CIMM Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 21 novembre 2002
¿ | 0900 |
Le vice-président (M. Jerry Pickard (Chatham—Kent Essex, Lib.)) |
L'hon. Denis Coderre (ministre de la Citoyenneté et de l' Immigration) |
M. Michel Dorais (sous-ministre, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration) |
M. Denis Coderre |
¿ | 0905 |
¿ | 0910 |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Alliance canadienne) |
M. Denis Coderre |
¿ | 0915 |
Mme Diane Ablonczy |
M. Denis Coderre |
Mme Diane Ablonczy |
M. Denis Coderre |
Mme Diane Ablonczy |
¿ | 0920 |
M. Denis Coderre |
M. Luke Morton (conseiller juridique principal, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration) |
Mme Diane Ablonczy |
M. Luke Morton |
Mme Diane Ablonczy |
M. Luke Morton |
Mme Diane Ablonczy |
M. Denis Coderre |
M. Luke Morton |
Mme Diane Ablonczy |
M. Denis Coderre |
¿ | 0925 |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, PC) |
M. Denis Coderre |
¿ | 0930 |
M. Inky Mark |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
M. Steve Mahoney (Mississauga-Ouest, Lib.) |
M. Denis Coderre |
M. Steve Mahoney |
¿ | 0935 |
M. Denis Coderre |
M. Steve Mahoney |
M. Denis Coderre |
M. Steve Mahoney |
M. Denis Coderre |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ) |
¿ | 0940 |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
Mme Madeleine Dalphond-Guiral |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
Mme Madeleine Dalphond-Guiral |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
M. Denis Coderre |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD) |
¿ | 0945 |
M. Denis Coderre |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
M. Denis Coderre |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
M. John Bryden (Ancaster—Dundas—Flamborough—Aldershot, Lib.) |
M. Denis Coderre |
¿ | 0950 |
M. John Bryden |
M. Denis Coderre |
M. John Bryden |
M. Denis Coderre |
M. John Bryden |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
M. John Bryden |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
Mme Diane Ablonczy |
M. Denis Coderre |
Mme Diane Ablonczy |
M. Denis Coderre |
¿ | 0955 |
Mme Diane Ablonczy |
M. Denis Coderre |
Mme Diane Ablonczy |
M. Denis Coderre |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
M. Yvon Charbonneau (Anjou—Rivière-des-Prairies, Lib.) |
M. Denis Coderre |
M. Yvon Charbonneau |
M. Denis Coderre |
À | 1000 |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
M. John Bryden |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
M. John Bryden |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
M. Luke Morton |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
À | 1010 |
Mme Rosaline Frith (directrice générale, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration) |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
Mme Rosaline Frith |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
Mme Rosaline Frith |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
M. Steve Mahoney |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
M. Steve Mahoney |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
M. Steve Mahoney |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
Mme Rosaline Frith |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
Mme Lynne Yelich (Blackstrap, Alliance canadienne) |
Mme Rosaline Frith |
Mme Lynne Yelich |
Mme Rosaline Frith |
À | 1015 |
Mme Lynne Yelich |
Mme Rosaline Frith |
Mme Lynne Yelich |
Mme Rosaline Frith |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
Mme Anita Neville (Winnipeg-Centre-Sud, Lib.) |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
M. Andrew Telegdi (Kitchener—Waterloo, Lib.) |
À | 1020 |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
M. Bruce Scoffield (directeur, Élaboration des politiques et coordination internationale, Direction générale des réfugiés, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration) |
Mme Rosaline Frith |
M. Andrew Telegdi |
Mme Rosaline Frith |
M. Andrew Telegdi |
Mme Rosaline Frith |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
Mme Madeleine Dalphond-Guiral |
À | 1025 |
Mme Rosaline Frith |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
Mme Madeleine Dalphond-Guiral |
Mme Rosaline Frith |
Mme Madeleine Dalphond-Guiral |
Mme Rosaline Frith |
Mme Madeleine Dalphond-Guiral |
À | 1030 |
Mme Rosaline Frith |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
M. Yvon Charbonneau |
À | 1035 |
Mme Rosaline Frith |
À | 1040 |
M. Yvon Charbonneau |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
M. Yvon Charbonneau |
Mme Rosaline Frith |
M. Yvon Charbonneau |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
Mme Rosaline Frith |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
Mme Diane Ablonczy |
Mme Rosaline Frith |
À | 1045 |
Mme Diane Ablonczy |
Mme Rosaline Frith |
Mme Diane Ablonczy |
Mme Rosaline Frith |
Mme Patricia Birkett (greffière, Citoyenneté, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration) |
Mme Diane Ablonczy |
Mme Rosaline Frith |
Mme Diane Ablonczy |
Mme Rosaline Frith |
Mme Diane Ablonczy |
Mme Rosaline Frith |
À | 1050 |
Mme. Diane Ablonczy |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
M. Andrew Telegdi |
Mme Rosaline Frith |
M. Andrew Telegdi |
Mme Rosaline Frith |
M. Andrew Telegdi |
Mme Rosaline Frith |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
Mme Rosaline Frith |
M. Paul Yurack (conseiller juridique, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration) |
À | 1055 |
M. Andrew Telegdi |
M. Paul Yurack |
Mme Rosaline Frith |
M. Andrew Telegdi |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
Mme Madeleine Dalphond-Guiral |
M. Paul Yurack |
Mme Madeleine Dalphond-Guiral |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
Mme Madeleine Dalphond-Guiral |
Le vice-président (M. Jerry Pickard) |
CANADA
Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration |
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 21 novembre 2002
[Enregistrement électronique]
¿ (0900)
[Traduction]
Le vice-président (M. Jerry Pickard (Chatham—Kent Essex, Lib.)): La séance est ouverte. Mesdames et messieurs, nous allons commencer tout de suite parce que le ministre n'a qu'une heure à nous accorder.
Monsieur Coderre, nous sommes vraiment heureux de vous accueillir ce matin. Vous voudrez peut-être nous présenter les gens de votre ministère puis faire une brève déclaration. Nous laisserons ensuite la parole aux membres du comité.
Chers collègues, comme nous avons seulement une heure, je vous demanderais que vos questions soient brèves pour que tout le monde ait l'occasion de prendre la parole. Merci beaucoup.
Monsieur le ministre.
L'hon. Denis Coderre (ministre de la Citoyenneté et de l' Immigration): Merci, monsieur le président.
D'abord, je dois dire que je commence à connaître mes nouveaux collaborateurs. Je vous présente Michel Dorais, qui est sous-ministre, à qui je vais demander de présenter tous ceux qui nous accompagnent en indiquant le poste qu'ils occupent.
M. Michel Dorais (sous-ministre, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration): Voici Alfred MacLeod, SMA, Orientation stratégique; Rosaline Frith, directrice générale de la citoyenneté, et Paul Yurack, qui vient de Justice Canada.
M. Denis Coderre: Monsieur le président, d'abord,
[Français]
merci beaucoup. C'est toujours important pour nous d'avoir cette discussion entre parlementaires, étant donné que le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration est avant tout
[Traduction]
essentiel pour bâtir le pays et orienté vers les gens. Voilà pourquoi nous croyons qu'il est vraiment important d'engager des discussions de ce genre.
[Français]
Vous savez évidemment que nous allons parler principalement aujourd'hui de la loi, de la nouvelle mesure législative sur la citoyenneté. C'est un projet de loi qui touche l'essence même de ce qui est canadien.
[Traduction]
J'aimerais faire quelques commentaires au sujet du projet de loi C-18.
Je vais aussi parler des niveaux, si vous voulez, et je vais bien sûr aborder la question de l'entente sur les tiers pays sûrs que nous allons signer le 5 décembre avec les Américains.
[Français]
Le projet de loi C-18 nous permet d'approfondir notre modèle de citoyenneté, qui s'appuie à la fois sur la diversité et la responsabilité mutuelle.
[Traduction]
Le projet de loi nous permet aussi de combler des lacunes de la loi actuelle. Il nous donne en même temps des outils pour moderniser la gestion des demandes de citoyenneté.
¿ (0905)
[Français]
Les Canadiens et Canadiennes tiennent à ce que les nouveaux membres de notre société partagent certaines valeurs fondamentales, comme le respect de la démocratie et la liberté des personnes.
[Traduction]
Nous montrons clairement l'importance des valeurs en les mentionnant dans le serment proposé. En même temps qu'ils jugeraient fidélité et allégeance au Canada, les nouveaux citoyens s'engageraient à respecter les droits et libertés du Canada et à préserver les valeurs démocratiques de notre pays. L'absence de ces engagements dans le serment actuel justifie un changement de la formule.
[Français]
D'autre part, nous nous devons de protéger la valeur de la citoyenneté canadienne. On ne doit pas accepter que certaines personnes gardent la citoyenneté si elles l'ont obtenue quand elles n'y avaient pas droit.
[Traduction]
Le ministre aura le droit d'annuler l'attribution de la citoyenneté dans les cas simples où le demandeur a évidemment utilisé une fausse identité ou caché des antécédents criminels.
[Français]
La procédure de révocation de la citoyenneté s'appliquerait aux cas plus complexes et aux cas qui remontent à plus de cinq ans.
[Traduction]
Donc, nous voulons maintenant que la révocation de la citoyenneté soit soumise à un processus judiciaire.
[Français]
Seule la Cour fédérale aura le pouvoir de révocation. De cette façon, la procédure sera marquée par la transparence. De plus, lors des audiences de révocation, dans le cas de personnes ayant participé à des actes terroristes, à des crimes de guerre ou au crime organisé, on pourra demander à la Cour fédérale de prendre une deuxième décision qui permettrait un renvoi rapide du Canada.
[Traduction]
Quand nous avons dit dès le départ que c'était tolérance zéro à l'égard des criminels de guerre, nous étions vraiment sérieux. Et comme nous voulons agir de façon transparente, les mesures de révocation et de renvoi seront, en même temps, soumises au juge. Je tiens à répéter que c'est uniquement dans de très rares cas que le gouverneur en conseil pourra refuser la citoyenneté aux personnes qui affichent un grave mépris à l'égard des valeurs et des principes sur lesquels se fonde notre société libre et démocratique.
[Français]
J'ai suivi un peu les débats et je sais qu'un certain nombre de députés s'inquiètent de cette disposition.
[Traduction]
Cependant, dans les faits, le pouvoir de refus est rattaché à deux balises. Premièrement, la mention de «société libre et démocratique» est liée à une jurisprudence concernant la Charte canadienne des droits et libertés et, deuxièmement, la procédure écarte la possibilité que le gouvernement s'en serve de manière frivole.
[Français]
Demandons-nous d'abord quelles sont les valeurs et les principes d'une société libre et démocratique. On trouve une réponse dans le jugement Oakes de 1986, où la Cour suprême du Canada a interprété l'article 1 de la Charte.
[Traduction]
La Cour a tranché que ces valeurs et principes comprennent, en autres, le respect de la dignité humaine, la tolérance envers une grande variété de croyances et le respect de l'identité des groupes et des cultures.
[Français]
En ce qui a trait à la procédure, à mon avis, elle est bien détaillée dans le projet de loi. Le ministre doit d'abord informer la personne du refus envisagé et des motifs invoqués. On lui donne 30 jours pour soumettre des représentations écrites.
[Traduction]
C'est seulement après ces 30 jours que le ministre pourrait recommander au gouverneur en conseil d'interdire la citoyenneté. Le cabinet aurait à examiner le dossier pour décider s'il doit prendre un décret.
[Français]
Encore là, un décret imposerait simplement une interdiction de citoyenneté de cinq ans, ce qui veut dire que l'intéressé pourrait demeurer au Canada à titre de résident permanent. Il pourrait remplir une nouvelle demande de citoyenneté après cinq ans.
[Traduction]
Je voudrais maintenant vous parler du volet administratif du projet de loi.
[Français]
Parce que les nouveaux critères sont faciles à comprendre et à appliquer, nous pouvons bien fonctionner avec un système axé sur des décisions administratives.
¿ (0910)
[Traduction]
Grâce au processus de révision par le ministre, les erreurs simples relevées par les demandeurs pourront être corrigées sans l'intervention des tribunaux.
[Français]
Les personnes qui ont fait l'objet d'une décision négative lors de la révision interne pourront demander un contrôle judiciaire par la Cour fédérale.
[Traduction]
Pour conclure au sujet du projet de loi, je formulerai les réflexions suivantes. Beaucoup de personnes ont fait d'énormes sacrifices pour devenir citoyens canadiens. Nous ne pouvons pas accepter qu'un petit nombre d'individus compromettent le sens ou l'intégrité d'un bien si précieux. Mesdames et messieurs, je crois vraiment que le projet de loi qui prévoit un nouveau processus de révocation de la citoyenneté va donner encore plus de valeur à ce que signifie être citoyen canadien.
Nous allons maintenant parler de l'entente sur les tiers pays sûrs. Évidemment, comme je l'ai dit, nous avons plus d'un dossier à discuter aujourd'hui. À propos de l'entente sur les tiers pays sûrs avec les États-Unis, le projet de règlement de mise en oeuvre a été déposé à la Chambre le 28 octobre.
[Français]
Je pense que vous avez maintenant reçu les copies de cet élément important de la Déclaration sur la frontière intelligente.
D'ailleurs, j'ai demandé qu'on dépose également une copie de l'addendum, qui est une clarification de l'article 9 de cette entente et qui fait partie de cette entente. Et pour ceux qui pensent qu'il y aurait un side deal, je dirai que ce n'est pas le cas.
D'ailleurs, lorsque j'ai rendu public cet accord de principe, j'ai parlé moi-même de la clarification de l'article 9.
[Traduction]
Avant de proposer ce règlement, nous avons travaillé de près avec le Haut Commissariat pour les réfugiés. Le Commissariat accepte de telles ententes dans le cadre de la gestion du mouvement des réfugiés. Je sais que la représentante du Canada a exprimé ici certaines réserves, mais nous avons un texte dans lequel le Haut Commissariat des Nations Unies «considère constructif l'objectif visé par l'accord, qui est d'assurer le partage approprié des responsabilités de l'État à l'égard de la détermination du statut de réfugié.» Nous allons déposer ce texte dans les deux langues officielles. Il y a parfois des problèmes de communication entre les intéressés à ce sujet mais, quand le Haut Commissaire lui-même dit que l'entente est valable, je pense qu'il est opportun que je vous le signale aujourd'hui.
[Français]
À l'échelle canadienne, nous avons également collaboré avec le Conseil canadien pour les réfugiés et nous nous sommes efforcés de faire en sorte que le projet de règlement soit public.
[Traduction]
C'est une entente qui va nous permettre de mieux aider les personnes qui ont besoin de la protection du Canada. Je ne veux pas trop m'étendre là-dessus parce que vous en avez déjà beaucoup entendu parler, et je pourrai répondre aux questions précises que vous voudrez bien me poser par la suite à propos de l'entente sur les tiers pays sûrs.
Je vous rappelle que cet accord permet, je pense, de régulariser le système. Il a été signé en tenant compte de la façon de faire canadienne. C'est un autre outil mis à notre disposition et, à toutes les étapes, la façon de faire canadienne a été respectée. Il y a quelques exceptions, comme vous le savez, et le ministre peut toujours exercer sa prérogative, son pouvoir discrétionnaire, si bien que nous sommes capables de prendre les mesures voulues. Même avec l'annexe concernant les 200 personnes, elle appuie la loi que nos agents font appliquer, et jamais personne ne nous a imposé quoi que ce soit.
Voilà pourquoi c'est vraiment une situation qui est favorable aux deux parties.
[Français]
Je vais maintenant parler du rapport annuel au Parlement. Comme vous le savez, le 30 octobre, j'ai déposé le premier rapport annuel au Parlement en vertu de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés. Ce rapport présente d'une façon beaucoup plus complète le plan d'action annuel sur les niveaux d'immigration.
J'aimerais simplement vous mentionner que notre objectif de 1 p. 100 de la population demeure. Évidemment, nous sommes conscients que les niveaux ont un lien direct avec la question des ressources, que l'immigration n'est pas strictement un port d'entrée, mais qu'il y a toute la notion de l'intégration, du resettlement et qu'à partir de cet extraordinaire moment historique de la conférence fédérale-provinciale-territoriale sur l'immigration, nous avons obtenu des engagements fermes des provinces, de l'ensemble des partenaires. D'ailleurs, nous avons déjà signé de nouvelles ententes avec des gouvernements provinciaux, tout ça dans le contexte du respect des ententes existantes, pour nous assurer que nous pourrons effectivement avoir une immigration beaucoup plus régionale, où l'ensemble des partenaires pourront travailler à s'assurer de jouer pleinement leur rôle, et pour nous assurer d'avoir une politique totalement inclusive, où l'ensemble des Canadiens pourront avoir voix au chapitre et participer à ce processus. Sur la question des niveaux, il est clair que notre objectif de 1 p. 100 demeure et que nous voulons l'atteindre. Par conséquent, toute aide pour pousser afin d'obtenir des ressources sera la bienvenue.
[Traduction]
Mesdames et messieurs, monsieur le président, voilà ce que j'avais à dire pour commencer. Comme je dois partir à 10 heures, j'ai pensé qu'il valait mieux que mon exposé soit bref pour que nous ayons le temps de discuter. Je promets aux membres de l'opposition que mes réponses seront courtes, pour que vous puissiez poser le plus grand nombre de questions possible.
Je veux cependant m'assurer de revenir sur la question de la citoyenneté. Je sais qu'on se préoccupe de l'adoption, surtout au Québec.
[Français]
J'aimerais vous dire que cette mesure législative a été écrite dans le respect des provinces et très certainement dans une collaboration totale, notamment avec le gouvernement du Québec, et que le gouvernement du Québec, de fonctionnaire à fonctionnaire, est totalement d'accord sur la façon dont nous nous sommes organisés concernant la question de l'adoption. Je pourrai répondre de façon plus technique par la suite.
[Traduction]
Merci beaucoup. Je vous laisse la parole.
Le vice-président (M. Jerry Pickard): Merci beaucoup, monsieur le ministre.
Diane.
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Alliance canadienne): Merci beaucoup, monsieur le président.
L'entente sur les tiers pays sûrs a été décrite de bien des façons et je me demande si le ministre pourrait nous dire ce que cette entente, d'après lui, vise à réaliser.
M. Denis Coderre: J'ai deux observations à faire. Comme vous le savez, nous voulons nous assurer de respecter nos obligations internationales, mais nous avons toujours fait valoir que, pour ce qui est de l'immigration, il faut réussir à concilier ouverture et vigilance. Notre système nous permet d'accueillir et de protéger chaque année entre 25 000 et 29 000 revendicateurs du statut de réfugié et, depuis trois ans, le nouveau système nous a permis d'en recevoir de 45 000 à 50 000, en moyenne.
Ensuite, l'entente sur les tiers pays sûrs est un outil. Nous avons déjà la nouvelle loi et le nouveau règlement; par exemple, les revendicateurs du statut de réfugié ne peuvent plus refaire de demande si leur revendication est refusée.
Par ailleurs, depuis que la Cour suprême a statué, en 1985, sur l'affaire Singh, nos obligations juridiques ne nous offrent plus le choix. Tous les citoyens et les non-citoyens sont protégés en vertu de la Charte des droits et libertés, et le seul moyen par lequel nous pouvons régulariser le système est une entente sur les tiers pays sûrs.
Au sujet des États-Unis et du Canada, le Canada a évidemment signé la Convention de Genève et les États-Unis ont signé le protocole; nous avons aussi des documents que nous allons déposer, qui prouvent qu'ils respectent la Convention de Genève. Mais nous voulons régulariser notre système et nous assurer de pouvoir, avec l'exception prévue dans l'entente, remplir nos obligations internationales.
Dans la réalité, notre système nous permet d'accueillir de 25 000 à 29 000 personnes; nous n'avons pas les ressources nécessaires pour en recevoir 45 000 à 50 000 chaque année. Grâce à l'entente sur les tiers pays sûrs, les personnes qui passent par les États-Unis, sauf pour ce qui est des exceptions prévues, pourront bénéficier d'une diligence raisonnable et les Américains vont respecter la Convention de Genève. Cela nous satisfait.
¿ (0915)
Mme Diane Ablonczy: Donc, d'une façon, c'est un moyen de limiter le nombre de revendicateurs du statut de réfugié qui passent par les États-Unis. Je suis un peu déroutée, cependant, parce que les fonctionnaires nous ont dit qu'il y aurait encore des audiences relatives à la revendication pour tout le monde. La décision ne serait pas prise tout de suite. Il faudrait faire des contrôles, vérifier des documents, et le reste. Où se trouveront ces personnes pendant qu'on effectue les vérifications? Si elles ne sont pas dans le pays, où vont-elles être? Si elles sont dans le pays, la décision Singh ne s'appliquerait-elle pas, et alors la situation reste la même parce qu'il faut garantir la possibilité d'appel et l'application régulière de la loi à tous ceux qui se trouvent au Canada?
M. Denis Coderre: Actuellement, nous nous préoccupons du suivi. Nous avons un accord et, comme je l'ai dit, le 5 décembre nous allons signer l'entente conclue entre le Canada et les États-Unis. Nous acceptons de travailler avec les intéressés, comme le Haut commissariat pour les réfugiés et le Conseil canadien pour les réfugiés, pour veiller à ce qu'au moment de la mise en oeuvre de l'entente, nous puissions répondre à toutes ces questions.
Dans certains cas qui surviennent à la frontière, nous pourrons bien sûr réagir presque immédiatement. Quand il y a des exceptions, ceux qui ont des parents—et nous avons une définition de la famille—pourront entrer, tout comme les enfants non accompagnés, parce que nous avons notre propre politique au sujet des enfants.
Je pense qu'il faudra attendre. C'est vraiment au moment de la mise en oeuvre et selon la façon dont nous assurerons le suivi auprès de tous les intervenants que nous pourrons répondre à ces questions. La situation évolue; c'est un outil de travail.
Mme Diane Ablonczy: Je me demande bien pourquoi nous signons une entente alors que nous ne savons pas comment elle va fonctionner dans les faits.
M. Denis Coderre: Ce n'est pas ce que je dis, Diane. Je dis que nous sommes en train de négocier avec les Américains pour nous assurer que nous ne serons pas bloqués à la frontière. Si nous voulons régulariser le système, nous voulons qu'il fonctionne. Actuellement, nous nous entendons sur les principes.
Je vous rappelle que le gouvernement canadien veut conclure cette entente depuis 1990. Nous avons désormais un accord. Il nous faut maintenant en examiner les modalités pour nous assurer qu'il fonctionne.
Mme Diane Ablonczy: Je pose cette question parce que, depuis l'arrêt Singh, les revendicateurs légitimes du statut de réfugié sont protégés par la Charte. Je me demande comment on arrive à statuer sur une revendication. Si l'arrêt Singh s'applique, nous n'accélérons pas le processus, parce que les gens bénéficient de toutes les protections, ainsi que de l'application régulière de la loi et du droit d'appel prévus par notre système.
¿ (0920)
M. Denis Coderre: Luke Morton va vous répondre. J'ajouterai autre chose ensuite.
M. Luke Morton (conseiller juridique principal, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration): Il est certain que le Canada compte respecter la Charte. Il est important de remarquer que, dans l'affaire Singh, la personne concernée a été renvoyée dans son pays d'origine. Ce n'est pas le cas ici. Les gens sont renvoyés dans un pays sûr.
Mme Diane Ablonczy: À ce sujet, vous savez que l'article 159.6 m'inquiète beaucoup parce qu'il prévoit essentiellement que, si celui qui revendique le statut de réfugié a été accusé ou condamné pour meurtre, il ne peut être renvoyé aux États-Unis. Ce serait une des exceptions.
Les fonctionnaires du ministère m'ont répondu, quand je les ai interrogés à ce sujet, que cette mesure avait été prévue dans l'intérêt public. J'aimerais savoir, monsieur le ministre, comment le fait d'offrir un asile sûr à des personnes accusées et condamnées pour meurtre pourraient servir l'intérêt public des Canadiens.
M. Luke Morton: Si je peux...
Mme Diane Ablonczy: Non, j'aimerais que le ministre réponde à cette question, parce que vous m'avez déjà répondu.
M. Luke Morton: Le ministre va vous répondre. Je veux simplement...
Mme Diane Ablonczy: J'ai entendu la réponse des fonctionnaires, mais je veux que le ministre, s'il le peut, nous dise pourquoi il a prévu cette mesure.
M. Denis Coderre: D'accord.
Nous voulons, par exemple, qu'une personne, qui est reconnue coupable d'un crime et qui va être condamnée à la peine de mort, ne soit pas renvoyée, parce que c'est contraire à nos valeurs. Il est possible de servir l'intérêt public sans renvoyer cette personne condamnée à mort. C'est ainsi que je comprends la situation dans ce cas.
Légalement, nous ne pouvons pas les renvoyer. Par ailleurs, l'intérêt public suppose aussi que nous respections nos propres valeurs. Nous ne pouvons pas nous occuper de cette personne sans compromettre la sécurité des Canadiens.
[Français]
C'est ce qu'on voulait mettre de l'avant en réglant cette situation. Je ne sais pas si M. Morton a...
[Traduction]
M. Luke Morton: Je veux rapidement ajouter que, depuis ma comparution de mardi, j'ai revérifié avec le Service du droit de l'extradition du ministère de la Justice et, dans l'affaire Burns et Rafay, la Cour suprême du Canada a statué que, d'après l'article 7 de la Charte, le jugement s'applique autant aux Canadiens qu'aux non-Canadiens.
Mme Diane Ablonczy: Cela n'a jamais été vérifié dans le cas de non-Canadiens, mais il reste que nous avons maintenant une entente par laquelle, d'après le ministre, les valeurs canadiennes vont rendre primordiale la protection des personnes condamnées à la peine de mort pour meurtre. Le ministre dit-il que le Canada accorde une priorité absolue à la protection des meurtriers? N'oubliez pas, monsieur le ministre, que les terroristes sont des meurtriers.
Pourquoi serions-nous le pôle d'attraction des meurtriers en permettant une exception et en laissant ces personnes échapper à la justice, quoi qu'en décide leur pays d'origine? Pourquoi accorder autant d'importance à la protection des meurtriers?
[Français]
M. Denis Coderre: La députée sait pertinemment que le Canada n'est pas un paradis pour les terroristes et qu'à cet égard, l'Entente sur les tiers pays sûrs est un outil. La nouvelle Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés nous permet de jouer pleinement notre rôle et d'empêcher les gens arrivant en tant que réfugiés mais ayant un casier judiciaire de passer par le processus réservé aux réfugiés. Nous avons également mis de l'avant une série de ressources et de règlements afin de voir à ce que la sécurité soit assurée.
Comme vous le savez, l'intérêt public va de pair avec les jugements de la Cour suprême. Vous êtes avocate et êtes par conséquent respectueuse de la Rule of law. Il faut donc faire preuve d'une certaine cohérence dans la façon de procéder.
L'Entente sur les tiers pays sûrs n'est pas une fin en soi, mais plutôt un outil supplémentaire nous permettant de jouer pleinement notre rôle en matière de combat des abus. Selon moi, on doit envisager l'entente dans cette optique plutôt que la considérer comme un nouvel aimant visant à protéger les terroristes.
Nous sommes respectueux de la loi, de la Cour suprême et des jugements. Nous accomplissons notre travail et nous disposons maintenant d'outils nous permettant de régulariser un système qui nous permettra de jouer pleinement notre rôle tout en respectant nos propres valeurs et nos propres ententes sur la scène internationale.
¿ (0925)
[Traduction]
Le vice-président (M. Jerry Pickard): Merci beaucoup, monsieur le ministre.
J'ai une demande spéciale à faire au comité de la part de M. Mark. Je tiens à assurer tous les membres qu'ils auront droit au même temps de parole. Comme M. Mark doit assister à une autre séance de comité, il aimerait pouvoir poser sa question tout de suite.
Les membres du comité sont-ils d'accord? Avez-vous des objections?
Allez-y, Inky, vous avez cinq minutes.
M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, PC): Merci, monsieur le président.
Pour commencer, permettez-moi de souhaiter la bienvenue au ministre et de le féliciter pour son travail dans le cadre des rencontres avec les provinces pour la promotion du programme des candidats; cela faisait longtemps que nous l'attendions. J'espère qu'il continuera dans ce sens.
Pour éviter toute confusion, je tiens à préciser que je représente aujourd'hui le Parti conservateur. Ce parti est favorable à l'immigration et, bien évidemment, à la protection des réfugiés.
J'aimerais faire deux commentaires. Tout d'abord, le ministre a dit qu'il était ici pour parler du projet de loi C-18 et de l'Entente sur les pays tiers sûrs. Comme il le sait, la seule critique que j'ai à l'égard du projet de loi C-18, c'est qu'il classe les citoyens en deux catégories. J'espère que le ministre corrigera cette situation.
Ma question concerne l'Entente sur les pays tiers sûrs. Les deux derniers jours d'audition des témoins ont été très instructifs, c'est le moins que l'on puisse dire. Je crois que nous commençons à nous apercevoir qu'il ne s'agit pas de la formule idéale que cherchait le gouvernement. En fait, il se pourrait même que nous nous tirions une balle dans le pied.
Il ne fait aucun doute que l'entente contribuera à contenir le flot de réfugiés désireux d'entrer au pays, mais je ne pense pas que nous ayons choisi la bonne méthode. Malheureusement, le Canada n'a pas tiré les leçons du passé, comme l'ont fait remarquer certains témoins. Notre histoire a été jalonnée d'épisodes sombres. Nous avons fermé la porte aux Juifs persécutés lorsqu'ils voulaient se réfugier chez nous; nous avons fait la même chose aux Asiatiques entre 1923 et 1947; nous avons été jusqu'à interner des Canadiens d'origine japonaise et des Ukrainiens. Quoi qu'il en soit, étant donné la culture et l'histoire de notre pays, j'espère que nous ne perdrons pas de vue ces considérations dans l'Entente sur les pays tiers sûrs.
Quelqu'un a demandé ce matin où était le problème. Je pense que nous devons véritablement définir ce problème et dire pourquoi nous mettons en place de telles mesures. Je suis sûr qu'il y a d'autres solutions. D'ailleurs, les témoins qui ont comparu devant nous ont d'autres solutions à proposer.
Cette entente est vouée à l'échec à cause de son libellé. La clé du problème pour un demandeur d'asile consiste à arriver au Canada par avion; autrement dit, une fois entré au pays—illégalement, il va sans dire—il pourra revendiquer le statut de réfugié. C'est pour cette raison que cela ne marchera pas.
On n'a cessé de clamer que le Canada était un pays plus clément et plus accueillant que d'autres. Nous sommes uniques. Nous sommes les premiers en matière de protection des réfugiés. Pourquoi devrions-nous compromettre notre réputation mondiale en adoptant ce type de mesures législatives?
Ma question au ministre est la suivante: Permettrez-vous au comité de modifier le règlement avant qu'il ne soit définitif?
M. Denis Coderre: Tout d'abord, merci. Nous devons être très prudents. Le libellé de l'entente vise à protéger les intérêts canadiens.
Si le ministre dispose encore de ce pouvoir discrétionnaire et jouit de cette prérogative lui permettant de faire exception à la règle dans certains cas, c'est justement pour éviter les abus dont vous venez de parler. Nous ne refoulons pas les gens pour le plaisir et nous estimons que le libellé de l'entente et notre façon de négocier empêcheront ce type d'abus.
Mais nous devons réglementer le système. L'Entente sur les pays tiers sûrs n'est pas une finalité en soi. Nous y avons apporté des changements majeurs, auxquels vous avez participé, dans le cadre de la nouvelle Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés. Nous avons mis davantage d'outils à la disposition de nos agents aux frontières et nous croyons que cette entente nous permettra de respecter aussi les décisions de nos propres tribunaux, comme dans l'affaire Singh, en disant que la seule façon de réglementer un système et de respecter la primauté du droit, c'est de renvoyer ces gens dans un pays tiers sûr.
Mais encore une fois, votre propre parti, et ce n'est pas nouveau... Dans le cadre des travaux de ce comité sur les pays tiers sûrs, l'Alliance avait dit espérer—et vous étiez contre, comme d'habitude, bien sûr—qu'on arrive à une entente globale avec nos amis américains et avec l'Union européenne. Le Parti conservateur avait déclaré que le Canada devait mettre en place un mécanisme de renvoi temporaire dans un pays tiers sûr. Je vous écoute.
¿ (0930)
M. Inky Mark: Le problème...
Le vice-président (M. Jerry Pickard): Au lieu d'entamer un débat, je propose que nous laissions la parole à ceux qui doivent répondre aux questions.
Steve.
M. Steve Mahoney (Mississauga-Ouest, Lib.): Merci, monsieur le président.
Bonjour, monsieur le ministre, et merci d'être venu. Vous devez être un peu dérouté car ce sont les mêmes partis qui critiquent sévèrement l'Entente sur les pays tiers sûrs qui avaient demandé sa mise en oeuvre, pendant la période de questions à la Chambre des communes. Cela me rend aussi perplexe.
J'aimerais vous interroger au sujet du projet de loi sur la citoyenneté, mais avant, permettez-moi de vous poser deux ou trois questions concernant l'Entente sur les pays tiers sûrs.
Des témoins ont déclaré que tout ce que nous arriverons à faire avec cette entente, c'est de pousser les gens à entrer dans la clandestinité. Au lieu de traverser la frontière à Lacolle, au Québec, ils emprunteront des chemins de traverse, dans la campagne de la circonscription de mon ami, et trouveront un autre moyen d'entrer au pays. Ou bien, étant donné que l'entente ne s'applique qu'aux passages terrestres et non aux aéroports—je tiens à préciser que 95 p. 100 des personnes dont nous parlons passent par les points d'entrée terrestres et seulement 5 p. 100 par les aéroports—, une fois que nous aurons mis en oeuvre cette entente, nous observerons un renversement de la tendance et verrons arriver des demandeurs d'asile au Canada par avion.
A-t-on pensé à la mise en place d'un système de suivi ou à un processus d'examen au bout d'un an ou deux qui permette de déterminer si oui ou non l'entente a poussé ces gens à entrer clandestinement?
M. Denis Coderre: Tout d'abord, je vous remercie de la question.
Il est évident que le gouvernement peut apporter des changements, c'est pourquoi j'invite les membres du comité à me faire part de leurs opinions. Néanmoins, je tiens à préciser, à propos des aéroports, qu'il existe ce que nous appelons le principe de frontières multiples—qui ne vise pas seulement les frontières terrestres—et que nous favorisons également une stratégie de prévention.
Le Canada a créé des postes d'agents de contrôle de l'immigration pour prévenir l'apparition de problèmes avant même que les personnes visées ne se présentent à nos frontières. Grâce à nos 44 agents de contrôle de l'immigration, basés à Heathrow, Charles de Gaulle et dans d'autres aéroports aux quatre coins du monde, nous avons conclu des ententes avec des compagnies aériennes et réussi à régler 45 000 cas au cours des six dernières années. Cette stratégie de prévention et les ressources que nous avons mobilisées, le nouveau règlement qui accompagne la Loi sur l'Immigration et la protection des réfugiés ainsi que l'Entente sur les pays tiers sûrs sont autant d'instruments destinés à nous aider. Lorsque j'ai dit qu'il fallait réglementer le système, c'est aussi pour résoudre ce type de problèmes. Nous travaillons également avec d'autres agences et nous avons établi des partenariats à tous les niveaux pour garantir notre efficacité.
Mais la situation de l'immigration et des pays tiers sûrs ne cesse d'évoluer. Nous voulons que le système fonctionne. Bien sûr, compte tenu de nos relations avec les Américains et de la façon dont nous entendons mettre en oeuvre cette entente, nous sommes prêts à exercer un contrôle, avec l'aide d'autres intervenants. Je crois que nous sommes capables de faire face à la musique.
M. Steve Mahoney: Si j'ai bien compris, la très grande majorité des personnes visées par l'Entente sur les pays tiers sûrs se trouvent aux États-Unis, où on leur a délivré un visa de travailleur, d'étudiant ou de touriste. Elles sont là tout à fait légalement. Ce ne sont pas des gens qui se sont immiscés clandestinement—qui sont entrés par le sud et ont pris un autobus vers le nord—sans avoir été repérés, surtout depuis les événements du 11 septembre qui, je pense, devraient avoir rendu encore plus difficile l'obtention d'un visa aux États-Unis.
Est-ce qu'on craint que ces personnes, qui sont légalement aux États-Unis, c'est-à-dire dans un pays tiers sûr, revendiquent le statut de réfugié? On dirait que les Américains ne veulent pas traiter ces personnes comme elles le méritent ni leur donner la possibilité de demander le statut de réfugié à l'intérieur de leurs frontières.
Avez-vous parlé de cette question avec les responsables américains, leur avez-vous dit que nous voulions que la Convention de Genève soit respectée et qu'il fallait donner refuge à ces personnes, d'une façon ou d'une autre?
¿ (0935)
M. Denis Coderre: C'est une question qui comporte plusieurs volets, mais je pense que dans l'intérêt des travaux du comité, nous déposerons des documents qui vous permettront d'acquérir certaines connaissances.
Il y a, par exemple, un rapport d'expert produit par M. David Martin, qui est professeur de droit à l'université de Virginia. M. Martin a évalué dans quelle mesure le système de détermination du droit d'asile américain se conformait aux obligations et aux normes internationales en la matière. Les conclusions de son rapport nous permettent de dire que les États-Unis sont un pays tiers sûr et qu'ils respectent le Protocole de Genève, mis en oeuvre en 1967, qui est la même chose que la Convention de Genève de 1951. En fait, le protocole inclut davantage de pays.
Nous vous présentons également un jugement de la haute cour de justice britannique, la Queen's Bench division, qui s'est interrogée sur le régime législatif permettant de désigner les États-Unis comme un pays tiers sûr. Ce jugement sera très utile pour n'importe quel tribunal canadien qui se penche sur les mêmes questions. Je déposerai également la décision de justice qui a été rendue.
Il faut aussi tenir compte de l'opinion du HCR à propos de l'Entente sur les pays tiers sûrs, selon laquelle les Américains respectent effectivement ces conventions.
Par conséquent, nous considérons que les États-Unis sont un pays tiers sûr. Ils répondent favorablement à environ 53 p. 100 des demandes de statut de réfugié. Dans notre cas, cette proportion est de 56 p. 100. Encore une fois, chaque cas est particulier.
Étant donné que nous appliquons certaines exceptions—comme celles visant les enfants non accompagnés et les individus ayant des parents au Canada—, des personnes entrées aux États-Unis peuvent ensuite demander à venir chez nous. Ce que nous ne pouvons accepter, c'est qu'une personne fasse à la fois une demande de statut de réfugié aux États-Unis et au Canada.
M. Steve Mahoney: Je crois que le temps qui m'était imparti est écoulé, mais j'aimerais savoir ce que vous pensez du recours à la biométrie et de l'utilisation d'une carte d'identité. Quelles sont les implications et en quoi cela affecte la Loi sur la citoyenneté et toutes les questions relatives à la protection de la vie privée, l'identité, la sécurité, etc.?
M. Denis Coderre: Je crois en la biométrie; je suis pour une carte d'identité nationale. Je crois que la biométrie, utilisée comme un procédé d'authentification, est une bonne chose. C'est à nous de décider comment nous voulons utiliser la technologie et c'est la raison pour laquelle j'ai demandé à ce qu'il y ait un débat, un débat qui ne porte pas uniquement sur la carte d'identité nationale. Nous avons déjà dit, et je le confirme, que nous sommes prêts à utiliser la biométrie pour les cartes d'identité nationales délivrées aux immigrants reçus et aux résidents permanents et, bien sûr, avec ce qui est arrivé aux États-Unis, ce débat est encore plus pressant.
Mais je crois en même temps que c'est à nous, Canadiens, de tenir un débat de fond sur l'utilisation de la biométrie et sur la façon de mettre en oeuvre un système fondé sur un procédé d'authentification permettant d'éviter certains abus. Je crois que nous pouvons protéger la vie privée tout en utilisant la technologie. Nous ne sommes pas une bande de luddites, comme au XVIIIe siècle.
M. Steve Mahoney: Certains le sommes.
M. Denis Coderre: Peut-être, mais je considère que c'est à nous, Canadiens, de décider. Et parce que nous avons cette Loi sur la citoyenneté, monsieur le président, nous devons choisir le type de société dans laquelle nous voulons vivre. Nous pouvons protéger nos droits tout en utilisant la technologie à bon escient.
Le vice-président (M. Jerry Pickard): Madeleine.
[Français]
Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Merci, monsieur le président. Bonjour, monsieur le ministre.
Compte tenu de l'urgence, je vais surtout m'attarder à l'Entente sur les tiers pays sûrs. Après avoir entendu les fonctionnaires du gouvernement et entendu des témoins durant cinq heures, je suis obligée de vous dire, bien que je sois sûre que vous le savez déjà--que les témoins qu'on a entendus sont unanimes à dire qu'il n'y a rien de bon pour les réfugiés dans cette entente. Ces témoins ont beaucoup d'inquiétudes, inquiétudes que nous partageons d'ailleurs. Vous savez qu'on a toujours eu des réserves à l'endroit de cette entente.
Il y a une question que je me pose et que plein de gens de bon sens se posent aussi. Comment se fait-il que les Américains, qui étaient très opposés à une telle entente avant le 11 septembre, se retrouvent tout d'un coup plutôt d'accord sur ça? On ne peut s'empêcher de penser que c'est comme dans un couple dont les conjoints se disent: «Je te donne quelque chose, tu me donnes autre chose.» Nous ne saurons jamais ce que les Américains voulaient avoir, mais on peut penser ça.
Hier, on a entendu des gens de loi. On a entendu l'American Immigration Lawyers Association, qui a 120 membres qui travaillent au Canada. Je leur ai demandé quel serait l'élément le plus important parmi les nombreuses propositions et suggestions qu'ils nous ont faites. Ce qui est essentiel, selon eux, si cette entente est effectivement signée--à l'évidence, elle va être signée--, c'est qu'il devrait absolument y avoir dans le règlement une disposition sur la discrétion du ministre. Ceci apparaît dans l'entente, mais ne se retrouve pas dans le règlement. Ça devrait y être inscrit très clairement.
Le Syndicat des travailleurs unis de l'automobile s'inquiète beaucoup de tout ce qui a trait à la discrimination basée sur le sexe et sur le profil racial. On n'a pas besoin d'être de grands stratèges pour être capables de voir très clairement, quand on parle de profil racial, qui peut être visé.
L'Association du Barreau canadien trouve essentiel et fondamental que chaque personne qui demande le statut de réfugié ait accès à un système. Autrement dit, quelqu'un qui serait refusé aux États-Unis devrait avoir le droit de faire une demande au Canada.
¿ (0940)
[Traduction]
Le vice-président (M. Jerry Pickard): Vous pourriez peut-être essayer de répondre à toutes ces questions.
[Français]
Mme Madeleine Dalphond-Guiral: Ce sera une réponse courte: il va me dire que j'ai raison.
[Traduction]
Le vice-président (M. Jerry Pickard): Mais il ne pourra répondre à vos questions si...
[Français]
Mme Madeleine Dalphond-Guiral: Voici ce que je veux demander au ministre. Compte tenu qu'il n'y a pas d'urgence, puisque la réglementation américaine est peut-être écrite mais n'est pas encore publique, est-ce qu'il n'y aurait pas possibilité d'obtenir un délai pour entendre d'autres témoins, qui seraient des témoins experts? Il ne s'agit pas d'une entente mineure. Ce n'est pas une niaiserie. Il y a eu le 11 septembre. Ce que je crains, c'est que le 11 septembre ait occulté ce que je considère comme des valeurs canadiennes et québécoises, c'est-à-dire la compassion et le jugement.
[Traduction]
Le vice-président (M. Jerry Pickard): Les cinq minutes sont écoulées depuis longtemps et je vous demanderai d'être bref.
[Français]
M. Denis Coderre: La compassion existe déjà parce qu'il existe des exceptions. La raison pour laquelle on a mis sur pied ces exceptions... Soit dit en passant, la prérogative du ministre existe dans la loi. J'ai donc la prérogative d'appliquer toute la discrétion nécessaire. Vous parlez de sexe et ainsi de suite. Je suis allé à Fort Erie dernièrement. On parlait aussi d'un contingent francophone de gens qui aimeraient... J'ai dit qu'on avait la discrétion nécessaire et qu'on examinait la situation. J'ai cette prérogative de toute façon.
L'Entente sur les tiers pays sûrs n'émane pas du 11 septembre. On y pense depuis 1990 parce que certains ont abusé du système canadien. On veut s'assurer d'être en mesure de régulariser ce système pour qu'on puisse jouer pleinement notre rôle, faire preuve de compassion et remplir nos devoirs sur la scène internationale. Si on ne règle pas cette situation, il y aura un problème au niveau de la Commission de la protection des réfugiés, et vous allez me dire en Chambre que c'est épouvantable car il faut sept ou neuf ans pour régler les dossiers.
Maintenant, on peut avoir un système complémentaire qui nous permettrait de régler notre situation canadienne et de la respecter. Cela fait partie de l'accord et notamment des 30 points sur la frontière intelligente. Nous avons bien négocié. Soyons fiers! Le Canada a très bien négocié l'entente. Notre négociateur, John Scratch, a fait un travail extraordinaire. Au début, on parlait de la question de l'addendum pour clarifier l'article 9. Les Américains voulaient que ce soit 2 400 par année, et je l'ai dit publiquement; on a réduit ça à un maximum de 200. En outre, on a dit que ça allait se faire selon notre façon d'être et notre façon de faire.
Donc, oui, il existe des success stories, et c'en est un. On a bien fait notre travail et on a bien réglé la situation. C'est justement pour assurer cette compassion qu'on a prévu ces exceptions. Il n'y aura pas de prolongation.
[Traduction]
Le vice-président (M. Jerry Pickard): Judy, c'est à vous. Allez-y.
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Merci, monsieur le président. J'aimerais commencer par poser quelques questions au sujet de l'Entente sur les pays tiers sûrs. Le ministre pourra dire de moi ce qu'il veut, mais il ne pourra pas me traiter d'incohérente.
Des voix: Oh, oh!
Mme Judy Wasylycia-Leis: Vous avez dit que, conformément aux valeurs canadiennes, ce pays n'enverrait jamais personne à la mort. Mais avec cette entente, vous faites courir un énorme risque aux femmes victimes de violence familiale car les États-Unis ne tiennent pas compte de la persécution fondée sur le sexe dans la détermination du statut de réfugié.
Ma question est la suivante: cette entente vous comble-t-elle et considérez-vous qu'elle est fidèle aux valeurs et aux traditions canadiennes, qu'elle respecte le droit international et qu'elle satisfait aux principes généraux d'humanité et de compassion? J'imagine que vous ne voyez aucun inconvénient à déposer cette entente au Parlement pour obtenir son approbation de principe. Le ferez-vous la semaine prochaine?
¿ (0945)
M. Denis Coderre: Non, car il s'agit d'une entente internationale.
Je considère que vous faites un excellent travail pour la mise en oeuvre du règlement. Vous avez entendu des témoins, vous avez discuté de la question et vous savez comment les choses fonctionnent. La situation évolue constamment. C'est la raison pour laquelle nous avons prévu certaines exceptions et établi cette prérogative.
Mais non, nous n'avons pas besoin de la présenter au Parlement. Vous savez tout comme moi que cela tient à notre procédure. Mais nous acceptons, comme nous le permet la loi—l'article 5, si je me souviens bien—que les modalités de mise en oeuvre soit examinées par ce comité. Cela devrait suffire, à mon avis.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Il est vrai qu'on pourrait dire que vous n'avez pas besoin de le faire, mais vous le feriez si vous étiez vraiment préoccupé par des questions de transparence et de responsabilité—comme vous l'étiez à propos des criminels de guerre ce matin. L'Accord de Kyoto n'a pas non plus besoin d'être déposé au Parlement, mais dans le meilleur intérêt de la démocratie, il est mieux qu'il le soit, surtout lorsqu'il s'agit de questions aussi importantes. Je vous invite donc à reconsidérer votre approche et, au moins, si vous êtes confiant, à déposer l'Entente sur les pays tiers sûrs au Parlement pour que nous puissions voter sur le principe d'une telle entente.
J'aimerais également vous poser des questions au sujet des cartes nationales d'identité pour tous les citoyens. Vous vous êtes dit très préoccupé du fait que l'on tienne compte du profil racial des gens à la frontière et de la façon dont les autorités américaines traitent les citoyens canadiens et les immigrants reçus. Vous avez dit que vous étiez allés à Washington pour régler le problème. Vous en êtes revenu avec une carte d'identité nationale pour tous les citoyens canadiens. Qui vous a demandé pareille chose?
M. Denis Coderre: Tout d'abord, je pense que ce comité serait un forum très approprié pour tenir le débat national que j'ai demandé. Ainsi, monsieur le président, c'est aux membres du comité de décider, mais je pense que vous devriez le faire.
La détermination du profil racial me gêne, particulièrement pour les immigrants reçus. L'affaire des passeports m'a mis en colère. Mais étant donné que notre lieu de naissance est indiqué sur le passeport et pas sur notre carte de citoyenneté, nous ne demandons pas l'impossible. J'ai demandé aux Canadiens s'il y avait moyen d'utiliser la technologie, comme la biométrie, pour protéger la vie privée et, du même coup, trouver une façon de prévenir les abus. C'est pour cela que j'ai voulu ce débat. Personne ne nous a rien demandé.
Actuellement, le gouvernement n'a pas l'intention d'imposer une nouvelle carte d'identité. C'est à cause de la Loi sur la citoyenneté que nous avons déjà cette carte. Il s'agit d'une carte d'identité avec photo, mais le lieu de naissance du détenteur n'y figure pas. Nous avons aussi la possibilité de recourir à la biométrie et c'est la raison pour laquelle j'ai lancé ce débat, un débat transparent qui nous permettra de définir ce que nous voulons vraiment. C'est tout ce que je cherche.
Le vice-président (M. Jerry Pickard): John.
M. John Bryden (Ancaster—Dundas—Flamborough—Aldershot, Lib.): Merci.
Monsieur le ministre, je remarque que les mots dans le soit-disant nouveau serment sont repris directement des serments actuels de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande. En voici le libellé:
Je m'engage à respecter les droits et libertés de notre pays, à défendre nos valeurs démocratiques, à observer fidèlement nos lois et à remplir mes devoirs et obligations de citoyen(ne) canadien(ne). |
Ce sont des mots et des idées tirés de serments d'autres pays. Comment le serment de citoyenneté peut-il être particulier aux Canadiens ou représenter les Canadiens lorsqu'il est en fait une copie du serment d'un autre pays?
M. Denis Coderre: Je sais que mon collègue travaille très fort en ce qui a trait à cette question. Cependant, nous croyons— et vous devrez aborder cette question ici—que le serment en lui-même est très équilibré, très approprié et qu'il reflète, selon moi, ce qu'est le Canada. Je ne veux pas lancer un autre débat sur la monarchie, mais je crois quand même que pour les gens qui viennent ici... Ils viennent au Canada de sorte que selon moi un serment d'allégeance à notre pays est très approprié. Par conséquent, je ne comprends pas pourquoi; je ne sais pas pourquoi vous pensez que la formulation du serment proposé n'est pas canadienne.
¿ (0950)
M. John Bryden: Monsieur le ministre, c'est tout simplement parce que ce sont des mots d'ailleurs, de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande.
Vous avez parlé plus tôt de nos valeurs. Pourquoi ne peut-on mentionner les valeurs canadiennes dans le serment? Les valeurs de la Charte des droits et libertés par exemple? Pourquoi ne pouvons-nous pas nous définir comme Canadiens par l'entremise de la Charte, dans le serment?
M. Denis Coderre: Selon moi, en prêtant allégeance au Canada, c'est implicite.
M. John Bryden: Peut-être, monsieur le ministre. Je ne sais pas comment répondre à cela.
Je vous le demande encore une fois. Pouvez-vous dire pourquoi vous rejetez un serment de citoyenneté qui nous définit en tant que Canadiens et qui explique que nous croyons à l'égalité des chances, à la liberté d'expression, aux droits fondamentaux de la personne, à la règle du droit et à la démocratie? Pourquoi est-ce que nous ne pouvons pas dire cela dans le serment? C'est pourtant ce qui fait de nous des Canadiens et nous distingue des Australiens, des Néo-Zélandais et des Britanniques. Pourquoi pas, monsieur le ministre? Pourquoi avons-nous peur de dire que nous sommes Canadiens dans notre propre serment?
M. Denis Coderre: Comme réponse à cela, je vais lire, dans l'intérêt de tous, le serment de citoyenneté proposé. Je crois qu'il couvre tout:
Dorénavant, je promets fidélité et allégeance au Canada et à Sa Majesté Elizabeth II, Reine du Canada. Je m'engage à respecter les droits et libertés de notre pays, à défendre nos valeurs démocratiques, à observer fidèlement nos lois et à remplir mes devoirs et obligations de citoyen(ne) canadien(ne). |
Ce n'est pas mauvais du tout.
M. John Bryden: Me permettez-vous simplement de répondre à cela? J'aimerais lire le serment que je propose, si vous le permettez, simplement aux fins du compte rendu.
Le vice-président (M. Jerry Pickard): Allez-y. Lisez rapidement, John.
M. John Bryden: Voici le serment que je propose, monsieur le ministre:
En promettant allégeance au Canada, je prends ma place parmi les Canadiens, un peuple défini par sa foi indéfectible dans cinq principes: l'égalité des chances, la liberté d'expression, la démocratie, les droits fondamentaux de la personne et la règle de droit. |
Lequel des deux serments, monsieur le ministre, décrit le mieux les Canadiens?
Le vice-président (M. Jerry Pickard): Merci.
Diane.
Mme Diane Ablonczy: Il y a tellement de questions que je pourrais poser que j'aimerais disposer de plus de temps. Je suis sûre que vous souhaitez que j'aie plus de temps, vous aussi.
J'aimerais vous poser une question au sujet de l'arriéré des revendicateurs du statut de réfugié. Cela m'inquiète, et je suis convaincue qu'il en va de même pour vous vu qu'il on a dépassé les 50 000. Il s'agit de personnes qui n'ont aucun statut, qui ne peuvent poursuivre leur chemin et qui, selon moi, sont traitées très injustement du fait qu'on les tient dans un vide juridique. Je me demande simplement si vous pouvez nous assurer que des mesures pratiques sont prises à l'heure actuelle pour supprimer cet arriéré. Est-ce que cet arriéré continuera tout simplement de s'amplifier et les problèmes de s'aggraver?
M. Denis Coderre: C'est probablement une des questions les plus importantes. Je suis d'accord avec ma collègue lorsqu'elle parle d'une situation et mon rôle en tant que ministre c'est de veiller au bon fonctionnement. C'est la raison pour laquelle nous avons apporté des modifications à la loi. Nous avons mis en place certains nouveaux règlements et l'entente sur les tiers pays sûrs aura des retombées.
Nous disons vouloir réglementer le système et empêcher les personnes d'avoir à attendre cinq, six voire sept ans. Cela engendre certains autres problèmes sociaux. Le problème se pose; nous devons nous y attaquer et trouver une solution. Grâce aux nouvelles ressources, aux nouveaux outils dont nous disposerons, je crois que nous pourrons voir la lumière au bout du tunnel.
Nous avons déjà amélioré le système. D'autres outils dont nous disposons auront une grande portée sur l'arriéré lui-même. Je crois que concrètement, à court terme, nous serons en mesure de régler ces problèmes en même temps. Mais c'est aussi la raison pour laquelle nous avons tenu la conférence fédérale-provinciale. Nous avons parlé de cela, également—à la demande du gouvernement du Québec, en fait—et nous sommes convenus d'unir nos efforts vu qu'il s'agit d'une compétence partagée. Tout le monde s'est engagé à faire tout en son pouvoir pour veiller à éviter ces problèmes.
Mme Diane Ablonczy: Est-ce que cela signifie que vous associer les provinces au système de détermination du statut de réfugié?
M. Denis Coderre: Non, cela signifie que nous devons nous occuper des revendicateurs du statut de réfugié pendant qu'ils séjournent au Canada. Il y a le système scolaire; il y a aussi certaines questions qu'il nous faut régler en ce qui a trait à ces personnes. En ce sens, les provinces jouent un rôle. Elles ne le font pas l'entremise de la CISR, mais par l'entremise des personnes elles-mêmes.
¿ (0955)
Mme Diane Ablonczy: Quelles mesures précises sont prises pour supprimer cet arriéré et pour empêcher qu'il prenne plus d'ampleur?
M. Denis Coderre: Ce que je vous dirais, avec tout le respect que je vous dois, c'est que, étant donné l'indépendance de la commission, vous devriez demander au nouveau président, Jean-Guy Fleury, de comparaître pour lui poser ce genre de questions. La nouvelle mesure législative et la nouvelle entente sur les tiers pays sûrs auront elle-même des retombées, c'est le président lui-même qui s'occupera de toute la microgestion. Je crois donc que le comité devrait convoquer le président de la commission pour lui poser ces questions.
Mme Diane Ablonczy: Dites-vous que vous n'avez aucun rôle à jouer en ce qui a trait à l'arriéré?
M. Denis Coderre: Notre rôle consiste à nous assurer de créer l'environnement favorable pour ces personnes et à fournir à ces personnes, à ces professionnels, les outils dont ils ont besoin; à veiller à ce que ces personnes dévouées remplissent leur mandat. C'est ce que je fais.
Le vice-président (M. Jerry Pickard): Merci.
Yvon.
[Français]
M. Yvon Charbonneau (Anjou—Rivière-des-Prairies, Lib.): Merci, monsieur le ministre, d'être venu partager ces moments avec nous.
L'accord sur les 200 personnes, pour le nommer rapidement, prévoit-il la pleine réciprocité? En d'autres mots, prévoit-il la possibilité que le Canada leur envoie également 200 personnes par année?
M. Denis Coderre: Oui, ça fonctionne dans les deux sens.
M. Yvon Charbonneau: Quelqu'un de votre groupe pourrait nous dire où cette information se trouve dans le texte. C'est impossible maintenant puisqu'il nous reste trois ou quatre minutes.
Si vous nous aviez accordé un peu plus de temps, nous serions peut-être arrivés à trouver une personne favorable à l'Entente sur les tiers pays sûrs; pour le moment, tous ceux qui ont comparu y sont opposés.
Vous avez cité correctement les représentants de l'organisme des Nations Unies, mais ils ont tenu ces propos en juillet, avant d'avoir vu le texte. Ils ont alors dit être d'accord sur les objectifs de la manoeuvre, mais nous ont présenté un mémoire dans lequel ils exprimaient l'idée suivante: attention, il est exact que nous avons dit cela, mais les sept pages de recommandations et d'amendements qui suivent visent à rendre le tout acceptable.
Acceptable dans quel sens? Certaines personnes, parfois même des fonctionnaires, nous disent qu'au Canada et aux États-Unis, on joue le même jeu et on applique le même ensemble de règles. Or, même si on peut dire officiellement que le Canada et les État-Unis ont signé les mêmes conventions, il est faux de dire que les choses sont identiques dans les deux pays; la jurisprudence et la pratique en font foi.
Plusieurs questions, dont celles de la détention et de la persécution reliée au sexe de la personne, posent de nombreux problèmes. Or, les pratiques américaines sont plus dures que celles du Canada à cet égard. Cela a été dit par tous ceux qui se sont présentés devant nous.
L'actuel projet de règlement interdit à une personne qui est refusée aux États-Unis d'essayer de se faire admettre au Canada. Si cet individu a été refusé pour des questions qui ne correspondent pas à nos valeurs, pourquoi n'aurait-il pas le droit de tenter sa chance au Canada? Pourquoi quelqu'un n'aurait-il pas le droit de choisir le Canada en raison de ce qui le différencie, de façon avantageuse, à mon avis, des États-Unis?
Dans plusieurs domaines, on fait état de préoccupations importantes. Par exemple, les gens qui représentent les employés et qui sont aux frontières, sur la ligne de feu, disent qu'ils ne sont pas équipés pour porter sur place un jugement définitif et sans appel. On parle ici de pratiques passablement différentes de ce qui se fait normalement au Canada.
M. Denis Coderre: Vous trouverez réponse à plusieurs de vos questions dans les documents que je vais déposer.
D'abord, je tiens à préciser que le délégué local du Haut Commissariat pour les réfugiés a déclaré une chose qui ne correspondait en rien à ce que l'organisme lui-même avait dit sur cette situation. Pour signer l'accord de principe, nous sommes allés à Genève, nous avons rencontré les dirigeants, et tout était exact, en tout point et à la lettre.
À mon avis, la copie que vous aurez l'occasion de lire répondra de façon globale à vos questions.
Il existe aussi une autre réalité, et c'est le fait qu'on ne peut plus magasiner. Selon moi, notre rôle est maintenant de nous assurer de faire passer les bons messages; ainsi, les gens qui veulent venir viendront directement au Canada.
Il est clair qu'on dispose d'une série d'outils et que certains éléments de l'entente nous permettent de conserver la compassion à laquelle nous faisions allusion plus tôt. Nous sommes ainsi en mesure de jouer pleinement notre rôle et de répondre aux besoins tout en respectant nos devoirs internationaux.
Enfin, je crois que les documents mis à votre disposition et mes propos d'aujourd'hui vous montrent que nous sommes en mesure d'y arriver. Nous avons les outils nécessaires et la capacité de jouer pleinement notre rôle. En outre, la régularisation du système aura un effet positif, y compris sur nos propres agents.
À (1000)
[Traduction]
Monsieur le président, un simple éclaircissement pour Judy concernant sa question relative au Parlement: c'est en vertu de l'article 101 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés que nous avons adoptée, cela se trouve à l'alinéa e). Nous avons parlé d'un tiers pays sûr de sorte que le Parlement avait une façon de prendre une décision à ce sujet.
Voilà pour votre éclaircissement. Où étiez-vous à ce moment-là.
Mme Judy Wasylycia-Leis Où étiez-vous? Selon... [Note de la rédaction:—Inaudible]...n'importe quel réfugié peut entrer? Non.
Le vice-président (M. Jerry Pickard): Merci beaucoup, Judy.
Merci beaucoup, monsieur le ministre. Les membres du comité se joignent à moi pour vous dire combien ils vous savent gré d'avoir comparu.
Nous allons prendre une pause d'une minute ou deux pendant que le ministre sort et que les hauts fonctionnaires s'installent.
À (1001)
À (1006)
Le vice-président (M. Jerry Pickard): À tous les membres du comité, simplement pour que vous vous rendiez compte de ce sera le processus relatif à l'entente sur les tiers pays sûrs, quelqu'un a demandé ce que le comité peut faire ou dans quel sens vont les recommandations. Je crois comprendre que notre personnel de recherche travaillera pendant le week-end pour rassembler le tout et voir à la traduction. D'ici 16 heures environ, lundi, vous aurez dans votre bureau une série de recommandations que vous pouvez examiner. Choisissez celles que vous voulez, travaillez sur le libellé parce que ces recommandations vous seront soumises. Jeudi matin, nous nous réunirons pour discuter de ces recommandations et préparer notre rapport.
Voilà ce qui est prévu pour l'instant; vous aurez ainsi votre mot à dire d'ici mardi, avant que nous soumettions notre rapport au ministre.
Oui, vous avez la parole Judy.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Combien de temps nous accordera-t-on pour déposer un rapport minoritaire, si nous jugeons que le rapport majoritaire ne reflète pas nos vues?
Le vice-président (M. Jerry Pickard): Il faudra le déposer le plus tôt possible, soit mardi.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Nous ne l'aurons que lundi. Si nous devons déposer notre rapport mardi... Nous avons droit, habituellement, à un délai de 48 heures.
Le vice-président (M. Jerry Pickard): Donnez-moi quelques instants, car la question du délai pose un problème sur le plan logistique.
Judy, je viens de demander des éclaircissements au greffier.
Le comité, lorsqu'il adopte un rapport ou décide d'en proposer l'adoption, peut accorder un délai à ceux qui souhaitent exposer une opinion dissidente. On me dit qu'un délai de 24 heures constitue la norme.
Mme Judy Wasylycia-Leis: D'accord.
Le vice-président (M. Jerry Pickard): John.
M. John Bryden: Monsieur le président, avant d'aller plus loin, est-ce que le comité peut demander aux fonctionnaires du ministère de déposer des documents sur les consultations qui ont mené à l'adoption du libellé actuel du serment d'allégeance?
Les députés n'ont jamais été consultés. Je voudrais, au lieu d'être obligé de présenter une demande d'accès à l'information, qu'on nous renseigne sur les consultations qui ont mené à l'adoption du libellé du serment d'allégeance qui figure dans le projet de loi.
Le vice-président (M. Jerry Pickard): Le comité étant maître de sa destinée, c'est à lui de décider s'il compte ou non présenter une telle demande.
M. John Bryden: D'accord.
Le vice-président (M. Jerry Pickard): Oui.
M. Luke Morton: Monsieur le président, concernant votre calendrier de travail, nous voulons vous remettre le rapport d'expert, mais il est en anglais seulement. Nous avons demandé qu'il soit traduit sans délai pour qu'il puisse être déposé auprès du comité. Je tiens tout simplement à vous le signaler.
Le vice-président (M. Jerry Pickard): Merci beaucoup.
Y a-t-il d'autres points de procédure à régler?
Est-ce que le comité souhaite avoir accès, ainsi que l'a demandé M. Bryden, aux documents d'information portant sur les consultations dont a fait l'objet le concept de tiers pays sûr? C'est ce qu'il a demandé, si je ne m'abuse.
Je vois que vous êtes d'accord.
Très bien.
À (1010)
Mme Rosaline Frith (directrice générale, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration): Monsieur le président, je pense que le député faisait allusion aux consultations qui portaient sur le serment d'allégeance.
Le vice-président (M. Jerry Pickard): Le serment d'allégeance? D'accord.
Avez-vous des renseignements à ce sujet?
Mme Rosaline Frith: Je suis certaine qu'il existe des renseignements sur les consultations qui ont eu lieu à ce sujet, mais je ne vois pas pourquoi c'est si urgent.
Le vice-président (M. Jerry Pickard): Pouvez-vous essayer de trouver ces renseignements et les communiquer au greffier?
Mme Rosaline Frith: Oui.
Le vice-président (M. Jerry Pickard): Je ne veux pas m'éterniser là-dessus. Nous avons présenté notre demande, et nous allons nous en tenir à cela, si vous êtes d'accord.
Judy.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Mais, monsieur le président, vu l'importance de la question, il serait utile qu'on ait accès, sans délai, à un rapport sur les consultations qui ont servi de fondement à l'entente sur les tiers pays sûrs.
Le vice-président (M. Jerry Pickard): Est-ce que votre demande s'adresse aussi au comité?
Steve.
M. Steve Mahoney: On devrait peut-être demander une copie du rapport que le comité a lui-même adopté. Ce serait sans doute un bon point de départ, pour ce qui est des consultations—on pourrait relire le rapport.
Une voix: Nous l'avons déjà examiné à fond.
Mme Judy Wasylycia-Leis: J'accepterais volontiers de discuter des recommandations qu'a formulées l'ancien comité. Nous allons déposer tous les documents pertinents qui ont trait aux préoccupations que soulève l'entente sur les tiers pays sûrs.
M. Steve Mahoney: Il faudrait le faire avant le 5 décembre.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Nous avons beaucoup de temps, puisqu'il n'y a rien de prévu au programme. Il y a aura un autre débat exploratoire aujourd'hui. On pourrait discuter des tiers pays sûrs.
M. Steve Mahoney: Je suis prêt à le faire. Accordez-moi 20 minutes.
Mme Judy Wasylycia-Leis: D'accord, allons-y.
M. Steve Mahoney: Je n'y vois aucun inconvénient.
Le vice-président (M. Jerry Pickard): Nous ne pouvons pas nous prononcer sur la motion parce que nous ne sommes pas assez nombreux. Nous pourrions peut-être entendre ce qu'ont à dire les représentants du ministère.
Je ne sais pas si vous avez une déclaration à faire. Si oui, allez-y.
Mme Rosaline Frith: Mesdames et messieurs, bonjour. Je m'appelle Rosaline Frith. Je suis la directrice générale de l'intégration au ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration. Je suis accompagnée ce matin de Patricia Birkett, le greffier de la citoyenneté, et de Paul Yurack, notre conseiller juridique.
Nous répondrons volontiers à vos questions sur le projet de loi C-18. Nous vous avons déjà expliqué brièvement les différences qui existent entre le projet de loi C-18 et l'ancien projet de loi C-16. Comme vous préférez sans doute poser des questions, je vous cède la parole.
Merci.
Le vice-président (M. Jerry Pickard): Merci beaucoup.
J'espère que tout le monde a assisté aux séances d'information. Des documents ont également été remis à tous les députés.
Lynne.
Mme Lynne Yelich (Blackstrap, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.
Je voudrais parler des dispositions qui traitent des personnes adoptées. Qui va se charger de faire les vérifications? Ces personnes vont se trouver, en fait, à contourner le processus d'immigration, parce qu'elles vont pouvoir—d'après ce que je crois comprendre—obtenir leur citoyenneté si elles font l'objet d'une demande d'adoption ou si elles ont été adoptées. Qui va se charger de faire les vérifications, dans ce cas-ci?
Mme Rosaline Frith: Nous allons essentiellement procéder de la même façon que dans le passé, et collaborer avec les provinces, nos agents à l'étranger, nos agents d'immigration, ainsi de suite. Nous allons utiliser la même marche à suivre pour déterminer si une personne a été adoptée en bonne et due forme, à la différence que nous allons nous servir de ces renseignements pour émettre un statut de citoyen au lieu d'un statut d'immigrant.
Mme Lynne Yelich: Vous allez donc avoir recours aux agents d'immigration du système d'immigration. Il n'y aura pas d'autres...
Mme Rosaline Frith: Il n'est pas question ici de réinventer la roue. Nous allons avoir recours aux services d'agents qui possèdent déjà une certaine expérience en la matière, et nous allons le faire de concert avec les provinces, qui sont responsables de l'adoption.
À (1015)
Mme Lynne Yelich: Donc, ces personnes vont présenter une demande de citoyenneté, sauf qu'elles ne l'obtiendront pas rapidement ou facilement, parce que le processus utilisé sera le même que celui qu'on utilise pour l'immigration, qui compte déjà un arriéré important, n'est-ce pas?
Mme Rosaline Frith: Le processus d'adoption étant assez rapide, il ne devrait pas y avoir de délais supplémentaires. Nous simplifions en fait les formalités, puisque les parents n'ont pas à franchir toutes les étapes du processus d'immigration. Ils devront uniquement passer par le processus d'adoption, c'est-à-dire présenter une demande. Les formalités que devront remplir les provinces et nos agents à l'étranger, ainsi de suite, ne prendront pas plus de temps.
Mme Lynne Yelich: Dans la plupart des provinces—puisque cette question, semble-t-il, est de compétence provinciale—même si le processus d'immigration est efficace, il faut parfois attendre huit ans avant de pouvoir adopter quelqu'un. C'est le cas en Saskatchewan. Je ne crois pas que ce soit une bonne chose pour les enfants qui attendent d'être adoptés.
En fait, c'est ce que je veux savoir: quelles garanties a-t-on mises en place pour éviter que le système ne fasse pas l'objet d'abus. Avez-vous déjà parlé aux agents préposés aux cas? Il y a un pourcentage. Il y a également des adoptions de convenance. Je me demande tout simplement si c'est une question qui vous préoccupe.
En fait, c'est à l'étranger quand j'ai entendu parler de ce projet de loi. On m'a dit qu'il y a souvent des familles qui abusent du système dans le simple but de faire venir une nièce ou un neveu. Elles ne cherchent pas à adopter des enfants. Ce n'est pas qu'elles sont sans enfants ou que les personnes qui se font adopter sont orphelines. Souvent, ces personnes utilisent l'adoption pour entrer au Canada. Par ailleurs, ce n'est pas l'adoption d'enfants mineurs qui pose problème, mais plutôt celle de personnes adultes. J'aimerais tout simplement savoir si vous avez quelque chose à dire à ce sujet.
Mme Rosaline Frith: À notre avis, le système que nous avons fonctionne très bien. Nous faisons tout pour nous assurer que les adoptions se font selon les règles, que ce sont des adoptions plénières, non pas des adoptions qui se font pour d'autres raisons. Dans le cas des personnes de 18 ans et plus qui sont adoptées, nous allons examiner de près les renseignements recueillis afin de nous assurer que le lien d'affiliation existait avant que l'enfant ne devienne adulte et qu'il existe toujours. Par conséquent, les garanties nécessaires sont déjà en place et le système ne devrait pas faire l'objet de nouveaux abus.
Il existe, en vertu de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, des mesures similaires qui concernent l'adoption, à des fins d'immigration, de personnes âgées de 18 ans et plus. Nous allons donc utiliser les mêmes ressources de façon générale.
Le vice-président (M. Jerry Pickard): Anita?
Mme Anita Neville (Winnipeg-Centre-Sud, Lib.): Je n'ai pas de questions.
Le vice-président (M. Jerry Pickard): Andrew, c'est à vous. Ce sera ensuite au tour d'Yvon.
M. Andrew Telegdi (Kitchener—Waterloo, Lib.): Concernant l'entente sur les tiers pays sûrs, si vous vous souvenez bien, le Canada avait accepté des milliers de réfugiés qui venaient du Chili. S'ils avaient demandé asile aux États-Unis, ils auraient été renvoyés au Chili, où régnait Pinochet. Bien entendu, le Chili, à l'époque, était la terre des disparus. Des personnes disparaissaient, et bon nombre d'entre elles étaient retrouvées mortes. Je me demande comment ces réfugiés auraient été traités en vertu de l'entente sur les tiers pays sûrs. Je tiens à faire ce commentaire aux fins du compte rendu parce que nous nous trouvons dans une situation similaire avec les réfugiés de l'Amérique du Sud qui utilisent les États-Unis, ou qui se sont servis des États-Unis, comme terre de transit pour entrer au Canada.
J'aimerais vous poser des questions au sujet des articles 16, 17, 18 et 56 de la Loi concernant la citoyenneté canadienne.
L'article 16 prévoit des améliorations du fait qu'il permet d'intenter une action devant la Cour fédérale et, si l'appel est autorisé, devant la Cour suprême. On tient toujours compte, dans ce cas-là, de la prépondérance des probabilités, une question qui préoccupe beaucoup de personnes. Toutefois, l'article 56 dispose que la nouvelle loi ne s'applique pas aux personnes déjà dans le système. Je trouve cela fort inquiétant. Pourquoi adopter une nouvelle loi, si nous reconnaissons que l'ancienne est mauvaise et que nous excluons ces personnes du nouveau régime? Voilà ma question.
À (1020)
Le vice-président (M. Jerry Pickard): Deux questions ont été posées. Je pense que vous aurez le temps d'y répondre.
Bruce, voulez-vous commencer?
M. Bruce Scoffield (directeur, Élaboration des politiques et coordination internationale, Direction générale des réfugiés, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration): Merci, monsieur le président.
Dans les documents qu'a mentionnés le ministre et qui seront déposés auprès du comité, vous allez trouver une étude réalisée par le professeur David Martin, de l'Université de la Virginie, qui porte sur diverses questions touchant le système américain de détermination du statut de réfugié.
On a laissé entendre au comité que, dans le passé, le système américain avait parfois été influencé par la politique étrangère ou par des considérations d'ordre politique. Le député a fait allusion à la situation qui existait au Chili dans les années 70.
Je tiens à signaler au comité qu'à partir de 1990, les États-Unis ont entrepris plusieurs réformes législatives qui ont eu pour effet de modifier en profondeur la nature du système américain de détermination du statut de réfugié, de sorte qu'aujourd'hui ce système n'est plus assujetti à la politique étrangère ou aux considérations d'ordre politique. Les décideurs sont indépendants, qu'il s'agisse de fonctionnaires—les responsables des demandes d'asile—qui prennent des décisions au premier palier, ou de juges qui président les auditions en matière d'immigration. Ces fonctionnaires et ces juges ont accès à toute une série de renseignements recueillis de façon indépendante par un bureau central d'information calqué sur le centre de documentation de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié.
Donc, vous allez trouver, dans les documents déposés auprès du comité, une réponse satisfaisante à la préoccupation que vous avez soulevée.
Mme Rosaline Frith: Pour ce qui est de la deuxième question, qui concerne l'article 17 et le processus de délivrance des certificats, le projet de loi est très clair.
M. Andrew Telegdi: Je n'ai pas posé de question au sujet de cet article.
Mme Rosaline Frith: Est-ce que j'ai mal saisi la question?
M. Andrew Telegdi: J'ai parlé de l'article 16, dont certains aspects sont intéressants. J'ai ensuite parlé de l'article 56, qui a pour effet d'exclure du nouveau régime toute personne qui est déjà dans le système, et cela vise aussi bien la Couronne que la personne dont la demande de citoyenneté pose problème.
Mme Rosaline Frith: Vous faisiez allusion à l'article 56—et à la façon dont nous allons assurer la transition—entre les cas qui sont actuellement dans le système et les nouveaux cas qui seront examinés en vertu de la nouvelle loi, quand celle-ci entrera en vigueur.
Nous avons mis en place un système qui permet aux instances déjà en cours de se poursuivre sous le régime de la loi actuelle, étant donné que les affaires auront déjà été entendues, en partie ou en totalité, par les tribunaux. Les nouvelles instances, elles, seraient entreprises sous le régime de la nouvelle loi.
Le vice-président (M. Jerry Pickard): Madeleine.
[Français]
Mme Madeleine Dalphond-Guiral: Merci, monsieur le président.
Il y a deux points sur lesquels j'aimerais avoir votre opinion. Pour ce qui est de la première question, le ministre était sûr que je la poserais. Il y a répondu d'une certaine façon, mais je voudrais des précisions. Cela concerne la volonté, dans le projet de loi C-18, d'octroyer la citoyenneté canadienne aux enfants adoptés, ce qui est en soi une mesure qui me réjouit. Mais là où ça pose un peu un problème, c'est que c'est le Code civil du Québec qui régit et qui confirme les adoptions internationales au Québec. Le ministre dit qu'il y a eu des discussions au niveau des fonctionnaires. J'aimerais savoir avec quels fonctionnaires on a eu ces discussions, parce qu'il m'apparaît important qu'il y ait un arrimage bien réel entre le projet de loi C-18, qu'on va adopter un jour ou l'autre, et le Code civil du Québec. Il y a déjà suffisamment de motifs de discorde, et je souhaite vraiment qu'on puisse en arriver à un arrimage intelligent.
D'après vous, les échanges qu'il y aurait eu entre les fonctionnaires du Québec et les fonctionnaires du gouvernement fédéral sont-ils suffisants pour garantir cet arrimage?
Ensuite, je vous poserai ma deuxième question.
À (1025)
Mme Rosaline Frith: Nous avons eu des discussions avec les groupes existants qui traitent d'adoption dans l'ensemble du pays, y inclus au Québec. Ce sont les gens qui sont responsables dans chaque province de toutes les lois et de tous les processus relatifs à l'adoption.
Dans le cas du Québec, parce qu'il y a une différence attribuable au Code civil, nous en sommes arrivés à une entente qui dit que la loi est la loi: la loi s'applique à tout le monde. Mais pour le cas spécial des enfants qui n'auront pas été formellement adoptés avant leur arrivée au Canada et dont l'adoption n'aura pas été approuvée par la loi civile au Québec, il faut mettre en place un arrangement administratif, cela dans le cadre d'une entente entre le gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec. Le but de cet arrangement serait d'éviter que les parents québécois aient plus de problèmes et plus de procédures que les parents ailleurs au Canada. C'est de cette façon que nous avons procédé, et je pense que jusqu'au moment où on a procédé ainsi la dernière fois, on a eu une entente qui fonctionnait assez bien. C'est une entente en vertu de laquelle ces parents ont la chance de faire le processus d'une façon différente, mais d'une façon aussi efficace que d'autres personnes. Les enfants recevront leur citoyenneté aussitôt qu'ils auront été formellement adoptés au Québec.
[Traduction]
Le vice-président (M. Jerry Pickard): Madeleine, excusez-moi, je voudrais vous interrompre quelques instants.
Mesdames et messieurs, comme vous le constatez, plusieurs personnes viennent d'arriver. Nous accueillons ce matin des députés et des hauts fonctionnaires de l'Ukraine.
Nous sommes heureux de vous accueillir. Bienvenue.
Madeleine, je vous ai interrompue et je m'en excuse.
[Français]
Mme Madeleine Dalphond-Guiral: C'était pour une bonne raison, monsieur le président. Je souhaite la bienvenue à ces parlementaires.
Rosaline, vous avez parlé d'une entente entre le Québec et... Est-ce que cette entente pourrait être déposée au comité?
Mme Rosaline Frith: Je regrette, mais il s'agissait d'un document de discussion entre les deux gouvernements, et on a convenu de ne pas l'officialiser avant qu'il y ait une loi acceptable au Parlement.
Mme Madeleine Dalphond-Guiral: Alors, ce n'est pas vraiment une entente; ce sont des discussions étoffées.
Mme Rosaline Frith: Oui, absolument.
Mme Madeleine Dalphond-Guiral: Très bien. Comme vous aviez utilisé le mot «entente», je pensais qu'il y avait quelque chose.
Mme Rosaline Frith: Je m'excuse.
Mme Madeleine Dalphond-Guiral: D'accord. Nos autres préoccupations à l'endroit de C-18 portent sur les articles qui parlent de la révocation de la citoyenneté. Dans le libellé actuel du projet de loi, il y a des choses qui nous inquiètent grandement, notamment concernant la possibilité, dans certains cas, de retirer la citoyenneté à quelqu'un, sans que l'épreuve soit connue, sans que la personne concernée sache même en vertu de quelle preuve on l'accuse et sans que cette personne ait un droit d'appel.
Je pense que tous les gouvernements du Canada qui se sont succédé étaient très fiers de dire, au niveau international, que le système juridique canadien était pratiquement un système modèle, mais il me semble qu'il y a là un grave problème. À partir du moment où un juge peut agir très rapidement et recevoir en guise de preuve ce qui ne serait même pas admissible devant nos tribunaux réguliers, je m'inquiète. Je me dis que même s'il n'y avait qu'une seule personne lésée par cette loi-là, ce serait inacceptable. Je peux reconnaître à M. le juge ou à Mme la juge un jugement extraordinaire, mais vous comprendrez que jamais je ne me ferais couper la main gauche--je suis gauchère--pour ça. Alors, je m'interroge. Qu'est-ce qui peut bien justifier le libellé actuel? Je vous annonce d'entrée de jeu qu'il y aura très certainement des amendements qui viendront de mon parti. Ça, c'est sûr.
À (1030)
Mme Rosaline Frith: Vous avez bel et bien raison: il y a différents processus de révocation. Il y a un processus pour les gens--j'allais dire « les gens normaux »--, pour les personnes dont le cas est tel qu'il n'y a aucune raison de protéger de l'information. Il y a d'autres cas où on ne peut pas procéder sans qu'il y ait protection de l'information. Pour ces cas-là, nous avons proposé un système ayant beaucoup de points, ce qui fera que la personne pourra savoir pourquoi il y a un cas contre elle. Oui, l'information est protégée, mais ce n'est pas noir ou blanc. C'est fait de telle façon que deux ministres doivent signer le certificat dès le début pour signaler qu'on pense devoir protéger l'information.
À la deuxième étape, il y a un juge qui examine de près ce que les ministres ont soulevé devant le juge et qui prend une autre décision à savoir si l'information doit bel et bien être protégée. C'est seulement à ce moment-là qu'on procède à une troisième étape, et là, le juge s'assure qu'il y a un document sommaire indiquant pourquoi la personne est devant la cour. La personne reçoit de l'information. Non seulement la personne reçoit-elle de l'information, mais le juge peut aussi avoir une audience avec elle. Donc, on s'assure que la personne ait la chance de participer au processus.
Oui, c'est vrai qu'il faut protéger de l'information, mais dans certains cas, on n'a pas de choix. Il y a des raisons dans les situations où on traitera du cas d'un terroriste ou de quelqu'un qui fait partie du crime organisé. Dans pareil cas, si on permet que l'information soit publique, il peut y avoir des conséquences pour les témoins. Alors, on ne peut pas agir ainsi, entre autres pour des raisons de sécurité publique.
Nous ne pensons pas que nous aurons beaucoup de cas semblables; ils seront très, très rares, mais dans ces cas-là, ce sera la seule façon de procéder devant les cours.
[Traduction]
Le vice-président (M. Jerry Pickard): Merci, Rosaline.
Yvon.
[Français]
M. Yvon Charbonneau: Madame Frith, je vois que vous êtes la directrice générale de l'intégration. Je voudrais donc vous entendre parler d'intégration.
On peut discuter des règles du jeu quant à l'octroi de la citoyenneté, mais on sait bien que dans le processus auquel est soumis un nouvel arrivant dans un pays, il y a bien d'autres choses que des formalités juridiques. Il faut réunir beaucoup d'autres conditions pour que la greffe soit un succès.
Il y a quelques semaines, dans mon comté, j'ai organisé une table ronde réunissant des organismes qui travaillent quotidiennement en vue d'assurer une meilleure intégration des nouveaux arrivants. Il y avait 65 personnes et elles m'ont dit que c'était la première année qui était déterminante. Bien sûr, cela peut être plus long, mais la première année est tout à fait déterminante. S'il n'y a pas véritablement de mesures positives d'intégration de mises en place dès la première année, il y a un grand risque d'échec.
Elles ont fait ressortir en particulier tout le stress que connaissent les nouveaux arrivants: le stress personnel, le stress au niveau du couple et de la famille, dans les relations entre les parents et les enfants. Souvent, ce sont des aspects auxquels on ne s'attarde pas beaucoup. Ils ont aussi des problèmes d'accès à l'emploi et au logement, et ils doivent se familiariser avec leurs droits en matière de sécurité sociale, d'éducation et de santé. Il y a beaucoup à apprendre et cela doit se faire rapidement. Ces gens que j'ai consultés m'ont demandé d'essayer de faire savoir aux autorités qu'ils étaient des organismes bénévoles ayant peu de moyens. Ils m'ont dit qu'ils sentaient que les services gouvernementaux avaient peu de moyens pour assurer l'intégration, mais qu'il y avait de grands besoins dans ce domaine.
Comme vous êtes directrice générale de l'intégration, je voudrais que vous me disiez en quoi cette loi, si c'est de cette loi qu'il s'agit, va nous aider à assurer une meilleure intégration, ou si c'est un dispositif fédéral-provincial qui est cause.
À (1035)
Mme Rosaline Frith: C'est une question assez complexe et difficile, mais je vais essayer d'y répondre quand même.
Oui, je suis responsable de l'intégration dans tout le Canada. Le gouvernement fédéral, en partenariat avec les gouvernements provinciaux et les organismes à but non lucratif du pays, essaie d'aider les personnes dès leur arrivée au Canada, et même avant leur arrivée au Canada, pour qu'elles comprennent toutes les difficultés qui existent dans les domaines du logement, de l'emploi et de la langue. On fait beaucoup de travail en ce sens.
Vous m'avez demandé de quelle façon la Loi sur la citoyenneté avait un lien avec l'intégration des futurs citoyens à leur arrivée au pays.
C'est évident qu'il y a un lien. La loi est telle qu'on invite les personnes qui viennent au Canada comme résidents permanents et les réfugiés à devenir citoyens du Canada. C'est extrêmement positif. Cela veut dire que quelqu'un qui arrive au Canada a, dès le début, les connaissances nécessaires pour savoir que si on rencontre les critères de la citoyenneté, qui sont des critères objectifs, on va avoir cette citoyenneté. Il n'y a alors aucun obstacle à la citoyenneté.
Il est très clairement dit que la connaissance de la langue est importante pour devenir un Canadien, mais il est encore plus important, afin de s'intégrer au Canada, de trouver du travail au Canada. Pour cela, il faut parler une de nos langues officielles. Donc, c'est très clair.
On dit dans la loi qu'il faut avoir un certain degré de connaissance du Canada. Cela est aussi nécessaire pour que ces personnes puissent s'intégrer à la société canadienne. Il faut respecter les lois du Canada, et on dit aux nouveaux arrivants, dès leur arrivée, qu'on ne tolère pas l'abus des membres de la famille, qu'on respecte les femmes, que les hommes et les femmes ont des droits égaux. On leur parle aussi de la dualité linguistique. La Loi sur la citoyenneté prévoit une façon de faire en sorte que toutes les personnes se sentent les bienvenues dès le début et de réduire jusqu'à un certain point leur stress et leur angoisse à leur arrivée au Canada.
À (1040)
M. Yvon Charbonneau: Quels sont le moyens...
[Traduction]
Le vice-président (M. Jerry Pickard): Yvon, puis-je vous interrompre un instant?
Un autre comité doit siéger dans cette pièce à 11 heures. Il nous reste une vingtaine de minutes. Je suppose qu'un échange à quatre serait possible. Presque tous les membres, ou la plupart d'entre eux, auront droit à un autre tour de table.
Yvon, allez-y.
[Français]
M. Yvon Charbonneau: Je suis d'accord sur tout ce que vous dites, mais je voudrais savoir si votre ministère a l'intention de déployer davantage de moyens pour assurer l'intégration, la connaissance de la langue, l'emploi et tous les autres facteurs de réussite dans l'obtention de la citoyenneté. Ou est-ce plutôt par le biais des accords entre le fédéral et les provinces qu'on arrive à cela?
Quelle est la responsabilité des deux paliers de gouvernement? Quelles sont vos relations avec les organismes sans but lucratif? Avez-vous des relations directes avec eux, ou si cela se fait par l'entremise des provinces? Ou est-ce qu'on parle des deux?
Mme Rosaline Frith: C'est les deux. Tout dépend de la province. Nous avons différentes ententes avec certaines provinces du Canada. Dans certains cas, les moyens sont alloués à la province, et celle-ci est responsable de l'intégration des nouveaux arrivants. Dans d'autres cas, c'est le ministère lui-même qui travaille de près avec les organismes à but non lucratif.
M. Yvon Charbonneau: Monsieur le président, est-ce que Mme Frith pourrait nous faire parvenir un tableau ou un résumé de la situation province par province? Elle pourrait nous dire s'il y a un accord fédéral-provincial ou non avec chacune des provinces et nous indiquer les montants qui sont en cause. Cela nous serait utile.
[Traduction]
Le vice-président (M. Jerry Pickard): Il faudra voir si le ministère dispose de renseignements de ce genre.
Rosaline, est-ce que ces renseignements existent, ou est-ce que vous pouvez les fournir au comité?
Mme Rosaline Frith: Nous avons des documents généraux qui portent sur l'intégration, les ententes conclues, les sommes dépensées à l'échelle nationale. Cette information existe, et elle est diffusée au public. Nous pouvons vous la communiquer.
Le vice-président (M. Jerry Pickard): C'est excellent. Merci. Cela permettrait de répondre à la question d'Yvon.
Diane.
Mme Diane Ablonczy: J'aimerais poser des questions au sujet d'un certain nombre de dispositions. J'espère avoir le temps de le faire.
La première porte sur le paragraphe 21(1), qui précise que le ministre peut interdire l'attribution de la citoyenneté «s'il est convaincu qu'il existe des motifs raisonnables de croire qu'une personne a fait preuve d'un grave mépris à l'égard des principes et des valeurs sur lesquels se fonde une société libre et démocratique». Cette disposition a une portée très vaste. En tant qu'avocate et démocrate, je trouve cette clause passe-partout pour le moins inquiétante. Pouvez-vous nous dire ce que vous entendez par «grave mépris à l'égard des principes et des valeurs»?
Mme Rosaline Frith: Oui, je peux très bien répondre à cela.
Pour commencer, je dois dire que nous tentons, par ce projet de loi, de clarifier la définition dont les juges pourront débattre. Nous n'avons pas prévu de définition englobante précise énumérant tous les cas auxquels nous pourrions être confrontés.
Nous avons plutôt établi le principe de la preuve «d'un grave mépris à l'égard des principes et des valeurs sur lesquels se fonde une société libre et démocratique». Ce faisant, nous avons établi la base d'une norme dont il faudra débattre. Celle-ci découle de la décision rendue dans l'affaire Oakes. Le jugement prononcé s'appuyait sur «les valeurs et les principes qui sont essentiels à une société libre et démocratique [... dont ] le respect pour la dignité inhérente de la personne, l'engagement envers la justice sociale et l'égalité, l'acceptation d'une vaste gamme de convictions, le respect de l'identité culturelle et celle des groupes et la confiance dans les institutions sociales et politiques qui améliorent la participation des personnes et des groupes à la société».
Ceci se veut un point de départ. Cela évitera qu'on fasse un usage abusif de ce paragraphe du projet de loi et qu'on parle vraiment de grave mépris à l'égard de nos valeurs.
À (1045)
Mme Diane Ablonczy: Y aura-t-il plus de détails sur ce paragraphe dans le règlement?
Mme Rosaline Frith: Non, il n'y en aura pas.
Mme Diane Ablonczy: Le règlement sera-t-il soumis au comité?
Mme Rosaline Frith: La description du règlement en général peut et sera accessible au fur et à mesure que nous progresserons. Mais je ne crois pas...
Mme Patricia Birkett (greffière, Citoyenneté, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration): Je crois important de remarquer que le projet de loi n'octroie aucun pouvoir de prendre règlement quant à ce paragraphe précis, qui porte sur les refus pour grave mépris. Toute l'explication se trouve là, dans le projet de loi. Il n'y aura rien dans le règlement qui ajoutera à cette définition ou la modifiera, tout est ici.
Mme Diane Ablonczy: D'accord, donc le renvoi à l'affaire Oakes est l'élément le plus définitif jusqu'ici?
Mme Rosaline Frith: C'est juste.
Mme Diane Ablonczy: Merci pour votre réponse.
En ce qui concerne le paragraphe 18(5), l'article 16 dicte que le ministre peut refuser ou révoquer la citoyenneté dans certaines conditions, notamment s'il découvre que la personne a fait de fausses déclarations importantes ou qu'elle s'est déjà livrée à des activités criminelles non déclarées, mais en vertu du paragraphe 18(5), le ministre ne dispose que de cinq ans après l'octroi de la citoyenneté pour exercer ce pouvoir. Je me demande pourquoi on a fixé cette période à cinq ans. Qu'arrive-t-il si de nouveaux renseignements sur la personne ne sont mis au jour que six ans après qu'elle a reçu la citoyenneté?
Mme Rosaline Frith: Je crois que lorsque nous avons étudié la question et tenté d'en arriver à des limites raisonnables quant au délai d'acquisition de renseignements et à leur clarté, nous avons décidé que si a priori, une personne n'avait pas été autorisée à recevoir la citoyenneté en raison d'antécédents criminels, qu'elle avait fait de fausses déclarations au cours des cinq dernières années, que des documents étaient accessibles à son sujet et qu'il y avait très peu d'autres facteurs à prendre en considération, il était parfaitement raisonnable d'annuler la citoyenneté. Elle n'aurait jamais dû la recevoir au départ. Dans une telle éventualité, la personne devrait attendre et pourrait présenter une nouvelle demande ultérieurement comme si elle demeurait résidente permanente du Canada.
Si plus de cinq ans s'étaient écoulés et d'autres facteurs entraient en jeu, nous avons jugé qu'il serait plus logique de suivre le processus de révocation que le simple processus d'annulation. Dans le cadre de ce projet de loi, le processus de révocation est complètement judiciaire et donnerait lieu à une présentation plus complexe de l'affaire, qui serait entendu par un juge. C'est pourquoi nous avons restreint cette période à cinq ans.
Mme Diane Ablonczy: Nous dites-vous qu'une personne pourrait toujours voir sa citoyenneté révoquée, mais simplement pas par le ministre?
Mme Rosaline Frith: Voilà.
À (1050)
Mme. Diane Ablonczy: Ai-je encore un peu de temps?
Le vice-président (M. Jerry Pickard): Je vais essayer de revenir à vous. Il y a Andrew qui a des questions, puis je vais faire de mon mieux pour revenir à vous si nous le pouvons, d'accord?
Andrew.
M. Andrew Telegdi: Le grand problème dans ce processus, c'est que si le gouvernement allègue qu'une personne a obtenu sa citoyenneté de façon frauduleuse, la personne dont la citoyenneté est en jeu n'a pas la chance de se défendre devant un tribunal.
Imaginez un instant que le gouvernement puisse affirmer que vous avez fait ceci ou cela, vous accuser de crime, mais qu'il ne vous octroyait pas le droit de vous défendre devant un tribunal. C'est vraiment ma critique de base de l'ensemble des articles 17 et 18.
L'article 7 de la Charte des droits et libertés, qui s'inscrit dans la partie intitulée Garanties juridiques, prescrit que:
Chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne; il ne peut être porté atteinte à ce droit qu'en conformité avec les principes de justice fondamentale. |
Il y a six millions de Canadiens qui ne sont pas nés au pays, donc pour nous, la citoyenneté fait grandement partie de la sécurité de la personne.
Monsieur le président, à un moment donné, j'aimerais bien voir toutes les consultations que le ministère a présenté à ce comité, parce que notre comité a déjà entendu des témoignages sur cette question auparavant. Tous les groupes qui ont comparu devant le comité de la Chambre des communes—et ils se comptent par dizaines—demandaient la mise en place d'un processus judiciaire en bonne et due forme et voulaient que ce soient les tribunaux qui prennent ce genre de décisions et non des politiciens et encore moins des bureaucrates. Or, c'est essentiellement ce qui se passe lorsqu'on dit «le ministre». Le ministre suit les recommandations de la bureaucratie. Dieu sait comment on peut vérifier ces preuves. Comment peut-on vérifier cette accusation? On ne le peut pas.
L'autre problème se trouve dans l'article 17. C'est un autre article tout nouveau. On n'y parle d'aucune mesure d'appel à un processus très radical. On peut présenter des éléments de preuve sous le sceau du secrets, les règles de présentation de la preuve ne s'appliquent alors pas. Cela n'a aucun sens. Non seulement la personne dont la citoyenneté est en jeu ne peut interjeter appel, mais la Couronne ne le peut pas non plus.
Pensez un instant à l'affaire de Maurice «Mom» Boucher. Si la Couronne n'avait pu interjeter appel de la décision, M. Boucher serait libre. Or, la Couronne a interjeté appel, et M. Boucher est maintenant derrière les barreaux. Je pense que cela nous montre combien il est ridicule de ne prévoir aucune mesure d'appel dans une situation. Le fait d'affirmer le contraire, d'affirmer que notre système est efficace et qu'il fonctionne, relève de la fraude. Nous ne nous sommes débarrassés de personne. Bien que nous ayons dépensé des dizaines de millions de dollars dans un nombre très limité d'affaires, personne n'a été renvoyé du pays et déporté, en bout de ligne.
D'après moi, le problème c'est que nous ne respectons pas l'article 7 de la Charte. Si nous le respections, je crois que toutes les affaires devant les tribunaux seraient réglées, de même que les observations présentées à cet égard. Si nous avions un meilleur processus judiciaire, un processus comprenant des mesures d'appel, nous aurions probablement déjà réglé toutes les affaires actuellement devant les tribunaux.
Mme Rosaline Frith: Je pense que nous parlons de l'article 17, du certificat de sécurité en particulier, et du fait qu'il n'y ait aucune mesure d'appel dans ce cas.
M. Andrew Telegdi: Dans l'article 18, il n'y a aucune mesure d'appel. Le processus est mené par les bureaucrates et le ministre.
Mme Rosaline Frith: Il y a une mesure d'appel dans l'article 18. Un contrôle judiciaire.
M. Andrew Telegdi: Un contrôle judiciaire n'est pas un appel. Ne trompez pas le comité.
Mme Rosaline Frith: Je suis désolée.
Le vice-président (M. Jerry Pickard): [Note de la rédaction: Inaudible]... préciser ce que nous voulons dire. Allez-y.
Mme Rosaline Frith: Paul, pourriez-vous répondre à cette question s'il vous plaît.
M. Paul Yurack (conseiller juridique, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration) Vous avez soulevé un certain nombre de points, que je voudrais replacer dans le contexte de la citoyenneté.
Jusqu'à maintenant, les droits et libertés prescrits par l'article 7 ne s'appliquaient pas à la citoyenneté. C'est une pure création de loi, qui doit être conforme à la Charte. Ainsi, lorsque quelqu'un acquiert sa citoyenneté légalement, il a le droit de la conserver légalement. Cependant, si quelqu'un a acquis sa citoyenneté au moyen de fraude, de fausses déclarations ou qu'il a volontairement dissimulé des renseignements, le gouvernement a le droit absolu et le devoir de la lui retirer, conformément à la loi.
Il y a un processus de révocation, un processus de délivrance de certificat et un processus d'annulation. Tout dépend des circonstances de chaque cas. Nous avons examiné la question et avons déterminé ce qui était le plus approprié.
À (1055)
M. Andrew Telegdi: Monsieur le président, c'est de là que vient toute la confusion qui règne au ministère.
Si un procureur m'accuse de fraude, je dois aller en cour et contester cette allégation de fraude. Si je perds en première instance, j'ai le droit d'interjeter appel. Avec autorisation, je peux porter cet appel jusqu'en Cour suprême.
Ce que vous alléguez, c'est que la personne a commis une fraude pour obtenir sa citoyenneté. Eh bien, sachez que nous nous fondons sur la présomption d'innocence dans ce pays. Or, dans votre processus, lorsque vous dites qu'on peut l'octroyer et la retirer, mais que l'accusé n'a pas le droit de jouir du cours normal de la loi, vous sous-entendez qu'il n'y a pas présomption d'innocence.
M. Paul Yurack: Non.
Mme Rosaline Frith: Il est très clair qu'il y a présomption d'innocence. Il faut suivre un processus pour déterminer s'il y a eu fraude ou non. En première instance, selon les règles de révocation normales prescrites à l'article 16, la personne peut interjeter appel et se rendre jusqu'en Cour suprême.
M. Andrew Telegdi: Mais pas en vertu des articles 17 et 18.
Le vice-président (M. Jerry Pickard): Malheureusement, il y a un comité qui attend après nous. Je m'excuse auprès de tous les membres du comité qui n'ont pas reçu des réponses à toutes leurs questions. J'espère que vous comprenez qu'il y ait une minute ou deux pour nettoyer la salle avant que l'autre comité ne commence, dans deux minutes.
Madeleine, vous pouvez poser une dernière question, très rapidement.
[Français]
Mme Madeleine Dalphond-Guiral: J'aimerais avoir votre opinion sur deux dispositions: le paragraphe 42(2) et le paragraphe 44(1). Dans ces deux dispositions, on fait allusion à la signature du ministre et on prend soin de préciser qu'on n'a pas besoin de vérifier l'authenticité de la signature. Je trouve ça assez étonnant. Je voudrais comprendre la logique de ça et je vous souhaite bonne chance si vous voulez arriver à me convaincre. Est-ce assez court, monsieur le président?
[Traduction]
Vous pouvez y penser et répondre ultérieurement au comité.
M. Paul Yurack: Nous allons vous répondre plus tard.
Mme Madeleine Dalphond-Guiral: D'accord, je suis certaine que vous allez le faire.
Le vice-président (M. Jerry Pickard): N'oubliez pas que vous allez recevoir de l'information lundi avant 16 heures, dès que nous l'aurons rassemblée. Soyez prêts à discuter de vos préoccupations à cet égard mardi matin.
Mme Madeleine Dalphond-Guiral: Les opinions dissidentes doivent toujours être exprimées 24 heures plus tard?
Le vice-président (M. Jerry Pickard): Oui, vous avez 24 heures.
Je vous remercie tous beaucoup, j'apprécie votre collaboration. Bonne journée.
La séance est levée.