FOPO Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Comité permanent des pêches et des océans
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 8 mai 2003
¾ | 0810 |
Le président (M. Tom Wappel (Scarborough-Sud-Ouest, Lib.)) |
M. Arthur Bull (coordonnateur, «Bay of Fundy Inshore Fishermen's Association») |
¾ | 0815 |
Le président |
Mme Patricia Rhynold (gérante, «Guysborough County Inshore Fishermen's Association») |
Le président |
Mme Patricia Rhynold |
¾ | 0820 |
¾ | 0825 |
Le président |
M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD) |
M. Arthur Bull |
M. Peter Stoffer |
Mme Patricia Rhynold |
M. Peter Stoffer |
¾ | 0830 |
M. Arthur Bull |
Mme Patricia Rhynold |
M. Peter Stoffer |
Le président |
M. Reed Elley (Nanaimo—Cowichan, Alliance canadienne) |
M. Arthur Bull |
¾ | 0835 |
M. Reed Elley |
M. Arthur Bull |
M. Reed Elley |
M. Arthur Bull |
M. Reed Elley |
Mme Patricia Rhynold |
Le président |
M. Jean-Yves Roy (Matapédia—Matane, BQ) |
¾ | 0840 |
Mme Patricia Rhynold |
M. Arthur Bull |
¾ | 0845 |
Le président |
M. Bob Wood (Nipissing, Lib.) |
Mme Patricia Rhynold |
M. Bob Wood |
Mme Patricia Rhynold |
M. Bob Wood |
Mme Patricia Rhynold |
M. Bob Wood |
Mme Patricia Rhynold |
M. Bob Wood |
M. Arthur Bull |
¾ | 0850 |
M. Bob Wood |
M. Arthur Bull |
M. Bob Wood |
M. Arthur Bull |
M. Bob Wood |
Le président |
¾ | 0855 |
M. Arthur Bull |
Le président |
M. Arthur Bull |
Le président |
¿ | 0900 |
M. Arthur Bull |
Le président |
M. Scott Milsom (agent de communications, «Coastal Communities Network») |
¿ | 0905 |
Le président |
M. Scott Milsom |
Le président |
M. Scott Milsom |
Le président |
M. Scott Milsom |
Le président |
¿ | 0910 |
M. Scott Milsom |
Le président |
M. Ashton Spinney (président, Comité consultatif du homard, Zone de pêche du homard 34) |
¿ | 0915 |
¿ | 0920 |
Le président |
M. Reed Elley |
¿ | 0925 |
M. Scott Milsom |
Le président |
M. Scott Milsom |
M. Ashton Spinney |
M. Reed Elley |
M. Ashton Spinney |
¿ | 0930 |
Le président |
M. Ashton Spinney |
M. Jean-Yves Roy |
M. Scott Milsom |
¿ | 0935 |
M. Ashton Spinney |
¿ | 0940 |
Le président |
M. Scott Milsom |
Le président |
M. Peter Stoffer |
M. Ashton Spinney |
M. Peter Stoffer |
¿ | 0945 |
Le président |
M. Ashton Spinney |
¿ | 0950 |
Le président |
M. Scott Milsom |
Le président |
M. Scott Milsom |
Le président |
M. Mark Dittrick (président de la conservation, Chapitre du Canada atlantique, Club Sierra du Canada) |
¿ | 0955 |
À | 1000 |
Le président |
À | 1005 |
M. Jean-Yves Roy |
Le président |
M. Peter Stoffer |
M. Mark Dittrick |
M. Peter Stoffer |
M. Mark Dittrick |
Le président |
M. Mark Dittrick |
Le président |
M. Mark Dittrick |
À | 1010 |
Le président |
À | 1015 |
Le président |
À | 1020 |
Mme Debbie MacKenzie |
À | 1025 |
Le président |
Mme Debbie MacKenzie |
Le président |
M. Bob Wood |
Le président |
M. Bob Wood |
Le président |
M. Peter Stoffer |
Mme Debbie MacKenzie |
Le président |
M. Peter Stoffer |
Mme Debbie MacKenzie |
À | 1030 |
M. Peter Stoffer |
Mme Debbie MacKenzie |
M. Peter Stoffer |
Le président |
Mme Debbie MacKenzie |
Le président |
M. Reed Elley |
Mme Debbie MacKenzie |
M. Reed Elley |
Mme Debbie MacKenzie |
M. Reed Elley |
Mme Debbie MacKenzie |
M. Reed Elley |
Mme Debbie MacKenzie |
M. Reed Elley |
Mme Debbie MacKenzie |
M. Reed Elley |
Mme Debbie MacKenzie |
M. Reed Elley |
Mme Debbie MacKenzie |
M. Reed Elley |
Mme Debbie MacKenzie |
M. Reed Elley |
Mme Debbie MacKenzie |
M. Jean-Yves Roy |
À | 1035 |
Mme Debbie MacKenzie |
M. Jean-Yves Roy |
Mme Debbie MacKenzie |
Le président |
Mme Debbie MacKenzie |
The Chair |
Mme Debbie MacKenzie |
Le président |
M. Peter Stoffer |
Le président |
Mme Debbie MacKenzie |
Le président |
À | 1040 |
M. Carol Mahtab (secrétaire, «Partnership for Sustainable Development of Digby Neck and Islands Society») |
M. Ashraf Mahtab (président, Comité légal, «Partnership for Sustainable Development of Digby Neck and Islands Society») |
À | 1045 |
Le président |
M. Mark Dittrick |
M. Ashraf Mahtab |
Le président |
M. Peter Stoffer |
M. Ashraf Mahtab |
Le président |
M. Ashraf Mahtab |
Le président |
M. Ashraf Mahtab |
À | 1050 |
M. Peter Stoffer |
Mme Carol Mahtab |
Le président |
M. Mark Dittrick |
À | 1055 |
Le président |
M. Ashraf Mahtab |
Le président |
M. Mark Dittrick |
Le président |
M. Mark Dittrick |
Le président |
Mme Carol Mahtab |
Le président |
Mme Carol Mahtab |
Le président |
M. Reed Elley |
Mme Carol Mahtab |
M. Reed Elley |
Mme Carol Mahtab |
M. Reed Elley |
Á | 1100 |
Mme Carol Mahtab |
M. Reed Elley |
Le président |
M. Mark Dittrick |
M. Reed Elley |
M. Ashraf Mahtab |
M. Reed Elley |
Le vice-président (M. Peter Stoffer) |
M. Bob Wood |
Á | 1105 |
M. Ashraf Mahtab |
Mme Carol Mahtab |
M. Bob Wood |
Le président |
M. Jean-Yves Roy |
M. Ashraf Mahtab |
Le président |
Mme Carol Mahtab |
M. Ashraf Mahtab |
Le président |
M. John MacDonell (porte-parole pour les pêches, Nouveau Parti démocratique, Assemblée législative de la Nouvelle-Écosse) |
Á | 1115 |
Le président |
M. Reed Elley |
Á | 1120 |
M. John MacDonell |
M. Reed Elley |
Le président |
M. Jean-Yves Roy |
M. John MacDonell |
Á | 1125 |
M. Jean-Yves Roy |
M. John MacDonell |
M. Jean-Yves Roy |
M. John MacDonell |
M. Jean-Yves Roy |
Le président |
M. Bob Wood |
M. John MacDonell |
M. Bob Wood |
M. John MacDonell |
M. Bob Wood |
M. John MacDonell |
Le président |
M. Peter Stoffer |
M. John MacDonell |
Á | 1130 |
M. Peter Stoffer |
M. John MacDonell |
Le président |
CANADA
Comité permanent des pêches et des océans |
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 8 mai 2003
[Enregistrement électronique]
¾ (0810)
[Traduction]
Le président (M. Tom Wappel (Scarborough-Sud-Ouest, Lib.)): La séance est ouverte. Bonjour. Conformément à l'article 108(2) du Règlement, nous menons une étude relative aux questions touchant les pêches de l'Atlantique. Nous aimerions commencer. Nous avons une pleine journée, nous avons un plein ordre du jour et, comme je l'ai fait chaque jour, je vais vous livrer quelques détails éclectiques inutiles.
Nonobstant ce que le Globe and Mail a dit hier, ma source me fait savoir que c'est ce jour en 1915 qu'un sous-marin allemand a fait couler le Lusitania, tuant 1 200 personnes. Ce jour, en 1429, Jeanne-D'Arc a repris Orléans. Fait triste, ce jour, en 1902, un volcan a explosé—ou plutôt a fait éruption, pour employer le terme correct—en Martinique, tuant 30 000 personnes, et l'on avait enregistré deux survivants. Enfin, Harry Truman, président des États-Unis à une époque, était né ce jour-ci. Alors voilà. Voilà ce qui aura déjà marqué ce jour.
Bienvenue à nos premiers témoins. Il s'agit d'Arthur Bull, coordonnateur de la Bay of Fundy Inshore Fishermen's Association, et de Patricia Rhynold, gestionnaire, Guysborough County Inshore Fishermen's Association.
Bienvenue. La formule est assez simple. Nous vous invitons à faire vos exposés. Nous vous demandons de vous en tenir de façon générale à une dizaine de minutes afin que cela nous laisse le temps de poser des questions. D'autres députés vont se joindre à nous et nous aurons donc une séance de questions et réponses.
Qui aimerait commencer? Monsieur Bull? Allez-y, je vous prie.
M. Arthur Bull (coordonnateur, «Bay of Fundy Inshore Fishermen's Association»): Merci, monsieur le président. J'aimerais remercier les honorables membres du comité d'être venus à Halifax, d'être des nôtres et de nous donner ainsi l'occasion de venir nous entretenir avec vous de cette question.
Je vais vous entretenir aujourd'hui, au nom de la Bay of Fundy Inshore Fishermen's Association, des changements proposés aux politiques en matière de licences qui ont été proposées par le ministère des Pêches et des Océans dans le cadre de la révision de la politique sur les pêches de l'Atlantique. Les membres de la BFIFA sont tout particulièrement préoccupés par les changements envisagés aux dispositions de la politique d'octroi de licences du MPO visant les propriétaires-exploitants et la séparation de la flottille.
La Bay of Fundy Inshore Fishermen's Association représente des pêcheurs côtiers multi-espèces dans cinq comtés de la région de la Baie de Fundy de Nouvelle-Écosse. Nous comptons à l'heure actuelle quelque 160 membres,dont la plupart sont des pêcheurs de homard et de poissons de fond avec ligne et hameçon, et il y a également quelques pêcheurs d'oursins et de hareng à petite échelle. Nous sommes une petite organisation, mais nous croyons jouer un rôle important pour les pêcheries des collectivités côtières de notre région.
Nous pensons que les changements envisagés à la politique d'octroi de licences mineront très sérieusement ce qui reste des flottes de pêcheurs propriétaires-exploitants de la Nouvelle-Écosse et de toute la région de l'Atlantique. Nous vous rappelons que cela englobe la pêcherie du homard du Sud-Ouest de la Nouvelle-Écosse, l'une des petites pêcheries commerciales indépendantes les plus durables et les plus réussies au monde.
Plus précisément, le document intitulé La gestion des pêches sur la côte Atlantique du Canada: Document de discussion sur la politique et les principes, établit clairement que la RPPA est en train d'être utilisée pour miner sérieusement les dispositions visant les propriétaires-exploitants et la séparation de la flottille de l'actuelle politique d'émission des licences.
Les mécanismes permettant à des flottes de se soustraire aux dispositions visant les propriétaires-exploitants, qui sont esquissés à la page 25 de ce document, semblent avoir été conçus en fonction des besoins du secteur de la transformation, qui, dans la région de Scotia Fundy, a déjà été autorisé à contrôler des parts massives des flottes existantes en contravention de l'actuelle politique visant les propriétaires-exploitants. Par ailleurs, l'absence de toute mention de la politique de séparation de la flottille dans ce document est une preuve supplémentaire que la nouvelle politique portera sérieusement atteinte aux flottes de propriétaires-exploitants indépendants.
Notre organisation s'oppose fermement à toute tentative de diluer les politiques visant les propriétaires-exploitants et la séparation de la flottille. Ces politiques sont essentielles au bien-être économique de nos collectivités et elles doivent de façon urgente être renforcées et non pas affaiblies.
Il est notoire que dans toutes les régions de l'Atlantique, les consultations publiques au sujet de la RPPA ont donné lieu à l'expression massive de la part des participants dans l'industrie de la nécessité de renforcer les politiques en matière de propriétaires-exploitants et de séparation de la flottille. Il s'agit d'un important écart par rapport à la politique établie. La politique antérieure d'octroi de licences commençait par la phrase que voici: «Celle-ci est une politique de séparation de la flottille». La nouvelle version ne fait état nulle part d'une politique de séparation de la flottille. Ce que nous avons ici est un changement de politique sournois. Les citoyens de la région de l'Atlantique méritent assurément mieux que cela. Dans la région de Scotia Fundy, où des échappatoires dans la politique actuelle d'octroi de licences ont permis à des transformateurs de prendre le contrôle de flottes entières, cette question est pressante pour les pêcheurs, leurs organisations et leurs collectivités.
Nous croyons qu'il importe que des mesures soient prises immédiatement pour renverser la vapeur. Plus précisément, nous recommandons que le MPO prenne tout de suite deux mesures.
Nous recommandons tout d'abord qu'il exige l'application immédiate des politiques en matière de propriétaires-exploitants et de séparation de la flottille surtout dans les cas où des accords de fiducie ont été utilisés pour les contourner. Les mesures récentes prises par le MPO dans la région du golfe montrent qu'il est possible pour le ministère d'appliquer vigoureusement ces politiques en obtenant des résultats très positifs.
¾ (0815)
Deuxièmement, nous recommandons que soient fermées les échappatoires existantes dans la politique d'octroi de licences en intégrant les politiques en matière de propriétaires-exploitants et de séparation de la flottille au règlement de la Loi sur les pêches, leur donnant ainsi force de loi. Avocats et comptables au courant du problème des accords de fiducie nous disent que cela réglerait tout de suite le problème.
Nous vous implorons, en votre qualité de parlementaires responsables de veiller à l'avenir des pêcheries du Canada, d'intervenir pour notre compte auprès du ministère pour qu'il revoie ces changements. Plus précisément, nous demandons respectueusement que le ministre retarde le dépôt devant le Cabinet de la Révision de la politique sur les pêches de l'Atlantique en attendant qu'il y ait eu un débat public exhaustif sur ces changements.
Monsieur le président, cela met fin à mon mémoire écrit. J'aimerais ajouter qu'à la lumière des crises que l'on constate dans les pêcheries de l'Atlantique, dont vous êtes, je le sais, au courant, dans un cas, la crise a à voir avec l'allocation, alors que dans une autre elle a à voir avec la rareté de la ressource, mais dans ce cas-ci, nous avons dans notre partie de la Nouvelle-Écosse une très saine pêcherie. Il s'agit d'une pêcherie indépendante. Ce n'est pas une pêcherie subventionnée. C'est l'une des plus saines au pays. C'est une pêcherie axée sur la petite entreprise et qui est une pierre angulaire de l'économie du sud-ouest de la Nouvelle-Écosse.
Dans ce cas-ci, donc, le gouvernement fédéral est en train d'apporter des changements de politique qui viendront miner la petite entreprise en Nouvelle-Écosse, déclenchant ainsi une crise à l'intérieur d'une pêcherie saine, durable et viable. Nous vous exhortons donc d'intervenir pour notre compte dans ce dossier.
Merci encore de m'avoir donné l'occasion de m'exprimer ainsi devant vous pour le compte des pêcheurs de notre région.
Le président: Merci, monsieur Bull. J'aimerais vous remercier pour trois choses: premièrement, d'avoir préparé un mémoire écrit; deuxièmement, de nous avoir fait de véritables recommandations; et, troisièmement, de vous en être tenu à moins de dix minutes. Nous vous sommes très reconnaissants pour tout cela.
Que cela n'exerce pas de pression sur vous, madame.
Mme Patricia Rhynold (gérante, «Guysborough County Inshore Fishermen's Association»): Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité permanent des pêches et des océans, je m'appelle Pat Rhynold et je représente ici la Guysborough County Inshore Fishermen's Association. C'est moi qui comparais ici aujourd'hui au lieu que ce soit un pêcheur étant donné que c'est la saison de la pêche au homard dans l'Est et le Nord de la Nouvelle-Écosse et que tous les pêcheurs sont sur l'eau.
Lorsque notre groupe a passé en revue les diverses questions sur lesquelles nous pouvions nous prononcer dans le cadre de ces audiences ici aujourd'hui, il nous a été difficile de choisir sur quel aspect nous concentrer dans le cadre de la préparation de notre mémoire. C'est ainsi que l'on m'a demandé de traiter de quelques-uns des aspects énumérés, et j'ose espérer que vous m'y autoriserez.
Le président: Allez-y.
Mme Patricia Rhynold: La politique du ministère quant au statut de propriétaire-exploitant et de la séparation de la flottille a ces derniers temps mobilisé l'attention de nos membres. Nombre de nos pêcheurs craignent que la politique telle qu'elle existe à l'heure actuelle ne vienne ouvrir la porte, laisse la porte ouverte aux grosses entreprises et aux gros transformateurs pour qu'ils aient accès à ce qui a traditionnellement été une pêcherie basée sur des navires de moins de 65 pieds, et que ceux-ci se voient peut-être même accorder le droit de détenir des licences pour ces pêcheries traditionnelles d'eaux intérieures axées sur des petites embarcations.
Si cela devait demeurer inchangé, il serait alors plus facile pour eux de contrôler le prix versé aux pêcheurs. Nos membres savent que le ministère des Pêches et des Océans est en train de s'efforcer d'adapter ses approches à une pêcherie nouvelle et diversifiée. Dans de nombreux cas, la pêche de certaines espèces n'est plus limitée aux zones de pêche traditionnelles.
Nous comprenons que le ministère tente d'équilibrer les besoins de toutes les parties prenantes dans l'utilisation de nos océans et de nos ressources. Cependant, une solide politique visant les propriétaires-exploitants est essentielle à la durabilité des pêcheurs sur petites embarcations. Les collectivités côtières de la Nouvelle-Écosse, et en fait de toute la région de l'Atlantique, dépendent de la pêche sur petites embarcations. La concentration de permis et de quotas aux mains d'une poignée d'intervenants dans ces ports pourrait être désastreuse. Il est essentiel de permettre d'autres approches qui favorisent l'indépendance et la viabilité économique de ces pêcheries.
Je vais maintenant passer à la question de la gestion du phoque. La question de la gestion du phoque est elle aussi un sujet de discussion populaire sur nos quais et lors de nos réunions. Les pêcheurs sont inflexibles dans leur conviction qu'il faut faire quelque chose face au grand nombre de phoques gris dans nos ports. Les pêcheurs dans de nombreuses régions se sont vus obliger d'abandonner la pêche au maquereau à cause du coût croissant du remplacement de leur matériel de pêche du fait des dommages causés par les phoques.
Les pêcheurs comptaient autrefois sur la pêche au maquereau à l'automne pour compléter le revenu en provenance de la pêche du homard au printemps. Le maquereau est également un appât utilisé pour la pêche au homard et la pêche au thon. L'activité de ces phoques a eu un effet en cascade dans les collectivités de pêcheurs, ayant une incidence sur les revenus des pêcheurs et sur la viabilité potentielle d'autres pêcheries possibles.
La question de la qualité des travaux scientifiques et de recherche du MPO intéresse elle aussi notre association. Nous sommes un groupe très proactif et nous avons été des partenaires dans le cadre de nombreux projets de recherche avec des universités et le ministère. Une chose qui est devenue apparente aux yeux des pêcheurs est que s'ils devront continuer de s'adapter aux mesures de conservation imposées par le ministère, alors des travaux de recherche défendables sur les résultats de ces mesures doivent être menés.
Un exemple serait le prélèvement d'échantillons en mer et dans les ports pour la pêche du homard. Cette fonction revenait traditionnellement aux techniciens du MPO, et l'on recrutait souvent d'autres pour venir appuyer l'effort. Ces dernières années, nos membres ont cherché à obtenir des fonds pour la recherche sur le homard et les stagiaires et techniciens que nous embauchons ont aidé le MPO à prélever les échantillons en mer et dans les ports, et ils se sont même dans certains cas occupé de tout le travail d'échantillonnage.
Nous ne limitons pas notre recherche à cette simple activité d'échantillonnage; pourtant, après cinq années de recherches sur le homard, nous constatons un besoin de financement pour mener à bien le travail requis. Non seulement les coûts mais également la responsabilité en matière de recherche scientifique sont en train d'être répercutés sur les pêcheurs. Aussi intéressés soient-ils, ils n'ont pas les moyens de continuer. Pourtant, ils savent que la viabilité de leur pêcherie dépend de la recherche.
Une autre question corollaire est celle des inquiétudes des pêcheurs quant à l'absence de financement pour les opérations d'application de la loi sur l'eau. Les pêcheurs suivent les règles en matière de conservation et font tout en leur pouvoir pour maintenir leur pêcherie. Cependant, sans exécution du règlement, le braconnage et la pêche illégale pourraient détruire leur travail et leurs efforts.
Dernièrement, le concept de la viabilité économique et sociale a été l'un des principaux objets de la recherche en sciences sociales effectuée par notre association. Nous avons eu la chance de participer à un certain nombre d'initiatives de recherche dans le cadre d'alliances communautés-universités financées par le Conseil de recherches en sciences humaines.
Les renseignements compilés par notre coordonnatrice de la recherche et son personnel ont fourni la preuve très claire à notre groupe que le mode de vie traditionnel de nos pêcheurs a presque disparu. Les valeurs et traditions qui lient ensemble nos collectivités et qui font que nous sommes qui nous sommes sont en train de disparaître. L'esprit communautaire est remplacé par le principe de la survie du plus fort. Pêcheurs se montent contre pêcheurs, collectivités se montent contre collectivités, chacun se battant pour survivre. La fière histoire de nos collectivités, villes et villages côtiers est menacée.
¾ (0820)
Voici, en résumé, l'essentiel de ce que nous avons à dire.
La politique de séparation de la flottille et de maintien des propriétaires-exploitants intéresse au plus haut point les membres de la GCIFA. La concentration des permis et des quotas aux mains d'un petit nombre d'intervenants serait désastreuse pour nos collectivités côtières.
Il importe que l'on mette en place un plan de gestion efficace des phoques gris si l'on veut que notre pêcherie survive.
Le ministère doit financer le travail scientifique et de recherche nécessaire pour veiller à ce que les règles et politiques auxquelles les pêcheurs doivent se conformer soient véritablement efficaces en vue de l'amélioration des chances de survie de la pêcherie.
Il importe que davantage de ressources soient consacrées à l'application des règles en matière de pêche.
La viabilité économique et sociale de notre communauté de pêcheurs doit l'emporter sur l'intérêt de tout individu ou de toute entreprise. Nos collectivités et notre culture doivent être préservées.
Je vous remercie sincèrement du temps que vous nous avez accordé ce matin.
¾ (0825)
Le président: Merci, madame. Je vous adresse à vous les mêmes observations et les mêmes compliments que ceux que j'ai faits à M. Bull.
Si vous êtes d'accord, collègues, étant donné que nous sommes ici en Nouvelle-Écosse aujourd'hui, j'aimerais que l'on commence avec un député de la Nouvelle-Écosse, et ce sera donc M. Stoffer qui ouvrira la période des questions.
M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Merci beaucoup, monsieur le président, et merci à tous mes collègues. Bienvenue dans cette magnifique province de la Nouvelle-Écosse.
Arthur, j'ai quelques questions pour vous. La première qui me vient à l'esprit est pourquoi? À votre avis, s'agissant de quelque chose qui soutient depuis si longtemps ces collectivités, pourquoi les pêcheurs et leurs familles et leurs collectivités sont-ils, sur la base de perceptions ou de la réalité, en train de supposer que le MPO veut éliminer leur mode de vie traditionnel et concentrer aux mains de quelques-uns seulement ce qui a été ou ce qui devrait être une ressource commune? Que vous disent les pêcheurs? Pourquoi pensez-vous que les choses se passent ainsi?
M. Arthur Bull: La question, comme vous le savez, est au coeur même de ce qui se passe dans la pêcherie et de l'orientation suivie par le gouvernement fédéral au cours des dix dernières années au moins. La concentration des permis, la propriété des permis, sont en réalité très étroitement liées à la propriété des quotas, et la propriété des quotas est liée à la politique fédérale d'ensemble visant la privatisation des quotas; je veux parler ici de la privatisation de l'accès aux pêcheries, qui a été vécue dans le gros des pêcheries de poissons de fond, dans la plupart des pêcheries de pétoncle, à l'exception de celle du Nouveau-Brunswick, dans la pêcherie du hareng, et dans presque toutes les pêcheries en définitive. C'est cela qui a été le moteur, la tendance sous-jacente.
Il y a donc une importante accumulation de quotas—c'est-à-dire d'accès aux pêcheries—aux mains d'un petit nombre d'intervenants. La politique qui a été en place dit que les pêcheurs devraient pêcher et être les détenteurs de licences—les propriétaires-exploitants—et que les transformateurs devraient transformer. Mais en même temps, cela a été miné par cette politique en vertu de laquelle les pêcheries ont été mises aux mains d'un petit nombre.
Mais cela ne répond pas vraiment à votre question, car nous savons que cela a été la tendance politique. Nous savons que c'est cela qui se passe. Nous savons que l'élimination de la politique axée sur les propriétaires-exploitants est en réalité la dernière étape là-dedans. Il s'agit simplement d'aligner la politique sur ce qui se passe dans les faits, car ce qui est en train d'arriver maintenant c'est que l'on contourne la politique par le biais d'accords de fiducie dans une pêcherie après l'autre, et cela est en ce moment-même en train de se passer avec la pêcherie du homard dans le sud-ouest de la Nouvelle-Écosse.
Pourquoi cela arrive-t-il? Je ne pense pas qu'il s'agisse de montrer ces compagnies du doigt. C'est leur plan d'affaires. Elles font ce pour quoi elles ont été montées, et la plupart d'entre nous ferions la même chose si nous étions à leur place. C'est tout à fait logique en affaires.
Une question à laquelle il est plus difficile de répondre est celle de savoir pourquoi le gouvernement fédéral minerait ainsi de petites entreprises. Voilà une question à laquelle il est difficile de répondre. Je sais que c'est celle que devrait se poser le gouvernement fédéral lui-même. Pourquoi n'apprécie-t-on pas la petite entreprise dans le secteur des pêches? C'est cela qui est en train d'être détruit. Bien franchement, même en y mettant toute ma volonté, je ne parviens pas à comprendre. Je n'ai pas la réponse à cette question.
M. Peter Stoffer: Pat, vous avez mentionné le phoque gris. Nous étions tout juste à Terre-Neuve et au Labrador, où la question des phoques est bien sûr un gros sujet de préoccupation.
Nous avons demandé ce que les pêcheurs recommandent que nous fassions quant aux phoques gris. J'ai constaté que vous n'avez pas parlé d'un abattage sélectif ou autre chose du genre. Que le gouvernement fédéral devrait-il faire en ce qui concerne le phoque gris dans votre région? Que suggéreriez-vous?
Mme Patricia Rhynold: Je n'ai pas vraiment la réponse à cette question. Je sais qu'en tant qu'association nous avons examiné les zones d'exclusion adoptées dans certaines régions de Terre-Neuve. Il a été question de cela. Mais je n'ai pas vraiment de réponse à vous donner. Si les pêcheurs savaient ce qui fonctionnerait, ils s'y appliqueraient, vous savez--en dehors d'une décimation des populations de phoques, et ce n'est pas vraiment là leur approche.
Mais nous n'avons pas vraiment de réponse à vous donner.
M. Peter Stoffer: Ma dernière question s'adresse à l'un ou l'autre de vous deux.
Nous avons entendu dire l'an dernier que l'on faisait enquête sur une pêcherie de homard illégale d'une valeur, je pense, de quelques centaines de millions de dollars. Des gens du coin avec qui j'en ai parlé ont dit qu'en l'absence de contrôle d'application de la loi et d'une personne qui se consacre véritablement au problème, ce genre d'activité va persister.
Pat, vous avez mentionné l'absence d'application de la loi. Vous-même ou Arthur pourriez-vous comparer la situation actuelle sur le plan application de la loi à ce qui existait il y a, mettons, dix ou quinze ans? Y a-t-il là une comparaison que vous puissiez faire pour nous?
¾ (0830)
M. Arthur Bull: Tout ce que l'on peut dire c'est que c'est une fraction de ce que c'était à l'époque.
D'autre part, ce qui sous-tend tout cela est un stéréotype ou une fausse impression courante au Canada selon laquelle la Nouvelle-Écosse est subventionnée et que les pêcheurs côtiers sont subventionnés. Le MPO me dit que le tiers de la valeur des prises pour l'ensemble des pêcheries du Canada provient du sud-ouest de la Nouvelle-Écosse, soit la région dans laquelle nous nous trouvons. Songez à l'impôt sur le revenu, aux droits de permis, à la TPS, à cette incroyable richesse qui est versée au Trésor canadien par cette pêcherie incroyablement porteuse. Apparemment, environ 3 p. 100 à 5 p. 100 des ressources du MPO sont reversées à cette pêcherie.
Les pêcheurs dans notre région demanderaient donc, j'imagine, qui est en train de subventionner qui dans cette histoire? Et cela vaut pour le contrôle d'application de la loi, pour la science, pour tout ce qui se fait.
Mme Patricia Rhynold: Je suis tout à fait d'accord avec Arthur là-dessus et je ne voudrais pas donner l'impression que les agents d'exécution de la loi ne font pas leur travail ou bien qu'ils ne collaborent pas avec les pêcheurs, car ce n'est certainement pas le cas. Ce qu'il faut, c'est davantage de ressources pour la conservation et la protection. Les employés avec qui il leur faut traiter sont excellents et ils sont toujours là dès qu'on téléphone; c'est simplement que les ressources ne sont pas là pour leur permettre de faire leur travail de surveillance comme il se doit.
M. Peter Stoffer: Monsieur le président, on a beaucoup entendu dire que les agents sur le terrain du MPO et les pêcheurs dans les localités ont de très bonnes relations de travail partout au pays, mais il semble que quelque part au-delà il y a un décalage et qu'il est toujours difficile de le cerner.
Merci.
Le président: Merci, monsieur Stoffer.
Nous allons maintenant passer à M. Elley. M. Elley est membre du comité et je suis certain qu'il va vous dire qu'il vient de la belle province de la Colombie-Britannique.
M. Reed Elley (Nanaimo—Cowichan, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.
Merci beaucoup d'être venus et de nous avoir fait part ce matin de la situation que vous vivez.
Comme M. Wappel l'a déjà dit, je représente une circonscription maritime de la côte Ouest, dans l'île de Vancouver, alors je parle avec beaucoup de pêcheurs. Il est incroyable de voir à quel point les histoires sont les mêmes. Cela unit le pays d'une façon quelque peu étrange.
Une question que j'aimerais vous poser est la suivante. La ministre des Pêches de Terre-Neuve a comparu devant le comité hier matin. J'ai été un peu déconcerté par ce qu'elle avait à nous dire, mais en même temps, je pense comprendre sa situation, et j'aimerais savoir ce que vous en pensez.
Elle a maintenu que le gouvernement de Terre-Neuve et que le peuple terre-neuvien souhaitent exercer plus de contrôle sur les pêches. Je me demande ce que vos membres et vous-mêmes pensez. Cette ressource serait-elle mieux gérer si les provinces exerçaient sur elle un plus grand contrôle?
M. Arthur Bull: Je vais tenter une réponse, et on pourra me relayer.
Premièrement, vous avez tout à fait raison quant au lien d'une côte à l'autre, car dans notre région nous avons été très actifs dans la gestion communautaire des pêcheries. Nous avons discuté avec des gens de la côte ouest de l'île de Vancouver et établi avec eux de bons rapports. Nous avons été très impressionnés par le travail effectué là-bas, surtout sur le plan collaboration entre Autochtones et non-Autochtones.
Voilà comment je répondrais à la question. De notre point de vue, il n'est pas question de déplacer le contrôle, la responsabilité et l'autorité d'un palier de gouvernement à un autre, mais plutôt de confier cela à la communauté de façon à ce qu'il y ait une gestion communautaire.
Dans notre région, par exemple, dans le cas de la pêcherie des poissons de fond, les pêcheurs côtiers gèrent leur pêcherie depuis 1996. Et cela va des allocations de prises à l'accès à la science et ainsi de suite, englobant même l'application de la loi. Les pêcheurs ont donc en réalité créé leurs propres mécanismes d'autoréglementation.
Ce genre d'auto-gouvernance démocratique fonctionne très bien. Il s'agit là d'une très petite pêcherie que celle des poissons de fond, mais elle a fait ses preuves et je pense qu'il existe des exemples semblables en Colombie-Britannique.
À mon sens, c'est ainsi que la responsabilité devrait être déplacée, et je ne parle pas tant du pouvoir, mais bien de la responsabilité, car ce sont les gens dont les enfants et les petits-enfants vont dépendre de la ressource qui vont prendre le plus au sérieux cette responsabilité. C'est donc à ces gens-là que devrait, à mon avis, être confiée la responsabilité décisionnelle--pas tant à la province, donc, mais bien aux collectivités elles-mêmes, ce qui les aidera à bâtir la capacité requise pour s'occuper de la ressource.
¾ (0835)
M. Reed Elley: Je pense que ce à quoi l'on essaie d'en venir ici c'est ce que M. Stoffer a évoqué lorsqu'il a dit qu'il semble que le problème réside dans ce décalage qui vient s'interposer quelque part entre ici et Ottawa. J'imagine par ailleurs que dans le cas de ceux d'entre nous qui venons de communautés maritimes, ce que nous nous efforçons de faire est de déterminer s'il n'y aurait pas moyen de régler ce problème de sorte que les décisions soient prises en province, en région, et qu'en cours de route, lorsque vous pensez pendre des décisions ici, celles-ci ne se fassent pas changer entre ici et Ottawa.
Comment corriger cela? Tout le monde nous en parle.
M. Arthur Bull: Je suppose que je répéterai ici encore que c'est la gestion communautaire qu'il faudrait privilégier. C'est en ramenant une part importante du processus décisionnel à ce niveau-ci que l'on réglera le problème. Dès que la gestion communautaire aura été prise au sérieux par le gouvernement fédéral et appuyée, alors la question sera réglée.
M. Reed Elley: Et que se passera-t-il si cela n'arrive pas?
M. Arthur Bull: Eh bien, il n'y a pas de garanties dans ce monde, mais cela ne fonctionne pas dans l'état actuel des choses. Les pêcheries sont en assez mauvaise posture ici dans le cadre de l'actuel régime, et s'il ne survient pas quelque nouvelle façon de voir les choses, alors les toutes dernières pêcheries qui réussissent encore ici vont disparaître. Et je parle de pêcheries qui réussissent très bien et nous constatons qu'elles sont aujourd'hui menacées par l'actuel régime de gestion. La pêche du homard au sud-ouest de la Nouvelle-Écosse est une pêche sans quota, mais il s'exerce d'énormes pressions pour que l'on opte pour un système de quotas, celui-là même qui a détruit pêcherie après pêcherie le long des deux côtes.
Il importe donc d'adopter une nouvelle façon de penser et cette façon de penser nouvelle doit être la gestion communautaire. Nous en sommes absolument convaincus et, comme je le disais, c'est ce que nous faisons, et cela fonctionne lorsque les pêcheurs eux-mêmes montent au bâton et prennent le contrôle du jeu.
M. Reed Elley: Aimeriez-vous ajouter quelque chose à cela, Pat?
Mme Patricia Rhynold: Je suis tout à fait d'accord avec Arthur là-dessus. Nous avons recouru à un mode de gestion communautaire pour notre pêcherie du crabe des neiges dans l'est de la Nouvelle-Écosse et cela a très bien fonctionné. Cette année, tout cela va changer, car nous pensons qu'un accès permanent sera accordé. Les quotas ne seront donc pas distribués aux collectivités, mais à des particuliers.
Mais lorsque cela revenait aux collectivités... Pendant les cinq dernières années, j'ai géré le crabe des neiges pour le comté de Guysborough; tout le monde partageait et cela a très bien réussi. Les pêcheurs pêchaient les prises allouées et les collectivités en bénéficiaient. Si cela va maintenant être concentré aux mains de quelques-uns seulement, les gens qui en bénéficieront ne viendront pas forcément de la communauté.
Le président: Merci.
M. Roy, qui vient du Québec, sera le suivant. Il est le porte-parole pour les pêches de son parti, le Bloc Québécois.
[Français]
M. Jean-Yves Roy (Matapédia—Matane, BQ): Je vous remercie d'être présents ici ce matin.
Votre exposé concernant l'accès aux pêches pour la collectivité m'intéresse beaucoup, parce qu'on a entendu parler du même sujet à Gaspé aussi. Ce que j'ai constaté, c'est que ça fonctionnait, évidemment, lorsqu'il était question de la pêche au homard. Vous venez de me dire qu'au niveau de la pêche au crabe, vous avez fait la même chose. Ça, je peux dire que c'est la première fois que je l'entends, parce que comme vous l'avez constaté avec ce qui se passe dans le dossier du crabe à l'heure actuelle, il y a un sérieux problème.
Ce que les gens de Gaspé nous disaient, c'est que plus l'entreprise gagne de l'argent, moins elle est intéressée à partager sa richesse. Les pêcheurs de homard, entre autres, nous disaient que pour eux, ça fonctionne. Mais je me demandais, après la comparution des témoins, comment on pourrait arriver à appliquer ça pour le crabe ou pour d'autres espèces, à l'heure actuelle.
Je vais vous donner un exemple. Vous nous dites qu'il faut que le pêcheur, celui qui est sur le bateau, soit le détenteur du permis, et que de cette manière-là, on va conserver une petite entreprise de pêcheurs indépendants. Ce que je veux vous dire, c'est que dans ma région, quand les petits pêcheurs indépendants ont des problèmes financiers, ils ne peuvent pas se tourner vers les banques parce que les banques ne les financent pas. Ils se tournent donc vers les transformateurs. Ils sont pris à gorge par les transformateurs, de toute façon. En bout de ligne, c'est un peu une forme d'esclavage, parce que si le transformateur décide de fixer un prix et que c'est lui-même qui finance le pêcheur, le pêcheur, en fin de compte, travaille presque pour rien, à mon avis.
Mais comment arriver à appliquer ce système-là pour le crabe ou pour d'autres espèces? Pour le poisson de fond, c'est sûr qu'on aurait des problèmes. Mais comment l'appliquer à d'autres espèces? Voilà le sens de ma question.
¾ (0840)
[Traduction]
Mme Patricia Rhynold: Dans le cas de la pêcherie du crabe des neiges, cela s'est passé de la façon suivante: l'allocation a été accordée aux communautés et j'ai moi-même, pour le compte des pêcheurs, géré le crabe. Nous traitions avec les acheteurs et les transformateurs dans le cadre d'un arrangement semblable à celui que vous décrivez. La différence était que le quota appartenait au groupe; en conséquence, aucun individu n'exerçait plus d'influence que les autres.
Je vous comprends tout à fait que lorsque vous dites que mieux l'entreprise réussit et plus elle est rentable, moins elle a tendance à vouloir partager. C'est le problème auquel nous sommes à l'heure confrontés avec notre pêcherie du crabe des neiges. Je pense que si les allocations avaient été au départ accordées à des particuliers plutôt qu'à un groupe, nous n'aurions pas pu lancer cette approche de gestion communautaire. Les pêcheurs, pris individuellement, seraient sans doute tout contents de recevoir chacun leur quota. Le problème est qu'ils ne sont pas autorisés à pêcher un quota individuel; il leur faut se constituer en groupes. C'est ainsi que nous nous sommes trouvés dans une situation unique et que nous avons eu la possibilité de tenter quelque chose de différent.
D'autre part, comme l'a mentionné Arthur, nous avons également recouru à un système de gestion communautaire pour les poissons de fond dans notre région, mais vu que nous sommes à l'heure actuelle visés par un moratoire, nous n'explorons plus beaucoup cela ces jours-ci.
Dans le cas d'autres pêcheries, je pense que le problème--et Arthur a évoqué cela--est attribuable à la façon dont sont faites les allocations. Si les allocations de pêche sont consenties à des individus et s'il s'agit de quotas transférables d'une personne à une autre, alors elles peuvent être vendues à n'importe qui. Je n'exprime ici qu'une opinion personnelle--et je tiens à ce que cela soit bien clair--mais selon moi, les QIT, ou quotas individuels transférables, permettent la concentration des licences et du pouvoir.
M. Arthur Bull: J'aimerais ajouter quelque chose à cela. C'est une bonne question: Comment iriez-vous de l'avant avec un mode de gestion communautaire? Je pense qu'une façon de faire raisonnable serait de tenter la chose, d'avoir un certain nombre de pêcheries très limitées et très contrôlées à l'intérieur desquelles tenter l'expérience. Au lieu de révolutionner tout le système, je pense qu'il serait plus raisonnable de dire au MPO: écoutez, prenons quelques pêcheries qui fonctionnent bien, là où il existe de solides organisations--car la clé est que les pêcheurs soient bien organisés. Le gouvernement fédéral pourrait très bien dire: nous avons certains critères ici et l'un d'eux est que vous devez avoir un processus décisionnel démocratique, imputable, transparent--de solides organisations en vue de la prise de décisions.
Il y a des pêcheries qui pourraient très bien fonctionner ainsi. J'ai déjà mentionné l'exemple des pêcheries de l'île de Vancouver. Il y en a également certaines en Nouvelle-Écosse. Je comprends que dans le Nord il y a quelques exemples très intéressants dont vous êtes sans doute mieux au courant que moi.
Ce qu'il nous faut c'est que ces exemples et d'autres encore servent de terrain d'essai pour la gestion communautaire. Cela requiert une approche différente de celle en place à l'heure actuelle. Cela exige réellement que le MPO cède une partie de son contrôle. Qu'il garde la reddition de comptes, mais qu'il cède son pouvoir autoritaire sur chaque petite chose qui arrive.
Que l'on cède certaines responsabilités aux collectivités et aux pêcheurs de ces collectivités et qu'on les laisse se débrouiller. Qu'on les laisse faire des erreurs et en tirer des leçons. C'est la meilleure réponse que je puis vous donner pour le moment.
¾ (0845)
Le président: Merci.
Thank you, Mr. Roy.
Nous passons maintenant à monsieur Wood, qui vient de la même province que moi, soit l'Ontario.
M. Bob Wood (Nipissing, Lib.): Merci, monsieur le président.
Je sais que nous nous efforçons aujourd'hui de respecter l'horaire, et ce sera peut-être un petit peu difficile pour nous. Je n'ai que quelques petites questions que je vais poser rapidement.
Madame Rhynold, vous disiez dans votre exposé que la responsabilité quant à l'aspect scientifique est en train d'être déchargée sur les pêcheurs, ce qui vient leur imposer encore d'autres genres de pressions. De quels genres de pressions vouliez-vous parler?
Quel est le pourcentage? Avez-vous une idée de ce que les pêcheurs investissent dans la recherche ou autre chose du genre?
Mme Patricia Rhynold: Je regrette, je n'ai pas les chiffres exacts, mais je pourrais...
M. Bob Wood: Un simple chiffre approximatif serait bien--si vous en avez un.
Mme Patricia Rhynold: Non, je n'en ai pas.
Je connais davantage la pêcherie du crabe. Dans le cas de la pêcherie du crabe, avec l'accès temporaire nous payions un taux supérieur pour la science que la flotte permanente. C'était en fonction de l'allocation. C'était un pourcentage de l'allocation de pêche. C'est ainsi que cela était financé.
Dans mon mémoire, ce que je voulais plutôt faire ressortir est qu'une part importante de la recherche qui doit être faite dans les collectivités et sur l'eau et à laquelle participent les pêcheurs—il s'agit de recherches participatoires—n'est pas de la recherche qui nous est imposée mais de la recherche qui est faite avec nous.
M. Bob Wood: Et pour vous.
Mme Patricia Rhynold: Et pour nous.
Parfois, les priorités ne sont pas les mêmes. Les priorités des pêcheurs en matière de recherche ne coïncident pas toujours avec celles du ministère. Lorsque nous relevons une chose dont nous savons qu'elle doit être étudiée, il nous faut partir à la recherche de l'argent nécessaire pour faire l'étude. Même dans les cas où le ministère convient que des études doivent être entreprises--nous travaillons en partenariat avec lui et aidons des fonctionnaires au sein du ministère à obtenir les fonds requis pour effectuer la recherche nécessaire, et c'est notamment le cas avec le homard. Nous avons fait beaucoup de recherche sur le homard--cinq années de recherche.
M. Bob Wood: Les pêcheurs sont probablement également plus fiables que le MPO, mais vous ne voudrez pas vous prononcer là-dessus. Moi, je peux en parler, parce que je pense que c'est vrai, car cela fait plusieurs jours que l'on nous dit que lorsque les pêcheurs font leurs propres recherches, leurs résultats sont beaucoup plus justes que ceux du MPO.
Des réponses ont déjà été données à certaines de mes autres questions, mais j'aimerais vous en poser une au sujet de l'application de la loi sur l'eau. Dans quelle mesure le problème est-il grave et quels changements se sont opérés au cours des cinq dernières années environ?
Mme Patricia Rhynold: La technologie a évolué et les gens qui sont en mer et qui violent la loi ont des téléphones cellulaires et d'autres dispositifs électroniques. Ils le savent si des agents sillonnent la mer. On se passe le mot. C'est là un exemple.
La présence des forces de contrôle dans les collectivités n'est pas aussi solide parce qu'il n'y a plus autant de personnel.
Peut-être que ce sera un peu philosophique, mais une partie de cela relève peut-être même de tout le changement de perception au sein de nos collectivités dans lesquelles, autrefois, les gens respectaient davantage les droits d'autrui, respectaient leur gagne-pain et le fait que ces pêcheurs partent en mer pour gagner leur vie et que d'autres qui ne participent pas activement à la pêcherie commerciale bénéficient parfois de la pêcherie.
M. Bob Wood: Aviez-vous quelque chose à ajouter?
M. Arthur Bull: J'ignore précisément quelle réduction il y a eu côté quantité de recherches scientifiques effectuées, mais en ce qui concerne l'application de la loi, je dirais que là encore, avec la gestion communautaire, les pêcheurs peuvent eux-mêmes s'en occuper dans une certaine mesure. Dans notre cas, nous avons en fait des contrats civils, les pêcheurs ayant des contrats avec leur propre association. Si une personne dépasse une limite donnée, il y a moyen de la sanctionner de façon juste.
D'un autre côté, un certain nombre d'importantes responsabilités demeurent toujours aux mains du gouvernement fédéral. C'est comme s'il fallait établir deux colonnes, ou peut-être trois, à l'intérieur du système de gestion communautaire. L'une correspondrait aux responsabilités du MPO, l'autre aux responsabilités des pêcheurs et je suppose que la colonne du milieu serait celle des responsabilités partagées. Dans notre cas, nous dirions que l'application de la loi en mer est clairement du ressort du fédéral. Que l'on laisse le MPO choisir un certain nombre de choses et les faire bien au lieu d'essayer de tout microgérer à l'intérieur des pêcheries. Ce serait là une première chose.
Quant à toute la science, je pense qu'il est important que le gouvernement fédéral y investisse davantage d'argent et fasse un bon travail. Mais, comme vous le dites, la connaissance locale est elle aussi importante, alors la clé réside dans la façon de combiner connaissances locales et science. Voilà donc encore une autre chose qui viendrait s'inscrire dans la colonne du gouvernement fédéral.
Il y a beaucoup d'autre choses qui pourraient être transférées à la communauté, que le gouvernement fédéral pourrait en fait confier aux organisations communautaires.
¾ (0850)
M. Bob Wood: Je pense que ces temps derniers l'on a également constaté que pour quelque raison—Dieu sait pourquoi—le MPO hésite beaucoup à puiser dans les connaissances et les ressources locales et à faire l'appel téléphonique pour demander comment vont les choses, si nous avons des idées à lui communiquer ou autre. Il semble que ce soit un problème de fierté au MPO qui l'empêche de recourir aux personnes qui font véritablement le travail. Nous l'avons constaté maintes et maintes fois au cours des derniers jours et même lors d'audiences tenues à Ottawa: les gens du ministère hésitent à aller recueillir des renseignements auprès de personnes comme vous ou Mme Rhynold ou l'organisation qu'elle représente.
M. Arthur Bull: Je répéterai simplement ce qu'a dit M. Stoffer, c'est-à-dire que les gens du MPO en région sont très au courant. Ils sont très renseignés sur ce qui se passe et ont une vaste expérience dans le domaine. Mais un peu plus loin au-delà de…
M. Bob Wood: Il y a un vide quelque part.
M. Arthur Bull: Oui.
M. Bob Wood: Merci.
Le président: Merci. Cet échange a été intéressant. Dommage, monsieur Wood, que l'on ne puisse pas enregistrer vos expressions faciales aussi bien que vos commentaires.
Cela m'ennuie de prolonger les choses, mais j'ai quelques questions. L'une d'elles a été très bien traitée par M. Wood, et c'était la question au sujet de l'application de la loi. Mon autre question, je vais la poser à M. Bull, car elle concerne deux des recommandations.
Nous recevons des notes de breffage afin que nous restions au courant des différentes questions, et j'aimerais simplement vous lire ce qu'on nous a dit au sujet, disons, de la politique en matière d'application de la loi. Je vous poserai ensuite une question. Voici donc ce qu'on peut lire:
Il est inexact d'affirmer que le gouvernement fédéral corrigera le problème des contrats privés passés entre pêcheurs et transformateurs en se contentant de faire respecter la politique de séparation de la flottille. Cette politique reste une politique, ce n'est ni une loi ni un règlement. Le MPO ne peut, pour éviter la cession de permis de pêche à des sociétés, faire respecter la politique que dans les limites de ses compétences. De plus, le ministère n'a pas le pouvoir d'interdire de tels contrats |
—et il s'agit des contrats de fiducie dont nous parlons—
car ceux-ci n'entraînent pas la cession du permis à une société et ne constituent qu'une entente privée entre pêcheurs et transformateurs. Même si cela relevait de sa compétence, le MPO ne dispose d'aucun moyen pour faire respecter les dispositions de ces contrats dont le nombre pourrait s'élever à plusieurs milliers. Enfin, les contrats sont en général de compétence provinciale car ils mettent en cause des droits de propriété et des droits civils sur le territoire de la province, comme le prévoit le paragraphe 92(13) de la Loi constitutionnelle de 1867. |
Il y a moyen de fermer les échappatoires, y compris par le biais de règlements, et c'est très bien. Vous avez expliqué cela et nous comprenons. Ma question est la suivante: Vu ce que je viens à l'instant de vous lire, pourriez-vous me donner des exemples de mesures récentes prises par le MPO dans la région du golfe et qui sont pour vous la preuve qu'il est possible pour le ministère d'appliquer vigoureusement ces politiques en obtenant des résultats positifs?
¾ (0855)
M. Arthur Bull: M'appuyant sur ce que je sais, je ne le peux pas. Mais il me faut vous dire que je ne suis pas avocat et que je ne suis pas tout à fait au courant de tous les aspects de la situation, alors je ne vous donne que mon interprétation de l'état des choses.
Mais d'après ce que j'ai compris, dans la région du golfe, le MPO aurait dit à quelqu'un qui a un accord de fiducie qu'il était en violation de la politique des propriétaires-exploitants, et il y a maintenant une affaire devant les tribunaux. C'est une histoire de permis pour le crabe qui appartiennent à une compagnie de Terre-Neuve et qui allaient sortir du Nouveau-Brunswick. Il y avait des accords de fiducie et, si j'ai bien compris... Mes renseignements me viennent principalement du Conseil canadien des pêcheurs professionnels, alors j'espère que si des représentants du Conseil viennent comparaître devant vous vous leur poserez cette question, car ils sont très au courant. Ils suivent d'ailleurs cette affaire dans la salle de tribunal même.
D'après ce que j'ai compris, dans la région du golfe, le MPO aurait bel et bien dit aux pêcheurs ayant des accords de fiducie qu'ils avaient deux années pour y mettre fin, et la procédure en justice a été déclenchée après cela.
Le président: Je peux voir pourquoi.
M. Arthur Bull: Vous pouvez voir pourquoi.
Il me faut vraiment dire que je ne peux pas vous donner d'avis juridique là-dessus, car en tant que simple citoyen... Disons que Revenu Canada ou que l'ADRC s'adresse à l'avenir à une petite entreprise et que la personne dit qu'elle est propriétaire-exploitant, remplit son rapport d'impôt et obtient son permis en tant que propriétaire-exploitant, mais qu'il s'avère en fait que l'entreprise appartient, par le biais d'un quelconque accord civil, à Sobey's. Je ne pense pas que le ministère du Revenu aurait du mal à dire que ce n'est pas le cas, que l'intéressé ne se présente pas de façon honnête au gouvernement fédéral. Qu'il représente faussement la nature de son entreprise. Qu'il prétend être un petit entrepreneur, qu'il a un permis de petit entrepreneur, mais qu'il est en fait l'employé d'une autre société.
Comment se fait-il que le MPO soit tout d'un coup moins sévère là-dessus? C'est une combinaison étrange de la part du MPO. Il est autoritaire un jour, et le lendemain il dit: Oh, nous ne pouvions pas bouleverser cela, car il y a un investissement; nous ne voudrions pas que quiconque perde quelque chose comme cela. Le ministre de l'Environnement, lui, va aller à une station-service et dire, votre réservoir d'essence souterrain n'est plus sain sur le plan environnemental, alors vous devez l'enlever; l'environnement l'emporte sur vos besoins financiers. Et le propriétaire de la station-service de dire, mais je vais devoir fermer boutique. Savez-vous ce que dit le gouvernement fédéral dans pareille situation? Alors fermez boutique.
Pourquoi donc le MPO est-il si sensible là-dessus? Ce pourrait-il que les gros joueurs dans la pêcherie exercent une influence démesurée sur le MPO? C'est l'impression que nous avons dans les collectivités côtières de Nouvelle-Écosse, soit que les décisions politiques en Nouvelle-Écosse et dans la région de l'Atlantique sont le fait des plus puissants intérêts dans la pêcherie, et que c'est vraiment cela qui sous-tend toute l'affaire. Encore une fois, ce n'est pas là l'avis d'un juriste, mais mon impression très nette est que le gouvernement fédéral devient très prudent et très doux--tout à fait non interventionniste--dans certains cas, alors que dans d'autres cas les gens se font coincer.
Je vous donne tout simplement mon impression. Je peux en tout cas vous dire que du point de vue des communautés côtières de Nouvelle-Écosse, la croyance très générale est que le ministère des Pêches et des Océans agit dans l'intérêt des gros intérêts dans les pêcheries, jour après jour, et ce depuis 20 ans. C'est là la toile de fond dans tout cela.
Le président: Eh bien, je pense que c'est un endroit idéal pour clore votre témoignage. Nous allons réfléchir à tout cela.
Merci beaucoup. Encore une fois, je vous suis reconnaissant d'avoir été succincts. Un grand merci.
¿ (0900)
M. Arthur Bull: Merci à vous.
Le président: Collègues, nous allons maintenant entendre, du Coastal Communities Network, Scott Milsom, et du LFA 34 Lobster Committee, Ashton Spinney. Bienvenue, messieurs.
Vous étiez ici, alors vous avez entendu ce que j'ai dit aux autres témoins, et je vous demanderais la même collaboration. Qui aimerait commencer?
M. Scott Milsom (agent de communications, «Coastal Communities Network»): On m'a apparemment donné le feu vert.
Je suis l'agent de communications du Coastal Communities Network, une organisation-cadre regroupant plus de 250 organisations communautaires, pas toutes actives dans les pêches; pas toutes actives dans l'agriculture, pas toutes actives dans la foresterie, mais recouvrant toute la gamme, car ce sont des groupes qui s'intéressent à l'avenir des régions côtières et rurales de Nouvelle-Écosse.
Nous sommes ici aujourd'hui pour parler politiques et notamment celle du MPO. Le MPO a une politique, Transports Canada a une politique, et ainsi de suite, et toutes ces différentes politiques ont une incidence sur les communautés côtières. Nous venons d'entendre Arthur, du comté de Digby, et Pat, du comté de Guysborough. L'incidence de la politique du MPO dans ces régions est énorme. Le dernier recensement nous apprend—et je ne suis pas en train de suivre mes notes; je vais y venir dans un instant—que le comté de Guysborough a, au cours de la dernière décennie, perdu 12 p. 100 de sa population tandis que celui de Digby en a perdu plus de 9 p. 100. C'est là une tendance qu'alimente la politique gouvernementale.
Je sais que nous sommes ici aujourd'hui pour traiter plus particulièrement de la politique du MPO, mais il y a un ensemble de politiques interdisciplinaires qui menacent sérieusement les localités côtières et rurales de la Nouvelle-Écosse. C'est cela mon mandat, défendre les collectivités côtières et rurales de la Nouvelle-Écosse.
Je vais maintenant vous lire mon mémoire.
Je comparais aujourd'hui devant le comité permanent au nom du Coastal Communities Network, ou CCN, pour discuter de la révision de la politique des pêches de l'Atlantique—que je ne vais pas abréger—dans son ensemble, mais j'aimerais traiter plus particulièrement des dispositions proposées relativement aux propriétaires-exploitants et aux politiques d'octroi de permis et de séparation de la flottille.
Le CCN représente plus de 250 organisations côtières, rurales et de petites localités de la Nouvelle-Écosse qui sont préoccupées par l'avenir des régions rurales et côtières de la Nouvelle-Écosse. Cela fait 11 ans que nous travaillons étroitement avec des organisations de pêcheurs ainsi qu'avec une vaste gamme d'autres organisations communautaires partout dans la province.
Une partie du mandat du CCN est d'identifier les questions qui touchent nos communautés côtières et rurales, comme je l'ai souligné il y a un instant. Lorsque nous discutons publiquement d'une question, comme c'est le cas ici, nous nous efforçons de refléter les soucis généraux de l'ensemble de nos membres. Nous ne faisons pas dans l'improvisation. Tout ce que nous disons au sujet d'une quelconque question de politique passe d'abord par un processus démocratique de consultation de nos membres, et ce dont nous allons vous entretenir ici a été examiné plus tôt cette semaine dans le cadre d'une réunion de notre conseil d'administration et de nos membres.
Notre conseil d'administration et nos organisations membres sont très préoccupés par les changements à la politique d'octroi de licences proposée dans le cadre de la révision de la politique des pêches de l'Atlantique. Ces changements proposés représentent un important virage dans la politique fédérale d'octroi de permis et ont été conçus sans grande participation d'organisations de pêcheurs et de leurs collectivités. Ils semblent plutôt représenter les intérêts du petit nombre d'entreprises de transformation qui en bénéficieraient.
Il y a deux aspects à ces changements proposés. Premièrement, il y a la trahison du principe de défense des propriétaires-exploitants. La mesure proposée—je pense que cela se trouve à la page 25 de l'ébauche de la politique—semble s'attaquer à la politique existante applicable aux propriétaires-exploitants, autorisant les flottes à s'y soustraire. Cela mettrait en définitive fin au concept de la politique d'octroi de licences aux propriétaires-exploitants.
Deuxièmement, le principe de la séparation de la flottille est tout à fait absent de la politique proposée. Cela laisse entendre que la nouvelle politique appuiera la tendance de la propriété de flottes par les transformateurs. Lors de consultations préalables sur la révision de la politique tenues un peu partout dans la région de l'Atlantique, la demande dominante exprimée a été que l'on renforce les politiques en matière d'exploitants, de propriétaires-exploitants et de séparation de la flottille. Voici que le MPO se propose de faire tout le contraire en affaiblissant ces politiques.
¿ (0905)
Ce qui trouble le plus le Coastal Communities Network est le fait que cet important virage dans la politique soit annoncé sans grand débat public. J'imagine que c'est le débat que nous sommes en train d'avoir ici en ce moment, ou peut-être que nous sommes en train de le commencer ici. En fait, ce qu'il faut, c'est la fermeture des échappatoires qui à l'heure actuelle—et il a été question plus tôt des accords de fiducie et d'autres choses du genre—sont en train de contourner l'actuelle politique, ainsi que le renforcement des politiques en matière de propriétaires-exploitants et de séparation de la flottille. Ces politiques devraient se voir accorder force de loi, et c'est chose possible.
Les Néo-Écossais ruraux estiment que les pêcheries côtières indépendantes sont la colonne vertébrale de nos collectivités côtières. Ils sont en train de se demander pourquoi le gouvernement fédéral veut miner encore le secteur de la petite entreprise dans nos pêcheries. Ces changements proposés ne feront qu'augmenter encore la concentration de propriété qui a déjà nui à tant de collectivités—vous n'avez qu'à parler à mon ami à Canso. Ils se solderont par d'énormes pertes d'emplois et pourraient s'avérer très néfastes pour le tissu même des communautés côtières de Nouvelle-Écosse.
En conséquence, le CCN soumet respectueusement au sous-comité les recommandations suivantes.
Premièrement, nous recommandons que le comité permanent demande au ministre de retarder le dépôt de la révision de la politique des pêches de l'Atlantique en attendant d'avoir une discussion beaucoup plus approfondie au sujet des questions des propriétaires-exploitants et de la séparation de la flottille. Si le comité permanent le souhaite, le Coastal Communities Network serait prêt à faciliter ce processus en Nouvelle-Écosse. Nous ne pouvons pas aller au-delà de la Nouvelle-Écosse, car notre mandat nous limite à cette seule province.
Deuxièmement, nous recommandons que le comité permanent recommande au ministre de donner force de loi aux actuelles politiques en matière de propriétaires-exploitants et de séparation de la flottille.
Enfin, nous recommandons que le ministère des Pêches et des Océans tienne d'autres discussions avec les organisations de pêcheurs avant d'apporter ces changements de politique majeurs.
Merci de m'avoir écouté.
Le président: Merci de votre exposé écrit et de ces recommandations très précises. Nous vous en sommes très reconnaissants.
Avant de passer aux questions, j'aimerais vous demander une précision. Vous avez évoqué la page 25 de l'ébauche de la politique. Nous éprouvons de la difficulté à trouver cette ébauche de politique.
M. Scott Milsom: J'ai moi-même eu quelques difficultés hier soir.
Le président: En avez-vous copie?
M. Scott Milsom: Non, pas pour l'instant. Hier soir, je suis allé sur le site Web du MPO. Je pensais y trouver un document pdf, mais je n'ai trouvé qu'un long document qui défilait sans pagination. On me dit que la page 25 est un problème.
Le président: Notre recherchiste me dit que nous avons un document de discussion par opposition à une ébauche de politique. Est-ce de cela--
M. Scott Milsom: Oui, c'est cela. Toutes mes excuses.
Le président: Il n'y a aucun problème. Nous tenons simplement à être bien certains de savoir de quoi vous parlez.
¿ (0910)
M. Scott Milsom: J'ai maintenant quelque chose devant les yeux.
Le président: Très bien. Si vous en avez copie, je demanderais au recherchiste de l'examiner et de voir si c'est la même que ce que nous avons.
Pendant qu'il fait cela, je vais demander à M. Spinney de nous faire sa déclaration.
M. Ashton Spinney (président, Comité consultatif du homard, Zone de pêche du homard 34): Monsieur le président, mesdames et messieurs, merci de l'occasion que vous m'avez donnée de venir comparaître devant vous ce matin.
Je vais m'attaquer tout de suite au mémoire, que vous avez devant vous, et je tâcherai de faire le plus vite possible. Nous verrons ensuite.
Je présente donc ce mémoire au Comité permanent des pêches et des océans au nom de la Zone de pêche au homard 34 (ZPH 34), au sud-ouest de la Nouvelle-Écosse.
Les pêcheurs, nos familles et nos collectivités ont de sérieuses inquiétudes quant à la révision de la politique des pêches de l'Atlantique. L'industrie du homard dans Southwest Nova est la plus lucrative au Canada, avec une valeur annuelle des prises supérieure à un quart de milliard de dollars.
Nos membres sont préoccupés par les changements à la politique en matière de permis proposés ou ignorés dans la Révision de la politique sur les pêches de l'Atlantique, ou RPPA, relativement à: la politique pour les propriétaires-exploitants, qui est minée; la politique sur la séparation de la flottille, qui est inexistante; l'exigence que les navires de pêche du homard aient une longueur hors-tout de 44 pieds, 11 pouces, avec une extension hors de l'eau de cinq pieds, ce qui n'est pas abordé, mais nous pourrons en traiter plus tard—je suis certain que vous aurez des questions là-dessus, et l'accès à la Commission des prêts aux pêcheurs pour l'achat d'entreprises axées sur le homard pour les nouveaux pêcheurs de homard.
L'orientation et les principes de la politique des pêches proposée sont tout à fait contraires aux recommandations soumises au comité de révision de la politique par les nombreux groupes communautaires et des pêcheries de la région de l'Atlantique, y compris de la ZPH 34. Il est clair qu'un petit nombre de flottes intégrées appartenant à des sociétés seront les bénéficiaires des changements de politique recommandés, ce au détriment des flottes de propriétaires-exploitants et des collectivités côtières de la région de l'Atlantique.
Pourquoi les politiques ont-elles été retranchées du règlement sur les pêcheries? Qu'a-t-on gagné et qui en a bénéficié? Pourquoi les politiques en matière de pêcheries ne sont-elles pas exécutées par le MPO? Neuf cent soixante-huit détenteurs de permis dans notre secteur du homard de Southwest Nova représentent une importance économique majeure pour les équipages, les familles, les acheteurs, les camionneurs, les magasins, les détaillants, etc. Environ 200 des entreprises détentrices de permis de pêche au homard de la ZPH 34 sont aujourd'hui détenues dans le cadre d'accords de fiducie par de grosses sociétés. Si cette tendance demeure, l'industrie du homard ne sera pas différente d'autres secteurs des pêches à intégration verticale comme la pétoncle et les poissons de fond, ne comptant plus que très peu de pêcheurs propriétaires-exploitants indépendants.
Les gardiens fédéraux de notre ressource publique ne doivent pas laisser se faire la prise en main de l'industrie du homard par les grosses sociétés. Les pêcheries qui sont la seule propriété de sociétés n'ont aucun remords à laisser à sec les familles de pêcheurs et les collectivités côtières, qui se retrouvent sans poissons et sans emplois, pour aller établir ailleurs leurs profits et leurs quotas. Allez parler aux gens des collectivités néo-écossaises de Canso, de Lunenburg et de Lockeport si vous ne voyez pas très bien comment cela se passe, ni l'incidence que cela a sur nos familles et nos collectivités côtières. Les pêcheurs côtiers indépendants et leurs compagnies et équipages réinvestissent leurs gains dans l'économie locale. Les grosses sociétés conservent 40 p. 100 de leurs profits pour acheter un accès plus grand à la pêche ou pour investir à l'extérieur de la région de l'Atlantique.
Il est clair que les grosses sociétés imposent davantage d'efforts de pêche aux stocks de homard. Les capitaines à louer se font dicter par les sociétés propriétaires quand, où et comment pêcher, créant davantage d'efforts. Davantage de vies sont mises en danger, des skippers employés étant forcés de sortir en mer tandis que les pêcheurs indépendants restent à quai du fait de conditions météorologiques dangereuses. Les équipages sont moins bien payés, ce qui permet aux exploitants de couvrir une part plus importante des coûts de pêche, et ils reçoivent également un plus bas prix à la livre pour le homard, ce qui permet aux grosses sociétés d'augmenter encore leur marge de profit. En conséquence, les familles de pêcheurs dans les petites localités sont les perdants dans l'invasion du secteur par les grosses sociétés, avec le plein appui du ministère des Pêches et des Océans qui, dans son inaction, n'applique pas les politiques et règlements actuels.
Les détenteurs de licences qui investissent dans la construction et l'adaptation de leurs bateaux de pêche du homard—comme vous pouvez le voir, le bateau doit avoir une longueur hors-tout de 44 pieds et 11 pouces, et ce n'est qu'un petit paragraphe ici—pour que ceux-ci soient plus longs que ce qu'exigeait le règlement le font en connaissance de cause, et le MPO a choisi de ne rien voir, laissant tout simplement faire. Le ministre des Pêches a pour obligation d'appliquer la politique du MPO. Par le passé, les permis de pêche au homard étaient retirés aux navires qui violaient la règle des pêcheries imposant que la longueur hors-tout des bateaux ne dépasse pas les 44 pieds et 11 pouces.
¿ (0915)
Le fait d'ignorer ces violations n'est plus acceptable aux yeux de la très grande majorité des parties prenantes dans la ZPH 34. Approuver un tel mépris de la politique et du règlement en matière de pêches de la part d'un petit nombre agissant par intérêt et par avidité revient à encourager le chaos et la catastrophe pour tout le secteur de la pêche au homard.
Passons maintenant à la séparation de la flottille. Le gouvernement du Canada, grâce à des politiques de séparation de la flottille, limite sévèrement la capacité de non-pêcheurs et de transformateurs à détenir des permis de pêche commerciaux. Les politiques en matière de séparation de la flottille et de propriétaires-exploitants ont pour la première fois été élaborées à la fin des années 70. Elles ont été enchâssées par le MPO dans une politique en matière d'octroi de licences de 1989.
L'existence de politiques en l'absence d'efforts d'exécution par le MPO a permis l'affaiblissement de ces politiques essentielles par des usines de transformation pour leur intérêt propre, ce qui leur aura permis d'exercer un contrôle sur les entreprises de pêche en établissant des contrats civils appelés ententes de fiducie. Ces entreprises de pêche à intégration verticale continuent de saper la politique des propriétaires-exploitants et réclament la suppression de la séparation de la flottille.
Des stocks de poissons partout dans le monde sont en train d'être détruits par le même genre de producteurs intégrés à base terrestre et axés sur le marché. Il s'agit d'un gros souci pour ce qui est des pêches de l'Atlantique, mais c'est également un problème international. Il faudrait selon nous qu'il y ait réaffirmation de la séparation de la flottille et, à plus long terme, restitution complète de la flotte côtière aux pêcheurs professionnels afin que ceux-ci puissent continuer de jouer leur rôle vital dans la gestion des pêcheries commerciales.
Cette opinion, appuyée par les résidents côtiers et par les organisations de pêcheurs côtiers partout dans la région de l'Atlantique, est esquissée dans document après document, exposé après exposé, soumis aux auteurs de la politique de pêche. Cela fait beaucoup trop longtemps que l'on ignore ces opinions de la majorité.
Si les décideurs prenaient le temps d'examiner attentivement les sources scientifiques historiques et sociales, ils verraient que là où les communautés de pêcheurs et les pêcheurs indépendants ont pu garder le contrôle des champs de pêche, ceux-ci ont également pris les moyens nécessaires à la protection et à la conservation des ressources pour les générations futures.
Ces quatre règlements en matière de pêche sont des stratégies clés nécessaires au maintien d'une pêcherie côtière du homard viable. Que ces quatre règles politiques soient sapées relève d'une stratégie corporatiste visant la prise en main d'une pêche côtière au homard d'une valeur de plusieurs millions de dollars pour la réserver aux mains d'un petit nombre de privilégiés.
En choisissant d'ignorer les infractions à la politique et au règlement, le ministre des Pêches et des Océans, l'honorable Robert Thibault, pave la voie pour une prise de contrôle et une gestion de la pêche au homard par les grosses sociétés au moyen de quotas, de grands navires et d'efforts de pêche accrus.
La frustration des pêcheurs locaux est en train d'augmenter sur les quais au fur et à mesure qu'eux-mêmes et leurs équipages apprennent que le MPO, à Ottawa, est en train d'ignorer leurs demandes répétées que soient appliquées la politique et les règles actuelles.
Nous ne demandons pas de changement de politique majeur. La grande majorité des pêcheurs de la ZPH appuient les actuels politiques et règlements. Ils souhaitent également que le MPO applique les politiques en matière de propriétaires-exploitants, de longueur hors-tout de navires et de séparation de la flottille.
Les tactiques de lobbying très intensif d'un petit nombre de participants à l'industrie ont amené un virage marqué dans l'attitude du ministre, qui ignore le processus démocratique dans la ZPH 34, ignore les recommandations des responsables locaux et régionaux du MPO et favorise d'énormes pertes économiques pour les Canadiens en région côtière.
¿ (0920)
Passons maintenant en revue les avantages de la stratégie de la ZPH en vue de renforcer les politiques en matière de propriétaires-exploitants, de séparation de la flottille et de restriction de la longueur des navires, compte tenu de leur incidence sur les localités côtières: les résidents locaux continuent d'avoir des emplois, les profits restent dans la région, la durabilité économique de la collectivité est assurée, des pratiques de pêche durable sont maintenues, les ressources publiques en provenance de la pêche du homard bénéficient à la majorité publique et une pêche du homard durable pour les générations futures est assurée.
Les désavantages pour les localités côtières de la mise en péril des règles en matière de propriétaires-exploitants, de séparation de la flottille et de restrictions quant à la longueur des navires: la perte pour des milliers de gens de leur gagne-pain; l'exportation des profits; la multiplication des emplois perdus dans les magasins et les stations-services locaux; la fermeture d'églises, d'écoles et d'hôpitaux; la précarité économique d'un nombre croissant de collectivités; la multiplication des efforts de pêche subis par les stocks de poissons, les lobbyistes de la grosse entreprise continuant d'obtenir des décideurs qu'ils autorisent l'augmentation de la taille des navires, la transférabilité des prises, la pêche à longueur d'année, etc.; le recul des stocks de homard; le versement de ressources publiques à une poignée d'entreprises multimillionnaires n'appartenant peut-être même pas à des intérêts canadiens.
Nous recommandons au comité permanent des pêches ici réuni de prendre des mesures positives pour renforcer l'actuelle politique des propriétaires-exploitants à l'appui de nos pêcheries traditionnelles et de nos activités côtières.
Premièrement, fermez les échappatoires existantes dans la politique d'octroi de licences qui permettent de contourner les politiques en matière de propriétaires-exploitants et de séparation de la flottille.
Deuxièmement, donnez force de loi aux politiques en matière de propriétaires-exploitants et de séparation de la flottille en les intégrant au règlement de la Loi sur les pêches.
Troisièmement, faites en sorte qu'il faille être propriétaire-exploitant pour être admissible à un permis de pêche.
Quatrièmement, établissez, en consultation avec le Comité du homard de la ZPH 34, une clause de temporisation, devant être mise en oeuvre immédiatement, pour dissoudre les ententes de fiducie pour les pêcheries de homard qui contreviennent à l'actuelle politique en matière de propriétaires-exploitants.
Maintenez et renforcez la politique de séparation de la flottille. Les transformateurs transforment les stocks de poisson. Les pêcheurs ont accès à toutes les espèces de poissons, et ce sont eux qui les pêchent.
Réintégrez dans le règlement l'actuelle politique quant à la longueur des navires de pêche au homard—44 pieds, 11 pouces, avec une extension de cinq pieds hors de l'eau—et assurez un contrôle par le MPO.
Réorganisez la Commission des prêts aux pêcheurs de la Nouvelle-Écosse pour inclure l'accès au financement pour les nouveaux pêcheurs de homard désireux d'acheter des entreprises de pêche du homard.
Nous soulignons à nouveau qu'il n'est pas trop tard pour le ministre fédéral des Pêches et des Océans, l'honorable Robert Thibault, de s'attaquer à ces graves questions, ce de façon à assurer l'avenir de nos entreprises de pêche de propriétaires-exploitants, la durabilité économique des collectivités côtières et le maintien d'une ressource pour les générations futures de Canadiens. L'actuelle politique, des règlements essentiels et, plus particulièrement, la crédibilité du processus de consultation au sujet du homard entre l'industrie et le MPO, sont ici en jeu.
Les quatre dernières pages de notre exposé sont des lettres qui ont été envoyées le 23 avril à l'honorable ministre, et nous vous les fournissons pour votre gouverne.
Je vous remercie du temps que vous m'avez accordé.
Le président: Monsieur Spinney, je vous félicite comme j'ai félicité M. Milsom et les témoins antérieurs.
Nous allons commencer avec M. Elley.
M. Reed Elley: Merci beaucoup, monsieur le président.
Encore une fois, merci, mesdames et messieurs, d'être venus comparaître ici aujourd'hui devant le comité. Il nous faut entendre des personnes qui participent directement à l'industrie—des partenaires qui sont très importants en vue de l'existence et du maintien de la pêcherie.
Encore une fois, comme je l'ai déjà dit, en tant que représentant d'une circonscription maritime de la côte ouest du Canada, j'entends les mêmes genres de problèmes chez moi qu'ici le long de la côte est. C'est un problème généralisé. J'apprécie que M. Milsom soit venu nous rencontrer pour partager avec nous son vécu. Je suis vice-président du caucus parlementaire de la côte Pacifique et je sais l'énorme travail que font les réseaux de collectivités côtières à l'échelle du pays en vue de porter ces questions à l'attention du public et de favoriser l'amélioration de la communication.
L'une des choses que l'on entend cependant sans cesse répéter est qu'en matière de communication et de consultation les pêcheurs continuent de présenter des instances, de soumettre des recommandations, ainsi que les collectivités, mais qu'ils ont l'impression qu'on ne les écoute pas. Que pouvons-nous faire pour changer cela? Y a-t-il des stratégies que vous n'ayez pas encore utilisées ou des choses qu'il faudrait selon vous faire pour que ce processus de consultation soit meilleur?
¿ (0925)
M. Scott Milsom: Je ne sais pas trop. Je ne sais trop ce qui se passe entre... J'étais présent lors des consultations antérieures—le processus d'examen de la politique des pêches de l'Atlantique sur Kearney Lake Road, à Halifax, et dans quelques autres endroits—et j'ai entendu ce que d'autres, y compris Ashton, ont dit. J'ai également lu des choses au sujet d'autres consultations tenues d'Iqaluit à Yarmouth. Ce que j'ai entendu, à répétition, est que fois après fois des résidents de collectivités côtières et des pêcheurs actifs défilaient pour revendiquer des politiques de séparation de la flottille et favorisant les propriétaires-exploitants.
J'ignore si vous connaissez mieux que moi le processus, allant du, d'accord, nous avons tenu toutes ces rencontres, nous rentrerons chez nous pour un an et nous reviendrons ensuite avec un document reflétant ces discussions—et au bout du compte, le document produit ne reflète pas ces discussions. Il n'est nulle part, dans l'ébauche que j'avais il y a un instant et que je vous ai remise, fait mention de la séparation de la flottille.
Le président: Veillez à ce qu'on vous la rende.
M. Scott Milsom: Nous voulons la récupérer. D'accord?
J'ignore comment la séparation de la flottille et les propriétaires-exploitants, mais tout particulièrement la séparation de la flottille, ont été complètement balayés du processus. Et l'on peut ou être propriétaire-exploitant ou ne pas l'être; en d'autres termes, peu importe. Les gens de la région de l'Atlantique ont dit aux responsables de la révision de la politique sur les pêches de l'Atlantique, lorsque ceux-ci sont venus faire leur tour, que ces deux choses sont essentielles aux collectivités côtières. Pourquoi on les a balayées, je n'en sais rien.
Que pensez-vous, Ashton?
M. Ashton Spinney: Comment pourriez-vous nous aider? Je suis sérieux.
M. Reed Elley: C'est ce pour quoi nous sommes ici.
M. Ashton Spinney: Je pense, pour être parfaitement franc avec vous, que la meilleure chose que le Parlement puisse faire pour la pêcherie est d'arracher le pouvoir à Kent Street. Je suis en train d'être franc et ouvert avec vous et je vous parle du fond du coeur. Nous avons dans nos bureaux locaux du MPO de très très bons hommes qui ont été recrutés pour y faire le travail—que ce soit à Halifax ou dans les autres localités—ce sont des hommes très capables, mais on ne leur laisse aucune marge. Ils ne peuvent strictement rien faire à moins que quelqu'un à Ottawa le leur ordonne, et ce quelqu'un à Ottawa n'est pas au courant du tout. Que peut-on faire?
Ce n'est pas que l'on n'a pas besoin du MPO à Ottawa; ce besoin existe, mais il faut laisser les personnes que le ministère a embauchées pour faire le travail le faire. Si tout ce qu'il a c'est une marionnette dont il tire sur les fils, la marionnette ne va rien faire toute seule. Cela est triste, mais vrai.
Vous vous êtes lancés dans une discussion là-dessus ici, et, si vous me permettez d'y intervenir, le financement pour le MPO est en train d'être coupé. Je ne devrais pas trop en dire, mais je dispose de renseignements privilégiés et j'estime qu'il est de mon devoir d'en discuter avec vous. Il se fait un sabrage. On coupe des emplois, et bien que le chef de l'application de la loi dans l'Est du Canada me dise que nous ne perdons pas d'emplois, je ne partage pas son point de vue. Nous avons perdu tous nos navires de patrouille au large des côtes, tous les navires de surveillance des pêches. Ils ont été mis à la ferraille. Tous les agents des pêches qui travaillaient à bord de ces navires ont perdu leur emploi—ce sont des emplois perdus. Qui assure aujourd'hui la surveillance? Personne. C'est grand ouvert.
De notre point de vue, nous autres pêcheurs, c'est une véritable honte. Nous n'avons pas arrêté de verser de l'argent et nous n'obtenons rien en retour. Cela ne veut pas dire que les agents ne font pas du bon travail; c'est tout à fait le cas. Mais ils sont limités dans ce qu'ils peuvent faire car ils ont besoin de ressources, de matériel. Si vous embauchez des gens pour faire un travail et que vous ne leur donnez pas d'outils, ils ne peuvent pas le faire. C'est aussi simple que cela. Il ne faut pas être un avocat pour venir ici vous dire qu'il existe de graves problèmes.
À notre avis, le principal problème n'intervient pas entre Halifax et Yarmouth, où j'habite; le problème se situe entre Ottawa et Halifax. Je suis en train d'être tout à fait franc et ouvert avec vous. Ce serait irresponsable de ma part de ne pas l'être.
¿ (0930)
Le président: Merci, monsieur Elley.
Monsieur Roy.
M. Ashton Spinney: Vous ne pourriez pas deviner que je vis et que je travaille entouré d'Acadiens francophones. Je m'excuse, mais je ne parle pas un mot de français.
[Français]
M. Jean-Yves Roy: D'accord.
Je voudrais revenir à la question que j'ai posée tout à l'heure aux deux premiers intervenants. La pêche au homard est ce qu'on appelle dans le milieu une pêche compétitive, c'est-à-dire que vous avez un quota et que vous devez le remplir le plus rapidement possible. Dans les autres pêches, on parle de quotas individuels, et vous semblez, entre autres les deux premiers intervenants, vous opposer aux quotas individuels.
Mais ce qu'on me répond à chaque fois que je pose la question, c'est que lorsqu'il est question d'autres pêches, de pêches où il y a de la transformation, comme la pêche à la crevette ou la pêche au crabe, il est impossible d'avoir une pêche compétitive. Les entreprises de transformation ne seraient évidemment pas capables de faire face à une pêche compétitive, dans la pêche à la crevette par exemple, parce qu'on ne peut pas faire entrer dans une usine des milliers de tonnes de crevettes en même temps. Il faut donc que la pêche soit répartie dans un espace de temps. La raison pour laquelle il y a des quotas individuels, c'est justement qu'il faut que la pêche soit répartie dans une période de temps et qu'elle ne se fasse pas de façon très rapide, sans quoi les usines seraient littéralement engorgées avant de pouvoir faire la transformation.
Je voudrais savoir ce que vous pensez de ça, parce que je veux savoir comment arriver à mettre en application le principe qui est adopté dans la pêche au homard dans les autres secteurs. J'ai eu une partie de la réponse tout à l'heure.
[Traduction]
M. Scott Milsom: Eh bien, c'est toute une question.
La pêche au homard a peut-être eu de la chance car la technologie requise pour remonter le homard du fond de l'océan exige moins de capitaux que ce qu'exigeait la pêche des poissons de fond.
J'utilise le passé car il y a eu une intensification de cet effort et une intensification des capitaux. Les entreprises entrevoyaient un profit pour le trimestre suivant.
Je m'écarte peut-être un petit peu du sujet, ce dont je m'excuse, mais lorsque vous avez des petites entreprises et des petits pêcheurs de homard à Yarmouth, à Pomquet ou ailleurs, ces petits entrepreneurs font partie de ces localités, y vivent et y ont des intérêts. La pêche au homard est donc sur ce plan privilégiée. Je pense que c'est en grande partie une simple question de chance s'agissant de la technologie requise pour enlever les homards du fond de la mer. S'il existait un autre moyen de pêcher le homard, j'ai bien peur qu'un grand nombre de collectivités côtières auraient déjà été dévastées, car les grands capitaux seraient arrivés, et les grosses sociétés ne s'intéressent guère à ce qui arrive dans les Pubnicos, car elles ne sont pas établies dans les Pubnicos; elles sont établies à Toronto, à New York, à Paris ou à Londres.
Je ne réponds peut-être pas directement à votre question, mais c'est mon impression, ma théorie quant à la raison pour laquelle la pêche au homard est demeurée la pierre angulaire de ces économies locales.
La pêche du poisson de fond a périclité. Il y a eu cette crise que l'on sait dans les pêcheries des poissons de fond. Mais si vous regardez la valeur totale des prises débarquées en Nouvelle-Écosse, elle augmente depuis une décennie. Pourtant, le nombre de participants à la pêcherie a reculé. Il y a un décalage par rapport à la politique.
¿ (0935)
M. Ashton Spinney: C'est véritablement de la concurrence que vous parlez. Je remercie le seigneur que nous ayons avec le homard une pêcherie compétitive. Elle est ouverte.
Je vais vous raconter un peu d'histoire. Je suis un pêcheur de homard de troisième génération. Tout gamin, je me suis lancé dans la pêcherie à 25 sous. J'ai obtenu un permis pour cette pêche. Pour votre gouverne, cela vaut aujourd'hui entre 600 000 $ et 1 million de dollars. Je vais céder mon permis à mon fils pour le plus petit profit possible, dans les limites de ce à quoi Revenu Canada m'autorisera. Ce permis m'a servi pendant toutes ces années et je continue d'en remercier le seigneur.
Il est bien que nous ayons une pêche concurrentielle. Il y a des transformateurs et des négociants qui aimeraient mettre la main là-dessus. D'ailleurs, il y a même eu un article au sujet des transformateurs dans le Chronicle-Herald de samedi dernier. Les transformateurs se lamentent de ce qu'ils ne puissent pas mettre la main sur le produit de première catégorie qui est livré au consommateur.
Mais la clé est que c'est le prix qui détermine où va le produit. Si vous n'êtes pas prêt à payer le prix, alors vous n'allez pas obtenir le produit. C'est la même chose qu'il s'agisse de poissons ou de légumes sortis d'un jardin. Pour l'agriculteur, qu'il soit producteur de boeuf, de blé ou d'autre chose, c'est le prix qui détermine où va le produit, et c'est de la concurrence qu'il faut.
Dans l'Ouest, par exemple, on plante du blé, et je ne connais rien au blé, mais je sais ceci: lors de la récolte, il y a du volume. Cela a toujours été ainsi. Cela a toujours été ainsi dans le cas du poisson.
Nous n'avons pas avec le homard le luxe de dire, eh bien, je sais que demain il y aura du homard. Ce n'est pas ainsi que les choses fonctionnent. Le homard est là, mais il ne rentre pas dans le piège.
J'ai fait une sortie de pêche hier matin avant de partir pour venir ici. Il y avait un vent qui soufflait à 50 ou 60 milles à l'heure et il y avait une forte houle. Il n'y avait pas de homard dans les pièges. Nous sommes rentrés parce que la pêche ne marchait pas ce jour-là. Mais les transformateurs disent, eh bien, nous voulons le même volume de homard aujourd'hui. Ce n'est pas ainsi que les choses fonctionnent.
Mais nous avons besoin des transformateurs. Nous avons besoin des acheteurs. Nous avons besoin de tous ces gens. Nous avons besoin de toute cette boucle. Nous ne pouvons pas sortir et arracher un gros morceau de la chaîne et dire que nous n'en voulons plus. Nous en avons besoin. Cela contribue à la santé de l'industrie. Permettre à un élément du cycle de devenir le lion serait néfaste, destructeur pour notre industrie. C'est pourquoi la perte des propriétaires-exploitants est si néfaste.
Si vous me permettez, j'aimerais vous parler de quelque chose qui ne figure pas dans ce document.
Le ministre Robert Thibault me dit: Ash, nous allons procéder par flotte; la flotte va décider si elle veut du propriétaire-exploitant.
Je représente 968 détenteurs de permis, sans compter les hommes qui travaillent là-bas. Je parle des détenteurs de permis, des hommes dont je suis responsable et à qui je dois des comptes, etc.
Aux fins de la discussion, prenons comme port celui de Yarmouth. Les gens regardent la situation et disent: Monsieur le ministre, nous avons une reconnaissance spéciale car nous habitons Yarmouth et nous pensons que nous devrions être reconnus comme étant une flotte. Alors ils sortent et ils disent: nous ne voulons pas de propriétaires-exploitants.
Il me dit que la ZPH 34 est une flotte. C'est peut-être le cas à ses yeux, mais ce ne sera peut-être pas toujours le ministre Thibault qui sera en poste. On a commencé avec MM. Tobin, Anderson et Dhaliwal, et maintenant c'est au tour de M. Thibault.
Alors que sommes-nous en train de dire? Il nous faut cela par écrit afin que le suivant sache de quoi il s'agit. Il faut que le tout soit explicité. Si le document dit qu'il faut que ce soit par flotte, alors il faut identifier la flotte afin qu'aucun élément de la flotte ne puisse obtenir une exclusion et créer de sérieux problèmes.
¿ (0940)
Nous avons des flottes qui étaient consacrées à la pêche des poissons de fond et qui essaient maintenant de se lancer dans la pêche lucrative du homard. On parle de gros sous. C'est le seule raison pour laquelle ces gens viennent ici. Ils essaient d'y établir la même mentalité que celle qui a détruit les poissons de fond, et nous, nous résistons.
Le président: Vouliez-vous ajouter quelque chose, monsieur Milsom?
M. Scott Milsom: Oui. Ce dont Ashton ou son réseau veulent, je pense, parler, surtout—s'agissant juste de la ZPH 34, soit les comtés de Shelburne, Digby et Yarmouth—c'est du fait que ce qui est véritablement en jeu ici et ce qui est véritablement menacé par ces changements proposés à la politique du MPO ce sont les 968 petites entreprises indépendantes.
Les gouvernements à tous les paliers disent depuis des années—et cela est vrai—que c'est la petite entreprise qui est le moteur de la croissance économique et de la durabilité économique. Ashton a déjà cité le chiffre de 200 ententes de fiducie parmi ces 968 permis. En gros, ce sont là 200 petites entreprises qui n'existent plus.
Nous sommes ici aujourd'hui pour défendre les 768 entreprises restantes, non pas pour punir les personnes qui ont peut-être signé des ententes de fiducie, pour qui c'était sans doute le moyen d'améliorer leur situation personnelle. Nous ne souhaitons aucunement punir ces 200 ou autres qui sont parties à ces ententes de fiducie.
Au-delà de la ZPH 34, la même chose vaut dans la ZPH—peu importe laquelle, c'est la même chose tout le long de la côte de la Nouvelle-Écosse. Ce sont de petites entreprises que cette politique proposée va simplement étouffer, et nos localités vont elles aussi mourir.
Le président: Monsieur Stoffer.
M. Peter Stoffer: Merci, monsieur le président, et merci à Ash et à Scott, pour leurs exposés.
J'ai deux questions, l'une pour Scott et l'autre pour Ash—si cela ne vous ennuie pas que je vous appelle Ash.
M. Ashton Spinney: Pas du tout.
M. Peter Stoffer: Merci.
Scott, l'on entend parler des localités côtières et du désir de ces localités, des localités individuelles, de pouvoir contrôler—bien sûr avec la réglementation adéquate—leur destin, de pouvoir dire, voici ce qu'en tant que collectivité nous voulons pour les nôtres aujourd'hui et demain.
Nous avons deux exemples en Nouvelle-Écosse de situations dans lesquelles la volonté écrasante de la collectivité—et je vais prendre Northwest Cove comme exemple—90 p. 100 des gens disant non à une exploitation aquicole dans leur région, a été ignorée, les gouvernements provincial et fédéral leur en imposant une, du fait d'avoir écouté une seule voix et ignoré la majorité des gens.
J'aimerais entendre vos commentaires là-dessus ainsi que sur—et vous devez savoir que j'ai déjà soulevé cette question avec le ministre—la carrière de la péninsule Digby.
Ash, vous et votre ami Wayne savez très bien ce qui pourrait arriver à l'industrie du homard, qui est une industrie durable depuis le début. Si elle est bien gérée, vos arrières-petits-enfants pourront toujours y être actifs, s'ils le désirent.
Cette carrière est une idée de la province mais elle pourrait être assujettie à une réglementation fédérale émanant du ministère des Pêches et des Océans. Encore une fois, les collectivités de Sandy Cove et de la péninsule Digby disent majoritairement qu'elles n'en veulent pas, qu'elles ont un mode de vie qui est durable tant à court terme qu'à long terme.
J'aimerais donc que vous nous disiez, dans la perspective de ces collectivités côtières ou en leur nom, pourquoi vous pensez que le gouvernement leur donne quelque chose dont elles ne veulent pas voire même leur impose de faire quelque chose.
Ashton, lorsque je suis devenu député en 1997, j'ai été nommé à ce comité et je me suis presque immédiatement dit que j'allais voir le jour où il y aurait un QIT dans la pêche du homard. Les pêcheurs de homard et tous les autres m'ont ridiculisé. Ils m'ont dit que j'étais complètement fou, que l'on ne verrait jamais cela.
Je crains que ce jour ne soit pas si loin de nous. Il y a déjà des pêcheurs de homard qui sont en train de me dire qu'ils pensent que cela pourrait arriver et qu'au lieu qu'il y ait ce petit bateau avec 250 ou 300 pièges, qu'est-ce qui empêche le gouvernement d'autoriser une grosse entreprise avec un énorme navire, du genre de ceux que l'on voit au Banc Georges, à faire la même chose le long des côtes?
Je vois venir ce jour. C'est beaucoup plus efficient, c'est plus facile à gérer et ces fichus pêcheurs indépendants dans ces maudites collectivités côtières n'ont qu'à se tasser et à laisser les grands prendre toute la place! Ai-je tort là-dessus?
Comme je l'ai demandé hier, monsieur le président, suis-je complètement à côté? Vous avez répondu que je ne devrais pas m'exposer de la sorte. Mais je crains que ce soit dans cette direction que nous avançons. Je vous en supplie, dites-moi que j'ai tort.
¿ (0945)
Le président: Messieurs, je vous lance un défi pour voir si vous êtes capables de donner des réponses plus courtes que la question.
M. Ashton Spinney: Lors d'une réunion en table ronde que nous avons eue avec l'industrie, M. Bellefontaine a dit très clairement à tous les participants que la ZPH 34 n'envisageait pas du tout de quotas dans un avenir prévisible, et nous, nous préconisons la même chose.
Mais il me faut vous dire quelque chose au sujet du processus démocratique qui a été vécu à la ZPH 34. Cette longueur de 44 pieds, 11 pouces est inscrite dans la politique. Cela ne vaut que pour les ZPH 33 et 34, et la longueur du navire dans l'eau ne peut pas être supérieure à 44 pieds 11 pouces. Il y avait des gens qui contournaient cela, déposant des documents falsifiés car--et je vais vous dire comment, mais ne m'en voulez pas, monsieur le président. Ce qu'il faut faire avant d'aller au bureau des permis c'est faire construire un nouveau navire et aller voir un mesureur de navires qualifié et autorisé par le gouvernement pour qu'il me fournisse un papier disant que mon navire fait 44 pieds et 11 pouces de long. C'est officiel. C'est ce qu'il inscrit. Il signe le papier. Je le porte au bureau des permis et on m'accorde sur cette base mon permis de homard.
Ce que les gens font c'est qu'une fois le papier rempli, ils obtiennent du constructeur naval d'ajouter cinq pieds à la poupe et le navire fait alors 50 pieds, mais ce n'est pas ce qui figure sur les papiers. Il s'agit de faux papiers. Mais c'est ce qui est arrivé. Le ministère des Pêches ne peut rien y faire et les pêcheurs de la ZPH 34 ont dit qu'ils veulent que cela soit tiré au clair. Peu nous importe dans quel sens cela va tant et aussi longtemps que c'est juste pour tous les détenteurs de permis, et ce quelle que soit la décision.
Les pêcheurs de la ZPH 34 ont décidé démocratiquement que la longueur allait être maintenue à 44 pieds 11 pouces et que l'on autoriserait un ajout de style rampe de cinq pieds--pas cinq pieds dans l'eau, mais un genre de rampe. Le ministre rechigne à faire cela parce qu'il parle de reconnaître des droits acquis à une poignée de gens qui ont mené une vigoureuse campagne de lobbying auprès de lui en opposition à 80 p. 100 des détenteurs de permis. Cela nous inquiète beaucoup s'agissant des propriétaires-exploitants. Les gens de la ZPH 34 ont décidé de quelque chose de façon tout à fait démocratique et voici que le ministre intervient pour changer les choses. La même chose est arrivée avec la séparation de la flottille et les propriétaires-exploitants.
Nous sommes pétrifiés par les ramifications que cela pourrait avoir et c'est pourquoi, si vous permettez que j'insiste, nous sommes ici aujourd'hui pour vous expliquer qu'il y a peut-être des cas de traitement injuste dont vous n'êtes pas au courant--le processus démocratique ayant été complètement ignoré.
Et je parle d'un processus démocratique dans le cadre duquel un bulletin a été envoyé par la poste à chaque détenteur de permis, et nous les avons. Nous avons tous ces votes de tous les détenteurs de permis.
En tout cas, merci.
¿ (0950)
Le président: Merci, monsieur Spinney.
Souhaitez-vous faire un commentaire?
M. Scott Milsom: Je tâcherai d'être un petit peu plus bref.
Le président: Il n'a pas gagné le pari.
M. Scott Milsom: Je ne sais pas très bien. Vous avez parlé de la situation de Northwest Cove et de celle de la péninsule Digby. Je connais personnellement la situation de Northwest Cove car ma soeur et mon beau-frère y ont élevé une famille et je sais que les gens de Northwest Cove s'opposent fermement à cette entreprise aquicole au large de Horse Island—je pense que cela s'appelle Horse Island.
Je me suis rendu plusieurs fois à la péninsule Digby et je sais qu'il n'y a pas une seule maison le long de la route qui n'ait pas devant elle un panneau sur lequel sont écrits les mots «Stop the Quarry».
Si vous demandez pourquoi il y a un décalage entre la politique et le sentiment public, il s'agit là d'une question plus vaste intéressant toute notre société civile. Je sais qu'avec l'hémorragie de nos collectivités côtières et rurales de Nouvelle-Écosse, les gens ont l'impression de vivre une crise. La ville de Halifax est en plein boom et tant mieux pour elle. Mais nos collectivités rurales et côtières partout dans la province, en dehors du principal corridor et des environs de Halifax, sont en train de voir leurs habitants partir. Le Cap-Breton a perdu 9 p. 100 de sa population en l'espace de dix ans.
Je ne sais pas, Peter. Nous vivons en démocratie. Voyons à quoi ressemble une démocratie.
Voilà. Ai-je fait plus court?
Le président: C'est très bien. Merci.
Messieurs, merci beaucoup de vos témoignages. Nous vous en sommes reconnaissants. Nous avons entendu votre message haut et fort. Nous tenterons de le transmettre au 200 Kent Street.
Collègues, nous avons un changement de programme. Mettez de côté l'ordre du jour que vous avez devant les yeux car nous allons maintenant entendre le Sierra Club du Canada.
Je signale à l'assistance qu'après le Club Sierra du Canada, nous allons entendre Debbie MacKenzie. Viendra ensuite la Digby Neck and Islands Society.
Il nous faudra nous en tenir pour cette partie à environ une heure, car je sais que vous êtes des ajouts et nous avions un petit peu de place. Je vais demander à chacun de vous d'être aussi bref que possible et il me faudra être raisonnablement strict afin qu'il nous reste du temps pour des questions. S'il s'avère qu'il n'y a pas de questions, alors vous pourrez conclure.
Mark Dittrick. Bienvenue, monsieur. Allez-y, je vous prie.
M. Mark Dittrick (président de la conservation, Chapitre du Canada atlantique, Club Sierra du Canada): Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité. Merci de tenir vos audiences en Nouvelle-Écosse et de m'accorder le temps de comparaître devant vous.
Je m'appelle Mark Dittrick et je suis président pour la conservation pour la chapitre de l'Atlantique du Club Sierra du Canada.
Je vais sauter par-dessus certains des renseignements au sujet du Club Sierra et dire, plutôt, qu'en tant que président pour la conservation pour le chapitre de l'Atlantique du Club Sierra , je suis sans doute un petit peu plus au courant des questions de changements climatiques et de pratiques forestières. Je pourrais sans doute captiver votre attention pendant des heures à vous entretenir de la gestion municipale des déchets solides—et ne me lancez pas sur la carrière de la péninsule Digby, sans quoi nous serions ici pendant des jours.
Le Club Sierra du Canada est fier d'être parmi les organisations qui ont fondé la Save Our Seas and Shores Coalition. La coalition a été fondée à l'automne 1999 en réponse à la délivrance de licences à des compagnies de pétrole et de gaz naturel dans certains des plus riches territoires de pêche du Canada. Ces baux ont été accordés sans consultation publique aucune, même pas des Premières nations, bien que ce soit là une exigence de la Constitution.
Comptent parmi les partisans et membres de la Coalition SOSS toutes les organisations de pêcheurs du Canada Atlantique, les principales associations touristiques de la Nouvelle-Écosse, y compris la Tourism Industry Association of Nova Scotia, l'Atlantic Policy Congress of First Nation Chiefs, tous les groupes environnementaux de Nouvelle-Écosse, de l'Île-du-Prince-Édouard et du Nouveau-Brunswick, tous les capitaines de bateau d'observation des baleines de l'Île du Cap-Breton, ainsi que de nombreux particuliers et citoyens locaux.
Nous apprécions beaucoup le leadership relativement à cette question qui a été manifesté par le comité et par plusieurs de ses membres, dont son ancien président, l'honorable Wayne Easter, qui a comparu devant la Commission d'examen public, tout comme Peter Stoffer, ainsi que John Cummins, que la question a beaucoup préoccupé et qui a été d'une grande aide. Il est rare en politique de voir un comité mixte, avec des membres de la gauche, de la droite et du centre, parler si clairement au nom des pêcheurs dans l'écosystème.
Les opinions du comité ont été exprimées clairement dans votre rapport sur la Loi sur les océans à l'automne 2001. Le comité y souligne que les baux le long de la côte du Cap-Breton n'auraient jamais dû être accordés. Votre rapport fait ressortir l'incompatibilité entre le pouvoir conféré au ministre fédéral des Pêches et des Océans en vertu de la Loi sur les océans et les pouvoirs de réglementation de l'Office Canada-Nouvelle-Écosse des hydrocarbures extracôtiers, ou OCNEHE, un corps non élu. Votre rapport demandait au gouvernement d'imposer un moratoire sur l'exploration pétrolière et gazière et le développement dans la région de Sydney Bight et du sud du golfe Saint-Laurent.
En cela le Comité permanent de la Chambre n'est pas seul. Le groupe consultatif d'experts auprès du ministre fédéral des Pêches et des Océans, le Conseil de conservation des ressources halieutiques, ou CCRH, a fait la même recommandation, l'étendant au golfe tout entier. En effet, voici ce qu'il a dit au printemps 2000:
Plusieurs travaux scientifiques ont décrit les effets néfastes des méthodes de prospection séismique sur les poissons à chaque stade de leur vie. L'on sait également que le forage rejette dans l'environnement des éléments toxiques. Le CCRH recommande que toute activité de production pétrolière ou gazière dans le golfe du Saint-Laurent, depuis l'exploration jusqu'à la production, soit suspendue en attendant une évaluation complète, au moyen d'un processus transparent, des répercussions éventuelles de ces activités sur la vie marine. |
De nombreux autres groupes ont fait des recommandations semblables. Pourtant, nous voici au printemps 2003, et c'est toujours l'OCNEHE qui mène le bal. Le conflit entre la Loi sur les océans et l'OCNEHE n'a pas encore été résolu. Nous avons eu un examen public suivi d'un groupe de travail spécial.
Le Club Sierra du Canada a travaillé très fort au sein de ces deux processus et a déployé d'importantes ressources pour tenter de relever le défi. Nous avons bâti un solide dossier factuel contre l'exploration et qui aurait dû éteindre toute idée d'aller de l'avant avec la prospection. De fait, témoignant devant la Commission d'examen public, des scientifiques du MPO ont déclaré que les régions visées étaient plus riches et plus sensibles que le Banc Georges. Trevor Ketchington, témoignant à titre d'expert au nom de l'Union of Nova Scotia Indians, a souligné que les écosystèmes interreliés de Sydney Bight et du sud du golfe accueillent une migration annuelle d'envergure globale mondiale importante. En effet, plus de 1 million de tonnes de vie animale transite entre ces systèmes.
Les témoins pour le Club Sierra du Canada et la Save Our Seas and Shores Coalition ont démontré que les pêcheries et le tourisme dans la région visée fournissent des emplois directs et indirects équivalant à 20 p. 100 de tous les emplois au Cap-Breton et 20 000 autres emplois dans le reste de la Nouvelle-Écosse, ainsi qu'à l'Île-du-Prince-Édouard et au Nouveau-Brunswick.
¿ (0955)
Nos preuves font ressortir de sérieux dangers pour les poissons et les espèces menacées comme les baleines et les tortues. Nous avons également clairement indiqué qu'il n'existait aucune donnée scientifique sur l'incidence des tests séismiques sur le crabe et le homard. Pourquoi est-il toujours question de tests sismiques dès l'automne? Le problème est clairement dû au fait que chaque étape du processus doit être contrôlé par l'OCNEHE.
Le 7 mars 2003, l'OCNEHE a émis un communiqué de presse malhonnête conçu en vue de donner l'impression que les permis pour les tests sismiques dans les eaux les plus biologiquement riches de la région de l'Atlantique avaient été émis sur la base de conseils émanant d'un groupe consultatif spécial. C'était faux. Les permis n'avaient pas encore été délivrés et le groupe consultatif n'avait pas recommandé l'autorisation des tests sismiques.
Le Club Sierra du Canada siégeait au comité consultatif aux côtés des pêcheurs, des Premières nations et d'autres. L'OCNEHE avait insisté pour que les deux sociétés pétrolières et gazières intéressées y siègent elles aussi. Le résultat a été que le rapport du consensus ne comportait aucune recommandation jouissant de l'appui de tous. Pour chaque point clé, il était noté que le comité n'était pas parvenu à une entente. En conséquence, le rapport se lit comme le reflet de différents points de vue, comme en témoigne le paragraphe suivant, tiré du rapport:
Certains membres du Groupe de travail spécial croient que les préoccupations exprimées dans le cadre de l'examen portant sur le Cap-Breton sont semblables à celles soulevées relativement au Banc Georges. Ils pensent que la question des risques et des avantages dans les deux zones dans les eaux côtières du Cap-Breton devrait être réglée de la même façon, soit par le biais d'un moratoire. D'autres ne sont pas d'accord. Ils estiment que le système de réglementation publique a évolué à un point tel que des activités spécifiques peuvent être examinées attentivement selon leur mérite et qu'il est possible de trancher en tenant compte des risques et des avantages à l'intérieur des paramètres que livre la science. |
Voici un autre extrait du rapport, celui-ci portant sur la morue:
Consensus: |
Le Groupe de travail spécial accepte le travail du GCES et son affirmation que le stock de morue résident est fragile et que les stocks de morue de la zone 4T poursuivent leur déclin. |
Le Groupe de travail spécial accepte la conclusion du GCES selon laquelle il n'existe aucune fenêtre pour des tests sismiques entre octobre et décembre qui ne poserait aucun risque pour la morue. |
Les deux stocks de morue doivent se voir accorder toutes les possibilités faisables et raisonnables de se reconstituer. |
Recommandations |
Dans sa comparaison du risque potentiel pour la morue et des avantages potentiels sur le plan production pétrolière et gazière, le Groupe de travail spécial a exprimé les opinions que voici. |
Certains membres estiment que le risque pour les stocks de morue est acceptable étant donné la petite échelle des relevés sismiques, le faible risque de dommages à la population de morues, les mesures d'atténuation proposées et les recommandations du GCES relativement à la SEE. |
Certains membres du Groupe de travail spécial ne partagent pas ce point de vue et estiment qu'il n'y a aucune période au cours de laquelle il n'y aurait pas de risque pour la morue dans les deux zones, que le programme de relevés sismiques à Sydney Bight était important par rapport à la population de morues et que tout risque supplémentaire pour l'une ou l'autre des populations de morues est inacceptable. |
Le processus n'a aucunement abouti à une justification des travaux envisagés, mais l'OCNEHE a tout simplement décidé de faire semblant que oui. Je vous encourage vivement à lire la version intégrale du rapport co-signé par le Club Sierra du Canada et les compagnies pétrolières. Cela dresse un tableau assez juste des questions. Il comprend un rapport du Comité de révision scientifique, qui réunissait des experts-conseils des compagnies pétrolières ainsi que des chercheurs locaux nommés par le Club Sierra du Canada et les Premières nations. Il établit lui aussi un solide dossier quant aux risques sérieux posés pour les poissons de fond et tout particulièrement pour la morue.
Maintenant que la morue du Nord est visée par la Loi sur les espèces en péril, il doit certainement y avoir moyen de protéger ces stocks fragiles des tirs de canons à air. La morue recourt à des méthodes acoustiques pour la communication, essentielle à la reproduction. Il est insouciant et irresponsable d'autoriser les tirs de prospection sismique alors qu'une population est en voie de disparition et que le rétablissement de cette population pourrait amener une reprise économique bénéficiant à des dizaines de milliers de gens.
En conclusion, nous avons désespérément besoin d'entendre le comité répéter ses conseils passés. Il faut que le ministre des Pêches et des Océans joue un rôle moins passif et qu'il assume l'autorité qui lui revient en vertu de la Loi sur les océans. Ces riches zones de pêche, qui abritent des espèces en péril à l'intérieur et au-delà de la frange de dix kilomètres longeant la côte, ne doivent pas être exposées à des activités d'exploration pétrolière et gazière.
À (1000)
Merci.
Le président: Merci, monsieur.
[Français]
Monsieur Roy, avez vous des questions?
À (1005)
M. Jean-Yves Roy: Non, merci.
[Traduction]
Le président: Monsieur Stoffer.
M. Peter Stoffer: Merci, monsieur le président.
Ici encore, et je m'adresse à M. Elley, c'est comme le problème que nous avons avec l'exploration pétrolière et gazière en Colombie-Britannique. C'est tout un avantage pour des gens comme mon collègue, M. Elley, et les gens de la Colombie-Britannique, de pouvoir tirer des leçons des erreurs que nous avons commises au Cap-Breton.
En passant, c'est le même ministère qui a autorisé le dragage. Il a levé un moratoire de dix ans sur le dragage d'hiver ou sur le droit de pêcher dans la zone que vous avez mentionnée, soit la 4Vn. D'un côté, il parle très éloquemment de la conservation, disant que c'est son principe directeur, et de l'autre il autorise le dragage dans cette région même dont le témoin vient de nous parler.
Mark, en ce qui concerne la comparaison avec le Banc Georges, je me souviens de cette bagarre. C'était une campagne anti-forage et elle a très bien réussi. Cela a débouché sur un moratoire de 12 ans sur la prospection pétrolière et gazière dans toute la région du Banc Georges.
Nous savons que la région autour du Cap-Breton et de Sydney Bight est beaucoup plus sensible. Pourtant, en dépit des conseils du comité ici réuni et de nombreux autres intervenants, il semble qu'il soit prévu d'aller de l'avant avec des tests sismiques dès cet automne. Nous ne possédons tout simplement pas toutes les données scientifiques nécessaires pour déterminer l'incidence qu'auront les explosions sismiques sur les stocks de morue. Selon de très bonnes données anecdotiques et certaines données scientifiques, l'effet ne sera pas du tout positif. Or, le ministre des Pêches et des Océans a donné le feu vert.
Je suppose que ma question est la suivante: si sa responsabilité principale est de protéger le poisson et son habitat, pourquoi son ministère ne tient-il pas compte de toutes les preuves dont il dispose et pourquoi le ministre ne s'acquitte-t-il pas de son devoir constitutionnel?
Vous avez également mentionné un communiqué de presse du 7 mars. Si vous en avez copie, serait-il possible pour le comité de l'obtenir également? Vous avez affirmé en des termes plutôt tranchants que l'Office Canada-Nouvelle-Écosse des hydrocarbures extracôtiers a émis un communiqué de presse malhonnête. Nous aimerions en avoir copie, car cela nous intéresserait de le convoquer un jour et de l'interroger là-dessus.
M. Mark Dittrick: Je n'en ai pas apporté une copie avec moi, mais je pourrai assez rapidement en faire parvenir à vous-mêmes et à tous les autres membres du comité.
Je pense que nous avons ici la même situation que celle que nous avons avec... Les essais sismiques au large du Cap-Breton s'inscrivent en fait dans un très vaste projet. Cela a même été comparé à la carrière de la péninsule Digby. Même si les deux projets ne semblent rien avoir en commun, c'est la même situation. Il semble qu'au MPO la production industrielle à grande échelle l'emporte sur les stocks de poisson, les pêches et ce genre de choses.
Nous ne voyons simplement pas de protection pour les pêcheries; nous voyons l'industrie à l'avant-scène et il semble que la santé des pêcheries ait été reléguée à l'arrière-plan.
M. Peter Stoffer: Mark, une chose dont certains disent que c'est peut-être un facteur est qu'il semble, aux yeux de nombreux pêcheurs des collectivités côtières, que l'industrie pétrolière et gazière soit là pour remplacer la pêche, qui est en déclin.
Les gens sont nombreux à dire que l'on pourrait en fait avoir les deux choses. Si l'industrie pétrolière et gazière était réglementée comme il se doit en vue de limiter au strict minimum les activités néfastes pour la vie marine, et si l'on éliminait tous les dragueurs, par exemple, dans les zones sensibles, alors il serait possible d'avoir les deux choses. L'une durerait des centaines d'années, et l'autre jusqu'à ce que les réserves de pétrole et de gaz soient épuisées.
Pourtant, les éditoriaux de différents quotidiens semblent privilégier l'idée qu'une industrie vienne plus ou moins remplacer l'autre. Bien que l'une ne remplace l'autre que pour le court terme, celle qui se ferait remplacer pourrait en réalité exister pendant des centaines d'années encore.
M. Mark Dittrick: La position du Club Sierra est que la délivrance de ces permis autour du Cap-Breton n'aurait pas dû se faire en l'absence d'évaluations environnementales en bonne et due forme.
Le président: Monsieur, étant donné que vous représentez le Club Sierra, auriez-vous quelque commentaire à faire au sujet des phoques?
M. Mark Dittrick: En ce qui concerne leur incidence sur les stocks de morue?
Le président: Auriez-vous des commentaires à faire au sujet des phoques, autrement que pour nous dire que vous les aimez ou que vous ne les aimez pas?
M. Mark Dittrick: Non, nous ne sommes pas totalement opposés à la chasse aux phoques. Je suis peut-être ici en train de franchir une barrière d'espèce, mais nous pensons que le phoque est peut-être en train d'être utilisé comme bouc émissaire pour expliquer le déclin des stocks de morue.
Il est clair pour moi que la principale raison du déclin des stocks de morue est vraisemblablement la surpêche. Nous ignorons quelle incidence pourrait avoir l'intervention humaine sous forme de tests sismiques. Notre sentiment est que cela pourrait très bien avoir un effet néfaste sur les stocks de morue. Vu ce mélange de surpêche et d'exploration pétrolière et gazière intrusive, nous croyons que les phoques ne sont pas les seuls responsables, mais nous ne serions je pense pas en faveur d'une augmentation de la chasse aux phoques.
À (1010)
Le président: Merci beaucoup.
En effet, hier à St. John's, je pense que nous avons entendu un assez solide consensus selon lequel les phoques n'étaient pas la cause de l'écroulement--mais il se pourrait qu'ils soient un facteur dans le rétablissement des stocks.
Merci beaucoup, monsieur.
Madame MacKenzie, c'est à vous maintenant. J'aimerais simplement souligner que vous avez un mémoire très long et détaillé. Bien sûr, nous autres et les recherchistes du comité l'examinerons attentivement.
Je me permets de vous demander d'en faire ressortir un ou deux points saillants. Je constate, par exemple, que vous faites des remarques intéressantes au sujet des phoques. Nous sommes certainement intéressés par la question des phoques, entre autres choses, alors vous pourriez peut-être faire ressortir ces points, car ils sont différents ou rafraîchissants, si vous voulez.
C'est à vous de décider, étant donné que c'est votre déclaration, mais vous accepterez peut-être ces quelques indications en provenance de la présidence.
À (1015)
Le président: Formidable. Merci.
J'aurais juste une petite question pour vous. Avez-vous discuté avec des chercheurs du MPO?
À (1020)
Mme Debbie MacKenzie: Cela fait environ cinq ans que j'essaie de dialoguer avec eux. Au départ, ils m'ont répondu parce que je parlais d'évaluations des stocks de poissons. Ils ont dit: oui, c'est intéressant, et si nous pouvons vous aider avec votre recherche, alors ce sera très bien. Mais lorsque j'ai essayé de les coincer au sujet du plancton et de ce qui était arrivé aux pouces-pieds, alors c'était comme un mur de briques et on a refusé de me répondre.
J'ai écrit au directeur de l'Institut océanographique de Bedford lui disant: écoutez, vous savez que j'ai consacré beaucoup de temps à ceci et vous savez que je suis inquiète, puis-je vous rencontrer? J'aimerais discuter avec vous de mes préoccupations. Nous ne pouvons pas nous rencontrer. Je trouve cela incroyable. Je suis parfois sarcastique lorsque j'écris; je ne sais trop ce que j'ai dit ici, mais... Ces 6 millions de dollars pour l'expérience en matière d'exclusion des phoques ne passent vraiment pas lorsque la science de la mer ne peut pas nous dire ce qui se passe avec le plancton. Il est clair qu'une grosse partie du problème vient du plancton. Le plancton est en train de changer de façon inattendue et imprévisible. Le MPO refuse d'en parler.
Pour être juste envers eux, les chercheurs du ministère des Pêches—et je sais qu'il y en a qui sont des gens vraiment bien—ne peuvent pas parler du plancton; ce ne sont pas des spécialistes du plancton. Je ne pense donc même pas que le MPO soit équipé pour s'en occuper dans la situation actuelle, et il me semble que si nous voulons commencer à financer de nouvelles initiatives en matière de recherches marines, il faudrait cerner la question du plancton.
À (1025)
Le président: Je ne veux pas monopoliser les questions, mais, pour enchaîner là-dessus, si vous n'avez pas discuté avec des chercheurs du MPO parce qu'ils ne sont peut-être pas au courant du zooplancton, en avez-vous discuté avec des chercheurs ou des professeurs universitaires?
Mme Debbie MacKenzie: Oui. Il y en a quelques-uns à Dalhousie dont la curiosité a fini par être piquée et qui s'y sont intéressés. C'est le cas notamment de Martin Willison. Il va comparaître devant vous cet après-midi.
Sans aller trop dans le détail, ces petits copépodes, ces petites créatures qui sont la principale petite forme de vie animale, migrent partout dans la mer. Chose mystérieuse, ces copépodes vont monter et descendre de 500 mètres chaque jour et chaque nuit—c'est une migration verticale, de la surface au fond. Nous ne parvenons pas à déterminer pour quelle raison ils font cela. Il y a un autre chercheur spécialisé dans le plancton qui vient de prendre sa retraite de l'Université Dalhousie. Il s'appelle Sifford Pearre. Cette année, il a publié un ouvrage important réunissant toutes les théories quant à ces mouvements de bas en haut du plancton.
J'ai également publié l'an dernier un petit papier dans lequel j'avance une toute nouvelle hypothèse expliquant pourquoi je pense qu'il monte et qu'il descend. C'est parce qu'il obtient quelque chose en descendant. M. Pearre a réagi très positivement à ce que j'ai écrit. Il était très impressionné. C'est une personne qui est très calée en matière de plancton. Pourquoi a-t-il été si impressionné?
Le président: Très bien.
Monsieur Wood, avez-vous des questions?
M. Bob Wood: J'en aurai peut-être plus tard, mais pour l'instant je veux écouter.
Le président: Nous n'entendons pas souvent parler de pouces-pieds, et je sais que vous…
M. Bob Wood: Non, mais j'écoute. J'apprends.
Le président: Monsieur Stoffer.
M. Peter Stoffer: Merci, monsieur le président.
Je tiens à vous remercier. Vous avez tout à fait raison: nous n'avions pas encore entendu parler de la situation quant aux pouces-pieds, mais nous avons entendu parler du krill. Nous n'avons pas au Canada d'interdiction permanente de la pêche du krill, mais nous imposons des interdictions annuelles à la discrétion du ministre et, bien sûr, du MPO.
Conviendriez-vous qu'une chose qui serait utile serait l'imposition d'une interdiction permanente de pêcher le krill en eaux canadiennes? La raison pour laquelle je vous pose la question est la suivante. Au Boston Seafood Show, il y avait quatre kiosques, de krill frit, de krill bouilli, de krill spécial micro-ondes et ainsi de suite. Je me suis dit que c'était ridicule. Avec le zooplancton, le krill se trouve au bas de la chaîne alimentaire. À Terre-Neuve, nous avons entendu parler d'inquiétudes quant au capelan. Eh bien, le capelan mange du krill. Il mange n'importe quoi d'autre aussi. Mais si nous commençons à détruire le bas de la chaîne alimentaire, alors les niveaux supérieurs commenceront à s'effondrer eux aussi.
Appuieriez-vous, ou diriez-vous au MPO qu'une chose qui pourrait être utile serait non seulement d'investir davantage dans la recherche scientifique... et vous avez sans doute répondu à votre propre question lorsque vous avez dit que les chercheurs du ministère des Pêches ne sont pas des spécialistes du plancton. Je ne veux critiquer personne ici, mais c'est peut-être la raison pour laquelle vous n'avez pas obtenu de réunion--parce qu'il n'y en a peut-être pas parmi eux qui soient qualifiés pour répondre à certaines de vos questions.
Une interdiction permanente de la pêche au krill serait-elle utile? Clairement, au lieu de dépenser leur argent pour savoir ce que mangent les phoques, ils pourraient peut-être consacrer ces fonds à d'autres activités océaniques. L'on a toujours dit que l'on est mieux renseigné au sujet de la situation sur la lune que de celle dans nos propres océans.
Mme Debbie MacKenzie: Oui, je suis bien sûr tout à fait d'accord avec vous là-dessus. Vous avez raison de craindre que la pêche du krill puisse nuire au bas de la chaîne, mais ce que je suis en train de dire est que le bas de la chaîne est déjà abîmé.
Le président: Y a-t-il encore autre chose, monsieur Stoffer?
M. Peter Stoffer: Oui. Êtes-vous en train de dire que les pouces-pieds sont plus ou moins comme les serins dans les mines?
Mme Debbie MacKenzie: Ce que je suis en train de dire est que le pouce-pied est un très intéressant indicateur quant au plancton. Il nous renseigne quant à la richesse de l'eau de mer: toi, petit pouce-pied, peux-tu vivre ici? Il pouvait autrefois vivre presque jusqu'à la ligne de la marée haute. Il n'est sous l'eau que pendant une ou deux heures dans chaque cycle de marée.
Si la richesse de l'opportunité d'alimentation chute, alors jusqu'à quel niveau pouvez-vous aller? Cela descend comme avec un thermomètre. Et il faut que cela descende. Et c'est cela qui fait peur. Ce n'est pas une question de pollution et ce n'est pas une question de réchauffement de la planète. Il suffit d'aller sur le front de mer à Halifax et d'y jeter un coup d'oeil. Il y a des tas de pouces-pieds qui se portent à merveille--dans le port. Sur la côte, où l'eau est propre, le pouce-pied est en train de disparaître. Cela a son importance pour les stocks de poissons sur le plateau.
Ce qui nous interpelle est le fait que les tendances constatées avec le plancton ne correspondent pas aux modèles que nous voyons gérer la vie océanique.
À (1030)
M. Peter Stoffer: C'est intéressant, vous savez. Dans le port de Halifax, tout le monde est très préoccupé par la pollution, mais les pouces-pieds y résistent très bien. À Peggy's Cove, un endroit virginal, les pouce-pieds ne survivent pas.
Mme Debbie MacKenzie: Ce n'est pas qu'à Peggy's Cove.
M. Peter Stoffer: Qu'on déverse des eaux d'égout brutes. Est-ce cela que vous êtes en train de dire?
Le président: C'est ce que disent les pouces-pieds.
Mme Debbie MacKenzie: L'énergie dont je dispose est limitée, mais je suis en fait allée voir le premier ministre de la province pour tenter de lui expliquer que le fait de prolonger les tuyaux d'égout pour les eaux usées de Halifax ne poserait pas de problèmes à condition de les envoyer suffisamment loin des côtes pour qu'il n'y ait pas d'E. coli sur les plages. Que toute la zone côtière est surchargée de nutriants issus de la pollution est un mythe. Ce n'est pas vrai, sans quoi il y aurait des pouces-pieds à Peggy's Cove.
Le président: Monsieur Elley.
M. Reed Elley: Cela est très intéressant. Je suis intrigué. J'ai tenté de trouver votre site-toile et je pense l'avoir enfin trouvé—www.fisherycrisis.com/seaweed.
Mme Debbie MacKenzie: Oui, c'en est un. Je n'ai pas parlé du varech, mais je le pourrais.
M. Reed Elley: Il nous faudra un peu de temps pour examiner votre site-toile, bien sûr, car il renferme beaucoup de renseignements qui pourraient nous aider dans tout cela.
Mme Debbie MacKenzie: Il est plein à craquer.
M. Reed Elley: Vous m'intriguez en tant que personne. Vous dites que vous êtes une observatrice intéressée. Quels genres d'antécédents, côté études ou autre, apportez-vous à la table aujourd'hui?
Mme Debbie MacKenzie: Je suis infirmière. J'ai un diplôme en sciences infirmières de…
M. Reed Elley: Mon épouse est elle aussi infirmière. Ce sont des gens formidables.
Mme Debbie MacKenzie: Je me suis retirée de l'école d'ingénierie après cela. J'ai surtout travaillé comme infirmière, mais j'ai également fait un peu de pêche commerciale et de ramassage commercial de mousse. J'ai vécu avec des pêcheurs. J'ai été la voisine d'Ashton Spinney pendant dix ans.
Je suis terriblement préoccupée et intriguée par tout ceci. Cela fait cinq ans que je me consacre exclusivement à cette recherche. Allez vérifier mon site Web.
M. Reed Elley: Ce que vous êtes en train de nous dire, donc, Debbie, c'est que vous n'avez pas un doctorat en biologie marine.
Mme Debbie MacKenzie: Non, non. Cela est-il nécessaire?
M. Reed Elley: Je vous pose ces questions, voyez-vous, parce que c'est peut-être la raison pour laquelle vous n'avez rien obtenu auprès des chercheurs au MPO. Bien franchement, il y a dans chaque profession un certain snobisme intellectuel, et si vous ne pouvez pas aligner tous ces titres derrière votre nom, vous ne franchissez même pas la porte.
Cela est dommage, car ce sont les pêcheurs qui sortent en mer qui voient et entendent ce qui se passe. Nous le savons. Le MPO ne le sait pas.
Mme Debbie MacKenzie: C'est exact, et ce sont eux qui débarquent le poisson et qui viennent me le montrer.
M. Reed Elley: C'est peut-être la raison pour laquelle vous ne progressez pas autant que vous le souhaiteriez. Si des gens comme nous, les membres du comité, avions accès à tout ce que vous avez, cela aiderait peut-être.
Mme Debbie MacKenzie: Eh bien, c'est un problème extrêmement grave et, comme je le disais, cela va à l'encontre des modèles actuels. Cela va carrément à l'encontre de ce sur quoi reposent les sciences halieutiques. Je pense que ces gens-là veulent tout simplement continuer d'ignorer le problème. Tout colle lorsque vous savez que le plancton est déjà affaibli.
M. Reed Elley: J'apprécie vraiment ce que vous nous dites. Encore une fois, je n'ai pas ces antécédents scientifiques non plus, mais ce me semble être tout à fait logique.
Mme Debbie MacKenzie: Heureusement que vous ne les avez pas, ces antécédents.
M. Reed Elley: Oui, précisément.
En tant qu'observatrice sur le terrain depuis une quarantaine d'années, vous savez instinctivement qu'il y a quelque chose qui ne va pas et que c'est probablement tel aspect. Je vous suis reconnaissant d'être venue et je suis ravi que nous ayons eu le temps de vous entendre.
Mme Debbie MacKenzie: Merci.
[Français]
M. Jean-Yves Roy Merci, monsieur le président.
Vous dites que le ministère des Pêches et des Océans n'a pas étudié le plancton et vous citez, dans votre bibliographie, deux études dont j'entends parler pour la première fois. La première vient du ministère des Pêches et des Océans et elle est intitulée État du phytoplancton, du zooplanctonet du krill sur le plateau néo-écossais en 1998», et la deuxième, c'est la même chose, mais au large de Terre-Neuve. J'ai peut-être mal entendu ou mal compris, mais vous citez dans votre bibliographie deux études du ministère des Pêches et des Océans et vous dites que le ministère des Pêches et des Océans ne se préoccupe pas de cette question. Cela me pose un peu de difficulté.
À (1035)
[Traduction]
Mme Debbie MacKenzie: Très bien. D'accord.
Le MPO dispose des données. Ce qu'il a de plus ancien lui a été fourni par ce qu'on appelle l'enregistreur continu de plancton. Ils accrochent ce dispositif compteur aux navires commerciaux qui quittent Halifax, Louisbourg et St. John's. Cela a commencé en 1960—1961 en Nouvelle-Écosse et en 1959, je pense, à Terre-Neuve. Il y a une bande sur laquelle on enregistre les données sur la quantité de vert—la fraction de plantes—et le nombre de petits animaux, le zooplancton.
Les gens du ministère ont enregistré les tendances, mais ce dont je me plains c'est qu'ils n'en aient pas fait l'analyse. Ils n'aiment pas chercher à déterminer pourquoi la fraction verte augmente et pourquoi la fraction animale est en train de tomber. C'est là une erreur criante d'après le modèle de la façon dont fonctionne la production marine.
Vous pourrez vérifier ces documents. J'en ai en fait un ici. Ils n'analysent pas le pourquoi, et à la fin du document, on peut lire «Pour plus de renseignements, communiquer avec...» et il y a là des noms de personnes-ressources. Je me suis essayée et on m'a demandé de m'abstenir d'envoyer d'autres courriels.
[Français]
M. Jean-Yves Roy: Ce que vous nous dites, c'est que le ministère recueille les données mais qu'il n'en fait pas l'analyse, tout simplement. En réalité, on a les données. Tout ce qu'on aurait à faire, c'est de procéder à une analyse pour tenter de connaître les causes des variations et de savoir pour quelle raison ça évolue de telle manière. C'est un peu ce que vous nous dites, et la demande que vous faites à Pêches et Océans Canada, c'est précisément celle d'analyser les résultats des données qu'ils ont obtenues au fil des ans. C'est ça?
[Traduction]
Mme Debbie MacKenzie: Oui, merci, c'est cela que je veux. Et je veux que cela soit expliqué avant que l'on ne commence à abattre des phoques.
Le président: Savez-vous s'il se fait ailleurs dans le monde de la recherche sur le zooplancton?
Mme Debbie MacKenzie: Oui, l'on a relevé des reculs troublants ailleurs dans le monde. Au large des côtes californiennes, il y a eu une baisse d'environ 70 p. 100. L'on enregistre les niveaux depuis les années 50 environ. Selon des données sur la mer de Béring, les baleines qui y mangent du plancton, les baleines boréales, y ont vu leur source d'alimentation diminuer au cours des dernières décennies. Ces renseignements nous ont été fournis par leurs fanons. C'est un phénomène généralisé.
L'hiver dernier, il y a eu une étude britannique—je pense que c'était le fait de Southhampton University—sur le plancton de l'Atlantique Nord. Je n'ai pas vu le rapport final, mais le rapport initial disait que les chercheurs étaient restés très perplexes, ne relevant que le dixième du zooplancton auquel ils s'étaient attendu. L'étude couvrait toute la zone depuis le Groenland jusqu'à leur... C'est une tendance généralisée très troublante.
The Chair: Pourriez-vous nous rendre un petit service et nous envoyer un courriel énumérant les travaux de recherche effectués par les universités et ainsi de suite? Pas aujourd'hui, mais pourriez-vous nous envoyer ces renseignements afin que nous en disposions?
Mme Debbie MacKenzie: Très bien.
Le président: Merci.
Merci, collègues.
M. Peter Stoffer: Monsieur le président, j'aimerais simplement dire que Mme MacKenzie me fait penser à Alex Morton, dans l'archipel de Broughton, qui, sans doctorat, fait tout le travail de recherche sur l'aquaculture, et à un monsieur à Walton, au large de la côte de Nouvelle-Écosse, qui sans avoir fait d'études poussées, a fait état du problème du corail dont tout le monde niait l'existence. Maintenant, le MPO, bien sûr, à cause de l'intérêt de cette personne—tout comme dans votre cas—s'intéresse activement au corail au large de la côte de Nouvelle-Écosse.
Cela m'émerveille que des personnes qui n'ont pas les diplômes universitaires mais qui sont très intéressées et très préoccupées par leur environnement naturel, soient celles qui soulèvent ces questions, justement parce qu'elles sont attachées à la vie aquatique dans nos océans. Cela m'épate et je tenais simplement à vous en remercier.
Le président: Et bien sûr, c'est exactement comme cela que la science et la biologie sont nées, car des gens s'y intéressaient.
Mme Debbie MacKenzie: J'aurais peut-être dû dire, très rapidement, que mon père, qui est aujourd'hui âgé de 84 ans, a passé toute sa carrière au MPO. Il était de ceux qui voulaient déjà à l'époque que l'on vérifie la teneur en mercure des espadons.
Il m'a dit un jour, alors que nous parlions poisson: «Sais-tu ce qui ne va pas? Les poissons sont en train de mourir de faim». J'ai répondu: «C'est ce que tu penses?» «Oui», a-t-il dit, «J'en suis convaincu». J'ai répondu «Eh bien, pourquoi ne le disons-nous pas à quelqu'un?» et il a répondu, «Personne ne nous écoutera».
Le président: Eh bien, vous, vous avez écouté.
Merci beaucoup à tous les témoins pour leur comparution. Nous vous en sommes reconnaissants. Je suis très heureux que nous ayons pu vous entendre ici.
Nous allons maintenant accueillir, pour le Partnership for Sustainable Development of Digby Neck and Islands Society, Carol Mahtab, secrétaire, et Ashraf Mahtab, président, aux côtés de Mark Dittrick, qui va rester parmi nous en tant que conseiller.
Voici donc encore un autre groupe que nous avons eu la chance de glisser dans le programme, si je puis dire. Vous disposez de 25 minutes en tout, et cela devrait nous suffire pour explorer la question.
Qui aimerait commencer?
À (1040)
M. Carol Mahtab (secrétaire, «Partnership for Sustainable Development of Digby Neck and Islands Society»): Monsieur le président, je suis Carol Mahtab. Voici mon mari, Ashraf Mahtab. Nous sommes la collectivité menacée.
Je ne savais rien de tout cela il y a un an. Nous apprécions beaucoup l'occasion de comparaître, c'est la première fois pour nous. Nous avons été amenés à former notre association il y a un an à cause de la menace qui plane sur notre collectivité. Nous représentons ici notre président, un pêcheur de homard qui est en mer aujourd'hui au large de Whites Cove, l'endroit même où cette carrière et ce terminal maritime sont censés s'ouvrir.
J'apprécie grandement la possibilité de comparaître à la dernière minute. Mon mari va poursuivre.
M. Ashraf Mahtab (président, Comité légal, «Partnership for Sustainable Development of Digby Neck and Islands Society»): Je ne suis que le président du comité juridique, non le président de l'association.
Une demande de construction d'un terminal maritime à Whites Cove, près de Little River dans la péninsule Digby a été déposée. Ce terminal maritime est partie intégrante d'une carrière de basalte de 380 acres. Cette demande fait maintenant l'objet d'un examen collectif de la part de la Nouvelle-Écosse et du gouvernement fédéral. L'autorité responsable est le ministère des Pêches.
Ce projet soulève plusieurs problèmes. Les explosions en sont un. Les lignes directrices de la Loi sur les océans interdisent les explosions à moins de 500 mètres de mammifères. Les explosions endommagent la vésicule biliaire et la vessie natatoire des poissons et le dynamitage perturbe les migrations et autres comportements du hareng, de l'aiglefin, de la goberge et de la morue. Tout cela est néfaste pour l'économie locale, qui dépend largement de la pêche.
Il y a ensuite le danger de l'envasement et de la contamination de l'eau du fait du dynamitage et du concassage de basalte. Les effets de l'envasement sont cumulatifs. Au bout d'un certain temps, la population de poissons s'en trouvera réduite—ainsi que d'autres espèces comme le homard, le bigorneau et l'oursin—et nul n'a réellement effectué d'études socio-économiques pour déterminer quel sera l'effet cumulatif sur l'économie de la péninsule Digby.
L'autre problème est que ce terminal maritime, avec sa jetée en projection de 200 mètres au large de Whites Point, gênera la navigation des petits navires qui fréquentent actuellement la zone. Les pêcheurs, les homardiers, les touristes pendant l'été—tous ces petits bateaux auront du mal à négocier les eaux à proximité et ce terminal engendrera d'énormes risques.
Une préoccupation tout à fait majeure est la contamination qui sera causée par les eaux de ballast amenées par ces énormes navires de 700 pieds de long venant du New Jersey, de la région de New York. Ces eaux de lestage seront remplies de toutes sortes d'organismes toxiques dont certains n'ont même pas été identifiés. Ils sont extrêmement dangereux, comme en témoigne le fait que sur Long Island le nombre de pêcheurs licenciés est tombé de 1 100 à 100 en l'espace de quatre ans. Ce n'est là qu'un des exemples.
Ce sont là des préoccupations majeures, mais principalement c'est l'angoisse devant ce qui va se passer dans cette péninsule étroite et fragile où la pêche est l'activité dominante. Celle-ci va disparaître en l'espace de quelques années.
Nous demandons donc que le comité se penche sur ces problèmes et veille à ce que le ministère des Pêches, qui sera l'organisme responsable de toutes ces décisions, en tiendra compte.
Merci.
À (1045)
Le président: Aimeriez-vous ajouter quelque chose?
M. Mark Dittrick: Oui. Vous avez demandé à la personne précédente ses titres de créances. Nous parlons ici d'une très grosse carrière produisant des agrégats et j'aimerais demander à Ashraf Mahtab de vous indiquer ses titres de compétence.
M. Ashraf Mahtab: En gros, j'ai commencé comme ingénieur des mines et j'ai obtenu ensuite le diplôme de génie civil. J'ai enseigné le génie minier à l'Université Columbia pendant huit ans. Je suis maintenant semi-retraité.
Mes titres me permettent de me prononcer sur les effets de l'extraction de roches, du dynamitage et d'autres effets miniers, dont l'un est la contamination de l'eau. Lorsque vous concassez le basalte avant l'expédition, vous devez le laver; et lorsque vous dynamitez le basalte, l'eau va percoler à travers la roche, ce qui fait qu'elle va se charger en métaux lourds et sera contaminée. Cette eau passera soit dans la nappe phréatique des maisons aux alentours soit se déversera en mer. Dans tous les cas, c'est de l'eau contaminée, ce qui aura des effets destructeurs sur la vie marine.
Le président: Merci.
Nous allons commencer la période de questions avec monsieur Stoffer.
M. Peter Stoffer: Merci beaucoup, monsieur le président.
Nous avons posé ces questions au ministre des Pêches la dernière fois qu'il a comparu devant le comité. Il nous a dit, à juste titre, que c'est la province qui pousse à la roue en faveur de cette carrière et de l'éventuelle prospection. Les promoteurs disent qu'aucune évaluation environnementale n'est requise car ils ne demandent à exploiter que 3,9 hectares, c'est-à-dire juste en dessous du seuil de déclenchement. Je ne vois pas comment cette société aurait pu trouver cet artifice sans les conseils d'un initié à l'intérieur de l'administration.
Gordon Balser était le ministre à l'époque. Il est maintenant votre député provincial. Nous savons quelle est la position de M. Thibault à ce sujet. Il a reçu la demande et il est obligé de suivre la procédure et j'en conviens. Mais le fait est que c'est principalement la province qui pousse à la roue. M. Balser est votre député provincial et j'aimerais savoir ce qu'il vous dit à ce sujet. La pêche dans cette région est de grande importance économique. Il serait intéressant de savoir ce que la province dit pour la défense de cette carrière.
M. Ashraf Mahtab: De combien de temps est-ce que je dispose?
Le président: Seize minutes.
M. Ashraf Mahtab: Bien. Si vous le permettez, j'aimerais remonter au 30 avril 2002, lorsque les voisins…
Le président: Désolé, vous avez 16 minutes en tout et il peut y avoir d'autres questions.
M. Ashraf Mahtab: Très bien.
Initialement, les 3,9 hectares contournaient la règle de l'évaluation environnementale, mais tout le monde au sein du gouvernement de Nouvelle-Écosse—et nous le savons maintenant de diverses sources—savait que ce ne serait jamais une petite exploitation. D'ailleurs, en juin et juillet, les promoteurs de la carrière ont rencontré le gouvernement de la Nouvelle-Écosse et le gouvernement fédéral. Certaines suggestions ont dû être faites. Mais cela est mentionné dans la demande d'autorisation du terminal portuaire qui a été déposée en mars.
Chaque fois que nous avons contacté le gouvernement de la Nouvelle-Écosse, et notamment M. Balser, on nous a assuré que les règles seraient suivies. Cependant, les règles ont toujours exigé que le MPO délivre un permis de dynamitage, et un tel permis n'a jamais été octroyé.
Le promoteur avait également très tôt demandé l'autorisation pour un terminal maritime et cette demande avait été rejetée. Puisqu'il s'est toujours agi d'une mégacarrière... Ils l'ont avoué, maintenant qu'ils ont commencé le terminal maritime, et reconnu qu'il s'agirait d'une carrière de 380 acres.
À (1050)
M. Peter Stoffer: Pour permettre au comité de... nous parlons-là d'une bande de terre très étroite. Il y aura de graves conséquences, non seulement pour le mode de vie de la population mais également pour l'écologie de toute la région. Nous savions depuis le début, monsieur le président, que cette compagnie ne voudrait jamais se contenter de 3,9 hectares. Elle a les yeux sur environ 600 hectares de terrain.
Ce qui est réellement affligeant, pour moi qui viens de Nouvelle-Écosse, c'est que la province ne retirera pas un sou de royalties de ce basalte car toute la production sera expédiée aux États-Unis et servira à l'asphaltage des routes américaines. Je ne comprends absolument pas pourquoi on voudrait détruire le gagne-pain de la population locale, plus toute la zone de pêche, plus l'environnement, rien que pour pouvoir brader une ressource de plus à un pays étranger. Cela défie le bon sens.
J'aimerais votre opinion. Que disent les gens par chez vous?
Mme Carol Mahtab: Puis-je dire un mot? Je n'ai pas de diplôme. Je suis une artiste peintre. J'ai été entraînée dans cette campagne avec grande réticence à cause de la menace qui plane sur la petite communauté tranquille que nous avons.
Nous avons des pêcheurs--une très bonne pêcherie de homard--de Westport jusqu'à Centreville, et vous avez toutes les cartes. Cela représente 10 millions de dollars; 40 bateaux pêchent le homard juste au large de... la zone qui sera directement touchée... je ne suis pas pêcheur, loin de là, j'apprends sur le tas.
On ne récolte pas le varech par ici, on n'y touche pas, car c'est la nurserie du homard, l'endroit où les homards pondent et où les jeunes grandissent et sont protégés jusqu'à leur départ en mer. C'est une industrie très florissante.
Il n'est question que de crise dans toute la pêche de la région Atlantique. Ici, elle n'est pas encore en crise. S'il vous plaît, aidez-nous. Laissez-nous tranquilles.
C'est pourquoi nous sommes venus. La collectivité grossit. Il y a l'écotourisme. Il y a l'observation des baleines autour de Bar Island et en fait tout le long de la péninsule aujourd'hui. Les baleines vont être touchées. Tout l'écosystème de la Baie de Fundy va être touché. Il a besoin d'être protégé, mais il est encore sain. Ne le plongeons pas dans une crise, lui aussi, comme partout ailleurs.
Ce sera une carrière à terre... C'est toute la Baie de Fundy qui sera touchée. Les Américains viennent ici et sont ravis de sortir en mer pour observer les baleines. Même les Européens viennent. C'est une jolie petite région, tranquille et heureuse qui vit de la pêche. Pourquoi détruire encore une autre région du Canada Atlantique?
Le président: Monsieur Dittrick.
M. Mark Dittrick: Je fais du travail environnemental depuis très longtemps. Je n'ai jamais vu un projet présentant autant d'inconvénients. Ce projet de carrière est de la pure folie. Il faut le stopper.
Un problème, et Carol vient de le mentionner, est la survie de la baleine franche. Récemment, on a déplacé les couloirs de navigation pour aider la baleine franche, pour réduire la probabilité de collisions avec les baleines franches venant depuis sud-est de Grand Manan. Le promoteur argue du déplacement des couloirs de navigation vers la carrière pour dire qu'il n'y a pas de risque de collision avec les baleines franches dans cette zone. Ce n'est simplement pas vrai. Le déplacement des couloirs de navigation a quelque peu réduit les risques de collision avec les baleines franches mais ajouter de 40 à 50 vraquiers de 45 000 tonnes dans ces couloirs de circulation réduira à néant tout l'avantage du déplacement de ces couloirs.
Une autre carrière au Nouveau-Brunswick, qui est presque la jumelle de cette carrière-ci, vient d'être rejetée par le ministre de l'Environnement du Nouveau-Brunswick. Elle aurait ajouté encore de 40 à 50 navires similaires dans ces couloirs de navigation. Dieu merci, ce projet-là a été enrayé.
Le gouvernement provincial de la Nouvelle-Écosse ne cesse de répéter qu'il n'a pas le pouvoir de stopper cette carrière, alors qu'il le possède. Il l'a.
À (1055)
Le président: Désolé de vous interrompre, mais pourrais-je vous poser à tous la question suivante? Supposons, hypothétiquement, que ce projet n'ait absolument rien pour lui. Je ne dis pas qu'il ne comporte aucun avantage, mais posons cette hypothèse. Quelle est la connexion fédérale? M. Stoffer a dit que c'est principalement une question environnementale de compétence provinciale. Nous avons entendu M. Mahtab dire que le MPO doit émettre un permis de dynamitage. Voilà donc la connexion fédérale. Si le MPO doit délivrer un permis de dynamitage, alors il doit se pencher sur tous les facteurs qui influencent le poisson.
Quel autre rôle fédéral y a-t-il? Il n'y a rien que notre comité puisse faire sinon formuler des recommandations au ministère des Pêches et Océans et au ministre. Aussi, pourriez-vous préciser ce que vous espérez que notre comité recommande dans la sphère de compétence fédérale, hormis l'aspect dynamitage dont vous avez parlé?
M. Ashraf Mahtab: L'octroi de l'autorisation de construction du terminal relève de la Loi sur la protection des eaux navigables, une compétence fédérale. Tout dommage causé à des cours d'eau terrestres par cette carrière est également du ressort fédéral--le gouvernement fédéral a compétence sur tous les cours et plans d'eau.
Le président: Est-ce que les couloirs de circulation relèvent de Transports Canada?
M. Mark Dittrick: Transports Canada était l'une des parties à la décision de les déplacer.
Le président: J'essaie de limiter le champ au rôle fédéral…
M. Mark Dittrick: Mais je pense que le MPO a également joué un rôle.
Le président: Y a-t-il d'autres connexions fédérales avec ce projet?
Mme Carol Mahtab: Eh bien, la pêche, la pêche de la pétoncle, la…
Le président: Il faudra donc déterminer si ce projet aurait des répercussions sur la pêche.
Mme Carol Mahtab: Oui. Il y a d'autres effets néfastes sur le littoral—par exemple, les bancs de homard, la nurserie de baleines en été. Les baleines sont là. Elles sont arrivées, nous les avons vues. Vous pouvez aller à Whites Cove et constater que les baleines sont de retour.
La pêche du homard, la pêche de la pétoncle, le hareng, l'aiglefin, le poisson de fond, la goberge—le hareng remonte jusqu'au fond de la Baie de Fundy pour frayer. C'est la pêche qu'il faut protéger.
Je pense que vous entendez partout le même refrain: le ministère des Pêches et Océans doit protéger la pêche.
Le président: Je pose la question car très souvent on nous dit que c'est du ressort provincial ou si l'on s'adresse à la province, que c'est du ressort fédéral. On se renvoie beaucoup la balle et j'essaie de cerner quelle est la responsabilité du MPO afin que nous puissions lui demander sa position sur ces divers éléments.
Monsieur Elley.
M. Reed Elley: À ce sujet, monsieur le président, ce que vous avez réellement demandé au MPO, c'est qu'il lance une étude d'impact environnemental sur la pêche pour voir dans quelle mesure cette carrière nuirait à la pêche. C'est cela que vous nous demandez de faire, n'est-ce pas?
Mme Carol Mahtab: Oui.
M. Reed Elley: Et conseiller au ministre, sur cette base, de ne pas accorder le permis de dynamitage.
Mme Carol Mahtab: Ni le terminal maritime.
M. Reed Elley Donc c'est en rapport avec votre situation particulière. Voilà les choses que nous pouvons faire.
Á (1100)
Mme Carol Mahtab: Sans du tout posséder de qualifications, lorsque j'entends le MPO parler de protéger la limite des 200 milles... pourquoi ne protège-t-il pas la Baie de Fundy, bon Dieu? Ce sont là des eaux entièrement canadiennes.
Nous avions des navires polonais qui venaient dans la Baie de St. Marys. Je me souviens les avoir vus dans le temps. C'était avant que la pêche décline tellement. Mais si la Baie de Fundy n'est pas canadienne, qu'est-ce qui peut l'être?
M. Reed Elley: C'est une question quelque peu rhétorique…
Le président: Monsieur Elley, excusez-moi, mais M. Dittrick voulait ajouter un mot.
M. Mark Dittrick: Un examen complet par une commission ne ferait pas de mal. Actuellement, c'est seulement censé être une étude complète. Voilà le niveau d'évaluation qui sera effectué. Je pense qu'un premier pas serait d'exiger une étude complète par une commission.
Il y a tellement d'aspects différents. Il y a les nombreux impacts socio-économiques. L'impact sur la pêche, en particulier dans le marais de Digby, un secteur privilégié pour la pétoncle—vous avez probablement ces chiffres. Le quota a été accru de nettement plus de 50 p. 100. Je pense que la valeur des prises est passée de 28 millions de dollars à quelque 43 millions de dollars aujourd'hui. Les pêcheurs de pétoncle de la région de Digby sont très inquiets devant l'effet potentiel des espèces envahissantes sur cette pêcherie.
Pour ce qui est du conditionnement, il y a une usine à Little River qui traite non seulement le poisson local mais aussi du poisson de l'Alaska. Je ne sais pas comment ils s'y prennent. Elle emploie 20 personnes. Si la nappe phréatique baisse le moindrement et qu'elle n'a plus accès à l'eau douce, cette usine fermera ses portes.
La carrière n'apportera que 30 emplois. Il est intéressant que le député fédéral soit Robert Thibault et le député provincial Gordon Balser—il est le ministre des Pêches provincial. Nous avons donc des ministres des Pêches comme élus locaux et voilà que l'on risque de détruire la pêche en Nouvelle-Écosse.
Je signale en passant que cette région, la péninsule Digby, a été citée par les Nations Unies—nous pouvons vous trouver cette référence également—comme exemple de développement économique durable. Elle a été citée en exemple par les Nations Unies comme région ayant effectué la transition entre les activités plus traditionnelles et l'écotourisme.
Les gens viennent dans la péninsule Digby pour observer les baleines, et non pas regarder les navires leur passer dessus et les tuer. Une baleine tuée à cause du trafic supplémentaire dans ces couloirs de navigation et ce sera la fin de l'observation des baleines le long de la péninsule Digby.
Si vous voulez des statistiques sur la valeur de cette industrie, la Tourism Industry Association of Nova Scotia pourra vous les fournir.
M. Reed Elley: Les gens viennent nous voir et parlent des énormes problèmes environnementaux d'un projet comme celui-ci. Cela semble parfaitement fondé. Selon ce que les gens comme vous nous disent, ce projet ne devrait pas se faire. M. Stoffer dit que c'est le gouvernement provincial qui pousse à la roue. Pourquoi le fait-il? Qu'a-t-il à gagner face à tous ces inconvénients? Cela dépasse l'entendement.
M. Ashraf Mahtab: C'est toujours ce que nous nous sommes demandés aussi. Il n'y absolument aucun bénéfice; il n'y a pas de royalties sur le basalte, qui n'est pas une pierre de construction. Il n'y a pas de royalties. Nous nous sommes toujours demandés pourquoi le gouvernement provincial a encouragé le promoteur, d'abord avec le projet de petite carrière et maintenant de grande carrière.
Nous voyons les gens aller et venir dans le bureau de Balser. M. Balser distribue des demandes d'emploi pour des postes dans la carrière. Pourquoi l'encourage-il? Nous n'avons aucune idée. Nous ne voulons pas formuler d'hypothèses.
M. Reed Elley: Si vous pouvez mettre le doigt dessus, vous aurez votre réponse.
Le vice-président (M. Peter Stoffer): Je rappelle que M. Balser est maintenant le ministre des Pêches de la Nouvelle-Écosse.
M. Wood a une question.
M. Bob Wood: C'est manifestement la première fois que quelqu'un veut être associé à ce projet.
De quel échéancier parle-t-on ici? Quand projette-t-on de faire tout cela? Est-ce que les travaux ont déjà commencé? Si nous voulons intervenir avant que les travaux commencent, de combien de temps disposons-nous? J'espère que ce n'est pas un fait accompli, mais quels sont les délais?
Á (1105)
M. Ashraf Mahtab: Ils ont seulement déposé la demande d'autorisation du terminal maritime en mars, je crois. On nous dit que les formalités prendront de six à neuf mois, notamment le dépôt du document d'évaluation environnementale, de l'examen de tout le dossier et de la consultation de tous les ministères. Il faut compter au moins six mois à partir de mars, ce qui nous mène donc vers la fin de l'année.
Cependant, si certaines autorisations sont accordées avant cela, il pourra être trop tard car l'ALENA peut intervenir également. Si vous refusez au bout de six mois à un promoteur les permis d'exploitation, alors il peut vous poursuivre. Dans ce cas, et le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial seront tenus responsables—mais c'est nous qui devrons payer.
Mme Carol Mahtab: Le ministère des Pêches et Océans est l'autorité responsable du mécanisme d'évaluation environnementale actuellement en cours.
M. Bob Wood: Merci.
Le président: Monsieur Roy.
[Français]
M. Jean-Yves Roy: Merci, monsieur le président.
J'aurais juste une question toute simple, parce que j'ai raté le début de votre présentation. Est-ce qu'une évaluation environnementale a été faite, particulièrement au niveau de l'érosion des berges? Si le tonnage des navires est très important, ça va effectivement avoir un très grand impact sur les berges parce que ça provoque une vague très importante. C'est un problème qu'on a ailleurs, dans plusieurs régions.
Je voudrais savoir si une évaluation environnementale a été faite et s'il y a eu une évaluation au niveau de l'érosion des berges.
[Traduction]
M. Ashraf Mahtab: Ils ont commencé d'abord en dessous du seuil de 3,9 hectares, c'est-à-dire sans exigence d'une évaluation environnementale. Maintenant qu'ils ont demandé la construction du terminal maritime, dont ils ont admis qu'il fera partie d'une carrière de 380 acres, l'évaluation environnementale va intervenir. Ils sont en train de rassembler les données et de combiner toutes les diverses demandes. Le processus doit donc commencer maintenant et l'évaluation devra être faite pour cette taille de carrière.
La question de l'envasement et de l'érosion sont toutes deux très importantes. Il faudra les poser au moment de déterminer les paramètres et de l'étude complète--et si l'on va passer à une commission d'étude, à ce moment-là aussi, bien sûr.
Merci de votre commentaire.
Le président: Merci infiniment de votre exposé.
Mme Carol Mahtab: Merci.
M. Ashraf Mahtab: Merci.
Le président: Notre dernier témoin sera M. MacDonell.
Bienvenue, monsieur. Nous sommes impatients d'entendre ce que vous avez à dire.
M. John MacDonell (porte-parole pour les pêches, Nouveau Parti démocratique, Assemblée législative de la Nouvelle-Écosse): Merci, monsieur le président.
J'apprécie cette occasion de prendre la parole devant votre comité et je ne laisse passer aucune occasion de parler à qui veut bien m'écouter. J'espère que les propos tenus par les autres témoins aujourd'hui et ce que je vais dire moi-même auront une influence sur les décisions de ce comité, et ultérieurement sur les décisions du ministre et de son administration.
Monsieur le président, je me nomme John MacDonell et je suis le député provincial de la circonscription Hants East de Nouvelle-Écosse. Je suis le critique pour la pêche du Nouveau Parti démocratique.
Je vous remercie de cette invitation à comparaître devant le Comité permanent des pêches et des océans. Nous vivons un moment turbulent dans la pêche, avec les actes de violence survenus à Shippagan, au Nouveau-Brunswick, le boycott de la pêche par les pêcheurs de crabe des neiges du fait de la diminution des quotas et la fermeture de la pêche de la morue à Terre-Neuve. Si jamais il y a eu un moment où Ottawa devait écouter pour comprendre l'effet de ses politiques en matière de pêche, c'est bien maintenant.
En substance, le MPO doit arrêter de démolir les économies locales avec sa politique de privatisation de la gestion de la pêche imposée d'en haut. Peut-être le meilleur exemple de ce que j'entends par là a-t-il été donné par Graeme Gawn de l'Union des pêcheurs des Maritimes. M. Gawn vit et pêche dans le comté de Digby depuis très longtemps. Lorsqu'il a commencé, il existait dans le comté une grosse flotte de bateaux de pêche appartenant à des particuliers et exploités par leur propriétaire, dont des dragueurs de pétoncle hauturiers et côtiers, des bateaux senneurs, des chalutiers et une flottille viable de bateaux côtiers polyvalents pêchant le homard et, avec des engins fixes, le poisson de fond et le hareng.
Ensuite, le MPO a introduit les quotas individuels transférables. Qu'il s'agisse de quotas pour les particuliers ou de contingents d'entreprise, les plus gros navires dans chaque secteur de pêche n'ont pas tardé à faire l'objet de plans de privatisation. C'est ce que voulaient le MPO et les acheteurs de poisson. En 1983, le MPO a introduit les QIT pour les senneurs. La florissante pêche du hareng au filet dont vivaient des centaines de navires côtiers en a été durement touchée. Le MPO n'a pas contrôlé la prise totale admissible et les senneurs n'ont pas tardé à inonder le marché de hareng à bas prix.
Gawn dit qu'il était normal pour un senneur de débarquer le double de son quota et de se faire payer pour la moitié. Les petits pêcheurs ne pouvaient pas suivre, ayant besoin d'être payés pour chaque livre débarquée, et ils ont donc été évincés du marché et les stocks de hareng ont été décimés. Le but du MPO était de réduire la surcapacité. Il a réduit le nombre de navires, mais il a totalement ignoré le fait que les bateaux à senne coulissante seraient remplacés par d'autres ayant deux ou trois fois la capacité de pêche et coûtant deux ou trois fois plus. Le MPO a laissé faire car peu lui importait le type de navire utilisé par les pêcheurs pour prendre leur quota individuel.
Aujourd'hui, il y a une quarantaine de bateaux dans la flottille de senneurs, ayant trois fois la capacité des 52 qu'ils ont remplacés. Le récif de la Trinité, le vivier de hareng, est aujourd'hui stérile. Je suis d'accord avec Gawn lorsqu'il argue que sans le système des QIT et l'absence de contrôle pendant dix ans, nombre de ces senneurs auraient disparu. Dans la précipitation à lancer des navires plus gros dans les eaux du large, nul n'a réfléchi aux conséquences pour la pêche côtière dont la viabilité était séculaire.
Ensuite, lorsque les marchés déprimés et les taux d'intérêt élevés ont menacé la survie de la pêche hauturière au début des années 80, on a eu recours à la méthode canadienne habituelle face à une crise: on a formé une commission royale.
Le rapport du groupe de travail Kirby recommandait d'accroître la flotte de chalutiers, ignorant virtuellement tout soutien à l'effort de pêche côtier. Ottawa et les grosses sociétés de pêche ont vu l'aubaine. Ainsi, la corporatisation à grande échelle a-t-elle commencé avec l'injection de fonds publics. Cette restructuration du secteur a donné naissance à deux géants, National Sea et Fishery Products International, et maintenant Highliner a été racheté par Clearwater qui contrôle dorénavant 50 p. 100 de la pétoncle.
Nous voyons donc le résultat: la pêche par écrémage où les espèces commercialement les moins rentables sont rejetées par-dessus bord et la décimation de nombreux stocks, résultat qui était douloureusement prévisible.
La morue est maintenant une espèce en danger à Terre-Neuve et cette province, qui en a vécu pendant des siècles, voit son économie dévastée. La concentration dans la pêche atteint des sommets et des localités comme Canso ici, en Nouvelle-Écosse, peut-être le plus ancien village de pêche en Amérique du Nord, n'ont plus rien. On aurait dû prévoir les Digby et les Canso et les villages de pêche anéantis de Terre-Neuve, mais nous n'avons rien vu venir.
À mon avis, il faut renoncer à cette idée de donner à quelques privilégiés des droits de pêche privés. Cette ressource commune devrait être exploitée dans l'intérêt du plus grand nombre et la pratique des QIT ne va pas dans ce sens.
L'Islande nous a averti que les QIT transformeraient une ressource commune en ressource privée. Arthur Bogason, président de l'Association nationale islandaise des petits pêcheurs a indiqué que l'introduction des QIT dans son pays a entraîné une flambée de chômage et une baisse des emplois dans la pêche. Les QIT ont été introduits en 1991. Avant cette date, on comptait 1 043 petits navires de pêche. Dans les trois années et demie qui ont suivi, de grandes sociétés ont racheté 700 de ces bateaux et ont transféré les quotas à de gros chalutiers. Un village islandais s'est réjouit lorsqu'un chalutier congélateur flambant neuf a fait son entrée dans le port; mais 70 emplois ont disparu dans ce village lorsque l'usine de poisson locale a fermé ses portes, supplantée par le chalutier congélateur. Cette histoire vous rappelle quelque chose?
En outre, Bogason fait valoir que les QIT ne peuvent pas être économiquement efficients s'ils sont concentrés aux mains de grosses sociétés. Des études islandaises ont montré que les plus gros profits de la pêche sont engendrés par les petits bateaux. Ces derniers créent trois fois plus d'emplois que les chalutiers, ils coûtent moins cher en carburant et ils prennent du poisson de meilleure qualité et de prix supérieur. Une étude islandaise a conclu également qu'il en coûte environ 30 millions de dollars pour un chalutier congélateur avec un équipage de 30, mais que 30 petits navires avec un équipage d'une personne ne coûteraient qu'environ 8,4 millions de dollars.
Un autre critique des QIT est Parcival Copes, de l'Institute of Fisheries Analysis de l'Université Simon Fraser. Il dit que les QIT ont rendu la pêche plus profitable pour un petit nombre mais que leur effet négatif sur les collectivités et l'habitat du poisson dépassent grandement les avantages. Il dit que les QIT encouragent les pêcheurs à rejeter en mer la prise secondaire ou les poissons de mauvaise qualité et petite taille. Ils encouragent les dépassements de quotas et le braconnage et le racket. Il y a de meilleures solutions.
L'une d'elles, que nous appuyons de tout coeur, est la gestion communautaire ou la cogestion locale. Cette méthode permet aux pêcheurs et à d'autres d'une région géographique de fixer les quotas et de gérer la pêche pour eux-mêmes. Nous en avons vus des exemples réussis ici même, en Nouvelle-Écosse. Le Fundy Fixed Gear Council, présidé par Arthur Bull, a instauré un système de gestion communautaire le long de la côte de Fundy. Il représente 230 pêcheurs qui s'entendent pour gérer leur pêche côtière. Cette méthode favorise les petits pêcheurs indépendants par rapport aux intérêts privés et fait que la ressource halieutique reste un bien public plutôt que de donner à certains particuliers le droit privé de prendre du poisson.
Sambro Fisheries est un autre exemple de système de gestion communautaire. Là, 65 navires ont adhéré à un système de gestion collectif. Le MPO a alloué un quota au groupe et celui-ci a élaboré un plan de gestion qu'il administre et contrôle. Sam Ellsworth a été le pionnier de ce projet et Donny Hart l'a maintenant remplacé. Sambro Fishery conditionne de 65 p. 100 à 70 p. 100 du poisson pris mais expédie également du poisson entier à des marchés comme Boston où le prix est favorable. La clé, c'est la flexibilité et l'autogestion. Je leur souhaite beaucoup de succès pour l'avenir.
Je sais, cependant, que certaines collectivités ne sont pas convaincues des avantages de la cogestion locale. La côte sud de la Nouvelle-Écosse semble être rétive à cette idée. Aussi, si l'on va utiliser les QIT dans ces régions, j'ai une proposition pour éviter qu'ils soit thésaurisés par les grosses sociétés de pêche. Les caisses de crédit aux pêcheurs offrent traditionnellement des capitaux pour l'achat de bateaux de pêche. Pourquoi ne pourrait-on élargir leur rôle de façon à financer aussi l'achat de QIT? Si l'accès à ces derniers était limité aux petits pêcheurs indépendants ou aux nouveaux venus dans le secteur, cela enrayerait la concentration sectorielle et amènerait du sang neuf dans une population de pêcheurs grisonnante. Cela assurerait également la survie de nos villages côtiers vivant de la pêche depuis des siècles. Des provinces comme la Nouvelle-Écosse auraient du mal à offrir un tel financement, mais des crédits fédéraux pour une telle initiative pourraient être administrés par les caisses de crédit existantes, évitant d'avoir à créer une structure administrative de plus pour le programme.
J'aimerais aborder très brièvement quelques autres sujets, pour l'édification du comité.
Je suis atterré par la décision du ministre fédéral des Pêches de fermer la pêche de la morue à Terre-Neuve. Terre-Neuve a été construite sur la pêche à la morue et sa survie en dépend.
Terre-Neuve n'est pas convaincue que la fermeture est fondée sur les meilleures connaissances scientifiques disponibles. Le comité pluripartite de Terre-Neuve a recommandé que la pêche reste ouverte, considérant que si elle est correctement gérée, les stocks pourraient se reconstituer avec le temps. Mais les recommandations ont été ignorées et maintenant les villages côtiers de Terre-Neuve dépérissent. Le ministre doit revoir cette décision. Je veux souligner que ces décisions doivent reposer sur un fondement scientifique solide et nous ne sommes pas entièrement convaincus que tel ait été le cas.
Comme le comité le sait, l'aquaculture est en expansion à l'échelle mondiale. La Nouvelle-Écosse compte près de 370 baux et 200 sites aquacoles actifs, mais les localités environnantes s'inquiètent des effets écologiques et de la viabilité de ces exploitations.
L'inquiétude en Colombie-Britannique a atteint un stade tel qu'un moratoire a été imposé à l'industrie, qui vient seulement d'être levé. Les pêcheurs craignent que les déchets de ces sites détruisent les zones propices au homard et nuisent à d'autres espèces de poisson.
Ces poissons d'élevage s'échappent souvent et certains biologistes craignent que les croisements avec l'espèce indigène ne détruisent les stocks sauvages. Une aquaculture de l'Île-du-Prince-Édouard élève expérimentalement du poisson génétiquement modifié. Ce saumon grossit trois fois plus vite que l'espèce indigène. Cette ferme est située sur terre car l'on craint que si le poisson modifié s'échappait, il supplanterait en l'espace de quelques générations le saumon sauvage.
Les connaissances scientifiques à cet égard sont insuffisantes et je pense donc qu'il est temps d'invoquer le principe de précaution. Bien que la compétence en matière d'aquaculture soit largement provinciale, le MPO a néanmoins la responsabilité de protéger les stocks de poisson. Je pense qu'il est temps que le MPO exige que l'aquaculture soit pratiquée dans des systèmes de confinement fermés afin de protéger les espèces sauvages et l'habitat du poisson.
Je dois dire que je ne vois pas l'intérêt de risquer des pêcheries qui sont saines et viables et ont fait vivre la population en introduisant l'aquaculture dans des zones où elle peut dégrader l'habitat. Je songe en particulier à la pêche du homard. Si l'on calculait le prix qu'il en coûterait pour élever le homard en aquaculture alors que la nature fournit le milieu gratuitement, je pense que le risque posé par l'aquaculture dépasse de loin les avantages.
La prospection sismique du pétrole et du gaz. Le NPD se joint aux pêcheurs du Cap-Breton dans leur opposition aux sondages sismiques en mer par les compagnies pétrolières et gazières. On n'a jamais déterminé les effets des sondages sismiques sur les habitats fragiles du poisson. Avant d'autoriser de tels tests, une étude environnementale exhaustive doit être faite qui prouve de manière concluante l'absence d'effets néfastes pour la pêche.
La prospection sismique m'amène au projet controversé d'ouverture d'une carrière de basalte dans la péninsule Digby. Ce secteur jouit d'une pêche florissante et d'un secteur écotouristique en expansion. C'est également l'un des derniers bastions de la baleine franche.
La province a agréé une carrière de 3,9 hectares, mais il faut aussi des autorisations fédérales pour le quai, auquel la compagnie a l'intention d'amarrer de gros vraquiers. La baleine franche n'a certes pas besoin d'une intensification du trafic maritime dans la Baie de Fundy à ce stade, pas plus que les pêcheurs n'ont besoin de gros navires traversant leurs zones de pêche traditionnelles.
Cette compagnie n'a pas caché son intention de créer une carrière de 300 hectares et de transporter les agrégats jusque sur la côte Est des États-Unis. Cela créera peut-être 30 emplois, mais le dynamitage à grande proximité du littoral pourrait entraîner des effets imprévisibles pour l'habitat du poisson.
Pourquoi mettre en danger nos industries traditionnelles en échange d'une poignée d'emplois? Les carrières ouvrent et ferment, mais la pêche reste l'ossature économique de ces collectivités. Je demande au MPO d'assurer que des évaluations environnementales exhaustives soient menées sur les effets de ce projet avant qu'une seule tonne de gravier ne soit extraite de la péninsule Digby.
On me dit qu'un groupe de citoyens de la péninsule opposé à la carrière s'est vu refuser la comparution devant votre comité.
Une voix: Ils ont comparu.
M. John MacDonell: Ils ont comparu. Merci. J'apprends au moins une bonne nouvelle aujourd'hui. Excellent.
Ils éprouvent des inquiétudes légitimes sur les effets de cette exploitation sur la pêche, l'écotourisme et l'observation des baleines.
Je remercie donc le comité d'avoir autorisé le groupe à comparaître et j'espère que leurs préoccupations seront répercutées plus haut. Je veux moi aussi remercier le comité de m'avoir autorisé à faire cet exposé et je me ferais un plaisir de répondre à vos questions.
Á (1115)
Le président: Merci beaucoup, monsieur.
Je vais demander à M. Elley s'il a des questions.
M. Reed Elley: Monsieur MacDonell, sachez que nous entendons les mêmes préoccupations sur la côte ouest. Nous avons les mêmes craintes.
Ce qui me désole souvent—et vous êtes un politicien provincial et vous comprenez bien ce que je veux dire—c'est que ce qui paraît bon du point de vue provincial apparaît souvent comme beaucoup moins favorable du point de vue fédéral, dans une perspective d'ensemble.
Auriez-vous des conseils à nous donner sur la manière dont nous pourrions faciliter un dialogue entre gouvernements provinciaux et fédéral, de telle façon que le tableau d'ensemble soit pris en compte, à la place de cette vision myope qui prédomine souvent au niveau provincial? Je ne critique pas les responsables provinciaux, mais vous voyez où je veux en venir.
Á (1120)
M. John MacDonell: Je crois savoir où vous voulez en venir.
La première chose qu'il faut dire, c'est que, que nous représentions une municipalité, une province ou le pays, nous sommes tous Canadiens. Donc, dans l'ordre général des choses, peu importe où l'on tire les traits sur la carte ou quelle compétence le gouvernement fédéral délègue aux provinces ou aux municipalités. En dernière analyse, nous sommes tous Canadiens. Les ressources de ce pays, me semble-t-il, devraient être partagées entre tous ses habitants.
S'il est un message que vous devriez ramener à Ottawa, c'est que les inquiétudes des habitants de ces localités côtières sont véritables. Ils ne cherchent pas la bagarre; ils veulent simplement l'accès aux ressources de façon à réaliser leurs rêves et ceux de leurs familles et pouvoir envoyer leurs enfants à l'université, ou ce genre de choses. Voilà ce qu'ils veulent faire. Nous avons tous des désirs et aspirations différents et, pour autant que je sache, nous n'avons droit qu'à un seul passage sur terre et il n'est pas question de revenir et recommencer.
Donc, il faut d'abord réaliser que nous sommes d'abord Canadiens, nous tous, et voilà le message qu'il faut transmettre au gouvernement fédéral de telle façon que lorsqu'il prend des décisions, il réfléchisse d'abord aux effets sur les êtres humains et élabore sa politique en conséquence, c'est-à-dire de manière à bénéficier au plus grand nombre possible et non à quelques privilégiés. Je pense que si le gouvernement fédéral procédait ainsi, il en sortirait gagnant.
L'autre chose que je dirais, c'est de ne pas prétendre réparer ce qui n'est pas cassé.
M. Reed Elley: Merci.
Le président: Merci, monsieur Elley.
Monsieur Roy.
[Français]
M. Jean-Yves Roy: Monsieur Elley vient d'affirmer que le gouvernement fédéral cause beaucoup de problèmes aux gouvernements des provinces parfois. Moi, je dirais que c'est toujours et tout le temps, mais en tout cas, on va en rester là. Je ne veux pas faire de politique trop partisane ce matin.
Vous avez abordé un sujet que d'autres intervenants ont abordé et qui m'intéresse parce que nous avons le même problème pour ce qui est de la recherche de gaz dans le golfe Saint-Laurent. Actuellement, on a un problème parce que, effectivement, il n'y a pas eu d'évaluation environnementale et malgré ce fait, il y aurait possiblement des activités de prospection pour le gaz.
Je sais que le Comité des pêches et des océans s'est penché sur le dossier il y a un an ou deux ans, si ma mémoire est bonne, et dans un des rapports, on avait justement émis l'opinion qu'il fallait auparavant qu'il y ait des études environnementales et qu'on s'assure qu'il n'y ait aucun impact sur les ressources.
Vous n'avez pas été très loin dans votre position là-dessus; vous avez juste abordé la question. J'aimerais que vous alliez un petit peu plus loin, parce que je connais un peu moins bien ce qui se passe ici par rapport à ce qui se passe chez nous. Il y a eu un moratoire d'accordé, mais je ne suis pas certain que le moratoire n'est pas levé et je ne suis pas certain, comme on nous l'a mentionné tout à l'heure, qu'il n'y aura pas d'autres explorations. Je voudrais que vous me précisiez cela, c'est-à-dire que vous me traciez brièvement un portrait de ce qui se passe ici à l'heure actuelle.
[Traduction]
M. John MacDonell: À ma connaissance il n'y a pas de moratoire et la zone entourant le Cap-Breton fait l'objet d'études. On n'effectue peut-être pas encore beaucoup de sondages sismiques, mais rien ne les empêcherait. Notre crainte est qu'on les fasse sans que soit menée une étude environnementale complète qui examine concrètement les effets à long terme sur la pêche, et il semble n'y avoir aucun mouvement dans cette direction.
Á (1125)
[Français]
M. Jean-Yves Roy: Ce que vous êtes en train de me dire, c'est que même s'il y a peu d'activité sismique, il y en a quand même, et ce, sans autorisation du ministère des Pêches et des Océans, c'est-à-dire sans qu'il y ait eu une évaluation environnementale?
[Traduction]
M. John MacDonell: Je ne suis pas certain que des sondages sismiques aient lieu. Tout ce que je peux dire pour le moment, c'est que rien n'indique que l'on prévoie la moindre étude environnementale susceptible de les empêcher. Voilà donc ma crainte, à savoir que ces sondages aient lieu sans études environnementales.
[Français]
M. Jean-Yves Roy: Effectivement, quand il s'agit de l'océan, l'évaluation environnementale doit être exigée par Pêches et Océans, et non pas par la province.
[Traduction]
M. John MacDonell: Je crois que tel est le cas.
[Français]
M. Jean-Yves Roy: Merci.
[Traduction]
Le président: Thank you, Mr. Roy.
Monsieur Wood.
M. Bob Wood: J'ai plusieurs questions.
Monsieur MacDonell, nous avons reçu ce matin Arthur Bull et j'ai relevé que vous avez dans votre mémoire quelques paragraphes sur son système de gestion communautaire sur la côte de la Baie de Fundy.
Vous avez dit également que l'idée ne semble pas avoir de succès sur la côte sud de la Nouvelle-Écosse. Comment cela se fait-il? La cogestion de la pêche paraît pourtant une chose logique.
M. John MacDonell: En fait, je ne sais pas pourquoi. Il me semble moi aussi que toute collectivité devrait souhaiter suivre cette approche. C'est peut-être dû à l'esprit d'indépendance des pêcheurs de la région, mais je ne connais pas vraiment la raison. J'aimerais connaître la réponse et j'aimerais pouvoir aider les gens dans cette région.
Je sais que l'un de leurs problèmes est lié au financement, en vue de l'achat de licences. Ils peuvent acheter les navires, mais ils ne peuvent obtenir de financement pour la licence auprès de la caisse de crédit des pêcheurs. Ils ne semblent pas vouloir aller dans la direction de la cogestion et peut-être est-ce dû au fait qu'ils touchent le prix qu'ils souhaitent pour leurs prises et que cela leur suffit.
M. Bob Wood: En tant que critique néo-démocrate pour la pêche, avez-vous beaucoup de contacts avec l'Union des pêcheurs des Maritimes?
M. John MacDonell: Pas beaucoup. De fait, je crois que la plupart des associations de pêcheurs—et je n'ai traité moi-même qu'avec deux ou trois—s'adressent davantage à nos homologues fédéraux qu'aux responsables provinciaux, simplement à cause de la compétence fédérale dès que le poisson arrive à quai, comparé à ce qui s'est passé dans l'océan sur le plan des quotas, allocations, etc.
M. Bob Wood: L'Union était censée comparaître ce matin et ne sait pas présentée, pour quelque raison. J'espérais que vous pourriez me renseigner.
M. John MacDonell: Non, je ne peux rien vous dire.
Le président: Merci, monsieur Wood.
Monsieur Stoffer.
M. Peter Stoffer: Merci, monsieur le président.
John, merci beaucoup de comparaître. Je sais que vous êtes très occupé en cette saison d'agnelage et il est agréable de vous voir en dehors de votre ferme pour parler de pêche.
Mais, monsieur, l'an dernier la province allait instituer une politique visant à réduire le nombre d'acheteurs de homard en contraignant ces derniers à augmenter la capacité de leur vivier. Je crois savoir qu'actuellement un acheteur de homard n'est obligé de posséder qu'une capacité de stockage d'environ 5 000 kilos—rectifiez si je me trompe—et on allait porter ce volume à 12 500. Si j'ai bien compris, cette mesure a été annulée à cause du tollé chez les acheteurs du homard.
Mais cela nous ramène à ce que je disais tout à l'heure au sujet d'un QIT sur le homard. Si vous ne pouvez attribuer aux pêcheurs de homard un QIT, alors la façon de s'y prendre c'est de réduire le nombre des acheteurs de homard en les forçant à posséder une certaine capacité—ce qui était stupide aux yeux des petits négociants en homard qui assuraient des prix compétitifs, et donc la mesure a été suspendue.
Pourriez-vous nous expliquer très brièvement ce qui s'est passé de manière un peu plus détaillée et nous dire s'il est question de revenir à la charge ultérieurement?
M. John MacDonell: Nous n'avons aucune indication que le gouvernement prévoit de revenir à la charge.
Á (1130)
M. Peter Stoffer: Je précise qu'il s'agit là du gouvernement provincial.
M. John MacDonell: Oui, le gouvernement provincial.
En fait, on ne nous a jamais vraiment expliqué les raisons, mais il semble bien que ceux qui souhaitaient accès à plus de homard, les gros négociants, ont cherché à convaincre le gouvernement que ce serait une meilleure façon d'organiser la commercialisation et de servir la clientèle. Mais on a bien vu que le négoce tomberait aux mains d'un nombre toujours plus réduit d'acteurs et que les petits exploitants seraient évincés à cause du coût d'agrandissement de leur vivier. Il en résulterait donc une concurrence réduite, c'est-à-dire que le consommateur se retrouverait lésé car il n'y aurait plus de concurrence sur le prix.
En outre, les petits négociants, ayant une moindre capacité de stockage, connaissent une rotation plus rapide des homards, c'est-à-dire que le consommateur, avec eux, non seulement bénéficient d'un meilleur prix, mais aussi d'un meilleur homard.
Nous n'avons rien vu le mois dernier qui donne à penser que la province va revenir à la charge. Je pense qu'elle a renoncé à ce plan. Je pense qu'elle reconnaît que les négociants en place seraient défavorisés, sans parler des consommateurs.
Le président: Merci beaucoup de votre exposé et d'avoir comparu, monsieur.
Je remercie les membres du comité. Les choses roulent plutôt bien aujourd'hui.
Je veux rappeler aux membres du comité et aux personnes dans l'auditoire, si certains veulent rester—et je remercie, en passant, tout le monde de leur présence—que nous reviendrons à 12 h 45 pour entendre Ransom Myers, de l'Université Dalhousie.
Nous aurons également des représentants, nous l'espérons, de l'Office Canada–Nouvelle-Écosse des hydrocarbures extracôtiers pour nous parler de prospection sismique et de ce genre de choses.
Nous entendrons également une mise à jour sur un autre sujet intéressant que notre comité a abordé, à savoir le déversement en mer d'armes chimiques de la Seconde Guerre mondiale par le Canada. Nous entendrons à ce sujet Myles Keyoe, ainsi que la Société pour la protection des parcs et des sites naturels du Canada.
Je vous remercie. La séance est levée.