Passer au contenu
;

ENVI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain

37e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent de l'environnement et du développement durable


Témoignages du comité

TABLE DES MATIÈRES

Le jeudi 28 février 2002




¿ 0915
V         Le président (M. Charles Caccia (Davenport, Lib.))
V          M. Robert G. Connelly (vice-président, Élaboration des politiques, Agence canadienne d'évaluation environnementale)
V         Le président
V         M. Robert Connelly

¿ 0920
V         Le président
V         M. Robert Connelly
V          Mme Heather Smith (conseillère juridique; ministère de la Justice; avocate principale, Services juridiques, Agence canadienne d'évaluation environnementale)

¿ 0925

¿ 0930
V         M. Robert Connelly
V         Le président

¿ 0935
V         M. Robert Connelly
V         Le président
V         M. Bob Mills (Red Deer, Alliance canadienne)
V         M. Robert Connelly
V         M. Bob Mills
V         M. Robert Connelly
V         M. Bob Mills

¿ 0940
V         M. Robert Connelly
V         M. Bob Mills
V         Le président
V         Mme Karen Kraft Sloan (York-Nord, Lib.)
V         Mme Heather Smith
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         Le président
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         Mme Heather Smith

¿ 0945
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         M. Robert Connelly
V         Mme Karen Kraft Sloan
V          Mme Heather Smith
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         Le président
V         M. Julian Reed (Halton, Lib.)

¿ 0950
V         M. Robert Connelly
V         M. Julian Reed
V         M. Robert Connelly

¿ 0955
V         M. Reed
V         Le président
V         M. Alan Tonks (York-Sud--Weston, Lib.)
V         M. Robert Connelly
V         M. Alan Tonks
V         M. Robert Connelly
V         M. Alan Tonks
V         M. Robert Connelly
V         M. Alan Tonks
V         M. Robert Connelly
V         M. Tonks
V         Le président

À 1000
V         Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.)
V         M. Robert Connelly
V         Mme Heather Smith
V         Mme Karen Redman
V         Mme Heather Smith
V         Mme Redman
V         Le président
V         Mme Hélène Scherrer (Louis-Hébert, Lib.)
V         Mme Heather Smith
V         Mme Hélène Scherrer

À 1005
V         Mme Heather Smith
V         Mme Hélène Scherrer
V         Mme Heather Smith
V         Mme Hélène Scherrer
V         Mme Heather Smith
V         Mme Hélène Scherrer
V         Mme Heather Smith
V         Mme Hélène Scherrer
V         Mme Heather Smith
V         Mme Hélène Scherrer
V         Le président

À 1010
V         Mme Heather Smith

À 1015
V         Le président
V         Mme Heather Smith
V         Le président
V         Mme Heather Smith
V         Le président
V         Mme Heather Smith
V         Le président
V         Mme Heather Smith
V         Le président
V         Mme Heather Smith
V         Le président
V         Mme Heather Smith
V         Le président
V         Mme Heather Smith
V         Le président
V         Mme Heather Smith
V         Le président

À 1020
V         Mme Heather Smith
V         Le président
V         M. Bob Mills
V         Mme Heather Smith
V         M. Bob Mills
V         M. Robert Connelly
V         M. Bob Mills
V         M. Robert Connelly

À 1025
V         M. Bob Mills
V         Le président
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         Mme Heather Smith
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         Mme Heather Smith
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         Mme Heather Smith
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         Mme Heather Smith
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         Mme Heather Smith
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         Mme Heather Smith
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         Mme Heather Smith
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         Mme Heather Smith

À 1030
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         M. Robert Connelly
V         Mme Heather Smith
V         
V         
V         Le président
V         Le président










CANADA

Comité permanent de l'environnement et du développement durable


NUMÉRO 062 
l
1re SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

Témoignages du comité

Le jeudi 28 février 2002

[Enregistrement électronique]

¿  +(0915)  

[Traduction]

+

    Le président (M. Charles Caccia (Davenport, Lib.)): Bonjour, mesdames et messieurs. Nous avons une très importante séance ce matin. Nous aurons un exposé de l'Agence canadienne d'évaluation environnementale. Nous avons invité les représentants de l'Agence à venir nous parler de la décision de la Cour fédérale du Canada dans l'affaire de l'autoroute de Red Hill Creek à Hamilton, qui a beaucoup retenu l'attention du public.

    Comme il y a quorum, nous commençons tout de suite. Je vous souhaite la bienvenue, monsieur Connelly, madame Smith et monsieur Clarke. La parole est à vous. Je vous remercie d'être revenus nous voir. Je vous prie de commencer.

+-

     M. Robert G. Connelly (vice-président, Élaboration des politiques, Agence canadienne d'évaluation environnementale): Je vous remercie, monsieur le président, de nous avoir donné l'occasion de comparaître de nouveau. Aujourd'hui, comme vous l'avez demandé, nous vous présentons un exposé sur la récente décision de la Cour fédérale selon laquelle la Loi canadienne sur I'évaluation environnementale ne s'applique pas à l'autoroute de Red HilI Creek envisagée à Hamilton.

    Au-delà des détail particuliers de l'affaire Red Hill, la décision de la Cour fédérale soulève une question administrative extrêmement importante à propos du processus fédéral d'évaluation environnementale:la Loi devrait-elle s'appliquer à des projets dont la planification est déjà très avancée au moment où une décision fédérale est sollicitée?

[Français]

    Nous avions l'impression que cette question avait été définitivement réglée il y a plus d'une décennie, avec les décisions du tribunal relativement au barrage Rafferty-Alameda en Saskatchewan et au barrage de la rivière Oldman en Alberta. Malheureusement, à la suite de la décision relativement au cas Red Hill Creek, la situation n'est pas aussi claire que cela. Le manque de clarté qui en résulte pourrait entraîner des répercussions négatives sur l'application éventuelle de la loi.

    Monsieur le président, je résumerai les faits du cas Red Hill Creek afin que les membres du comité puissent comprendre pleinement le problème. Heather Smith, ma collègue du ministère de la Justice, expliquera les décisions de la Cour fédérale et la raison pour laquelle nous croyons que cette décision pourrait causer un problème.

[Traduction]

    Permettez-moi de noter que le projet de loi C-19 n'aborde pas actuellement ce problème parce qu'il a été présenté en mars 2001, c'est-à-dire avant que la Section de première instance de la Cour fédérale et que la Cour d'appel fédérale ne rendent leurs décisions, respectivement en avril 2001 et en novembre 2001.Après avoir situé le problème, nous vous ferons part de nos réflexions préliminaires au sujet d'une solution éventuelle.

    Nous avons donné au greffier le texte de notre exposé. Pour gagner du temps, au lieu de vous présenter toute la chronologie détaillée de l'affaire, qui a commencé dans les années 50 et qui figure dans le texte que nous avons remis au greffier, je vais directement passer au résumé des événements qui figure à la page 3 des versions anglaise et française.

+-

    Le président: Excusez-moi de vous interrompre, mais comme cette séance est télévisée et que la chronologie est très intéressante, vous voudrez peut-être, si vous n'y voyez pas d'inconvénient, nous la présenter quand même en entier à l'intention des gens qui s'intéressent à l'affaire.

+-

    M. Robert Connelly: Bien sûr, monsieur le président, je serai heureux de le faire. Je vais donc suivre le texte que vous avez également en main.

    Comme je l'ai mentionné, monsieur le président, l'idée de construire l'autoroute de Red HilI Creek remonte à la fin des années 50. On a étudié divers tracés routiers au fil des ans et c'est en 1979 que la municipalité régionale à choisi les tracés actuels en ce qui a trait aux tronçons est-ouest et nord-sud de l'autoroute.

    La municipalité régionale a présenté une demande d'évaluation environnementale au gouvernement de l'Ontario en 1983. Le gouvernement fédéral n'a pas participé à l'évaluation provinciale à ce moment parce que ce n'était pas une initiative fédérale et qu'elle ne mettait en jeu ni une subvention fédérale ni le territoire domanial.

    Bien sûr, tout cela se passait avant l'adoption de l'actuelle Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Le ministère provincial des Ressources naturelles, qui administrait alors tous les aspects des dispositions relatives à l'habitat de la Loi sur les pêches, a fait savoir que le projet ne comportait aucun enjeu touchant les pêches.

    L'administration municipale a commencé à se préparer à construire l'autoroute bien avant l'arrivée de l'approbation provinciale en 1985. Elle a exproprié des biens, démoli des structures, perçu des redevances d'exploitation, adopté divers règlements et signé des ententes relatives au financement du projet.

    La construction du tronçon nord-sud a débuté en 1990, mais le financement a été supprimé par suite de l'élection d'un nouveau gouvernement provincial. Par conséquent, la construction de ce tronçon a été suspendue, sauf en ce qui concerne trois passages supérieurs pour lesquels des contrats avaient déjà été adjugés. À la suite de l'élection du gouvernement provincial actuel en 1995, le financement du tronçon nord-sud a été rétabli. La municipalité régionale a recommencé à planifier l'autoroute selon un tracé assez différent de celui qui avait été approuvé en 1985.

    Le nouveau tracé exige un réalignement partiel du ruisseau Red HilI ainsi que l'établissement de huit passages. Comme le ruisseau fournit un habitat aux poissons, le ministère des Pêches et des Océans a informé la municipalité régionale que le nouveau tracé du tronçon nord-sud de l'autoroute exigeait une autorisation en vertu de la Loi sur les pêches. Parce que le ministère des Pêches et des Océans devait décider s'il accorderait ou non cette autorisation, il fallait en même temps entreprendre une évaluation environnementale en vertu de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale.Cela revient à dire en fait que la Loi sur les pêches a déclenché l'application de la LCEE.

    À l'échelon provincial, un décret d'exemption a été accordé en 1997 en vertu de la Loi sur les évaluations environnementales de l'Ontario.En 1998, la municipalité régionale a présenté officiellement une demande d'autorisation en vertu de la Loi sur les pêches, et un examen préalable a été entrepris en vertu de la LCEE. Par suite de cet examen préalable, Environnement Canada a déterminé que le projet entraînerait la destruction de l'habitat d'oiseaux migrateurs et que l'ampleur des répercussions de cette perte était inconnue. De plus, le ministre des Pêches et des Océans et le ministre de l'Environnement ont reçu un grand nombre de lettres exprimant des préoccupations à propos du projet d'autoroute.

    En s'appuyant sur la possibilité d'importants effets environnementaux nuisibles et sur les préoccupations exprimées par le public, le ministre des Pêches et des Océans a, conformément à l'article 25 de la Loi, demandé au ministre de l'Environnement, en mai 1999, de soumettre immédiatement le projet à une commission d'examen, sans attendre le résultat de l'examen préalable.Le ministre de l'Environnement a accepté cette demande. Peu après, la municipalité régionale de Hamilton-Wentworth a présenté à la Cour fédérale une demande de contrôle judiciaire portant sur plusieurs questions, mais surtout sur la décision du gouvernement fédéral d'assujettir le projet à la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale et à la Loi sur les pêches.

    Pour récapituler, monsieur le Président, je vais passer en revue quelques éléments clés de cette chronologie.

    Premièrement, l'idée de construire l'autoroute de Red HilI Creek remonte à plus de quarante ans. Deuxièmement, la province a approuvé la construction en 1985. Les travaux ont commencé en 1990, mais ont été suspendus la mêmeannée lorsque le financement a été retiré. À la fin des années 90, lorsque le financement a été rétabli, le projet a fait l'objet de modifications qui ont déclenché les dispositions de la LCEE. Enfin, la municipalité régionale de Hamilton-Wentworth a contesté l'application de la LCEE au projet devant la Cour fédérale du Canada.

    C'était donc là...

¿  +-(0920)  

+-

    Le président: Avant de passer au chapitre suivant concernant les litiges, pourriez-vous dire au comité d'une façon approximative quel nombre d'arbres il aurait fallu couper, quel nombre de ruisseaux auraient été endommagés ou touchés, pour que nous puissions nous faire une idée des répercussions environnementales?

+-

    M. Robert Connelly: À ma connaissance, monsieur le président, le nombre d'arbres abattus serait aux alentours de 40 000. L'autoroute aurait une longueur d'environ 8 kilomètres. Une importante partie du ruisseau Red Hill doit être recanalisée, c'est-à-dire déplacée vers un autre endroit qui n'est pas très différent de l'endroit initial, mais où le ruisseau sera canalisé.

    Au moment où l'évaluation a été entreprise, les préoccupations environnementales exprimées par le public et par différentes autorités fédérales portaient sur l'habitat du poisson et les effets sur le poisson dans le cours d'eau. On s'inquiétait aussi des répercussions possibles de l'abattage des arbres sur les oiseaux migrateurs et leur habitat car, si j'ai bien compris, il y a dans la région des terres marécageuses écologiquement délicates qui pourraient subir des dégâts. Les préoccupations portaient en outre sur certaines espèces de plantes et d'arbres que l'on considère importantes dans la zone locale. Bref, monsieur le président, je crois que ce sont là les principaux aspects environnementaux envisagés au début de l'évaluation.

    Je vais maintenant céder la parole à ma collègue, Heather Smith. Elle nous exposera les faits relatifs aux litiges.

+-

     Mme Heather Smith (conseillère juridique; ministère de la Justice; avocate principale, Services juridiques, Agence canadienne d'évaluation environnementale): Monsieur le président, les litiges relatifs au processus fédéral d'évaluation environnementale se présentent en général sous forme de contrôles judiciaires. Le titre officiel de cette procédure est demande de contrôle judiciaire d'une mesure administrative.

[Français]

En français, on appelle cela une demande de contrôle judiciaire. C'est le mécanisme par lequel les tribunaux supervisent les actions de la division exécutive du gouvernement. La Cour fédérale du Canada est responsable de la supervision des activités des ministères et des organismes fédéraux.

    Dans le cas de l'autoroute de Red Hill Creek, la Municipalité régionale de Hamilton-Wentworth a demandé le contrôle judiciaire de: la décision de Pêches et Océans selon laquelle la Loi sur les pêches s'applique au projet; la décision de Pêches et Océans selon laquelle la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale s'applique au projet; la demande du ministre des Pêches et des Océans au ministre de l'Environnement de soumettre le projet à une commission d'examen en vertu de la LCEE; la nomination des membres de la commission par le ministre de l'Environnement et l'établissement du mandat de la commission.

    On a accordé le statut d'intervenant à un groupe environnemental opposé au projet qui s'appelle Friends of the Red Hill Creek Valley. Ses membres étaient représentés devant la cour par l'Association canadienne du droit de l'environnement, la Canadian Environmental Law Association. La province de l'Ontario est également intervenue dans le processus et a appuyé la Municipalité régionale de Hamilton-Wentworth.

¿  +-(0925)  

[Traduction]

    Dans la décision rendue par la Section de première instance, le 24 avril 2001, Mme le juge Eleanor Dawson a accueilli la demande de contrôle judiciaire, estimant que la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale ne s'appliquait pas à l'autoroute.Elle a également soutenu que, d'après la preuve produite, la décision de renvoyer le projet à une commission d'examen ne s'appuyait pas sur un chef de compétence fédérale valide. Ayant déjà conclu que la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale ne s'appliquait pas au projet, le juge Dawson n'avait pas à statuer sur cette question, mais elle a décidé de l'aborder dans sa décision. Elle a conclu qu'il était trop tard pour que la municipalité régionale conteste la décision par laquelle le MPO avait déclaré que la Loi sur les pêches s'appliquait au projet.Elle n'a pas statué sur les autres questions soulevées dans le litige.

    Monsieur le président, le gouvernement fédéral a décidé d'en appeler d'une partie de la décision. Nous voulions attirer l'attention de la Cour fédérale sur la question capitalede savoir si la LCEE s'applique à un projet dont la planification est déjà très avancée.Lorsque la Cour d'appel fédérale a examiné l'affaire, elle a confirmé la décision du juge Dawson en statuant qu'elle n'avait commis dans sa décision aucune erreur susceptible de révision. Autrement dit, la Cour d'appel n'a trouvé aucune raison d'intervenir pour infirmer sa décision.

    Permettez-moi de vous décrire plus précisément le raisonnement suivi par la Cour fédérale pour établir que la LCEE ne n'applique pas au projet de Red HilI Creek. Le raisonnement s'appuyait sur deux éléments: d'abord, à cause de l'application du paragraphe 74(4) de la Loi, dit clause de droits acquis;ensuite, parce que cela constituerait une application rétroactive de la LCEE à un projet à l'égard duquel des décisions irrévocables ont été prises avant l'entrée en vigueur de la Loi, en janvier 1995.

    C'est le deuxième élément du raisonnement qui nous semble particulièrement inquiétant. On retrouve le concept de décision irrévocable partout dans la Loi. Il se trouve par exemple, à l'article 11 que la Cour a considéré dans l'affaire de Red Hill Creek. L'article 11 exige que les autorités fédérales veillent

à ce que l'évaluation environnementale soit effectuée le plus tôt possible au stade de la planification du projet, avant la prise d'une décision irrévocable...

C'est là une obligation qui incombe aux ministère fédéraux.

Nous avons toujours appliqué l'expression «décision irrévocable» de l'article 11 aux décisions des autorités fédérales, mais le juge Dawson a conclu qu'elle avait un sens plus général, soutenant qu'elle s'étendait aux décisions prises par l'administration municipale, qui est pourtant l'auteur du projet d'autoroute.Le raisonnement tenu par la Cour signifie que les décisions prises par le promoteur d'un projet peuvent empêcher l'application de la LCEE.

La Cour a conclu que la municipalité régionale avait déjà pris des décisions irrévocables relatives à la construction de l'ensemble de l'autoroute avant l'entrée en vigueur de la LCEE. Elle a, par exemple, pris des mesures telles que l'expropriation de biens, la démolition de structures, la perception de redevances d'exploitation, l'adoption de règlements et la signature d'ententes de financement.Se fondant sur la preuve produite, la Cour a conclu que toutes ces choses se sont produites avant l'entrée en vigueur de la Loi.

    Le libellé anglais de la définition de «projet»--qui dit «any proposed construction» ou «toute construction proposée»--occupe également une place de premier plan dans le raisonnement du juge Dawson. Elle a conclu que l'autoroute n'était pas un «projet» aux fins de la LCEE parce que des décisions irrévocables avaient été prises pour entreprendre la construction avant 1995 et, par conséquent, que la construction de l'autoroute n'était plus «proposée». Autrement dit, la Cour a statué que l'autoroute ne s'inscrivait pas dans la définition de «projet» parce qu'elle avait dépassé l'étape de la proposition au moment de l'entrée en vigueur de la LCEE en 1995. En conséquence, les exigences de l'évaluation environnementale fédérale ne s'appliquent pas.

    Monsieur le président, nous sommes préoccupés par ce raisonnement contraire à l'objet de la LCEE, qui est de veiller à un examen sérieux des effets environnementaux des projets avant que le gouvernement fédéral ne prenne de décisions. Sans l'information recueillie grâce à l'application de la LCEE, les décideurs fédéraux disposeraient de peu ou pas d'information concernant les effets possibles sur l'environnement des projets entrepris par suite de leurs décisions.

¿  +-(0930)  

+-

    M. Robert Connelly: Je vous remercie d'avoir expliqué le litige au Comité, Heather.

    Pour continuer, monsieur le président, je dirai que la question de savoir si la LCEE s'applique ou non à un projet ne peut pas être simplement déterminée par le fait que le promoteur, qu'il s'agisse de la province ou de tout autre intervenant, a déjà pris une décision relative à ce projet. Dans ce cas, les promoteurs pourraient planifier leurs projets de manière à prendre des décisions irrévocables avant de solliciter des autorisations fédérales, ce qui leur permettrait de se soustraire à l'application de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale.

    Comme je l'ai déjà mentionné au sujet du Décret sur les lignes directrices visant le processus d'évaluation et d'examen en matière d'environnement ou DLDPEEE, nous avons cru longtemps, sur la base des décisions rendues par la Section de première instance de la Cour fédérale, par la Cour d'appel fédéral et même par la Cour suprême, que la question de l'application de la Loi aux projets dont la planification est déjà très avancée avait été réglée. Comme je l'ai dit, sur la base des décisions antérieures, nous estimions que les résultats des affaires du barrage Rafferty-Alameda et du barrage de la rivière Oldman étaient très clairs: le processus fédéral d'évaluation environnementale devait être appliqué avant que les ministères puissent prendre une décision, ce qui constituait le déclencheur du DLDPEEE.

    Deuxièmement, il importe peu que la décision fédérale soit sollicitée au début ou à la fin des étapes de planification d'un projet, ou même au cours des étapes de mise en oeuvre d'un projet. Le processus fédéral d'évaluation doit être appliqué dès qu'une décision fédérale est sollicitée.

    Troisièmement, nous avions l'impression que l'application du processus fédéral d'évaluation environnementale n'était pas touché par les décisions des autres, que ce soit l'administration municipale, le gouvernement provincial, les promoteurs ou tout autre intervenant.

    Monsieur le président, l'une des raisons pour lesquelles le gouvernement a décidé de ne pas demander l'autorisation d'en appeler de la décision de la Cour d'appel fédérale est le fait qu'à notre avis, l'étude du projet de loi C-19 constitue une excellente occasion de proposer des modifications pouvant garantir le respect de l'intention initiale du législateur. Nous croyons qu'il est important de clarifier deux éléments de la Loi. Premièrement, un projet continue d'être «proposé» aussi longtemps qu'il n'a pas fait l'objet d'une décision fédérale. Deuxièmement, les décisions des autres parties ne modifient pas l'application du processus fédéral d'évaluation.J'entends par «autres parties» tout ce qui n'est pas un organisme fédéral.

    L'inscription claire de ces messages dans la LCEE présente un défi. Nous avons longuement réfléchi à cette question.S'il y a une leçon à tirer du litige de Red HilI Creek, c'est que l'abondance de mots ne clarifie pas nécessairement une situation.Nous sommes conscients du fait que toute modification à la Loi peut entraîner d'autres contestations judiciaires. Nous croyons donc que, pour être efficace, une modification doit tenir compte du raisonnement tenu par les tribunaux, et surtout des questions entourant la notion de «décision irrévocable» et la définition de «projet».

    Nous envisageons à l'heure actuelle d'ajouter un énoncé qui aiderait à l'interprétation des dispositions pertinentes de la Loi. Cet énoncé pourrait figurer à l'article 2 des définitions. Il établirait essentiellement qu'un projet proposé doit faire l'objet d'une évaluation environnementale tant qu'une autorité fédérale n'a pas pris une décision. Autrement dit, les décisions d'autres organismes ne compteraient pas comme « décisions irrévocables » et le processus fédéral d'évaluation environnementale s'appliquerait au moment où une décision fédérale est sollicitée, même si la planification du projet est à un stade avancé.

[Français]

    Monsieur le président, comme je l'ai dit, c'est une question que nous étudions très sérieusement. Nous notons avec satisfaction l'intérêt manifesté par le comité à son endroit et votre établissement du calendrier d'une session plénière pour examiner cette question. Notre objectif consiste à assurer l'intégrité du processus afin que les décideurs fédéraux puissent tirer profit de l'information à propos des effets possibles sur l'environnement lorsque des décisions sont prises concernant des projets particuliers.

[Traduction]

    Nous vous remercions, monsieur le président, de nous avoir donné l'occasion de présenter cet exposé. Nous serons heureux de répondre maintenant à vos questions et à celles des autres membres du comité.

+-

    Le président: Devons-nous interpréter votre conclusion comme voulant dire que vous présenterez les amendements voulus lorsque nous entreprendrons l'étude article par article?

¿  +-(0935)  

+-

    M. Robert Connelly: C'est exact, monsieur le président. Nous vous avons donné, dans notre exposé, une idée des domaines qui, à notre avis, doivent être corrigés. Nous travaillons actuellement à la rédaction des amendements. Bien sûr, nous devons tenir des consultations à ce sujet dans l'administration fédérale afin de nous assurer que nos amendements sont libellés d'une façon appropriée avant de vous les présenter.

+-

    Le président: C'est très bien. Je vous remercie.

    Nous commencerons par M. Mills, puis Mme Kraft Sloan, M. Reed et M. Tonks.

+-

    M. Bob Mills (Red Deer, Alliance canadienne): Après avoir entendu votre exposé -- en regardant ceci, je dois admettre que je ne connais pas beaucoup de détails puisque vous ne nous avez donné qu'un aperçu --, je me demande combien de projets ont pu être approuvés dans le passé. Je m'interroge sur la gravité réelle du problème. Je me souviens d'un projet appelé PRIME qui était réalisé en Alberta dans les années 50. Des rivières ont été détournées et beaucoup de travaux d'ingénierie et de recherche ont été effectués. Bien sûr, le projet a été discrédité, mais je crois savoir que le gouvernement de l'Alberta est en train de reprendre l'idée des transferts entre bassins hydrographiques. Je pense que la Colombie-Britannique fait la même chose.

    De toute évidence, d'après ce que vous venez de nous dire de la décision de la Cour fédérale, comme le projet PRIME a effectivement été approuvé dans les années 50, on pourrait affirmer qu'il n'était pas assujetti à la LCEE. Mon interprétation est-elle correcte?

+-

    M. Robert Connelly: En réponse à votre question, monsieur Mills, je vous dirai que vous venez de soulever un point très important. Vous venez d'exprimer l'exacte préoccupation que nous avons. Si j'ai bien compris les exemples que vous avez donnés, vous craignez que d'autres--les provinces, dans ce cas--aient pu prendre des décisions qui seraient considérées comme irrévocables, à moins de modifier la LCEE pour éviter cette situation. Voilà pourquoi nous croyons que c'est là une question très importante qu'il faut étudier soigneusement et, nous l'espérons, corriger.

+-

    M. Bob Mills: Avec l'amendement que vous envisagez, par conséquent, le déclenchement de ce genre d'évaluation environnementale ne tiendrait vraisemblablement pas compte du fait que des montants importants peuvent avoir déjà été dépensés dans le cadre d'un projet. Nous pourrions prendre comme exemple des travaux entrepris en 1980, qui auraient été suspendus pour une raison quelconque, mais qu'on reprend aujourd'hui. Comme vous l'avez mentionné dans cet exemple, beaucoup d'argent aurait déjà été dépensé. Comment justifier ces dépenses aux yeux des contribuables si nous rejetons un projet, mettons en 2003, pour lequel on a déjà dépensé 10 millions de dollars avant 1995? Qu'avez-vous à répondre à cela?

+-

    M. Robert Connelly: Eh bien, monsieur Mills, nous devons considérer soigneusement les faits dans tout projet envisagé. Si j'ai bien compris, le premier exemple que vous avez donné portait sur un processus qui n'en était encore qu'aux premiers stades de la planification. Il s'agissait donc d'un projet auquel on avait beaucoup réfléchi, mais dans lequel la construction proprement dite n'avait pas commencé.

    Par ailleurs, s'il s'agit d'un projet qui était très avancé avant 1984, année à partir de laquelle la clause des droits acquis commence à s'appliquer, qui a peut-être été suspendu puis repris par la suite, alors ce projet pourrait bénéficier de la clause des droits acquis, selon les dispositions actuelles de la Loi, si les plans ne font pas l'objet de modifications sensibles une fois que les travaux sont repris.

    Voilà pourquoi je dis qu'il faut considérer les faits. Nous devons faire bien attention à appliquer correctement la Loi quelle que soit la situation.

+-

    M. Bob Mills: J'en reviens encore à PRIME. Quand on y pense, le gouvernement de l'Alberta -- je prends l'exemple de l'Alberta parce que c'est la province que je connais le mieux -- pourrait se servir de l'argument que le barrage Dickson de la rivière Red Deer, le barrage Oldman et d'autres barrages faisaient partie du projet PRIME. Autrement dit, il suffit de réaménager les cours d'eau, de les transférer d'un bassin hydrographique à l'autre pour pouvoir, en définitive, envoyer l'eau en Californie, je suppose. Tout cela faisait partie du plan des années 50. On pourrait donc dire que nous avons construit trois grands barrages dans les années 60 afin de réaliser ce projet. Je suis en train de me faire l'avocat du diable pour essayer de voir comment on pourrait monter ce genre d'argument. Est-ce que votre amendement pourrait remédier à cela?

¿  +-(0940)  

+-

    M. Robert Connelly: Monsieur Mills, nous croyons que le concept que nous venons de vous exposer, à titre de proposition, pourrait remédier à la situation, si j'ai bien compris votre question. Cela revient à dire que si un nouveau projet -- je vais me permettre d'utiliser ce mot -- ou de nouveaux travaux de construction étaient nécessaires pour faire communiquer entre eux ces bassins hydrographiques, nous croyons que notre formule d'amendement du projet de loi C-19 nous permettrait d'assujettir ces travaux aux dispositions de la LCEE à l'avenir, en supposant qu'il y aurait une décision fédérale pouvant déclencher l'application de cette Loi. En l'absence d'une telle décision fédérale, il est possible que nous ne puissions pas intervenir dans le cas d'un tel projet.

+-

    M. Bob Mills: Je vous remercie.

+-

    Le président: Merci, monsieur Mills.

    À vous, madame Kraft Sloan.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan (York-Nord, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Si j'ai bien compris votre exposé, la Cour d'appel fédérale a rendu sa décision le 24 avril.

+-

    Mme Heather Smith: Non, c'est la Section de première instance qui s'est prononcée à cette date. La décision de la Cour d'appel a été rendue en novembre.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: C'était donc en novembre. Excusez-moi.

    La situation était donc la suivante. Le projet de loi C-19 a été déposé avant que la décision ne soit rendue. Maintenant, nous envisageons un amendement. J'aurait été plus rassurée au sujet de la résolution du problème si les modifications s'étaient directement trouvées dans la version initiale du projet de loi C-19 plutôt que d'être présentées sous forme d'amendement. Beaucoup d'entre nous, autour de cette table, ont déjà vu des amendements rejetés même quand ils viennent du gouvernement

    Ainsi, dans le cas de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, le gouvernement avait présenté un amendement au sujet de l'« élimination de fait » parce que l'expression était jugée incompréhensible et qu'il y avait certaines contradictions avec la Politique de gestion des substances toxiques. Lorsque le projet de loi était revenu à la Chambre à l'étape du rapport, le gouvernement lui-même a cédé aux pressions et a finalement modifié l'amendement, le rendant sensiblement plus faible que la définition initiale. Je crois que nous nous trouvons dans le même genre de situation. Des amendements appuyés par le gouvernement que notre comité avait proposés ont été rejetés à l'étape du rapport dans le cas de la nouvelle Loi sur les espèces en péril.

    Je m'inquiète parce que nous sommes en train d'espérer résoudre le problème posé par la décision de Red Hill Creek en proposant un amendement au projet de loi C-19. Je sais que vous ne pouvez pas aborder l'aspect politique des choses, mais si nous proposons un amendement en comité, il est souvent considéré davantage comme un amendement de comité que comme un amendement du gouvernement ou un amendement appuyé par le gouvernement. Il est alors en butte aux attaques de toutes sortes de groupes d'intérêts.

    Si nous proposons ce changement, quel genre de garantie puis-je avoir, à titre de vice-présidente représentant le gouvernement au sein du comité, qu'il sera maintenu aux différentes étapes qu'il doit franchir à la Chambre?

+-

    Le président: Ce n'est pas une question à laquelle des fonctionnaires peuvent répondre, madame Kraft Sloan.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Eh bien, c'est vraiment malheureux, monsieur le président, mais je voulais que ma question figure au compte rendu.

    Vous avez parlé dans votre exposé de l'habitat des oiseaux migrateurs. Comment croyez-vous que cette question particulière a été traitée? Je ne vois rien là-dessus dans votre mémoire.

+-

    Mme Heather Smith: Je vais essayer de répondre à cette question.

    Comme je l'ai mentionné lorsque j'ai passé l'affaire en revue, plusieurs questions étaient posées quand l'affaire est passée à la Section de première instance de la Cour fédérale, mais la décision rendue était centrée sur deux grandes questions. La LCEE s'applique-t-elle au projet? La décision de renvoyer le projet à une commission d'examen en vertu de la LCEE était-elle fondée?

    La Cour s'est d'abord occupée de la première question et a conclu que la LCEE ne s'appliquait pas au projet. Une fois qu'elle a abouti à cette conclusion, la Cour n'avait pas vraiment, du point de vue juridique, à se prononcer sur la seconde question concernant les motifs qu'avait le gouvernement de renvoyer l'affaire à une commission d'examen. Le juge Dawson a quand même abordé la question dans sa décision, mais ce n'était plus vraiment un thème central de l'affaire puisqu'il était déjà acquis, à ce moment, que la Loi ne s'appliquait pas au projet. Nous avons donc choisi de concentrer nos efforts sur cette question d'application de la Loi, et c'est ce que nous avons fait dans la suite de l'affaire.

¿  +-(0945)  

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Vous m'excuserez, mais je ne suis pas avocate, et surtout pas avocate spécialisée en affaires environnementales. Si j'ai bien compris, cependant, le groupe Friends of Red Hill Valley a avancé l'argument qu'il s'agissait d'un projet modifié et qu'en cas de modification, il était nécessaire d'obtenir une autorisation en vertu de la Loi sur les pêches. Le groupe a soutenu qu'il y avait des différences entre le plan de 1985 et celui de 1998. Il voulait sans doute empêcher l'application de la clause des droits acquis et défendre la thèse selon laquelle il fallait obtenir une autorisation en vertu de la Loi sur les pêches.

    À l'origine, l'autoroute devait traverser le ruisseau à huit endroits différents... Je m'excuse, c'était un projet différent. Dans le nouveau projet, les plans prévoyaient huit passages, par rapport aux quatorze d'origine, ainsi qu'un chenal naturel plutôt que les quatre kilomètres de chenal bétonné du plan initial. Il y avait également d'autre détails.

    Nous avons d'une part la modification d'un projet qui déclenche l'exigence relative à une autorisation en vertu de la Loi sur les pêches. De l'autre, il ne semble pas être clair dans la LCEE que la modification d'un projet puisse agir comme déclencheur. Encore une fois, c'est un sujet qui est nouveau pour moi. Je vous serais donc reconnaissante si vous pouviez me donner des éclaircissements.

    Je voudrais en fait savoir s'il est parfaitement clair dans la LCEE que la modification d'un projet déclenche le processus. Si ce n'est pas le cas, que pouvons-nous faire dans le projet de loi C-19 pour que les choses soient parfaitement claires?

+-

    M. Robert Connelly: Monsieur le président, en réponse à cette question, permettez-moi de confirmer à Mme Kraft Sloan qu'elle a parfaitement raison. La modification d'un projet nécessite une autorisation en vertu de la Loi sur les pêches. Il y a maintenant des doutes au sujet de la clause des droits acquis, mais le juge, dans sa décision, a soutenu que la modification n'était pas suffisante pour qu'on puisse considérer, dans ce cas, qu'il s'agissait d'un nouveau projet. Le juge a conclu que la modification était liée à des mesures d'atténuation et qu'à toutes fins utiles, le projet était resté le même. Nous n'avons pas abordé cette question dans notre exposé, mais elle est à l'étude dans le contexte de la clause des droits acquis.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Toutefois, en ce qui concerne la LCEE, si je vous ai bien compris, il faut se demander si les modifications sont des mesures d'atténuation et, si c'est le cas, on considère que le projet est resté le même.

+-

     Mme Heather Smith: Permettez-moi de revenir à la décision de la Cour. Le juge s'est demandé si le projet était resté le même ou s'il était différent. Quand la Cour a examiné les changements que la municipalité régionale avait proposés depuis l'entrée en vigueur de la LCEE, elle a estimé que tous les changements se rapportaient à des mesures d'atténuation. C'est sur cela qu'elle s'est basée pour statuer que le projet était le même. Au cours des audiences, nous avons défendu les mêmes arguments que le groupe Friends of Red Hill Valley, mais la Cour nous a dit que nous avions tort.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: J'espère bien que vous répondrez à un moment donné à cette question de modification en vertu de la LCEE.

    Je vous remercie.

+-

    Le président: Nous reviendrons à vous au second tour.

    À vous, monsieur Reed.

+-

    M. Julian Reed (Halton, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Je me soucie depuis un certain temps d'une question fondamentale qui a évidemment été examinée par les tribunaux. Il me semble que cette question se pose très couramment dans toutes les activités du gouvernement. Je trouve, d'une certaine façon, qu'il est acceptable d'accorder des droits acquis après qu'un projet a commencé. J'ai vu cela se produire très souvent, et j'en ai moi-même été victime. Un projet commence, on arrive au milieu et, un an et demi plus tard, les règles concernant ceci et cela changent tout à coup. On est alors obligé d'appliquer un nouvel ensemble de règles.

    Cette question s'est posée d'une façon très précise dans un autre comité dont je faisais partie, lorsque l'industrie minière nous exhortait à intervenir pour que l'ensemble de règles qui s'appliquait à un moment donné de la planification d'un projet continue à s'appliquer par la suite. Si les règles changent, les changements devraient s'appliquer aux projets suivants, pas à ceux qui ont déjà commencé.

    J'ignore combien Red Hill a coûté, mais je suis sûr que c'est un montant important. Dans le cas des sociétés minières, un changement des règles décrété rétroactivement coûte souvent des millions de dollars.

    Avez-vous des observations à faire à ce sujet? Y a-t-il un moyen de mettre un terme à cela?

¿  +-(0950)  

+-

    M. Robert Connelly: Monsieur le président, en réponse à la question de M. Reed, je vais peut-être vous expliquer comment nous avons pensé que la clause des droits acquis figurant dans la LCEE s'appliquerait.

    Cette clause ne peut pas remonter au-delà de 1984. Cette date a été choisie parce qu'elle correspond au début de l'ancien régime qui a précédé l'entrée en vigueur de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. En 1984, c'était le Décret sur les lignes directrices visant le processus d'évaluation et d'examen en matière d'environnement qui était en vigueur. Il n'a été remplacé par la LCEE qu'en 1995

    L'idée était qu'un projet dont la construction ou l'exploitation avait commencé avant 1984 ne serait pas assujetti à la LCEE, à moins que des modifications ne soient faites plus tard. Dans ce cas, il était possible de réévaluer le projet.

    Par conséquent, la question qui se posait dans le cas qui nous occupe était de savoir s'il s'agissait ou non d'un projet modifié par rapport au plan d'origine approuvé avant 1984. C'était là le point contesté. Mme le juge Dawson a statué que c'était essentiellement le même projet et qu'il n'était donc pas assujetti à la LCEE.

+-

    M. Julian Reed: Si j'ai du temps, monsieur le président, j'aimerais aller un peu plus loin au sujet du processus réglementaire.

    Supposons qu'un promoteur entreprenne un projet. Un règlement change douze mois plus tard. Tout à coup, le projet est compromis à cause du changement. Cela se produit tout le temps. Je peux vous donner des détails si vous le souhaitez.

    Cela ne s'applique peut-être pas directement dans ce cas. Je n'en suis pas sûr, mais on a toujours l'impression qu'un règlement peut être introduit et imposer de tout arrêter. Un promoteur peut avoir dépensé des centaines de milliers ou même des millions de dollars dans le cadre d'un projet, puis être obligé de l'adapter au nouveau règlement. Je tiens à dire publiquement que je suis catégoriquement opposé à ce genre de comportement. Y a-t-il un moyen d'arrêter cela au gouvernement?

+-

    M. Robert Connelly: Monsieur Reed, je ne pense pas pouvoir répondre à ce genre de question générique concernant le comportement de l'ensemble de l'administration fédérale. Je ne peux répondre qu'en ce qui concerne la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Dans ce cas, l'intention du législateur était simplement la suivante: si un projet était déjà construit ou exploité et se trouvait à un stade très avancé avant 1984, la LCEE ne s'appliquerait pas. En même temps, la Loi prévoit, je crois, qu'en cas de modification importante du projet, la situation est différente et doit faire l'objet d'un examen. C'est ce que nous pensions faire dans ce cas. Nous avions l'impression d'avoir raison.

¿  +-(0955)  

+-

    M. Julian Reed: Merci, monsieur le président.

+-

    Le président: À vous, monsieur Tonks. Ensuite, madame Redman.

+-

    M. Alan Tonks (York-Sud--Weston, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Ma première série de questions portera sur le processus. Il y a une chose que je veux comprendre. En proposant vos amendements, avez-vous l'intention d'appliquer rétroactivement ceci au projet de Red Hill, par l'intermédiaire de la Cour, ou bien vos amendements ont-ils pour objet de régler la question de l'application de la LCEE à d'autres projets, peut-être sur une base rétroactive?

+-

    M. Robert Connelly: Je crois, monsieur Tonks, que je peux répondre non à la première question et oui à la seconde. J'aimerais cependant donner quelques éclaircissements.

    Nous sommes évidemment préoccupés par les répercussions de cette décision sur ce qui constitue une décision irrévocable. En d'autres termes, pour les projets futurs, nous voulons empêcher d'autres de prendre des décisions au sujet d'un projet, puis de présenter au gouvernement fédéral une demande d'approbation au tout dernier moment en affirmant qu'il est trop tard pour que la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale puisse s'appliquer. C'est ce que nous essayons de corriger ici.

+-

    M. Alan Tonks: Si j'ai bien compris, quelle ligne de conduite la municipalité régionale pourrait-elle adopter à la lumière de cette décision? En demandant un contrôle judiciaire, la municipalité a obtenu un droit d'appel. Cette procédure va-t-elle s'appliquer maintenant?

+-

    M. Robert Connelly: Pour le moment, monsieur Tonks, la décision judiciaire signifie que la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale ne s'applique pas à ce projet. Toutefois, la municipalité régionale est encore tenue d'obtenir une autorisation en vertu de la Loi sur les pêches pour être en mesure de détruire des habitats du ruisseau Red Hill. À ma connaissance, il y a des discussions en cours entre la municipalité régionale et le ministère des Pêches et des Océans.

+-

    M. Alan Tonks: Et ces discussions pourraient aboutir à un autre procès. Nous reviendrions donc à la question posée par ma collègue, Mme Kraft Sloan, qui est de savoir s'il y a eu modification du projet ou s'il s'agissait de mesures d'atténuation, et si cela suffit pour être conforme aux dispositions de la Loi sur les pêches.

+-

    M. Robert Connelly: Oui, on prendrait en considération les mesures d'atténuation touchant le poisson et l'habitat du poisson.

+-

    M. Alan Tonks: Très bien, je vous remercie.

    Monsieur le président, j'ai les renseignements qu'il me faut, du moins en ce qui concerne l'application régulière de la loi ou la justice naturelle. Pour l'avenir, cependant, si l'on tente d'appliquer très largement des mesures rétroactives dans ce genre de cas, j'ai l'impression que nous agissons nous-mêmes un peu comme un tribunal et que nous devrions donner aux autres organismes la possibilité de comparaître pour donner leur point de vue.

    Dans ce cas particulier, si j'ai bien compris, avec les amendements qu'on nous renverra, nous en serons au point tournant, c'est-à-dire au seuil de la rétroactivité en ce qui concerne les jugements relatifs aux décisions irrévocables, etc. Pour ce qui est de Red Hill, notre audience ne porte pas essentiellement sur cette affaire, qui a déjà abordé une autre étape.

    Ai-je raison en ceci? Avez-vous la même impression que moi au sujet de ce qui se passe ici?

+-

    M. Robert Connelly: Oui. Permettez-moi cependant d'établir clairement que les idées d'amendements dont nous avons parlé n'entraîneraient pas, à notre avis, la réapplication de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale au projet de Red Hill Creek. Elles auraient plutôt pour objectif d'éviter en général les problèmes à l'avenir.

+-

    M. Alan Tonks: Je n'ai pas d'autre question pour le moment, monsieur le président.

+-

    Le président: Merci.

    À vous, madame Redman.

À  +-(1000)  

+-

    Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Je reconnais le fait que nous parlons en particulier de l'autoroute de Red Hill Creek. Je voudrais cependant poser une question plus vaste. D'une façon générale, les contestations judiciaires présentées en vertu de la LCEE ont-elles posé des problèmes particuliers jusqu'ici? Y a-t-il eu beaucoup de cas comme celui de Red Hill Creek?

+-

    M. Robert Connelly: Monsieur le président, en réponse à Mme Redman, je voudrais demander à Heather Smith de m'assister sur ce point. Permettez-moi de dire cependant qu'en sept ans d'application de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, nous avons eu des contestations judiciaires portant sur 33 projets. Or nous traitons chaque année entre 5 000 et 6 000 projets. Si je fais le calcul, 6 000 fois 7 donnent 42 000 projets dont 33 ont été contestés. Voilà donc les faits. Peut-être Heather pourra-t-elle cependant les situer dans une perspective plus large.

+-

    Mme Heather Smith: Sur ces 33 projets, quelques-uns ont engendré plus d'une demande de contrôle judiciaire, comme dans le cas de Red Hill Creek, qui a donné lieu à trois demandes distinctes, qui ont cependant été entendues simultanément. Au total, nous avons eu environ 55 demandes de contrôle judiciaire relatives à la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale.

    Du point de vue du gouvernement du Canada, si l'on considère le volume des contestations judiciaires et leur répartition parmi les différents domaines, on ne pourrait pas considérer que le volume dans ce cas est très important. Il est jugé important pour des projets particuliers, mais il n'est pas inhabituel qu'une nouvelle loi donne lieu à des contestations judiciaires. Bref, le nombre de cas n'est pas particulièrement élevé.

+-

    Mme Karen Redman: Merci. Je peux certainement voir de quelle façon cela peut constituer un obstacle majeur pour un promoteur ou un projet particulier, imposant une réévaluation du travail. Je crois cependant que l'industrie a l'impression que la LCEE a donné lieu à beaucoup de procès. De toute évidence, ce n'est pas le cas.

+-

    Mme Heather Smith: Pas à notre avis.

+-

    Mme Karen Redman: Merci, monsieur le président.

+-

    Le président: Merci.

[Français]

    Madame Scherrer, s'il vous plaît.

+-

    Mme Hélène Scherrer (Louis-Hébert, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

    J'aimerais revenir sur un élément que vous avez soulevé au cours de votre présentation et qui semblait poser problème, particulièrement dans ce projet mais possiblement aussi dans des projets à venir. Il s'agit de la définition du mot «projet». On définit souvent le mot «projet» dans les définitions générales comme étant une ébauche de quelque chose à venir. Tant et aussi longtemps que le projet n'est pas complètement terminé, on appelle encore ce processus d'action  un projet, ce qui semble être ici un problème, et je voudrais que vous m'éclairiez là-dessus. Est-ce qu'on parle ici d'un projet simplement au moment de l'ébauche? Est-ce qu'à partir du moment où il y a une première action, ce n'est plus un projet? Est-ce que dans la définition du nouveau projet de loi qu'on met de l'avant, le mot «projet» est bien défini et est-ce que le projet déborde la simple élaboration du processus? À quel moment le projet cesse-t-il d'être un projet pour devenir une action concrète?

+-

    Mme Heather Smith: Le raisonnement que la cour a suivi dans le dossier Red Hill Creek était basé sur la définition de «projet» en anglais, parce qu'on a utilisé le mot «proposed» .

[Traduction]

La version anglaise de la Loi dit «proposed construction...or other undertaking».

[Français]

    S'il y a cette idée dans la version française, on la trouve dans le mot «réalisation», mais on ne mentionne pas le mot. On n'a pas proposé de changement à la définition de «projet» dans le projet de C-19. On va proposer une façon de clarifier l'interprétation de la version anglaise de la définition de «projet».

+-

    Mme Hélène Scherrer: Je vais revenir à votre définition. Le terme « projet », dans mon esprit à moi, signifie quelque chose qui en est encore au stade de l'élaboration. La réalisation, dans mon esprit à moi, est l'étape finale, parce que le projet a été réalisé en ce sens qu'il a été terminé. Il y a là un espace de temps qui est terriblement long et qui peut nous nuire énormément, l'élaboration étant souvent simplement une proposition sur papier, et la réalisation étant l'étape finale où on met le dernier clou. Si la période de temps entre le moment où le projet est couché sur papier et le moment où il est réalisé n'est pas vraiment définie dans la loi, les gens vont pouvoir contourner très facilement la loi. Ils pourront aller en cour n'importe quand et gagner, l'élaboration étant mise en place dans la tête et non pas dans le concret d'un projet. La réalisation étant le projet terminé, il y a un espace de temps terriblement long. Si ce n'est pas vraiment défini dans le nouveau projet de loi, on risque encore que n'importe quel projet se glisse à travers cela sous prétexte qu'on en est encore à l'étape du projet.

À  +-(1005)  

+-

    Mme Heather Smith: Monsieur le président, la question saisit bien le problème que pose le concept de « projet  ». Il y a beaucoup de points au sujet desquels on peut dire qu'il pourrait y avoir de l'incertitude. On a bien réfléchi et on pense qu'on a réglé le problème. On veut préciser qu'aux fins de la LCEE, un projet est quelque chose qui est proposé pour une décision fédérale. Peu importent les décisions des autres décideurs, ce sont les décideurs fédéraux qui décident si quelque chose est un projet aux fins de la LCEE. Comme vous l'avez démontré, les définitions peuvent souvent faire l'objet d'arguments, et on essaie de contrer ces arguments possibles dans notre proposition.

+-

    Mme Hélène Scherrer: Je veux terminer là-dessus. Ayant travaillé aux niveaux municipal, provincial et fédéral, je sais que des projets, il y en a à la tonne. Tout le monde a un projet quelconque. Je ne sais pas à quel niveau de projets on demande que la loi fédérale puisse intervenir, parce que vous savez comme moi que tout le monde a des projets. Si un projet n'est que l'élaboration d'une idée sur papier, à ce moment-là, on ne passera jamais au travers de la politique avec laquelle on va se retrouver.

    À quel moment le projet devient-il un projet suffisamment viable pour qu'on doive le prendre en considération? Est-ce lorsqu'il y a une première action? Est-ce lorsqu'un budget est voté? Est-ce parce qu'une autorité a décidé de le mettre de l'avant? Ça aussi, c'est une zone qui est un peu difficile à déterminer.

+-

    Mme Heather Smith: Je pense que c'est moins gris qu'on ne le pensait, parce que pour déclencher la LCEE, il faut demander qu'il y ait une décision fédérale. Au moment où il devient est clair qu'on a besoin d'une décision fédérale, on peut regarder ce qu'on va faire. Est-ce un projet aux fins de la LCEE? Il y a des choses qui ne trompent pas dans les définitions du projet, et la loi s'applique à ces choses.

+-

    Mme Hélène Scherrer: Il n'y a jamais eu un lien entre la loi et le moment où on fait une demande de financement? En règle générale, quand on demande un financement, c'est parce qu'on est vraiment sérieux en ce qui concerne le projet, quel que soit le niveau où on demande le financement. Mais il n'y a rien qui rattache la loi à une demande de financement.

+-

    Mme Heather Smith: Oui. Un des déclencheurs, en vertu de la loi, est une demande de financement, ou c'est plutôt l'étude d'une demande par une autorité fédérale qui déclenche la loi, parce que la loi parle aux autorités fédérales.

+-

    Mme Hélène Scherrer: Il ne s'agit pas nécessairement d'une demande de financement au niveau fédéral. Ce peut être une demande de financement à n'importe quel niveau.

+-

    Mme Heather Smith: Cela ne déclenche pas la loi fédérale, parce que la loi fédérale parle aux décideurs fédéraux et impose une procédure qui doit être suivie avant la prise de décisions au fédéral.

+-

    Mme Hélène Scherrer: Est-ce que ça veut dire qu'un projet municipal qui s'autofinancerait pourrait ne pas avoir à passer par la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, même si c'est un projet majeur?

+-

    Mme Heather Smith: Cela dépend si on a besoin d'une décision fédérale. Par exemple, dans le cas de Red Hill Creek, est-ce qu'on avait besoin d'un permis en vertu de la Loi sur les pêches, ce qui déclenche la loi?

+-

    Mme Hélène Scherrer: D'accord. Merci.

+-

    Le président: Merci, madame Scherrer.

[Traduction]

    Nous commencerons très bientôt le second tour.

    Il est intéressant d'examiner pendant quelques instants le raisonnement tenu par Mme le juge Dawson. Ce faisant, je citerai quelques exemples découlant des questions posées par Mme Scherrer. Par exemple, à la page 36, paragraphe 167 de la décision, le juge note:

La Région et l'Ontario font remarquer avec raison qu'aucune disposition de la COM ne traite expressément de la protection de l'habitat des oiseaux migrateurs.

C'est exact, mais il est étrange que le juge n'ait pas cité la Loi sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs qui, sauf erreur, mentionne l'habitat. Elle ne le fait peut-être pas d'une manière aussi concluante et précise que nous l'aurions voulu, mais je suis sûr qu'elle mentionne l'habitat.

À la page suivante, on trouve ce qui suit:

Cela ne veut pas nécessairement dire que le retrait du site aura un effet sur les populations d'oiseaux à l'échelle provinciale, mais plutôt que l'aménagement influera probablement sur l'utilisation du site.

À mon avis, cela revient à couper les cheveux en quatre. De toute évidence, l'abattage de 40 000 arbres... Comment l'abattage de 40 000 arbres peut-il ne pas avoir d'effets sur la population d'oiseaux? J'aime bien également cette mention des «populations d'oiseaux à l'échelle provinciale» parce que, voyez-vous, je suppose qu'il y a aussi des populations d'oiseaux à l'échelle municipale, à l'échelle nationale et aussi à l'échelle internationale. C'est une façon de voir les choses qui me fascine. Faire ce genre de distinction touche presque à la perversion.

    Voilà d'ailleurs une autre perle un peu plus loin dans la même page:

Malheureusement, il n'existe absolument aucune littérature au sujet de l'effet de ces types d'aménagement sur les oiseaux migrateurs de sorte...

...la suite est soulignée...

qu'il est difficile de dire avec exactitude si la proposition aura des effets importants après que des tentatives d'atténuation auront été faites.

    Cela semble peut-être indiquer que nous ne pouvons pas porter de jugement à moins de réaliser une étude. C'est la conclusion qu'on tire de ce paragraphe. L'abattage de 40 000 arbres et la disparition de terres humides et d'autres habitats à l'écologie fragile ne semblent pas suggérer au juge qu'il y a une conclusion à tirer même sans disposer d'une étude.

    Sur la même page, quatre paragraphes plus loin, on peut lire ceci:

Il est également difficile de prédire avec exactitude les effets de réduction des terres humides dans les étangs Van Wagner et dans la zone marécageuse de Red Hill...

etc. Voilà donc une autre raison de formuler soi-même des observations plutôt que d'attendre des études sur ce que le juge trouve elle-même difficile à prédire.

    Avez-vous des commentaires à ce sujet?

À  +-(1010)  

+-

    Mme Heather Smith: Je dois vous dire, monsieur le président, que le juge citait des textes écrits par des scientifiques d'Environnement Canada dans le contexte de l'évaluation environnementale. Étant moi-même membre d'une profession qu'on accuse souvent de parler d'une façon nébuleuse, je peux maintenant jeter la pierre à une autre profession. En toute honnêteté, cependant, ces scientifiques se parlaient entre eux en appliquant la norme scientifique de la certitude avant de présenter des énoncés définitifs.

    Les passages que vous avez cités venaient de rapports produits dans le cadre de l'évaluation environnementale afin de déterminer si les effets étaient importants ou non. Le juge considère ces textes dans le contexte d'une demande de contrôle judiciaire et tente d'interpréter ce que disent les experts dans ces documents scientifiques afin de se prononcer sur l'application de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale.

À  +-(1015)  

+-

    Le président: Parlez-vous des énoncés qui figurent à la page 38?

+-

    Mme Heather Smith: Les paragraphes que vous avez cités sont tirés de textes scientifiques présentés à l'appui des avis donné par Environnement Canada. Je crois que vous avez cité le paragraphe 172 de la décision.

+-

    Le président: Ainsi, le passage qui figure à la fin du paragraphe 172 serait une citation.

+-

    Mme Heather Smith: Il s'agit dans tous les cas de citations de scientifiques d'Environnement Canada, dans le cadre de l'évaluation environnementale. Le juge les a citées dans la décision pour appuyer son interprétation de la Loi.

+-

    Le président: Avez-vous le texte devant vous?

+-

    Mme Heather Smith: Oui.

+-

    Le président: Et vous parlez du paragraphe qui commence par « Il est également difficile... »? Vous dites que c'est une citation?

+-

    Mme Heather Smith: Je ne suis pas sûre...

+-

    Le président: Eh bien, pour moi, cela ne ressemble pas à une citation.

+-

    Mme Heather Smith: Je crois que cela dépend de la version de la décision imprimée que vous avez en main. D'après ma version, c'est le paragraphe 172. Et, toujours dans ma version, le passage que vous avez lu est en retrait et en petits caractères.

+-

    Le président: Ce n'est pas en retrait dans ma version.

+-

    Mme Heather Smith: Monsieur le président, la version que vous avez est tirée d'Internet. En regardant cette version, je me rends compte qu'elle est difficile à lire. Je crois...

+-

    Le président: C'est très bien, passons sur ce point. Je cite maintenant le paragraphe 176, à la page 39. Si j'ai bien compris, le juge a écrit ce qui suit:

[...] je puis conclure à l'existence d'un lien suffisant entre les questions relatives aux oiseaux migrateurs et le fait d'établir d'une façon indépendante la nécessité de la route express.

+-

    Mme Heather Smith: Il n'y a pas de doute. Dans ce cas, c'est bien le juge qui parle.

+-

    Le président: Fort bien. On peut donc se demander quel genre de lien il faudrait pour convaincre le juge que les deux sont reliés. Pour un observateur normal, je crois que l'abattage de 40 000 arbres constituerait un indice suffisant.

    À la page 40, paragraphe 180, il y a un autre passage que je tiens à porter à votre attention:

Le fait que la préoccupation du public était surtout axée sur la nécessité du projet et sur ses solutions de rechange, soit des questions relevant exclusivement de la compétence provinciale, ne pourrait pas à mon avis étayer l'exercice du pouvoir fédéral lorsqu'il s'agit de renvoyer le projet à une commission.

    De toute évidence, le fait que le public s'intéressait à la nécessité d'une solution de rechange ne suffisait pas pour justifier l'exercice du pouvoir fédéral. C'est comme s'il y avait une opinion publique provinciale très différente de l'opinion publique qu'on pourrait qualifier de fédérale. Encore une fois, je trouve la distinction plutôt mince. Si la préoccupation du public est de nature fédérale, elle ne s'applique pas. En d'autres termes, les Canadiens qui s'intéressent aux oiseaux migrateurs n'ont rien à dire. C'est mon interprétation du raisonnement tenu par le juge, mais vous êtes peut-être d'un avis différent.

+-

    Mme Heather Smith: Je n'ai rien à ajouter à ce que vous avez dit.

+-

    Le président: La dernière phrase stupéfiante se trouve sur la même page, à la fin du paragraphe 180:

Compte tenu des faits que vous avez portés à mon attention, il semble que la préoccupation du public se rapporte à des questions qui relèvent entièrement de la province. Cela étant, je ne recommanderais pas le renvoi pour examen public.

    J'ai l'impression qu'il y a contradiction entre le premier passage du paragraphe 180 et cette dernière phrase. C'est l'un ou c'est l'autre. Peut-être pouvez-vous m'aider à comprendre.

À  +-(1020)  

+-

    Mme Heather Smith: Encore une fois, ce n'est pas clair dans la version que vous avez en main et qui a été imprimée à partir d'Internet. Le juge commence le paragraphe avec ses propres mots, puis elle présente une citation. Le passage que vous avez lu était précédé de ceci: «Comme les services juridiques l'ont fait savoir au ministère de l'Environnement:». Cela est suivi d'une citation qui se termine par l'extrait que vous avez lu.

+-

    Le président: Je vous remercie.

    Nous commençons maintenant le second tour. À vous, monsieur Mills.

+-

    M. Bob Mills: Le point soulevé par le président est vraiment surprenant. La question évidente à se poser est de savoir si les scientifiques ou le juge ont visité le site et l'ont vraiment regardé avant d'écrire ces textes. On a l'impression qu'ils vivent dans le vide et ne comprennent rien aux oiseaux migrateurs, à leur habitat, à l'importance des terres marécageuses, etc. Ce que le président vient de signaler est très étrange. Je crois que je vais passer à autre chose, mais avant de le faire, je vais vous demander si, à votre connaissance, le juge a visité le site.

+-

    Mme Heather Smith: Je pense pouvoir vous affirmer qu'elle ne l'a pas fait.

+-

    M. Bob Mills: Très bien, je vous remercie.

    Cela me fait pensait à un problème constant qui se pose dans le contexte de l'évaluation environnementale: c'est le conflit de compétence fédéral-provincial. En examinant le projet de loi C-19, j'avais l'impression qu'il contribuerait à réduire le conflit, en regroupant et en accélérant les évaluations environnementales.

    Croyez-vous que ce soit le cas? Mon interprétation est-elle valide? Que pouvons-nous faire pour éviter le conflit fédéral-provincial dans le cas des évaluations environnementales? Je crois qu'il y a double emploi dans beaucoup de cas mais que, dans certaines affaires, nous en arrivons à des conclusions diamétralement opposées dans le cadre d'une évaluation environnementale.

+-

    M. Robert Connelly: Monsieur Mills, vous soulevez un excellent point qui nous ramène au commentaire du président concernant la distinction à faire entre les oiseaux fédéraux, les oiseaux provinciaux et les oiseaux municipaux, qu'il faudrait ranger dans de petites boîtes bien nettes. C'est un vrai défi.

    De bien des façons, les modifications apportées dans le projet de loi C-19 ont surtout pour objet de faciliter la collaboration avec nos homologues provinciaux, de sorte qu'en cas d'examen d'un projet, il soit possible de regrouper l'expertise fédérale et l'expertise provinciale pour assurer une bonne étude holistique du projet. Ainsi, nous espérons qu'en fin de compte, nous arriverons à cesser de nous chamailler pour savoir si les oiseaux sont en fait provinciaux ou fédéraux.

    Bien sûr, dans tout exercice conjoint, nous voudrons nous assurer de satisfaire pleinement à toutes les exigences juridiques tant provinciales que fédérales prévues dans les lois respectives. Nous avons pris des mesures pour améliorer cette collaboration. Nous espérons donc obtenir de meilleurs résultats à l'avenir.

+-

    M. Bob Mills: Dans cette même veine, je crois qu'il est important de faire participer les gens de la place qui sont souvent les plus au courant de ce qui se passe et qui devraient pouvoir intervenir. J'ai l'impression que, dans ce cas particulier, on n'a pas prêté une grande attention à l'apport du public. Ayant moi-même participé à un certain nombre d'évaluations environnementales, dans lesquelles j'étais du côté des gens de la place qui présentaient leur point de vue, j'ai souvent eu l'impression que le gouvernement ouvrait ou fermait le commutateur, disant plus ou moins de laisser les gens se défouler un peu, en espérant qu'ils s'en iraient ensuite pour le laisser faire à sa guise. J'espère donc que ce processus permettra de faire en sorte que lorsque nous disons vouloir consulter le public, ce soit vrai et réel.

+-

    M. Robert Connelly: Oui, je crois que nous admettons tous que les distinctions faites en parlant de compétences--les oiseaux provinciaux ou fédéraux, dans le cas qui nous occupe--ne sont probablement pas d'une importance primordiale dans l'esprit du public qui participe à une évaluation environnementale.

    L'une des choses que nous avons envisagées dans le projet de loi C-19, c'est un moyen de donner au public une plus grande possibilité de participer. C'était l'un des objectifs que nous avions dès le début de l'examen: chercher des moyens d'assurer une plus grande participation du public au processus. Nous avons l'impression d'avoir réalisé certaines choses tant dans les modifications apportées au projet de loi C-19 que dans les engagements pris par le ministre dans le rapport présenté au Parlement. Par exemple, nous élaborons actuellement des lignes directrices régissant la participation du public au stade de l'examen préalable. Nous collaborons à cette fin avec des groupes environnementaux, l'industrie et d'autres.

À  +-(1025)  

+-

    M. Bob Mills: Je vous remercie.

+-

    Le président: Merci, monsieur Mills.

    À vous, madame Kraft Sloan.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Merci, monsieur le président.

    Je regardais ce document qui vient du site de l'ACEE. Il s'agit de la fiche d'information concernant l'appel interjeté contre la décision de la Cour fédérale dans l'affaire de l'autoroute de Red Hill Creek. Au sommet de la page 2, vous indiquez les motifs de l'appel de l'Agence. La fiche d'information dit ceci: «Le gouvernement est d'avis que la décision de la juge Dawson contient des erreurs de droit.»

    Compte tenu de la discussion pour nous venons d'avoir au sujet des oiseaux migrateurs et de la question précédente que j'ai posée, je crois comprendre que vous essayez de réduire au minimum les questions que suscite la loi, de façon à ne laisser que les points fondamentaux, comme de savoir, par exemple, si la LCEE s'applique ou non. Pourtant, dans ce document tiré de votre site Web, vous énumérez une série d'erreurs de droit que vous avez relevées dans la décision du juge Dawson. Or je me demande pourquoi les oiseaux migrateurs ne figurent pas dans cette liste.

+-

    Mme Heather Smith: Comme nous l'avons mentionné dans notre exposé, lorsque nous avons reçu la décision de la Section de première instance de la Cour fédérale, elle comportait deux conclusions distinctes. La première était que la Loi ne s'appliquait pas. La seconde était que, même si la Loi s'était appliquée, notre renvoi du projet à une commission d'examen sur la base des préoccupations concernant les oiseaux migrateurs et d'autres préoccupations du public ne s'appuyait pas sur un chef de compétence fédérale valide.

    Nous avons décidé de ne pas en appeler de cette partie de la décision. Nous préférions concentrer l'appel sur la première question relative à l'application de la LCEE, parce que nous pensions que nos arguments juridiques les plus forts se fondaient sur les faits de l'affaire. Compte tenu de la décision rendue par la Cour d'appel fédérale, je crois que nous avions pris la bonne décision.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: C'était donc la liste des motifs invoqués dans l'appel. Vous n'avez pas...

+-

    Mme Heather Smith: C'est exact. Nous avons seulement énuméré les questions que nous allions soulever devant la Cour d'appel.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Ce sont donc les questions posées à la Cour d'appel, mais vous avez quand même l'impression qu'il y en a d'autres concernant les oiseaux migrateurs.

+-

    Mme Heather Smith: Nous avons décidé de ne pas contester cette partie de la décision.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Je comprends que cela ne faisait pas partie de votre appel, mais vous aviez quand même l'impression qu'il y avait des problèmes concernant les oiseaux migrateurs.

+-

    Mme Heather Smith: Lorsque nous avons présenté nos arguments sur cette question, nous n'étions pas d'accord avec l'interprétation des faits donnée par la Cour . Toutefois, la Cour a abouti dans cette affaire à des conclusions factuelles que nous devons accepter.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Mais vous avez quand même des préoccupations au sujet des oiseaux migrateurs.

+-

    Une voix : [Inaudible.]

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Je comprends très bien ce que vous dites au sujet de l'appel, mais je vous demande de vous en écarter un instant.

+-

    Mme Heather Smith: Je comprends, oui.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Je comprends parfaitement que ce sont les arguments que vous avez soulevés dans le cadre de l'appel, mais, en dehors de cela, avez-vous des préoccupations au sujet des oiseaux migrateurs?

+-

    Mme Heather Smith: Me demandez-vous s'il y a des préoccupations au sujet des oiseaux migrateurs dans l'affaire du projet de Red Hill Creek?

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Oui, au sujet des décisions.

+-

    Mme Heather Smith: Je crois qu'Environnement Canada s'inquiète toujours des répercussions du projet sur les oiseaux migrateurs, mais le ministère ne pourra pas s'attaquer à ce problème dans le cadre de l'autorisation nécessaire en vertu de la Loi sur les pêches.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: D'accord, je vous remercie. Je vais maintenant passer à une autre question.

    De toute évidence, la décision a des incidences sur l'application et l'interprétation de la LCEE. Comme nous le savons tous--et je l'ai mentionné plus tôt, monsieur le président--, ce processus d'amendement est toujours aléatoire, mais je me demande pourquoi vous n'avez pas interjeté le dernier appel?

+-

    Mme Heather Smith: Pour interjeter appel devant la Cour suprême du Canada, il faut en demander l'autorisation, et il n'était pas du tout garanti que nous l'obtiendrions. Demander l'autorisation d'interjeter appel et défendre une affaire devant la Cour suprême est extrêmement long. De plus, il faut attendre longtemps pour obtenir une décision. Le projet de loi C-19 nous donne la possibilité de régler l'affaire d'une façon que nous trouvions plus simple, sans compter que nous étions un peu plus sûrs du résultat.

    Quand on se présente devant un tribunal, on peut être sûr de l'interprétation qu'on donne soi-même à la loi, mais les juges peuvent ne pas être d'accord. Je crois que l'affaire de Red Hill Creek en est un bon exemple.

À  +-(1030)  

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: J'aimerais revenir à cette question de modification et à ce que vous pensez de l'interprétation de ce mot. Comme vous l'avez dit plus tôt, la Cour a considéré qu'il s'agissait d'atténuation et non de modification. Très clairement, quels sont les critères ou les déclencheurs qui permettent de décider s'il s'agit d'une modification ou d'une mesure d'atténuation? J'essaie, en premier, de comprendre les répercussions de cette décision sur les affaires futures. En deuxième lieu, je me demande si le projet de loi C-19 permet de déterminer plus clairement cette question.

+-

    M. Robert Connelly: En réponse à la question de Mme Kraft Sloan, monsieur le président, je dirai seulement qu'à l'heure actuelle, le projet de loi C-19 n'aborde pas cet aspect. Je n'irai pas plus loin. Le projet de loi n'aborde pas la question de la modification dans le contexte de l'article dont elle parle, c'est-à-dire l'article 74 de la LCEE qui contient la clause de droits acquis.

    Je vais demander à Heather de répondre à la seconde partie de la question.

+-

    Mme Heather Smith: Beaucoup de ce que nous avons dit ce matin porte sur l'interprétation donnée par le juge Dawson au mot «modification» dans la décision de la Section de première instance de la Cour fédérale. La question est cependant abordée également dans la décision de la Cour d'appel. La Cour a défini un critère à deux volets pour déterminer ce qu'est une modification aux fins de l'article 74 de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale.

    Selon la Cour d'appel, il faut en premier que le changement soit important par rapport à l'ensemble du projet. Deuxièmement, il faut déterminer si, globalement, le changement aurait un effet positif sur les répercussions environnementales du projet. La Cour a donc défini un critère relativement simple et clair pour déterminer ce qu'est une modification.

+-

    Une voix : Monsieur le président, cette alarme va sûrement nous crever les tympans.

+-

    Une voix : C'est l'alarme incendie.

+-

    Le président: Nous allons suspendre la séance pour le moment et revenir quand l'alarme aura été débranchée.

À  +-(1033)  


Á  -(1101)  

-

    Le président: Membres du comité, nous allons reprendre la séance pour la lever aussitôt, afin de laisser la place à nos collègues du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.

    Témoins, nous vous remercions.

    Merci beaucoup. La séance est levée.