HERI Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON CANADIAN HERITAGE
COMITÉ PERMANENT DU PATRIMOINE CANADIEN
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le jeudi 29 novembre 2001
Le président (M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.)): Bonjour. La séance est ouverte. Le comité permanent du Patrimoine canadien poursuit son étude de l'état du système de radiodiffusion canadien.
Au cours de la première heure, nous entendrons le groupe Friends of Canadian Broadcasting et le Toronto Arts Council. Le reste de la séance sera consacré à l'Office national du film, à Téléfilm Canada, au Bureau de certification des produits audiovisuels canadiens et au CRTC.
Nous allons maintenant entendre le groupe Friends of Canadian Broadcasting, qui est représenté par Mme Noreen Golfman,
[Français]
présidente du Comité directeur,
[Traduction]
et M. Ian Morrison, porte-parole.
Madame Golfman ou monsieur Morrison, vous avez la parole. Quand le représentant du Toronto Arts Council arrivera, vous vous partagerez le temps pour vos exposés, qui, nous l'espérons, ne dépasseront pas 15 ou 20 minutes chacun, afin qu'il nous reste du temps pour les questions des membres du comité.
M. Ian Morrison (porte-parole, Friends of Canadian Broadcasting): Monsieur le président, avant que le professeur Golfman ne commence, je tiens à vous dire que notre exposé ne prendra pas plus de 10 minutes...
Le président: Excellent.
M. Ian Morrison: ...et c'est elle qui commencera.
Le président: Merci.
Mme Noreen Golfman (président, Comité directeur, Friends of Canadian Broadcasting): Merci, monsieur le président.
Monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité, merci d'avoir invité le groupe Friends of Canadian Broadcasting à participer avec vous à cette discussion. Je m'appelle Noreen Golfman et je préside le comité directeur du groupe Friends. Dans mes moments de loisir, j'enseigne la littérature anglaise et les études cinématographiques à l'université Memorial, à Terre-Neuve. Je suis accompagnée d'Ian Morrison, notre porte-parole.
Permettez-moi de vous dire d'entrée de jeu que nous considérons votre travail comme étant très important.
[Français]
À l'occasion du dixième anniversaire de l'entrée en vigueur de la Loi sur la radiodiffusion, il nous apparaît tout à fait justifié que les parlementaires se penchent sur le système audiovisuel canadien et tâchent de voir s'il répond aux besoins des auditeurs et des téléspectateurs.
[Traduction]
Comme vous, nous avons à coeur la viabilité de l'ensemble du système audiovisuel qui, en cette ère de l'électronique, peut être qualifié de système nerveux central du pays. Aussi sa santé reflète-t-elle la santé du pays. Il y a peu de sujets qui sont plus importants.
Comme vous le savez peut-être, Friends of Canadian Broadcasting est une association bénévole qui a l'appui de plus de 80 000 Canadiens. Notre mission est de préserver et de promouvoir la qualité et la quantité des émissions canadiennes dans le système audiovisuel de langue anglaise. Nous reflétons donc une part importante de votre mandat.
Notre association vous a soumis un mémoire de 35 pages, de même que deux rapports de recherche en guise de contribution initiale à votre étude. Nous savons, d'après ce que nous disent nos membres, qu'on est impatient dans les différentes régions du pays de rencontrer les membres de votre comité. Aussi nous vous encourageons à ne pas limiter vos audiences à Ottawa, et nous sommes persuadés que, quand vous vous déplacerez dans les villes et les municipalités du pays, vous entendrez le témoignage d'auditeurs et de téléspectateurs qui souhaitent vous faire part de leurs idées pour l'avancement de votre étude. Je voudrais donc prendre quelques minutes pour porter à votre attention certaines préoccupations qui découlent de l'analyse de l'étude que nous avons fait réaliser cette année et dont le résultat se trouve annexé à notre mémoire.
Ian.
M. Ian Morrison: Merci, Noreen.
Mesdames et messieurs les membres du comité, monsieur le président, je vous invite à vous reporter au document que nous venons de vous remettre. À la deuxième page, soit le premier acétate, vous voyez un tableau qui décrit le réseau de télévision de langue anglaise pendant les grands sondages réalisés par le BBM en février-mars 2000, ici même à Ottawa. Ces grands sondages, comme vous le savez sans doute, servent à évaluer le nombre de téléspectateurs pendant la période de l'année où les cotes d'écoute sont les plus élevées, soit à la fin février et au début mars, quand il neige, comme c'est le cas aujourd'hui. Vous trouverez également à la fin de notre mémoire relié, ce document-ci qui est plus volumineux que les autres, des tableaux semblables pour St. John's, Halifax, Montréal, Toronto, Winnipeg, Regina, Calgary, Edmonton et Vancouver, non pas seulement pour l'an dernier, mais aussi pour l'année 1990, soit une décennie plus tôt, pour que vous puissiez faire la comparaison. Friends a préparé ces tableaux spécialement pour votre comité.
• 0910
Les tableaux présentent la grille complète des émissions
offertes par les télédiffiseurs de langue anglaise de 19 heures à
23 heures, du lundi au dimanche inclusivement, c'est-à-dire aux
heures de grande écoute, quand la plupart de vos électeurs
regardent la télévision. C'est pendant ces 28 heures que la grande
majorité de l'auditoire télévisuel regarde la télévision. Nous
présentons en bleu les émissions locales, en rouge les émissions
canadiennes et en blanc les émissions étrangères, américaines pour
la plupart. Si vous vérifiez les données présentées à la fin du
mémoire relié, vous constaterez que les tableaux pour Ottawa sont
fort représentatifs des neuf autres villes.
Quand on examine de plus près ces tableaux des émissions diffusées pendant les heures de grande écoute, un certain nombre de tendances se dégagent. La télévision de la Société Radio-Canada est devenue presque entièrement canadienne pendant la décennie visée. La télévision canadienne privée a continué à diffuser surtout des émissions américaines pendant ses périodes de grande écoute, tandis que les émissions locales et régionales ont presque complètement disparu—c'est d'ailleurs sur cette question que vous allez porter votre attention la semaine prochaine, monsieur le président.
Un rapide coup d'oeil aux émissions qui sont présentées quand la plupart des gens regardent la télévision permet de constater que les chaînes traditionnelles privées continuent à être les moutons noirs du système de radiodiffusion canadien, offrant aux Canadiens très peu d'émissions qui sont à leur image. Le mémoire de 35 pages où nous présentons notre point de vue est suivi d'un rapport de 30 pages intitulé «Follow the Money» qui nous présente des données relatives au système de radiodiffusion. Ce rapport qui a été préparé spécialement pour les fins de votre étude montre que 86 p. 100 de l'auditoire de la télévision de langue anglaise de Radio-Canada, pendant les heures de grande écoute, regarde des émissions canadiennes, tandis que 14 p. 100 regarde des émissions étrangères. Au réseau CTV, 12 p. 100 seulement de l'auditoire regarde des émissions canadiennes pendant les heures de grande écoute, tandis que la proportion n'est que de 5 p. 100 pour le réseau Global.
Dans «Follow the Money», Friends présente une synthèse de données provenant d'organismes publics, dont beaucoup témoignent devant vous ici aujourd'hui. Ces données visent les 10 dernières années, soit la décennie qui a suivi l'adoption de l'actuelle Loi sur la radiodiffusion. La deuxième acétate du petit document que nous vous avons remis, qui est tirée de «Follow the Money», permet de constater que l'aide financière fédérale à la production télévisuelle canadienne a triplé de 1994 à 2001, passant de 76 millions de dollars à 227 millions de dollars. Je vous signale que tous les montants présentés dans «Follow the Money» ont été convertis en dollars de 2001 pour permettre la comparaison au cours de la période de 10 ans.
Comme vous le verrez d'après l'acétate suivant, l'acétate 3, qui est tiré de la même étude, au cours de cette même période de sept ans, les chaînes privées diffusant par la voie des ondes ont réduit de 6 p. 100 leur investissement dans la programmation canadienne tout en haussant plus de 50 p. 100 les fonds consacrés aux émissions étrangères. Si la tendance actuelle se maintient, les dépenses de programmation étrangère de diffuseurs privés dépasseront les dépenses de programmation canadienne l'an prochain. Si cette tendance se poursuit, les subventions accordées depuis 1994 pour favoriser le contenu canadien, qui sont financées à même l'argent des contribuables, ont servi à acheter des quantités massives de produits hollywoodiens. Il est difficile d'imaginer que c'est ce qu'avait envisagé le gouvernement actuellement au pouvoir quand il a accru, il y a quelques années de cela, les crédits réservés à la promotion télévisuelle canadienne.
Comme vous pouvez le voir sur l'acétate suivant, l'acétate 4, les recettes des diffuseurs traditionnels privés ont augmenté de 13 p. 100 au cours de la décennie visée tandis que leurs bénéfices ont connu une hausse fort appréciable, augmentant de 128 p. 100.
Friends conclut que les subventions et le soutien accordés par l'État pour la programmation canadienne ont favorisé l'éclosion d'un secteur privé dynamique et rentable, mais n'ont donné que des résultats mitigés pour ce qui est d'obtenir une télévision qui soit à l'image du Canada, sujet dont il est question ici aujourd'hui. Nous espérons que les membres du comité jetteront un regard sévère sur la feuille de route des diffuseurs professionnels privés au Canada et les interrogeant sans ménagement au sujet de l'efficacité des programmes gouvernementaux existants qui visent à nous donner une télévision qui soit le reflet du Canada.
• 0915
Vous verrez sur l'acétate suivant, l'acétate 5, que, même si
la SRC demeure au premier rang des investisseurs dans la production
de langue anglaise subventionnée par Téléfilm Canada, les chaînes
spécialisées ont collectivement remplacé le réseau CTV au deuxième
rang des investisseurs, tandis que le réseau Global n'a qu'une
participation minime.
[Français]
Une autre tendance devient très visible lorsque nous examinons les données en dollars de 2001. Il s'agit d'un changement de la nature même de la télévision de la Société Radio-Canada. Tel que vous pouvez le voir à la planche numéro 6, les revenus publicitaires des réseaux anglais et français de Radio-Canada ne représentaient que 28 p. 100 de son allocation parlementaire en 1991. L'année dernière, cette dépendance publicitaire avait grimpé à 44 p. 100.
Ces données sous-estiment cette dépendance puisqu'elles comprennent les dépenses de la radio non commerciale.
[Traduction]
L'automne dernier, Friends a publié un rapport de recherche sur la qualité de la télévision de langue anglaise, intitulé «It's Good and We Like It». Nous en avons envoyé un exemplaire à chacun des membres du comité il y a déjà un certain temps. Je conclurai ce bref exposé en vous rappelant quelques-unes des constatations qui sont ressorties de ce travail de recherche.
Le sondage Nielsen qui évaluait en 1999 la qualité des émissions présentées par les médias a révélé que les émissions dramatiques de chez nous recueillent la faveur des Canadiens qui ont pourtant bien d'autres choix dans le contexte actuel où la concurrence est de plus en plus forte. L'acétate 7 montre que 8 des 23 émissions dramatiques les plus populaires d'après le sondage sur la qualité des émissions étaient canadiennes. L'acétate 8 indique que, sur les 10 émissions canadiennes les plus populaires d'après ce même sondage Nielsen de 1999, 7 étaient diffusées par la CBC, 3 par CTV et aucune par Global.
Comme vous pouvez le constater à l'acétate 9, qui est assez compliqué à quelques exceptions près les émissions de qualité attirent un grand nombre de téléspectateurs, contrairement à l'idée qu'on se fait que les émissions de qualité sont généralement moins populaires. Les émissions qui figurent en haut à droite ont une part d'auditoire plus élevée que la moyenne et une cote de qualité plus élevée que la moyenne aussi, et chaque couleur représente un diffuseur différent.
Noreen.
Mme Noreen Golfman: Merci.
Dans ce court exposé préliminaire, nous avons pensé qu'il serait plus utile de vous présenter certains faits saillants qui ressortent de nos recherches que d'insister encore une fois sur les divers énoncés de position que nous vous avons présentés dans notre mémoire du 10 septembre. Ces questions nous tiennent néanmoins beaucoup à coeur. Nous croyons à l'importance fondamentale, entre autres, de la partie I, article 3 de la Loi, «Politique canadienne de radiodiffusion»; de la réforme de la Loi sur le CRTC; de la relation entre Téléfilm et le Fonds canadien de télévision; de la nécessité de corriger l'écart entre le mandat de la CBC et ses ressources; de réformer le processus de nomination à la CBC, à CRTC, à Téléfilm, à SCT; de faire en sorte que les diffuseurs traditionnels privés contribuent à la réalisation des objectifs de la loi en fonction de leurs moyens; d'imposer des limites aux chaînes spécialisées que peuvent posséder les câblodistributeurs, de maintenir la propriété et le contrôle canadien efficaces des titulaires de licences; d'empêcher que la propriété des entreprises de télédiffusion ne devienne encore plus concentrée; d'obliger les titulaires de licences de télédiffusion à maintenir des salles de nouvelles distinctes des salles de nouvelles des quotidiens dans lesquelles ils ont un intérêt; d'interdire aux diffuseurs de faire des contributions politiques; de faire en sorte que la responsabilité de la politique en matière de radiodiffusion et de télécommunications relève du même ministère fédéral; de réunir et de diffuser des informations sur les politiques relatives au système audiovisuel.
Merci, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité, d'avoir bien voulu nous écouter. Nous sommes prêts à dialoguer avec vous maintenant et tout au long de cette étude d'importance capitale que vous avez entreprise.
Merci.
Le président: Merci.
Avant de céder la parole à M. Garrard, après quoi nous passerons à la période de questions, je tiens à signaler pour les fins du compte rendu que, même si votre mémoire du 10 septembre a été traduit, conformément à nos règles, celui-ci ne l'a pas été, et la greffière me dit qu'il a été remis directement aux membres du comité. En temps normal, nous n'acceptons aucun document qui n'est pas traduit; cela va à l'encontre de nos règles, mais parce qu'il s'agissait principalement de tableaux, j'ai autorisé sa distribution. Je sais que M. Sauvageau a demandé à recevoir un exemplaire en français, comme c'est son droit, et en temps normal il aurait fallu que le document soit traduit avant qu'il puisse être distribué.
[Français]
M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): [Note de la rédaction: inaudible].
Le président: On posera les questions ensuite.
M. Benoît Sauvageau: Je veux simplement dire que je partage totalement l'opinion du président. Vous savez que le ministère du Patrimoine et notre comité ont le mandat de faire respecter la Loi sur les langues officielles. Vous vous appelez Friends of Canadian Broadcasting. De quels Canadiens êtes-vous les amis? Je regarde votre slide 1, comme vous dites. J'aimerais savoir si vous avez aussi des données sur le Québec. À ma connaissance, nous ne sommes pas inclus dans le terme «Canadian». Je tiens d'abord à vous dire que c'est par politesse que nous vous avons laissé présenter un rapport qui ne respectait pas les règles et les normes du Comité du patrimoine canadien, celui qui doit faire respecter la Loi sur les langues officielles.
Ensuite, je pense que vous pourriez vous questionner sur votre nom, quand on considère les slides que vous nous présentez. Je vous remercie et je vais vous poser des questions plus tard.
[Traduction]
Le président: Monsieur Garrard.
M. Jim Garrard (directeur exécutif, Toronto Arts Council): Bonjour, je m'appelle Jim Garrard. Je suis directeur exécutif du Toronto Arts Council. Nous sommes nous aussi des amis de la CBC. Je tiens à présenter au comité quelques brèves remarques préliminaires. Il me faudra sans doute moins que les 10 minutes qui m'ont été allouées.
Le Toronto Arts Council est un organisme de bienfaisance sans but lucratif qui a été créé il y a 27 ans pour appuyer le développement, l'accessibilité et l'excellence des arts à Toronto. Le Toronto Arts Council distribue des subventions municipales, sans aucun lien de dépendance avec l'administration, à plus de 400 organisations du milieu artistique et à des centaines d'artistes. Nous distribuons aussi un certain nombre de subventions et de prix dans le domaine des arts au nom de la Toronto Arts Council Foundation et d'autres organismes.
Nous avons un conseil d'administration composé de 29 membres. Nos règlements précisent que la majorité de nos administrateurs doivent être des artistes en exercice. En outre, nous comptons 60 artistes en exercice et gestionnaires du milieu des arts qui siègent aux comités permanents chargés d'étudier les demandes d'aide financière.
Cette structure et cette façon de fonctionner font en sorte que le Toronto Arts Council est bien au fait de la situation du milieu des arts à Toronto et peut servir de porte-parole autorisé aux artistes et aux organisations artistiques de Toronto. Étant donné les nombreuses similitudes entre le milieu des arts des grandes villes canadiennes, nous sommes d'avis que les messages que nous apportons aujourd'hui au Comité ont une application nationale.
Tout d'abord, le Toronto Arts Council appuie les recommandations suivantes de la part de la Conférence canadienne des arts: Maintenir l'exclusion de la culture des accords commerciaux; maintenir les dispositions actuelles sur la propriété étrangère, veiller à ce que le CRTC assure la mise en oeuvre de la loi; instituer un régime compétitif de renouvellement des licences; financer une étude de base sur la diversité des émissions d'actualité et d'information; maintenir et accroître l'appui aux industries culturelles canadiennes, notamment à la programmation canadienne; et assurer à Radio-Canada un financement sur sept ans.
Le Toronto Arts Council appuie également les politiques et les principes énoncés dans la Loi sur la radiodiffusion de 1991, qui ont pour but de maintenir, de protéger et de renforcer la programmation canadienne. Les seuils minimums en matière de contenu canadien ont grandement contribué à la création d'emplois dans le secteur et au développement de l'industrie. Les consommateurs ont un éventail raisonnable d'émissions canadiennes parmi lesquelles choisir.
Nous estimons toutefois qu'il faudrait une réforme du côté de la qualité des émissions parmi lesquelles ils peuvent choisir. L'article 3 de la loi dispose que le système de radiodiffusion devrait «servir à sauvegarder, enrichir et renforcer la structure culturelle, politique, sociale et économique du Canada», proposer «une très large programmation qui traduise des attitudes, des opinions, des idées, des valeurs et une créativité artistique canadiennes» et «refléter la condition et les aspirations, des hommes, des femmes et des enfants canadiens, notamment l'égalité sur le plan des droits... et le caractère multiculturel et multiracial de la société canadienne ainsi que la place particulière qu'y occupent les peuples autochtones», mais ces objectifs n'ont pas été réalisés.
• 0925
On se fonde principalement sur la quantité pour mesurer le
contenu canadien dans le système de radiodiffusion. Les choix sont
faits surtout en fonction de considérations industrielles, des
marchés d'exportation, du plus bas dénominateur commun, de la
coproduction, de l'imitation d'émissions américaines, etc. Les
seuils minimums de l'industrie de la radiodiffusion, si fragile
soit-elle, mais ils n'ont guère été utiles jusqu'à maintenant pour
sauvegarder, enrichir et renforcer la structure culturelle
canadienne. Pour que le contenu canadien nous permette d'avancer
sur les deux fronts, il faudrait y appliquer des critères de
qualité.
Heureusement, les circonstances ont changé si bien que la qualité est dorénavant un objectif réalisable. Plus que jamais auparavant, des artistes de toutes les régions du Canada et de tous les coins du globe affluent vers nos grandes villes, où ils échangent et collaborent avec d'autres, où ils créent un vaste éventail de pièces de théâtre, de spectacles de danse et de musique et d'autres oeuvres semblables de très grande qualité. Les auteurs, les artistes de la scène, les concepteurs, les réalisateurs, les compositeurs, les chefs d'orchestre et les conservateurs viennent y parfaire leurs compétences et y perfectionner leurs oeuvres. Nos milieux artistiques sont des incubateurs de talents et sont perçus par certains comme des foyers de R-D pour les secteurs de la radiodiffusion, du cinéma et des arts commerciaux. À Toronto, en tout cas, notre milieu artistique constitue une immense richesse naturelle, qui crée et présente chaque année des milliers de manifestations artistiques.
Notre industrie de la radiodiffusion exploite déjà un tant soit peu ce bassin de contenu et de talents, mais le contenu, malgré sa qualité et sa pertinence culturelle, ne vit généralement que de façon éphémère sur une scène pour ensuite disparaître. Comme nous l'a dit récemment un auteur réalisateur bien connu de Queen Street: «C'est un peu comme les sacrifices des Incas, n'est-ce-pas? On monte jusqu'au sommet, puis on est jeté dans le précipice. Ces pièces, ces spectacles disparaissent à tout jamais. C'est donc à la fois horrible, merveilleux, terrible et extraordinaire de vivre cette expérience du théâtre en direct, et qui est destiné essentiellement à brûler sur le bûcher.»
Il n'est pas nécessaire qu'il en soit ainsi. En fait, c'est précisément ce dont notre système de radiodiffusion a besoin à l'heure actuelle pour offrir cette large programmation qui traduit les attitudes, les opinions, les idées, les valeurs et la créativité artistique des Canadiens, celles-là mêmes dont parle la Loi sur la radiodiffusion de 1991.
On pourrait réaliser des économies considérables en adaptant les pièces et spectacles présentés sur scène pour qu'ils puissent être diffusés. Les caméras sont maintenant plus portables qu'autrefois et exigent un éclairage moins complexe. Le montage se fait plus rapidement et de façon plus économique. Les oeuvres elles-mêmes ont déjà été préparées pendant des mois, sinon des années. Elles ont déjà passé la rampe. Dans bien des cas, la transposition d'un médium à un autre peut se faire très rapidement, avec le même personnel, les mêmes éléments de production et parfois aussi les mêmes salles. Dans la seule ville de Toronto le secteur artistique produit du matériel fascinant en abondance. Ce matériel est très divers sur le plan culturel et thématique. Il est souvent très intelligent. Il est à l'image de notre vécu et de nos préoccupations. Il reflète le Canada.
Dans l'ancien univers où l'on n'avait accès qu'à trois chaînes, on pensait qu'il fallait à tout prix investir des sommes importantes afin de produire des oeuvres conçues spécialement pour la radiodiffusion. Dans le nouvel univers à chaînes multiples, cette façon de faire n'est vraiment pas viable. La réalité économique est telle que la majorité des entreprises doivent abaisser leurs coûts de production. Il nous semble donc que ces nouveaux mariages entre économie et qualité, excellence artistique et technologie, doivent nous amener à jeter un regard neuf sur les arts de la scène comme source d'émissions et de choix canadiens de qualité.
• 0930
Les pièces à succès qui sont présentées dans nos meilleurs
théâtres attirent au mieux 5 000 spectateurs. Pourquoi ne pas
explorer la faisabilité économique de diffuser ces oeuvres à des
auditoires plus vastes grâce à la radiodiffusion? Il est peut-être
improbable que quelqu'un puisse ainsi faire fortune, mais il n'en
coûterait pas plus au contribuable qu'à l'heure actuelle, et il lui
en coûterait peut-être moins, pour réaliser beaucoup des objectifs
énoncés qui nous tiennent tellement à coeur, de ces objectifs
énoncés dans la loi, mais qui n'ont pas encore trouvé d'expression
concrète.
Le Toronto Arts Council recommande d'utiliser des mesures qualitatives pour déterminer les quotas de contenu canadien et préconise la création d'un mécanisme qui favoriserait un partenariat entre les producteurs de spectacles du secteur sans but lucratif et les parties intéressées du système canadien de radiodiffusion afin d'adapter, pour les ondes, une large palette de spectacles ayant bénéficié d'une grande popularité.
Je vous remercie.
Le président: Merci, monsieur Garrard.
Je donne maintenant la parole à M. Abbott.
M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président, et merci également à nos témoins pour leur présence ici aujourd'hui.
Comme d'habitude, je commencerai par les éléments sur lesquels nous sommes d'accord. Je relève dans le sommaire de l'exposé du groupe Friends of Canadian Broadcasting que celui-ci parle d'une réforme du processus de nomination à Radio-Canada, au CRTC, à Téléfilm et au FCT. Même si je puis imaginer que ces réformes pourraient produire un résultat très différent, je conviens facilement avec vous du fait qu'il faut réformer le processus de nomination dans ce secteur extrêmement important.
Quant au maintien de services de presse distincts pour la télévision et les journaux, même si sur papier cela semble être une bonne idée, ne diriez-vous pas comme moi que cela risquerait de mettre la ministre du Patrimoine et bien d'autres encore qui comprennent le Canada aussi bien qu'elle dans une position de contrôle de l'actualité? En d'autres termes, jusqu'où cela irait-il? Quel serait le contrôle que le gouvernement devrait exercer pour arriver à ce résultat?
Je vais simplement vous soumettre un méli-mélo auquel vous jugeriez peut-être bon de répondre. J'ai également le sentiment, peut-être à la blague, que le fait de dire, comme vous le faites à l'acétate 9, que mes deux émissions préférées à la télévision, «Power Play» et «Made in Canada» sont d'une moindre qualité—je ne comprends pas comment vous êtes parvenus à cette conclusion.
Pour être plus sérieux, et je vous dis cela en toute déférence, il est essentiel que je comprenne bien le monde tel que le voient nos deux témoins. Lorsque j'étais tout jeune, mon père avait bâti une nouvelle maison au carrefour de la 401 et de la rue Yonge. C'était en 1949. Je me souviens fort bien à quel point nous nous étonnions à l'époque de voir apparaître les antennes de télévision; il y avait même une ou deux personnes qui avaient un récepteur noir et blanc et qui pouvaient regarder les émissions en provenance de Buffalo, et tout ce qu'elles pouvaient capter au moyen de leur antenne. Je sais comment la télédistribution a fini par arriver sur le marché, mais nous sommes très loin de tout cela. Je vous le dis, avec beaucoup de déférence et beaucoup de gentillesse, à mon sens la vision que Friends of Canadien Broadcasting et le Toronto Arts Council se font de la télévision contemporaine est une vision qui s'assortit d'un contrôle de ce médium et d'un auditoire captif.
Nous avons vu le CRTC, faisant preuve de sagesse à des degrés divers, à notre sens du moins, avancer l'idée de chaînes spécialisées comme Bravo, Showcases et les autres chaînes éducatives. Nous avons vu ces chaînes être mises à la disposition de la population, et c'était d'excellents choix. Par contre, je n'ai perçu dans vos commentaires aucune corroboration que ces choix sont maintenant à la portée des gens qui sont abonnés au câble ou à un distributeur par satellite. J'ai toujours le sentiment—et si je me trompe, dites-le-moi—que vous en êtes toujours à cet univers des années 50, 60, voire 70, un univers dans lequel on pouvait effectivement contrôler ce qui était offert aux Canadiens. Qu'auriez-vous à dire à cela?
Le président: J'imagine que vous avez pris des notes au fur et à mesure. Qui veut commencer? Monsieur Garrard?
M. Jim Garrard: Je pourrais peut-être ouvrir le débat.
Il est certain que lorsqu'on syntonise son poste de télévision au Canada, les choix sont nombreux, et souvent, ces choix sont intéressants et bons, cela ne fait aucun doute. Le Toronto Arts Council aimerait toutefois parler du fait qu'il y a, sur nos scènes, beaucoup de créations qui sont l'oeuvre d'artistes canadiens et qui traduisent de façon très précise et très intelligente le paysage canadien. Par contre, nous n'offrons pas le même choix sur les ondes. Pourtant, ces choses-là existent. À notre avis, l'économie de la distribution des oeuvres de nos meilleurs artistes est telle qu'il serait tout à fait possible de donner ce genre de choix aux téléspectateurs et aux auditeurs canadiens. Mais pour l'instant, il est très rare qu'on puisse voir et entendre les meilleurs oeuvres de nos meilleurs artistes de la scène, et la distribution, pour ce qui est du secteur des spectacles, est beaucoup plus limitée que dans le cas de la radiodiffusion.
Ce n'est pas une très bonne réponse.
M. Jim Abbott: Je voudrais demander à M. Garrard ce qu'il pense...
Le président: Vous ne voulez pas monopoliser la séance, n'est-ce pas? Nous avons beaucoup de temps et je pense que nous pouvons donner aux gens de Friends of Canadian Broadcasting la possibilité de donner leur avis. Nous pourrons toujours revenir plus tard à M. Garrard.
Monsieur Morrison, madame Golfman, auriez-vous quelque chose à dire?
M. Ian Morrison: Je vous remercie.
Monsieur Abbott, vous avez posé sept excellentes questions, et voici quelques réponses en rafale.
S'agissant du processus de nomination, je me plais à penser que le conseil que nous vous donnons—et je vous renvois d'ailleurs à notre mémoire de 35 pages de préférence à notre exposé de 10 minutes, ce qui vous permettra d'avoir tout notre argumentaire—ce que nous conseillons donc en matière de nomination n'est pas vraiment quelque chose que votre formation politique serait la seule à appuyer. Je me plais à penser que tous les parlementaires pourraient le faire, de manière à ce que les institutions culturelles de premier ordre du Canada soient dirigées par les meilleurs qui soient, et je pourrais à ce sujet vous citer l'exemple du Royaume-Uni et de l'Afrique du Sud. La chose est possible, et cela ne serait pas un précédent. Tout ne doit pas nécessairement être fait à partir du cabinet du premier ministre et sans aucune consultation.
Pour ce qui est des services de presse, vous représentez la région des Kootenays, mais j'imagine qu'à l'occasion vous traversez la ville de Vancouver et je voudrais attirer votre attention sur le fait que, dans la région côtière de la Colombie-Britannique, une seule entreprise contrôlée par une seule famille possède les trois quotidiens et les trois stations de télévision de cette région. Rien du point de vue de la politique de l'État ne les empêche de regrouper leurs services de presse au point de limiter considérablement le nombre de porte-parole qui rapportent l'actualité à Vancouver. Cela préoccupe également énormément de Canadiens, d'après ce que nous disent les sondages.
Pour ce qui est maintenant de l'auditoire de qualité, je pense qu'il y a concordance de vues avec ce que dit le Toronto Arts Council, en l'occurrence que le problème consiste à offrir un environnement permettant aux diffuseurs de rejoindre les auditoires qui leur permettront de recueillir des fonds pour pouvoir dépenser de l'argent précisément là où les choix sont limités, c'est-à-dire dans le domaine des émissions canadiennes de grande valeur artistique, et c'est là un énorme défi.
Je ne savais pas que vous aviez grandi au coin de la 401 et de la rue Yonge. Moi aussi, Jim, puisque j'habitais avenue Cameron. Nous avons donc quelque chose d'autre en commun.
S'agissant de la question du choix, nous partons du principe qu'à certains égards, le système audiovisuel canadien offre davantage de choix que n'importe quel autre système au monde. Le problème, c'est la pénurie de choix au niveau des réalisations canadiennes de grande valeur artistique. Pour vous donnez une comparaison approximative, dans le système audiovisuel de langue anglaise au Canada, 33 p. 100 des produits disponibles sont des produits canadiens. Par comparaison, chez nos voisins du Sud, 98 p. 100 des produits disponibles sont des produits américains. Nous avons donc énormément de choix.
• 0940
Lorsque vous parlez des années 50, il y a des centaines de
gens dans votre circonscription qui seraient d'accord avec nous
lorsque nous nous portons à la défense du contenu canadien. Ce
n'est pas simplement une question de contrôle, car il s'agit plutôt
de créer un environnement qui inciterait les décideurs dans le
monde de la radiodiffusion, à travailler pour le Canada en
contrepartie de toute la protection que le Parlement leur donne. Je
voudrais vous signaler à ce sujet deux événements récents qui vous
feront peut-être comprendre que le mode de contrôle est déjà
dépassé et que nous sommes peut-être allés trop loin en cédant ce
contrôle.
Un des grands diffuseurs vient tout juste, la semaine passée, d'être autorisé par le CRTC à racheter une licence de télévision, celle du Women's Television Network, mais, contrairement à ce que ce diffuseur avait laissé entendre en termes généraux, contrairement à ce qu'il avait même promis, il s'est empressé de déménager le siège du réseau de Winnipeg à Toronto. Un autre grand diffuseur avait multiplié les promesses en disant qu'il allait desservir le nord de l'Ontario, mais, quelques mois après avoir obtenu une licence valide pour sept ans, il a cessé ses activités à Timmins, à Sault Ste. Marie et à North Bay. C'est une compagnie qui est contrôlée par BCE.
Le CRTC a donc peut-être fait trop confiance aux gens. En interprétant l'opinion publique, nous avons le sentiment que la pendule oscille maintenant en faveur de l'attitude chère à Saint-Luc qui disait: «Qui a beaucoup reçu devra aussi beaucoup donner».
Le président: Vous aurez à nouveau la parole plus tard, monsieur Abbott.
[Français]
Monsieur Sauvageau.
M. Benoît Sauvageau: Ma première question s'adresse à M. Morrison.
Madame Golfman et monsieur Morrison, j'ai lu votre mémoire de 35 pages. En bas de la première page, on peut lire ceci:
-
FRIENDS a pour mandat d'améliorer et de protéger la
qualité et la quantité de la programmation canadienne
dans le système audiovisuel.
Est-il question de programmation dans les deux langues, l'anglais et le français, ou seulement en anglais? Voilà ma première question.
M. Ian Morrison: Comme je suis plus à l'aise en anglais qu'en français, je vais le répéter en anglais. J'ai la version anglaise devant moi.
[Traduction]
Vous voudrez bien noter que Friends of Canadian of Broadcasting est le porte-parole des téléspectateurs et des auditeurs du système audiovisuel en langue anglaise et, même si nous collaborons avec d'autres groupes qui représentent la perspective francophone, ce n'est pas notre objectif premier.
[Français]
M. Benoît Sauvageau: Cela me permet de mieux comprendre. Cela explique aussi pourquoi le site Internet est en anglais seulement. C'est qu'il s'adresse à une clientèle spécifique. Recevez-vous des subventions de Patrimoine Canada, par exemple, ou du CRTC?
M. Ian Morrison: Non, pas du tout.
M. Benoît Sauvageau: Pas du tout?
M. Ian Morrison: Non. Nos revenus proviennent de dons après impôt, car nous ne sommes pas considérés comme un organisme de bienfaisance étant donné que nos activités sont parfois politiques. Elles sont non partisanes, mais politiques tout de même. Nous avons reçu environ 50 000 $ de dons l'année passée. La valeur moyenne des dons était de 35 $. Nous n'avons reçu aucune somme des gouvernements, de syndicats ou d'entreprises.
M. Benoît Sauvageau: Je voulais être sûr de bien comprendre. Je vous remercie beaucoup.
M. Ian Morrison: D'accord.
M. Benoît Sauvageau: Si vous deviez ne faire qu'une recommandation quant à la révision de la Loi sur la radiodiffusion—je voulais poser la même question à M. Garrard—, quelle serait la plus importante pour vous, celle qu'il faudrait absolument inclure dans la conclusion du rapport final? Quelle serait la recommandation de Friends of Canadian—on devrait adopter un autre mot—Broadcasting, et quelle serait la vôtre, monsieur Garrard?
M. Ian Morrison: Vous me demandez quelle est notre recommandation la plus importante, ce qui nous semble primordial. Je pense que vous devriez souligner l'importance de la politique de radiodiffusion contenue dans la Loi sur la radiodiffusion. Je pense que les huit principes de la politique de radiodiffusion en sont les aspects clefs. Il ne faut pas changer cela et se concentrer sur les moyens de les réaliser en pratique.
M. Benoît Sauvageau: Merci.
[Traduction]
Le président: Monsieur Garrard, pouvez-vous répondre à la même question?
M. Jim Garrard: Je donnerais pour ma part une réponse assez similaire. La Loi sur la radiodiffusion nous semble être un instrument assez efficace pour autant qu'elle puisse être appliquée comme on l'entendait à l'origine. Par contre, je dirais que la recommandation que nous serions les plus enclins à souligner serait également la plus difficile à mettre en oeuvre, en l'occurrence l'utilisation de mesures qualitatives permettant de faire l'adéquation avec le contenu canadien. Les mesures quantitatives sont relativement faciles à utiliser, mais il n'en va pas de même pour les mesures qualitatives, quoiqu'à mon avis, nous pourrions obtenir des retombées relativement importantes en nous efforçant d'y parvenir.
[Français]
M. Benoît Sauvageau: Merci.
Le président: Pardon?
M. Benoît Sauvageau: Ai-je le temps de poser une autre question?
Le président: Très brièvement, monsieur.
M. Benoît Sauvageau: D'accord. Vous êtes-vous penchés sur la question de la diffusion par Internet ou si vous vous êtes restreints aux moyens traditionnels de diffusion? Ma question s'adresse à Friends of Canadian Broadcasting. Vous êtes-vous aussi intéressés à une modification possible de la Loi sur la radiodiffusion pour légiférer sur Internet?
[Traduction]
Mme Noreen Golfman: Nous nous occupons en fait surtout du domaine télévisuel, ce qui ne veut pas dire que nous ne pourrions pas à un moment donné nous saisir également de cette question. Nous surveillons cet environnement et nous résistons à la tentation de recommander qu'il soit strictement un règlement. Si tant est que ce qui nous intéresse c'est le choix et la diversité des choix, nous pensons que nous allons forcément devoir participer à ce débat sur les choix qui sont mis à notre disposition dans le monde électronique. Pour l'instant, nous axons surtout nos interventions sur les éléments de loi qui concernent la radiodiffusion.
Le président: Madame Bulte.
Mme Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.): Je vous remercie tous d'être venus aujourd'hui.
Monsieur le président, je voudrais commencer en disant qu'en ma qualité de députée de la région de Toronto, je sais fort bien à quel point le Toronto Arts Council est important pour cette communauté artistique merveilleuse et dynamique qu'est la nôtre. Je vous remercie donc au nom des nombreux artistes et des nombreuses troupes de ma circonscription.
Je vais commencer par le groupe Friends of Canadien Broadcasting, après quoi je reviendrai aux mesures quantitatives parce que je voudrais m'étendre un peu sur la question.
Une des choses que j'ai constatées, ce qui est inévitable, c'est l'absence d'émissions produites localement. Je pense que c'est là un domaine très important. Monsieur Morrison, vous avez dit en réponse à une question que certains diffuseurs privés avaient cessé de produire des émissions localement. L'an dernier, nous avons entendu ici les représentants de la SRC qui eux aussi nous ont dit avoir arrêté de produire des émissions localement. À l'époque, M. Rabinovitch nous avait déclaré que si nous regardions ce que dit la loi—en quoi il avait absolument raison—nous n'y verrions absolument aucune mention de la production locale puisqu'elle ne parle que de la production régionale.
Alors, que faire? Comment faire valoir la nécessité d'avoir des émissions produites localement? Est-ce là quelque chose dont l'absence est tellement flagrante dans la loi que nous n'avons pas pris la peine d'y penser? Faudrait-il le mentionner dans la loi? Que faire? On n'arrête pas de nous dire que la production d'émissions au niveau local est d'une très grande importance partout, mais personne ne semble faire quoi que ce soit. Que faire, donc? Éclairez-nous si vous le pouvez.
M. Ian Morrison: Voilà une excellente question.
Il y a tout juste trois ans, nous avons effectué quelques recherches dans le cadre d'un processus d'élaboration d'une politique en matière de télévision par le CRTC, et nous avions choisi la ville de Winnipeg parce qu'elle était représentative d'un marché anglo-canadien. Nous avons comparé le nombre de chaînes qui pouvaient y être captées au moyen d'une antenne de télévision entre 1986, lorsque les premières chaînes spécialisées commençaient à apparaître, et 1997. Nous avons découvert que les émissions produites localement avaient décliné, non seulement de façon quantitative, mais également sous l'angle qualitatif. J'entends par-là qu'en 1997 à Winnipeg, les seules émissions produites localement étaient à peu de choses près des émissions d'actualité. Dans toutes les autres catégories, qu'il s'agisse d'émissions religieuses, d'émissions musicales et de toutes les autres catégories qui sont pourtant tellement importantes, il n'y avait plus rien. Par conséquent, si Winnipeg est effectivement représentative de la situation canadienne, nous avons 50 pages de données qui prouvent que, depuis 11 ans, le système de radiodiffusion a abandonné la scène locale.
• 0950
Nous avons également constaté qu'à Winnipeg, l'auditoire des
émissions faites à Winnipeg était plus important que l'offre, en
l'occurrence que 16 p. 100 de la journée normale de radiodiffusion
était composée d'émissions produites localement à Winnipeg, mais
que 19 p. 100 de l'auditoire était un auditoire de Winnipeg. En
d'autres termes, les gens aiment les émissions produites
localement.
Par conséquent, pour revenir à votre question de politique concernant la Loi sur la radiodiffusion, je répondrais ceci à M. Rabinovitch si c'est ce qu'il me disait: Quelle est la définition d'une émission régionale qu'on peut trouver dans la loi. Je me souviens que Pierre Juneau, une sommité dans ce domaine, avait dit jadis qui pourrait affirmer que le sud de l'Alberta n'est pas une région? Qui peut affirmer que la région de Sault Ste. Marie n'est pas une région? C'est en quelque sorte la notion selon laquelle une région devrait être quelque chose qui ressemble à la province de l'Ontario ou les trois provinces des Prairies. Mais il n'y a rien dans ce sens dans la loi. Je dirais donc que lorsque le Parlement a utilisé en 1991 le mot «régional», ce n'était certainement pour exclure ce qui était local, mais simplement pour faire la différence avec le plan national.
Ce qu'il faut donc aujourd'hui, et Noreen va en dire un mot, c'est une impulsion quelconque, qui n'exigerait pas nécessairement de modifier la loi, mais qui signalerait que ce que le Parlement souhaite, c'est que les Canadiens puissent retrouver leur propre collectivité dans leur système audiovisuel, ce qu'ils veulent d'ailleurs profondément.
Noreen.
Mme Noreen Golfman: Je pense que la question est excellente et que la distinction entre ce qui est régional et ce qui est local est souvent confuse. Je vis à un endroit, au Canada, à St. John's, à Terre-Neuve, où cette notion de région vexe souvent mes voisins, parce que le terme région englobe les Maritimes et Terre-Neuve, la région Atlantique du Canada donc, et qu'en tant que spectateur représentatif, je soutiens personnellement que le mot «régional» ou le mot «région» signifie Terre-Neuve, et non pas cette zone géographique plus vaste.
Par conséquent, il faut absolument se demander si nous parlons oui ou non d'une espèce géographique ou culturelle. Comme l'a dit Ian, il serait très utile que le comité examine cette distinction, ou à tout le moins la définisse pour arriver à la certitude que la signification du terme «régional» englobe également en partie ce qui est local, afin que l'élément local ne finisse pas par disparaître complètement de la discussion.
Mme Sarmite Bulte: Monsieur le président, pourrais-je poser une toute petite question à M. Garrard?
Le président: Soyez brève.
Mme Sarmite Bulte: Je me suis toujours portée vigoureusement à la défense d'une augmentation du contenu canadien, pas uniquement du contenu canadien pour la beauté de la chose, mais d'un contenu canadien de qualité, comme vous le dites, monsieur Garrard, en utilisant des mesures qualitatives. Mais encore une fois, comment allons-nous pouvoir arriver à un objectif comme celui-là? Qu'est-ce qui sera qualitatif? Si nous utilisons le théâtre comme exemple, un succès d'affiche attirera peut-être 5 000 spectateurs, mais donnons-nous une définition de la chose en fonction du nombre de billets vendus? Va-t-il falloir demander à un jury de donner une définition, comme c'est souvent le cas dans les organismes subventionnaires? Allons-nous devoir adopter une grille horaire selon le contenu canadien? Fera-t-on comme avec le CRTC, qui exige six points sur 10? Je comprends votre point de vue, mais je vous demande de m'éclairer. Comment allons-nous nous y prendre? Je peux vous dire que ce n'est pas forcément un succès d'affiche qui fait la qualité d'une production. Les principaux réalisateurs commerciaux de Toronto sont ceux qui ont les plus gros auditoires, mais il ne s'agit pas de productions canadiennes; les acteurs et les réalisateurs ne sont même pas Canadiens.
M. Jim Garrard: Je pense qu'un producteur canadien qui veut faire des bénéfices, objectif louable s'il en est, recherche plutôt une pièce qui sera un succès d'affiche partout. Il veut un produit qu'il peut vendre souvent et dans le plus grand nombre d'endroits possibles. Ce que nous essayons de faire valoir, c'est qu'il y a effectivement des oeuvres de qualité, les médias l'ont reconnu, le public l'a également reconnu en en faisant des succès d'affiche, et donc qu'il y a déjà un certain jugement qualitatif. Peu importe la ville où vous allez, les cinq spectacles qui y ont été les plus populaires l'année dernière sont généralement des spectacles d'assez bonne qualité.
• 0955
Il y a aussi l'évaluation par les pairs, un système que les
conseils des arts, et tout particulièrement le Conseil des arts
de Toronto, utilisent depuis 26 ans. Nous réunissons des groupes
de spécialistes qui déterminent quel projet est le plus digne
d'intérêt. C'est un bon système, car il dépend de la compétence
de gens qui font plus ou moins la même chose.
Ce que nous voulons vous faire comprendre, c'est qu'il y a beaucoup d'oeuvres de très grande qualité que l'on peut transférer ou transposer pour les diffuser. Le mariage de la réaction du public et de la critique associé à une évaluation par les pairs représente une méthodologie efficace pour évaluer la qualité. Ce ne serait pas parfait, mais ce serait, je pense, efficace.
Mme Sarmite Bulte: Merci.
Le président: Monsieur Bonwick.
M. Paul Bonwick (Simcoe—Grey, Lib.): Merci, monsieur le président.
J'aimerais aborder quelques points. Tout d'abord, on a mentionné une question à deux ou trois reprises, ces dernières semaines, et comme M. Morrison vient de le faire encore, j'aimerais tirer les choses au clair et donner des précisions afin de corriger ce malentendu sur la procédure de nomination. Manifestement, ou bien on dit des choses qui ne sont pas justes ou on a mal compris le processus quand on déclare, par exemple, que les nominations se font en secret au cabinet du premier ministre.
Voici comment fonctionne le processus de nomination. On communique avec les députés. On s'adresse à nous pour un grand nombre de nominations à toutes sortes de commissions et groupes, partout au pays, dans de nombreux secteurs différents. Nous sommes donc prévenus de...
M. Dennis Mills (Toronto—Danforth, Lib.): Les députés libéraux sont prévenus.
M. Paul Bonwick: Le gouvernement.
Nous sommes prévenus des nominations à venir et nous avons l'occasion de présenter les curriculum vitae de candidats qui, à notre avis, ont les compétences voulues pour le poste. C'est donc très...
M. Benoît Sauvageau: J'essaie de garder mon sérieux.
M. Paul Bonwick: ...ouvert, je pense, pour mettre des gens compétents en place. Je voulais tout simplement corriger cette idée fausse, à savoir que ce n'était pas ouvert.
Monsieur Garrard, vous avez soulevé ce qui pourrait être une idée très intéressante. Évidemment, notre comité tient à donner aux Canadiens un plus grand accès à des histoires canadiennes, à des artistes canadiens. Si j'ai bien compris votre recommandation ou suggestion, vous semblez penser que nous avons la possibilité, grâce au réseau de télédiffusion, de présenter du théâtre en direct aux Canadiens à moindre frais. Pourriez-vous nous en dire plus long, et plus particulièrement, proposez-vous un canal spécialisé qui offre uniquement du théâtre canadien? Proposez-vous plutôt de modifier les directives ou la réglementation du CRTC afin de prévoir un certain pourcentage de diffusion de pièces de théâtre? C'est quelque chose que je trouve très intéressant, pouvez-vous nous en dire plus long à ce sujet?
M. Jim Garrard: Les canaux spécialisés représentent un bon départ. Si ces canaux avaient accès à un produit abordable, ils seraient heureux d'en faire la diffusion. Pour nous, la question qui se pose, c'est de savoir si le produit est abordable. Le produit existe déjà. Nous avons tendance, je pense, au Canada, à mettre l'accent sur les normes de production les plus élevées, ce qui est bien, mais nous sommes maintenant en mesure d'offrir des émissions dont les normes de production sont tout à fait acceptables, à bas prix parce que nous compensons cela grâce au contenu de très grande qualité qui est disponible.
Prenons par exemple une pièce. Il peut s'écouler, à compter du moment où l'auteur commence à la rédiger jusqu'au moment où le public la voit, plus de deux ans et il peut en coûter beaucoup de temps et d'argent. Si c'est un succès, si le public aime la pièce, si la critique l'aime, si les pairs l'aiment, normalement cela signifie trois semaines de spectacles et ensuite la pièce disparaît à tout jamais ou si c'est vraiment un énorme succès, on partira peut-être en tournée ou on la reprendra.
• 1000
Or justement, ces productions sont à toutes fins utiles
prêtes à diffuser. En faisant appel aux mêmes artistes, aux mêmes
décors et même aux mêmes costumes, je pense que nous sommes en
mesure, très rapidement, de transformer cet événement sur scène
en événement de diffusion et les économies ainsi réalisées sont
énormes. Toutefois, je ne pense pas que les télédiffuseurs privés
vont beaucoup s'intéresser à ce genre de chose parce que cela ne
permet pas de marquer des points. Il serait donc très utile que
le gouvernement intervienne, crée un fonds quelconque qui
permettrait de transposer ces oeuvres presque immédiatement afin
de les télédiffuser. On pourrait même télédiffuser les meilleures
oeuvres à un public plus vaste.
Le président: Madame Lill.
Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD): Merci.
Je vous remercie beaucoup d'être venus ici et de nous avoir fourni toutes ces données statistiques, car cela nous est très utile. Nous sommes là pour tenter de comprendre l'état du système de télédiffusion et plus particulièrement, je dirais, la place du public, la place de l'intérêt public dans notre système de télédiffusion. La loi prévoit des composantes publiques, privées et communautaires et nous sommes censés faire ressortir l'identité nationale et mettre en valeur la souveraineté culturelle. Nous utilisons des fréquences radios qui sont propriété publique et donc je pense que tous les télédiffuseurs ont la responsabilité de mettre l'accent sur le contenu canadien et la culture canadienne.
J'ai lu une grande partie de votre documentation et vous présentez des chiffres qui sont très alarmants. En fait, avec l'affaiblissement de notre télédiffuseur public suite aux réductions dans les crédits parlementaires, nous avons vu la disparition de la programmation régionale et locale et c'est là dans vos statistiques. Vos données révèlent également clairement que c'est CBC qui a manifesté un engagement à créer et à diffuser du contenu canadien. Les chaînes de télévision privées traditionnelles ont augmenté leurs dépenses sur le contenu canadien de 20 p. 100, mais les revenus ont augmenté de 36 p. 100, alors que CBC, le producteur le plus efficace de programmation canadienne, a dépensé 78 p. 100 de ses revenus pour ce genre de programmation en l'an 2000 comparé à 57 p. 100 en 1991. Nous savons donc que si le diffuseur public canadien reçoit de l'argent, il l'investit dans le contenu canadien.
Nous ne voyons toutefois pas un réengagement en ce moment envers ce secteur particulier et tout porte à croire qu'à la lumière d'une plus grande concentration de la propriété en main privée, le contenu canadien diminue, le travail pour les créateurs canadiens diminue. J'ai des chiffres du Writers Guild qui sont très alarmants puisqu'ils révèlent que les émissions dramatiques canadiennes ont diminué de moitié au cours des trois dernières années.
J'aimerais donc vous demander si vous considérez qu'il y a une relation directe entre la diminution de la programmation locale et régionale et le renforcement du secteur privé dans le domaine de la télédiffusion.
J'aimerais aussi savoir si vous pensez que les programmes gouvernementaux constituent une façon efficace de créer du contenu canadien parce que le Fonds canadien de télévision semble disposer de beaucoup d'argent, mais comme je l'ai dit, le Writers Guild of Canada prétend que les émissions dramatiques canadiennes ont diminué de moitié depuis trois ans. Quel est le lien? À quoi sert l'argent des contribuables canadiens si ce n'est au contenu canadien?
Mme Noreen Golfman: Permettez-moi de commencer. D'une certaine façon, vous avez répondu à la question en la posant comme vous l'avez fait. Nos recherches révèlent très certainement ce lien et l'échec du système, une faiblesse du système qui fait que les deniers publics canadiens ne servent pas à promouvoir l'intérêt public canadien. En fait, c'est ce que nous sommes venus discuter, ou tout au moins, c'est une partie importante de ce qui nous intéresse. Nous tentons de souligner l'engagement de CBC à agir à assumer la responsabilité de la souveraineté culturelle, mais il est très clair, comme toutes nos données statistiques et toute la recherche le révèlent, que les télédiffuseurs privés s'intéressent de moins en moins au contenu canadien et se déchargent de cette responsabilité.
Je pense que, dans une large mesure, on prend tout ça pour acquis. Le monde est de plus en plus complexe et je pense que le vaste choix offert justifie dans, une certaine mesure, le manque d'intervention. C'est un dérapage et les créateurs, écrivains et d'autres Canadiens qui produisent cette souveraineté culturelle dont on parle, travaillent d'arrache-pied pour se faire entendre et pour avoir une part des crédits disponibles.
Ian, veux-tu répondre à la deuxième question?
M. Ian Morrison: J'aimerais reprendre un point que vous avez soulevé. Notre analyse du Fonds canadien de télévision est la suivante: c'est l'argent des Canadiens, des contribuables et des abonnés au service de télévision par câble qui est utilisé pour financer la production télévisuelle. Au début, on a siphonné 100 millions de dollars de CBC pour le verser dans le Fonds. Le Conseil du Trésor a tout simplement transféré les crédits de CBC au Fonds canadien de télévision, il y a cinq ans. Nous voulons savoir comment on dépense ces crédits, mais le conseil que nous donnons, à la suite de notre enquête, et que nous avons donné au ministère du Patrimoine quand il nous a demandé notre conseil au sujet de ce fonds, c'est qu'il faudrait le supprimer. Nous avons un meilleur mécanisme que le Fonds canadien de télévision, c'est- à-dire Téléfilm Canada, qui comparaîtra devant vous plus tard.
Si on avait de l'argent à jeter par les fenêtres, on pourrait en verser au Fonds canadien de télévision. Cela serait un mécanisme très efficace pour distribuer les crédits à tout le secteur de production. Mais étant donné que ce n'est pas le cas, le problème avec le Fonds canadien de télévision est qu'il n'y a pas de lien entre les téléspectateurs et les crédits. Vous devriez poser cette question aux représentants du Fonds canadien de télévision quand ils comparaîtront devant ce comité. Il faudrait leur demander quels Canadiens regarderont telle ou telle émission dans trois ans, une fois que ces émissions ont été approuvées? Ils vont vous dire qu'ils ne savent pas. À notre avis le problème est qu'il y a un conseil où le sous-ministre du Patrimoine représente les Canadiens tandis que tous les autres membres du conseil représentent les producteurs, les câblodistributeurs et les télédiffuseurs. Donc, on ne les encourage pas à étudier l'intérêt des téléspectateurs.
Mais Téléfilm Canada est une institution—et je ne dis pas que c'est un organisme parfait—qui est en mesure de décider là où il vaut mieux dépenser les crédits pour atteindre les objectifs de la politique publique. Donc, dans un contexte où nous n'avons pas d'argent à jeter par les fenêtres, nous pensons qu'il faudrait utiliser la meilleure institution qui existe déjà, c'est-à-dire Téléfilm Canada. Il faudrait fournir un financement suffisant à cet organisme.
M. Jim Garrard: Dans notre secteur, il n'y a pas de mécanisme pour que les émissions soient télédiffusées. Téléfilm Canada est peut-être semblable au Conseil des arts du Canada et pourrait donc faciliter la transition. Si ce n'est pas le cas, nous pourrions peut-être nous servir du principe de l'examen par les pairs. Ce principe a très bien marché pour le Conseil des arts. Nous pourrions l'appliquer dans le cadre du Fonds, et je pense que nous n'aurions pas grand chose à débourser, peut-être même rien du tout, pour télédiffuser certains de ces programmes en direct.
Le président: Monsieur McNally.
M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, PC/RD): Merci, monsieur le président.
J'aimerais juste signaler à M. Bonwick que l'opposition ne voit jamais les formulaires où il faut inscrire des noms de personnes qu'on aimerait voir nommées au CRTC, au CISR ou aux cours d'appel des anciens combattants. Je voulais juste vous signaler la réalité.
• 1010
J'aimerais vous remercier de votre exposé et de tout le
travail que vous avez fait au sujet de cette question. Vous avez
dit que vous comparaissez devant nous grâce à l'appui financier
des Canadiens qui soutiennent votre cause. C'est très
encourageant. Très souvent, les gens qui comparaissent devant
nous sont financés par le gouvernement ou par un autre groupe de
pression quelconque. Cependant, vous comparaissez ici devant nous
parce que vous croyez à votre cause. Je vous en félicite pour ce
que vous faites.
Monsieur Garrard, j'aime bien l'idée que vous proposez de télédiffuser les pièces et les spectacles en direct. Je pense qu'il y a peut-être un marché pour ce genre d'émissions. C'est une idée qu'il sera difficile de pousser plus loin, mais il vaudrait la peine d'étudier la question.
J'aimerais discuter de certaines observations que je relève dans le mémoire de Friends of Canadian Broadcasting. Votre organisme s'en prend au gouvernement libéral quand il dit qu'on ne devrait pas permettre aux télédiffuseurs de faire des contributions aux partis politiques. Pourriez-vous expliquer votre recommandation? Pourriez-vous nous dire pourquoi nous devrions étudier cette question?
M. Ian Morrison: Nous avons suivi les contributions politiques versées par les télédiffuseurs selon la définition juridique. Cette définition comprend tous ceux qui détiennent des permis, donc, les câblodistributeurs. Nous avons commencé à mener des recherches au milieu des années 90. Cette recherche a continué pendant les périodes d'émission de brefs électoraux, et nous avons constaté que quelques grands télédiffuseurs privés... Je crois qu'on y fait référence dans le mémoire, mais je vais quand même les nommer. BCE, Rodgers et CanWest Global sont les plus grands contributeurs de fonds pour les partis politiques, par rapport à leur taille. Les banques ont un chiffre d'affaires, et une capitalisation boursière plus grande que CanWest, par exemple mais chacun de ces câblodistributeurs verse des sommes considérables aux partis politiques. Ces entreprises profitent, dans un secteur réglementé, des décisions prises par ce Parlement. Donc, pendant la dernière campagne électorale, nous avons publié ces données. Ces données se trouvent sur notre site Web. Je pense que les adresses Internet de notre site paraissent dans les notes de bas de page de ce mémoire. Allez y faire un tour si vous voulez vérifier nos renseignements.
Nous avons publié un énoncé de politique qui disait que le «Parlement devrait tout simplement refuser les contributions des médias». Nous avons fait cet énoncé politique parce que nous nous préoccupions de l'influence que les médias pourraient exercer, particulièrement sur le parti au pouvoir. Cette influence est excessive et malsaine. Les médias ne devraient pas essayer d'influencer le contexte dans lequel on prend des décisions. Ça serait aider leurs actionnaires. Les fonctionnaires ne devraient pas approuver une situation où l'on verse beaucoup de contributions aux partis politiques. Pour vous donner un exemple concret, nous n'avons pas seulement suivi les contributions aux partis politiques, mais aussi les contributions aux candidats, qui lors de l'émission du bref électoral, étaient des ministres. Nous avons constaté, dans le cas de CanWest, que pratiquement chaque ministre dans le conseil des ministres libéral au début de 1997 a reçu une contribution de CanWest Global d'au moins 10 000 $.
Nous n'aimons pas du tout cette situation. Les Canadiens n'aiment pas cela non plus. Nous avons sondé les Canadiens nous avons constaté qu'à peu près 80 p. 100 d'entre eux pensent que les contributions des médias aux partis politiques ne devraient pas exister. Supprimer cette pratique dissiperait la perception qu'ont les Canadiens que les journalistes sont en quelque sorte de mèche avec les gens qui sont le sujet des nouvelles.
M. Grant McNally: D'accord.
Ma dernière question porte—et vous y avez fait allusion dans votre réponse à la question de Mme Lill—sur le Fonds canadien de télévision. Plus tôt cette semaine, un témoin nous a expliqué que ce fonds profitait aux émissions canadiennes. Cependant, vous préconisez son élimination et le transfert des responsabilités à Téléfilm Canada. Pourriez-vous étoffer cette idée, parce qu'il me semble que c'est le contraire de ce que nous avons entendu il y a quelques jours?
M. Ian Morrison: Nous ne disons pas du tout que les crédits devraient être versés reversés dans le Trésor ou que Shaw devrait rembourser ses abonnés, à raison de 10c. par mois. Nous voulons que ces crédits soient versés à une institution qui est capable de s'en servir de façon stratégique. Le Fonds canadien de télévision est axé sur la demande. Il y a des règles et des critères bien définis. Vous allez en parler plus tard aujourd'hui. Je parle bien sûr des règles CAVCO etc. Mais à part ça, on fait très peu d'évaluations pour voir comment on peut dépenser les crédits de façon plus efficace. Nous disons qu'il faut étudier la cote d'écoute des émissions canadiennes. Nous nous préoccupons du fait qu'on ne se sert pas de Téléfilm Canada pour bien cibler les crédits. Si l'objectif est d'assurer un secteur de production d'émission en plein essor, c'est une réussite. Mais si l'objectif est d'augmenter la cote d'écoute pour les émissions télévisées canadiennes, c'est plutôt un échec.
Cela vous éclaire-t-il?
M. Grant McNally: Oui, je vous remercie.
Le président: Pour le second tour, trois personnes m'ont demandé de poser rapidement quelques questions, après quoi je pense que nous allons devoir terminer. M. Mills, M. Sauvageau et M. Cuzner.
M. Dennis Mills: Merci beaucoup, monsieur le président.
Comme vous le savez, monsieur Morrison, je me félicite de ce qu'a fait le groupe Friends of Canadian Broadcasting au fil des ans, surtout en ce qui concerne les émissions réalisées localement, mais je dois néanmoins vous dire mon désaccord avec vous à un ou deux égards.
Tout d'abord, il y a toute la question des contributions. Je comprends fort bien que la question des contributions politiques données aux ministres est extrêmement délicate, étant donné qu'elle suscite effectivement des préoccupations, mais en même temps il faudrait, selon moi, encourager ces sociétés à participer de plus près au processus politique, c'est-à-dire au niveau de tous les députés et non pas simplement d'une poignée d'entre eux. En d'autres termes, je ne pense pas qu'il faille essayer de les décourager de prendre part au processus politique. Ce qui m'inquiéterait beaucoup plus, c'est ce que ces organismes dépensent ici à Ottawa pour payer des lobbyistes.
Pour revenir maintenant à toute la question du Fonds canadien de télévision, je ne suis pas d'accord avec vous lorsque vous dites qu'il faut fermer les portes de cet organisme. Dans ma localité, il y a des milliers de gens qui travaillent dans l'industrie de la télévision, et j'ai pu constater que l'esprit d'entreprise, la créativité et l'énergie qu'on trouve dans ce milieu, avec tous ces gens qui ont ainsi l'occasion de concrétiser leur créativité et leurs talents, est un fondement extrêmement important pour le développement de toute l'industrie cinématographique au Canada.
Depuis de nombreuses années, je défends les budgets dont Radio-Canada a besoin. Si nous prenons le cas de la Société Radio-Canada, ce n'est pas simplement un pôle de contenu canadien et un hommage à nos valeurs culturelles, cette société a également été un merveilleux terrain de formation pour tous ceux et celles qui sont allés travailler pour CTV, Global et bien d'autres encore. À mon avis, l'une des plus belles réalisations de Radio-Canada a précisément été d'avoir été ce centre de formation pour des milliers d'hommes et de femmes, pas seulement à la télévision, mais également à la radio. Je suis donc enclin à me rallier pour l'essentiel à ce que vous faites, mais je pense que le fait qu'il existe des systèmes de production extérieurs qui marchent bien produisent une tension et une concurrence à la fois saine et créatrice, et je ne suis pas d'accord avec vous lorsque vous dites que tout devrait se faire sous la houlette de Radio-Canada.
M. Ian Morrison: Je pense que nous avons ici un petit malentendu, dont nous sommes peut-être tous les deux coupables, et je voudrais donc préciser une chose.
Tout d'abord, à ma connaissance il n'existe aucune circonscription électorale qui compte davantage de gens dans le système audiovisuel que la vôtre, monsieur Mills, si ce n'est peut-être celle de Mme Bulte. On y trouve une très forte concentration de spécialistes, de sorte que je comprends fort bien que ce sujet vous tienne à coeur et, d'ailleurs, c'est ce que nous constatons nous aussi lorsque nous comptons le nombre de gens qui nous appuient dans les diverses circonscriptions fédérales, celles-là précisément qui tendent à compter un grand nombre de gens qui se préoccupent de notre sort, plusieurs centaines en fait, mais je crois que vous le savez déjà.
J'aimerais donc bien préciser, pour commencer, qu'à notre avis, il faut injecter davantage d'argent dans le système audiovisuel parce que nous pensons que les Canadiens veulent davantage de choix canadiens dans ce système. Ce que nous disons dans notre mémoire, c'est que s'il n'y a pas assez d'argent pour financer des productions télévisuelles, les fonds disponibles devraient aller surtout à Téléfilm, plutôt qu'à Radio-Canada, puisque cet organisme est le mieux outillé pour le distribuer intelligemment, si tant est que l'objectif—cet objectif que nous jugeons primordial—consiste à agrandir l'auditoire canadien des productions canadiennes. Il s'agit donc plutôt d'une question d'efficacité du Fonds canadien de télévision, sous sa forme actuelle, comparée à celle de Téléfilm Canada. Voilà donc l'argument politique que nous vous faisons valoir, et si je vous ai bien entendu, vous pensiez que nous préconisions plutôt de prendre de l'argent dans ce fonds pour le donner à Radio-Canada, mais ce n'est pas notre suggestion.
M. Dennis Mills: Merci.
Le président: Monsieur Sauvageau, puis monsieur Cuzner, ensuite nous allons terminer.
[Français]
M. Benoît Sauvageau: D'abord, pour rassurer M. Mills, je peux vous garantir qu'aucun des candidats du Bloc n'a reçu 1 000 $ dans son comté. N'ayez crainte, on s'en serait rendu compte. C'est la première chose.
Deuxièmement, monsieur Bonwick, ma question portera sur le processus de nomination. Je vous dirai que je suis toujours surpris que vous vous inquiétiez lorsqu'on fait allusion à la compétence comme critère d'embauche. Vous semblez davantage tenir compte de l'allégeance. Je suis convaincu qu'il doit y avoir des libéraux compétents. Ne vous inquiétez pas.
Des voix: Ah, ah!
M. Benoît Sauvageau: Il n'y en a peut-être pas une multitude, mais il doit y en avoir quelques-uns.
Si je vous ai bien suivi et écouté, monsieur Morrison, vous avez parlé d'un processus de nomination qui devrait ressembler davantage à celui de la Grande-Bretagne qu'à celui que nous avons ici aujourd'hui. Vous voyez que je suis attentif malgré tout.
Pourriez-vous nous expliquer davantage ce que c'est? Sinon, pourriez-vous nous envoyer de l'information pour qu'on puisse alimenter un peu notre rapport sur ce type de nomination qui se fait en Grande-Bretagne?
[Traduction]
M. Ian Morrison: Comme je ne tiens pas à ce que mes propos se perdent dans des généralités, je vais plutôt axer mon intervention sur le conseil d'administration de la Société Radio- Canada. Cela vous va? Nous pourrions également parler de la façon dont les gens son nommés au conseil de Téléfilm Canada, par les deux processus de nomination au CRTC ou encore de la structure FCT, mais parlons plutôt du conseil et de la présidence de la Société Radio-Canada.
Pour l'instant, et malgré ce qu'a dit mon collègue et ami, c'est un processus en vase clos. Il est évident que les membres du caucus libéral sont invités à offrir leurs bons conseils et il ne fait aucun doute non plus que, dans la salle du dessus, ces bons conseils sont, comme on dit, «dûment pris en considération», mais prenons les résultats que nous connaissons. Et d'ailleurs, pour décocher une flèche en passant à un autre parti politique, un parti auquel vous étiez encore dernièrement affilié, il y a 12 ans, le conseil d'administration de Radio-Canada avait été à un moment donné composé entièrement de gens affiliés au Parti progressiste-conservateur. Ce n'est pas le cas aujourd'hui. Le conseil d'administration de la Société Radio-Canada, d'après ce que nous avons pu découvrir, est entièrement affilié au Parti libéral du Canada. Cela n'est pas dans l'intérêt public, pour plusieurs raisons. En premier lieu, nous voulons que l'organisme national de radiodiffusion soit indépendant du gouvernement et, si les amis du parti au pouvoir sont seuls à figurer au conseil d'administration, c'est à la direction qu'il revient de défendre les journalistes et les créateurs en cas d'ingérence politique.
Je voudrais simplement vous signaler que cette réflexion n'a pas été concoctée par le groupe Friends of Canadian Broadcasting. Je voudrais vous citer une recommandation formulée par Pierre Juneau, Peter Herrndorf et la professeure Catherine Murray qui faisaient partie en 1996 du comité chargé d'examiner le mandat de la Société Radio-Canada, un comité qui a prodigué d'excellents conseils au sujet d'une réforme du processus de nomination. Voici ce que ces trois personnes avaient à dire au sujet de Radio- Canada:
-
Enfin, nous croyons qu'il pourrait être certainement avantageux
d'avoir au conseil des membres ayant de solides antécédents
politiques. Par contre, nous voudrions souligner qu'il serait
préférable, pour l'intégrité du conseil et l'indépendance de la
Société, que les administrateurs ayant des allégeances politiques
notoires représentent tout le spectre politique et pas simplement
le parti au pouvoir. Nous constatons que c'est le modèle qui a
été retenu par plusieurs gouvernements britanniques successifs et
qui, à notre avis, a contribué à préserver l'indépendance et le
prestige de la BBC.
Le président: Monsieur Morrison, si vous avez de la documentation sur le système britannique, et je constate que vous avez également parlé du système sud-africain et d'un autre encore, ce serait utile pour les membres du comité que vous la fassiez parvenir au greffier.
M. Ian Morrison: Monsieur le président, je voudrais simplement ajouter que, dans notre mémoire, nous disons également qu'on pourrait élargir la participation au processus de sélection sous l'égide du Conseil privé. Personne ne veut limiter les moyens du caucus libéral, mais la participation pourrait effectivement être élargie aux compagnons et aux officiers de l'Ordre du Canada, ce qui permettrait de faire en sorte que ce soient les meilleurs et les plus brillants qui dirigent, dans l'intérêt national, ces institutions culturelles qui représentent des milliards de dollars.
Le président: Monsieur Cuzner.
M. Rodger Cuzner (Bras d'Or—Cape Breton, Lib.): Je vous remercie, monsieur le président.
Je dirais que la réalité actuelle est que les entreprises, les compagnies, les organismes sans but lucratif et toutes ces autres agences se sont trouvées contraintes de travailler plus efficacement et de façon plus rentable. Il est certain que la technologie nous a donné davantage le moyen de le faire, et cela vaut également pour la télévision et la présentation des services télévisuels.
Je vais vous donner un exemple. Si Jim Abbott veut annoncer qu'il se porte candidat à la direction de l'Alliance canadienne et s'il veut en faire l'annonce à Prince Rupert, tous les services de presse qui n'ont sans doute pas les moyens d'avoir quelqu'un sur place pour faire le reportage; ce serait probablement un service travaillant à la fois pour un journal et pour la télévision qui pourrait justifier d'envoyer quelqu'un sur place ou qui aurait les moyens de le faire. Si des chaînes de télévision étaient associées à des services de presse, quelles seraient les responsabilités ou, pour présenter les choses autrement, quels seraient les risques d'abus?
Mme Noreen Golfman: Nous sommes d'avis que si les systèmes de communication sont la propriété d'une poignée de personnes, on diminue les possibilités d'avoir une diversité d'informations et d'opinions. Dans un pays démocratique comme le nôtre, ce n'est que logique d'encourager autant d'accès que possible à une multiplicité de points de vue. Donc s'il y a de moins en moins de gens qui contrôlent les systèmes de communication, les médias, il va de soi que l'information elle-même sera diminuée. Notre pays a toujours été bien servi lorsqu'un plus grand nombre de gens ont travaillé à produire les nouvelles et les émissions d'actualité, et il existe un lien entre la concentration de la propriété et la nature des nouvelles elle-même.
M. Ian Morrison: De plus, la Loi sur la radiodiffusion, qui annonce la politique de radiodiffusion du pays, prévoit:
-
dans la mesure du possible, offrir au public l'occasion de
prendre connaissance d'opinions divergentes sur des sujets qui
l'intéressent
Donc le Parlement s'est déjà prononcé à cet égard.
M. Rodger Cuzner: Peut-être que si l'on peut diminuer les coûts de la publicité ou offrir d'autres possibilités de programmation... Je pense que le point de vue de M. Garrard est très noble et que les Canadiens voudraient avoir davantage d'émissions de ce genre. Si on y affectait davantage de ressources, en rationalisant ailleurs, vous estimez que ce ne serait pas une entreprise valable?
M. Ian Morrison: Il serait intéressant d'entendre ce que pensent les publicitaires de l'idée selon laquelle la réduction des coûts de production dans le secteur privé—et même, je suppose, à la télévision de CBC Radio-Canada, qui est un très important radiodiffuseur parce qu'il cherche de la publicité—vise à faire baisser les coûts de la publicité. En fait, ce sont surtout les actionnaires qui ont tendance à bénéficier de ces économies.
• 1030
Je pense que les titulaires de licences, les radiodiffuseurs
privés, ont été bien protégés par le Parlement. D'abord, Ted
Turner ne peut pas installer une antenne près d'Ottawa et
commencer à faire de la radiodiffusion; il y a des limites
concernant la propriété. Deuxièmement, il y a la substitution de
signaux identiques, ce qui augmente énormément le nombre de
téléspectateurs pour les émissions américaines qui viennent ici.
Il y a des règles fiscales qui empêchent le radiodiffuseur de
déduire les coûts de la publicité provenant d'un canal à Sault
Ste. Marie Michigan, s'il y a un publicitaire canadien qui veut
faire cela. Il existe beaucoup de protections de ce genre, et il
s'agit d'une industrie réglementée.
Il est très important que le Conseil, comme il est prévu dans la Loi sur la radiodiffusion, exige des comptes à ces personnes qui ont reçu ces avantages. Il faut qu'elles donnent quelque chose au pays en retour. Certains radiodiffuseurs donnent plus que d'autres. La nouvelle politique sur la télévision aura peut-être un effet salutaire en ce sens, mais je vous rappelle quand même deux incidents récents—l'affaire du WTN et le comportement déplorable de Bell dans le nord de l'Ontario le mois dernier. Il est important que les radiodiffuseurs privés soient tenus de rendre des comptes de ce qu'ils font en contrepartie de tous les avantages qu'ils reçoivent.
Le président: Mme Hinton a demandé la parole pour poser une brève question. Ensuite, nous allons terminer cette partie de la réunion.
Mme Betty Hinton (Kamloops, Thompson and Highland Valleys, Alliance canadienne): Il s'agit d'un commentaire plutôt que d'une question. C'est la première fois que je rencontre ces témoins, et je voulais tout simplement dire à M. Morrison qui traduit mon point de vue très bien et qu'il s'exprime beaucoup mieux que je n'aurais pu le faire.
Le président: Vous êtes trop modeste.
Mme Betty Hinton: Non, je ne le pense pas. Vous n'avez pas oublié ma dernière remarque, n'est-ce pas?
Je partage votre préoccupation, toutefois, et mon collègue a demandé ce que les gens craignent si cela se produit. Ce que l'on craint face à la situation actuelle, c'est que tout cela devienne une machine à propagande, si on laisse aller les choses, et dans certains cas, ce n'est plus du reportage mais plutôt de la création littéraire. Lorsqu'il y a des points de vue divergents, comme le prévoit la loi, il existe des protections, comme vous nous l'avez expliqué de façon très éloquente aujourd'hui. Je partage d'ailleurs votre préoccupation à ce sujet.
Monsieur Garrard, je voudrais réfléchir un peu plus à ce que vous avez dit aujourd'hui, parce que vous essayez d'offrir de la culture canadienne et de promouvoir les artistes canadiens, objectif que j'appuie avec enthousiasme, mais j'examine la liste des canaux et je me demande s'il n'y a pas déjà un canal où l'on pourrait intégrer ce que vous proposez, peut-être Bravo ou un autre. Existe-t-il déjà un canal qui pourrait vous permettre de réaliser ce que vous cherchez à faire?
M. Jim Garrard: Je pense que les canaux de distribution sont probablement suffisamment nombreux, mais ils ne diffusent pas en direct les événements qui sont disponibles, pas autant que nous le voudrions. Dans le domaine de la R-D en radiodiffusion, c'est- à-dire les arts de la scène, il ne se fait pas suffisamment de R-D de qualité. Je pense que les débouchés sont là, mais c'est le contenu qui manque.
Mme Betty Hinton: Nous avons énormément d'artistes de talent au Canada. J'adore aller au théâtre et j'y vais le plus souvent possible. Ce qui me préoccupe toujours, c'est que nous permettons à ces gens-là d'atteindre un certain niveau, nous les appuyons, ils deviennent très bons dans leur domaine, et puis nous les perdons parce qu'ils s'en vont ailleurs, habituellement aux États-Unis. J'aimerais trouver un moyen d'enrayer cela, tout comme j'aimerais trouver un moyen d'enrayer les pertes dans les autres catégories de professionnels au Canada, des gens que nous formons à même les deniers publics et que nous perdons ensuite au profit des États-Unis. J'aimerais avoir davantage d'information là-dessus. Je vais faire mes recherches et lire tout ce que vous me ferez parvenir.
Le président: C'est une excellente façon de conclure l'audition de ce groupe de témoins, madame Hinton, sur cette intervention éloquente. Merci beaucoup d'être venus témoigner. Je pense que la rencontre a été très instructive et nous vous remercions de votre participation. Merci.
Le président: Pour la deuxième partie de notre audience, nous souhaitons la bienvenue à M. Jacques Bensimon, commissaire du gouvernement à la cinématographie et président de l'Office national du film, et à Mme Laurie Jones,
[Traduction]
directeur des communications.
[Français]
nous accueillons M. François Macerola, président du conseil d'administration, et Mme Johanne St-Arnauld, la directrice exécutive intérimaire. Nous recevons aussi, de CAVCO, le Bureau de certification des produits audiovisuels canadiens,
[Traduction]
Bureau de certification des produits audiovisuels canadiens, le directeur, M. Robert Soucy,
[Français]
et, du CRTC, M. Jean-Pierre Blais, directeur exécutif à la radiodiffusion,
[Traduction]
M. John Traversy, directeur de l'analyse économique et de la recherche, et M. Nick Ketchum, directeur des politiques de la radio et de la télévision en langue anglaise.
Nous allons commencer par l'Office national du film. Je vous demanderais de vous limiter à 10 minutes, pour nous donner le temps de poser des questions.
Monsieur Bensimon.
[Français]
M. Jacques Bensimon (commissaire du gouvernement à la cinématographie et président de l'Office national du film): Monsieur le président, je vous remercie. Avant tout, je tiens à vous remercier, ainsi que le comité, de donner à l'Office national du film l'occasion de présenter son point de vue sur l'important travail de réexamen de la Loi sur la radiodiffusion de 1991 que vous avez entrepris.
[Traduction]
Le contenu canadien occupe une place capitale dans le système de radiodiffusion et l'ONF, qui joue le rôle d'yeux du Canada depuis 1939, est intéressée au premier chef à la place qui lui sera accordée dans la nouvelle Loi sur la radiodiffusion. Si vous me permettez une métaphore, cette Loi doit devenir l'inspirante partition musicale des règles du contenu canadien au pays. L'ONF a beaucoup à dire sur le sujet. Nos recherches les plus récentes démontrent que les Canadiens connaissent et respectent notre importante contribution à la culture canadienne. Mais l'ONF est à la croisée des chemins, il doit se renouveler et doit le faire à l'intérieur d'une politique culturelle qui privilégie d'abord et avant tout la narration d'histoires canadiennes.
Je suis le premier commissaire de l'ONF à être à la fois un ancien cinéaste de l'Office et un ancien radiodiffuseur et, à ce double titre, je comprends les impératifs de la programmation télévisuelle. Je suis revenu à l'ONF en juin dernier pour en réorienter les activités, afin qu'il donne à une nouvelle génération les chances que j'ai eues en tant que cinéaste. Nous voulons que l'ONF de demain serve de mentor aux jeunes cinéastes en y impliquant des maîtres de cet art. Nous nous proposons d'offrir un écran à des façons différentes de raconter des histoires et nous voulons que ces histoires reflètent la merveilleuse mosaïque culturelle qu'est le Canada. Nous voulons aussi bâtir de nouveaux ponts entre nous et les Canadiens, que ce soit par le biais de nos médiathèques, au moyen d'Internet et des nouveaux médias, de projections publiques ou de la télévision.
[Français]
Alors, que doit comporter une nouvelle loi sur la radiodiffusion? La ministre Copps souhaite que vous lui présentiez des recommandations sur les moyens susceptibles d'accroître la viabilité économique d'histoires canadiennes de grande qualité et sur les façons de donner à ces récits les plus grands auditoires possibles. Je vais donc parler d'abord d'une création accrue de contenus canadiens intéressants et de celle d'un espace public dédié sur les ondes.
Les grands succès de la télévision canadienne n'ont jamais été l'oeuvre d'un soliste mais bien d'un ensemble. Pensons à The Boys of St. Vincent, Les garçons de Saint-Vincent, un triomphe au pays et à l'étranger qui a réuni des talents de l'ONF, de la Société Radio-Canada, de CBC et du secteur privé. Pensons aussi à Bacon, le film, un film de l'ONF qui porte un regard très controversé sur l'industrie des mégaporcheries au Québec, qui a été récemment diffusé à Télé-Québec.
Ces titres montrent bien ce que le secteur public peut offrir aux Canadiens. Mais il en faut plus et il faut que nos auditoires reconnaissent ce que le secteur public contribue à la télédiffusion et à la radiodiffusion dans ce pays.
[Traduction]
Par exemple, les Canadiens en général ne se rendent pas compte que, lorsque les canaux spécialisés ont envahi les ondes dans les années 80, ils appartenaient pour la plupart à des entreprises privées mais étaient largement subventionnés par les fonds publics. C'est que bon nombre de ces canaux ont pris l'antenne en programmant des heures et des heures de productions tirées du catalogue de 10 000 titres de l'ONF. Si à cette époque l'ONF avait signé des partenariats avec quelques-uns de ces canaux spécialisés au lieu de se contenter de vendre son catalogue au poids, notre situation financière et nos possibilités de radiodiffusion seraient complètement différentes aujourd'hui.
Quoi qu'il en soit, l'ONF utilise aujourd'hui de nouveaux moyens pour s'assurer que ses productions sont régulièrement vues à la télévision et qu'elles sont reconnues comme telles. Tout en restant un fournisseur des télédiffuseurs, nous sommes également partenaires de nouveaux services tels que le Documentary Channel. Cette entente nous donne deux créneaux réguliers au moins par semaine sur les ondes de cette chaîne. Mais il s'agit d'un service unilingue anglophone et le Canada a besoin d'un service équivalent en français.
L'ONF a été créé avec une volonté claire, non seulement d'être le chroniqueur du pays, mais aussi de diffuser nos histoires partout à travers le Canada. John Grierson a mis en place les bases d'un réseau par l'entremise de ce qu'on appelait les projectionnistes itinérants et depuis, nous n'avons cessé de chercher des façons de faire voir nos films à nos concitoyens. Une loi sur la radiodiffusion revue et repensée de façon créative, pluraliste et reflétant les priorités du pays doit aller au-delà des limites du cadre habituel et reconnaître le rôle toujours en évolution de l'ONF, non seulement comme acteur clé dans la partie publique du système de radiodiffusion, mais aussi comme diffuseur en ligne, grâce à NFBTV.ca. Et même au-delà de tout cela, la loi, dans sa vision et sa sagesse, devrait encourager l'ONF à joindre les rangs des détenteurs de licences pour renforcer le rôle de la présence publique.
[Traduction]
Dans un contexte marqué par l'explosion du nombre des canaux spécialisés, la prochaine Loi sur la radiodiffusion doit également réaffirmer la présence importante et le poids relatif de la SRC/CBC en tant que source de débat national, de célébration et de cohésion sociale. Utilisant sa nouvelle Loi comme partition, le gouvernement doit protéger la Société Radio- Canada/CBC et les autres institutions culturelles publiques reconnues comme l'ONF. Enfin une nouvelle Loi peut augmenter la visibilité des productions canadiennes en leur assurant une place à la télévision—avec un nouveau système qui évaluera la création et non pas uniquement la citoyenneté des créateurs. L'ONF peut également faire sa part: ses productions devraient bénéficier d'une présence régulière à l'antenne de CBC/Radio-Canada.
[Français]
Voilà qui m'amène à la question d'être Canadien dans un marché fragmenté. Comment les programmateurs peuvent-ils continuer à alimenter de plus en plus de canaux tout en évitant de créer des produits bas de gamme? La plupart des nouveaux canaux spécialisés analogues ont atteint très rapidement le seuil de rentabilité. Ils ont ajouté du volume au contenu canadien, mais, c'était à prévoir, l'investissement dans les productions canadiennes a plafonné. Cependant, de nouvelles sources de financement pour la production d'histoires canadiennes de grande qualité pourraient être identifiées parmi d'autres partenaires, et entre autres les coproductions internationales.
Il nous faut aussi une plus grande variété d'émissions. Les horaires de radiodiffusion d'aujourd'hui sont plus limités que ce que Caplan et Sauvageau recherchaient lorsque leur groupe de travail avait rédigé son rapport en 1986. Un récent sondage effectué à la demande de l'ONF révèle que les Canadiens désirent voir une plus grande présence canadienne à l'écran, en particulier un plus grand nombre de documentaires—et la présentation de M. Stursberg, il y a deux jours, reflétait exactement ce point—sur une variété de sujets.
Plus encore, à l'heure où la mondialisation nous fait tous vivre dans le même univers, nous devons viser à dépasser les frontières canadiennes et à être présents partout sur la planète. De la même façon que nous devons nous ouvrir davantage aux partenaires internationaux, nous devons aussi nous montrer plus dynamiques sur le front international en mettant en place un réseau pour la radiodiffusion de notre programmation. Tout comme les chaînes américaines Discovery, A&E et d'autres réseaux, le Canada doit rendre ses émissions accessibles au reste du monde par l'entremise de canaux de radiodiffusion dont il détiendrait le contrôle.
[Traduction]
Donc, l'auditoire veut de nouveaux rythmes dans la programmation et pour y arriver nous devons fournir les partenariats—avec des canaux existants, des coproducteurs, des cinéastes de la relève. Un excellent moyen d'élargir la programmation serait de mieux refléter la diversité culturelle du pays. Si nous réussissions à mieux représenter les Canadiens, peut-être seraient-ils plus nombreux à nous regarder! Grâce au CRTC, le réseau APTN est offert sur le service de base du câble, mais des demandes pour des stations multilingues ont été refusées. Si vous êtes francophone et que vous habitez à l'extérieur du Québec, vos choix sont minimes. Lorsqu'ils ont de la chance, les francophones hors Québec peuvent capter TVA, RDI, TV5 et TFO en Ontario et au Nouveau-Brunswick. Mais c'est très peu si l'on compare ces choix à ceux qui sont offerts aux téléspectateurs de langue anglaise.
• 1050
Un contenu canadien de grande qualité dans un large éventail
de genres, la diversité des reflets culturels et plus de choix en
français—tous ces éléments doivent être intégrés dans une
nouvelle Loi qui respecte la nécessité d'un espace public. Cet
espace doit faire partie du forfait de base offert aux abonnés
par les fournisseurs du service de câble et de canaux numériques.
Si nous ne réservons pas un tel espace, l'intérêt du public va
s'éteindre. Il est vrai que les industries culturelles sont
exclues de la Loi sur le libre-échange nord-américain. Mais la
Loi sur la radiodiffusion de 1991 doit également être redéfinie
pour favoriser clairement des objectifs culturels plutôt que les
politiques industrielles. Par exemple, en 1991 la Loi indiquait
clairement que la SRC/CBC était un élément clé d'un amalgame
public-privé. Pourtant, à peine quelques années plus tard, le
gouvernement initiait une vague de réductions budgétaires
dévastatrices pour la SRC/CBC et l'ONF. En 1999, le CRTC refusait
à son tour d'accorder une licence pour un canal spécialisé sur
les arts en français à la Société d'État. La même année, la
nouvelle politique du CRTC sur la télévision a éliminé les
exigences minimales de dépenses relatives au contenu canadien.
[Français]
Cela étant dit, comment le contenu canadien peut-il se démarquer dans la prolifération des canaux? Je suis convaincu que si les Canadiens pouvaient avoir accès à des canaux authentiquement canadiens, dont la programmation serait canadienne à au moins 85 p. 100, nos productions pourraient aussi devenir une programmation de rendez-vous. Mais la question qui se pose est alors la suivante: pouvons-nous réglementer une programmation culturelle à valeur ajoutée? Certainement en partie, répondrai-je.
Au-delà de la production du contenu, nous devons également penser à la distribution. Le secteur privé souhaite que notre loi permette une plus grande propriété étrangère, et cette pression atteint un crescendo avec la convergence des entreprises médiatiques. Une plus grande participation étrangère est envisageable, mais commençons par renforcer le contenu. Ce serait une honte si un jour le contenu canadien était aussi mal représenté à la télévision qu'il l'est dans nos salles de cinéma.
Je termine, monsieur le président.
[Traduction]
Ce n'est pas le moment de se reposer sur la réglementation en matière de contenu. Nous devons renforcer les radiodiffuseurs et les producteurs du secteur public pour préserver les voix culturelles, la diversité des visages à l'écran et une sélection saine de propriétaires. Les ondes appartiennent à tous les Canadiens. La nouvelle Loi doit refléter notre volonté, nous avons bien le droit de choisir. Faisons-nous entendre haut et fort. Fortissimo. Fabriqué au Canada.
[Français]
Merci.
Le président: Merci beaucoup.
Je voudrais maintenant demander à M. Macerola et à Mme St-Arnauld de faire leur présentation.
M. François Macerola (président du conseil d'administration, Téléfilm Canada): Bonjour. J'aimerais remercier le président et les membres du comité qui nous ont conviés à venir vous rencontrer et à vous adresser la parole ce matin. Mon nom est François Macerola. Je suis le président du conseil d'administration de Téléfilm Canada, après avoir eu le plaisir d'être le directeur général de cet organisme durant six ans. Je suis accompagné de Mme Johanne St-Arnauld, qui est la directrice générale intérimaire de Téléfilm Canada.
Je vais essayer d'être bref. Tout simplement, j'aimerais vous dire que Téléfilm Canada oeuvre dans le secteur du contenu canadien depuis près de 30 ans, dont 20 ans dans le domaine de la télévision. Nous sommes ici aujourd'hui pour partager avec vous l'expérience que nous avons acquise au fil des ans.
Plusieurs expressions ont été utilisées pour décrire le contenu canadien: distinctement canadien, visiblement canadien, contenu canadien de grande qualité, véritablement canadien et, plus récemment, le nouveau buzz word «canadien plus». Mais tout cela cache une volonté des organismes publics et de l'industrie de la radiodiffusion et de la production d'offrir aux citoyens d'ici des produits de très grande qualité dans lesquels ils pourront se reconnaître. Par conséquent, il y a plusieurs mots, mais une seule idée, une seule philosophie: la qualité. Et le Canada est un pays producteur de contenu.
• 1055
Donc, nous jonglons avec ces expressions
qui tentent de refléter le but que cherchent à atteindre
la politique culturelle du pays, de même que Téléfilm
Canada. Le défi consiste à trouver, à développer et à
offrir sur nos écrans l'expression de la culture
canadienne sous toutes ses formes et dans toute sa
diversité. Cela devrait continuer d'être l'objectif du
système de radiodiffusion et de la Loi sur la
radiodiffusion.
[Traduction]
La plupart des systèmes de mesure comportent des imperfections. Certains s'attardent surtout à la nationalité, c'est-à-dire que l'auteur doit être canadien. Nous savons que cela a entraîné la création d'émissions en série qui ne reflètent pas vraiment la réalité et la culture canadiennes.
Nous croyons que Téléfilm Canada a réussi à trouver un juste équilibre entre les règles et la souplesse permettant de donner libre cours à l'esprit créateur. Mais il y a du travail à faire pour mettre en place un seul et unique système applicable à tout, au lieu d'avoir des systèmes différents comme c'est le cas actuellement. Les coproductions internationales, par exemple, qui figurent en permanence dans le paysage cinématographique canadien, n'utilisent pas le système de pointage du contenu canadien, mais il n'en demeure pas moins que dans tous les cas, le personnel créateur et technique canadien est avantagé.
Durant ses travaux sur cette question et d'autres, le comité pourrait prendre en compte les éléments suivants: l'obligation que le réseau canadien de radiodiffusion soit de propriété canadienne et dirigé par des Canadiens; une plus grande synergie entre les éléments public et privé du système—et ici, je songe au Fonds canadien de télévision; veiller à ce que le CRTC se concentre sur la réglementation et non pas sur l'élaboration des politiques; les coproductions internationales comme outil de développement culturel et non pas outil industriel; l'utilisation de ce qu'il y a de meilleur dans la télévision canadienne pour promouvoir l'image du Canada à l'étranger; et enfin, la création d'un comité national de l'audiovisuel qui serait chargé de conseiller le gouvernement sur des questions de politique, d'aider le gouvernement à élaborer des politiques dans le domaine de la radiodiffusion et de créer une certaine synergie parmi les diverses institutions culturelles.
[Français]
Monsieur le président, je m'arrête ici. Naturellement, madame St-Arnauld et moi-même sommes prêts à répondre à vos questions. Merci.
Le président: Merci, monsieur Macerola.
Monsieur Soucy.
M. Robert Soucy (directeur, Bureau de certification des produits audiovisuels canadiens): Bonjour, monsieur le président et membres du comité. Je m'appelle Robert Soucy et je suis le directeur du Bureau de certification des produits audiovisuels canadiens, connu sous l'acronyme anglais CAVCO.
Au cours des dernières semaines, vous avez peut-être entendu parlé de CAVCO. Vous avez certainement entendu parler du système de pointage pour le contenu canadien et, en même temps, des crédits d'impôt. J'aimerais passer vite en revue les données particulières à chacun de ces éléments et vous donner un aperçu de ce que fait CAVCO.
[Traduction]
Le BCPAC est le résultat d'une politique gouvernementale, créé par le ministère des Finances, en vue d'offrir des incitatifs fiscaux à l'industrie; tout cela a commencé en 1974 avec le programme de déductions pour amortissement qui visait à accroître les investissements du secteur privé et à financer les productions de cette façon. On les appelait à l'époque des abris fiscaux, mais après une vingtaine d'années, peut-être, l'industrie a conclu que les abris fiscaux n'étaient pas vraiment la meilleure façon de recevoir une aide financière. L'industrie préférait un crédit d'impôt. Après les interventions faites auprès du ministère des Finances, un crédit d'impôt a en fait été accordé en 1995 aux cinéastes et aux téléastes canadiens. Ce nouveau crédit d'impôt a en fait remplacé le programme de déductions pour amortissement, et a continué à appuyer les productions à contenu canadien.
[Français]
En 1997, le ministère des Finances a créé un nouveau programme appelé le Crédit d'impôt pour production cinématographique ou magnétoscopique. Ce programme est destiné à faire venir au Canada des producteurs étrangers ou même à faire tourner au Canada des producteurs canadiens mais qui produisent du contenu non canadien à la base.
• 1100
Je vais essayer de faire un peu la distinction
entre les deux. L'objectif du Crédit d'impôt pour
production cinématographique ou magnétoscopique est
simplement d'encourager la création d'un cadre de financement plus
stable et une expansion à plus long terme des
entreprises canadiennes de production.
Donc, c'est une mesure incitative au niveau corporatif
plutôt qu'au niveau des productions individuelles.
[Traduction]
Quant à l'admissibilité au crédit d'impôt pour production canadienne, sont admissibles les producteurs canadiens qui travaillent au Canada et sont détenteurs du droit d'auteur des productions qui seront alors certifiées car il y aura production d'un contenu canadien. Vous avez eu l'occasion de vous familiariser avec le système de pointage du contenu canadien lorsque vous avez entendu d'autres témoins et je ne consacrerai donc pas trop de temps à la question. Cependant, je serai heureux de répondre à vos questions plus tard, si vous voulez avoir de plus amples précisions. Je voudrais simplement signaler à cet égard que les coproductions officielles, dont a parlé François, sont reconnues comme ayant un contenu canadien également, mais n'assurent pas nécessairement des points.
Je ne vous donnerai tous les détails qui figurent à ce sujet dans mon document.
Le crédit d'impôt pour production canadienne et le crédit d'impôt pour services de production, dont on parle à la fin de ce document, sont gérés conjointement par le BCPAC et l'Agence des douanes et du revenu du Canada. Il s'agit de programmes de crédits d'impôt qui visent l'industrie, mais qui ont également un élément culturel. Ainsi, le BCPAC atteste qu'il y a un contenu canadien, émet un certificat au producteur, et l'ADRC interprète alors la Loi de l'impôt sur le revenu et accorde les crédits d'impôt s'il y a lieu. Vous trouverez à la page 6 une brève explication du calcul du crédit d'impôt. En fait, il s'agit d'un calcul relativement simple, mais je vous laisserai lire cette page quand vous en aurez le temps.
Le BCPAC et les programmes de crédits d'impôt sont fondés sur des principes de gestion du risque. Ces principes ont été énoncés à certains égards à la suite de l'examen des pratiques de gestion des divers mécanismes fédéraux qui appuient la production cinématographique et télévisuelle qu'avait demandé la ministre. Nous avons mis sur pied divers autres mécanismes afin d'assurer que la gestion du risque entre en ligne de compte dans le cas de ces programmes. En fait, nous discutons actuellement avec des représentants du ministère des Finances des méthodes que nous pourrions employer pour assurer la transparence du système, en vue de publier les titres des productions certifiées, le nom des producteurs et de rendre ainsi le système beaucoup plus cohérent; nous pourrons également parler des questions d'impôt sur le revenu—pas nécessairement des questions d'impôt sur le revenu, mais des questions qui découlent de la certification; nous ferons cela en collaboration avec nos groupes associés comme Téléfilm Canada et les autres organismes gouvernementaux.
[Français]
Les prochaines diapositives vous présentent certaines statistiques. Encore là, je ne vais pas passer beaucoup de temps à expliquer ce qu'elles contiennent, sauf que
[Traduction]
la production se porte très bien.
[Français]
Le président: Pouvez-vous nous donner les numéros de page afin que nous puissions vous suivre?
M. Robert Soucy: Certainement. Je suis maintenant à la page 8, où nous voyons certains totaux qui s'appliquent au travail de CAVCO, dont le total des demandes certifiées par année. Je dois dire en passant que les dernières années, 1999-2000 et 2000-2001, ne sont pas encore complètes. On attend que les demandes soient faites par les producteurs pour ces années en particulier. Les productions ne sont peut-être pas encore complètes. On s'attend quand même à ce que le niveau de production pour ces deux années soit aussi élevé que pour l'année 1998-1999. On parle en moyenne de budgets agrégés de 1,8 milliard de dollars par année. Encore là, je vous ferai remarquer que les montants des dernières années, 1999-2000 et 2000-2001, vont certainement remonter à mesure que les producteurs feront les demandes et que le bureau pourra certifier les productions.
• 1105
Je suis maintenant à la page 9, où on trouve le décompte de ce
que CAVCO certifie par région.
Enfin, au bas de
la page 9, nous avons une espèce de décompte qui se
veut le pointage moyen obtenu, sur une base
quinquennale, par les productions
accréditées. Donc, on voit
qu'il y a beaucoup de productions de dix points,
qu'effectivement il y a du dix sur dix,
et un peu moins de neuf, huit,
sept et six. Cela reflète ce que les
producteurs canadiens produisent et ce qu'ils peuvent
vendre, pas nécessairement autour du monde,
mais au Canada.
À la page 10, vous trouvez le domaine des coproductions. Ce sont des chiffres que nous avons obtenus de Téléfilm Canada. Encore là, les coproductions officielles entre le Canada et jusqu'à 50 autres pays sont présentement en bonne santé. Nos principaux partenaires sont évidemment le Royaume-Uni et la France.
En passant à la diapositive 11, on voit encore les niveaux budgétaires. Les totaux agrégés pour les productions qui ne sont pas encore nécessairement certifiés. Les chiffres de Téléfilm et de CAVCO ne correspondent pas toujours à cause des années financières, mais encore là, on parle de budgets totaux agrégés de 677 millions de dollars.
Finalement, on arrive à une question qui a été soulevée plus tôt ici au cours des présentations.
[Traduction]
On a demandé quels étaient les avantages-coûts des montants qui sont investis dans ce système. Vous trouverez à la page 12 une ventilation sur une base annuelle des dépenses au titre du programme de crédits d'impôt pour productions canadiennes. Ainsi, en 2000-2001, quelque 151 millions de dollars ont été accordés pour des productions canadiennes certifiées. Vous voyez le total pour 2001-2002, mais il faut clairement comprendre que ce montant augmentera au fur et à mesure que de nouvelles productions seront présentées au BCPAC et à l'ADRC.
Enfin, je ne veux pas consacrer trop de temps à l'autre programme que le BCPAC administre en collaboration avec Revenu Canada, le crédit d'impôts pour services de production cinématographique ou magnétoscopique. Encore une fois, il s'agit d'un crédit d'impôt qui vise à encourager l'embauche de main-d'oeuvre canadienne pour les productions tournées au Canada; il s'agit d'un mécanisme purement industriel.
[Français]
C'est effectivement Hollywood, que l'on accueille à bras ouverts, qui vient tourner au Canada et qui y dépense beaucoup d'argent. On voit au bas de la prochaine diapositive, qui se trouve à la page 14, que pour les quatre et possiblement cinq dernières années, on parle d'un montant de 3 milliards de dollars qui a été dépensé au Canada, ce qui représente quand même un élément important du soutien à l'industrie canadienne.
La dernière diapositive, à la page 15, donne les totaux par année pour les crédits d'impôt consentis pour les productions dites services.
Je termine là mes commentaires et je vous remercie.
Le président: Je vous remercie, monsieur Soucy. Je vais demander maintenant à M. Jean-Pierre Blais du CRTC de bien vouloir prendre la parole.
M. Jean-Pierre Blais (directeur exécutif, Radiodiffusion, Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes): Merci, monsieur le président.
Messieurs, mesdames, je vais vous présenter très brièvement le document que nous vous avons remis à l'avance.
[Traduction]
Ce document s'intitule «Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes—Contenu canadien à la télévision». Si vous avez ce document sous les yeux, vous pourrez le suivre avec moi. Il s'agit simplement des points saillants de la réglementation du contenu canadien. Comme vous le savez, les obligations de la télévision conventionnelle sont énoncées dans le règlement. Pendant les heures de grande écoute, il faut que 50 p. 100 des émissions soient canadiennes, et 60 p. 100 globalement; la SCR/CBC doit toujours atteindre un taux de 60 p. 100. Permettez-moi de placer les choses dans leur contexte. Pour un radiodiffuseur comme CJOH ici dans la région, cela représenterait quelque 4 000 heures d'émissions canadiennes par année.
• 1110
Pour la télévision payante et spécialisée, puisque la nature
de la programmation varie de façon marquée, nous avons décidé
d'établir leurs obligations par condition de licence. J'ai annexé
à notre document une liste des divers niveaux, pour les heures
générales et pour les heures de grande écoute, pour les services
de télévision payante et spécialisés.
La loi stipule que nous devons déterminer ce qu'on entend par production canadienne. Comme vous le savez tous pertinemment, parce que d'autres en ont déjà parlé, nous utilisons un système de pointage de 10 points, assorti de deux règles sur les dépenses. Ce système a récemment été peaufiné à la suite d'audiences publiques qui ont commencé en 1999; vous pourrez trouver ces règlements dans notre avis public 2000-42. Afin d'assurer une réglementation efficace, nous acceptons comme canadiennes toutes les productions qui ont été certifiées par le BCPAC, tout comme nous acceptons les coproductions officielles de Téléfilm Canada. De plus, pour les productions maisons des radiodiffuseurs, nous acceptons également automatiquement cette certification.
La prochaine page, la page 4, vous explique qu'il existe quelques différences quant aux émissions que nous reconnaissons tout particulièrement dans le secteur des jeux-questionnaires, des émissions sportives et d'affaires publiques. Nous sommes conscients du fait que les radiodiffuseurs doivent offrir toute une gamme d'émissions, mais ce genre d'émissions ne font pas nécessairement partie du système du BCPAC. De la même façon, nous avons un projet spécial qui, du point de vue statistique, n'est pas très important. Je vous en parle en passant et vous pouvez lire plus de données là-dessus, car je vous ai également fourni une copie des règles régissant la certification des émissions en ce qui a trait à la reconnaissance spéciale, soit l'avis public 42. Il s'agit de coproductions qui ne font pas l'objet d'une entente et où un Canadien exerce un certain contrôle sans pour autant exercer tout le contrôle. Nous reconnaissons ces productions pour des raisons industrielles également.
Les titulaires doivent présenter des rapports mensuels sur ce qu'ils ont diffusé, lesquels sont visés dans un système de registre spécial que nous vérifions tous les mois. Nous faisons des calculs annuels, nous en discutons avec les titulaires s'il y a certains problèmes.
Quant au nombre de demandes que nous recevons, nous vous donnons un tableau à la page 5. Nous recevons un nombre croissant de demandes. La tendance s'explique par les séries d'attribution de licences pour les services spécialisés, ce qui crée immédiatement une demande pour ce genre de programmation, et le secteur des productions indépendantes. C'est pourquoi ces intervenants nous présentent des demandes.
Quant aux dépenses, j'ai ajouté certains chiffres à la page 6 du document qui vous présente en fait les niveaux de dépenses pour la télévision de langue anglaise et de langue française.
[Français]
Quant à l'information sur la télévision de langue française, je dois apporter une petite correction aux données que vous avez. En fait, le chiffre de 329 millions de dollars représente la somme dépensée non seulement pour la SRC, mais aussi pour TVA et TQS.
[Traduction]
La dernière page fait état des résultats que nous avons enregistrés en consultant les téléspectateurs d'émissions canadiennes. Comme nous l'avons signalé la semaine dernière, lorsque vous tenez compte de tous les services auxquels ont accès les Canadiens, et cela inclut les émissions américaines, qui n'ont absolument aucun contenu canadien à nombre d'égards—globalement on écoute des émissions canadiennes dans 33 p. 100 des cas. Si on considère le taux d'écoute de Radio-Canada, c'est un e moyenne globale de 82 p. 100; par contre, pour les réseaux privés non spécialisés, ce serait 39 p.100. Nous avons un défi de taille à relever pendant les heures de grande écoute parce qu'à ce moment-là seulement 13 p. 100 des téléspectateurs regardent des émissions canadiennes.
[Français]
Le système de radiodiffusion est beaucoup plus en santé du côté français pour ce qui est des auditoires. Les chiffres démontrent bien que le public est au rendez-vous. Il y a toutes sortes de raisons historiques qui font en sorte que tel est le cas. Le défi, comme plusieurs l'ont répété, se trouve surtout du côté de la télévision de langue anglaise. Voilà donc mes propos, monsieur le président.
Le président: Je vous remercie beaucoup, monsieur Blais.
J'ai une liste de ceux qui veulent poser des questions et j'espère que nous pourrons être disciplinés pour que tout le monde ait la chance d'intervenir.
Nous commencerons par Mme Hinton, suivie de M. Sauvageau, de M. Mills et de M. Harvard. Nous reviendrons alors à M. Comartin, M. McNally et puis Mme Bulte et M. Bonwick. Puis nous aurons un deuxième tour de questions si le temps le permet.
Madame Hinton.
Mme Betty Hinton: Merci.
Je tiens à vous remercier d'être venus nous rencontrer aujourd'hui. Il vaut toujours mieux entendre des témoins que d'essayer de lire des rapports.
J'aimerais parler du document intitulé «Renforcer la trame culturelle du Canada». Sur un des tableaux, je constate qu'il y a eu une augmentation spectaculaire dans la région de l'Atlantique. Pouvez-vous m'expliquer ce qui s'est produit?
M. Robert Soucy: C'est une excellente question, et je ne suis pas tout à fait certain de pouvoir y répondre. J'aimerais avoir le temps de me pencher plus à fond sur cette question lorsque je retournerai au bureau. Tout semble indiquer en fait que les productions ont augmenté considérablement. Je dois ajouter cependant que l'année n'est pas encore terminée, comme je l'ai signalé plus tôt, mais il est clair qu'il y a eu une augmentation spectaculaire qui mérite d'être expliquée. J'aimerais répondre plus tard si vous me le permettez.
Mme Betty Hinton: Il serait bon de savoir en fait à quoi on peut attribuer cette augmentation, et peut-être pourrait-on à ce moment-là répéter la même expérience dans le reste du pays pour obtenir les mêmes résultats.
Le président: Monsieur Soucy, pourriez-vous faire parvenir cette réponse à la greffière pour qu'on puisse la distribuer alors aux députés?
M. Robert Soucy: Certainement.
Le président: Merci.
Madame Hinton.
Mme Betty Hinton: C'est la chose la plus remarquable que j'ai notée, mais mon collègue désire ajouter quelque chose.
Le président: Monsieur Abbott.
M. Jim Abbott: Nous nous penchons sur l'accès aux services et nous essayons de comparer l'accès et la qualité de la programmation afin d'intéresser les téléspectateurs canadiens. Il s'agit là des deux paramètres que nous devons respecter. Lorsque les radiodiffuseurs présentent une demande au CRTC pour obtenir une licence pour un secteur donné, ils s'attendent à obtenir certains revenus et donc réaliser des profits. J'aimerais que le CRTC nous en dise un peu plus long sur une question que nous avons abordée la dernière fois que le Conseil avait accepté d'être des nôtres.
En proposant l'adoption rapide d'une politique SRD du satellite au foyer afin de créer une force concurrentielle importante pour les services de câblodistribution, on s'est retrouvé avec deux choix, mais je crois qu'on s'est retrouvé également avec des répercussions imprévues. Je crois que la politique actuelle du CRTC nuit aux radiodiffuseurs locaux. Par exemple, j'ai appris qu'à des endroits comme Medicine Hat, il y a un taux de pénétration du satellite de 40 p. 100 et le radiodiffuseur est pratiquement mis au rancart. Je ne veux pas limiter les choix, ce n'est pas mon objectif, mais j'aimerais savoir si le CRTC s'est penché sur l'impact qu'avait eu la décision d'assurer la mise en place rapide du SRD au foyer? Ces répercussions imprévues ont manifestement nui aux radiodiffuseurs locaux. Lorsque notre comité se demande comment assurer une réglementation, il faut se demander tout d'abord si le CRTC reconnaît que le règlement qu'on a adopté a eu des répercussions imprévues? Deuxièmement, le CRTC empruntera-t-il des modifications? Dans l'affirmative, quand le fera-t-il?
M. Jean-Pierre Blais: Quand on parle de politique réglementaire, j'ai dit souvent que c'est un peu comme un ballon: lorsque vous appuyez d'un côté, il y a une bulle qui se forme ailleurs. Ce que nous avions l'intention de faire avec cette politique sur le SRD du satellite au foyer c'est d'assurer un cadre concurrentiel, car nous jugions que ce serait bon pour le consommateur, lui assurant à la fois choix et protection. Les fournisseurs de services SRD du satellite au foyer ont eu l'occasion d'offrir certains services dans divers fuseaux horaires et n'ont pas eu la même distribution que certains des services locaux offerts à Medicine Hat. Je sais que cela pose de graves problèmes, parce que les publicitaires disent qu'ils n'achèteront pas de publicité à l'extérieur de ce marché. Nous sommes parfaitement conscients du problème. En fait, nous avons émis un avis public il y a environ un mois et demi—je devrai vérifier—et l'étude est en cours; demain est la date limite pour faire parvenir des observations quant à la façon dont nous devrions aborder la question de la distribution par les entreprises de SRD; nous voulons nous assurer que les joueurs des petits marchés locaux n'en seront pas les victimes.
• 1120
Plusieurs options s'offrent à nous. On peut se pencher par
exemple sur les types d'émissions distribués par les entreprises
de SRD. Il existe un programme qui pourrait être peaufiné et qui
vise à dédommager financièrement ces joueurs du marché local.
[Français]
Le président: Monsieur Sauvageau, la parole est à vous.
M. Benoît Sauvageau: Ce n'est pas le temps des questions. C'est le processus de nomination, n'est-ce pas? Vous me dites qu'il ne s'agit pas de ce groupe-là. D'accord. J'aurai donc des questions sur le contenu canadien.
J'essaie de comprendre quelque chose. Il est écrit ici: «Quand le contenu est-il «canadien»»?. M. Bensimon de l'ONF et M. Macerola de Téléfilm Canada ont parlé du contenu canadien. Afin de tenter de comprendre, je vais donner des exemples et vous allez me dire si je comprends bien.
Qui a parlé des critères de points? D'accord, il y a deux personnes qui en ont parlé.
Est-ce que le court métrage Voisins de McLaren, qui a été exporté et qui a remporté un Oscar, aurait rencontré les critères de contenu canadien de 1990 ou ceux d'aujourd'hui compte tenu du fait qu'il n'y avait pas de drapeau et qu'on n'y voyait ni le Canada ni les montagnes? Est-ce que, dans un premier temps, cela aurait rencontré les critères? Dans le film Bacon, il n'y a ni drapeaux ni montagnes non plus. On n'y voit pas le lac Louise. Est-ce que ce film rencontrait les critères de contenu canadien?
Lorsqu'on parle de qualité en vue de l'exportation, je crois que le court métrage Voisins constitue un bel exemple de courts-métrages qui ont été exportés.
Je passe maintenant à quelque chose d'ordre personnel. J'ai de jeunes enfants et j'écoute une émission qui s'intitule Dans une galaxie près de chez nous. Cette émission a un certain contenu canadien. C'est même une émission étrangère canadienne. Ils ont des petits drapeaux partout. Est-ce que cette émission est exportée? J'adresse ma question à quiconque veut y répondre.
M. Jacques Bensimon: Je vais vous simplifier la vie. Vous avez choisi deux mauvais exemples, si je peux me permettre de le dire, parce que les deux sont des produits maison ONF. Donc, il est évident que, de ce fait, ils ne sont pas tombés dans les critères auxquels les allusions ont été faites.
Je voudrais répondre à cette partie-là en disant qu'autant le film de McLaren, Voisins, que celui de Latulippe, Bacon, sont des films qui font partie de la production 100 p. 100 ONF. À ce moment-là, il aurait pu y avoir des réactions si ces films-là avaient été faits dans le privé.
M. Robert Soucy: Ce qui reçoit la désignation de contenu canadien pour les besoins de CAVCO et du CRTC n'a rien à voir avec le contenu canadien comme tel. C'est plutôt qui produit les production au niveau des créateurs clés.
M. Benoît Sauvageau: Je vous comprends. Vous me dites que le contenu canadien n'a pas de rapport avec le contenu canadien. J'ai compris.
M. Robert Soucy: Je ne veux pas vous niaiser, mais pour Téléfilm et le Fonds canadien de télévision, c'est effectivement une question de contenu. Donc, des décisions suggestives sont faites pour déterminer si, dans ces productions-là, on voit assez de choses portant sur le Canada.
M. Benoît Sauvageau: Je ne sais pas si vous avez vu le court métrage Voisins, mais est-ce que celui-ci a assez de contenu canadien? Il a remporté un Oscar.
Le président: On va en faire un à la fois. On va d'abord finir d'entendre M. Soucy et ensuite on entendra M. Macerola. Téléfilm s'occupe du contenu et l'autre s'occupe de la création et de la production. C'est un ensemble qui se complète.
Monsieur Soucy, allez-y; terminez votre réponse.
M. Robert Soucy: On se sert du personnel clé de création comme critère de base pour déterminer si au moins, à la base, on a une production qui a été faite par des Canadiens. Le producteur doit, lui aussi, être canadien et détenir la propriété du film, donc le droit d'auteur, le copyright de la production.
Le président: Monsieur Macerola, la parole est à vous.
M. François Macerola: Au Fonds canadien de télévision et à Téléfilm Canada, on regarde le contenu. Par conséquent, pour vous rassurer immédiatement, je dirai qu'un film comme celui de Norman McLaren, Voisins, aurait été financé par le Fonds canadien de télévision et Téléfilm Canada cette semaine. Le film sur le porc l'aurait été possiblement aussi. Quant à l'émission Dans une galaxie, Téléfilm Canada investit là-dedans.
• 1125
Maintenant, étant donné que la demande était
énorme, le Fonds canadien de
télévision a utilisé, à un certain moment donné, le
contenu canadien pour établir une
priorité parmi les projets. En fin de compte, plus il
y avait de contenu canadien, plus la note de passage
accordée était élevée. Il y a des producteurs qui ont
réagi de façon un peu... Je préfère ne pas qualifier
leur façon de réagir. Ils ont
mis des drapeaux canadiens et ont mis un castor
plutôt que de mettre un orignal ou un lion.
M. Benoît Sauvageau: [Note de la rédaction: inaudible].
M. François Macerola: À ce moment-là, on tombe un peu dans le ridicule. Le Fonds canadien de télévision ne demande pas ça. Le Fonds canadien de télévision dit que, puisqu'il est un organisme public qui investit de l'argent public, il va investir dans des produits canadiens. Maintenant, à un moment donné, le Fonds canadien est peut-être allé un peu trop loin. Toutefois, le pendule est en train de se rééquilibrer. De plus en plus, on s'ouvre à des projets qui, tout en décrivant la réalité canadienne, ne sont pas nécessairement aussi ancrés dans cette réalité que certaines personnes aimeraient le croire.
Le président: On passe maintenant à M. Mills.
[Traduction]
M. Dennis Mills: Merci beaucoup, monsieur le président. J'aimerais poser trois petites questions.
Monsieur Bensimon, est-ce que les 10 000 titres de l'Office national du Canada sont disponibles sur le site nfb.ca/f/?
Mme Laurie Jones (directrice, Communications, Office national du film): J'aimerais répondre à cette question. Actuellement quelques 800 films sont disponibles. Ils sont numérisés et sont offerts aux universités canadiennes et aux centres de recherche, ainsi qu'aux CEGEP du Québec.
M. Dennis Mills: Très bien. Je ne veux pas trop monopoliser le temps du comité aujourd'hui, mais j'aimerais rencontrer la personne qui est responsable de la commercialisation de nfb.ca/f/ J'aimerais savoir ce qui se passerait si je crée un lien pour aller directement au site de l'ONF; est-ce que cela me donnerait un accès immédiat à ces 800 films numérisés?
Mme Laurie Jones: Cela fait partie de nos négociations avec les détenteurs des droits d'auteur, dans le cadre des ententes que nous avons conclues avec SOCAN, ACTRA et l'UDA.
M. Dennis Mills: Quand le système sera-t-il prêt à être lancé?
Mme Laurie Jones: Nous le mettrons à l'essai dans un module Internet. Actuellement, il est disponible sur CA*net3. Nous le mettrons à l'essai dans le module Internet probablement en mai prochain.
M. Dennis Mills: Très bien. Merci. J'espérais que ce serait déjà prêt, car je crois que ce sera un véritable bijou.
J'aimerais passer maintenant à M. Soucy. À la page 12, au tableau 7, si j'ai bien compris, vous indiquez que ce crédit d'impôt coûte environ 151 millions de dollars au Trésor pour quelque 1,8 milliard de dollars en budgets de coproductions et de productions canadiennes. Ai-je bien compris? Est-ce exact? Il s'agit là du total des coûts associés au financement de ce crédit qui suscite d'ailleurs une vive controverse actuellement.
M. Robert Soucy: Ces chiffres ont été fournis au BCPAC par l'Agence de douanes et de revenu Canada; il s'agit des montants des crédits qui ont été accordés pendant certains exercices financiers. Ainsi entre 2000 et 2001, 151 millions de dollars ont été accordés. Cela peut représenter des crédits d'impôt pour des productions qui étaient déjà dans les archives et qui sont lancées pendant cette année financière. Mais vous pouvez voir les chiffres, 115 millions de dollars, 116 millions de dollars, 151 millions de dollars pendant ces trois années.
M. Dennis Mills: Très bien. Je vois.
Voici ma question. Je m'excuse, mais je veux aller au coeur du sujet. Comme vous le savez, le ministre des Finances, sous les pressions exercées par ses fonctionnaires dont l'influence n'est pas à négliger, est sur le point d'éliminer ce crédit d'impôt et de mettre progressivement fin aux productions qui sont en cours. Êtes-vous au courant?
M. Robert Soucy: Oui monsieur, je suis au courant de la situation; cependant je dois corriger une fausse impression que le comité semble avoir depuis quelques semaines. Les crédits d'impôt que le gouvernement canadien accorde aux producteurs canadiens et non canadiens ne sont pas des abris fiscaux. Un abri fiscal, c'est complètement différent.
M. Dennis Mills: C'est donc complètement distinct des abris fiscaux?
M. Robert Soucy: Il s'agit d'un instrument financier complètement différent.
M. Dennis Mills: Savez-vous à combien s'élèvent les abris fiscaux?
M. Robert Soucy: Non. Vous pourriez probablement obtenir ces chiffres du ministère des Finances. Ce n'est pas une question qui touche le BCPAC.
M. Dennis Mills: Il s'agit donc là d'un des instruments sur lequel le ministère des Finances ne se penche pas actuellement. Cet instrument est solide et viable.
M. Robert Soucy: Les crédits d'impôt, oui, mais on discute certainement des abris fiscaux, et je suppose que le ministère discute actuellement avec l'industrie des droits acquis pour essayer justement d'éliminer ces abris fiscaux.
M. Dennis Mills: Y a-t-il une raison particulière pour laquelle vous n'avez pas abordé, la question des abris fiscaux lors de votre présentation aujourd'hui?
M. Robert Soucy: C'est une question qui ne relève pas du BCPAC. Les abris, en fait, en ce qui a trait au BCPAC ont été éliminés en 1995.
M. Dennis Mills: Très bien. Merci beaucoup.
Le président: Merci, monsieur Mills. Je crois qu'il importe de bien comprendre la question.
Monsieur Harvard.
M. John Harvard (Charleswood St. James—Assiniboia, Lib.): Merci, monsieur le président.
J'aimerais poser des questions importantes au CRTC en ce qui a trait à un problème qui se pose actuellement chez moi, à Winnipeg. Je suis convaincu que vous êtes déjà au courant de la situation, monsieur Blais. Cette question n'est peut-être pas directement liée à votre étude sur la radiodiffusion, mais je crois que la situation à Winnipeg est symptomatique du problème. Comme vous le savez, et je suis convaincu que tout le monde le sait dans la salle, Corus Entertainment ferme les installations du Women's Television Network à Winnipeg, la ville où ce réseau a d'ailleurs vu le jour. Cinquante ou soixante personnes vont perdre leur emploi. Corus a annoncé cette décision peu après que le CRTC l'est autorisé à acheter ce réseau. D'après un article de presse, monsieur Blais, le CRTC a dit au nouveau propriétaire de la chaîne spécialisée qu'il fallait reconnaître la présence de longue date du WTN dans l'ouest du Canada et a encouragé Corus à s'inspirer de l'orientation du WTN comme service établi dans l'Ouest du Canada. C'était un beau geste de la part du CRTC, mais cela n'a manifestement pas impressionné Corus. En fait, un certain M. Ellis de Corus est cité dans cet article; il aurait dit que Corus n'a pas interprété ces propos du CRTC comme étant une directive.
Voici mes questions et j'espère que vous pouvez y répondre, monsieur Blais. Tout d'abord, est-ce que Corus vous a dupé? En d'autres termes, lors des discussions, est-ce que Corus vous a laissé entendre que si cette société achetait ces installations, elle fermerait les bureaux de Winnipeg et effectuerait une intégration, pour employer un euphémisme, avec les bureaux de Toronto? Est-ce que Corus vous a donné quelque indication de son intention de procéder de cette façon?
De plus, avez-vous demandé à Corus ce qu'elle ferait de ce nouvel achat si la demande était approuvée? Est-ce que Corus avait l'intention de déménager de Winnipeg? Avez-vous posé la question? Dans la négative, pourquoi pas?
Je suppose que je pourrais également vous demander si vous avez le pouvoir nécessaire pour assortir l'autorisation d'une telle condition? Par exemple, vous pourriez dire: si vous voulez acheter ceci, vous pouvez le faire, mais vous ne pouvez pas déménager les services à l'extérieur de Winnipeg. Après tout, nous avons l'impression que vous devriez prendre appui sur cette orientation du service qui est sur l'Ouest du pays. Avez-vous le pouvoir nécessaire pour imposer ce genre de condition? Dans l'affirmative, pourquoi ne l'avez-vous pas fait? Si vous n'aviez pas le pouvoir nécessaire, devriez-vous l'avoir?
Je peux vous dire, monsieur Blais, que les résidents de Winnipeg sont plutôt en colère—je pourrais utiliser d'autres termes, mais j'essaierai de rester poli. Les gens sont désemparés. C'est un réseau qui a été créé en 1995 dans notre ville, à Winnipeg. Nous en sommes fiers, et maintenant nous le perdons.
Voilà mes questions. J'espère que vous pourrez y répondre.
M. Jean-Pierre Blais: Je dois être prudent, parce que le Conseil se penche sur la question. Lorsque nous avons appris que la station devait être fermée, j'ai immédiatement envoyé une lettre à Corus lui demandant de m'expliquer comment la société pourrait respecter les engagements pris dans la décision visant à l'autoriser à acheter ce service; on parlait d'ailleurs du rôle des femmes dans le système de la radiodiffusion, ainsi que d'une présence dans l'Ouest du pays. Nous avons immédiatement envoyé cette lettre, et je crois qu'elle reflète clairement le fait que le Conseil était très déçu du fait que Corus ait pris cette décision quelques jours à peine après que nous ayons approuvé sa requête. Nous avons reçu une réponse. Je voudrais bien pouvoir vous faire part du contenu de cette lettre aujourd'hui, mais cela m'est impossible puisque le Conseil ne s'est pas encore prononcé sur la question. Nous étudions la réponse. Lorsque nous aurons terminé notre évaluation, je pourrai certainement vous faire part du résultat.
Lors des discussions qui ont précédé l'approbation de cette demande, la question avait certainement été abordée. Les représentants de Corus avaient tenu certains propos et c'est justement le genre de chose que nous étudions en ce moment. Nous avons dans d'autres dossiers assorti l'approbation de conditions quant à l'emplacement des installations matérielles des radiodiffuseurs devait se faire. Les membres du Conseil doivent décider quel type d'engagement ils exigeront du requérant. Je n'ose pas vraiment vous en dire plus long étant donné que le Conseil examine actuellement ce dossier.
Je comprends pourquoi vous vous inquiétez de la situation, et je n'essaie pas simplement de noyer le poisson, bien au contraire. C'est simplement que je dois être prudent puisque nous discutons d'une question qui est actuellement à l'étude.
M. John Harvard: Est-ce que les représentants de Corus avaient indiqué qu'ils songeaient à déménager? Avez-vous posé la question?
M. Jean-Pierre Blais: Je ne pense pas que, lors de réunions dont le procès-verbal devait être rendu public, les responsables aient déclaré carrément leur intention de fermer les bureaux de Winnipeg.
M. John Harvard: Je vous remercie de ces commentaires, mais compte tenu de ce que vous venez de dire, pourriez-vous, vu ce qui s'est produit depuis que le CRTC a approuvé la vente, revenir sur votre décision ou imposer à Corus une autre décision pour l'obliger à conserver les installations de Winnipeg?
M. Jean-Pierre Blais: Comme je l'ai signalé, certaines de ces choses sont mentionnées dans la décision rendue par le Conseil. Il faudrait étudier en détail quelle portée cela peut avoir. Je le répète, nous voulions conserver une présence dans l'Ouest du pays. Toute décision du Conseil à l'égard d'une cession est définitive, quoi qu'il arrive à l'occasion que ces entreprises s'adressent à nouveau à nous soit pour le renouvellement d'une licence ou pour d'autres requêtes. Nous avons donc un rendez-vous permanent avec les radiodiffuseurs, et nous pourrons en discuter à nouveau avec eux, mais tout est fonction du résultat de l'examen auquel nous procédons actuellement.
M. John Harvard: Vous êtes donc déçu. Croyez-vous que les gens de Corus ont été honnêtes avec vous?
M. Jean-Pierre Blais: Je me contenterai de dire que je suis déçu. Je ne veux pas leur faire un procès d'intention.
M. John Harvard: Merci.
Le président: Monsieur Comartin.
M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD): Monsieur Blais, je suis désolé, mais je ne comprends pas la réponse que vous avez donnée à M. Harvard. Aviez-vous eu le pouvoir nécessaire? Le CRTC avait-il l'autorité nécessaire pour forcer Corus à conserver la station et les emplois dans cette ville?
M. Jean-Pierre Blais: Lorsque le Conseil étudie les demandes de cession, nous pouvons imposer des conditions à l'approbation de celles-ci. Il était donc possible en théorie pour le CRTC d'imposer cette condition.
M. Joe Comartin: Si j'ai bien compris vos réponses, vous n'avez absolument pas songé à l'époque à imposer cette condition lorsqu'il y a eu transfert de licence.
M. Jean-Pierre Blais: La question de la présence à Winnipeg et du rôle permanent du WTN pour appuyer la présence des femmes en radiodiffusion a été mentionnée publiquement lors des discussions de la Commission. En fait, le CRTC en fait mention dans sa décision.
M. Joe Comartin: Mais ce n'était pas une des conditions de la licence.
M. Jean-Pierre Blais: Nous n'avons pas été jusqu'à imposer cette condition à l'approbation de la licence.
M. Joe Comartin: J'aimerais maintenant passer à une autre question. Le CRTC a renouvelé les licences de CTV dans le nord de l'Ontario—il s'agit de licences pour une durée de sept ans—et quelques semaines plus tard, NCTV a annoncé la fermeture des salles de presse de North Bay, Sault Ste. Marie et Timmins, ce qui élimine les services locaux de nouvelles télévisées. Ma question revient un peu à celle qu'on a posée un peu plus tôt. Avez-vous le pouvoir nécessaire pour forcer CTV à conserver ces salles de presse? Lors du renouvellement, a-t-on songé à demander à CTV de maintenir ces services? Il y a 200 000 Canadiens dans cette région qui n'ont pas de service de nouvelles locales.
M. Jean-Pierre Blais: Le modèle choisi pour CTV pour desservir le nord de l'Ontario est un modèle qui porte sur des services offerts à l'ensemble de la région—et je reviens un peu à la discussion que nous avons eue un peu plus tôt sur la comparaison entre les services locaux et régionaux. Le problème, c'est que dans certains très petits marchés, et ceux que vous décrivez sont des petits marchés, ces radiodiffuseurs perdent de l'argent s'ils assurent des services de nouvelles locales. Les émissions de nouvelles et d'affaires publiques coûtent très cher. CTV a pris une décision. La politique de la télédiffusion, lorsque nous l'avons étudiée en 1999, portait surtout sur la constitution de groupes plus importants et plus solides, parce que nous étions conscients des défis qu'il faudrait relever à l'avenir. Mais dans le cas qui nous occupe, je ne suis pas convaincu qu'ils aient compris l'esprit même de cette décision, car nous disions que nous voulions des plus gros joueurs justement pour assurer une forme d'interfinancement pour aider ces petits marchés. Vous savez peut-être que le Conseil a dit clairement à CTV que sa décision allait à l'encontre de l'esprit de sa décision.
M. Joe Comartin: Est-ce que les responsables de CTV avaient mentionné au CRTC qu'ils avaient l'intention de fermer ces stations?
M. Jean-Pierre Blais: Je ne crois pas.
M. Joe Comartin: Auriez-vous pu assortir le renouvellement de la licence de conditions stipulant que ces stations devaient rester ouvertes?
M. Jean-Pierre Blais: Oui, le Conseil aurait pu le faire.
M. Joe Comartin: Vous avez le pouvoir nécessaire pour forcer le réseau CTV, s'il veut agir de cette façon, à donner avis aux collectivités locales, puis à présenter une nouvelle demande au CRTC. Pouvez-vous imposer cette condition?
M. Jean-Pierre Blais: Nous ne l'avons pas fait jusqu'à présent, mais je ne pense pas que les pouvoirs du Conseil nous en empêcheraient. Nous n'avons tout simplement pas envisagé ce modèle par le passé. C'est un modèle intéressant, mais nous ne l'avons ni imposé ni même pris en considération, que je sache.
M. Joe Comartin: Une autre question qui a suscité des inquiétudes chez nous, c'est la manière dont la chaîne Vision a été traitée quand il a fallu renouveler la licence. Vous vous préoccupez évidemment de la tenue des livres de cette chaîne et d'autres choses également. Conscients de la petite taille de cette chaîne, vous avez autorisé un renouvellement de 33 mois assorti de certaines conditions assez sévères, quand on pense à la façon dont vous avez traité Global et CTV. Est-ce la politique des deux poids deux mesures?
M. Jean-Pierre Blais: Le cas de Vision se trouve au coeur du sujet dont nous discutons aujourd'hui. Comme je l'ai signalé, cette chaîne devait se conformer à des conditions de licence relativement au contenu canadien qu'elle devait diffuser. À cet égard, la tenue des livres de la chaîne laissait à désirer, mais étant donné que le contenu canadien est au coeur de notre mandat, lorsqu'un titulaire de licence fait une entorse à ces conditions, cela entraîne des conséquences. La première est le renouvellement de la licence à court terme, ce que nous avons fait dans ce cas-ci.
En fait, cela représente une occasion pour Vision, puisque nous travaillons étroitement avec la chaîne pour l'aider. La chaîne respectait effectivement le contenu canadien, mais le problème était lié à la tenue des livres, et c'est à cela que nous collaborons avec elle. Nous avons récemment rencontré les dirigeants de la chaîne, et je puis vous assurer qu'ils ne se contentent pas de respecter les obligations touchant le contenu canadien, ils les dépassent. Nous avons donc espoir que la situation se réglera, et les choses sont déjà sur la bonne voie.
M. Joe Comartin: Mais lorsque Global...
Le président: Est-ce que ça vous dérangerait d'attendre le prochain tour, monsieur Comartin?
M. Joe Comartin: Ma question découle directement de ce qu'on vient de dire.
Le président: D'accord.
M. Joe Comartin: Mais lorsque vous avez eu la confirmation de Global, on ne s'est pas demandé si les livres étaient exacts ou non. De même, quand la chaîne CIII-TV vous a confirmé qu'elle se contentait de 13 heures par semaine, plutôt que les 17,5 heures obligatoires, vous n'avez pas imposé de restrictions au renouvellement de la licence de Global. Il n'y a pas eu de sanction, il n'y a rien eu. Encore une fois, n'est-ce pas là une politique de deux poids deux mesures?
M. Jean-Pierre Blais: Non, ce n'est pas le cas, parce que ce n'était pas une condition de licence auparavant, mais nous avons imposé la condition au renouvellement de licence. Il y a donc eu des conséquences dans ce cas-là.
M. Joe Comartin: Autrement dit, il n'y avait pas d'exigences auparavant quant au nombre d'heures, et ce n'est qu'après que vous avez imposé les 17,5 heures.
M. Jean-Pierre Blais: Exactement.
M. Joe Comartin: Merci, monsieur le président.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Comartin.
Monsieur McNally, la parole est à vous.
M. Grant McNally: Merci, monsieur le président.
Monsieur Blais, j'aimerais savoir combien il en coûte au CRTC pour contrôler tout le système de rapports relatifs au contenu canadien. Avez-vous des employés qui compilent des statistiques et les versent dans une base de données?
M. Jean-Pierre Blais: Vous parlez des diffuseurs canadiens?
M. Grant McNally: Oui, j'entends tous les diffuseurs, les télédiffuseurs comme les radiodiffuseurs, qui sont tenus de vous envoyer des formulaires indiquant le contenu canadien de leurs émissions et qui sont autoréglementés, si on veut.
M. Jean-Pierre Blais: Notre bureau chargé de la définition des émissions canadiennes compte un peu moins de quatre employés à temps plein et dispose d'un budget de moins de 200 000 $. Je n'ai pas sous la main les chiffres précis quant à la saisie des statistiques à ce sujet, et c'est ce que vous me demandez, c'est-à-dire le suivi que nous faisons quand quelqu'un entre des données et que nous faisons rapport. Lors de notre dernière comparution, on nous a posé la même question, et nous sommes en train de préparer une réponse écrite que nous enverrons à la greffière.
M. Grant McNally: Ce serait merveilleux d'avoir ces informations.
Vous avez évoqué l'auditoire canadien durant les heures de grande écoute, en parlant des téléspectateurs anglophones et francophones, et vous dites que 13 p. 100 des Canadiens regardent des émissions à contenu canadien durant les heures de grande écoute. Est-ce que c'est...?
M. Jean-Pierre Blais: Nous surveillons la fréquence d'écoute de toutes les chaînes traditionnelles du Canada durant les heures de grande écoute, et entre 7 heures et 23 heures, 13 p. 100 des téléspectateurs regardent des émissions canadiennes. C'est pour cette raison justement que nous avons révisé notre cadre réglementaire pour la télévision canadienne en 1999, qui a été mise en oeuvre assez récemment, et nous avons mis l'accent sur les heures de grande écoute en créant une programmation prioritaire. Ce problème ayant été recensé, nous avons décidé d'orienter nos ressources afin d'augmenter ce pourcentage.
M. Grant McNally: Le CRTC a-t-il une politique visant à augmenter ces chiffres?
M. Jean-Pierre Blais: Absolument. Les heures de grande écoute sont le principal défi pour la télévision canadienne. En parlant des heures de grande écoute, quelqu'un a dit que c'est là que se trouvent les poissons. C'est donc durant ces heures qu'il faut avoir des émissions canadiennes, puisque c'est le meilleur moment pour attirer des téléspectateurs canadiens. C'est durant ces heures que les gens se trouvent devant leur poste de télévision. Je ne veux pas minimiser l'importance des autres plages horaires, celle des émissions pour enfants, par exemple, mais c'est durant les heures de grande écoute que le problème se pose le plus. Le problème tient au fait que nous avons au sud de la frontière un grand exportateur qui fait une promotion énergique de ces émissions. C'est un problème de taille.
M. Grant McNally: La question qui découle de tout ce que vous venez de dire concerne tout le débat sur le rôle du CRTC, l'équilibre entre le recours à des politiques et la réglementation; il s'agit en fait de déterminer si ce rôle devrait être assumé par le CRTC ou par la ministre elle-même par voie de politique gouvernementale. Je soulève la question, car ce sera l'une des principales questions à laquelle nous devrons répondre, à savoir le rôle du CRTC, la possibilité pour lui de combler un vide politique et la désignation d'une autorité compétente si cela ne relève pas de vous.
M. Jean-Pierre Blais: Je ne peux que répéter ce que M. Colville vous a dit la semaine dernière: il existe différents types de politiques. En effet, il y a la politique visant le grand public, puis la politique réglementaire. Lorsque nous parlons de politique, nous entendons notre politique réglementaire. C'est une façon de penser tout haut. Notre politique réglementaire aide les détenteurs de licence ou les postulants à savoir lequel nous recherchons dans une demande de licence. Elle facilite la procédure. L'article 6 de note loi nous autorise à faire ce genre d'énoncé, et c'est utile effectivement. Différents niveaux d'élaboration de politiques entrent en ligne de compte.
M. Grant McNally: Je vous remercie.
Le président: Merci, monsieur McNally.
M. Sauvageau devant nous quitter, les membres du comité ont bien voulu lui céder la parole.
[Français]
M. Benoît Sauvageau: J'apprécie et je remercie mes collègues de me donner cette possibilité.
Dans un premier temps, vous êtes ici pour la révision de la Loi sur la radiodiffusion. Je vais vous poser une question à laquelle vous n'aurez peut-être pas le temps de répondre aujourd'hui, mais j'apprécierais que vous nous fassiez parvenir la réponse par écrit. C'est toujours la même question que je répète.
Si vous aviez une seule recommandation à écrire dans le rapport, que ce soit à l'ONF ou aux autres, quelle serait-elle? J'aimerais que vous écriviez une réponse de cinq ou six lignes et que vous nous la fassiez parvenir. Si on en a le temps, vous pouvez répondre et ça me fera plaisir.
Plus tôt, j'ai entendu quelque chose sur le contenu canadien quantitatif et qualitatif. Si je ne m'abuse, c'est M. Macerola qui a dit cela, mais je peux me tromper et je vous l'avoue. Quand vous analysez le contenu canadien d'une émission, d'un film ou d'un documentaire, quel est le pourcentage du qualitatif par rapport au quantitatif? Par exemple, si une équipe totalement canadienne faisait un film totalement canadien, sur le territoire canadien, sur l'incendie du Parlement à Montréal après les rebellions de 1937-1938, quel serait le pourcentage de la qualité de l'équipe par rapport au subjectif, dirais-je?
M. François Macerola: Je peux vous faire parvenir la grille qu'on utilise en même temps que la recommandation qu'on aimerait écrire. Disons que le quantitatif est d'environ 60 p. 100 par rapport à 40 p. 100 pour le qualitatif. Quand on parle du quantitatif, on parle des revenus projetés, de l'auditoire, de la récupération que Téléfilm Canada peut faire, des équipes et du financement. Naturellement, il y a aussi la lecture du scénario et l'évaluation de ce scénario. Par conséquent, je mettrais environ 60 p. 100 et 40 p. 100.
M. Benoît Sauvageau: Donc, vous allez nous envoyer cette grille dont se servent ceux qui analysent le contenu canadien pour qu'on puisse voir si...
M. François Macerola: Oui, absolument.
Maintenant, si vous me le permettez, je dirai qu'il y a présentement des systèmes. Il y a celui du CRTC, celui de CAVCO et celui de Téléfilm Canada. À l'intérieur de Téléfilm Canada, on a trois systèmes de contenu canadien: le long métrage, la télévision et les coproductions. Je regarde Johanne parce qu'elle est notre experte. À un moment donné, il va falloir, et je pense que c'est un peu le mandat de ce comité-ci, se pencher pour voir comment on peut harmoniser... [Note de la rédaction: inaudible].
M. Benoît Sauvageau: En terminant, je dirai que ça pourrait être une très bonne recommandation que celle d'avoir un processus d'acceptation harmonisé, uniforme et simple pour ne pas que de mauvaises expériences se répètent.
M. François Macerola: C'est un peu la recommandation que j'aimerais écrire.
M. Benoît Sauvageau: Je vous remercie. Je remercie aussi mes collègues.
Le président: Merci, monsieur Sauvageau. Je pense que c'est très utile.
[Traduction]
Le président: Madame Bulte, la parole est à vous.
Mme Sarmite Bulte: Merci, monsieur le président.
Merci également à tous les témoins d'être revenus nous rencontrer. Vous nous avez fourni tellement d'information.
Monsieur Macerola, vous avez dit que le CRTC dépense moins d'argent à élaborer des politiques, et j'aimerais que vous expliquiez votre propos.
Monsieur Bensimon, j'aimerais que vous m'expliquiez comment l'ONF devrait se réinventer et réinventer ce que vous estimez être son rôle. Des témoins représentant le syndicat des producteurs de la SRC sont venus nous dire que la SCR devrait faire davantage de productions à l'interne. Comment concevez-vous votre rôle maintenant avec l'arrivée en scène des cinéastes indépendants, des producteurs et de la SRC? Quelle orientation l'ONF devrait-il suivre? Votre histoire, merveilleuse, a été célébrée en Californie et à New York il y a quelques années, mais qu'en est-il de votre avenir? En avez-vous un? Je vous le demande en toute sincérité.
Monsieur Blais, vous avez un nouveau président. La semaine dernière, M. Colville a comparu devant nous. Monsieur le président, j'aimerais que l'on invite le nouveau président, évidemment pas demain, pour qu'il vienne nous faire part de sa vision de ce que devrait être le CRTC. Avec tout le respect que j'ai pour M. Colville, je pense qu'il est important, au fur et à mesure que nous progresserons dans notre examen du secteur de la radiodiffusion, que nous l'invitions de nouveau à venir nous rencontrer.
M. Jean-Pierre Blais: Le mandat de M. Dalfen commence seulement le 1er janvier. Nous n'avons donc pas tout à fait de nouveau président. Nous attendons impatiemment son arrivée au CRTC.
Mme Sarmite Bulte: Je crois que nous ne reprendrons nos travaux qu'à la fin de janvier, ce qui lui donne trois semaines.
Je voudrais commencer par M. Macerola. Je crois qu'il est très important que nous examinions le rôle du CRTC et son mandat, qui est de superviser et de réglementer. Le SMA, M. Wernick, nous a parlé de l'important travail en matière de politiques que fait le CRTC pour rendre transparents les enjeux, mais en même temps, la loi dispose que son rôle et de superviser et de réglementer. Quand vous faisiez votre examen de la SCR, on s'est inquiété de ce que vous étiez à la limite d'influer sur les politiques ou d'en élaborer carrément, au lieu de vous contenter de les mettre en oeuvre. J'aimerais beaucoup que vous réagissiez à tout cela.
M. François Macerola: Premièrement, je voudrais apporter une nuance au sujet des politiques auxquelles M. Blais a fait allusion, c'est-à-dire les politiques utilisées par le CRTC pour assurer son rôle en matière de réglementation. Je me souviens d'avoir fait la recommandation au comité spécial, mais j'étais très jeune à l'époque. Personnellement, je crois que le gouvernement devrait créer un comité de l'audiovisuel qui serait composé de personnes qui assument quotidiennement l'administration de la télévision, soit des organismes comme Téléfilm Canada, le Fonds canadien de la télévision, l'ONF, Radio-Canada ou autres. Il faudrait également que ce soit des personnes qui soient en mesure d'élaborer des politiques générales, d'agir sur les recommandations du gouvernement, et de créer et de promouvoir de meilleures relations et une meilleure synergie entre les organismes culturels concernés par la télévision.
• 1155
Je sais qu'il existe un comité de ce genre en Europe, et
j'aime bien le fait que ce comité assure la continuité. On ne
peut pas simplement réviser la Loi sur la radiodiffusion tous les
cinq ans, d'où l'importance d'une approche de ce genre qui sera
plus dynamique et continue et qui permettra une participation
régulière. Au lieu de réinventer la roue chaque fois, on apporte
simplement des modifications.
Les représentants de l'organisme Friends of Public Broadcasting ont dit ce matin qu'il faudrait se débarrasser du Fonds canadien de télévision et transférer l'argent à Téléfilm Canada. Si je n'ai même pas souri, c'est que je trouve que la relation entre Téléfilm Canada et le fonds des câblodistributeurs est une expérience fantastique. En effet, pour la première fois au Canada, des représentants des secteurs public et privé travaillent ensemble à l'élaboration de lignes directrices. Nous savons que nous sommes en conflit d'intérêts autour de la table, puisqu'il y a des télédiffuseurs, mais au moins tout le monde le sait.
Une question comme celle-ci pourrait éventuellement être confiée au nouveau comité de l'audiovisuel. Comme je l'ai déjà dit, ce comité de l'audiovisuel grâce à une relation dynamique et continue avec les autorités compétentes, pourrait régulièrement formuler des recommandations dans le but d'améliorer le système de radiodiffusion au Canada.
Mme Sarmite Bulte: Est-ce que vous pensez à quelque chose comme le groupe de consultations sectorielles sur le commerce extérieur?
M. François Macerola: C'est un peu plus qu'un groupe de ce genre. Avec votre permission, monsieur le président, je voudrais vous envoyer un exemplaire d'un document de deux pages que j'ai écrit à ce sujet.
Le président: Je vous en prie.
M. François Macerola: Je le ferai avec plaisir.
Le président: Je vous en remercie.
M. Jacques Bensimon: Il me serait très difficile de vous parler de ma vision en quelques minutes. Permettez-moi de vous faire part des quelques idées que j'ai au sujet de ce que nous devrions faire.
Premièrement, pour revenir à ce que disait M. Macerola, je pense que nous sommes arrivés à une étape où il nous faut une plus grande harmonisation des organismes et institutions publics. Cela comprend tous nos organismes, et je puis vous dire que l'Office national du film est très ouvert à ce genre de questions.
Comment l'Office national du film peut-il être utile? C'est très simple. D'abord auprès des cinéastes émergents. Au Canada, quand on est frais émoulu et qu'on s'apprête à faire son premier, deuxième et même troisième film, nous avons encore besoin d'avoir un endroit où l'on peut être bien accueilli, un endroit qui permet à un jeune cinéaste de réaliser son film ou son premier projet nouveau média. À l'heure actuelle, il y a très peu d'endroits qui offrent exclusivement ce genre de climat. Après leur formation dans différentes écoles de film, les jeunes diplômés sont livrés à l'industrie et ils se font prendre par les règles de l'industrie. Il faut qu'il y ait un organisme public vers lequel le jeune réalisateur peut se tourner pour réaliser son premier projet, et en même temps, il faut que celui-ci puisse être encadré par les réalisateurs talentueux que nous avons au Canada, de sorte qu'il y ait une relation de mentorat entre les deux.
Deuxièmement, il y a la diversité culturelle. Il est extrêmement important, surtout depuis les événements du 11, que nous prenions conscience de la pluralité du Canada. Je suis moi- même un immigrant, quelqu'un à qui l'on a donné la chance de s'exprimer sur ses origines. Je pense qu'il est important que nous continuions de maintenir cela. Je peux vous donner l'exemple d'un réalisateur iranien qui vient de terminer un film à l'Office national, et ce film vous donnerait les larmes aux yeux, car le réalisateur vous montre de l'intérieur la réalité de la vie de quelqu'un qui a vécu en Iran et qui est venu au Canada.
L'Office national du film doit également être un partenaire pour l'industrie. Il est évident que pendant très longtemps nous avons été un peu comme un panneau de signalisation sur le boulevard métropolitain, où les voitures passent à côté sans vraiment s'arrêter. Cette fois-ci, nous essayons d'arrêter la circulation et nous voulons intervenir auprès de l'industrie dans la mesure du possible et à l'échelle du pays. Durant mes 90 premiers jours à l'Office national du film, j'ai parcouru le pays d'un bout à l'autre pour dire aux gens que nous sommes prêts à faire affaire avec eux.
Pour ce qui est de la visibilité de l'ONF, j'ai parlé de l'importance d'ouvrir la vitrine de l'Office pour promouvoir la distribution. Je veux vous donner deux exemples illustrant la visibilité de l'ONF. Le film inuit Atanarjuat a été sélectionné. De tous les films qui ont été sélectionnés, les trois organismes canadiens, à savoir l'Office national du film, Téléfilm Canada et le Conseil des arts, ont financé ce film. C'est un film à petit budget, à tel point que je ne suis même pas en mesure de vous dire combien il a coûté, mais c'est le film que le Canada a choisi pour se faire représenter aux Oscars.
• 1200
De plus, toujours au sujet de la diversité culturelle, nous
avons un film qui, nous l'espérons, sera mis en nomination pour
les Oscars. Le film en question s'intitule Obachan's Garden, et
c'est un film qui a été réalisé par un cinéaste de la côte Ouest
d'origine japonaise qui l'a fait en hommage à sa grand-mère.
Encore une fois, c'est le genre de chose que l'ONF devrait faire.
Je vais m'en tenir là.
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur Bonwick, allez-y.
M. Paul Bonwick: Merci, monsieur le président.
J'aimerais aborder quelques questions, mais tout d'abord, je commencerai par M. Blais, représentant le CRTC. De temps à autre, le CRTC est vu d'un oeil critique quand on examine les conséquences de ses décisions. J'ai écouté les propos de M. Harvard à ce sujet, et cela indique parfaitement pourquoi le comité, et je présume les députés d'une manière générale, s'inquiètent de certaines de vos décisions et des conséquences à long terme de celles-ci. Le comité est en train d'examiner le rôle du CRTC et sa conformité par rapport à la Loi sur la radiodiffusion, et c'est pourquoi j'aimerais vous poser quelques questions précises à vous, monsieur Blais.
Premièrement, j'essaie de comprendre comment vous prenez vos décisions et comment vous les formulez. Le CRTC rend typiquement des décisions—et je parle d'une manière générale, et non pas de cas précis—et, ce faisant, se contente simplement d'exprimer des souhaits durant la rencontre, plutôt que d'en faire des conditions. Cela n'est-il pas vrai? Je parle de choses concrètes comme la représentation et l'infrastructure régionales. C'est bien d'exprimer oralement des souhaits, mais à moins qu'il ne s'agisse de conditions, ce n'est pas impératif.
Deuxièmement, je crois savoir que lorsqu'une décision est prise, elle est finale, à moins que la ministre, par voie de décret, ne souhaite la renverser. Cela dit, vous avez dit quelque chose et j'aimerais que vous l'expliquiez davantage. Le CRTC peut prendre en considération la non-conformité d'un détenteur de licence quand il doit prendre une décision concernant des demandes futures du même détenteur. Est-ce que j'interprète bien vos propos? Si vous n'êtes pas satisfait du comportement d'un postulant après avoir pris une décision à son sujet, si le même postulant refait une demande plus tard, vous le traiterez différemment.
Voilà pour ce qui est des questions que j'avais à poser, et j'en aurai d'autres plus tard.
M. Jean-Pierre Blais: Pour ce qui est de votre deuxième question, je faisais allusion au renouvellement d'une licence en particulier. En général, nous émettons un avis public d'après le dossier que nous a fourni le postulant, et notre décision reflète souvent les préoccupations des intervenants, dans ce cas-ci en particulier, celles des conseillers régionaux et des conseillers nationaux qui siègent à la table.
J'essaie d'éviter cette affaire en particulier, comme vous le savez, mais le conseil a, dans d'autres cas, imposé des conditions précises. Il a choisi de ne pas le faire dans ce dossier. Une décision écrite a été rendue, comportant des déclarations très claires. Il n'est pas rare que le conseil établisse une gradation de ses préoccupations en utilisant différents termes, allant des conditions de licence, qui est l'attente la plus élevée, jusqu'aux exigences, qui sont quasi-obligatoires. En fait, on a déjà vu des gens demander des changements aux exigences, ce qui n'est pas strictement nécessaire sur le plan de la procédure. Et puis il y a d'autres situations où nous exprimons simplement tout haut nos attentes, nous signalons certains aspects. Ceci se situait plutôt au niveau des attentes—il arrive parfois que tout soit clair rétrospectivement.
M. Paul Bonwick: Vous avez éclairci ce lien et j'étais curieux de savoir comment vous procédiez.
Je vais maintenant poser une question à Téléfilm Canada, mais avant de le faire, je voudrais dire que l'information contenue dans ce graphique sur le crédit d'impôt a été extraordinairement utile de mon point de vue. M. Mills m'en a déjà parlé par le passé et je ne comprenais pas vraiment les répercussions de tout cela. En comparant les données de votre graphique de 1996 jusqu'à 2000, il est très facile d'établir un lien direct entre le montant des crédits d'impôt utilisés et la croissance de l'industrie, du point de vue budgétaire. Si je vois par exemple que l'on a utilisé 39 millions de dollars de crédits d'impôt en 1997, par opposition à 1,4 milliard de dollars, les chiffres correspondant étant de 151 millions de dollars et de 1,8 milliard de dollars, le parallèle est frappant. J'espère donc que le comité continuera à appuyer cela.
L'un des témoins précédents a déclaré que Téléfilm Canada devrait jouer un rôle qui est actuellement joué par le Fonds canadien de télévision. Avez-vous réfléchi à cela, à la façon dont vous vous y prendriez et aux raisons pour lesquelles vous pourriez faire du meilleur travail?
Le président: Vous l'avez déjà dit, mais vous pourriez peut-être répéter votre réponse pour qu'elle soit consignée au compte rendu.
M. François Macerola: Tout ce que je peux dire, c'est que Téléfilm Canada s'occupe de télévision depuis près de 20 ans. À un moment donné, le gouvernement a décidé d'élaborer une nouvelle approche et a proposé le concept de coentreprise entre les secteurs public et privé. Il est vrai que la première année, cela n'a pas été facile, la deuxième non plus, mais nous en sommes maintenant à notre cinquième année et tout va très bien, parce que vous savez...
Le président: Le fonds, le fonds de câblodistribution...
M. François Macerola: Oui, le Fonds canadien de télévision. Nous avons harmonisé nos politiques. Par exemple, pour ce qui est des droits de licence, il verse des contributions; nous, à Téléfilm Canada, nous investissons et nous nous attendons donc à récupérer notre argent. Nous utilisons la même grille d'évaluation, mais avec certaines nuances, et ce qui est excellent pour la communauté télévisuelle du Canada, c'est qu'il y a deux portes auxquelles on peut frapper pour financer des projets.
Il y a toujours place pour de l'amélioration dans les situations de ce genre, et mon mandat à titre de directeur général de Téléfilm Canada a été vraiment difficile, rempli de défis, mais les résultats se passent de commentaires. Cette année, nous avons investi dans plus de 2 000 heures d'émissions canadiennes de grande qualité. Nous avons créé quelque 18 000 emplois, et nous avons réduit le coût de l'administration, ce qui est très important à mes yeux, puisque nous administrons des fonds publics.
Ce n'est donc pas une réussite éclatante pour le moment, mais c'est quand même un succès. Quand le gouvernement aura la sagesse de renouveler le fonds ou de le transformer en une organisation permanente, il deviendra vraiment une réussite éclatante.
Le président: Monsieur Abbott.
M. Jim Abbott: Merci. Je veux m'assurer de bien comprendre ce graphique du CRTC, et je me demande si vous pourriez m'aider à comprendre le chiffre de 50 p. 100 à la rubrique «Mystery». C'est à la rubrique services spécialisés en langue anglaise diffusés pendant le jour, et il est indiqué: «50 p. 100 Y/A 1-3, 55 p. 100 Y/A 4-6». Pourriez-vous me traduire cela, s'il vous plaît?
M. Jean-Pierre Blais: C'est un service numérique pour lequel nous avons récemment accordé un permis.
M. Jim Abbott: Je me demande seulement ce que c'est que le Y/A.
M. Jean-Pierre Blais: C'est la première année d'exploitation. C'est un resserrement de leurs obligations en matière de contenu canadien. Donc, après 1-3, le A veut dire «année» et le Y correspond au mot anglais year.
M. Jim Abbott: Je comprends. D'accord.
M. Jean-Pierre Blais: C'est donc 50 p. 100 au cours des années 1 à 3, et ensuite cela passe à 55 p. 100, etc.
M. Jim Abbott: Au sujet de ce tableau, je voudrais poser une question au CRTC, mais j'inviterais aussi les autres membres du groupe à répondre à la deuxième partie de la question.
Voici la première partie de la question. Quel objectif le CRTC vise-t-il en accordant tous ces permis de canaux spécialisés? Quel est le rapport entre cela et le contenu canadien? Et la deuxième partie de la question, qui est directement liée, est celle-ci. Ce matin, nous avons entendu le Conseil des arts de Toronto, et nous avons aussi reçu d'autres témoins qui nous ont parlé du manque d'accès. Nous dépensons nettement plus d'un milliard de dollars de l'argent des contribuables canadiens pour créer du contenu canadien. Nous savons que les canaux spécialisés cherchent désespérément du contenu canadien. Et pourtant, nous avons entendu aujourd'hui une personne témoigner devant le comité, et d'autres aussi qui sont venues dire qu'il est difficile d'obtenir la diffusion de contenu canadien. Qu'est-ce qui cloche? Si nous dépensons des montagnes d'argent et qu'il n'y a aucun accès, alors même que le CRTC semble offrir tout l'accès voulu, il y a quelque chose qui cloche quelque part. Pouvez-vous m'aider à comprendre cela?
M. Jean-Pierre Blais: Je vais répondre à vos questions dans l'ordre.
Quel est l'objectif du conseil quand il accorde des permis pour tous ces services? Le mouvement en direction des canaux spécialisés et de la télévision payante n'est pas exclusivement canadien, c'est la même chose aux États-Unis et en Europe. Il faut aussi offrir un plus grand éventail de choix aux Canadiens, et c'est donc l'un des objectifs. Mais quand vous établissez un lien direct entre cela et le contenu canadien, c'est pour s'assurer que les Canadiens occupent cet espace avant que d'autres demandent qu'on distribue leur produit au Canada. Nous voulions donc une solution canadienne d'abord et avant tout.
Une autre option aurait consisté à ouvrir tout grands les bras à 13th Street, ce qui est l'équivalent américain d'un canal spécialisé dans les dramatiques policières. Nous aurions pu les inviter à venir s'établir au Canada, mais nous avons décidé que non, que nous lancerions plutôt un appel de demande de services spécialisés, parce que nous savons que nous pouvons imposer à nos détenteurs de permis des quotas de contenu canadien et créer ainsi un contenu et occuper ce champ. Voilà le lien avec le contenu canadien.
Quant à la deuxième question, il y a des créneaux pour de telles émissions. Nous avons mentionné Bravo et, du côté français, ARTV, qui offrent un débouché aux arts de la scène, mais en plus de cela, nous avons demandé à CBC et à la SRC de respecter des exigences précises et des conditions de licence relativement aux arts de la scène. Nous créons donc ce créneau.
La difficulté des émissions artistiques—et il y a de plus grands experts que moi autour de la table au sujet du financement des émissions artistiques—c'est que cela coûte très cher. Il n'y a pas beaucoup de compagnies—Rhombus en est une—et c'est très coûteux de produire des spectacles, des performances artistiques diffusées en direct. Il faut acheter des droits supplémentaires pour pouvoir filmer. En fait, il faut produire de façon différente, pour que la présence sur l'écran ait plus d'impact; on ne peut pas se contenter d'installer une caméra devant la scène. Il faut donc produire d'une manière différente.
Mme Johanne St-Arnauld (directrice générale par intérim, Téléfilm Canada): Je ne comprenais pas votre question sur le manque d'accès, mais je comprends maintenant ce que vous voulez dire.
La diffusion d'émissions artistiques a toujours coûté très cher. Heureusement, les redevances des radiodiffuseurs représentent entre 15 p. 100 et 20 p. 100 du montant qu'il faut pour déclencher le financement de Téléfilm. Les politiques du Fonds canadien de télévision pour cette année ont permis d'abaisser le seuil; c'était la recommandation et elle a été acceptée. Donc, si vous êtes un producteur et que vous voulez produire des émissions artistiques, il vous faudra, je pense, des redevances minimums de 10 p. 100. Ce sera donc plus facile d'avoir accès au financement de Téléfilm, et aussi au financement de la câblodistribution. Je pense donc que ce sont de bonnes nouvelles cette année pour les productions télévisuelles artistiques.
M. Jacques Bensimon: Je pense que vous avez raison, nous multiplions le nombre de fenêtres, nous construisons de grands boulevards énormes avec de nombreuses fenêtres. Le problème, c'est que la qualité du produit est de moins en moins bonne pour la simple raison que malgré un rayonnement plus grand, nous disposons toujours des mêmes budgets pour réaliser des émissions canadiennes. Par conséquent, nous avons dilué le processus et nous avons des droits de licence qui, comme le disait Johanne, sont de plus en plus bas. Dans tous les plans d'affaires que vous examinez, vous constatez qu'il faut de plus en plus de temps pour rentabiliser. Il faut donc énormément de temps avant que les détenteurs de licence ne soient en mesure d'investir dans des produits canadiens.
Voilà pourquoi j'ai souvent dit que l'Office du film a été—et je reviens à l'Office national du film—le point de départ d'un grand nombre de nouveaux canaux, a servi à valider ou à valoriser le contenu canadien. Immédiatement, on a lancé Bravo, on a lancé WTN. Tous ces réseaux font appel aux catalogues de l'Office du film pour pouvoir offrir du contenu canadien puisque ses produits sont réputés être canadiens à 100 p. 100.
• 1210
Avec l'évolution dans le secteur de la télédiffusion, le
mariage du canal documentaire avec l'ONF et Corus constitue un
modèle de réseau où le public et le privé se trouvent réunis.
Voilà pourquoi je vous demande et pourquoi je voudrais que la Loi
sur la radiodiffusion repense qui doivent être les détenteurs de
licence à l'avenir, qui devrait avoir droit à une licence et
j'avance le nom de l'Office national du film comme détenteur
possible parce que nous avons ses catalogues.
M. Robert Soucy: J'ajouterais au nom de BCPAC que l'appui intégré dont jouit cette industrie n'est pas seul responsable du financement des productions. Je m'avancerais même à dire que cela ne représente qu'un petit pourcentage de ce qui est nécessaire au fonctionnement de l'industrie de la production d'émissions de télévision. Le reste du financement provient de la pré-vente à des télédiffuseurs internationaux, à des télédiffuseurs canadiens aussi, sous forme d'avances de distribution de distributeurs étrangers et canadiens qui sont disposés à avancer des fonds sur la vente de ce matériel. Pour toutes sortes de raisons, peut-être le grand nombre de canaux, il y a peu d'argent disponible pour chaque émission. La commandite mondiale des émissions de télévision ne cesse de diminuer et il existe certainement une grande diversité dans ce nouveau monde de télédiffusion. Tout cela a évidemment une incidence sur le genre d'émissions réalisées.
Ce matin, M. Morrison a parlé aussi de la qualité des émissions diffusées et du fait que les créateurs perdent du financement et par conséquent ne profitent pas nécessairement de la diffusion de leurs oeuvres. Voilà des questions que doit certainement examiner ce comité, c'est-à-dire le financement du système compte tenu des marchés disponibles et de la mesure dont les créateurs bénéficient du financement qui existe.
Avons-nous atteint l'équilibre parfait ou y a-t-il déséquilibre, dans un sens ou dans l'autre et faut-il réexaminer encore une fois toute la question? En fait, Patrimoine Canada propose d'examiner toute la question du contenu canadien, le système des points. Est-ce toujours valide? Est-ce que ce système peut fonctionner dans des marchés en évolution? Comme vous le savez, les choses changent à tous les jours, certainement depuis septembre. Voilà d'excellentes questions, mais à l'heure même, il y a dilution du système.
Le président: Monsieur Soucy, j'espère que vous transmettez le message à Patrimoine Canada que si les fonctionnaires travaillent sur la question du contenu canadien, ils ne devraient pas reprendre ce que nous tentons de faire ici, et ils devraient plutôt nous faire parvenir l'information de façon à ce que nous puissions en tenir compte dans nos recommandations au gouvernement, on pourrait les inclure. Ce serait dommage si nous formulions des recommandations qui ne vont pas de pair avec ce que fait le ministère. Je pense qu'il devrait y avoir dialogue.
M. Robert Soucy: En effet.
Le président: Voilà vraiment la grande question, le contenu canadien.
M. Jim Abbott: Avec votre permission, monsieur le président, j'aimerais dire que nous en sommes à un point critique. Si j'ai bien compris—et dites-le-moi si je fais erreur—c'est qu'au fur et à mesure qu'il y a de plus en plus de chaînes spécialisées, au fur et à mesure qu'il y a de plus en plus de choix pour les Canadiens, nous nous retrouvons avec une dilution toujours plus grande du matériel canadien disponible, à un point que c'est comme si on ajoutait encore cinq ou dix équipes à la ligue nationale de hockey. Dieu sait qu'il y a suffisamment de dilution déjà. Est-ce vraiment ce dont il est question ici? En sommes-nous là?
M. Jean-Pierre Blais: Je dirais que c'est un peu plus compliqué, car lorsque l'on regarde le système de télédiffusion dans son ensemble, on y trouve divers éléments. Il y a toute une série de questions du côté de l'offre et du côté de la demande. Au Conseil, nous créons une demande en fixant des quotas de contenu canadien. Il y a d'autres parties du système qui facilitent l'offre en créant des mécanismes de financement. En fait, c'est plus que la création de mécanismes de financement, bien que cela soit important, il y a aussi les budgets de publicité qui servent à produire du matériel canadien, car s'il y a des téléspectateurs, il y aura de la publicité. Du côté des chaînes spécialisées, il y a des droits d'abonnement et donc si c'est un bon choix de programmation... Je ne suis pas persuadé que toutes les chaînes qui figurent ici survivront surtout à la lumière de la ronde la plus récente. Il faut des abonnés pour soutenir ces chaînes et certaines disparaîtront peut-être. La politique du Conseil ne vise pas nécessairement à garantir leur survie.
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Mais s'il y a des téléspectateurs et s'ils souhaitent
particulièrement regarder du contenu canadien, sur Book
Television, par exemple, le contenu canadien provient de livres,
cela se fera et on peut espérer que l'on pourra aller chercher de
l'argent des abonnés, des annonceurs, du public, des
câblodistributeurs. C'est donc une question de pression et
d'attraction, si je peux dire, ou d'offre et de demande. C'est
compliqué.
M. Jacques Bensimon: Puis-je vous en donner un exemple?
Le président: Oui, brièvement, monsieur Bensimon.
M. Jacques Bensimon: Oui.
M. Shaw de Shaw Cable, jusqu'à un certain point a dit la vérité cet été, lorsqu'il a déclaré qu'il y avait un choix à faire. Je dirais que cela nous a tous forcés dans l'industrie à faire quelque chose. D'abord, il a fallu collaborer plus étroitement les uns avec les autres. Et donc comme dans l'exemple donné plus tôt, au lieu d'obtenir une licence d'un télédiffuseur, vous avez peut-être une collaboration entre deux, trois ou quatre télédiffuseurs qui participent à une production. Voilà une formule. Ensuite, on peut être plus ouvert aux coproductions internationales, ce qui fait appel aux traités internationaux que nous avons mis en place. Je dirais donc comme M. Blais qu'en fait, c'est une façon beaucoup plus compliquée de conclure des ententes que par le passé.
Le président: Très bien.
Merci beaucoup. Je pense que cette réunion a été extrêmement intéressante et des plus utiles. Nous vous sommes très reconnaissants de votre participation ici aujourd'hui. Merci d'être venus.
La séance est levée.