suwet'ens. Les traités ne concernent pas Ottawa ou Vancouver, ni Victoria; ils touchent Smithers, Terrace, Burns Lake, Hazelton. C'est à ces endroits que les traités seront appliqués. Et nous sommes ceux, tous, chacun d'entre nous, qui devront faire en sorte que tout se déroule bien.

• 1440

J'ai entendu dire que certains n'étaient pas d'accord avec la répartition des terres stipulée par le traité—et c'est mon opinion, mon opinion seulement, même si j'espère ne pas être le seul à penser ainsi—mais l'autonomie gouvernementale et l'administration collective des terres ne constituent pas un problème au Canada. Honnêtement, ce n'est pas un problème. Qui a entendu quelque plainte au sujet des huttériens dernièrement? Essentiellement, c'est ce dont nous parlons. Alors, quand la Nation nishga demande d'administrer ses terres collectivement, cela ne pose aucune difficulté à mes yeux. Certaines sociétés possèdent infiniment plus d'avoirs et de contrôle que les Premières nations autonomes, même la plus importante. Le vrai problème est de faire en sorte que le potentiel économique bénéficie à tous, parce que c'est ce qui compte vraiment.

Je suis ici depuis assez longtemps—pas 100 ans, mais quand même—il fut vraiment un temps où le poisson et la fourrure étaient des richesses. Si vous avez entendu parler des calamités qui ont frappé la Colombie-Britannique, vous savez sûrement que le poisson et la fourrure ne sont plus une richesse. Avec les piscicultures et les problèmes des rivières. Avec les—je dois être prudent. Je suis fermier moi-même et j'aime les animaux, mais je dois peser mes mots. Disons que les défenseurs des droits des animaux ont rendu l'industrie de l'élevage des animaux à fourrure plutôt suspecte. Franchement, que sera l'avenir des éleveurs d'animaux à fourrure du nord-ouest? La richesse animale de la vallée des Nishgas est-elle si grande? Voilà 40 ans, l'industrie forestière était florissante. Je m'en souviens parce que j'étais dans la vallée dans les années 50, alors qu'elle abondait en scieries et que nous travaillions tous—tous pouvaient tirer profit du développement économique. Avec des mains et de l'ambition, Autochtones ou non, nous avions tous notre chance. Mais ce genre d'économie aussi a changé. Les petites scieries se sont transformées en de grandes multinationales qui ont fait main basse sur l'industrie forestière.

Le plus difficile sera l'application du traité. Quand les Nishgas s'y mettront, ils auront de la difficulté à atteindre cette participation égale et entière. Il faudra établir des liens à l'échelon local; nous devrons trouver le moyen de collaborer vraiment. Et quand je dis cela, je fais référence à points particuliers du traité qui m'inquiètent, notamment dans les secteurs social et de la santé. Le traité nous sépare en groupes distincts, il semble vouloir établir des systèmes distincts pour des peuples distincts, ce que nous ne sommes pas et ce que nous ne pouvons pas nous offrir. Nous ne pouvons nous offrir certaines choses que nous avons maintenant. Comment pourrons-nous offrir deux systèmes distincts? Nous avons les moyens de satisfaire les besoins de notre peuple parce que nous avons de bonnes terres, mais nous n'avons pas les moyens de nous offrir ce qui n'est pas pratique. Nous devons collaborer.

• 1445

Nous avons un autre problème, que vous avez sous les yeux aujourd'hui. La décision Delgamuukw sera soit négociée, soit portée devant les tribunaux, et nous avons les mains liées. La pire chose qui peut nous arriver maintenant, compte tenu de notre situation économique, est l'incertitude, les luttes constantes au sujet de nos ressources, les conflits entre nous, au sein du peuple—et nous vivons de l'incertitude.

J'aimerais mentionner une autre chose avant de conclure. Je serai très direct. Honnête. Je n'arrive pas à comprendre. Je parle de cet article, de celui-là. L'autonomie gouvernementale pour tous les peuples autochtones ne me pose aucune difficulté. Je suis depuis longtemps un défenseur de cette cause. Je ne vois aucune difficulté à ce que l'on ait une grande autonomie pour les questions culturelles. Mais le secteur qui m'inquiète énormément, après de mon expérience de la politique municipale, est celui de l'utilisation des terres. Dans ce traité, c'est l'article 44, puis l'article 45 qui leur donne ce droit. Il y est stipulé que le droit d'utiliser les terres qui est conféré aux Nishgas a préséance sur l'autorité des deux autres gouvernements.

J'ai énormément de difficulté à accepter ce passage. L'un des objectifs qui nous tiennent le plus à coeur est certainement l'égalité. C'est quelque chose que la plupart d'entre nous ne comprenons pas. Qu'est-ce qui s'est passé? Pourquoi une disposition qui découle essentiellement de l'accord de Charlottetown se trouve- t-elle dans ce traité? L'accord de Charlottetown a été rejeté par la population canadienne. Le concept d'égalité, que ce soit pour le peuple qui administre cette collectivité, pour le Conseil de Smithers et celui d'Aiyansh, ou de Grenville, de Canyon City, devrait être le même pour tous.

Dans les affaires concernant les terres—c'est toujours un problème pour le Conseil, mais pas tant pour les Nishgas, parce qu'ils sont éloignés—prenons l'exemple de Burns Lake, où une collectivité autochtone vit à l'intérieur des limites de la ville. Vous allez donner à un groupe des pouvoirs en matière de terres qui dépassent ceux du gouvernement fédéral et ceux de la province, et vous allez dire à l'autre groupe, qui devra probablement fournir des services, et qui de fait fournit des services actuellement, qu'ils n'ont pas ces droits.

Je crois que c'est une erreur. Je vous ai entendu parler de tous les problèmes que vous aurez à concilier tout ce que vous avez entendu jusqu'à maintenant. Mais si vous avez tant de problèmes, pourquoi ne pas radier l'accord de Charlottetown du préambule de ce projet de loi?

Merci.

La présidente: Merci beaucoup.

Voulez-vous entamer la première série de questions, monsieur Scott?

M. Mike Scott: Merci, madame la présidente. Merci à vous, monsieur Davidson. J'apprécie vraiment votre visite et votre présentation.

Je tiens à dire que vos commentaires sur l'autonomie gouvernementale sont très pertinents.

• 1450

J'ai remarqué que vous aviez commencé en parlant des huttériens. Vous reconnaîtrez avec moi qu'aucune loi ne confère aux huttériens l'autonomie qu'ils exercent depuis plus d'un siècle qu'ils sont dans ce pays afin de diriger leurs affaires internes et leurs relations avec les collectivités huttériennes.

Vous savez aussi, j'en suis sûr, que dans quatorze domaines au moins—en fait, ils sont plus nombreux—le gouvernement central des Nishgas sera investi d'une compétence législative qui aura préséance sur celle du gouvernement fédéral et du gouvernement de la Colombie-Britannique, ce à quoi vous avez fait allusion.

Comme vous l'avez souligné très justement, ce concept représentait l'un des cinq éléments clés de l'accord de Charlottetown, qui a été rejeté au vote par la population canadienne. En passant, il a été rejeté par 67 p. 100 en Colombie- Britannique, et les Autochtones de cette province l'ont rejeté dans une proportion similaire.

Si vous envisagez l'accord Nishga dans son ensemble, sans tenir compte des affaires territoriales, des ressources, etc., qui sont des points litigieux pour certaines personnes, ne diriez-vous pas que votre collectivité s'inquiète plus des dispositions liées à l'autonomie gouvernementale que de tout autre aspect?

M. Jim Davidson: À l'origine, si vous m'aviez posé la même question, monsieur Scott, je vous aurais répondu que l'aspect des impôts nous préoccupait plus que tout autre. C'est l'égalité des taux d'imposition qui préoccupaient le plus tous les membres de la collectivité que je connais. Les Nishgas ont trouvé une solution. Je leur baisse mon chapeau pour cette réussite, parce que le traitement de cette question a été très efficace.

Quel sujet d'inquiétude vient ensuite? Je suis un grand défenseur des traités. Cependant, là où le bât blesse, c'est dans la façon d'aborder l'autonomie gouvernementale. Notre plus grave erreur depuis de nombreuses années a été de ne pas rejeter la Loi sur les Indiens pour permettre l'autonomie gouvernementale. Avec le temps, notre peuple a construit sa propre conception du gouvernement, comme vous l'avez fait avec votre Parlement. Quand vous avez imposé aux autres peuples des lois qui régissent leurs gouvernements, vous n'avez pas tenu compte de ce qu'ils vous disaient, à savoir qu'ils s'étaient déjà donné un gouvernement, qu'ils s'étaient déjà gouvernés eux-mêmes, depuis des années. Nous savons que c'est vrai, parce que même au sein de nos familles, nous établissons des règles de vie, une sorte de gouvernement.

Je crois que vous avez probablement raison, monsieur Scott: ce n'est pas l'autonomie gouvernementale qui est en jeu. C'est plutôt ce qu'elle signifie. Je crois que si nous pouvions comprendre ce qu'est l'autonomie gouvernementale et arriver à un consensus, ce ne serait pas un problème. C'est ce qu'on entend par autonomie gouvernementale qui dérange la plupart des gens.

La présidente: Monsieur Scott, vous avez encore deux minutes à votre disposition, si vous avez encore des questions.

M. Mike Scott: Non, je vais m'arrêter ici.

La présidente: Très bien. Merci.

[Français]

Monsieur Bachand.

M. Claude Bachand: Merci, madame la présidente.

Monsieur Davidson, je veux faire avec vous une espèce de cheminement. Vous nous avez présenté les enjeux qui chatouillent normalement certaines personnes lorsqu'un traité de ce genre est porté à leur connaissance.

Vous avez parlé d'égalité, de droits et de certitude. Je vais vous demander de réagir à mes propos tout à l'heure. Depuis que je m'occupe du dossier autochtone, je me suis bâti dans mon esprit une certaine logique à laquelle j'aimerais que vous réagissiez, entre autres sur la notion d'égalité.

Je crois qu'il y a un peuple du Québec et je crois qu'il y a des peuples autochtones. Je ne veux pas faire de nuance entre un peuple et une nation parce qu'il n'y a pas de définition claire de cela. Disons que les mots «peuple» et «nation» sont souvent employés.

À partir du moment où reconnaît que des gens forment un peuple, on leur reconnaît aussi des droits spécifiques, et cela peut se faire de deux façons. Cela peut se faire par le législateur, qui va reconnaître qu'il y a un peuple nisga'a et que ce peuple a des droits. Cela peut aussi se faire par les cours, notamment par la Cour suprême, qui a rendu beaucoup de jugements dernièrement. Elle interprète l'intention du législateur, elle trouve des zones grises et elle dit de quelle façon elle voit cela. Par la suite, le législateur est obligé de s'ajuster.

• 1455

Jusqu'à maintenant, donc, du côté de la légalité, à partir du moment où on reconnaît un peuple ou une nation, on lui reconnaît des droits spécifiques et on dit qui peut fixer ces droits-là.

Maintenant, quand deux peuples se rencontrent et doivent concilier leurs intérêts respectifs, il faut arriver à une entente sur un partenariat possible. C'est comme cela que je vois cette entente aujourd'hui. La nation canadienne a compris qu'il y avait une nation nisga'a et qu'elle devait lui donner des droits. Cela a fait l'objet d'une négociation qui a duré 100 ans et qui s'est poursuivie de façon plus intensive dans les 30 dernières années.

J'arrive à la question de la certitude. À partir du moment où on dit qu'on est tous égaux et qu'on reconnaît qu'il y a des peuples ayant des droits, pour concilier ces droits, on se rencontre et on négocie, parfois sous la poussée des cours, parfois sous la poussée des individus ou des communautés. Il me semble que lorsqu'on arrive à conclure un traité, on arrive à la certitude. On sait que les Nisga'as ne pourront pas pêcher 50 p. 100 du saumon de la rivière Nass. C'est précisé ici. On sait qu'ils ne pourront pas couper tant de mètres carrés d'arbre, car c'est inscrit dans la convention. On sait qu'ils ne pourront pas construire d'usine de traitement pour le poisson avant huit ans. On sait qu'ils n'auront toujours pas de taxe à payer pour l'instant, mais qu'ils vont commencer à en payer dans huit et douze ans.

J'aimerais que vous réagissiez à cela. Il me semble que c'est la seule façon de procéder. Si on garde le statu quo, les gens ne sauront plus où se situer et certains actes seront commis. Il y a des gens qui vont prendre plus que la moitié du saumon et ils diront que c'est leur droit. Vous comprendrez que pour moi, c'est le parfait mariage: on est arrivé à une entente de partenariat qui a créé une certitude. Est-ce que ma pensée et la vôtre sont conciliables?

[Traduction]

La présidente: Monsieur Davidson, s'il vous plaît.

M. Jim Davidson: Merci d'avoir posé cette question, monsieur Bachand. Oui, je suis tout à fait d'accord, mais je crois que cela dépasse ce droit. C'est la relation qu'il faut construire, de sorte que ces droits puissent être exercés et que leur exercice permette à d'autres peuples d'exercer leurs droits. À mon sens, un droit existe dans la seule mesure où il n'a aucun effet néfaste. Certains droits vous appartiennent et m'appartiennent du seul fait de notre existence. Non? D'autres droits, par contre, doivent être négociés, ce qui a été fait pour ce traité.

Quelqu'un a dit je crois qu'il était fermier. Les 4-H ont un dicton selon lequel on «apprend en faisant». Il est absolument primordial que nous apprenions en faisant. C'est l'une des raisons pour lesquelles j'éprouve des réserves relativement à l'établissement d'un troisième gouvernement. Je ne parle pas des droits. Je suis tout à fait d'accord pour donner des droits aux peuples. Mais je m'interroge sur l'octroi de droits que nous ne comprenons pas encore, quand le rejet ou l'acquiescement peuvent entraîner on ne sait quels changements.

Une pierre se trouve au sommet de la montagne, et elle peut rouler dans quatre directions. Si vous dites: «Poussez-la, simplement», Dieu sait ce qui se passera. Jetons-la dans le ravin. Débarrassons-nous de cette pierre pendant que nous la contrôlons encore, au lieu de la pousser pour voir la direction qu'elle prendra.

• 1500

Merci.

La présidente: Madame Hardy.

Mme Louise Hardy: Vous semblez vous préoccuper surtout de la question de l'autonomie gouvernementale Le Yukon compte actuellement au moins huit Premières nations autonomes. Certaines ont décidé de faire les choses d'une façon mais, dans tous les cas, quand des problèmes communs entre les collectivités... Vous semblez penser que, quand une collectivité compte des membres d'une Première nation et d'autres qui n'en font pas partie, il risque d'y avoir énormément de problèmes. Pourtant, on a vu l'émergence de conseils conjoints de planification de l'utilisation des terres. De plus, une collectivité a pris des décisions sur le partage des installations de loisir, et les deux parties ont participé. Un modèle de planification forestière a été établi avec la participation de tous, à l'étape de l'élaboration et de la mise en oeuvre.

Certaines Premières nations ont décidé de se concentrer sur la justice; pour elles, c'est un aspect d'une grande importance. D'autres ont mis l'accent sur les travaux constitutionnels, sur la mise en oeuvre de processus d'autonomie gouvernementale. D'autres encore ont décidé que le bien-être des enfants ou les toxicomanies étaient des plus importants.

Tout ce qu'ils ont fait et décidé de faire en tant que groupes n'a rien changé à la façon dont je vis au Yukon. Mes droits de citoyenne canadienne n'ont pas souffert parce qu'ils voulaient reconnaître leurs mariages traditionnels ou adopter une combinaison de méthodes traditionnelles et modernes de se gouverner. Je dirais plutôt que cela a permis de rehausser leur image, de sorte qu'ils sont maintenant perçus comme des égaux, comme ayant droit au chapitre quand il s'agit des terres qu'ils habitent depuis tant d'années. Il y a eu une transition. Certains voudront continuer, peut-être, d'élever leurs enfants d'une façon différente, ou d'essayer de donner une nouvelle vie à leur langue et de l'utiliser de diverses façons.

En fait, j'essaie de vous rassurer. Rien de grave n'est arrivé, mais je ne crois pas non plus qu'il a été facile pour les Premières nations de retrouver leur propre mode de vie.

M. Jim Davidson: Je n'ai aucune difficulté avec ce que vous dites. En fait, vous remarquerez que je n'ai rien dit du tout au sujet de la culture. J'ai parlé de l'utilisation des terres. Pourquoi en parler? Parce que c'est un domaine susceptible d'entraîner des conflits quand la portée des traités sera élargie.

Me permettez-vous de vous donner une explication? Les membres de nos Premières nations ont été sous la tutelle de la Loi des Indiens depuis tant d'années—comme ils l'ont dit ce matin, ils étaient les pupilles du gouvernement. Savez-vous que les municipalités sont les pupilles du gouvernement provincial, qu'elles sont leurs créatures? Elles sont les créatures du gouvernement et elles sont sous la mainmise des gouvernements. Quand nous avons adopté un règlement de zonage dans notre ville et que le gouvernement provincial a décidé de construire un édifice sans construire de stationnement, il ne l'a pas fait. Il pouvait passer outre au règlement.

J'essaie simplement de dire que, quand vous donnez à une partie le droit de passer outre à une loi fédérale ou provinciale sur les questions d'utilisation des terres, et que vous dites à l'autre partie non, tu feras ce que papa a dit... je pourrais aller plus loin. C'est vraiment une question épineuse. Vous rappelez-vous quand le gouvernement de l'Ontario a dit à Toronto: «Vous allez faire ceci, de cette façon-ci, et nous aurons une municipalité énorme, un point c'est tout. Fermez-la et asseyez-vous!»? C'est ce qui nous dérange—pas le fait que notre peuple autochtone ait des droits. Cela ne me dérange pas. J'en suis très heureux. Je dis bravo. Vraiment.

Mais qu'arrive-t-il quand il y a deux groupes et que vous dites à l'un d'entre eux qu'ils seront plus égaux que l'autre? C'est tout.

Mme Louise Hardy: Quand on en vient à l'application des lois, les conflits sont très clairement définis. Une loi provinciale peut entrer en conflit avec la loi fédérale ou la loi territoriale. Il peut arriver par exemple qu'une Première nation décide de rehausser les normes en matière d'environnement sur ses terres, et que le gouvernement provincial ou fédéral dise non, qu'il faut tolérer un tel de niveau de pollution. Si la Première nation rétorque qu'elle ne veut pas... Je ne vois pas pourquoi on n'appliquerait pas les normes les plus élevées. Les Premières nations ne pourront abaisser les normes; elles devront se conformer aux lois fédérales ou provinciales, ou établir des exigences encore plus élevées. Elles ne pourront diminuer la portée de quelque loi que ce soit. Elles peuvent seulement les dépasser.

M. Jim Davidson: Je vous concède ces points.

• 1505

Supposons simplement que des enjeux économiques soient en cause et que les Nishgas décident que la seule façon d'arriver à leurs fins est d'établir des enclaves économiques sur leurs terres. Je ne suis pas certain que cela est impossible, que nous ne subirons pas de telles décisions, compte tenu des modalités d'utilisation des terres, de cette législation regrettable sous certains aspects. Les choses ne se passeront peut-être pas ainsi. J'ai peut-être tout à fait tort de m'inquiéter. Je veux simplement dire que beaucoup de gens s'inquiètent à ce sujet, surtout si on enchâsse cette disposition dans la Constitution. Si nous avons commis une erreur, que ferons-nous?

La présidente: Monsieur Keddy.

M. Gerald Keddy: Merci, madame la présidente.

J'aimerais vous remercier de ce témoignage. Je crois que vous avez parlé avec votre coeur, et je respecte cette attitude.

Mais, avec tout mon respect, je suis en désaccord avec certaines de vos opinions. Je crois que vous devez prendre le temps d'examiner attentivement certains exemples qui figurent dans le traité et certaines des critiques que vous avez entendues. Tenez compte du fondement de ces critiques.

Nous comprenons bien entendu que des territoires se chevauchent. En ma qualité de député, je n'essaie certes pas de dire que ce traité est parfait, mais beaucoup d'éléments... Tout d'abord, ce traité ne fait pas partie de la Constitution, malgré ce qu'en disent les députés. De toute évidence, c'est faux. Il est protégé par la Constitution, mais il ne fait pas partie de la Constitution.

Le traité pourra être modifié sans qu'il faille amender la Constitution. Certaines parties du traité pourront être modifiées par la province de la Colombie-Britannique et par la Nation nishga. D'autres aspects du traité pourront être modifiés par la province de la Colombie-Britannique et la Nation nishga, et le gouvernement fédéral pourra approuver le changement. Il y a une énorme différence entre des droits qui sont protégés par la Constitution et des droits qui font partie de la Constitution. Si des droits sont constitutionnels, une révision constitutionnelle est nécessaire pour les modifier, et huit provinces doivent sanctionner la révision. Cela ne se produira jamais.

Je comprends que vous fassiez référence à Charlottetown, mais vous devriez aussi comprendre que ce pays comporte des constituantes—les provinces, les territoires, où se trouvent des municipalités, des villages et des villes—qui se sont dotées de règlements qui ne sont pas égaux pour tous les Canadiens, qui touchent seulement les gens qui y habitent.

La Nouvelle-Écosse a signé l'accord Canada-Nouvelle-Écosse sur les ressources offshore. Terre-Neuve a signé l'Accord atlantique Canada-Terre-Neuve. L'accord donne à la Nouvelle-Écosse la compétence en matière de droits sur les ressources pétrolières sous-marines.

On trouve le même processus en Colombie-Britannique. Pas au Nouveau-Brunswick, ni à l'Île-du-Prince-Édouard. Au moment où nous nous parlons, le gouvernement fédéral a le plein contrôle sur leur zone extracôtière.

Je voudrais ajouter un autre point. Une fois encore, il s'agit d'un échange d'idées et d'opinions. J'essaie de démontrer que vous faites vraiment fausse route sur certains points. Sur d'autres, c'est peut-être moi qui fait fausse route. Vous nous dites que vous croyez en un gouvernement autonome, mais que vous n'avez pas l'intention de le réaliser. Il faut à un moment donné dire ce que nous entendons faire. Vous ne pouvez pas croire à l'autonomie gouvernementale d'un côté, et de l'autre dire que vous n'avez pas l'intention de l'essayer.

Oui, toutes les parties devraient être protégées. Nous voulons donner des droits aussi égaux que possible à tous les Canadiens, en tenant compte du fait que, dans les domaines où les territoires les excèdent... Par exemple, les Nishgas auront des droits qui sont à toutes fins utiles des droits provinciaux, des droits d'adoption. Les droits fédéraux toucheront la citoyenneté.

On a allégué à propos de ce traité que vous étiez imposés sans droit de représentation. Ce n'est pas ce qui est dit. Vous en avez parlé. C'était un problème, que vivent entre autres les Premières nations de la Nouvelle-Écosse. Les collectivités non autochtones éprouvent beaucoup de ressentiment par rapport à l'exonération fiscale. On ferait une erreur si on ignorait ce fait. C'est une réalité pour les membres de la société qui ne sont pas autochtones. Cependant, l'exonération fiscale existe pour une raison bien précise. Nous pouvons nous pencher sur cette question pour la comprendre, puis passer à autre chose.

• 1510

Tôt ou tard, nous devrons comprendre que, dans la limite du raisonnable, comme l'a énoncé ma collègue Mme Hardy plus tôt, aucune loi adoptée par les Nishgas ne pourra être moins sévère que sa contrepartie provinciale, et aucune loi ne pourra être moins sévère que sa contrepartie fédérale. Ainsi, aucun mécanisme afférent à l'environnement, par exemple une loi régissant l'environnement, n'obligera la pollution sur le territoire. Les lois ne pourront certainement pas être moins sévères ou moins applicables que les lois de la province de la Colombie-Britannique ou du Canada.

Par conséquent, le processus des traités assure une protection. Mais au-delà, il faudra nous assurer à nous-mêmes, à la Nation nishga et aux autres Premières nations que nous pourrons vivre avec ce traité. À la fin du processus, il faudra nous rappeler que la Charte des droits et libertés reste applicable, tout comme la Constitution du Canada, et qu'elles assurent la protection de tous les citoyens canadiens. Elles restent applicables, c'est certain.

Je suis désolé si j'ai dépassé le temps.

La présidente: Vous avez fini juste en temps, mais si notre témoin a des commentaires...

M. Jim Davidson: Je n'ai vraiment rien à dire à ce sujet.

La présidente: Très bien, Merci.

Le dernier à poser des questions sera M. Finlay.

M. John Finlay: Merci, madame la présidente.

Monsieur le maire, je suis très heureux de votre présence. Nous n'avons pas pu visiter votre ville. Nous avons eu un bon aperçu de ce beau centre communautaire et, si nous finissons à temps, nous pourrons peut-être visiter un peu avant la tombée du jour. Nous avons certes fait beaucoup d'efforts pour venir ici, et je crois que nous devrions à tout le moins visiter un peu et apprécier.

Aujourd'hui, nous avons accueilli un très bon auditoire, un large auditoire, venu voir ce que nous essayons de faire.

M. Keddy a dit une bonne partie de ce que je voulais dire au sujet de ces articles de l'accord. J'ai souligné une autre ligne dans l'article 9, qui suit l'article 8. Voici ce qui est dit:

    8. L'Accord ne modifie pas la Constitution du Canada, notamment:

      a. la répartition des pouvoirs entre le Canada et la Colombie- Britannique;

Voici ce que contient l'Accord:

    9. La Charte canadienne des droits et libertés s'applique au gouvernement nishga concernant toutes les questions relevant de son pouvoir, eu égard au caractère libre et démocratique du gouvernement nishga tel qu'énoncé dans l'Accord.

J'imagine qu'on a inséré cette disposition pour qu'il soit clair pour tous que les Nishgas ne créeront pas une dictature ou rien de semblable.

Puis l'article 13 va comme suit:

    13. Les lois fédérales et provinciales s'appliquent à la Nation nishga, aux institutions nishgas, aux sociétés nishgas, aux terres nishgas et aux terres nishgas en fief simple, mais:

      a. en cas d'incompatibilité ou de conflit entre l'Accord et les dispositions de toute loi fédérale ou provinciale, l'Accord l'emporte dans la mesure de l'incompatibilité ou du conflit;

Je comprends que ces incompatibilités ou ces conflits ne peuvent en soi contrevenir à la Constitution, ni les lois de la Colombie-Britannique, du Canada, ou de tout autre gouvernement libre et démocratique. À l'instar de M. Keddy, je crois qu'il faut tout simplement donner à la Nation nishga le leadership et la possibilité d'adopter des lois afférentes aux domaines qui ont de l'importance à ses yeux. Ils sont aussi énumérés; ils doivent toucher à la culture, à la langue, aux terres, etc.

Mais j'aimerais que nous gardions en mémoire que dans l'article 59 du chapitre 11, «l'ordre public, la paix et la sécurité» sont abordés par l'autre bout de la lorgnette:

    59. Le gouvernement Nisga'a Lisims peut faire des lois concernant la réglementation, le contrôle ou l'interdiction de tout acte, activité ou entreprise sur les terres nishgas ou sur les terres submergées situées à l'intérieur des terres nishgas, qui constitue ou peut constituer une nuisance, une intrusion, un danger pour la santé publique ou une menace contre l'ordre public, la paix ou la sécurité, autre que des actes, activités ou entreprises autorisés par la Couronne sur les terres submergées.

Monsieur le maire, je crois que nous devrons permettre aux Nishgas de faire ce que le reste d'entre nous avons fait, ce que vous et votre municipalité avez fait. Vous n'avez probablement pas fait beaucoup d'erreurs, mais vous en avez peut-être commis quelques-unes, et il a peut-être fallu revoir ou modifier les règlements, ou même les révoquer. Peut-être cela arrivera-t-il aux Nishgas, qui vivront ce merveilleux exercice de l'autonomie gouvernementale après 500 ans de manipulation que leur ont imposé la Loi des Indiens et les gouvernements de ce pays.

Merci, madame la présidente.

La présidente: Avez-vous des commentaires?

M. Jim Davidson: Non.

• 1515

La présidente: C'était notre dernier témoin. Nous n'avons plus de temps. J'aimerais vous remercier d'avoir participé à notre audience. J'imagine qu'il est quelque peu intimidant de témoigner à titre individuel devant un comité permanent. Je donne tout mon respect à ces personnes qui osent nous faire part de leurs idées. Ces échanges sont très riches pour nous tous, qu'il s'agisse de groupes ou d'individus. Nous vous sommes très reconnaissants de votre visite.

Avant de lever la séance d'aujourd'hui, j'aimerais aussi remercier toutes les personnes de l'assistance qui se sont jointes à nous. Merci beaucoup.

M. David Iftody: Rappel au Règlement, madame la présidente.

La présidente: Oui.

M. David Iftody: Je me demande si nous pourrions applaudir ceux qui nous ont servi un si délicieux repas et des vivres pour la journée. Merci beaucoup.

Des membres: Bravo!

La présidente: La séance est ajournée jusqu'à demain.