TRGO Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON TRANSPORT AND GOVERNMENT OPERATIONS
LE COMITÉ PERMANENT DES TRANSPORTS ET DES OPÉRATIONS GOUVERNEMENTALES
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mardi 27 mars 2001
Le président (M. Ovid Jackson (Bruce—Grey—Owen Sound, Lib.)): Veuillez vous asseoir, je vous prie. Nous allons commencer.
Je veux souhaiter la bienvenue à nos témoins de ce matin. Nous étudions le projet de loi S-2, et je crois que nous recevons quatre groupes de témoins. Nous allons entendre deux témoins pendant la première heure. Ils ont cinq à sept minutes chacun pour faire une déclaration avant que nous leur posions des questions, et je laisserai la place aux deux autres témoins à midi.
Il y a quelques questions de régie interne dont j'aimerais d'abord vous parler. Nous allons continuer notre étude du projet de loi S-2 le 29 mars. Nous avons trois autres témoins à entendre et j'espère que nous pourrons passer à l'étude article par article du projet de loi ensuite. Si le comité est d'accord pour que nous poursuivions avec l'étude du projet de loi C-14, nous allons demander au greffier de bien organiser la comparution des témoins et le reste.
Nous allons prendre un peu de temps pour confirmer le programme. J'essaie de tout concilier. Le comité est maître de son programme et je veux m'assurer que tout le monde est satisfait. J'essaie de confirmer des dates et de voir exactement quand nous pourrions accueillir, par exemple, M. Milton—c'est-à-dire quel moment lui conviendrait et ce genre de choses.
Si le comité est d'accord avec ce que je viens de dire, nous allons poursuivre dans ce sens.
Nous verrons ce que nous pouvons faire jeudi. Merci beaucoup.
Je veux souhaiter la bienvenue à nos témoins. Vous avez cinq à sept minutes chacun, après quoi nous vous poserons des questions. Merci.
M. Gilles Bélanger (président, Fédération maritime du Canada): Bonjour monsieur le président. Je veux remercier le comité de nous avoir invités à venir témoigner devant lui pour lui exposer notre point de vue sur le projet de loi sur la responsabilité en matière maritime.
[Français]
Je m'appelle Gilles Bélanger et je suis président et chef de la direction de la Fédération maritime du Canada. Permettez-moi de vous présenter ma collègue, Me Anne Legars, directrice des Affaires législatives et gouvernementales, aussi de la fédération.
[Traduction]
Nous nous exprimons aujourd'hui au nom de la fédération ainsi qu'au nom de la Chamber of Shipping of British Columbia. La fédération et la CSBC représentent la quasi-totalité de l'industrie maritime faisant affaire dans les ports des deux côtes du Canada—la CSBC représentant celle de la côte Ouest, et la fédération celle oeuvrant à l'est des Rocheuses.
J'aimerais signaler qu'on dit souvent que nous représentons des étrangers. Or, ce n'est pas tout à fait vrai. Effectivement, nous représentons un certain nombre d'étrangers, mais nous représentons tous les intérêts maritimes canadiens qui exploitent des navires battant pavillon étranger. C'est bien différent, parce qu'il y a de grandes compagnies canadiennes qui exploitent des navires battant pavillon étranger au Canada; ce sont donc des entreprises canadiennes, et les sociétés étrangères qui font affaire ici sont toutes représentées par des sociétés canadiennes, qui agissent comme leurs agents. Ce sont les intérêts que nous représentons au Canada.
Le projet de loi à l'étude remplace plus ou moins le projet de loi S-17 au sujet duquel nous nous sommes prononcés devant le comité sénatorial auquel il avait été renvoyé. Notre point de vue aujourd'hui est resté essentiellement le même, à quelques différences près. Nous sommes très favorables au projet de loi S-2, comme nous l'étions dans le cas du projet de loi S-17. Ce qui nous préoccupait à l'époque, et nous préoccupe toujours, est l'article 46 du projet de loi.
Quand le projet de loi S-17 a été présenté, nous avons exprimé nos inquiétudes au sujet de l'article 46 en raison de l'adoption imminente du projet de loi US COGSA 99 qui renfermait une disposition attributive de compétence. Étant donné que la France et le Royaume-Uni envisageaient des dispositions du même genre, nous avons soulevé le problème sans nous opposer à l'article.
Aujourd'hui, c'est différent. La situation qui existait en mai dernier a évolué à différents égards.
Premièrement, le projet de loi US COGSA 99 n'a pas beaucoup progressé depuis et il est fort improbable qu'il progresse dans un avenir prévisible. Deuxièmement, tant la France que la Grande- Bretagne se sont abstenues d'adopter des dispositions attributives de compétence qui auraient refléter celles du projet de loi US COGSA. Enfin, les règles de La Haye-Visby, auxquelles adhèrent la plupart de nos partenaires commerciaux, ne prévoient pas ce type de disposition attributive de compétence.
Dans ce contexte, il n'existe donc plus aucun motif susceptible de justifier, sur le plan international, une disposition d'attribution de compétence comme celle qui est proposée dans le projet de loi S-2, et tant la CSBC que la fédération sont maintenant d'avis qu'un amendement à l'article 46 proposé est nécessaire.
Soulignons par ailleurs que nous ne voyons pas la nécessité de changer au Canada le droit relatif à la juridiction compétente en cas de litige. En vertu du droit actuel, les tribunaux canadiens donneront effet à la clause du connaissement clairement attributive de compétence, à moins que le demandeur ne fasse la preuve de motifs impérieux pour lesquels il ne devrait pas être lié par ses engagements contractuels. Par conséquent, la protection est déjà assurée dans le droit canadien en vigueur et ces motifs sérieux ont été résumés par le juge Brandon dans l'affaire Eleftheria. Un extrait de cette partie du jugement figure d'ailleurs dans notre mémoire.
• 1110
Ce test est régulièrement appliqué par la Cour fédérale du
Canada dans les dossiers maritimes lorsqu'une clause d'attribution
de compétence est en jeu. Nous croyons que le droit actuel parvient
à concilier raisonnablement à la fois le besoin de sécurité des
transactions commerciales et la nécessité de protéger les intérêts
des deux parties au contrat de transport. Nous sommes donc dans
l'impossibilité de trouver une seule raison susceptible de
justifier le besoin d'adopter une disposition attributive de
compétence en droit canadien. Nous pouvons par contre indiquer
facilement les dangers associés à la disposition proposée.
Nous sommes d'avis que la disposition attributive de compétence qui est proposée viendrait compromettre les engagements pris par le Canada sur le plan international tel qu'ils figurent dans la Loi sur l'arbitrage commercial. Cette loi est expressément fondée sur la loi type adoptée par la Commission des Nations Unies pour le droit commercial international le 21 juin 1985. D'après cette loi, les tribunaux doivent faire appliquer les clauses d'arbitrage comme le confirment les cas de jurisprudence que nous avons annexés à notre mémoire.
En dépit de ce qui précède, l'article 46 du projet de loi S-2, tel qu'il est rédigé actuellement, semble autoriser le demandeur à intenter des recours judiciaires au Canada en dépit de la présence d'une clause d'arbitrage au contrat de transport. Une telle initiative irait donc encore plus loin que l'article 22 des règles de Hambourg, et contreviendrait également à la loi type sur l'arbitrage international à laquelle le Canada souscrit.
Même si l'article 46 était remanié de façon à faire une distinction claire entre le régime applicable aux clauses attributives de compétence judiciaire et celui applicable aux clauses attributives de compétence arbitrale, le système commercial international deviendrait, selon nous, imprévisible et chaotique si chaque pays adoptait une disposition attributive de compétence du genre de celle qui est proposée dans le projet de loi S-2. Les demandeurs pourraient choisir de poursuivre dans n'importe lequel des pays abritant soit le port de chargement, soit le port de déchargement, soit le port de chargement initialement envisagé, soit le port de déchargement initialement envisagé, soit un établissement, une filiale ou un représentant du défendeur, soit le lieu où le contrat a été conclu et ce, en dépit de clauses contractuelles claires indiquant devant quelle instance les litiges éventuels devront être entendus. Le défendeur ne pourrait pas s'opposer à ce magasinage de compétence, lequel bénéficierait donc uniquement au demandeur et serait exercé à la seule discrétion de ce dernier.
Il faut se rappeler que les clauses attributives de compétence sont prévues dans les contrats pour de bonnes raisons, c'est-à-dire pour préciser à l'avance les questions qui pourraient survenir quant au choix des tribunaux et pour dissiper les incertitudes.
Le président: Si votre propos est la question de compétence, nous comprenons où vous voulez en venir. Mais si vous lisez tout ce qui porte sur le sujet, vous en avez pour à peu près une demi- heure. Je veux m'assurer que vous résumez votre propos.
M. Gilles Bélanger: D'accord.
La disposition attributive de compétence nous inquiète. Pour ce qui est du reste du projet de loi, nous l'approuvons.
Nous nous opposons à cette disposition parce qu'elle va à l'encontre de tous les contrats que les transporteurs et leurs clients signent, parce que des clauses sont prévues. Il peut être utile d'assurer une protection contre ces clauses quand il y a divergence à ce sujet, dans la négociation du contrat, mais cette protection est déjà assurée par la loi. Les tribunaux l'ont assurée au cours des années.
Pour résumer, nous recommandons fortement que l'article 46 du projet de loi soit amendé ou retiré de la loi.
Le président: Merci beaucoup.
M. Gilles Bélanger: Merci.
Le président: Lisa McGillivray va maintenant parler au nom de l'Association canadienne de transport industriel.
Mme Lisa McGillivray (présidente, Association canadienne de transport industriel): Bonjour, et merci beaucoup de nous donner l'occasion de venir exprimer notre point de vue.
Je suis accompagnée aujourd'hui par Sophie Tourangeau qui est la directrice des communications de l'ACTI.
Je représente les expéditeurs du Canada, c'est-à-dire ceux qui achètent des services de transport quels qu'ils soient. Nos membres oeuvrent dans différents domaines: la sidérurgie, les mines, les forêts, les produits manufacturés, les produits alimentaires, l'agriculture, les boissons, les produits chimiques, les engrais, et le reste. Disons que nous représentons à peu près toutes les industries qui expédient des produits au Canada et à l'étranger.
• 1115
Mes remarques seront des plus lapidaires. Disons
essentiellement que nous approuvons la teneur de la Loi sur la
responsabilité en matière maritime. Nous sommes d'accord pour
réunir les diverses formes de responsabilité et la responsabilité
en matière maritime. Contrairement à ce qu'a dit M. Bélanger, les
expéditeurs du Canada approuvent l'article 46 du projet de loi.
Nous sommes d'accord pour dire que la compétence doit rester au
Canada quand un expéditeur canadien conclut un contrat avec l'agent
canadien d'une compagnie maritime.
Je vais m'arrêter là.
Le président: Nous allons passer aux questions, en commençant par Andy Burton qui a dix minutes.
M. Andy Burton (Skeena, AC): Pour l'instant, je n'ai pas de question à poser, monsieur le président. Merci.
Le président: Monsieur St. Denis.
M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin, Lib.): Merci, monsieur le président.
Merci d'être venus nous rencontrer.
Il est assez clair que, sauf pour ce qui est des inquiétudes soulevées par M. Bélanger au sujet de l'article 46, tout semble être acceptable. Nous pouvons donc peut-être parler un peu plus de l'article 46. Tous les témoins sont libres de s'exprimer. Il serait peut-être utile à l'intention de ceux qui vont lire la transcription de nos délibérations et qui ne sont pas juristes, de donner un ou deux exemples des problèmes que causerait, selon vous, monsieur Bélanger ou madame Legars, l'adoption de l'article 46 du projet de loi. Mme McGillivray et Mme Tourangeau pourraient aussi dire ce qu'elles pensent de cet exemple. Nous pourrions ainsi avoir une idée des deux points de vue au sujet d'un ou de deux cas particuliers. Est-ce possible?
M. Gilles Bélanger: J'aimerais faire remarquer, et je vais demander à Mme Legars de compléter, que ce sont, en général, non pas de petites quantités, mais de grandes quantités de produits qui sont transportées par bateau, dans la plupart des cas.
Les clients de Mme McGillivray, les producteurs d'acier et d'aluminium, sont tout à fait en mesure de négocier leurs contrats avec les transporteurs. Les deux parties devraient avoir le droit de convenir que, pour une raison ou une autre, le contrat relèvera de lois américaines, britanniques ou françaises, comme elles peuvent décider de tous les autres aspects des transactions commerciales.
Pourquoi cela ne serait-il pas possible en vertu de la Loi sur la responsabilité en matière maritime? Les compagnies peuvent prévoir une clause attributive de compétence et s'entendre pour que le contrat soit régi par les lois d'un certain pays et si, pour une raison quelconque, l'expéditeur change d'idée et veut poursuivre au Canada... Les parties auraient pu choisir une instance canadienne au départ. C'est une clause qui est négociée, en général, par des entreprises d'envergure qui savent ce qu'elles font.
Pour répondre plus précisément à votre question, je vois que ma collègue a un exemple à vous donner.
Mme Anne Legars (directrice, Affaires législatives et gouvernementales, Fédération maritime du Canada): En fait, les clauses attributives de compétence ou les clauses d'arbitrage qui sont prévues dans les contrats visent à dissiper les incertitudes et à déterminer à l'avance l'instance, arbitraire ou judiciaire, et le pays, la loi habilitante, etc. Elles servent à dissiper les incertitudes et à éviter les différends qui peuvent survenir dans ces cas particuliers. Si on élimine ces clauses ou qu'on ne les applique pas, on crée des incertitudes supplémentaires, ce que les membres de notre industrie n'aiment pas parce que nous cherchons à réduire le plus possible les incertitudes dans les transactions commerciales. C'est un aspect de la question.
• 1120
De plus, tel qu'il est rédigé, l'article 46 semble regrouper
les clauses d'arbitrage et les recours judiciaires. Je tiens à le
préciser. Nous l'avons d'ailleurs signalé dans le mémoire.
Les règles de Hambourg ont apparemment et même explicitement inspiré cette disposition. Dans ces règles, il y a deux articles différents, les articles 21 et 22. L'article 21 s'applique aux instances judiciaires et l'article 22 à l'arbitrage.
Dans la Loi sur la responsabilité en matière maritime, les deux articles sont réunis. Selon l'article 46 du projet de loi, le demandeur pourrait intenter des poursuites au Canada, même si ce n'est pas conforme à la clause d'arbitrage prévue dans le contrat. Cette disposition va plus loin que les règles de Hambourg et cause beaucoup d'incertitude parce qu'elle permet non seulement de choisir la loi applicable et le pays où la poursuite sera intentée, mais aussi le genre de poursuite, l'arbitrage ou le recours judiciaire. L'article 46 causerait une incertitude supplémentaire.
M. Gilles Bélanger: Si vous me le permettez, monsieur le président, j'ajouterais que c'est la même chose pour la plupart des clients de mes amis qui prévoient tous les jours des clauses attributives de compétence dans leurs contrats d'approvisionnement. Ils achètent des produits ou des matières premières et ils décident que le contrat relèvera des lois des États-Unis, du Canada ou d'un autre pays. Cela se fait tous les jours. Pourquoi ne serait-il pas possible de le faire en vertu de la Loi sur la marine marchande du Canada?
Quand le projet de loi COGSA qui prévoyait une disposition de ce genre a été déposé aux États-Unis, le Canada, la France et le Royaume-Uni l'ont examiné. Si une disposition de ce genre commence à être adoptée dans certains pays, elle finira par l'être partout dans le monde. Certains pays ont déjà adopté une disposition semblable, mais pas les principaux pays avec lesquels nous faisons affaire. Il y aura un effet d'entraînement.
Quand elles vont signer un contrat, les compagnies de transport maritime ne sauront jamais devant quelle instance elles pourront être poursuivies parce que le destinataire aura le droit d'intenter des poursuites dans son pays. On ne le saura jamais d'avance. Il deviendra très difficile de faire des affaires, et cette incertitude est susceptible d'entraîner des hausses de coût. Les entreprises prennent des décisions de ce genre tous les jours pour tous les autres aspects de leurs transactions commerciales.
M. Brent St. Denis: Je me demande si l'ACTI aurait un commentaire à faire.
Mme Lisa McGillivray: Non, je peux attendre.
M. Brent St. Denis: Je m'inquiète du temps qu'il me reste. Je n'ai plus que deux minutes. Nous pouvons toujours y revenir plus tard si le temps le permet.
Mme Lisa McGillivray: Merci. D'abord, j'ai un certain nombre d'observations à faire.
Je veux bien admettre que l'ACTI compte de très grosses entreprises parmi ses membres. Mais nous regroupons aussi des petites et moyennes entreprises qui ne sont peut-être pas aussi bien renseignées sur la nature des contrats. Ce n'est certes pas une anomalie. Il existe des régimes de responsabilité pour les autres modes de transport au Canada. Par exemple, la Loi sur les transports routiers, qui est aussi à l'étude, a déjà été une loi d'autorisation d'exploitation. Il fallait prouver qu'on était en mesure d'offrir les services économiquement. Transports Canada a décidé, il y a des mois, d'en faire une loi sur la sécurité. Mais je vous dirais que, malgré son objectif avoué, le gouvernement va réglementer sur la sécurité et non l'exploitation. Un régime de responsabilité et un contrat de transport sont toujours prévus dans la loi, justement pour les situations de ce genre, afin d'aider les expéditeurs qui ne disposent peut-être pas d'un important service de logistique et de transport au sein de leur entreprise.
Ensuite, pour ce qui est de l'incertitude et de savoir si c'est conforme à ce qui se fait ailleurs dans le monde, selon moi, cette disposition vise à assurer que les importateurs et les exportateurs canadiens pourront interjeter appel devant une instance qu'ils connaissent bien. Cette possibilité, même si elle crée un peu d'incertitude pour certains des membres que M. Bélanger représente, sécurise ceux que je représente. Il s'agit donc de trouver un juste équilibre entre les besoins des uns et des autres.
En ce qui concerne le «magasinage de juridiction», je rejette l'idée que les chargeurs prennent certaines de leurs transactions aussi à la légère. Il va sans dire qu'ils veulent le meilleur cadre pour négocier leurs affaires. Je maintiens que le meilleur cadre est celui qu'ils connaissent bien, qu'il soit américain ou canadien. Aller en Europe et ailleurs, où ils pourraient peut-être ne pas avoir de choix, pourrait ne pas constituer un avantage.
Le président: D'accord. Vous avez dépassé le temps qui vous était imparti, monsieur St. Denis.
Je vais passer à Mario qui vient tout juste d'arriver. Mario, il était question de juridiction. Comme vous le savez, nous avons deux invités ici aujourd'hui pour nous entretenir au sujet du projet de loi. Ils ont surtout parlé de l'article 46 qui porte sur la juridiction. Un témoin dit qu'ils prennent normalement des dispositions et qu'ils aiment connaître les règles du jeu. D'autre part, certaines personnes estiment que ces règles devraient être établies au Canada. Ainsi, simplement pour vous permettre de nous rattraper, voilà où nous en sommes. Vous avez des questions?
M. Mario Laframboise (Argenteuil—Papineau—Mirabel, BQ): Non, pas pour l'instant.
Le président: D'accord. Monsieur Shepherd.
M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Vous pourriez peut-être éclaircir un point pour moi. Je ne suis absolument pas un spécialiste de ce domaine. Si je suis un importateur ou un exportateur canadien, je retiens les services d'une ligne maritime et elle bat pavillon libérien—et je ne sais pas si c'est pertinent ou non—je passe un marché avec ce transporteur. À l'heure actuelle il se peut que la responsabilité incombe au Libéria—est-ce que j'ai raison? Si j'ai des marchandises endommagées, que j'ai passé un contrat avec ce transporteur et qu'il y a un différend, comme j'ai signé un contrat avec le transporteur il se pourrait que mon affaire soit jugée au Libéria—est-ce que c'est ce que vous dites?
M. Gilles Bélanger: La responsabilité n'est pas nécessairement celle du pays dont le bateau arbore le pavillon. Elle découle généralement des dispositions qui figurent dans les contrats de transport.
À l'heure actuelle—et cela est vrai depuis un certain nombre d'années—l'Angleterre a entre autres la cote pour ce qui est de la clause d'arbitrage et de la clause de juridiction. Il y a une longue tradition à cet égard. Ainsi la responsabilité n'est pas celle du pays dont le navire arbore le pavillon.
M. Alex Shepherd: D'accord. Cela n'arrive pas en soi, nous n'en finissons pas par une décision rendue au Libéria. Mais un fort pourcentage des affaires seraient probablement en Angleterre à l'heure actuelle—Est-ce ce que...?
M. Gilles Bélanger: L'Angleterre est souvent choisie par les parties, mais les clauses introduites dans les contrats prévoiraient, dans une large mesure, que les affaires seraient jugées en vertu des lois anglaises. Il en revient à ce moment à la partie de décider.
M. Alex Shepherd: J'ai des marchandises endommagées. J'en prends livraison au Canada. Il m'incomberait donc d'essayer d'obtenir un dédommagement en m'adressant à un tribunal en Angleterre. Est-ce là où les choses en sont à l'heure actuelle?
M. Gilles Bélanger: Cela dépendrait des circonstances.
M. Alex Shepherd: C'est possible toutefois.
M. Gilles Bélanger: Oui, et il est possible que ce soit ailleurs—cela pourrait être également au Canada. Comme je l'ai dit plus tôt dans notre exposé, les tribunaux ont déterminé un certain nombre de situations où ils renverront le litige devant un tribunal canadien si certaines conditions sont remplies. Ce serait certes le cas lorsqu'une personne qui a passé un contrat pour un petit chargement a demandé que l'affaire soit jugée par un tribunal canadien, même si le contrat de transport précisait l'Angleterre ou ailleurs. Les tribunaux ont statué que si certaines conditions sont remplies en ce qui a trait au contrat de transport, les tribunaux ne donneront pas effet à la clause de juridiction.
J'aimerais que ma collègue dise quelques mots. Elle a plus d'expérience que moi dans ce domaine.
Mme Anne Legars: C'est ce que nous avons précisé dans notre mémoire. Lorsque le contrat de transport contient une clause de juridiction, le tribunal y jetterait un coup d'oeil et y donnerait effet à moins que le plaignant—qui serait, par définition, le chargeur, puisse démontrer qu'il n'existe pas de lien véritable avec cette juridiction, par exemple avec l'Angleterre, si un tribunal indiquait qu'un contrat prévoyait l'Angleterre.
J'ai décrit dans le mémoire les critères sur lesquels se fondent les tribunaux, c'est-à-dire tous les éléments qui doivent être pris en compte. Par exemple, le défendeur ne peut utiliser cette clause de juridiction comme avantage des procédures. Si le plaignant peut faire la preuve de motifs impérieux pour lesquels il ne devrait pas respecter la clause de juridiction, un tribunal canadien n'y donnera pas effet et l'affaire sera entendue au Canada.
Ainsi, ce que nous disons fondamentalement dans notre mémoire, c'est que nous disposons déjà de critères en vertu de la loi canadienne et que cela évite des abus possibles de recours aux clauses de juridiction en permettant aux tribunaux de garder la cause au Canada, si certaines conditions sont respectées. Nous croyons que la loi canadienne actuelle parvient à concilier raisonnablement à la fois les droits et obligations des parties en ce qui concerne les clauses de juridiction. Nous estimons qu'elle constitue une garantie adéquate contre les problèmes avec lesquels les expéditeurs risqueraient d'être aux prises, parce qu'elle empêchera les abus et autorisera le tribunal à entendre l'affaire au Canada.
M. Alex Shepherd: Par conséquent, si à l'heure actuelle certaines des causes sont jugées en Angleterre et d'autres au Canada, pourquoi vous opposez-vous à ce qu'un changement soit apporté à la loi, à savoir que le pays qui serait normalement compétent deviendrait le Canada?
Mme Anne Legars: C'est parce qu'en vertu de la loi actuelle, lorsque vous avez une clause de juridiction claire, elle doit s'appliquer. Elle est appliquée par le tribunal à moins que vous ne fassiez la preuve de motifs impérieux du contraire. Dans les circonstances normales, il y a une certitude que la clause de juridiction sera appliquée et que le tribunal qui est compétent d'après le contrat sera celui auquel sera confié le litige.
Mais vous avez toujours les dispositifs de protection, bien sûr. Vous avez moins de causes que le contraire parce que c'est un peu comme une protection. Ce n'est pas quelque chose qui se produit dans tous les cas, à savoir que le demandeur peut intenter la procédure au Canada si certaines conditions sont respectées.
M. Alex Shepherd: Quels coûts augmenteront si cette mesure législative est adoptée? Vous avez dit que vous alliez facturer ces gens plus cher en raison de la situation.
M. Gilles Bélanger: J'ai mentionné cela comme une possibilité. Nous n'avons pas examiné cet aspect, mais si vous vous trouvez dans une situation où vous ne savez pas à quoi vous attendre, vous envisageriez les coûts qui peuvent s'ensuivre. Pour bien évaluer votre geste, vous envisagerez la possibilité de coûts supplémentaires. C'est la chose normale à faire dans toutes les entreprises.
Un point qui nous inquiète vraiment... Vous avez demandé pourquoi, s'il ya a une possibilité aujourd'hui que cela puisse se produire, nous nous opposons? Aujourd'hui, en règle générale, la plupart des contrats sont passés entre des sociétés qui savent ce qu'elles font; elles décident ensemble que ce contrat sera régi par les lois d'un certain pays.
Aujourd'hui, des centaines et des milliers d'entreprises au Canada signent des contrats tous les jours, que ce soit pour des fournitures... Pour toutes sortes de raisons, elles signent des contrats et décident du tribunal qui aura compétence. Il y a des gens ici à Ottawa qui soumettraient leur contrat à une cours de justice québécoise ou à une cour de justice américaine parce qu'ils estiment que c'est à leur avantage. C'est ainsi que les choses se passent tout le temps dans le secteur du transport.
Dans d'autres secteurs de l'industrie du transport, vous n'avez pas de choix. Mon amie, Mme McGillivray, a parlé plus tôt du camionnage. Si vous recevez un chargement en provenance des États- Unis et qu'il est muni d'un connaissement américain, c'est la loi américaine qui s'applique. La loi américaine comporte certaines différences par rapport à la loi canadienne. Même si le réceptionnaire canadien peut intenter des poursuites devant un tribunal canadien, le tribunal appliquera des lois américaines en ce qui a trait au connaissement. C'est ainsi que les choses se passent pour d'autres modes de transport.
Ce que nous essayons de faire maintenant avec l'article 46... Nous étions parvenus à une certaine harmonie établie il y a plus de cents ans dans le secteur et c'est de cette façon qu'on a procédé. Les contrats de transport comportent une clause d'arbitrage ou une clause de juridiction. Alors qu'une assez bonne harmonie règne à l'échelle planétaire, le législateur veut maintenant provoquer le chaos.
Le président: Monsieur Burton.
M. Andy Burton: M. Bélanger vient de répondre à ma première question, à savoir que les transporteurs peuvent choisir la juridiction qui entendra le cas. Est-ce bien cela?
M. Gilles Bélanger: Oui.
M. Andy Burton: Ce qui nous inquiète, ce sont les petits transporteurs qui n'ont peut-être pas les ressources que possèdent les gros navires qui transportent des marchandises en vrac, que ce soit du concentré de cuivre ou autre. La situation dans leur cas est tout autre.
Donc, ils ont les ressources voulues, l'assistance d'avocats, ainsi de suite, mais accepteriez-vous qu'on modifie l'article de manière à ce qu'il précise que la procédure, sauf indication contraire, serait intentée au Canada? Cela nous donnerait une certaine marge de manoeuvre.
M. Gilles Bélanger: Absolument. Ce que nous voulons, c'est protéger le droit que nous avons d'établir des clauses de juridiction et d'arbitrage, ce que nous faisons depuis des centaines d'années.
M. Andy Burton: Mais si on précisait que la procédure, sauf indication contraire, serait intentée au Canada, est-ce que cela serait acceptable?
M. Gilles Bélanger: Oui.
M. Andy Burton: Merci.
Qu'en pense Mme McGillivray?
Mme Lisa McGillivray: La procédure devrait être intentée au Canada. Toutefois, pourquoi ne pas aller un peu plus loin et ajouter qu'il incombe au défendeur de démontrer que la procédure devrait être intentée ailleurs?
M. Andy Burton: Les gros entrepreneurs, les gros transporteurs, auraient la possibilité de choisir la juridiction, n'est-ce pas?
Mme Lisa McGillivray: Absolument. C'est plus ou moins la même chose. On ne fait que l'exprimer autrement.
M. Andy Burton: D'accord.
C'est tout pour l'instant, monsieur le président.
Le président: Merci.
Marcel.
M. Marcel Proulx (Hull—Aylmer, Lib.): Merci, monsieur le président.
J'ai un peu de mal à m'organiser ce matin. C'est peut-être à cause du temps froid.
Si cela ne vous fait rien, je voudrais revenir à Mme Legars et à M. Bélanger.
[Français]
Monsieur Bélanger, vous qualifiiez plus tôt de gigantesques les clients qui forment la clientèle de l'Association canadienne de transport industriel. Comment qualifieriez-vous les clients qui composent la vôtre, celle de la Fédération maritime du Canada? Qui sont-ils? Quelles sortes de sociétés ou de consommateurs sont-ils?
M. Gilles Bélanger: Ce peut être des entreprises qui ont 500 navires, aussi bien que des entreprises qui n'en ont qu'un, de même que les agents qui les représentent au Canada.
M. Marcel Proulx: Excusez-moi, je me suis mal exprimé. Dans ce cas-là, qui est la clientèle de vos clients? Ce qui vous importe à vous, c'est que vos clients se sentent protégés contre leur clientèle. Quelle serait la clientèle de vos clients?
M. Gilles Bélanger: Ah, mon Dieu...
M. Marcel Proulx: Parle-t-on d'industries gigantesques ou de consommateurs privés du genre PME? Est-ce que ce peut être des PME?
M. Gilles Bélanger: Fondamentalement, monsieur Proulx, tout ce qui traverse l'océan traverse en bateau, sauf certains petits paquets qui arrivent par avion.
M. Marcel Proulx: Oui, c'est ça.
M. Gilles Bélanger: D'accord? Donc, la clientèle, ce peut être n'importe qui. C'est assez rare qu'un client va acheter un petit paquet et le faire venir par bateau. Généralement, dans la grande majorité des cas, ce sont de gros contrats de fourniture, de l'acier, 30 000 tonnes de grain, 30 000 tonnes d'acier, etc. Ce sont des quantités assez considérables ou des quantités consolidées, comme tout ce qui est transporté par conteneur.
M. Marcel Proulx: D'accord.
M. Gilles Bélanger: Il y a des gens qui achètent ou placent une commande qui arrive dans 250 conteneurs ou 2 000 conteneurs. Il y en a qui vont recevoir... Si j'achète un fauteuil qui vient de la France ou d'Italie, il va m'arriver à un moment donné dans un conteneur. Il fera probablement partie d'un lot expédié en Amérique par le manufacturier de fauteuils. Ce n'est pas moi qui vais négocier avec le transporteur maritime. Ce sera le manufacturier des biens que j'achète qui, généralement, va expédier un plein conteneur ou plusieurs conteneurs de marchandises semblables.
M. Marcel Proulx: D'accord. Je présume que la raison de l'article 46, c'est d'éviter à des consommateurs canadiens, peu importe leur taille, d'avoir à faire face à des dépenses exorbitantes pour se défendre ou pour intenter une action contre un de vos clients à l'étranger. Ce doit être là le raisonnement sur lequel repose cet article, du moins en partie.
M. Gilles Bélanger: On veut permettre aux Canadiens, aux receveurs ou aux expéditeurs canadiens, d'avoir affaire au système judiciaire canadien. C'est ce qu'il semble.
M. Marcel Proulx: Chez eux, plus près de chez eux, ce qui est moins coûteux.
J'en déduis que si vos clients ont un contrat dont certaines clauses stipulent que leurs désaccords peuvent être arbitrés ou faire l'objet d'actions intentées ailleurs, ça peut rendre la vie plus difficile aux consommateurs canadiens et, par contre, avantager vos clients. Est-ce là votre objection?
• 1145
Vous semblez pourtant assez bien protégé puisqu'on dit
qu'on peut décider que cela se fasse ailleurs. Et
même, au paragraphe (2) de l'article 46, on prévoit
qu'il peut y avoir entente pour que ça se passe au
Canada ou ailleurs. Alors, quel est votre problème?
Pourquoi vous opposez-vous à l'article 46, monsieur
Bélanger ou madame Legars?
M. Gilles Bélanger: Le problème, c'est que malgré les ententes et même si j'ai un contrat ferme qui prévoit que, advenant un problème, le cas sera soumis à la juridiction américaine ou à la juridiction anglaise, par exemple, au moment où cela se produit, à cause des conditions du marché ou pour diverses raisons, l'expéditeur ou le receveur peut juger qu'aujourd'hui ce serait mieux d'intenter une action au Canada ou aux États-Unis. S'il a une connexion quelconque aux États-Unis, le Canadien pourrait bien vouloir poursuivre aux États-Unis.
Alors, les choses ne se passeront pas nécessairement au Canada. Cette disposition va permettre de faire du shopping selon les conditions existant un peu partout dans le monde et de se demander: serait-ce mieux de poursuivre ici ou de poursuivre ailleurs?
M. Marcel Proulx: Oui. Vous voulez un meilleur encadrement de façon à ce que vous soyez en mesure de faire vos prévisions, vos réserves financières, afin que s'il arrive quelque chose, vous sachiez d'avance que ce sera réglé selon telle juridiction. Autrement, le coût pourrait avoir été déterminé en fonction de la juridiction anglaise et il se pourrait que vous vous retrouviez tout à coup devant un tribunal canadien qui pourrait se montrer plus généreux ou tenir compte d'autres dispositions. C'est ça qui est le problème.
En autres mots, vos clients à vous voudraient savoir d'avance à quels risques ils auront à faire face.
M. Gilles Bélanger: Bien sûr, bien sûr.
M. Marcel Proulx: Alors, l'article pourrait stipuler que ce doit toujours être au Canada, à moins que vous ayez de bonnes raisons de dire que cela ne devrait pas être au Canada. Je ne sais pas quelles pourraient être vos raisons de le faire en juridiction anglaise, par exemple, mais si une disposition disait que cela doit toujours se passer au Canada à moins d'un motif extraordinaire, comme le disait Mme McGillivray, vous seriez alors encadrés et vous pourriez établir vos prix et vos coûts en fonction de la juridiction canadienne.
M. Gilles Bélanger: À partir du moment où on établit cela ici, l'Angleterre peut demain passer une loi semblable. Tous les Anglais pourraient alors poursuivre chez eux, tous les Français pourraient le faire chez eux et tous les Américains le faire chez eux.
M. Marcel Proulx: Oui.
M. Gilles Bélanger: À ce moment-là, le Canadien impliqué dans une affaire pourrait se retrouver un peu partout dans le monde...
M. Marcel Proulx: Je vois.
M. Gilles Bélanger: ...pour la même raison.
M. Marcel Proulx: Le Canadien propriétaire de bateaux.
M. Gilles Bélanger: Même l'expéditeur.
M. Marcel Proulx: Même l'expéditeur.
M. Gilles Bélanger: L'expéditeur peut être impliqué aussi dans... Même si une poursuite est intentée ailleurs relativement au mouvement de ses marchandises, il sera impliqué de la même façon.
Donc, lieu de créer un système harmonieux de responsabilité, ce serait en fonction de celui qui décide. Ce pourrait être dans n'importe quel pays du monde, en fonction de certains critères.
Prenons l'exemple d'une expédition qui se fait à partir du Canada vers la Grèce. Le receveur de là-bas décide que, parce qu'il est relié d'une quelconque façon à une entreprise dont les bureaux sont à Londres, il va poursuivre à Londres. Le Canadien va devoir aller se défendre à Londres.
Dans chacune des causes, la première question que devra se poser la cour sera celle de savoir si la cause a été portée devant le bon tribunal. On aura donc à se battre en Grèce, en Angleterre, au Canada ou aux États-Unis pour déterminer d'abord si on est devant le bon tribunal.
Si chacun a le droit de le faire dans son pays, les gens d'autres pays vont vouloir contester ça à cause des circonstances, et on va se retrouver dans des contestations sur les juridictions qui n'en finiront plus. C'est ce que l'article 46 va entraîner. Il entraîne le morcellement complet du régime de responsabilité qui existe depuis 2000 ans.
M. Marcel Proulx: Donc, vous me dites qu'il faut voir tout cela dans un esprit international.
M. Gilles Bélanger: Oui.
M. Marcel Proulx: Merci.
[Traduction]
Merci, monsieur le président.
Le président: Monsieur Laframboise, vous avez la parole.
M. Mario Laframboise: Dans la foulée des propos de M. Proulx, j'ai quand même l'impression que ce qui vous déplaît dans tout cela serait que le Canada décide de donner préséance aux règles de Hambourg, parce que la seule façon d'éviter tout cela serait d'adhérer à la convention des Nations Unies qui a été négociée à Hambourg.
Pourquoi ne voulez-vous pas y adhérer? Vous semblez dire que tout fonctionne bien depuis 2000 ans dans le meilleur des mondes, mais il ne faut pourtant pas oublier que des règles internationales ont sûrement été établies parce que tout n'allait pas si bien quelque part. Autrement, on n'aurait pas établi les règles de Hambourg.
Donc, ce que vous semblez dire dans votre mémoire aussi, c'est que vous ne voulez pas que le Canada donne préséance aux règles de Hambourg, puisque, somme toute, c'est ce que fait l'article 46. Ce qu'il dit, c'est que si cela vous semble trop compliqué, vous n'avez qu'à suivre les règles de Hambourg. J'en déduis donc que vous ne voulez pas les utiliser.
M. Gilles Bélanger: Premièrement, ça va un peu plus loin que les règles de Hambourg, parce que ça amalgame les règles de juridiction et d'arbitrage. Le Canada est déjà partie au modèle international des règles d'arbitrage, et les tribunaux canadiens doivent mettre en application les clauses d'arbitrage qui existent. Ce serait le cas selon les règles de Hambourg, mais ce ne serait plus le cas en vertu de l'article 46.
Deuxièmement, les règles de Hambourg ne sont pas adoptées ici et ne le sont pas non plus dans la majeure partie du monde. Quelques pays seulement les ont adoptées. Je ne connais pas toutes les raisons pour lesquelles cela n'a pas été fait. Ma collègue en sait peut-être un peu plus long là-dessus. Mais il y a une foule de raisons qui font que Hambourg n'a pas été accepté.
La majorité du trafic actuellement s'effectue toujours sous les règles de La Haye-Visby, qui précédaient les règles de Hambourg, parce qu'on n'a pas accepté ces dernières. Aujourd'hui, on est en train de renégocier une nouvelle entente multinationale pour remplacer les règles de La Haye-Visby, vu l'incapacité des règles de Hambourg de devenir la règle dans l'ensemble du monde. Il y a actuellement des comités du CMI et de l'OCDE qui sont en train de négocier une nouvelle entente internationale qui viendrait remplacer à la fois La Haye-Visby et Hambourg.
M. Mario Laframboise: Pourquoi ne demandez-vous pas que La Haye-Visby remplace Hambourg dans le projet de loi? Pourquoi ne le demandez-vous pas?
Écoutez, quand je lis les règles de Hambourg, j'y vois tout ce qui peut être négocié; on a au moins l'avantage d'y trouver la responsabilité du transporteur et la durée. Il y a quand même des règles importantes qui sont écrites dans ces traités-là. Si on s'en passe, ça nous laisse devant les tribunaux de chacun des pays où peuvent avoir lieu les procédures judiciaires.
Imaginez-vous celui qui vend des marchandises, souvent en passant par des courtiers, qui peut se retrouver devant le tribunal d'un pays dont il ne connaît pas les lois et qui doit se fier à celui qui a négocié pour lui, sans connaître le fondement. Donc, il y aurait avantage à avoir une règle internationale qui s'applique et qui soit simple, qui puisse tenir sur une même page et permettrait de comprendre dans quoi on s'embarque quand on fait du transport de marchandises par voie d'eau.
Donc, je vous le dis, accrochez-vous à une norme. Si vous n'aimez pas Hambourg, accrochez-vous à La Haye-Visby. Je trouve pertinent que le Canada s'accroche à un traité, à quelque chose qui soit compréhensible par tout le monde. Autrement, peu importe les lois, ce n'est pas tout le monde qui les connaît. Pour vous, ça va, car vous représentez de gros armateurs. Vous n'avez pas besoin des spécialistes. Vous avez sûrement des bureaux d'avocat qui travaillent pour vous. Mais ce n'est pas le cas de tout le monde.
Je trouvais que le projet de loi, au moins, contenait une norme que tout le monde pouvait respecter. Les règles de Hambourg, on les connaît. Personnellement, j'en ai une copie. Tout le monde peut en avoir des copies. C'est très simple. Pour le reste, les transporteurs peuvent décider ensemble...
Le dernier paragraphe de l'article mentionne:
-
(2) Malgré le paragraphe (1), les parties [...] peuvent d'un
commun accord désigner...
Elles peuvent désigner un autre tribunal si elles le veulent, si elles ne veulent pas que ce soit au Canada. C'est un peu ça. C'est-à-dire que si vous n'utilisez pas Hambourg, l'article 46 vous dit que ce seront les tribunaux canadiens, à moins que les deux parties décident de choisir quel autre pays ou quel autre tribunal va s'en occuper. Je pense que c'est simple.
Le problème, c'est que vous n'aimez pas Hambourg. Vous dites que c'est une nouvelle norme qui devrait s'appliquer. Alors, au moins, déterminez une norme sur laquelle pourront se rabattre tous ceux et celles qui trouvent ça trop compliqué. Avec Hambourg, au moins, l'avantage c'est que tout le monde pourrait se dire que les règles de Hambourg sont utilisées dans les contrats et on aurait des normes.
M. Gilles Bélanger: Nous n'avons pas de problèmes avec La Haye-Visby. C'est appliqué au Canada et on vit selon les règles qui y sont définies actuellement. C'est appliqué partout à travers le monde ou à peu près, en grande partie. Alors, on n'a pas de problème avec La Haye-Visby.
M. Mario Laframboise: Selon vous, pour quelle raison ceux qui ont rédigé ce projet de loi n'ont pas utilisé La Haye-Visby? Il y a sûrement une raison.
M. Gilles Bélanger: Je ne le sais pas.
M. Mario Laframboise: Vous ne le savez pas.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Laframboise.
[Traduction]
Marcel.
M. Marcel Proulx: Merci, monsieur le président.
Monsieur Bélanger, je crois comprendre que des dispositions identiques à l'article 46 du projet de loi S-2 ont été adoptées par l'Australie, la Nouvelle-Zélande, la Suède, le Danemark, la Finlande, la Norvège, l'Afrique du Sud et la République populaire de Chine. L'Angleterre veut continuer d'appliquer ses propres règles, parce que c'est là que se déroule le gros des opérations d'assurance et des poursuites judiciaires. Je crois aussi comprendre que les États-Unis d'Amérique vont sans doute réintroduire une telle clause dans leur législation. Que ferait le Canada s'il ne se dotait pas d'une telle clause? Il ne serait pas nécessairement contre ces pays, bien que la République populaire de Chine et l'Afrique du Sud, par exemple, possèdent une industrie du transport assez importante. Si les États-Unis d'Amérique se dotent d'une telle clause, qu'allons-nous faire?
M. Gilles Bélanger: Les États-Unis songent peut-être à réintroduire la loi sur le transport de marchandises par mer, mais cela ne se fera pas du jour au lendemain. Quoi qu'il en soit, un nouveau régime est en train d'être négocié, et nous espérons qu'il sera mis en place à l'échelle internationale en temps voulu.
M. Marcel Proulx: Merci.
Le président: Y a-t-il d'autres questions? Non?
Je tiens à remercier nos témoins. Gilles, madame McGillivray, merci d'être venus.
Nous allons suspendre la séance pendant deux minutes pour permettre aux autres témoins de s'installer.
Le président: Nous reprenons la séance et souhaitons la bienvenue à nos invités. Nous accueillons James Gould, de l'Association canadienne de droit maritime, et MM. Douglas McRae et Art Rayne, du Canadian Board of Marine Underwriters.
Nous allons commencer par James.
M. James Gould (président, Association canadienne de droit maritime): Merci, monsieur le président. Je m'appelle James Gould, et je suis le président de l'Association canadienne de droit maritime, ou l'ACDM. J'aimerais vous dire quelques mots au sujet de l'association.
Elle a été fondée en 1951 par des Canadiens qui s'intéressaient au droit maritime national et international. Notre mandat consiste à promouvoir l'adoption de lois maritimes modernes et efficaces aussi bien au Canada qu'à l'étranger. Nous participons, de concert avec d'autres associations nationales de droit maritime—et elles sont nombreuses—à l'examen de propositions portant sur l'unification, l'uniformisation et l'harmonisation des lois maritimes à l'échelle internationale.
Nous avons deux catégories de membres, soit des membres à titre personnel et des associations. Nous comptons environ 300 membres à titre personnel, des avocats, des assureurs maritimes, des experts répartiteurs, des universitaires, des juges, des experts maritimes, des dirigeants de sociétés de transport maritimes, ainsi de suite. Nos dix-neuf associations membres représentent à la fois des intérêts particuliers et divers. Elles englobent le Canadian Board of Marine Underwriters, représenté par mes collègues, messieurs McRae et Payne; l'Association of Average Adjusters of Canada; l'Association des armateurs canadiens; la Fédération maritime du Canada, dont vous venez d'entendre l'exposé; la Company of Master Mariners of Canada; l'Association des banquiers canadiens et même l'Association du Barreau canadien. Nous comptons de nombreux membres, sauf que l'ACDM ne défend pas les intérêts d'un groupe particulier.
• 1205
Notre association représente également le Canada au sein du
Comité maritime international, le CMI, une organisation
internationale non gouvernementale fondée en Belgique en 1897. Son
objectif premier est de promouvoir l'uniformisation et
l'unification des lois maritimes internationales. Le CMI a négocié
l'adoption de nombreuses conventions maritimes internationales très
importantes au cours des 104 dernières années.
Nous appuyons le projet de loi S-2, tout comme nous avons appuyé le projet de loi S-17. Cette mesure aurait dû être adoptée il y a longtemps. Inutile pour moi de vous la décrire, puisque vous en connaissez tous le contenu. Elle rassemble les principales dispositions des divers régimes sur la responsabilité en matière maritime en vigueur au Canada, et ajoute deux nouvelles composantes importantes, soit le partage des responsabilités et la responsabilité en matière de transport de passagers. Encore une fois, nous appuyons sans réserve le projet de loi.
Compte tenu du sujet à l'étude ce matin, j'aimerais porter mon attention sur la clause de juridiction, soit l'article 46, qui figure à la partie 5 du projet de loi S-2. Je n'aborderai pas les autres dispositions, mais j'accepterai volontiers de les commenter, si vous le désirez. Je me contenterai de dire que nous appuyons l'ensemble du projet de loi.
L'ACDM est favorable à l'adoption de la clause de juridiction énoncée à l'article 46 du projet de loi S-2. Elle reflète, dans une certaine mesure, les dispositions des articles 21 et 22 des règles de Hambourg qui, comme vous le savez, ont été annexées à notre Loi sur le transport des marchandises par eau. Elles n'ont toutefois pas encore été promulguées.
La Fédération maritime du Canada, membre prisé de notre association, et la Chamber of Shipping of British Columbia appuient le projet de loi, mais se sont prononcées contre la clause de juridiction. Or, nous sommes en faveur de cette clause parce qu'elle permet à un réclamant canadien—et il s'agit bien d'un choix qu'on lui offre—d'intenter une procédure judiciaire ou arbitrale au Canada, dans les cas où le lien avec le Canada est clairement établi. Elle fournirait un avantage aux exportateurs et importateurs canadiens dont le seul choix serait d'abandonner leur demande de réclamation ou d'intenter une procédure judiciaire ou arbitrale dans un pays étranger.
De manière plus précise, le règlement de créances peu élevées peut être source de nombreux problèmes et entraîner des coûts exorbitants si on est obligé d'intenter une procédure judiciaire ou arbitrale dans un pays étranger. En Angleterre, par exemple, il faudra peut-être faire appel à un avoué, qui peut commander entre 250 et 300 livres, ou plus, l'heure, et aussi à avocat, ce qui fera augmenter les coûts, leurs honoraires étant identiques ou plus élevés. Même les hôtels coûtent cher là-bas. L'expérience peut donc s'avérer fort coûteuse.
Je crois également comprendre qu'au Japon, par exemple, même si le contrat est conclu en anglais entre des Japonais, ou avec des Japonais, tous les documents doivent être traduits en japonais avant qu'une poursuite ne puisse être intentée, ce qui peut constituer tout un fardeau.
Par ailleurs, le Canada ne serait pas le seul à adopter une telle clause. Comme on l'a mentionné ce matin, plusieurs pays très importants ont déjà adopté des dispositions similaires à l'article 46. Parmi ceux-ci figurent l'Australie et la Nouvelle-Zélande, qui exigent que le réclamant intente une procédure judiciaire ou arbitrale dans ce pays, tout autre recours étant jugé nul. C'est ce que dit la disposition.
Cette clause a également été reprise par les quatre pays nordiques, soit la Suède, le Danemark, la Finlande et la Norvège—des pays qui possèdent tous des navires, ce qui est significatif—et aussi par l'Afrique du Sud et la République populaire de Chine, qui représente un vaste marché.
Nous avons entendu dire que la loi américaine sur le transport de marchandises par mer est au point mort. Je me suis entretenu avec le président de la Maritime Law Association of the United States, vendredi dernier. Il a confirmé que l'association continue de promouvoir l'adoption d'une nouvelle loi sur le transport de marchandises par mer qui engloberait une clause de juridiction identique à l'article 46. Donc, à son avis, ce n'est qu'une question de temps avant qu'une telle loi ne soit adoptée.
Par ailleurs, et peut-être plus important encore, le CMI, est en train de revoir les questions relatives au transport de marchandises par mer. Il s'entend pour dire que les dispositions des articles 21 et 22 des règles de Hambourg devraient être incluses dans une nouvelle convention sur le transport de marchandises par mer.
• 1210
Il convient aussi de mentionner la décision récente de la Cour
d'appel fédérale concernant la clause d'arbitrage. Elle a plaidé
pour la mise en oeuvre de l'article 46. La décision, même si elle
n'est pas longue, est fort instructive. J'accepterai volontiers de
l'analyser plus à fond, si vous le désirez.
Si la clause de juridiction n'est pas adoptée, les importateurs et exportateurs canadiens continueront d'être sérieusement défavorisés par rapport aux armateurs et aux exploitants étrangers. Le Canada, en passant, n'est pas un terrain vague sur le plan légal ou juridique. Nous avons de très bons tribunaux, y compris la Cour fédérale du Canada, qui sont capables d'examiner avec efficience et efficacité de telles demandes. Nous avons également d'excellents arbitres dans le domaine maritime.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Gould.
Je tiens à dire à M. McRae que nous ne voulons pas consacrer tout notre temps aux déclarations. Les membres du comité ont peut- être des questions à poser. Nous allons manquer de temps si votre exposé est trop long. Donc, messieurs Payne ou McRae disposeront de cinq ou sept minutes pour exposer le point de vue des assureurs.
M. Art Payne (ancien président, Canadian Board of Marine Underwriters): D'accord. Je m'appelle Art Payne, et je suis le président sortant du Canadian Board of Marine Underwriters. La première fois que j'ai comparu ici, c'était à titre de président de l'association.
Le Canadian Board of Marine Underwriters a été fondé en l917. Nous comptons parmi nos membres tous les grands assureurs maritimes canadiens, dont plusieurs assurent tant les navires commerciaux que les bateaux de plaisance. Le CBMU appuie avec force l'harmonisation internationale du droit maritime, car elle tend à réduire les coûts et à conserver à l'industrie canadienne du transport sa position concurrentielle. Notre exposé portera surtout sur la partie 4 du projet de loi S-2, qui vise la mise en oeuvre du régime international sur le transport des voyageurs, la Convention d'Athènes, mais touche également d'autres aspects du projet de loi. Nous avons préparé un rapport détaillé que nous souhaitons remettre au comité. Nous aimerions aborder certains points que l'on retrouve dans celui-ci.
L'assurance maritime canadienne est une industrie internationale. Le principal marché mondial de l'assurance de responsabilité civile des navires de gros tonnage, la couverture protection et indemnisation, se compose d'un ensemble d'associations mutuelles connues sous le nom d'associations de protection et d'indemnité ou de clubs P et I. Par la mise en commun de leur capacité, les clubs P et I sont en mesure de fournir une capacité estimée de 4 milliards de dollars à une demande individuelle de règlement. Ils sont de toute évidence le premier choix des propriétaires de navires de gros tonnage et, plus particulièrement, des armateurs de navires-citernes.
Le marché canadien de l'assurance maritime et fluviale offre la couverture des petits bateaux naviguant ordinairement dans les eaux canadiennes. Elle ne représente qu'une très petite fraction des primes totales de responsabilité civile souscrites dans le marché canadien. À notre avis, le projet de loi n'aura pas d'impact majeur sur les propriétaires de navires ou les assureurs canadiens.
Pourquoi appuyons-nous le projet de loi? Jetons un coup d'oeil sur la partie 4, la responsabilité en matière de transport de passagers par eau. En 1996, le Parlement a présenté simultanément deux projets de loi connexes, le projet de loi C-58 visant à donner force de loi à la Convention de 1976 sur la limitation de la responsabilité en matière de créances maritimes et à son protocole de 1996, ainsi que le projet de loi C-59 pour habiliter la Convention d'Athènes sur la responsabilité civile découlant du transport de passagers. Les deux projets de loi avaient l'appui général de l'industrie, mais ni l'un ni l'autre n'a pris force de loi car une élection a été déclenchée.
À nos yeux, les deux conventions sont inséparables et la promulgation du projet de loi S-2 les réunira dans le droit canadien. La mesure provisoire du projet de loi S-4, l'article 577(3) restreignant la responsabilité globale relative aux passagers, peut être révoquée, augmentant de beaucoup la limitation de la responsabilité en valeur pouvant être allouée aux demandes de règlement de passagers.
Nous souhaitons maintenant parler des conséquences du projet de loi sur l'assurance maritime fluviale. Comme nous l'avons mentionné, les clubs P et I offrent de vastes capacités de paiement aux armateurs exposés à des demandes de règlement élevées. Les clubs P et I ont déjà donné leur aval à la Convention d'Athènes. Son adoption par le Canada n'aura pas de répercussions sur les armateurs de navires de gros tonnage.
Je vais maintenant céder la parole à mon collègue, Doug McRae.
M. Douglas McRae (président du comité législatif, Canadian Board of Marine Underwriters): à l'heure actuelle, beaucoup des petits navires canadiens de passagers, des bateaux de louage, des traversiers de petite taille, des bateaux d'excursion, sont assurés dans le marché canadien. Nous nous attendons à ce que les bateaux de moins de 24 passagers continuent d'être assurés dans le marché canadien, alors que les bateaux plus gros, en raison de la couverture plus élevée offerte en vertu de la Convention d'Athènes, se tourneront sans doute vers les associations de protection et d'indemnité.
Les limites requises pour les bateaux, qu'ils soient gros ou petits, sont disponibles à un prix abordable. Vous trouverez dans notre exposé une liste des coûts. À l'heure actuelle, un gros bateau de passagers ne paie qu'environ 3 500 $ par année pour son assurance-responsabilité, ce qui est conforme à la Convention d'Athènes. Ce n'est pas beaucoup. Nous ne nous attendons pas à ce que les primes augmentent par suite de l'adoption du projet de loi. Toutefois, les propriétaires de petits bateaux devront peut-être souscrire à une assurance-responsabilité plus élevée, sauf que celle-ci sera offerte à un prix abordable.
• 1215
J'aimerais maintenant vous parler de l'article 39, qui traite
de l'assurance obligatoire. Le projet de loi établit les moyens
d'introduire, si besoin est, l'assurance obligatoire. Or, nous ne
croyons pas de telles mesures nécessaires en ce moment. À notre
avis, les propriétaires de navires, dans leur vaste majorité, sont
disposés à acquérir des assurances qui respectent les limites plus
élevées. Si l'assurance obligatoire s'avère nécessaire, il faudra
alors régler la question de sa mise en application, une question
qu'il faudra examiner en profondeur avant qu'aucune mesure ne
puisse être prise.
En ce qui a trait à l'article 40, qui traite des modifications aux dispositions sur la limitation, nous le jugeons positif. L'approche de mise à jour des limites de passagers se fera par décret en conseil et ne nécessitera pas l'adoption d'une nouvelle loi. Quand les initiatives internationales actuelles de révision des limites de la Convention d'Athènes seront terminées, le Canada pourra accroître sans difficulté ces limites.
Nous sommes d'accord avec le concept de la loi sur la responsabilité civile maritime et fluviale, que plusieurs ont abordée. Cette loi sera très efficace.
Enfin, j'aimerais dire quelques mots au sujet de l'article 46, le transport de marchandises. Le CBMU appuie énergiquement la confirmation de la compétence du Canada. Nous trouvons tout à fait logique que les navires qui transportent des cargaisons en partance et à destination du Canada soient soumis à la compétence du Canada pour ce qui est du recouvrement des réclamations de dommages aux cargaisons.
Nous tenons à remercier le comité de nous avoir donné l'occasion de présenter nos vues sur la question.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Payne.
Nous allons commencer par Andy Burton, de l'Alliance canadienne.
M. Andy Burton: Merci.
Ma question s'adresse à M. McRae ou à M. Payne. Quel pourcentage de bateaux de passagers au Canada s'assure auprès de vos associations membres ou de la CBMU? À votre avis, est-ce que ce pourcentage va augmenter ou diminuer à la suite de l'adoption du projet de loi?
M. Douglas McRae: Nous n'avons pas de données précises là-dessus. Les navires qui transportent 100 passagers ou plus sont actuellement assurés par les clubs P et I parce qu'ils offrent une responsabilité illimitée et qu'ils disposent d'une capacité de 4 milliards de dollars pour répondre à une demande de règlement. Cette assurance coûte environ 3 500 $ par année. Presque tous les gros bateaux de passagers s'assurent auprès des clubs, et nous nous attendons à ce qu'ils continuent de le faire. Certains bateaux plus petits de 20 ou 30 passagers vont sans doute s'assurer auprès des clubs P et I, compte tenu des hausses prévues par la Convention d'Athènes. Nous allons perdre quelques clients, mais pas beaucoup. Ils ne représentent pas une grosse clientèle pour l'industrie canadienne de l'assurance maritime.
M. Andy Burton: Y a-t-il des sociétés au Canada qui offrent de l'assurance-responsabilité à l'égard des passagers et qui ne sont pas membres du CBMU?
M. Art Payne: J'en doute.
M. Andy Burton: Êtes-vous satisfait de la limite de 350 000 $? Est-elle suffisante, ou croyez-vous qu'elle devrait être plus élevée?
M. Douglas McRae: Eh bien, elle constitue un juste milieu. Si vous avez 1 000 passagers, elle totalisera 350 millions de dollars. Même avec 10 passagers, le montant global demeure élevé.
Ces limites ont été établies il y a dix ans. Une initiative internationale est en cours en vue d'en assurer la mise à jour régulièrement. Elles vont sans doute augmenter dans un avenir prévisible.
Cela ne représente pas beaucoup d'argent pour un passager, sauf que dans le cas d'un accident grave... si on devait revivre l'épisode du Titanic, les sommes en cause seraient énormes.
M. Andy Burton: D'accord.
À votre avis, est-ce qu'il faudrait prévoir, dans le projet de loi, une marge de manoeuvre qui nous permettrait d'augmenter les limites au bout d'un certain temps?
M. Douglas McRae: Le projet de loi prévoit une mise à jour des limites par décret en conseil. On peut donc les modifier sans difficulté, compte tenu du libellé actuel du projet de loi.
M. Andy Burton: Vous êtes donc en faveur de l'approche proposée?
M. Douglas McRae: Absolument.
M. Andy Burton: D'accord.
Est-ce que les membres de votre association tireraient partie d'une baisse des limites de passagers, puisque cela aurait pour effet de réduire le montant total payable en cas d'un accident?
M. Art Payne: C'est possible, puisque la majorité des propriétaires de bateaux s'assurent auprès des clubs P et I. Toutefois, notre chiffre d'affaires n'augmenterait pas nécessairement si les limites étaient moins élevées. Il augmenterait, mais de façon négligeable. Comme nous l'avons dit, cela ne représente pas un gros chiffre d'affaires pour le marché de l'assurance. Les changements qui pourraient être apportés n'auront pas beaucoup d'impact sur nos activités.
M. Andy Burton: Qu'en est-il de la différence qui existe entre les limites qui s'appliquent aux bateaux de passagers et celles qui s'appliquent aux bateaux de plaisance? Elles sont beaucoup plus élevées, et pourraient même atteindre un million de dollars. Comment expliquez-vous cette différence? Doit-on apporter des changements?
M. Douglas McRae: Encore une fois, si vous accueillez 20 personnes à bord de votre bateau pour la fin de semaine, un million de dollars, ce n'est pas beaucoup. Pour ce qui est des bateaux commerciaux, et c'est de cela dont il est question dans le projet de loi, ils ont essayé de fournir une couverture financière plus importante en cas d'accident mettant en cause un grand nombre de passagers. On a essayé de trouver un juste milieu et je crois qu'on a réussi à le faire.
M. Andy Burton: D'accord. Et combien de temps faudrait-il à l'industrie pour introduire l'assurance obligatoire? Est-ce qu'elle pourrait le faire rapidement? Est-ce que cela prendrait des semaines, des mois?
M. Art Payne: Il faudrait analyser la question à fond avant de pouvoir en discuter.
M. Andy Burton: Il y a donc des inquiétudes à ce sujet?
M. Art Payne: Vous soulevez là un point valable. On pourrait, à la limite, trouver des solutions au problème, mais pas en un mois. Nous n'avons jamais été confrontés à ce genre de situation.
M. Andy Burton: C'est tout pour l'instant, monsieur le président.
Le président: Monsieur Shepherd.
M. Alex Shepherd: Encore une fois, je ne connais pas tellement bien ce domaine.
Pourquoi voudrait-on introduire une assurance obligatoire? Est-ce qu'il y a beaucoup de transporteurs commerciaux qui naviguent sans être assurés?
M. Douglas McRae: Je ne le crois pas. Je pense que la vaste majorité le sont. Il y a peut-être des cas exceptionnels, mais...
M. Alex Shepherd: Mais cette assurance est facultative, ce qui veut dire qu'il doit y en avoir qui ne le sont pas si le gouvernement se sent obligé d'imposer l'assurance obligatoire. Nous devons présumer qu'il y a des navires qui ne sont pas assurés.
M. Douglas McRae: C'est possible, mais nous ne l'apprenons que lorsque nous voyons une créance qui n'est pas indemnisée, ce qui arrive très rarement.
M. Alex Shepherd: Vous pensez donc qu'un régime d'assurance obligatoire est difficile à appliquer, n'est-ce pas?
M. Douglas McRae: En tant que gens d'affaires, le concept d'assurance obligatoire ne nous cause pas de problème. Cela permettrait sans doute de s'assurer que tout le monde achète de l'assurance, si bien que cela serait à l'avantage de l'industrie de l'assurance au Canada.
Ce qui nous inquiète, c'est que l'administration en serait très difficile. Il y a des milliers de bateaux dans le pays et il n'existe pas de régime de permis permettant de s'assurer que la loi est respectée. Nous pensons simplement qu'il faudrait faire une étude approfondie pour être sûr que le volet administratif soit raisonnablement en place avant de se lancer dans une telle entreprise.
M. Art Payne: Je pense qu'il est juste de dire que même si vous mettez ce régime en place, même si vous le rendez obligatoire et si vous en veillez à l'application, absolument rien ne garantit que tout le monde s'y conformera, dans tous les cas. De la même façon, et c'est la vérité, beaucoup de conducteurs automobiles n'ont pas d'assurance dans les provinces dotées d'un régime obligatoire et conduisent des véhicules non assurés. C'est simplement la réalité du monde dans lequel nous vivons.
M. Alex Shepherd: Quand même, la pire conclusion à laquelle on arrive, c'est qu'un certain pourcentage de voyageurs prennent des embarcations maritimes qui ne sont pas protégées.
M. Art Payne: Cela pourrait fort bien être le cas, mais nous n'avons pas de réponse à cela en raison de l'expérience que nous avons à propos de tels incidents. Ils ne sont tout simplement pas signalés.
Le président: Nous allons passer à M. Laframboise.
[Français]
M. Mario Laframboise: Merci, monsieur le président.
Messieurs Payne et McRae, vous représentez les assureurs et vous dites au gouvernement de ne pas imposer un programme d'assurance obligatoire. Cela m'inquiète pour la population, dans le sens où, une fois que le gouvernement aura adopté ce projet de loi, notre bon peuple va penser qu'il est assuré lorsqu'il est transporté par bateau. Pourtant, ce n'est pas ce que le projet de loi dit. Les transporteurs qui auront cotisé à une assurance pourront rembourser les dommages, alors que ceux qui n'auront pas d'assurance ne pourront pas rembourser les passagers ayant subi des dommages. C'est cela qui m'inquiète.
J'ai posé les mêmes questions aux représentants du gouvernement qui ont défendu le projet de loi. Lorsqu'on implante un régime de responsabilité, il est important que ceux qui subissent des dommages soient automatiquement protégés et sûrs d'être remboursés pour les dommages causés. Ce n'est pas ce que propose le projet de loi, et vous me confirmez ce que nous disaient les représentants du gouvernement, à savoir qu'il n'y a pas eu d'analyses approfondies du marché de l'assurance préalablement à ce que ce projet de loi soit adopté.
• 1225
Vous nous dites que cela prendrait
un certain temps, mais encore une fois, vous ne pouvez pas
nous confirmer le temps requis pour analyser le marché de
l'assurance et savoir dans combien de temps on pourrait
instaurer un régime obligatoire. C'est ça qui m'inquiète.
Nous sommes là pour protéger la population. C'est bien
qu'il y ait un programme et une loi qui rendent responsables
les transporteurs pour les dommages qu'ils peuvent causer.
Le problème réside dans le fait qu'il n'y a pas de filet de
sécurité si jamais des dommages surviennent. Donc, n'importe
quel transporteur pourra s'établir sous la forme d'une
société à numéro, ne pas cotiser à une assurance, offrir des
tarifs peut-être meilleurs et concurrencer d'autres
transporteurs qui, eux, s'assureront. Quand arrivera un
dommage, le transporteur n'étant pas assuré, ce ne sera
pas de la faute des assureurs. Ce sera la faute du
gouvernement qui, lui, aura sanctionné une loi dans
laquelle il n'y a pas de filet de sécurité ni d'obligations.
Je peux comprendre qu'on n'empêchera jamais des gens de ne pas avoir d'assurance ou de ne pas respecter les lois. On ne pourra pas les en empêcher. Mais au moins, si le gouvernement oblige les transporteurs à se doter d'une assurance pour l'obtention de leur permis de transporteur, avec un certain contrôle sur les émissions de permis de navires ou autres, il aura fait son possible.
À titre d'exemple, il est évident qu'on ne peut pas empêcher les gens, aujourd'hui, de se promener sur la route en automobile. Cependant, ils sont obligés de s'assurer. Ils sont obligés d'immatriculer leurs véhicules. Il y aura toujours des gens qui se promèneront sans assurance et qui causeront des dommages, mais ce n'est pas la faute des gouvernements lorsque cela arrive.
C'est la même chose, à moins que je me trompe, en ce qui concerne le transport aérien: ils sont obligés d'avoir d'une assurance. Les transporteurs maritimes, eux, n'auront pas d'obligations ni de filet de sécurité pour protéger la population, le peuple qui nous écoute. Ces derniers penseront être protégés par l'adoption de ce projet de loi. Ce ne sera pas le cas. Les transporteurs sont responsables, on le sait, mais ça ne veut pas dire qu'ils auront l'argent nécessaire pour rembourser les dommages.
C'est bien ce que je comprends?
M. Douglas McRae: Si vous me le permettez, je vous dirai que notre expérience en tant qu'assureurs nous fait comprendre qu'une vaste majorité des gens d'affaires qui investissent achètent de l'assurance. Ce n'est pas une problématique au Canada. Dans la grande majorité des cas, les gens d'affaires au Canada achètent de l'assurance pour protéger leurs biens.
[Traduction]
Je crois que je ferais mieux de continuer en anglais.
[Français]
M. Mario Laframboise: Allez-y.
[Traduction]
M. Douglas McRae: S'assurer au Canada ne semble tout simplement pas poser de problème. La plupart des gens sont conditionnés et achètent de l'assurance, notamment ceux qui ont des investissements à protéger comme des bateaux qu'ils achètent, ainsi que ceux qui créent des entreprises. D'après notre expérience, je ne peux pas dire qu'il y a des exploitants de bateaux qui ne sont pas assurés; il peut y en avoir quelques-uns, mais cela ne semble pas poser un gros problème.
Le problème relatif à l'imposition d'une assurance obligatoire, c'est qu'il faudrait s'assurer qu'il existe un marché pour tous les gens qui devront acheter de l'assurance. C'est un point que nous ne pouvons pas nécessairement garantir. Il peut y avoir des gens qui n'ont pas de permis; en effet, il n'existe pas de système de permis pour les bateaux de moins de 12 passagers.
Pour les bateaux de plus de 12 passagers, la garde côtière fait une inspection, le bateau est certifié et on est quelque peu assuré de la sécurité. Pour les petits bateaux, de 10 à 12 passagers, il se peut que rien ne soit prévu en matière d'inspection. Il se peut qu'il n'y ait aucune façon de s'assurer qu'ils auront accès à de l'assurance, sans procéder à une étude préalable.
La loi autorise certainement le ministre à invoquer un régime d'assurance obligatoire si cela s'avérait nécessaire. Nous ne pouvons pas dire que nous n'y ferions pas bon accueil. Nous l'accepterions, mais nous ne pouvons pas garantir que nous serons en mesure d'assurer tous ceux qui en feront la demande, sans faire inspecter ces bateaux au préalable. Il y en a peut-être 2 000 dans le pays et certains se trouvent dans des endroits éloignés. Ce serait tout un travail que d'arriver à garantir que tous ceux qui demandent de l'assurance y ont accès.
C'est certainement un sujet intéressant, mais je ne pense pas que nous puissions vous dire que nous sommes prêts pour la mise en place immédiate du régime et nous ne souhaiterions certainement pas que l'adoption du projet de loi soit retardée en attendant cette étude.
[Français]
M. Mario Laframboise: Permettez-moi de trouver cela un peu plus compliqué que vous ne le dites. Vous dites que tout le monde s'assure, que les entreprises s'assurent. Quand on vous demande de mettre en place un régime d'assurance, alors là, c'est toute une montagne.
• 1230
Si tout le monde s'assure, instaurer une assurance
obligatoire ne devrait pas être si compliqué que ça,
mais c'est probablement parce que beaucoup de gens ne
s'assurent pas que vous
ne voulez entrer dans ce débat. C'est ma
crainte.
Vous dites que tout le monde s'assure, que tout le monde est responsable au Canada. Si tout le monde s'assurait, il n'y aurait pas de problème. Ils seraient déjà tous assurés chez vous et on pourrait accepter qu'on prévoie un régime d'assurance obligatoire dans un projet de loi. Mais, comme ce n'est pas tout le monde qui s'assure, un régime d'assurance obligatoire vous crée un grand problème. C'est sûrement ça, la réponse. Si tout le monde s'assurait, ce serait simple. Ils seraient tous des clients chez vous et l'assurance obligatoire ne changerait rien.
[Traduction]
M. Douglas McRae: Ceux qui sont actuellement assurés auprès de l'industrie canadienne de l'assurance ont fait leurs demandes d'assurance. Nous connaissons leur entreprise, les genres de bateaux qu'ils utilisent, ainsi que leurs activités.
Étant donné que nous ne connaissons pas tous ceux qui viendraient nous demander de l'assurance, il est difficile de dire que nous pouvons garantir à tous l'accès à de l'assurance. Il se peut que des bateaux dédiés au sport intense, par exemple, soient assurés ou non, et il faudrait examiner la question de très près avant de pouvoir dire que nous pouvons leur donner accès à de l'assurance.
Selon nous, la plupart des gens achètent de l'assurance. Nous ne disposons d'aucun moyen de le savoir, vu qu'il faudrait s'adresser à chaque propriétaire de bateau et lui demander, êtes- vous sûr d'avoir de l'assurance?
[Français]
M. Mario Laframboise: Ça revient à la première question que j'ai posée lorsqu'on a rencontré les représentants du gouvernement. Pourquoi avoir introduit un régime de responsabilité si on ne peut pas garantir un filet de sécurité pour tous ceux et celles qui sont passagers sur un bateau ou un navire?
Il aurait fallu que l'étude approfondie du marché de l'assurance soit réalisée. Elle aurait dû être commandée il y a quelques années pour qu'on soit en mesure de dire si c'est possible ou non, ou de dire, par exemple, que les navires de 25 passagers et plus ou de 20 passagers et plus seront obligés d'avoir une assurance alors que pour les autres, on attend.
Ma grande surprise, c'est qu'on introduise une disposition que le gouvernement pourrait imposer. Mais finalement, il ne l'imposera pas parce que le marché de l'assurance n'est pas capable de la mettre en oeuvre. Il n'y a pas encore d'étude qui a été commandée à cet égard et vous ne semblez pas prêts à en faire une rapidement. Donc, cette disposition ne s'appliquera jamais: 39, c'est peu et ça va rester peu tout le temps. C'est ce que je comprends.
[Traduction]
M. Douglas McRae: Nous serions probablement en mesure de fournir de l'assurance aux gens qui l'exigeraient. Nous ne sommes tout simplement pas sûrs que le régime administratif permettant de s'assurer que ces gens-là achèteraient de l'assurance, même si cela était prescrit par la loi, est en place.
La convention internationale qui vise les gros navires de passagers, la Convention d'Athènes, pourrait éventuellement imposer l'assurance obligatoire. C'est un point qui est à l'étude.
Un autre problème dont je ferais mention est celui du trafic international. Nous avons des navires étrangers qui arrivent au Canada pour prendre et déposer des passagers. Il serait peut-être difficile de se montrer déphasés par rapport à la convention internationale et d'exiger que ces navires donnent une preuve d'assurance, alors qu'ils ne seraient même pas au courant de ces conditions. Il faut donc tenir compte de la réalité internationale ainsi que du régime national.
Par contre, si le gouvernement nous disait que tous les navires de 12 passagers ou plus qui sont certifiés par la Garde côtière canadienne doivent être assurés, je suis sûr que nous pourrions fournir ces produits d'assurance. Ce ne sera pas un problème difficile à régler. Pour l'instant toutefois, notre priorité consiste à faire adopter immédiatement le projet de loi afin d'en bénéficier des avantages, du relèvement des limites et, ensuite, examiner la question d'un régime d'assurance obligatoire peut-être plus tard.
M. Art Payne: J'aimerais également souligner ce que nous avons dit plus tôt, à savoir que je ne pense pas que le public canadien ait souffert de l'absence d'un régime d'assurance obligatoire en ce qui concerne les navires de passagers. Rien ne prouve que ce soit le cas—à ma connaissance, certainement, en tant que spécialiste de l'assurance.
[Français]
M. Mario Laframboise: Ma prochaine question s'adresse à M. Gould.
Trouvez-vous raisonnable d'instaurer un régime de responsabilité sans filet d'assurance au moment où on se parle?
[Traduction]
M. James Gould: Oui, monsieur. Il faut un point de départ avant de passer à l'assurance obligatoire. Comme l'a dit M. McRae, avant d'instaurer un régime d'assurance obligatoire pour tous les bateaux de passagers au Canada, il faut prévoir un cadre administratif, ce qui n'est pas possible pour l'instant. Les inspections disponibles maintenant s'appliquent uniquement aux bateaux de plus de 12 passagers, je crois. Les bateaux dédiés au sport intense, par exemple, peuvent avoir 12 passagers ou plus, mais risquent de ne pas pouvoir se procurer de l'assurance.
• 1235
Selon moi, il est souhaitable que la Convention d'Athènes
fasse partie de notre loi. Je suis très heureux de pouvoir reporter
à l'avenir la décision relative au caractère souhaitable ou non
souhaitable d'un régime d'assurance obligatoire.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Gould.
[Français]
Je vous remercie beaucoup, Mario. Vous aviez de bonnes questions.
[Traduction]
Nous allons passer à Marcel Proulx, du Parti libéral.
M. Marcel Proulx: Merci, monsieur le président.
J'aimerais poursuivre dans la même veine. Lorsque vous parlez de bateaux de 12 passagers ou plus, soit 13 passagers ou plus ou 12 passagers et moins, qu'en est-il du risque couru par 11 passagers et moins, par exemple? À quoi pensez-vous? Parlez-vous de descente en eaux vives ou de petits traversiers? Quels sont les genres de bateaux, en pratique, de moins de 12 passagers?
M. Art Payne: Je pourrais parler de l'observation des baleines sur la côte Est ou même sur la côte Ouest. Si vous allez à Victoria, vous verrez un nombre considérable de ces petits bateaux pontons qui prennent 12 passagers pour aller observer les baleines. On peut aussi parler des descentes de rivière.
M. Marcel Proulx: Ne seraient-ils pas couverts par les dispositions ou les permis relatifs aux petites embarcations, par le MPO, je suppose, ou la Garde côtière? Ne seraient-ils pas couverts par cette partie de la loi?
M. Douglas McRae: Non, s'ils sont de moins de cinq tonnes brutes. Ils n'ont pas à être inspectés à moins qu'ils ne dépassent les cinq tonnes ou transportent plus de 12 passagers.
M. Marcel Proulx: Je vois.
Je me demande s'il serait possible de prévoir un article obligeant les bateaux d'observation des baleines, par exemple, puisqu'ils ne sont pas nécessairement assurés, à annoncer qu'ils n'ont pas d'assurance? Cela n'équivaut pas, bien sûr, à rendre l'assurance obligatoire, vu que le système ne peut le permettre. Ce qui préoccupe le plus mon collègue à ce sujet, si je le comprends bien—et je suis d'accord avec lui—c'est la protection de la population canadienne. Si vous prenez l'un de ces bateaux un dimanche après-midi, que vous n'avez pas d'assurance et que quelque chose se produit, les conséquences pourraient être dramatiques.
Pouvons-nous penser à un système qui les forcerait à dire: «Bienvenue à bord, mais sachez que nous n'avons pas d'assurance- responsabilité»?
M. Art Payne: Eh bien, vous pourriez le légiférer, mais je suppose que ce n'est pas vraiment la bonne façon d'inciter les gens à acheter de l'assurance. J'essaie d'imaginer un tel panneau: «Voici votre billet pour monter à bord de notre bateau qui n'est absolument pas assuré.»
M. Marcel Proulx: J'essaie de donner cette responsabilité à votre industrie, car ces armateurs seraient alors indirectement obligés de vous demander de l'assurance. Je suis surpris de vous entendre dire qu'il n'y a pas d'assurance disponible. Je connais le domaine de l'assurance et tout le monde sait que tout peut être assuré.
M. Art Payne: Je serais surpris que nous ayons dit que l'assurance n'est pas disponible. Je dis que dans certaines circonstances, elle peut ne pas être disponible, ou que le prix est si prohibitif qu'il s'agit de savoir si, avec le coût de l'assurance, l'entreprise est viable. C'est le genre de décisions qu'il faut prendre.
M. Marcel Proulx: D'accord.
Le président: Andy Burton, de l'Alliance.
M. Andy Burton: Merci.
Monsieur Gould, vous avez dit qu'en règle générale, ce projet de loi vous convient. Y a-t-il des ajouts ou des changements que vous aimeriez voir, maintenant ou à l'avenir?
M. James Gould: Je ne le pense pas, monsieur, non.
M. Andy Burton: Ce projet de loi vous satisfait donc complètement.
M. James Gould: Nous en sommes aussi satisfaits que possible. Nous participons depuis des années à la préparation de la Loi sur la responsabilité en matière maritime et nous en faisons la promotion.
M. Andy Burton: Est-il difficile ou est-il même possible pour un passager blessé de dépasser la limite de responsabilité, la limite de 350 000 $?
M. James Gould: C'est possible dans la mesure où il peut prouver que, selon les conditions, le dépassement de la limite s'applique—c'est-à-dire, s'il s'agissait d'un acte délibéré avec intention de causer des dommages. Ces dispositions sont prévues autant dans la limitation de la responsabilité conventionnelle que dans la Convention d'Athènes.
M. Andy Burton: Il est donc possible de dépasser ces limites.
M. James Gould: Oui.
M. Andy Burton: Ce n'est pas trop difficile? Ce que je veux dire, c'est que si c'est trop difficile, faudrait-il relever les limites?
M. James Gould: La limitation des régimes de responsabilité qui sont maintenant en vigueur est beaucoup plus à l'avantage des ayants droit qu'elle ne l'était. Dans ce cas-là, l'obligation est imposée à l'armateur ou à l'exploitant du bateau de passagers. Le passager blessé ou les personnes à charge d'un passager décédé n'ont qu'à prouver qu'ils tombent sous le coup de la loi. Il y a présomption de faute à moins que l'armateur ne prouve le contraire. Les limites de responsabilité, toutefois, peuvent être dépassées s'il s'agit d'un acte délibéré.
Cela serait-il difficile? Eh bien, cela dépendrait des circonstances.
M. Andy Burton: Cela est peut-être légèrement en dehors du sujet du projet de loi, mais je pense que cela s'y rapporte, monsieur le président.
Il semble qu'il y ait un vide dans la réglementation en ce qui concerne les bateaux de moins de 12 passagers et de moins de cinq tonnes. Il semble que les bateaux ne soient pas réglementés, ne fassent pas l'objet d'inspection et ne soient pas tenus d'être assurés.
Faudrait-il envisager quelque chose à ce sujet? Faudrait-il combler le vide, ou non?
M. James Gould: Je le répète, il faudrait que le cadre administratif soit mis en place. En ce qui concerne les passagers, un armateur de bateau peut actuellement exclure ou limiter sa responsabilité. La Convention d'Athènes empêcherait qu'on refuse d'y participer.
C'est pourquoi je dis, par exemple, que lorsque vous prenez un bateau dédié au sport intense, que l'armateur soit assuré ou non, vous signez probablement une renonciation, ce qui signifie que vous ne ferez pas de demande de réclamation pour quelque raison que ce soit.
M. Andy Burton: Merci, monsieur le président.
Le président: Monsieur Shepherd.
M. Alex Shepherd: Je suis surpris d'apprendre que la délivrance de permis pourrait constituer un obstacle à l'assurance. Beaucoup d'entre nous en Ontario et, je crois à l'échelle du Canada, devons passer par tout un processus pour nos petits bateaux. J'ai dû obtenir un permis l'autre jour pour mon petit bateau à moteur dont je me sers pour me promener sur le lac. Il me semble donc étonnant que cela pose un problème.
Certaines des questions que nous posons se résument à ceci: dans quelle mesure les bateaux tendent-ils à être insuffisamment assurés? Vous parlez de la demande de règlement maximum. Il existe sans doute d'autres formes de responsabilité que celle relative aux dommages corporels—par exemple, si mon navire de charge emboutit le dock.
D'un point de vue actuariel, il est courant dans le domaine de l'assurance de prévoir une coassurance. La coassurance est-elle un facteur? Ce que je veux demander en fait c'est si les transporteurs sont vraiment mal assurés.
M. Art Payne: Autant que nous le sachions, les principaux transporteurs et exploitants de navires dans les eaux canadiennes sont membres de clubs professionnels de protection et d'indemnisation qui offrent une responsabilité illimitée. Compte tenu de cette protection, les questions d'insuffisance ou de coassurance ne se posent tout simplement pas.
M. Alex Shepherd: D'accord.
Cela n'a rien à voir avec l'assurance individuelle, mais ma dernière question porte sur le Irving Whale. Je me trouvais sur les lieux lorsque ce bateau a été remonté à la surface, etc. Comment se fait-il que le gouvernement du Canada se soit retrouvé responsable?
M. Art Payne: Je ne... On pourrait sans doute répondre longuement ou brièvement à cette question, et je ne sais pas qui veut le faire.
M. Douglas McRae: Il était assuré.
M. Alex Shepherd: Une réclamation a-t-elle été présentée pour l'opération de dégagement?
M. Douglas McRae: Autant que je sache, la situation juridique était compliquée. On ne savait pas vraiment si l'armateur, ou l'assureur du bateau, avait la responsabilité de le faire enlever. Compte tenu des circonstances, il se trouvait en dehors des eaux territoriales lorsqu'il a sombré. Il était au fond de la mer depuis quelque 20 années. Beaucoup de questions d'ordre juridique se sont donc posées et il ne s'agissait pas uniquement de savoir qui...
M. Alex Shepherd: Parce que c'était une limite de trois milles, par opposition à une limite de 100 milles.
M. Douglas McRae: Des questions d'ordre juridique se sont donc posées, mais le bateau avait une assurance de garanties complémentaires des armateurs au moment où il a coulé et cette compagnie d'assurances aurait réagi si elle avait fait l'objet d'une réclamation.
M. Alex Shepherd: Par conséquent, si le Irving Whale coulait aujourd'hui, il serait assuré—est-ce bien ce que vous dites?
M. Douglas McRae: Certainement, oui.
M. Alex Shepherd: Cette assurance couvrirait tous les coûts effectivement supportés par le gouvernement pour toute cette opération?
M. Douglas McRae: Absolument.
Le président: Mario, avez-vous d'autres questions?
[Français]
M. Mario Laframboise: Je vous remercie, monsieur le président.
J'ai une question, monsieur Gould, par rapport à l'article 46. Ceux qui vous ont précédé, dont M. Bélanger de la Fédération maritime du Canada, semblaient dire que ce qui les irritait beaucoup, c'était que, dans cet article-là, le gouvernement du Canada semblait donner préséance à la convention de Hambourg. Ils auraient mieux aimé qu'on applique les règles de La Haye-Visby. Pouvez-vous me dire, rapidement, quelles sont les différences entre Hambourg et La Haye-Visby? Est-ce que, selon vous, il y en a? Quelles sont les différences, par rapport à la question de la responsabilité, entre les règles de Hambourg et celles de La Haye-Visby?
[Traduction]
M. James Gould: Eh bien, monsieur, elles ne sont pas complètement différentes, mais représentent des régimes différents de responsabilité légale. Actuellement, si je ne me trompe, le Canada, par exemple, ne peut appliquer sa loi sur le transport de marchandises qu'aux lettres de transport au départ—c'est-à-dire dans le cas des expéditions à partir du Canada à destination de l'étranger ou d'un autre endroit au Canada. Par contre, les lettres de transport à l'arrivée peuvent être assujetties aux règles de La Haye-Visby, qui sont conformes à notre loi actuelle, ou être assujetties dans certains cas aux règles de Hambourg, si bien que lorsque nous recevons des marchandises au Canada, elles peuvent être assujetties soit aux premières, soit aux secondes, selon la loi applicable à la lettre de transport au moment où elle est émise.
La question n'est pas de savoir si on aime les règles de Hambourg ou non. L'article 46 permet de prendre une caractéristique des règles de Hambourg qui est considérée souhaitable et de l'insérer dans les règles de La Haye-Visby, pour que l'on puisse reconnaître et appuyer les expéditeurs et les importateurs canadiens.
Je ne pense pas que l'observation faite à propos du sondage de tribunaux soit vraiment juste. Une lettre de transport peut être émise à l'étranger; vous pouvez avoir un expéditeur allemand, un destinataire canadien et un bateau libérien; lorsque les marchandises arrivent au Canada, elle peuvent déjà se trouver entre les mains du consignataire sous réserve de l'arbitrage ou de la juridiction en Allemagne, en Angleterre ou ailleurs. Ce que l'on veut, c'est donner aux expéditeurs et aux destinataires canadiens l'option—il s'agit simplement d'une option—d'intenter une action au Canada.
Maintenant, d'après M. Bélanger, et c'est vrai, dans de nombreux cas, vous avez de gros expéditeurs et de gros armateurs qui se mettent ensemble et conviennent coûte que coûte d'intenter une action à Hambourg, en cas de différend. C'est une chose. Souvent, vous ne savez pas qui est le transporteur lorsque vous faites votre expédition. Parfois, la clause de juridiction prévoit que cela se fera selon la loi applicable au pays où se trouve le siège social du transporteur; or, vous ne le savez pas tant que vous ne savez pas qui est le transporteur. Je ne sais pas s'il faut en dire plus à ce sujet.
Le problème qui s'est posé à propos de ces dispositions de poursuite au Canada est le mieux illustré par l'affaire dont j'ai parlé plus tôt où vous aviez un expéditeur canadien, deux navires appartenant à deux sociétés différentes transportant de la pâte de bois de la Colombie-Britannique jusqu'à Rotterdam, port où la cargaison a été transbordée dans d'autres bateaux appartenant à deux armateurs différents avant d'être finalement livrée en Finlande. La cargaison est apparue endommagée au moment du transbordement à Rotterdam. Vous avez donc toutes sortes de liens entre de nombreuses lois différentes: les États-Unis, le Libéria; certains pays scandinaves, dont bien sûr la Finlande; les Pays-Bas, etc.
• 1250
Le contrat entre un plaignant et l'un des accusés—et il y
avait deux plaignants, je crois, ou peut-être cinq plaignants et
dix accusés—ce contrat prévoyait l'arbitrage à Londres.
Fait bizarre, l'Angleterre était pratiquement le seul pays au monde qui n'avait rien à voir avec ce contrat. Pourtant, la cour a déclaré que dans ce cas particulier, elle ne pouvait rien faire tant que la Loi sur la responsabilité en matière maritime n'était pas promulguée. La cour a exercé son pouvoir discrétionnaire en faveur de la suspension de l'instance pour que cette affaire puisse être renvoyée à l'arbitrage en Angleterre.
Le juge Sexton de la Cour d'appel fédérale a déclaré qu'il est clair que le résultat n'est pas entièrement satisfaisant. Idéalement, les parties devraient pouvoir réunir leurs revendications dans une seule action à un seul endroit. De toute évidence, une loi s'impose pour faciliter les choses. Nous espérons que s'il est adopté, un projet de loi comme le projet de loi S-17, qui est l'ancienne Loi sur la responsabilité en matière maritime, le permettra. Toutefois, dans l'intervalle, nous devons respecter la loi telle qu'elle existe actuellement.
Par conséquent, comme mes amis vous l'ont déclaré, nous sommes dans l'incertitude, jusqu'à un certain point. Je pense que cela permettrait toutefois d'avoir une certitude raisonnable, car si vous expédiez des marchandises à destination ou en provenance du Canada, vous savez que le Canada risque d'être l'un des pays où peut se dérouler le procès ou l'arbitrage.
[Français]
M. Mario Laframboise: C'est bien. J'ai une autre question.
Les articles 91 et 92 parlent de la limite de responsabilité de la Caisse d'indemnisation qui s'applique, évidemment, au transport des produits pétroliers et autres choses. La limite de responsabilité de la caisse est basée sur des chiffres qui avaient été établis en 1990. Donc, le montant de la responsabilité est fixé au niveau des années 1990. On indexe ces montants, au paragraphe 91(3), selon l'indice des prix à la consommation en excluant les facteurs énergétique et alimentaire.
J'ai un problème pour ce qui est de l'industrie des produits pétroliers. On ne veut pas indexer avec les coûts énergétiques. Il faut comprendre que les dernières augmentations du coût de la vie au Canada ont été en bonne partie attribuables au facteur énergétique. On exclut le facteur énergétique partout dans le projet de loi, même du montant que les armateurs doivent contribuer à la Caisse d'indemnisation. On l'exclut toujours de l'indexation au coût de la vie.
Est-ce que vous trouvez raisonnable, monsieur Gould, que les montants totaux d'indemnisation soient toujours les mêmes que ceux de 1990, compte tenu, évidemment, du coût des dommages environnementaux et autres que pourrait occasionner un déversement de produits pétroliers, et compte tenu aussi de la responsabilité encore plus grande qui a été ajoutée dans le projet de loi? C'est-à-dire que tous ceux et celles qui subiraient des pertes, y compris les pêcheurs et ceux qui opèrent des usines de transformation de pêche qui pourraient subir des pertes, pourraient être dédommagés à même la Caisse d'indemnisation. N'aurait-on pas dû ajuster tout de suite—évidemment on arrive au XXIe siècle—les chiffres pour qu'ils soient plus représentatifs du coût des dommages qui pourraient être causés dans les années 2000?
[Traduction]
M. James Gould: Eh bien, je crois que c'est une question politique, monsieur. Vous posez ici la question de la limite de la responsabilité de la Caisse d'indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires, mais non de la limite de la responsabilité à l'égard de l'incident lui-même. Dans cette partie du projet de loi, vous avez un système multicouche de responsabilité. Deux conventions internationales s'interposent entre la Caisse d'indemnisation et l'armateur qui peut causer les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures.
Par conséquent, la Caisse d'indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires est importante, mais cela limite sa responsabilité. C'est une institution canadienne, mais cela ne limite pas la responsabilité de l'armateur au bout du compte; c'est tout du moins ce que je pense.
[Français]
M. Mario Laframboise: C'est ça.
Vous trouvez raisonnable que les chiffres soient toujours ceux de 1990? N'aurait-on pas pu augmenter la responsabilité de la caisse? Évidemment, en augmentant la responsabilité de la caisse, on aurait pu prélever plus de contributions de la part des armateurs. Ça nous aurait donc permis d'avoir des montants plus raisonnables, à tout le moins plus réalistes.
• 1255
Est-ce que les montants sont toujours réalistes?
Êtes-vous satisfaits de la somme de 100 millions de
dollars, qui sera
indexée, évidemment, mais en excluant du coût de la vie
l'indexation du facteur énergétique? Vous semblez
satisfaits du montant de la Caisse d'indemnisation.
Je comprends que l'armateur est, lui aussi, responsable, sauf qu'il n'en demeure pas moins que c'est un fonds qui est garanti. Si une catastrophe devait arriver—ce que l'on ne se souhaite pas—, est-ce que la somme de 100 millions de dollars serait raisonnable compte tenu de ce que peuvent coûter tous ces dommages-là? N'y aurait-il pas lieu d'augmenter, possiblement graduellement, la limite de responsabilité afin d'avoir plus de sous et d'être capable de régler les cas de tous ceux et celles qui pourraient subir des dommages par rapport à un déversement et de les indemniser?
[Traduction]
M. James Gould: Eh bien, le directeur de la caisse serait mieux placé pour vous répondre. Autant que je sache, la caisse a beaucoup d'argent et les réclamations sont insignifiantes par rapport aux ressources dont elle dispose. Je ne peux donc pas vous dire si 100 millions de dollars sont suffisants ou non. La caisse a beaucoup d'argent et n'a pas eu à payer.
Le président: Avez-vous terminé, Mario?
Monsieur St. Denis, du Parti libéral.
M. Brent St. Denis: En fait, mes questions ont déjà été traitées. J'aimerais faire une observation que je vais reporter à jeudi; c'est une observation générale qui pourra être faite à ce moment-là si bien que je passe mon tour.
Le président: Andy?
M. Andy Burton: Non, merci, monsieur le président.
Le président: Y a-t-il d'autres questions de la part des membres du comité?
J'aimerais remercier nos invités, M. Gould, M. McRae et M. Payne. C'est avec plaisir que nous vous avons entendu aujourd'hui exprimer vos points de vue. Nous vous remercions de vos observations et bien sûr les prendrons en compte dans le cadre de notre examen du projet de loi.
Y a-t-il autre chose pour le comité?
La séance est suspendue jusqu'à 11 heures, jeudi.