NDVA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON NATIONAL DEFENCE AND VETERANS AFFAIRS
COMITÉ PERMANENT DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES ANCIENS COMBATTANTS
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le jeudi 16 décembre 1999
Le président (M. Pat O'Brien (London—Fanshawe, Lib.)): Je déclare ouverte la séance du Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants. C'est sans doute la dernière fois—mais on ne sait jamais—que nous siégerons avant le congé de Noël.
Avant de donner la parole aux témoins, je tiens à dire aux membres du comité que, malheureusement, notre voyage aux États-Unis a été, disons, annulé, ou n'a pas été approuvé en raison d'autres... facteurs qui ont incité certains leaders à la Chambre à se prononcer contre ce voyage. C'est triste à dire, mais c'est ainsi que les choses se passent à Ottawa.
Alors voici ce que nous allons faire. Je ne sais pas si je l'ai mentionné, mais j'ai parlé au général Baril, vendredi dernier, et il a invité le comité, chose qu'il entendait faire au moment de sa comparution, à se rendre à Colorado Springs à bord d'un avion militaire. Je sais que le ministre souhaite que nous fassions ce voyage. L'accord NORAD doit bientôt être renouvelé, et cela devrait se faire de façon plus ou moins automatique, mais il y a toute la question du système de défense anti-missiles, de la participation du Canada à ce système, ainsi de suite, qui doit être examinée.
Je viens de parler au greffier, et nous allons communiquer avec le général Baril le plus tôt possible pour lui dire que nous aimerions discuter de son invitation. Je lui avais dit que nous attendions une décision à ce sujet, mais je pense que nous allons maintenant pouvoir en discuter avec lui. Nous allons essayer de respecter l'échéancier qui avait été fixé à l'origine. Nous vous donnerons des précisions dès que nous aurons d'autres renseignements.
Cela dit, je désire souhaiter la bienvenue aux colonels Sean Henry et Alain Pellerin. M. Henry est analyste principal pour les questions de défense, et M. Pellerin, directeur général de la Conférence des associations de la défense.
Messieurs, je m'excuse pour l'autre jour. Ce genre d'interruption est presque inévitable sur la Colline, avant un congé. En fait, nous devons, plus tard dans la journée, participer à un vote vers 10 h 30 ou 10 h 45. Toutefois, nous aurons eu le temps d'entendre votre témoignage et vos réponses aux questions. Nous allons donc maintenant écouter votre déclaration, et ensuite passer aux questions. Bienvenue.
[Français]
Le colonel Alain Pellerin (directeur général, Conférence des associations de la défense): Monsieur le président, membres du comité, c'est un plaisir et un privilège pour moi de comparaître devant votre comité. Je suis aujourd'hui accompagné du colonel Sean Henry, tel que mentionné, qui est notre principal analyste des questions de défense.
La Conférence des associations de la défense, la CAD—CDA en anglais—a été créée en 1932, regroupe 29 associations et représente environ 600 000 membres dans tout le Canada. C'est un organisme à but non lucratif qui étudie les problèmes de défense et de sécurité, ainsi que le bien-être des Forces armées canadiennes.
Je veux d'abord exprimer une vive frustration face à notre incapacité de bien faire comprendre aux Canadiens la nature des graves problèmes qui touchent notre défense et leur incidence négative sur notre bien-être national.
Les Forces armées constituent un élément fondamental de l'édifice de notre nation. Elles défendent notre souveraineté et appuient nos intérêts économiques et politiques à l'étranger. Compte tenu de la fragilité de notre prospérité, cette question devrait intéresser les Canadiens de façon plus que passagère. Les Forces armées constituent une solide police d'assurance contre les graves conséquences de l'instabilité. Nous accueillons donc avec joie la récente résolution proposée par M. David Pratt et adoptée par ce comité de fournir des ressources adéquates à la défense.
• 0905
Au fil des ans, la CAD a étudié minutieusement la
situation de la défense au Canada. Nous avons été
particulièrement actifs depuis la fin de la guerre
froide. Nous en venons maintenant à la conclusion que
la Défense nationale, y compris les Forces armées
canadiennes, vit une situation de crise causée par deux
problèmes fondamentaux: le sous-financement et la
démilitarisation.
[Traduction]
Le mois dernier, nous avons témoigné devant le Comité permanent des finances à l'appui d'un important mémoire, qui présentait une analyse des résultats du sous-financement du ministère de la Défense nationale depuis 1989. Nous sommes d'avis qu'une affectation additionnelle minimale de 500 millions de dollars au budget de base du MDN en l'an 2000 serait nécessaire pour éviter un effondrement important de notre potentiel de combat. J'ai d'ailleurs annexé au présent document un résumé de notre présentation sur le financement. L'analyse détaillée que nous avons préparée sur les insuffisances budgétaires du MDN est disponible sur notre site Web, et j'en ai remis des copies en anglais et en français au greffier du comité.
En fin de compte, le Comité des finances s'est dit d'accord avec nous et a recommandé une augmentation importante du budget de la défense, dans le cadre d'un programme quinquennal de revitalisation et de modernisation. Les exemples de cette recommandation sont également annexés au présent document.
Je tiens également à apporter à votre attention un article qui figurait dans l'édition de ce matin du National Post et qui s'intitule «House committee calls for increased military spending».
Ce matin, je vais mettre l'accent sur le deuxième problème d'importance touchant la défense au Canada, c'est-à-dire la démilitarisation. Je suis conscient du fait que vous étudiez présentement la nature du processus d'approvisionnement pour les systèmes et le matériel militaire. Cependant, nous sommes d'avis que les difficultés qu'éprouvent les Forces canadiennes sur le plan de l'approvisionnement constituent un exemple de la non-reconnaissance de la nature et des besoins spéciaux d'une organisation militaire.
Nous définissons le terme «démilitarisation» comme étant le refus ou l'incapacité des décideurs de reconnaître que le MDN est différent des autres ministères, et que les Forces canadiennes ne ressemblent à aucun autre groupe en uniforme, tels la GRC, la Garde côtière, les Services correctionnels, les douaniers, ainsi de suite. Bref, nombreux sont ceux qui dépeignent les forces armées comme étant uniquement un autre «marché du travail».
En réalité, les militaires acceptent un contrat de responsabilité illimitée dans le cadre duquel le fait d'être confronté de façon courante à la mort fait partie de leur description de travail. Cela exige de leur part qu'ils fassent preuve d'un sens aigu des responsabilités et qu'ils soient animés de l'idéal de servir. Cela les place dans une catégorie spéciale au sein de la société. En échange, les militaires s'attendent du gouvernement qu'il assume la responsabilité illimitée de leur fournir les moyens d'accomplir leurs missions. Dans son plus récent rapport, le vérificateur général a d'ailleurs réitéré le caractère unique des forces armées.
Depuis le début des années 70, cependant, les militaires ont perdu nombre de leurs attributs particuliers parce que le MDN s'est vu obligé d'entrer dans le moule et de devenir «un ministère comme les autres». Par conséquent, le MDN est assujetti à une avalanche de directives de sources diverses, notamment la Charte des droits, les politiques du Conseil du Trésor, la politique d'achat du gouvernement, etc. Dans un article publié dans l'édition du 10 décembre du National Post, le professeur Douglas Bland de l'université Queen's approfondit la question. Nous avons une copie de cet article, si cela vous intéresse.
Je veux être bien clair sur un point. Nous ne préconisons pas de soustraire les forces armées au contrôle politique légitime du Parlement. Nous disons plutôt, en termes simples, que les militaires ne sont pas des fonctionnaires en uniforme. La démilitarisation renforce la perception erronée des forces armées au sein du gouvernement et du public. Ce qui est encore plus dangereux, c'est que la démilitarisation agit de façon insidieuse dans l'esprit des militaires et qu'elle les incite moins à tendre vers l'idéal de servir.
La décision en 1972 de fusionner les éléments militaires et civils du quartier général de la Défense nationale est souvent perçue comme la source unique du processus de démilitarisation. Ce n'est pas vrai—ce n'est que la plus visible.
Qui plus est, nous ne critiquons pas les employés civils consciencieux et compétents du MDN qui subissent les mêmes contraintes que les militaires. Nous faisons allusion au problème plus général des lourdeurs administratives à l'échelle du gouvernement qui ne contribuent aucunement à l'efficacité militaire, mais qui, en fait, minent souvent celle-ci.
• 0910
Malheureusement, la démilitarisation et le sous-financement
oeuvrent de concert pour forcer l'adoption de solutions inefficaces
à court terme en réponse à des procédures improductives.
Conséquence: le MDN s'avère incapable d'affecter au mieux ses
ressources limitées.
Les défis que posent la réduction des effectifs et les besoins liés à la nouvelle ère de l'information devraient être relevés par les officiers d'état-major qui connaissent fort bien les exigences militaires de l'efficacité opérationnelle. Ils n'ont pas besoin, pour ce faire, d'un surcroît de règlements et de procédures qui n'ont aucun rapport avec les besoins militaires. L'un des moyens de remédier au problème de la démilitarisation, en ce qui a trait à l'approvisionnement, serait de permettre au MDN d'établir son propre organisme d'approvisionnement, qui se conformerait en général aux directives et aux lignes directrices du Conseil du Trésor, entre autres, mais qui ne serait pas paralysé par le processus bureaucratique qui lui est maintenant imposé.
Cela permettrait d'éviter l'inefficience, le gaspillage et les longs délais de livraison. Cependant, nous reconnaissons que le MDN doit faire un bon ménage à l'interne en rationalisant un système de gestion du programme de défense improductif et beaucoup trop complexe.
En ce qui a trait à la politique de défense, la CAD appuie les principes énoncés dans le Livre blanc de 1994, qui préconisent la création de forces armées prêtes au combat. Le problème est que le sous-financement et la démilitarisation en rendent la mise en oeuvre impossible, et empêchent le ministère d'évoluer.
Dans le mémoire que nous avons présenté au Comité des finances, nous indiquions, en termes crus, qu'il y a un écart de 1,5 milliard de dollars entre la politique et la réalité, et que cet écart ne cesse de croître. Par conséquent, l'efficacité militaire diminue de façon abrupte. On peut alors sérieusement se demander si le développement futur des forces armées, tel qu'énoncé dans le récent document du MDN intitulé Stratégie 2020 est réalisable. Il est important de souligner, comme le font d'ailleurs de plus en plus les responsables du ministère, que ce plan sauvera les forces armées en les faisant passer du présent insatisfaisant au nouveau monde dominé par la haute technologie et les menaces diverses.
Le nouveau secrétaire général de l'OTAN, Lord Robertson, dans les commentaires qu'il a adressés au Canada dans l'édition du 10 décembre dernier du Globe and Mail, parle de la nécessité de maintenir un fort potentiel militaire dépassant les besoins des missions des casques bleus. Les forces militaires doivent être souples, modernes, bien équipées et capables de s'acquitter d'un large éventail de missions, allant de l'aide humanitaire au combat de haute intensité.
Nous sommes d'avis que dans l'état actuel des choses, les Forces armées canadiennes ne peuvent s'acquitter d'un tel mandat. Les capacités des forces armées sont à ce point diminuées qu'elles ne pourront pas s'appuyer sur une base solide pour construire les nouveaux modèles définis dans Stratégie 2000. Cela s'explique principalement par l'absence d'orientation stratégique au sein du gouvernement ou du ministère lui-même pour composer avec les deux problèmes fondamentaux que sont le sous-financement et la démilitarisation.
Vous constaterez que nos recommandations aujourd'hui portent essentiellement sur cet aspect. L'honorable John Fraser fait d'ailleurs allusion à la même situation dans son dernier rapport sur le suivi de nombreuses recommandations formulées notamment dans le rapport de la commission d'enquête sur la Somalie. Il fait remarquer en particulier qu'il n'existe aucune stratégie globale visant à résoudre les problèmes avec lesquels il faut composer. Sans une telle stratégie, le processus devient fragmenté et, en bout de ligne, inefficace parce qu'il ne résoudra pas les problèmes fondamentaux.
Pour résoudre la crise actuelle au sein de la défense canadienne, la CAD recommande que le gouvernement établisse un groupe de travail spécial chargé de «réinventer les forces armées», afin de créer une organisation moderne, prête au combat, bien financée et au sein de laquelle les besoins militaires sont primordiaux. À cet égard, le Canada prendrait des mesures semblables à celles adoptées par les Forces armées américaines, en particulier au sein de l'armée, après la guerre du Vietnam. Il importe de prendre les mesures décisives pour sortir de la confusion actuelle et pour bâtir des Forces canadiennes revigorées.
Pour mettre ce processus en marche et le superviser jusqu'à sa conclusion exigerait un fort leadership politique depuis les hauts échelons. Il faut accepter, comme point de départ fondamental, que la défense diffère en fait de toute autre entreprise humaine et que, par conséquent, elle doit être traitée de manière à pouvoir produire les meilleurs résultats compte tenu des sommes importantes qui y sont investies.
• 0915
Il faudrait en priorité définir clairement les besoins
militaires, et déterminer ensuite les obstacles à leur réalisation.
Une fois que le groupe de travail aura présenté son plan, dans un
délai ne devant pas dépasser six mois, il faudrait compter une
période de cinq ans pour remettre les Forces canadiennes dans un
état satisfaisant et ouvrir ainsi la voie à leur modernisation
complète. Cette démarche serait conforme à la recommandation du
Comité des finances d'échelonner le nouveau financement sur cinq
ans.
Nous réitérons également la recommandation formulée dans notre évaluation stratégique de 1999 voulant que soit créé un organisme consultatif permanent de sécurité nationale afin d'éviter que ne surviennent de nouveau les problèmes auxquels la défense est présentement confrontée.
Merci de votre attention. Sean et moi répondrons volontiers à vos questions sur la démilitarisation ou le sous-financement.
Le président: Merci beaucoup, colonel Pellerin.
Je tiens également à vous remercier, au nom du comité, de l'exposé que vous avez présenté au Comité des finances, qui a indubitablement aidé à convaincre nos collègues là-bas. En tout cas, je peux vous dire que certains ici ont travaillé très fort pour amener le caucus du gouvernement à appuyer la motion de M. Pratt que nous avons tous, ou la plupart d'entre nous, entérinée sans hésitation. Je pense que la plupart des partis partagent votre point de vue. Donc, merci beaucoup. Ces idées vont nous être d'une grande utilité dans nos délibérations. Notre rapport sur la politique des acquisitions sera déposé à la Chambre, nous l'espérons, au tout début de mars.
Nous allons maintenant passer aux questions. Monsieur Hart, vous avez droit à sept minutes.
M. Jim Hart (Okanagan—Coquihalla, Réf.): Merci beaucoup, messieurs, pour cet exposé intéressant.
J'aimerais dès le départ vous demander si, à votre avis, nos forces armées sont aptes au combat.
Col Alain Pellerin: Sean, souhaitez-vous répondre à cette question?
Le colonel Sean Henry (analyste principal des questions de défense, Conférence des associations de la défense): Oui, dans une certaine mesure.
Le potentiel de combat au sein des trois éléments n'est pas le même. De manière générale, on pourrait qualifier le potentiel de combat de la marine et de l'aviation de raisonnable. En tout cas, il n'est certainement pas ce qu'il devrait être. Je pense que la plupart des gens s'entendraient pour dire que le problème est plus grave du côté de l'armée.
Encore une fois, pour répondre directement à votre question, le potentiel de combat de l'armée équivaut probablement à celui d'un bataillon. Certains soutiennent que ce potentiel équivaut à celui d'une compagnie, parce que c'est le seul niveau où les soldats bénéficient d'un entraînement. Les soldats au sein d'une compagnie—qui est, bien entendu, la formation la plus petite puisqu'elle ne regroupe que 150 personnes environ—sont bien équipés. Le potentiel de combat existe donc, mais pas au niveau auquel il devrait être.
M. Jim Hart: Est-ce que ce niveau correspond à celui recommandé dans le Livre blanc de 1994?
Col Sean Henry: Non. Le Livre blanc de 1994 précise—encore une fois, nous parlons de l'armée, parce que c'est là que le problème est plus grave—que nous devrions être en mesure de déployer un groupe-brigade apte au combat et un, ou peut-être deux, groupes-bataillons distincts.
Nous pourrions, en puisant dans les effectifs de l'armée, trouver sans doute assez de militaires—entre 4 000 et 6 000—pour constituer une brigade. Toutefois, je ne sais pas s'ils auraient l'équipement ou la formation voulus pour s'acquitter de leurs tâches. Je ne le crois pas. On pourrait constituer un groupe-brigade en puisant dans les effectifs de l'armée, mais, en tant que commandant, je ne l'affecterais pas à une mission dangereuse. Il faudrait entre six et douze mois pour bien l'entraîner.
• 0920
Pour ce qui est des deux groupes-bataillons, il serait
possible de les déployer, sauf qu'il ne faut pas oublier ce qui
s'est produit récemment au Kosovo. Nous avons présentement deux
groupes-bataillons à l'étranger qui, semble-t-il, ne pourront être
maintenus. Or, nous sommes un pays de 30 000 d'habitants qui fait
partie du groupe des sept nations les plus industrialisées, et nous
sommes uniquement capables de maintenir et d'appuyer, à long terme,
un groupe-bataillon d'environ 1 500 personnes. Je pense que cela
répond à votre question.
Col Alain Pellerin: Puis-je ajouter un commentaire?
Pour situer dans leur contexte les commentaires du colonel Henry et les problèmes auxquels sont confrontés les trois éléments, si l'armée est beaucoup plus touchée que la marine et l'aviation, c'est parce que, comme vous le savez, les effectifs des forces armées ont été réduits de plus de 30 p. 100 ces dernières années. Ils se situent pour l'instant à environ 60 000, mais je dirais qu'ils tournent autour de 57 000 et qu'ils continuent probablement de diminuer alors que le nombre d'engagements, lui, augmente.
Nous avons présentement 4 500 soldats à l'étranger, et ce chiffre sera réduit au printemps. Les effectifs de l'armée ont été considérablement réduits. En fait, si vous demandez au chef d'état-major de la Défense combien de soldats il a à sa disposition pour participer à ces missions de maintien de la paix, il vous dira qu'il en a environ 12 000. Si vous multipliez 4 500 par trois, et c'est ce que vous devez faire pour pouvoir remplir cet engagement, vous allez manquer de joueurs au cours de l'année. Voilà le principal problème auquel nous sommes confrontés: notre budget a été réduit d'environ 25 p. 100, et le personnel, d'environ 30 p. 100 ou plus, alors que les engagements opérationnels qui exigent des forces aptes au combat ont augmenté.
Encore une fois, pour ce qui est des missions de maintien de la paix, les gens ne s'en rendent pas compte, mais ce ne sont pas les anciens casques bleus qui y participent. Nous avons des blindés au Kosovo. Nous avons besoin de troupes aptes au combat, et nous en manquons.
M. Jim Hart: J'ai lu récemment—je suppose que ce renseignement a été obtenu grâce à la Loi sur l'accès à l'information—que le colonel Howie Marsh avait laissé entendre que les effectifs de l'armée pourraient être ramenés à 10 000, et qu'il faudrait miser davantage sur la technologie. Je me demande si, avec un tel niveau d'effectifs, nous serions en mesure de remplir les engagements énoncés dans le Livre blanc, et si le matériel de haute technologie peut remplacer les soldats.
Col Sean Henry: Vous avez peut-être lu la lettre que j'ai écrite à ce sujet et qui a été publiée dans le Ottawa Citizen. On a tendance, de manière générale, à remplacer les gens par du matériel de haute technologie, sauf que ce n'est pas possible au sein des Forces canadiennes.
Permettez-moi de replacer les faits dans leur contexte. Lors de la préparation du Livre blanc de 1987, des études très détaillées ont été menées afin de déterminer le nombre de soldats dont auraient besoin les Forces canadiennes pour remplir leurs engagements. Ces études ont été réexaminées juste avant que ne soit préparé le Livre blanc de 1994. Le fait est que les engagements, comme l'a signalé le colonel Pellerin, n'ont pas tellement changé. Toutefois, d'après ces études, les forces armées auraient de la difficulté à s'acquitter de leurs tâches si leurs effectifs tombaient sous la barre des 78 000. Or, ils se situent maintenant à 60 000, ce qui veut dire que les forces armées ont de sérieux problèmes.
L'idée de ramener les effectifs de l'armée à 10 000 et de combler le vide au moyen de matériel de haute technologie ne tient tout simplement pas. Il nous faut, en ce moment, et des soldats et du matériel de haute technicité.
M. Jim Hart: J'ai une dernière question à vous poser, et nous y reviendrons au deuxième tour de table.
Je voudrais vous parler un peu de la démilitarisation. Le recours à des modes différents de prestation de services est un thème qui revient souvent dans le cadre de notre étude. Certains témoins ont aussi laissé entendre que le MDN n'avait pas réussi à réduire ses dépenses de 200 millions de dollars, comme prévu, mais seulement de 68 millions. Je pense que c'est le chiffre qui a été cité. Est-ce que le recours à des modes différents de prestation de services, dans ce contexte de démilitarisation, vous inquiète?
Col Alain Pellerin: C'est surtout inquiétant si vous évoluez dans l'armée, parce que les soldats affectés à une mission auront besoin, une fois qu'ils auront quitté la base, de soutien logistique. Par exemple, on me dit que l'armée australienne s'est débarrassée de tous ses cuisiniers. Or, quand elle a été déployée au Timor oriental, elle n'avait pas de système de ravitaillement pour répondre aux besoins des soldats sur le terrain. Elle a donc été obligée de réinventer la roue.
• 0925
La situation n'est pas aussi problématique du côté de
l'aviation, puisque les avions sont obligés de regagner leur base
militaire après avoir rempli leur mission. Dans le cas de la
marine, encore une fois, les missions auxquelles elle participe
sont différentes. Toutefois, dans notre cas, il faudrait examiner
la question de plus près en raison des besoins particuliers de
l'armée.
Col Sean Henry: La question est intéressante, parce qu'elle nous amène au fond du problème. Le programme touchant les différents modes de prestation de services devait s'appliquer à l'ensemble du gouvernement. Il découlait du processus d'examen des programmes, et était perçu comme un moyen d'économiser beaucoup d'argent, et donc de réduire le déficit. Malheureusement, le MDN a été obligé de l'appliquer dans tous ses domaines d'activité. Il y a beaucoup de personnes au MDN dont la réputation et la carrière dépendent de ce programme, et c'est de cela dont il est question ici. On ne tient pas compte du fait que le MDN est un ministère différent des autres. Le Secrétariat du Conseil du Trésor et d'autres organismes centraux nous ont tout simplement dit de l'appliquer et, malheureusement, les forces armées étant ce qu'elles sont, les gens ont obéi à l'ordre qu'on leur a donné.
Il peut être utile, dans certains cas, d'avoir recours à d'autres modes de prestation. Toutefois, le problème, c'est que, si l'on va trop loin, le potentiel militaire risque d'être affaibli.
Permettez-moi de vous donner un autre exemple. Le colonel Pellerin vient de dire que le roulement, aux six mois, des effectifs au Kosovo et en Bosnie pose problème. Il nous faudrait trois fois plus de personnes pour assurer ce roulement, car il faut tenir compte des gens qui s'apprêtent à partir, de ceux qui sont déjà sur place, et de ceux qui rentrent de mission. Le problème est, en général, assez grave. Le personnel de soutien, notamment, se trouve dans une situation quasi impossible parce qu'une bonne partie de celui-ci a été remplacé par d'autres modes de prestation de services, de sorte qu'il n'y a pas suffisamment d'effectifs pour ces affectations de six mois. En fait, les gens du milieu affirment que si nos troupes n'avaient pas été retirées du Kosovo, l'armée aurait été en mesure de respecter ses engagements, et ce, dès le mois d'avril prochain, en raison surtout de la situation qui existe du côté du personnel de soutien.
Le président: Merci, monsieur Hart.
[Français]
Monsieur Laurin, vous avez sept minutes.
M. René Laurin (Joliette, BQ): Monsieur le colonel, ce qui me frappe de façon générale de votre présentation ou le message que j'en retiens, c'est que vous semblez affirmer que, l'armée étant un organisme tellement différent de tout ce qui peut exister ailleurs, il est presque impossible de lui appliquer des normes d'administration faisant en sorte qu'elle puisse contrôler ses dépenses. C'est un des principaux problèmes soulevés par le vérificateur général. Il mentionne que presque chaque fois qu'on a fixé des objectifs d'administration à l'armée, ou en tout cas très souvent, elle a eu énormément de difficulté à les atteindre.
Une telle affirmation me fait peur parce que je me dis que, finalement, l'armée est un gouffre financier. Est-ce que, sous prétexte qu'il s'agit de l'armée et qu'elle est investie d'une mission particulière et unique, on doit lui donner de l'argent chaque fois qu'elle en demande, peu importe le montant demandé? Est-ce que je saisis bien le message? Est-ce que c'est cela, le message que vous venez nous livrer aujourd'hui? Si ce n'est pas cela, j'aimerais que vous puissiez le nuancer.
Col Alain Pellerin: Je ne crois pas que c'est tout à fait le message que nous voulons vous livrer. J'étais ici mardi, lorsque vous avez interrogé le vérificateur général, et je suis très conscient de vos préoccupations concernant la compétence de ceux qui font la gestion au ministère de la Défense, etc.
En fait, il y a deux messages. Il y a d'abord la question du sous-financement. Je crois qu'on se rend compte de plus en plus que le budget du ministère de la Défense a été réduit de 25 p. 100 depuis six ans et que cela a réduit de 30 p. 100 son pouvoir d'achat.
Ce problème a même été reconnu par le Comité des finances, ce qui est unique. Autant que je sache, c'est la première fois que le Comité des finances se penche sur les questions de la défense. Il y a un problème de sous-financement et il y a aussi le problème des tâches qui ont augmenté. Dans le passé, nous n'avions pas de tâches telles que le maintien de la paix et d'autres tâches opérationnelles.
• 0930
Il faut essayer de trouver un juste milieu. Je suis
très conscient des problèmes de dépenses du ministère.
C'est toujours un problème dans tous les pays et dans toutes
les démocraties. Quand on a des forces armées, on a de
très grandes dépenses. Par exemple, on a dépensé
environ 10 milliards de dollars pour les 12 frégates,
qui sont tout ce qu'il y a de plus moderne. On aurait
peut-être pu dépenser moins s'il n'y avait pas eu la
dimension politique. C'est un facteur à prendre
en considération.
Je ne préconise pas qu'on fournisse de l'argent à l'armée à pleines poches et sans aucun contrôle. J'ai bien mentionné dans mon document qu'il était nécessaire que le ministère règle ses problèmes de gestion. Les deux vont ensemble. Il y a un besoin de financement, mais il faut également qu'il y ait une meilleure gestion, tout en se rappelant que le ministère de la Défense nationale est un ministère différent des autres à cause de ses missions.
M. René Laurin: Je pense que, d'une certaine façon, vous avez raison. Il pourrait être facile de conclure que, puisqu'on a réduit leur budget de 2 milliards de dollars, ces gens ont du mal à joindre les deux bouts, car 2 milliards de dollars, c'est très important. Cependant, tous les ministères ont subi des coupures, et pas un seul ministre n'a avoué que les services de son ministère avaient été réduits parce qu'on avait coupé les budgets. Tous ont prétendu pouvoir donner à la population les mêmes services avec moins d'argent. C'est ce qu'affirment les ministres.
Dans votre texte, vous dites que si vous aviez notre propre système d'acquisition de biens d'approvisionnement, ce serait plus efficace. Au plan administratif, ce serait du dédoublement, parce qu'on aurait au gouvernement un système d'approvisionnement pour tous les autres ministères alors que l'armée, elle, aurait son propre système d'approvisionnement. Je me dis que ce pourrait être une source de gaspillage additionnel. C'est facile de se dire que, parce que l'armée a son propre système d'approvisionnement, les procédures ne sont pas importantes; s'il y a un besoin, on achète.
C'est vrai que cela va plus vite si on décide de faire un achat sans appel d'offres, mais par la suite, on pourrait se rendre compte que l'armée a acheté pour près de 3 milliards de dollars de biens et services sans appels d'offres. C'est important.
Quand vous réclamez votre propre système d'approvisionnement et que vous dites que ce serait bien plus efficace, je n'en doute pas, car c'est vrai que cela serait plus expéditif et plus efficace, mais à quel prix? Pourquoi l'armée ne se soumettrait-elle pas à un système d'approvisionnement bien contrôlé qui lui permettrait, à elle aussi, d'avoir les meilleurs prix?
On n'est pas dans la situation où on a un ennemi en face de soi et où il faut se défendre parce que c'est une question de vie ou de mort. Je comprends que dans un tel cas, la personne ne regarde pas le prix. La personne se dit que c'est sa vie et la nation qui sont en danger. Mais ce n'est pas le cas. Comment justifier un tel système d'approvisionnement?
Col Alain Pellerin: Je vais laisser mon collègue répondre pour ce qui concerne les détails, mais j'aimerais citer une phrase du rapport du Comité des finances qui a trait aux réductions des différents ministères. On dit:
-
L'Examen des programmes a très efficacement
réalisé son objectif de restructuration des dépenses
de programmes additionnels, mais a touché certains
ministères plus que d'autres. Les dépenses pour la
défense en constituent un exemple.
Le Comité des finances a constaté que le ministère de la Défense nationale avait été plus touché que les autres. C'est notre message.
Pour ce qui est des détails, je vais laisser mon collègue Sean répondre à votre question.
[Traduction]
Col Sean Henry: Monsieur le président, voilà une autre question fort intéressante qui nous aide à faire passer le message que nous essayons de transmettre, ce matin. Avant d'entrer dans les détails, je pense que le comité a eu l'occasion d'examiner la partie 111 du budget, soit le rapport sur les plans et les priorités de 1999-2000, de même que le guide de planification de la défense 2000. Je pense que ces documents décrivent bien les dépenses et les besoins de financement des forces armées. C'est très détaillé. On y trouve l'explication à une partie du problème.
• 0935
Pour revenir de façon plus précise à votre question, le
problème avec le système d'approvisionnement, c'est que les
responsables au sein de la Défense nationale doivent faire le même
travail deux fois. Il y a un système interne, qu'on appelle le
système de gestion du programme de la défense et qui sert
essentiellement à répartir les dépenses entre l'armée, la marine,
l'aviation et les autres éléments de soutien.
Une fois que les responsables des projets ont terminé leurs calculs, ils doivent refaire le même travail, mais pour le système externe cette fois-ci. Cela représente une charge de travail énorme qui n'entraîne que gaspillage et inefficience. De plus, comme les délais sont très longs, et c'est triste à dire, le MDN n'arrive pas, et ceci se produit presque à chaque année, à dépenser les sommes modestes qui lui sont allouées. C'est terrible, et c'est à cause des systèmes d'approvisionnement interne et externe.
Les organismes centraux doivent reconnaître que le MDN est différent des autres ministères. Il est plus gros, plus complexe, il dépense plus d'argent et il est assez unique. Ce qu'il faut, c'est rationaliser le système interne. Il n'est pas parfait. Il y a beaucoup de choses qui doivent être améliorées. Toutefois, il faut fusionner les deux systèmes d'approvisionnement en un seul.
Personne ne dit que nous devrions faire fi des directives du Conseil du Trésor. On exercerait un certain contrôle sur celui-ci, tout comme c'est le cas à l'heure actuelle. En fait, une partie de ce contrôle serait assuré par le comité.
Le président: Merci.
Monsieur Pratt, et ensuite M. Proud.
M. David Pratt (Nepean—Carleton, Lib.): Merci, monsieur le président.
Je voudrais souhaiter la bienvenue à nos deux témoins, et les remercier d'avoir clarifié certaines des questions posées par M. Laurin. Je sais que Mme Wayne attache beaucoup d'importance à la clarté ces jours-ci.
Je suis en général d'accord avec ce que vous dites dans votre exposé. Corrigez-moi si je me trompe, mais vous ne parlez pas de la sécurité des populations.
Compte tenu du fait que les Forces canadiennes ont, ces derniers temps, participé à des missions qui consistaient à assurer la sécurité des populations, que ce soit en Bosnie, au Kosovo ou au Timor oriental, j'aimerais savoir ce que vous pensez de l'idée de créer une force d'intervention rapide à grande mobilité. J'appuie les recommandations du Livre blanc de 1994, et je pense que les exigences en matière de sécurité des populations s'ajoutent aux objectifs énoncés dans ce document. J'aimerais avoir votre opinion là-dessus.
J'aimerais également savoir si la Conférence des associations de la défense a son mot à dire au sujet de la politique de défense du gouvernement? D'après certains sondages réalisés récemment, les efforts déployés par les Forces canadiennes et les missions visant à assurer la sécurité des populations semblent bénéficier d'un large appui. Je me demande si la Conférence des associations de la défense ne devrait pas se joindre à d'autres groupes en vue de former une coalition d'intérêts autour de la politique étrangère canadienne et des Forces canadiennes.
Col Alain Pellerin: Je vais répondre à la première question avant de donner la parole à Sean.
Quand j'ai cité Lord Robinson dans l'exposé, j'ai précisé que nous avions besoin de forces souples, modernes, bien équipées et capables de s'acquitter d'un large éventail de missions, allant de l'aide humanitaire au combat de haute intensité. Nous le croyons toujours. Même si le contexte a changé en cinq ans, nous continuons de souscrire aux principes énoncés dans le Livre blanc, qui préconisent la création de forces armées prêtes au combat. C'est la seule façon dont nous pouvons participer à des opérations d'aide humanitaire et à des combats de haute intensité.
• 0940
Si nous jetons un coup d'oeil sur les missions récentes
auxquelles nous avons participé, sur les 4 500 soldats qui sont
déployés à l'heure actuelle, environ 300 sont des casques bleus,
les gardiens de la paix traditionnels. Les autres sont tous placés
sous le commandement des Nations Unies, sauf qu'ils portent
l'uniforme canadien et utilisent du matériel qui n'appartient pas
aux Nations Unies. Nous avons même deux groupes de blindés au
Kosovo. Or, nous n'avons jamais déployé de blindés dans le cadre
d'opérations de maintien de la paix, sauf en Corée, si on peut
appeler cela une opération de maintien de la paix.
Il nous faut donc des forces aptes au combat qui sont capables de remplir ce large éventail de missions. Il faut aussi poursuivre le dialogue, sauf que, depuis la déclaration de Londres en 1990, l'OTAN a beaucoup parlé des changements qui surviennent dans le monde et de la nécessité d'avoir des forces souples et mobiles. Tous nos ministres ont souscrit à ce principe, sauf qu'ils n'ont pas joint l'acte à la parole.
Prenons l'exemple du Kosovo. Je pense que le Canada s'est fort bien débrouillé avec ses F-18. Toutefois, si nous avions été obligés de déployer des troupes sur le terrain, le Canada et ses alliés européens auraient eu beaucoup de mal à le faire parce que leurs formations de chars lourds ne sont ni mobiles, ni souples. C'est un problème auquel il faut s'attaquer. Il faut engager des dépenses, oui, mais de façon judicieuse afin de rendre nos forces plus mobiles et flexibles.
Pour ce qui est de la CAD, je suis tout à fait d'accord avec vous. La Conférence doit intervenir activement dans les dossiers touchant la défense. En fait, la CAD est le seul organisme national qui s'intéresse aux questions de défense et qui se soucie du bien-être des Forces armées canadiennes. Nous avons accueilli deux nouveaux groupes au cours des dernières années: la Légion, qui compte 500 000 adhérents, et l'Association de la force aérienne, un organisme bien structuré qui compte 20 000 membres.
Nous allons donc de l'avant. Nous comptons dans nos rangs 15 associations qui sont membres à part entière, et 14 membres associés, dont les anciens du CMR, ainsi de suite. Nous essayons de susciter plus d'intérêt à l'échelle nationale.
En toute honnêteté, il est très difficile pour la CAD de recueillir des fonds et ainsi de permettre au bureau national de remplir son mandat. Sean et moi travaillons deux ou trois jours par semaine, parfois quatre ou cinq, et nous sommes très modestement payés. Je ne dirai pas combien nous touchons parce que c'est parfois gênant de le dire. Mais nous croyons en ce que nous faisons. Malheureusement, nous manquons d'argent et il est très difficile d'en avoir.
Les subventions versées par le gouvernement ont été réduites de 80 p. 100 au cours des dernières années. La situation est donc très difficile. Nous pouvons compter sur l'aide de bénévoles, mais nos ressources demeurent très limitées.
Col Sean Henry: Je voudrais seulement ajouter quelques commentaires.
D'abord, je pense que le Livre blanc traite la question à fond. C'est ce que vous allez constater si vous y jetez un coup d'oeil. D'ailleurs, cela faisait longtemps que je ne l'avais pas relu. Les principes énoncés dans le Livre blanc englobent celui de la sécurité des populations. En fait, nous devons, pour ce genre de mission, établir un cadre de forces armées pour que les autres éléments puissent effectuer leur travail humanitaire. Comme l'a signalé le colonel Pellerin, ce cadre doit souvent être très solide.
En ce qui concerne le déploiement, oui, le matériel des forces armées doit être amélioré. La marine a besoin de navires modernes et rapides. L'aviation a besoin de nouveaux aéronefs, que ce soit des C-17 ou des avions Hercules. La plupart des spécialistes soutiennent que nous devons avoir accès à des avions plus gros afin d'éviter d'avoir à en louer des Russes ou des Américains, qui n'en auront peut-être pas de disponibles.
• 0945
L'interopérabilité est un élément fort important des
opérations de coalition. La marine et l'aviation possèdent un
potentiel raisonnable. Je ne veux pas que les membres du comité
pensent que la marine et l'aviation n'ont pas de problèmes. Ils en
ont, mais pas les mêmes.
L'armée à des problèmes d'interopérabilité parce qu'elle ne dispose pas encore d'un système intégré de contrôle de commandement. En raison des compressions qui ont été décrétées, le système fonctionnera seulement au tiers de sa capacité dans les années à venir. Donc, l'interopérabilité avec les alliés constitue un autre défi pour l'armée.
Le dernier point concerne les efforts de coordination de la CAD. Dans le passé, notamment lors de l'examen de la politique de défense en 1993-1994, la CAD a réussi à recruter de nouvelles organisations civiles. Je ne veux pas les mentionner parce que certaines ne souhaitent pas qu'on sache qu'elles collaborent avec la CAD, mais nous nous sommes adressés à des entreprises et à des associations qui s'intéressent aux questions de défense. Vous avez donc tout à fait raison: c'est quelque chose que nous devons faire.
Col Alain Pellerin: Par ailleurs, je pense que nous devons collaborer davantage avec les comités comme le vôtre, parce que nos intérêts sont les mêmes. Nous nous intéressons tous les deux aux questions de défense. De plus, la semaine prochaine par exemple, nous allons rencontrer M. d'Aquino, du CCCA, afin de voir si nous ne pouvons pas travailler ensemble, bien que notre mandat ne consiste pas à défendre les intérêts des entreprises. Nous laissons cela au CCCA, mais nous pouvons peut-être travailler en plus étroite collaboration avec lui.
Le président: Merci.
Madame Wayne, vous avez sept minutes.
Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Colonel Henry et colonel Pellerin, vous parlez de démilitarisation et vous dites que le MDN n'est pas perçu comme étant différent des autres ministères, alors qu'il devrait l'être.
Le ministre a laissé entendre que vous aviez exagéré les faits lors de votre comparution devant le Comité des finances. Toutefois, la CAD nous a dit que vous aviez raison sur toute la ligne. C'est ce qu'elle a dit.
À votre avis, est-ce qu'il existe un profond clivage entre les commandants militaires et les hauts fonctionnaires? Existe-t-il de bonnes relations de travail entre les deux groupes? Est-ce qu'ils s'échangent des renseignements, ou est-ce qu'ils restent chacun de leur côté, sans qu'il n'y ait aucune communication ou collaboration entre eux?
Col Sean Henry: Il s'agit-là d'un terrain miné, monsieur le président. Mais soyons positifs. Nous n'oserions jamais, ni la CAD ni moi, en tant qu'analyste principal de la Conférence, critiquer les politiciens, peu importe leur allégeance. Nous savons qu'il y a des gens qui s'efforcent de défendre les intérêts du Canada et des forces armées.
Le problème se situe plutôt au niveau des connaissances que nous avons des forces armées. Je ne poserai pas la question aux gens réunis autour de la table, mais nous avons constaté, au fil des ans, qu'il y a de moins en moins de personnes au sein du gouvernement qui connaissent bien les forces armées, et je parle ici aussi bien des politiciens que des fonctionnaires. D'après les derniers chiffres que j'ai vus, seulement 2 p. 100 des parlementaires connaissent bien les forces armées. Il s'agit là d'un gros problème. Les politiciens ne connaissent pas bien l'appareil militaire.
• 0950
Il en va de même pour les fonctionnaires. Je ne veux pas les
critiquer. Je dis tout simplement qu'ils ne connaissent pas très
bien la situation des militaires, et qu'ils voient souvent les
choses sous un angle différent de celui de ministère de la Défense.
Leurs objectifs sont différents, leur point de vue aussi. Je pense
qu'on le mentionne dans l'exposé. L'organisation bureaucratique est
l'antithèse de l'organisation militaire. Les bureaucraties mettent
l'accent sur les processus, tandis que les militaires mettent
l'accent sur les résultats.
Il y a aussi, malheureusement, dans un système bureaucratique, un flou dans la structure hiérarchique. Dans les bureaucraties, les gens n'assument pas de responsabilités, alors que c'est le fondement même d'un système militaire. C'est d'ailleurs, je dirais, l'un des facteurs qui a créé des situations comme celle de la Somalie et toutes sortes d'autres situations déplaisantes dans les forces armées. Avec la démilitarisation, toute la structure hiérarchique s'est vue assiégée, dans les forces armées. Et une fois que le désordre est semé, les problèmes commencent.
Mme Elsie Wayne: Je sais que le général Lewis MacKenzie et le colonel Drapeau préconisent la création d'un quartier général militaire séparé, loin du centre bureaucratique du ministère. Pouvez-vous envisager cela?
Col Sean Henry: Dans une certaine mesure. J'ai parlé tout à l'heure du mouvement du pendule, en faisant référence à la DMPS. De toute évidence, il faut une interaction entre le secteur militaire du siège social de la Défense nationale et son secteur civil. Personne ne dit le contraire. Mais rassembler tout le monde en un méli-mélo, ce qui en fait était le cas jusqu'à très récemment et l'est encore, malheureusement, plus qu'il ne le faudrait, ce n'est pas productif. Je dirais que ces deux messieurs vont peut-être un peu plus loin que ce que nous recommanderions.
Je ne sais pas ce qu'en pense le colonel Pellerin.
Col Alain Pellerin: Je ne ferai que répéter ce que j'ai dit dans mon exposé, c'est-à-dire que lorsque nous parlons de démilitarisation, dans l'esprit de beaucoup de gens, c'est l'intégration des quartiers généraux qui pose le seul problème, donc, si nous les séparons, le problème est résolu. Je dirais que c'est plus que cela. C'est peut-être l'aspect le plus visible de la démilitarisation, mais ce n'est pas le seul.
C'est pourquoi nous suggérons la mise sur pied d'un groupe de travail qui se pencherait sur toutes ces questions, et il est bien possible qu'au bout du compte, il recommande que nous remettions les choses telles qu'elles étaient auparavant.
Nous devrions aussi être prudents. Vous savez, Sean et moi travaillons au QGDN depuis plusieurs années, et il est important de collaborer. L'unification a eu beaucoup d'effets positifs, dans le sens où nous avons appris à collaborer avec les forces aériennes et avec la marine de beaucoup plus près que dans tout autre pays, et aussi à collaborer étroitement avec les civils employés au ministère de la Défense nationale. Il y aura toujours des civils au ministère, donc il nous faut comprendre comment ils fonctionnent et comment nous pouvons travailler avec eux. Je crois que nous devons faire très attention, lorsque nous parlons de séparer tout à fait les deux entités et d'aller chacune de son côté.
Col Sean Henry: Il y a un autre aspect à cela, et c'est que la démilitarisation est un sujet très, très vaste, selon la définition que nous en avons, et nous pourrions probablement passer une bonne partie de la semaine ici à vous en parler.
Nous n'avons même pas encore abordé les sujets comme la Charte des droits et libertés. Voilà un autre champ de mines. D'une manière qui n'est ni remise en question, ni contrôlée, elle a une très mauvaise influence sur les forces armées, autre facteur qui contribue à l'inaptitude de la chaîne de commandement à s'acquitter de son rôle de chaîne de commandement. On hésite maintenant à donner des ordres clairs et concis et, pardonnez-moi l'expression, à donner des coups de pied aux fesses, parce que les gens craignent tellement d'être traînés devant les tribunaux des droits de la personne, etc. C'est donc tout un aspect de la démilitarisation dont il faut tenir compte, à part le fait de mêler les civils aux militaires dans les sièges sociaux.
J'ai une dernière observation sur les remarques du colonel Pellerin. J'aimerais préciser son intervention sur l'unification. C'est allé trop loin. L'intégration—vous vous rappelez qu'en 1964, le livre blanc introduisait le concept de l'intégration des forces armées, qui est excellent. Tout d'abord, on unit les gens.
• 0955
Là où les choses se gâtent, c'est quand on en vient à
l'unification, et l'unification implique qu'on ne reconnaît pas
que, non seulement les forces armées sont une entité distincte,
mais que dans les forces armées, la marine, les forces aériennes et
les forces militaires sont des entités distinctes. Il y a encore
des gens qui ne saisissent pas cela.
Pour terminer, le colonel Pellerin a mentionné l'article du professeur Doug Bland, paru dans le National Post il y a une semaine, où il expose le problème qu'il y a à donner à l'armée carte blanche pour s'acquitter de ses fonctions, comme les autres ministères. C'est un excellent article, en passant.
Le président: Merci, madame Wayne.
Maintenant, chers collègues, nous allons faire un deuxième tour de table. J'ai laissé se prolonger celui-ci parce que les questions posées et les réponses données étaient très intéressantes. Nous entamons maintenant un deuxième tour, et nous n'accorderons que cinq minutes. Il se pourrait que nous soyons interrompus, donc je recommande des questions et des réponses succinctes, pour que tout le monde ait la chance de parler.
Nous commencerons avec M. Hart.
M. Jim Hart: Il y a trois questions que j'aimerais explorer un peu avec vous. Si vous permettez, je vais les expliquer brièvement, et peut-être pourriez-vous répondre lorsque j'aurai terminé.
Premièrement, je m'intéresse aux pressions que subissent actuellement les Forces armées canadiennes, avec, comme vous l'avez dit, l'augmentation des engagements, l'amélioration de l'équipement, la Révolution dans les affaires militaires, la qualité de vie, la rémunération et les avantages sociaux et l'hébergement du personnel militaire.
Je m'intéresse depuis environ deux ans au concept selon lequel la carrière militaire étant unique, comme vous le disiez aussi dans votre exposé—du fait que les militaires doivent être prêts à donner leur vie, s'il le faut—peut-être faudrait-il accorder un dégrèvement fiscal aux militaires de manière à ce que celui puisse constituer une augmentation salariale sans qu'il soit nécessaire de modifier le budget. J'ai étudié la question. J'aimerais savoir ce que vous en pensez et si votre organisation appuierait ce genre de mesure, ou même si vous y avez déjà pensé.
Ma deuxième question concerne un article publié récemment, qui parlait de deux régiments, aux États-Unis, qui étaient déclarés n'être pas prêts au combat, et je me demandais si vous pouviez dire au comité si les régiments canadiens font eux aussi l'objet de ce genre d'évaluation. Le cas échéant, qui s'en charge et à qui est transmise l'information?
Ma dernière question concerne l'organisme de sécurité nationale que vous préconisez. J'aimerais savoir quel genre de conseils il pourrait donner. Est-ce que ce serait, par exemple, sur le degré de préparation au combat des régiments? Qui le composerait et de qui relèverait-il? Est-ce que ce serait du Parlement, ou du Cabinet? Comment voyez-vous les choses?
Le président: Messieurs, il reste trois minutes pour tout cela.
Col Alain Pellerin: Je commencerai avec la dernière question et je laisserai la parole à Sean.
Je crois que l'organisme de sécurité nationale dont nous parlons serait un organe de coordination situé au plus haut niveau, soit au niveau du premier ministre. Il coordonnerait tout ce qui se rapporte à la sécurité et à la défense, aux questions générales de sécurité. Il se situerait à ce niveau-là. Il ne s'agirait pas d'un inspecteur général ou d'un protecteur du citoyen, mais rien que de questions de défense. Son rôle serait de coordonner toutes les priorités du Canada en matière de défense et de sécurité au sens large.
Maintenant, au sujet de la formation américaine, je crois qu'à ce propos, le système américain a eu une réaction exagérée. C'était une histoire de jeu des gobelets. En fait, deux brigades étaient parties—l'une au Kosovo et l'autre en Bosnie—détachées, la première, d'une division stationnée en Allemagne et l'autre de Fort Drum, dans l'État de New York. À cause de ce qui a été déclaré, les deux divisions ont été jugées n'être pas prêtes au combat parce qu'il leur manquait ces deux brigades, mais en fait les deux brigades en question étaient parfaitement prêtes au combat et elles avaient été déployées. À mon avis, c'était une histoire de jeu des gobelets.
Pour ce qui est de l'autorité, je laisserai Sean répondre à votre question.
Col Sean Henry: Il y a bien des années, avant, à peu près, les années 70, les forces armées ne payaient pas d'impôt sur le revenu. Remarquez qu'ils gagnaient moins que maintenant. L'un des problèmes de la démilitarisation, et là encore nous pourrions en discuter toute la semaine, est qu'au début des années 70, il a été décrété que le ministère de la Défense nationale ne devait pas se distinguer des autres ministères et que, par conséquent, les militaires du ministère seraient payés de la même manière et selon les mêmes modalités que les fonctionnaires, et il y a eu les groupes d'étude sur la rémunération, etc., etc.
Ce que vous dites, donc, a du bon sens, mais il faudrait une volonté politique très ferme pour que cela passe. La bureaucratie y opposerait d'énormes obstacles, mais cela a du bon sens. Le groupe de travail dont nous recommandons la formation pourrait très bien examiner cette possibilité.
• 1000
En ce qui concerne votre deuxième question, à propos des deux
formations américaines, c'est un inspecteur général qui est chargé
de l'évaluation. Ici, pour des raisons qui m'échappent, le concept
d'inspecteur général a été complètement déformé. La première
fonction d'un inspecteur général, dans la plupart des armées, est
d'évaluer l'aptitude au combat des troupes, et non pas de
s'intéresser aux supercheries—bien qu'il s'y intéresse— aux
déficiences personnelles, etc. Leur principale fonction est
d'évaluer le degré de préparation des troupes au combat.
Dans les Forces armées canadiennes, cela se fait à l'interne. Les forces aériennes font des évaluations tactiques. Auparavant, l'armée chargeait un groupe particulier de son personnel d'évaluer les brigades, mais cela a perdu tout son sens, puisque les brigades n'ont reçu aucune formation depuis cinq ans et que très peu des bataillons en ont eu. En fait, les employés qui faisaient ce genre d'évaluation ont probablement... les titulaires des ces postes ont été mutés et les postes sont vacants. Je n'en suis pas absolument certain, mais je le soupçonne.
Enfin, nous pensons qu'un organisme de sécurité nationale est quelque chose de très important—nous n'avons pas vraiment eu la possibilité d'en parler beaucoup dans notre évaluation stratégique—parce que telles que sont les choses maintenant, l'expertise est fragmentée au Bureau du Conseil privé. Personne, au cabinet du premier ministre, ne tient de dossier sur la défense—personne. Si nous nous adressons au CPM, il nous renvoie immédiatement au BPC. Au BPC, c'est généralement la personne qui est en charge des affaires étrangères qui s'occupe de la défense et de la politique étrangère. Il y a là-bas un militaire, mais depuis quelques années, il n'a plus l'influence qu'il devrait avoir. Même s'il l'avait, c'est un mode de fonctionnement fragmenté.
Un organisme de sécurité nationale serait entièrement consacré à son rôle, qui serait double: tenir constamment le gouvernement au fait des situations relatives à la sécurité qui surviennent dans le monde, et de ce en quoi elles touchent le Canada et, deuxièmement, lorsqu'une situation d'urgence survient, fournir des conseils sur ce que devrait faire le Canada face à cette situation. En ce moment, on procède plutôt au jour le jour.
Le président: Merci, monsieur Hart.
Monsieur Pratt, c'est à vous.
M. David Pratt: Merci, monsieur le président.
Je voulais creuser un peu plus la question de cet organisme de sécurité nationale. Dans quelle mesure, à votre avis, devrait-il ressembler à celui des Américains, qui m'a l'air d'être assez semblable? Est-ce que c'est un organisme de sécurité nationale ou un conseil de sécurité nationale?
Col Sean Henry: Un organisme de sécurité nationale.
Col Alain Pellerin: C'est bien cela.
M. David Pratt: Qui, à votre avis, devrait intervenir dans la dotation de cet organisme? Quelle en serait l'envergure? Est-ce que ses employés seraient, par exemple, des universitaires, des militaires de carrière, des bureaucrates civils ou des spécialistes des affaires étrangères? Selon vous, qui devrait fournir les conseils?
Restons-en là pour l'instant. Il se peut que j'aie d'autres questions à poser quand vous aurez répondu à cela.
Col Alain Pellerin: Je crois qu'il nous faudrait observer ce qu'il y a dans d'autres pays et comment ils font, parce que la plupart d'entre eux... Je sais qu'en France, par exemple, il existe un organisme semblable qui relève du premier ministre. Il y en a un autre aux États-Unis, qui relève du président—le National Security Council.
Ce pourrait être un mélange, il me semble, de diplomates, de militaires, d'anciens diplomates, d'anciens militaires... quiconque aurait l'expertise nécessaire dans le domaine. Ce seraient des fonctionnaires rémunérés, et d'autres personnes pourraient venir effectuer des tâches spéciales. Je le verrais comme un organisme relevant du premier ministre, je le répète, pour qu'il puisse s'occuper des questions qui nous intéressent, la sécurité en général et la défense en particulier, qui ne reçoivent pas l'attention qui leur est due au plus haut niveau.
Comme le disait Sean, personne au cabinet du premier ministre n'a pour fonction principale de s'occuper de la défense. Si vous allez au Bureau du conseil privé, et bien, Sean le disait... À mon avis, il nous faut élever l'organe de coordination au niveau du premier ministre, et le doter des détenteurs de l'expertise nécessaire.
Col Sean Henry: En passant, croyez-le ou non, Israël en a créé un il y a deux ou trois mois. On aurait pensé qu'ils en avaient un avant cela, mais je crois que cela montre bien la complexité de la situation de la sécurité de nos jours. La guerre froide, c'était facile. Aujourd'hui, la sécurité c'est quelque chose de beaucoup plus complexe, et le fait que des pays comme Israël le reconnaissent, à mon avis, est très significatif. Comme l'a dit le colonel Pellerin, un organisme comme celui-là amènerait d'abord et avant tout les questions de sécurité nationale dans les forces armées sur un plan beaucoup plus élevé qu'elles ne le sont actuellement dans les affaires canadiennes, au niveau du gouvernement.
Pour répondre à votre question au sujet de l'envergure de l'organisme, mieux vaut rester modestes, parce que les organismes comme celui-ci tendent à prendre beaucoup d'expansion une fois qu'ils sont créés et fonctionnels, et cela limite leur efficacité. Je suis d'accord avec Alain pour dire qu'il faudrait d'anciens diplomates distingués, des militaires distingués et des universitaires, etc. Une fois qu'on aura décidé de créer cet organisme, il ne sera pas difficile de décider qui y sera affecté.
En premier lieu, ils conseilleraient le premier ministre et son cabinet, mais ils ne seraient certainement pas tenus à part des gens qui sont actuellement dans les ministères, comme le ministère des Affaires étrangères, le ministère de la Défense nationale, etc., que l'on croise au Bureau du conseil privé. Ces gens auraient un mandat spécial. Une fois qu'ils se mettraient à là tâche, d'autres personnes leur seraient adjointes pour mettre en oeuvre les mesures nécessaires dans les divers ministères.
Une bonne partie des problèmes dont nous parlons aujourd'hui auraient probablement pu être évités si un organisme de ce genre-là avait existé au Canada il y a 20 ou 30 ans.
M. David Pratt: On présume que leurs rapports au premier ministre et au cabinet seraient secrets, donc, en ce qui concerne l'évaluation des menaces et ce genre de chose.
Col Sean Henry: Il faudrait très certainement réfléchir attentivement aux modalités. Ce groupe de travail dont nous recommandons la création pourrait sans aucun doute examiner la question. Pour ce qui est de ses liens avec le présent comité, vous demanderiez probablement la tenue de séances à huis clos, et les obtiendriez. Il y aurait aussi, j'en suis sûr, des séances publiques, mais comme vous le savez, il y a des gens qui sont chargés de la sécurité et des renseignements...
M. David Pratt: Le comité de surveillance.
Col Sean Henry: Au Bureau du conseil privé, il y a des gens chargés particulièrement de la sécurité et des renseignements, qui informent le cabinet régulièrement. Il y aurait, à tout le moins, interaction avec ce que nous proposons. L'organisme de sécurité nationale se servirait des renseignements recueillis par les entités déjà en place, pour étoffer leurs propres études. Il ne remplacerait pas ces entités, mais il pourrait en tirer parti. Les procédures qui y sont en vigueur resteraient les mêmes et, dans une certaine mesure, elles pourraient s'appliquer à l'organisme de sécurité nationale.
Le président: Merci, monsieur Pratt.
M. David Pratt: Est-ce que je peux ajouter quelque chose sur le...
Le président: Votre temps est écoulé.
M. David Pratt: Je serai très bref...
Le président: Monsieur Laurin...
D'accord.
M. David Pratt: Étant donné la structure bureaucratique du territoire ici, à Ottawa, et le fait que chacun protège son propre territoire, que ce soit à la Défense nationale, aux Affaires étrangères, au Bureau du conseil privé ou au cabinet du premier ministre, quelles sont les chances, à votre avis, que cet organisme voie le jour?
Col Alain Pellerin: Je crois que vous êtes mieux placé pour tâter le terrain et savoir si ce serait possible. Nous ne faisons que dire que le besoin est là. Il est évident, cependant, qu'il faudrait une volonté politique au plus haut niveau pour que cela puisse se réaliser, parce que ça s'insérerait dans...
Col Sean Henry: Ceci est extrêmement important. Telles que sont les choses actuellement en matière de défense au Canada, pour qualifier les mesures qui sont prises pour tenter d'améliorer la situation, nous utilisons les termes comme «chaotique», ou «manque de direction stratégique». Il manque une étoile, un intervenant clé, qui prendrait les choses en mains.
Voilà, mesdames et messieurs, c'est à vous—c'est aux politiciens—qu'il incombe de faire preuve de leadership à ce sujet. Une fois qu'une ferme volonté politique aura été formulée et exprimée, tous les gens, militaires et fonctionnaires, devront y adhérer. Tant que cette volonté ferme et décisive n'aura pas été exprimée, je crains que nous ne puissions pas aller bien loin.
Le président: Merci beaucoup.
Merci, monsieur Laurin, d'avoir bien voulu céder la parole à notre collègue. C'est maintenant votre tour,
[Français]
monsieur Laurin, pour cinq minutes, s'il vous plaît.
M. René Laurin: Mon colonel, vous avez indiqué qu'il y avait un écart de 1,5 milliard de dollars entre la politique et la réalité. C'est beaucoup d'argent. Je suis d'accord en principe que l'armée devrait disposer des sommes dont elle a besoin pour s'acquitter des tâches qu'on lui a confiées. Si la tâche qu'on lui a confiée est trop lourde, c'est à nous, les politiciens, de faire une révision de nos objectifs et de ne pas exiger plus que ce qu'elle peut faire avec les moyens qu'on lui donne.
Par contre, on demande 1,5 milliard de dollars de plus pour atteindre les objectifs, et le vérificateur général nous dit que ses vérifications ont montré que la Défense nationale était capable de concevoir de bons systèmes de gestion, mais que souvent le ministère ne les mettait pas en oeuvre. Il dit:
-
Il est troublant de constater un manquement
continu aux règles régissant la passation des marchés,
la gestion des finances ainsi que la santé et la
sécurité.
C'est troublant. Pour ma part, avant d'accepter qu'on accorde 1,5 milliard de dollars de plus, je voudrais m'assurer que les sommes qui sont déjà accordées à l'armée sont utilisées de façon optimale. Est-ce que vous êtes d'accord sur les affirmations du vérificateur général? Est-ce que dans ce cadre, il nous serait possible d'épargner suffisamment d'argent pour l'affecter aux besoins qui sont insatisfaits actuellement? C'est la première opération qu'on devrait faire.
Quand on aura la certitude que l'armée utilise bien l'argent qu'on lui a confié, on pourra décider de lui en accorder davantage ou de réviser nos objectifs. Mais d'abord, il faut s'assurer que la gestion est bien faite. De façon générale, est-ce que vous appuyer les remarques du vérificateur?
Col Alain Pellerin: Dans mes remarques, je mentionne
[Traduction]
que nous reconnaissons aussi que le ministère de la Défense nationale doit mettre de l'ordre dans ses propres affaires.
[Français]
Nous disons qu'il est nécessaire de le faire. Nonobstant cela, il faut se rappeler de nouveau qu'on a beaucoup de tâches. Il y a maintenant 21 missions de maintien de la paix à travers le monde. On est passé de cinq, à la fin des années 1980, à 22 récemment, et c'est maintenant 21, et on a dû subir une réduction de plus de 30 p. 100 des forces.
Tout ce que je veux dire, c'est que même si on réussissait à épargner un peu d'argent au sein du ministère, étant donné les tâches qu'on nous a données et qui vont continuer, il ne fait aucun doute dans mon esprit qu'au cours du XXIe siècle, il y aura de sérieux problèmes. On parle de problèmes humanitaires.
Dans le monde, il existe à l'heure actuelle plus de 30 conflits internes. Les Forces armées canadiennes seront appelées continuellement. Elles devront peut-être aller bientôt en Afrique, en Sierra Leone, etc.
On aura toujours besoin de forces armées suffisantes pour faire face à ces demandes. Malgré les problèmes de gestion au sein du ministère, il y a surtout un manque de personnel. Même si vous réussissez à trouver 200 millions de dollars au sein du ministère par une meilleure gestion, cela ne résoudra pas le problème du sous-financement, qui a pour conséquence une réduction constante du personnel. Même maintenant, on parle de 60 000 personnes. Effectivement, les Forces armées canadiennes sont passées à 57 000, ou peut-être même 56 000, et leur nombre va continuer à diminuer parce qu'il n'y a pas assez d'argent.
Nous croyons sincèrement qu'il est nécessaire qu'il y ait une meilleure gestion, mais il est aussi nécessaire d'augmenter le budget. En fait, le Comité des finances, qui n'est pas prêt à dépenser de grosses sommes pour la défense—il ne l'a jamais recommandé dans le passé— recommande cette année qu'il y ait un programme de cinq ans pour moderniser les Forces armées canadiennes. Ils reconnaissent qu'il y a un problème sérieux. Le vérificateur général a reconnu le problème de gestion, mais nous disons aussi que le problème le plus sérieux est celui du sous-financement du ministère.
M. René Laurin: Vous dites que la priorité est le personnel. Si on vous accordait 1,5 milliard de dollars de plus, que feriez-vous? Combien de militaires ajouteriez-vous? Est-ce que vous consacreriez ces 1,5 milliard de dollars uniquement à cela ou également à vos autres priorités?
Col Alain Pellerin: En fait, on parle de 500 millions de dollars dans le prochain budget. Disons que le besoin est actuellement de 1,5 milliard de dollars et que cette somme devra être échelonnée. On appuie la recommandation du Comité des finances voulant que ce soit échelonné sur un certain nombre d'années.
• 1015
Mais il n'y a pas que la question du personnel. Je
mentionne le personnel, qui a peut-être été plus touché
dans le cas de l'armée que dans les autres cas, mais il
y a aussi un besoin en matière d'équipement.
Prenons par exemple le cas de l'hélicoptère. On voit constamment le problème des Sea King et celui des Hercules. Il y a toute une gamme d'équipement qui doit être remplacée. Qui, parmi nous, Canadiens, se promène maintenant sur les routes avec un véhicule de plus de 30 ou 35 ans? C'est ce qu'on demande à nos militaires. Ils sont confrontés à des situations très difficiles, avec de l'équipement désuet, que ce soit au Kosovo ou au Timor oriental. On ne demande pas cela à des civils.
Le montant de 1,5 milliard de dollars, ce n'est pas seulement pour le personnel; il faut aussi remplacer l'équipement qui est désuet.
[Traduction]
Col Sean Henry: C'est une bonne question pour faire la lumière sur les chiffres qui circulent.
La somme de 500 millions de dollars que nous recommandons suffirait seulement à maintenir les choses dans l'état minimal où elles sont actuellement dans les forces armées, à éviter de recourir à ce que nous appelons une solution désespérée, dont certains exemples sont donnés ici, comme par exemple nous défaire d'aéronefs ou des Snowbirds. Comme le signalait le CAD, il y a bien une quarantaine d'autres véritables solutions désespérées. Pour empêcher cela, il faudra 500 millions de dollars rien que pour pouvoir continuer de fonctionner.
Le million et demi de dollars, c'est ce qu'il faut pour que les forces armées atteignent un niveau minimal de préparation au combat, comparativement à maintenant. Donc, c'est 500 millions de dollars pour assurer leur survie, et 1,5 million de dollars pour leur permettre de retourner s'entraîner et de rehausser leur niveau d'aptitude au combat.
Les 8 milliards de dollars dont parle le vérificateur général ne concernent à peu près strictement que les systèmes d'armement, l'équipement, et tout cela qui sera nécessaire d'ici quelques années pour remplacer des choses comme les hélicoptères qui s'écrasent, etc. Il s'agit donc de sommes différentes, pour des objectifs différents.
Enfin, les forces armées ont été acculées au pied du mur avec les réductions—réductions des bases, des services, etc.
Il y a certainement d'autres choses qui pourraient retenir votre attention, mais elles ne sont pas si importantes.
[Français]
Le président: Merci, monsieur Laurin.
[Traduction]
Revenons de ce côté-ci de la table. Y a-t-il des questions? Monsieur Pratt.
M. David Pratt: À propos de l'approvisionnement, de votre recommandation visant la création d'un système au sein du ministère de la Défense nationale, j'aimerais que vous me disiez ce qui est arrivé au Royaume-Uni, avec leur Smart Initiative, parce qu'ils semblent avoir pris la direction contraire. Avez-vous des commentaires là-dessus?
Col Alain Pellerin: Je ne sais pas très bien ce qu'ils comptent faire mais la France, par exemple, va dans le sens contraire. Ils ont toujours eu un système, au Secrétariat général de l'armement, qui ne fait pas qu'assurer l'approvisionnement en armement, mais aussi la vente d'armes à l'étranger, parce que leur situation est différente. Ils ont donc depuis toujours un système intégré au ministère de la Défense.
Le Secrétariat général de l'armement est l'équivalent chez eux d'un bureau de sous-ministre; c'est à ce niveau-là d'autorité. Je ne sais pas ce qu'il y a au Royaume-Uni.
Col Sean Henry: Les Britanniques se sont lancés, comme vous le savez probablement, avec un programme d'assez grande envergure dans la Marine royale. En fait, la diversification des modes de prestation des services a probablement ses origines là-bas.
Je ne sais pas tout, moi non plus, mais je peux vous dire ceci: la masse critique des Forces armées britanniques est bien plus grande que celle des Forces armées canadiennes, et il se pourrait bien qu'avec cela, ils soient capables de garder intact leur potentiel militaire tout en faisant ce dont vous parlez. Ce n'est pas le cas pour nous. Nous n'avons pas une masse critique suffisante pour aller bien plus loin que là où nous en sommes maintenant.
En ce qui concerne le système d'approvisionnement, je crois que l'Association de l'industrie de la défense du Canada doit témoigner devant vous au début de l'année prochaine, et vous devriez vraiment leur poser des questions très pointues là-dessus. Mais nous, ce que nous essayons de faire, c'est d'éviter le gaspillage et la redondance bureaucratique qui existent maintenant, parce qu'il y a en fait deux organismes, l'un au sein du ministère de la Défense nationale et l'autre en dehors, et lorsqu'on finit une chose au ministère, on recommence à zéro en dehors. Il y a donc redondance. C'est le problème principal que nous cherchons à régler.
Pour ce qui est de la mécanique de tout cela, c'est l'Association de l'industrie de la défense qui s'y connaît.
M. David Pratt: J'ai une autre brève question à poser sur la démilitarisation. Depuis un ou deux ans, nous entendons beaucoup parler du problème de ce qui a été qualifié de «carriérisme» au sein des Forces armées canadiennes. Voyez-vous un lien entre ces problèmes?
Col Sean Henry: Eh bien, c'est bizarre que vous en parliez, parce que j'allais justement distribuer ceci, mais j'ai pensé que le président m'en empêcherait peut-être.
Sur la page couverture de ce document, vous voyez une publicité du Collège royal militaire du Canada qui a été diffusée dans la revue Maclean's. Comme vous le savez, Maclean's se refuse à englober le CMR dans sa liste des universités, donc le ministère de la Défense fait des frais de publicité. Ceci est la première page. Il y en a, en fait, quatre.
J'aimerais vous demander si, à votre avis, l'illustration que vous voyez vous donne à penser que le CMR est un établissement militaire. On y voit bien une personne en uniforme militaire, mais vous remarquerez qu'elle ne porte pas d'arme, comme on pourrait s'y attendre. Au bas de la page, vous voyez des gens en survêtement de sport. Je sais pertinemment que personne ne va en classe habillé d'un survêtement, au CMR. Toujours est-il qu'en ce qui concerne, s'il y a carriérisme, c'est là que commence le problème, parce que le CMR est censé être le point de diffusion de l'idéal militaire dans les esprits des nouveaux élèves officiers. C'est la même chose pour les autres grades, au collège de Saint Jean.
Selon nous, c'est là que commence la démilitarisation, pour certaines raisons en rapport avec la Charte des droits et libertés et plusieurs autres choses. Et ceci l'illustre parfaitement. C'est ça, la démilitarisation—un exemple qui tape en plein dans le mille.
Sur l'autre page, pour changer un peu le sujet, on décrit un nouveau programme qui est prévu, et vous pouvez être sûrs que le MDN va se faire tordre le bras pour se conformer tout à fait à ce programme, qui ne présente probablement pas beaucoup d'intérêt sur le plan militaire. Pourtant, il faudra y consacrer efforts et argent.
Pour revenir à la question qui a été posée, le carriérisme survient lorsque les militaires ont à peu près abandonné la partie. Soyons honnêtes et réalistes: nous sommes humains et nous avons tous nos intérêts personnels. Certaines personnes y accordent plus d'importance que d'autres. Mais dans une organisation militaire qui se respecte, où on est animés par la morale militaire et l'idéal de servir, l'intérêt personnel pose bien moins de problème. Depuis une trentaine d'années, à cause de l'érosion de la morale militaire et de l'idéal de servir, et aussi de la démilitarisation des forces armées, le problème du carriérisme a pris de l'ampleur. Ceci ne fera pas grand chose pour le régler.
Le président: Merci, monsieur Pratt. Nous cédons encore la parole à Mme Wayne.
Mme Elsie Wayne: Merci beaucoup.
J'apprécie vos commentaires, vraiment, parce que j'ai déjà tenté de faire comprendre à la Chambre que la Charte des droits et libertés a négligé un aspect, celui des responsabilités. Ce que vous dites, sur le fait qu'on ne peut pas assurer de discipline dans l'armée et que certains craignent de dire ceci ou de faire cela—c'est la même chose dans le système d'éducation. Pensez-y seulement. Je sais ce que c'est; j'ai plusieurs parents enseignants. En fait, deux d'entre eux ont abandonné l'enseignement justement à cause de cela. Ils refusent de continuer à enseigner dans un pareil contexte.
Je suis profondément convaincue que nous ne sommes pas corrects vis-à-vis nos jeunes. Il faut faire quelque chose, vraiment. Nous avons encore besoin du système des cadets qu'il y avait avant. Il n'y a qu'à regarder la société d'aujourd'hui pour constater combien de jeunes se sentent perdus. S'ils étaient dans les cadets ou la réserve... on leur enseignait la discipline. Maintenant, comme vous le dites, on est très prudents, dans le système et dans toutes nos actions.
Je me demande ce que nous pouvons faire pour changer la situation, parce que je dois dire que notre société a besoin que plus de jeunes gens s'engagent dans les forces armées, et aussi dans les cadets. Cela ne fait aucun doute. J'ai prononcé un discours dans le cadre d'un dîner sur le NCSM New Brunswicker, dans ma province. Il y a nettement beaucoup moins de cadets qu'avant. Cela me fait un peu de peine, parce que rien qu'en marchant dans les rues, je vois bien qu'il se passe des choses qui ne devraient pas arriver. S'ils étaient dans les cadets, cela n'arriverait pas. Et nous pouvons changer la situation. Comment faire?
Col Sean Henry: Eh bien, la réponse la plus simple, mais qui en fait est très complexe, c'est qu'en ce qui concerne les forces armées, la première chose qu'il faudra envisager c'est la question des exceptions de la Charte des droits et libertés. Voilà un sujet qui enflamme les esprits. Cela a déjà été tenté deux fois, et rejeté catégoriquement. Il faut pourtant insister au niveau politique, parce que tant que... et bien entendu, il y en a qui montent sur leurs grands chevaux rien qu'à en entendre parler. Nous ne proposons pas de soustraire complètement les forces armées à la Charte des droits et libertés, mais il y a quelques articles spécifiques dont elles devraient être exclues ou exemptées.
D'autres pays le font. Les choses ne se font pas de la même manière dans les forces armées et dans la société civile. Donc, du côté politique, il faudrait commencer à tenter de faire comprendre cela au monde. Nous ne nous faisons pas d'illusions. Dès que le sujet vient sur le tapis, toutes sortes de groupes d'intérêts émergent pour s'y opposer.
Col Alain Pellerin: Est-ce que je peux ajouter un commentaire ici, sur ce qui pourrait être fait?
Vous avez parlé des cadets, et je suis d'accord avec vous. Ils existent encore, mais ils ont besoin d'être revitalisés. Il y a aussi la milice et la réserve, qu'il faut revitaliser. L'un des problèmes, pour cela, est celui du sous-financement.
Si vous voulez attirer des jeunes gens, il faut que ce soit attrayant, évidemment, et la réserve et la milice, comme vous le savez, ont plusieurs problèmes qu'il faut régler. Il y a celui du financement. Il y a aussi la formation et l'équipement, qui peuvent les attirer. Alors, lorsque nous parlons des forces armées et de revitalisation, il faut évidemment englober là dedans la milice et la réserve. C'est pareil pour les cadets.
Mme Elsie Wayne: J'ai une autre observation à faire. J'ai entendu cela aujourd'hui, vous parliez des Sea Kings, des hélicoptères. Aux nouvelles, l'autre soir, j'ai vu les sous-marins usagés que nous achetions, dont trois sur quatre avaient des tas de problèmes...
M. David Pratt: Certains problèmes.
Mme Elsie Wayne: Oui, et si nos gens ne s'en étaient pas occupés, ce serait encore pire. Alors je suis vraiment déçue que nous devions acheter des sous-marins usagés et que nous ne puissions pas en faire construire des tous neufs ici au Canada. Je crois que nous devrions aussi penser à cela.
Le président: Il me semble que Saint John serait idéal pour la construction de sous-marins.
Des voix: Bravo, bravo!
Le président: Il y a aussi la vallée de l'Okanagan.
Col Alain Pellerin: Est-ce que je peux faire un commentaire là-dessus? Il y existe un dicton français selon lequel «On a la défense de ses moyens».
Si la population ou le gouvernement n'est pas disposé à fournir le financement nécessaire, il est inévitable que nous nous retrouvions avec de l'équipement désuet et des forces armées insuffisantes et inaptes au combat.
Le président: C'est très bien.
Je veux maintenant m'offrir le luxe d'une ou deux questions, maintenant que les autres membres du comité ont eu le loisir d'en poser pas mal.
Oui, vous avez fait une observation intéressante, colonel. On a les forces armées qu'on veut, ou qu'on mérite. On a déjà dit ça du gouvernement. Nous pensons que les Canadiens ont un bon gouvernement—tout le monde n'est peut-être pas d'accord là-dessus. Mais on a le gouvernement qu'on veut et qu'on mérite, et on a les forces armées qu'on veut, je suppose, ou pour lesquelles on veut bien payer. Cela m'amène à l'une de mes questions.
D'après les sondages, fort heureusement, on constate une augmentation du soutien public à une dépense accrue sur les forces armées. La plupart d'entre nous, au comité, sommes déterminés à poursuivre la lutte pour que cela se réalise dans le prochain budget—ou plutôt que cela continue, parce que nous avons finalement obtenu de l'argent la dernière fois.
Croyez-vous, cependant, que le soutien public en général va jusqu'aux éléments que vous avez soulevés aujourd'hui? Je veux dire par-là croyez-vous qu'il soit assez fort pour appuyer des mesures comme la création d'un nouveau groupe de travail spécial? Vous préconisez des mesures très intéressantes, que j'appuierais très probablement, mais qu'en est-il des gens qui sont sur la rue Sparks en ce moment même, est-ce qu'ils seraient d'accord, selon vous?
Col Alain Pellerin: Disons que cela dépend si on leur expliquait pourquoi. À propos du sondage dont vous avez parlé, je crois qu'il y a une augmentation comparativement au même sondage mené l'année dernière, dont le chef s'était servi dans son rapport annuel.
• 1030
Il est très encourageant de voir que la population peut être
à l'avant-garde de son gouvernement, sur ce plan. Nos forces armées
ont beaucoup de soutien, à part ces nombreuses critiques négatives
que diffusent parfois les médias, mais il y a eu beaucoup de
commentaires positifs récemment.
J'aimerais donner un autre exemple de situation où la population peut être à l'avant-garde de nos gouvernements, dans la société démocratique. C'est au sujet du critère d'absence de victimes, de l'engagement dans des opérations dans la mesure où il n'y aura pas de victimes, et comme exemple récent, on peut donner celui du Kosovo.
Aux États-Unis, selon une importante étude qui a été menée par trois universités, et dont les conclusions ont été publiées dans le Washington Post, la population était prête à accepter qu'il y ait des victimes, du moment que la mission leur était présentée clairement.
Donc, la population comprend que la profession militaire est différente des autres et que le gouvernement exige beaucoup avant d'exposer les militaires au danger, et que s'ils y sont exposés, il est probable qu'il y ait des victimes. L'histoire nous a appris que lorsqu'on engage des troupes dans la lutte, il y a toujours des victimes. Le Kosovo n'est donc pas un bon exemple.
Tout ceci pour dire que la population pourrait bien être à l'avant-garde du gouvernement sur ces divers plans. Je crois que le gouvernement et un comité comme le vôtre doivent y réfléchir et voir quel genre d'appui on reçoit, et dans quelle mesure la population appuie les forces armées et favorise l'engagement des forces armées dans les conflits.
Le président: J'espère que vous avez raison. Comme je le disais, nous savons qu'il y a plus de soutien; j'espère seulement que la population voudra bien appuyer les mesures que vous préconisez.
J'aimerais poursuivre dans la foulée de mon collègue, M. Pratt, lorsqu'il a posé une question au sujet d'autres groupes. Le BCNI est fort bien, mais en toute franchise, sauf votre respect, il n'atteindra pas un très grand auditoire, selon votre raisonnement politique. Il en atteindra certains, mais pas tous.
Qu'en est-il de la gauche politique? Êtes-vous capable de rallier des gens qui appuient la plate-forme de la sécurité humaine dont a parlé M. Pratt?
Il existe des Canadiens, dont certains à la Chambre des communes, qui voudraient faire le bien et empêcher les gens de s'entre-tuer, mais ils n'appuient pas les militaires. Je ne comprends pas leur logique, mais en fin il y en a une; c'est une réalité. Pouvez-vous rallier certains de ces groupes, les coopter d'une manière quelconque grâce au programme de sécurité humaine et élargir la base à partir de laquelle convaincre le gouvernement, qui est attentif aux réactions du grand public, de faire ce que vous demandez?
Col Alain Pellerin: Voilà une excellente question.
En fait, comme publicité gratuite, notre colloque annuel et notre assemblée générale annuelle, prévus pour le 27 janvier 2000, porteront sur le Parlement et sur les forces armées. Deux d'entre vous ont été invités à y prendre part, y compris le président. Le Parlement ne siégera pas, à ce moment-là, mais j'espère que les parlementaires y participeront ainsi que des personnes... Vous avez parlé de gens de l'extérieur. Je songe notamment à Ernie Regehr, du Project Ploughshares, pour lequel j'ai beaucoup de respect, avec lequel j'ai beaucoup traité avant de prendre en charge la direction de la politique nucléaire à la Défense nationale. Manifestement, nous étions de camps opposés en ce qui concerne la politique nucléaire, mais, d'après ses commentaires récents à l'appui du besoin de troupes pour des missions humanitaires, je crois que nos vues se rapprochent dans ce dossier. J'ose espérer que nous pourrions nous regrouper avec des groupes comme ceux-là pour appuyer encore plus solidement la défense. Il faut incontestablement accroître les efforts en ce sens.
Au sein même de notre organisme, nous comptons beaucoup d'organismes qui ont toujours été pro-défense, mais il n'y a pas de raison pour laquelle nous ne pouvons pas en accroître le nombre. C'est incontestable.
En fait, j'ai eu un entretien analogue hier, à l'heure du dîner, avec Doug Bland, qui a passé la matinée avec le sénateur Rompkey et la CAD pour discuter de toutes ces questions et voir comment nous pourrions travailler concerter notre action. Nous pourrions notamment—à nouveau, c'est une question d'éducation—travailler de plus près avec les députés et les sénateurs et tenir en leur présence des déjeuners, des tables rondes en matière de défense et de sécurité. Nous le ferions volontiers.
Col Sean Henry: J'aimerais faire remarquer au président et au comité que je suis un membre cotisant de l'Alliance canadienne pour la paix. Nous sommes donc très conscients de ce qu'il nous faut faire.
Malheureusement, comme vous le savez fort bien, de nombreuses personnes de l'autre camp sont ce que je qualifierais de «doctrinaires». Elles ont épousé une idéologie, et il est extrêmement difficile de les en faire déroger. Par contre, certains, je crois, comprennent les nouvelles réalités. Je reviendrai simplement à ce que j'ai dit tout à l'heure en rapport avec la question de M. Pratt: il faut les convaincre que la sécurité humaine exige un encadrement militaire solide. Si cet argument sert de point de départ, je crois qu'on peut les rallier.
Il est fort intéressant de constater que parmi les ONG, Médecins sans Frontières, qui a reçu le prix Nobel, est, que je sache, le seul organisme consacré à l'aide humanitaire qui appuie les militaires. Il l'a dit publiquement, et j'ai parlé à certains de ses membres. Ils sont convaincus que ce que j'ai dit au sujet de l'encadrement est tout à fait vrai. J'estime qu'il faut exploiter cela.
Le président: Je vous remercie beaucoup.
M. David Pratt: Monsieur le président, pourrais-je relancer le témoin à ce sujet?
Le président: Bien sûr. La parole est maintenant aux membres du comité qui ont des questions.
Monsieur Pratt, suivi de M. Laurin.
M. David Pratt: Pour ce qui est de bâtir d'autres coalitions, Médecins sans frontières a certes une expérience de première main des conséquences de la guerre.
Vous avez parlé des ONG, mais il y beaucoup de groupes au Canada—entre autres, des groupes qui se consacrent au développement comme World Vision—qui selon moi comprennent très bien qu'il ne peut pas y avoir de développement dans le Tiers-Monde sans stabilité et que, pour avoir la stabilité, il faut avoir recours à la force militaire.
À nouveau, en tant que suivi, il est peut-être temps que la CAD se concentre, non pas sur des arrangements formels, mais sur une coalition informelle de groupes comme la Croix-Rouge qui sont confrontés chaque jour aux conséquences de la guerre et ont une meilleure idée de ce dont il est question quand on parle de sécurité dans les zones de guerre. Ce n'est qu'une suggestion.
Col Sean Henry: Votre suggestion est certes positive. Malheureusement, au-delà d'un certain point, on bute non seulement contre des approches politiques doctrinaires, mais aussi contre un manque de ressources et d'argent.
Ce n'est pas une coïncidence si, lorsque nous avons commencé à parler d'un écart de 1,5 milliard de dollars entre ce que préconise le Livre blanc de 1994 et ce dont ont besoin les forces armées, tout à coup, des manifestants sont descendus dans les rues d'Ottawa en faveur des sans-abri qui eux aussi avaient besoin de 1,5 milliard de dollars. Ce ne fut pas un hasard. Pour certains, tout est noir et blanc.
Dans beaucoup de nos activités, nous avons essayé de faire ressortir que tout n'est pas noir ou blanc, que les forces armées sont essentielles pour garantir la prospérité qui permet à son tour au gouvernement d'offrir des programmes sociaux. Bien des gens vous jetteront à la porte de leur bureau si vous faites une telle affirmation, mais c'est bel et bien le raisonnement qu'il faut tenir, que tout n'est pas noir et blanc, même si c'est ainsi que beaucoup le voient.
Le président: Ce n'est pas une question dichotomique.
[Français]
Monsieur Laurin, avez-vous une question?
M. René Laurin: Avant de poser ma question, il y a quelque chose que j'aimerais savoir. On a parfois des documents qui sont intitulés «Conférence des associations de la défense» et d'autres qui portent la mention «Congrès des associations de la défense».
Col Alain Pellerin: C'est la même chose. Il y a quelques années, le nom était «Congrès», mais on a changé le nom en français pour celui de «Conférence».
M. René Laurin: D'accord.
Col Alain Pellerin: On croyait que cela reflétait mieux le titre anglais.
M. René Laurin: Ma question est en réaction à un commentaire qu'a fait plus tôt le colonel Henry.
Vous dites qu'on ne devrait peut-être pas appliquer la Charte des droits et libertés aux militaires. Croyez-vous que cela pourrait nuire au recrutement des militaires? Combien cela pourrait-il coûter au gouvernement? Combien cela coûte-t-il de renoncer aux droits de la personne? Est-ce que cela pourrait avoir une influence néfaste? J'aimerais savoir ce que vous en pensez.
[Traduction]
Col Sean Henry: Je vais répondre à votre question d'ordre général par un exemple précis.
• 1040
Revenons-en au Collège militaire royal et à la préoccupation
provoquée chez certains, à la Défense nationale, par le fait que
cet établissement doit publier des annonces pour faire du
recrutement. Ils craignent que le phénomène ne soit dû à la Charte
des droits. Récemment, un sondage a également été effectué au
collège, et les médias ont réussi à mettre la main sur les
résultats grâce à la Loi sur l'accès à l'information. Ces résultats
révélaient que les gens du collège militaire, les cadets, sont
aussi inquiets de ce genre de choses. La réponse à votre question
est donc négative, selon moi. Suffisamment de personnes comprennent
ce que l'armée va exiger d'eux, mais lorsqu'ils entrent dans les
Forces, ils sont déçus de constater que tout est édulcoré.
Aux États-Unis, la situation est très analogue. On dit que les Forces armées des États-Unis, particulièrement l'armée, ont de la difficulté à atteindre leurs objectifs de recrutement. Il y a trop de volontaires pour un volet des Forces armées des États-Unis, les Marines. Les forces des Marines n'ont jamais dévié de...
[Français]
M. René Laurin: Mon colonel, je comprends bien ce que vous dites, sauf qu'il y a une différence entre dire qu'on accepte de faire du recrutement avec l'uniforme, et un soldat qui doit passer en cour martiale parce qu'il a refusé d'accepter un vaccin. À ce moment-là, les droits de la personne entrent en ligne de compte. On a ici deux extrêmes. Si on n'applique pas la Charte des droits et libertés à nos militaires, je pense que cela va beaucoup plus loin que l'exemple de l'uniforme que vous avez donné.
Col Alain Pellerin: Pour venir à la défense de mon collègue, je ne crois pas qu'il ait dit, non plus que nous à la Conférence des associations de la défense, que les Forces armées ne devaient pas être assujetties à la Charte des droits et libertés. C'est sûr que les Forces armées doivent être responsables devant le Parlement et face aux lois adoptées par le Parlement.
Toutefois, dans certaines circonstances, pour ce qui est de certains éléments de la Charte des droits de la personne, il devrait y avoir pour les Forces armées une clause nonobstant. On devrait peut-être, par exemple, regarder de plus près la question des femmes dans les forces de combat. C'est toujours le même débat qui revient. Vous vous rappellerez peut-être qu'il y a deux semaines, un très bon article a été publié dans le National Post à ce sujet.
À cause de la Charte des droits et libertés, le ministère et les Forces canadiennes ont dû se plier à la loi et s'assurer que les femmes soient admises dans tous les secteurs des Forces armées, sauf dans les sous-marins, je crois.
Mais le problème n'est pas là. Il n'y a pas assez de demandes de la part des femmes pour aller dans les forces de combat. Ce n'est pas une question d'être négatif eu égard à la Charte des droits et libertés; il s'agit d'être réaliste. Les femmes ne demandent pas à aller dans certains secteurs. Je vous donne un exemple spécifique, mais il y en a sûrement d'autres.
[Traduction]
Col Sean Henry: J'irai encore plus loin. Il est très important de bien faire comprendre que nous ne sommes pas contre l'application de la Charte. Par contre, sur cinq points très précis peut-être, il faudrait en modifier les dispositions.
La présence de femmes dans les forces de combat est une question très explosive. J'irai encore plus loin et je dirai qu'on s'inquiète de la mise en présence des deux sexes. L'expression clé est «mise en présence» d'hommes et de femmes dans des forces de combat, surtout dans l'infanterie. Si nos forces armées étaient plus importantes et qu'elles étaient obligées d'inclure des femmes dans les forces de combat, nous ferions ce que font d'autres pays et établirions des unités distinctes. C'est ainsi que l'on a toujours procédé dans le passé quand, pour des raisons d'ordre démographique, il fallait recruter des femmes pour atteindre les quotas en matière de personnel. Dans l'armée russe et, plus récemment, dans l'armée israélienne, on a établi des unités de femmes distinctes.
Dans l'armée israélienne, on a buté contre des problèmes très réels durant la guerre de 1967, alors qu'hommes et femmes se retrouvaient dans des endroits comme la tour de chars d'assaut, entre autres. Sa solution a été plutôt intéressante. Le personnel qui fait marcher son école des armes de combat est composé de femmes. En fait, il n'y pas si longtemps que le commandant de son école de l'armée blindée était une brigadière-générale. C'est une bonne solution, parce que vous donnez ainsi aux femmes la possibilité de faire partie des Forces et que vous les encouragez, mais que vous évitez que des hommes et des femmes de combat se retrouvent en présence les uns des autres dans des espaces confinés, ce qui soulève toutes sortes de problèmes. Il faudrait donc modifier la Charte des droits, non pas la rejeter.
Le président: Monsieur Laurin, je vous remercie.
Il n'y a plus quorum parce que la présence de certains membres du parti ministériel était requise à la Chambre. Ce n'est pas par manque d'intérêt, je vous l'assure.
Je vais maintenant céder la parole à M. Hart qui va proposer ce que j'estime être une très bonne idée.
M. Jim Hart: Monsieur le président, étant donné la période de l'année et le fait qu'il s'agit en réalité de la dernière réunion du Comité de la défense avant le Nouvel an, j'aimerais préciser officiellement que le Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants félicite les hommes et femmes des Forces armées canadiennes des services rendus au Canada et à l'étranger en 1999. Les membres du comité transmettent également leurs meilleurs voeux à tous les membres des Forces canadiennes et à leurs familles, particulièrement à ceux qui seront loin de leur famille durant la période des Fêtes.
Le président: Je vous remercie.
Ces propos reflètent les sentiments de chacun d'entre nous, j'en suis sûr. Nous tenons à féliciter et, certes, à remercier tous les membres des Forces. Je sais que c'est là l'intention, et nous sommes tous en faveur de cela. Dès la première occasion, c'est-à-dire dès que nous aurons un quorum, nous rendrons ses félicitations et ces voeux officiels.
Madame Wayne.
Mme Elsie Wayne: Comme vous le savez, les cinq groupes des hommes de la marine marchande se sont mis d'accord. Ils ont tous accepté et signé l'accord. C'est un cadeau de Noël qui, avec un peu de chance, sera présenté à M. Baker par le sous-ministre aujourd'hui. L'entente est due au comité et à ses dernières recommandations. J'aimerais remercier tous mes collègues de m'avoir entendue quand j'ai dit qu'il fallait qu'ils le fassent par eux-mêmes. Ils ont eux-mêmes livré le combat au cours des dernières 48 heures et ils ont obtenu ce qu'ils réclamaient.
Le président: C'est fort bien.
Nous avons tous consacré beaucoup d'heures à cette question, mais en tant que président, il faudrait que je reconnaisse au nom de tous les membres du comité que Mme Wayne a certes travaillé très fort pour cette cause. Elle a manifesté un très vif intérêt dans ce dossier et en a assumé le leadership. J'estime qu'elle a droit à des félicitations. Je sais que les marins marchands connaissent son dévouement à leur cause. De nombreux autres membres se sont dévoués, mais elle a certainement consacré beaucoup de temps à ce dossier. En toute franchise, j'ignore comment elle a réussi, mais je la félicite.
Monsieur Hart, ce que vous avez proposé est excellent. J'ignore si d'autres ont quelque chose à ajouter à cet égard. Si nous avions suffisamment de membres présents, nous pourrions en faire des voeux officiels. Vos propos reflètent certes le désir du comité de féliciter et remercier les hommes et les femmes de nos Forces canadiennes, particulièrement ceux qui se trouvent à l'étranger dans des zones dangereuses. Je vous remercie d'avoir attiré notre attention sur ce point.
Messieurs, je vous remercie beaucoup de votre exposé fort intéressant qui nous donne beaucoup de matière à réflexion. Quelqu'un a demandé que nous nous procurions l'article de M. Bland, à un certain moment. Ce serait une excellente idée. Je tiens à vous remercier vivement d'être venus ici aujourd'hui.
M. Laurin a une question.
[Français]
M. René Laurin: Monsieur le président, j'aimerais qu'on me donne un renseignement avant que la réunion ne se termine.
Je crois que M. Goldring devait déposer une motion. Lors de la dernière réunion du comité, je suis arrivé un peu en retard. Je voudrais savoir ce qu'il est advenu de cette motion. Est-ce qu'elle a été présentée?
[Traduction]
Le président: Non. M. Goldring a envoyé un avis, mais il n'a jamais assisté à une réunion du comité pour présenter sa motion. Il n'y a toujours qu'un avis de son intention de déposer une motion. Monsieur Laurin et chers collègues, je ne suis pas sûr que nous pouvions faire grand-chose de toute façon. L'affaire est devant les tribunaux actuellement. Nous pouvons recevoir la motion, mais je ne crois pas que le comité puisse faire grand-chose parce que les tribunaux ont été saisis de la question. Quoi qu'il en soit, quand M. Goldring sera ici, nous en discuterons.
Comme l'a dit Jim, il s'agit de notre dernière réunion de la session, en fait du siècle, que dis-je, du millénaire—certains le contesteraient, de toute façon, mais c'est mon opinion. Je félicite tout le monde de l'excellent travail qui s'est accompli et d'avoir essayé d'être le plus impartial possible. Je vous remercie, chers collègues, de votre collaboration. Joyeux Noël à tous et Bonne année à vous et à vos proches. Nous nous reverrons l'année prochaine. Merci beaucoup à tous.
Mme Elsie Wayne: Monsieur le président, je vous remercie beaucoup. Vous faites de l'excellent travail.
Le président: C'est moi qui vous remercie.
La séance est levée.