HERI Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Comité permanent du patrimoine canadien
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 28 novembre 2002
Á | 1105 |
Le président (M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.)) |
M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin, Lib.) |
Á | 1110 |
Á | 1115 |
Le président |
M. Brent St. Denis |
Le président |
M. Brent St. Denis |
Le président |
M. Leon Benoit (Lakeland, Alliance canadienne) |
M. Brent St. Denis |
M. Leon Benoit |
M. Brent St. Denis |
Le président |
M. John Harvard (Charleswood—St. James—Assiniboia, Lib.) |
M. Brent St. Denis |
M. John Harvard |
Á | 1120 |
M. Brent St. Denis |
M. John Harvard |
M. Brent St. Denis |
M. John Harvard |
M. Brent St. Denis |
Le président |
Mme Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.) |
M. Brent St. Denis |
Le président |
M. Paul Bonwick (Simcoe—Grey, Lib.) |
M. Brent St. Denis |
M. Paul Bonwick |
M. Brent St. Denis |
M. Paul Bonwick |
M. Brent St. Denis |
Le président |
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ) |
Á | 1125 |
Le président |
M. John Harvard |
Le président |
Le président |
M. Brent St. Denis |
M. John Harvard |
Le président |
M. Brent St. Denis |
Le président |
Le président |
M. Ian Morrison (porte-parole, Friends of Canadian Broadcasting) |
Á | 1135 |
Á | 1140 |
Á | 1145 |
Le président |
M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Alliance canadienne) |
M. Ian Morrison |
M. Chuck Strahl |
M. Ian Morrison |
Á | 1150 |
M. Chuck Strahl |
M. Ian Morrison |
M. Chuck Strahl |
M. Ian Morrison |
M. Chuck Strahl |
Le président |
Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD) |
Á | 1155 |
M. Ian Morrison |
Mme Wendy Lill |
M. Ian Morrison |
Mme Wendy Lill |
M. Ian Morrison |
Mme Wendy Lill |
Le président |
M. Paul Bonwick |
M. Ian Morrison |
M. Paul Bonwick |
 | 1200 |
M. Ian Morrison |
Le président |
M. John Harvard |
Mme Christiane Gagnon |
M. Paul Bonwick |
M. John Harvard |
Le président |
Mme Christiane Gagnon |
 | 1205 |
Le président |
M. Chuck Strahl |
M. Ian Morrison |
Le président |
M. Ian Morrison |
Le président |
M. John Harvard |
M. Ian Morrison |
 | 1210 |
M. John Harvard |
M. Ian Morrison |
M. John Harvard |
M. Ian Morrison |
M. John Harvard |
Le vice-président (M. Paul Bonwick) |
Mme Christiane Gagnon |
M. Ian Morrison |
Mme Christiane Gagnon |
M. Ian Morrison |
Mme Christiane Gagnon |
Le vice-président (M. Paul Bonwick) |
Mme Janet Yale (présidente et directrice générale, Association canadienne de la télévision par câble) |
 | 1215 |
M. Louis Audet (président et directeur général, COGECO Inc.) |
 | 1220 |
M. Jim Shaw (directeur général, Shaw Communications Inc.) |
M. John Tory (président et directeur général, Rogers Cable Inc.) |
 | 1225 |
Mme Janet Yale |
Le vice-président (M. Paul Bonwick) |
M. Chuck Strahl |
M. Jim Shaw |
 | 1230 |
M. John Tory |
M. Chuck Strahl |
M. Jim Shaw |
M. Louis Audet |
 | 1235 |
Le vice-président (M. Paul Bonwick) |
Mme Christiane Gagnon |
M. Louis Audet |
Mme Christiane Gagnon |
M. Louis Audet |
M. John Tory |
 | 1240 |
Mme Christiane Gagnon |
Le vice-président (M. Paul Bonwick) |
M. John Harvard |
M. John Tory |
M. John Harvard |
M. Chuck Strahl |
M. John Harvard |
M. Chuck Strahl |
M. John Harvard |
Le vice-président (M. Paul Bonwick) |
M. Jim Shaw |
M. John Harvard |
M. Jim Shaw |
M. John Harvard |
M. Jim Shaw |
 | 1245 |
M. John Harvard |
M. Jim Shaw |
M. John Harvard |
M. Jim Shaw |
Le vice-président (M. Paul Bonwick) |
M. Claude Duplain (Portneuf, Lib.) |
M. Louis Audet |
M. Claude Duplain |
 | 1250 |
M. Louis Audet |
M. Claude Duplain |
Le vice-président (M. Paul Bonwick) |
M. Chuck Strahl |
Le vice-président (M. Paul Bonwick) |
M. Chuck Strahl |
Le vice-président (M. Paul Bonwick) |
Mme Wendy Lill |
M. John Tory |
M. Jim Shaw |
Mme Wendy Lill |
M. Jim Shaw |
Le vice-président (M. Paul Bonwick) |
Mme Wendy Lill |
 | 1255 |
M. Jim Shaw |
Mme Wendy Lill |
M. Jim Shaw |
Le vice-président (M. Paul Bonwick) |
M. Louis Audet |
Le vice-président (M. Paul Bonwick) |
M. Chuck Strahl |
M. Jim Shaw |
M. Chuck Strahl |
· | 1300 |
M. John Tory |
Le vice-président (M. Paul Bonwick) |
Mme Christiane Gagnon |
M. Louis Audet |
· | 1305 |
Mme Christiane Gagnon |
M. Louis Audet |
Mme Christiane Gagnon |
M. Louis Audet |
Le vice-président (M. Paul Bonwick) |
M. John Harvard |
M. Jim Shaw |
· | 1310 |
M. John Harvard |
Mme Janet Yale |
M. John Harvard |
Mme Janet Yale |
M. John Harvard |
Mme Janet Yale |
M. John Harvard |
Mme Janet Yale |
M. John Harvard |
M. Ian Morrison |
M. John Harvard |
Le vice-président (M. Paul Bonwick) |
M. John Tory |
M. Jim Shaw |
· | 1315 |
Le vice-président (M. Paul Bonwick) |
M. Louis Audet |
M. Jim Shaw |
Le vice-président (M. Paul Bonwick) |
M. John Harvard |
M. Jim Shaw |
· | 1320 |
M. John Harvard |
M. Jim Shaw |
M. John Harvard |
M. Jim Shaw |
M. John Tory |
M. John Harvard |
Le vice-président (M. Paul Bonwick) |
CANADA
Comité permanent du patrimoine canadien |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le jeudi 28 novembre 2002
[Enregistrement électronique]
Á (1105)
[Traduction]
Le président (M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.)): Je déclare ouverte cette séance de réunion du Comité permanent du patrimoine canadien.
[Français]
Le Comité permanent du patrimoine canadien se réunit aujourd'hui pour étudier le projet de loi C-227,
[Traduction]
Loi instituant une journée nationale de commémoration de la bataille de la crête de Vimy .
Si vous regardez l'ordre du jour, il y a une phrase qui a été omise, qui devrait être entre guillemets «l'article 1 est-il adopté?» et «le titre est-il adopté»:
[Français]
« Le préambule est-il adopté? »
[Traduction]
Je voudrais maintenant laisser la parole à l'auteur du projet de loi, M. Brent St. Denis.
M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin, Lib.): Merci, monsieur le président.
Je tiens à remercier le comité d'accorder à un simple député et à ce projet de loi l'attention que, selon moi, il mérite. Il est agréable de constater que le comité reconnaît les efforts non seulement d'un simple député, comme dans mon cas, mais d'un citoyen de ma circonscription, Robert Manuel, qui a lancé cette idée dans le cadre d'un projet du millénaire. Nous avons donc, dans ce projet de loi, quelque chose qui a réellement sa source dans la population. J'espère que vous pourrez convenir que cette idée a du mérite. C'est avec plaisir que je l'ai prise en charge et que je l'ai présentée au nom des anciens combattants vivants et défunts et de nos militaires actuels au Canada et dans le monde entier, comme un symbole de la phénoménale participation du Canada dans les opérations militaires et les opérations de maintien de la paix.
Je serai bref dans mes observations, monsieur le président. Je vais demander à mon adjoint de faire circuler l'une de ces pièces de chaque côté de la table pour que vous puissiez les regarder. C'est une pièce de la Monnaie royale du Canada, frappée en commémoration de la bataille de la crête de Vimy. Comme nous célébrons cette année le 85e anniversaire de cette bataille, je crois que c'est à tout fait pertinent. Vous n'aurez pas besoin de me les rendre. Nous pouvons les faire tirer, si vous voulez.
La deuxième lecture de ce projet de loi a eu lieu le 18 juin. Il a reçu, Dieu merci, l'appui unanime de la Chambre des communes pour que votre comité en soit saisi. J'espère que vous pourrez maintenir ce rythme des progrès qu'il fait.
Je vais seulement résumer le contexte de la bataille. La pièce, elle-même, en illustre un merveilleux résumé, un bref tableau de ce qui est arrivé. Ensuite, je prendrai quelques instants pour m'expliquer.
La crête de Vimy, en France, était une position stratégique clé dont s'était emparée l'Allemagne quatre mois à peine après le début de la Première Guerre mondiale. La France s'est efforcée vaillamment de reprendre ses terrains houillers, qui lui étaient absolument vitaux, mais a perdu deux batailles et 110 000 soldats. La Grande-Bretagne a aussi tenté de chasser l'armée allemande, mais sans succès. C'est alors que le 9 avril 1917, quatre divisions de l'armée canadienne, comptant des soldats originaires des quatre coins du Canada, de chaque province, de chaque région du pays, qui étaient stationnés en France, ont lancé l'assaut contre la position allemande sur la crête de Vimy. La lutte brutale a duré trois jours, mais au bout du compte, le Canada l'a emporté et a pu rendre ce territoire aux alliés.
Pour beaucoup, la crête de Vimy représente la plus grande victoire du Canada pendant la Première Guerre mondiale, et pourtant cette victoire va bien au-delà de la stratégie militaire, et fait ressortir l'identité d'une nation. En unissant des bataillons disparates en une seule entité, le Canada a regroupé une multitude de cultures qui existaient au pays. Des soldats qui s'étaient engagés volontairement, sans aucune formation, ont joint les rangs des bataillons les plus chevronnés et respectés de la guerre. Fait encore plus important, un pays qui avait toujours été perçu comme une colonie britannique a réalisé une tâche apparemment impossible, se forgeant ainsi une identité en tant que nation respectée sur la scène mondiale. Le succès de l'effort déployé sur la crête de Vimy a acquis au Canada une signature sur le Traité de Versailles. Il reconnaissait qu'un nombre incalculable de soldats avaient déjà perdu la vie en tentant de ressaisir cette position cruciale en France. Pour beaucoup, cela a été le point tournant de la Première Guerre mondiale. Le Canada a perdu 4 000 hommes lors de cette bataille.
J'aimerais signaler—vous en avez tous une copie—que la Légion royale canadienne, comme bien d'autres encore, a donné son appui à ce projet de loi. J'ai des lettres de Lloyd Robertson, de CTV, du Conseil national des associations d'anciens combattants et de bien d'autres personnes et légions de tout le pays qui expriment leur soutien pour ce projet de loi.
Á (1110)
Il y a une question qui, j'en suis sûr, sera posée par quelqu'un, et je pense qu'elle devrait l'être. Si nous devons commémorer une bataille avec une journée spéciale, qu'en est-il des autres? Je vous dirais, chers collègues, que cette bataille-là les symbolise toutes. La culture de la commémoration, chez nous au Canada, acquiert de la vigueur. Je le constate dans ma propre circonscription, et peut-être que vous aussi, vous le constatez dans les vôtres. En soulignant par une journée particulière, pas un jour férié, sur le calendrier du patrimoine du pays, une journée qui reconnaisse l'importance historique et militaire du 9 avril, et en mettant en berne le drapeau de la tour de la Paix, selon les règles du protocole qui s'appliquent au drapeau de la tour de la Paix, en soulignant ainsi l'importance de cette journée, je crois qu'alors, nous honorerions toutes les grandes batailles auxquelles ont participé les soldats du Canada, dans toutes les guerres, que ce soit pendant la Première ou la Deuxième Guerre mondiale, la guerre de Corée ou, plus récemment, la guerre en Afghanistan. Tous ceux à qui j'en ai parlé ont trouvé que c'était la chose à faire.
Je n'en dirai pas beaucoup plus, à part pour vous signaler que le ministère des Anciens Combattants a publié des documents réellement fascinants sur le sujet. Il y en a trois qui fournissent d'excellents détails, plus que je n'en ai donné ici. Alors je vous demande d'appuyer ceci, non pas pour moi, mais pour tous ceux qui continuent de représenter le Canada en temps que gardiens de la paix et, au besoin, dans les conflits, comme cela a été le cas en Afghanistan.
Si je vous semble un peu amorti, aujourd'hui, c'est à cause du décalage horaire. Je viens à peine, par hasard, de revenir d'un voyage de neuf jours en Bosnie où j'ai rendu visite à nos gardiens de la paix, avec trois autres collègues. Je peux vous dire que nos gardiens de la paix se font témoigner un respect immense par ceux qui ont besoin de notre aide. Ce respect est ancré dans une merveilleuse réputation de bataillons professionnels, bien formés, bien organisé, bien dirigés, la réputation de tous ces gens qui ont tant donné au Canada dans le passé, ceux qui ont sacrifié leur vie lors de batailles, qui sont morts tout simplement de vieillesse ou pour d'autres raisons de santé, ou ceux qui sont ici aujourd'hui, avec nous. Quoi que nous fassions pour honorer tous ceux qui ont donné ainsi au Canada, je crois, se répercutera positivement sur nous tous, les parlementaires.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Á (1115)
Le président: Merci beaucoup, monsieur St. Denis.
Est-ce vrai que la crête de Vimy est maintenant territoire canadien? La France l'a donné au Canada?
M. Brent St. Denis: Je n'ai pas eu l'honneur, ni la chance d'y faire une visite, mais d'après ce que j'ai compris, le titre foncier du monument commémoratif est au nom de notre pays. Je crois que le titre de ce bout de territoire a été donné au Canada, et que notre monument commémoratif, là-bas, est, comme il se doit, sur...
Le président: territoire canadien.
M. Brent St. Denis: Oui.
Le président: Merci.
Y a-t-il des questions à poser à M. St. Denis?
Monsieur Benoit.
M. Leon Benoit (Lakeland, Alliance canadienne): Je veux seulement vous féliciter, monsieur St. Denis, pour avoir présenté ceci, et aussi pour avoir reconnu que l'idée vient d'un électeur et que vous agissez en son nom. Je crois que c'est digne d'éloges.
M. Brent St. Denis: Je vous remercie.
M. Leon Benoit: Ce n'est pas, à mes yeux, un projet de loi superficiel. Je suis convaincu que la bataille de la crête de Vimy a vraiment confirmé le Canada en tant que pays. Les Canadiens, à ce moment-là, ont cessé d'être des sujets britanniques et sont réellement devenus des citoyens canadiens. J'ai eu la chance, la semaine dernière seulement, d'aller à Gallipoli, où une bataille qui a eu lieu pendant la Première Guerre mondiale a vraiment confirmé l'Australie et la Nouvelle-Zélande comme des pays. Des autobus pleins d'Australiens et de Néo-Zélandais s'y arrêtent constamment pour y faire une visite. C'est qu'ils ont repris conscience du fait que cette bataille a confirmé leurs pays comme nations. Malheureusement, ils n'ont jamais connu, lors de cette bataille, une victoire de l'ampleur de celle qu'a remporté le Canada sur la crête de Vimy.
Je tiens donc à vous féliciter. Je pense que le projet de loi est exactement ce qu'il doit être. C'est un jour où le drapeau doit être en berne sur la tour de la Paix, pour souligner l'importance de cette journée, sans pour autant perturber les activités normales, à part d'encourager la population à se souvenir. C'est pourquoi je pense que c'est juste ce qu'il faut. Je vous remercie beaucoup de l'avoir présenté.
M. Brent St. Denis: Je vous remercie.
Le président: Monsieur Harvard.
M. John Harvard (Charleswood—St. James—Assiniboia, Lib.): Je n'ai que deux ou trois questions. D'après ce que j'ai compris du protocole des drapeaux le 11 novembre, le Jour du Souvenir, ils sont en berne du lever au coucher du soleil.
M. Brent St. Denis: Je crois que c'est effectivement le protocole.
M. John Harvard: Est-ce que ce serait la même chose le 9 avril?
Á (1120)
M. Brent St. Denis: Je n'ai pas donné ce détail dans le projet de loi. J'ai pris pour acquis que le drapeau serait abaissé conformément à l'habitude et au protocole. Je ne m'attends pas à ce qu'on en fasse plus que pour le 11 novembre. Je crois que ce serait approprié.
M. John Harvard: Ce projet de loi, s'il devient loi, reconnaîtrait une bataille en particulier. Les soldats canadien, au fil de plusieurs guerres, se sont distingués dans plusieurs batailles. La crête de Vimy en est une, L'une des plus connues, bien entendu. Il y a eu Dieppe, pendant la Deuxième Guerre mondiale, la Normandie, Paschendale, plusieurs autres grandes batailles. Je ne serais pas étonné que ce projet de loi, s'il était adopté, incite d'autres Canadiens à vouloir faire adopter un projet de loi du même genre pour reconnaître d'autres batailles où des soldats canadiens se sont battus avec héroïsme. Qu'en diriez-vous?
M. Brent St. Denis: Je ne voudrais certainement pas décourager quiconque de vouloir promouvoir le souvenir, mais je dirais que cette commémoration est particulière, en ce sens que c'était la première bataille où nous nous sommes battus en tant que pays sous commandement canadien. Je crois que c'est ce qui la distingue. Quelqu'un qui viendrait avec un autre projet de loi pour une autre journée devrait en démontrer la singularité. Je pense que c'est ce qui distingue celle-ci. C'est l'une des nombreuses batailles importantes, et une bataille cruciale, parce qu'elle est reconnue comme la bataille à laquelle ont participé des Canadiens d'un bout à l'autre du pays pour la première fois, et ils ont remporté la victoire où d'autres avaient échoué, sous le commandement d'un Canadien, et c'est ce qui en fait la singularité. C'est pourquoi, à mes yeux, elle symbolise toutes les batailles.
M. John Harvard: Mais vous reconnaîtriez que chaque bataille a ses propres particularités.
M. Brent St. Denis: Elles sont toutes uniques et spéciales, et je ne prétendrai pas juger aucune autre bataille, mais je dirais seulement que celle-ci a été la première. Souvent, dans notre société, nous honorons nos premiers, et ceci a été la première fois que des Canadiens se battaient en tant que Canadiens, que Canadiens de chaque province du pays, d'après mes registres.
Le président: Madame Bulte, et M. Bonwick.
Mme Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.): J'ai une question similaire à poser à M. Harvard, mais je voulais ajouter quelque chose à ce que disait le membre de l'opposition officielle, et vous féliciter pour votre travail et pour la passion avec laquelle vous nous avez présenté ce projet de loi aujourd'hui. Je recommanderais aussi à tout le monde, si vous ne l'avez pas encore lu, le superbe ouvrage de Jane Urquhart, The Stone Carvers, sur la construction du monument commémoratif de la crête de Vimy.
M. Brent St. Denis: Je vous remercie.
Le président: Monsieur Bonwick.
M. Paul Bonwick (Simcoe—Grey, Lib.): Je vous félicite, Brent.
M. Brent St. Denis: Merci, Paul.
M. Paul Bonwick: Quel honneur se doit être pour vous de présenter ceci.
M. Brent St. Denis: C'est un fait. J'ai été étonné de voir avec quelle rapidité votre comité pouvait me recevoir et je le répète, je l'apprécie. Comme je ne suis arrivé qu'hier de la Bosnie, si peu de temps après avoir passé un moment avec nos gardiens de la paix, c'est véritablement une journée spéciale pour moi.
M. Paul Bonwick: Lors de la réunion d'hier soir, monsieur le président, alors que nous avions des représentants de collectivités autochtones devant notre comité, une chose est ressortie haut et fort, et c'est un sentiment passionné de responsabilité qu'ils ont de se souvenir. C'est absolument crucial. Pour eux, c'est une responsabilité, pas seulement pour que leur génération se souvienne, mais pour que les générations futures aussi comprennent les sacrifices qui ont été faits pour qu'elles puissent, et nous aussi, jouir de la qualité de vie que nous avons.
Pour ce qui est de faire avancer cette demande, je ne peux qu'être d'accord avec vous que nous ne voulons pas dissuader les gens de faire ceci. Nous évaluerons chaque cas lorsqu'ils seront présentés. J'en ai un, que je vais présenter au comité, dans un avenir pas très lointain, j'espère, au sujet des anciens combattants de la marine marchande et d'une reconnaissance similaire de cette journée particulière, et des milliers et des milliers d'anciens combattants de la marine marchande qui ont sacrifié leur vie pour approvisionner les troupes.
Alors, je vous félicite, Brent. Vous avez mon appui inconditionnel et, au nom des légions de ma circonscription, mon éternel respect.
M. Brent St. Denis: Merci, Paul.
Le président: S'il n'y a pas d'autres commentaires, je pense que nous allons passer à l'étude article par article du projet de loi.
[Français]
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le président, j'aimerais ajouter un commentaire pour donner suite aux propos de M. Harvard.
Mon père a fait la guerre pendant cinq ans, outre-mer, mais je me demande pourtant ce qu'il y a de pertinent à souligner un combat spécifique par une journée spéciale. À ce compte-là, pourquoi ne pas commémorer les autres batailles qui ont eu lieu?
Selon moi, le 11 novembre englobe toutes les personnes qui ont contribué à l'effort de guerre du Canada. Pourquoi la bataille de Vimy? On nous a donné plus tôt des raisons pour lesquelles on voulait tenir une journée tout à fait spéciale; mais éventuellement, ne risque-t-il pas d'y avoir d'autres journées qu'on voudra consacrer à d'autres batailles? Je pourrais vous nommer quelques autres batailles auxquelles mon père a participé et qui se sont avérées une réussite, bien qu'elles ne soient pas de l'envergure de celle de Vimy.
Pour ma part, j'envisage de m'abstenir plutôt que d'appuyer cette initiative, non pas que je sois contre le principe lui-même, mais je pense que le 11 novembre souligne déjà la participation de plusieurs milliers de Canadiens et Québécois à cet effort de guerre.
On pourrait aussi souligner, pourquoi pas, le débarquement de Normandie ainsi que d'autres batailles qui ont eu lieu. Mais plutôt que d'en distinguer une en particulier, ce qui est important, c'est de souligner l'effort du Canada et l'aide qu'on a apportée à tous les pays européens aux prises avec les nazis.
Je ne suis pas totalement défavorable à l'idée, mais sur le principe, je préfère m'abstenir.
Á (1125)
Le président: Merci beaucoup, madame Gagnon.
[Traduction]
Puisqu'il n'y a pas d'autres commentaires, nous allons passer à l'étude article par article. Conformément au paragraphe 75(1) du Règlement, l'étude de l'article 1 est reportée.
Nous allons examiner l'article 2.
M. John Harvard: Est-ce que nous ne pourrions pas avoir simplement une motion d'ensemble pour adopter tous les articles à la fois?
Le président: Bien sûr, c'est possible.
(Les articles 1 à 4 inclusivement sont adoptés)
Le président: Le préambule est-il adopté?
Des voix: D'accord.
Le président: Le titre est-il adopté?
Des voix: D'accord.
Le président: Le projet de loi est-il adopté?
Des voix: D'accord.
Le président: Puis-je présenter le projet de loi, sans modification, à la Chambre?
Des voix: D'accord.
Le président: Le projet de loi a reçu l'approbation du comité. Mes félicitations, monsieur St. Denis. Nous apprécions votre présence ici, et vos efforts pour présenter ce projet de loi.
M. Brent St. Denis: Merci beaucoup.
Avec votre indulgence, j'ai trois pièces, et je vous en laisserai une, et une pour chacun des vice-présidents. Je ne sais pas exactement où sont les deux autres.
M. John Harvard: J'avais pensé pouvoir la garder.
Le président: D'accord. Merci beaucoup.
M. Brent St. Denis: Merci beaucoup, chers collègues.
Le président: Nous allons suspendre la séance quelques minutes pour permettre aux autres témoins de venir pour l'étude.
Á (1128)
Á (1131)
Le président: Je déclare la reprise de la séance. Puis-je suggérer qu'en attendant l'arrivée de l'Association canadienne de télévision par câble et des autres, nous écoutions M. Morrison?
Je laisserai la parole à M. Ian Morrison, de l'organisation Friends of Canadian Broadcasting.
[Français]
M. Ian Morrison (porte-parole, Friends of Canadian Broadcasting): Monsieur le président et membres du comité, les amis de la radiodiffusion canadienne vous sont très reconnaissants d'avoir été invités à se joindre à vous aujourd'hui pour discuter de la propriété étrangère.
Á (1135)
[Traduction]
Je dois dire que c'est toujours un plaisir que d'être au nombre des chefs de file de l'industrie de la câblodistribution. J'ai connu une expérience semblable avec certains des radiodiffuseurs, il y a à peine deux jours.
Le projet de loi que vous examinez veut que le système de radiodiffusion du Canada soit la effectivement propriété des Canadiens et sous leur contrôle. Notre système ne se compose pas uniquement de radiodiffuseurs, mais aussi d'entreprises de distribution de radiodiffusion, connues comme les EDR, comme celles qui sont représentées autour de cette table. Depuis 1991, lorsque le Parlement a adopté la Loi sur la radiodiffusion qui est en vigueur actuellement, les restrictions imposées à la propriété étrangère ont déjà été diluées en réaction aux arguments soulevés par les radiodiffuseurs et les monopoles de la câblodistribution qui voulaient avoir des règles du jeu équitables avec les firmes de télécommunications. Maintenant, à la suite de l'annonce qu'a faite le ministre Rock, nous assistons au deuxième acte de cette pièce, et nous sommes ici pour vous demander avec insistance de ne pas changer d'idée.
Comme vous le savez, certains des plus gros détenteurs de licences qui sont ici aujourd'hui et ceux que vous avez entendus depuis mardi sont des radiodiffuseurs ou des distributeurs. Cependant, le contenu et la diffusion sont deux domaines très différents. Du côté du contenu, ces entreprises ne sont pas capitalistiques. De fait, leurs coûts en équipement ont beaucoup baissé ces dernières années, grâce aux progrès technologiques. Leurs plus grosses dépenses sont les frais d'exploitation. Par exemple, Leonard Asper, de CanWest, a dit à votre comité le 1er mars, à Winnipeg, que sa compagnie prévoyait de dépenser un milliard de dollars, pendant la période actuelle de licence de son groupe, sur la programmation canadienne. L'un de vos collègues lui a demandé ce que CanWest prévoyait de dépenser sur la programmation américaine pendant la même période, et il a promis, monsieur le président, de vous donner une réponse plus tard. D'après ce que j'ai compris, depuis huit mois qui se sont écoulés, il n'a pas encore tenu cette promesse. On en vient à se demander combien ce pourrait être.
Dans mon bref exposé, déclaration, je ne perdrai pas votre temps en réitérant des arguments en faveur de ce que les entreprises de télécommunications restent «effectivement la propriété des Canadiens et sous leur contrôle». Au lieu de cela, je me concentrerai sur l'industrie de la télévision par câble, les EDR dominantes.
D'après les données du CRTC, les entreprises COGECO, Rogers et Shaw détiennent à elles seules les deux-tiers des abonnés au service de câble de base et il suffit d'ajouter Vidéotron pour arriver à 87 p. 100. Contrairement à la plupart des industries qui font un lobbying effréné sur la Colline parlementaire, chacune de ces grandes entreprises de câblodistribution est sous contrôle familial et le reste. Leur modèle initial d'entreprise découle du fait que le Parlement ait décidé de ne pas autoriser les télédiffuseurs étrangers, c.-à-d. américains, à posséder et exploiter des émetteurs au Canada. Le créneau de la câblodistribution, grâce aux licences de monopole territorial délivrées par le gouvernement fédéral, vise à acheminer des signaux américains de haute qualité dans les foyers canadiens. Même aujourd'hui, la seule concurrence légale dans ce domaine provient de deux entreprises de diffusion par satellite canadienne, dont l'une est contrôlée par Shaw, et d'une poignée de petits réseaux de câblodistribution sans fil.
Les plus grandes entreprises de câblodistribution ont d'assez bons résultats au plan technique, mais le public leur accorde de mauvaises notes aux chapitres de la confiance du public et de l'identité canadienne. En 1993, et de nouveau en 1995, sans compter l'année dernière, Compas Inc., qui jusqu'à tout récemment était le sondeur de Friends—le choix devait se faire entre Friends et une entreprise appelée CanWest Global, d'après ce qu'on m'a dit—a posé les questions suivantes aux Canadiens dans le cadre de son sondage:
Je vais vous lire le nom de plusieurs groupes. Dites-moi le degré de confiance que vous avez personnellement en chacun de ces groupes en ce qui concerne la protection de la culture et de l'identité canadienne à la télévision. Sur une échelle de 7, 7 signifie un niveau très élevé de confiance, 1, l'opposé. |
Compas a fait part des résultats en additionnant le pourcentage des répondants qui ont donné à chaque groupe la cote 5, 6 ou 7, c.-à-d. une cote élevée. Les résultats varient peu au cours de la période de huit ans. C'est la SRC qui obtient la meilleure cote de confiance, 70 p. 100; CTV, 65 p. 100; le CRTC, 60 p. 100; Global, 55 p. 100; le gouvernement fédéral, 47 p. 100 et la câblodistribution, seulement 37 p. 100. Ce qui est malgré tout encourageant pour l'industrie de la câblodistribution, c'est que son score a en fait augmenté, puisqu'il se situait à 29 p. 100 en 1995. C'est comme si le public avait entendu l'allocution de Leo Hindery Jr., magnat de l'industrie américaine de câblodistribution, qu'il a prononcée au congrès de l'Association canadienne de la télévision par câble à Vancouver, en avril dernier:
Vous, vos associés et l'industrie américaine de la câblodistribution êtes depuis si longtemps inséparables que nous sommes comme des siamois poursuivant un objectif commun. |
Á (1140)
Comme vous le savez, ces grandes entreprises de câblodistribution se sont récemment lancées dans l'aventure du service Internet à haute vitesse qu'elles fournissent aux foyers qu'elles desservent. À elles quatre, les grandes entreprises de câblodistribution comptaient 1,7 million de clients en juin 2002. Ce chiffre est considérablement plus élevé que le nombre total des clients Bell-Telus, soit 1,2 million. Ces données sont tirées du récent rapport de surveillance de la politique sur la radiodiffusion du CRTC. L'industrie de la câblodistribution prétend maintenant que les exigences en matière de propriété canadienne devraient refléter celles des firmes de télécommunication. Elle prétend que le fait d'autoriser plus d'investissements étrangers dans l'industrie canadienne de câblodistribution comblera le fossé entre l'évaluation du marché faite par un abonné canadien au service de câble et celle faite par son homologue américain.
Premièrement, pourquoi faudrait-il combler ce fossé? Dans quelle mesure cela va être à l'avantage du Canadien moyen? Deuxièmement, comment les analystes financiers de Bay Street voient-ils l'industrie de la câblodistribution? L'évaluation du marché indique qu'il n'a pas une cote élevée de solvabilité. Pourquoi? On peut citer la dette excessive, découlant en partie d'acquisitions trop ambitieuses et trop coûteuses. Par exemple, Quebecor a récemment acheté Vidéotron pour 5,6 milliards de dollars, ce qui équivaut presque au prix basé sur le tarif d'abonnement pratiqué aux États-Unis. Même Ted Rogers ne paierait pas ce prix; il a choisi d'acheter les Blue Jays de Toronto, et a parlé de synergies avec Sportsnet. Malheureusement, les Blue Jays perdent 50 millions de dollars chaque année. Bien sûr, récemment Rogers et Shaw ont vu les gros investissements dans Internet tourner à l'aigre. Le fait de ne pas avoir une cote élevée de solvabilité signifie qu'il est plus cher d'emprunter et que l'accès aux capitaux est plus restreint; c'est aussi simple que cela.
Pour avoir accès aux capitaux, l'industrie de la câblodistribution devrait mettre de l'ordre dans ses bilans et éviter de prendre de trop gros risques. Mais pourquoi le faire si le gouvernement fédéral peut résoudre le problème? Si le Parlement devait accepter les exigences de l'industrie de la câblodistribution et autoriser des prises de contrôle par des intérêts étrangers, peut-être que l'évaluation du marché par les abonnés canadiens s'améliorerait, tout comme la capacité d'emprunt, mais quels en seraient les avantages pour les Canadiens? Ils seraient nuls. Par contre, il y en aurait pour ceux qui contrôlent ces entreprises. N'oubliez pas que les actionnaires contrôlant sont les membres de quatre familles seulement, Audet, Péladeau, Rogers et Shaw. Voilà comment ils bénéficient de la situation.
Les acheteurs potentiels ne sont pas nombreux au Canada. Un changement dans les restrictions en matière de propriété étrangère signifie qu'il y aura plus de soumissionnaires intéressés, ce qui fera monter le cours des actions. Si vous augmentez les niveaux de propriété étrangère, cela signifie que ces familles feront beaucoup d'argent. C'est aussi simple que cela. Je ne dis pas qu'il y a quelque chose de foncièrement mal à cet égard, mais reconnaissons à tout le moins que c'est bien ce dont il s'agit ici. Il ne sert à rien de parler d'avantages pour la plupart des Canadiens.
Voici ce que Gordon Pitts, auteur de Kings of Convergence, livre récemment publié et que vous pourriez trouver intéressant—c'est un journaliste du Globe and Mail—a à dire au sujet de l'échec de la prise de contrôle de Vidéotron par Ted Rogers, qui représentait 5,4 milliards de dollars:
D'après les observateurs de l'industrie, Rogers voulait simplement combiner ses actifs en matière de câblodistribution à ceux de Vidéotron. Certains laissent entendre que lorsqu'on assouplit les règles sur la propriété étrangère, un acheteur peut se retrouver avec un volume énorme d'abonnés dans une région bien circonscrite. La possibilité de propriété étrangère est toujours un facteur de la planification successorale des câblodistributeurs et Ted Rogers ne fait pas vraiment exception à la règle. |
Pitts fait une observation parallèle sur les Shaw:
L'Industrie fait les spéculations suivantes: si les règles sont assouplies pour permettre une plus grande propriété étrangère des entreprises de câblodistribution, un intervenant américain opportuniste, comme John Malone, peut-être, prendrait un intérêt beaucoup plus important dans Shaw Communications et pourrait même aller jusqu'à acheter complètement les Shaw. Ce soupçon est renforcé par l'impression que J.R., Jim et Heather Shaw sont, avant tout, des pragmatistes. Ils adorent le monde des communications, mais n'y sont pas mariés corps et âme. Au bout du compte, les Shaw seront probablement des vendeurs et ils s'en tireront très bien. |
Le fait est que l'assouplissement des règles sur la propriété étrangère dans cette industrie réglementée aurait pour résultat l'entrée de milliards de dollars dans les comptes des membres de quatre familles et ce, d'un trait de plume de Son Excellence.
Les câblodistributeurs aiment se faire passer pour des opprimés vis-à-vis les géants de la télécommunication, mais n'oublions pas la façon dont fonctionne la câblodistribution dans le monde de la concurrence. Comme vous le savez sans doute, depuis six ans les grosses entreprises de câblodistribution ne respectent pas une ordonnance du CRTC visant à permettre aux autres fournisseurs d'accès Internet, appelés les FAI, d'avoir accès à leur réseau coaxial. Elles continuent de retarder les choses aux dépens des petits entrepreneurs qui sont véritablement les bâtisseurs d'Internet au Canada, y compris les FAI qui ont déployé leurs services dans les petites collectivités canadiennes que les grandes entreprises de la câblodistribution continuent de laisser pour compte. Imaginez quelle serait la réaction si les firmes de télécommunication refusaient l'accès aux FAI indépendants?
Á (1145)
L'année dernière, le groupe de travail national sur les services à large bande du gouvernement fédéral a recommandé que tout financement public de l'infrastructure de large bande dans les régions éloignées soit conditionnel à l'accès aux lignes par les tiers. Friends recommande que le gouvernement fédéral suive ce modèle. N'envisagez même pas d'écouter les supplications de l'industrie de la câblodistribution à propos de l'investissement étranger tant qu'elle n'accorde pas complètement l'accès aux tiers. Le CRTC est bien placé pour surveiller la situation et indiquer au gouvernement quand les grandes entreprises de câblodistribution répondent à cette exigence. Par la suite, les grandes entreprises de câblodistribution doivent répondre aux préoccupations du public relatives à la propriété et au contrôle de leurs filiales par des Canadiens avant que le gouvernement ne songe à donner suite aux propositions intéressées des familles de l'industrie de la câblodistribution en matière de propriété étrangère.
Merci.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Morrison.
Monsieur Strahl.
M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Alliance canadienne): Merci, monsieur Morrison, d'être parmi nous aujourd'hui. J'imagine que la prochaine série de témoins va nous raconter une toute autre histoire, si bien que le débat de ce matin va être intéressant.
Vous avez dit que les FAI n'ont pas l'accès voulu, même s'il faudrait l'encourager, etc. Cela n'a rien à voir avec la propriété étrangère, mais plutôt avec des entreprises réticentes, qui ne respectent pas les règles. Cette situation changerait-elle si l'on optait pour la propriété étrangère? Serait-elle meilleure? Ne s'agit- il pas plutôt d'une question de faiblesse au niveau des règles ou des organes de réglementation et non pas d'une question de propriété?
M. Ian Morrison: Vous avez raison, je crois, la situation ne changerait probablement pas si on optait pour la propriété étrangère. Si j'ai donné cet exemple, c'est pour parler du comportement de ces entreprises, que l'on peut expliquer par la réalité du monopole; c'est pourquoi elles traitent ainsi les petites entreprises, au mépris de l'ordonnance d'un agent du Parlement.
M. Chuck Strahl: Le monopole dont vous parlez me semble exister en partie parce que nous avons voulu donner raison à quatre familles, comme vous le dites, qui ont piétiné tous leurs concurrents. Ni le marché, ni la concurrence ne peuvent augmenter, puisque personne d'autre ne peut percer le marché de façon aussi importante. Les seules personnes qui pourraient percer le marché, d'après vous, sont celles qui ont un accès suffisant à des fonds étrangers et qui peuvent se mesurer de front à ces familles. Sinon, ces quatre familles vont continuer, elles vont se lamenter, mais il reste que c'est elles qui ont la part du gâteau.
M. Ian Morrison: À l'origine, l'industrie de la câblodistribution était différente, puisqu'il y avait plus que quatre familles; je crois qu'il y en avait 100. Peu à peu, le plus gros poisson a avalé les petits, et en fait, si l'offre de Rogers pour Vidéotron avait porté fruit, on ne parlerait aujourd'hui que de trois familles. C'est une industrie fortement concentrée, qui s'appuie sur un monopole territorial, ce qui est encore le cas aujourd'hui. La concurrence provient d'autres technologies, et il est fort improbable que vous et moi, par exemple, puissions percer ce marché et trouver suffisamment de capitaux pour créer un réseau coaxial pour la ville de Calgary.
Á (1150)
M. Chuck Strahl: Je suis d'accord avec vous sur ce point, mais ce que je veux dire, c'est que dans le système actuel, ne pas autoriser la propriété étrangère, pour quelque raison que ce soit, fait que c'est toujours le gros poisson qui avale les petits, si bien que trois ou quatre familles dominent le marché. Autoriser la propriété étrangère ne va pas empirer les choses, elle va peut-être les améliorer. Il se pourrait fort bien qu'il s'agisse de concurrence américaine, mais au moins, d'autres voudront se mesurer à ces familles. Il n'y a pas beaucoup de gens au Canada qui peuvent le faire, car le volume n'est pas suffisant.
M. Ian Morrison: Ce que vous proposez pourrait fonctionner, mais d'après des observateurs renseignés, comme par exemple, M. Pitts, dont le livre est fort intéressant et flatteur pour plusieurs de ces familles milliardaires, les capitaux étrangers ne serviraient pas à susciter la concurrence avec ces entreprises bien ancrées, mais permettraient leur acquisition. Ainsi, Shaw Communications pourrait être contrôlée par TCI de M. Malone, à Denver. Il n'y aurait pas de nouvelle concurrence, la concurrence ne disparaîtrait pas, mais les propriétaires ne seraient tout simplement pas canadiens.
Je vais essayer de résumer en soulignant l'importance des enjeux. Je vais prendre l'exemple des Shaw, mais je pourrais aussi bien parler de Rogers et certainement des Péladeau, peut-être un peu moins des Audet. Dans le cas de Shaw, J. R. Shaw contrôle personnellement 76 ou 78 p. 100 des actions avec droit de vote, autant de Shaw Communications, une entité de câblodistribution, que de Corus, qui est la structure organisationnelle distincte cotée à la Bourse de Toronto, et qui regroupe toutes les entreprises de radiodiffusion. Par conséquent, si M. Malone pouvait acheter Shaw Communications, ce serait une chose, s'il pouvait acheter les entreprises de radiodiffusion, cela irait beaucoup plus loin que le contrôle du contenu, qui nous est diffusé. Le problème c'est que tous ces gros intervenants s'occupent à la fois de contenu et de distribution et certainement, de la diffusion des signaux audiovisuels plus, comme je l'ai dit plus tôt, du service Internet à haute vitesse.
M. Chuck Strahl: Ne pouvez-vous toujours pas contrôler le contenu, indépendamment du propriétaire? Vous pouvez toujours réglementer le contenu, ce qui doit être diffusé par l'industrie de la câblodistribution. Vous pouvez toujours avoir des règles sur le contenu canadien, si vous le souhaitez, sans préciser qui est propriétaire.
M. Ian Morrison: Je pense que vous avez raison. Il faut faire la distinction entre la nationalité de la propriété et le contenu qui est diffusé par les émetteurs et les câbles. C'est légitime. Toutefois, à l'exception d'un membre de l'OCDE, la Nouvelle-Zélande, je ne connais pas de pays qui n'ait pas de restrictions quant à la nationalité des propriétaires des grandes entreprises de radiodiffusion. Par exemple, ce n'est que grâce au bon vouloir du Congrès américain que M. Rupert Murdoch a acquis la nationalité américaine et qu'il a été ainsi en mesure de devenir propriétaire de certains de ses grandes entreprises de radiodiffusion aux États-Unis.
M. Chuck Strahl: Merci.
Le président: Madame Lill.
Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD): Merci pour votre exposé.
Vous ne croyez pas que ces entreprises recherchent vraiment la concurrence, elles recherchent plutôt le profit et souhaitent être achetées. C'est vraiment ce qu'il faut examiner de près.
Il semble que l'augmentation de la propriété étrangère dans les entreprises de télécommunications soit plus acceptable. L'industrie de la câblodistribution et de la radiodiffusion prétend qu'il serait injuste de rehausser les pourcentages pour les firmes de télécommunications et non pour les autres, puisque le potentiel de propriété croisée et d'interfinancement est plus grand. Ne s'agit-il pas des mêmes radiodiffuseurs et entreprises de câblodistribution qui ont introduit la propriété croisée en premier lieu?
Á (1155)
M. Ian Morrison: Oui.
Mme Wendy Lill: N'est-ce pas comparable à la situation de celui qui assassine ses parents et qui demande pitié sous prétexte qu'il est orphelin?
M. Ian Morrison: Je vous laisse libre de choisir pareille image, mais vous avez bien compris. Il suffit de revenir une décennie en arrière pour s'apercevoir—je vais simplifier—que la propriété canadienne était établie à ce moment-là à 80 p. 100 et que les conseils d'administration des entités de radiodiffusion devaient se composer de Canadiens; la même chose s'appliquait aux firmes de télécommunications—67 p. 100—en vertu de la Loi sur les télécommunications. Certains ont dit qu'il fallait mettre la radiodiffusion sur le même pied que les firmes de télécommunications. C'est un peu plus compliqué, à cause des sociétés de portefeuille, etc. mais sans aller dans les détails, je dirais qu'on finit par diluer le tout. Aujourd'hui, le ministre Rock déclare qu'il serait peut-être bon que les firmes de télécommunications soient à ce niveau. Pour des raisons d'équité, le pourcentage prévu pour les radiodiffuseurs et les câblodistributeurs devrait également baisser.
Vous devez bien sûr vous demander ce qui sert l'intérêt national? Vous examinez une loi qui stipule que le système canadien doit effectivement appartenir à des Canadiens et être contrôlé par des Canadiens. Il arrive un moment où cela ne peut pas se produire. Même ceux qui conviennent avec M. Strahl que propriété et contenu sont des questions distinctes ne voudraient probablement pas gaspiller un atout au moment des futures négociations avec la communauté européenne ou les États-Unis en se contentant de diminuer volontairement la propriété étrangère, même pour les télécommunications, si d'autres pays ne sont pas prêts à le faire. Je vous renvoie à une déclaration du ministre britannique au moment du dépôt du projet de loi sur les communications, que l'on peut résumer en disant que le gouvernement britannique n'entrevoit aucun changement immédiat dans la loi américaine à cet égard.
Mme Wendy Lill: On n'arrête pas de nous dire que propriété, contenu et distribution peuvent être envisagés séparément. J'aimerais vous poser une question précise. L'industrie de la câblodistribution prétend que nous pouvons les séparer et, par conséquent, augmenter la propriété de la câblodistribution sans toucher le contenu. Je me demande si cet argument ne contredit pas le droit constitutionnel, je veux parler ici du renvoi relatif à la réglementation et au contrôle de radiocommunication au Canada où la compétence fédérale en matière de réglementation du contenu a été établie en fonction du contrôle du support de distribution. Comment peut-on maintenir le contrôle canadien du contenu si ce support tombe entre des mains étrangères? Ne finirait-on pas par se retrouver face à une situation semblable à celle des salles de cinéma qui relèvent non pas de la compétence fédérale mais de la compétence provinciale si bien que l'on ne peut presque jamais voir de films canadiens?
M. Ian Morrison: Je crois que les opinions que vous exprimez sont valides et méritent une sérieuse réflexion. J'ai été impressionné par un commentaire qu'a formulé l'autre jour ici même M. Gourd, de la société Bell Globemedia, quand il parlait de l'exemple du Québec. Il me semble que vous et lui êtes sur la même longueur d'ondes.
Mme Wendy Lill: Merci.
Le président: Monsieur Bonwick, la parole est à vous.
M. Paul Bonwick: Tout d'abord, je dois dire que je suis déçu par une partie de votre exposé et que je désapprouve certains de vos propos. Je m'attendais à un exposé technique. C'est ce qui aurait été le plus utile pour le comité, c'est-à-dire des arguments visant à démontrer que l'augmentation des limites de l'investissement étranger n'aurait pas pour effet d'améliorer la distribution et d'accroître le contenu. Je ne dis pas qu'il s'agit d'une mesure totalement bonne ou complètement mauvaise. Je veux que des témoins et des spécialistes dans le domaine m'expliquent pourquoi c'est bon ou c'est mauvais.
Diffamer des familles canadiennes qui ont sans aucun doute réussi est inutile, selon moi. Je crois que nous devrions être fiers du fait que des familles canadiennes aient réussi. Quand vous dites—et j'ai noté deux de vos propos—que quelques poches seulement se garniraient de milliards de dollars, vous laissez entendre que l'industrie de la câblodistribution profite à 15 personnes au pays à l'heure actuelle ou serait susceptible de profiter à ces personnes grâce à l'investissement étranger. Il est impératif de signaler que des investisseurs tirent profit de l'industrie à l'heure actuelle et le feront dans l'avenir. L'industrie profite à des manufacturiers, à des prêteurs, à des municipalités par l'entremise de taxes, aux provinces et au gouvernement fédéral. Enfin, les employés aussi en bénéficient puisqu'ils y trouvent un emploi.
M. Ian Morrison: Vous feriez un très bon témoin vous-même à ce que je vois.
M. Paul Bonwick: Je crois qu'il est important de répondre à une déclaration que je considère diffamatoire.
Je crois que nous convenons qu'il est possible de séparer la distribution du contenu, comme M. Strahl l'a démontré. Êtes-vous d'avis que les investisseurs étrangers doivent bien voir une possibilité de croissance et d'expansion au sein de l'industrie puisque, en fait, ils sont prêts à investir?
Deuxièmement, comment évaluez-vous la situation actuelle du Canada par rapport à celle d'autres pays en ce qui concerne non seulement le système de distribution, mais aussi l'accès au contenu canadien?
 (1200)
M. Ian Morrison: Premièrement, vous avez peut-être entendu des propos que je n'ai pas dits. Je vous mets au défi de me dire quand dans mon exposé j'ai diffamé des familles de quelque manière que ce soit. J'ai attiré l'attention sur leur intérêt, sur ce qui serait mis en jeu et sur les personnes qui pourraient très bien empocher l'argent à la suite d'un changement dans les règles régissant l'investissement étranger.
En ce qui concerne les autres pays, nous devons comparer des situations semblables. Il existe peu de pays où la distribution par câble coaxial est si répandue qu'au Canada. C'est assez rare. On dirait maintenant que je fais de la propagande pour l'industrie, alors pour éviter cela je dois mentionner qu'environ 80 p. 100 des foyers canadiens sont dotés du câble et que la grande majorité d'entre eux sont abonnés à la télévision par câble. Au cours de l'année dernière, en raison de la concurrence, l'industrie de la câblodistribution a enregistré pour la première fois une baisse de 2 ou 3 p. 100 de l'abonnement. Effectuer une comparaison avec le Royaume-Uni ou les États-Unis serait inapproprié.
Le président: Pardonnez-moi. Deux photographes sont ici présents, l'un du National Post et l'autre du Globe and Mail. Ils veulent prendre des photos. Je vous avais demandé de ne pas prendre de photos tant que les membres ne vous auraient pas donné leur consentement. J'espère que vous n'en avez pas pris. Je crois que le greffier a été très clair sur ce point. Je voudrais savoir si les membres acceptent que les photographes prennent des photos.
M. John Harvard: La politique n'est-elle pas que, lorsque nous tenons une séance, aucune photo ne peut être prise?
Mme Christiane Gagnon: Il y a la liberté de la presse. Ils pourraient faire vite.
M. Paul Bonwick: Existe-t-il une politique de la Chambre qui prévoit des restrictions concernant la presse, les photographes et les caméras de télévision ou est-ce la liberté de la presse qui prévaut lors d'une séance publique?
M. John Harvard: Habituellement, les photos sont prises avant l'ouverture de la séance afin que les délibérations ne soient pas perturbées, comme elles le sont maintenant. C'est pour cette raison que nous ne permettons pas la prise de photos durant la séance. Pour autant que je sache, c'est la règle qu'appliquent tous les comités.
Le président: Nous ne voulons pas un débat sur le sujet, nous voulons seulement...
[Français]
Mme Christiane Gagnon: Mais lorsque le ministre vient à ce comité, le fait de prendre des photos ne constitue pas un problème; je ne vois pas pourquoi c'en serait un.
 (1205)
Le président: On prend des photos au début, mais on n'en prend pas pendant la séance.
[Traduction]
Je propose que vous preniez vos photos maintenant afin de ne pas déranger les témoins.
M. Chuck Strahl: Je suis déçu de l'angle qu'ils prennent. C'est un gros problème.
M. Ian Morrison: Monsieur Strahl, je vous ai toujours trouvé très photogénique.
Le président: Je crois que ça suffit maintenant, ne croyez-vous pas?
Monsieur Morrison, je suis désolé de vous avoir interrompu. Nous voulions seulement tirer les choses au clair. Allez-y.
M. Ian Morrison: Je tentais d'expliquer qu'il est impossible selon moi d'effectuer un grand nombre de comparaisons avec d'autres pays sans tenir compte du fait que l'industrie canadienne de la câblodistribution connaît un grand succès, occupe une place importante et fait maintenant l'objet d'une très grande concentration. L'industrie la plus semblable à la nôtre est probablement celle des États-Unis.
Le président: Merci.
Monsieur Harvard, la parole est à vous.
M. John Harvard: J'ai deux questions à vous poser monsieur Morrison. J'assume que, si le gouvernement fédéral assouplissait les règles en matière de propriété étrangère dans le domaine de la câblodistribution et des autres services connexes, cela serait profitable pour lui sur le plan financier. Mais oublions cet élément pour l'instant. D'après ce que vous avez dit, je déduis que, si les règles en matière de propriété étrangère étaient assouplies, cela ne profiterait aucunement aux consommateurs. En fait, vous dites qu'il n'y aurait aucun avantage pour nous, que cela nous nuirait. Vous en venez à la conclusion que, malgré les restrictions qui existent au pays en matière d'investissement étranger, les entreprises de câblodistribution font assez bonne figure par rapport à leurs homologues américains. Elles ont réussi à amasser les capitaux nécessaires pour leur permettre de satisfaire à la demande du marché. Est-ce exact?
M. Ian Morrison: Je crois que j'ai dit dans mon exposé que l'industrie de la câblodistribution, en particulier les grandes entreprises représentées ici aujourd'hui, a su assez bien tirer son épingle du jeu. M. Strahl a raison d'établir une distinction entre la propriété et la politique. Il est possible de gérer ses propres politiques. Les taux facturés aux abonnés de la télévision par câble aux États-Unis, si l'on tient compte du taux de change, sont un peu plus élevés que ceux facturés ici. S'il arrivait, en effet, que M. Malone prenne le contrôle de Shaw Communications, comme nous en avons parlé plus tôt, nous devrions voir à ce que les taux fixés par cet homme n'entrent pas en vigueur au Canada, car cela aurait, de toute évidence, une incidence négative. Il existe un risque d'augmentation des prix. Cette situation peut être maîtrisée par l'entremise de la réglementation, quoique le CRTC a entrepris, comme vous le savez peut-être, de déréglementer les taux des services de câblodistribution, sauf ceux des services de base. Malgré cela, certaines entreprises demandent une déréglementation en fonction du fait que la concurrence occupe maintenant 5 p. 100 du marché. La possibilité d'une hausse des prix existe s'il y a déréglementation. Je ne recommande pas, bien sûr, qu'on aille de l'avant avec la déréglementation.
 (1210)
M. John Harvard: Essentiellement, vous dites que la déréglementation n'apporterait rien de bon pour nous. L'incidence serait mauvaise pour nous. Vous n'entrevoyez tout simplement pas un changement positif pour le consommateur. C'est essentiellement ce que vous dites Ian, n'est-ce pas?
M. Ian Morrison: Oui, dans l'ensemble.
M. John Harvard: Le comité se préoccupe toujours du développement et du soutien de la culture au pays. Est-ce que le fait que les entreprises de câblodistribution soient en majeure partie des distributeurs de programmes atténue vos préoccupations d'une manière ou d'une autre?
M. Ian Morrison: Je n'ai pas toutes les données en main, mais vous savez qu'au moins deux des grandes entreprises représentées ici aujourd'hui sont affiliées à des organisations qui assurent la diffusion de contenu. Elles sont en fait des diffuseurs. Cela soulève une question que j'ai abordée. Uniquement parce qu'elles assurent la diffusion, elles ont des obligations importantes. Ce sont des obligations imposées par le CRTC. À l'instar d'autres câblodistributeurs, elles doivent affecter une certaine somme à la programmation communautaire et certains fonds approuvés au développement de la télévision. Il s'agit d'une contribution importante. Elles ont tendance à s'attribuer le crédit, mais j'ai plutôt tendance à concevoir cette contribution comme l'argent des abonnés qui contribue à soutenir la création canadienne en vertu d'une politique publique fédérale.
Les entreprises de câblodistribution constituent un élément important du système audiovisuel canadien. Elles devraient être bien traitées, mais elles devraient d'aucune façon pouvoir toujours obtenir ce qu'elles veulent surtout lorsque le bénéficiaire est évident.
M. John Harvard: Merci.
Le vice-président (M. Paul Bonwick): Merci monsieur Harvard. Comme le temps avance, nous allons maintenant passer aux autres invités qui viennent d'arriver.
[Français]
Mme Christiane Gagnon: Je n'ai posé aucune question étant donné que Mme Lill est passée avant moi. En principe, donc, je devrais pouvoir en poser une.
Si on levait le pourcentage de la propriété sur les entreprises, quelle incidence cela aurait-il, par exemple, sur la liberté de presse? Est-ce que cela constituerait un danger? On sait que la concentration de la presse et la liberté de presse...
M. Ian Morrison: Vous parlez de la presse écrite?
Mme Christiane Gagnon: Oui, la presse écrite, mais aussi les communications et les nouvelles. Est-ce que cette attitude gagnerait en force? Croyez-vous qu'il y ait aussi un danger à cet égard?
M. Ian Morrison: Probablement, madame Gagnon. Je voudrais mentionner qu'il serait plus facile pour moi de répondre en anglais.
[Traduction]
Je crois que pour un groupe comme les Friends of Canadian Broadcasting ce sont trois empires en particulier qui constituent une préoccupation en ce qui concerne le sujet que vous avez soulevé. Il s'agit bien sûr des Péladeau et des nombreux médias qu'ils possèdent et dont nous avons parlé il y a deux jours, des Aspers et de la société à grand nombre d'actionnaires qui contrôle Bell Globemedia. Ce sont là les trois empires qui devraient constituer une préoccupation, plutôt que les sociétés représentées ici aujourd'hui. Lorsqu'un certain niveau de concentration de la propriété est atteint dans les deux domaines, cela constitue toujours une préoccupation. Vous avez raison, en ce qui concerne la liberté d'expression par rapport aux programmes de fiction et au contenu canadien, d'être préoccupé en premier lieu par la presse écrite, car il s'agit du média qui comporte le plus haut degré d'interprétation.
[Français]
Mme Christiane Gagnon: Merci.
[Traduction]
Le vice-président (M. Paul Bonwick): Le président a dû quitter pour prononcer un discours à la Chambre, et il m'a demandé de le remplacer. J'ai cru qu'il avait fait le tour de chacun d'entre vous. C'est pour cette raison que je ne vous ai pas accordé la parole.
Nous allons donc laisser la parole à nos témoins. Je vous rappelle que vous êtes quatre à intervenir, alors j'aimerais bien que vous fassiez court afin que nous puissions effectuer deux tours de questions.
Nous allons commencer par Janet Yale, présidente et directrice générale de l'Association canadienne de la télévision par câble.
Mme Janet Yale (présidente et directrice générale, Association canadienne de la télévision par câble): Merci à vous, monsieur le président, et aux membres du comité.
Veuillez d'abord excuser mon retard. Un certain nombre d'entre nous devions prononcer un discours dans le cadre d'une conférence ici même à Ottawa. Quoi qu'il en soit, nous sommes très heureux de comparaître devant vous aujourd'hui.
 (1215)
[Français]
Nous sommes très heureux de pouvoir comparaître devant le Comité permanent du patrimoine canadien pendant que le processus d'examen du système canadien de radiodiffusion est en cours. Nous sommes particulièrement reconnaissants aux membres du comité de prendre le temps d'assister à ce panel.
[Traduction]
L'industrie de la câblodistribution tient à vous faire part de certaines recommandations très précises que je vais exposer brièvement. Nous serons plusieurs à prendre la parole. Permettez-moi de vous présenter les autres membres du groupe. Il s'agit de M. Louis Audet, président et directeur général de COGECO Inc., de M. Jim Shaw, directeur général de Shaw Communications, et de M. John Tory, président et directeur général de Rogers Cable. Nous allons maintenant rapidement passer en revue le document que nous avons préparé pour vous.
Tout d'abord, permettez-moi de dire que l'industrie de la câblodistribution est très fière de ses réalisations. Nous comptons à l'heure actuelle plus de 7,9 millions de clients. Nous avons deux millions d'abonnés au service Internet à large bande, et 9,4 millions de foyers peuvent avoir accès à Internet. Nous avons investi massivement dans une infrastructure de réseau de plus de 200 000 kilomètres de long. Voilà un bref aperçu de notre situation.
Je vais maintenant passer à nos recommandations clés. L'industrie de la câblodistribution est d'avis que les entreprises de distribution de radiodiffusion et les compagnies de télécommunications devraient bénéficier d'un assouplissement des règles régissant la propriété étrangère. Nous croyons qu'il en découlerait des avantages importants, notamment un accès plus facile aux capitaux, une incitation à développer nos réseaux, l'équité concurrentielle entre les industries des télécommunications et de la câblodistribution et la capacité de continuer à développer notre infrastructure afin de soutenir le système de radiodiffusion du pays.
Je dois dire dès le départ que nous ne sommes pas en faveur d'une modification des règles régissant la propriété en ce qui concerne les fournisseurs de contenu. Nous vous expliquerons au fil de notre exposé comment il est possible d'assouplir les règles pour les entreprises de câblodistribution, mais non pour les fournisseurs de contenu.
Je vais maintenant céder la parole à Louis Audet.
M. Louis Audet (président et directeur général, COGECO Inc.): Merci, Janet.
La prochaine section sur la convergence et l'équité concurrentielle, je la passerai en revue en français, mais je serai bien sûr ravi de répondre à vos questions en anglais.
[Français]
En 1996, le gouvernement fédéral a effectivement donné vie à une politique de convergence qui visait à encourager les compagnies de télécommunications à entrer en concurrence les unes avec les autres, alors que les câblodistributeurs doivent entrer dans les télécommunications et les compagnies de téléphone dans la vidéo. Alors, conformément à la décision 91-1 du CRTC, les entreprises de câblodistribution sont également des distributeurs au sens de la Loi sur les télécommunications. Donc, les entreprises de câble acheminent des services de télévision et des services de télécommunications, tel Internet, sur un seul et même fil.
Les compagnies de téléphone, quant à elles, acheminent la téléphonie, Internet à haute vitesse et des signaux de télévision sur un seul et même fil également. Alors on parle ici de Telus Alliance et de SaskTel, ce qui fait que vous voyez deux réseaux filaires concurrentiels qui, à l'occasion, empruntent la même infrastructure, mais qui sont des réseaux filaires distincts. Et chacun de ces deux réseaux permet de transporter la pleine sélection des services.
Évidemment, il y a une exception dans le cas de Bell qui transporte ses signaux vidéos par satellite plutôt que de les transporter par fil. Mais ce matin même, à la conférence de l'Institut international des communications, le président de Bell nous confirmait qu'à plus long terme, il envisageait également de les distribuer par fil. Ceci fait que les compagnies de téléphone et les entreprises de câblodistribution sont toutes deux des distributeurs hybrides, partiellement distributeurs de télécommunications en vertu de la Loi sur les télécommunications et partiellement entreprises de distribution en vertu de la Loi sur la radiodiffusion. Les deux composantes ne peuvent pas être dissociées parce qu'elles sont sur un même réseau qui est intégré. C'est pourquoi nous croyons que, par équité concurrentielle, les câblodistributeurs et les compagnies de téléphone doivent bénéficier du même traitement dans le cadre de la libéralisation des règlements sur la propriété étrangère.
La concurrence entre les entreprises dotées de leurs propres installations, facilities based competition, comme celles des distributeurs de télécommunications et des câblodistributeurs, a permis au Canada d'être un chef de file mondial. On le voit, entre autres, dans Internet où le service est largement disponible et à des prix, ma foi, très raisonnables.
De même, il y a une concurrence dans la distribution où le satellite et le câble ont réussi en fait à desservir plus de trois millions de clients au service numérique. Ce sont des progrès qui ont été accomplis, et il ne faudrait pas arrêter le progrès. Alors, la libéralisation pour les seuls distributeurs de télécommunications créerait, selon nous, un déséquilibre concurrentiel et menacerait la politique gouvernementale en matière de convergence.
 (1220)
[Traduction]
L'absence d'une totale équité concurrentielle serait dangereuse, injuste et irait à l'encontre de l'intérêt du public.
Jim, la parole est à toi.
M. Jim Shaw (directeur général, Shaw Communications Inc.): Merci Louis.
L'industrie de la télévision par câble est hautement capitalistique. Nous commençons à peine à développer l'infrastructure nécessaire à la prestation de la prochaine génération de services, comme la câblodistribution numérique, qui occupe actuellement entre 15 et 20 p. 100 du réseau global au Canada, et la haute vitesse, qui occupe en ce moment un peu plus de 20 p. 100 du réseau de notre grand pays. L'industrie de la câblodistribution est encore l'une des plus importantes au monde. Elle est concurrentielle et déréglementée. Les exploitants d'entreprises de câblodistribution ont investi massivement, mais davantage de capitaux sont pourtant nécessaires. Comme le montre le graphique inclus dans le document, l'accès à des capitaux nous permet d'être des pionniers. À mesure que nous continuons de veiller à demeurer des chefs de file mondiaux, nous devons aussi continuer à innover. Les Canadiens exigent des produits de qualité, cela ne changera pas. De nouveaux services, comme la vidéo sur demande et la télévision haute définition, en sont encore à leurs premiers balbutiements. Le développement de ces services exigera encore davantage de capitaux.
Les sources actuelles de financement sont en péril. Un bon nombre d'entre vous est au courant que des agences d'évaluation du crédit partout en Amérique du nord ont révisé à la baisse la cote de crédit de nombreuses entreprises et qu'un grand nombre de marchés des capitaux ont fermé. Le marché à haut rendement est fermé depuis environ six mois, et on ne s'attend même pas à ce qu'il ouvre cette année. Toutes les entreprises sont préoccupées par les niveaux des dettes. Elles devront se financer en s'endettant et en émettant des actions. Le système bancaire canadien a commencé à restreindre les prêts consentis aux entreprises de télécommunication et de câblodistribution. À titre d'exemple, la Banque TD a révélé la semaine dernière que les sommes accordées en prêts aux entreprises de télécommunication et de câblodistribution sont passées en une année de 5,5 milliards de dollars à 1,5 milliard de dollars. Les sources de financement pour le développement de l'industrie deviendront encore plus importantes au fil du temps.
Nous sommes d'avis que l'élimination des restrictions en matière de propriété aurait une incidence positive sur les secteurs des télécommunications et de la câblodistribution et permettrait aux entreprises de ces secteurs de bâtir l'infrastructure nécessaire pour favoriser l'expansion continue du contenu canadien.
Je cède maintenant la parole à John Tory.
M. John Tory (président et directeur général, Rogers Cable Inc.): Merci.
Je pense que je vais parler de ce que nous ne sommes pas venus demander et, plus particulièrement, de la question de la séparation du contenu et de la distribution. C'est notre avis, et je pense que c'est un fait, que la libéralisation de la propriété en ce qui concerne la distribution n'entraîne pas et n'entraînera pas un changement dans le contenu distribué par les entreprises que nous représentons ici aujourd'hui. Les règlements régissant le contenu, qui s'appliquent à des réseaux de distribution comme les nôtres, demeureront inchangés peu importe qui est propriétaire de ces réseaux. Cela comprend des choses comme les obligations en matière de distribution, le mode d'assemblage des forfaits, etc. Ces règlements ont cours quel que soit le propriétaire du réseau. Alors, nous sommes ici aujourd'hui pour dire qu'il y a une séparation entre les mesures visant à protéger et à promouvoir le contenu canadien et les mesures concernant la propriété. Nous ne sommes pas ici pour demander une modification des règlements s'appliquant aux fournisseurs de contenu et, de fait, nous croyons que ces règlements ne devraient pas être changés. Monsieur Morrison a reconnu l'importance de ces règlements, et ce sont ces règlements qui ont des répercussions importantes sur le produit que nous distribuons, sur la façon dont nous vendons la programmation et sur la façon dont nous travaillons avec les radiodiffuseurs pour bâtir un système de radiodiffusion canadien.
Si la libéralisation des règlements sur la propriété étrangère crée des inquiétudes parce qu'il existe des entreprises dont les activités comportent à la fois un volet contenu et un volet contribution, nous croyons que la séparation structurelle a, et aura, pour effet de garantir que cette libéralisation pour le volet distribution n'aura pas d'incidences sur le volet contenu. Les trois entreprises représentées ici aujourd'hui ont, jusqu'à un certain degré, une activité média et une activité distribution, et elles sont déjà structurées de manière que ces deux activités soient des entités différentes de l'entreprise. Si les règlements régissant la propriété étrangère étaient libéralisés et qu'il y avait des inquiétudes justifiant que la séparation entre ces deux entités soit encore plus grande du point de vue structurel qu'elle ne l'est à l'heure actuelle, il ne resterait pas grand-chose à faire, et il serait facile d'assurer une séparation structurelle complète entre le contenu et la distribution.
Alors, nous ne sommes pas ici pour réclamer ou appuyer des changements dans les règlements relatifs au contenu. Nous croyons que la séparation structurelle existante et d'autres changements qui pourraient être apportés pour rendre encore plus complète cette séparation suffiraient à protéger les règlements régissant le contenu canadien, tout en permettant à nos entreprises, comme l'a dit Jim, de profiter d'une libéralisation des règlements sur la propriété étrangère pour avoir un meilleur accès aux capitaux.
Janet.
 (1225)
Mme Janet Yale: Merci.
Les dernières pages de notre présentation répondent à la question suivante qui, nous le savons, préoccupe beaucoup les esprits. Étant donné que les câblodistributeurs et les télédiffuseurs sont tous deux assujettis à la Loi sur la radiodiffusion, comment allez-vous, en termes pratiques, changer les règlements régissant la propriété pour les réseaux de distribution, comme les entreprises de câblodistribution, sans le faire pour les télédiffuseurs qui sont les fournisseurs de contenu au pays? À notre point de vue, c'est en réalité une chose assez simple, parce que les règlements actuels sur la propriété étrangère sont contenus dans une instruction au CRTC appelée «Inadmissibilité des non-Canadiens», et cette instruction peut être modifiée pour s'appliquer aux fournisseurs de contenu et non aux entreprises de distribution en conformité avec les définitions de ces termes prévues dans la Loi. La dernière page de notre présentation donne le libellé réel du changement qui permettrait de mettre en oeuvre notre recommandation, de libéraliser les règlements régissant la propriété étrangère pour les entreprises de câblodistribution, mais non pour les fournisseurs de contenu. Nous voulions nous assurer que vous aviez en main un projet de libellé pour que vous puissiez voir comment cela se ferait.
Nous sommes maintenant prêts à recevoir vos questions.
Le vice-président (M. Paul Bonwick): Merci, madame Yale.
Pour le premier tour, nous allons donner la parole à M. Strahl. M. Lincoln essayait de s'en tenir à cinq minutes pour chaque personne qui pose des questions pendant le premier tour en espérant que cela nous permettrait de faire un deuxième tour.
Monsieur Strahl.
M. Chuck Strahl: Merci de votre exposé. Vous avez raté un premier round excitant, mais nous allons nous reprendre maintenant et voir ce que nous réussirons à trouver.
Nous voyons votre description des avantages qui découleraient d'un accès accru à des investissements étrangers. Qu'arrivera-t-il si vous n'avez pas cet accès? Y a-t-il ici un scénario d'apocalypse? Allez-vous pouvoir continuer de vous débrouiller avec les règlements actuels sur la propriété canadienne ou êtes-vous en train de nous dire que sans les modifications que vous souhaitez, vous voyez des nuages à l'horizon?
M. Jim Shaw: Les entreprises sont solides et continueront d'aller de l'avant et je n'ai pas à vous dire si nous serons en faillite si cela n'arrive pas. La question, c'est de savoir dans quelle mesure nous voulons développer le réseau, dans quelle mesure nous voulons être des chefs de file au Canada et dans quelle mesure nous voulons que cet argent additionnel crée de l'innovation, des emplois, beaucoup de choses pour les Canadiens. Nous estimons que cela favoriserait notre développement et améliorerait nos capacités en matière de contenu. À l'heure actuelle, nos plates-formes sont tellement petites que même les nouveaux canaux numériques ont de la difficulté à respecter les exigences financières et les exigences en matière de contenu canadien; il faut dire, cependant, que notre taux de pénétration du marché canadien n'est que de 20 p. 100. Même pour nos services d'Internet, qui sont un succès à l'échelle mondiale, le taux de pénétration du marché est inférieur à 30 p. 100. Alors, il y a beaucoup d'autres facteurs qui interviennent dans le développement du réseau et nous voyons que les gens veulent plus d'accès au réseau. Je pense que plus nous aurons accès à des capitaux, plus nous pourrons nous épanouir.
 (1230)
M. John Tory: Il y a bien quelques industries dans lesquelles le Canada occupe le premier rang mondial, non pas le troisième ou le quatrième, mais le premier, et nous aimerions tous en voir plus. Dans le domaine de la télévision par câble et, en particulier, de l'accès Internet à large bande, nous avons été les premiers au monde pour ce qui est de l'importance du déploiement, de la vitesse avec laquelle ce déploiement a eu lieu, du nombre de personnes à avoir accès à ces services, etc. Je pense que nous y sommes parvenus grâce au travail de nombreux pionniers et, dans le monde de la télévision par câble à l'échelle mondiale, les gens qui sont représentés à cette table, et d'autres qui ne sont pas ici, ont été des pionniers. Comme l'a dit Jim, personne ne dit que les entreprises vont courir à la faillite, mais je pense que lorsque nous parvenons à nous hisser au premier rang mondial dans une industrie comme la nôtre, c'est une position que nous aimerions garder.
Jim a parlé de la situation des marchés de capitaux canadiens. Cette situation est en partie fonction de la taille du pays, de l'époque dans laquelle nous vivons, etc., mais la demande de capitaux pour maintenir notre position comme chef de file mondial ne disparaît pas pour autant. Il faut trouver des sources nouvelles, différentes et additionnelles de capitaux, y compris, comme l'a dit Jim, les capitaux propres, pour conserver cette position.
Quel sont les avantages pour les Canadiens? Les Canadiens ont été les premiers au monde à profiter d'un accès à large bande et, aujourd'hui, cet accès est davantage accessible au Canada que partout ailleurs dans le monde. Le gouvernement a dit, par l'intermédiaire du Groupe de travail national sur les services à large bande, aux travaux duquel Jim, Louis et moi avions eu le bonheur de participer, qu'il désire faire en sorte que plus de Canadiens aient accès aux services à large bande. Pour trouver la technologie qui permettrait, par exemple, de rentabiliser l'opération, etc., il faudra plus de capitaux; il faudra plus de capitaux pour rester le chef de file mondial dans ce domaine et réaliser certains des objectifs de politique publique fixés par le gouvernement.
M. Chuck Strahl: Dans le dernier budget aussi, il a été beaucoup question de nouveaux fonds pour l'accès aux services à large bande, etc., fonds qui ne se sont jamais matérialisés et je ne pense pas non plus, pour dire la vérité, qu'ils viendront du gouvernement fédéral. Nous devrons trouver cet argent quelque part. Je ne vois pas de problème dans ce que vous proposez ici. Je pense qu'on peut facilement adapter la question culturelle canadienne sans s'inquiéter du fait qu'il y a plus d'argent étranger dans les systèmes de câblodistribution. Personnellement, je n'y vois pas de gros problème. En fait, je dirais que même dans le secteur de la radiodiffusion, avoir plus d'argent dans le système aiderait les gens à faire un meilleur travail—je sais que ce n'est pas ce que vous préconisez. Lorsque l'argent est rare, et c'est le cas, et le Canada n'est pas un très grand marché, et que vous voulez trouver des fonds pour ces industries convergentes, je pense que vous devez aller à l'extérieur.
Il y a la thèse qui veut que si on libéralise, cela ne fera qu'apporter un bénéfice exceptionnel aux actionnaires actuels; ils seront en mesure de vendre et de faire un profit énorme. Qu'avez-vous à dire à ce sujet?
M. Jim Shaw: Ces entreprises sont la propriété de Canadiens, et tous les Canadiens ont la possibilité d'être des actionnaires. Lorsqu'il m'a passé le flambeau, mon père m'a dit que c'était juste un permis pour dépenser, et que j'allais dépenser, dépenser et dépenser encore et qu'il semble que c'est la seule chose que nous faisons. Nous essayons de renverser cette tendance, ce qui est un thème populaire ici aussi sur la colline, mais c'est très difficile à faire. Lorsque vous êtes habitués à bâtir des infrastructures et des routes, vous avez tendance à faire cela. Ces entreprises ne sont pas la propriété d'une seule personne, mais d'une multitude de Canadiens et d'autres intervenants et il y a une progression naturelle. Je pense que le fait de savoir si les actions de quelqu'un montent ou baissent d'un dollar n'est pas du tout la question, mais plutôt comment nous allons développer ces routes pour demeurer les chefs de file que nous sommes.
M. Louis Audet: Et je pense qu'à l'occasion, on interprète mal la question en disant que ce sont des gens qui veulent tout liquider. En fait, j'aimerais insister sur le fait que le gens qui sont devant vous, comme l'a dit Jim, ne sont pas seuls. Le public canadien participe avec nous dans cette aventure. Si vous avez suivi les explications de John, nous avons été à l'avant-garde du développement d'une infrastructure de haute performance. Alors, il ne s'agit pas d'une question de liquidation, mais plutôt d'être en mesure de vendre des actions à un juste prix. La taille du marché canadien est telle qu'il est maintenant extrêmement difficile de le faire. Parce que le marché canadien est si petit, la valeur des actions est bien inférieure à ce qu'elle devrait être et, en particulier, à ce qu'elle serait aux États-Unis, généralement parlant. C'est là le coeur du problème. Il est possible de contracter une dette sur les marchés étrangers, surtout au sud de la frontière, mais être capable d'émettre des actions à l'intention de personnes qui sont intéressées à les acheter à un prix juste et plus élevé, pour garder l'équilibre entre la dette et l'actif et être en mesure de progresser, comme l'a suggéré Jim, c'est cela que nous recherchons.
 (1235)
Le vice-président (M. Paul Bonwick): Merci.
Madame Gagnon.
[Français]
Mme Christiane Gagnon: Merci.
Un des enjeux reliés à la levée des restrictions en matière de propriété étrangère est la qualité du contenu et l'accès à ce dernier par la population. Vous avez précisé que des sommes supplémentaires seraient consacrées à des services à large bande et qu'un des avantages qui en résulteraient pour le consommateur serait de pouvoir accéder à une gamme plus étendue de produits. Je veux revenir à cette question des avantages pour le consommateur.
On fait une tournée consacrée à la Loi sur la radiodiffusion, et on nous a amenés à réfléchir sérieusement à l'accessibilité et à la qualité de la programmation locale ainsi qu'aux ressources nécessaires pour atteindre ces objectifs. En quoi la levée des restrictions sur la propriété étrangère pourrait-elle non seulement élargir l'accessibilité, mais également améliorer la qualité de la programmation et les investissements dans la créativité?
Seriez-vous obligés de donner généreusement, si on peut dire, afin que cette programmation soit de meilleure qualité et qu'elle reflète mieux les communautés locales et régionales? Un des enjeux importants de la Loi sur la radiodiffusion est non seulement d'élargir l'accessibilité, mais aussi d'offrir aux différentes communautés les ressources nécessaires .
Hier, nous avons rencontré les peuples autochtones et nous avons constaté que partout au Canada, il existe encore des lacunes à l'égard de la programmation désirée. On souhaiterait l'obtenir, mais on n'a aucun outil pour se développer.
M. Louis Audet: Madame Gagnon, merci de votre question. Je comprends votre préoccupation mais, comme l'expliquait mon confrère Jim, nous nous présentons à vous aujourd'hui comme des bâtisseurs de routes. Or, par définition, les bâtisseurs de routes ne construisent pas les automobiles et ne dirigent pas la circulation: ils bâtissent des routes alors que les gens, eux, les utilisent. Les fabricants de contenu, pour leur part, utilisent la route pour faire parvenir ce dernier à leurs clients. Pour ce qui est de la question que vous posez, nous ne sommes pas les bons destinataires.
Mme Christiane Gagnon: En matière de convergence ou, autrement dit, de concentration, vous êtes associés à des gens qui font du contenu.
M. Louis Audet: Nous appartenons à des entités structurellement séparées, que nous ne représentons pas aujourd'hui. Il me fait plaisir, néanmoins, de répondre à votre question.
Je précise également que nous oeuvrons dans le cadre de stations de télévision, de canaux spécialisés et de stations de radio; or, dans ces différents contextes, nous ne désirons pas avoir accès à des capitaux étrangers. Par conséquent, nous ne souhaitons pas de changements à la réglementation actuelle, pour ce qui est de ces entités. À l'heure actuelle, elles se développent très bien, elles font leur travail et ont à coeur--je peux vous parler de domaines dans lesquels nous sommes engagés--de bien desservir la population locale. En fait, je dois dire qu'il n'y a pas vraiment de lien direct avec la proposition que nous faisons aujourd'hui, même si je sais que votre préoccupation est légitime.
[Traduction]
M. John Tory: Je pense qu'il y a un endroit où cela peut faire une différence. Louis a dit, et avec justesse d'ailleurs, que nous sommes davantage des bâtisseurs de routes et des distributeurs que des concepteurs de programmation. En procédant aux investissements que nous avons faits dans le réseau et en dépensant les milliards de dollars que nous avons dépensés, nous avons créé la capacité, la bande passante, qui nous permet d'avoir, dans notre cas, par exemple, suffisamment de canaux pour offrir un canal communautaire dans chacune des langues officielles à Ottawa et au Nouveau-Brunswick. Nous avons de la place lorsque la politique publique dit que nous devons distribuer le réseau autochtone sur le service de câble de base. L'investissement que nous avons fait dans les services à large bande dont Jim Shaw a parlé a probablement donné lieu au réseau de distribution ultime par lequel les gens peuvent avoir accès à toutes sortes de contenus, y compris à un contenu très local.
Ainsi, l'accès au capital, propre ou autre, nous permet de bâtir des réseaux qui sont aussi robustes ou qui offrent autant de capacité que n'importe quel réseau au monde, ce qui signifie qu'il y a plus de possibilités que les gens aient accès à des contenus variés, y compris le contenu local ou le contenu très spécifique dont vous parlez. Sans la disponibilité de ce capital, nous aurions des réseaux qui seraient beaucoup moins en mesure de le faire.
 (1240)
[Français]
Mme Christiane Gagnon: Je vous remercie.
[Traduction]
Le vice-président (M. Paul Bonwick): Monsieur Harvard.
M. John Harvard: Merci.
Je dois dire d'emblée que je me sens tout à fait chez moi ici. Monsieur Tory, j'utilise les services de Rogers dans ma demeure à Ottawa, tandis que dans ma maison de Winnipeg, j'utilise les services de câblodistribution de M. Shaw, y compris le service Internet; alors, je suis ici en qualité de client. Je suis déçu que vous n'ayez pas relevé le défi de participer à la course au leadership du Parti conservateur; j'aurais adoré la compétition.
M. John Tory: Monsieur Harvard, j'ai rencontré le premier ministre Chrétien il y a quelques mois et il m'a confié qu'il était impatient de faire de moi le huitième chef de l'opposition qu'il écartait. Ce fut pour moi un moment de vérité.
M. John Harvard: Mes premières questions s'adresseront à vous, monsieur Shaw. Je vous ai déjà dit que j'étais de Winnipeg et je vais sortir du sujet pour un moment. Je ne vais pas vous interroger sur la propriété étrangère; je vais plutôt vous parler d'une question d'actualité dans la ville de Winnipeg. La question a été soulevée pour la première fois par la CBC dans une de ses nouvelles émissions à Winnipeg. Votre entreprise distribue le canal Showcase et on trouve, sur ce canal, deux ou trois émissions violentes plutôt explicites. D'après les règlements du Conseil canadien des normes de la radiotélévision, ce genre d'émission devrait être diffusé entre 21 h et 6 h. D'après ce que je peux comprendre, les émissions qui passent à Winnipeg sont conformes, techniquement, à la norme parce qu'elles proviennent de Vancouver et qu'elles partent de cet endroit dans la période se situant entre 21 h et 6 h, heure de Vancouver; mais elles peuvent être vues entre 7 h et 9 h à Winnipeg, dans le fuseau horaire du Centre, le samedi matin, lorsque les enfants sont à l'écoute. Beaucoup de gens sont contrariés, y compris moi-même, parce que je pense qu'il y a un moment approprié pour ce genre d'émissions. Je me demande seulement si vous, en qualité de distributeur, vous vous sentez responsable de cette situation et ce que vous feriez pour la corriger.
M. Chuck Strahl: J'en appelle au Règlement; si le témoin désire répondre à cette question, libre à lui de faire, mais nous avons convoqué ces gens pour qu'ils nous parlent expressément de propriété étrangère. Si nous avions voulu parler de toutes sortes d'autres choses, nous aurions pu le faire, mais je pense, John, que vous vous écartez vraiment du sujet.
M. John Harvard: Je m'écarte du sujet, mais je...
M. Chuck Strahl: Ce n'est pas parce que vous l'avez dans votre collimateur que vous devez le pulvériser.
M. John Harvard: Je ne pense pas du tout qu'il soit dans le collimateur. Il est président-directeur général d'une entreprise et je suis sûr qu'il peut répondre.
Le vice-président (M. Paul Bonwick): Pour ce qui est du rappel au Règlement, monsieur Shaw, vous êtes libre de répondre si vous le désirez, mais ce n'est pas la raison pour laquelle vous avez été invité ici. Il reste deux minutes dans ce tour.
M. Jim Shaw: Il y a seulement deux choses dans la Loi sur la télédiffusion. Nous ne pouvons pas modifier un signal quel qu'il soit. Il nous est fourni par un exploitant canadien et nous avons le choix entre une diffusion de Vancouver ou en provenance de l'est. Une diffusion en provenance de l'est signifierait que vous auriez cette émission explicite à une heure de grande écoute en soirée, moment où les téléspectateurs sont très nombreux, comparativement à une présentation de l'émission tôt le matin, à une heure où les téléspectateurs sont peu nombreux. Il a été décidé que la diffusion de l'émission au moment où le nombre de téléspectateurs est le plus faible était la meilleure solution pour notre entreprise dans cette région, et vraiment, c'est tout ce que nous pouvons faire.
M. John Harvard: Pourquoi ne la retardez-vous pas tout simplement?
M. Jim Shaw: Nous ne pouvons le faire. Nous n'avons pas le droit de modifier le signal. C'est leur signal, il s'agit d'une entreprise canadienne, et en vertu de la Loi sur la télédiffusion, nous n'avons pas le droit de changer les signaux.
M. John Harvard: Ainsi, notre querelle, si nous pouvons l'appeler ainsi, concerne le CRTC?
M. Jim Shaw: Non, je pense qu'elle concerne le fournisseur de l'émission. Si ces gens fournissent des émissions trop explicites sur un réseau de télédiffusion qui est obligatoire et qui fait partie du service de base des Canadiens, il y a effectivement un problème.
 (1245)
M. John Harvard: Alors, vous ne leur demanderiez pas de reconsidérer la question, de manière que les émissions puissent être diffusées à une heure appropriée.
M. Jim Shaw: Ils reçoivent des lettres toutes les semaines. Le choix leur appartient. Notre seul rôle, c'est qu'on exige de nous qu'on distribue le signal, comme on le fait pour celui de la CBC. Vous ne pouvez rien modifier, même si vous n'aimez pas la programmation.
M. John Harvard: Alors il faut parler soit à Showcase ou au producteur, Alliance Atlantis.
M. Jim Shaw: Oui, c'est par là qu'il faut commencer.
[Français]
Le vice-président (M. Paul Bonwick): Monsieur Duplain.
M. Claude Duplain (Portneuf, Lib.): En fait, je n'ai pas beaucoup de questions. J'acquiesce beaucoup à vos demandes et je pense qu'on peut quand même, dans votre cas, parler d'investissements étrangers sans jouer dans la programmation, sauf que j'aimerais m'avancer un peu sur la question de Mme Gagnon, qui faisait partie de ma question aussi.
Vous dites, monsieur Audet, qu'on s'adresse aux mauvaises personnes, mais quand on parle de câblodistribution et de télévision communautaire, on s'adresse aux bonnes personnes, je crois. Aujourd'hui, avec la convergence, les investissements étrangers, vous allez devenir de plus en plus gros, souvent de plus en plus impersonnels. On parle également de fusions et on parle de gens dans nos localités proches où la télévision communautaire a une grande appartenance à la région. On voit des télévisions communautaires qui sont venues ici pour se plaindre de la non-accessibilité, des heures de programmation que les compagnies enlèvent aux télévisions communautaires. Vous dites que vous en faites, sauf qu'elle est centralisée, et les villes n'ont plus leur appartenance à ces télévisions communautaires.
Les télévisions communautaires font des présentations autonomes, donc cela a rapport à vous, comme câblodistributeurs. Donc, les câblodistributeurs ont des droits aussi.
J'aimerais avoir vos commentaires là-dessus.
M. Louis Audet: Ça me fait plaisir de répondre à votre question, monsieur Duplain.
En effet, nous sommes actifs dans le domaine de la programmation communautaire. Dans les plus petits réseaux, cela représente environ 5 p. 100 des recettes des services de radiodiffusion qui sont orientés vers cette activité-là. Dans les plus grands réseaux, 3 p. 100 va au Fonds canadien de télévision, et 2 p. 100 va à la programmation communautaire. Donc, c'est une activité importante. C'est une responsabilité que nous assumons et qui nous tient à coeur, mais disons que dans le portrait de la construction de l'autoroute, c'est un segment assez limité.
Cela étant dit, je ne doute pas et je suis en fait d'accord avec vous que la télévision communautaire est un outil important dans la communauté. Il se peut que vous ayez des exemples de compagnies dont vous n'êtes pas satisfaits du travail au plan de la télévision communautaire, mais ce n'est pas notre cas. En fait, le CRTC a promulgué une nouvelle politique de programmation communautaire qui entrera en vigueur en janvier et qui exigera que 60 p. 100 des contenus soient de nature communautaire. La majorité des exploitants et ceux que vous avez devant vous en ce moment se conformaient déjà à cette exigence. Donc, nous prenons notre responsabilité au sérieux et nous nous en acquittons.
Par contre, nous sommes toujours à l'écoute de suggestions qui peuvent nous aider à être meilleurs, à mieux nous acquitter de notre rôle, et ça nous fera toujours plaisir d'en recevoir. Comme exploitant, d'ailleurs, on en reçoit tous les jours et on essaie de les mettre en application.
Alors, tout ça pour dire que je ne veux pas minimiser notre rôle. Il est significatif et on essaie de s'en acquitter pour le mieux. Dans un scénario de participation non canadienne accrue, cette exigence du CRTC et de la réglementation ne disparaîtrait pas. Elle serait toujours là, et les compagnies s'en acquitteraient à l'intérieur des exigences de la réglementation et de la loi. Je vous dis donc qu'il n'y aurait pas lieu pour vous de vous inquiéter à cet égard.
Est-ce que cela répond à votre question?
M. Claude Duplain: En fait, ça y répond, oui, sauf qu'on s'en inquiète parce que les télévisions communautaires viennent nous voir pour se plaindre du fait qu'elles n'ont plus les heures de programmation qu'elles avaient. La concentration se fait. À certains endroits, c'est distribué dans les villages; les villages n'ont plus la possibilité de transmettre leur âme comme ils pouvaient le faire auparavant. Certaines télévisions communautaires autonomes me disent que maintenant ça va bien parce qu'elles ont un petit câblodistributeur, mais la journée où elle seront achetées, est-ce que la programmation qu'elles font dans le village n'existera plus et que l'on va tout simplement leur fouter la programmation qui est faite à Montréal ou ailleurs?
 (1250)
M. Louis Audet: Mais, monsieur Duplain, je comprends qu'on vous ait posé la question. C'est une question légitime et importante, mais en ce qui a trait à la revue du contexte de toute la programmation communautaire, à la réglementation, le CRTC vient de tenir un processus complet au terme duquel il a édicté les règles du jeu. Alors maintenant, tous les câblodistributeurs se conforment aux règles du jeu. Que ce soit nous ou quelqu'un d'autre, les règles du jeu devront être respectées et devront être suivies. Il se peut qu'il y ait des gens parmi ceux qui vous ont fait ces représentations-là qui ont trouvé que le contenu local était diminué, mais il est clair que les quelques rares câblodistributeurs qui auraient erré de ce côté-là, s'il en est, devront se conformer à la politique à compter du 1er janvier. Donc, il me semble que ça devrait répondre à votre question.
M. Claude Duplain: Merci.
[Traduction]
Le vice-président (M. Paul Bonwick): Monsieur Strahl.
M. Chuck Strahl: Peut-être pourrions-nous inviter M. Morrison à reprendre le débat. Cela pourrait nous aider à bien comprendre les deux côtés de la médaille.
Le vice-président (M. Paul Bonwick): Je suppose que vous savez que n'importe lequel des témoins est invité à prendre part à la discussion pendant cette période de cinq minutes.
M. Chuck Strahl: D'accord. Merci.
Le vice-président (M. Paul Bonwick): Madame Lill.
Mme Wendy Lill: Je n'ai qu'une question à vous poser concernant le Groupe de travail national sur les services à large bande. À ce que je comprends, le groupe recommande que tout financement public de l'infrastructure des services à large bande en région éloignée favorise le libre accès des tiers aux lignes, et le CRTC a sommé les câblodistributeurs d'élargir l'accès à leur câble coaxial aux fournisseurs de services Internet externes, mais rien ne s'est passé. Ainsi, vos sociétés sont-elles enfin disposées à suivre les recommandations du groupe de travail? Dans la négative, pourquoi?
M. John Tory: Nous avons toujours été disposés, en mesure et prêts à respecter la directive du CRTC. Comme vous le savez, le CRTC a mené de vastes études de coûts et a établi un tarif que les fournisseurs externes qui souhaitent avoir accès à nos réseaux doivent nous payer pour y avoir accès. Dans notre cas, le nombre de personnes qui nous ont contactés ne serait-ce que pour parler de l'accès à nos installations se limite à deux ou trois, et je crois qu'une seule a poussé la démarche jusqu'à d'autres discussions. Nous n'avons pas participé à ces discussions ni n'avons essayé de lui mettre d'autres bâtons dans les roues. Les conditions selon lesquelles ces gens pourraient faire affaire avec nous sont fixées par le CRTC. Je suppose donc—et ce n'est vraiment qu'une supposition—qu'il y a bien des gens qui ne se sont pas adressés à nous pour se procurer l'accès ou qui ont communiqué avec nous et ont décidé de ne pas poursuivre leur démarche parce qu'ils ne croient pas vraiment pouvoir lancer une entreprise ou faire des affaires en ce moment.
En fait, vous pouvez constater la tarification applicable aux produits Internet et la compétition saine qui existe entre les divers fournisseurs du marché. Il y a une vive concurrence entre Telus et Shaw, COGECO et Bell, Rogers et Bell, et je crois que cela créé de nombreuses guerres de prix, de bonnes affaires pour la clientèle, mais a peut-être rendu le climat moins attirant pour ceux qui voudraient se lancer dans ce commerce. Il est clair que nous sommes tout à fait disposés à nous conformer aux règles qui nous sont imposées et à rencontrer quiconque nous appelle et demande à nous rencontrer, mais nous n'avons reçu que très peu d'appels.
M. Jim Shaw: Nous n'avons refusé aucun accès. L'accès est totalement libre, donc si quiconque d'entre vous veut lancer une société Internet, nous sommes prêts à en discuter n'importe quand pour la démarrer. Ce que vous laissez entendre est complètement faux.
Mme Wendy Lill: Il n'y a donc aucun mépris des règles, aucun obstacle, tout est possible...
M. Jim Shaw: Les tarifs sont déjà fixés, vous pouvez donc venir...
Le vice-président (M. Paul Bonwick): Je m'excuse, elle doit terminer sa question.
Mme Wendy Lill: Je veux seulement une explication. Je suis ravie de vous entendre dire officiellement que vous êtes ouverts et prêts à participer à tout cela.
 (1255)
M. Jim Shaw: Oui, c'est juste, nous sommes ouverts. C'est le CRTC qui a fixé les tarifs après un examen exhaustif auquel tous les participants ont pris part. Il suffit de respecter certaines exigences techniques, de sorte que les consommateurs soient protégés dans une certaine mesure et que l'accès soit offert par l'entremise de toutes les sociétés.
Mme Wendy Lill: Selon vous, il semble y avoir un problème qui explique pourquoi cela ne fonctionne pas. Quel est-il, que nous puissions le résoudre? Comment pouvons-nous favoriser vraiment le libre accès des tiers si vous dites ne pas y faire obstacle, mais qu'il ne concrétise tout de même pas? Quelle est la barrière et que devrions-nous recommander selon vous?
M. Jim Shaw: Il n'y a aucune barrière, mais je suppose que lorsque les entrepreneurs ont élaboré leur modèle financier, ils ont déterminé qu'il ne pouvait pas fonctionner. C'est la seule raison qui me semble pouvoir expliquer pourquoi ces gens n'ont pas demandé à y avoir accès. On ne peut obtenir l'accès gratuitement, il faut payer sa juste part des coûts et c'est tout ce que les câblodistributeurs demandent. Je suppose donc qu'ils ont pris une décision opérationnelle. Je ne peux en deviner les motifs, mais les tarifs sont les mêmes pour tout le monde, donc je ne peux que supposer qu'ils ne désavantagent personne.
Le vice-président (M. Paul Bonwick): Monsieur Audet.
M. Louis Audet: Je pense que John a mis le doigt sur le bobo. Les sociétés se disputent férocement les consommateurs. Nous nous battons contre la société de téléphone, et cette situation rend le milieu moins invitant pour des tiers. Comme Jim l'a très bien dit, nous suivons tous les règles, ce qui fait que l'accès est libre, mais il est clair qu'il n'est pas très attirant. Ce n'est pas un champ de bataille très facile, le marketing est très fort, diverses promotions réduisent les prix et la marge de manoeuvre. Ce n'est pas un marché facile. Je crois que c'est l'explication que vous cherchez.
Le vice-président (M. Paul Bonwick): Je vous remercie, monsieur Audet.
Pour la seconde ronde de questions, nous allons commencer par M. Strahl.
M. Chuck Strahl: Dans la même veine, les tiers souhaitant avoir accès aux installations pourraient-ils avoir plus de succès si les règles de propriété étrangère étaient assouplies? Quelqu'un pourrait-il avoir suffisamment d'argent pour pénétrer le marché et affronter la concurrence?
M. Jim Shaw: J'en doute. Si l'on prend la situation économique des consommateurs par câble ou modem à grande vitesse, même sous leur forme actuelle, je crois que le temps qu'il nous faut pour recouvrer notre capital, nos intérêts et tout le reste se situe entre un an et deux, il nous faut donc conserver notre clientèle. Les clients peuvent nous laisser tomber n'importe quand, mais nous courons ce risque. Or, je crois que ce sont ces risques que les gens ne sont pas prêts à prendre. Les gens constatent à quel point le marché est serré, la concurrence est forte et les gens croient en retirer une juste valeur, donc en tant qu'hommes d'affaires, ils ne veulent pas se battre pour obtenir un accès public.
M. Chuck Strahl: Je voulais simplement vous le demander, mais je suis d'accord.
Je vois dans votre mémoire, vous l'avez mentionné deux ou trois fois, que l'industrie de la câblodistribution s'oppose à des changements aux règles de propriété imposées aux fournisseurs de contenu. S'agit-il d'une opinion sincère? Probablement, parce que vos sociétés sont toutes intégrées et axées sur la convergence. Je suppose que les règles sur le contenu canadien, votre accès à certains fonds gouvernementaux et tout le reste vous offrent une certaine protection, mais vous en parlez à deux ou trois reprises dans votre mémoire. Est-ce une manoeuvre politique pour vous assurer que tous sont d'accord? Ou cela vient-il vraiment du fond de votre coeur? Par exemple, dans le secteur des journaux nationaux, bien qu'on la doive à Conrad Black, l'arrivée du National Post a été une très bonne chose pour la concurrence entre les journaux nationaux, nous avions enfin un peu de concurrence. J'aurais été tout aussi content si on la devait à Murdoch ou à qui que ce soit d'autre, cela m'était égal, parce que nous avions besoin d'un peu de concurrence. Il est peut-être plus facile d'obtenir du contenu canadien dans les journaux, mais ne pourriez-vous pas élargir l'accès à vos installations ou accroître la propriété étrangère, même pour les fournisseurs de contenu, tout en garantissant, par voie de règlement, une certaine proportion de produits de contenu canadien? Ne pourriez-vous simplement pas dire qu'il faut quelques joueurs de plus dans l'industrie et davantage de capitaux étrangers?
· (1300)
M. John Tory: Je suppose qu'en théorie, la réponse à votre question pourrait être positive en bout de ligne, si toutes les règles restent les mêmes en ce qui concerne le contenu, l'horaire, ce qu'il faut transmettre, etc. Il faut dire que ces sociétés ne sont pas capitalistiques. Elles n'ont pas besoin des capitaux massifs dont nous parlons dans notre exposé aujourd'hui. Nous sommes tous des participants à ces sociétés, dans une certaine mesure, et je pense que nous avons l'impression que le maintien d'un système de radiodiffusion canadien fort profite probablement de... D'autres pays se sont penchés sur l'actif de la distribution, des télécommunications et de la câblodistribution et envisagent de libéraliser le taux d'investissement étranger dans ces actifs, bien que peu de pays maintiennent toujours des restrictions quant à la propriété étrangère des télécommunications et de la câblodistribution, certains de ces pays imposent toujours certaines restrictions quant à la propriété de l'actif des médias.
Je crois que nous sommes très coopératifs, et c'est le point de vue que nous essayons de défendre aujourd'hui. Nous sommes extrêmement favorables au maintien d'un système de radiodiffusion canadien fort. Nous en faisons partie intégrante. Nous savons que nos consommateurs veulent des services canadiens. Ils veulent jouir d'autres services aussi, et non seulement de services américains, mais de services de toutes sortes et de tous lieux—le plus nous pouvons leur en fournir, le mieux ce sera.
Je raconte souvent une histoire que j'ai vécue lorsque j'étais dans un tout autre domaine et qui pourrait sans doute expliquer en partie ce que nous tentons de dire. Il est venu un temps où, lorsque j'étais à la tête de la Ligue canadienne de football, nous avons dû trouver un nouveau propriétaire à l'équipe de football de Montréal, qui était pratiquement sur le bord de la faillite. Un monsieur de New York voulait l'acheter. J'en étais franchement ravi. Je ne me souciais absolument pas d'où il venait, parce qu'il était prêt à recapitaliser l'équipe, à fournir le capital dont elle avait besoin pour forger l'équipe qui est devenue championne la semaine dernière. Cependant, il y a une chose qu'il ne m'a pas demandée pendant que je tentais de faire admettre sa candidature. Il ne m'a jamais demandé si nous allions changer les règles du jeu, en modifier le contenu et jouer différemment. Il a acheté l'équipe, conscient qu'il devait suivre nos règles.
Je pense que tant qu'on maintient la propriété canadienne, un système de distribution en santé et des règles pertinentes établies par l'organisme de réglementation, si l'on combine ces trois éléments—soit un contenu de propriété canadienne, des distributeurs forts offrant des services par satellite et par câble, ayant suffisamment de fonds, capables d'élargir leurs réseaux et j'en passe et le maintien des règles que les organismes de réglementation estiment adéquates pour assurer la force du système de radiodiffusion canadien—vous pouvez avoir votre part du gâteau, profiter d'un système de radiodiffusion canadien fort dans lequel sont investis beaucoup de capitaux, demeurer un chef de file mondial et tout le reste. On n'a pas à changer les règles du jeu, même si l'on admet un investisseur étranger prêt à fournir du capital.
Le vice-président (M. Paul Bonwick): Merci, monsieur Tory.
Madame Gagnon.
[Français]
Mme Christiane Gagnon: Vous dites vouloir élargir le réseau. Pourriez-vous, à cet effet, nous parler du plan de développement que vous souhaiteriez mettre en oeuvre? Quelles seraient vos priorités s'il advenait que vous ayez plus d'argent à consacrer au développement? Enfin, étant donné l'accès à un plus grand territoire, quelles seraient vos priorités?
M. Louis Audet: À mon avis, les priorités se situent à deux niveaux. En premier lieu, il s'agit d'étendre des réseaux hautement performants de plus en plus loin pour atteindre des communautés plus petites, ou à tout le moins plus isolées. La câblodistribution est déjà accessible à 95 p. 100 des foyers; il reste un certain pourcentage de foyers qui sont plus dispendieux à rejoindre, mais qu'on pourrait atteindre .
Ensuite, pour peu que nous puissions le prévoir, il semblerait que les clients consommeront de plus en plus à la demande et de moins en moins sur rendez-vous. Ainsi, en regardant loin devant, on se rend compte que les consommateurs devront éventuellement avoir accès au contenu sur demande, quelle qu'en soit la source et l'origine. Cela exigera une bande passante beaucoup plus large que ce que nous pouvons offrir aujourd'hui. On parle ici des besoins en matière de divertissement.
Pour les besoins d'affaires ou de services sociaux tels les hôpitaux, les écoles et les universités, il faut envisager une demande de bande passante fortement accrue pour permettre de très hauts débits. Je ne me souviens plus des chiffres précis, mais le groupe d'étude qui a étudié la question de la large bande a déposé son rapport en juin 2001 et a bien identifié les besoins qui devraient être comblés dans tous ces domaines.
Vous comprenez le besoin--pour employer les termes de mon ami Jim Shaw--d'élargir l'autoroute. En considérant l'avenir, on voit que cet élargissement sera probablement ce qui nécessitera le plus de capital.
· (1305)
Mme Christiane Gagnon: Si on levait les restrictions sur la propriété étrangère, le nombre d'acteurs diminuerait; il y aurait, par conséquent, une concentration accrue en termes de propriété des entreprises. On peut donc s'attendre à ce qu'il y ait une pression à la hausse qui s'exerce sur les coûts. La tendance naturelle est d'augmenter les coûts plutôt que de les diminuer.
Or, toute une portion de la population risque de ne pas avoir accès à vos services, faute de moyens financiers. Ne pensez-vous pas qu'il s'agit d'un enjeu important?
M. Louis Audet: Il y a sûrement un enjeu, mais il ne m'inquiète pas. Vous postulez qu'il y aura une réduction du nombre d'acteurs. Je suis désolé de vous contredire, mais aucune preuve ne démontre que ce serait le cas et, le moins qu'on puisse dire, c'est que ce n'est pas le postulat que nous avançons aujourd'hui. Si des gens décident de vendre, ils vendront, mais autrement, la réduction dont vous parlez ne fait pas partie de nos prévisions.
Ensuite, il existe présentement une concurrence féroce entre les compagnies de téléphone et les câblodistributeurs. Ce phénomène, à mon avis, touche directement l'inquiétude que vous soulevez à juste titre, en l'occurence celle de savoir si les coûts vont augmenter.
Il reste que, à mon avis, la concurrence qui prévaut actuellement n'aura pas comme effet à long terme de faire augmenter les coûts. Les entreprises essaient d'être de plus en plus efficaces, elles se font concurrence, et c'est une concurrence plutôt âpre, je l'admets, mais qui bénéficie aux consommateurs. Il n'y a donc pas lieu, selon moi, de s'inquiéter de cela. Il faut rester à l'écoute, soit, mais sans aller jusqu'à s'inquiéter.
Mme Christiane Gagnon: Les coûts, justement, sont concurrentiels dans la mesure où il y a concurrence. Prenez l'exemple du milieu des compagnies aériennes: maintenant que la concurrence a disparu, le prix des billets d'avion est faramineux.
M. Louis Audet: Je suis d'accord avec vous, et soyez rassurée: ici, ce n'est pas la concurrence qui manque.
[Traduction]
Le vice-président (M. Paul Bonwick): Merci, madame Gagnon.
Monsieur Harvard.
M. John Harvard: Merci, monsieur le président.
Je n'ai que quelques questions. Vous avez parlé de libéralisation. J'aime bien ce mot, mais à moins que je n'aie pas bien écouté, vous ne l'avez pas défini. Je comprends bien en quoi consiste la libéralisation des règles de propriété étrangère, vous voulez en fait être sur le même pied que les télécommunications, mais pourriez-vous me donner des chiffres précis, s'il vous plaît?
Deuxièmement, je ne connais peut-être pas bien l'histoire des câblodistributeurs du Canada et des États-Unis, donc j'ai besoin de votre aide. J'ai toujours eu l'impression qu'au moins au début, l'industrie de la câblodistribution canadienne était vraiment en avance sur l'industrie américaine, qu'il était beaucoup plus facile de pénétrer le marché canadien. Or, vous affirmez maintenant avoir besoin d'un assouplissement des règles de propriété étrangère pour attirer plus de capitaux, notamment. Que s'est-il passé en cours de route pour que vous ayez besoin de cette source de capital supplémentaire pour continuer si vous vous estimez—du moins est-ce ce que je pensais—déjà en avance par rapport aux Américains, de toute façon?
M. Jim Shaw: Nous sommes toujours en avance sur le plan de la pénétration du marché. La moyenne américaine tourne autour de 55 p. 100, alors que celle du Canada se rapproche probablement plutôt des 70 p. 100. Comme vous le savez, les câbles ont originalement été conçus pour diffuser sur les marchés canadiens les services trois-plus-un américains, des chaînes que les grands marchés recevaient déjà par antennes aériennes, comme de Buffalo à Toronto. Il y avait aussi des systèmes embryonnaires à Winnipeg qui diffusaient des produits de Fargo. C'est ainsi que tout s'est véritablement développé. Le câble n'était pas développé aux États-Unis, sauf dans certaines régions très éloignées, où l'on tentait de transmettre des signaux des grandes villes. La même chose s'est donc produite aux deux endroits, mais les États-Unis ne nous ont pas vraiment emboîté le pas avant l'invention de ce que l'on appelle la télévision par satellite, qui a permis à des grandes chaînes d'être diffusées au pays. Turner et TBS ont été les premiers à lancer la câblodistribution aux États-Unis. Puis ont proliféré CNN et diverses autres chaînes semblables ou qui ont créé leur propre niche, et la même chose est survenue au Canada.
La pénétration du marché canadien par câble est toutefois en déclin en raison de la concurrence féroce entre la câblodistribution et la télévision par satellite, mais plus de Canadiens que jamais adhèrent à ces services. Or, les gens exigent d'avoir le choix dès maintenant, nous devons donc installer des serveurs de fichiers, de sorte que vous pouvez faire un appel sélectif, demander un spectacle et l'obtenir sur demande. Nous devons nous doter de technologies digitales, afin de pouvoir ajouter 50 chaînes dès que l'organisme de réglementation le demande. Nous devons toujours multiplier les choix et c'est tout ce qu'on nous dit. Les consommateurs en veulent vraiment toujours plus. Par conséquent, nous avons toujours besoin de plus de capitaux pour améliorer nos plate-formes technologiques, parce que nos utilisateurs ne paient que ce dont ils ont besoin. Prenez les bilans financiers de n'importe quel câblodistributeur et vous verrez qu'ils ont besoin de beaucoup d'argent et qu'ils continuent d'investir au Canada et dans les Canadiens. Tout leur argent reste au Canada. Nous sommes en train de vendre nos activités américaines afin de continuer à recapitaliser nos activités canadiennes.
· (1310)
M. John Harvard: Qu'en est-il de la libéralisation?
Mme Janet Yale: Actuellement, les limites des câblodistributeurs et des entreprises de télécommunication sont les mêmes, soit 20 p. 100 des activités et 33 1/3 p. 100 des immobilisations. La question reste à savoir si l'on peut dépasser 50 p. 100. Si l'on favorise la libéralisation, on autorise les entreprises à dépasser 50 p. 100 pour...
M. John Harvard: Dans les deux domaines?
Mme Janet Yale: En télécommunications et en câblodistribution.
M. John Harvard: Mais voulez-vous ajouter ces 20 p. 100 à 50 p. 100?
Mme Janet Yale: Nous recommandons l'élimination complète de règles.
M. John Harvard: Ce serait donc 100 p. 100, de façon directe, indirecte, peu importe. Ai-je bien compris?
Mme Janet Yale: Oui. Notre position, c'est que tant qu'à dépasser 50 p. 100, quelle est la différence entre 51 p. 100 et 100 p. 100? En bout de ligne, la question reste à savoir s'il faut ou non favoriser la libéralisation.
M. John Harvard: Cela pourrait valoir la peine d'entendre les commentaires de M. Morrison à ce sujet. Monsieur Morrison, avez-vous quelque chose à dire?
M. Ian Morrison: Je suis complètement d'accord avec elle, il n'y a aucune différence entre 51 et 100 p. 100. Cinquante-et-un pour cent est une erreur. Pas 100 p. 100.
M. John Harvard: Je pense que cette réponse était plutôt ironique.
Le vice-président (M. Paul Bonwick): Merci.
J'ai moi-même quelques questions à poser. Compte tenu qu'il y a des compétiteurs autour de la table, je me demandais si vous pouviez nous donner une idée, selon vos prévisions, des investissements dont vous pourriez avoir besoin au cours des cinq à dix prochaines années, ou disons d'ici cinq ans. De quel montant s'agirait-il?
M. John Tory: C'est difficile pour nous de le faire et vu que, et à juste titre, toutes sortes de restrictions nous sont imposées à l'égard de ce que nous pourrions partager et avec qui et, bien sûr, nous sommes tous tenus de préparer des plans de deux ans. Pour ce qui est de notre entreprise—et je l'ai déjà dit publiquement—en ce qui a trait à nos besoins en capital pour la seule câblodistribution, nos dépenses en immobilisations atteindront 650 millions cette année. L'an prochain,comme nous l'avons dit, elles se chiffreront à moins de 500 millions, probablement moins, et l'année suivante, elles descendront à quelque 400 millions. Par conséquent, vous pourriez simplement additionner ces deux chiffres. L'entreprise elle-même a des besoins constant de capital si elles veux que ces réseaux restent concurrentiels, augmenter la largeur de bande, etc. Pour notre seule entreprise, on parle de 1,5 milliard de dollars au cours des trois prochaines années. Tant Jim que Louis et toutes les autres entreprises de câblodistribution pourraient vous donner des chiffres très élevés.
M. Jim Shaw: Nous revoyons tout le temps ces finances—nous semblons y consacrer presque tout notre temps ces jours-ci. Au cours des deux dernières années, nous avons consacré 2 milliards de dollars à l'amélioration du réseau. Je crois que cette année nous sommes en passe de dépenser 450 millions de dollars. Nous avions espéré réduire les coûts mais comme les Canadiens exigent davantage de services, ces coûts pourraient aussi augmenter. Cela dépend en quelque sorte des commandes qui sont passées. C'est un peu l'histoire de l'oeuf et de la poule: plus vous avez du succès, plus vos besoins sont grands et plus vous avez besoin d'argent pour l'infrastructure. C'est un des problèmes lorsque vous progressez. C'est un secteur très exigeant en investissements. Si nous parlions à Louis, il tiendrait le même propos.
· (1315)
Le vice-président (M. Paul Bonwick): Par conséquent, plusieurs milliards de dollars au cours des cinq prochaines années seront nécessaires. Je ne cherchais certainement pas à vous faire partager une prévision de bilan.
Pour ce qui est de l'aspect concurrentiel, j'estime qu'il est impératif de faire une distinction entre distribution et contenu. Côté distribution, comment servir au mieux les Canadiens? Dites-le moi si je me trompe, mais je suppose que l'industrie, peu importe le pays, fonde ses prix sur un coût de production, en tenant compte d'un taux de rendement raisonnable et de ce que sera la capacité du marché. Je suppose que cela équivaut à 59,95 ou 49,95 $ selon le cas. Si c'est exact, comment nous comparons-nous à d'autres pays? Deuxièmement, si votre coût de production baisse parce que vous avez accès à des capitaux moins coûteux ou que vous êtes en mesure d'intensifier vos investissements en capital, est-ce que cela serait avantageux pour les Canadiens?
M. Louis Audet: La triste vérité pour notre industrie à l'heure actuelle c'est de ne pas avoir de taux de rendement parce qu'elle n'est pas rentable. La concurrence est trop forte. Nous faisons des pieds et des mains pour atteindre cette rentabilité et ce taux de rendement et générer un flux de trésorerie disponible, ce que les marchés financiers exigent vraiment de nous. J'ai toutes les raisons de croire que nous réussirons. J'aime parler de taux de rendement parce qu'entre 1992 et 1999 nous avions un taux de rendement réel. Par conséquent, nous sommes encore dans une période transitoire.
M. Jim Shaw: Fondamentalement, chez nos voisins du Sud les taux dans l'ensemble seraient de 10 à 20 p. 100 supérieurs aux nôtres. Dans le secteur des télécommunications et de la câblodistribution vous auriez beaucoup de mal à trouver de meilleurs taux dans à peu près n'importe quelle catégorie, qu'il s'agisse de téléphones cellulaires, de télévision par câble, d'accès haute vitesse, d'accès faible vitesse, les services téléphoniques locaux. Je crois que le Canada a accompli un travail remarquable en maintenant ses coûts. Je ne crois pas que la libéralisation ou un changement de politique ferait hausser les prix.
Le vice-président (M. Paul Bonwick): Merci. C'est rare que nous avons l'occasion de vous réunir tous les cinq autour de la même table.
M. Harvard aimerait poser une très courte question.
M. John Harvard: Vous qualifiez de restrictive la règle actuelle du 20 à 33 p. 100 en ce qui concerne la propriété étrangère. Puis-je présumer alors que vous avez déjà atteint le plafond et que vous voulez davantage?
M. Jim Shaw: Voudriez-vous investir dans une entreprise au deuxième rang? Voudriez-vous être un investisseur bloqué qui n'a aucune idée de la réglementation? Il s'agit simplement de questions qui nous sont posées. Nous n'avons pas toujours les réponses. Les investisseurs accepteront certaines conditions mais pas toutes. Ils disent que s'ils ont le choix d'investir entre ceci et une entreprise ne comportant pas de restrictions, pourquoi investir dans celle à qui des restrictions sont imposées? Il en va de même lorsqu'ils vendent. Disons qu'ils ne veulent pas acheter la totalité. Disons qu'ils veulent acheter 10 p. 100. Est-ce que les 10 p. 100 que j'investis maintenant sont bloqués de sorte que je ne pourrai jamais les récupérer? On attire les capitaux en facilitant le plus possible les choses en matière de développement, d'entrée et de sortie. C'est ce que nous essayons de faire. Ils aimeraient disposer d'un système où les règles sont stables et ne sont pas constamment modifiées de sorte qu'ils seraient engagés en permanence ou exclus.
· (1320)
M. John Harvard: Par conséquent, même si vous n'avez pas atteint la limite, cela ne veut pas nécessairement dire quoique ce soit.
M. Jim Shaw: Vous avez raison.
M. John Harvard: Avez-vous ou non atteint la limite?
M. Jim Shaw: Non. Avons-nous beaucoup d'investisseurs aux des États-Unis? Oui. Avons-nous beaucoup d'investisseurs à l'étranger? Nous étions en fait à Londres pour de gros investissements outre-mer.
M. John Tory: Vous devez surveiller de près la situation pour vous assurer de ne pas dépasser la limite. C'est le règlement qui l'exige. Il y a des gens de nos jours qui investiraient dans nos entreprises mais estiment que, s'ils détenaient même une participation minoritaire, encore moins une participation majoritaire, ils seraient laissés en plan vu que des limites sont imposées quant aux personnes à qui ils pourraient vendre cet intérêt. Si nous atteignions la limite à un certain moment et qu'un investisseur américain détenait 10 p. 100, à qui pourrait-il vendre? Il ne pourrait alors le faire qu'à un Canadien. Cela les empêche d'investir dans nos entreprises.
M. John Harvard: Merci.
Le vice-président (M. Paul Bonwick): Je remercie de tout coeur tous nos invités du groupe d'aujourd'hui. Ce fut une séance très instructive et je sais que mes collègues en ont beaucoup retiré. Je le répète, nous vous remercions d'avoir pris le temps de venir nous rencontrer ce matin en dépit de vos horaires chargés.
La séance est levée.