SINT Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Sous-comité du commerce international, des différends commerciaux et des investissements internationaux du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mercredi 20 mars 2002
¹ | 1530 |
¹ | 1535 |
¹ | 1540 |
Le président |
¹ | 1545 |
¹ | 1550 |
¹ | 1555 |
º | 1600 |
º | 1605 |
M. Larry Hill |
M. Rick Casson |
M. Bob Friesen |
º | 1610 |
M. Rick Casson |
Mme Sandra Marsden |
Le président |
Le président |
M. Pierre Paquette (Joliette, BQ) |
Mme Sandra Marsden |
M. Paquette |
M. Pierre Paquette |
º | 1615 |
M. Pierre Paquette |
Mme Sandra Marsden |
M. Paquette |
M. Bob Friesen |
Le président |
M. Liam McCreery |
º | 1620 |
Le président |
M. Pierre Paquette |
Le président |
M. Pierre Paquette |
Le président |
M. Pierre Paquette |
Le président |
M. Pierre Paquette |
M. Casey |
M. Neil Jahnke |
M. Casey |
M. Neil Jahnke |
M. Casey |
º | 1625 |
M. Neil Jahnke |
M. Casey |
M. Neil Jahnke |
M. Jim Caldwell |
M. Casey |
M. Neil Jahnke |
M. Jim Caldwell |
M. Casey |
Mme Sandra Marsden |
M. Casey |
Mme Sandra Marsden |
M. Casey |
Mme Sandra Marsden |
M. Casey |
Mme Sandra Marsden |
M. Casey |
Mme Sandra Marsden |
M. Casey |
Mme Sandra Marsden |
M. Casey |
Mme Sandra Marsden |
M. Casey |
Mme Sandra Marsden |
M. Casey |
M. Larry Hill |
º | 1630 |
M. Casey |
M. Larry Hill |
M. Casey |
M. Larry Hill |
M. Casey |
M. Neil Jahnke |
M. Jim Caldwell |
M. Casey |
M. Jim Caldwell |
M. Neil Jahnke |
M. Casey |
M. Casey |
º | 1635 |
M. Casey |
Le président |
º | 1640 |
M. Bob Friesen |
º | 1645 |
M. Mark Eyking |
M. Liam McCreery |
M. Mark Eyking |
M. Liam McCreery |
M. Bob Friesen |
M. Jim Caldwell |
º | 1650 |
M. Mark Eyking |
M. Jim Caldwell |
M. Rick Casson |
M. Liam McCreery |
Le président |
M. Bob Friesen |
º | 1655 |
M. Larry Hill |
M. Rick Casson |
M. Pierre Paquette |
Le président |
» | 1700 |
M. Bob Friesen |
Le président |
» | 1705 |
M. Bob Friesen |
CANADA
Sous-comité du commerce international, des différends commerciaux et des investissements internationaux du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le mercredi 20 mars 2002
[Enregistrement électronique]
¹ (1530)
[Traduction]
Le président (M. Mac Harb (Ottawa-Centre-, Lib.)): La séance du Sous-comité du commerce international, des différends commerciaux et des investissements internationaux du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international est ouverte. Nous examinons diverses questions liées à l'Organisation mondiale du commerce en vue de faire rapport à la Chambre des communes. Dans ce rapport, nous entendons présenter un certain nombre de suggestions. À cette fin, nous avons déjà tenu de nombreuses séances et aujourd'hui, nous avons l'honneur d'accueillir un groupe d'éminents Canadiens de la Commission canadienne du blé, de la Canadian Cattlemen's Association, de la Fédération canadienne de l'agriculture, de l'Alliance canadienne du commerce agro-alimentaire, de l'Institut canadien du sucre et de l'Union des producteurs agricoles du Québec.
Je vous souhaite la bienvenue. Nous allons commencer par la Commission canadienne du blé. Chaque organisme aura entre trois et cinq minutes pour faire une déclaration liminaire. Ensuite, nous ouvrirons la discussion et c'est à ce moment-là que nous vous poserons des questions. Autrement dit, plus vous serez brefs, mieux ce sera car nous pourrons poser davantage de questions. Si vous avez un mémoire, nous considérerons qu'il fait partie intégrante du procès-verbal du comité pour que vous n'ayez pas à le lire intégralement.
Monsieur Hill, vous avez la parole.
M. Larry Hill (directeur, Commission canadienne du blé): Merci beaucoup. Je vous remercie de me donner l'occasion de prendre la parole devant le comité.
La CCB vend sur les marchés d'exportation le blé et l'orge produits dans l'ouest du Canada tant pour l'alimentation animale que pour la consommation humaine. Notre organisme est régi par un conseil d'administration composé de dix agriculteurs élus et de cinq personnes nommées par le gouvernement fédéral. Sa mission consiste à optimiser le revenu des producteurs de l'ouest du Canada grâce à la mise en marché de produits et de services de qualité.
Les ventes à l'exportation représentent 63 p. 100 de la production de blé, 75 p. 100 de la production de blé dur et 13 p. 100 de la production d'orge de l'Ouest canadien, le reste étant consommé au pays. En l'occurrence, nous tenons à bien faire comprendre que les agriculteurs de l'Ouest canadien dépendent beaucoup plus des exportations que leurs homologues des États-Unis et de l'Union européenne. La valeur des ventes de la CCB est de quatre à six millions de dollars canadiens environ par année. Je souligne que la CCB ne reçoit ni n'offre de subventions. Le blé et l'orge sont commercialisés à l'échelle nationale et internationale strictement en fonction de considérations commerciales.
La CCB appuie la position de négociation initiale du gouvernement fédéral à l'OMC. Nous partageons les mêmes objectifs dans les domaines de la concurrence à l'exportation, du soutien interne et de l'accès au marché. La CCB adhère aux accords commerciaux bilatéraux et multilatéraux qu'elle considère comme un moyen d'établir des environnements commerciaux équitables dotés de règles claires en matière de règlement des différends. Elle préconise l'élimination des subventions à l'exportation. En ce moment, les États-Unis et l'Union européenne ne subventionnent pas le blé et l'orge, mais des dispositions relatives aux subventions à l'exportation ont toujours cours dans ces deux régions.
Le fait que l'on utilise l'aide alimentaire à des fins de développement des marchés commerciaux plutôt qu'à des fins humanitaires n'est pas sans nous inquiéter. De même, les crédits à l'exportation assortis d'échéances de remboursement excessivement longues dont on se sert comme moyen d'écouler des produits excédentaires ou de développer des marchés commerciaux représentent une menace sérieuse à un commerce international des céréales équitable axé sur les forces du marché. Des disciplines efficaces doivent être imposées sur les crédits à l'exportation abusifs, ainsi que sur le recours illégitime à l'aide alimentaire en vue de créer un environnement commercial équitable.
La CCB ne saurait être assimilée à une subvention à l'exportation et par conséquent, elle ne relève pas de la définition d'une subvention à l'exportation, ce qui la rendrait passible d'élimination. Des dispositions spéciales, notamment le pouvoir d'exporter à partir d'un guichet unique et des garanties du gouvernement, sont essentielles au fonctionnement de la CCB et doivent être maintenues. D'ailleurs, l'article 17 de l'OMC permet explicitement l'existence d'entreprises commerciales d'État, et il doit continuer d'en être ainsi.
Les négociations ne doivent aucunement entraver la capacité de la CCB de fonctionner en tant qu'organisme commercial. Il convient de maintenir la protection des renseignements commerciaux confidentiels et la CCB ne doit pas être assujettie à des exigences plus rigoureuses que celles qui s'appliquent aux commerçants privés. Il est absolument crucial que la CCB ne soit pas défavorisée en étant tenue de communiquer des renseignements commerciaux confidentiels et des données relatives à des transactions spécifiques. Les disciplines susceptibles de nous être imposées doivent également s'appliquer aux grandes entités privées. À ce propos, il ne faut pas perdre de vue le fait que 38 p. 100 du commerce du blé est contrôlé par quatre sociétés privées seulement.
À l'aube du cycle de Doha, un domaine particulier nous cause beaucoup d'inquiétude, soit le soutien interne porteur de distorsions au niveau de la production et du commerce. Le système des catégories ou des boîtes de couleur instauré au cours du Cycle d'Uruguay n'a pas permis de régler ce problème de façon satisfaisante et il doit être réévalué. Des mesures de soutien en agriculture extrêmement généreuses, comme celles que l'on voit aux États-Unis et dans l'Union européenne, constituent un incitatif aux investissements non économiques, ce qui au bout du compte se traduit par une surproduction et un affaissement des cours mondiaux. Ces répercussions touchent plus durement les agriculteurs qui tentent de livrer concurrence sans de telles subventions, ce qui englobe les agriculteurs de l'Ouest. On estime que les subventions accordées par les pays étrangers ont coûté aux producteurs de céréales et de graines oléagineuses de l'Ouest canadien 1,2 milliard de dollars canadiens en revenus nets par année.
¹ (1535)
La redéfinition des catégories ne doit pas permettre les abus ou y laisser place, comme cela a été le cas après le Cycle d'Uruguay. Des réductions concrètes et substantielles des subventions gouvernementales doivent être réalisées. La CCB prône des changements qui auraient les résultats suivants: l'imposition de limites officielles sur les dépenses totales au soutien agricole, la suppression de la catégorie bleue et un plafond intégral sur les subventions à effet de distorsion commerciale ciblées de façon minimale par la catégorie verte.
La dernière contestation commerciale montée par les États-Unis contre la CCB a encore une fois fait la preuve que la CCB est un organisme commercial équitable et que nos ventes aux États-Unis ne nuisent pas aux agriculteurs américains. L'aspect décourageant de la décision est le harcèlement continu de notre organisme comme le montre la décision du Bureau du représentant américain au Commerce dans laquelle on évoque d'autres contestations potentielles. Ces incessantes contestations sont pénibles pour les agriculteurs de l'Ouest. Il faut que cela cesse.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Le président:: Merci, monsieur Hill.
Monsieur Caldwell.
M. Jim Caldwell (directeur, Affaires gouvernementales, Canadian Cattlemen's Association): Merci beaucoup, monsieur le président. Nous sommes ravis d'avoir l'occasion de venir discuter aujourd'hui de la situation de notre industrie avec les membres du comité.
Je commencerai l'exposé et M. Jahnke, notre président, prendra le relais.
En guise de contexte, l'industrie bovine du Canada compte 100 000 éleveurs de bovins de boucherie et avec un chiffre d'affaires de 7,8 milliards de dollars en 2001, ou approximativement 22 p. 100 du revenu agricole canadien, elle représente la principale source de recettes monétaires agricoles du pays. À l'heure actuelle, le Canada est le troisième importateur de boeuf et de bovins de boucherie au monde, avec 12 p. 100 des exportations mondiales. La valeur des exportations a atteint 3,9 milliards de dollars en 2001, soit une hausse de 20 p. 100 par rapport aux trois milliards de dollars de l'an 2000. Deux des plus grandes et des plus modernes usines de transformation de la viande se trouvent en Alberta et on prévoit une expansion d'envergure de la plus importante usine en Ontario. Nous avons donc le vent dans les voiles.
L'industrie bovine canadienne a également été le promoteur du programme d'identification nationale, le programme «Quality Starts Here», des programmes de marquage, des programmes ARMPC, de l'adaptation à une nouvelle technologie et de l'instauration d'un nouveau système d'identification et de vente au détail axé sur le consommateur. Toutes ces composantes unissent leurs efforts pour assurer une plus grande sécurité du boeuf. Il existe manifestement des perspectives de croissance intéressantes dans notre secteur. D'après notre nouvelle stratégie de commercialisation mondiale, il serait possible d'accroître nos ventes de boeuf de 172 000 tonnes d'ici 2010, ou de 18 p. 100.
Je demanderai maintenant à M. Jahnke, président de la Canadian Cattlemen's Association, de nous énoncer certains des objectifs du secteur du boeuf de boucherie dans le contexte des négociations commerciales.
¹ (1540)
M. Neil Jahnke (président, Comité du commerce international, Canadian Cattlemen's Association): Merci, Jim, monsieur le président.
Une plus grande libéralisation du marché continue d'être notre priorité au cours du cycle qui s'amorce. Nous souhaitons que l'on continue de réduire les programmes et les subventions ayant pour effet de fausser la production et le commerce et que l'on améliore l'accès au marché. Cela passe par la suppression de tous les droits et tarifs sur la production contingentée, la plus grande réduction possible des tarifs, des règles claires et exécutoires relativement à l'administration des contingents tarifaires et la plus forte hausse possible des engagements d'accès minimum.
Nous souhaitons prioritairement, entre autres, une plus grande libéralisation des marchés du boeuf de la Corée et du Japon, un accès raisonnable à l'Union européenne--ce qui est un irritant de longue date pour nous--et le maintien d'un contingent tarifaire équivalent pour les produits du boeuf avec les États-Unis, y compris des taux tarifaires identiques. Nous voulons aussi que soient éliminées toutes les subventions à l'exportation. À défaut d'atteindre pleinement cet objectif, nous préconisons que l'on reconduise l'assurance d'Andriessen, selon laquelle les États-Unis n'auront pas recours à la restitution à l'exportation pour subventionner les exportations de boeuf sur le marché asiatique.
En ce qui concerne le soutien interne, nous souhaitons que l'on abaisse davantage le niveau des dépenses admissibles au titre des subventions nationales au commerce et à la production ayant des effets de distorsion ainsi que l'élimination de la catégorie bleue applicable aux subventions intérieures à la production.
Nous recommandons également que l'accord sur l'application des mesures sanitaires et phytosanitaires ne soit ni inclus ni rouvert dans la prochaine ronde de négociations. Notre politique dans ce domaine repose sur les principes suivants. L'adoption de règles fondées sur la science empêcherait que l'on recourre aux mesures SPS en guise de barrières non tarifaires au commerce, faisant ainsi des principes scientifiques objectifs le seul critère pour résoudre les enjeux liés aux mesures SPS.
Nous voulons que les règles antidumping changent et que l'on reconnaisse que les fluctuations cycliques des prix dans les pays importateurs et exportateurs sont une fonction normale de l'offre et de la demande et que la définition de dumping se limite à la discrimination liée aux prix abusifs.
Nous souhaitons aussi nous assurer que les exigences concernant les normes techniques, l'approbation d'organismes génétiquement modifiés, l'étiquetage des produits et la sécurité des aliments reposent sur des principes scientifiques acceptés à l'échelle internationale et conformes à nos obligations commerciales nationales.
Nous voulons instamment que le mécanisme de règlement des différends de l'OMC soit renforcé pour assurer une prompte mise en oeuvre de ses décisions. D'ailleurs, il faudrait prévoir une indemnisation financière en cas de non-observance. Je n'ai pas besoin d'évoquer l'Union européenne et tous les problèmes que nous avons eus à cet égard.
Nous vous remercions d'avoir été à l'écoute de notre point de vue.
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur Friesen.
¹ (1545)
M. Bob Friesen (président, Fédération canadienne de l'agriculture): Merci beaucoup, monsieur le président. C'est un plaisir pour nous que d'être ici pour vous présenter certains des grands objectifs que nous estimons devoir atteindre au cours du prochain cycle de négociations.
Nous avons apporté, pour qu'elle vous soit distribuée, une trousse qui comprend un énoncé de la politique commerciale de la FCA, ainsi qu'un mémoire dont je me servirai pour faire certaines observations cet après-midi, sans toutefois le lire intégralement. Bien sûr, la FCA a toujours pensé que l'OMC devait êre le principal véhicule à employer pour élaborer et établir des règles claires et efficaces régissant le commerce international.
À notre avis, les deux principaux objectifs que nous devons atteindre au cours du prochain cycle sont les suivants: conclure un accord visant à supprimer les subventions à l'exportation et conclure un accord contenant des règles précises et exécutoires qui s'appliquent de la même façon à tous les membres pour rectifier la disparité du niveau des engagements qui a découlé du Cycle d'Uruguay. Comme la plupart d'entre nous le savons, l'accord d'Uruguay n'a pas été mis en oeuvre dans tous les pays selon l'esprit et les règles découlant des dernières négociations. Il faut en arriver à une certaine équité à cet égard.
La Fédération canadienne de l'agriculture a toujours soutenu la position de négociation initiale du gouvernement. Nous croyons que cette position demeure fort valable. Le document d'information fourni pour la présente audience pose la question suivante: comment peut-on concilier la position canadienne avec l'attitude combative du Groupe de Cairns? La pierre angulaire est la suprématie du mandat de négociation du Canada.
Nous avons appris par des organismes agricoles de pays membres du Groupe de Cairns que notre gouvernement avait mené des consultations beaucoup plus exhaustives dans le monde agricole, ce qui légitimise et renforce conséquemment la position de négociation initiale du Canada. Aucun autre pays du Groupe de Cairns n'a réalisé de consultations aussi larges auprès de son secteur et de sa clientèle. Nous avons donc un mandat de négociation plus exhaustif que n'importe quel autre pays membre de Cairns.
Cela dit, il est aussi manifeste que les autres pays du Groupe de Cairns ont une attitude plus combative dès qu'il est question de commerce. Bien que leur position n'ait pas un caractère aussi exhaustif, ils adoptent une attitude beaucoup plus musclée, ne se bornant simplement à affirmer la nécessité du libre-échange. Nous savons tous que le simple fait de parler de libre-échange ne débouche pas sur l'instauration de règles justes et équitables et ne nous rapproche pas nécessairement des objectifs que nous tentons de réaliser. Il va de soi que même si le Canada est membre du Groupe de Cairns, il y a certains domaines où il ne saurait être d'accord avec ses partenaires et en l'occurrence, advenant qu'il ne puisse se rallier à la position du Groupe de Cairns, le Canada devrait présenter ses propres positions à l'OMC. C'est uniquement de cette façon que nous pourrons atteindre nos objectifs.
Permettez-moi d'aborder brièvement certains des enjeux d'intérêt particulier pour le prochain cycle si nous voulons parvenir à nos fins.
Premièrement, j'ai déjà mentionné que nous souhaitons l'élimination des subventions à l'exportation. Dans cette optique, il faut notamment s'assurer que les autres pays ne pourront recourir aux crédits à l'exportation, aux programmes de promotion des exportations et à l'aide alimentaire pour masquer des subventions à l'exportation. Je me bornerai simplement à attirer votre attention sur la nouvelle mesure agricole faisant l'objet de discussions aux États-Unis, le U.S. farm bill, qui prévoit de faire passer les sommes consacrées aux programmes d'accès aux marchés de 90 à 200 millions de dollars. Il faut faire en sorte que cela ne se concrétise pas.
Je tiens à dire qu'avec sa position de négociation initiale, le Canada dispose de tous les outils nécessaires pour obtenir tout ce qu'il souhaite obtenir pour l'ensemble des secteurs agricoles du pays. Le concept du tarif unique et du tarif à double niveau qui fait partie intégrante du mandat de négociation du Canada est sans contredit la voie à suivre. Le Canada devrait viser l'équivalence complète des niveaux d'accès minimal reposant sur des règles claires et précises. Le Canada devrait chercher sans relâche à obtenir un accès optimal pour les secteurs agricoles canadiens ayant un grand intérêt dans l'exportation. Je songe notamment à l'initiative zéro pour zéro qu'ont embrassée certains de nos exportateurs. C'est certainement là une initiative dont nous pouvons tirer parti pour nous prévaloir de meilleures possibilités d'accès aux marchés. Évidemment, lorsqu'on parle d'accès minimal aux marchés, nous savons que d'autres pays n'ont respecté ni l'esprit ni la lettre des dernières négociations d'Uruguay. Nous devons obtenir prioritairement que tous les pays de l'OMC offrent le même accès minimal que le Canada a offert depuis la signature de l'accord d'Uruguay. Les secteurs agricoles qui offrent déjà un accès supérieur à l'accès minimal commun à l'OMC ne devraient pas avoir à consentir un accès additionnel.
¹ (1550)
En matière d'engagements minimum aux marchés et de réduction des tarifs, la FCA recommande un ensemble de règles qui, une fois mises en oeuvre, rehausseraient sensiblement nos perspectives d'accès aux marchés dans le monde. Nous visons zéro, c'est-à-dire l'abolition complète des tarifs à l'intérieur des contingents tarifaires. Nous préconisons la désagrégation de l'accès aux marchés; autrement dit, l'accès aux marchés devrait être offert en fonction de chaque produit. Nous devrions également enrayer la progressivité des tarifs; cela signifie qu'on devrait autoriser l'accès à un produit et à tous les produits à valeur ajoutée subséquents au même niveau. Il faudrait aussi chercher à faire abaisser le plus possible tous les autres tarifs uniques. Par tarifs uniques, nous entendons les tarifs supérieurs à un contingent tarifaire, les tarifs qui ne protègent pas un contingent tarifaire. Nous réclamons donc une baisse optimale des tarifs uniques. Parallèlement, les tarifs qui ne protègent pas un contingent tarifaire devraient demeurer à un niveau qui assurera l'accès souhaité aux marchés.
J'ai dit tout à l'heure que nous avions tous les outils nécessaires pour atteindre deux objectifs, soit maintenir des structures commerciales ordonnées et rehausser l'accès aux marchés. Les Européens ont suggéré, entre autres, de revenir à la case départ et d'employer la même formule de réduction des tarifs que nous avions employée au cours du dernier cycle, qui tournait en moyenne autour de 15 p. 100. Notre gouvernement a mis sur la table une proposition qui s'inscrit dans l'énoncé de politique commerciale de la FCA, selon laquelle les pays devraient réduire leurs tarifs au plus bas niveau possible. Cependant, si les pays ne sont pas prêts à abaisser leurs tarifs à un niveau qui permet un accès valable, ils devraient offrir un accès minimum garanti. Si vous faisiez des recherches dans ce domaine, vous constateriez que dans bien des cas, si un pays accepte uniquement d'abaisser ses tarifs de 15 p. 100, le mur demeure tout de même trop haut pour que nous puissions le franchir. En fait, nous obtiendrions un meilleur accès à son marché s'il garantissait un accès minimum.
Permettez-moi d'aborder divers autres sujets, dont celui du soutien interne. Comme vous le savez, les agriculteurs canadiens doivent livrer concurrence au Trésor des gouvernements des autres pays. Nous exigeons une réduction des mesures de soutien interne. Nous réclamons également l'application d'un plafond sur toutes les dépenses agricoles. Le plafond en question serait fondé sur un pourcentage de la valeur de la production à la ferme. Il faut éliminer l'exemption des programmes de la catégorie bleue des limites de la catégorie orange. Il convient également de préciser et de resserrer les programmes de la catégorie verte. Il est évident--et je n'ai pas besoin de vous le dire--que certains des programmes qui ont été classés dans la catégorie verte, supposément parce qu'ils n'avaient pas d'effet de distorsion, ne répondent plus à ce critère depuis que le niveau des dépenses a monté en flèche. Voilà pourquoi nous voulons que l'on redéfinisse et que l'on précise les programmes de la boîte verte.
Pour ce qui est des mesures antidumping que l'on a déjà mentionnées, il est indéniable que certains pays font un emploi abusif des recours commerciaux, mais à ce stade-ci, nous ne réclamons pas l'élimination des droits antidumping. Tout comme l'a dit l'intervenant précédent, nous estimons que le sujet mérite un examen sérieux. Les recours commerciaux pourraient avoir des répercussions plus graves que celles que nous avons connues ces derniers temps.
En outre, nous voulons faire reconnaître qu'un droit compensateur ne peut pas être supérieur à la différence nette entre les niveaux des subventions octroyées pour le produit dans le pays exportateur et le pays importateur. Au cours des deux dernières années, un autre pays nous a imposé des droits compensateurs ainsi que des droits antidumping alors qu'en fait, il dépensait des sommes considérables pour subventionner son propre secteur. En pareil cas, un pays ne devrait pas pouvoir imposer de droits compensateurs.
¹ (1555)
Je le répète: nous avons les outils qu'il faut. Il ne fait aucun doute que l'approche employée par le Canada recueille de plus en plus d'appuis dans le monde car les autres pays commencent à se rendre compte que la seule façon d'atteindre leurs objectifs est d'avoir un cycle discipliné, un cycle qui permet l'élaboration de règles claires et exécutoires. C'est le seul moyen de gérer le commerce mondial.
J'ajouterais que s'il souhaite réussir, il est absolument impératif que le Canada conclue des alliances dans le monde en faveur de sa position car nous estimons qu'elle renferme énormément de potentiel. C'est en bâtissant des alliances que nous pourrons le mieux négocier des résultats favorabales pour le secteur agricole canadien.
En guise de conclusion, je vous signale que la FCA a dirigé une délégation à Genève à la fin de l'automne dernier. D'après les rencontres que nous avons eues avec des délégations de pays spécifiques et après avoir entendu les propos du commissaire Fischler et des porte-parole américains, il est très clair qu'il y aura encore une fois un mouvement concerté de plusieurs pays en vue de forcer le Canada à déréglementer, en partie, ses structures de mise en marché. Parallèlement, ces mêmes pays, qui réclament l'ouverture des frontières, vont exercer de fortes pressions et il est plausible qu'ils réussissent à maintenir leur capacité de consacrer des sommes d'argent substantielles aux subventions agricoles. Si tel est le cas, on peut envisager un scénario selon lequel on déréglementera partiellement les structures de mise en marché ordonnée et on autorisera les autres pays à acheter des marchés à leur guise. Si cela se produisait, tout notre secteur agricole sortirait perdant. Nous devons donc être très vigilants. Encore une fois, la solution consiste à nouer des alliances pour s'assurer de pouvoir négocier les objectifs que s'est donné le Canada.
Merci.
Le président: Merci beaucoup.
Liam.
M. Liam McCreery (président, Alliance canadienne du commerce agroalimentaire): Merci, monsieur le président. En premier lieu, je vous suis reconnaissant, ainsi qu'aux membres du comité, de nous permettre de faire un exposé aujourd'hui.
Je m'appelle Liam McCreery et je suis un agriculteur commercial du sud de l'Ontario. Je suis également président d'une organisation appelée l'Alliance canadienne du commerce agroalimentaire, que je vous présenterai aujourd'hui. Je suis accompagné de Ted Haney, l'un des membres du conseil d'administration de l'Alliance, qui est ici pour rattraper les omissions que je ferai sans aucun doute.
J'ai remis au greffier un mémoire intitulé «The Benefits of Further Trade Liberalization». Je souhaite qu'il fasse partie intégrante de mon exposé et qu'il soit intégré au compte rendu. Merci.
L'Alliance canadienne du commerce agroalimentaire est une coalition de 12 associations, sociétés et exportateurs unis par la volonté d'appuyer une plus grande libéralisation du commerce agricole et agroalimentaire dans le monde. Notre groupe est unique puisqu'il n'est pas composé uniquement de producteurs, de transformateurs ou d'exportateurs. Nos membres sont issus de tous ces secteurs et représentent une tranche importante de l'industrie. Les membres de l'Alliance apportent une contribution considérable à l'économie agricole et nationale du Canada. Ensemble, ils emploient directement près de 500 000 Canadiens dans la production et la transformation. Nos transactions commerciales représentent des rentrées de plus de 40 milliards de dollars par an, ce qui est sensiblement plus que la valeur de la production à la ferme au Canada. Nous sommes à l'origine de 70 à 80 p. 100 du total des exportations agroalimentaires du Canada, chiffrées à 18,3 milliards de dollars pour l'an 2000. Il convient de noter également que d'après les estimations pour 2001, nous avons exporté des produits agricoles et agroalimentaires d'une valeur de 26,3 milliards de dollars et contribué plus de sept milliards de dollars au surplus commercial. Notre poids dans l'économie est donc loin d'être négligeable.
Une plus grande libéralisation du commerce profiterait énormément au secteur agricole et à l'économie canadienne dans son ensemble. Agriculture Canada estime que pour toute augmentation des exportations de l'ordre de un milliard de dollars, le revenu monétaire net des agriculteurs enregistrerait une hausse d'environ 300 millions de dollars. Le Centre George Morris, un groupe de réflexion dont le siège social est à Guelph, en Ontario, est arrivé à la conclusion que la suppression de tous les tarifs d'ici dix ans rapporterait 2,5 milliards de dollars de plus par année à notre secteur.
L'objectif ultime de l'Alliance est l'élimination de la totalité des subventions et des tarifs à l'échelle mondiale sur une base réciproque. Au cours de la transition vers un environnement commercial exempt de subventions et de tarifs, l'Alliance privilégie la diminution substantielle des tarifs en tous genres dans tous les pays membres de l'OMC, une hausse marquée des engagements d'accès minimum; la suppression de toutes les subventions à l'exportation et un moratoire sur leur utilisation future; des accords de protection zéro dans les secteurs où du commerce international des denrées où ils peuvent s'appliquer; une réduction sensible des programmes de soutien interne à effet de distorsion, produit par produit; l'élaboration de règles claires et applicables pour s'assurer que les programmes dont l'effet de distorsion est considéré minime ou non existant n'influent effectivement pas sur la production et le commerce; l'adoption de règles garantissant que les mesures prises en vue de protéger la santé humaine et l'intégrité de l'environnement sont fondées sur des principes scientifiques reconnus à l'échelle internationale; l'adoption de règles faisant en sorte que les différends commerciaux soient résolus sans délai; l'élaboration et l'application de définitions et de règles claires visant à assurer que les pays en développement et défavorisés s'intègrent pleinement à l'OMC et tirent parti d'un environnement commercial plus ouvert.
J'ai eu l'honneur de faire partie de la délégation canadienne à Doha, en novembre. Très solide, la position commerciale du Canada s'articulait autour de trois piliers: l'accès aux marchés, le soutien interne et les subventions à l'exportation. Nous préconisons un élargissement de l'accès aux marchés, une diminution du soutien interne et l'élimination de toutes les suventions à l'exportation.
Vous avez en main l'excellent mémoire que nous avons rédigé--du moins, nous pensons qu'il est excellent. Vous y trouverez la liste de nos groupes. Nos membres sont disséminés partout au Canada, répartis sur l'ensemble du secteur et nous sommes fiers de ce que nous faisons. Je suis honoré d'avoir pu faire cet exposé aujourd'hui.
Merci.
º (1600)
Le président: Merci beaucoup de cet excellent exposé.
Nous allons passer à l'Institut canadien du sucre. Sandra.
Mme Sandra Marsden (présidente, Institut canadien du sucre): Merci, monsieur le président. Je suis heureuse d'être ici pour vous parler brièvement de la position de l'industrie canadienne du sucre dans le contexte de l'OMC.
Comme bon nombre d'entre vous l'avez déjà entendu dire auparavant, l'OMC est une tribune essentielle pour l'industrie du sucre du Canada, et ce pour bien des raisons. Les accords commerciaux antérieurs n'ont pas résolu les problèmes de notre secteur. Nous fonctionnons essentiellement dans un libre marché. Nous talonnons les États-Unis, qui sont le principal importateur de sucre brut de l'hémisphère occidental, et nous allons sans doute les dépasser à cet égard. Nous avons les tarifs sur le sucre les plus bas du monde ainsi que des droits de douane effectivement appliqués de 0 et 8 p. 100 sur le sucre brut et le sucre raffiné respectivement. Cela dit, le reste du monde ne fonctionne pas de cette façon. Les producteurs de sucre sont protégés. En fait, le sucre est l'une des denrées les plus fortement protégées du monde. En conséquence, nous sommes forcés de composer avec cet environnement faussé.
Moins de 1 p. 100 de notre production de sucre raffiné peut être exportée, compte tenu des barrières à l'importation appliquées aux États-Unis et ailleurs dans le monde. Voici un exemple de la protection tarifaire dont jouit le sucre, qu'elle prenne la forme de contingents tarifaires ou de simples tarifs. Aux États-Unis, les tarifs sont de l'ordre de 150 p. 100, au Guatemala de 160 p. 100 et dans le cas du Japon, ils dépassent les 200 p. 100. Il n'y a donc tout simplement pas d'ouvertures pour les exportations. Nous dépendons de nos clients, de nos usines de transformation. Quatre-vingt-cinq pour cent du sucre vendu fait l'objet d'une transformation ultérieure. Pour ce qui est des produits non visés par les contingentements, les exportations accusent une certaine croissance.
Nous appuyons donc l'adoption par l'OMC d'un programme musclé qui exige l'adhésion de tous les membres de l'organisme et qui stipule que l'on cible carrément les denrées qui ont échappé au Cycle d'Uruguay, le sucre et un certain nombre d'autres produits étant du lot.
Pour ce qui est de la position initiale du Canada, nous souhaitons qu'on s'attache à instaurer des règles du jeu équitables car pour l'heure, la situation n'est pas équitable pour nous et pour de nombreux autres groupes faisant partie de l'Alliance canadienne du commerce agroalimentaire.
Tout comme eux, nous jugeons important de multiplier les exportations de produits à valeur ajoutée. Nos membres produisent du sucre raffiné, du thé glacé, des boissons à base de cristaux et des mélanges gélatineux sucrés; nous ajoutons donc de la valeur tout au long de la chaîne et il est particulièrement important que les restrictions ne soient pas plus serrées à l'égard de ces produits. Par exemple, les États-Unis autorisent des importations de 1,1 million de tonnes de sucre brut et de 22 000 tonnes de sucre raffiné dans le monde entier, et cela ne peut tout simplement pas continuer si nous voulons que notre secteur tire son épingle du jeu.
Nous appuyons sans réserve les trois piliers de la position canadienne. Il est inutile que je les réitère. Cependant, nous estimons que l'approche du Canada relativement à l'accès aux marchés n'est pas aussi combative que nous l'aurions souhaité en termes d'appui à notre secteur ainsi qu'à d'autres exportateurs agricoles au Canada. Nous serions en faveur d'une approche qui nous laisse un vaste éventail d'options car les autres pays ont recours à une large gamme de moyens pour restreindre l'accès, que ce soit des taux de droits applicables intracontingent, des taux de droits hors contingent ou de simples tarifs. Nous estimons que toutes ces composantes doivent être visées par la réforme du commerce. De toute évidence, si nous ne mettons pas sur la table certains de ces éléments, nous risquons de sortir du prochain cycle les mains vides.
Il va de soi que nous souhaitons que le processus progresse rapidement, tout en reconnaissant qu'il y a partout dans le monde des obstacles qui freinent un tel progrès. Nous favorisons le versement de paiements initiaux au début du processus. Nous prônons une telle approche dans la perspective canadienne, compte tenu surtout de l'avancement des négociations régionales, qui seront plus problématiques qu'utiles pour notre secteur, lorsque les négociations en question ne mettent pas en cause les États-Unis, notre principal marché d'exportation.
Pour ce qui est des questions de développement, nous adhérons au concept d'un accord pour tous les membres, ce qui s'inscrit dans la philosophie de l'Alliance canadienne du commerce agroalimentaire, ainsi qu'un régime particulier en matière de renforcement des capacités, etc. Cependant, il convient de distinguer entre les économies de pays en développement en cours de transition et celles de pays moins favorisés. Par exemple, le Brésil est le producteur de sucre le plus important, le plus efficient et le plus concurrentiel au monde et à notre avis, il faudrait en tenir compte lorsqu'on envisage un traitement spécial et différencié.
C'était là mes observations. Merci.
º (1605)
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur Casson.
M. Rick Casson (Lethbridge, Alliance canadienne): Merci.
Je remercie les témoins d'être venus et de nous avoir présenté des exposés aussi bien préparés, concis et brefs, parce que vous êtes tellement nombreux. Nous aurons le temps de lire le texte intégral des mémoires plus tard.
J'ai deux ou trois questions qui portent sur des situations auxquelles certains d'entre vous ont déjà fait allusion, je pense que vous en avez parlé, monsieur Hill, et vous aussi, Bob. Les entreprises commerciales d'État seront une question épineuse au cours de la prochaine ronde de négociations. L'Europe et les États-Unis et d'autres vont réclamer des changements à ce chapitre. L'Australie a déjà indiqué sa volonté d'aller de l'avant. Si le Canada se voit forcé, dans le cadre des compromis qui constituent l'essence des négociations, d'éliminer ses monopoles pour obtenir de meilleures parts de marché, dans l'espoir d'obtenir une baisse de l'aide gouvernementale qui crée des distorsions commerciales et qui fausse la production, devrions-nous le faire? Monsieur Hill, je sais ce que vous allez répondre, mais peut-être que les autres personnes présentes ont une opinion sur la question de savoir si le Canada devrait mettre cet aspect sur la table. Sera-t-il forcé de le faire, dans le cadre des négociations, à votre avis, et où cela nous mènerait-il si nous le faisions?
Monsieur le président, je pose cette question à quiconque voudrait y répondre.
Le président: Monsieur Hill.
M. Larry Hill: Je voudrais commencer. Je pense que la clé, c'est que le monde entier et l'OMC doivent juger la CCB en fonction de ce qu'elle fait, et non pas de son nom. La CCB est une entreprise commerciale. Pour ce qui est du monopole, je pense que la décision incombe clairement aux agriculteurs canadiens, et je pense que le Canada doit appuyer cette position sur la scène mondiale.
M. Rick Casson: Merci.
Le président: Bob.
M. Bob Friesen: Je pense que tous les autres pays membres de l'OMC doivent se rendre compte d'une chose, à savoir que la Commission canadienne du blé n'est rien de plus qu'un groupe d'agriculteurs qui se rassemblent pour vendre leurs produits, groupe créé par la loi, et je pense que le Canada doit défendre cet organisme devant l'OMC. La Commisison canadienne du blé respecte actuellement toutes les règles de l'OMC. Je suis convaincu que le Canada doit défendre son droit de conserver la Commission canadienne du blé. Ce n'est pas un monopole à l'importation et, avec toutes les difficultés que la Commisison canadienne du blé a dû surmonter dans le passé, le gouvernement canadien a toujours dit que la Commission est disposée à être aussi transparente que les compagnies multinationales qui sont ses concurrentes. Soyons bien clair sur un point: il y a probablement cinq ou six gigantesques compagnies transnationales qui n'attendent que l'occasion de venir au Canada et de monopoliser notre industrie des céréales. Pourquoi n'aurions-nous pas un syndicat de vente d'agriculteurs créé par la loi qui n'en ferait pas autant?
º (1610)
Le président: Rick.
M. Rick Casson: Je pense, Sandra, que vous avez fait remarquer dans votre exposé que si nous travaillons à mettre sur pied la zone de libre-échange des Amériques et d'autres accords régionaux en anticipant sur l'OMC, cela pourrait se faire au détriment de certains objectifs que nous tentons d'atteindre. Pourriez-vous en dire plus long là-dessus? Et peut-être qu'il y aurait quelqu'un d'autre, monsieur le président, qui voudrait également commenter cet aspect.
Mme Sandra Marsden: Dans la région de la ZLEA, qu'il s'agisse de l'Amérique centrale ou de l'ensemble de la région de la ZLEA, il y a de grandes régions qui produisent des surplus de sucre. Ces pays ont entre eux des politiques sucrières protectionnistes. Le problème qui se pose à nous, c'est que si les États-Unis ne participent pas à ces négociations, nous sommes confrontés à la menace de... Nous avons déjà des droits de douane de 8 p. 100 et nous faisons déjà concurrence à ces pays, les temps sont déjà difficiles, mais nous sommes menacés de perdre ce droit de douane de 8 p. 100 sans réaliser de véritables gains à l'exportation. Il se pourrait donc que le Guatemala, par exemple, qui produit deux millions et demi de tonnes de sucre, fasse disparaître son droit de douane de 160 p. 100 sur une période de 15 ans, tandis que notre droit de 8 p. 100 sera réduit au cours de la même période. Nous sommes donc menacés fortement de voir les importations augmenter, sans avoir véritablement rien obtenu en échange. Il est donc improbable que nous considérions jamais le Guatemala comme un débouché d'exportation, ce ne serait pas logique pour nous, mais au moins, si les États-Unis étaient partie prenante et s'ils réduisaient leurs droits de douane, nous aurions une compensation sur ce marché. Nous avons opéré une restructuration en application du scénario actuel; donc, le jour où la frontière américaine commencera à s'ouvrir, nous serons prêts à nous battre, mais nous ne pouvons pas nous battre en ayant les mains liées derrière le dos.
Le président: Bob.
M. Bob Friesen: Les producteurs canadiens de sucre ont été très déçus de l'aboutissement des négociations commerciales régionales quand nous avons conclu avec le Costa Rica une entente, prévoyant une mise en oeuvre asymétrique de cet accord, ce qui a marginalisé nos producteurs de betteraves à sucre. Cela dit, notre gouvernement s'est engagé dans le passé à ne pas négocier un avantage pour un secteur au détriment d'un autre secteur, et l'on a le sentiment que c'est effectivement ce qui s'est produit dans le cas de l'accord conclu avec le Costa Rica.
Le président: Pierre.
[Français]
M. Pierre Paquette (Joliette, BQ): Merci beaucoup pour vos exposés. J'aimerais faire un premier commentaire sur la dernière intervention du représentant de la Fédération canadienne de l'agriculture.
Le sous-comité a été saisi des problèmes de l'industrie du sucre en rapport avec l'accord de libre-échange du Costa Rica. D'ailleurs, le Bloc québécois a cherché à apporter un amendement au traité pour enlever cette partie qui parlait de la libéralisation unilatérale du sucre, mais évidemment, cet amendement n'a pas été retenu.
Cela dit, avez-vous l'impression, madame Sandra, que le gouvernement canadien amène à l'Organisation mondiale du commerce ou dans les négociations de la Zone de libre-échange des Amériques les préoccupations qui sont les vôtres? Je n'ai jamais vu le Canada présenter la position qui est la vôtre à l'OMC ou dans le cadre de la Zone de libre-échange des Amériques, c'est-à-dire une véritable ouverture du marché du sucre raffiné et, en particulier, l'ouverture du marché américain.
[Traduction]
Mme Sandra Marsden: Je n'arrive pas à comprendre l'interprète. Je devrais plutôt vous écouter.
M. Pierre Paquette: Croyez-vous que le gouvernement canadien vous a aidés dans ce dossier de la libéralisation du sucre partout dans le monde?
Mme Sandra Marsden: Vous demandez si le gouvernement canadien nous a aidés?
M. Pierre Paquette: Jusqu'à maintenant.
Mme Sandra Marsden: Non.
º (1615)
M. Pierre Paquette: C'est une bonne réponse. C'est aussi mon avis.
Mme Sandra Marsden: Nous essayons d'éteindre des incendies. Nous essayons seulement de ne pas perdre de terrain. C'est une question d'échéancier pour nous, et si nous sommes sacrifiés dans de petits accords commerciaux au fur et à mesure qu'ils sont conclus, nous ne serons plus là pour défendre notre secteur dans un environnement régi par l'OMC. C'est important pour un pan immense de l'industrie agroalimentaire au Canada. Nous représentons un ingrédient très important, un ingrédient dont le prix est très compétitif aujourd'hui, compte tenu du marché mondial, mais si nous ne pouvons pas approvisionner cette industrie, nous verrons des entreprises quitter notre pays.
[Français]
M. Pierre Paquette: Donc, dans son rapport, le sous-comité devrait recommander au gouvernement canadien d'avoir une position très ferme sur la libéralisation du marché du sucre raffiné, ce qui inclut évidemment le marché américain.
Vous avez presque tous la même position sur la nécessité de faire disparaître les subventions à l'exportation, mais il y a des facteurs externes qui vont influer sur l'évolution de la négociation, et c'est surtout là-dessus que je voudrais vous entendre. J'en nomme trois et je laisserai ceux qui le souhaitent répondre à ma question.
Premièrement, il y a le Farm Bill, aux États-Unis, qui se retrouve au Sénat et au Congrès. Ce sont deux versions. Comme vous le savez, on propose des niveaux incroyables de soutien aux producteurs américains. À ce moment-là, comment peut-on penser libéraliser davantage l'agriculture canadienne et québécoise?
Deuxièmement, il y a la politique de la Communauté européenne, qui est extrêmement protectionniste. D'ailleurs, j'étais au Mexique la semaine dernière, et tous les pays sud-américains se sont plaints du protectionnisme américain et du protectionnisme européen.
Le troisième élément qui, je pense, va beaucoup influencer l'évolution de la négociation, c'est l'entrée de la Chine à l'OMC.
J'aimerais avoir vos avis sur ces éléments-là. Comment est-ce que cela peut influencer la négociation et qu'est-ce que le gouvernement canadien devrait faire pour s'assurer que ce ne soit pas des facteurs qui entravent l'atteinte des objectifs que vous partagez tous en gros?
[Traduction]
Le président: Monsieur Hill.
M. Larry Hill: Merci, monsieur le président.
Le projet de loi agricole des États-Unis préoccupe énormément les agriculteurs dans ma région. J'ai une ferme près de Swift Current, dans le sud-ouest de la Saskatchewan, et nous cultivons beaucoup de légumineuses. Nous avons hâte de voir quelle forme prendra la version définitive du projet de loi, pour voir si les légumineuses seront touchées. Nous croyons que la culture des légumineuses est très rentable. Les Américains pourraient inscrire cela dans leur projet de loi agricole et nous couper toute possibilité d'être rentables, de sorte que nous sommes très inquiets à la pensée que le projet de loi agricole des États-Unis vienne fausser le marché. Cela cause la surproduction.
L'autre difficulté que nous percevons, c'est qu'il semble bien que les Américains augmentent leurs subventions avant les négociations, pour avoir peut-être quelque chose à donner en échange. Cela préoccupe beaucoup les agriculteurs canadiens, car nous fonctionnons essentiellement sans aucun soutien et nous nous présentons à ces négociations les mains vides, en ayant très peu à donner.
Le président: Bob.
M. Bob Friesen: Je dois dire que je souscris à ce que M. Hill vient de dire. Le projet de loi agricole de 75 milliards de dollars n'est qu'un petit complément qui s'ajoute à leurs dépenses de base. Ce n'est pas la totalité de leur aide, cela ne fait qu'inscrire dans la loi les compléments qu'ils ont ajoutés à ce qu'ils dépensaient déjà au cours des trois dernières années, notamment en augmentant le nombre de cultures visées. C'est ce que je voulais dire tout à l'heure quand j'ai dit qu'ils ont beau être disposés à montrer patte blanche dans les négociations commerciales et à améliorer l'accès aux marchés, ils sont aussi tout à fait disposés à débarquer ensuite avec des tonnes d'argent et à s'emparer des marchés.
Il y a autre chose qui nous inquiète dans le nouveau projet de loi agricole, c'est l'étiquetage obligatoire du pays d'origine, qui peut à notre avis nuire à nos exportations aux États-Unis.
Quant à l'UE, les Européens veulent peut-être négocier eux aussi durant la prochaine ronde de négociations à l'OMC, mais il nous apparaît clairement qu'ils vont trouver d'autres moyens novateurs de subventionner leurs producteurs. J'en ai parlé au ministre de l'Agriculture du Royaume-Uni, qui m'a dit qu'ils en avaient assez d'investir dans l'agriculture. Cela leur a coûté quelque chose comme 13 milliards de dollars au cours des dernières années. Ils n'en ont tiré aucun avantage. C'est seulement 1 p. 100 du PIB. Le tourisme se situe entre 4 p. 100 et 6 p. 100 et ils vont commencer à dépenser leur argent pour le tourisme. Pour nous, cela veut dire simplement qu'ils vont envoyer des chèques aux agriculteurs, et c'est encore une façon détournée de subventionner l'agriculture.
Le président: Liam.
M. Liam McCreery: Merci, monsieur le président.
Vous soulevez un excellent point. Vous faites ressortir une pratique qui cause des distorsions commerciales et qui touche durement les agriculteurs canadiens. On serait tenté de réagir en adoptant automatiquement une attitude protectionniste et en disant que, puisque les règles commerciales ne sont pas justes dans le monde, nous devrions peut-être nous entourer d'un mur et nous protéger au lieu d'essayer d'être compétitifs dans un environnement commercial mondial très agressif. À mon avis, ce serait faire preuve de naïveté. Je vais donner l'exemple du boeuf. Il y a plus de 100 000 producteurs de boeuf dans notre grand pays, et 60 p. 100 du boeuf que nous produisons est exporté. Donc, si nous refusions de jouer le jeu du marché international, nous perdrions 63 000 producteurs de boeuf au Canada. C'est tout à fait inacceptable. Vous faites donc ressortir l'un des grands problèmes que nous avons dans le monde du commerce international, nommément le soutien interne. Nous devons déployer beaucoup d'énergie pour essayer de réduire ce soutien.
º (1620)
M. Ted Haney (administrateur, Alliance canadienne du commerce agroalimentaire): En plus de ne pas ériger des murs dans un environnement protectionniste, comme mécanisme d'adaptation, comme il y a une certaine surproduction causée par les subventions, notre solution consisterait à travailler énergiquement à l'ouverture des marchés, pour que les produits que nous voulons vendre et les produits provenant de tous les autres marchés puissent être écoulés de la façon la plus efficiente dans les pays clients, en particulier, dans notre cas, en Asie et au Mexique. Il faut répartir cette production le plus possible et parmi le plus grand nombre possible de consommateurs, avec le moins de protection possible. Donc, un mécanisme d'adaptation intérimaire serait l'accès aux marchés, la libéralisation, et l'ouverture, en plus d'être un élément de la solution à plus long terme, tout en tentant parallèlement de contester ces fortes subventions nationales. Des efforts énergiques pour obtenir l'accès aux marchés font partie de la solution.
Le président: Y a-t-il d'autres commentaires là-dessus?
[Français]
Avez-vous d'autres questions Pierre?
M. Pierre Paquette: Personne ne semble intéressé à répondre sur la Chine.
[Traduction]
Le président: Quelqu'un est-il intéressé à...
[Français]
M. Pierre Paquette: Je ne peux pas croire que la Commission canadienne du blé n'a rien à dire sur la Chine.
[Traduction]
Le président: Monsieur Jarjour.
[Français]
M. Pierre Paquette: Chaque fois qu'on voit un film chinois, on voit de grands champs de blé.
[Traduction]
M. Victor Jarjour (Politiques et planification stratégique, Commission canadienne du blé): Premièrement, pour revenir à l'autre question, je pense que vous avez soulevé des points très intéressants. L'orientation du projet de loi agricole américain est très inquiétante, non seulement à cause de la possibilité que d'autres denrées y soient incluses, mais aussi à cause de l'énorme augmentation des dépenses agricoles et du soutien interne. Je ne suis pas certain que nous ayons nécessairement fait suffisamment pour contrer l'Union européenne, la Commission européenne et ses programmes. N'oublions pas que l'Europe subventionne l'agriculture à hauteur de quelque 65 milliards de dollars canadiens par année, un chiffre énorme pour ce qui est de l'accès aux marchés européen, mais aussi à cause de l'effet dépresseur que cela exerce sur les denrées que les producteurs canadiens essaient d'écouler sur des marchés tiers.
Au sujet des répercussions de la présence de la Chine dans les négociations de l'OMC, nous sommes restés muets sur la question, comme d'autres l'ont été aussi, parce qu'il est encore très tôt. C'est très difficile de savoir quelles en seront les conséquences, puisque la Chine vient tout juste de se joindre à l'OMC. Ce pays a parfois représenté un marché important pour la Commission canadienne du blé, pas nécessairement aussi important récemment qu'il ne l'a été dans le passé.
[Français]
Le président: Pierre, avez-vous des questions?
[Traduction]
M. Pierre Paquette: Non merci.
Le président: Monsieur Casey.
M. Bill Casey (Cumberland--Colchester, PC/RD): Merci.
Vous me faites tous prendre conscience à quel point je connais mal votre domaine. C'est assez impressionnant.
Neil, vous avez mentionné les mesures antidumping. Quels pays vous inquiètent à cet égard? Avez-vous déjà été accusés de faire du dumping?
M. Neil Jahnke: Oui, certainement, par les États-Unis. Notre industrie a dû dépenser environ cinq millions de dollars pour se défendre. C'est une forme pernicieuse de protectionnisme, c'est la meilleure façon de décrire cela, à mon avis. En tant que producteurs, je pense que nous avons tous connu des années où nous avons perdu de l'argent à faire pousser nos denrées, et si je vends un produit aux États-Unis et que les Américains estiment que je le vends à un prix inférieur à ce qu'il m'en coûte pour le produire, c'est du dumping. C'est donc une règle qui nous tient tous à coeur. Nous avons besoin d'un changement à cette règle sur le dumping.
M. Bill Casey: Quand les accusations ont-elles été portées pour la première fois?
M. Neil Jahnke: Il y a trois ans.
M. Bill Casey: L'affaire est-elle encore en suspens?
º (1625)
M. Neil Jahnke: Non, nous avons gagné, mais cela nous a coûté cher. Il faut parfois remercier le ciel qu'il y ait le gouvernement, mais dans ce cas particulier, il ne pouvait pas nous appuyer, alors l'industrie a dû se débrouiller pour trouver l'argent pour se défendre toute seule, et nous l'avons fait avec succès, mais ce sont les avocats de Washington qui ont tout empoché.
M. Bill Casey: En fin de compte, quelle instance vous a donné raison? Était-ce l'OMC?
M. Neil Jahnke: Non, ça s'est réglé de pays à pays.
M. Jim Caldwell: C'était un tribunal du commerce. Nous avons fait l'objet d'une enquête à la fois pour des droits compensateurs et des droits antidumping. Bien sûr, le gouvernement peut vous aider à plaider votre cause pour les droits compensateurs, mais l'industrie doit se défendre elle-même devant la commission quand elle est accusée de dumping. C'était le prix du boeuf à l'époque, et il est certain qu'il était inférieur au coût de production. Ils vendaient aussi du boeuf au Canada moins cher que le prix coûtant, et certains de nos producteurs ont demandé pourquoi nous ne les accusions pas de dumping. Eh bien, nous n'avions pas une autre cagnotte de cinq millions de dollars pour payer les avocats, et cela n'aurait probablement fait aucune différence de toute manière. Ils auraient perdu leur cause, nous avons gagné la nôtre, alors quelle est la différence?
M. Bill Casey: Quelqu'un a dit il y a un instant que 60 p. 100 du boeuf élevé ici est exporté. Est-il exporté surtout aux États-Unis?
M. Neil Jahnke: Il est exporté aux États-Unis dans une proportion de 78 p. 100 à 80 p. 100, n'est-ce pas, Ted?
M. Jim Caldwell: Monsieur Casey, pour revenir en arrière, je pense que ce que nous aimerions, c'est d'avoir une tribune quelconque où l'on n'aurait pas besoin de faire appel à des avocats américains qui gagnent leur vie dans ce dossier, essayant de convaincre un groupe d'intenter des poursuites contre un autre groupe dans le seul but de faire de l'argent. Il y a peut-être des cas légitimes, mais d'habitude, cela revient à cela. Il me semble que dans une société moderne, les Américains et nous, nous devrions pouvoir nous rencontrer et régler cela à l'amiable sans avoir besoin de faire appel à une foule d'avocats et d'économistes et tout le reste, pour se retrouver en fin de compte dans la même situation.
M. Bill Casey: En réalité, c'est un coup monté, parce que s'ils ont gain de cause dans leurs accusations et peuvent imposer des droits compensateurs, c'est l'industrie qui touche l'argent. Quelle industrie n'appuierait pas de telles accusations? Tout est fait pour encourager les accusations de ce genre aux États-Unis, et c'est particulièrement offusquant. On discute à l'heure actuelle du dossier du bois d'oeuvre, et l'on s'imagine que nous avons le libre-échange, mais ils ont des lois intérieures qu'ils peuvent utiliser contre nous. Pas étonnnant qu'ils signent des accords de libre-échange aux États-Unis; ces accords ne veulent pas dire grand-chose, puisque les Américains ont d'autres outils qu'ils peuvent utiliser.
Au sujet du sucre, d'où provient le sucre que vous raffinez?
Mme Sandra Marsden: Près de 90 p. 100 de notre production est fabriquée à partir de sucre brut importé du Brésil, du Guatemala, de l'Australie, de Cuba, et le reste, de 10 p. 100 à 15 p. 100 environ, provient de betteraves à sucre cultivées en Alberta.
M. Bill Casey: Combien avez-vous dit, 10 p. 100?
Mme Sandra Marsden: La proportion varie entre 10 p. 100 et 15 p. 100, dépendant de la récolte.
M. Bill Casey: D'après ce graphique que vous avez ici, ce commerce est totalement dépendant des quotas et des droits de douane, n'est-ce pas? Cela est très révélateur.
Mme Sandra Marsden: Oui, avec chaque accord de libre-échange, nous avons perdu une partie de l'accès.
M. Bill Casey: Oui. Donc, à un moment donné, nous avions 120 000... Mais 120 000 quoi?
Mme Sandra Marsden: Tonnes.
M. Bill Casey: C'était le maximum, atteint en 1977. Que s'est-il passé en 1981?
Mme Sandra Marsden: Les États-Unis ont imposé des droits antidumping, et c'était du véritable harcèlement. À la suite de cela, ils ont imposé des contingents tarifaires par pays. Ce qui est intéressant, c'est qu'ils ont compté ces deux années dans leur calcul pour déterminer quelle proportion du contingent global le Canada obtiendrait, de sorte que l'on nous a accordé 1 p. 100 du quota global, en fonction des sept années précédentes, dont deux années au cours desquelles nous étions sous le coup de cette mesure artificielle antidumping.
M. Bill Casey: Parlez-moi donc de cette mesure antidumping. Que s'est-il passé?
Mme Sandra Marsden: Aux termes de la disposition de réexamen, nous nous sommes retrouvés à plaider cette cause, et nous avons gagné, bien sûr, parce que les accusations ne tenaient absolument pas debout. Au Canada, nous fonctionnons en fonction du marché mondial. Aujourd'hui, le cours mondial du sucre est d'environ 6¢, tandis qu'aux États-Unis, le prix intérieur subventionné est d'environ 18¢, et il est donc absolument ridicule de prétendre que nous pourrions faire du dumping aux États-Unis.
M. Bill Casey: Quel pourcentage du sucre fabriqué au Canada est exporté actuellement?
Mme Sandra Marsden: Environ 1 p. 100,.
M. Bill Casey: Seulement 1 p. 100? Le reste est donc entièrement écoulé sur le mraché intérieur.
Mme Sandra Marsden: C'est bien cela. Il n'y a pas d'accès.
Le président: M. Hill voulait faire un commentaire en réponse à une question que vous avez posée tout à l'heure.
M. Larry Hill: Merci, monsieur le président.
La CCB n'a pas échappé à cette chasse aux sorcières, elle non plus. Des gens du Département du commerce des États-Unis sont venus à la CCB et nous avons été accusés de subventionner l'orge vendue aux éleveurs canadiens de bétail. Naturellement, il a été établi que ces accusations n'avaient aucun fondement, mais les agriculteurs de l'ouest du Canada ont encore été obligés de dépenser de l'argent pour se défendre. Cela revient à ce que nous disions dans notre mémoire. Ces contestations sont une forme de harcèlement qui nous coûtent de l'argent, et nous voudrions qu'on y mette fin.
º (1630)
M. Bill Casey: Je pense que le groupe ministériel qui se penche sur les mesures antidumping et les droits compensateurs va probablement en faire son cheval de bataille. Sauf erreur, c'est la quatrième fois que nous sommes aux prises avec ce problème dans le dossier du bois d'oeuvre. Il est certain que cela va aiguiser leur attention.
Il se trouve que je participais ce matin à une réunion, et un type est arrivé de l'ouest--soit dit en passant, je précise que je suis de Nouvelle-Écosse--et il a dit comme ça, de but en blanc, pourquoi ne pas se débarrasser de la Commission canadienne du blé? Qu'est-ce que j'aurais dû lui répondre? Pourquoi ne pas se débarrasser de la Commission canadienne du blé, pourquoi ne pas laisser les agriculteurs vendre leur propre blé?
M. Larry Hill: Parce que la Commission canadienne du blé avantage les agriculteurs et leur apporte des revenus plus importants. Dans la dernière étude de la Commission du commerce international des États-Unis--cela figurait dans le dernier examen de la CCB--on a constaté que la CCB obtenait des prix plus élevés que les vendeurs américains sur le marché américain 59 mois sur 60. Donc, en cinq ans, pendant quatre ans et 11 mois, la CCB a reçu un meilleur prix que les vendeurs américains sur le même marché. Je trouve que c'est une indication que la CCB est avantageuse pour les agriculteurs.
M. Bill Casey: Je ne connais franchement pas suffisamment bien le dossier, mais ma réaction serait de poser la question suivante: vendraient-ils plus de blé s'ils le vendaient un peu moins cher?
M. Larry Hill: Feraient-ils plus d'argent s'ils le vendaient moins cher? Je suppose que c'est la question qui vient ensuite. L'objectif de la CCB est de maximiser le rendement pour les producteurs canadiens. Par exemple, nous avons récolté plus de blé dur durant l'année-récolte 2000 que le marché mondial ne pouvait en absorber. La question qui se pose est donc la suivante: faut-il faire du dumping et se faire accuser de faire du dumping, ou bien faut-il vendre par l'entremise de la CCB et toucher un prix bonifié? C'est ce que nous avons fait, et je pense que nous avons obtenu un rendement sensiblement plus élevé pour les agriculteurs.
M. Bill Casey: D'accord.
Je voudrais revenir un instant aux éleveurs de bétail. Vous avez dit que 78 p. 100 des 60 p. 100 du boeuf qui sont exportés vont aux États-Unis. Le Canada en importe-t-il une quantité équivalente des États-Unis, ou bien avons-nous un surplus?
M. Neil Jahnke: Ce n'est pas équivalent. Je pense qu'environ 32 p. 100 de notre boeuf vient des États-Unis. Nous sommes exportateurs nets de 32 p. 100 de notre production, parce que nous importons beaucoup de boeuf des États-Unis.
M. Jim Caldwell: Pour mettre les choses en perspective, je pense que le Japon nous a peut-être dépassé maintenant, mais le Canada était, jusqu'à il y a deux ou trois ans, le plus grand importateur de boeuf par habitant au monde.
M. Bill Casey: Le Canada? Incroyable!
M. Jim Caldwell: Oui. Nous avons un marché très ouvert. Par exemple, nous avons importé environ 116 tonnes de l'Océanie, c'est-à-dire la Nouvelle-Zélande et l'Australie. Les gens ont tendance à croire que l'Australie et la Nouvelle-Zélande nous vendent de l'agneau, mais c'est insignifiant en comparaison de la quantité de boeuf qui est importée de ces deux pays. Nous importions aussi d'Amérique du Sud jusqu'à ce qu'il y ait là-bas des problèmes causés par des maladies.
M. Neil Jahnke: Nous importons aussi du bétail sur pied des États-Unis, des bovins d'engraissement, en quantités assez considérables ces dernières années, quelques centaines de milliers. Nous sommes des commerçants, nous sommes partisans du libre-échange, nous voulons le libre-échange.
M. Bill Casey: Excellent. Merci.
Le président: Merci, messieurs.
Monsieur Haney.
M. Ted Haney: La dernière année pour laquelle nous avons des statistiques absolument complètes est 2000; cette année-là, le Canada a exporté, à la fois pour le boeuf et le bétail sur pied, un peu plus de trois milliards de dollars de produits et en a importé environ un milliard de dollars, ce qui représente un environnement commercial très ouvert. Donc, sur cette base, ce secteur a contribué à lui seul à notre surplus commercial à hauteur de deux milliards de dollars. Si je remonte à 1990, avant que notre secteur manifeste l'intention de vendre ses produits dans de nombreux marchés autres que les États-Unis, pour le boeuf et le bétail, nos exportations étaient dirigées vers les États-Unis dans une proportion d'environ 98 p. 100. Notre objectif pour le boeuf, non pas pour les animaux vivants, est d'équilibrer nos exportations en vendant 50 p. 100 en Asie et au Mexique et 50 p. 100 aux États-Unis.
Pour offrir une stabilité fondée sur les marchés à une agriculture canadienne qui est très solide et qui ne dépendrait pas des dépenses gouvernementales et qui ne serait pas vulnérable à l'accès aux marchés d'un seul pays en période de catastrophe, il faut vraiment déployer des efforts énergiques pour obtenir un meilleur accès aux marchés, pour que notre industrie atteigne son plein potentiel dans tous les pays, comme nous l'avons fait tellement bien aux États-Unis. D'aucuns diraient que nous avons trop bien réalisé notre potentiel aux États-Unis et que nous avons ainsi créé un certain risque en matière de marketing.
M. Bill Casey: Quels sont les obstacles sur lesquels vous butez au Mexique et au Japon?
M. Ted Haney: Au Japon, ce sont les droits de douane qui sont l'obstacle. À l'heure actuelle, leur tarif est de 41,8 p. 100, et le droit augmente pour les produits du boeuf à valeur ajoutée jusqu'à environ 75 p. 100. Cela nous encourage donc à leur envoyer du boeuf en caisses, mais si nous le transformons en galettes de boeuf pour hamburger, il faut alors payer des droits de douane de 75 p. 100. Par conséquent, toute valeur ajoutée ou transformation supplémentaire du boeuf que nous vendons au Japon représente une escalade des droits de douane; en l'occurrence, cela représente l'exportation d'emplois.
Notre préoccupation pour ce qui est de savoir quels tarifs doivent être diminués et lesquels doivent rester se situe au niveau de la définition. Pour reprendre l'exemple du Japon, bien qu'il ait un taux de droits applicable dans la limite du contingent, ce pays a aussi une disposition sur le retour aux droits NPF en vertu de laquelle les droits de douane remontent à environ 75 p. 100 si le volume dépasse un certain niveau, s'il est de 19 p. 100 plus élevé en une année donnée. Pour nous, c'est un défi constant, parce qu'il nous faut obtenir beaucoup de succès dans un autre marché, sous réserve de l'augmentation de la consommation ou de la baisse de la production. Je répète que l'accès aux marchés est l'une des raisons pour lesquelles notre secteur a connu une bonne croissance au cours des 25 dernières années, et il est certain que c'est ce qui nous permettra de poursuivre notre croissance au cours des 20 prochaines années. L'accès aux marchés, c'est un élément de la solution.
Dans le cas de la Corée, là encore, nous avons des problèmes en matière de réglementation interne pour la distribution, mais le principal obstacle, c'est le droit de douane de 38,5 p. 100 imposé sur le boeuf canadien, et ce droit est également sujet à une série de mesures pouvant le faire augmenter.
º (1635)
M. Bill Casey: Et le Mexique?
M. Ted Haney: Le Mexique, en fait, est un excellent exemple de ce que l'ouverture totale des marchés peut nous apporter, dans le cadre de l'ALENA. En 1995, la première année de l'ALENA, nous avons vendu 3 000 tonnes au Mexique. Nos ventes sont passées à 6 000 tonnes en 1997, à 8 500 tonnes en 1998, soit les deux premières années après que nous ayons ouvert là-bas un bureau pour diriger les activités de promotion et de marketing dans un environnement de libre-échange. Et nos ventes ont atteint 70 000 tonnes en 2001, ce qui représente entre 5 p. 100 et 7 p. 100 de notre production totale.
C'est un exemple typique de ce que l'ouverture des marchés peut faire pour une industrie. Ce n'est pas un pays riche en comparaison des pays asiatiques, et ce n'est pas non plus un pays où les consommateurs ont tendance à manger beaucoup de boeuf, pas plus que nos amis asiatiques au même niveau de revenu. L'histoire de la libéralisation commerciale et de l'ouverture du marché du Mexique est une merveilleuse histoire de prospérité pour notre industrie.
Les perspectives actuelles de libre-échange dans les Amériques, offrant un accès en franchise de douane aux marchés de l'Amérique centrale et de l'Amérique du Sud, pourraient bouleverser nos ventes au Mexique. Nous croyons que les importations totales du Mexique augmenteraient, à cause d'un environnement encore plus compétitif, et notre part du marché diminuerait. Nous perdrions probablement une part du marché au Mexique, mais nous appuyons cela catégoriquement, parce que nous croyons qu'il est important de favoriser une ouverture encore plus grande des marchés en Asie et, à terme, je suppose, en Europe également. La prospérité, pour notre industrie toute entière, pas seulement notre secteur, vient de l'ouverture des marchés et de la libéralisation du commerce.
Un autre excellent exemple de cela, c'est la Chine. On s'interrogeait au sujet de la Chine: Quelles seront les conséquences pour nous de l'adhésion de ce pays à l'OMC? Nous avons obtenu un engagement important en terme d'ouverture du marché. La Chine a abaissé immédiatement son droit de douane sur l'importation de boeuf de 40 p. 100 à 25 p. 100, et ce droit continuera de diminuer pour atteindre 12 p. 100 en 2004. De nouvelles baisses seront négociées au cours de l'actuelle ronde de négociations. Nous croyons que la Chine baissera encore ses droits de douane, qui se situeront entre 5 p. 100 et 10 p. 100, soit approximativement le taux qui est actuellement appliqué dans le cas de la contrebande entre Hong Kong et le sud de la Chine. En 2001, la Chine a importé seulement 30 000 tonnes de boeuf. Le Canada en a fourni 3 000 tonnes, pour une valeur de 10 millions de dollars. Ce n'est pas beaucoup pour un pays immense, mais grâce à la plus grande ouverture du marché qui nous sera accordée par l'entremise de l'OMC, nous croyons que la Chine augmentera ses importations à hauteur d'environ 400 000 tonnes, et notre part sera de quelque 43 000 tonnes, pour une valeur de 135 millions de dollars. C'est encore un apport de plus de 120 millions de dollars supplémentaires pour notre industrie. C'est un autre exemple de prospérité découlant de l'ouverture des marchés.
Le président: Merci beaucoup, Bill.
Monsieur Eyking.
M. Mark Eyking (Sydney--Victoria, Lib.): Merci, monsieur le président.
Ma question s'adresse à Bob. Nous avons appris aujourd'hui que nous exportons un grand nombre de nos produits agricoles vers les États-Unis. Or, il semble que les Américains peuvent produire eux-mêmes la plupart de ces produits. Chaque fois que nos produits sont moins cher ou de qualité supérieure il semble que les Américains nous flanquent une raclée. Cela s'est produit avec les pommes de terre, le boeuf et je pense que les tomates sont maintenant dans leur mire.
On voulait s'éloigner de Washington, des avocats et privilégier une meilleure tribune internationale. L'OMC est-elle la meilleure tribune dans ce dossier ou devrions-nous déployer des efforts dans une autre direction pour obtenir des résultats plus rapidement? Le moratoire sur les pommes de terre de l'Île-du-Prince-Édouard a pratiquement terrassé l'industrie pendant tout l'hiver. Je connais des agriculteurs là-bas et ils ont été très ébranlés. Certains d'entre eux ne s'en remettront jamais. L'OMC est peut-être la meilleure tribune pour certains dossiers, mais de quelle façon pouvons-nous dialoguer avec d'autres intervenants pour faire en sorte que les choses changent plus rapidement? Si je vous pose la question à vous, Bob, c'est que vous avez affirmé que nous avions tous les outils pour régler un grand nombre de ces problèmes. On peut se plaindre des Américains et de tous les autres, mais comment s'y prendre pour faire avancer les choses plus rapidement?
º (1640)
M. Bob Friesen: Votre argument est fort valable. Permettez-moi de revenir en arrière pour vous donner l'exemple d'une injustice encore plus grande. Sandra a parlé tout à l'heure de l'accès pour le sucre. À la suite des dernières négociations, les pays offrant l'accès à leur marché devaient soit accorder une hausse de 5 p. 100 ou demeurer à leur niveau historique d'accès. Or, notre secteur affichait un contingent tarifaire de 21 p. 100 et notre gouvernement a décrété qu'il devait être maintenu. Par la suite, les Américains ont fermé la porte à nos exportations de sucre, tout cela au cours de la même période. Il y a d'énormes injustices à cet égard. À propos de mesures antidumping, combien de nos denrées agricoles auraient pu être vulnérables à de telles mesures depuis les deux dernières années si les États-Unis avaient voulu opter pour cette voie?
Vous avez donc tout à fait raison. Ils s'accrochent constamment à divers stratagèmes pour entraver l'accès à leur marché. Le cas de la pomme de terre à l'Île-du-Prince-Édouard a été l'une des violations les plus flagrantes de l'accord sur les mesures SPS à l'OMC.
L'intérêt de garder ces enjeux à l'OMC, d'en faire la tribune privilégiée où élaborer des règles justes et équitables c'est que dans ce contexte, à tout le moins, le Canada est en mesure de bâtir des alliances avec d'autres pays. J'en veux pour exemple le Groupe de Cairns. Au moins, au sein du Groupe de Cairns, nous avons davantage de poids pour tenter de forcer les États-Unis et les pays d'Europe à réduire leurs subventions. En ce qui concerne des enjeux comme la progressivité tarifaire--et Ted en a déjà parlé--et la désagrégation de l'accès aux marchés en fonction de chaque produit, nous pensons pouvoir gagner davantage de terrain si nous oeuvrons dans un contexte où nous pouvons rallier d'autres pays à notre cause.
Pour ce qui est d'améliorer l'accès aux marchés, cela va de soi. En fait, en Saskatchewan, 80 p. 100 du secteur agricole dépend des marchés d'exportation. Ailleurs au Canada, cela se situe probablement entre 60 et 70 p. 100. L'accès aux marchés est primordial pour nous. Le fait de négocier des ententes zéro pour zéro relativement à certains produits spécifiques est une bonne façon d'y arriver. Cela se fait en dehors du forum de l'OMC et c'est là que le Canada peut négocier avec d'autres pays. Évidemment, une fois un tel marché conclu, ils doivent l'offrir à d'autres pays, mais à tout le moins, cela leur donne l'occasion d'ouvrir leur marché chaque fois qu'ils le peuvent.
Pour ce qui est d'obliger les États-Unis à s'aligner, la seule solution à mon avis est de garder cet enjeu dans une tribune où nous avons la possibilité de manoeuvrer. Un bon exemple est celui de Doha, où les Américains ne voulaient pas que les mesures antidumping fassent l'objet de discussion. À ce propos, je signale qu'il y a au Canada deux secteurs qui dépendent également des mesures antidumping. Par conséquent, c'est un véritable défi de s'assurer que tous les secteurs sortent gagnants. Mais à Doha nous avons vu d'autres pays, qui avaient formé une coalition, insister énormément et forcer les États-Unis à reculer. Nous pouvons donc tirer un certain avantage de cette façon de faire.
º (1645)
M. Mark Eyking: Ma prochaine question s'adresse à Liam. Pendant presque toute la journée, il a été question d'exportations et d'ouverture des marchés, mais personne n'a beaucoup parlé des offices de commercialisation. Je m'attendais à ce que Liam en parle. Il a mentionné différentes denrées. À votre avis, où en serons-nous dans quelques années dans le dossier des offices de commercialisation? Devrions-nous même aborder la question? Ce dossier est-il au point mort à l'heure actuelle?
M. Liam McCreery: Certainement pas. Nous sommes les représentants de l'Alliance canadienne du commerce agroalimentaire et nous veillons à nos intérêts. Nous représentons des secteurs qui ne sont pas protectionnistes, qui n'ont rien à voir avec des offices de commercialisation. Nos propos se limitent donc à notre champ d'activité.
Vous avez soulevé d'excellents points dans votre dernière question à Bob. Il faut instaurer de meilleures règles à l'OMC. Il faut que nous puissions bénéficier de meilleures règles concernant l'accès aux marchés pour nos produits. Il faut également que des règles plus rigoureuses régissent le soutien interne. Évidemment, ce qui s'est passé à la suite de l'adoption du U.S. farm bill est ridicule. Cela déstabilise profondément des secteurs importants.
Nous avons beaucoup parlé de viande rouge aujourd'hui, des exportations considérables que nous en faisons et de l'importance que cela revêt pour l'économie canadienne, mais il ne faudrait pas oublier le secteur des céréales et des oléagineux. Ce secteur est en pleine croissance partout au pays. Bob a fait remarquer que la Saskatchewan exporte 80 p. 100 de sa production agricole. Nous avons besoin de règles internationales valables pour l'ensemble de ces marchés.
M. Mark Eyking: Et les seuls alliés que nous pouvons nous faire sont les pays qui sont dans le même bateau que nous, comme l'Australie et l'Argentine. En Europe et aux États-Unis, l'économie et l'agriculture ne dépendent pas autant des exportations qu'ici. Par conséquent, nous sommes très vulnérables et nous devons nouer des alliances avec des pays qui sont tout aussi vulnérables que nous.
M. Liam McCreery: Ou qui ont des convictions aussi ancrées. Voilà pourquoi nous recommandons que le Canada continue de collaborer avec le Groupe de Cairns.
Le président: Bob.
M. Bob Friesen: Merci, monsieur le président.
Quant à la question de savoir si nous devons abandonner nos structures de mise en marché ordonnées, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, compte tenu de la position de négociation adoptée par notre gouvernement à l'heure actuelle, si nous négocions vigoureusement et que nous bâtissons des alliances, il n'est pas nécessaire que ce soit une décision dichotomique. Nous pensons pouvoir manoeuvrer de façon à faire place aux intérêts liés à l'exportation. Comme je l'ai dit, c'est une nécessité. C'est incontournable. Nous ne pouvons laisser notre secteur agricole stagner; il faut qu'il puisse croître. Mais nous sommes convaincus de pouvoir gagner sur les deux tableaux.
Lorsqu'il est question de protectionnisme, bien des gens pensent que le Canada est un pays protectionniste. Sur les 1 370 contingents tarifaires à l'OMC, le Canada n'en a que 21; un pays comme la Norvège en a 245. Nos contingents tarifaires à l'OMC sont de 30 p. 100 supérieurs à la moyenne. À l'OCDE, le Canada affiche la plus faible moyenne de tarifs agricoles. En fait, nous sommes l'un des quatre pays dont les tarifs agricoles sont inférieurs aux tarifs industriels. En moyenne, à l'OCDE, les tarifs agricoles sont 427 p. 100 plus élevés que les tarifs industriels; les nôtres sont plus bas. Nous ne sommes donc pas protectionnistes et nous ne pensons pas qu'il faut sacrifier un secteur au profit d'un autre. Encore une fois, d'autres pays ont manifesté leur intérêt, de sorte que si nous utilisons à bon escient les outils dont nous disposons, nous pouvons atteindre nos objectifs dans tous les secteurs de l'agriculture.
Le président: Jim.
M. Jim Caldwell: En aparté, je dirai à M. Eyking que les problèmes que nous causent les Américains sont habituellement motivés par la politique. C'est dans cette arène qu'ils prennent naissance et les Américains se fichent bien qu'il y ait des règles commerciales ou non. Si les mandats n'étaient pas de deux ans à la Chambre des représentants, les membres de cette assemblée ne seraient pas constamment en campagne électorale. Mais je pense qu'il est également important qu'en tant que politiciens, vous ayez des entretiens fréquents avec vos homologues des États-Unis pour qu'ils puissent apprendre à connaître notre industrie.
Du point de vue des éleveurs de bétail, nous avons de très bonnes relations avec l'association américaine des éleveurs. Le groupe qui a intenté des poursuites contre nous était un groupe un peu à part, et l'Association nationale des éleveurs des États-Unis n'appuyait pas nécessairement sans réserve cette intervention, mais comme ils étaient tous les deux américains, ils devaient bien jouer le même rôle. Par exemple, sur l'étiquetage du pays d'origine, la position actuelle de la National Cattlemen's Association est qu'ils veulent l'étiquetage volontaire, mais l'étiquetage obligatoire fait pourtant toujours partie du projet de loi agricole. La mesure législative sur le pays d'origine n'a pas autant de chances d'être adoptée que si elle avait l'appui des éleveurs des États-Unis.
C'est donc politique, en grande partie.
º (1650)
M. Mark Eyking: C'est une observation très juste. Nous sommes allés à Washington le printemps dernier dans le dossier du bois d'oeuvre, et ma tâche était de rencontrer le sénateur de Louisiane pour en discuter. Il avait un deux-par-quatre sur son bureau et il m'a dit: vous savez, ceci est un poteau canadien, et il était percé de part en part. Je m'étais préparé et j'avais des chiffres dont je voulais lui faire part. Nous vendons cinq millions de dollars de bois d'oeuvre en Louisiane, mais nous achetons 50 millions de dollars de produits chimiques de la Louisiane. Il a compris pendant notre discussion que ce n'était pas à sens unique. Je pense que c'est vraiment au cours d'entretiens en tête à tête de ce genre que l'on peut faire comprendre que nous sommes tous dans le même bateau. C'est une façon d'établir des liens, je suppose.
M. Jim Caldwell: Je voudrais ajouer à cela que l'un des plus grands alliés que nous avions aux États-Unis dans ces dossiers, c'était l'American Meat Institute, qui a dit: écoutez, c'est facile de faire tout cela, mais vous allez nous nuire, à nous et aux consommateurs nord-américains. C'est la même chose dans le dossier du bois d'oeuvre. C'est le consommateur, le constructeur de maisons qui est durement frappé dans cette affaire. D'un point de vue politique, ils ont tendance à ne pas voir les choses sous cet angle, mais si l'on applique des pressions émanant de cette source, il y a plus de chances qu'ils changent d'idée que si le Canada leur dit que c'est une mauvaise affaire pour nous.
M. Mark Eyking:À long terme, c'est mieux de s'entendre avec eux que de les combattre.
M. Jim Caldwell:Oui, nous sommes d'accord.
Le président: Monsieur Casson.
M. Rick Casson: Merci.
Je m'excuse, mesdames et messieurs, d'avoir dû m'absenter. Pendant mon absence, j'ai pris la parole à la Chambre sur le projet de loi C-15B, sur la cruauté envers les animaux. Je pense que c'est un dossier que vous connaissez tous pasablement bien, et il nous a fallu mettre notre grain de sel dans le débat. Demain, nous discutons de nouveau des espèces en péril, et ce sont tous des dossiers qui ont des conséquences sur l'agriculture.
Je voulais poser une question sur un éventuel protocole sur les parcs d'engraissement, mais je ne le ferai pas, parce que vous avez déjà discuté longuement de la viande rouge. Je voulais avoir votre point de vue à tous, car notre pays compte beaucoup sur cette prochaine ronde de négociations, dans le domaine de l'agriculture, pour obtenir des revenus plus élevés pour nos producteurs à la ferme. Tout cela prend beaucoup de temps, c'est très complexe. Comme nous l'avons vu récemment dans le cas du projet de loi agricole des États-Unis, les Américains semblent prêts à continuer envers et contre tous de subventionner les céréales et les oléagineux, sans se soucier des conséquences. Est-il réaliste pour nous de continuer à dire à nos producteurs qu'il y a encore des chances que cette prochaine ronde nous apporte des revenus plus élevés, surtout dans le secteur des céréales et des oléagineux?
Le président: Liam.
M. Liam McCreery: Le Canada est une nation commerçante, nous sommes des exportateurs et des importateurs de biens, les producteurs de céréales et d'oléagineux n'ont aucun espoir de faire des affaires autrement que sur les marchés internationaux. Nous ne pouvons pas nous enfermer entre quatre murs et proclamer que nous allons établir nos propres règles du jeu, car nous perdrions trop de producteurs. Nous exportons neuf milliards de dollars de céréales et d'oléagineux, nous ne pouvons pas tout arrêter. Nous ne voulons pas tout arrêter, nous voulons continuer. Est-ce que ce sera une route longue et ardue vers l'obtention de meilleures relations commerciales? Oui. Trouverons-nous un jour la panacée, les relations commerciales parfaites? Non. Tout ce que nous pouvons faire, c'est de continuer le combat et de faire en sorte que la situation soit meilleure demain qu'elle n'était hier.
Le président: Bob.
M. Bob Friesen: Merci, monsieur le président.
Vous soulevez un point très valable. Comme vous le savez, nous avons réussi à obtenir à Doha certaines victoires très importantes sur le plan des principes. Nous avons obtenu des Européens tout au moins qu'ils ne retirent pas de la déclaration le texte sur les subventions aux exportations. Nous avons obtenu quelques progrès sur les mesures antidumping, nous avons aussi bougé un peu sur le principe de précaution, et aussi sur la multifonctionnalité. Vous avez absolument raison, l'OMC doit demeurer, nous devons négocier tout cela, mais l'OMC permettra-t-elle d'établir l'équité au chapitre du soutien interne au cours des trois prochaines années? Non. Le projet de loi agricole des États-Unis, c'est-à-dire le complément de programme, est un projet étalé sur dix ans.
Quand nous étions à Doha--j'ignore si vous vous rappelez de cela, Liam, je pense que c'était à Doha--le ministre brésilien a proféré des menaces, disant qu'à moins que les États-Unis commencent à agir au lieu de parler, il se retirerait de l'OMC, et peut-être qu'il faut que des pays de ce genre commencent à adopter des positions semblables. Ce n'est pas que nous tentons d'ébranler l'OMC, nous l'appuyons et nous voulons qu'elle soit efficace. D'une manière ou d'une autre, il faut que les Américains se rendent compte que beaucoup de pressions seront exercées sur eux. De là à dire aux agriculteurs que l'OMC résoudra du jour au lendemain le problème du soutien interne et de l'équité, je ne peux certainement pas faire cela.
º (1655)
Le président: Larry.
M. Larry Hill: Merci, monsieur le président.
Je reprends à mon compte les propos de ceux qui ont dit que nous devons continuer à faire du commerce. Nous produisons beaucoup plus que notre capacité de consommer dans notre pays, de sorte que le commerce est le seul moyen de maximiser le rendement pour les producteurs de notre pays.
Pour ce qui est des producteurs de l'Ouest, je pense qu'on leur a un peu trop doré la pilule dans le passé pour ce qui est des avantages des accords commerciaux. Ils se méfient énormément, maintenant, des résultats que l'on peut obtenir à cette ronde de négociations de l'OMC. Je pense qu'il incombe à tous les dirigeants agricoles et à tous nos politiciens de ne pas exagérer les avantages pour les producteurs. Il ne faut pas créer de faux espoirs. Nous devons travailler autant que nous le pouvons pour obtenir le plus d'avantages possibles, mais les producteurs doivent être conscients que cela ne va pas les sauver à court terme, ni même peut-être à long terme.
M. Rick Casson: Merci.
Le président: Monsieur Haney.
M. Ted Haney: Ce n'est pas seulement une question de tout un ou tout l'autre. Deux de nos trois grandes priorités dans le dossier du commerce sont de s'attaquer au soutien interne qui fausse le commerce et aux inéquités qui en découlent, qui sont une cause importante limitant sévèrement les revenus dans les secteurs des céréales et des oléagineux au Canada. Parallèlement, une stratégie énergique pour obtenir un meilleur accès aux marchés permettra d'augmenter les revenus de l'agriculture canadienne à n'importe quel niveau de soutien interne différencié. C'est moins pire si nous avons accès librement aux marchés, surtout aux marchés riches et en pleine croissance de l'Asie et aux futurs marchés que nous espérons obtenir en Europe. Notre situation financière sera donc moins pire. Au mieux, si nous réussissons à réduire les écarts au niveau du soutien interne, ce sera encore mieux pour l'agriculture canadienne si nous réussissons à libéraliser l'accès aux marchés, surtout sous la forme de droits de douane fondés sur des règles.
Il y a de l'espoir, mais les chances que cet espoir se réalise, surtout dans les céréales et les oléagineux et d'autres secteurs qui peuvent être ébranlés, surtout à cause du projet de loi agricole américain, dépendront en grande partie du niveau et des écarts du soutien interne, surtout les subventions qui influent sur le commerce. Mais ce n'est pas tout l'un ou tout l'autre.
Le président: Pierre.
[Français]
M. Pierre Paquette: J'ai une question très générale à laquelle les gens de la Fédération canadienne de l'agriculture pourraient peut-être répondre. J'aurais d'ailleurs aimé que les gens de l'Union des producteurs agricoles y soient, mais ils n'ont probablement pas pu venir à cause de la température.
On sent très bien une tension dans le monde agricole, au Québec, entre les gens qui font de la production et qui ont besoin d'exporter, non seulement pour se maintenir sur le marché, mais aussi pour vivre, et toute une série de producteurs qui ont décidé de cibler d'abord le marché local et qui sont prêts à abandonner l'exportation pour garder leur manière de faire.
Évidemment, il y a le cas de la gestion de l'offre dans le domaine du lait, où les producteurs disent qu'ils exportent 5 p. 100 de leur production et que si, pour garder ce 5 p. 100, ils doivent laisser tomber tout leur système de gestion de l'offre, ils préfèrent abandonner ce 5 p. 100 et garder leur système de gestion de l'offre. Mais ça va beaucoup plus loin. Il y a même des mouvements... Au Québec, il y a l'Union paysanne, pour qui l'un des principes du maintien des activités agricoles en région est l'occupation du territoire. C'est un choix de mode de vie, et je pense que c'est tout à fait légitime.
Comment concilier ces tensions qui existent dans le monde agricole? Est-ce que, tout en refusant--pour ma part, je suis un tenant de ça--toute forme de subvention à l'exportation, on peut donner aux producteurs agricoles qui le souhaitent la possibilité d'approvisionner simplement le marché local ou régional? Est-ce que c'est possible?
Si les gens de l'UPA étaient ici, ils n'auraient d'autre choix que celui de répondre.
Le président: Monsieur Paquette, le groupe agricole du Québec va arriver à 17 h 30.
[Traduction]
M. Ted Haney: Il y a beaucoup de diversité dans l'agriculture canadienne entre les secteurs et entre les agriculteurs individuels à l'intérieur de chaque région. Il y a probablement autant de diversité à l'intérieur de chaque région qu'il y en a entre deux régions quelconques. La diversité est donc un fait avec lequel il faut compter dans l'agriculture, et cela rend d'autant plus solide l'agriculture du Canada. Que les proportions soient de 85 p. 100-15 p. 100, ou bien de 90 p. 100-10 p. 100 (ces pourcentages peuvent donner lieu à un débat), la grande majorité des producteurs tirent aujourd'hui leur revenu des marchés internationaux et du commerce extérieur.
À l'intérieur de chaque secteur, les céréales, les oléagineux, le bétail, la volaille, les produits laitiers, il y a des producteurs qui gagnent honorablement leur vie en se contentant d'écouler leurs denrées sur des créneaux particuliers du marché canadien. En général, ceux-là n'ont pas besoin de protection. Ils répondent aux besoins locaux grâce à des produits hautement différenciés et ils font de l'excellent travail. Mais 90 p. 100 de l'agriculture canadienne, le coeur même de l'industrie dans l'ensemble du pays, dépend du commerce et bénéficiera du commerce à l'avenir. C'est ce créneau que CAFTA veut servir, et c'est vraiment une partie très importante de notre industrie.
» (1700)
M. Bob Friesen: Je pense avoir dit déjà que la déréglementation de la gestion de l'offre n'influera pas sur l'ouverture des marchés dans d'autres secteurs agricoles. Ce n'est pas l'un ou l'autre. De plus, je ne suis pas davantage prêt à suggérer que l'on échange l'industrie du boeuf contre l'industrie des céréales, pas plus que je proposerais d'échanger les secteurs où nous avons la gestion de l'offre contre n'importe quel autre secteur. Nous avons la possibilité de négocier une entente dans laquelle tout le monde sera gagnant. Notre gouvernement s'est engagé à ne pas sacrifier un secteur au profit d'un autre, et c'est notre position. Quand on examine les difficultés dans certains secteurs agricoles un peu partout au Canada à l'heure actuelle, il est clair que la gestion de l'offre ne fait pas appel aux mêmes montants d'argent. Il n'est pas nécessaire de soutenir cette industrie.
Pour de nombreuses raisons diverses, il est absolument impératif que notre gouvernement continue de maintenir notre capacité de mettre en place des structures de marketing ordonné. Notre principal négociateur à la dernière ronde nous a dit bien des fois que le problème n'était pas de choisir entre la gestion de l'offre ou un autre secteur. Je suis donc convaincu que si nos négociateurs sont solides, nous avons des possibilités intéressantes. J'ai aussi dressé une liste de nombreuses améliorations que nous pourrions apporter pour augmenter notre accès aux marchés. Nous pouvons préconiser l'option zéro, et nous n'avons même pas besoin d'attendre que les négociations de l'OMC soient terminées. Nous pouvons promouvoir des négociations sur l'option zéro en attendant l'issue des négociations de l'OMC.
Je répète donc que ce n'est pas l'un ou l'autre et je suis convaincu que le gouvernement ne devrait jamais envisager de sacrifier un secteur au profit d'un autre. Cela ne nous mènerait nulle part et, en principe, ce n'est tout simplement pas ainsi que l'on doit diriger l'agriculture au Canada.
Le président: J'ai une brève question. À l'OMC, sur la question de l'étiquetage, l'Union européenne insistait sur des dossiers relatifs aux modifications génétiques, et aussi sur des préoccupations environnementales. En fait, en un sens, ils parlent en codes, car tout cela vise toujours les OGM. Ils voulaient aborder cette question. C'est ainsi que, accessoirement, la question de l'étiquetage a été abordée, la question de savoir s'il faut étiqueter un produit, en préciser tous les ingrédients, etc. Je voulais avoir une idée générale de ce que l'industrie en pense.
M. Victor Jarjour: Monsieur le président, je pense que vous avez abordé un point intéressant, une question qui a peut-être certains parallèles avec ce que nous considérons comme des mesures SPS; il s'agit d'utiliser des questions relatives à la salubrité des aliments comme prétexte, comme barrière commerciale déguisée. Ce que l'Union européenne cherchait à obtenir, dans certains cas, c'était essentiellement d'étiqueter les méthodes de production. Ce n'est peut-être pas directement pertinent à la CCB, mais à titre d'observation générale, je crois que les initiatives de ce genre sont extrêmement dangereuses et peuvent avoir des conséquences très graves en termes de distorsions du commerce.
» (1705)
M. Bob Friesen: C'est l'une des préoccupations que nous avons depuis pas mal de temps pour ce qui est de la mise au point de normes pour l'étiquetage volontaire. Il nous apparaissait clairement, aux membres du comité, que bien des gens ne comprenaient pas l'importance pour le Canada d'élaborer des normes qui, au strict minimum, ne feraient pas obstacle aux relations commerciales que nous avons bâties avec d'autres pays. À un moment donné, on envisageait une norme qui aurait clairement donné lieu à une contestation commerciale de la part des États-Unis. Parce que l'étiquetage est une question d'information et non pas de salubrité, les États-Unis auraient eu clairement l'occasion de contester en toute légitimité en application des règles de l'OMC.
Je voudrais aussi aborder la question du protocole sur la biosécurité. Comme vous le savez, c'est le protocole qui est censé régir les déplacements transfrontaliers des produits génétiquement modifiés. Ce qui nous préoccupait vraiment dans le contexte du commerce et du protocole sur la biosécurité, c'est que, premièrement, ils veulent le ratifier avant que la négociation soit terminée. C'est un peu comme si l'on signait un accord de l'OMC aujourd'hui, quitte à le négocier ensuite pendant les sept prochaines années. Cela nous inquiète vivement.
Il y a quelques éléments de ce protocole qui nous préoccupent. Premièrement, Environnement Canada nous a dit qu'il envisage de ne pas négocier un niveau de tolérance dans ce protocole. Autrement dit, on permettrait à tous les pays d'établir leur propre niveau de tolérance. Le risque serait de créer des niveaux de tolérance se situant n'importe où entre 1 p. 100 et Dieu seul sait combien; déjà, autour du monde, ce niveau se situe entre 1 p. 100 et 5 p. 100. Donc, ou bien nous aurions plusieurs filières de ségrégation, ou bien, si nous voulions n'en avoir qu'une seule, il nous faudrait alors réaliser le niveau de tolérance le plus bas, ce qui est impossible pour l'instant, d'après ce que nous dit l'industrie.
L'autre risque, dont Victor a déjà parlé, c'est qu'un pays pourrait décider de changer son niveau de tolérance pendant qu'une cargaison de céréales est en route pour ce pays. Disons qu'il y a chute des cours et qu'ils décident d'obtenir un meilleur prix; ils changent donc le niveau de tolérance ou la méthode d'essai, parce qu'ils n'ont pas encore établi une méthode d'essai harmonisée. Ainsi, l'exportateur pourrait utliser pour les essais des critères différents de l'importateur, et puis il pourrait changer d'avis alors même que la cargaison est en route et se trouve au milieu de l'océan, et le pays importateur pourrait dire, écoutez, nous sommes prêts à prendre votre blé si vous baissez votre prix.
Il est donc clair qu'il y a d'autres problématiques commerciales, même à l'intérieur du dossier des mesures SPS, qui ouvrent toute grande la porte à la création de barrières commerciales non tarifaires.
Le président: Messieurs, mesdames, merci beaucoup. Ce fut très instructif et je tiens à vous féliciter, collectivement et individuellement, pour les excellents documents que vous nous avez fait parvenir. Vous avez abordé toutes les questions que nous vous avions posées et vous avez répondu très franchement aux questions des membres du comité. Vos exposés, ainsi que vos réponses à certaines de nos questions, feront partie intégrante du rapport que nous rendrons public à la Chambre des communes, ce que nous espérons faire d'ici huit semaines. Je ferai le nécessaire pour que chacun d'entre vous obtienne copie de ce rapport.
Nous allons suspendre la séance et passer à huis clos. Il nous reste un témoin, qui viendra à 17h30. Nous allons donc suspendre la séance pendant deux ou trois minutes, après quoi nous reprendrons nos travaux.
[Note de la rédaction: La séance se poursuit à huis clos]