AGRI Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mardi 6 mai 2003
Á | 1110 |
Le président (M. Paul Steckle (Huron—Bruce, Lib.)) |
M. Mark Corey (sous-ministre adjoint, Direction générale des services à l'industrie et aux marchés, ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire) |
Á | 1115 |
M. David Chatterson (directeur, Direction de la politique commerciale multilatérale, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international) |
Á | 1120 |
Le président |
M. Steve Verheul (négociateur principal en agriculture, Direction des politiques de commerce international, ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire) |
Á | 1125 |
Le président |
M. Steve Verheul |
Le président |
M. David Anderson (Cypress Hills—Grasslands, Alliance canadienne) |
Le président |
M. David Anderson |
Le président |
M. David Anderson |
M. Steve Verheul |
M. David Anderson |
Á | 1130 |
M. Steve Verheul |
M. David Anderson |
M. Steve Verheul |
M. David Anderson |
M. Rick Casson (Lethbridge, Alliance canadienne) |
Le président |
M. Rick Casson |
M. Steve Verheul |
Á | 1135 |
Le président |
M. Louis Plamondon (Bas-Richelieu—Nicolet—Bécancour, BQ) |
M. Steve Verheul |
M. Louis Plamondon |
M. Steve Verheul |
Á | 1140 |
M. Louis Plamondon |
M. Steve Verheul |
Á | 1145 |
Le président |
Le président |
Le président |
Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.) |
M. Mark Corey |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Steve Verheul |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Steve Verheul |
 | 1220 |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Steve Verheul |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Steve Verheul |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Steve Verheul |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Steve Verheul |
Le président |
M. David Anderson |
M. Steve Verheul |
M. David Anderson |
M. Steve Verheul |
 | 1225 |
M. David Anderson |
M. Steve Verheul |
M. David Anderson |
M. Steve Verheul |
M. David Anderson |
M. Steve Verheul |
M. David Anderson |
M. Steve Verheul |
M. David Anderson |
M. Steve Verheul |
Le président |
M. John Maloney (Erie—Lincoln, Lib.) |
 | 1230 |
M. Steve Verheul |
M. John Maloney |
M. Steve Verheul |
M. John Maloney |
Le président |
M. David Anderson |
M. David Anderson |
M. Steve Verheul |
M. David Anderson |
M. Steve Verheul |
M. David Anderson |
M. Steve Verheul |
 | 1235 |
M. David Anderson |
M. Steve Verheul |
M. David Anderson |
M. Steve Verheul |
M. David Anderson |
M. Mark Corey |
Le président |
M. Claude Duplain (Portneuf, Lib.) |
M. Mark Corey |
 | 1240 |
M. Steve Verheul |
M. Claude Duplain |
M. Steve Verheul |
M. Claude Duplain |
Le président |
M. David Anderson |
M. Steve Verheul |
 | 1245 |
M. David Anderson |
M. Steve Verheul |
M. David Anderson |
M. Steve Verheul |
M. David Anderson |
M. Steve Verheul |
M. David Anderson |
M. Steve Verheul |
Le président |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Steve Verheul |
 | 1250 |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Steve Verheul |
M. Mark Corey |
Mme Rose-Marie Ur |
Le président |
M. David Anderson |
M. Steve Verheul |
 | 1255 |
M. David Anderson |
M. Steve Verheul |
M. David Anderson |
M. David Chatterson |
M. David Anderson |
M. David Chatterson |
M. David Anderson |
M. David Chatterson |
Le président |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Steve Verheul |
Mme Rose-Marie Ur |
Le président |
M. David Anderson |
Le président |
· | 1300 |
M. Steve Verheul |
M. Mark Corey |
Le président |
M. David Chatterson |
Le président |
M. Mark Corey |
M. David Chatterson |
· | 1305 |
Le président |
CANADA
Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le mardi 6 mai 2003
[Enregistrement électronique]
Á (1110)
[Traduction]
Le président (M. Paul Steckle (Huron—Bruce, Lib.)): Bonjour, Veuillez excuser notre léger retard. Ce matin, il semble qu'il soit difficile de réunir suffisamment de personnes pour siéger et tout le monde doit courir d'un endroit à l'autre. Je présente donc nos excuses à nos invités qui sont venus témoigner.
En vertu du paragraphe 108(2) du Règlement, nous tenons ce matin une séance d'information au sujet des négociations actuelles de l'OMC sur l'agriculture.
Nous sommes heureux d'accueillir du ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, le sous-ministre adjoint de la Direction générale des services à l'industrie et aux marchés, M. Mark Corey, et M. Steve Verheul, le négociateur principal en agriculture. Nous sommes heureux de vous revoir. Du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, nous accueillons David Chatterson, directeur de la Direction de la politique commerciale multi-latérale.
Messieurs, je vous remercie d'avoir accepté notre invitation. Je suppose que vous parlerez le premier, monsieur Corey, mais je crois savoir que vous avez préparé un exposé. M. Chatterson et M.Verheul vous suivront dans l'ordre. Vous disposez d'environ 17 minutes. Nous serions reconnaissants que vous respectiez cette limite.
Je devrais vous prévenir que nous pourrions être interrompus par un vote ce matin. J'essaie d'avoir l'accord de mes collègues. Si nous arrivons à être suffisamment nombreux, nous pourrons poursuivre la séance, si les partis de l'opposition y consentent. Autrement, nous devrons interrompre, puis revenir.
Monsieur Corey.
[Français]
M. Mark Corey (sous-ministre adjoint, Direction générale des services à l'industrie et aux marchés, ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire): Merci, monsieur le président.
Comme vous l'avez mentionné, Steve Verheul, du ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, se joint à moi aujourd'hui. Il est négociateur principal en agriculture et depuis plusieurs années, il gère divers dossiers concernant les politiques en matière de commerce agricole au Canada. David Chatterson, directeur à la Direction de la politique commerciale multilatérale au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, siégera également avec nous.
[Traduction]
Je vais vous donner quelques renseignements généraux. Par la suite, Dave fera un survol des discussions qui ont eu lieu à l'OMC et Steve explorera plus en détail les négociations sur l'agriculture.
La position du Canada à l'égard des négociations de l'OMC sur l'agriculture est l'aboutissement de trois années de consultations avec des centaines de représentants provenant de l'ensemble de l'industrie agroalimentaire. C'est par un processus intense de consultation que le Canada s'est assuré d'avoir une position de négociation solide et crédible puisse qu'elle reflète les intérêts commerciaux de toute l'industrie agroalimentaire. Des représentants du gouvernement ont tenu des dizaines de réunions avec les principaux intéressés afin de discuter de leurs priorités au sujet des questions de politique commerciale. Le ministre Vanclief a organisé plusieurs tables rondes et a rencontré en privé plusieurs groupes de l'industrie représentant un vaste éventail d'intérêts dans le but de connaître leurs points de vue. Ces consultations ont mené, en avril 1999, à la tenue d'une conférence fédérale, provinciale et sectorielle sur les négociations de l'ONC sur la l'agriculture. Plus de 300 intéressés de l'industrie ont participé à cette rencontre de trois jours pour faire part aux deux paliers du gouvernement de leurs points de vue sur les priorités du Canada dans les négociations sur l'agriculture. Suite à cette intense période de consultations, le Cabinet a approuvé la position de négociation du gouvernement du Canada dans les négociations de l'OMC sur l'agriculture en juillet 1999.
[Français]
L'objectif principal de la position de négociation est d'uniformiser les règles du jeu internationales afin que les producteurs et les transformateurs de tous les pays puissent se faire concurrence de manière juste et équitable.
Plus précisément, le gouvernement du Canada vise l'élimination complète des subventions à l'exportation, l'élimination ou une réduction substantielle des mesures de soutien interne qui faussent les échanges et une amélioration appréciable de l'accès aux marchés pour tous les produits agroalimentaires.
Cette position continue de représenter les intérêts de l'ensemble de l'industrie agroalimentaire et nous est profitable à cette étape des négociations.
Á (1115)
[Traduction]
Une réforme importante du commerce agricole est cruciale non seulement pour le Canada, mais aussi pour la plupart des autres pays, plus particulièrement les pays en développement. Les négociations sur l'agriculture jouent un rôle clé pour l'ensemble du programme Doha pour le développement. Pour bien comprendre la dynamique des négociations sur l'agriculture, il est important d'avoir une idée claire sur l'étendue du contexte, notamment à l'égard du cycle de négociations de Doha. David fera un survol des discussions qui ont lieu à l'OMC et, par la suite, Steve explorera plus en détail les négociations sur l'agriculture.
David.
M. David Chatterson (directeur, Direction de la politique commerciale multilatérale, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Merci.
Comme vous le savez, ces négociations commerciales ont été lancées il y a 18 mois environ à Doha, au Qatar. Elles portent sur trois secteurs économiques essentiels : premièrement, une réforme considérable du commerce des produits agricoles, deuxièmement, une plus grande libéralisation du commerce des produits et des services et troisièmement, des règles plus claires sur les subventions antidumping et les mesures de rétorsion. Ces négociations portent également sur la résolution des différends et d'autres questions liées à la propriété intellectuelle, au commerce et à l'environnement. On parle du programme de développement de Doha puisque le développement est au coeur même de ces négociations. Les pays en développement ont remporté un succès mitigé quant aux avantages qu'ils ont pu retirer de négociations précédentes et d'autres mesures de libéralisation, et bon nombre de ces pays connaissent des limites importantes sur leur marché intérieur. Nous croyons que ces négociations pourraient être grandement avantageuses du point de vue économique pour tous les participants et favoriseront une plus grande intégration des pays en développement à l'économie mondiale. À l'heure actuelle, nous sommes à mi-chemin de ces négociations dont la conclusion est prévue pour le 1er janvier 2005. Il reste également quatre mois avant la conférence ministérielle de Cancun, en septembre.
Nous avons entrepris ces négociations sur le bon pied. Nous avons réussi à mettre en place assez rapidement des programmes de travail dans la structure. Il y a eu une assez bonne participation aux négociations. Nous avons fait de bons progrès dans certains domaines, plus particulièrement dans les négociations sur les services. Mais il nous a fallu beaucoup de temps pour progresser dans les deux principaux dossiers de ces négociations, c'est-à-dire l'agriculture et le développement. Nous n'avons pas respecté la plupart des dates butoir qui avaient été fixées dans ces domaines. Cela a pour effet de ralentir l'ensemble du programme. Parallèlement, tous les pays mettent de plus en plus l'accent sur les gains économiques qui sont en cause dans ces négociations. À la conférence ministérielle sur le commerce qui aura lieu à Cancun en septembre, les ministres du Commerce examineront les progrès des négociations et nous fourniront des directives dans tous les domaines négociés.
Comme je l'ai dit, l'agriculture est au coeur même de ces négociations. Steve vous en parlera plus en détail.
L'accès au marché des produits non agricoles est également un autre sujet important. Il y a eu beaucoup d'engagements et beaucoup de propositions, mais il n'y a pas encore eu d'entente sur l'objectif général. Les discussions se poursuivront. Les progrès dans ce domaine dépendent en partie de ce qui sera réalisé du côté de l'agriculture.
Comme je l'ai dit, les négociations sur les services vont bon train. Le Canada a déposé son offre à la fin du mois de mars et nous avons reçu les demandes de quelque 36 pays.
On a reçu plus de 80 propositions de différents pays au sujet des subventions antidumping et des mesures de rétorsion, dans le cadre des négociations des règles. Les discussions en sont encore à ce qu'on appelle l'étape de l'identification, mais on prévoit qu'il sera possible de passer rapidement aux négociations après la réunion de Cancun.
Les négociations sur le règlement des différends se poursuivent et continueront encore quelque temps. Les choses avancent bien, mais il n'y a pas encore de convergence.
Quelques observations au sujet du développement. Il n'y a pas de négociations sur le développement lui-même, mais ce sujet touche tous les aspects des négociations, plus particulièrement en ce qui a trait à la mise en oeuvre, à la façon dont les pays industrialisés peuvent mieux respecter leurs obligations, au traitement spécial et différentiel ou à la façon dont les pays industrialisés peuvent avoir une plus grande marge de manoeuvre pour libéraliser davantage leurs échanges commerciaux.
Je dois mentionner également les enjeux de Singapour. À Doha, nous avons convenu de lancer ce que nous appelons les négociations de Singapour, qui sont des négociations sur la facilitation du commerce, la transparence dans les achats gouvernementaux, les investissements et la concurrence. Il y a également consensus sur les modalités qui seront discutées à la prochaine réunion ministérielle à Cancun.
En résumé, je dirais qu'à cette étape-ci des négociations, les membres en sont encore à déterminer leur position plutôt qu'à s'orienter vers une convergence. Cela n'a rien d'étonnant compte tenu de nos positions de départ. L'agriculture est au coeur même des négociations. Pour réaliser des progrès dans d'autres domaines, il faudra en réaliser en agriculture. Les pays en développement ont toute une gamme d'intérêts qui sont pris en compte dans l'ensemble des négociations. D'une façon générale, je dirais que les choses se passent bien.
Á (1120)
Le président: Monsieur Verheul.
M. Steve Verheul (négociateur principal en agriculture, Direction des politiques de commerce international, ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire): Merci.
Comme David l'a mentionné, les ministres ont défini le mandat et les échéanciers en vue des négociations sur l'agriculture lors de la réunion de Doha en 2001. Ils ont donné aux négociateurs la consigne d'établir, avant le 31 mars 2003, les modalités ou les engagements que prendront les membres de l'OMC en vue de réduire les subventions et d'apporter des améliorations à l'accès aux marchés. Dans le cadre de ce processus, le président des négociations sur l'agriculture, Stuart Harbinson, a présenté en février un premier projet de modalités. La nature de ce texte se voulait controversée, cherchant à susciter de véritables négociations entre les membres de l'OMC. Les membres de l'OMC ont discuté du projet à la fin de février et le président Harbinson a soumis, à la mi-mars, un projet légèrement modifié. Les membres de l'OMC se sont alors réunis, fin mars, pour négocier à partir du projet modifié. Comme nous pouvions nous y attendre, les membres de l'OMC n'ont pu parvenir à un accord avant l'échéance du 31 mars sur un texte de modalités, étant donné les grandes différences qui persistent sur les points fondamentaux des négociations. Les points les plus difficiles touchent l'approche relative à la réduction des tarifs et le niveau d'engagement à réduire les mécanismes de soutien interne qui faussent les échanges. Tous les membres, y compris le Canada, ont manifesté de sérieuses inquiétudes au sujet des ébauches du président. Le Canada en particulier a maintes et maintes fois exprimé ses inquiétudes fondamentales au sujet des dispositions touchant l'accès aux marchés, les entreprises commerciales d'État dans le domaine de l'exportation et le manque d'engagement à réduire les mécanismes de soutien interne qui faussent les échanges.
Le fait de ne pas avoir réussi à établir les modalités avant l'échéance du 31 mars constitue nettement un échec pour les négociations. Toutefois, tous les membres de l'OMC maintiennent leur engagement relatif aux négociations, ainsi qu'au mandat à remplir et au respect de l'échéancier général qui ont été établis à Doha. Les membres de l'OMC ont entrepris une série de consultations techniques avec le président Harbinson afin de diminuer leur désaccord sur certains enjeux clés. Les ministres discuteront également des négociations lors d'une prochaine série de réunions et nous espérons que, grâce à ces discussions, ils seront dans une meilleure position pour prendre les décisions politiques nécessaires en vue de faire avancer les négociations lors de la conférence des ministres de l'OMC, qui doit avoir lieu à Cancun, au Mexique.
Bien que nous devions faire face à d'importants défis au sujet de certains enjeux, le Canada occupe toujours une bonne position dans les négociations. Comme Mark l'a dit, notre premier objectif est de faire en sorte que les mêmes règles internationales soient appliquées par tous. Nous visons l'élimination complète, le plus rapidement possible, des subventions à l'exportation, l'élimination ou une diminution substantielle des mécanismes de soutien interne qui faussent les échanges et une amélioration appréciable de l'accès aux marchés pour tous les produits agroalimentaires. Il est évident que les membres de l'OMC ne se sont pas encore véritablement engagés à trouver des solutions pragmatiques pour régler leurs différends, surtout en ce qui a trait à l'accès aux marchés. À mesure que les membres progressent dans la recherche de solutions créatives, la force de notre position de négociation nous avantage pour promouvoir nos idées visant à atteindre un résultat ambitieux et pratique qui satisfasse les besoins et les intérêts de l'ensemble de l'industrie agroalimentaire du Canada.
Plus nous approchons de la date de la conférence de Cancun, plus il devient évident que les messages provenant des États-Unis, de l'Union européenne et des principaux pays en développement auront un impact majeur sur notre capacité de faire progresser les négociations. Je voudrais parler brièvement de leur rôle dans les négociations pour vous donner une idée de la dynamique de ces négociations. Les États-Unis maintiennent leur engagement envers l'atteinte de résultats ambitieux en ce qui concerne ces négociations. Ils insistent beaucoup, particulièrement en faveur d'un résultat important sur l'accès aux marchés, bien qu'ils démontrent un moins grand intérêt à l'égard d'un résultat ambitieux quant aux mécanismes de soutien interne. L'Union européenne ne fait toujours pas preuve de beaucoup de souplesse. Ceci est principalement dû au débat interne en Europe au sujet de la réforme de la politique agricole commune. Les États-Unis ont clairement dit que nous devons d'abord voir jusqu'où l'Union européenne est prête à aller par rapport à la réforme de la PAC avant de savoir à quel point le résultat attendu des négociations pourra être ambitieux.
Comme David l'a dit, cette nouvelle ronde touche particulièrement les pays en développement; la façon dont ils s'organiseront et exerceront leur pouvoir aura une grande influence sur les résultats. Les pays en développement défendent à la fois des intérêts offensifs et des intérêts défensifs dans les négociations. Leurs intérêts offensifs consistent à tenter de faire diminuer le plus possible les niveaux élevés de dépenses des pays en développement tandis que leurs intérêts défensifs consistent à protéger leurs propres marchés. Nous les encourageons à comprendre que nous avons tous de solides intérêts à long terme à maintenir la pression en vue de réduire les niveaux élevés de dépenses dans des pays tels ceux de l'Union européenne et les États-Unis.
Quant à nous, la force du Canada réside dans nos idées et dans notre potentiel pour attirer le soutien des membres de l'OMC à chaque extrémité du spectre des négociations. Notre position pour ces négociations représente une approche pratique visant à faire progresser les négociations vers un résultat qui assurera que les mêmes règles internationales s'appliquent à tous les membres. Nous continuerons à travailler à la création d'alliances stratégiques avec un grand nombre de pays afin de convaincre les autres membres du bien-fondé de notre position dans ces négociations.
Á (1125)
En terminant, je voudrais préciser que les négociations font de réels progrès, même si elles avancent à un rythme plus lent que celui prévu à Doha. Il est essentiel que les membres de l'OMC poursuivent leurs efforts. Avant que notre secteur agroalimentaire puisse être concurrentiel sur le plan international, il faut appliquer les mêmes règles du jeu à tous. D'une façon générale, il est important de progresser pour que les membres de l'OMC puissent donner des signaux positifs au sujet de l'état de l'économie mondiale, et qu'elle démontre que les pays développés se sont engagés sérieusement à répondre aux besoins et préoccupations des pays en développement, et ce, dans un contexte multilatéral. Le Canada est bien situé par rapport à ces négociations et nous continuerons à travailler avec acharnement avec les autres membres de l'OMC en vue d'atteindre un résultat juste et équitable pour les producteurs agroalimentaires d'ici et d'ailleurs dans le monde.
Merci, monsieur le président.
Le président: Merci, monsieur Verheul.
Nous savons qu'il y aura beaucoup de questions.
M. Steve Verheul: Je m'y attendais.
Le président: Avant d'en arriver à la partie de notre réunion où nous posons des questions, j'aimerais d'abord savoir si nous pouvons nous entendre. Nous avons ici des députés du parti ministériel et des députés de l'opposition. Il y en a autant de chaque côté. Si nous pouvons nous entendre, je propose que nous continuions notre réunion sans égard au vote, compte tenu de ce que le nombre de ceux qui voteraient est le même de part et d'autre. Pourrions-nous procéder de cette façon? Je ne veux pas lancer une discussion. Je veux simplement savoir s'il y a consensus.
M. David Anderson (Cypress Hills—Grasslands, Alliance canadienne): Non.
Le président: Dans ce cas, nous allons continuer. Il nous reste environ 20 minutes et nous pouvons donc commencer notre premier tour de table.
Nous entendrons d'abord M. Anderson.
M. David Anderson: Monsieur le président, je n'aurais pas besoin d'aller voter si le gouvernement n'avait pas eu recours à la clôture au sujet du projet de loi C-10A.
Le président: Ce n'est pas le sujet dont nous discutons, monsieur Anderson. Nous en sommes maintenant aux questions.
M. David Anderson: Les secteurs à gestion de l'offre ont déclaré à notre comité qu'ils souhaiteraient un système fermé. Vous comprenez ce que cela signifie, que ces secteurs pourront opérer au sein du Canada. D'autres nous ont dit qu'on pourrait réaliser des bénéfices de 3 billions de dollars en ouvrant nos marchés et en libéralisant davantage nos échanges commerciaux. Est-il possible de réconcilier ces deux positions? Si oui, comment?
M. Steve Verheul: Je crois en fait qu'il est possible de réconcilier ces deux positions. Nous avons réussi à le faire dans la position de négociation que nous avons défendue au cours des dernières années. C'est sur la question de l'accès aux marchés qu'il pourrait y avoir un conflit. Certains éléments de notre industrie souhaitent avoir un accès accru au marché des autres pays pour placer leurs exportations, alors que les secteurs à gestion de l'offre souhaitent limiter l'augmentation de l'accès aux marchés.
Dans nos négociations, nous ne parlons pas d'améliorer l'accès aux marchés. Nous discutons de différentes méthodes pour améliorer l'accès aux marchés. Nous réclamons une réduction substantielle des tarifs au moyen d'une formule. Mais disons toutefois que dans le cas d'un produit sensible, les pays doivent avoir suffisamment de souplesse pour fournir un accès par d'autres moyens, par exemple par l'augmentation des contingents tarifaires. De cette façon, les marchés deviennent plus équitables, même pour ce qui est de l'accès aux marchés à gestion de l'offre. Par exemple, nous offrons un accès plus grand à notre marché des produits laitiers que les États-Unis. Nous devons corriger ce genre de situation. Au titre de l'accès aux marchés, notre position fait le pont entre les divers intérêts de l'industrie.
Pour ce qui est des mécanismes de soutien interne, nous avons un objectif commun, c'est qu'il faudrait ramener les niveaux de dépenses en Europe et aux États-Unis à des niveaux plus raisonnables afin qu'il existe une concurrence plus équitable entre tous les producteurs. Je ne crois pas qu'il y ait à ce sujet de grandes divergences d'opinions.
Nous avons intérêt à prendre les mesures nécessaires pour éliminer les mécanismes de soutien qui produisent le plus de distorsion, c'est-à-dire les subventions aux exportations. Il existe des subventions aux exportations dans le secteur laitier. Ce sont les seules subventions de ce genre que nous ayons. Mais le secteur laitier est prêt à accepter que ces subventions disparaissent dans le cadre d'une réforme future. Je crois que l'industrie a bien accepté cela.
M. David Anderson: Je sais que vous essayez d'en arriver à une position qui permettra les deux régimes, mais j'ai l'impression qu'on continue foncièrement à éroder le régime de gestion de l'offre. À long terme, on ne peut pas avoir les deux régimes. On ne peut pas avoir l'accès aux marchés et ensuite limiter l'accès aux marchés de son propre pays. Je vois l'orientation que vous prenez. Mais depuis dix ans, le gouvernement libéral érode la gestion de l'offre et il semble qu'on continue dans la même voie. On ne peut pas limiter l'accès à son propre marché et s'attendre simultanément à ce que ses produits soient bien accueillis sur les autres marchés.
Á (1130)
M. Steve Verheul: Il s'agit donc de voir comment on offre l'accès à son marché. Ce qu'il faut, dans la gestion de l'offre, c'est que l'accès soit prévisible. Il faut savoir quelle quantité de produits arrivent sur le marché afin de pouvoir gérer l'approvisionnement intérieur. En améliorant l'accès au moyen de meilleurs contingents tarifaires, il est possible d'avoir une certaine prévisibilité et de connaître l'offre, y compris les importations sur une période donnée. Je crois qu'il est possible de réconcilier ces positions car on peut augmenter l'accès aux marchés grâce aux contingents tarifaires. Mais si nous décidions de réduire les tarifs, les secteurs à gestion de l'offre seraient moins en mesure d'évaluer le marché. Nous pouvons réconcilier ces deux positions en donnant l'accès aux marchés au moyen de meilleurs contingents tarifaires, comme solution de rechange.
M. David Anderson: Il semble que les progrès sont très lents. Vous dites que les pays sont encore en train d'élaborer leur position. Il n'y a pas de convergence. Pourra-t-on en dire autant à Cancun? Cette réunion servira-elle à établir des positions ou permettra-t-elle plutôt une convergence? Croyez-vous que, si les pays prennent trop de temps à établir leur position, les États-Unis et l'Union européenne pourraient entreprendre des négociations bilatérales plutôt que de traiter avec l'OMC?
M. Steve Verheul: Nous sommes plusieurs à partager cette préoccupation. Il est possible que les États-Unis et l'Europe s'unissent et s'entendent sur des éléments qui leur seraient profitables mais qui ne seraient pas nécessairement dans l'intérêt des autres membres, notamment du Canada. Ces dernières semaines, nous avons remarqué que les États-Unis et l'Europe ont négocient plus fréquemment en tête-à-tête, et cela devient préoccupant. Toutefois, avant Cancun, c'est-à-dire au cours des prochains mois, il devrait se tenir plusieurs réunions ministérielles au cours desquelles nous devrions pouvoir progresser. Il se tiendra notamment en Égypte à la mi-juin une mini réunion ministérielle qui sera précédée au début juin d'une réunion du G-8. Au cours de l'été, il y aura aussi une réunion ministérielle du groupe de Cairns, puis une du groupe Quint, c'est-à-dire le Canada, les États-Unis, le Japon, l'Union européenne et l'Australie. Voilà une autre tribune qui nous permettra de discuter avec ces pays de la façon de faire avancer les négociations. N'oublions pas non plus que les États-Unis et l'Europe pourraient s'entendre sur des éléments qui les arrangeraient mais qui laisseraient les autres pour compte. Il faut continuer à exercer de la pression. Nous avons également discuté avec d'autres pays, comme la Chine, l'Inde, le Japon et divers autres, qui pourraient être tout aussi préoccupés que nous de voir une entente entre l'Union européenne et les États-Unis se concrétiser.
M. David Anderson: Je vais laisser M. Casson finir mon tour.
M. Rick Casson (Lethbridge, Alliance canadienne): Merci beaucoup monsieur le président.
Monsieur Verheul, vous avez signalé que l'Union européenne n'avait aucunement réagi lorsqu'il avait été question qu'elle réduise son soutien interne. Ce n'est pas ce que semblent vouloir faire pour l'instant les États-Unis. Pour ce qui est de l'élargissement de l'Union européenne et des changements au plan d'action collectif, que doit faire notre gouvernement pour inciter les instances à bouger? S'ils se retirent et font cavalier seul, cela n'aura servi à rien. Cela fait des années que les producteurs espèrent que les négociations permettront d'apporter un semblant de logique au marché et permettront de réduire le soutien interne et les subventions d'exportation. S'il est impossible de bouger sur ce front-là, l'espoir investi dans cette solution s'envolera.
De plus...
Le président: Votre temps est écoulé. Si vous voulez qu'on réponde à votre question, vous devrez vous en tenir à cela.
M. Rick Casson: Je laisserai le témoin répondre.
M. Steve Verheul: L'important, c'est de continuer à collaborer avec les autres pays. Il est évident que nous travaillons en étroite collaboration avec les États-Unis et l'Union-européenne d'un côté, et que nous les rencontrons régulièrement tout deux pour discuter de l'état des négociations. Mais en même temps, il est important que nous poursuivions notre étroite collaboration avec les pays en développement, qui ont beaucoup à gagner des négociations. Après tout, il s'agit de la ronde de développement de Doha, et ce sont les pays en développement qui permettront qu'elles soient couronnées de succès. Nous avons donc gardé des contacts très étroits avec les pays en développement, qui sont au nombre de 108. Il faudra bien qu'ils soient satisfaits dans une certaine mesure de l'issue des négociations. Le Canada leur a expliqué qu'il fallait mettre l'accent sur ce qui nous intéresse véritablement tous, c'est-à-dire abaisser les niveaux élevés de soutien interne et abolir une fois pour toutes les subventions d'exportation. Il faudra donc que tous les autres pays continuent au cours des prochains mois d'exercer des pressions sur l'Union européenne et sur les États-Unis.
Á (1135)
Le président: Merci beaucoup, monsieur Verheul.
Monsieur Plamondon, vous avez sept minutes.
[Français]
M. Louis Plamondon (Bas-Richelieu—Nicolet—Bécancour, BQ): Merci, monsieur le président.
Ma question s'adresse à vous, Steve. Vous êtes un homme d'expérience en matière de négociation internationale et vous n'êtes pas sans savoir que le discours de M. Harbinson a provoqué des réactions d'extrême inquiétude chez les producteurs québécois et canadiens. Comme vous le savez, dans son premier discours, il avait parlé de faire passer les barrières tarifaires de 299 p. 100 à 166 p. 100, ce qui serait un massacre du système de la gestion de l'offre, du moins selon les producteurs agricoles. Dans son deuxième discours--et on commence à négocier à partir de cela--, il parlait d'un changement moins prononcé du niveau des barrières tarifaires.
J'aimerais savoir quel est votre mandat à l'égard de l'intention du gouvernement. Il semblerait, lorsque vous vous êtes adressé aux producteurs agricoles pour leur parler de la gestion de l'offre, la semaine dernière, à Ottawa, que vous ayez dit à ce sujet qu'il y avait trois paliers de l'industrie, dont un qu'on appelle «les prix administrés»; vous auriez déclaré qu'en cette matière, vous n'étiez pas mandaté pour prendre position. Pourriez-vous éclaircir ce point, s'il vous plaît?
[Traduction]
M. Steve Verheul: Bien sûr. Il y a plusieurs dispositions qui nous préoccupaient dans le document Harbinson, particulièrement ce qui touche l'accès aux marchés et ce que cela impliquerait pour notre industrie à gestion de l'offre. Du côté du soutien interne, et pas particulièrement du côté des prix administrés, rien dans le document Harbinson ne changerait quoi que ce soit à l'affaire, ni dans un sens ni dans l'autre. Le document Harbinson n'en fait aucunement mention, et cela n'a pas été un sujet abordé aux négociations. Lors des pourparlers que j'ai eus la semaine dernière avec les organismes de gestion de l'offre, j'ai signalé que dans la position de négociation du Canada, rien ne laisse entendre que nous suivrons une voie ou une autre pour ce qui est des prix administrés, en grande partie parce que nous ne considérons pas que ce pilier en question est directement menacé par cette négociation-ci. Par contre, l'accès aux marchés et les réductions tarifaires constituent un enjeu de taille, mais rien n'a été dit au cours des négociations sur les prix administrés.
[Français]
M. Louis Plamondon: Le fait qu'il n'y ait pas eu de discussions ne signifie pas que vous n'avez pas une position claire. Lorsque vous vous assoyez à la table des négociations pour représenter le gouvernement canadien et, par ricochet, les producteurs canadiens, votre position est-elle de maintenir intégralement les trois points de la gestion de l'offre ou de vous dire que vous ferez votre possible pour obtenir des agencements qui puissent être acceptables pour les agriculteurs?
Comme vous le savez, deux documents confidentiels ont été mis en circulation. On a remis aux quatre ministres concernés un document selon lequel il fallait peut-être mettre sur la table certains aspects de la gestion de l'offre, voire la gestion de l'offre elle-même. Cela a eu énormément d'effet sur les agriculteurs; ils sont très inquiets.
D'abord, lorsque vous êtes à la table des négociations, avez-vous un mandat clair du gouvernement vous disant de ne toucher en rien à la gestion de l'offre? Ensuite, lorsque vous entrez en contact avec les autres pays, qui forment ce regroupement de 144 pays à l'OMC, sont-ils vraiment au courant que la position du Canada est claire?
[Traduction]
M. Steve Verheul: Notre mandat est très clair en ce qui concerne la gestion de l'offre. Notre ministre a dit à plusieurs occasions qu'il souscrit sans réserve à la gestion de l'offre, et notre mandat, au cours de ces négociations, c'est de faire en sorte que la gestion de l'offre sera maintenue, de même que tous les volets nécessaires pour son bon fonctionnement. Vous voyez que notre mandat est très clair. J'ai parlé à divers pays de notre perspective et des propositions que nous voulions faire sur certains aspects, tel que l'accès aux marchés, ce qui pourrait donner de bons résultats pour notre système de gestion de l'offre de certains produits et aussi d'autres enjeux entourant la gestion de l'offre. Nous faisons cela avec beaucoup de pays. De janvier à mars, aucun autre pays que le Canada n'a autant rencontré ses homologues. Nous sommes extrêmement actifs et nous rencontrons les pays, quel que soit leur point de vue, pour leur faire comprendre de façon détaillée notre position et pour essayer, dans la mesure du possible, d'aller chercher leur appui.
Á (1140)
[Français]
M. Louis Plamondon: Vous dites que le ministre a une position claire. Or, je l'ai questionné à la Chambre la semaine dernière, et il a dit que c'était la position du gouvernement, que l'industrie était d'accord sur cela et que c'était également la position adoptée par les négociateurs.
Sans vouloir être méchant, je dirai que vous savez comme moi que les ministres sont à Ottawa, mais que les négociateurs, c'est-à-dire ceux qui prennent les décisions ou qui font ce qu'on appelle les deals, se trouvent à des tables de négociation internationales. Il arrive souvent que le ministre reçoive un rapport disant que les négociations se sont bien déroulées, mais qu'il y a eu un petit accrochage et qu'il faudra faire comprendre aux producteurs qu'ils vont perdre sur deux ou trois points. Cela les inquiète énormément. Les producteurs agricoles me disent souvent que la gestion de l'offre est un barrage, que l'eau est au niveau du barrage et que si on y touche le moindrement, l'eau va passer par-dessus le barrage; notre gestion de l'offre sera alors complètement anéantie.
D'après tout ce qu'on entend au sujet des discussions qui se tiennent là-bas, on pourrait croire que les négociations vont finir par toucher à pratiquement tous les secteurs de tous les pays, y compris notre gestion de l'offre. Voilà qui est inquiétant.
À cet égard, les recherchistes qui traitent de questions d'agriculture ont suggéré une question qui m'intéresse et que je voudrais vous poser intégralement. Elle se lit comme suit:
Les modalités prévoient offrir une certaine flexibilité en permettant aux pays d'accroître à 8 p. 100 (au lieu de 10 p. 100) leur accès au marché pour certains produits agricoles en autant que cet excès «plus» faible soit compensé par un nombre équivalent de contingents tarifaires qui atteindraient 12 p. 100 de la consommation intérieure. |
Est-ce que la production sous gestion de l'offre pourrait profiter de cette flexibilité, selon vous? Deuxièmement, pourriez-vous donner un exemple concret de la façon dont cette flexibilité pourrait être appliquée?
[Traduction]
M. Steve Verheul: Lorsque vous affirmez que ce sont les négociateurs qui sont à la table de négociations et que le ministre ne fait que recevoir des rapports sans nécessairement suivre à la loupe chacun des enjeux, vous devez savoir que, dans notre cas, nous faisons rapport quotidiennement au ministre et lui expliquons en détail ce qui se passe dans les négociations à Genève. Depuis peu, les négociations de Genève se concentrent surtout sur des questions assez techniques. Pour ce qui est des enjeux plus difficiles, et qui pourraient avoir une incidence sur divers secteurs de notre industrie, comme par exemple ce qu'il adviendra des réductions tarifaires et du soutien interne, il faut qu'à ce moment-là les décisions soient prises au palier politique. Ce sont donc nos dirigeants politiques qui nous diront à nous, les négociateurs, jusqu'où nous pouvons aller dans la négociation. Cela devrait se faire beaucoup plus tard en cours de route, possiblement à Cancun.
Pour ce qui est de la question que vous vous posez sur les modalités prévoyant une certaine flexibilité pour que les contingents tarifaires soient augmentés, sachez que le président, M. Harbinson, avait proposé dans son texte que, d'une façon générale, tous les pays puissent accroître leurs contingents tarifaires pour qu'ils atteignent 10 p. 100 de la consommation intérieure récente, mais que, pour certains produits, l'augmentation n'atteindrait que 8 p.100 de la consommation intérieure, pour autant que cela soit compensé par des contingents tarifaires atteignant 12 p. 100 de la consommation intérieure pour d'autres produits.
Nous pourrions hypothétiquement tirer profit dès aujourd'hui de cette situation, étant donné que certains contingents tarifaires nous préoccupent moins que d'autres. En effet, les contingents tarifaires applicables au blé, aux produits du blé et à la margarine, par exemple, sont bien moins sensibles aux augmentations puisqu'ils ne dépendent pas véritablement des augmentations. Mais c'est à mon avis une situation extrêmement hypothétique, puisque le Canada est d'avis qu'il est possible d'accorder un accès encore plus grand au marché dans la mesure où cela se fait de la bonne façon. Par exemple, on peut obtenir un plus grand accès au marché avec 5 p. 100 de la consommation intérieure plutôt qu'avec 10 p. 100 pour certains produits, dans la mesure où c'est fait proprement. En effet, nous préférerions avoir un contingent plus faible mais que cela soit fait selon les règles plutôt qu'un contingent plus élevé alors que les règles du jeu sur la façon de les établir ne sont pas respectés.
Á (1145)
Le président: Nous devrons arrêter ici pour lever la séance. Je vous demanderais de revenir dès que le vote sera terminé.
Pour les partis qui n'ont pas le nombre de représentants voulu, essayez d'en convaincre de vous raccompagner après le vote, car cela en vaut la peine.
Nous promettons aux témoins de revenir.
Nous revenons après le vote. La séance est levée.
Á (1145)
 (1218)
Le président: Nous n'avons pas vraiment levé la séance, mais nous l'avons plutôt suspendue. Je n'aime pas être en suspension.
Des voix: Oh, oh!
Le président: Monsieur Verheul, c'est vous qui aviez la parole.
Nous passons maintenant à Mme Ur pour poursuivre la discussion. Vous avez droit à sept minutes.
Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.): Merci.
Merci de votre exposé.
J'aurais quelques questions pour vous. Le 1er mai, le ministre de l'Agriculture a dit très clairement qu'il n'appuierait pas le rapport Harbinson sur les modalités. Dans ce cas, monsieur Verheul, ce refus ne devrait-il pas être à la base même des prochaines négociations? Cette prise de position ferme ne devrait-elle pas vous servir de point de départ?
M. Mark Corey: Monsieur le président, permettez-moi de répondre d'abord, après quoi je céderai la parole à mon collègue. Il y a une chose sur laquelle il faut être très clair, et sur laquelle on nous demande souvent des précisions : sachez que les négociateurs ne négocient pas ce qu'ils veulent. Ils ont un mandat de négociation très précis, et dans le cas qui nous occupe, ce mandat nous est parvenu du conseil des ministres en 1999. C'est un mandat public et chacun sait exactement quelle est la position de notre pays. À titre de négociateurs à Genève, par exemple, nous n'avons pas le pouvoir de négocier des éléments qui ne sont pas contenus dans le mandat, car pour se faire, il faudrait que le conseil des ministres le décide. Si nous devions négocier à l'extérieur de notre mandat, il faudrait en demander l'autorisation au conseil des ministres. Comme le mentionnait mon collègue, nous communiquons quotidiennement avec le ministre lorsque l'OMC siège, de sorte qu'il est très bien informé. Ce qu'il faut souligner, c'est que les décisions importantes sur les questions de fond sont prises par les ministres et non pas par les négociateurs.
Mon collègue vous en parlera plus longuement.
Mme Rose-Marie Ur: Dans ce cas, quel est votre mandat? Soyez bref, car je n'ai que sept minutes. Si cela ne vous suffit pas, vous pourriez nous l'envoyer.
M. Steve Verheul: J'aimerais revenir à votre première question.
Notre mandat est décrit dans la position de négociation du Canada. Nous voulons éliminer les subventions à l'exportation le plus rapidement possible, réduire au maximum ou éliminer complètement toute forme de soutien interne pouvant entraîner une distorsion des échanges commerciaux et accroître de façon substantielle l'accès au marché pour tous les produits, et ce, dans tous les marchés.
Pour revenir à votre question sur le document Harbinson, sachez que ce document visait à entraîner les pays vers la convergence sur les questions de fond et leur donner une base de départ. Comme on l'a reconnu dès le début, cette ébauche posait des difficultés à bon nombre de pays, dont le Canada qui y voyait beaucoup de problèmes de fond. Par conséquent, le document a échoué complètement dans cette tentative de rapprocher les intéressés. L'ébauche, dans sa forme originale, n'est donc plus un document de négociation. Le président, à la lumière des discussions que j'ai eues à quelques reprises avec lui, persiste à croire que le texte devrait être gardé sur la table de négociations pour qu'on puisse le changer au besoin. Il serait possible d'en retrancher des pans entiers, de le remanier, voire d'en changer tous les mots. Mais, à son avis, ce texte pourra servir à mieux cibler les négociations. Certaines parties du texte conviennent au Canada, par exemple, l'élimination des subventions à l'exportation. Mais il est évident que les autres secteurs qui posent des problèmes pour nous devraient être modifiés.
Mme Rose-Marie Ur: Nous devons certainement faire preuve de diligence. Il y a 10 ans que je suis ici et c'est la première fois, mis à part l'aspect social, que je constate la présence en si grand nombre de représentants de la gestion de l'offre en train de discuter très sérieusement de la situation au sein de leur industrie. Je considère qu'il s'agit vraiment d'un avertissement. Je félicite le ministre d'avoir dit qu'il appuie à 1 000 p. 100 la gestion de l'offre. Moi aussi.
Je crois que nous avons joué les scouts, pour ainsi dire. Nous voulons faire toutes ces choses au cours de la prochaine ronde de négociations. Je crois que le Canada se trouve déjà en première ligne. Nous devons nous tourner vers les États-Unis, l'Union européenne et d'autres pays pour nous en assurer. Savez-vous comment vous allez y parvenir au cours de la prochaine série de négociations?
M. Steve Verheul: Oui. Je crois...
 (1220)
Mme Rose-Marie Ur: Très bien. Nous n'avons pas obtenu de très bons résultats jusqu'à présent.
M. Steve Verheul: Nous avons en fait une position de négociation très solide. Nous travaillons depuis longtemps là-dessus. Nous savons quelle est la position de tous les autres pays et ils commencent à savoir très clairement quelle est la nôtre. Chaque fois que nous sommes à Genève, nous nous réunissons avec les Américains et nos discussions sont très franches et ouvertes. La situation est la même avec les Européens et la douzaine d'autres pays que nous rencontrons.
Mme Rose-Marie Ur: Nous avons eu aussi beaucoup d'alliés lors du cycle d'Uruguay. Mais cela ressemble beaucoup à ce qui se passe avec le gouvernement ici quand la situation devient difficile, ils se désistent. Donc, je considère qu'il est vraiment important de s'assurer concrètement de leur engagement à notre endroit.
Dans une lettre datée du 5 mai provenant du GO5 et adressée au ministre et à M. Pettigrew, le GO5 a présenté ce qui suit à propos de la gestion de l'offre. Je vous en lirai un court extrait.
Étant donné que le rapport Harbinson, s'il refaisait surface, signifierait la fin de la gestion de l'offre au Canada et compromettrait l'avenir de l'industrie laitière et de l'industrie de la volaille et des entreprises apparentées qui profitent de nos industries, une décision sur l'orientation qu'adoptera le Canada est d'une importance cruciale à ce stade. |
Êtes-vous d'accord avec cette déclaration du GO5?
M. Steve Verheul: Oui. Je considère que le rapport Harbinson n'a pas donné les résultats escomptés. Il ne constituera pas la base sur laquelle nous conclurons un accord. Cela a permis aux pays, au Canada en particulier, de proposer de nouvelles idées et de trouver des moyens de combler l'écart qui les sépare. Je crois que notre position est bien formulée à cet égard. Nous sommes en très bonne position. Nous sommes dans une position où nous pouvons parler tant à ceux qui sont partisans d'une libéralisation extrême qu'à ceux qui ne souhaitent que des changements mineurs. Donc, je considère que nous demeurons très bien positionnés.
Mme Rose-Marie Ur: Croyez-vous que nous devrons réviser en profondeur notre stratégie pour pouvoir négocier de façon plus efficace?
M. Steve Verheul: Je ne le crois pas pour l'instant. Je crois que notre stratégie est toujours aussi bonne. Nous sommes aujourd'hui dans la situation où les États-Unis et certains autres pays se trouvent à une extrémité et l'Union européenne et d'autres pays à l'autre. Ni la position de l'Union européenne, ni celle des États-Unis ne prévaudront. Tout le monde le reconnaît. Une fois que les pays changeront leur position, ils devront en adopter une autre. Nous considérons que notre approche permet de répondre aux objectifs qui les intéressent tous les deux, et c'est la raison pour laquelle nous devrions étudier certaines des idées proposées par le Canada.
Mme Rose-Marie Ur: Il existe un document qui énonce la position de négociation du Canada, daté de janvier de cette année. On y indique que «si d'autres pays sont préoccupés par les prétendus effets des systèmes de commercialisation ordonnés et sur les échanges, le Canada est prêt à discuter de tout problème concret avec eux». Qu'est-ce qu'on entend par prétendus effets des systèmes de commercialisation?
M. Steve Verheul: Cela concerne principalement les entreprises commerciales d'État qui font de l'exportation, comme la Commission canadienne du blé. Les États-Unis considèrent qu'il s'agit d'une forme déloyale de commerce parce qu'à leur avis des entreprises comme la Commission du blé peuvent vendre sur certains marchés à des prix très élevés et le fait qu'elles peuvent, à leur avis, vendre sur d'autres marchés à des prix très bas peut constituer une forme de subvention indirecte. Donc, ils considèrent que la capacité dont dispose la Commission du blé en tant que principal acheteur de la totalité des céréales lui confère un avantage supplémentaire sur le marché au niveau des prix.
Le président: Votre temps est écoulé pour ce tour-ci. Vous pourrez poser des questions au prochain tour.
Monsieur Anderson, vous avez cinq minutes.
M. David Anderson: Vous avez mentionné que vous allez assister à la réunion ministérielle du groupe de Cairns. Que vous attendez-vous à obtenir de cette réunion compte tenu du fait que nous n'appuyons pas la position de Cairns en ce qui concerne l'accès au marché ou le soutien interne?
M. Steve Verheul: La réunion à laquelle nous assisterons avec les autres ministres du groupe de Cairns en juillet ou en août portera essentiellement sur la stratégie à adopter en prévision de la réunion de Cancun.
Nous avons beaucoup de choses en commun avec le groupe de Cairns en ce qui concerne les subventions à l'exportation et la concurrence à l'exportation de façon plus générale, y compris les crédits à l'exportation, l'aide alimentaire et d'autres aspects. Nous avons entériné leur proposition concernant les subventions à l'exportation. En ce qui concerne le soutien interne, nos positions ne divergent pas tant que cela. Nous réclamons tous deux des réductions très importantes du soutien interne ayant un effet de distorsion du commerce. Nous avons certaines divergences avec le groupe de Cairns au sujet d'aspects précis de la façon d'y parvenir, mais je crois que nous sommes du même avis concernant l'objectif fondamental. Même en ce qui concerne l'accès au marché, nous partageons le même point de vue sur la façon de gérer les contingents tarifaires et la façon de calculer les augmentations du contingent tarifaire. Donc nous avons des éléments en commun.
À la réunion ministérielle du groupe de Cairns cet été, nous n'aborderons pas des aspects aussi détaillés. Il s'agira davantage d'une question de stratégie. Par exemple, je peux songer à l'une des questions qui sera à l'ordre du jour. Nous craignons que les États-Unis et l'Europe soient en train de s'acheminer vers une forme quelconque d'entente. Il nous faudra donc déterminer, en tant que troisième force du groupe de Cairns, comment nous pouvons orienter cette entente dans un sens qui nous convient.
M. David Anderson: Lorsque vous dites que le rapport Harbinson a été un échec, voulez-vous dire qu'il n'a pas réussi à faire adopter les propositions précises qu'il a faites concernant les modalités ou les propositions concernant le cadre général?
M. Steve Verheul: Je crois que cet échec se situe davantage au niveau des particularités, surtout dans des secteurs comme l'accès au marché où il existe d'énormes divergences. Il n'a pas réussi à réduire ces divergences. Donc j'estime que le rapport a été un échec à cet égard. Mais à ce stade des négociations, je crois que personne n'aurait réussi à produire une ébauche de rapport qui aurait permis aux pays de se rapprocher davantage. À ce stade-là, les pays n'étaient tout simplement pas disposés à opérer ce genre de rapprochement.
 (1225)
M. David Anderson: Il fallait que quelqu'un adopte cette première position, et c'est ce qu'il a fait. De toute évidence, il y en a qui n'y souscriront pas.
Vous avez parlé plus tôt des contingents tarifaires et de l'importance qu'ils revêtiront dans le cadre de notre stratégie. On a proposé de doubler le niveau de ces tarifs afin de les porter à 10 p. 100 de la consommation intérieure. Quel est le niveau de contingent tarifaire que vous êtes disposé à adopter compte tenu de notre position de négociation? Si nous augmentons ce taux, cela nuira à la gestion de l'offre mais offrira des débouchés à certains autres secteurs. Quels sont les secteurs qui bénéficieraient de cette hausse des tarifs à 10 p. 100?
M. Steve Verheul: La position de négociation du Canada prévoit une augmentation des contingents tarifaires allant au moins jusqu'à 5 p. 100 de la consommation intérieure. C'est notre mandat en ce qui concerne les contingents tarifaires.
Pour nous, l'élément le plus important est de nous assurer que nous rectifions certaines des erreurs du passé quant à la façon dont les contingents tarifaires ont été établis et calculés. Nous devons nous assurer que les contingents tarifaires assurent un accès net et réel qui peut être utilisé dès le départ. Nous avons de graves problèmes avec les pays qui maintiennent des taux de droit applicables dans la limite du contingent, lesquels dans notre cas approchent de 0 p. 100, mais certains pays les maintiennent jusqu'à 800 p. 100. Donc, l'élimination de ces taux de droit applicables dans la limite du contingent permettrait d'améliorer nettement l'accès. Pour l'instant, ce qui nous intéresse surtout, c'est la façon d'y parvenir et non de déterminer un chiffre.
M. David Anderson: Nous avons accordé 5 p. 100 pour chaque produit. D'autres ont décidé de les grouper. Quelle est l'orientation prise par les négociations commerciales?
M. Steve Verheul: Les négociations commerciales semblent privilégier davantage une approche par produit. Donc, selon le rapport Harbinson, vous auriez un accès de 10 p. 100 pour n'importe quel produit, par exemple un accès de 10 p. 100 pour le boeuf ou le porc, en fonction des données récentes de consommation calculées dans ce pays.
M. David Anderson: Donc vous tâchez de les rendre plus conformes à ce que nous faisons comparativement, disons, à ce que font les Européens.
M. Steve Verheul: Oui. Nous avons été relativement plus formels dans la façon dont nous avons administré et calculé nos contingents tarifaires. Nous estimons que cette fois-ci nous avons besoin de règles plutôt que de simples lignes directrices. Nous avons besoin de règles qui énoncent la façon de calculer les contingents tarifaires et la façon de les administrer.
M. David Anderson: À votre avis, est-ce un aspect où vous obtiendrez des résultats?
M. Steve Verheul: Je crois que nous sommes déjà en train de faire des progrès importants. Même le rapport Harbinson renfermait un certain nombre d'éléments sur l'administration des contingents tarifaires, qui reflètent les idées du Canada. Dans une partie du texte, il a mentionné la méthode utilisée lors de la dernière série de négociations pour calculer les contingents tarifaires. Grâce en grande partie à nos efforts, cette mention a été retirée. Donc, je crois que nous sommes en train d'obtenir de l'appui et de faire des progrès relativement importants dans ce secteur en particulier.
M. David Anderson: Dans un autre ordre d'idées, j'aimerais savoir où en est la contestation déposée par les États-Unis devant l'OMC en ce qui concerne la Commission canadienne du blé. Je crois comprendre qu'elle ne fait que débuter, mais j'aimerais savoir si vous pourriez nous donner certains détails sur les arguments qu'invoqueront les États-Unis et sur notre position, compte tenu du fait que 50 p. 100 des gens captifs de ce système ne veulent pas l'être.
M. Steve Verheul: L'affaire en est encore à ses tout débuts. En décembre, ils ont demandé que nous tenions des consultations avec eux en janvier. Puis, ils ont demandé la constitution d'un groupe spécial à l'OMC, et ce groupe spécial a été accepté et est maintenant sur pied. Tout récemment, nous avons tâché de déterminer qui ferait partie de ce groupe spécial. Il faut donc présenter des noms qui sont acceptables pour nous et pour les États-Unis, et ce processus prend beaucoup de temps. Nous ne nous sommes pas encore entendus sur la liste des membres du groupe spécial. Ensuite, il faudra présenter les arguments. Tout d'abord, les Américains devront énoncer de façon détaillée les agissements de notre part qui à leur avis ne sont pas conformes aux règles en vigueur. Jusqu'à présent, ils nous ont donné très peu de précisions sur l'objet de leurs plaintes. Il a été difficile d'établir tous les aspects de notre réaction car nous ne savons pas avec exactitude quelle sera la teneur de leur contestation. Donc nous avons demandé plus de détails à ce sujet.
Le président: C'est la fin des questions pour ce tour.
Monsieur Maloney.
M. John Maloney (Erie—Lincoln, Lib.): Vous avez indiqué que le Cabinet vous a donné ses instructions. Il vous a indiqué l'orientation qu'il veut que prennent les négociations. Mais négocier signifie faire des compromis. Il faut faire preuve d'une certaine souplesse. Vous avez indiqué que vous n'avez aucun pouvoir pour y déroger. Comment conciliez-vous ces deux positions? Y a-t-il un minimum au-dessous duquel vous ne voudrez pas descendre ou existe-t-il une position de repli? Comment le processus fonctionne-t-il?
 (1230)
M. Steve Verheul: Pour l'instant, le mandat est très clair. Il est énoncé dans la position de négociation du Canada, et c'est la position dont nous faisons la promotion à Genève. Nous sommes encore loin de nous entendre réellement sur certains aspects. Si les négociations prennent une certaine orientation, nous pourrions peut-être devoir communiquer à nouveau avec les ministres et le Cabinet pour obtenir de nouvelles orientations. Pour l'instant, nous sommes encore en train de promouvoir nos idées, et nous avons une certaine marge de manoeuvre pour le faire au fur et à mesure que nous fournissons plus de détails relevant du mandat. Mais nous faisons rapport régulièrement aux ministres sur le déroulement du processus et sur notre travail.
M. John Maloney: Je suis arrivé en retard. Vous avez peut-être déjà répondu à cette question. En ce qui concerne les produits pour lesquels la tarification est supérieure à 90 p. 100, on prévoit la réduire de 60 p. 100 sur cinq ans. Si cela devait se faire, avez-vous calculé les industries soumises à la gestion de l'offre qui pourraient être vulnérables à la concurrence étrangère sur nos marchés intérieurs?
M. Steve Verheul: Oui. Tous les taux de droit hors contingent de notre secteur à offre réglementée sont supérieurs à 90 p. 100, donc selon le rapport Harbinson, ils feraient l'objet d'une réduction moyenne de 60 p. 100 et d'un minimum de 45 p. 100. Nous avons bien entendu rejeté l'adoption d'une telle approche pour l'accès au marché, surtout parce que cela influerait sur la gestion de l'offre. Si nous réduisions ces taux de droit hors contingent de 60 p. 100, alors nous courrons effectivement un risque très réel de concurrence de l'étranger et c'est la raison pour laquelle nous avons rejeté cette partie de la proposition.
M. John Maloney: Je vous remercie, monsieur le président.
Le président: Monsieur Anderson, vous avez à nouveau la parole.
M. David Anderson: Formidable. La solitude comporte certains avantages.
Des voix: Oh, oh!
M. David Anderson: J'aimerais revenir au délai prévu pour la contestation devant l'OMC. Quel est le délai prévu et quand pourra-t-on évaluer les pénalités prévues dans le cadre de cette contestation?
M. Steve Verheul: Il s'agit de la contestation concernant la conformité de la Commission du blé aux obligations internationales de l'OMC. Il ne s'agit pas de la contestation concernant l'antidumping ou les droits compensateurs. Une fois que nous nous serons entendus sur la sélection des membres du groupe spécial, nous aurons alors 60 jours jusqu'à ce que la première étape du groupe spécial soit terminée et 90 jours pour que le groupe spécial rende sa décision. Entre ces deux périodes se tiendra une audience. Chaque parti fera valoir ses arguments. Les États-Unis présenteront les leurs en premier, puis nous répliquerons. Nous répéterons ce processus une autre fois, puis il y aura l'audience. Après toutes ces étapes, le groupe spécial recueillera toute cette information et aura environ 30 jours pour rendre sa décision. Ces délais peuvent varier légèrement, surtout si les membres conviennent qu'il nous faut plus de temps ou que le groupe spécial a besoin de plus de temps. Donc, il faudra probablement prévoir entre six et neuf mois avant qu'une décision soit rendue. On peut faire appel d'une décision rendue par l'OMC, donc l'organe d'appel de l'OMC pourrait entendre l'appel, ce qui pourrait prendre 60 à 90 jours de plus.
M. David Anderson: Simplement pour le compte rendu, je n'ai pas obtenu de réponse claire à l'une des questions que j'ai posées plus tôt. Quels sont les secteurs qui profiteraient de contingents tarifaires plus élevés ou de cet accès net de 5 p. 100 par produit?
M. Steve Verheul: Pratiquement tous les secteurs exportateurs. Ce serait une aide considérable pour nos producteurs de grains et d'oléagineux. L'industrie du boeuf et l'industrie du porc dont les principaux marchés d'exportation sont assujettis à des tarifs très élevés en profiteraient aussi. En fait, n'importe quel produit destiné à l'exportation en bénéficierait.
M. David Anderson: Avez-vous essayé de déterminer quelle serait l'incidence négative sur la gestion de l'offre comparée au bénéfice net pour certaines autres industries à l'échelle de notre économie nationale.
M. Steve Verheul: Nous avons fait quelques calculs pour déterminer les avantages que nous apporterait cette règle de 5 p.100. Mais nous n'avons pas été plus loin. Au-delà, ce serait de la pure extrapolation.
Nous revenons toujours à des exemples comme celui de l'Union européenne. Dans leur calcul des contingents tarifaires pour le porc, par exemple, ils ont prévu près de 75 000 tonnes de porc. S'ils avaient suivi notre suggestion fondée sur la consommation par produit, en l'occurrence sur la consommation de porc, plutôt que sur la consommation globale de viande, ce qu'ils ont fait, au lieu de 75 000 tonnes, c'est à environ à 750 000 tonnes que nous aurions eu droit. Vous pouvez donc voir que même à 5 p. 100 par produit, l'accès est largement multiplié.
 (1235)
M. David Anderson: Pour vous c'est une priorité?
M. Steve Verheul: Absolument.
M. David Anderson: J'aimerais maintenant parler des barrières non tarifaires, en particulier de certaines des restrictions biotechnologiques imposées par l'Union européenne. Dans votre stratégie de négociation, quelle importance accordez-vous à la suppression éventuelle de ces barrières qui restreignent l'accès à certains marchés?
M. Steve Verheul: Les participants à la réunion ministérielle de Doha ne sont pas arrivés à se mettre d'accord sur l'ouverture de négociations sur les barrières phytosanitaires et sanitaires ou sur les barrières techniques qui entravent le commerce, c'est-à-dire des accords qui couvriraient, par exemple, les organismes génétiquement modifiés. Nous n'avons donc pas de mandat de négociation sur ces questions dans le cadre de la ronde de Doha.
Cependant, sur ces questions particulières, le travail se fait plus sur une base bilatérale. Nous collaborons aussi avec les États-Unis et d'autres pays qui souhaitent que l'Europe supprime certaines des ces barrières et nous pousserons cette collaboration jusqu'au règlement des différends s'il n'y a pas d'autres solutions.
M. David Anderson: Quelle priorité accordez-vous à cette question en fait de règlement par l'OMC? Il est évident que certains pays se servent de ce prétexte pour restreindre l'accès à leur marché. S'ils peuvent invoquer des raisons sanitaires ou phytosanitaires pour bloquer l'accès à leur marché, ils n'hésitent pas.
M. Mark Corey: Monsieur le président, les règles de l'accord sur l'application des mesures sanitaires et phytosanitaires plus les barrières techniques au commerce ne sont pas si mauvaises que ça. En fait, elles nous ont permis de déjà gagner plusieurs fois contre l'Union européenne. Il y a une jurisprudence. Il suffit d'avoir des arguments scientifiques. Nous avons gagné dans le cas de certains aliments génétiquement modifiés et dans celui des hormones de croissance pour le boeuf. Il y a des règles et elles sont relativement claires. Elles ne sont pas mauvaises. Elles nous ont permis de gagner plusieurs fois. Le problème c'est ce qui se passe après; par exemple, arriver à obliger l'Union européenne à modifier en conséquence ses règlements pour permettre au canola et à d'autres produits de ce genre du Canada de revenir sur le marché européen. Les règlements européens nous ont fait perdre des marchés de canola importants. Sauf erreur, ils représentaient au début des années 90 quelque 420 millions de dollars. Nous avons gagné, ils ont perdu mais nous n'avons toujours pas récupéré nos marchés.
Le président: Nous en resterons là pour le moment.
Monsieur Duplain, cinq minutes.
[Français]
M. Claude Duplain (Portneuf, Lib.): Je pourrais partager mon temps avec Mme Ur, qui n'avait pas terminé. Des questions intéressantes ont été posées; pour ma part, je n'en ai qu'une, et elle s'adresse à M. Steve Verheul.
Concrètement, sur le plancher des vaches, notre situation est la suivante. Le ministre dit qu'il maintient la gestion de l'offre, et tous les ministres en parlent et soutiennent la gestion de l'offre. Vous êtes négociateur et vous savez par conséquent que depuis quelques mois, les agriculteurs et leurs fédérations sont présents sur la Colline parlementaire. Ils ont des craintes à l'égard du maintien de la gestion de l'offre.
On en a parlé plus tôt et vous y avez fait allusion plusieurs fois. J'aimerais que vous nous disiez quelque chose sur la gestion de l'offre qui permettrait aux députés de rassurer vraiment les agriculteurs. Lorsqu'on parle aux agriculteurs, on constate qu'ils croient que les ministres veulent soutenir la gestion de l'offre. Par contre, comme l'a dit M. Plamondon il y a un moment, lorsqu'on mentionne aux fédérations des agriculteurs les noms de ceux qui sont à la table de négociation, elles sont sceptiques. Qu'est-ce que vous pourriez leur répondre pour les convaincre que le Canada, dans le cadre des négociations, soutient la gestion de l'offre?
M. Mark Corey: Monsieur le président, je pourrais commencer à répondre, et Steve pourrait ensuite fournir plus de détails.
Comme je l'ai mentionné auparavant, le Cabinet nous a confié un mandat très clair, à savoir protéger la gestion de l'offre. Pour apporter un changement à notre mandat, il faudrait obtenir une décision de la part du Cabinet ainsi que l'appui des ministres. Or, notre mandat est très clair: diriger des négociations à Genève. Nous n'avons pas le droit de changer cela ou d'engager d'autres discussions.
Steve, vous pourriez peut-être élaborer plus en détail.
 (1240)
[Traduction]
M. Steve Verheul: La meilleure illustration c'est probablement le texte Harbinson qui, on le comprend fort bien, a provoqué bien des craintes pour les produits assujettis à la gestion de l'offre sur lesquels il aurait un impact relativement négatif. Nous avons clairement indiqué à tous les pays et directement au président à plusieurs reprises que son texte n'était pas acceptable, tout particulièrement en termes d'accès puisqu'il affecterait la gestion de l'offre. En conséquent, si nous parvenons à un accord, ce ne sera pas sur la base de ce texte. Comme Mark vient de le dire, la position du gouvernement est claire : nous défendons la gestion de l'offre. C'est notre position de négociation.
[Français]
M. Claude Duplain: Lorsqu'on parle de la gestion de l'offre, on parle par le fait même des trois piliers. Vous respectez donc les trois piliers de la gestion de l'offre. C'est exact?
[Traduction]
M. Steve Verheul: Je vois qu'il y a un petit malentendu. Un des piliers de la gestion de l'offre est le contrôle à la frontière qui concerne directement la question de l'accès au marché. Nous l'abordons sous un angle qui convient aux produits assujettis à la gestion de l'offre.
Les prix administrés sont un autre des piliers. Je crois qu'à ce niveau il y a un malentendu. Le texte Harbinson ne contenait aucune disposition touchant aux prix administrés ou à notre capacité de fixer des prix administrés. Il n'y a donc rien dans notre position de négociation qui cible spécifiquement cette question car elle n'est pas un élément de la discussion. Nous sommes persuadés que les négociations déboucheront sur un texte qui n'affectera en rien nos pratiques de prix administrés.
Les contingents de production sont un autre pilier sur lequel les négociations ne portent pas non plus.
C'est donc au pilier d'accès au marché, au pilier de contrôle à la frontière, que nous prêtons toute notre attention parce que c'est l'aspect le plus fondamental au respect des objectifs de la gestion de l'offre. C'est sur cet aspect que nous faisons porter tous nos efforts de négociation.
[Français]
M. Claude Duplain: Merci.
[Traduction]
Le président: Si le gouvernement s'intéresse tout particulièrement à cette question de la gestion de l'offre c'est parce qu'en 1993, lorsque nous sommes arrivés au pouvoir, on nous a fait croire qu'il y avait un article 11 à protéger, mais il n'y avait plus d'article 11. Nous nous sommes fait prendre une fois, on ne nous y reprendra pas deux fois. Cette fois-ci nous voulons des assurances et je pense que vous nous les avez données ce matin. D'ailleurs j'ai rencontré un groupe de gens que vous aviez précédemment rencontrés, et ils m'ont dit qu'ils avaient eu une bonne réunion avec vous et que vous leur aviez donné les mêmes assurances. Nous voulons qu'il en aille de même pour nous car nous ne voulons pas nous retrouver avec un autre article 11 sur les bras pour la prochaine ronde.
Monsieur Anderson.
M. David Anderson: Je me demande pourquoi nous continuons à être aussi timide avec nos partenaires commerciaux. Les États-Unis ont un gros programme. Dans certains secteurs, on a l'impression d'être en présence de plusieurs programmes de subventions. Selon un rapport publié récemment, ils vendent un énorme pourcentage de leur grain à un prix inférieur au coût de production. C'est censément un des arguments qu'ils ont utilisés pour contester notre Commission du blé. Pourquoi ne faisons-nous pas la même chose? J'aimerais en savoir plus sur le prix de revient et le prix de vente de ces grains. Est-ce que c'est parce que ce sont des ventes privées que nous ne pouvons rien faire? Pourquoi restons-nous les bras ballants?
M. Steve Verheul: Cette histoire de coût de production fait suite à une affaire de dumping déclenchée par l'industrie de l'autre côté de la frontière. L'industrie américaine a déclenché une poursuite antidumping contre les importations de blé canadien et c'est dans ce contexte qu'il a été question de coût de production pour confirmer ou infirmer qu'il y avait dumping. Notre industrie, si elle le considérait à-propos, pourrait déclencher une poursuite antidumping contre le blé américain. Le problème, c'est que nous n'en achetons pas beaucoup car nous en vendons énormément. Mais c'est sur cette base précise.
D'une manière plus générale, c'est le Farm bill américain de l'année dernière qui nous a causé beaucoup d'inquiétude. En ce qui nous concerne, nous le considérons comme allant totalement à contre-courant puisqu'il autorise des formes de soutien encore plus déformantes. Non seulement va-t-il à contre-courant pour ce qui est des montants des dépenses, mais aussi au niveau de la manière de les dépenser. Nous avons donc pris tout le temps nécessaire pour préparer un dossier d'arguments potentiels contre certains éléments du Farm bill américain. Le problème c'est que certains de ces éléments n'ont toujours pas été appliqués, et il nous faut attendre qu'ils soient effectivement en place avant de pouvoir contester. Quand le moment sera venu, nous serons prêts et nous n'hésiterons pas à intervenir si nous avons tous les éléments en mains.
 (1245)
M. David Anderson: Est-ce que l'étiquetage du pays d'origine est une question internationale ou une question continentale? L'industrie est à l'origine de certaines de ces contestations. Mais est-ce que ces questions d'étiquetage du pays d'origine pourraient relever de l'OMC?
M. Steve Verheul: Sur ces questions on peut aussi bien faire intervenir l'ALENA que l'OMC. Cela fait partie de notre évaluation chaque fois qu'il y a une affaire potentielle d'étiquetage du pays d'origine. Pour le moment nous attendons le passage à la phase obligatoire puisque nous en sommes toujours à la phase volontaire. Notre stratégie à court terme est donc de travailler pour le moment avec l'industrie américaine qui s'oppose également à cette notion d'étiquetage du pays d'origine et pour essayer de l'empêcher de devenir obligatoire. Mais si la phase obligatoire est atteinte, je crois que nous avons un dossier très solide.
M. David Anderson: Nos contestations ne peuvent-elles concerner que les produits qui arrivent sur notre marché? Vous avez dit que c'était l'industrie américaine qui était derrière cette affaire de dumping qu'ils nous reprochent. S'ils vendent leur blé à un coût inférieur au coût de production, le fait que nous n'en importions pas nous empêche-t-il de contester leur méthode commerciale?
M. Steve Verheul: Cela dépend de la contestation. Nous pourrions réclamer une enquête antidumping mais elle n'aboutirait à rien à moins que nous ne puissions prouver un préjudice pour notre marché. Quand les quantités sont faibles, il est difficile de prouver le préjudice. Par contre, pour des questions comme l'étiquetage du pays d'origine ou le Farm bill américain, on peut toujours contester qu'il y ait ou non importation. La contestation à ce moment-là concerne le respect des obligations imposées par l'ALENA ou l'OMC.
M. David Anderson: Selon les cinq secteurs de gestion de l'offre, une absence d'un accord vaut mieux qu'un mauvais accord. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.
M. Steve Verheul: C'est aussi ce que dit le ministre Vanclief. Je crois que dans le contexte du texte Harbinson, cet accord aurait été pire qu'une absence d'accord. Il faut nous assurer que l'accord qui sera conclu est logique pour nous. Nous voulons un accord où l'industrie canadienne a tout à gagner. Nous préférons de loin qu'un accord soit conclu, nous continuons donc à pousser dans ce sens.
M. David Anderson: Pouvons-nous adopter cette position à l'OMC si nous voyons que l'Union Européenne et les États-Unis commencent à discuter?
M. Steve Verheul: Nous craignons que cela ne dépassera pas ce niveau de discussion mais en même temps il faut bien savoir que nous n'aboutirons à rien tant qu'ils ne seront pas plus ou moins d'accord entre eux. L'essentiel c'est que nous arrivions à quelque chose qui nous apporte les avantages que nous recherchons et c'est notre priorité. Si la proposition des États-Unis et de l'Europe est difficile à vendre aux autres pays, y compris aux pays en voie de développement, ça ne passera pas. Il faut que nous restions au centre et en première ligne et que nous continuions à pousser autant que faire se peut avec d'autres pays.
Le président: Madame Ur.
Mme Rose-Marie Ur: Monsieur Verheul, vous avez dit que les dispositions du texte Harbinson ne contenaient rien sur les prix administrés. Vous n'avez rien à eu à faire. Est-ce que vous avez prévu quelque chose en cas d'incident de parcours et que cette question revienne sur le tapis? Ne serait-il pas bon de prévoir ou de réfléchir à la question? Y avez-vous réfléchi depuis le rejet des propositions Harbinson?
M. Steve Verheul: Nous y avons un peu réfléchi. Mais dans le contexte des mesures de soutien interne, cela concerne beaucoup plus les taux de dépenses élevés des Européens, des Américains et des Japonais. Cela concerne avant toute chose leurs dépenses directes, les dollars qu'ils dépensent. Cela concerne beaucoup moins ce qu'ils appellent les prix de soutien du marché, c'est-à-dire l'approche adoptée pour nos produits assujettis à la gestion de l'offre. Cela n'a donc pas été la priorité de ces discussions, ni la priorité à propos du texte Harbinson ou pendant toutes ces négociations qui durent déjà depuis trois ans.
Si quelqu'un voulait mettre cette question sur le tapis—et il est un peu tard pour mettre sur le tapis des négociations quelque chose de complètement nouveau—il faudrait qu'il ait l'appui de beaucoup de pays pour y arriver. À mon avis, il est fort peu vraisemblable qu'à ce stade avancé une nouvelle idée puisse être intégrée aux négociations. Cela ne veut pas dire pour autant que nous ne suivions pas cette possibilité avec grande attention car nous en connaissons l'importance pour l'industrie. Au cas fort peu vraisemblable où cela surviendrait, nous serions prêts à intervenir et, pour commencer, à nous y opposer et à chercher le soutien d'autres pays pour nous épauler.
 (1250)
Mme Rose-Marie Ur: Il semble qu'il y ait plus de discussions avec les pays les moins avancés. L'Union Européenne ne cesse de clamer qu'elle défend leurs intérêts. Quelle place occupons-nous par rapport à l'Union Européenne et aux États-Unis? Où sommes-nous sur le mât?
M. Steve Verheul: Les propos de l'Europe sur les pays en voie de développement et les pays les moins avancés nous inquiètent beaucoup. Selon eux, leur approche est beaucoup plus bénéfique pour les pays en voie de développement. Ils concentrent une grande part de leur intention aux préférences tarifaires qu'ils offrent aux pays en voie de développement pour certains produits. Il semble qu'ils offrent à certains pays en voie de développement un meilleur accès à leur marché. Le problème c'est qu'ils l'offrent à certains pays en voie de développement mais pas à tous. Il faut une règle générale.
Nos propres marchés sont très ouverts aux pays en voie de développement. Nous sommes une des économies mondiales les plus ouvertes pour les pays en voie de développement. Nous sommes certainement largement en avance sur l'Europe à cet égard et nous sommes très proches aussi des États-Unis. Nous pensons être très bien positionnés avec les pays en voie de développement. Nous sommes également disposés à discuter avec les pays en voie de développement du détail de certains autres éléments dont ils ont besoin dans ces négociations. Nous travaillons souvent sur divers dossiers avec des pays en voie de développement.
M. Mark Corey: Monsieur le président, au Sommet alimentaire mondial de Rome qui s'est déroulé sous les auspices de la FAO, le ministre Vanclief a rencontré une dizaine ou une douzaine de ministres de l'agriculture d'autres pays, notamment de pays en développement, pour réagir au Farm bill américain. Je crois qu'il y a eu un début de consensus pour dire qu'une des pires choses à faire pour les pays en développement, c'était de subventionner les produits agricoles. Cela provoque une baisse des coûts internationaux et cela empêche ces pays de produire à l'intention des marchés mondiaux et de vendre leurs produits sur les marchés mondiaux, alors qu'ils pourraient très bien le faire. Je pense que le Canada est à la tête des pays qui préconisent la libéralisation des échanges commerciaux, notamment la réduction des subventions aux exportations et des subventions intérieures pour améliorer la situation des pays en développement. Le premier ministre lui aussi s'est beaucoup occupé de choses comme le nouveau programme économique pour le développement de l'Afrique. La ministre de l'ACDI a pris les devants pour ramener l'agriculture dans le cadre du développement international. Disons donc que le Canada a pris très au sérieux la question du développement international. C'est un très important élément du contexte qui nous pousse vers la libéralisation des échanges commerciaux.
Mme Rose-Marie Ur: Je vous remercie vraiment de cet exposé aujourd'hui. Quand nous sommes peu nombreux, non seulement nous obtenons des réponses à nos questions, mais on répond même aux questions du public, qui ne peut pas siéger à la table. Je trouve que c'est donc une excellente chose d'avoir cette occasion.
Merci, monsieur le président.
Le président: Merci, madame Ur.
Monsieur Anderson, peut-être pourriez-vous nous présenter quelque-unes de ces questions du public.
M. David Anderson: Monsieur le président, je crois que l'ai déjà fait.
La position du Canada est que les pays peuvent opter pour des contingents tarifaires dans le cas de produits particulièrement sensibles. Pour le Canada, il s'agit évidemment de la volaille et des produits laitiers. Certains de nos plus grands clients à l'exportation sont sensibles à d'autres secteurs, par exemple, le boeuf ou le porc. L'Asie et l'Union européenne en sont de bons exemples. L'administration actuelle des contingents tarifaires empêche déjà les produits canadiens de pénétrer de nombreux marchés. En quoi la position du Canada, qui est favorable à un accroissement de ces mesures, est-elle avantageuse pour notre commerce? L'exportation d'un pays est un produit sensible pour un autre pays.
M. Steve Verheul: Nous proposons que les pays aient le choix. Ils pourraient soit opter pour une ambitieuse formule de réduction des barrières tarifaires, soit améliorer l'accès grâce à des réductions des contingents tarifaires. Je ne pense pas qu'on verrait proliférer de nouveaux contingents tarifaires dans un tel contexte. Certains pays préféreraient ne pas suivre cette voie. En présentant les choses de cette façon, on ne propose pas une échappatoire ou une façon de se dérober à des améliorations. On dit simplement qu'on fait les choses d'une façon différente.
Pour revenir à l'Union européenne, une bonne partie de ses initiatives en matière de contingents tarifaires ont entraîné toutes sortes de restrictions. Nous n'avons pas pu bénéficier des contingents tarifaires lors du dernier cycle à cause de la façon dont ils avaient souvent été conçus. C'est pour cela que nous cherchons à nous assurer qu'il y aura cette fois-ci des règles précises afin que les contingents tarifaires soient administrés conformément à des règles, soient transparents et prévisibles, et que les modalités d'accès respecteront aussi des règles. Cela me ramène à l'exemple du porc en Europe. Si les choses étaient faites correctement, nous aurions à peu près dix fois plus de possibilités d'accès à cette région qu'actuellement.
 (1255)
M. David Anderson: Selon eux, ont-ils bien fait les choses?
M. Steve Verheul: Non. Ils reconnaîtront qu'ils ont utilisé des méthodes innovatrices pour calculer leurs tarifs. Le problème, la dernière fois, c'est que nous fonctionnions avec des directives plutôt que des règles. Je pense que cette fois il nous faut des règles pour éviter que les pays aient une telle flexibilité.
M. David Anderson: Je pense que M. Pettigrew a dit que cette échéance du 31 décembre était un obstacle plutôt qu'un incitatif dans ce processus. Est-il moins décidé à s'engager à cette échéance, ou sommes-nous tout simplement incapables de la respecter?
M. David Chatterson: Non, je ne pense pas qu'il soit moins décidé. Nous participons à des négociations compliquées. Il a aussi dit qu'il voulait une solution qui soit la bonne pour le Canada, pas une solution rapide. Nous sommes à mi-chemin de cette échéance ambitieuse de trois ans pour conclure ces négociations. Au cours des réunions auxquelles le ministre a participé à Paris la semaine dernière, la question de dépasser cette date butoir du 1er janvier 2005 n'a jamais été soulevée.
M. David Anderson: Si l'on veut être réaliste, quelles sont nos chances d'y arriver? Nous sommes à mi-chemin de cette date mais nous n'avons fait que 10 p. 100 du travail et des négociations nécessaires.
M. David Chatterson: Une grande partie du travail ne se voit qu'à la fin du processus. Nous travaillons d'arrache-pied. Serons-nous dans les temps? Je ne sais pas. Je pense que c'est tout à fait possible. Je ne sais pas quelles en sont les probabilités.
M. David Anderson: À une époque, l'agriculture était considérée comme une question centrale dans ces négociations. Si nous n'arrivons pas à une entente, les autres domaines vont-ils progresser, ou est-ce que tout va s'arrêter jusqu'à ce que nous concluions une entente en matière d'agriculture?
M. David Chatterson: Je ne pense pas que tout s'arrêtera. Même si nous avons dépassé certaines échéances en agriculture et dans d'autres domaines, le travail continue pour tous les éléments des négociations. Cependant, l'agriculture et la réforme du commerce agricole sont si importantes pour tant de participants à ces négociations qu'ils attendent des résultats positifs, tels que ceux auxquels nous nous sommes engagés lorsque nous avons lancé ces négociations. Les négociations sont aussi menées par un seul grand projet, ce qui signifie essentiellement que rien n'est final tant que tout n'est pas finalisé. Je ne pense pas que les choses se figent ou cessent de progresser dans d'autres domaines. Elles continueront à évoluer. Cependant, il nous faut tous les morceaux du casse-tête pour que le travail soit terminé.
Le président: Madame Ur.
Mme Rose-Marie Ur: Par rapport à la question de M. Anderson au sujet des méthodes de calcul créatives auxquelles ont recours certains pays et qui consistent à regrouper certaines denrées et obtenir un chiffre total, avons-nous résolu ce problème?
M. Steve Verheul: Pas encore. Nous avons proposé des idées lors des négociations pour éliminer cette échappatoire. Je pense que nous avons de bonnes chances d'y arriver. C'est une échappatoire qui existait déjà lors des ententes de 1995. Je suis enthousiaste parce que les pays ont vu ses effets pendant les cinq à huit dernières années. Je pense que tout le monde est d'accord pour éliminer cette échappatoire cette fois-ci.
Mme Rose-Marie Ur: Merci.
Le président: Monsieur Anderson, avez-vous quelque chose à ajouter?
M. David Anderson: Non.
Le président: L'un d'entre vous a parlé il y a quelques minutes du fait que nous avons maintenant des règles plutôt que des directives. Est-ce quelque chose que nous avons appris du cycle d'Uruguay? Quelles sont les autres leçons que nous avons tirées de ce cycle? Visiblement, il y en a beaucoup, mais peut-être pourriez-vous parler des choses importantes pour que nous puissions nous consoler en nous disant que nous avons tiré des leçons du passé. Nous avons vécu beaucoup de choses depuis le cycle d'Uruguay, notamment en ce qui concerne l'huile de beurre et ce genre de choses, et par rapport à nos interprétations. Certaines personnes fonctionnent de manière interprétative. Avons-nous appris des choses importantes du cycle d'Uruguay?
· (1300)
M. Steve Verheul: Je pense que oui. Le cycle d'Uruguay était un peu différent parce que nous avons concentré nos efforts à transformer toute protection existante à la frontière en tarifs douaniers et en contingents tarifaires. C'était la première fois que cela avait jamais été tenté. Nous avions beaucoup de marge de manoeuvre et dans certains cas, les directives étaient plutôt souples sur la façon de s'y prendre. Maintenant que nous l'avons déjà fait une fois, je pense que nous avons appris ce qui fonctionnait et ce qui ne fonctionnait pas. Nous avons certainement appris que pour être efficaces, il nous faut plus de règles que de directives.
M. Mark Corey: Monsieur le président, l'autre chose qui s'est passée entre, disons, 1991-1992, avant le cycle d'Uruguay, et 2001, c'est que nous avons appris à bien vendre nos produits sur les marchés étrangers et nous avons profité de l'accès fourni par le cycle d'Uruguay. Je sais qu'il y a toujours des problèmes. D'un autre côté, nous vendions l'équivalent de 13 milliards de dollars en exportation de produits agricoles et agroalimentaires en 1992. En 2001, ce chiffre atteignait 26 milliards de dollars. Nous avons donc doublé nos exportations de produits agricoles et agroalimentaires pendant cette décennie. Il subsiste toujours des problèmes. C'est l'objectif même du prochain cycle. Mais je pense qu'il faut se souvenir que nous avons fait beaucoup de progrès lorsque nous fonctionnions avec les règles du cycle d'Uruguay.
Le président: Je suis d'accord avec vous, monsieur Corey. Vous avez tout à fait raison.
Nous avons laissé M. Chatterson tranquille ce matin. J'ai une question pour lui et c'est sans doute ma dernière question. Vous savez que c'est le Conseil des ministres qui prend les décisions. Agriculture, Ressources naturelles et le ministère des Affaires étrangères sont représentés au Conseil des ministres. Au bout du compte, êtes-vous satisfait de la façon dont vous résolvez vos différends au Conseil des ministres, de sorte que vous pouvez en arriver à une série de règles communes pour travailler à ces négociations? Que se passe-t-il, par exemple, si le ministère de l'Agriculture veut une chose à laquelle s'oppose le ministère des Affaires étrangères? Qui est-ce qui l'emporte?
M. David Chatterson: Nous sommes des fonctionnaires.
Le président: Je sais. Vous êtes les fonctionnaires, et l'on vous rend responsables de beaucoup de choses, alors tirez-en parti. S'il y a quelque chose qui cloche, il y aura un responsable. Bien sûr, cela revient aux politiques, et nous ne sommes pas d'accord. Mais pouvez-vous nous dire ce qui se passe s'il y a une impasse entre le ministère de l'Agriculture qui veut quelque chose...? Disons qu'il s'agit de gestion de l'offre. M. Vanclief dit, nous vous assurons que le secteur agricole vous appuie à 100 p. 100. Mais le ministère des Affaires étrangères décide que pour conclure une entente sur le bois d'oeuvre, il faut faire certaines concessions en matière de gestion de l'offre. Qui est-ce qui gagne dans cette situation?
M. Mark Corey: Monsieur le président, pour commencer, je pense qu'une des forces du système parlementaire c'est la solidarité du Conseil des ministres. Lorsque les ministres ont des divergences d'opinion graves en matière de politiques, ils sont obligés d'accorder leurs opinions et d'en arriver à une entente. Alors, même s'il y a certains différends lors des réunions du Conseil des ministres, le Conseil est toujours unanime à la fin de ces réunions. En tant que fonctionnaires, on ne peut pas faire de spéculations sur les décisions du Conseil des ministres et je pense que c'est une des forces de ce système.
Pour l'instant, sur toutes les questions liées aux négociations commerciales en matière d'agriculture, je ne pense pas qu'il y ait eu de différend important au niveau des fonctionnaires entre le ministère des Affaires étrangères et le ministère de l'Agriculture. Nous avons passé beaucoup de temps à concevoir notre stratégie de négociations commerciales et notre position, et je pense que cela nous a rendu service parce qu'elles représentent tous les intérêts du secteur agricole canadien. Alors je vous dirais que nous avons une opinion très cohérente de l'agriculture. Les conseils que nous donnons aux ministres sont toujours cohérents.
David, vouliez-vous ajouter quelque chose?
M. David Chatterson: Nous avons un processus interministériel exhaustif dans les ministères, qui va jusqu'au niveau du sous-ministre, et c'est quelque chose qui existait avant même les négociations commerciales de Seattle. Cela s'explique par le fait que beaucoup de ces questions sont ce que l'on appelle des questions horizontales. Elles ont des implications en dehors des champs économiques et commerciaux. D'après mon expérience, il s'agit d'un effort collectif. Nous avons tous des divergences d'opinions, mais nous sommes toujours arrivés à les résoudre. Je pense que tout le monde travaille avec les intérêts collectifs du Canada en tête. Ce que je voudrais rajouter, c'est que nous avons aussi beaucoup de chance d'avoir des ministres qui ont beaucoup d'expérience, qui travaillent à ces questions depuis un certain temps et qui, ajouterais-je, sont très efficaces.
· (1305)
Le président: Je ne veux pas donner l'impression de vouloir sous-estimer le secteur du bois d'oeuvre, parce que je pense que c'est un secteur très important, tout comme l'industrie automobile et d'autres. Ils sont tous importants. J'ai fait une analogie avec le bois d'oeuvre parce que c'est quelque chose qui vient tout de suite à l'esprit des gens lorsque l'on parle de règlement des différends.
Finalement, il arrive un moment où il faut un compromis. Nous voulons quitter cette pièce ce matin en étant sûrs de votre engagement complet. Je crois que nous le sommes.
Steve, je tiens à vous remercier d'être venu et d'être notre négociateur. Nous voulons que vous soyez là et que vous travailliez fort à ces négociations. Mark, continuez d'être là pour nous. David, du MAECI, nous vous remercions d'être venu ce matin. Nous sommes impatients de vous retrouver une autre fois. Merci.
La réunion est levée.