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37e LÉGISLATURE, 3e SESSION
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 051
TABLE DES MATIÈRES
Le lundi 10 mai 2004
1100 |
Les travaux de la Chambre |
Le président suppléant (M. Bélair) |
1105 |
Initiatives parlementaires |
La Loi sur les motomarines |
M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.) |
1110 |
1115 |
1120 |
M. Marcel Gagnon (Champlain, BQ) |
M. Clifford Lincoln |
1125 |
M. James Moore (Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam, PCC) |
1130 |
1135 |
M. Jean-Yves Roy (Matapédia—Matane, BQ) |
1140 |
1145 |
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD) |
1150 |
L'hon. Jim Karygiannis (secrétaire parlementaire du ministre des Transports, Lib.) |
1155 |
1200 |
M. Marcel Gagnon (Champlain, BQ) |
1205 |
Le président suppléant (M. Bélair) |
Initiatives ministérielles |
Loi sur la gestion financière et statistique des premières nations |
M. Rick Laliberte (Rivière Churchill, Lib.) |
1210 |
1215 |
1220 |
1225 |
Le président suppléant (M. Bélair) |
1230 |
L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.) |
M. Rick Laliberte |
1235 |
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD) |
M. Rick Laliberte |
1240 |
M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.) |
1245 |
1250 |
1255 |
1300 |
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD) |
M. Clifford Lincoln |
1305 |
M. Rick Laliberte (Rivière Churchill, Lib.) |
M. Clifford Lincoln |
1310 |
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD) |
1315 |
1320 |
L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.) |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
1325 |
M. Rick Laliberte |
Le vice-président |
1330 |
L'hon. Don Boudria (Glengarry—Prescott—Russell, Lib.) |
1335 |
1340 |
1345 |
1350 |
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD) |
L'hon. Don Boudria |
1355 |
Le vice-président |
Déclarations de députés |
La coopérative de Peterborough |
M. Peter Adams (Peterborough, Lib.) |
Les localités rurales |
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PCC) |
1400 |
L'Irak |
L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.) |
La Semaine nationale de la police |
M. Jeannot Castonguay (Madawaska—Restigouche, Lib.) |
Le hockey |
M. Alan Tonks (York-Sud—Weston, Lib.) |
Les pêches |
M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PCC) |
Claude Beausoleil |
L'hon. Don Boudria (Glengarry—Prescott—Russell, Lib.) |
1405 |
Les prix Jackie Robinson |
M. Bernard Bigras (Rosemont—Petite-Patrie, BQ) |
La Prestation nationale pour enfants |
M. Gilbert Barrette (Témiscamingue, Lib.) |
Le Parti libéral du Canada |
M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, PCC) |
Eric Kierans |
L'hon. Serge Marcil (Beauharnois—Salaberry, Lib.) |
1410 |
L'ouragan Juan |
M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD) |
La sclérose en plaques |
Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.) |
L'environnement |
M. Bob Mills (Red Deer, PCC) |
Les Olympiques de Gatineau |
M. Marcel Proulx (Hull—Aylmer, Lib.) |
La citoyenneté et l'immigration |
M. Scott Reid (Lanark—Carleton, PCC) |
1415 |
Le prix de l'essence |
M. Sébastien Gagnon (Lac-Saint-Jean—Saguenay, BQ) |
QUESTIONS ORALES |
Le programme des commandites |
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PCC) |
L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.) |
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PCC) |
L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.) |
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PCC) |
L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.) |
M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, PCC) |
1420 |
L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.) |
M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, PCC) |
L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.) |
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ) |
L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.) |
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ) |
L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.) |
M. Michel Gauthier (Roberval, BQ) |
1425 |
L'hon. Jacques Saada (leader du gouvernement à la Chambre des communes et ministre responsable de la réforme démocratique, Lib.) |
M. Michel Gauthier (Roberval, BQ) |
Le vice-président |
L'hon. Jacques Saada (leader du gouvernement à la Chambre des communes et ministre responsable de la réforme démocratique, Lib.) |
Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD) |
L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.) |
Le Parti libéral du Canada |
Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD) |
L'hon. Jacques Saada (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.) |
Le programme des commandites |
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, PCC) |
L'hon. Stephen Owen (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
1430 |
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, PCC) |
L'hon. Stephen Owen (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
Les prix de l'essence |
M. James Moore (Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam, PCC) |
L'hon. Ralph Goodale (ministre des Finances, Lib.) |
M. James Moore (Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam, PCC) |
L'hon. Ralph Goodale (ministre des Finances, Lib.) |
La santé |
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ) |
L'hon. Ralph Goodale (ministre des Finances, Lib.) |
1435 |
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ) |
L'hon. Pierre Pettigrew (ministre de la Santé, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre responsable des langues officielles, Lib.) |
M. Richard Marceau (Charlesbourg—Jacques-Cartier, BQ) |
L'hon. Pierre Pettigrew (ministre de la Santé, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre responsable des langues officielles, Lib.) |
M. Richard Marceau (Charlesbourg—Jacques-Cartier, BQ) |
L'hon. Pierre Pettigrew (ministre de la Santé, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre responsable des langues officielles, Lib.) |
Le vice-président |
Le registre des armes à feu |
M. Monte Solberg (Medicine Hat, PCC) |
L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.) |
1440 |
M. Monte Solberg (Medicine Hat, PCC) |
L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.) |
L'agriculture |
M. Rick Casson (Lethbridge, PCC) |
L'hon. Bob Speller (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.) |
M. Rick Casson (Lethbridge, PCC) |
L'hon. Bob Speller (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.) |
Le vice-président |
Les affaires étrangères |
M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.) |
L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.) |
1445 |
Le discours du Trône |
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD) |
L'hon. Pierre Pettigrew (ministre de la Santé, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre responsable des langues officielles, Lib.) |
La défense nationale |
M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD) |
L'hon. David Pratt (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
Le vice-président |
Les pêches |
M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PCC) |
L'hon. Geoff Regan (ministre des Pêches et des Océans, Lib.) |
M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PCC) |
L'hon. Geoff Regan (ministre des Pêches et des Océans, Lib.) |
Les affaires des anciens combattants |
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, PCC) |
1450 |
L'hon. John McCallum (ministre des Anciens Combattants, Lib.) |
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, PCC) |
L'hon. John McCallum (ministre des Anciens Combattants, Lib.) |
Le prix de l'essence |
M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, BQ) |
L'hon. R. John Efford (ministre des Ressources naturelles, Lib.) |
M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, BQ) |
Le vice-président |
L'hon. Lucienne Robillard (ministre de l'Industrie et ministre responsable de l'Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec, Lib.) |
L'assurance-emploi |
M. Brian Pallister (Portage—Lisgar, PCC) |
1455 |
L'hon. Joseph Volpe (ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences, Lib.) |
M. Brian Pallister (Portage—Lisgar, PCC) |
L'hon. Joseph Volpe (ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences, Lib.) |
Le vice-président |
Les travailleurs âgés |
Mme Diane St-Jacques (Shefford, Lib.) |
L'hon. Joseph Volpe (ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences, Lib.) |
La fonction publique |
M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PCC) |
L'hon. Reg Alcock (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, Lib.) |
M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PCC) |
1500 |
L'hon. Reg Alcock (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, Lib.) |
L'agriculture |
M. Roger Gaudet (Berthier—Montcalm, BQ) |
L'hon. Bob Speller (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.) |
Le développement des ressources humaines |
M. Alan Tonks (York-Sud—Weston, Lib.) |
L'hon. Joseph Volpe (ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences, Lib.) |
AFFAIRES COURANTES |
Nominations par décret |
L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.) |
Réponse du gouvernement à des pétitions |
L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.) |
Les comités de la Chambre |
Justice, droits de la personne, sécurité publique et protection civile |
M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.) |
1505 |
Pétitions |
La santé |
L'hon. Joe Jordan (Leeds—Grenville, Lib.) |
Les réfugiés |
Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.) |
Le mariage |
M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, PCC) |
Les maladies du rein |
M. Peter Adams (Peterborough, Lib.) |
1510 |
L'immigration |
Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD) |
Le mariage |
M. Rob Anders (Calgary-Ouest, PCC) |
M. Dale Johnston (Wetaskiwin, PCC) |
Questions transformées en ordres de dépôt de documents |
L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.) |
L'hon. Larry Bagnell |
Initiatives ministérielles |
Loi sur la gestion financière et statistique des premières nations |
L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.) |
1515 |
Le vice-président |
M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.) |
1520 |
1525 |
L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.) |
1530 |
M. Clifford Lincoln |
1535 |
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD) |
1540 |
1545 |
1550 |
1555 |
M. Rick Laliberte (Rivière Churchill, Lib.) |
1600 |
M. Pat Martin |
Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD) |
M. Pat Martin |
1605 |
M. Rick Laliberte (Rivière Churchill, Lib.) |
1610 |
1615 |
1620 |
1625 |
Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD) |
Le président suppléant (M. Bélair) |
M. Rick Laliberte |
Mme Bev Desjarlais |
1630 |
Le président suppléant (M. Bélair) |
M. Rick Laliberte |
M. Marcel Gagnon (Champlain, BQ) |
1635 |
M. Rick Laliberte |
Le président suppléant (M. Bélair) |
Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD) |
1640 |
1645 |
1650 |
M. Rick Laliberte (Rivière Churchill, Lib.) |
Mme Bev Desjarlais |
1655 |
Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.) |
1700 |
1705 |
M. Marcel Gagnon (Champlain, BQ) |
1710 |
Mme Paddy Torsney |
1715 |
Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD) |
Mme Paddy Torsney |
1720 |
Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.) |
1725 |
1730 |
M. Jean-Yves Roy (Matapédia—Matane, BQ) |
1735 |
Mme Karen Redman |
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD) |
Mme Karen Redman |
M. Marcel Gagnon (Champlain, BQ) |
1740 |
Mme Karen Redman |
M. Marcel Gagnon (Champlain, BQ) |
1745 |
1750 |
M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ) |
1755 |
M. Marcel Gagnon |
1800 |
L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.) |
Le président suppléant (M. Bélair) |
M. Marcel Gagnon |
M. Jean-Yves Roy (Matapédia—Matane, BQ) |
M. Marcel Gagnon |
1805 |
M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ) |
1810 |
1815 |
1820 |
Le président suppléant (M. Bélair) |
M. Réal Ménard |
1825 |
M. Jean-Yves Roy (Matapédia—Matane, BQ) |
M. Réal Ménard |
La motion d'ajournement |
1830 |
Les pêches |
L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.) |
L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.) |
1835 |
L'hon. Charles Caccia |
L'hon. Larry Bagnell |
Le président suppléant (M. Bélair) |
CANADA
Débats de la Chambre des communes |
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COMPTE RENDU OFFICIEL (HANSARD)
Le lundi 10 mai 2004
Présidence de l'honorable Peter Milliken
La séance est ouverte à 11 heures.
Prière
* * *
[Français]
Les travaux de la Chambre
Le président suppléant (M. Bélair): Conformément au paragraphe 81(14) du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre la motion qu'elle abordera demain lors de la prise en considération des travaux des subsides:
Que la Chambre condamne la prestation privée de services de santé à but lucratif que le gouvernement encourage depuis 1993. |
[Traduction]
Cette motion, inscrite au nom de la députée de Churchill, ne peut faire l'objet d'un vote. On peut se procurer des exemplaires de cette motion au Bureau.
[Français]
Comme il est 11 h 7, la Chambre abordera maintenant l'étude des affaires émanant des députés, selon l'ordre indiqué au Feuilleton d'aujourd'hui.
Initiatives parlementaires
[Initiatives parlementaires]
* * *
[Traduction]
La Loi sur les motomarines
M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.) propose: Que le projet de loi S-8, Loi concernant les motomarines dans les eaux navigables, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
--Monsieur le Président, le projet de loi S-8, la Loi sur les motomarines, est essentiellement le même projet de loi que le S-10 présenté lors de la session précédente.
C'est pour moi un privilège de débattre de ce projet de loi à la Chambre des communes et d'appuyer les nombreuses années de travail que le sénateur Spivak a consacrées à la résolution de ce problème écologique et social très réel. En l'absence de toute modification réglementaire, Mme le sénateur Spivak a rédigé ce projet de loi et a été assez persévérante pour le présenter à deux reprises au Sénat.
Cette mesure législative améliorerait la sécurité des Canadiens, protégerait le fragile environnement de nos lacs et de nos rivières et surtout donnerait le choix aux communautés locales et leur permettrait de contrôler localement ce problème important qui frappe leurs lacs et leurs rivières. Le projet de loi aurait aussi pour effet d'inverser, dans ce cas précis, le mouvement d'érosion de l'autorité fédérale qu'on peut constater dans certains domaines.
Le problème dont traite ce projet de loi a émergé il y a environ dix ans, avec l'apparition des motomarines, qu'on appelle aussi JetSki, Sea-Doo ou scooter des mers, dans des secteurs où elles présentent une trop grande menace pour la sécurité, l'environnement et la paix de ceux qui veulent profiter des plaisirs des eaux navigables. Pour ceux qui ne connaissent pas les motomarines, je précise que ce sont de très petites embarcations de plaisance hydropropulsées que les gens conduisent comme des motoneiges sur l'eau.
Bref, le projet de loi va permettre aux municipalités, aux associations de propriétaires de chalet et à d'autres institutions d'imposer des restrictions en limitant l'utilisation des motomarines sur des parties de voies navigables côtières, sur des rivières et sur des lacs désignés. Il va permettre également aux autorités locales d'interdire complètement leur utilisation lorsqu'elles présentent d'énormes problèmes sur le plan de la sécurité, de la protection de l'environnement et de la jouissance paisible de n'importe quelle voie navigable.
Ce projet de loi repose sur deux principes. Tout d'abord le principe du choix et ensuite, le principe du contrôle local. Le projet de loi va permettre à ceux qui possèdent une motomarine ou en louent une de continuer à les utiliser dans les endroits où elles peuvent être utilisées de façon sécuritaire et sans causer des torts indus à l'environnement. Il va donner aux autorités locales, qui connaissent le mieux la région, un certain pouvoir de contrôle pour décider où des restrictions s'imposent.
Le projet de loi a reçu un appui important. Quelque 78 organisations le soutiennent, soit des associations municipales, des associations de propriétaires de chalet, des canoéistes, des associations de défense de la faune et d'autres groupes qui réclament une solution au problème. Faute de temps, je m'abstiendrai de vous lire la liste des nombreuses organisations qui appuient ce projet de loi. Cependant, je tiens à dire que des pétitions signées par des milliers de gens et exhortant le Parlement à adopter cette mesure législative ont été présentés au Sénat. Les médias accordent également un grand intérêt à cette question qui a fait l'objet de plus de 100 articles et reportages dans les magazines ou les journaux, à la radio et à la télévision.
Ce n'est pas tout le monde qui est en faveur de cette approche. Comme on pouvait s'y attendre, les fabricants de motomarines et certaines associations de navigateurs de plaisance n'y souscrivent pas. Les intéressés croient que ce sont les conducteurs non formés, et pas leurs machines, qui causent les problèmes et ils croient que la solution réside dans l'éducation.
C'était en fait l'approche adoptée par un comité du Cabinet en 1994. La Garde côtière canadienne avait rédigé des règlements qui auraient rendu inutile ce projet de loi, le projet de loi S-8. Les collectivités voulaient avoir le droit de restreindre l'utilisation des motomarines. La Garde côtière a répondu en proposant de nouveaux règlements. Avec l'accord des provinces, un lac au Québec et les eaux du parc national Pacific Rim ont été choisis pour donner un exemple que d'autres collectivités pourraient suivre.
Cependant, le comité du Cabinet a rejeté cette solution en supposant, à tort, que la formation résoudrait tous les problèmes. Le Cabinet a dit à la Garde côtière de refaire ses devoirs et d'élaborer de nouveaux règlements en matière de sécurité pour tous les types d'embarcations de plaisance en ce qui concerne l'équipement, la sécurité nautique, la formation, l'âge des embarcations et les conducteurs de motomarines. À l'heure actuelle, il faut avoir 16 ans au moins pour conduire ces machines puissantes.
Cette approche a été défendue par les fabricants de motomarines qui ont eu le mérite--et il faut le reconnaître--de contribuer financièrement aux programmes de formation en navigation de plaisance. C'est également une approche qui tenait pour acquis que les motomarines n'étaient pas les seules embarcations concernées et qu'il était discriminatoire de permettre à des collectivités locales de restreindre leur utilisation tout en permettant la présence de bateaux à moteur plus gros sur les lacs et les rivières.
On peut répondre trois choses à ces prétentions.
Premièrement, la stratégie de la pédagogie n'a pas donné les résultats escomptés; les problèmes n'ont pas disparu. Entre autres, on note une augmentation étonnante des décès liés à l'utilisation des motomarines. L'été dernier, la Société royale de sauvetage du Canada a documenté une hausse de 53 p. 100, depuis 1996, dans les décès liés à ces engins. Parallèlement, le nombre de décès liés aux petites embarcations a chuté de 29 p. 100. Le taux de mortalité attribuable à l'utilisation des motomarines représente actuellement près de deux fois celui des autres embarcations motorisées.
Deuxièmement, les motomarines sont des embarcations particulières, de par leur conception et de par l'utilisation qui en est faite, parce qu'on les considère comme des embarcations à sensations fortes.
Troisièmement, il n'est pas plus injuste de réglementer l'activité des motomarines que de réglementer celle du ski nautique ou du surf, lesquels sont aujourd'hui autorisés en vertu du Règlement sur les restrictions à la conduite des bateaux.
Le projet de loi modifierait la politique. Le gouvernement pourrait simplement apporter les modifications nécessaires au Règlement sur les restrictions à la conduite des bateaux pris en vertu de la Loi sur la marine marchande du Canada. Le projet de loi S-8 reprend la proposition présentée par les dirigeants de la Garde côtière canadienne en 1994, parue dans la Gazette du Canada à titre de projet de règlement. Les documents internes à l'appui de cette proposition font état d'un régime de réglementation équilibré. Or, le projet de loi tente précisément de rétablir cet équilibre.
J'ai souvent évoqué les problèmes engendrés par les motomarines. Je voudrais en parler brièvement. Le problème le plus grave est celui des décès, blessures et opérations de sauvetage qui se produisent lorsque ces puissantes machines entrent en collision sur l'eau avec d'autres embarcations, heurtent des rochers ou s'échouent quelque part.
Une étude poussée concernant l'utilisation des motomarines aux États-Unis a révélé qu'il y a plusieurs années, ces embarcations représentaient 9 p. 100 de tous les bateaux immatriculés, mais qu'ils étaient impliqués dans 26 p. 100 de tous les accidents de navigation et qu'ils étaient à l'origine de 46 p. 100 de toutes les blessures subies pendant des activités de navigation de plaisance. Santé Canada, dans le cadre du SCHIRPT, en l'occurrence le Système canadien hospitalier d'information et de recherche en prévention des traumatismes, a analysé des informations obtenues dans les salles d'urgence et a conclu que l'utilisation de la motomarine entraîne un nombre disproportionné de blessures. Toute proportions gardées, les accidents de motomarines ne devraient représenter que de 3 à 5 p. 100 des accidents de navigation de plaisance rapportés dans les salles d'urgence. Or, ils représentent plus de 20 p. 100 d'entre eux.
La formation sur la sécurité nautique contribue à réduire les accidents, mais il est important de se rappeler que les motomarines sont d'abord et avant tout «des embarcations à sensations fortes». Les gens les conduisent pour le plaisir et pour l'euphorie que procure la vitesse. Il y aura toujours des amateurs de sensations fortes ayant plus de courage que de compétence ou de jugement.
Les motomarines sont incroyablement polluantes. Bien que bon nombre de nouveaux modèles sont maintenant dotés d'un moteur à quatre temps, la majorité des modèles plus anciens ont un moteur à deux temps. Aux États-Unis, l'agence de protection de l'environnement estime que les motomarines libèrent jusqu'à 30 p. 100 de leur combustible non brûlé directement dans l'eau. Une motomarine, qui peut consommer jusqu'à dix gallons américains d'essence à l'heure, libère entre 50 et 60 gallons d'essence par année, à raison de moins d'une heure d'utilisation par semaine.
Les gaz d'échappement sont aussi une source de pollution. En sept heures de conduite, les émissions provenant d'une motomarine équipée d'un moteur de 100 chevaux-vapeur équivalent aux émissions d'une voiture qui parcourrait 160 000 kilomètres. En une heure de conduite, une motomarine produit autant de smog polluant qu'une voiture en une année.
Les gouvernements du Canada et des États-Unis ainsi que les fabricants de moteurs pour les motomarines ont reconnu ces faits. Tous ont convenu de réduire les émissions graduellement, mais c'est une mince consolation pour les gens qui vivent en bordure de lacs peu profonds ou dans des secteurs où la pollution s'accroît. Ces gens doivent supporter les motomarines de leurs voisins.
La menace pour les oiseaux qui font leur nid sur les rives ou sur le lac, pour les mammifères marins et pour les huards est également très bien documentée. En 2001, James Martin a réalisé une étude sur le huard et la grèbe. Je n'aurai pas le temps de vous en citer des extraits, mais le rapport qu'on peut consulter dans Internet dresse un portrait clair de la problématique.
En outre, le problème du bruit est également reconnu. À une distance d'à peine 100 pieds d'une motomarine, la faune et les humains sont exposés à environ 75 décibels qui, à cause des changements rapides d'accélération et de direction, peuvent s'avérer plus perturbateurs qu'un son constant de 90 décibels.
L'American Hospital Association recommande le port d'un dispositif de protection anti-bruit lorsque le niveau sonore dépasse les 85 décibels. Lorsqu'elles croisent en groupes, comme c'est souvent le cas, le niveau sonore des motomarines est amplifié d'autant. Là encore, les fabricants de motomarines sont conscients du problème et ils ont commencé à mettre en vente des modèles plus silencieux. Toutefois, les riverains devront encore supporter le bruit des modèles plus anciens.
Le statu quo est simplement inacceptable. Les provinces ne sont plus disposées à laisser les motomarines et autres embarcations à moteur porter préjudice à l'eau potable, à l'environnement et à la sécurité d'autrui sur leurs lacs et leurs rivières ou à proximité de ces derniers.
André Bourgon, Diane Rivard et Nicholas Bourgon, de Montréal, au Québec, ont écrit ce qui suit:
[Français]
Il est maintenant devenu nécessaire que le Canada, appuyé par les provinces, commence à agir dans le domaine de l'eau. Cette ressource «épuisable» doit être protégée. Outre la qualité de l'eau qui est ici en cause, il faut également protéger notre quiétude sur les rives de nos rivières et de nos lacs. |
[Traduction]
Il y a de nombreuses années, en Colombie-Britannique, une municipalité a interdit aux motomarines l'accès à un lac de l'île de Vancouver. Au début de l'année, la municipalité de villégiature de Whistler, site des Jeux olympique de 2010, a invoqué un règlement sur le bruit pour interdire aux motomarines l'accès à quatre lacs. Au Nouveau-Brunswick, dans l'intérêt de la protection de leurs bassins hydrographiques, les autorités provinciales ont interdit aux motomarines l'accès à 30 lacs. L'été dernier, par souci de sécurité, le gouvernement du Québec a autorisé les municipalités à fixer des limites de vitesse à proximité des berges et on s'attend généralement à ce qu'il interdise les embarcations à moteur sur les petits lacs.
Aucune de ces mesures provinciales ou municipales n'est conforme à la répartition constitutionnelle des pouvoirs en vertu de laquelle le gouvernement fédéral exerce des compétences exclusives en matière de navigation; lui seul a le droit d'établir des limites pour déterminer où et quand les embarcations peuvent ou ne peuvent pas naviguer. En l'absence de mesures fédérales, cependant, les mesures que je viens de mentionner sont justifiées moralement, sinon juridiquement.
Il aurait été préférable de suivre la procédure proposée dans le projet de loi S-8, en l'occurrence, respecter l'autorité constitutionnelle du gouvernement fédéral tout en reconnaissant la nécessité de faire des choix et d'exercer des contrôles à l'échelle locale. Ainsi, le projet de loi S-8 exigerait qu'une résolution provenant d'une autorité locale, accompagnée de la preuve que des consultations ont été dûment tenues, soit remise au ministre fédéral pour fins de publication dans la Gazette du Canada. De plus, il exigerait un délai pour permettre au public de présenter des observations et donnerait au ministre le droit de refuser la demande de restriction dans le cas où elle entraverait indûment la navigation.
Les autorités locales qui préconisent cette approche le font parce qu'elles savent que la formation en sécurité nautique et les limitations d'âge n'ont pas suffi. Elles veulent avoir le choix de limiter les motomarines là où les résidants s'accordent pour dire qu'elles constituent clairement un risque pour la sécurité, l'environnement ou la jouissance paisible de leurs lacs.
On ne prévoit pas que le projet de loi S-8 sera nécessaire partout. On souhaite même qu'il ne soit pas nécessaire sur la plupart de nos lacs et rivières. Les codes volontaires, les ententes à l'amiable et le gros bon sens des utilisateurs de motomarines devraient permettre de résoudre bon nombre de problèmes. Cependant, lorsqu'une certaine activité de navigation de plaisance constitue un danger pour le public ou nuit à l'environnement, les autorités locales doivent être en mesure de demander une limitation de la navigation de plaisance. Le projet de loi S-8 leur donnerait cette possibilité.
J'ose espérer que les députés saisiront l'importance de la mesure et la transféreront au Comité permanent de l'environnement et du développement durable pour examen plus approfondi. J'espère que les solutions pratiques qui y sont proposées deviendront loi. Nous ne perdons rien à soumettre le projet de loi au Comité permanent de l'environnement et du développement durable pour qu'il en débatte. Si nous faisons la sourde oreille, comme si les motomarines ne posaient pas problème, nous passerons tout à fait à côté de la question.
Le projet de loi S-8 offre une possibilité importante. Il nous permet de débattre de cette question d'importance, de protéger l'environnement, de protéger le droits des citoyens de jouir paisiblement de leurs eaux navigables et de protéger la faune et la flore. J'invite mes collègues à appuyer fortement la mesure.
[Français]
M. Marcel Gagnon (Champlain, BQ): Monsieur le Président, je voudrais remercier le député de Lac-Saint-Louis d'avoir proposé ce sujet extrêmement important, surtout en ce début d'été.
Hier, j'étais justement au bord de la baie de Shawinigan, et j'ai réalisé que les motomarines pouvaient parfois déranger les résidants près des cours d'eau. Le seul hic, c'est que nous n'avons pas besoin de loi pour cela, puisque, comme le député de Lac-Saint-Louis vient de le mentionner, les municipalités ont déjà le pouvoir de réglementer.
Voici la question que je lui pose. Que vient faire un projet de loi dans un domaine de juridiction municipale, donc de juridiction du Québec et des provinces en général? C'est un beau sujet de discussion, bien sûr, pour sensibiliser les législateurs. Toutefois, cette loi n'existe-t-elle pas déjà au Québec?
Le député a mentionné qu'en Colombie-Britannique, par exemple, et je pourrais mentionner quelques municipalités dans mon comté, en Mauricie, on a déjà réglementé pour un lac situé en plein milieu d'une municipalité.
Je demande au député de Lac-Saint-Louis si cette loi apporte quelque chose de neuf ou si ce n'est pas tout simplement une intrusion dans les champs de compétence des provinces.
M. Clifford Lincoln: Monsieur le Président, je remercie mon collègue de sa question. En fait, comme je l'expliquais, les eaux navigables, au Canada, sont de juridiction fédérale. Cela est clair.
On parle ici d'eaux navigables. C'est vrai que beaucoup de municipalités à travers le pays, incluant au Québec et en Colombie-Britannique, ont déjà adopté des lois municipales pour restreindre l'usage de certains types de bateaux, comme les motomarines et autres. En même temps, beaucoup de municipalités et de provinces ne veulent pas s'aventurer dans ce domaine. Elles pensent que le gouvernement fédéral est responsable des eaux navigables et que, selon la Constitution, c'est à lui de faire des règlements en ce sens.
En fait, des règlements avaient été discutés et proposés par la Garde côtière, il y a plusieurs années. Toutefois, cela a été mis de côté par le gouvernement. Il faut donc que le gouvernement prenne ses responsabilités. Selon ses propres obligations et sa propre juridiction sur les eaux navigables, il doit faire des règlements qui s'appliqueraient partout au Canada, donnant ainsi complète autorité aux provinces et aux municipalités de faire des lois. À ce moment-là, ces lois tiendraient le coup devant la Cour suprême, si jamais elles étaient remises en cause.
Il faut donc à tout prix que le gouvernement fédéral prenne ses responsabilités et ne se réfugie pas derrière les municipalités pour qu'elles fassent son travail.
[Traduction]
M. James Moore (Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam, PCC): Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui pour parler du projet de loi S-8, Loi concernant les motomarines dans les eaux navigables. En gros, le projet de loi donnerait aux autorités locales la capacité de restreindre l'utilisation des Sea-Doo, des Jet Ski et autres motomarines tout comme elles le font pour le ski nautique ou les hydravions, qu'elles peuvent empêcher d'amerrir.
Le projet de loi S-8 permettrait aux autorités locales de demander au ministre des Pêches et des Océans de prendre des règlements restreignant l'utilisation des motomarines en vertu de la Loi sur la marine marchande du Canada. Étant donné que cette loi ne s'applique qu'aux eaux fédérales, le projet de loi S-8 n'empiète pas sur les pouvoirs des provinces.
Parlant de la Constitution, les experts pour la majorité, décrivent les pouvoirs résiduels d'Ottawa en la matière comme se limitant au maintien de la paix, de l'ordre et du bon gouvernement. Je suis heureux que le maintien de la paix et de l'ordre soit au coeur du projet de loi S-8.
Le bruit produit par les motomarines est tel que, en février, la municipalité de Whistler, site des Jeux olympiques d'hiver de 2010, a inclus les motomarines dans sa réglementation antibruit.
Une autre source importante de préoccupation est la sécurité des autres usagers des voies navigables. Selon des renseignements internes obtenus par le sénateur Spivak auprès de la Direction générale du sauvetage et de l'intervention environnementale de la Garde côtière, le taux de collisions est plus élevé pour les motomarines que pour toute autre catégorie de petite embarcation. De même, un nombre disproportionné d'appels au numéro sans frais du Bureau de la sécurité nautique de la Garde côtière concerne les motomarines.
Cependant, le maintien de la paix et de l'ordre n'implique pas nécessairement que l'on interdise les motomarines. Il implique le respect au sein de la collectivité, et la tenue de consultations, ainsi qu'une utilisation responsable et courtoise des voies navigables publiques. Par conséquent, même si, pour certains députés, l'interdiction totale des motomarines soit la seule manière de maintenir la paix et l'ordre, personnellement, j'aurais tendance à voir plus loin.
Pour moi, le maintien de la paix et de l'ordre implique que la collectivité décide ensemble de la meilleure manière de partager l'utilisation de nos lacs et de nos voies navigables. Dans une confédération comme le Canada, le véritable maintien de la paix et de l'ordre implique l'acceptation que différentes collectivités choisiront différentes solutions.
Le concept de la collectivité est au centre du projet de loi S-8 en cela que l'autorité locale peut être soit une municipalité soit une association de propriétaires de chalet. Essentiellement, la collectivité est le groupe qui contrôle l'utilisation des voies navigables pour le plus grand bien de tous. C'est important car il devrait être évident que, dans toute association de propriétaires, il y a des gens qui aiment faire de la motomarine et d'autres qui n'aiment pas ça. Si l'on veut que la paix et l'ordre règnent en été dans les régions où il y a des chalets, il est essentiel de rendre le plus grand nombre de personnes aussi heureuses que possible.
Il est important de comprendre que le projet de loi S-8 n'est rien de plus qu'un moyen de permettre aux autorités de gérer l'utilisation croissante des motomarines. Dans la grande majorité des cas, des codes volontaires, des règlements négociés et le bon sens de la part des utilisateurs de motomarines rendront l'application du projet de loi S-8 superflue. Le projet de loi permettrait aux autorités locales de demander l'application de restrictions à l'utilisation de motomarines comme elles le font pour d'autres types d'embarcations.
Dans ce contexte, le projet de loi S-8 ferait de l'autorité locale l'instigatrice des modifications au règlement sur la navigation. En fait, comme pour renforcer la participation des autorités locales à la solution qui lance le processus, le projet de loi S-8 contient un article relatif à l'objet de la loi, qui stipule:
3. La présente loi a pour objet de fournir aux autorités locales un mécanisme par lequel elles peuvent proposer au ministre d'apporter des restrictions à l'utilisation des motomarines sur tout ou partie d'une voie navigable relevant de la compétence du Parlement, afin d'assurer l'usage sécuritaire et la jouissance paisible de celle-ci ainsi que la protection de l'environnement. |
Même l'article 4 exigerait de l'autorité locale qu'elle procède à une «consultation générale auprès de la collectivité, y compris les résidents locaux et les organismes chargés de l'application de la loi» avant de demander un nouveau règlement. L'autorité locale doit ensuite adopter une résolution et la transmettre au ministre des Pêches et des Océans.
Après avoir reçu la résolution, le ministre disposerait de 60 jours pour publier le règlement dans la Gazette du Canada. Il entamerait ensuite une période de consultations de 90 jours après laquelle, à moins que le règlement n'entrave la navigation ou que les consultations ne donnent des résultats défavorables, le règlement entrerait en vigueur.
Il est intéressant de noter que le projet de loi S-8 avait d'abord été présenté en tant que projet de loi S-26 le 9 mai 2001, il y a exactement trois ans aujourd'hui. Grâce au travail effectué par la Garde côtière canadienne, le projet de loi propose un règlement équilibré semblable, qui serait publié dans la Gazette du Canada de juin 1994.
Lorsqu'elle a présenté le projet de loi pour la première fois, Mme le sénateur Spivak a déclaré ce qui suit à ses collègues:
Souscrivent à ce projet de loi 141 municipalités de la Colombie-Britannique, la moitié des municipalités rurales de l'Alberta, la Union of Nova Scotia Municipalities, la Newfoundland and Labrador Federation of Municipalities, la Manitoba Association of Cottage Owners, qui se compose de 60 associations représentant plus de 9 000 propriétaires de chalets dans ma province, la FAPEL, une fédération d'associations de propriétaires de chalets du Québec, l'Alberta Summer Village Association... |
Il a été présenté au Sénat comme projet de loi S-26, projet de loi S-10 et, plus récemment, projet de loi S-8, celui dont nous sommes saisis aujourd'hui et qui a été étudié pendant 15 jours par un comité sénatorial, qui en a fait rapport sans proposition d'amendement.
Qu'une mesure aussi fondamentale recueillant un tel appui national tarde tant à être adoptée m'étonne et me dit que les libéraux fédéraux n'excellent pas autant que certains le pensent à la Chambre à copier les idées des autres.
Le vrai génie peut-être du projet de loi S-8 est qu'il accorde aux autorités locales un réel pouvoir sur les règlements fédéraux qui s'appliquent «aux voies navigables désignées dont les rives se situent dans un secteur relevant de la compétence d'une autorité locale». Par exemple, aux termes du projet de loi S-8, le village de Belcarra, dans ma circonscription, pourrait demander, après consultation, que la baie de Bedwell soit ajoutée à l'annexe I du Règlement sur les restrictions à la conduite des bateaux, «Eaux interdites à tous les bateaux sauf autorisation du ministre». Cela aurait pour effet d'interdire les motomarines de la baie de Bedwell et de rendre les contrevenants passibles d'une amende de 500 $.
De même, en vertu du projet de loi S-8, le village de Belcarra pourrait, après consultation, demander que la baie de Bedwell soit ajoutée à l'annexe II du Règlement sur les restrictions à la conduite des bateaux, «Eaux dans lesquelles les bâtiments à propulsion mécanique ou à propulsion électrique sont interdits, sauf sur autorisation du ministre». Cela obligerait les adeptes de la motomarine dans la baie de Bedwell à se conformer aux restrictions établies par le village de Belcarra, à défaut de quoi ils s'exposeraient à une amende de 500 $.
Dans un sens bien réel, donc, le projet de loi S-8 donnerait, par exemple, au village de Belcarra et à des dizaines de milliers d'autorités locales similaires la capacité d'influer sur les règlements fédéraux qui s'appliquent à leurs eaux. Dans chaque cas, une fois que l'autorité locale a tenu ses consultations et a soumis une résolution au ministre des Pêches et des Océans, l'article 5 du projet de loi S-8 oblige le ministre, à moins qu'il n'y ait obstacle à la navigation, à élaborer dans les 60 jours un nouveau règlement, à le publier dans la Gazette du Canada et ensuite, après 90 jours de consultations fructueuses, à commencer à l'appliquer.
Pour peut-être la première fois, ce projet de loi donne aux autorités locales la capacité d'indiquer à Ottawa et à ses bureaucrates ce que sont les priorités locales. Il ne faut pas surestimer l'importance de cette situation. Le village de Belcarra, l'endroit même que j'ai mentionné plus tôt, en est une illustration exemplaire. Si le projet de loi S-8 était adopté et si le village de Belcarra tenait des consultations, en gros, à cette période-ci l'an prochain, il aurait une influence sur la baie Bedwell.
Ce serait un formidable pas en avant. En fait, pour les citoyens du village de Belcarra et des trois villes contiguës, en particulier Ralph Drew, maire de Belcarra, ce pourrait être un incroyable pas en avant. Cela tient au fait que depuis 1996, ce village présente des pétitions au gouvernement fédéral pour que la baie Bedwell soit désignée «zone de non-déversement» pour la protéger des déversements d'eaux usées par des embarcations de plaisance.
En 1996, le gouvernement de la Colombie-Britannique a fait figurer la baie Bedwell sur une liste d'environ 70 sites qu'il voulait faire désigner zones de non-déversement au moyen d'un protocole d'entente avec le gouvernement fédéral. En juillet 1998, le conseil d'administration du district régional du Grand Vancouver (GVRD) a décidé à l'unanimité de faire écho à la volonté de désignation de la baie Bedwell comme zone de non-déversement et, un mois plus tard, le bureau régional du ministère de l'Environnement, des Terres et des Parcs a lui aussi donné son approbation.
En 2000, comme l'exigeait la loi sur la gestion des déchets, le GVRD a terminé le plan de gestion des déchets liquides de la région de Vancouver et a demandé à nouveau qu'Indian Arm soit désigné zone de non-déversement, au terme du règlement sur la prévention de la pollution par les eaux usées d'embarcations de plaisance. Le ministère de la Protection des eaux, des terres et de l'air de la Colombie-Britannique a ultérieurement approuvé le règlement en 2002.
Si le projet de loi S-8 est adopté et si j'ai la chance d'être réélu au terme de la prochaine campagne électorale, je travaillerai et je présenterai mon propre projet de loi d'initiative parlementaire afin de donner au village de Belcarra et à d'autres secteurs similaires le même pouvoir de déclarer des eaux locales zones de non-déversement que celui que le projet de loi S-8 leur donnerait d'ajouter des eaux locales aux annexes I et II du Règlement sur les restrictions à la conduite des bateaux.
Le Parti conservateur du Canada veut remettre plus de pouvoirs, d'argent, de contrôle et d'influence entre les mains des autorités locales. Permettre aux autorités locales de prendre des règlements concernant l'utilisation des motomarines et le rejet des eaux usées ne sont là que deux de nombreux exemples où le bons sens des autorités locales devrait toujours l'emporter sur la bureaucratie d'Ottawa.
Il faut nous demander qui peut bien défendre le déversement dans la baie Bedwell des eaux usées provenant d'embarcations de plaisance, mais ce doit sûrement être de grands partisans du Parti libéral, puisque huit ans se sont écoulées depuis que des pétitions ont été transmises au gouvernement à ce sujet, mais il refuse toujours d'interdire le déversement d'eaux usées dans ce magnifique secteur de ma circonscription et de tout le pays.
Que la baie Bedwell n'ait pas encore été désignée comme zone interdite pour tout déversement tient probablement au fait qu'aux yeux des bureaucrates d'Ottawa la baie Bedwell n'ait qu'un nom parmi tant d'autres et ne représente rien de concret. Toutefois, les habitants des trois villes avoisinantes admirent grandement la beauté et toute la gloire de la baie Bedwell. Quand aux habitants de ma circonscription, ils sont convaincus que la baie Bedwell et tout le secteur du bras Indian contribuent à la splendeur de la Colombie-Britannique.
Afin que la Chambre nous comprenne bien, je précise que l'opposition officielle, le Parti conservateur du Canada, appuie fermement le projet de loi S-8. Cette mesure législative donne un aperçu, à notre avis, du gouvernement dont le Canada a besoin, un gouvernement qui respecte les autorités locales et qui est disposé à remettre plus de pouvoir, d'argent, de contrôle et d'influence aux Canadiens, à leurs municipalités, afin que nous puissions tous jouir du modèle de gouvernement que nous désirons, et non du modèle conçu par le gouvernement d'Ottawa et de ses bureaucrates.
[Français]
M. Jean-Yves Roy (Matapédia—Matane, BQ): Monsieur le Président, c'est un plaisir pour moi de prendre la parole ce matin sur le projet de loi S-8, qui, comme le rappelait mon collègue, est un projet de loi qui avait été présenté à la Chambre précédemment.
J'ai certaines interrogations concernant le projet de loi, dont une en particulier. Effectivement, le projet de loi S-8 permet à des municipalités de traiter directement avec le gouvernement fédéral afin de modifier la réglementation en vigueur sur les lacs et rivières du Québec ou dans l'ensemble des autres provinces, alors que les mécanismes actuels permettent au ministère des Affaires municipales, du Sport et du Loisir du Québec de réglementer l'utilisation des motomarines sur nos lacs et rivières.
C'est là ma première interrogation, parce qu'effectivement, le projet de loi entre de plain-pied dans une juridiction qui appartient aux provinces.
Finalement, on pourrait se poser une question fondamentale, et c'est peut-être la principale. À titre d'exemple, si on confiait au gouvernement fédéral le soin de régir l'utilisation des motomarines sur l'ensemble des lacs du Québec et du pays, comment la Garde côtière, avec les moyens dont elle dispose à l'heure actuelle, pourrait-elle faire appliquer une telle réglementation? Je pense que la réponse est claire.
Il m'apparaît impossible qu'à l'heure actuelle, la Garde côtière, comme structure ou agence chargée de faire appliquer la loi, puisse à elle seule faire appliquer ladite loi. Il faudrait donc nécessairement que la Garde côtière délègue le pouvoir à des autorités locales qui seraient en mesure de contrôler la réglementation relative aux motomarines. On parle des motomarines, mais on pourrait parler de l'ensemble de la navigation.
Aujourd'hui, l'avènement de la motomarine ressemble un peu à l'avènement de la motoneige. En effet, lorsque la motoneige est apparue à la fin des années 1960, si ma mémoire est bonne—peut-être que j'étais trop jeune à l'époque pour me souvenir des dates exactes; mon collègue de Champlain pourrait peut-être préciser les dates—, il n'y avait bien entendu aucune réglementation et aucune manière de contrôler l'utilisation de la motoneige. Il y a donc eu des abus et de nombreux accidents. En effet, on allait sur des terres agricoles, et cela a produit des effets néfastes particulièrement sur le plan de l'environnement. De plus, bon nombre de décès se sont produits avant que les gouvernements interviennent et tentent de contrôler l'utilisation de la motoneige.
Revenons aux motomarines. À mon avis, il n'y a pas uniquement les motomarines—et c'est très important—, car aujourd'hui, certaines embarcations sont munies de moteurs extrêmement puissants. Ceux qui habitent le long du fleuve Saint-Laurent peuvent se rendre compte qu'il y a d'autres types d'embarcations qui sont utilisées par certaines personnes et qui vont à des vitesses absolument faramineuses. Il faudrait voir non pas exclusivement aux motomarines, mais à l'ensemble de ce type d'embarcations, et particulièrement sur les cours d'eau navigables comme le fleuve Saint-Laurent ou encore les Grands Lacs.
En réalité, il y aurait d'autres solutions que le projet de loi qui nous est soumis pour arriver à régler la situation, et c'est la position que le Bloc québécois adoptera. Effectivement, avec ce projet de loi, on entre de plain-pied dans une juridiction qui appartient aux provinces. Conséquemment, il nous est impossible d'appuyer un tel projet de loi, et, de toute manière, celui-ci nous apparaît tout à fait inutile, de la façon dont il est présenté à l'heure actuelle.
À l'heure actuelle, il existe un mécanisme qui permet aux municipalités de modifier la réglementation en matière de navigation de plaisance. Les demandes en ce sens sont acheminées au ministère des Affaires municipales, du Sport et du Loisir pour être ensuite transmises à Pêches et Océans Canada.
Nous considérons que le fait de changer la nature du mécanisme à l'heure actuelle pour faire en sorte que les municipalités traitent directement avec le gouvernement fédéral est une intrusion du gouvernement fédéral dans un champ de juridiction des provinces, particulièrement du Québec.
Donc, pour atteindre l'objectif recherché, soit restreindre l'utilisation des motomarines, les règlements pertinents au palier fédéral pourraient être modifiés sans que le lien entre les municipalités et le gouvernement du Québec soit court-circuité. Il s'agirait simplement de modifier, à l'heure actuelle, les règlements au palier fédéral, et le gouvernement fédéral, par la suite, pourrait déléguer aux autorités québécoises, qui, elles, pourraient travailler avec l'ensemble des autorités locales pour régler les problèmes que je qualifierais de spécifiques.
On sait qu'il y a une quantité importante de plans d'eau au Québec, et ils ne vivent pas tous cette situation. Il faudra donc traiter chacun d'entre eux de façon spécifique, avec les autorités locales et les autorités riveraines, un peu comme on le fait au niveau de l'environnement lorsqu'il est question des bassins versants, entre autres des rivières. C'est un comité local qui gère l'ensemble de la pollution au niveau des bassins versants. Les décisions sont prises par un comité local appuyé par le gouvernement du Québec, et cela donne de très bons résultats.
Je vois mal l'objectif d'une centralisation pancanadienne d'un problème qui peut être réglé par les autorités québécoises, par les autorités provinciales et locales. Bien entendu, il faudrait adapter le règlement fédéral. Comme je le mentionnais, il n'est pas nécessaire d'avoir un projet de loi. Il s'agit simplement d'adapter la réglementation fédérale de manière à permettre aux autorités québécoises et provinciales d'agir en ce sens.
Il existe aussi un autre problème concernant le projet de loi S-8. Avec ce projet de loi, pour arriver à la solution, on doit interdire tout type d'embarcation. Tel que libellé à l'heure actuelle, le projet de loi cause un problème. Veut-on interdire uniquement les motomarines ou veut-on interdire toute embarcation qui peut causer du bruit ou nuire à l'environnement?
Ce n'est absolument pas clair dans le projet de loi S-8 actuellement. Non seulement ce n'est pas clair, mais pour qu'une communauté ou une municipalité puisse interdire l'utilisation des motomarines, il faudrait interdire toute utilisation d'embarcation à moteur sur le plan d'eau en question. On ne peut interdire un seul type d'embarcation comparativement à un autre qui peut produire autant de bruit et de pollution et qui peut causer autant de dommages. Il y a donc un problème au niveau juridique concernant le projet de loi qui nous est soumis.
Pour certains plans d'eau où il n'y a aucune route, interdire l'utilisation de toute embarcation à moteur m'apparaît extrêmement difficile. S'il n'y a pas de route d'accès, les gens sont obligés d'utiliser une embarcation à moteur pour se rendre à leur chalet, ou ailleurs, lorsqu'ils vont à la chasse ou à la pêche ou qu'ils pratiquent d'autres activités. C'est un autre problème qui existe dans le projet de loi S-8.
Mon collègue de Lac-Saint-Louis, qui a déjà été ministre de l'Environnement au Québec, pourrait se rappeler qu'au moment de la première discussion que nous avons eue concernant l'utilisation des embarcations à moteur sur nos plans d'eau, nous avons abordé un problème qui n'est pas touché par le projet de loi S-8 et qui ne concerne effectivement pas le bruit, mais plutôt l'environnement, soit la propagation des espèces exotiques envahissantes produite par ce type d'embarcation. Ce sont des embarcations transportables, qu'on peut déplacer d'un plan d'eau à un autre.
À titre d'exemple, la propagation de la moule zébrée, à l'heure actuelle, représente des dépenses de 7 à 13 milliards de dollars par année dans notre économie. Ce type d'embarcation est la principale cause de propagation de ce genre d'espèces qui envahit nos plans d'eau actuellement et cause un problème environnemental majeur.
Il faut aller plus loin. Il faut voir à ce que la responsabilité fédérale, entre autres au niveau de la protection des eaux, touche davantage la protection des espèces. C'est dans ce sens que le projet de loi aurait peut-être dû être présenté.
Comprenons très bien que l'utilisation de motomarines peut nuire considérablement à la quiétude de certains riverains. Toutefois, tel que libellé, le projet de loi nous apparaît impossible à appliquer.
[Traduction]
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, merci de me permettre de participer au débat sur le projet de loi S-8. Je voudrais exposer quelques opinions du Nouveau Parti démocratique au sujet de cette mesure.
Avant tout, je félicite la sénatrice Spivak du Manitoba, pour ses efforts infatigables dans ce dossier, ainsi que le député de Lac-Saint-Louis, qui a fait preuve d'un aussi grand dynamisme dans les dossiers environnementaux abordés à la Chambre des communes. Il n'est que normal que la sénatrice Spivak et le député de Lac-Saint-Louis conjuguent leurs efforts pour faire adopter le projet de loi.
L'intervention du député de Lac-Saint-Louis a été pour moi un choc. J'avais déjà des idées personnelles assez fermes sur les motomarines, mais je n'étais pas au courant de certains des aspects négatifs de ces véhicules, et je ne savais pas qu'ils étaient dangereux pour le bien-être des Canadiens. Je ne savais pas non plus dans quelle mesure ils polluent et dégradent l'environnement. Ces statistiques ne font que renforcer mes propres impressions et mes idées sur les motomarines.
Personnellement, j'ai trouvé particulièrement intéressantes les données sur la fréquence des accidents, d'autant plus que beaucoup de jeunes pratiquent la motomarine. Considérons les proportions. Les motomarines représentent 3 p. 100 des véhicules pour les sports nautiques. Elles devraient être en cause dans environ 3 p. 100 des accidents. Or, le taux réel est de 20 p. 100, soit près de dix fois plus. Il y a un nombre disproportionné de blessures qui sont associées à ces véhicules.
En écoutant les autres députés, j'ai parcouru le document de la Garde côtière de Pêches et Océans Canada au sujet des motomarines. L'organisme a mis le doigt sur certains problèmes associés à ces véhicules et pris des mesures pour informer les Canadiens. Désormais, chaque personne qui utilise une motomarine doit être munie d'un permis.
Toutefois, tous les députés qui sont allés au lac récemment savent que ces véhicules sont utilisés, un peu comme les planches à roulettes dans les rues, avec un mépris total des règles de la prudence. La plupart des plaisanciers sont fiers de leur comportement de navigateurs. Les motomarines sont utilisées avec imprudence chaque fois que j'en vois. Il n'est pas étonnant que la fréquence des blessures soit tellement plus élevée, étant donné cette négligence.
Il y a deux fois plus de décès associés aux motomarines qu'aux embarcations motorisées conventionnelles. Et c'est sans parler du problème de pollution sonore et de la détérioration de l'environnement liés aux motomarines.
Je suis issu d'un corps de métier du bâtiment. Je suis habitué aux outils à commande mécanique et au matériel bruyant. J'ai même perdu une partie de mes facultés auditives pour avoir utilisé de tels outils et je sais que l'échelle des décibels n'est pas linéaire. Si l'on augmente de 3 le nombre de décibels et que ceux-ci passent de 65 à 68 décibels, le niveau de bruit double. Si l'on hausse encore de trois le nombre de décibels, le niveau de bruit double encore; le problème s'aggrave.
Lorsqu'on est exposé à environ 75 décibels produits par une motomarine en marche à une centaine de pieds de soi, c'est-à-dire la distance qui nous sépare, vous et moi, monsieur le Président, ou peut-être même moins, le bruit est épouvantable. Son niveau peut grimper à 90 décibels lorsque l'appareil effectue un virage ou que le vent ramène le bruit vers le conducteur. Or, 90 décibels, c'est beaucoup trop. Ceux qui conduisent ces véhicules devraient porter des protecteurs d'oreilles.
J'imagine que si les municipalités hésitent à prendre des mesures pour interdire l'utilisation des motomarines c'est, en partie, à cause des moteurs à deux temps, car il y a énormément de moteurs hors-bord à deux temps encore utilisés. Selon les statistiques, une embarcation personnelle dotée d'un moteur à deux temps et utilisée pendant sept heures polluerait autant qu'une automobile moderne qui aurait parcouru 160 000 kilomètres. Ces moteurs crachent de la fumée. Quelque 30 p. 100 du carburant utilisé n'est pas brûlé, mais est rejeté dans l'air ou même dans l'eau.
J'ai été renversé par le discours de notre collègue de Lac-Saint-Louis. Cela a renforcé mon point de vue sur les motomarines. Pour être juste à l'égard de mes collègues néo-démocrates, au moins une députée de notre caucus a dit qu'elle n'était pas d'accord avec le projet de loi qui permettrait aux municipalités de restreindre davantage l'utilisation de ces motomarines. Elle représente la grande région de Churchill, qui couvre les deux tiers du Manitoba et qui compte plus de 100 000 lacs.
Notre collègue a signalé que beaucoup d'habitants des petites localités du nord du Manitoba que la députée représente ne veulent pas qu'on limite leur utilisation de ces machines. Pour être juste à l'égard de son point de vue, elle représente une grande circonscription où un certain nombre d'électeurs habitent à l'année la région des chalets, et où il n'y a pas que des citadins qui viennent se réfugier dans ces zones vierges. Des gens utilisent des motomarines dans certaines régions du pays et ma collègue voulait que je signale en son nom que notre caucus n'appuie pas de façon unanime le projet de loi S-8.
Si ces véhicules causent la détérioration de l'environnement dont nos collègues ont parlé aujourd'hui, ils devraient alors être réglementés par Environnement Canada. Nous devrions commencer à nous occuper des vieux Evinrude tout à fait inefficients qui sont encore utilisés. Je ne critique pas une gamme de produits en particulier, mais nous devrions commencer à prendre des mesures au sujet des vieux moteurs hors-bord à deux temps qui continuent de cracher de la fumée dans toute la région des chalets.
C'est une belle journée pour l'environnement, en ces dernières heures de cette législature, du fait que nous sommes saisis de cette mesure législative qui aura des répercussions utiles pour les Canadiens en général.
Je voudrais partager avec mes collègues une autre bonne nouvelle qui vient de nous parvenir. La société Monsanto a annoncé qu'elle n'allait plus produire du blé génétiquement modifié. Je sais que c'est une question qui ne touche pas directement ce dont nous discutons maintenant, mais c'est une bonne journée pour l'environnement. Monsanto n'a pas attendu qu'un régime d'étiquetage soit mis en place; elle a simplement déclaré qu'elle ne pouvait vendre sur le marché ce blé génétiquement modifié. C'est une grande journée pour l'environnement et pour ceux d'entre nous qui s'intéressent à ces questions.
J'appuie le projet de loi S-8 et j'espère vivement qu'il sera adopté rapidement. J'appuie les efforts du sénateur Spivak, qui se préoccupe sans relâche de cette question depuis de nombreuses années. Ce projet de loi ne lie les mains à personne. Ce n'est pas une intervention massive de l'État. Il permet simplement aux municipalités de vérifier sur leur territoire si les propriétaires de chalet veulent ou non limiter l'utilisation de ces embarcations dans leur région.
L'hon. Jim Karygiannis (secrétaire parlementaire du ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, je dois d'abord dire que le gouvernement est heureux de ce débat parce qu'il est convaincu que le dialogue et la sensibilisation peuvent améliorer de façon exponentielle la sécurité nautique. Nous félicitons le sénateur Spivak et le député de Lac-Saint-Louis pour leur engagement de longue date à l'égard de l'environnement et, dans ce cas particulier, à l'égard de la sécurité nautique.
Bien que le ministère partage bon nombre des préoccupations à l'origine du projet de loi qui nous est proposé, je ne peux appuyer le principe de celui-ci à sa deuxième lecture, et je le regrette, parce que, visiblement, il est inutile. Il fait double emploi avec des mesures existantes et ne respecte pas les droits fondamentaux des Canadiens en matière de démocratie, car il ne prévoit pas un processus de consultation équitable et ouvert.
Avant d'examiner plus en détail le projet de loi proposé, permettez-moi de vous faire un bref historique de la législation et de la politique en vigueur.
C'est la Loi sur la marine marchande du Canada qui sert de fondement législatif à la restriction de la navigation de plaisance à des fins de sécurité publique, de protection de l'environnement maritime et d'intérêt public. C'est en vertu de cette loi que le gouvernement a imposé par réglementation des restrictions à la navigation de plaisance. Cette réglementation comporte un mécanisme permettant de restreindre ou même d'interdire l'utilisation de tous les bateaux à moteur, y compris les motomarines, dans les eaux canadiennes.
Cette réglementation comporte un certain nombre d'annexes qui énoncent les restrictions ou les interdictions frappant les bateaux. Tous les bateaux, et non pas certains types seulement, peuvent être interdits par cette réglementation.
Le projet de loi S-8 ferait double emploi pour ce qui est des restrictions à la navigation de plaisance s'appliquant aux divers bateaux à moteur du même type ou mus par un moteur de même taille. Ce qui est en cause et l'aspect sur lequel le gouvernement et les parrains du projet de loi S-8 divergent de point de vue, c'est que la législation actuelle s'applique à tous les bateaux et ne fait pas de distinction entre les divers types de bateaux, notamment les motomarines.
Un certain nombre d'autres mesures utiles peuvent être mises en vigueur au moyen de la réglementation sur les restrictions s'appliquant à la navigation de plaisance.
En vertu de cette réglementation, la vitesse le long des côtes a été limitée dans les eaux, depuis la rivière des Outaouais jusqu'à l'océan Pacifique. Des permis peuvent être accordés pour tenir des événements sur une voie navigable frappée d'une restriction. Une puissance maximale a été fixée pour les pilotes de moins de 16 ans, ainsi qu'un âge minimal nécessaire pour conduire un bateau, y compris une motomarine. Selon cette réglementation, seule une personne âgée d'au moins 16 ans peut conduire une motomarine.
De plus, la réglementation en matière de compétence des conducteurs de bateau de plaisance exige maintenant que le conducteur d'une motomarine possède une carte de compétence. Les annexes servant à la mise en application de ces dispositions sont modifiées périodiquement pour y ajouter ou, dans de rares cas, y abroger une restriction à la suite d'une demande, qui provient habituellement d'autorités locales.
En vertu des dispositions actuelles, les provinces interviennent à titre de partenaires dans l'application des règlements visant les plaisanciers et elles participent de façon importante au processus de réglementation. Je trouve important de le signaler car le projet de loi S-8 pourrait court-circuiter les municipalités et les provinces. Cela nous préoccupe vivement et cela préoccupe aussi les municipalités et les provinces.
J'aimerais fournir quelques exemples de ce que le projet de loi permettra. Il propose un régime qui permettra à un petit groupe de gens de réclamer l'interdiction des motomarines sans qu'il soit nécessaire de se préoccuper du droit démocratique des autres résidents des abords d'un lac ou d'une rivière à être consultés. En vertu des articles 5, 6 et 7 du projet de loi, le ministre sera contraint de prendre des mesures précises pour donner suite à la résolution dans un très court délai, sans égard aux préoccupations que pourrait susciter chez lui l'absence de consultation. Le ministre pourrait refuser de donner suite à une proposition si des préoccupations relatives à la sécurité s'avéraient fondées ou si la proposition avait pour effet de faire obstacle de façon indue à la navigation.
À l'heure actuelle, il serait peut-être utile d'indiquer quelles sont les mesures du projet de loi S-8 qui font double emploi, selon le gouvernement. Commençons par quelques-unes des similarités. Le projet de loi S-8 prévoit: un pouvoir similaire à l'égard de la prise de règlements; une série similaire d'annexes au règlement; un processus plus court pour réclamer une restriction ou une interdiction et une disposition relative aux consultations auprès de la collectivité.
Quant aux différences, les mesures proposées par le projet de loi se traduiraient ainsi: des restrictions ou des interdictions s'appliquant seulement aux motomarines; le ministre et non le Cabinet détiendrait le pouvoir de prendre des règlements; les administrations provinciales et municipales seraient court-circuitées; et le ministre se verrait imposer des contraintes administratives et des échéances, ce qui, dans certains cas, pourrait signifier qu'il devrait passer outre à la politique de réglementation du gouvernement du Canada.
Je dois souligner ici que cette politique de réglementation a évolué pour assurer la mise en place d'un processus de consultation détaillé, car la consultation est importante pour protéger les droits démocratiques des Canadiens. Le gouvernement a établi des exigences claires pour que le processus de consultation soit approprié et juste, un processus possiblement difficile à respecter en vertu de ce projet de loi.
Je ne crois pas que le projet de loi S-8 serait très utile aux Canadiens pratiquant la navigation de plaisance parce qu'il y aurait deux règlements sur les restrictions à la conduite des bateaux: un pour les motomarines et l'autre pour tous les types d'embarcations.
Je propose un moyen de promouvoir des changements à la conduite des motomarines qui, selon nous, rendrait ce projet de loi inutile. Nous avons, aujourd'hui, dans nos antichambres, des exemplaires de plusieurs publications. Le Bureau de la sécurité nautique se fera un plaisir de nous en fournir d'autres pour que nous puissions les remettre à nos électeurs afin qu'ils comprennent les obligations en vigueur liées à l'utilisation de ces embarcations.
Je parlerai d'abord d'une petite brochure qui s'intitule «Du nouveau pour mieux s'amuser sur l'eau!» Les députés savent-ils également que, en vertu de la Loi sur les contraventions, les organismes d'exécution, dans plusieurs provinces, disposent maintenant du pouvoir d'infliger une amende aux contrevenants sur le lieu de l'infraction? On peut infliger une contravention, entre autres, pour ne pas avoir eu l'équipement de sécurité obligatoire à bord, ou pour excès de vitesse, infractions qui s'appliquent toutes les deux aux motomarines. Ces dispositions existent déjà au Nouveau-Brunswick, à l'Île-du-Prince-Édouard, en Nouvelle-Écosse, en Ontario, au Québec et au Manitoba.
On peut porter des accusations contre les délits mêmes dont--je suppose--les parrains de ce projet de loi se préoccupent le plus. En vertu de l'article 43 du Règlement sur les petits bâtiments, les conducteurs de toutes les embarcations de plaisance, y compris les motomarines, peuvent être poursuivis s'ils utilisent une embarcation de manière imprudente ou de manière à créer une menace pour la sécurité des gens ou la propriété ou sans considération pour les autres. Comme je l'ai mentionné plus tôt, en vertu de la réglementation sur les restrictions concernant l'utilisation d'embarcations, il existe déjà, de l'Ontario à la Colombie-Britannique, des limites de vitesse riveraines à moins de 30 mètres de la rive.
J'ai dit que le projet de loi S-8 s'éloignait des politiques et des pratiques actuelles du ministère, mais je tiens à ajouter que Transports Canada tient toujours compte des demandes qui lui sont adressées en matière de restrictions à la conduite des bateaux.
Il y a des bureaux de la sécurité nautique un peu partout au pays. Des périodes de formation supplémentaires ont été prévues pour le personnel qui a maintenant la formation nécessaire pour répondre à toutes les questions des gens sur la navigation sur les lacs et les rivières. Le Bureau de la sécurité nautique a son propre site Web. De plus, les gens peuvent s'adresser aux bureaux régionaux ou communiquer avec Transports Canada au besoin. Les représentants locaux peuvent agir à titre de médiateurs entre les parties en cause en cas de conflits impliquant des motomarines ou d'autres embarcations.
Dans la région du Pacifique par exemple, les représentants du bureau de la sécurité marine ont été les premiers à jouer un rôle de promotion et de médiation pour répondre aux demandes des gens de l'endroit. Grâce à l'efficacité des programmes de médiation et de formation, le nombre de demandes d'intervention officielle a chuté de 90 p. 100.
Il y également un autre produit excellent sur lequel nous pourrions nous pencher et qui fournit quelques exemples d'enseignes qui peuvent être installées près des rampes d'accès municipales par exemple, ou dans tout autre endroit où les plaisanciers se rassemblent. Cela pourrait aider à sensibiliser les plaisanciers et leurs voisins aux droits et aux responsabilités qui s'appliquent tant à ceux qui se trouvent sur l'eau qu'à ceux qui sont sur la côte.
On y précise très clairement que le Règlement sur les petits bâtiments interdit la conduite négligente d'une embarcation, ce qui signifie que personne ne peut conduire une embarcation sans faire preuve de l'attention nécessaire et de la considération qui s'impose à l'égard des autres. Malheureusement, bon nombre de municipalités et de collectivités ne connaissent pas ce Règlement et ne savent pas qu'il peut servir à régler rapidement un problème de comportement. Il existe même un exemple d'enseigne qu'on peut afficher près des voies navigables et des marinas. On y précise que toute personne reconnue coupable de conduite négligente pourrait se voir imposer une amende et même être convoquée devant un tribunal.
Je crois qu'il existe à l'heure actuelle des interdictions auxquelles les autorités locales peuvent faire appel lorsqu'elles tentent de lutter contre un comportement inacceptable sur les lacs et les voies navigables. En terminant, je rappelle que je ne suis pas prêt à appuyer ce projet de loi à l'étape de la deuxième lecture parce que je considère qu'il est tout à fait inutile.
[Français]
M. Marcel Gagnon (Champlain, BQ): Monsieur le Président, j'aimerais d'abord féliciter mon collègue de Lac-Saint-Louis. J'ai eu l'occasion de travailler avec lui à l'Assemblée nationale du Québec où il a été ministre de l'Environnement. Je sais qu'il va éventuellement mettre fin à sa carrière politique. Je peux dire, tel que je le connais, qu'à chaque tribune qu'on lui a offerte, il a su en profiter pour faire avancer les dossiers de l'environnement. C'est tout à son honneur et il y a encore énormément de travail à faire.
J'habite tout près du fleuve Saint-Laurent, entre Trois-Rivières et Québec. Tantôt, mon collègue a mentionné que la Garde côtière suffisait pour faire respecter un règlement ou un loi comme celle-là, et c'est vrai. Cela m'a fait penser que, habitant sur le bord du fleuve, on voit des exagérations épouvantables.
Nous sommes en train de détruire les berges du Saint-Laurent. Ce n'est pas seulement à cause de la navigation de plaisance d'ailleurs, mais à cause de la navigation, tout simplement. Les armateurs ne respectent pas les berges du Saint-Laurent et on va détruire rapidement notre environnement si rien n'est fait. Cela relève directement aussi du gouvernement fédéral.
Compte tenu de la valeur de notre environnement et compte tenu que le fleuve est la colonne vertébrale du Québec, il me semble que le gouvernement fédéral devrait permettre plus de surveillance sur le fleuve. Il y a des bateaux qui passent chez nous, entre autres des bateaux de plaisance. On disait tantôt que le bruit des moteurs était de 90 décibels. Toutefois, je peux vous dire, même si je ne l'ai jamais mesuré, qu'il y a des bateaux qui passent sur le fleuve à une vitesse telle que le bruit qu'ils font est énorme et qu'on les entend à une dizaine de kilomètres lorsqu'ils viennent vers Champlain. Et c'est la même chose sur l'autre côté du fleuve.
Je pense que le gouvernement fédéral devrait adopter de toute urgence les moyens pour protéger le fleuve Saint-Laurent, pas seulement contre les motomarines mais contre tous ceux qui en abusent.
[Traduction]
Le président suppléant (M. Bélair): L'heure réservée à l'étude des initiatives parlementaires est maintenant écoulée, et l'article retombe au bas de la liste de priorité du Feuilleton.
Initiatives ministérielles
[Initiatives ministérielles]
* * *
[Traduction]
Loi sur la gestion financière et statistique des premières nations
La Chambre reprend l'étude, interrompue le 7 mai, de la motion: Que le projet de loi C-23, Loi prévoyant les pouvoirs en matière d'imposition foncière des premières nations, constituant la Commission de la fiscalité des premières nations, le Conseil de gestion financière des premières nations, l'Administration financière des premières nations ainsi que l'Institut de la statistique des premières nations et apportant des modifications corrélatives à certaines lois, soit lu pour la troisième fois et adopté, et de l'amendement.
M. Rick Laliberte (Rivière Churchill, Lib.): Monsieur le Président,
[Note de la rédaction: Le député s'exprime en cri.]
[Traduction]
C'est pour moi un honneur que de prendre la parole encore une fois au nom des nombreuses premières nations et des autochtones qui ont créé ce magnifique pays que nous appelons Canada en entretenant des relations fondées sur des traités. Ce projet de loi aurait des répercussions sur leur vie, sur le développement de leurs collectivités, sur l'évaluation de leurs terres et sur la gestion des risques qui aurait lieu dans les limites des emprunts consentis dans le cadre des nouvelles relations financières prévues dans le projet de loi C-23.
J'ai longuement étudié le projet de loi pour connaître sa raison d'être. Le gouvernement a expliqué qu'il vise en grande partie à assurer le développement socioéconomique des membres des premières nations inscrits sur la liste des bandes qui sont définis dans la Loi sur les Indiens comme étant Indiens et membres d'une première nation. J'ai essayé de sonder les intentions du gouvernement.
J'ai examiné un document provenant du budget des Affaires indiennes de 2003. Il dit que, à défaut d'un nouveau modèle financier, les besoins budgétaires croissants des premières nations risquent de miner l'appui de la population, dont son appui en faveur de l'autonomie gouvernementale.
Cette toute petite phrase en dit long. Elle signifie que les dirigeants des Affaires indiennes comprennent que les premières nations du Canada connaissent une explosion démographique. Au cours des dernières années, le nombre de jeunes autochtones vivant dans les réserves et à l'extérieur de celles-ci n'a jamais atteint de tels sommets.
Certaines réserves comptent environ 5 000, 6 000, 10 000 ou 15 000 habitants. Les conseils de bande font l'objet de pressions croissantes pour développer et financer le logement et répondre aux besoins sociaux et économiques de ces collectivités.
Cette phrase signifie que les autorités des Affaires indiennes reconnaissent qu'il y aura une augmentation des besoins budgétaires. Toutefois, le ministère des Affaires indiennes et le gouvernement du Canada semblent davantage préoccupés par l'opinion publique à l'égard de ces besoins accrus. Le gouvernement essaie d'établir avec les conseils de bande une nouvelle relation financière, pour alléger la pression budgétaire qui ne cesse de croître.
À l'heure actuelle, les besoins augmentent au chapitre du logement et du réseau d'aqueducs et d'égouts. Il faut également davantage de cliniques médicales, d'écoles et de salles de classe. La population autochtone croît au Canada, non seulement dans les réserves, mais également à l'extérieur de celles-ci.
Aux fins du compte rendu, je tiens à faire état d'une autre de mes préoccupations à l'égard du projet de loi C-23. Ma préoccupation est liée à la commission royale. Dans le cadre de la Décennie internationale des populations autochtones, les Nations Unies ont consacré les dix dernières années au traitement des questions concernant les peuples autochtones. Au cours de ces dix années, le Canada a mis sur pied la Commission royale sur les peuples autochtones. Cette commission souligne que l'article 35 de la Loi constitutionnelle, d'une part, définit les peuples autochtones du Canada comme étant notamment les Indiens, les Inuit et les Métis et, d'autre part, offre la base d'un gouvernement autochtone s'inscrivant dans le contexte politique canadien à côté des paliers de gouvernement fédéral et provincial.
Nous avons des ordres de gouvernement fédéral et provinciaux. La Constitution accorde tous les pouvoirs au Parlement. Au cours de l'histoire du Canada, le gouvernement fédéral a cédé certains de ses pouvoirs pour créer les gouvernements provinciaux. À leur tour, les administrations municipales cèdent certains de leurs pouvoirs aux municipalités.
Au cours de notre histoire, le Parlement a adopté une Loi sur les Indiens identifiant de 630 à 650 conseils de bande partout au pays. Le projet de loi C-23 accorderait aux conseils de bande des premières nations, telles que définies par ce projet de loi, les pouvoirs d'une administration municipale. Ces conseils auraient l'autorisation d'emprunter et le pouvoir de taxer les biens immeubles, d'évaluer les terrains et les bâtiments, pour percevoir des impôts fonciers et générer des recettes locales.
Cependant, la Commission royale a recommandé que le gouvernement du Canada reconnaisse un ordre de gouvernement autochtone coexistant aux côtés des ordres degouvernement fédéral et provincial dans le cadre du Canada.
Je rappelle à la Chambre une page d'histoire du pays. Il existait un traité, appelé le wampum à deux rangs, qui correspondait à une intention. Un traité de wampum à deux rangs signifiait que les nouveaux venus--le système parlementaire britannique, l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, la Grande-Bretagne, la France, tous les Européens à la recherche de colonies, les Espagnols, les Portugais et les Hollandais, qui occupaient une grande place dans cette entente--seraient maître de leur vaisseau en matière de législation, de langue et de religion. Ces traités prévoyaient aussi que les autochtones et les nations auxquelles ils appartenaient auraient aussi leurs gouvernements, leurs langues et leurs religions, et que les deux vaisseaux vogueraient ensemble sur la rivière de la vie.
Cette recommandation de la Commission royale invitait le Canada à reconnaître un ordre de gouvernement autochtone. Je propose aujourd'hui à la Chambre que les ordres de gouvernements autochtones soient reconnus, premièrement, comme des nations, des tribus et des communautés, ce que la Loi sur les Indiens définit comme étant des bandes, ces camps et localités qui s'engagent par traité, la Loi sur les Indiens ne reconnaissant pas les nations et les tribus.
Pour le bénéfice de la Chambre, je lirai les noms officiels des nations et tribus du pays. J'ai fait la recherche, et peut-être que les gens reconnaîtront ces noms. Les voici: les Beothuks, les Mi'kmaw, les Malécites, les Naskapis, les Montagnais, les Innus, les Hurons, les Pétuns, la nation neutre, les Algonquins, les Odawas, les Cayugas, les Tuscaroras, les Sénécas, les Onondagas, les Oneidas, les Mohawks, les Ojibwas, les Cris-des-Plaines, les Cris des bois, les Moskégons, les Assiniboines, les Saulteaux, les Pieds-Noirs, les Dénés, les Gwich'in, les Tahltans, les Hares, les Sarcis, les Tlichos, les Slaveys, les Carriers, les Chippewyans, les Tutchonis, les Beavers, les Sioux, les Dakotas, les Nakotas, les Lakotas, les Kutenais, les Okanagans, les Shuswaps, les Comox, les Lillooets, les Nuu-chah-nulth, les Kwakiutl, les Nuxalk, les Heiltsuks, les Haislas, les Wakashans, les Haidas, les Tsimshians, les Nisga'as, les Salish, les Sechelts, les Squamish, les Halkomelems et les Tlingits.
Le Canada commettra une grave erreur s'il ne fait rien pour structurer, reconnaître et respecter ces nations. J'ai étudié la création des traités dans ce pays, en consultant les documents et l'histoire des peuples.
[Note de la rédaction: Le député s'exprime en cri.]
[Traduction]
J'ai examiné comment cette relation de coexistence était symbolisée et reflétée dans les traités. La Couronne a créé une obligation intitulée responsabilité fiduciaire. Il ne s'agissait pas uniquement d'une relation financière. Cette responsabilité fiduciaire signifiait que l'État respecterait la souveraineté initiale des nations. Je ne crois pas que nous devrions créer une relation d'emprunt et de gestion financière de style municipal avec les conseils de bandes qui sont régis par la Loi sur les Indiens, sous la direction de l'agent des Indiens agissant à titre de gardien coordonnateur.
Les Indiens ont été traités comme des pupilles de l'État et c'est ainsi qu'ils ont été inscrits dans les pensionnats. Comment le gouvernement a-t-il pu enlever des enfants de cinq ans à leur famille et les placer en institution pour leur enseigner le français, l'anglais, la religion catholique et la religion protestante? Ces enfants ont été arrachés à leur communauté par le gouvernement qui les considérait comme des pupilles de l'État.
Il est maintenant grand temps de traiter les autochtones avec respect et de leur permettre de jouer un rôle important dans la gouvernance de ce pays. La commission royale a aussi mis le pays au défi de reconstruire la structure de gouvernance du Canada, non seulement la structure d'autonomie gouvernementale des conseils de bandes, des communautés métisses ou des villages inuits, mais la structure parlementaire du pays tout entier. Elle a notamment formulé une recommandation réclamant que le palier de gouvernement autochtone soit reconnu.
Lors de nombreux discours à la Chambre, j'ai demandé qu'on songe à la possibilité de créer une troisième chambre du Parlement. La Chambre des communes représente une chambre du Parlement, le Sénat en est une autre. Ces deux institutions sont issues du système parlementaire britannique où les deux côtés s'affrontent pour discuter et redresser les travers de la nature humaine. Il y a donc deux parties, le gouvernement et l'opposition. Il n'existe aucun symbole d'unité dans cette structure. Tout est carré. Ce système est né parce que le roi d'Angleterre ne pouvait réunir les représentants du peuple ailleurs que dans une cathédrale qui elle-même était carrée. Voilà pourquoi cette enceinte est aussi carrée. Cependant, il existe un édifice sur la Colline du Parlement qui ressemble à un tipi et c'est la Bibliothèque du Parlement. Un symbole très sacré représentant le cercle d'influences est incrusté dans le plancher selon les plans de l'édifice. Ce bâtiment est maintenant en rénovation et sera prêt en 2006.
Il s'agit d'une période difficile pour mes frères et soeurs de toutes les nations et tribus du Canada, qui doivent former un conseil pour participer à la direction du pays. Nos nations autochtones traversent plus que jamais une période à la fois prometteuse et risquée.
Ce projet de loi comporte une disposition d'adhésion, qui constitue la seule mesure importante permettant au gouvernement d'affirmer que le projet de loi ne présente aucun risque pour les premières nations. Ce n'est pas le cas. Une autre clause comportant des dispositions d'adhésion a déjà été établie, pour des raisons politiques, à la Chambre. Il s'agissait d'une clause relative à la pension des députés. Le gouvernement a utilisé une tactique politique et a fait du régime de pensions un programme facultatif. Certains députés se sont soustraits du régime de pensions pendant plusieurs années, mais ils ont fini par céder. Si l'on vérifiait les archives de la Chambre, on constaterait que la majorité des députés bénéficient actuellement du régime de pensions auquel certaines personnes s'opposaient.
Dans le projet de loi à l'étude, le gouvernement utilise la même stratégie politique. Les conseils de bande peuvent choisir de ne pas adhérer à la disposition législative, mais dans 10 ou 15 ans, peu importe le temps nécessaire, tous les conseils de bande finiront par devoir trouver une institution financière en vue d'emprunter de l'argent pour leur clinique. S'ils veulent augmenter le nombre de salles de classes dans leurs écoles en raison de la hausse du nombre d'enfants, ils devront se tourner vers la relation financière pour emprunter l'argent nécessaire à la construction de leur école.
En ce qui a trait aux réseaux d'aqueducs et d'égouts, la qualité de l'eau peut se détériorer au point où les collectivités seront obligées, pour des raisons médicales et essentielles, voire pour leur propre survie, d'emprunter de l'argent afin d'améliorer leurs réseaux d'aqueducs et d'égouts.
J'estime que, si on ne reconnaît pas de façon appropriée les tribus et les peuples indigènes, on crée un dangereux précédent. Ils constituent la source de sécurité des autochtones. Il y a des responsabilités sacrées au sein des premières nations. Notre langue en est un exemple.
[Note de la rédaction: Le député s'exprime en cri.]
[Traduction]
Je parle couramment le cri grâce aux nations autochtones, à mes ancêtres qui ont su préserver et perpétuer la langue comme un cadeau reçu de Dieu. Le Créateur nous a fait don de cette langue. Je l'emploie aujourd'hui avec fierté et noblesse. Cette langue est également porteuse de connaissances et de sagesse. Il incombe à une nation, et non à un conseil de bande, de protéger sa langue. Une collectivité ne peut à elle seule porter la responsabilité de protéger une langue. Cette responsabilité doit être assumée par l'ensemble du peuple.
Il y a également des responsabilités sacrées à l'égard des terres, des connaissances traditionnelles et des droits de propriété intellectuelle pour les produits médicinaux. Les sociétés pharmaceutiques tentent de mettre au point des médicaments fabriqués à l'aide de plantes, de haricots et de minéraux divers qu'on trouve sur nos terres. Certains de ces médicaments étaient autrefois fabriqués au sein de la collectivité, grâce aux connaissances traditionnelles de ces peuples. Il s'agit là d'une importante responsabilité.
Le but visé par le projet de loi sur la gestion financière et statistique est excellent et il est apprécié; toutefois les choses ne sont pas faites dans le bon ordre. Mettons d'abord en place une structure de gouvernement appropriée pour les premières nations, les tribus et les conseils de bande. Notre système parlementaire compte trois ordres de gouvernement: fédéral, provincial et municipal. Il y a également trois ordres dans la structure gouvernementale autochtone, à savoir la nation, les tribus et les conseils de bande. Le gouvernement du Canada commet une grave erreur en ne reconnaissant que les conseils de bande. Dans le projet de loi, on définit une première nation comme étant un conseil de bande désigné dans la Loi sur les indiens.
Il faut vérifier dans le dictionnaire. Premier veut dire original, initial. Il désigne ceux qui étaient ici les premiers. Nation veut dire nation, et non conseil de bande. Les premières nations du Canada sont celles dont je parle. Il y en a entre 50 et 60. Si nous vérifions les documents du gouvernement et du ministère, l'Assemblée des Premières Nations est considérée comme un groupe de pression qui représente les chefs et les conseils de bande.
Il est temps, mes frères et mes soeurs, que nous nous réunissions en nations et en tribus et que nous nous respections mutuellement. Formons un cercle et aidons à guider notre pays, sans quoi il risque de se perdre. Le Canada est un très beau pays.
Nous ne pouvons assumer nos responsabilités comme l'ont fait les mères de clan qui sont à la Chambre aujourd'hui. Au cours de leur histoire, il y a eu un don de paix. Le créateur a fait un don de paix aux premiers peuples de cette terre. Ce serait commettre une grave erreur que de ne pas cultiver cette paix de façon respectueuse et responsable.
Je voudrais proposer l'amendement suivant: Que la motion soit amendée par suppression de tous les mots suivants le mot «Que» et par substitution de ce qui suit: Le projet de loi C-23, Loi prévoyant les pouvoirs en matière d'imposition foncière des premières nations, constituant la Commission de la fiscalité des premières nations, le Conseil de gestion financière des premières nations, l'Administration financière des premières nations ainsi que l'Institut de la statistique des premières nations et apportant des modifications corrélatives à certaines lois, ne soit pas lu pour la troisième fois, mais qu'il soit renvoyé au Comité permanent des affaires autochtones, du développement du Grand Nord et des ressources naturelles pour qu'il soit réétudié de façon à assurer une consultation complète des chefs des premières nations et de leurs collectivités au sujet des avantages et des conséquences de cette nouvelle relation financière.
Le président suppléant (M. Bélair): L'amendement du député n'est pas recevable, car la Chambre est actuellement saisie d'un amendement. J'invite le député à s'adresser aux greffiers au bureau pour savoir quel autre moyen serait envisageable pour réaliser ce qu'il veut faire.
L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je sais que le député éprouve certaines réserves au sujet du projet de loi. À cause de la limite de temps imposée aux interventions, je tiens à lui donner l'assurance qu'il aura encore l'occasion de les exprimer. Il y aura sans doute encore des observations sur certaines des dispositions de ce projet de loi.
M. Rick Laliberte: Monsieur le Président, l'autre grande raison pour laquelle je recommande que cette question soit renvoyée pour consultation, c'est que, l'an dernier, les projets de loi C-6, C-19 et C-7 ont été considérés comme une suite de projets de loi dans le cadre des travaux du comité permanent qui a tenu des consultations publiques. Ces consultations, cependant, étaient essentiellement axées sur le projet de loi C-7, le projet de loi sur la gouvernance. Le projet de loi C-19, qui est désormais le projet de loi C-23, a été proposé dans l'ombre de la consultation du projet de loi C-7. Une grande partie de ces consultations ont eu lieu au Parlement.
Le projet de loi C-19 n'a pas fait l'objet de consultations publiques. En effet, au cours des audiences relatives au projet de loi C-7, certaines personnes ont voulu s'exprimer sur le projet de loi C-19, la version antérieure du projet de loi C-23, mais n'ont pu le faire parce que le mandat du comité permanent, à l'occasion de ces audiences publiques, concernait uniquement le projet de loi C-7. Cependant, puisque nous sommes si fiers de ce projet de loi et qu'il résiste à l'épreuve des consultations publiques et à celle de son examen par les dirigeants des premières nations, il est temps de le soumettre aux consultations dans les collectivités. Faisons en sorte que chacun comprenne bien que cette tentative de recherche d'une relation financière concerne un marché intérieur. C'est une occasion pour les membres emprunteurs et il y a une définition des membres emprunteurs parmi les conseils de bandes autochtones.
Certaines définitions concernent également les contribuables. Je trouve ces définitions très amusantes parce que qu'elles créent différentes catégories de contribuables. Il y a les contribuables à des fins commerciales, les contribuables à des fins résidentielles et les contribuables pour la prestation de services publics. Or, je ne connais aucune autre loi, fédérale ou provinciale, qui définit ainsi des catégories de contribuables.
Il est également question de définir un nouveau type de première nation, le membre d'une première nation. Les membres des premières nations sont les Indiens du Canada, tels que définis dans la Loi sur les Indiens. Il est cependant désormais question d'une autre catégorie de membre d'une première nation, celui qui est d'accord avec l'imposition des terres. Le membre d'une première nation qui est d'accord avec l'imposition pourra siéger à la Commission de la fiscalité et au Conseil de gestion financière.
Le projet de loi définit également différentes catégories de premières nations. Si nous commençons à définir différentes catégories de premières nations et différentes catégories de contribuables, pourquoi ne pas définir les différentes nations et tribus du Canada et permettre à ces premières nations, en tant que paliers de gouvernement, de participer à la sécurité d'une première nation? Disons qu'une première nation membre souhaite contracter un emprunt, par exemple, une communauté crie du nord de la Saskatchewan, dans ma circonscription. Cependant, compte tenu des relations fiscales existantes, le membre ne paie pas d'impôts et ne peut donc rembourser sa dette. Pourquoi la nation crie, ou les Cris des Prairies ou les Cris des bois ne pourraient-ils pas se porter au secours du membre, au lieu de recourir aux dispositions du projet de loi relatives à la cogestion ou à la gestion par un tiers?
La cogestion et la gestion par un tiers sont déléguées aux différentes institutions: le Conseil de gestion financière, la Commission de la fiscalité et l'Administration financière. Ces autorités seront créées pour la gestion des risques face à la réalité du marché en matière d'emprunt. Pourquoi ne pouvons-nous pas reconnaître dans le projet de loi que les nations et les conseils tribaux qui ont été créés dans tout le pays ont un rôle important à jouer dans ces relations fiscales?
De même, je ne manquerai pas cette occasion de mentionner qu'il s'agit là d'une vision audacieuse de notre premier ministre, qui souhaite établir des relations avec les premières nations du pays. Il faut permettre à ces relations de se matérialiser avant de les couler dans le béton par le biais d'un mesure législative. Une fois qu'une première nation aura choisi d'adhérer à l'institution fiscale, il lui sera difficile de s'en retirer. Ce sera difficile pour les premières nations de se redéfinir unilatéralement comme membres non emprunteurs car le consensus des membres emprunteurs sera nécessaire avant qu'elles puissent procéder.
De nombreuses mesures doivent être examinées de près. Les premières nations et leurs dirigeants devraient dûment se consulter et s'entendre. Le gouvernement devrait d'abord reconnaître la véritable gouvernance autochtone des nations et des tribus. Ce projet de loi leur assurera ensuite la sécurité pour l'avenir. Les événements ne se présentent pas dans l'ordre approprié.
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, la nation nishnawbe-aski du Traité no 9 du district du Nord de l'Ontario m'a transmis une question par la magie du courriel.
Elle signale qu'en 2002, lorsque le projet de loi C-19 a été présenté pour la première fois par le député de Kenora—Rainy River, qui était ministre des Affaires indiennes à l'époque, le député de Calgary-Centre avait demandé au ministre comment il pouvait déposer le projet de loi alors que les quatre institutions étaient déjà sur pied et à l'oeuvre. Elles avaient des bureaux, du personnel, des fonctionnaires salariés, des conseils d'administration et des PDG. La loi habilitante venait juste d'être présentée et était en cours de débat, mais les institutions existaient depuis deux ans, sinon davantage. Qui a autorisé le ministre à effectuer des dépenses pour l'engagement du personnel et la création des quatre institutions sans que la loi habilitante n'ait été adoptée?
Le député croit-il que c'est une raison pour justifier l'urgence de faire adopter le projet de loi même si aucune contrée indienne n'en veut?
M. Rick Laliberte: Monsieur le Président, malheureusement, il m'est impossible de répondre à la question et de préciser d'où viennent les fonds. Ils figurent peut-être dans le Budget des dépenses. Les agents du ministère pourraient peut-être répondre à la question.
Le député a raison. Il existe une commission. Des conseils consultatifs ont été créés au fil des ans. D'ailleurs, on reconnaît dans le préambule du projet de loi l'existence de ces conseils.
L'Administration financière des premières nations a été créée en 1995. En 1999, les premières nations et le gouvernement ont reconnu les avantages que procurerait la création d'organismes constitués par une loi et d'un système de gestion financière et statistique. La Commission consultative de la fiscalité indienne a vu le jour en 1988.
Le projet de loi C-23 renferme également une disposition de droits acquis. Les organisations et instituts existants garderont leurs commissaires, leurs conseils d'administration et leurs employés tant que le processus de renouvellement ne sera pas enclenché.
En ce qui a trait à l'adhésion à ce régime, le projet de loi prévoit un examen dans les sept ans suivant la sanction royale. Après avoir consulté non pas les membres ou les leaders des premières nations, mais bien la commission de la fiscalité, le conseil de gestion, l'administration financière et l'institut de la statistique, le ministre pourra apporter des changements, y compris toutes les modifications qu’il recommandera en ce qui atrait à l’évolution du mandat et du fonctionnement de ces institutions.
Voilà pourquoi le projet de loi C-23 devrait être renvoyé au comité. Il faudrait l'amender pour que, au bout de sept ans, le ministre consulte non seulement les institutions financières créées aux termes du projet de loi, mais également les premières nations et leurs leaders, avant de procéder à des changements.
J'incite le gouvernement, qui doit assumer la responsabilité fiduciaire de la Couronne, à respecter les tribus et les premières nations visées par une proclamation royale. Ces nations méritent notre respect.
M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.): Monsieur le Président, le moins qu'on puisse dire au sujet du projet de loi est que, depuis le tout début, il a constamment soulevé la controverse et l'opposition constante et profonde d'une majorité de premières nations. Aussi, j'appuie fermement la motion présentée par le député de Churchill River, qui propose de renvoyer le projet de loi C-23 au comité pour y faire l'objet d'un réexamen et de nouvelles audiences. Je suis bien conscient que vous avez statué, monsieur le Président, que la motion, dans sa forme actuelle, n'est pas recevable. Vous avez également ouvert la voie à une autre procédure qui aboutirait au même résultat, à savoir le renvoi du projet de loi au comité en vue de nouvelles audiences et consultations.
Il m'apparaît évident que l'opposition systématique d'une forte majorité de premières nations au projet de loi a été aggravée par ce que les premières nations ont considéré, à juste titre, comme des consultations inadéquates.
J'ai suivi le débat sur le projet de loi. J'ai constaté avec plaisir l'ouverture d'esprit dont a fait preuve mon collègue, le député du Yukon, qui a évidemment appuyé le projet de loi puisqu'il est secrétaire parlementaire. Par ailleurs, il a démontré un certain sens de l'équité et de l'ouverture en acceptant d'entendre les arguments des tenants des deux camps. C'est la raison pour laquelle le député de Churchill River et moi-même présentons un point de vue différent.
Nous devrions peut-être tous faire preuve d'ouverture, nous montrer conciliants et réceptifs aux voix qui se sont fait entendre à l'encontre du projet de loi et le renvoyer au comité pour qu'il le réexamine. Nous ne perdrions rien à faire ce qui est juste et indiqué.
La Cour suprême du Canada, dans des arrêts importants comme Sparrow et Delgamuukw, a dit clairement que les premières nations ont droit à des consultations complètes et raisonnables quand est présenté un projet de loi qui influera vraisemblablement sur leurs droits. C'est, de toute évidence, le cas du projet de loi à l'étude. Dans des cas spéciaux, le consentement des premières nations peut être requis, et s'il n'y a pas eu suffisamment de consultations, la loi peut être jugée invalide. C'est ce que l'Assemblée des premières nations, dans plusieurs résolutions, et de nombreuses premières nations agissant en leur propre nom soutiennent depuis le début.
S'il entre en vigueur, le projet de loi C-23 sera immanquablement contesté devant les tribunaux. Il est tout à fait vraisemblable que la loi sera jugée inconstitutionnelle, parce qu'on ne se sera pas conformé aux normes de consultation établies par la Cour suprême dans de nombreux arrêts faisant jurisprudence.
De récentes initiatives prises par le premier ministre et le gouvernement permettent d'espérer l'avènement d'un nouveau climat de confiance mutuelle et de compréhension entre le gouvernement et les premières nations.
Malheureusement, le projet de loi C-23 va à contresens du nouvel esprit d'espoir, de dialogue véritable et de compréhension dans nos rapports avec les premières nations. Il ressort comme un irritant majeur par rapport à un contexte récent d'espoir renouvelé pour nos premières nations, encouragées par les déclarations et les initiatives récentes de notre premier ministre, que je qualifierais de courageuses.
Lorsque le projet de loi a été brièvement soumis au Comité permanent des affaires autochtones, du développement du Grand Nord et des ressources naturelle en 2003, le comité a entendu le témoignage de M. Fred Lazar, économiste auprès de la Schulich School of Business de l'Université York, à Toronto. M. Lazar a manifesté son opposition catégorique au projet de loi C-19, désormais le C-23, déclarant:
Par conséquent, l'imposition, la délégation des responsabilités et le contrôle qui constituent l'essence de ce projet de loi sont réunis dans la conception restreinte et erronée sur le plan historique et sur le plan juridique qu'a le gouvernement de l'autonomie gouvernementale des Autochtones |
M. Lazar a fait valoir que, si les autochtones recevaient leur juste part des revenus liés aux ressources, la situation s'améliorerait grandement.
J'agis pour ma part depuis plusieurs années comme bénévole, comme ami et, depuis deux ans, comme représentant spécial d'une bande algonquine établie à proximité. En 1991, il y a 13 ans, la bande a signé une entente trilatérale avec le gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec concernant la gestion intégrée des ressources situées sur ses terres.
L'entente trilatérale résulte du fait que, un bon jour, des sociétés forestières ont commencé, en conformité du mandat de gestion que leur avait confié le gouvernement du Québec, à abattre des arbres à grande échelle sur les territoires que la bande et ses ancêtres occupaient depuis des milliers d'années. Les membres de la bande se sont alors révoltés, ils ont bloqué les routes, pour finalement imposer l'entente trilatérale, en faisant valoir que, selon le rapport Brundtland, la notion de développement durable était avalisée par tous nos gouvernements.
L'accord trilatéral est considéré par la Commission royale sur les peuples autochtones et même les Nations Unies comme un accord historique. Douze ans se sont écoulés depuis sa présentation, et nous nous demandons toujours si les ressources devraient être partagées ou non. Nous nous demandons toujours où les premières nations trouveront les ressources, au moyen de subventions, pour réparer leurs écoles, construire des logements adéquats, dont elles ont désespérément besoin, et recueillir des recettes sans avoir à quémander aux gouvernements ce que nous tenons pour acquis dans nos vies: le droit de chacun à un niveau de vie décent, à une qualité de vie, à l'éducation et à des soins de santé adéquats.
Où trouvent-elles ces ressources? Si elles sont sur leur propre territoire, elles n'ont pas droit à une part de ces ressources, qui sont les leurs en vertu des traités. C'est de cela qu'il s'agit en fait dans ce projet de loi.
Le Dr Lazar a dit, à juste titre:
Les premières nations croyaient qu'en vertu des engagements oraux des deux parties les terres seraient partagées entre les deux groupes de sorte que les deux pourraient vivre et prospérer ensemble. |
Cela signifie que les premières nations auraient dû recevoir au moins la moitié des recettes et de la richesse tirées du territoire et des ressources de ce dernier. Elles n'ont même pas demandé la moitié, mais seulement une part. Dans le cas d'une première nation que je connais bien, les Algonquins du lac Barrière, ceux-ci se contenteraient de toute part des recettes tirées de leur territoire. Ils se contenteraient d'exercer un contrôle sur une partie de leurs ressources pour que personne n'en abuse, tant du point de vue écologique que de leur durabilité à long terme.
Le Dr Lazar a demandé à savoir si le projet de loi donnerait aux premières nations accès aux marchés des capitaux, comme c'est le cas pour les autres gouvernements.
Le gouvernement fédéral considère la cession des recettes fiscales et d'autres revenus à long terme aux premières nations comme un moyen pour ces dernières de se doter d'une solide infrastructure dans les réserves. Nul doute que des investissements importants sont nécessaires pour améliorer l'infrastructure des réserves, mais il incombe toujours au gouvernement fédéral de financer pleinement ces coûts. Ce que nous demandons au gouvernement fédéral, ce n'est pas qu'il accorde pour toujours des subventions, mais qu'il donne aux premières nations une partie de leurs propres ressources, qui sont les leurs par traité.
Le projet de loi proposé met en lumière le contrôle qui peut être exercé sur presque toutes les affaires financières d'une réserve. Il semble receler un cheval de Troie permettant aux institutions indépendantes qu'il créerait de finir par régir toutes les dépenses d'une réserve.
Permettez-moi de citer le chef Stewart Phillip, président de l'Union of British Columbia Indian Chiefs. Il a affirmé au comité que 60 premières nations appartenant à son organisation s'opposaient à ce projet de loi. Il est lui-même le chef de la bande indienne de Penticton, appartenant à la nation Okanagan.
L'Union of British Columbia Indian Chiefs est l'organisation politique la plus ancienne de cette province. Le chef Phillip a déclaré au comité que le projet de loi C-23 ne répondait pas aux conditions formulées dans diverses résolutions de l'APN--et qui ont été adoptées--, selon lesquelles le projet de loi est insatisfaisant. J'ai en main un ensemble de ces résolutions adoptées sur une période d'une année, à diverses reprises à Ottawa, en Colombie-Britannique et ailleurs au pays, répétant sans cesse que ce projet de loi est défectueux, qu'il n'a pas fait l'objet de consultations adéquates et qu'il devrait être réexaminé ou alors rejeté.
En fait, une réunion spéciale de l'APN a été tenue en novembre 2002, il y a deux ans de cela, afin que les chefs présents prennent une décision à propos du projet de loi sur la gestion financière et statistique des premières nations. L'APN a rejeté le projet de loi C-23 dans sa totalité. Je cite à nouveau le chef Phillip:
Pour ce qui est du contenu du projet de loi C-19, notre point de vue est qu'aucune mesure législative, en particulier nationale, n'est nécessaire pour que ces quatre institutions fonctionnent. |
La Commission consultative de la fiscalité indienne tout comme les autres commissions existent et fonctionnent déjà, à notre connaissance. |
Je suis fermement convaincu que le chef Phillip et son organisation expriment le point de vue de la très grande majorité des premières nations et que sa recommandation est bien exprimée par la motion tout à fait justifiée de mon collègue de Churchill River. J'espère trouver un moyen quelconque pour faire mettre en oeuvre le contenu de sa motion.
Permettez-moi maintenant de revoir certaines modifications prévues dans le projet de loi qui, selon ses défenseurs, justifient qu'on l'appuie. La nouvelle annexe du projet de loi donne l'impression que trois des institutions prévues dans le projet de loi, sauf l'institut de la statistique, à la partie 5, sont optionnelles et, partant, ne porteraient pas préjudice aux premières nations qui décident de ne pas adhérer.
Outre l'information trompeuse selon laquelle le projet de loi reçoit l'appui des premières nations, on insiste pour dire que la prétendue disposition d'adhésion est une autre mesure importante qui milite en faveur de l'adoption du projet de loi. Le message implicite, c'est que, même si le projet de loi ne plaît pas à la plupart des premières nations, elles ne devraient pas mettre des bâtons dans les roues de celles qui décident d'y adhérer.
Cela est clairement trompeur.
Premièrement, la disposition d'adhésion présentée dans la modification de l'annexe ne vise pas l'institut de la statistique prévu dans la partie 5. Cette partie est imposée à toutes les premières nations ou bandes du Canada, que leur nom soit ajouté ou non à l'annexe. Cela est manifestement injuste pour la grande majorité des premières nations qui s'opposent au projet de loi. Il convient de noter que, aux termes de l'article 105 du projet de loi, l'institut désigné par le gouvernement fédéral peut recueillir et utiliser indéfiniment les renseignements les plus confidentiels au sujet de toutes les bandes du Canada, sans leur consentement.
Qu'en est-il des trois autres institutions: la commission de la fiscalité, le conseil de gestion et l'administration financière? Encore une fois, la prétendue disposition d'adhésion concernant ces trois institutions est considérablement trompeuse. En fait, ces organismes nationaux créés en vertu d'une loi fédérale auront des répercussions sur les droits et les intérêts de toutes les premières nations du Canada, que leur nom soit ajouté ou non à l'annexe. En effet, ces importantes institutions nationales seront contrôlées pendant longtemps, voire à jamais, par un petit nombre de premières nations qui appuient fortement le projet de loi C-23 et qui se rangent du côté du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien.
La commission de la fiscalité, organisme désigné par le gouvernement fédéral, deviendra le surveillant de tous les arrêtés ou de toutes les lois d'imposition foncière dans les réserves. Si le projet de loi est adopté, toutes les premières nations du Canada qui voudront élaborer des lois et des régimes d'imposition foncière dans les réserves devront demander l'approbation de cette commission désignée par le gouvernement fédéral. Toutes ces premières nations devront soumettre leurs budgets annuels d'imposition foncière à l'approbation de la commission, conformément à l'article 9. Cela se répercutera assurément sur les droits et les intérêts de toutes les premières nations, ce qui démentit l'argument au sujet de la disposition d'adhésion.
L'article 13.1, portant sur un amendement au projet de loi C-23 déposé par le ministre, peut laisser croire que les dispositions actuelles de la Loi sur les Indiens en matière d'imposition foncière, soit les articles 83 et 84, continueront de s'appliquer dans les collectivités qui ne sont pas inscrites à la commission de la fiscalité. Toutefois, je suis loin d'être certain que l'on maintiendra deux systèmes parallèles pendant longtemps si le projet de loi C-23 est adopté.
Il est peu probable que l'on permette aux collectivités de continuer pendant longtemps de fonctionner en vertu du régime de la Loi sur les Indiens alors qu'une nouvelle commission de la fiscalité sera chargée de gérer le tout nouvel instrument adopté par le gouvernement fédéral.
La disposition qui gêne peut-être le plus les premières nations qui s'opposent au projet de loi C-23 est peut-être celle qui porte sur le conseil de gestion. Aux termes de l'article 8 du projet de loi, les collectivités qui n'adhèrent pas au projet de loi C-23 ne sont pas autorisées à faire des lois ou des règlements dans le domaine important de l'administration financière.
Ainsi, les collectivités qui décident ne pas participer seront restreintes aux quelques domaines prévus au paragraphe 81(1) de la Loi sur les Indiens, ce qui n'inclut pas l'administration financière qui se trouve à la base même de tout gouvernement local. Autrement dit, les premières nations qui décident de ne pas participer perdent ainsi un secteur important de compétence locale, soit celui de l'administration financière.
J'ai parlé plus tôt des aspects constitutionnels du projet de loi qui risquent de mener à des contestations judiciaires. Il est évident que le principal problème à ce niveau a trait au droit inhérent des premières nations à l'autonomie gouvernementale, prévu à l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. Les pouvoirs conférés à la commission de la fiscalité et au conseil de gestion en vertu du projet de loi C-23 s'opposent directement au droit inhérent à l'autonomie gouvernementale protégé par la Constitution que toutes les premières nations considèrent comme la pierre s'assise de leurs droits fondamentaux à titre de premiers peuples de notre pays.
Les défenseurs du projet de loi feront valoir que la mise en place récente d'une disposition de non-dérogation relative à l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 protégera pleinement les droits constitutionnels des premières nations. Toutefois, le risque important demeure que le projet de loi puisse porter atteinte au devoir fiduciaire du Canada de tenir des consultations appropriées aux termes de l'article 35, ce qui, d'après ce que soutient la majorité des premières nations, n'a pas eu lieu, ainsi qu'à la protection contre la discrimination en vertu de l'article 15 de la charte et, ce qui est le plus important, au droit inhérent à l'autonomie gouvernementale de toutes les premières nations, droit protégé par la Constitution.
Je considère que la motion de mon collègue de Churchill River—ou un texte de remplacement qu'il négocie actuellement avec le Bureau—est équitable et éminemment sensé dans les circonstances. La motion vise à remplacer la controverse et l'opposition constante par la consultation, l'équité et la conciliation. Je tiens à exprimer mon appui sans réserve à sa teneur.
Pendant le temps qui m'est accordé, je voudrais lancer aux deux côtés de la Chambre un appel à l'équité et à la conciliation. À n'en pas douter, toutes ces premières nations qui s'opposent au projet de loi C-23--et il y en a des centaines qui s'expriment dans les résolutions que j'ai lues, une grande majorité d'entre elles--représentent une voix que nous ne saurions ignorer. À n'en pas douter, elles ont le droit d'exprimer leur position et, à n'en pas douter aussi, elles sentent sûrement dans leur coeur qu'il y a quelque chose qui ne va pas dans ce projet de loi.
Qui sommes-nous ici pour décider pour elles au sujet de mesures qu'elles-mêmes n'acceptent pas ou auxquelles elles ne souscrivent pas? Qui sommes-nous ici pour dire pour dire que c'est qui savons le mieux ce qui est bon pour elles alors qu'elles nous disent que cela ne leur suffit pas? Qui sommes nous dicter et légiférer lorsque cette position existe?
Je recommande vigoureusement que nous soutenions très activement la teneur de la motion de mon collègue de Churchill River et que nous renvoyions ce projet de loi au comité. Nous devons prendre le temps de produire un meilleur projet de loi, un projet de loi qui soit acceptable pour les populations le plus directement concernées, les premières nations du Canada.
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, je tiens à remercier le député de Lac-Saint-Louis pour un discours plein de discernement et de sensibilité sur un projet de loi très controversé. J'apprécie sa perspicacité. De par son ton et sa teneur, son discours est probablement le meilleur qu'il m'est été donné d'entendre sur le sujet à la Chambre des communes depuis le début du débat sur ce projet de loi controversé.
Vu que la très vaste majorité des premières nations dénoncent haut et fort le projet de loi, j'aimerais qu'il approfondisse la réflexion avec laquelle il nous a laissés. N'est-ce pas le summum de l'arrogance coloniale que d'imposer notre volonté en ce qui concerne la structure de gouvernance des premières nations alors qu'elles ont étudié le projet de loi et qu'elles l'ont rejeté de manière catégorique?
Sur les 633 premières nations que compte l'Assemblée des Premières Nations, seules une trentaine appuient le projet de loi. Les députés qui sont intervenus au nom du gouvernement ont dit qu'il y en avait jusqu'à une centaine, mais ils incluent dans ce chiffre toutes celles qui ont indiqué un intérêt pour certains aspects du projet de loi. Celles qui appuient activement le projet de loi et qui en font la promotion ne sont pas plus de 30, pour la majorité concentrées en Colombie-Britannique, et elles ont leur propre raison légitime pour appuyer certains aspects du projet de loi.
J'aimerais également demander au député de commenter l'aspect facultatif du projet de loi. Selon moi, selon nous, dire que le projet de loi est facultatif est la même chose que dire que le permis de conduire est facultatif. Il est facultatif jusqu'au jour où on veut conduire une voiture et tout d'un coup on doit avoir un permis.
Mon collègue a parlé spécifiquement du conseil de gestion financière. Les premières nations qui n'adhéreront pas au projet de loi, qui ne seront pas inscrites à l'annexe énumérant les premières nations participantes, n'auront pas le droit de se doter de règlements concernant ces questions. Si elles veulent se doter de règlements en matière d'administration financière qui dépassent les paramètres actuels de la Loi sur les Indiens, elles doivent adhérer à cette conception particulière du conseil de gestion financière. Comment peut-on dire que c'est facultatif? Ça ne l'est pas. C'est obligatoire si elles veulent faire ces choses.
La dernière question que j'aimerais qu'il commente est celle de la crainte, à mon avis, légitime, que la cogestion et la gestion par un tiers ne deviennent l'une des fonctions du conseil. Ainsi, lorsque le gouvernement mettra une bande sous tutelle pour avoir trop dépensé ou pour avoir essayé de répondre aux besoins de base des siens avec les ressources financières insuffisantes dont elle dispose, quand le gouvernement lui imposera un administrateur tiers, cette fonction sera confiée au conseil de gestion nommé par le gouvernement et qui est un instrument du gouvernement.
J'aimerais que mon collègue en dise plus long sur toutes ces questions.
M. Clifford Lincoln: Je tiens à remercier mon collègue pour ses observations. Sa bataille au nom des peuples autochtones est constante et très sincère. J'estime qu'en exprimant son point de vue de façon aussi passionnée et franche, le député contribue grandement au débat.
J'ai l'impression, à la Chambre, que tout n'est pas noir ou blanc. C'est également l'impression que j'ai au sein de notre propre parti. Si l'on considère que je peux me lever à la Chambre et prendre position sur une mesure proposée par mon propre gouvernement, que mon collègue de Churchill River a fait de même et que le secrétaire parlementaire du Yukon en a discuté ouvertement avec moi à l'extérieur de la Chambre, j'estime qu'il s'agit d'un processus très constructif pour nous tous.
Je suis d'accord avec mon collègue du NPD. Il y a longtemps qu'on ne peut plus imposer de mesures aux autres, en particulier aux premières nations. En fait, ces dernières devraient nous dire que ce sont elles qui étaient propriétaires de ces terres et qui le sont toujours. Elles devraient nous dire ce qu'elles veulent, et non pas nous laisser leur dicter ce qui est bon pour elles.
Voici, selon moi, pourquoi le projet de loi comporte des lacunes: il vise à imposer des mesures auxquelles la grande majorité, que ce soit 550, 450 ou 490 collectivités autochtones, s'opposent.
Je reprends l'argument de mon collègue disant qu'une fois que nous aurons légiféré au sujet de ces institutions et qu'elles seront légalisées, dirons-nous dans 5 ou 10 ans à ceux qui n'adhèrent pas que la clause d'adhésion est une réalité et qu'elle est importante? Bien sûr que non. Lorsque ces institutions auront tout leur personnel et tous les pouvoirs administratifs, la pression exercée sur les nations qui n'ont pas adhéré sera intenable. Elles vont adhérer ou pas au système.
C'est pourquoi j'ai fait remarquer dans mon discours que je trouve irréaliste le fait de dire qu'elles seront autorisées dans certains cas à invoquer la Loi sur les Indiens pour mettre en oeuvre un système parallèle. Quand les conseils d'administration seront créées, dotées de personnel et de fonds, les pressions sur les nations qui n'ont pas adhéré seront tellement fortes qu'elles resteront à l'écart du système. Les décisions seront prises malgré elles, contre elles et contre l'opposition et elles devront se conformer ou la loi devra être modifiée.
Il me semble que cette constante opposition, qui a commencé dès la présentation du premier projet de loi, est une indication de l'imperfection et des lacunes du projet de loi.
Si on suit l'esprit de discours récents du premier ministre, nous devrions examiner la question. Prenons quelques mois de plus ou une autre année, mais faisons les choses correctement au lieu de précipiter l'adoption du projet de loi malgré l'opposition. C'est ce que je préconise, de même que mon collègue du NPD.
Nous devrions donc ensemble à la Chambre appuyer la demande de mon collègue de Rivière Churchill.
M. Rick Laliberte (Rivière Churchill, Lib.): Monsieur le Président, un rapport récent des Nations Unies sur la Décennie internationale des populations autochtones du monde fait état d'un sommet sur les rapports fondés sur des traités entre les peuples autochtones du monde entier et des pays membres des Nations Unies.
Le projet de loi ne renvoie à aucun des traités qui ont créé ce pays. Le Canada a adopté une politique de gouvernement autonome. Celle-ci ne renvoie à aucun élément de l'article 35, qui traite des droits ancestraux ou issus de traités et des privilèges des premières nations. Le député peut-il formuler des commentaire à ce sujet?
Le projet de loi gagnerait à être examiné de nouveau et il serait peut-être mieux fondé s'il renvoyait aux traités initiaux et aux premières nations en tant que véritables nations sur ce territoire plutôt qu'en tant que conseils de bande aux termes de la Loi sur les Indiens ou de la politique gouvernementale tout simplement. Ce rapport devrait peut-être reposer sur les traités. Ce serait peut-être la façon appropriée d'aborder le projet de loi.
M. Clifford Lincoln: Monsieur le Président, mon collègue de Churchill River exprime un sentiment que je partage profondément, à savoir que les premières nations ont une place particulière dans notre histoire, dans notre nation et dans notre mode de vie. Les droits protégés en vertu de l'article 35 le sont pour une bonne raison. Cet article protège tous ces traités et tous les droits inhérents à l'autonomie gouvernementale qui sont enchâssés non seulement dans notre Constitution, mais dans les rapports historiques avec les premières nations. On ne saurait les mettre de côté un peu au hasard par le truchement de quelque pages de mesures législatives et dire qu'on a décidé de ce qui était mieux pour les autochtones.
C'est vraiment d'où le bloc d'opposition vient, y compris de la majorité des premières nations qui estiment que l'on ne peut mettre de côté tous ces droits inhérents reconnus par les traités. Par exemple, il y a une entente trilatérale signée entre les Algonquins du lac Barrière à titre de peuple souverain, le gouvernement du Québec et le gouvernement fédéral. Treize ans après la signature de cette entente, le Québec s'est retiré de façon unilatérale pour revenir lorsqu'il a réalisé qu'il avait agi en dehors de sa compétence.
Aujourd'hui le gouvernement fédéral est pratiquement absent de cette entente parce qu'il a décidé que les Algonquins étaient trop ennuyeux et trop embarrassants. On revient sans cesse sur la question du partage des ressources alors que 13 années se sont écoulées et qu'on n'a pas encore réglé la question des droits des autochtones à l'égard de leurs propres ressources sur leurs propres terre, de manière à ce qu'ils puissent vivre dans la dignité et le respect de soi et qu'ils puissent être fiers d'utiliser ces ressources comme ils l'entendent.
Voilà pourquoi la question soulevée par mon collègue de Churchill River est pertinente et qu'elle devrait être couverte par le projet de loi.
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, je suis heureuse de participer au débat sur le projet de loi C-23 et de prendre la parole après le député de Lac-Saint-Louis, qui a expliqué avec passion, compassion et force pourquoi nous devons étudier plus en profondeur ce projet de loi.
Je tiens à féliciter et à remercier le député de Lac-Saint-Louis de ses années de service ici. Il laisse un héritage qui sera une source d'inspiration pour nous tous, et je lui souhaite la meilleure des chances dans ses projets futurs.
Avec des arguments puissants et clairement exprimés, le député de Lac-Saint-Louis nous a expliqué qu'il faut faire une pause, prendre un moment de réflexion et étudier davantage le projet de loi dont nous sommes saisis. C'est un conseil très sage au sujet de ce projet de loi qui traite directement de nos relations avec les collectivités des premières nations.
À la lumière des observations formulées par les députés d'en face, je sens qu'il y a un bon nombre de libéraux qui ont des réserves par rapport au projet de loi C-23. J'espère que le gouvernement prendra au sérieux les opinions des députés libéraux d'arrière-ban avant de décider de faire franchir toutes les étapes à ce projet de loi.
Il me semble que voilà un exemple parfait du traitement réservé au problème du déficit démocratique à cet endroit. Si le premier ministre est sérieux lorsqu'il dit vouloir accorder davantage de pouvoirs aux députés d'arrière-ban, accroître le rôle des parlementaires et faire en sorte que les décisions prises à la Chambre soient fondées sur les meilleurs conseils possibles, conseils qui tiennent compte de facteurs externes--en l'occurrence, les relations avec nos collectivités des premières nations--le premier ministre dispose donc aujourd'hui de tout ce qu'il faut pour reconnaître la légitimité de reporter l'adoption du projet de loi.
Le premier ministre écoute-t-il ses députés d'arrière-ban ou a-t-il imposé une discipline de parti formelle à l'égard de ce projet de loi? Impose-t-il une discipline de parti formelle ou laisse-t-il un peu de latitude à ses députés? Comment le premier ministre tient-il compte des réserves des députés libéraux au sujet de ce projet de loi? S'il voulait vraiment régler le problème du déficit démocratique, il réagirait prochainement en ce qui concerne ce projet de loi et il déciderait de le retirer de l'ordre du jour et de le renvoyer au comité.
M. Pat Martin: C'est la seule chose sensée à faire.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Comme mon collègue de Winnipeg-Centre vient de le dire, c'est la seule chose sensée à faire. Il est bien placé pour le savoir. En tant que porte-parole du Nouveau Parti démocratique en matière d'affaires autochtones, il a travaillé sans relâche dans ce dossier et sur d'autres questions touchant à nos collectivités autochtones.
Il a consulté des collectivités autochtones de toutes les régions du pays. Après leur avoir demandé conseils et avoir recueilli leur point de vue, il a transmis à notre caucus et au Parlement le message que lui avaient livré la vaste majorité des collectivités autochtones: «Ne vous empressez pas d'adopter ce projet de loi, bon sang. Il est boiteux. Il nuira à nos relations.» Il nous fera régresser au moment où nous devons faire front commun pour corriger, une fois pour toutes, les torts que nous avons eus par le passé envers nos premières nations et qui ont de quoi faire rougir le Canada, l'un des plus riches pays au monde.
Que ce soit pour s'attaquer au déficit démocratique à la Chambre ou pour atténuer le désenchantement des Canadiens par rapport au processus parlementaire, le premier ministre n'a qu'un seul choix. Il devrait retarder l'adoption du projet de loi pour le soumettre à un examen plus poussé. Loin de concéder la victoire, il ne ferait qu'admettre que le projet de loi renferme de graves lacunes. Les premières nations ont exprimé de grandes réserves dont il faut tenir compte.
C'est absolument essentiel. C'est ainsi qu'il faut agir si nous voulons bâtir les partenariats dont nous avons besoin avec nos collectivités autochtones et corriger une fois pour toutes les iniquités sociales et économiques qui sont systémiques et profondément ancrées.
C'est le type de réponse qui est tout à fait nécessaire si nous voulons prendre au sérieux les observations bien documentées et impartiales des observateurs des Nations Unies voulant que les membres des premières nations au Canada vivent dans des conditions dignes du tiers monde. Si nous voulons laisser un héritage et trouver enfin une solution aux conditions de vie et de travail déplorables dans lesquelles se trouvent les membres des premières nations, le premier ministre va alors faire ce qui s'impose et renvoyer le projet de loi au comité au cours de la prochaine législature.
Pourquoi adopter à toute vapeur ce projet de loi à la Chambre quelques jours avant l'ajournement du Parlement pour les vacances ou à la suite du déclenchement d'élections? Pourquoi voulons-nous imposer au nouveau Parlement un projet de loi qui est loin d'être parfait? Pourquoi voudrions-nous léguer au nouveau Parlement une rupture des relations entre le Parlement et les membres des premières nations? Pourquoi ne voudrions-nous pas laisser la question en suspens, effectuer d'autres études, bâtir une chose qui reflète ces préoccupations et tenir compte des besoins de tous ceux qui sont concernés par cet important partenariat?
Le député de Lac-Saint-Louis, notre collègue de Winnipeg-Centre et d'autres ont montré clairement à quel point les premières nations s'opposent à ce projet de loi. Il est clair que la grande majorité des plus de 600 communautés autochtones du pays s'opposent avec véhémence au projet de loi C-23. N'est-ce pas suffisant pour amener le gouvernement à y penser à deux fois? Pourquoi aller de l'avant si plus de 50 p. 100 des intéressés ont de vives préoccupations au sujet du projet de loi?
L'association regroupant les communautés autochtones, l'Assemblée des Premières Nations, a réclamé le retrait du projet de loi au profit d'une mesure législative qui ne s'appliquerait qu'aux premières nations qui veulent participer aux institutions. L'APN a déclaré que le projet de loi devait renfermer une disposition de non-dérogation qui garantirait qu'il ne toucherait pas les droits ancestraux ou issus de traités. Le projet de loi a besoin d'une disposition beaucoup plus claire sur la capacité des premières nations d'adhérer à la loi ou de se soustraire à son application.
Les députés dans cette enceinte savent à quel point la relation entre le gouvernement et les premières nations est fragile. Nous savons à quel point les communautés autochtones ont vraiment le sentiment d'avoir été trahies par les gouvernements au fil des siècles. Nous avons une occasion aujourd'hui de changer cela. Il nous est possible de faire une différence en écoutant leurs voix. Nous sommes en mesure de faire mieux. Écoutons les préoccupations des communautés autochtones.
Je pourrais discourir pendant longtemps des problèmes que pose le projet de loi et faire état de la réaction de chacune des premières nations à l'égard de ses différents aspects, mais mon collègue de Winnipeg-Centre, le député de Lac-Saint-Louis et bien d'autres s'en sont déjà chargés.
Au cours des quelques minutes qui me restent, je tiens simplement à répéter un plaidoyer présenté à maintes reprises dans cette enceinte. Rien ne justifie l'adoption à toute vapeur du projet de loi C-23. La modification de l'ensemble de la gestion financière et statistique des premières nations ne fonctionnera que s'il y a collaboration. La collaboration repose sur le partenariat et sur l'écoute mutuelle. Il est possible d'y arriver en respectant le droit des premières nations à l'autonomie gouvernementale et en établissant avec elles une collaboration de nation à nation.
L'adoption d'une approche descendante avec les collectivités autochtones va totalement à l'encontre de ce partenariat. C'est un rejet total d'une relation de nation à nation. L'adoption de ce projet de loi à toute vapeur fera plus de tort que de bien. Il nous ramènera plus loin en arrière quant à ce qu'il faut faire.
Permettez-moi de conclure simplement en disant que mes collègues du Nouveau Parti démocratique et moi ainsi qu'un nombre croissant de députés libéraux estiment que le projet de loi C-23 comporte des lacunes. Ce n'est pas une mesure législative judicieuse parce qu'elle donne trop de pouvoir discrétionnaire au ministre et nie la nécessité d'établir une relation de consultation et d'écoute avec les collectivités autochtones.
Le gouvernement ne devrait pas essayer de faire adopter ce projet de loi à toute vapeur, quelques jours à peine avant la fin de la législature, juste au moment où des élections sont sur le point d'être déclenchées. Il serait sage d'attendre, de renvoyer le projet de loi aux députés qui siégeront au nouveau Comité des affaires autochtones de la Chambre, à la reprise des travaux, au début de la nouvelle législature, et de laisser un délai entre la présentation du projet de loi et la communication des préoccupations qu'il suscite. Il ne serait que juste de se réunir de nouveau et, cette fois, de prendre en compte entièrement les besoins et les préoccupations des premières nations du Canada.
L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je remercie la députée de son discours. Essentiellement, je n'ai aucune objection quant au caractère général de son intervention. Cependant, au début de son discours, elle a mentionné de sérieux problèmes dans le projet de loi. Pourrait-elle donner plus de détails sur ces problèmes?
Contrairement à ce qu'elle a laissé entendre, ce projet de loi n'a pas été imposé aux premières nations, comme selon moi toutes les personnes qui y ont collaboré le réalisent. Ce sont les premières nations qui l'ont proposé au gouvernement. Comme le premier ministre l'a dit, nous recherchons des solutions qui proviennent des premières nations. Nous essayons de travailler à partir de suggestions que nous avons reçues et nous les réalisons.
Je ne pense pas qu'il y ait de manoeuvre pour le faire adopter à toute vitesse. Nous parlons de cette question depuis les années 1990, lorsque nous avons reçu les premières propositions. Le projet de loi a donné lieu à beaucoup de discussions et à beaucoup de réactions. Il a subi un grand nombre de modifications, et il a dûment été donné suite aux réactions. Je n'arrive pas à percevoir une intention d'en précipiter l'adoption.
À l'instar du député du Lac-Saint-Louis, nous avons actuellement un débat très productif et nous essayons d'examiner les questions et les problèmes. Je ne sais pas combien de députés encore prendront la parole sur le projet de loi, mais je pense qu'il y en aura un certain nombre. Je ne vois pas du tout comment nous pourrions l'adopter à la hâte.
J'essaie actuellement de cerner et d'approfondir certains des problèmes que la députée pourrait signaler, en plus de ceux que j'ai notés pendant l'excellente intervention du député de Lac-Saint-Louis.
Pendant qu'il est ici, j'aimerais lui rendre hommage, comme mes collègues, à l'occasion de son dernier mandat à la Chambre. J'ai toujours eu beaucoup de respect pour lui et j'ai écouté attentivement ses interventions. Il a prononcé des discours fantastiques devant la Chambre de communes et il laissera un héritage bien concret au Parlement du Canada. Je lui rends honneur pour toutes ses initiatives à la Chambre.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Monsieur le Président, je suis heureuse de pouvoir soulever quelques préoccupations particulières concernant le projet de loi. D'abord, d'après notre analyse, le projet de loi C-23 ne semble pas vraiment différent du projet de loi C-19, qui a fait l'objet de discussions et de nombreuses suggestions. On a recommandé que des changements draconiens soient apportés à ce projet de loi afin de le rendre acceptable à l'égard de la communauté des premières nations et conforme à la définition d'une bonne politique gouvernementale.
Je ferai remarquer au député qu'à moins de me tromper, l'idée de l'intégration des quatre institutions financières et statistiques à la loi fédérale a été examinée par l'APN lors de son assemblée annuelle à Halifax en 2001. On a beaucoup discuté de la question, mais elle n'a pas obtenu le niveau d'appui de 60 p. 100 exigé aux termes de la charte de l'APN. Nous sommes encore loin d'obtenir l'appui unanime de la communauté des premières nations à l'égard de projet de loi.
Je n'aurai pas le temps de me pencher sur tous les détails, mais j'aimerais tout de même soulever certaines des principales préoccupations. Ce sont des points que j'ai tirés des documents des chefs ontariens et que le député doit sans doute connaître. On y souligne que l'élément le plus troublant et le plus arbitraire du projet de loi C-23 est directement lié au Conseil de gestion financière, dont il est question à l'article 8 du projet de loi, comme le député le sait bien.
Les collectivités qui ne souscriront pas volontairement aux dispositions de l'annexe du projet de loi C-23 n'auront pas le droit d'adopter de règlement ou de loi portant sur cet aspect essentiel de leur gestion financière. Ces collectivités seront restreintes à la courte liste des thèmes de règlement prévus au paragraphe 81(1) de la Loi sur les Indiens. L'administration financière n'en fait pas partie. C'est l'un des points soulevés. Puis, on souligne également que certaines des mesures draconiennes que l'on trouve dans le projet de loi C-23 visent à soutenir la solvabilité de l'administration créée aux termes du projet de loi, presque à n'importe quel prix, semble-t-il.
J'aimerais reprendre une partie du texte du document fourni aux chefs ontariens, dans lequel on peut lire que les premières nations risquent de se laisser séduire par ce mécanisme et de renoncer aveuglément à leur souveraineté. Un seul paiement en faute pourrait faire perdre à ce nouveau conseil de gestion le contrôle des affaires financières locales.
Ce sont là deux préoccupations d'importance. Le principal problème constitutionnel dans le dossier du projet de loi C-23, même tel qu'amendé par le texte de l'annexe, c'est l'attaque vague qu'il lance contre le droit inhérent de toutes les premières nations à l'autonomie gouvernementale.
J'aimerais revenir au premier point que j'ai soulevé quand j'ai dit que lorsque nous voulons corriger certains torts historiques ou revenir sur des faiblesses que nous avons déjà eues, nous devons le faire avec la participation et la collaboration des premières nations. S'il peut sembler que nous avons pu d'une quelconque façon contourner le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale, si on refuse de traiter d'égal à égal avec les premières nations, nous aurons failli à la tâche et nous n'aurons réussi qu'à rendre la situation encore plus pénible qu'elle ne l'est déjà.
J'espère de tout mon coeur que le député du Yukon, qui fait preuve de beaucoup de sincérité dans sa poursuite de la justice à cet égard, écoutera ceux de ses collègues qui ne tirent pas à boulets rouges sur tout le projet de loi, mais qui ont fortement insisté sur la nécessité de remettre la décision à plus tard et de soumettre à nouveau la question à un comité au cours de la prochaine législature. C'est le message qu'a transmis le député de Lac-Saint-Louis, qui a souligné que nous devrions y réfléchir davantage, que nous devrions discuter ouvertement de la question avec les premières nations et mettre au point un outil de gestion financière qui tiendrait réellement compte des besoins réels de tous les Canadiens.
M. Rick Laliberte: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Puisque l'amendement que j'ai proposé plus tôt aujourd'hui a été jugé irrecevable parce que nous discutions déjà d'un amendement, je voudrais demander à la Chambre son consentement unanime pour proposer le sous-amendement suivant.
J'aimerais que l'amendement soit amendé par l'ajout de ce qui suit après les mots « aux besoins de la majorité des premières nations »: en particulier le besoin de mener des consultations avec les chefs et les collectivités autochtones quant aux avantages et aux répercussions de la nouvelle relation financière.
Le vice-président: La Chambre consent-elle à ce que le député de Churchill River propose la motion?
Des voix: D'accord.
Une voix: Non.
L'hon. Don Boudria (Glengarry—Prescott—Russell, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux d'exprimer mon appui au projet de loi C-23, la Loi sur la gestion financière et statistique des premières nations, et de me prononcer contre la motion déposée par le député de Saint-Hyacinthe—Bagot.
[Français]
Avant d'aller plus loin, j'aimerais indiquer que j'ai écouté le discours de l'honorable député de Lac-Saint-Louis il y a quelques minutes et j'ai apprécié cette grande éloquence qu'on lui connaît bien. J'aimerais moi aussi saisir l'occasion pour le féliciter et le remercier de ses années de services envers la population de sa circonscription électorale et, bien sûr, le Canada entier ici, à la Chambre des communes.
Je me souviens de cet homme, aujourd'hui député de Lac-Saint-Louis, qui s'était présenté à une élection partielle à Chambly, je crois. J'avais alors eu l'occasion de me rendre dans sa circonscription pour l'écouter lors de son assemblée d'investiture. Malheureusement pour nous, l'honorable député n'avait pas été élu cette fois-là, mais c'était partie remise. Il est revenu plus tard et, bien sûr, il est avec nous depuis ce jour.
Toutefois, malheureusement pour nous—peut-être pas pour lui, puisqu'il aura sans doute une très belle retraite —, on n'entendra plus à la Chambre ses paroles si bien choisies, lorsque les élections seront déclenchées.
Encore une fois, j'aimerais féliciter ce député et ex-ministre du palier provincial, pour ses grands discours dont on se souviendra très longtemps, discours qui nous reviennent toujours à l'idée lorsqu'on parle du droit des individus. Chapeau à l'honorable député de Lac-Saint-Louis!
Ayant pris ces quelques minutes pour faire l'éloge inadéquate, puisqu'on pourrait parler beaucoup plus longtemps du travail du député de Lac-Saint-Louis, je m'attarderai pendant quelques minutes sur le contenu du projet de loi dont la Chambre est maintenant saisie.
Après avoir prononcé ces paroles si élogieuses et très méritées à l'endroit du député de Lac-Saint-Louis, le discours que je ferai ne concordera pas avec son point de vue à cet égard. Toutefois, cela dit quand même beaucoup de la grandeur et du respect qu'inspire l'homme, puisque lorsqu'on n'est pas d'accord avec son opinion, bien sûr on reconnaît même, en ce jour comme tous les autres jours, la grandeur de l'homme, de son oeuvre et, bien sûr, de son engagement en général envers tous ceux et celles qu'il a représentés et qu'il représentera encore pendant quelques temps ici, à la Chambre des communes.
[Traduction]
J'ai l'intention de voter en faveur du projet de loi après sa troisième lecture, lorsqu'il sera mis aux voix. Nous ignorons quand cela se produira, puisque je crois savoir qu'un bon nombre députés des deux côtés de la Chambre ont l'intention de prendre la parole en faveur du projet de loi ou contre celui-ci, ce qui est raisonnable.
Le secrétaire parlementaire a mentionné à de nombreuses occasions que le projet de loi découle d'une initiative des premières nations. Le projet de loi ne recueille peut-être pas l'appui de tous les membres des communautés autochtones, mais ce sont eux qui l'ont initié. Cela démontre, selon moi, que le gouvernement est déterminé à respecter ses engagements envers les premières nations et les autochtones.
Monsieur le Président, on se souviendra que dans le dernier discours du Trône, le gouvernement a réitéré son engagement à s'attaquer à la tâche difficile mais essentielle de renouveler ses relations avec les premières nations. Il a promis de s'engager dans une nouvelle approche de collaboration avec les dirigeants autochtones. Il a aussi promis de réanimer les relations sur une base d'équité, de confiance et de respect mutuel.
Le gouvernement a également fait connaître l'importance prioritaire qu'il souhaitait accorder au développement économique des collectivités des premières nations et à la réduction des écarts de niveaux de vie entre autochtones et non-autochtones, ce à quoi tous ceux qui sont ici devraient souscrire. C'est le cas, je crois, tout comme ce l'est généralement pour tous les Canadiens. Je crois en effet que tous les Canadiens qui ont le coeur à la bonne place souhaitent voir nos premiers citoyens, nos frères et soeurs des premières nations du Canada, améliorer leur niveau de vie
Plusieurs initiatives importantes ont permis d'établir les bases solides du progrès économique des premières nations. J'en donne quelques exemples aux députés. On a négocié des revendications territoriales. On a signé des accords d'autonomie gouvernementale. Ensemble, les dirigeants des premières nations et le gouvernement fédéral ont pris des mesures pour soutenir les entrepreneurs des premières nations, pour attirer des investissements et pour créer des emplois dans les collectivités autochtones.
[Français]
À l'époque où j'étais ministre d'État et leader du gouvernement à la Chambre des communes, il y a eu une période où presque la majorité des projets de loi devant la Chambre des communes étaient des projets de loi traitant de nos communautés autochtones au Canada. On a vu des débats très corsés.
Je me souviens, par exemple, qu'un petit groupe de parlementaires de l'autre côté de la Chambre avait voulu faire adopter des centaines et des centaines d'amendements au projet de loi visant à reconnaître la communauté Nisga'a, en Colombie-Britannique. Il y avait des amendements aussi absurdes que de changer des points-virgules pour des virgules, ou changer des dates de mise en vigueur. Il y a eu de tels exemples des centaines de fois. Cela avait pour but de faire voter inutilement des parlementaires pendant toute la nuit à la Chambre, empêchant ainsi une entente signée entre cette communauté de la Colombie-Britannique, le gouvernement de la province de la Colombie-Britannique et le gouvernement du Canada. Bien sûr, nous avons tenu bon. Le projet de loi a été adopté.
Je me souviens du projet de loi sur la gouvernance au Yukon. Le même groupe de gens d'en face l'ont retardé. Il y avait un nombre important d'initiatives parrainées par des communautés autochtones, ou en tout cas appuyées par un grand nombre de gens de cette communauté. Encore une fois, le dossier a été freiné pendant une certaine période de temps par ceux et celles qui tentaient de retarder sa progression en cette Chambre.
Je me souviens du projet de loi sur le Nunavut. Le Nunavut, comme nous le savons tous, est bien représenté dans cette Chambre par notre collègue. Je me souviens de la grande déception de notre collègue de voir certains députés d'en face voter contre ce projet de loi qui concernait la communauté qu'elle représentait à la Chambre. Ce projet de loi reconnaissait encore la composante importante des communautés autochtones dans cette région de notre beau et grand pays. On a dû faire des efforts considérables pour contrer ces «filibusters», ces tentatives de retarder des projets de loi.
En ce qui a trait au projet de loi qui est devant nous, il y a eu des tentatives semblables. Certains députés qui ont perpétré ces gestes sont assis à la Chambre aujourd'hui. Ils ont tenté de retarder un projet de loi, même si celui-ci était appuyé par un grand nombre de personnes de la communauté autochtone. On me dira qu'il n'y avait peut-être pas les 60 p. 100 nécessaires. Toutefois, concernant le député d'en face, je me demande s'il considérerait qu'un projet de loi, qu'il appuierait lui-même et qui jouirait de l'appui de 51 p. 100 des députés de la Chambre, n'aurait aucune valeur. Bien sûr, ce serait le contraire.
S'il n'y a pas 60 p. 100, cela ne veut pas dire que l'initiative qui est devant nous n'a pas valeur de loi dans cette Chambre. Je reconnais, bien sûr, qu'en vertu des règles du Conseil des premières nations, ce critère de 60 p. 100 existe pour les dossiers sur lesquels ils veulent voter. Toutefois, prétendre en quelque sorte que cela se traduit comme étant la même chose dans cette Chambre, ce n'est pas tout à fait le cas.
[Traduction]
Ces dernières années, l'économie des premières nations a connu un essor remarquable dans certaines régions du pays. Des entreprises appartenant à des premières nations sont à l'oeuvre dans divers secteurs de l'économie canadienne à l'heure actuelle. Voilà qui est excellent et nous ne pouvons que souhaiter des progrès continus.
Bien que des facteurs d'ordre matériel comme l'amélioration des réseaux de transport et des technologies de communication aient favorisé cette évolution, j'estime que les changement d'attitudes l'expliquent également. Au cours des dernières années, on a pu voir l'esprit de collaboration prendre de l'ampleur entre autochtones et non-autochtones, dans le secteur privé comme dans le secteur public.
J'ai pour ma part bénéficié d'une occasion assez particulière un jour, lors d'un vol de retour de Québec. J'ai aperçu dans l'avion un couple dont l'accoutrement quelque peu traditionnel indiquait l'appartenance aux premières nations. Au cours de la conversation intéressante que j'ai eue avec cet homme et cette femme, j'ai appris qu'ils avaient lancé une entreprise d'informatique qui réussissait assez bien. L'optimisme de ces deux personnes fort sympathiques était palpable. J'ai d'ailleurs eu l'occasion de les rencontrer un certain nombre de fois par la suite. C'était comme une grande bouffée d'air. Je me suis pris à espérer à ce moment-là que leur réussite pouvait avoir un effet multiplicateur partout au pays de sorte que des milliers d'autres puissent connaître la prospérité, en des endroits où elle a malheureusement trop fait défaut jusqu'a maintenant.
Cela étant dit, il est également vrai que les premières nations n'ont pas toutes bénéficié de l'accroissement de la coopération. Malgré certains progrès, la situation économique et sociale de nombreuses communautés autochtones laisse encore beaucoup à désirer et j'irais même jusqu'à dire qu'elle est inacceptable. L'un des principaux architectes du projet de loi, C.T. (Manny) Jules a défini ainsi les causes profondes du problème:
Aujourd'hui, un mur entoure les économies des premières nations. Il a été édifié par les lois et les politiques antérieures. C'est un mur de méfiance et de dépendance qui nous enferme dans notre propre pauvreté. Chaque nouvelle année de dépendance ajoute une brique à ce mur. Ce mur n'a pas bien servi le Canada. Il nous a empêchés de participer à l'économie. |
[Français]
À ceux qui, en cette Chambre, disent que le projet de loi est accéléré, en quelque sorte, je dois dire que je suis en désaccord avec cette analyse, puisque le projet de loi est à l'étude depuis des années; par conséquent, il n'est pas accéléré. D'ailleurs, certains pourraient dire que le projet de loi est retardé, non pas accéléré.
Si l'on retourne aux propos de M. Jules, si l'on retarde davantage le projet de loi, ce délai supplémentaire ajouté à celui que nous avions déjà ne servira qu'à perpétuer encore plus les conditions qu'on juge tous comme étant inacceptables, aussi bien ceux qui sont pour que ceux qui sont contre le projet de loi.
[Traduction]
Beaucoup estiment que le projet de loi C-23 contribuera à démanteler ce mur dont parlait M. Jules. Le projet de loi C-23 est une mesure indispensable qui aidera les premières nations à progresser encore davantage sur la voie de la prospérité et de l'autonomie. Ce projet de loi fournira aux premières nations un moyen de participer plus activement à l'économie canadienne, de créer un environnement propice aux affaires et de répondre aux besoins de leurs communautés.
Il est important de signaler que le projet de loi C-23 a été élaboré par les premières nations pour les premières nations, bien qu'il ne fasse pas l'objet d'un appui unanime. Les quatre institutions qui forment le noyau du projet de loi sont l'administration financière, la commission de la fiscalité, l'institut de la statistique et le conseil de gestion financière. En s'appuyant sur ces quatre institutions, les premières nations seront en mesure de réaliser un développement économique adapté à leurs besoins, leurs besoins propres, puisqu'on ne retrouve évidemment des structures semblables nulle part ailleurs dans l'économie. Des différences considérables les distinguent.
Ces institutions permettront aux premières nations de participer à part entière à la fédération canadienne. Les outils pratiques qui sont à la base du projet de loi aideront les premières nations à accéder plus facilement aux fonds dont elles ont besoin pour effectuer des immobilisations. Nous savons tous qu'il existe à ce chapitre un besoin urgent dans un grand nombre de nos communautés.
Le projet de loi C-23 facilitera également la prise de décisions, il permettra aux premières nations de tirer profit des relations d'affaires existantes et d'en créer de nouvelles. De nombreuses premières nations sont actuellement désavantagées sur le plan économique et c'est une situation à laquelle il faut remédier.
[Français]
On dit souvent que les institutions financières sont prêtes à vous prêter de l'argent pour établir un commerce, pourvu que vous n'en ayez pas besoin. Cela signifie bien sûr que les institutions financières cherchent des entreprises très solvables pour ne pas courir beaucoup de risques.
Justement, si ces entreprises sont si solvables, il y a de bonnes chances qu'elles n'aient pas besoin de beaucoup d'aide de la part des institutions financières. Si elles en avaient besoin, elles ne seraient pas dans cette situation. Parallèlement, elles auraient de la difficulté à obtenir des emprunts.
[Traduction]
Des recherches ont démontré qu'il peut en coûter jusqu'à six fois plus cher pour faire des affaires dans une première nation qu'ailleurs au Canada. Ce n'est peut-être pas le cas de toutes les premières nations; cela dépend sans doute de la situation propre à chacune. J'utilise ici une moyenne. Le ratio est probablement plus faible dans les communautés du sud du Canada, mais le coût demeure néanmoins élevé. Cette situation est attribuable au fait que les premières nations n'ont pas les systèmes et les institutions publiques que les collectivités, ailleurs au Canada, tiennent pour acquis.
Je pourrais continuer de parler, mais mon temps tire à sa fin.
[Français]
Inutile de dire que pour mettre sur pied une entreprise, s'il n'y a pas les infrastructures, s'il n'y a pas les égouts, s'il n'y a pas toutes ces choses qu'on retrouve dans les villages et qu'on ne retrouve pas très souvent dans les communautés autochtones, cela désavantage ces gens de façon très importante.
Bien sûr, ce n'est qu'un exemple. On pourrait en trouver des dizaines d'autres, à partir de l'urbanisme et de tous les autres éléments qui aident à développer des liens pouvant rendre des entreprises plus prospères.
Je terminerai mes commentaires en félicitant celui qui occupe le fauteuil temporairement, soit le député de Lac-Saint-Louis, pour la qualité de ses interventions, surtout dans les dernières minutes. Normalement il prend place derrière moi. Je désire le remercier de l'excellent travail qu'il a fait ici, à la Chambre des communes et je lui souhaite toutes sortes de belles choses pour l'avenir.
[Traduction]
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, il y a un vieux dicton rempli de sagesse qui vient peut-être même des saintes écritures: il n'y a pire sourd que celui qui ne veut pas entendre et il n'y a pire aveugle que celui que ne veut pas voir.
C'est ce qui m'est venu à l'idée lorsque j'ai entendu le discours du député de Glengarry—Prescott—Russell. Il semble que la mission que le gouvernement, le parti au pouvoir, lui a confiée aujourd'hui consiste à faire la sourde oreille aux désirs exprimés par les premières nations relativement à ce projet de loi et à imposer, encore une fois, les désirs et la volonté du gouvernement aux premières nations, qui ont manifesté énergiquement leur opposition à ce projet de loi à maintes reprises parce qu'elles le jugent insatisfaisant.
Le député a mal représenté le degré d'opposition à cette mesure législative lorsqu'il a essayé de dire à la Chambre que, même si l'appui à l'égard de cette initiative au sein des premières nations n'atteignait pas 60 p. 100, il était quand même assez vaste. Il a ensuite demandé si un appui de 50 p. 100 plus un ne devrait pas être suffisant. On pourrait soutenir l'argument selon lequel ce serait suffisant, mais, dans les faits, ce projet de loi ne jouit pas d'un appui de 50 p. 100 plus un. Il y a environ 30 premières nations sur 633 qui appuient cette mesure législative. D'après mes calculs, cela représente un appui ferme de 5 p. 100 à l'égard de ce projet de loi.
En fait, on a voté sur cette question lors de deux assemblées récentes de l'Assemblée des premières nations. Lors du premier vote, qui a eu lieu en novembre 2002 et qui portait sur le projet de loi C-19, comme il s'appelait à l'époque, la motion a été rejetée par un vote de 81 contre 10. La même motion a ensuite été présentée à une assemblée spéciale tenue en février 2003 et, cette fois, elle a été rejetée dans une proportion de 37 contre 2.
Même lorsqu'une assemblée spéciale a été organisée en Colombie-Britannique, où sont concentrés les partisans de cette mesure législative, le gouvernement n'a pas réussi à obtenir l'appui recherché. Je crois que le niveau d'appui était de 30 p. 100 à cette assemblée; les 202 premières nations de la Colombie-Britannique ne se sont même pas manifestées pour appuyer cette initiative.
Je ne prendrai pas tout le temps que j'avais prévu prendre parce que je sais que d'autres orateurs aimeraient aussi réagir aux propos du député de Glengarry—Prescott—Russell et faire des observations du même genre.
L'hon. Don Boudria: Monsieur le Président, je n'ai jamais laissé entendre que le nombre était celui que le député vient de mentionner. J'ai seulement dit que l'argument de l'intervenant précédent se fondait sur une prémisse inapplicable. Le député peut toujours relire ce que j'ai dit. Il n'est pas tenu de prendre ma parole à cet égard. Il n'a qu'à lire le hansard, ce qu'il fera sans doute plus tard.
Le député demandait implicitement pourquoi nous allons de l'avant quant à l'étude de ce projet de loi même si certaines premières nations ne l'appuient pas. La réponse est simple; si nous reportons à plus tard l'adoption de ce projet de loi, les coûts seront énormes pour les collectivités qui veulent l'utiliser en vue de favoriser leur développement. Elles se sont préparées et elles ont travaillé en prévision de l'arrivée de ce projet de loi. La charge est donc lourde pour elles.
Puisque l'application de cette mesure législative sera optionnelle, le député n'a pas raison de refuser son appui à ce projet de loi. Bien entendu, je reconnais qu'il a droit à son opinion, et j'ai droit à la mienne. En outre, par cette mesure, le gouvernement donne suite à son engagement envers les premières nations qui ont travaillé fort, et pendant longtemps, pour supprimer les obstacles au développement de leurs communautés.
En outre, je voudrais signaler au député que ce n'est pas une proposition optionnelle parce qu'elle n'empêche pas le gouvernement de travailler de manière coopérative avec différents groupes de premières nations afin de donner suite à d'autres initiatives.
Je voudrais revenir aux résolutions de l'APN concernant la loi sur la gestion financière et statistique des premières nations adoptées depuis sa présentation. Il n'y a qu'une seule résolution faisant mention du projet de loi C-23 depuis la présentation de ce dernier, en décembre 2002, et il s'agit d'un vote qui a eu lieu le 8 octobre 2003--c'est peut-être celui auquel le député a fait allusion--lors de l'assemblée spéciale des chefs de la nation squamishe.
Il a fait allusion au fait que l'assemblée avait eu lieu en Colombie-Britannique, de sorte que c'est sans doute de cette résolution qu'il voulait parler. C'était une résolution globale concernant les projets de loi C-6, C-7 et C-19, maintenant modifiés et constituant le projet de loi C-23.
La résolution invitait l'assemblée spéciale des chefs, d'abord, à rejeter le projet de loi C-6. Autrement dit, les chefs ont eux-mêmes présenté une motion visant à rejeter les projets de loi C-6 et C-7, et à appuyer le projet de loi C-19. Les trois éléments étaient intégrés à la même motion. Les résultats du vote ont été les suivants: 109 contre; 65 pour; 2 abstentions; et 52 n'ont pas voté. Mais il s'agissait de rejeter deux éléments et d'en appuyer un, tout cela dans la même motion.
La déclaration du député selon laquelle ces mesures sont contenues dans le projet de loi C-19, maintenant devenu le projet de loi C-23, n'est pas tout à fait juste. Ni lui ni moi ne pouvons déterminer combien de votes exactement ont été accordés à chacun des éléments.
Le vice-président: Le député de Glengarry—Prescott—Russell disposera de trois minutes la prochaine fois que cette question sera soulevée. La Chambre passe maintenant aux déclarations de députés.
Déclarations de députés
[Article 31 du Règlement]
* * *
[Traduction]
La coopérative de Peterborough
M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, la coopérative de Peterborough, qui est au service des localités rurales--et plus récemment des collectivités urbaines--de la région de Peterborough depuis plus de 60 ans, présente un nouveau visage à la population du comté et de la ville de Peterborough.
L'établissement, qui a été agrandi, offre dorénavant une plus grande variété de produits et de services, y compris un bar laitier, une confiserie et une collection unique de matériel agricole antique.
Depuis toujours, l'organisation Rural Routes fonctionne en tant que coopérative. Elle offre à ses membres des ristournes, des produits à prix réduit et l'occasion de se prononcer sur les orientations de l'organisation. Plus on fait affaire avec la coopérative, plus on réalise de bénéfices. Par exemple, un agriculteur qui y fait des achats totalisant 100 000 $ au cours d'une année reçoit un chèque de 4 500 $ à la fin de cette période.
Bien que tous ceux qui participent aux activités de la coopérative se réjouissent des rénovations qui y ont été apportées, tous tiennent par dessous tout à ce que la coopérative conserve la réputation qu'elle s'est taillée pour la qualité de son service.
Je tiens à féliciter la direction et le personnel de l'organisation Rural Routes de la coopérative de Peterborough et à leur offrir mes meilleurs voeux de succès.
* * *
Les localités rurales
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PCC): Monsieur le Président, parmi la liste, de plus en plus longue, de Canadiens oubliés par le premier ministre et son gouvernement libéral, y a-t-il un exemple de négligence plus frappant que le Canada rural?
Dans la circonscription néo-écossaise de Pictou—Antigonish—Guysborough, que je représente, des localités sont au bord du désastre, puisque leur bureau de poste ou leur usine de transformation du poisson risquent de fermer. Ces citoyens demandent au gouvernement national de défendre leurs intérêts et de leur permettre de demeurer, de travailler et de vivre dans leur localité.
Malheureusement, leur demande semble demeurer lettre morte. Le premier ministre ne fonde pas ses décisions sur ce qui s'impose. Il définit plutôt ses priorités selon le nombre de votes qu'il peut obtenir. Parce qu'il cherche l'appui électoral du Canada urbain, le premier ministre tente de bluffer en proposant aux villes des initiatives qui, étant donné son bilan, relèveront davantage de la forme que du fond. Cependant, il n'en a pas offert autant aux régions rurales du Canada.
Depuis 1993, le gouvernement a contribué à aggraver la situation du Canada rural. Des réductions budgétaires aux soins de santé, en passant par le gouffre financier du registre des armes à feu, le gouvernement n'a rien donné aux régions rurales, sinon une gifle.
Les Canadiens des régions rurales méritent mieux. Ils méritent un gouvernement qui sera attentif à leurs problèmes et qui tentera de les régler.
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L'Irak
L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Monsieur le Président, on ne saurait rester silencieux--encore moins indifférents--en voyant les images des prisonniers irakiens. Il est difficile de trouver les mots qui permettent de dire toute l'horreur de ces supplices infligés par des humains à d'autres humains.
Ces images ne mettent pas en cause le peuple américain. Nous le savons. Mais elles discréditent l'administration américaine. Pourtant, aucune action politique n'est venue répondre concrètement à l'indignation exprimée par le président des États-Unis. À chaque jour qui passe sans démission ni révocation, on a de plus en plus l'impression que les actes ne répondent pas aux paroles.
Heureusement, le comité international de la Croix-Rouge a rendu public son rapport. Il est heureux qu'il existe une convention internationale qui confie à la Croix-Rouge le soin de s'assurer que les détenus sont traités de façon humanitaire.
Les images des prisonniers irakiens sont accablantes. Nous avons tous une part de responsabilité à assumer si nous voulons qu'il soit possible de rétablir la paix avec le monde arabe. Aussi, en tant que parlementaires, nous revient-il de dénoncer cette situation.
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[Français]
La Semaine nationale de la police
M. Jeannot Castonguay (Madawaska—Restigouche, Lib.): Monsieur le Président, du 9 au 15 mai, c'est la Semaine nationale de la police. L'objectif de cet événement est de créer des liens entre les policiers et la collectivité, car la meilleure façon d'accroître la protection du public, c'est encore d'établir des partenariats avec les citoyens.
Plusieurs activités communautaires auront lieu aux quatre coins du pays. Par exemple, les policiers vont se rendre dans les écoles, participer à un marathon ou encore à une partie de balle-molle. Ils tiendront aussi des journées portes ouvertes dans certaines collectivité ou serviront les petits-déjeuners à des personnes âgées.
Nos services de police jouent un rôle de premier ordre afin d'assurer la sécurité de nos collectivités. C'est grâce à eux que les Canadiennes et les Canadiens éprouvent un fort sentiment de sécurité au pays.
À celles et ceux dont la profession est de nous protéger, je dis merci et les invite à continuer leur travail acharné en faveur de collectivités plus sûres.
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[Traduction]
Le hockey
M. Alan Tonks (York-Sud—Weston, Lib.): Monsieur le Président, à cette époque-ci de l'année, les Canadiens pensent à sortir la tondeuse et à se rendre au centre de jardinage. À quoi d'autre pensent-ils? Vous l'avez deviné, monsieur le Président, ils pensent au hockey.
Hier, Équipe Canada a remporté la Coupe du monde en battant la Suède par la marque de 5 à 3. Elle a ainsi remporté le championnat du monde pour la deuxième fois de suite, ce qui ne s'était pas vu depuis les Dunlops de Whitby, en 1958, et les McFarlands de Belleville, en 1959. C'était il y a presque un demi-siècle. Vous vous en souvenez sûrement, monsieur le Président.
Ces deux médailles d'or consécutives arrivent après l'éclatante victoire du Canada aux Jeux olympiques de Salt Lake City, il y a deux ans, et le titre mondial remporté par les hockeyeuses canadiennes, il y a deux mois. Les Canadiens ont l'assurance que tout va bien dans le monde si Équipe Canada remporte des championnats.
La Chambre et tout le Canada félicitent Équipe Canada. Nous sommes fiers de ses réalisations.
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Les pêches
M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PCC): Monsieur le Président, en étant davantage présents sur le nez et la queue des Grands Bancs, nous pouvons déceler de plus en plus d'infractions en matière de pêche. Nous avons maintenant la preuve que des bateaux étrangers pratiquent la surpêche, exploitent des espèces visées par des moratoires, se servent de filets illégaux et pêchent dans des zones d'accès restreint et parfois même à l'intérieur de la limite des 200 milles. Mais nous savons cela depuis des années.
Pour l'instant, notre présence se traduit par un plus grand nombre de contraventions. Ce qu'il nous faut, ce sont des mesures qui mettront fin à ces abus. Nous pouvons harceler les étrangers en leur nuisant sur le plan économique. Nous pouvons recourir à la Convention sur le droit de la mer. Nous pouvons susciter une coopération internationale vigoureuse. Ce sera tout de même une démarche longue et à l'issue douteuse.
Nous n'avons pas le temps. Des ressources renouvelables sont en train de disparaître. Il est impérieux que le Canada agisse dès maintenant. Si nous ne pouvons convaincre l'OPANO de faire respecter les lois, alors nous devons imposer une gestion axée sur la conservation avant qu'il ne soit trop tard.
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[Français]
Claude Beausoleil
L'hon. Don Boudria (Glengarry—Prescott—Russell, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais aujourd'hui souligner l'élection du poète Claude Beausoleil à la prestigieuse Académie Mallarmé. Fondée en 1937, cette dernière a pour mission de soutenir et promouvoir la poésie contemporaine.
Avant de devenir membre à part entière, M. Beausoleil était associé depuis 1997 à l'académie. M. Beausoleil, auteur des Dépossessions, du Déchiffrement du monde ainsi que du Chant du voyageur, aura ainsi une belle occasion de tisser des liens entre les univers poétiques canadien et français.
En tant que nouvel académicien, il sera en mesure de participer à la sélection des oeuvres, de suggérer des lectures et d'influencer le choix des rencontres avec des artisans du verbe.
Il ne fait pas de doute qu'il saura ainsi faire rayonner davantage le talent du Canada, des Canadiens et des Canadiennes.
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Les prix Jackie Robinson
M. Bernard Bigras (Rosemont—Petite-Patrie, BQ): Monsieur le Président, samedi dernier, à l'occasion du 19e gala Jackie Robinson, l'Association montréalaise des gens d'affaires et des professionnels honorait trois membres des communautés noires du Québec qui se sont illustrés par leur influence positive auprès de la société québécoise.
Rappelons d'abord que Jackie Robinson est ce joueur professionnel de baseball qui, en 1946, fut le premier Noir à signer avec les Royaux de Montréal.
D'origine haïtienne, Mme Yvette Bonny, pédiatre et hématologiste de l'hôpital Maisonneuve-Rosemont de Montréal, a réalisé, en 1980, la première transplantation de moelle osseuse chez un enfant au Québec.
Ulrick Chérubin, également originaire d'Haïti et maire d'Amos, a reçu un prix honorifique afin de souligner son implication sociale et communautaire dans son milieu.
Finalement, le prix de la personnalité d'affaires de l'année est allé à M. Jean-Yves Renel, un sociologue originaire de la Martinique, propriétaire de la Ferme du domaine, près de Shawinigan.
Nos plus sincères félicitations à ces trois récipiendaires québécois. Leur contribution culturelle, professionnelle et sociale est importante pour le Québec.
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La Prestation nationale pour enfants
M. Gilbert Barrette (Témiscamingue, Lib.): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour souligner les efforts considérables que notre gouvernement a entrepris au cours des dernières années pour combattre la pauvreté infantile.
Dans le cadre de la Prestation nationale pour enfants, le gouvernement du Canada assure une aide financière et des programmes et services à l'intention des familles à faible revenu.
Le gouvernement est déterminé à assurer aux enfants un bon départ dans la vie. Nous pouvons le constater dans le dernier budget de 2004, qui a annoncé 75 millions de dollars supplémentaires.
Je suis fier de faire partie d'un gouvernement qui vise à renforcer les assises sociales de notre pays pour aujourd'hui et pour demain.
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[Traduction]
Le Parti libéral du Canada
M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, PCC): Monsieur le Président, lorsque l'actuel premier ministre cherchait à déloger son prédécesseur, il a fait campagne à travers le pays en promettant de combler le déficit démocratique.
L'un des principes les plus fondamentaux de la démocratie est le droit des gens à choisir leurs propres représentants, plutôt que de se les faire imposer par un monarque ou un chef de parti. Le premier ministre a violé ce principe en désignant quatre nouveaux candidats libéraux dans l'Ouest canadien.
Dans ma propre ville d'Edmonton, il est intervenu directement et a court-circuité le processus démocratique en nommant John Bethel et en empêchant l'homme d'affaires local Sine Chadi de contester cette nomination. Pourquoi le premier ministre a-t-il choisi M. Bethel? Serait-ce parce qu'il a été l'organisateur de sa campagne au leadership en Alberta? Quelle honte!
Afin de récompenser ses propres amis, le premier ministre a violé le droit fondamental des libéraux d'Edmonton-Est de choisir leur propre représentant. Les habitants d'Edmonton auront le dernier mot le jour des élections et ils diront ce qu'ils pensent de ce geste antidémocratique du premier ministre en n'élisant pas un libéral chez eux.
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[Français]
Eric Kierans
L'hon. Serge Marcil (Beauharnois—Salaberry, Lib.): Monsieur le Président, c'est empli de tristesse que je prends aujourd'hui la parole, ayant appris le décès d'Eric Kierans, qui fut un véritable pilier pour la politique canadienne au cours d'une période des plus marquantes de son histoire.
Né à Montréal en 1914, il fit son entrée en politique provinciale en 1963. Élu lors d'une élection partielle, il fut successivement ministre du Revenu, puis de la Santé sous le gouvernement de Jean Lesage.
Tous s'entendent aujourd'hui pour dire que c'est ce gouvernement qui fut le maître d'oeuvre de la Révolution tranquille au Québec. Puis, en 1968, il fit le saut en politique fédérale où il s'illustra en tant que ministre des Postes et ministre des Communications au sein du gouvernement de Pierre Elliott Trudeau.
M. Kierans fait figure de géant dans l'histoire politique canadienne. En ce jour de deuil, au nom de tous les Canadiens et Canadiennes, nous tenons à offrir nos sincères condoléances aux proches de M. Kierans. Le Canada gardera à jamais la mémoire de cet homme dévoué à son pays.
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[Traduction]
L'ouragan Juan
M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, l'une des principales préoccupations de tout gouvernement en place devrait être de prendre soin des gens les plus démunis.
En Nouvelle-Écosse, récemment, l'ouragan Juan a eu des conséquences désastreuses pour de nombreux habitants. En fait, les gens à faible revenu et les assistés sociaux ont été les plus durement frappés. Or, nous apprenons aujourd'hui que les vérificateurs fédéraux ne leur rembourseront même pas les frais qu'ils ont déboursés pour se nourrir durant l'ouragan. C'est absolument incroyable. Nous apprenons également que c'est là la politique libérale qui s'applique dans l'ensemble du pays en cas de catastrophes!
Nous demandons au gouvernement fédéral de rappeler ses chiens de garde, de venir en aide à ces gens démunis et de rembourser les frais qu'il ont déboursés pour remplacer la nourriture qu'ils ont perdue à cause de l'ouragan Juan.
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La sclérose en plaques
Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Monsieur le Président, la semaine dernière, j'ai aidé la Société canadienne de la sclérose en plaques à lancer sa 28e campagne annuelle de l'oeillet en épinglant des oeillets sur les députés. Grâce à leurs généreux dons, nous avons recueilli près de 350 $, formidable départ d'une importante campagne visant à appuyer les personnes atteintes de la sclérose en plaques et à investir dans la recherche.
Aux députés des deux côtés de la Chambre, je dis que j'ai été touchée par leur générosité et par les nombreux messages personnels de leurs collègues qui ont été touchés par la sclérose en plaques.
La fin de semaine dernière, je me suis jointe à des bénévoles dans ma circonscription de Burlington pour vendre des oeillets. Nous avons remporté un grand succès.
Le mois de mai est le Mois de la sensibilisation à la sclérose en plaques. J'espère que tous les Canadiens prendront le temps de mieux se renseigner sur cette maladie, d'apprendre à en détecter les premiers symptômes et de demander de l'aide.
Le Canada compte un des taux de sclérose en plaques les plus élevés dans le monde. Selon les estimations, 50 000 Canadiens sont atteints de cette maladie et, chaque jour, on diagnostique trois nouveaux cas. Il nous faut trouver un remède à cette maladie.
Je remercie mes collègues de leur soutien.
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L'environnement
M. Bob Mills (Red Deer, PCC): Monsieur le Président, depuis plus de 10 ans, l'environnement du Canada souffre d'un gouvernement libéral. Des gouvernements libéraux qui ne font rien, sauf prononcer de belles paroles, nous ont amenés au seuil de l'efficacité zéro des programmes environnementaux.
Voici ce que nous avons: des eaux usées non traitées qui sont rejetées dans l'océan par trois villes de première importance; un héritage de sites contaminés; des zones industrielles désaffectées qui polluent toutes les villes; des décharges publiques débordantes qui ne mettent pas en oeuvre des techniques modernes; pas de législation sur les espèces invasives; le dégazage intentionnel au large de nos côtes; des avertissements sur la nécessité de faire bouillir l'eau dans toutes les provinces; la diminution de la qualité de l'air et l'accroissement des jours de smog.
Nous nous classons au 16e rang sur 24 pays pour ce qui est de la qualité de notre environnement. Nous avons des lois inefficaces, votées à la dernière minute et conçues pour acheter des votes. Nous avons un projet de loi sur les espèces menacées qui ne protégera pas ces espèces. Nous avons un traité sur le dioxyde de carbone qui ne sera jamais mis en oeuvre. Nous avons un projet de loi qui ampute de grandes étendues de terrains aux parcs nationaux. Nous avons des services météorologiques qui ont été taillés en pièces.
L'héritage libéral est interminable.
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[Français]
Les Olympiques de Gatineau
M. Marcel Proulx (Hull—Aylmer, Lib.): Monsieur le Président, je désire souligner la victoire des Olympiques de Gatineau lors de la finale de la Coupe du président, et ce, pour une deuxième année consécutive. Les Olympiques représenteront donc le Québec dans la course à la Coupe Memorial.
Les Olympiques se sont montrés à la hauteur de la situation hier soir, à l'aréna Robert-Guertin de Hull. Lors d'un match enlevant contre les Wildcats de Moncton, ils ont remporté la finale de la Ligue de hockey junior majeure du Québec devant une foule en délire. Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'ils ont du coeur au ventre!
Je tiens à féliciter toute l'équipe et, plus particulièrement, le capitaine Maxime Talbot. Pour une deuxième année de suite, son leadership lui a valu le prestigieux trophée Guy-Lafleur, soit celui du joueur le plus utile des séries.
Il va sans dire que le hockey continue de passionner les Canadiennes et les Canadiens et nous appuyons avec enthousiasme les jeunes joueurs. Gatineau a de quoi être fière de ses Olympiques et nous leur souhaitons bonne chance dans leur course à la Coupe Memorial.
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[Traduction]
La citoyenneté et l'immigration
M. Scott Reid (Lanark—Carleton, PCC): Monsieur le Président, le 24 octobre 2002, la Chambre des communes a unanimement voté en faveur d'une motion demandant la libération de 13 membres du groupe Falun Gong, alors emprisonnés en Chine. La motion a été adoptée précisément dans le but de permettre à ces prisonniers d'opinion de retrouver les membres de leur famille au Canada.
Un de ces prisonniers, en l'occurrence Mingli Lin, a été libéré le 26 mars 2003. Toutefois, depuis cette date, notre consulat de Shanghai refuse de lui accorder un visa pour venir au Canada. Les autorités chinoises ont acquiescé aux demandes du Parlement qui leur avaient été transmises par notre ancien premier ministre, mais nos propres autorités consulaires refusent de respecter les directives unanimes de la Chambre.
J'exhorte la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration à respecter la volonté expresse et unanime de la Chambre des communes et à permettre à Mingli Lin de retrouver sa famille au Canada.
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[Français]
Le prix de l'essence
M. Sébastien Gagnon (Lac-Saint-Jean—Saguenay, BQ): Monsieur le Président, vendredi dernier, lors d'une visite au Saguenay, le premier ministre du Canada est venu en grande pompe confirmer, pour une deuxième fois, la participation financière du fédéral dans l'élargissement de la route 175. Le moins que l'on puisse dire, c'est que le premier ministre semble à court d'idées en recyclant une annonce déjà faite, il y a deux ans, par son prédécesseur.
Celui qui voulait faire les choses autrement, reprend les vieilles méthodes «duplessistes» pour gagner des votes. Or, les gens ne sont pas dupes et se rendent bien compte de ces manoeuvres électoralistes. Il aurait été beaucoup plus important pour la population du Saguenay—Lac-Saint-Jean qu'il s'engage à intervenir rapidement pour contrer la flambée spectaculaire du prix de l'essence.
S'il veut vraiment se démarquer, que le premier ministre s'engage à mettre sur pied un Office de surveillance du secteur pétrolier, comme le réclame le Bloc québécois. Mais de toute évidence, il est beaucoup plus enclin à servir du réchauffé qu'à innover avec des mesures concrètes.
QUESTIONS ORALES
[Questions orales]
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[Traduction]
Le programme des commandites
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PCC): Monsieur le Président, les accusations portées aujourd'hui découlent d'un rapport antérieur de la vérificatrice générale, d'une enquête antérieure, d'un scandale antérieur, bien qu'il y ait un dénominateur commun, en l'occurrence le Parti libéral du Canada.
Ces accusations n'apporteront pas de réponses aux Canadiens au sujet du programme des commandites ou des préoccupations de la vérificatrice générale à l'égard des 250 millions de dollars de l'argent des contribuables. Il faudra attendre 18 mois avant d'avoir des réponses de l'enquête publique. La GRC mène 13 enquêtes. Le gouvernement ne fournit aucune réponse.
Les Canadiens méritent des réponses. Où est l'argent, qui est responsable et d'où venaient les directives politiques?
L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.): Monsieur le Président, c'est exactement ce que le premier ministre veut découvrir, comme il l'a dit très clairement d'ailleurs. C'est pourquoi nous avons une enquête publique. C'est pourquoi le Comité des comptes publics examine ce dossier.
Ce que je ferais, ce serait demander au Comité des comptes publics de présenter un rapport provisoire, spécialement à la lumière des accusations portées aujourd'hui. Le moment est probablement opportun pour que le Comité des comptes publics dresse un bilan des témoignages qu'il a entendus jusqu'à maintenant et partage ce bilan avec les Canadiens.
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PCC): Monsieur le Président, le glas sonne pour le Comité des comptes publics. Il y a un trou béant dans le gouvernement et dans la bureaucratie. Nous sommes loin d'avoir les réponses que nous cherchons dans le scandale des commandites.
Étant donné les récents propos du lieutenant du premier ministre au Québec, Jean Lapierre, demandant que des accusations soient portées dans le scandale des commandites, les accusations portées aujourd'hui sont pour le moins suspectes. Elles sont entachées par ces propos. Il ne convient pas qu'une personne si proche du premier ministre fasse publiquement de telles remarques.
Le premier ministre a donné des garanties absolues. Ce processus ne fera-t-il l'objet d'aucune manipulation politique et les Canadiens obtiendront-ils des réponses avant les élections?
L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.): Monsieur le Président, j'espère que le député ne met en doute ni l'intégrité ni l'indépendance de la Gendarmerie royale du Canada. Je vais citer les paroles du caporal Patrice Gélinas, qui a fait la déclaration suivante aujourd'hui relativement à cette enquête: «Notre enquête est tout à fait indépendante de tout ce qui peut se faire au plan politique; nous menons notre enquête policière sans égard à ce qui se passe ailleurs.» Il a dit que cela n'avait absolument aucune incidence sur l'enquête de la GRC.
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PCC): Monsieur le Président, cela n'a rien à voir avec la GRC.
La vérificatrice générale a déclaré que, dans le scandale des commandites, toutes les règles avaient été violées. Lorsqu'il s'agit de mettre fin à des enquêtes avant qu'elles ne soient terminées et de faire de l'ingérence politique, le gouvernement est sans égal.
La manipulation que fait le cabinet du premier ministre pour mettre fin à l'enquête est évidente. Le premier ministre lui-même a dit que les Canadiens méritaient des réponses, mais ils ne les ont pas encore. Il a affirmé qu'ils auraient des réponses avant les élections.
La vice-première ministre assurera-t-elle les Canadiens que nous allons aller au fond de cette affaire avant que le premier ministre ne mette fin aux travaux du comité?
L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.): Monsieur le Président, personne ne met fin aux travaux du Comité des comptes publics. En fait, si je comprends bien, les membres de ce comité ont demandé qu'un rapport provisoire soit présenté. Je crois que c'est parfaitement raisonnable compte tenu du nombre de témoignages que le comité a entendus.
En fait, je crois que les Canadiens devraient s'attendre, à ce moment-ci, à un rapport provisoire qui dresse un bilan de tout ce que le comité a entendu et appris jusqu'à maintenant.
M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, PCC): Monsieur le Président, cette réponse illustre à quel point les libéraux sont devenus arrogants. Ils pensent les Canadiens assez naïfs pour croire, comme le disait un des membres du comité, le député libéral de l'Île-du-Prince-Édouard, qu'un rapport provisoire faciliterait la vie au premier ministre et lui permettrait de déclencher des élections au printemps.
N'est-il pas vrai que les libéraux tentent de faire adopter un rapport provisoire cette semaine et de mettre un terme aux travaux du comité, alors qu'il lui reste encore 90 témoins à entendre, parce qu'ils ne veulent pas que les Canadiens découvrent, avant les élections, la vérité sur les millions de dollars qui ont été gaspillés?
L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.): Monsieur le Président, personne n'a fait plus que le premier ministre pour aller au fond de cette affaire et mettre au jour toute la vérité. C'est lui qui a exigé la tenue d'une enquête publique. C'est lui qui a demandé au Comité des comptes publics d'amorcer ses travaux plus tôt que prévu afin qu'il puisse tenir des audiences sans tarder.
Il est vraiment malheureux que les députés de l'opposition se servent des travaux de ce comité à des fins politiques. La population surveille la situation. Je peux dire à tous les députés que la population n'est guère impressionnée. Elle veut aller au fond de cette affaire. J'exhorte le Comité des comptes publiques à poursuivre ses travaux.
M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, PCC): Quelle farce, monsieur le Président. Plus de 90 témoins n'ont pas encore été entendus, y compris Warren Kinsella, de grands acteurs dans la combine de la publicité et même l'ex-premier ministre.
Nous n'avons pas encore recueilli le témoignage des principaux intervenants. Nous ne savons pas d'où venaient les directives politiques. Nous ne savons pas à quoi a servi l'argent, mais les libéraux veulent diffuser un rapport qui blanchirait le gouvernement, qui préparerait le terrain pour les prochaines élections, avant même que les Canadiens aient obtenu de véritables réponses à leurs questions.
Pourquoi le gouvernement met-il fin à la seule enquête en cours et abolit-il le seul mécanisme permettant aux Canadiens de découvrir la vérité sur la corruption des libéraux?
L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.): Monsieur le Président, comme nous le savons, l'examen effectué par le Comité des comptes publics n'est pas le seul processus qui existe. En fait, le juge Gomery a amorcé son enquête publique à ce sujet.
Revenons au Comité des comptes publics. J'encourage les membres de ce comité à poursuivre leurs travaux. Je pense que la diffusion d'un rapport provisoire est tout à fait logique. Les Canadiens auront ainsi l'occasion de découvrir qui a témoigné jusqu'à maintenant et ce que ces gens avaient à dire.
Au nom du gouvernement, j'encourage le Comité des comptes publics à poursuivre ses travaux.
[Français]
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, dans le dossier du scandale des commandites, des accusations sont portées aujourd'hui contre Jean Brault et Charles Guité—deux exécutants—, et ce, juste avant le déclenchement des élections. Ainsi donc, au moment où on s'approche des dirigeants politiques, les libéraux veulent mettre fin aux travaux du Comité permanent des comptes publics et faire adopter un rapport partisan.
Est-ce que le gouvernement va, au moins, avoir la décence d'admettre que les députés libéraux manoeuvrent présentement dans le but d'épargner les dirigeants politiques du scandale des commandites?
[Traduction]
L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.): Monsieur le Président, les députés ministériels n'essaient absolument pas de manipuler quoi que ce soit. Le Comité des comptes publics a un mandat à remplir et je l'encourage à s'acquitter de sa tâche.
Il me semble fort opportun et sensé de présenter un rapport provisoire aux Canadiens, après avoir entendu plusieurs dizaines de témoins.
[Français]
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, ce qui n'a pas de bon sens, en ce moment-ci, c'est qu'on ferme les livres juste à la veille du témoignage de Jean Chrétien et de l'actuel premier ministre. Celui-ci a reconnu qu'il y avait une direction politique au scandale des commandites; c'est le premier ministre qui a dit cela. On aimerait l'entendre au Comité permanent des comptes publics. Mais à l'approche des élections, les libéraux préfèrent que seuls les exécutants soient pointés du doigt.
Pourquoi le premier ministre veut-il fermer les livres alors que même Chuck Guité a reconnu que dans le scandale des commandites, le bureau du premier ministre et les ministres ont non seulement fourni les conseils, mais également pris des décisions?
[Traduction]
L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai dit, le gouvernement a demandé au Comité des comptes publics de devancer le début de ses travaux. Les membres du comité se sont donc mis à la tâche sans tarder et je les en remercie. J'espère qu'ils poursuivront leur travail. Toutefois, je suis carrément en désaccord avec quiconque laisse entendre qu'il est inapproprié de publier un rapport provisoire, maintenant, après des dizaines de témoignages, pour donner aux Canadiens un compte rendu de ce qui a été fait jusqu'ici.
J'estime fort important d'informer les Canadiens des témoignages que le Comité des comptes publics a entendus à ce jour.
[Français]
M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, les accusations qui tombent à point aujourd'hui pour le gouvernement sont faites à l'endroit d'acteurs du scandale des commandites, mais pas des véritables responsables politiques du scandale.
Est-ce que le gouvernement admettra qu'en arrêtant aujourd'hui Charles Guité, les accusations frappent celui qui était le «bras agissant» du gouvernement et pas du tout les vrais responsables politiques qui sont à l'origine de ce scandale?
L'hon. Jacques Saada (leader du gouvernement à la Chambre des communes et ministre responsable de la réforme démocratique, Lib.): Monsieur le Président, M. Guité a été arrêté ce matin sur la foi de preuves que la GRC a jugé utile d'utiliser. Le reste, ce ne sont que des allégations gratuites, sans aucun fondement, qui sont lancées comme un grand coup de filet politique tout à fait inutile. Franchement, je pense que le peuple canadien est plus en droit d'attendre un rapport préliminaire du travail qui a été fait que d'entendre ce genre d'allégations.
M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, les Canadiens sont en droit de s'attendre à ce qu'on fasse la lumière sur la responsabilité politique qui a été admise et déclarée par le premier ministre sur toutes les télévisions, d'un océan à l'autre.
Est-ce que le gouvernement admettra que le fait de produire un rapport incomplet du comité—un comité qui n'a pas entendu Jean Chrétien, qui n'a pas pu entendre le premier ministre sur ces allégations de responsabilités politiques—, n'a qu'un seul but, soit couvrir ceux et celles, pour un temps encore, qui sont responsables du scandale des commandites, qui l'ont cautionné...
Le vice-président: L'honorable leader du gouvernement à la Chambre a la parole.
L'hon. Jacques Saada (leader du gouvernement à la Chambre des communes et ministre responsable de la réforme démocratique, Lib.): Monsieur le Président, je ne comprends vraiment pas la question qui est posée.
Des leaders politiques ont comparu devant le comité. Ils ont été appelés à comparaître et ils ont comparu. Le comité a fait un travail de fond, je l'espère, aussi bien auprès de personnes de la catégorie politique qu'auprès de fonctionnaires et d'autres intervenants. Il a eu la liberté de convoquer qui il voulait. Je crois qu'il est normal que la population canadienne sache ce que le comité a fait jusqu'à présent. Qu'il fasse donc une synthèse.
[Traduction]
Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, aujourd'hui, deux personnes ont été arrêtées et accusées de fraude. La somme en question ne représente que 2 p. 100 des 100 millions de dollars qui se trouvent au coeur du scandale libéral des commandites. Clairement, ce n'est qu'un début si on en croit l'empressement des députés libéraux à mettre fin aux travaux du Comité des comptes publics, afin que le premier ministre puisse se présenter devant les électeurs avant que son hypocrisie dans presque tous les dossiers ne devienne trop évidente à leurs yeux.
N'est-il pas vrai que les libéraux veulent mettre fin aux travaux du comité parce qu' ils savent que les arrestations d'aujourd'hui ne sont que la partie visible de l'iceberg que représente la corruption libérale? N'est-ce pas ce qui est en train de se passer?
L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.): Monsieur le Président, loin de vouloir mettre fin aux travaux du Comité des comptes publics, c'est le gouvernement qui lui a demandé de se réunir plus tôt que prévu. C'est le gouvernement qui l'a encouragé à se mettre au travail. Je remercie d'ailleurs les membres du comité pour leur travail acharné.
Je pense qu'il serait opportun que le comité publie un rapport provisoire, si telle est sa décision cette semaine. Je pense qu'il serait opportun qu'il fasse part aux Canadiens des témoignages des douzaines de personnes qu'il a entendues jusqu'à présent et qu'il fasse le point sur l'enquête.
Je rappelle au député et à la Chambre que c'est le premier ministre et son gouvernement qui ont demandé que l'on tire cette affaire au clair.
* * *
Le Parti libéral du Canada
Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, passons à un autre bel exemple de démocratie libérale. Dans 14 circonscriptions, des amis du premier ministre ont été nommés ou ont pris la place de ses adversaires qui se sont miraculeusement récusés. Quatorze fois, M. Démocratie a décidé qu'il valait mieux que ses amis se présentent plutôt que de laisser la collectivité décider. Bien sûr, cela va de pair avec le favoritisme libéral, y compris le poste bidon de conseiller spécial pour les affaires du Caucase méridional et proche oriental.
Comment le premier ministre peut-il s'attendre à ce que quiconque croie ce qu'il dit étant donné le gouffre qui existe entre ses beaux discours sur la démocratie et la réalité?
L'hon. Jacques Saada (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais faire remarquer avant tout que c'est une question qui relève de la politique interne des partis et je ne pense pas qu'elle concerne le fonctionnement du gouvernement ou l'obligation de rendre des comptes.
Par ailleurs, j'aimerais dire que, dans chaque parti politique, on fait les choses en fonction de la constitution du parti, laquelle est adoptée par les membres du parti. Il ne revient pas au gouvernement de dicter ce qui devrait se passer au sein des partis politiques.
* * *
Le programme des commandites
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, PCC): Monsieur le Président, le 13 février, au réseau de télévision national, le premier ministre a dit, à propos du scandale des commandites: «Il doit y avoir une direction politique». Il a également dit au National Post «[...]c'est une des choses que nous devons découvrir.»
Au moment où un comité parlementaire s'apprête à trouver la réponse à cette question et qu'il lui reste au moins 90 témoins à entendre, la majorité libérale oblige le comité à présenter prématurément un rapport pour préparer la voie aux élections.
Pourquoi le premier ministre a-t-il décidé que les Canadiens ne méritent plus de savoir qui a donné les ordres d'enfreindre les règles du programme de commandites?
L'hon. Stephen Owen (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, comme on l'a dit plus tôt, c'est le premier ministre qui a demandé au Comité des comptes publics de tenir rapidement des audiences. Les audiences ont duré trois mois et le comité a entendu une quarantaine de témoins, y compris d'anciens ministres des Travaux publics. Nous avons recueilli des témoignages. Il revient maintenant au Comité des comptes publics de présenter un rapport provisoire pour que la population soit au courant des témoignages entendus jusqu'ici.
Qu'il y a-t-il de plus raisonnable et de plus opportun qu'un rapport provisoire qui résume les témoignages entendus à ce jour?
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, PCC): Monsieur le Président, pas plus tard que le week-end dernier, le premier ministre a dit au National Post: «Les Canadiens ont-ils toute l'information? Non», particulièrement au sujet de sa question cruciale concernant la provenance des directives politiques. Son Parti libéral majoritaire a plutôt bloqué des témoignages clés et s'est servi constamment de cette majorité pour empêcher des témoins de comparaître. Il semble que le premier ministre ait cessé de s'intéresser à la vérité et qu'il lui importe davantage de lancer un rapport bidon aux électeurs et de faire oublier le scandale des commandites pour tenir des élections.
N'est-il pas évident que le premier ministre trempe directement dans la culture de corruption du Parti libéral?
L'hon. Stephen Owen (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, sauf votre respect, c'est tout à fait absurde. C'est le premier ministre qui a exigé que nous allions au fond des choses et que le Comité des comptes publics agisse rapidement. Nous avons entendu 40 témoins pendant trois mois. Partageons le résumé de ces témoignages avec les Canadiens pendant que les autres mesures sont prises.
La commission d'enquête publique a officiellement commencé ses travaux. L'avocat spécial chargé de récupérer l'argent est sur le point d'engager des poursuites, et d'autres enquêtes et accusations viendront pour montrer que le gouvernement a pris et favorisé des mesures pour tirer cette affaire au clair.
* * *
Les prix de l'essence
M. James Moore (Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam, PCC): Monsieur le Président, on ne va pas au fond des choses en mettant un terme à l'enquête et aux travaux du comité, puis en déclenchant rapidement des élections. Ce n'est pas ainsi que les contribuables souhaitent voir le gouvernement aller au fond des choses.
Le prix de l'essence partout au Canada frôle ou dépasse même la barre du 1 $, alors qu'il est de 72¢ aux États-Unis. Environ la moitié de ce que l'on paie pour un litre d'essence est versé en taxes. Aux États-Unis, les taxes fédérales sur l'essence servent à l'entretien du réseau routier, ce qui n'est pas le cas au Canada.
Le gouvernement va-t-il réduire les taxes sur l'essence ou tenir parole et transférer aux provinces des points d'impôt relatifs aux taxes sur l'essence, comme il l'a promis dans ce qui est censé être son nouveau pacte pour les municipalités?
L'hon. Ralph Goodale (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, les taxes fédérales n'ont pas changé depuis 1995. En général, d'un océan à l'autre, les taxes provinciales sont supérieures aux taxes fédérales.
Nous travaillons actuellement à ce nouveau pacte pour les municipalités, pacte selon lequel le gouvernement du Canada et les provinces partagent avec les localités une partie de leurs recettes fiscales sur l'essence, aux fins de l'amélioration des infrastructures municipales et de la mise en oeuvre d'autres projets très valables au niveau local.
M. James Moore (Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam, PCC): Monsieur le Président, les provinces font leur travail, contrairement au gouvernement fédéral. Voilà le problème. Si le prix de l'essence augmente, il en est de même des recettes qu'Ottawa obtient de la TPS.
L'an dernier, alors que le litre d'essence coûtait 73¢, Ottawa a perçu 1,1 milliard de dollars en TPS; si le litre coûtait 87¢, Ottawa percevrait 200 millions de dollars supplémentaires, et 60 millions de dollars de plus si le prix atteignait 90¢. Les libéraux accablent donc les contribuables, mais ils ne réinjectent pas d'argent dans les infrastructures.
Si le gouvernement n'a pas tenu sa promesse au sujet d'un nouveau pacte pour les municipalités, est-ce parce que les recettes provenant des taxes sur l'essence sont tout simplement trop alléchantes pour qu'il y renonce?
L'hon. Ralph Goodale (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, le député se trompe sur toute la ligne. Dans le dernier budget, nous avons transféré aux municipalités 7 milliards de dollars de recettes fédérales, grâce au remboursement de la TPS. Nous avons accéléré notre programme concernant les infrastructures et nous sommes impatients de travailler avec les provinces afin de trouver le mécanisme qui permettra de partager une partie des taxes sur l'essence avec les municipalités, de manière à ce que les localités d'un océan à l'autre puissent bien s'acquitter de leurs responsabilités.
J'invite l'opposition à nous aider à soutenir les municipalités de notre pays.
* * *
[Français]
La santé
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, la véritable priorité du premier ministre, ce n'est pas la santé, mais l'armée. En effet, dès le budget, son gouvernement, sans même se doter d'une politique étrangère claire, s'est empressé d'annoncer des dépenses militaires de 900 millions de dollars. En santé, rien: le budget ne prévoit aucun nouveau transfert au Québec et aux provinces et, selon le premier ministre, contrairement à l'armée, en santé, ça prend un plan.
Est-ce que le premier ministre, qui avait les moyens financiers de réinvestir dès maintenant en santé, peut expliquer aux gens pourquoi il a choisi l'armée au détriment de la santé?
[Traduction]
L'hon. Ralph Goodale (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, bien entendu, les Canadiens ont un certain nombre de priorités très importantes sur lesquelles ils veulent qu'on se penche. C'est notamment le cas des Forces canadiennes, mais c'est également vrai des soins de santé.
Dans le dernier budget, nous avons transféré deux milliards de dollars aux provinces et nous avons prévu 500 millions de dollars de plus pour lancer une nouvelle agence de la santé publique du Canada.
Le premier ministre a lancé un processus de collaboration avec les provinces qui se poursuivra tout au cours de ce printemps jusqu'à l'été, où aura lieu un sommet des premiers ministres afin d'élaborer un plan de viabilité pour la santé, et le gouvernement du Canada débloquera ensuite les crédits nécessaires.
[Français]
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, dans une entrevue accordée au National Post, le premier ministre, qui prétend vouloir gouverner, en rajoute: ça lui prend un nouveau mandat pour réinvestir en santé.
Le premier ministre admettra-t-il que pour effectuer 900 millions de dépenses militaires, il n'a pas jugé bon d'obtenir un mandat, parce que l'armement, justement, c'est loin d'être la priorité des gens?
L'hon. Pierre Pettigrew (ministre de la Santé, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre responsable des langues officielles, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux que la députée de Québec me donne l'occasion de réitérer devant cette Chambre à quel point nous avons déjà, sur la base de l'accord de 2003, travaillé de très près avec les provinces, que nous voulons aller au-delà de cet engagement, que nous aurons investi 36,8 milliards de nouvelles sommes d'argent au cours des prochaines années, et que c'est certainement, quand on regarde les chiffres, la priorité de notre gouvernement.
M. Richard Marceau (Charlesbourg—Jacques-Cartier, BQ): Monsieur le Président, le ministre de la Santé lance de la poudre aux yeux à toute la population avec ces 37 milliards, car un fait demeure: le gouvernement fédéral actuel s'est désengagé du financement de la santé, et à ce titre, les 16¢ qu'il paie sur chaque dollar dépensé ne suffisent pas. Ce gouvernement est responsable d'une grande partie des problèmes à la santé, car il a lui-même réduit considérablement sa part dans le financement.
Comment expliquer que le premier ministre admet qu'il faut que le fédéral réinvestisse en santé, mais qu'il n'a pas profité du dernier budget pour mettre plus d'argent sur la table?
L'hon. Pierre Pettigrew (ministre de la Santé, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre responsable des langues officielles, Lib.): Monsieur le Président, c'est faux. Dans le dernier budget, un montant de 2 milliards de dollars a été confirmé, au-delà du montant de 34,8 milliards de dollars. Alors, au-delà des chiffres...
Des voix: Oh, oh!
L'hon. Pierre Pettigrew: C'est ce que la députée de Rimouski--Neigette-et-la Mitis appelait «aboyer».
M. Richard Marceau (Charlesbourg—Jacques-Cartier, BQ): Monsieur le Président, c'est une odieuse stratégie que celle du gouvernement fédéral d'attendre la campagne électorale pour annoncer le réinvestissement qu'il veut faire en santé.
Comment ce gouvernement, après avoir causé tant de problèmes dans le système de santé, peut-il maintenant pousser le cynisme jusqu'à faire sa campagne électorale au détriment de la santé? C'est dégueulasse.
L'hon. Pierre Pettigrew (ministre de la Santé, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre responsable des langues officielles, Lib.): Monsieur le Président, vous savez très bien que quand arrive le temps de tenir des élections, il y a plusieurs thèmes; celui de la santé sera au coeur de notre programme.
Toutefois, une chose est certaine: lorsque nous arriverons au moment des élections, ce que les Québécois regarderont, c'est que c'est le temps de voter pour un gouvernement. Qui voulons-nous pour nous gouverner? Voulons-nous que ce soit l'Alliance qui nous gouverne, ou voulons-nous un gouvernement libéral auquel nous participerons?
Le Bloc veut condamner les Québécois à rester dans l'opposition, donc à perdre, en se comportant en perdant dans l'opposition. Nous, nous voulons que les Québécois gagnent et participent au gouvernement.
Des voix: Oh, oh!
[Traduction]
Le vice-président: Nous ferions mieux de ne pas avoir à attendre trop longtemps, car le temps passe.
Le député de Medicine Hat a la parole.
* * *
Le registre des armes à feu
M. Monte Solberg (Medicine Hat, PCC): Monsieur le Président, au cours des dix dernières années, le premier ministre a joué un rôle central dans le financement de gouffres financiers comme l'annulation du projet d'acquisition d'hélicoptères EH-101, la débâcle entourant l'aéroport Pearson, le registre des armes à feu, le cafouillis à DRHC, le fiasco des avions Challenger, les millions de dollars donnés à ses amis à la société Earnscliffe, sans parler, bien entendu, de tout l'argent qui est allé à son ami Chuck Guité.
Le premier ministre affirme croire en la reddition de comptes, mais voyons donc s'il va répondre à une question au sujet de son bilan. Pourquoi le premier ministre a-t-il continué de financer le registre des armes à feu, qui a coûté 50 000 p. 100 de plus que prévu?
L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement entend bien contrôler de façon efficace les armes à feu et, en fait, comme nous le savons bien, la grande majorité des Canadiens veulent qu'on mette en place un programme efficace et efficient de contrôle des armes à feu.
Nous sommes bien décidés à réexaminer le fonctionnement du programme de contrôle des armes à feu. Nous ne revenons pas, cependant, sur notre engagement à l'égard d'un contrôle efficace des armes à feu. Nous ne faisons que réexaminer ce programme. Nous voulons un programme efficient et efficace, capable d'assurer la sécurité publique et convivial pour les propriétaires légitimes d'armes à feu.
M. Monte Solberg (Medicine Hat, PCC): Monsieur le Président, nous parlons du registre des armes à feu et pas de contrôle des armes à feu. Il y a une grande différence. Ainsi, le contrôle des armes à feu consiste à veiller à retirer des mains des criminels les armes à feu, alors que le registre a pour but de prendre l'argent dans les poches des contribuables.
Cependant, en réalité, je parle de reddition de comptes. Le premier ministre adore être félicité, mais lorsqu'il y a des problèmes, et il y en a eu des dizaines relevant de sa compétence lorsqu'il était ministre des Finances, il se décharge de ses responsabilités. Je voudrais savoir pourquoi il ne veut pas assumer la responsabilité de certains des problèmes dont j'ai parlé, y compris dans le cas du registre des armes à feu. Ne va-t-il pas assumer ses responsabilités?
L'hon. Anne McLellan (vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement prend très au sérieux ses responsabilités.
Le député parle du premier ministre qui, lorsqu'il était ministre des Finances, s'est attaqué au déficit laissé par le gouvernement précédent. Il s'est assuré en fait d'éponger le déficit et de réduire la dette de façon permanente. Je pense qu'à la lumière du bilan du premier ministre, on peut constater qu'il rend des comptes. Il assume ses responsabilités. Il agit au nom des Canadiens.
* * *
L'agriculture
M. Rick Casson (Lethbridge, PCC): Monsieur le Président, depuis la visite très médiatisée du premier ministre et du ministre de l'Agriculture à Washington, la situation dans l'industrie du bétail s'est aggravée. Les produits du boeuf qui passaient la frontière avant cette réunion avec le président ne la passent plus et ne la passeront plus tant que la nouvelle règle du département américain de l'Agriculture n'aura pas été mise en oeuvre.
Ce pas en arrière et le fait que la frontière demeure fermée au bétail sur pied indiquent clairement que le gouvernement ne réussit pas à se montrer influent dans ce dossier, dans cette crise. Je pose la question suivante au ministre: à quoi l'industrie bovine peut-elle s'attendre comme prochain pas en arrière de la part du gouvernement?
L'hon. Bob Speller (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): En fait, monsieur le Président, nous avançons dans ce dossier. Comme le député l'a dit, le premier ministre a parlé directement au président. Nous avons été ravis de la réponse du président des États-Unis, qui a dit clairement vouloir que les frontières soient ouvertes et qu'elles le soient maintenant. Il a aussi dit très clairement qu'il voulait que sa décision, ou la décision de son gouvernement, soit fondée sur des données scientifiques, et c'est précisément ce que nous voulons.
M. Rick Casson (Lethbridge, PCC): Monsieur le Président, en raison du manque de leadership du premier ministre, l'industrie du boeuf se bat contre des marchés qui se transforment radicalement et, de plus, les Canadiens qui travaillent pour que leur entreprise demeure viable concurrencent non seulement d'autres Canadiens, mais aussi des producteurs américains, qui ont de gros sous, pour les bovins d'engraissement canadiens. Ces producteurs sont au Canada et ils achètent notre bétail.
Le gouvernement monte un secteur de l'industrie contre un autre, à un moment crucial du processus. Comment le gouvernement pense-t-il que sa stratégie de confrontation avec l'industrie de la transformation contribuera à l'ouverture de la frontière?
L'hon. Bob Speller (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, je ne saisis pas très bien les propos du député. En fait, ce sont des collègues du Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire qui ont demandé des renseignements à l'industrie, dont ils discuteront cet après-midi. Ce n'est pas la position du gouvernement du Canada. C'est la position du Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire. Le député voudra peut-être poser la question à ce comité.
Le gouvernement a travaillé de très près avec tous les intervenants de l'industrie, des éleveurs aux transformateurs en passant par les provinces, de manière à assurer que nous présentons un front commun dans ce dossier. Ce front commun...
Le vice-président: Le député d'Oak Ridges a la parole.
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Les affaires étrangères
M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): Monsieur le Président, le 17 mai, la junte militaire birmane tiendra des pourparlers en vue de l'instauration d'une nouvelle constitution, auxquels participeront probablement certains membres de la Ligue nationale pour la démocratie dirigée par Aung San Suu Kyi. Depuis l'annulation de son élection en 1990, les forces armées ont violé les droits de la personne, mis des gens en prison pour des raisons politiques et fait de la torture une pratique répandue.
Comme le Canada entretient des relations diplomatiques avec la Birmanie, le ministre des Affaires étrangères pourrait-il nous dire, du point de vue de notre engagement, quels messages utiles nous formulons pour exprimer notre appui au processus qui doit conduire à des élections justes et transparentes?
L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député d'Oak Ridges de l'intérêt qu'il vient de manifester pour cette question extrêmement importante. Nous partageons sans réserve l'avis du député d'Oak Ridges, selon lequel cette nouvelle convention, pour être efficace, doit être transparente et inclusive. Toutes les parties doivent pouvoir participer et les délégués doivent être libres de participer au débat politique.
Nous mettrons à profit notre représentation en Birmanie, de même que notre présence à la Commission des droits de l'homme, à l'Assemblée générale des Nations Unies et à des réunions telles que celles du Forum régional de l'ANASE pour faire pression sur la Birmanie et pour implanter la démocratie en Birmanie. Nous pensons vraiment que, cette fois, nous sommes sur la bonne voie. Nous contribuerons, de concert avec nos partenaires internationaux, à maintenir la pression sur le gouvernement birman pour atteindre à cet objectif.
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Le discours du Trône
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, nous apprenons aujourd'hui que les libéraux ont gaspillé 50 000 $ à tenter de trouver une appellation pour le discours du Trône, mais ont fini par n'en choisir aucune. Voilà qui dépasse tout de même de 50 000 $ le financement de base des soins de santé. Pas surprenant que les libéraux n'aient pas su donner de nom à ce discours du Trône tout aussi creux que ceux auxquels nous a habitués le premier ministre.
Ayant déjà gaspillé des millions à l'avantage des copains des libéraux dans le scandale des commandites, comment le ministre des Finances peut-il justifier le gaspillage de milliers de dollars pour chercher à donner un nom au creux discours du Trône des libéraux?
L'hon. Pierre Pettigrew (ministre de la Santé, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre responsable des langues officielles, Lib.): Monsieur le Président, les bras m'en tombent. Nous avons affecté 665 millions de dollars à la santé publique, soit l'investissement le plus important jamais consenti en santé publique, ce qui représente 2 milliards d'argent frais qui vient s'ajouter aux 34,8 milliards de dollars que nous investissons déjà en santé, et l'opposition a le culot de dire que ce ne sont pas là des dépenses remarquables à l'appui de notre régime public de soins de santé.
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La défense nationale
M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, j'ai une question à poser au ministre de la Défense nationale. Le gouvernement engage le Canada dans une voie très dangereuse, avec ses entretiens avec les États-Unis sur la défense antimissile.
Quoi qu'il en soit, les trois dirigeants territoriaux du Yukon, des Territoires du Nord-Ouest et du Nunavut veulent représenter leurs administrés et demandent à participer aux entretiens avec les États-Unis sur la défense antimissile. Le gouvernement annoncera-t-il aujourd'hui que les trois dirigeants territoriaux pourront représenter leurs administrés dans tout pourparler sur la défense antimissile?
L'hon. David Pratt (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, il ne faut pas oublier que, pour l'instant, nous sommes toujours en train de discuter avec les États-Unis. Nous tenons à connaître l'opinion des dirigeants territoriaux et autochtones à ce sujet. Toutefois, il ne faut pas oublier non plus que nous poursuivons ces discussions et que nous espérons les terminer d'ici la fin de l'année.
Cela dit, c'est toujours avec plaisir que je me rends dans le Nord pour discuter de défense avec nos dirigeants territoriaux et autochtones. Pour l'instant, je suis prêt à avoir...
Le vice-président: Le député de St. John's-Ouest a la parole.
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Les pêches
M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PCC): Monsieur le Président, depuis dix ans, trois cents contraventions ont été infligées à des bateaux étrangers qui ont violé les règlements de l'OPANO concernant les Grands Bancs. Ces bateaux devaient faire l'objet de réprimandes par le pays dont ils arborent le pavillon, mais dans 90 p. 100 des cas, ils n'ont fait l'objet d'aucune mesure. Qu'est-ce qui rend les contraventions dressées par le ministère des Pêches et des Océans la semaine dernière différentes des autres, et quelles mesures particulières ont été prises par les pays concernés?
L'hon. Geoff Regan (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, j'ai été ravi d'apprendre cet après-midi que le gouvernement portugais avait ramené le Brites à son port d'attache, compte tenu des preuves évidentes conservées à St. John's. Le Canada est disposé à produire les preuves concrètes de la pêche illégale devant l'Union européenne, et nous nous attendons à ce que le Portugal réprimande ces mauvais comédiens.
M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PCC): Monsieur le Président, il y a des bateaux auxquels ont été infligées deux, trois, voire quatre contraventions et qui pêchent toujours sans qu'aucune mesure n'ait été prise contre eux par le pays dont ils arborent le pavillon. On a découvert qu'un filet trouvé à bord d'un de ces bateaux, et qui aurait été coupé, contenait 64 p. 100 de prises illégales. Le ministre peut-il nous donner la garantie que des mesures seront prises contre le capitaine du bateau, le bateau et ses propriétaires?
L'hon. Geoff Regan (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, les efforts déployés par le gouvernement pour faire cesser la pêche illégale sur le nez et la queue des Grands Bancs se sont traduits par neuf arraisonnements depuis une semaine. En outre, ces pressions exercées par notre Garde côtière et notre marine ont eu pour effet de repousser les flottes étrangères vers la haute mer où elles ne peuvent pêcher les espèces sous le coup du moratoire. Mes collaborateurs m'ont informé aujourd'hui que s'il y avait 14 bateaux portugais là-bas la semaine dernière, il n'y en a plus que cinq cette semaine.
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Les affaires des anciens combattants
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, PCC): Monsieur le Président, j'ai des nouvelles pour le ministre. Il faudra bien plus que des avertissements pour mettre fin à cette surpêche.
Le ministre des Anciens Combattants a eu un autre week-end pour trouver une façon d'aider nos anciens combattants qui veulent participer au pèlerinage, en Normandie, en France, à l'occasion du 60e anniversaire du jour J qui arrive à grands pas, et je dis bien Normandie et non pas Norvège. Il ne reste que 27 jours avant la date anniversaire du 6 juin; quelles autres «solutions», pour employer l'expression utilisée par le secrétaire parlementaire vendredi dernier, le ministre a-t-il imaginées pour aider nos anciens combattants du jour J qui souhaitent se rendre en France? Quand peuvent-ils espérer avoir des détails?
L'hon. John McCallum (ministre des Anciens Combattants, Lib.): Monsieur le Président, j'ai préparé diverses options pour les soumettre dès que possible au Cabinet. Entre-temps, je peux dire que le gouvernement a fait preuve de respect et d'admiration à l'égard des anciens combattants, non seulement en paroles, mais en actes. Dans les trois mois après notre arrivée en poste, nous avons engagé des fonds pour les anciens combattants ayant souffert des essais chimiques. Dans les cinq mois après notre arrivée, nous nous sommes engagés à procéder à la réforme la plus fondamentale des programmes des anciens combattants depuis la Seconde Guerre mondiale, avec l'accord enthousiaste des associations d'anciens combattants.
Je défie l'opposition de nommer un gouvernement, au cours de la dernière génération, qui a fait autant en si peu de temps pour les anciens combattants.
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, PCC): Monsieur le Président, ainsi parle le ministre qui ne sait pas la différence entre Vichy et Vimy. Il y a 60 ans, le gouvernement du Canada n'a pas hésité a envoyer ces hommes en France pour qu'ils combattent pour notre pays et pourtant, aujourd'hui, il continue de tergiverser et de se demander s'il devrait leur fournir une aide financière pour qu'ils puissent y retourner.
Comment les anciens combattants vont-ils pouvoir faire les préparatifs nécessaires pour retourner en France s'ils ne savent pas exactement combien le gouvernement fédéral est prêt à leur accorder et quand il leur fournira cette aide? L'heure H approche à grands pas; quand ces anciens combattants obtiendront-ils une réponse? Qu'attend donc le ministre? Que la date soit passée?
L'hon. John McCallum (ministre des Anciens Combattants, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement a le plus grand respect et la plus profonde admiration pour tous les anciens combattants canadiens. Voilà pourquoi, comme je l'ai dit dans la réponse précédente, nous avons manifesté ce respect et cette admiration non seulement par des paroles, mais aussi par des gestes sans précédent de la part des gouvernements de la dernière génération.
Par rapport à la question précise qui a été posée, j'aurai une réponse d'ici quelques jours, dès que possible en fait.
* * *
[Français]
Le prix de l'essence
M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, BQ): Monsieur le Président, le Comité permanent de l'industrie a recommandé la mise en place d'un office de surveillance du secteur pétrolier. Or, même les pétrolières se rendent à l'argument et se déclarent prêtes à vivre avec un tel organisme de surveillance.
Devant les hausses exagérées du prix de l'essence, puisque le comité le veut, puisque les consommateurs le veulent, puisque les pétrolières le veulent également, comment expliquer qu'il n'y a que ce gouvernement qui refuse de mettre sur pied l'Office de surveillance des produits pétroliers?
[Traduction]
L'hon. R. John Efford (ministre des Ressources naturelles, Lib.): Monsieur le Président, comme je le disais la semaine dernière, trois offices ont déjà été mis en place au Canada: à Terre-Neuve, dans l'Île-du-Prince-Édouard et au Québec. Aujourd'hui même, le Bureau de la concurrence enquête pour voir s'il y a eu fixation des prix au Canada. Le bureau a reçu des plaintes de consommateurs. Chaque fois qu'il reçoit une plainte, il suit le protocole et fait enquête.
J'ai accepté de parler aux agences de consommateurs d'essence dans chaque province et j'aurai d'autres rencontres et discussions avec l'industrie. Il n'est pas nécessaire d'aller plus loin.
[Français]
M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, BQ): Monsieur le Président, nous ne parlons pas de la même chose. Même si on sait que les élections arriveront bientôt, pourquoi le gouvernement ne profite-t-il pas de la collaboration qu'on lui offre pour créer un office de surveillance du secteur pétrolier? Nous pourrions procéder à toutes les étapes, ici en Chambre, en moins de 24 heures et l'office serait créé. C'est quoi le problème pour le gouvernement? Quand on...
Le vice-président: L'honorable ministre de l'Industrie a la parole.
L'hon. Lucienne Robillard (ministre de l'Industrie et ministre responsable de l'Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec, Lib.): Monsieur le Président, c'est quoi le problème pour le Bloc d'être tellement énervé par les élections?
Ce gouvernement gouverne comme il doit le faire pour le bien public. Le Bureau de la concurrence a décidé d'examiner de très près tout le marché pétrolier. Alors, on va laisser le Bureau de la concurrence faire son travail et voir si, de fait, il y a un problème de collusion dans le marché, ou si la situation est plutôt due à l'environnement international, à ce qui se passe pour le prix de l'essence.
* * *
[Traduction]
L'assurance-emploi
M. Brian Pallister (Portage—Lisgar, PCC): Monsieur le Président, la semaine dernière, le gouvernement a laissé entendre qu'il pourrait assouplir les règles d'admissibilité à l'assurance-emploi. La semaine dernière, des députés libéraux ont insulté les Canadiens qui subsistent tant bien que mal avec des emplois saisonniers, en qualifiant d'irritantes leurs préoccupations touchant l'assurance-emploi.
Il y a plus de trois ans, le Comité du développement des ressources humaines a recommandé des modifications à l'assurance-emploi, mais le gouvernement n'en a pas tenu compte. Affichant une compassion de dernière minute, il se montre maintenant disposé, comme par miracle, à délier les cordons de la bourse.
Pourquoi les travailleurs saisonniers accorderaient-ils foi à une manoeuvre électorale cynique pour s'assurer leurs votes?
L'hon. Joseph Volpe (ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences, Lib.): Monsieur le Président, j'ai toujours dit que j'examinerais toutes les propositions qui seraient faites. J'ai déclaré à la Chambre que le groupe de travail libéral sur les travailleurs saisonniers était en train de rédiger des recommandations et que je les soupèserais avant d'annoncer les mesures appropriées. Je le ferai quand le temps me le permettra.
Le député sait-il que nous avons également créé quelque 50 000 emplois le mois dernier? Il voudra certainement féliciter le gouvernement pour ce bon résultat.
M. Brian Pallister (Portage—Lisgar, PCC): Monsieur le Président, je rendrai à César ce qui revient à César; c'est le secteur privé et non le gouvernement qui a créé ces emplois.
Ce n'est pas une coïncidence si les électeurs versatiles, dans de nombreuses circonscriptions au Canada, sont des travailleurs saisonniers. Ces électeurs pourraient faire pencher la balance en faveur des libéraux ou contre eux aux prochaines élections. Le gouvernement n'a rien fait d'autre que négliger ce dossier depuis des années. Il pose maintenant un geste de dernière minute à l'endroit des travailleurs saisonniers, qui luttent pour joindre les deux bouts. En agissant de la sorte, le gouvernement montre son insensibilité et son cynisme, qui sont caractéristiques des libéraux.
Pourquoi le gouvernement ne reconnaît-il pas qu'il utilise davantage une stratégie électorale qu'une stratégie d'emploi?
L'hon. Joseph Volpe (ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences, Lib.): Monsieur le Président, le député se rendra compte que les Canadiens démontrent plus d'intelligence que n'en fait preuve le député dans sa critique.
Je rappelle au député que nous avons pris, ces dernières années, des mesures appropriées dans le dossier des travailleurs saisonniers. Nous avons conclu des accords avec plusieurs provinces, où des fonds ont été affectés pour la mise en oeuvre des ententes sur le développement du marché du travail, notamment dans la province de Québec, que le député connaît peut-être peu. Quelque 600 millions de dollars sont affectés chaque année à cette fin.
Le gouvernement a également dégagé des fonds supplémentaires pour les travailleurs saisonniers de l'industrie forestière...
Le vice-président: La députée de Shefford a la parole.
* * *
[Français]
Les travailleurs âgés
Mme Diane St-Jacques (Shefford, Lib.): Monsieur le Président, on sait que les travailleurs âgés peuvent continuer d'apporter une contribution concrète au marché du travail et aux collectivités. La réalisation des projets pilotes à leur intention nous l'a démontré.
Ma question s'adresse au ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences. Étant donné le succès remporté par ces projets pilotes, est-ce que le gouvernement entend les reconduire ou encore les établir en permanence?
L'hon. Joseph Volpe (ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences, Lib.): Monsieur le Président, effectivement, le gouvernement du Canada a investi 45 millions de dollars depuis 1999 par l'entremise du programme sur l'initiative des projets pilotes. On constate que ces investissements ont porté fruits. Le taux de chômage diminue et on a vu plus de 175 000 emplois créés depuis le début 2003. J'ai toujours dit dans cette Chambre, que s'il y a lieu d'assurer une participation accrue au marché du travail, nous ferons le nécessaire afin d'aider toute personne à y participer pleinement.
* * *
[Traduction]
La fonction publique
M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PCC): Monsieur le Président, chaque fois que nous posons des questions sur la politique libérale de discrimination qui base l'admissibilité des candidats à certains postes ouverts dans la région d'Ottawa sur leur code postal, le gouvernement nous dit qu'il tient à trouver des solutions à ce problème. La présidente de la Commission de la fonction publique a dit ce matin que le Conseil du Trésor n'était pas prêt à débloquer des fonds, ne serait-ce que pour établir un plan dans ce sens.
Le président du Conseil du Trésor annoncera-t-il aujourd'hui qu'il débloquera des fonds pour mener une telle étude ou expliquera-t-il alors aux Canadiens qui vivent à l'extérieur d'Ottawa pourquoi les libéraux ne veulent pas leur permettre de travailler à Ottawa?
L'hon. Reg Alcock (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, Lib.): Monsieur le Président, je ne suis pas du tout prêt à accepter le préambule de la question du député. Je me pencherai sur ce dossier.
J'ai récemment rencontré la présidente de la Commission de la fonction publique, qui ne m'a rien dit à ce sujet. En fait, la Commission a soumis une proposition et songe à effectuer le recrutement par voie électronique. Les responsables sont disposés à rencontrer le député et tout autre député intéressé pour discuter de cette question à tout moment qui leur conviendra.
M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PCC): Monsieur le Président, je ne tiens pas à discuter de cette politique. Nous voulons que des fonds soient prévus à cet effet, comme l'a demandé la présidente de la Commission de la fonction publique ce matin.
Le gouvernement a maintenant adopté une variante de cette politique de discrimination. L'un des volets du programme fédéral d'expérience de travail pour les étudiants vise à aider les étudiants à temps plein à trouver un emploi d'été. On a fait savoir aux étudiants que ce programme ne s'adressait qu'aux étudiants de la région d'Ottawa. Le ministère de la Justice informe les candidats que les étudiants de la région de la capitale nationale seront les premiers embauchés.
Le gouvernement mettra-t-il fin à cette politique de favoritisme choquante et ouvrira-t-il à tous les Canadiens tous les postes s'adressant aux étudiants, tous les emplois d'été, à Ottawa?
L'hon. Reg Alcock (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, Lib.): Monsieur le Président, ce second élément ne m'a été présenté qu'il y a une semaine environ. Nous faisons présentement enquête pour établir la véracité des faits rapportés. On se doit de vérifier de telles affirmations lancées en Chambre.
* * *
[Français]
L'agriculture
M. Roger Gaudet (Berthier—Montcalm, BQ): Monsieur le Président, l'Agence d'inspection des aliments a décidé récemment de remettre en vigueur un règlement relatif au transport d'animaux fragilisés, et n'a pas cru bon d'en avertir les producteurs de porcs, avec la conséquence que plusieurs d'entre eux font face à de fortes amendes et ont le sentiment de s'être fait piéger.
Quelles mesures le ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire entend-il prendre pour ramener l'Agence d'inspection des aliments à l'ordre, pour qu'elle cesse ce traitement abusif et préjudiciable à l'endroit des producteurs agricoles de ma région?
[Traduction]
L'hon. Bob Speller (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, j'étais à Québec jeudi et vendredi derniers et j'y ai rencontré les producteurs de porcs du Québec. Ils ont porté cette question à mon attention. Je leur ai dit que j'allais très certainement l'étudier. J'ai demandé à l'Agence canadienne d'inspection des aliments de se pencher là-dessus.
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Le développement des ressources humaines
M. Alan Tonks (York-Sud—Weston, Lib.): Monsieur le Président, nous entendons dire sans arrêt qu'une pénurie de compétences est imminente ou que les employeurs se font la lutte pour recruter des travailleurs qualifiés dans notre pays et à l'étranger.
Ma question s'adresse au ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences. Le ministre va-t-il informer la Chambre de la participation du gouvernement à la promotion de métiers spécialisés pour le pays et pour l'économie?
L'hon. Joseph Volpe (ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement est partenaire à part entière des secteurs d'activité, du Forum canadien sur l'apprentissage, du secteur privé et de tous les ordres de gouvernement pour ce qui est de faire en sorte que les métiers spécialisés et de pointe constituent le premier choix de carrière des jeunes hommes et femmes.
Ce matin, nous avons eu un indice du succès de cette orientation. Nous avons reçu un appel de Hong-Kong, de la part des responsables du concours de WorldSkills. Je suis heureux que le Canada ait été choisi à l'unanimité pour être le pays hôte du concours de WorldSkills de 2009, à Calgary.
AFFAIRES COURANTES
[Affaires courantes]
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[Traduction]
Nominations par décret
L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, j'ai le plaisir de déposer, dans les deux langues officielles, quelques décrets annonçant des nominations faites récemment par le gouvernement.
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Réponse du gouvernement à des pétitions
L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à une pétition.
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Les comités de la Chambre
Justice, droits de la personne, sécurité publique et protection civile
M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le premier rapport du Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile intitulé «Améliorer la procédure de nomination des juges de la Cour suprême du Canada».
Le rapport, qui répond aux propositions formulées par le premier ministre, le leader du gouvernement à la Chambre et les formations politiques représentées à la Chambre, présente les opinions des membres du comité, au moment où nous définissons un rôle qui convient aux députés de la Chambre des communes dans le processus de nominations des juges à la Cour suprême du Canada.
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Pétitions
L'hon. Joe Jordan (Leeds—Grenville, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter aujourd'hui une pétition signée par des électeurs de l'est de l'Ontario. Les signataires font remarquer à la Chambre que le nouveau projet de loi adopté en janvier 2004 et traitant du congé payé de six semaines accordé aux personnes dispensant des soins à des malades en phase terminale devrait être modifié de manière à inclure un congé payé, soit par la même source, soit par une autre, aux personnes dispensant des soins à des personne à charge gravement malades.
Selon les signataires, il pourrait notamment y avoir moins de faillites, de séparations de couple, de pertes d'emploi permanent et d'assistés sociaux si un programme de protection du revenu était mis en place pour couvrir ce secteur des soins de santé qui ne l'est pas en ce moment et dans lequel nombre de Canadiens peuvent être touchés à l'improviste. Afin d'assurer la paix d'esprit des Canadiens concernés, il devrait y avoir un programme officiel pour les protéger, et qui serait endossé par tous les employeurs, à l'instar de la mesure législative actuelle sur le congé parental.
Par conséquent, les signataires prient le Parlement d'adopter une mesure législative visant à modifier la loi entrée en vigueur en janvier ou d'adopter un nouveau projet de loi couvrant ce secteur critique des soins aux malades et des soins de santé dans notre pays.
* * *
[Français]
Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.): Monsieur le Président, il y a près de 10 000 signatures sur cette pétition, qui se lit comme suit:
Nous, soussignés, résidents du Canada, faisons remarquer à la Chambre ce qui suit: |
Considérant que la situation en Palestine et dans les camps palestiniens du Liban présente un risque réel pour la vie des personne qui s'y retrouvent ou qui y retourneraient; |
Considérant que le Canada est signataire de la Convention relative au statut de réfugié et qu'il a, à ce titre, des obligations internationales quant à la protection des demandeurs d'asile; |
Considérant que de nombreux demandeurs d'asile d'origine palestinienne ont formulé une demande de statut de réfugié au Canada; |
Considérant que plusieurs demandeurs d'asile déboutés par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié seront retournés dans des camps de réfugiés au Liban ou en Palestine, à moins d'une décision contraire des autorités compétentes; |
Considérant que trois demandeurs d'asile d'origine palestinienne, soit Nabi Ayoub, Therese Boulos Haddad et Khalil Ayoub, sont actuellement réfugiés à l'église Notre-Dame-de-Grâce à Montréal afin d'éviter la déportation; |
Par conséquent, vos pétitionnaires demandent au Parlement d'intervenir auprès des autorités compétentes, afin que les trois demandeurs d'asile ci-haut mentionnés soient reçus au Canada à titre de résidents permanents pour motifs humanitaires, et que les ordres de renvoi contre les autres demandeurs du statut de réfugié d'origine palestinienne soient suspendus afin que leur dossier soit réexaminé par les autorités compétentes. |
Comme je l'ai mentionné, cette pétition compte près de 10 000 signatures.
* * *
[Traduction]
M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, PCC): Monsieur le Président, j'ai une série de pétitions à présenter.
La première pétition provient de 204 de mes électeurs qui prient le Parlement de respecter la définition du mariage contenue dans la common law comme étant l'union entre un homme et une femme à l'exclusion de tout autre type d'union et ils prient le Parlement d'adopter une mesure législative en ce sens.
La deuxième pétition provient de 44 habitants de Calgary qui prient le Parlement d'invoquer, au besoin, la clause dérogatoire de la Charte des droits et libertés pour maintenir la définition hétérosexuelle du mariage, qui a été respectée dans chacune des grandes cultures à travers l'histoire connue.
La troisième pétition provient de plusieurs centaines d'habitants de Peterborough et de la région environnante, qui prient le Parlement d'adopter toutes les mesures nécessaires pour maintenir dans la loi et à perpétuité la définition actuelle du mariage et pour empêcher tout tribunal de renverser ou de modifier cette définition.
* * *
M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, tout au long de la législature, j'ai présenté des pétitions au nom des personnes atteintes de maladies du rein, de leurs familles, des chercheurs et des médecins qui essaient de les aider.
Des dizaines de milliers de personnes ont exhorté le Parlement à améliorer la situation pour les personnes atteintes de maladies du rein, soulignant le travail admirable de la Fondation du rein et l'importance des transplantations d'organes, du rein bioartificiel et de bonnes recherches au Canada sur les maladies néphrétiques.
Dans la deuxième pétition, les signataires signalent que les maladies du rein sont un problème énorme qui va s'aggravant. Ils savent qu'on réalise de vrais progrès dans les différents modes de prévention et de traitement, mais ils demandent au Parlement d'inciter les Instituts de recherche en santé du Canada à faire explicitement une place à la recherche sur le rein dans l'un des instituts, qui serait appelé Institut des maladies du rein et du tractus urinaire.
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Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends la parole à la Chambre pour présenter une pétition signée par un certain nombre de personnes de la région de Toronto au sujet de la réunification des familles. Elles signalent que la réunification des familles est depuis longtemps et demeure un élément central de la politique du Canada sur l'immigration. Les pétitionnaires appuient le projet de loi C-436, qui modifierait la loi pour permettre à un résident permanent de parrainer un membre de sa famille qui, par ailleurs, ne serait pas admissible aux termes des règles existantes.
* * *
M. Rob Anders (Calgary-Ouest, PCC): Monsieur le Président, je présente une pétition signée par 362 personnes. Les pétitionnaires disent que, essentiellement, ce sont les députés élus, et non les magistrats non élus, qui devraient prendre les décisions.
Les pétitionnaires croient également qu'il faut préserver et protéger la définition du mariage. Ils estiment qu'il faut au besoin invoquer l'article 33 de la charte pour préserver et protéger la définition actuelle du mariage, soit l'union entre un homme et une femme.
M. Dale Johnston (Wetaskiwin, PCC): Monsieur le Président, je voudrais présenter une pétition à la Chambre. Les électeurs de ma circonscription qui l'ont signée sont plus nombreux que le nombre minimal nécessaire.
Les pétitionnaires demandent au Parlement d'adopter une mesure législative pour reconnaître l'institution du mariage dans le droit fédéral comme étant l'union permanente d'un homme et d'une femme à l'exclusion de toute autre forme d'union.
* * *
Questions transformées en ordres de dépôt de documents
L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, si la question no 78 pouvait être transformée en ordre de dépôt de document, le document serait déposé immédiatement.
Le vice-président: D'accord?
Des voix: D'accord.
[Texte]
Quels fonds, subventions, prêts et garanties d’emprunt le gouvernement fédéral a-t-il accordés dans la circonscription de Dartmouth pour chacun des exercices suivants: 1999-2000, 2000-2001, 2001-2002, 2002-2003 et, le cas échéant: a) quel était le ministère ou l’organisme responsable; b) quel était le programme en vertu duquel le paiement a été fait; c) quel était le nom du destinataire, du groupe ou de l’organisation; d) quel était la valeur pécuniaire du paiement; e) quel était le pourcentage du financement du programme couvert par le paiement reçu?
(Le document est déposé.)
[Traduction]
L'hon. Larry Bagnell: Monsieur le Président, je demande que les autres questions restent au Feuilleton.
Le vice-président: D'accord?
Des voix: D'accord.
Initiatives ministérielles
[Initiatives ministérielles]
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[Traduction]
Loi sur la gestion financière et statistique des premières nations
La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-23, Loi prévoyant les pouvoirs en matière d'imposition foncière des premières nations, constituant la Commission de la fiscalité des premières nations, le Conseil de gestion financière des premières nations, l'Administration financière des premières nations ainsi que l'Institut de la statistique des premières nations et apportant des modifications corrélatives à certaines lois, soit lu pour la troisième fois et adopté, et de l'amendement.
L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Monsieur le Président, au nom de la brièveté, j'indique seulement que les interventions du député de Rivière Churchill d'abord, puis celle du député de Lac-Saint-Louis ensuite, qui était particulièrement érudite, correspondent à mon opinion et par conséquent, afin faciliter le débat et de faire avancer la question, je vais seulement proposer un sous-amendement. Je propose:
Que l'amendement soit modifié par l'ajout après les mots «aux besoins de la majorité des premières nations» de ce qui suit: |
«en particulier, le besoin de mener de vastes consultations auprès des dirigeants des premières nations sur les avantages et les effets de cette nouvelle relation fiscale». |
Le vice-président: La présidence a un sous-amendement déposé par le député de Davenport et jugé recevable.
M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.): Monsieur le Président, j'appuie le sous-amendement de mon collègue de Davenport et je tiens à souligner que le gouvernement devrait entreprendre des consultations dignes de ce nom avec les premières nations au sujet du projet de loi C-23.
Notre premier espoir, la motion originale de mon collègue de Rivière Churchill, était que le projet de loi soit renvoyé au comité pour réexamen et consultation supplémentaire étant donné notre conviction que les consultations ont été insuffisantes et que le projet de loi demeure une solution imposée pour régler un problème qu'il aurait été préférable de résoudre autrement, notamment en reprenant l'étude de la question à zéro, en reprenant les négociations dans un esprit de conciliation et sur la base du partage des ressources, qui appartiennent aux premières nations, ce qui a été reconnu par traité et inscrit dans la Constitution à l'article 35.
Nous estimons que, si nous adoptons le projet de loi en nous servant de notre majorité et si nous l'envoyons au Sénat sous sa forme actuelle, dans le contexte dans lequel nous nous trouvons aujourd'hui, à savoir que la vaste majorité des premières nations y sont totalement opposées, oui, il sera adopté, mais sans le consentement de ces dernières.
En effet, si le projet de loi est adopté, il demeurera une imposition pour les premières nations. L'histoire a prouvé que les premières nations sont déterminées et qu'elles ne cèdent pas de terrain concernant les droits inhérents que leur confère la Constitution. Elles continueront à s'opposer à cette mesure législative, que ce soit à court terme ou à long terme, si elles sont réellement convaincues qu'il n'y a pas eu de consultations dignes de ce nom au sujet des institutions dont le projet de loi C-23 prévoit la création. Elles sont prêtes à continuer à s'opposer au projet de loi dans le court terme, le moyen terme et certainement le long terme.
Faisons-nous des progrès de cette manière? Est-ce réellement ce que nous voulons ou ne recherchons-nous pas plutôt un consensus, la conciliation, en écoutant les doléances légitimes des premières nations et en tenant compte de leur opposition? Tel est notre devoir de parlementaires. Nous devons, en collaboration avec elles, élaborer une mesure législative en fonction de leur désir concernant leur intégrité en tant que premières nations et leur droit à l'autonomie gouvernementale et à la gestion de leurs propres affaires. C'est réellement ce que beaucoup d'entre nous veulent, des deux côtés de la Chambre.
J'aimerais citer certaines des résolutions adoptées par les chefs de l'Assemblée des Premières nations à diverses occasions. Je pense qu'elles énoncent très clairement pourquoi elles sont opposées au projet de loi C-23, sous sa forme actuelle.
Une des résolutions dit ceci:
Attendu que l'assemblée des chefs reconnaît que les relations bilatérales entre les premières nations et le gouvernement fédéral et la création des institutions doivent être basées sur: |
1. une stratégie de mise en oeuvre pro-active dans la voie d'une relation financière bilatérale; une relation de nation à nation qui maintient et protège les droits collectifs (ancestraux ou issus de traités) des premières nations; la résolution 5/96 et la résolution 49/98 de l'APN et les recommandations similaires du rapport Penner et du rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones concernant les relations financières, notamment les recommandations concernant le partage des recettes tirées des terres et des ressources naturelles; et... |
Le préambule d'une autre résolution adoptée à Kahnawake, au Québec, en juillet 2002, dit ceci:
Attendu que les premières nations ont reçu du créateur le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale, droit reconnu par le droit international et l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982; et |
Attendu que les premières nations ont dénoncé le processus consultatif ayant donné lieu à la Loi sur la gouvernance des premières nations comme étant illégal sur la foi du critère constitutionnel établi par la Cour suprême du Canada dans des causes comme celles de Delgumuukw et Sparrow; et |
Attendu que malgré l'opposition d'une majorité écrasante de premières nations du Canada, le gouvernement du Canada est allé de l'avant et a présenté au Parlement le projet de loi C-61, Loi sur la gouvernance des premières nations, le 14 juin 2002, et qu'il l'a renvoyé au comité après l'étape de la première lecture; |
Par conséquent, il est résolu que nous exhortons le gouvernement du Canada à faire participer les premières nations à un processus bilatéral respectueux axé sur la mise en oeuvre de nos droits, conformément aux principes énoncés dans le rapport de la Commission royale d'enquête sur les peuples autochtones et le rapport Penner; et |
Une autre résolution dit ceci:
Attendu que les instruments juridiques tels que la Proclamation royale (1763), les traités historiques entre les premières nations et la Couronne, le droit international, notamment les décisions récentes de la Cour suprême relativement à la protection et à la reconnaissance des droits inhérents des premières nations, et que par ailleurs, l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 reconnaît et affirme les droits ancestraux ou issus de traités; et |
Lorsque je suis intervenu ce matin, j'ai souligné que c'était en fait une question de confiance et de compréhension mutuelles. Voilà ce qui est fondamental en l'occurrence. En réalité, je me suis entretenu avec de nombreux Indiens, j'en connais bon nombre, des Mohawks, des Ojibwas, des Algonquins et d'autres, et ils m'ont tous dit, indépendamment du fait qu'ils soient chefs ou non, qu'à leurs yeux, le projet de loi C-23 porte atteinte à leurs droits inhérents, qu'ils n'ont pas été consultés suffisamment ni comme il se doit et qu'on leur a imposé ce projet de loi.
Mon collègue, le député de Glengarry—Prescott—Russell, a signalé ce matin que nous pourrions peut-être accepter comme majorité 50 p. 100 plus un, à défaut de 60 p. 100. Là n'est pas la question. L'important, c'est que, dans une négociation entre ce qu'ils considèrent des nations souveraines et le gouvernement fédéral, ces parties ayant signé des traités reconnaissant leur droit de se gouverner, au même titre que le droit dont nous jouissons ici de gérer nos propres affaires d'un côté comme de l'autre, nous avons le devoir de respecter ce droit en écoutant les véritables préoccupations de la vaste majorité de ces gens-là, indépendamment qu'elle s'élève à 60 p. 100 ou 70 p. 100. D'après ce que je sais, une écrasante majorité est contre le projet de loi C-23.
Nous devrions nous demander si nous voulons un projet de loi qui laisse complètement à désirer, de l'avis de ceux sur qui il a des répercussions. Allons-nous de l'avant, coûte que coûte, ou voulons-nous être à l'écoute, ouvrir nos yeux et nos oreilles et dire aux premières nations que nous les avons écoutées, que nous sommes conscients du problème qu'elles ont décelé dans le projet de loi et que nous allons en retarder l'adoption le temps qu'il faut pour amorcer des consultations exhaustives, comme l'a proposé le député de Davenport dans son sous-amendement, afin de produire un projet de loi qui respecte les opinions, les droits et les préoccupations des premières nations et, par souci de conciliation et d'équité, afin d'aller de l'avant dans le nouvel esprit dont le premier ministre a parlé?
Voilà essentiellement les raisons pour lesquelles j'appuie le sous-amendement proposé par mon collègue, le député de Davenport. J'espère que la Chambre l'appuiera de manière inconditionnelle et que nous établirons un nouvel esprit de conciliation, d'équité et de compréhension mutuelle avec les premières nations de notre pays.
L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais présenter quelques observations sur certains des éléments que le député a abordés et que j'ai trouvé intéressants. D'ailleurs, j'ai apprécié tout ce qui a été dit. Le débat est excellent, et les deux côtés de la chambre l'alimentent par leurs idées. J'ai eu de bonnes rencontres avec Roberta Jamieson et le chef Paibomsai. Ils ont abordé avec moi certaines questions sur lesquelles j'ai fait des recherches et auxquelles j'ai trouvé des réponses.
Ce projet de loi a fait l'objet de consultations et d'études qui ont commencé au cours des années 90. Lorsque le député dit que la consultation a été insuffisante, pourrait-il décrire en quoi elle a consisté? Il a parlé des votes. J'expliquerai dans quel contexte ces votes ont eu lieu parce que le député a, je crois, évoqué certains chiffres sur lesquels je pourrai fournir plus de précisions.
J'ai demandé au ministère de recueillir pour moi certains renseignements. Au cours de son assemblée générale, l'APN a tenu en 2001 un vote à Halifax. La résolution no 24 de l'assemblée générale de 2001 a été approuvée par 61 p. 100 contre 38 p. 100. Le comité de l'APN sur les relations financières a recommandé de créer quatre nouvelles institutions financières nationales des premières nations au moyen d'un projet de loi fédéral. Ce vote de portait pas sur ce projet de loi, mais sur la possibilité de l'améliorer ultérieurement.
Il est vrai que, durant le débat à l'assemblée générale de l'APN, les coprésidents du Comité des chefs ont annoncé qu'ils présenteraient de nouveau l'avant-projet de loi à une assemblée nationale des chefs pour examen et commentaires. Ils ont tenu parole.
En août 2002, le chef national de l'APN a distribué, à titre consultatif, à tous les chefs des premières nations des exemplaires d'un avant-projet de loi et d'un guide communautaire. Je ne pense pas que nous puissions élargir la consultation bien au-delà des chefs des premières nations du Canada.
Dans le communiqué adressé aux chefs, le chef national invite toutes les premières nations à assister à l'assemblée nationale sur les institutions financières et sur l'avant-projet de loi. Cette assemblée s'est tenue en septembre 2002 et a été d'un apport précieux à l'élaboration du projet de loi.
Certaines premières nations s'opposent à cette mesure législative, mais pas nécessairement la majorité d'entre elles. En outre, il n'y a certainement eu aucune rétroaction depuis que nous avons fait les modifications que la majorité a demandées.
Que ce soit vrai ou non, je donne simplement des éléments d'information. L'Assemblée des Premières Nations s'est prononcée par vote sur ce projet de loi à une seule occasion, en l'occurrence en octobre 2003. Ce vote portait sur la résolution concernant toutes les mesures législatives fédérales en vigueur sur les autochtones. On en a parlé plus tôt cet après-midi. Trois projets de loi étaient visés; le vote ne portait pas exclusivement sur le projet de loi C-23. Les chefs ont rejeté la résolution dans une proportion de 61 p. 100, avec 109 voix contre 65.
Dans une intervention antérieure, le député a mentionné que quelque 500 membres auraient voté contre, mais uniquement 109 chefs sur 633 ont pris part à ce vote. Toutefois, si on tient compte du fait qu'il y a 633 chefs au Canada, cela signifie qu'uniquement 17 p. 100 d'entre eux ont rejeté la résolution. Qui plus est, le projet de loi comporte maintenant des modifications visant à remédier aux lacunes relevées par les chefs lors de cette assemblée.
Pour être juste, il faut dire qu'il n'y a pas eu de votes. Des consultations ont eu lieu, depuis cette résolution. L'avant-projet de loi a été envoyé à tous les chefs au Canada et ceux-ci ont apporté un nombre considérable de modifications. Depuis, aucun vote n'a eu lieu. Néanmoins, depuis que nous avons procédé aux grandes améliorations demandées, rien ne montre comme le député le prétend que 500 chefs s'opposent peut-être au projet de loi.
M. Clifford Lincoln: Monsieur le Président, j'estime qu'il est contradictoire d'affirmer que, puisqu'aucun vote n'a été pris depuis l'adoption de résolutions précédentes, celles-ci sont dépassées. Selon moi, si quelque chose avait changé, les premières nations auraient adopté une résolution disant qu'ils acceptent le projet de loi dont il est question aujourd'hui. Tous ceux à qui j'ai parlé se sont dits totalement contre le projet de loi.
Le député a mentionné le nom du chef Roberta Jamieson. Si nous le lui demandions, elle nous dirait qu'elle est tout aussi contre le projet de loi qu'auparavant. Les nombreux chefs à qui j'ai parlé me disent la même chose. Les amendements apportés ne leur ont pas fait changer d'idée. En fait, ils ont affirmé que les amendements ne constituent que de la poudre aux yeux.
Selon moi, les résolutions sont toujours aussi valables. Elles ont été adoptées en bonne et due forme. Au cours de l'assemblée spéciale des chefs du 19 novembre 2002, exclusivement sur la question du projet de loi sur les institutions financières et statistiques, on a dit ce qui suit:
1. le projet de loi comporte des lacunes et ne peut pas être corrigé par de simples amendements; |
Voilà ce qu'on y a dit.
2. Le projet de loi n’est pas en harmonie avec les mandats antérieurs conférés par les résolutions de l’APNNo 5/96 et 49/98 et ne reconnaît pas le droit fondamental des Premières Nations àl’autonomie gouvernementale et aux relations de nation à nation; |
3. Les dispositions du projet de loi briment les autochtones, empiètent sur leurs droits conféréspar traité et empirent le statu quo; |
4. Le projet de loi viole la relation historique de nation à nation, fondée sur les traités, entre laCouronne et les Premières Nations; il viole l’essence même de cette relation. |
Cette résolution a été adoptée à 81 voix contre 10 avec 2 abstentions.
Une autre résolution de la Confédération des nations de l'APN, la résolution no 1/2003, a été adoptée les 20 et 21 février 2003 à 37 voix contre 2 sans abstention. Elle disait:
FINALEMENT, QU'IL SOIT RÉSOLU que la Confédération des nations de l'APN ordonne par les présentes au chef national de faire une déclaration publique et sans équivoque aux médias pour annoncer notre opposition au projet de loi C-19, la Loi sur la gestion financière et statistique des premières nations. |
Il est bien clair que ces résolutions sont toujours en vigueur à moins qu'elles n'aient été retirées, désavouées ou démenties. Or, elles ne l'ont pas été.
Comme je l'ai dit, j'ai parlé à des chefs qui ont pris part à ces délibérations, et mes collègues de Winnipeg-Centre et de Rivière Churchill ainsi que d'autres collègues l'ont certainement fait aussi. Les chefs soutiennent qu'ils n'ont pas changé d'idée depuis l'adoption de ces résolutions.
Une des résolutions disait clairement que de simples amendements au projet de loi ne suffiraient pas pour régler le problème parce que ce projet de loi comportait des lacunes fondamentales. C'est ainsi qu'ils jugent ce projet de loi. Ils y sont, en grande majorité, totalement et fermement opposés et nous devrions tenir compte de leur opinion. Nous devrions reprendre les négociations avec eux. Nous devrions leur parler à nouveau. Nous devrions les écouter davantage. En procédant coûte que coûte, on aura sans doute un projet de loi, mais il ne sera pas accepté par ceux-là même qui sont visés par cette mesure législative.
À titre de parlementaires, il serait totalement répréhensible que nous agissions ainsi. Nous n'avons pas toutes les réponses quant aux droits de ceux qui ne sont pas ici pour se défendre. Voilà pourquoi ils s'expriment par le truchement de résolutions et par le biais des médias. Nous devons les écouter. Je prie mes collègues de tous les côtés à la Chambre d'écouter et d'adopter le sous-amendement présenté par mon collègue de Davenport.
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, je suis heureux d'avoir l'occasion de participer au débat sur le sous-amendement de notre collègue de Davenport. Je suis heureux qu'il l'ait présenté, car je voulais défendre une position semblable. Il faut discuter à nouveau de cette question et une nouvelle ronde de négociations véritables devrait avoir lieu si nous voulons aller de l'avant avec le nouveau pacte fiscal avec les premières nations et les peuples autochtones.
Le sous-amendement à la motion parle précisément de la nécessité de consulter pleinement les chefs des premières nations. Je ne suis pas d'accord avec le secrétaire parlementaire qui a cité quelques exemples. Ces consultations n'ont pas eu lieu.
Le secrétaire parlementaire a déclaré que les ébauches des mesures que le gouvernement allait prendre avaient été envoyées aux chefs des premières nations. La consultation, au sens strict du terme, ne signifie pas qu'on dit aux gens ce que nous allons leur faire. Le mot consultation laisse entendre qu'on va tenir compte de ce que les gens vont nous dire. Cela exige un échange. Cela ne respecterait pas la définition juridique. On ne peut pas parler de consultation lorsqu'on se contente d'annoncer aux gens qu'on va leur faire cela à compter du 1er avril ou au début du prochain exercice et qu'on leur demande ensuite ce qu'ils en pensent. Pour qu'on puisse parler d'une véritable consultation, il faut tenir compte des préoccupations de l'autre partie.
Mon collègue de Lac-Saint-Louis a cité une décision récente de la Cour suprême dans l'affaire Sparrow qui précise ce qu'on entend par une consultation raisonnable et complète. Il a également mentionné l'affaire Delgamuukw, qui était un autre jugement récent de la Cour suprême du Canada établissant un précédent. Pour ma part, j'ai été très heureux qu'on parle de la nécessité de consulter pleinement dans le sous-amendement proposé par le député de Davenport.
Pour clarifier peut-être la chronologie des événements qui ont conduit à la présentation du projet de loi, je tiens à préciser qu'il semble y avoir un certain malentendu et j'irai jusqu'à dire de la désinformation de la part du secrétaire parlementaire et de ceux qui soutiennent le projet de loi. Revenons un petit peu en arrière et examinons la chronologie. Les gens pourront ensuite décider par eux-mêmes s'ils considèrent qu'il s'agit d'une véritable consultation.
L'inscription de ces quatre institutions financières et statistiques dans la loi fédérale a été envisagée au départ à l'assemblée annuelle de l'Assemblée des Premières Nations à Halifax, à l'été 2001. J'étais là en même temps que la chef à ce moment-là du Nouveau Parti démocratique, la députée de Halifax. Le projet de résolution appuyant la notion en question a été rejeté au congrès. On a fait circuler cette idée qui a été rejetée à cette assemblée. Elle n'a pas obtenu 60 p. 100 des voix à ce moment-là.
Le petit groupe de premières nations qui étaient favorables à cette notion ont exprimé diverses menaces liées à la procédure, menaces dont j'ai été témoin, y compris la révocation ou la destitution du président de l'assemblée. Elles défiaient la présidence parce qu'elles étaient déçues du rejet de leur initiative.
Dans l'intérêt des bonnes relations, certains chefs ont généreusement accepté que l'idée des institutions continue de faire son chemin, mais en précisant très clairement que le consentement était donné à la condition explicite que tout projet de loi soit d'abord soumis à l'Assemblée des premières nations pour être approuvé, rejeté ou modifié.
L'idée a été rejetée. Un petit groupe de chefs attachaient tant d'importance à cette question que d'autres chefs ont dit qu'ils mettraient cette notion de l'avant à la condition que rien ne soit mis en place et qu'aucune mesure législative ne soit approuvée sans que l'assemblée n'en soit saisie à nouveau pour la ratifier et l'approuver.
C'était là une chronologie précise de la façon dont le projet de loi a été présenté puis élaboré à l'assemblée de Halifax, ce dont j'ai été personnellement témoin. Malheureusement, il y a eu une réticence marquée à respecter l'engagement de saisir à nouveau l'assemblée du projet pour qu'elle l'approuve ou le rejette.
Diverses manoeuvres de procédure ont été déployées depuis l'été de 2002 pour empêcher les premières nations de donner leur opinion sur le projet de loi. Les supporteurs du projet de loi, qui, de toute évidence, ont été très bien financés par AINC pour faire la promotion du projet de loi, se sont lancés dans une campagne d'un océan à l'autre pour mousser les mérites du projet de loi et pour donner l'impression qu'il bénéficiait d'un vaste appui à l'échelle nationale.
Je ne peux que déplorer cet état de choses. Je déplore le fait que des ressources ont été prélevées sur le budget de base d'AINC consacré à l'aide pour la création de ces quatre institutions financières, sans l'adoption préalable d'une loi habilitante. Je déplore en outre que le personnel de ces quatre nouvelles institutions financières soit payé pour parcourir le pays et faire des pressions afin que les députés appuient le projet. Il convient de dire ici que la charrue a été placée devant les boeufs.
La loi habilitante n'a jamais été adoptée pour la création de ces institutions. Le ministre des Affaires indiennes a pris l'initiative et les a créées de toute façon. Il a ensuite laissé le nouveau personnel de ces institutions voyager dans tout le pays pour promouvoir la création des diverses institutions. C'est vraiment une insulte à la procédure établie à laquelle on pouvait s'attendre.
Permettez-moi à nouveau de parler de l'importance de l'appui partout au pays. On a lancé bien des statistiques et des chiffres à ce sujet. Je tiens à préciser que le projet de loi est appuyé par un noyau dur de 30 premières nations environ, pratiquement toutes de Colombie-Britannique.
J'étais présent à l'assemblée de Squamish dont a parlé le secrétaire parlementaire. Le député de Saint-Hyacinthe—Bagot, porte-parole du Bloc québécois en matière d'affaires autochtones, «mon frère autochtone», comme nous avons coutume de nous appeler, et moi-même nous sommes rendus à Squamish et avons participé à l'assemblée en lui demandant expressément de nous indiquer sa ligne de pensée. Nous avons ainsi demandé aux chefs assemblés de nous dire si oui ou non ils appuyaient le projet de loi C-19, selon l'appellation de l'époque, autrement dit le C-23 que nous connaissons aujourd'hui.
La question a été débattue. De la tribune des observateurs, nous avons assisté à des échanges vigoureux et entiers. Je souhaiterais en voir parfois de tels à la Chambre des communes. En effet, des opinions bien arrêtées ont alors été confrontées en toute légitimité. En dernière analyse, l'Assemblée des Premières Nations a rejeté pour la troisième fois le projet de loi C-19, l'actuel C-23. Nous savions désormais sur quel pied danser.
Lorsque l'Assemblée des Premières Nations s'est réunie en octobre 2003, elle a traité de cette question en particulier, rejetant à nouveau la mesure, pour la raison évoquée par mon collègue de Lac-Saint-Louis. J'ai en main les résolutions. Elles sont complexes et je me ferai un plaisir de les déposer après les faits, aux fins du procès-verbal.
Essentiellement, on y fait valoir dans les «Attendus» que le projet de loi est vicié à ce point que de simples amendements ne pourraient le corriger. Il ne correspond pas aux mandats antérieurement conférés par les résolutions 596 et 4998 de l'Assemblée des Premières Nations. Ces dernières renvoient à des années antérieures où des efforts avaient été consentis pour revoir le rapport financier avec le gouvernement fédéral. Elles continuaient d'être pleinement en vigueur. Le projet de loi ne reconnaît pas le droit inhérent des premières nations à l'autonomie gouvernementale. On peut même dire qu'il vient entraver le droit unilatéral à l'autodétermination et imposer aux premières nations la volonté de l'État, ce qui, selon nous, va à l'encontre de la notion de droit inhérent contenue dans l'article 35 de la Constitution. Les dispositions du projet de loi violent et contrecarrent les droits ancestraux et les droits issus de traités et vont constituer un pas en arrière par rapport au statu quo, selon l'Assemblée des Premières Nations. Le projet de loi viole les rapports historiques de nation à nation de même que les rapports établis par traités entre la Couronne et les premières nations. De plus, il les viole dans leur essence même, et ainsi de suite.
Il est très clair que le secrétaire parlementaire se trompe ou a été mal informé au sujet du niveau de soutien accordé à ce projet de loi et à la réalité historique selon laquelle le projet de loi a été présenté, débattu et rejeté sommairement, non pas une, mais trois fois lors de séances légalement constituées de l'Assemblée des Premières Nations.
Cela étant dit, je ne puis parler du sous-amendement que dans le cadre du discours du député. Je tiens à dire de manière tout à fait claire qu'il y a tellement de mésinformation au sujet de ce projet de loi qu'il nous incombe de le renvoyer au comité pour un examen approfondi et d'autres consultations.
Il y a de très graves répercussions en ce qui concerne la constitutionnalité du projet de loi. À quoi cela servirait-il d'adopter le projet de loi si nous pensons qu'il sera en fin de compte contesté et rejeté pour une question de constitutionnalité?
L'un des aspects du projet de loi qui irrite le plus les premières nations est son supposé caractère optionnel. Le député de Churchill a proposé, si je ne m'abuse, pas moins de 72 amendements à cette mesure sous sa mouture précédente, soit le projet de loi C-19. Tous sauf deux ont été rejetés par la Chambre. Des efforts ont été déployés pour remédier au projet de loi au moyen d'amendements à l'étape de l'étude en comité et à celle de la troisième lecture présentés avant la prorogation; le projet de loi a dû être présenté de nouveau au début de la nouvelle session.
Le gouvernement fédéral, ou AINC, a apporté des modifications. L'une d'elles a été ajoutée à l'annexe du projet de loi et stipule que les premières nations qui choisissent de se prévaloir des dispositions de la loi peuvent le faire en signant l'annexe. Le gouvernement tentait ainsi de laisser entendre que c'était optionnel et que la loi ne s'appliquerait qu'à ceux qui signeraient l'annexe.
Le caractère supposément optionnel de ces trois institutions est tout à fait trompeur. En réalité, ce sont des organismes nationaux obligatoires qui influeront sur les droits et les intérêts de toutes les premières nations du Canada, qu'elles signent l'annexe ou non. D'ailleurs, le modèle de l'annexe pourrait empirer les choses. Il importe donc que nous puissions réexaminer le projet de loi parce que le modèle fondé sur l'annexe garantit que ces importantes institutions nationales seront maîtrisées par un petit groupe de premières nations qui sont très fortement en faveur du projet de loi C-23 et qui y adhèrent. Il touchera toutes les premières nations.
Ne négligeons par l'aspect budgétaire. Ces institutions seront financées à même le budget de services votés du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. Je crois qu'il faudra 25 millions de dollars par an pour commencer. L'argent proviendra directement d'un montant qui aurait pu servir à satisfaire aux besoins essentiels d'autres premières nations non signataires. Qu'elles soient signataires ou non, cet argent aurait pu servir, de préférence, à améliorer la qualité de vie des premières nations plutôt qu'à ces institutions.
Penchons-nous sur la Commission de la fiscalité. Cet organisme nommé par le gouvernement fédéral deviendra le tzar de tous les futurs règlements ou lois en matière d'imposition foncière des réserves. Si ce projet de loi est adopté, à l'avenir, toutes les premières nations du Canada qui souhaiteront élaborer des lois et des régimes fiscaux devront demander l'autorisation de la commission nommée par le gouvernement fédéral.
Comment peut-on dire qu'elles ne seront pas touchées? Même si les premières nations ne signent pas l'annexe du projet de loi, toutes les mesures qu'elles prendront relativement aux impôts fonciers devront être approuvées par la commission nommée par le gouvernement fédéral. Dire que c'est facultatif est un mythe. Qu'elles choisissent ou non d'en faire partie précisément en signant l'annexe, elles sont certainement touchées par cette nouvelle institution. Toutes ces premières nations devront faire approuver leur budget annuel d'impôts fonciers par la commission, et ainsi de suite. Il n'y a aucun choix possible. Les droits et les intérêts de toutes les premières nations sont touchés.
J'espère que nous sommes clairs. J'espère que le secrétaire parlementaire écoute et qu'il comprend aussi. Les députés semblent faire volontairement la sourde oreille. Ils n'écoutent pas ce qu'on leur dit, non seulement ce que moi je leur dit, et je m'attends presque à ce qu'ils ne m'écoutent pas, mais ils n'écoutent pas ce que leur disent les personnes qui seront directement touchées par ce projet de loi.
J'ai dit auparavant qu'il n'y avait pire aveugles que ceux qui ne voulaient pas voir et pire sourds que ceux qui ne voulaient pas entendre. Il semble qu'il y ait une sorte d'aveuglement délibéré et intentionnel chez ceux qui, ayant décidé de faire adopter ce projet de loi à toute vitesse, ne tiennent compte ni de la raison, ni de la logique, ni des arguments convaincants en faveur du contraire. Ils refusent d'entendre l'argument le plus convaincant de tous: les premières nations s'opposent fermement à ce projet de loi. L'immense majorité d'entre elles s'y opposent farouchement.
Je ne saurais dire à quel point je suis déçu de voir que, à notre époque, en 2004, la Chambre des communes du Canada est saisie d'un projet de loi qui vise à imposer notre volonté à des nations souveraines ou que nous considérons comme telles, des nations indépendantes, les premières nations. Ce n'est pas là ce que l'on attendrait d'une Chambre des communes éclairée en 2004. Cette attitude s'apparente davantage à celles qui avaient cours au siècle dernier et même, à vrai dire, au siècle précédent.
L'élément le plus troublant du projet de loi C-23, par sa nature coercitive, est directement lié au Conseil de gestion financière. Cet élément figure à l'article 8 du projet de loi. Les collectivités qui n'adhéreront pas volontairement à l'annexe du projet de loi C-23 ne pourront pas adopter de lois ou de règlements relatifs au secteur essentiel de l'administration financière.
Encore une fois, de quelle façon est-ce facultatif? Voici l'analogie que nous faisons avec le permis de conduire. Ce permis est facultatif jusqu'à ce qu'une personne souhaite conduire une voiture, auquel moment le permis n'est plus facultatif. Ce projet de loi est facultatif à moins qu'une communauté ne souhaite adopter des règlements et des lois dans le domaine crucial de l'administration financière.
Les communautés qui n'endosseront pas le projet de loi, qui ne s'en réjouiront pas et qui ne s'inscriront pas à l'annexe ne pourront adopter des règlements que dans la courte liste des domaines actuellement prévus à l'article 81 de la Loi sur les Indiens, parmi lesquels ne figure pas l'administration financière.
Si une première nation souhaite exercer ce que nous considérons comme le droit souverain d'une nation indépendante en matière d'administration financière, elle doit faire comme les autres. Elle doit s'inscrire. Elle doit ajouter son nom à l'annexe. En quoi cela est-il facultatif?
La gestion financière est un aspect essentiel d'une administration locale. À nos yeux, elle doit être adaptée à chaque communauté. Les communautés devraient bénéficier de l'autorité d'administration locale. Néanmoins, l'article 8 du projet de loi C-23 modifié a une conséquence claire: seules les premières nations ayant décidé d'exercer cette option ou de s'inscrire à l'annexe pourront adopter des lois concernant l'administration financière. Ces premières nations deviendront alors perpétuellement assujetties aux institutions fédérales auxquelles elles se seront inscrites et qui auront été désignées par le gouvernement fédéral. Les nations qui n'auront pas exercé cette option renonceront, dans les faits, à une juridiction locale essentielle, celle de leur administration financière. Encore une fois, où se situe le caractère facultatif?
Voici l'une des craintes qui ont été portées à votre attention: nous avons tous dénoncé cette nouvelle industrie florissante qu'est la gestion par des tiers, selon laquelle des cabinets d'expertise comptable associés aux libéraux obtiennent les marchés pour gérer les affaires des premières nations ayant enregistré un excédent de dépenses d'à peine 8 p. 100 par rapport aux prévisions. Aujourd'hui, nous avons entendu parler, entre autres exemples, du registre des armes à feu dont les dépenses ont dépassé de 50 000 p. 100 les prévisions. Par ailleurs, si une première nation outrepasse son budget, si elle encourt un déficit de 8 p. 100, le gouvernement fédéral peut y intervenir et la mettre sous tutelle en imposant ce que nous appelons la gestion par un tiers.
L'une des craintes que nous entretenons au sujet de la mise en place de ce conseil de gestion financière, c'est que le gouvernement confiera la gestion par un tiers au conseil désigné. Ainsi, une institution fédérale désignée par le ministre gérerait alors toutes les communautés dont la gestion a été confiée à un tiers. Autant retourner à l'époque de l'agent des sauvages, puisque le ministre des Affaires indiennes jouera en définitive ce rôle devant le nombre croissant de communautés dont la gestion sera confiée à un tiers parce qu'elles ne parviendront pas à répondre aux besoins élémentaires de leur population avec les maigres budgets qu'elles obtiennent. Elles dépensent plus que prévu. Elles enlèvent à Pierre pour donner à Paul, parce qu'elles en ont assez de dire non à tous ceux qui viennent leur demander, avec raison, de l'aide pour un nouveau logement ou pour envoyer leurs enfants à l'université.
Certains chefs et conseils dépassent leur budget de 8 p. 100 et voilà que tombe la massue du gouvernement, qui impose la gestion par un tiers. Cette gestion peut être assurée par le nouveau conseil, qui sera un instrument aux mains du ministre.
Est-ce juste? C'est une situation sans issue pour les premières nations, qui devront ravaler leur fierté et adhérer au projet de loi C-23 pour obtenir du Canada le rare privilège d'adopter leurs propres lois en matière financière.
Ce n'est qu'un prolongement de la Loi sur les Indiens et du colonialisme qui nous répugne tant. Le pouvoir nouvellement acquis sera très limité. Il y aura toujours des limites aux lois sur la gestion des finances que les premières nations pourront mettre en place.
Toutes les lois sur la gestion des finances seront soumises à un veto sans appel du conseil de gestion nommé par les autorités fédérales. Aucun appel n'est prévu. Si le conseil dit que tel type de disposition sur la gestion financière ne doit pas être adopté, il n'y aura aucun recours, aucun appel. C'est du fascisme.
Certaines des mesures les plus draconiennes prévues par le projet de loi C-23 sont conçues pour soutenir la solvabilité de l'autorité, apparemment à n'importe quel prix ou presque.
Pour conclure, je dirai que, du point de vue juridique, le projet de loi C-23 présente des faiblesses fondamentales sur le plan constitutionnel. Sur le plan de la politique, l'obsession qu'il trahit pour l'impôt et les emprunts correspond à la réalité des finances et des programmes de seulement une poignée de premières nations. C'est pourquoi seulement quelques-unes d'entre elles souhaitent se prévaloir de ces institutions.
M. Rick Laliberte (Rivière Churchill, Lib.): Monsieur le Président, je sais qu'en plus de la politique fédérale, bon nombre de mes collègues de la Chambre ont également fait de la politique provinciale ou municipale, ou siégé à des conseils scolaires, des commissions d'hygiène ou des conseils de bibliothèque.
Je soulève la question parce que je viens de la Saskatchewan qui est en grande partie une province démunie au chapitre des paiements de transfert du gouvernement fédéral. La péréquation constitue une importante priorité pour ma province, mais la question des taxes scolaires soulève également de grandes discussions à l'heure actuelle.
Les agriculteurs sont propriétaires de vastes étendues de terres qui font l'objet d'une évaluation aux fins des améliorations locales dans les municipalités. Toutefois, ces évaluations servent également à déterminer les taxes liées aux conseils scolaires.
Compte tenu des grands débats nationaux sur le piètre état de la communauté agricole, nous savons tous que les exploitations agricoles familiales ont été grandement touchées par le commerce international ainsi que le prix du carburant, de l'énergie et des aliments pour les animaux. Il y a actuellement une révolte parmi les contribuables de la Saskatchewan. Elle découle des taxes scolaires. C'est dans cette voie que se dirige actuellement le projet de loi C-23.
J'aimerais que le député nous fasse part de ses commentaires et qu'il dise peut-être aux dirigeants autochtones du pays s'il est d'avis que la perception de taxes municipales selon la valeur des terres pourrait ne pas être la meilleure façon d'atteindre une certitude sociale et économique dans les premières nations. On pourrait peut-être étudier d'autres modèles. C'est la raison pour laquelle je crois que l'amendement et le sous-amendement demandent que le projet de loi C-23 soit soumis à un processus de consultation avec les dirigeants et les collectivités des premières nations.
Les députés qui ont déjà occupé un poste de commissaires d'école comprendront que les évaluations ne sont pas faites de la même façon dans toutes les collectivités. Bon nombre des collectivités autochtones sont isolées. La valeur d'une propriété d'une collectivité isolée du Nord n'est pas la même que celle d'une autre propriété située dans une réserve urbaine du Sud. Cela risque d'entraîner des différences énormes entre les définitions des réserves et la valeur fiscale des terres situées sur ces réserves.
Le député pourrait-il nous dire quelques mots sur la question des taxes foncières liées aux améliorations locales et scolaires, ainsi que sur l'énorme disparité au niveau de la valeur des terres dans les diverses régions du pays?
M. Pat Martin: Monsieur le Président, je remercie mon collègue de Churchill River de sa question très pertinente.
Permettez-moi d'amorcer ma réponse en faisant remarquer que cette commission de la fiscalité qui vient d'être créée a un caractère unilatéral et que cette difficulté s'aggrave en vertu des nombreuses restrictions à la fiscalité foncière des premières nations que contient le projet de loi C-23. Je ne crois pas que beaucoup de gens se rendent compte que les premières nations n'auront pas la latitude de dépenser leurs recettes fiscales comme bon leur semble, selon ce que prévoit le projet de loi. En fait, elles serons tenues de consacrer leurs fonds aux infrastructures locales et à des choses de ce genre, ce qui allégera du même coup le fardeau et les obligations pesant sur le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien.
Par exemple, il serait illicite d'utiliser cet argent pour financer une revendication territoriale contre le Canada. Les premières nations ne seront pas autorisées à utiliser leurs recettes pour des fins qu'elles auraient choisies. Elles ne pourront les utiliser que pour une liste très étroite de choses qui retirent le fardeau au gouvernement fédéral et allègent son obligation fiduciaire.
Si elles souhaitent construire une usine d'épuration des eaux d'égout, elles peuvent aller de l'avant, adhérer au projet de loi C-23 et la financer elles-mêmes. Elles peuvent emprunter l'argent et utiliser en garantie leurs recettes fiscales, si tant est qu'elles en aient, bien qu'à Shamattawa, Pukatawagan, Paungassi et dans la moitié des réserves du lac God et aux endroits où je me suis rendu, il n'y a pas de recettes fiscales de toute façon.
Pour répondre plus précisément à la question du député, une fois que la commission de la fiscalité sera opérationnelle, il est probable que le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien mettra, à titre de politique budgétaire, de plus en plus de pressions sur la plupart des bandes, voire la totalité au Canada pour qu'elles mettent en place des régimes de fiscalité foncière. Les collectivités qui résisteront verront un jour ou l'autre leurs contributions fédérales diminuer en fonction d'estimations des recettes fiscales.
Autrement dit, si le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien cherche une réserve dans son budget annuel, s'il y a une possibilité inexploitée de recettes fiscales, il réduira tout simplement le financement annuel d'après ce que la réserve aurait pu recueillir si elle avait adhéré à ce programme et généré des recettes de cette façon. Au bout du compte, la plupart des premières nations relèveront, d'une manière ou d'une autre, de la commission de la fiscalité nommée par le gouvernement fédéral. Encore une fois, son caractère facultatif est un mythe.
Le paragraphe 13(1) est une modification présentée par le ministre qui peut sembler donner à penser que les dispositions actuelles relatives à l'impôt foncier figurant dans la Loi sur les Indiens demeureront accessibles aux collectivités qui ne sauteront pas dans le train de la commission de la fiscalité. Toutefois, il est évident que si le projet C-23 devient loi, la seule modalité qui suscitera de l'intérêt concerne les nouvelles dispositions liées à la commission de la fiscalité.
C'est délirant que de penser que les collectivités seront autorisées à fonctionner pendant n'importe laquelle période de temps sous le régime de la Loi sur les Indiens en ce qui concerne la fiscalité foncière. Toutes les premières nations qui s'intéressent à des régimes fiscaux seront obligées, selon nous, de relever de cette nouvelle commission de la fiscalité. Encore une fois, son aspect facultatif est un mythe absolu.
Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Monsieur le Président, mon collègue a indiqué que ces institutions étaient déjà sur pied et à l'oeuvre depuis un certain temps, comme la plupart d'entre nous le savent. Je suis certaine que des téléspectateurs se demandent comment il se fait qu'on tienne un débat à Ottawa sur le projet de loi proposé pour conférer des droits juridiques à ces institutions alors que le gouvernement du Canada leur accorde du financement depuis un certain nombre d'années. Comment peut-on informer les Canadiens de la façon dont le gouvernement libéral s'y est pris dans cette affaire?
M. Pat Martin: Monsieur le Président, la députée de Churchill pose une question fort légitime et tout à fait valable.
Je trouve également troublant que nous tenions maintenant un débat sur un projet de loi visant à créer quatre institutions financières alors nous savons qu'elles sont déjà sur pied et à l'oeuvre. Elles embauchent du personnel, accumulent les frais de déplacement et gaspillent l'argent en toute insouciance, pour autant que je sache. Quelles sont leurs fonctions et leurs tâches si elle n'existent pas encore? L'une de leurs fonctions consiste à parcourir le pays pour faire la promotion du projet de loi.
Tous ceux d'entre nous qui ont participé à l'élaboration du projet de loi ont reçu la visite de lobbyistes payés par la commission de la fiscalité ou par le conseil d'administration de l'institution financière, ou par qui que ce soit d'autre. Mon temps est écoulé, mais j'aurais aimé pouvoir donner d'autres explications. Je déplore au plus haut point qu'on consacre de l'argent du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien à des institutions qui techniquement n'existent pas encore.
M. Rick Laliberte (Rivière Churchill, Lib.): Monsieur le Président, je saisis une autre occasion de prendre la parole au sujet du projet de loi C-23, et j'aimerais surtout formuler des commentaires sur le sous-amendement qui a été proposé.
Étant donné que je suis en partie l'auteur et l'appuyeur du sous-amendement, j'aimerais expliquer à la Chambre pourquoi nous devrions tenir des consultations avec les dirigeants et les collectivités des premières nations au sujet des incidences et des avantages du projet de loi C-23.
Nous irions ainsi beaucoup dans le sens du leadership et de la vision de notre premier ministre. Il y a quelques semaines, dans le cadre de la Table ronde Canada-Autochtones dont il était l'hôte, le premier ministre a dit:
Le Canada ne serait pas le Canada sans les peuples autochtones. |
Cela signifie que la création du Canada a fait l'objet d'un traité. La Couronne a défini ces territoires dans le cadre de la négociation de traités et le processus n'est pas terminé. Il y a de vastes étendues de terre en Colombie-Britannique et dans le nord du Canada qui font l'objet de négociations. À la lumière de cela, on a négocié de nouvelles relations et de nouvelles possibilités, en attendant, sous réserve que ces négociations de traités auraient une issue dans l'avenir.
Toutefois, le premier ministre reconnaît qu'en vertu de l'article 35 de la Constitution, il y a les Indiens, les premières nations de ce territoire, les Métis et les Inuits. Les dirigeants de ces groupes sont venus des quatre coins du pays pour participer à cette table ronde. Dans son discours, le premier ministre a dit que la réussite passait par la détermination de buts précis dans les domaines suivants: soins de santé, logement, éducation, 'affaires, développement économique, reddition de comptes, transparence et renforcement des capacités.
Ce sont des buts audacieux et clairs. Il a aussi dit que la réussite passait par une volonté politique. Le premier ministre a énoncé l'engagement de son gouvernement. Un nouveau premier ministre et un nouveau gouvernement, dotés d'un nouveau programme, travaillent à l'établissement de nouvelles relations avec les dirigeants autochtones. Les collectivités et les dirigeants autochtones ont aussi une obligation à l'égard de ce nouvel engagement.
Le premier ministre a poursuivi en disant:
Quant à nous, nous allons réserver des sièges à la table... À l'avenir, le gouvernement discutera avec [les collectivités et les dirigeants autochtones] avant d’élaborer des politiques. |
Cette déclaration est probablement la raison la plus importante pour laquelle ce sous-amendement fait actuellement l'objet d'un débat à la Chambre. Le projet de loi C-23 propose un nouveau pacte fiscal. Dans l'histoire du Canada, lorsque des réserves ont été créées et que des terres ont été mises de côté pour les Indiens, pour les membres des premières nations, elles n'ont jamais été assujetties à l'impôt foncier. La Couronne et le gouvernement n'ont jamais voulu évaluer leurs terres. Il s'agissait de terres réservées pour les Indiens. Le projet de loi revoit maintenant ces relations financières.
Il y a une responsabilité fiduciaire qui est définie relativement à la responsabilité du gouvernement. Il s'agit, dans une large mesure, d'une responsabilité financière, mais j'ai surtout constaté, en étudiant les livres de traités et les lettres que les commissaires aux traités envoyaient dans leurs rapports à la Couronne et à ses représentants, que la responsabilité fiduciaire de la Couronne suppose le respect des nations souveraines avec lesquelles ces traités ont été conclus.
Les nations autochtones doivent, à titre de nations, être respectées. Rien dans le projet de loi C-23 ne prouve que ces nations seraient représentées ou respectées. Rien. Il n'est même pas fait mention de l'article 35 de la Constitution. Dans la Constitution du Canada, les droits historiques et ceux issus des traités sont reconnus et respectés. Les principes du projet de loi ne reposent même pas sur l'article 35 de la Constitution.
Permettez-moi de revenir sur un point. Je souligne que le projet de loi C-23 a été présenté en janvier. Il y a eu un discours du Trône et je veux que l'on note que, dans ce discours du Trône, la Chambre des communes et le Parlement se sont engagés à reconnaître les relations avec les autochtones fondées sur des accords historiques. Ces accords historiques, ce sont les traités. Si le discours du Trône a été prononcé en février, le projet de loi a été déposé auparavant.
Par ailleurs, lorsque la table ronde a eu lieu en avril dernier, j'ai dit que le projet de loi devrait être renvoyé pour fins de consultations avec les chefs des premières nations du pays. Ceux-ci devraient examiner les relations qu'il crée, ce qu'il prévoit pour ce qui est de contracter des emprunts, d'emprunter des capitaux.
Les administrations municipales et les commissions scolaires savent très bien en quoi consistent ces pouvoirs en matière d'emprunt. Elles peuvent emprunter de l'argent pour une nouvelle école ou un hôpital. Elles peuvent en emprunter pour des réseaux d'aqueduc et d'égout destinés à de nouveaux lotissements. J'ose dire que le gouvernement fera aussi progresser le dossier du logement. Si quelqu'un veut créer un nouveau lotissement destiné à la construction domiciliaire, le gouvernement donnera aux premières nations la possibilité de contracter des emprunts auprès d'institutions financières. Il est question de ces institutions financières dans le projet de loi, mais ce que tout le monde doit comprendre, c'est que les administrations municipales et les commissions scolaires peuvent emprunter de l'argent au moyen d'obligations garanties ou non et de titres. Elles peuvent se tourner vers les marchés internationaux.
Le projet de loi se limite aux marchés canadiens et américains. Est-ce que cela signifie que les institutions financières canadiennes et américaines exercent des pressions dans ce sens? Pourquoi le marché financier européen n'est-il pas inclus? Comment se fait-il que les marchés asiatiques ne sont pas inclus? Il est possible qu'un jour, l'économie des États-Unis s'écroule comme en 1930. Le marché européen sera peut-être le seul à offrir une certaine sécurité. Pourquoi cette éventualité n'a-t-elle pas été envisagée? Pourquoi les marchés européen et asiatique ont-ils été exclus de cette mesure législative? Pourquoi est-elle limitée exclusivement aux marchés canadien et américain? Est-ce parce que c'est de là que viennent les pressions?
Je soulève cela parce que les questions sont nombreuses et qu'il faut expliquer énormément de choses aux premières nations. Ce projet de loi ouvre une toute nouvelle relation, une nouvelle réalité, en améliorant la qualité de vie dans les réserves et à l'extérieur de celles-ci, parce que certains de ces investissements peuvent fort bien porter sur des projets de développement à l'extérieur des réserves. Toutefois, les définitions du rôle d'une institution financière et de celui d'une commission de la fiscalité sont très limitées. Néanmoins, dans ce projet de loi, les pouvoirs sont clairement définis, et ces pouvoirs sont ceux du conseil de bande.
Les pouvoirs du conseil de bande n'ont jamais été définis aussi clairement dans la Loi sur les Indiens ou dans l'ancien projet de loi C-7. Ces deux mesures législatives sont fort vagues en ce qui concerne les pouvoirs des conseils de bande et des chefs. Toutefois, ce projet de loi met rapidement en évidence les pouvoirs des chefs et des conseils de bande, parce que ces pouvoirs seront délégués à la Commission de la fiscalité, au Conseil de gestion financière et également, j'imagine, dans une grande mesure au percepteur des impôts, en quelque sorte, à l'institution financière à laquelle il sera possible d'emprunter. Il y aura une délégation de ces pouvoirs.
Dans une large mesure, ces pouvoirs créeront d'abord et avant tout une loi sur l'impôt foncier. Les institutions prévues ne sont pas indépendantes les unes des autres; elles sont toutes liées. Notamment, en ce qui concerne l'Institut de la statistique, il est dit dans le préambule que l’accès à des données exactes, actuelleset crédibles est un élément essentiel à l’élaborationde rapports fiables, à la bonne planificationfinancière et à la saine gestion.
Il est donc uniquement question de finances. Je dirais qu'un institut de la statistique devrait servir à l'acquisition de connaissances sur la culture, la santé, la société et l'éducation pour qu'on puisse enseigner aux jeunes, de la maternelle jusqu'à la douzième année, un programme appuyé par une institution statistique, un atlas du savoir et des connaissances traditionnelles sur l'utilisation de la terre. Voilà quelle sorte de données statistiques nous devrions avoir.
Eh bien non, cet Institut de la statistique servira à la planification financière, à la gestion financière et à la présentation de rapports financiers. L'argent passe avant tout. Voilà ce qui me fait peur dans ce projet de loi. C'est l'argent qui explique pourquoi le projet de loi C-23 est présenté maintenant. L'hypothèse à la base de ce projet de loi, c'est qu'il faut aplanir les disparités socio-économiques, et que les gens dans les réserves devraient avoir des chances égales à ceux des citoyens des autres collectivités du Canada.
Cependant, la structure des commissions scolaires et des municipalités du pays n'est peut-être pas la panacée pour le développement des réserves. Il existe peut-être d'autres solutions. Il conviendrait peut-être, par exemple, d'attribuer aux réserves les pouvoirs d'emprunt d'un gouvernement provincial ou fédéral. Peut-être que ces pouvoirs d'emprunt devraient être prévus dans ce projet de loi afin que la reconnaissance des nations et des tribus puisse leur assurer le pouvoir d'emprunter et leur procurer la crédibilité requise pour qu'elles obtiennent les sommes voulues, quels que soient les montants en cause.
Plus tôt ce matin, un député a déclaré que le coût du développement dans les réserves était cinq à six fois plus élevé que le coût habituel. Bon nombre de ces collectivités sont éloignées et reliées uniquement par transport aérien. Les députés qui représentent des circonscriptions du Nord connaissent la réalité de la vie dans cette région, tant dans les réserves qu'à l'extérieur des réserves. Prenons les Inuits du Nunavut par exemple. Il n'existe pas une seule route permanente reliant ce territoire en toutes saisons et les coûts y sont vingt fois plus élevés qu'au centre-ville à Ottawa. Dans cette région, un deux-par-quatre pour construire une maison coûte 20 fois plus cher, non pas parce que ce sont des autochtones qui l'achètent, mais bien parce que cela fait partie de la réalité géographique dans ce pays.
En tant que pays, nous devons nous pencher sur cette question, et non pas sur le risque d'hypothéquer l'avenir des enfants autochtones. Pourquoi les autochtones devraient-ils être payés pour compenser le coût élevé de l'infrastructure alors que le pays devrait collectivement assumer cette responsabilité? Notre pays devrait être juste et équitable, qu'il s'agisse du développement au centre-ville de Toronto ou à Old Crow, Inuvik, Black Lake ou Ahtahkakoop, une réserve de la Saskatchewan.
Je voudrais soulever une autre question. Lorsque le traité no 6 a été négocié, il était notamment question d'une armoire à médicaments. Beaucoup de gens affirment que Tommy Douglas a été le père de l'assurance-maladie, mais corrigeons cela. Les grands-pères de l'assurance-maladie étaient les chefs visés par le traité no 6. Ils ont voulu qu'on établisse comme politique publique que les richesses du pays servent à assurer l'avenir des enfants. Lorsqu'ils ont scellé ces traités en fumant le calumet, ils ont prié dans les quatre directions représentant les quatre races de notre pays et les nations du Canada.
Il n'était pas simplement question des enfants des Cris, des Dénés et des Lakotas. Ils se préoccupaient de tous les enfants du pays et des enfants des nouveaux arrivants également, des enfants des colons. Cette armoire à médicaments devrait être offerte à tout le monde, mais le traité no 6 ne prévoyait d'aucune façon l'évaluation des terres de la bande Ahtahkakoop. Si nous décidions d'imposer dans cette réserve une loi sur les recettes fiscales, je vous garantis que les contestations nous conduiraient devant la Cour suprême.
Je vais préciser à la Chambre que même si ce projet de loi prévoit peut-être une disposition d'adhésion, je sais que ce n'est qu'une manoeuvre politique. Il y a déjà un certain temps, on a utilisé cela contre les parlementaires que nous sommes dans le cas des pensions. Certains députés pouvaient adhérer ou non au régime de pension, mais si on vérifiait maintenant, on s'apercevrait que nous avons tous adhéré, même ceux qui ont résisté contre cette adhésion. Ils ont été mis en difficulté du fait qu'il s'agissait d'une question d'adhésion facultative. C'est ce qui va arriver aux premières nations de notre pays.
Elles pourraient ne pas adhérer. Elles pourraient résister, du fait de leurs obligations par traité ou pour d'autres raisons, peut-être à cause de la valeur des terres ou du fait de leurs dirigeants et de leur vision. Cependant, à un moment donné, elles finiront par être entraînées par le projet de loi C-23, directement ou indirectement.
L'autre question que j'ai soulevée plus tôt portait sur la consultation. Selon moi, les consultations devraient être menées auprès des chefs et des collectivités des premières nations du pays. Selon l'article 143 du projet de loi, celui-ci sera réexaminé dans sept ans. Un examen parlementaire mené après sept ans. Lors de cet examen, le ministre des Affaires indiennes consultera la Commission de la fiscalité, le Conseil de gestionfinancière, l’Administrationfinancière ainsi que l’Institut de la statistique. Le projet de loi C-23 ne prévoit aucune consultation des premières nations et de leurs communautés. Alors, dans sept ans, lorsque le projet de loi sera réexaminé, cet examen sera uniquement axé sur l'auto-évaluation des instituts que le projet de loi a créés.
Par ailleurs, certains députés ont indiqué que d'importants changements ont été apportés au projet de loi. L'un des plus importants changements apportés par le ministre portait sur l'inclusion d'autres organismes et groupes autochtones au sein de l'Institut de la statistique ainsi que sur les archives et les données qui seraient conservées par cet institut. En vertu de l'article 35 de la Constitution, les Inuits et les Métis sont les seules autres organisations. Il y a les premières nations plus les Inuits et les Métis. Si nous comptons recueillir des données statistiques sur les Inuits et les Métis, pourquoi ne feront-ils pas partie du processus de consultation à l'issue de la période de sept ans?
Pourquoi ne pouvons-nous pas consulter les groupes autochtones puisque nous allons utiliser des données qui les concernent? Comme on l'a fait remarquer, ces données seront utilisées à des fins de planification, de gestion et de déclaration financières. Elles ne seront pas utilisées à des fins de préservation culturelle, d'élaboration des programmes d'enseignement, d'analyses sociales ou de comparaisons économiques entre les communautés. Ces données seront utilisées exclusivement par les institutions financières et dans leur intérêt.
Les «institutions autochtones nationales» que propose de créer le projet de loi «aideront les premières nations qui choisissent d'exercer un pouvoir en matière d'imposition foncière sur les réserves». En définitive, ce pouvoir ne pourrait être exercé que par ceux qui, dans les premières nations, veulent pratiquer l'imposition foncière. Autrement dit, ce sont ces personnes qui pourront emprunter de l'argent. Les impôts levés, notamment auprès des entreprises dans les réserves, serviront à assurer la prestation de services. Il y aura également des coûts de développement dans les réserves et l'adoption de lois sur les impôts en souffrance. La question des impôts en souffrance soulève actuellement une révolte des contribuables en Saskatchewan. Les impôts en souffrance constituent une partie importante des impôts des conseils scolaires ou des impôts recouvrables du conseil municipal d'une municipalité rurale. Il y aura également des coûts liés aux impôts en souffrance.
Cela permettra également de créer des privilèges fiscaux. C'est une notion étrangère aux réserves. Les privilèges fiscaux et les privilèges sur les biens fonciers constituent de remarquables outils, qui n'existent pas encore dans les réserves. Il y aura également des intérêts et des pénalités. Des intérêts et des pénalités s'ajouteront aux impôts non payés.
Le projet de loi confère également un pouvoir de «saisie, confiscation et cession d'intérêts ou de droits sur les terres de réserve». Aux droits de saisie s'ajoute également le droit de vente de biens personnels. Le projet de loi confère le pouvoir de saisir les biens personnels pour impôts non payés.
Le projet de loi crée de nouvelles relations financières et de nouveaux pouvoirs d'imposition qui n'existent pas nécessairement dans les réserves à l'heure actuelle. Il y aura disparité dans la valeur des terres des réserves dans le nord du Québec, dans le sud du Québec, dans le nord du Canada, en Colombie-Britannique et dans des communautés isolées. La valeur des terres créera des classes parmi les premières nations.
J'appuie le sous-amendement et l'amendement. Nous ne devrions pas adopter le projet de loi en troisième lecture. Nous devrions consulter les dirigeants des premières nations et les communautés. Le projet de loi C-23 devrait, par l'intermédiaire du comité permanent du gouvernement, faire l'objet de nouvelles consultations, afin de créer une relation financière égale et juste pour tous en vue d'assurer le développement des réserves. Mon temps est écoulé, mais je suis disposé à répondre aux questions.
Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Monsieur le Président, je désire répondre aux observations de mon collègue. D'abord, il a parlé de la réunion que le premier ministre avait eue avec des groupes autochtones il y a quelques semaines et où il avait indiqué la création d'une nouvelle relation. Cela me surprend. J'ai l'impression que le projet de loi dont nous sommes saisis est celui du gouvernemen et du premier ministre. La majorité des premières nations, plus de 600, ne sont pas d'accord avec le projet de loi. Où est-elle cette nouvelle relation dont il a parlé?
J'ai l'impression de comprendre que le premier ministre en retirait de la fierté. Il est malhonnête soit avec le peuple autochtone qu'il a rencontré, soit avec le projet de loi qui est devant nous. Ce serait lequel des deux?
Le président suppléant (M. Bélair): Je demanderais à la députée de faire attention à ses mots.
M. Rick Laliberte: Monsieur le Président, comme je l'ai mentionné, un nouveau gouvernement, doté d'un nouveau premier ministre et d'un nouveau Cabinet, a été formé en décembre. Avec la prorogation du Parlement l'automne dernier, ce projet de loi a été présenté de nouveau en janvier. Examinons les faits : le projet de loi a été déposé en janvier. Toutefois, un discours du Trône a été présenté en février et une table ronde réunissant des représentants des tous les peuples autochtones a eu lieu en avril.
Le premier ministre vise à établir de nouvelles relations, et nous l'en félicitons chaudement. Toutefois, le projet de loi court-circuite cette vision. Il faudrait le revoir en fonction de la nouvelle vision et des nouveaux engagements présentés par le premier ministre. Le premier ministre a déclaré vouloir une nouvelle relation de travail. Il a admis que le gouvernement devait changer sa façon de faire, mais que les premières nations devaient en faire tout autant. Les deux parties devront faire leur part pour que cette relation fonctionne.
Le renforcement de la capacité doit prévoir la transparence, la reddition de comptes et l'autonomie gouvernementale. Le renforcement de la capacité des premières nations consiste à relever le défi que présentent les disparités socio-économiques qui se sont creusées au sein de leurs collectivités. Nous devons toutefois permettre que cela se réalise. Nous devons permettre aux premières nations d'unir leurs efforts et de composer avec ce nouveau défi.
C'est pourquoi je demande aux députés d'adopter le sous-amendement. Faisons en sorte de permettre au gouvernement et au premier ministre de tenir des consultations exhaustives auprès des chefs et des collectivités des premières nations afin de proposer des relations financières renouvelées. Ce ne seront peut-être pas des impôts fonciers, mais il s'agira d'une nouvelle forme de relations financières.
Toutefois je sollicite des appuis en vue de faire adopter le sous-amendement. Le temps est venu pour le gouvernement de donner suite aux engagements pris dans le discours du Trône et dans les nouvelles déclarations du premier ministre. Ne le blâmons pas pour rien d'autre. Il souhaite aller de l'avant. Le temps est peut-être venu de réexaminer le projet de loi et de tenir de nouvelles consultations avec les premières nations.
Mme Bev Desjarlais: Monsieur le Président, nous parlons ici d'une nouvelle relation. Je sais que le premier ministre a déclaré à plusieurs reprises aux Canadiens, au cours des derniers mois, qu'il ne savait absolument pas ce qui se passait pendant qu'il était ministre des Finances. Cependant, il est maintenant aux commandes. S'il n'aime pas ce dossier, pourquoi sommes-nous donc saisis de ce projet de loi, à moins qu'il ne soit pas vraiment celui qui mène la barque?
Ce sont peut-être les institutions financières qui empocheront les intérêts des prêts que ces premières nations devront contracter pour se payer les services que le gouvernement ne leur a pas donnés. C'est peut-être là le but recherché. Peut-être qu'il n'est effectivement pas aux commandes. En réalité, il y est. Si le projet de loi est mauvais, il peut le retirer. C'est tout, fin de la discussion. Il ne faut pas être un génie pour le comprendre.
De deux choses l'une, soit que le premier ministre n'est pas honnête envers les autochtones du Canada, soit qu'il n'est pas honnête face au projet de loi. Prendre la parole et évoquer sa merveilleuse vision et son travail remarquable est un comportement absolument hypocrite. Je mets au défi mon collègue de Churchill River de faire preuve d'un meilleur sens pratique dans sa comptabilité.
Le président suppléant (M. Bélair): Encore une fois, veuillez faire attention avant d'utiliser le mot hypocrite. Dans ce contexte, il est plus ou moins acceptable, mais je préférerais que les députés s'abstiennent de l'utiliser.
M. Rick Laliberte: Monsieur le Président, la question est difficile à saisir, mais je vais m'efforcer d'y répondre. Notre travail ici, notre rôle, consiste à faire honneur à notre charge de députés et à créer des occasions. Notre rôle consiste à débattre du projet de loi. Il nous est soumis dans le cadre du processus parlementaire et nous avons à débattre en cette Chambre de son bien-fondé. Je l'ai fait en toute ouverture, selon mon expérience aussi bien comme percepteur d'impôts dans ma localité qu'à titre de commissaire d'école de ma région.
Le projet de loi transformerait radicalement les rapports entre les premières nations et le Canada. Selon mon expérience, nous pouvons comme députés, en dépit du peu de pouvoirs dont nous disposons, formuler des amendements. L'un de ces amendements consisterait à proposer de ne pas accepter ce projet de loi à l'étape de la troisième lecture et de tenir des consultations pleines et entières avec les dirigeants et les collectivités des premières nations concernant les répercussions et les avantages de la mesure. Le député voudra peut-être accepter que nous faisons en cela preuve d'audace. Voilà de quoi il est question ici.
C'est donc ce que j'ai à apporter au débat. C'est ce que j'ai à dire au premier ministre. La vision qu'il a, comme nouveau dirigeant et premier ministre, d'un rapport redéfini avec les autochtones de ce pays est bien intentionnée. Mon apport consiste à dire qu'il nous faut revoir le projet de loi C-23. Ne passons pas à la prochaine étape. Revenons aux consultations.
Il n'y a rien d'autre que je puisse faire sinon livrer ce message, tout simplement. Je n'use pas de faux-fuyants. Je n'y vais pas par quatre chemins. C'est très clair. Il n'est pas facile de dire à son premier ministre que sa mesure n'est pas au point. Or, c'est bien ce que nous faisons.
[Français]
M. Marcel Gagnon (Champlain, BQ): Monsieur le Président, j'écoute ce débat avec attention, parce qu'il touche aussi des communautés autochtones, des premières nations de mon comté.
Tantôt, vous avez dit à ma collègue de Churchill de faire attention à son choix de paroles. Toutefois, il y a des choses qui sont difficilement explicables. Effectivement, on entend des discours qui mentionnent qu'on veut faire les choses autrement. On dit même que le gouvernement a changé depuis cinq ou six mois, alors qu'il n'y a rien de changé, à part un homme qui a changé de banquette. Au lieu d'occuper la banquette du ministre des Finances, il occupe maintenant celle du premier ministre.
Ce dernier doit effectivement prouver qu'il veut changer les relations avec les premières nations. Je peux vous dire que leur situation est désolante. Il faut arrêter de penser que les premières nations doivent toujours être sous tutelle. Ces gens sont capables de s'administrer et de savoir ce qu'ils veulent.
Ce projet de loi, 60 p. 100 des premières nations n'en veulent pas; il semblerait que seulement 40 p. 100 en veulent. Si je regarde chez nous, des communautés telles que les Attikameks se trouvent dans des situations pénibles. Avec mon collègue de Saint-Hyacinthe—Bagot, je suis allé voir des choses qu'on ne pense pas voir en 2004. Ces gens pourraient se prendre en main davantage s'ils recevaient de l'aide.
Quand on demande un retour à la consultation, quand on veut revoir le dossier des communautés autochtones, est-ce justement afin de leur donner le plus possible les outils qu'ils souhaitent?
[Traduction]
M. Rick Laliberte: Monsieur le Président, je le répète, le premier ministre et le gouvernement ont l'obligation d'établir de nouvelles relations. Je pense que ce genre de relation financière pourrait être grandement améliorée.
Les dispositions du projet de loi C-23 ne sont pas suffisantes. Il s'agit d'un tout nouveau cadre d'imposition dans les réserves, fournissant des outils semblables à ceux des divisions scolaires et à la capacité d'emprunter des administrations municipales. Cependant, il se limite à la reconnaissance d'un conseil de bande. Que fait-on des tribus et des nations?
Les tribus et les nations sont responsables de vastes territoires. Selon la vision énoncée dans le traité no 6, les richesses du territoire devaient permettre de combler les besoins en matière de médicaments, de logement et de santé. C'est une responsabilité qui relève à la fois des autorités provinciales et fédérales. Le projet de loi C-23 ne dit rien à ce sujet. Il se limite seulement aux ressources à l'intérieur des réserves et, parfois, ces ressources ne suffisent pas à sortir les réserves de difficultés économiques et sociales. Il devrait être revu dans un cadre plus large et mieux documenté.
Le problème n'est peut-être pas de nature partisane, en grande partie. Il s'agit de la relation avec l'État. Voilà pourquoi nous mettons l'accent sur les traités. Le projet de loi devrait reposer sur les traités et les obligations créées en vertu de l'article 35 de la Constitution.
Le président suppléant (M. Bélair): En conformité de l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera à l'heure de l'ajournement ce soir, à savoir: le député de Davenport, Les pêches.
Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Monsieur le Président, je serai très prudente dans mon choix de mots. J'ai tendance parfois à me laisser emporter.
Je suis favorable à l'amendement qui a été présenté. Il nous donne l'occasion de renforcer les objections au projet de loi C-23.
Je voudrais faire des observations sur un certain nombre d'aspects du projet de loi C-23.
À première vue, quand on examine la nature de ces institutions, on ne peut que conclure que ce sont des institutions qu'il serait bon d'avoir. Grâce aux renseignements statistiques, nous pourrions mieux financer les premières nations et faire ce que nous aurions dû faire dès le début. Le projet de loi donnerait aux premières nations la chance de s'occuper vraiment de leur gestion financière. Les premières nations pourraient aussi percevoir les impôts. Elles auraient la maîtrise de leurs affaires financières. Toutefois, ce n'est pas ce que veulent en réalité les premières nations. Elles ne veulent pas que le Parlement légifère pour leur dire quoi faire à cet égard.
C'est la raison principale pour laquelle nous ne devrions pas être saisis de ce projet de loi. Si les premières nations veulent créer ces institutions, je suis d'avis qu'elles peuvent le faire par elles-mêmes.
J'estime que c'est seulement le gouvernement qui le veut. On peut parler de la Couronne dans ces relations, mais force est de l'admettre. Nous avons affaire au gouvernement libéral fédéral. C'est ce dernier qui veut cela. Ce n'est pas les premières nations et ce n'est certainement pas mes collègues du caucus néo-démocrate.
J'admets que certaines premières nations sont en faveur de certains des aspects de cette mesure. J'estime qu'elles devraient pouvoir appuyer cette dernière si c'est ce qu'elles souhaitent. Toutefois, la majorité des premières nations ne le veulent pas. En conséquence, nous ne devrions pas être saisis de ce projet de loi, et encore moins s'il donnera lieu à une nouvelle relation avec les premières nations, comme nous l'avons entendu à maintes reprises. La Chambre ne devrait pas être saisie de ce projet de loi.
Je crains de plus en plus que le projet de loi n'ait pour effet d'empirer la situation critique dans laquelle se trouvent déjà certaines premières nations. Par exemple, dans nombre de secteurs de ma circonscription, le taux de chômage est très élevé, c'est-à-dire entre 90 et 95 p. 100.
Allez dans une collectivité. Vous verrez que l'école est financée par des fonds qui ont été reçus par la première nation. Cet argent provient du gouvernement fédéral. C'est ainsi que le gouvernement leur donne de l'argent. Les traités établissent une relation de partenariat, mais le gouvernement fédéral ne permet jamais aux premières nations d'oublier qu'elles reçoivent l'argent des contribuables. Le gouvernement a tendance à oublier que les traités créent un partenariat pour le partage des terres et des ressources. On ne tient pas compte de cela. On rappelle aux membres des premières nations qu'ils reçoivent l'argent des contribuables pour financer leur éducation, les écoles, les enseignants et tous ceux qui travaillent dans la collectivité.
Dans la plupart des cas, il existe dans la collectivité un poste de soins infirmiers ou un poste sanitaire. Il est exceptionnel qu'elle bénéficie d'un hôpital ou d'une clinique où travaillent des médecins. Cela aussi, c'est financé par Santé Canada et l'argent des contribuables.
On trouvera peut-être dans la collectivité un Northern Store ou un autre magasin, et peut-être aussi de petits magasins ici et là et même une station-service. Dans les 31 collectivités de premières nations de ma circonscription, très peu d'entre elles comptent plus de magasins que cela. Et dans la plupart de ces collectivités, il n'y a pas d'autres possibilités économiques. Quelqu'un travaillera peut-être à l'aéroport financé par la province. Comme il s'agit d'une partie de l'économie indépendante de la première nation, on trouvera peut-être de l'argent pour le financer. La plupart des gens qui vivent dans la collectivité aimeraient qu'on y créent des possibilités économiques et des sources de revenus, mais on ne fait rien en ce sens.
On ne cesse de supprimer les possibilités traditionnelles, liées à la pêche et au piégeage. On s'en prend de nouveau en ce moment au commerce de la fourrure, qui offre l'un des rares débouchés. Je pose la question à mes collègues de la Chambre: d'où croient-ils que proviendront ces recettes fiscales?
J'ai du mal à croire que des membres des collectivités des premières nations réclament la possibilité de payer des impôts, avec le peu d'argent qu'ils ont pour boucler les fins de mois, avec l'aide accordée par les gouvernements aux premières nations. Comment diable peut-on s'attendre à ce qu'ils puissent payer des impôts?
Je n'arrive pas à concevoir d'où cette idée peut venir. Si les autochtones veulent recueillir des statistiques, c'est seulement sur le nombre de personnes par famille, par exemple. Ils peuvent se débrouiller. Je m'inquiète de plus en plus de l'aspect financier.
Comme mon collègue de Winnipeg-Centre l'a dit, si ce projet de loi est adopté et si les premières nations n'y adhèrent pas, elles devront emprunter même pour la modernisation des écoles ou la réfection des routes. Où trouveront-elles l'argent pour rembourser le prêt? Leur faudra-t-il contracter un prêt remboursable sur 25 ou 30 ans pour construire une école? J'ai du mal à croire que le prêt ne portera pas intérêt. C'est possible, mais j'ai du mal à le croire.
D'où viendra l'argent? Ou bien la première nation aura encore moins de ressources ou bien il faudra augmenter les impôts. Des premières nations subiront les conséquences si elles n'utilisent pas bien l'argent des contribuables alors que, en vertu d'un accord, certains services leur étaient assurés. Le gouvernement n'a pas répondu à cette attente.
On nous parle de gestion par un tiers. Il y a un ou deux ans, l'une des premières nations de ma circonscription a communiqué avec moi parce qu'elle avait un problème avec un tuteur qui avait été chargé de la gestion. Chose curieuse, en une brève période, de nombreuses premières nations ont été mises en tutelle. Je ne m'étonne pas que les premières nations du Manitoba se soient élevées en masse contre le projet de loi. Il me semble que ce serait un châtiment, car elles ont été nombreuses à être mises en tutelle.
Certaines premières nations qui s'étaient retrouvées dans cette situation ne pouvaient obtenir de renseignement du tiers auquel avait été confiée leur gestion. Ce ne sont pas elles qui avaient retenu ses services; c'est plutôt le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien qui y avait vu. J'ai vu les marchés en vertu desquels une somme mensuelle de 30 000 $ était prélevée de leur budget, alors qu'elle aurait dû servir à des installations récréatives, à de l'infrastructure et à la prévention des incendies dans une communauté gravement démunie à bien des égards. L'argent servait à rémunérer des tiers et on ne parvenait même pas à savoir où l'argent allait.
J'ai demandé au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien à prendre connaissance de sa politique en matière de gestion par un tiers. J'ai aussi demandé où se déroulait le processus d'appels d'offre, parce que je voulais voir comment cela se passait. Le ministère n'en avait pas. Le ministère enlevait littéralement le pain de la bouche des autochtones vivant dans ces communautés et le gouvernement n'avait même pas de politique d'appels d'offre. Ce juteux marché était tout simplement accordé à quiconque le ministère jugeait bon. Résultat, les premières nations dans mon comté et dans l'ensemble du pays ont souffert.
Le gouvernement ne manifeste aucune conscience dans la façon dont il traite les autochtones du Canada, et certainement les premières nations dans le cas de ce projet de loi. Si le premier ministre avait été sérieux dans les propos qu'il a tenus lors de cette réunion, nous ne serions pas saisis de ce projet de loi. Je n'arrive pas à comprendre qu'une seule première nation puisse accepter de prêter foi à la parole du premier ministre alors que nous sommes toujours saisis de cette mesure législative. Elle devrait être retirée et dès aujourd'hui. Nous ne devrions pas y consacrer une seconde de plus, si le premier ministre est un tant soit peu sincère lorsqu'il parle d'établir une nouvelle relation.
J'ai parlé des possibilités limitées de revenus. Souvent, lorsque nous rendons visite à des communautés, nous qui ne vivons pas dans une réserve autochtone, l'un de nos premiers réflexes consiste à nous demander pourquoi les gens n'en sortent pas pour aller chercher du travail ailleurs, puisque les conditions sur place sont si mauvaises. Beaucoup de gens ont pensé de la sorte. À mon avis, beaucoup d'autochtones ont quitté leur réserve et se sont rendus dans des zones urbaines dans l'espoir d'y améliorer leur sort et se sont rendus compte, en bout de ligne, que leurs conditions de vie y étaient pires qu'avant. Ainsi, de nombreuses femmes autochtones se sont dispersées dans le pays et rien n'est fait pour les retrouver. De nombreux enfants autochtones manquent à l'appel et personne ne s'en soucie.
Les gens des premières nations recherchent un mode de vie différent, mais en réalité, il est très difficile de rétablir les choses après des décennies d'inégalités dans le domaine de l'éducation.
En tentant de remédier à tous ces torts, nous devons établir les bases qui permettront aux collectivités des premières nations de devenir auto-suffisantes. Cela ne veut pas dire qu'elles auront besoin d'une importante industrie ou qu'elles devront percevoir des impôts sur les propriétés parce qu'elles étaient auto-suffisantes avant d'être confinées à des réserves. Les autochtones ne mourraient pas de faim avant la création du système des réserves. Ils vivaient de la terre et habitaient des maisons qui leur fournissaient la chaleur dont ils avaient besoin.
Il y a un homme qui vit seul dans une petite cabane de bois rond, dans une collectivité de ma circonscription qui n'est pas en fait une collectivité autochtone. Sa famille est partie. Il doit avoir près de quatre-vingts ans maintenant ou peut-être même plus, mais il fend toujours le bois dont il a besoin pour se chauffer. Mais les choses ont changé. Je crois que tous les autochtones vivant dans des collectivités des premières nations ont accès aux mêmes services d'eau courante et d'égout. S'ils veulent avoir une fournaise plutôt que de sortir pour fendre du bois, ils devraient pouvoir en avoir une.
Toutefois, nous n'avons vu que des ressources très limitées être affectées à ces collectivités. Cela n'a donc jamais pu être une véritable action visant à apporter une amélioration d'ensemble. Je veux donner aux gens un aperçu de la réalité dans certaines de ces collectivités. Leur eau et leur égout se retrouvent dans une citerne placée sur le gazon. Dans la maison, il y a peut-être un appareil de chauffage pour que les gens restent au chaud. Même si l'hydroélectricité est disponible dans certains cas, les gens ne peuvent se la payer, car ils n'ont que des revenus limités. Ils n'ont pas les moyens de payer des taxes ou l'hydroélectricité, donc ils essaient de limiter autant que possible les dépenses en se servant de leur four pour chauffer la pièce et, ainsi, ils n'ont pas à se soucier de tout le reste. Quand on entend le gouvernement dire que ces gens ont les moyens de payer des taxes foncières et que cela rehaussera leur qualité de vie, on croit rêver.
Je soumets au gouvernement l'avis que s'il reste au premier ministre une once de crédibilité, il devrait retirer ce projet de loi. On devrait donner aux premières nations qui veulent aller de l'avant la possibilité de le faire. Pour parler bien franchement, je crois qu'il y a une exigence absolue que le gouvernement rende compte des 20 millions de dollars qui ont déjà été dépensés pour ces institutions. Avec vingt millions de dollars, on pourrait faire beaucoup de choses dans les collectivités des premières nations. Le gouvernement a déjà mis en place ces institutions sans le consentement des premières nations et sans le consentement du Parlement du Canada. Je crois qu'il est temps que le gouvernement dise la vérité à tous.
M. Rick Laliberte (Rivière Churchill, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais fournir quelques statistiques à l'intention de la députée. Je sais qu'elle a déjà été commissaire d'école, comme moi, si bien que l'emprunt de fonds n'a rien de nouveau pour elle et moi.
Ces statistiques sont tirées d'une publication de 2003 intitulée Finances of the Nation. On y lit que «la dette nette consolidée des administrations fédérale, provinciales et municipales au Canada représentait un montant estimé à 830,4 milliards de dollars au 31 mars 2000». Elle totalisait 130 milliards de dollars il y a 20 ans. On ne peut qu'imaginer quels sommets atteindra la dette publique au Canada si les gouvernements des premières nations sont dans cette catégorie. Ce sont les institutions financières qui sortiront gagnantes compte tenu des taux préférentiels majorés et des sommes qu'elles toucheront en frais d'intérêts. Elles sont d'ailleurs là pour ça.
Permettez-moi de formuler un autre commentaire à l'intention de la députée. Je tenais absolument à préciser que c'est la Couronne qui doit définir les relations avec les nations autochtones. Nous devons nous méfier des gouvernements, peu importe leur allégeance politique. En Saskatchewan, c'est un gouvernement néo-démocrate qui a accordé des exemptions fiscales aux quatre coins de la province conformément aux traités. C'est un gouvernement néo-démocrate qui a révoqué unilatéralement cette exemption fiscale. N'importe quel gouvernement pourrait en faire autant.
C'est pour cela que je tiens à ce que cette consultation ait lieu avec les dirigeants et les collectivités des premières nations et que je tiens aussi à ce que toute institution financière, toute relation financière soit définie par la Couronne et les premières nations. Voilà pourquoi je soulève cette question.
Mme Bev Desjarlais: Monsieur le Président, les commentaires du député sur la fiscalité renforcent ma conviction que seules les institutions financières profiteraient du fait que les premières nations seraient autorisées à emprunter. En fin de compte, ce sont les contribuables qui devront assumer les coûts supplémentaires car il n'y a pas d'assiette de l'impôt foncier dont on peut tirer des recettes.
Il ne fait aucun doute que, en tant que conseillers scolaires, nous savons comment emprunter de l'argent, mais je sais également que, là d'où je viens, nous n'avions pas à emprunter parce que nous avions une assiette de l'impôt foncier. Le revenu moyen dans la région que je représentais était probablement de 45 000 $ à 50 000 $. Nous pouvions nous permettre de payer des taxes et des impôts. Je ne rechigne pas à payer mes taxes et mes impôts. Ils me procurent des avantages formidables. J'ai l'eau courante et le tout-à-l'égout. J'ai un service d'incendie et d'ambulance. J'ai les services d'un hôpital. Les routes sont dégagées. Mes trois enfants sont tous allés à l'école pendant 12 ans.
Dans la plupart des cas, les premières nations n'ont pas de recettes, mais elles ont des traités aux termes desquels le gouvernement s'est engagé à leur fournir certains services. Comme je le disais auparavant, si le gouvernement pouvait se soustraire aux obligations que lui imposent les traités, les progressistes-conservateurs et les libéraux l'auraient fait il y a longtemps. La réalité est que les traités sont là et que le gouvernement doit les respecter. Plus tôt il le fera, moins il en coûtera aux contribuables et aux premières nations, qui paient au prix de leur propre destruction.
Je n'essaierai pas de cacher le fait que la taxe de vente provinciale a été rétablie en Saskatchewan. Je suis originaire de cette province. Je sais que le gouvernement provincial a longtemps hésité. Nous avons discuté avec différentes personnes car nous savions que cela aurait un effet. Nous nous sommes réunis entre politiciens pour discuter de ces choses.
La réalité est que le gouvernement fédéral transférait moins d'argent aux provinces et que ces dernières, qui essayaient de maintenir leurs services de santé, entre autres, ont estimé qu'elles n'étaient pas obligées d'exempter les premières nations de la taxe de vente provinciale. Elles sont exemptées de la TPS.
Au début, il n'y a pas eu de consultation, mais je suis heureuse de dire que, par la suite, il y en a eu pour voir comment procéder. Ce n'est pas une chose qui a été faite à la légère, mais je sais qu'elle a été faite à cause du manque de ressources et parce que les provinces voulaient maintenir les services.
Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Monsieur le Président, je suis ravie d'intervenir pour appuyer le projet de loi C-23, la Loi sur la gestion financière et statistique des premières nations. J'ai déjà fait une intervention au sujet de ce projet de loi. En fait, j'ai même reçu des commentaires d'autochtones qui y sont favorables et qui veulent se prévaloir de cette mesure législative et des outils qu'elle offre. Tous les autochtones ne partagent pas le même avis, mais le projet de loi comporte la souplesse nécessaire pour s'accommoder de cette situation.
Le premier ministre a fait état d'une relation nouvelle et renforcée avec les autochtones et d'une nouvelle approche à l'égard de la disparité inacceptable qui perdure, et que les députés d'en face et de côté-ci ont décrite et qu'ils veulent faire disparaître. La disparité entre la qualité de vie des autochtones et celle de l'ensemble des Canadiens non autochtones est inadmissible.
Le 19 avril, à l'occasion de la Table ronde Canada-Autochtones, nous avons assisté à la mise en place d'un important jalon au Canada, dans nos rapports avec les autochtones. Ce forum visait à renouveler et à resserrer nos liens avec les premières nations, avec les Inuits et avec les Métis. Cet événement faisait suite à l'invitation du premier ministre et a réuni des aînés, le premier ministre lui-même, des dirigeants autochtones, des ministres du gouvernement actuel et des représentants distingués de diverses organisations autochtones. Il a permis d'établir les fondements d'un nouveau plan qui assurerait, une fois pour toutes, aux autochtones une qualité de vie égale à celle de leurs concitoyens canadiens non autochtones.
Le premier ministre a dit à l'époque, et à plusieurs reprises, que le Canada n'avait pas de plus grand défi que ceux auxquels font face les Canadiens autochtones et que les autochtones devraient participer à tout ce que le Canada avait à offrir, grâce à une autonomie accrue et à une qualité de vie qui s'améliorerait sans cesse.
Le projet de loi C-23 porte sur la réalisation de l'engagement du gouvernement envers les autochtones. Il porte sur la collaboration nécessaire pour enlever tout obstacle à la croissance. Il porte sur les mesures qui s'imposent pour faire en sorte que la population des premières nations ait accès aux outils nécessaires à la croissance économique et à la prospérité, ces outils dont ma municipalité disposerait, qui peut-être ne seraient pas utilisés par la municipalité de la députée de Churchill ou votre propre municipalité, monsieur le Président.
Différentes localités utilisent différents outils mis à leur disposition, mais elles doivent disposer de toute une gamme d'outils pour être considérées vraiment égales, pour bénéficier de la qualité de vie souhaitable pour tous les Canadiens, et pour se donner la capacité de choisir plutôt que de se faire imposer des choses par un gouvernement quelconque. Il s'agit ici de respecter la capacité des premières nations de trouver leurs propres solutions et d'appliquer ces dernières de façon adaptée à leur collectivité.
Le projet de loi C-23 mettrait à la porté des premières nations beaucoup des outils pratiques qui sont essentiels à la croissance économique et à l'autonomie. Il offrirait aux investisseurs le climat de certitude dont ils ont besoin pour investir dans les localités des premières nations. Le principal objectif est de combler l'écart socio-économique. Il est logique de voir que les premières nations ont la même possibilité que les autres Canadiens de saisir les occasions économiques.
En général, le projet de loi aiderait les collectivités des premières nations à contracter des emprunts sur les marchés financiers, en leur facilitant l'accès à un financement à faible taux d'intérêt pour réaliser des investissements dans l'infrastructure locale, et par le fait même attirer les investissements nécessaires dans les collectivités des premières nations, les mêmes investissements que ma localité a la capacité d'attirer pour ensuite faire concurrence aux autres localités.
Le député de Scarborough est ici. Sa localité fait concurrence à d'autres localités canadiennes en matière d'investissements. La capacité de trouver les outils appropriés et les occasions d'investissement appropriées est nécessaire à nos localités et aux localités des premières nations.
Le projet de loi C-23 est une nouvelle approche qui est basée sur le fait que les premières nations doivent être en mesure de planifier et d'orienter leurs propres économies pour qu'il y ait de véritables débouchés et une prospérité durable. Le projet de loi créerait quatre institutions nationales qui permettraient d'améliorer la capacité des gouvernements des premières nations de prendre en main le bien-être social et économique de leurs localités.
L'Administration financière des premières nations fournirait aux autochtones l'accès dont bénéficient les localités non autochtones aux sources de capitaux à faible taux d'intérêt, notamment sur le marché des obligations.
Je tiens à signaler aux députés que la proposition a reçu l'appui d'importants souscripteurs d'obligations et d'importantes agences d'évaluation du crédit. On s'attend à ce qu'elle permette aux communautés des premières nations d'obtenir 125 millions de dollars de capitaux privés les cinq premières années. En fait, le projet s'inspire d'un système qui a été utilisé en Colombie-Britannique, la cote de crédit de cette province reposant sur des obligations non garanties ayant même dépassé celle du Canada depuis un certain temps.
Pour les premières nations, le fait d'avoir accès aux marchés obligataires leur permettrait de réduire leurs coûts d'emprunt de 30 à 50 p. 100, ce qui laisserait plus d'argent à la disposition de la communauté. Comme l'a expliqué la députée de Churchill, cela laisserait plus d'argent pour répondre aux besoins prioritaires de la communauté. Au lieu de payer des intérêts plus élevés, la communauté aurait ainsi plus d'argent pour financer des projets d'immobilisation et d'infrastructure indispensables.
La deuxième institution, le Conseil de gestionfinancière des premières nations, attesterait la solvabilité des communautés désirant avoir accès au bassin d'investissements. En fait, ce conseil encouragerait les gouvernements des premières nations à respecter des normes rigoureuses de gestion financière et il attesterait qu'ils les respectent, comme on s'y attendrait de tout autre gouvernement.
La troisième institution est la Commission de la fiscalité des premières nations. Cet organisme aurait un rôle plus vaste que celui joué actuellement par la Commission consultative de la fiscalité indienne. Il permettrait aux premières nations de renforcer leur régime d'impôt foncier.
Autre aspect important à signaler, en vertu du projet de loi, ceux qui paient des impôts fonciers auraient davantage leur mot à dire au sujet de l'établissement des taux d'imposition et d'autres questions connexes. Tous n'auraient pas à payer des impôts fonciers. C'est aux communautés qu'il appartiendrait d'en décider. Ce sont elles qui prendraient la décision. Rien ne serait imposé à quiconque. Il s'agirait d'un choix. Le projet de loi C-23 offrirait des possibilités aux communautés.
Parmi la centaine de premières nations qui possèdent déjà des régimes d'imposition d'un océan à l'autre, on a pu voir tout ce qu'on peut accomplir en établissant une assiette fiscale stable.
Prenons quelques exemples. La première nation Millbrook, au Nouveau-Brunswick, s'est servie de ses pouvoirs d'imposition foncière pour devenir une des économies ayant connu la plus rapide croissance dans cette province. La première nation de Squamish s'est servie de ses recettes provenant de l'impôt foncier pour aménager des installations récréatives qui créent un environnement très positifs pour les enfants et les jeunes. Toutes nos communautés aspirent certainement à cela. La première nation de Westbank a, quant à elle, établi un nouveau système d'assainissement des eaux en réponse aux besoins commerciaux et résidentiels tant de ses membres que des non-membres. Évidemment, il y a beaucoup d'autres exemples édifiants comme ceux-là.
La quatrième institution, à savoir l'Institut de la statistique des premières nations, contribuerait non seulement à améliorer la qualité et la pertinence des renseignements disponibles pour traiter des questions autochtones, mais également à assurer que les décideurs autochtones aient accès aux renseignements. Cela appuierait la prise de décisions, rendrait les gouvernements plus responsables et contribuerait à faire en sorte que les ressources sont affectées là où les besoins se font sentir.
Dans ma collectivité, les gens parlent de l'importance d'avoir des données statistiques précises et de veiller à ce qu'elles tiennent compte des priorités de la collectivité dans l'avenir.
À l'heure actuelle, les premières nations n'ont pas accès aux genres de renseignements statistiques dont disposent la majorité des Canadiens. Le manque de données rend très difficiles pour les premières nations la planification et la capacité de profiter pleinement des possibilités économiques. L'Institut de la statistique recueillera les données existantes de diverses provenances afin de dresser un profil statistique complet, pertinent et précis des premières nations partout au Canada.
Rien dans le projet de loi n'obligerait une première nation à participer aux activités de collecte de données. L'institut appuierait les premières nations qui souhaitent profiter de ce service en les aidant à mieux comprendre et à mieux utiliser les données statistiques dans la planification, la prise de décisions et les négociations. Ainsi, les premières nations disposeraient des données statistiques et des compétences en gestion nécessaires pour bâtir un avenir plus certain.
Les quatre institutions établies par le projet de loi C-23 offriraient aux premières nations les outils nécessaires pour attirer des investissements, construire des infrastructures, créer des emplois et s'attaquer aux problèmes sociaux.
Il est crucial que nous nous penchions sur cette question extrêmement importante. Les premières nations pourraient atteindre leurs objectifs selon leurs propres conditions. Le projet de loi proposé est une initiative des premières nations, qui en ont guidé son élaboration. Grâce à ces institutions, les premières nations pourraient jouer un rôle de chef de file dans des initiatives de développement à long terme.
Comme on voit, en cette Chambre, des partis politiques différents, appuyés par des Canadiens de ma collectivité et d'autres collectivités partout au pays, je suis convaincue que certaines personnes des premières nations s'opposent au projet de loi et au leadership qui l'a fait naître. Ces divergences sont inhérentes à la nature même du Canada et de la démocratie.
Certaines collectivités des premières nations choisiront de ne pas faire appel à ces institutions créées grâce au projet de loi et c'est tout à fait normal; cependant, il importe de mettre ces outils à la disposition de celles qui voudront utiliser ces systèmes.
Grâce au projet de loi, les collectivités des premières nations pourront établir des partenariats avec d'autres gouvernements et avec l'industrie, pour renforcer leurs économies et améliorer la qualité de vie de tous leurs habitants.
Le projet de loi proposé crée ces institutions, mais la participation est facultative. Personne n'oblige les premières nations à prendre part à quoi que ce soit, pour quelque raison que ce soit; elles peuvent choisir de ne pas participer. Cela me permet de clarifier d'autres principes fort importants sous-jacents au projet de loi, et de répondre aux préoccupations tout à fait légitimes qui ont été soulevées à la Chambre.
Le projet de loi C-23 ne modifie pas la relation historique fondamentale entre le gouvernement du Canada et les peuples des premières nations. Il vise, premièrement, à donner aux premières nations la possibilité d'utiliser des outils statistiques et financiers, comme ceux dont disposent les autres paliers de gouvernement du Canada, pour faciliter leurs efforts en vue d'améliorer la qualité de vie dans les réserves.
Deuxièmement, le projet de loi n'oblige pas les premières nations à lever des impôts ou à emprunter. Les pouvoirs d'imposition foncière des premières nations existent dans la Loi sur les Indiens depuis les modifications de 1988. Tout comme aucune directive ne rend maintenant obligatoire l'imposition foncière ou les emprunts, il n'y aura pas de directive à cet effet à l'avenir.
La création de l'Institut de la statistique des premières nations sera entreprise de concert avec Statistique Canada. L'institut ne fera pas double emploi avec l'excellent travail de Statistique Canada, reconnu à l'échelle mondiale, et ne servira pas à compléter ce travail. L'institut aidera plutôt les premières nations à compiler des données statistiques. Les premières nations seront encouragées à participer davantage aux programmes nationaux de Statistique Canada.
Dans le discours du Trône, le gouvernement a indiqué que les conditions de vie horribles des membres des collectivités autochtones était l'un des problèmes les plus urgents auxquels fait face le Canada à l'heure actuelle. Au cours d'une table ronde tenue par le premier ministre, le 19 avril dernier, celui-ci a réitéré l'engagement du gouvernement à régler ces problèmes. Ce projet de loi nous permettra de prendre nos responsabilités, tout en adoptant des mesures précises en réponse aux manifestations de bonne volonté et de recherche du bien commun provenant de nombreuses personnes ayant participé à la table ronde.
Il reste encore beaucoup à faire, mais j'ai confiance que nous sommes sur la bonne voie. Le plus important, c'est que nous travaillions de concert avec les premières nations, les Inuits et les Métis. Nous n'oublions pas les erreurs du passé, mais nous sommes remplis d'espoir, de bonne volonté, de détermination et d'idées concrètes en vue de parvenir à une nouvelle destination et à un meilleur avenir pour nous tous.
[Français]
M. Marcel Gagnon (Champlain, BQ): Monsieur le Président, j'ai bien écouté le discours de ma collègue, et il y a une contradiction flagrante dans ce qu'on entend ici.
Mon collègue de Saint-Hyacinthe—Bagot, qui a suivi le dossier de très près, dénote quantité de contradictions. La députée vient de nous dire qu'il est très important de travailler avec les premières nations. Justement, ce qu'on reproche—et ce qui me semble être le plus gros reproche qu'on fasse—, c'est que les premières nations craignent qu'on soit en train de leur imposer une volonté. On a l'impression que le gouvernement est de plus en plus paternaliste, et ce n'est pas ce que les premières nations veulent.
Or, ma collègue qui vient de s'exprimer dit justement l'inverse de ce qui est la crainte de tout le monde. Qui dit vrai? C'est un peu comme le titre d'une émission de télévision qui s'intitulait Qui dit vrai?
Si ce que je viens d'entendre est vrai, si vraisemblablement la députée a la bonne notion de la chose, serait-il grave de retourner en arrière, de faire ce qu'on demande, c'est-à-dire de ne pas adopter la loi tout de suite et de retourner à la consultation? Il y a un malentendu à cet égard, puisque 60 p. 100 des autochtones refusent cette loi et disent qu'ils n'ont pas été assez consultés, et je viens d'entendre qu'il faut travailler surtout avec les autochtones. J'aimerais qu'elle me démêle un peu cela.
Comment se fait-il qu'on reproche justement ce qu'elle dit qu'on fait? Est-elle capable de m'expliquer cela, pour que je puisse le comprendre?
Mme Paddy Torsney: Monsieur le Président, je pense qu'il est nécessaire de faire observer que chaque groupe d'autochtones n'a pas la responsabilité ou l'obligation d'avoir la même opinion. C'est une population diverse. Il y a des réserves qui ont de gros problèmes et il y en a d'autres qui sont dans une meilleure situation.
Certains groupes d'autochtones dans certaines réserves veulent avoir de ces institutions contenues dans ce projet de loi. Le député dit qu'il est nécessaire d'avoir plus de consultations. C'est peut-être bon pour ceux qui ne veulent pas de ce projet de loi, mais pour les autres qui veulent apporter des changements, qui veulent utiliser les statistiques, qui veulent avoir la possibilité de changer la situation et qui veulent avoir les outils qui sont prévus dans ce projet de loi, il est nécessaire de l'adopter.
On peut regarder ce qui se passe dans ces réserves et voir si la situation exige des amendements pour certains groupes d'autochtones. Pour les autres, peut-être pouvons-nous avoir également cet outil.
[Traduction]
Une mesure n'a pas à être ajustée à toutes les tailles. Parmi les réserves ou les bandes, il se peut que certaines souhaitent bénéficier des outils rendus disponibles, d'autres non. Pour ce qui est par contre de consulter plus à fond et de ne pas adopter le projet de loi, ce serait nier aux premières nations qui veulent ces outils la possibilité d'en bénéficier. Qui sommes nous pour dire que ces gens ont tort, qu'ils ne représentent pas leur bande ou leur réserve?
Ils ont été investis du pouvoir de diriger. Ils nous dont demandé d'agir en ce sens. Nous avons effectué des consultations. Nous devrions veiller à adopter cette mesure et ainsi doter les intéressés de ces instruments. Voyons voir quels résultats ils donnent chez ceux qui les revendiquent. Nous serons ainsi en mesure de constater leur efficacité et de les améliorer au besoin. Pour ce qui est des groupes qui ne souhaitent pas se prévaloir des instruments prévus au projet de loi, ils n'ont qu'à ne pas le faire. Rien ne les y oblige.
La municipalité de mon vis-à-vis par exemple fait appel à certains instruments tandis que la mienne en privilégie certains autres. Voilà qui est fort bien. Nous avons des plans précis dans ma localité pour établir des clubs sportifs et c'est peut-être tout à fait autre chose ailleurs. Pourtant, nous évoluons dans le cadre d'une législation municipale. Et c'est exactement ce qui se passerait dans le cas qui nous occupe. Les gens de nos premières nations auraient accès à divers instruments.
Et il faut dire qu'il y a des dirigeants, des représentants et des particuliers de la collectivité des premières nations qui appuient ce projet de loi entièrement. Ils ont communiqué avec moi et je me suis entretenu avec eux. On m'a interpellé dans la rue. Certaines personnes souhaitent disposer de ces instruments. Nous ne devrions pas, à cause du désaccord des uns, les refuser aux autres qui ne demandent pas mieux que d'en profiter. Nous n'imposons rien à ceux qui sont contre. Nous autorisons une mesure à l'avantage de ceux qui la souhaitent et ont été parmi les chefs de file pour la réclamer.
Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Monsieur le Président, j'ai une observation à formuler, puis je poserai une question. La députée a mentionné la manière dont les municipalités peuvent gérer leurs affaires. Les municipalités sont visées par des dispositions législatives sur les municipalités, elles peuvent gérer leurs affaires et relèvent de directives provinciales.
L'année où j'ai été élue la première fois, j'ai rencontré un homme d'une communauté autochtone. Il avait 107 ans. J'étais très honorée de faire sa connaissance. Il m'a dit qu'un jour la police était venue avec un représentant de l'État et que le chef de la première nation avait signé le traité. Il ne m'a pas parlé d'une municipalité exposant ses vues au gouvernement pour savoir s'ils devaient agir ou non. La nation et l'État étaient sur un pied d'égalité. C'est de cela dont nous parlons.
La députée a raison lorsqu'elle dit que les premières nations peuvent le faire. Je lui dit qu'elles le font déjà et qu'elles n'ont pas besoin de ce projet de loi. Cependant, ce projet de loi risque grandement de porter préjudice aux autres nations qui n'en veulent pas. Il y a 600 et quelque nations qui n'en veulent pas. Comment la députée peut-elle, en toute conscience, appuyer un projet de loi alors que plus de 600 nations ont affirmé qu'elles n'en voulaient pas? Qui représentons-nous à la Chambre?
Je dis à la députée que le projet de loi n'est pas nécessaire. Les premières nations qui le veulent peuvent le faire. J'aimerais qu'elle me dise pourquoi elles ne peuvent pas le faire dès maintenant.
Mme Paddy Torsney: Monsieur le Président, je ne puis assurément pas parler au nom de chacun des groupes qui s'opposent au projet de loi. Je ne puis exposer en détail les objections ou expliquer pourquoi, selon moi, certains s'opposent au projet de loi. Je pense que le plus important est que le projet de loi n'obligera personne à agir contre sa volonté. Je suis consciente du risque que certains peuvent voir. C'est ce qui se produit lorsque la Chambre adopte un projet de loi. Certains groupes sont en désaccord. C'est ce qui se passe en démocratie. Je pense que les divergences d'opinion reflètent les situations différentes dans lesquelles se trouvent de nombreuses communautés autochtones. Certaines se tirent très bien d'affaire sur le plan économique alors que d'autres vivent dans des conditions déplorables, dont le député d'en face a d'ailleurs parlé. Je suis allée sur place et j'ai pu le constater.
Nous devons pouvoir donner des outils aux gens. Nous devons être en mesure d'assurer la flexibilité qui permettra à ceux qui le veulent de négocier et d'agir à leur guise, sans pour autant obliger les autres qui ne veulent pas participer, ou qui ne veulent pas s'engager dans cette direction, à agir contre leur gré.
En cette époque où nous sommes confrontés à des problèmes complexes, si nous n'avons pas de solutions simples, si nous n'avons pas de baguette magique pour régler les problèmes de tout le monde, il vaut mieux opter pour la flexibilité. Nous ne pouvons même pas donner de baguette magique à certaines personnes pour leur permettre de résoudre elles-mêmes leurs problèmes, parce que c'est important. Il vaut mieux offrir aux gens la flexibilité, leur proposer des solutions novatrices et travailler ensemble pour innover. Autrement, nous sommes condamnés à répéter le passé. Nous devons faire mieux. Nous avons l'obligation de redresser les torts, permettre aux gens de façonner leur propre avenir et de créer une véritable prospérité économique, une prospérité que les premières nations, les Inuits et les Métis méritent.
Certains pourront soutenir que le projet de loi ne permettra pas d'atteindre ces objectifs. En fin de compte, tout se termine par un vote et il nous incombe de prendre des décisions. Nous pouvons toujours les revoir plus tard si elles ne sont pas aussi efficaces que nous l'escomptions. Nous pouvons modifier les lois. Ce serait cependant une tragédie que de ne pas adopter ce projet de loi alors que de nombreuses premières nations l'attendent.
Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour m'opposer à la motion du député de Saint-Hyacinthe--Bagot. Je suis convaincue que le projet de loi C-23 jouit de l'appui de la majorité des premières nations. Le projet de loi est le résultat direct des efforts déployés par les dirigeants des organisations et des collectivités des premières nations.
Les dirigeants des premières nations ont travaillé pendant de nombreuses années pour trouver des moyens de réduire les barrières considérables au développement économique que doivent surmonter les premières nations d'un bout à l'autre du Canada. Il est difficile pour les premières nations d'améliorer leurs infrastructures comme leurs routes et leurs égouts si elles n'ont pas accès à des formes de capitaux à long terme comme les débentures gouvernementales.
Les projets d'infrastructure extrêmement cher. L'absence de pareille infrastructure a pour effet que les investisseurs s'adressent aux collectivités non autochtones disposant d'une infrastructure pour des possibilités de développement. Les premières nations ont beaucoup de difficulté à soutenir la concurrence dans pareilles conditions.
Le manque de renseignements ou une information inexacte ont également nui au développement au sein des premières nations. Pendant des décennies, divers ministères et organismes gouvernementaux ont recueilli auprès des premières nations des données les concernant, mais il a été difficile pour les premières nations d'accéder aux données statistiques connexes, lesquelles sont souvent incomplètes.
Il y a quelques années, le vérificateur général a estimé que chacune des premières nations du pays a fourni tous les ans au gouvernement de l'information sur plus de 150 aspects de la vie communautaire et des données concernant les inscriptions scolaires aussi bien que la population.
Des organismes comme la Société canadienne d'hypothèques et de logement, Santé Canada et le ministère de la Justice se sont servi des données qu'ils ont recueillies pour une variété de fins. Des renseignements ont été intégrés à des dossiers officiels comme le registre des Indiens, le Recensement des élèves de la liste nominative et les ententes de transfert de services de santé du Canada. D'autres données ont été utilisées pour le suivi de projets liés à la Stratégie relative à la justice applicable aux autochtones, aux programmes de logements dans les réserves et à des douzaines d'autres initiatives.
Des données ont été recueillies à des fins particulières, et très peu d'efforts ont été faits pour les partager avec d'autres organismes. Encore moins d'efforts ont été faits pour colliger les données afin qu'elles puissent servir à dresser un profit statistique juste et complet des premières nations d'un bout à l'autre du Canada.
Tous les planificateurs savent que l'accès à des données exactes est essentiel. Que la planification touche la rénovation d'un édifice tel qu'une installation communautaire à des fins récréatives ou la prestation de services sociaux, l'accès à une information complète et fiable est absolument indispensable. Pourtant, l'information recueillie auprès des collectivités des premières nations a rarement été fournie aux conseils de bande et aux dirigeants des premières nations. Cela compromet leur capacité de planifier efficacement. Ainsi, peu de premières nations ont acquis la facilité ou l'expertise leur permettant d'utiliser les renseignements statistiques pour faire leur planification, prendre des décisions et mener des négociations.
L'institut de la statistique proposé collecterait des données existantes à partir de sources variées afin de dresser un profil statistique complet, pertinent et exact des premières nations de tout le pays. L'institut fournirait par ailleurs un soutien aux premières nations qui désirent accroître leur capacité de comprendre et d'utiliser des renseignements statistiques aux fins de planification, de prise de décisions et de négociations. De cette manière, les premières nations pourraient acquérir les habiletés dont elles ont besoin pour gérer l'information statistique à des fins de planification et de projection à long terme pour leurs communautés.
Quelques premières nations déterminées ont réussi à surmonter en partie les obstacles au développement en travaillant avec des partenaires des secteurs public et privé. La première nation de Westbank, par exemple, négocie des contrats de location et prélève des impôts fonciers de non-membres qui vivent ou font des affaires sur leur territoire. Grâce aux recettes générées, la nation de Westbank peut maintenant opérer son propre centre de soins de jour et une résidence pour personnes âgées, de même qu'aménager des installations à des fins éducatives et récréatives qui profitent à toute la communauté.
Les dirigeants des premières nations qui perçoivent des impôts fonciers reconnaissent depuis longtemps que les recettes fiscales pourraient leur servir à d'autres fins. Les autorités municipales et provinciales, par exemple, utilisent souvent les recettes fiscales comme garantie pour obtenir des prêts à long terme pour des projets d'infrastructure. Certaines premières nations voulaient pouvoir faire la même chose.
Il y a plusieurs années, des dirigeants autochtones ont créé la First Nations Finance Authority Inc., organisme indépendant qui permettait aux communautés membres de faire des investissements collectifs. Au fur et à mesure qu'augmentait le nombre des premières nations membres de cet organisme, le désir d'émettre des débentures collectives pour avoir accès à un financement à long terme à des taux d'intérêt plus bas augmentait également. Ce sont là des principes commerciaux sains. Ce concept a attiré l'appui d'un partenaire clé, la Municipal Finance Authority of British Columbia, qui avait 30 ans d'expérience et une cote de crédit triple A.
Le projet de loi C-23 créera quatre institutions distinctes et complémentaires: une administration financière, une commission de la fiscalité, un conseil de gestion financière et un institut de la statistique. Une fois que ces institutions seront établies, les premières nations seront dotées de nombreux outils depuis longtemps à la disposition des autres ordres de gouvernement.
Les concepts qui se retrouvent dans le projet de loi C-23 ont été raffinés par plusieurs années d'interaction continue avec les gouvernements des premières nations, avec des groupes de contribuables et des experts techniques tels que la Banque Royale, Dominion Bond Rating Service et Moody's Investors Service, tous des intervenants clés sur les marchés financiers du Canada.
Le projet de loi C-23 créera l'Administration financière des premières nations. Cela permettra aux premières nations d'obtenir des capitaux privés à des taux privilégiés pour entreprendre des projets d'infrastructure, par exemple, notamment pour construire des routes. Les analystes estiment que, dans cinq ans, les premières nations se seront procuré 125 millions de dollars de financement par débenture en donnant leurs recettes fiscales foncières comme garantie. Un investissement de cette magnitude aura un effet très important sur les communautés des premières nations.
Afin que les premières nations créent et entretiennent des régimes fiscaux à la fois équitables et représentatifs, le projet de loi C-23 crée la Commission de la fiscalité des premières nations. Cette commission verra à équilibrer les intérêts des communautés des premières nations et ceux des contribuables.
Afin que cet environnement soit propice pour le long terme, il est impératif que les premières nations aient accès à des services professionnels d'examen et de conseils en matière de gestion financière. Il faut que les prêteurs aient une idée claire et précise de la santé financière des emprunteurs, et il faut qu'ils aient facilement accès à des évaluations indépendantes. Le Conseil de gestion financière des premières nations contribuera à assurer la présence de ces aspects importants d'une bonne gestion financière.
La gestion du conseil financier se divisera en deux éléments. Tout d'abord, les premières nations percevront des impôts fonciers et tenteront d'obtenir des prêts sur la base de ces revenus. Le conseil garantira que le système de gestion financière, les pratiques et les normes des premières nations seront respectés. Les membres du conseil pourront également intervenir sans délai au besoin. La seconde partie du mandat prévoira une disposition portant sur tout un éventail de services techniques à l'intention des premières nations. Le conseil pourra offrir une aide au chapitre de la recherche, de la promotion des droits, de la politique de gestion financière ainsi que du développement de la capacité. Ces activités aideront les collectivités des premières nations à tirer le plus grand profit possible de leurs ressources financières.
La quatrième institution prévue par le projet de loi C-23 aidera à résoudre les problèmes liés à la collecte et à l'analyse des données portant sur les premières nations. L'Institut de la statistique des premières nations créera une base de données commune à laquelle toutes les premières nations auront accès. Cette base de données fournira aux dirigeants des premières nations les renseignements statistiques précis dont ils ont besoin pour prendre des décisions éclairées. En résumé, cet institut permettra aux premières nations de tirer profit de ces renseignements plutôt que de se contenter de les fournir.
L'Institut de la statistique des premières nations travaillera directement avec les gouvernements et les organismes des premières nations pour les aider à déterminer leurs besoins en matière d'information et à y répondre. Les collectivités qui voudraient par exemple mettre sur pied et adopter des initiatives en matière de logement et de santé pourront obtenir des renseignements sur la croissance de la population et l'efficacité des mécanismes de prestation de services. C'est le genre de renseignements dont nous avons tellement besoin pour nous assurer que les institutions que nous mettrons sur pied seront utiles pour les gens auxquels ils sont destinés.
L'accès à l'information aidera les gouvernements et les organismes des premières nations à travailler en collaboration avec tous les niveaux de gouvernement. De nombreux renseignements sur les premières nations sont actuellement contenus dans des dizaines de banques de données différentes. L'Institut de la statistique assurera une utilisation pertinente de ces renseignements précieux, permettant ainsi le partage le plus efficace possible des renseignements statistiques les plus à jour, complets et pertinents entre les groupes de premières nations, les autres niveaux de gouvernement et les organismes de statistiques. Cela permettra également d'assurer que le gouvernement du Canada dispose des renseignements statistiques dont il a besoin pour mettre au point et adopter des politiques pertinentes.
Le projet de loi C-23 comprend également plusieurs mesures de protection à l'égard de la sécurité et de la confidentialité des données détenues par l'Institut de la statistique. Ce projet de loi jouera un rôle clé à l'égard de la capacité des premières nations à se servir des renseignements statistiques. Cet institut donnera accès à des renseignements précis, ce qui améliorera le niveau de responsabilisation et la capacité décisionnelle des conseils de bande et des gouvernements de premières nations.
Ce ne sont pas toutes les premières nations qui s'intéressent aux statistiques. Elles ne s'attendent pas toutes à avoir leur part des possibilités découlant du projet de loi C-23 et rien ne les oblige—je répète, rien ne les oblige—à le faire. Toute première nation qui ne souhaite pas communiquer de l'information au nouvel institut ne sera pas obligée de le faire en vertu du projet de loi C-23. Rien dans ce texte ne limite la capacité des premières nations de percevoir des taxes foncières et d'emprunter de l'argent conformément aux dispositions actuelles de la Loi sur les Indiens.
Aujourd'hui, nous avons le devoir de veiller à ce que cette initiative pilotées par les premières nations passe à l'étape suivante. Nous devons nous assurer que le projet de loi C-23, qui contient maintenant de nombreuses améliorations ajoutées à l'étape du rapport, franchisse l'étape de la troisième lecture. Ce projet de loi très important a fait l'objet de beaucoup de consultations et il appartient à la Chambre de donner suite à ces voeux.
[Français]
M. Jean-Yves Roy (Matapédia—Matane, BQ): Monsieur le Président, j'écoutais le discours de ma collègue concernant ce projet de loi qui nous est soumis. C'est finalement le même projet de loi que nous avons étudié avant la prorogation de la Chambre. J'ai entendu parler presque exclusivement de statistiques alors qu'on parle de différentes nations autochtones. On ne parle pas de groupes homogènes qui, d'un océan à l'autre, sont semblables. Nous parlons de nations autochtones différentes.
Il y a 60 p. 100 des nations autochtones qui refusent ce projet de loi alors que seulement 40 p. 100 l'approuvent. Dans quelle mesure ce projet de loi a-t-il une utilité? Je crois qu'il n'en a pas et qu'il devrait être retiré. Je pense que le rôle du gouvernement, à l'heure actuelle, serait d'abord de reconnaître les nations autochtones et la différence entre elles. Pour ce qui est de l'ensemble des services qui sont mentionnés, les nations autochtones y ont déjà accès.
À mon avis, il faudrait négocier l'autonomie gouvernementale avec chacun des groupes, chacune des nations autochtones. C'est là l'essence même de la question. Est-ce que nous voulons, comme État, reconnaître aux nations autochtones un pouvoir qui leur appartient, le pouvoir d'être autonomes, de s'autogérer et de faire leurs propres lois et leurs propres règlements sur leur territoire, exactement comme on le fait pour d'autres groupes?
C'est là l'erreur du projet de loi et c'est là le sens de ma question. Est-ce que ma collègue peut m'expliquer comment il se fait que le gouvernement, à l'heure actuelle, ne met pas plus d'efforts sur la négociation pour l'autonomie gouvernementale de chacun des groupes? À une question qui était posée au sous-ministre, on nous a dit: «On n'a pas les ressources nécessaires et on n'a pas les fonds nécessaires pour négocier, à l'heure actuelle, avec chacun des groupes».
[Traduction]
Mme Karen Redman: Monsieur le Président, de toute évidence, le plan directeur qu'exprime le projet de loi dont nous sommes saisis et sa dynamique n'incarnent pas une solution de type universel. En réalité, le texte reconnaît que les premières nations sont de nature très diverse et qu'elles ont des possibilités différentes. Il appartiendra à chaque première nation de déterminer si elle veut adopter une loi, et si oui, à quel moment, pour exercer les pouvoirs prévus dans ce projet de loi lorsqu'il aura été adopté et si elle demandera des services à une institution. Manifestement, nous confions la prise de décision à ceux qui devraient la détenir, c'est-à-dire aux dirigeants des premières nations.
Il incombe aux députés de reconnaître à quel point les premières nations sont diverses. Certaines ont de très importantes assiettes fiscales, tandis que d'autres ont une assiette extrêmement limitée. Dans un cas comme dans l'autre, elles auront la possibilité d'avoir accès aux services spécialisés de conseil, de formation et de soutien dont elles ont besoin pour réussir.
Les questions mêmes que mes collègues ont soulevées sont, en fait, inscrites dans ce projet de loi.
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, j'aimerais souligner deux choses à ma collègue de Kitchener-Centre.
Premièrement, avec tout le respect que je lui dois, la participation supposément facultative à ces trois institutions est trompeuse. J'aimerais disposer de plus de temps pour expliquer à la députée certains des points que j'ai abordés plus tôt, mais, en fait, il s'agit là d'organismes nationaux constitués par une loi qui affecteront les droits et les intérêts de toutes les premières nations du pays, qu'elles aient ou non été ajoutées à l'annexe Je vais m'interrompre ici, faute de temps pour expliquer, mais je tiens à lui souligner ce fait.
D'autre part, elle a aussi mentionné qu'ils espèrent dégager environ 125 millions de dollars sur cinq ans en capital de risque ou en financement privé pour des projets. Ne trouve-t-elle pas bizarre que le budget de ces quatre institutions s'élève à 25 millions de dollars par année? Autrement dit, il en coûtera 125 millions de dollars pour faire fonctionner ces quatre nouvelles institutions durant cinq ans et c'est exactement le montant qu'ils espèrent recueillir de sources privées pour promouvoir des initiatives. Selon moi, il s'agit là d'une recette pour échouer. J'aimerais que la députée nous dise ce qu'elle en pense.
Mme Karen Redman: Monsieur le Président, je constate que mon collègue voit ce projet de loi comme limitatif plutôt que facilitant une autonomie accrue. En fait, cette mesure fournirait aux dirigeants des premières nations les outils leur permettant d'exploiter les possibilités au profit de leur peuple de la façon la plus adaptée à leur cas.
Il n'y a qu'à regarder les peuples des premières nations aux quatre coins du Canada pour voir qu'il y a de très bons dirigeants qui, grâce à des pratiques exemplaires, ont permis à des bandes des premières nations de maximiser les ressources à leur disposition dans l'intérêt de la collectivité.
La mesure n'est pas limitative. Elle fournit aux premières nations d'autres outils, et je reprendrai les paroles de mon collègue de Burlington, des outils que les municipalités possèdent. Les premières nations peuvent choisir parmi une variété d'outils ceux qui leur semblent les plus appropriés. Le gouvernement travaillera en partenariat avec elles de manière à les aider à se doter du type d'infrastructure dont elles ont besoin pour prendre les décisions qui répondront de façon appropriée aux besoins de leur collectivité, aux besoins de leur bande.
[Français]
M. Marcel Gagnon (Champlain, BQ): Monsieur le Président, effectivement, certaines réponses me scandalisent un peu; on dit, par exemple, que les premières nations ne sont pas obligées de se servir de cet outil.
Toutefois, les premières nations ont besoin d'outils pour se développer. Est-ce qu'on donne des outils seulement à 40 p. 100 des premières nations, alors qu'on pourrait prendre un peu de temps, quelques semaines de plus, et les consulter vraiment pour leur donner des outils dont elles se serviraient à 100 p. 100?
Seulement au Québec, par exemple, on aurait besoin de 8 400 logements. Il faut voir la situation des logements dans mon comté: c'est absolument pénible. Personne ne pourrait demeurer dans ces maisons, et seulement quelque 400 ou 500 logements pourront être construits. Ces gens n'ont pas besoin d'outils facultatifs; ils ont besoin d'outils dont tout le monde pourrait se servir, parce qu'ils y ont droit.
Mon collègue a parlé d'autonomie. C'est probablement le premier outil dont les premières nations ont besoin.
[Traduction]
Mme Karen Redman: Monsieur le Président, je ne mets pas en doute la passion de mon collègue d'en face, mais je suis un peu perplexe. Je réitère que le projet de loi C-23 fournit ces outils, après des années de consultation ininterrompue. Si je me base sur les observations du député, celui-ci préférerait que l'on adopte une mesure législative normative qui serait imposée à toutes les bandes.
Il est évident que le projet de loi n'est pas normatif. Il ne propose pas une approche universelle. Si on fournit aux premières nations le type d'outils de planification qu'ont les municipalités et le type de renseignements statistiques qui est le pivot de la bonne planification, elles utiliseront ces outils à bon escient pour l'amélioration du logement et des soins de santé et pour assurer un meilleur avenir à tous les peuples des premières nations. Je ne crois pas qu'on ait besoin d'une mesure normative.
Compte tenu du partenariat et des outils prévus dans le projet de loi, les premières nations traceront elles-mêmes la voie d'un avenir meilleur. Elles auront l'aide du gouvernement pour y arriver, mais on ne leur imposera pas une façon de faire, comme ce fut le cas dans le passé.
[Français]
M. Marcel Gagnon (Champlain, BQ): Monsieur le Président, j'aimerais prendre quelques minutes pour ajouter ma voix à ce débat. J'ai eu l'occasion de le faire en posant des questions.
D'abord, je dois vous dire que ce n'est pas d'aujourd'hui que je m'intéresse au dossier des premières nations. J'ai été député à l'Assemblée nationale du Québec sous M. René Lévesque, qui fut le premier premier ministre à reconnaître les premières nations et leur autonomie. Chaque année, M. Lévesque nous obligeait à passer au moins une soirée, ou plus si possible, lors d'un grand congrès tenu par les premières nations à Québec, à aller discuter avec elles pour essayer de comprendre leurs problèmes et pour essayer aussi de faire en sorte qu'elles soient de plus en plus des nations à part entière au Québec, avec qui nous pourrions discuter d'égal à égal.
Il est assez déplorable de voir la façon dont le gouvernement fédéral a toujours traité les premières nations. C'est comme si l'on était le gouvernement supérieur et qu'elles étaient des minorités inférieures, des personnes mineures, et qu'il fallait assumer à leur place des responsabilités, prendre des décisions qu'elles sont amplement capables de prendre elles-mêmes, si on leur en laissait la possibilité.
J'ai eu l'occasion de me rendre chez les autochtones de mon comté à quelques reprises, et il est pénible de voir la situation de ces gens. Ils sont entourés de richesses, mais ils n'ont aucun droit de se développer, puisqu'ils sont toujours sous tutelle.
Quand j'ai vu l'état des logements qu'ils occupaient, j'ai demandé à des Attikameks pourquoi ils ne les rénovaient pas ou ne les réparaient pas. Ils m'ont répondu qu'ils n'étaient pas propriétaires, que ces logements ne leur appartenaient pas, qu'ils étaient au gouvernement fédéral. Ils disaient qu'ils avaient été cantonnés sur une réserve. Ils étaient scandalisés de voir que, n'étant pas capables de se développer suivant leurs aptitudes et compétences et suivant le droit à l'autonomie qu'ont tous les peuples de la terre, ils ont des problèmes majeurs, notamment des problèmes de santé et des problèmes relatifs au suicide.
Je suis allé dans une communauté autochtone au cours de l'été dernier; durant le premier mois de l'été, en juin, il y avait eu trois suicides de jeunes filles de 14 à 18 ans. Trois suicides dans une communauté de 2 000 habitants, c'est quand même assez dramatique, alors qu'on voit des gens pleins de talents. Ces gens ne demandent pas mieux que de se développer et d'apporter leur contribution, de développer leurs talents et leurs richesses.
Dans une communauté comme Weymontachie, par exemple, qui compte une population d'un maximum de 2 000 habitants, j'ai découvert qu'il y avait deux joueurs de hockey de 19 et 21 ans de calibre professionnel. J'ai travaillé avec eux pour essayer de les faire jouer en Europe. Ce sont 2 joueurs sur une population de moins de 2 000 habitants.
Ce sont des gens pleins de talents. Il s'agit tout simplement de leur permettre de se développer. Ce n'est pas vrai que ces gens ont besoin d'avoir encore un gouvernement-tutelle, d'avoir un ministère des Affaires indiennes comme autrefois. Ces gens ont tout simplement besoin d'être traités en adultes.
On me dit que ce projet de loi dont on parle présentement sera bon pour ceux qui veulent s'en servir. La députée qui vient de prendre la parole a dit qu'on en parle depuis des années. Un autre interlocuteur a dit que si cela ne fait pas l'affaire, on remettra la loi sur le métier. On sait qu'il faut plusieurs années pour changer les choses, surtout avec ce gouvernement-ci.
Lorsqu'on prend le temps de donner aux gens les outils qu'il leur faut, pourquoi ne prend-on pas le temps de leur donner ce qu'ils veulent véritablement et de les consulter correctement?
Cela n'a pas été fait. Mon collègue du Nouveau Parti démocratique vient de dire que c'est faux de dire que c'est volontaire. Ils ont peur. De plus, on sait que la loi obligera certaines choses, et ce ne sont pas des choses auxquelles on veut être obligés.
Mon collègue de Saint-Hyacinthe—Bagot suggérait que l'on prenne quelques semaines supplémentaires, mais que les résultats que nous aurions feraient l'unanimité, sinon un très large consensus. Alors, c'est une affaire de rien. Il nous a dit que si on avait présenté ce projet au congrès de l'Assemblée des premières nations, l'attitude aurait été complètement changée. Ces gens veulent tout simplement qu'on les consulte et qu'on les écoute, comme des adultes compétents, des personnes qui ont le droit de se développer suivant leurs aspirations.
Ayant fait mon éducation politique sous le regard et les conseils d'un homme comme René Lévesque, je trouve l'attitude de ce gouvernement scandaleuse à tous points de vue, et il n'y a pas que celui-là. En effet, on se prend pour des êtres supérieurs. On pense qu'on a la vérité. Tel est le défaut du gouvernement libéral, en face. C'est à un point tel que toutes sortes de choses surviennent. Des scandales sortent à pleines portes. Il s'agit seulement de bouger un peu pour s'apercevoir qu'à peu près rien ne fonctionne normalement, mais qu'on possède encore la vérité. En effet, on possède encore la vérité et, comme gouvernement fédéral libéral, on a le talent, la volonté et l'attitude d'êtres supérieurs qui sont capables de dire aux premières nations ce dont elles ont besoin pour se développer.
Je ne crois pas cela. J'invite n'importe qui du gouvernement à venir avec moi visiter les autochtones, les peuples des premières nations de mon comté. Je suis sûr que c'est la même chose dans l'ensemble du Canada. Ça l'est en tout cas dans l'ensemble du Québec, c'est certain. Ces gens ont le droit et le devoir de se développer, et ce, suivant leurs goûts.
Quand je suis allé rencontrer les premières nations, les Attikameks entre autres, je voulais m'enquérir quant au Supplément de revenu garanti. En effet, on avait dit que, parmi ceux qui étaient privés du Supplément de revenu garanti, les premières nations étaient une clientèle cible qu'il fallait visiter. À ma très grande surprise, chez les Attikameks, il n'y a pas de personnes âgées. Or, ici, dans la communauté blanche, le pourcentage de personnes âgées est de quelque 15 p. 100. Chez les Attikameks, il y avait trois personnes âgées de plus de 65 ans dans un village comptant environ 2 000 personnes.
Si l'espérance de vie n'est pas plus forte que cela, est-ce que cela veut dire que ces gens vivent dans de bonnes conditions? Est-ce que cela veut dire qu'ils ont ce qu'il leur faut pour se développer? On m'a dit: «Ne cherche pas ici les personnes âgées: personne n'a le Supplément de revenu garanti, car il n'y a pas de personnes âgées.»
Alors que chez nous l'espérance de vie est de 79 ans chez les hommes et de 82 ou 83 ans chez les femmes, on ne retrouve que trois personnes âgées dans une communauté qui compte environ 2 000 personnes. Il faut se poser des questions quant à leurs conditions de vie et de développement.
Quand de l'autre côté on entend dire que dans un seul mois, trois suicides et des tentatives de suicide ont été commis par des jeunes filles âgées de 14 à 17 ans, il faut se poser des questions, en bon père de famille comme on pense l'être. Il faut arrêter d'imposer notre façon de voir et aller les écouter pour connaître leurs besoins et leur donner la chance de se développer comme ils doivent le faire.
Je suis d'accord avec le député de Saint-Hyacinthe—Bagot et le collègue du NPD. Il est faux de prétendre que pour pour ce qui est des 60 p. 100 de la population qui ne veulent pas de cette loi, ils ont seulement à ne pas s'en servir. On va adopter la loi pour ceux qui aiment cela, qui pensent qu'ils en ont besoin et les autres ont seulement à ne pas s'en servir. C'est faux. On nous a dit qu'il y a des obligations dans la loi qui ne plaisent pas aux premières nations.
Comme citoyen, comme gouvernement, nous avons le devoir de faire en sorte que ces outils qui sont dans la loi soient acceptés par l'ensemble de la communauté, qu'ils obtiennent le consensus le plus large possible, comme le dit le député de Saint-Hyacinthe—Bagot.
Les premières nations ne sont pas ici pour se représenter. C'est pourquoi je m'en voudrais de laisser passer l'occasion de m'élever avec véhémence devant cette attitude paternaliste du gouvernement fédéral vis-à-vis des premières nations du Québec et de l'ensemble du Canada. Il faut qu'on accepte de retourner à la table, de négocier, de leur demander ce qu'elles veulent avoir et, surtout, qu'on leur dise la vérité. Si, effectivement, 150 millions de dollars par année sont disponibles avec la loi et, d'un autre côté, on sait qu'il y a seulement 25 millions de dollars, il est temps de le savoir. Il faut surtout qu'on leur dise la vérité. Cela doit être possible d'avoir la vérité dans cette Chambre. Cela devrait être possible.
Il faut surtout qu'on leur dise la vérité sur ce que la loi leur réserve et qu'on leur demande aussi la vérité sur ce qu'ils veulent avoir pour être considérés en adultes, d'égal à égal avec nous, de façon à ce qu'ils puissent se développer, comme tous les peuples de la Terre ont le droit de se développer.
M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, vous comprenez que c'est un bon discours de la part d'un parlementaire qui a eu le privilège de siéger à la fois à l'Assemblée nationale et aux Communes. Donc, son expérience est vaste. Je ne peux pas rester insensible aux allusions multiples qu'il a faites à l'ancien député de Taillon et premier ministre du Québec, M. René Lévesque. On disait de lui qu'il faisait partie de cette trop courte liste de libérateurs de peuples. Évidemment, comme vous le savez, notre libération est à venir.
Je voudrais poser la question suivante au député. Si M. Lévesque était de ce monde aujourd'hui, trouverait-il quelque matière d'inspiration dans ce projet de loi? Est-ce qu'il convient que le projet de loi C-23 dont nous sommes saisis est en total porte-à-faux avec les principes qu'a défendus M. René Lévesque tout au long de sa carrière politique?
M. Marcel Gagnon: Monsieur le Président, je vous remercie de me donner l'occasion d'en parler un peu moi aussi. Effectivement, tout en en parlant, cela me rappelle d'excellents souvenirs.
Comme mentor ou comme maître à penser en politique, on ne peut pas avoir mieux. J'entendais quelqu'un dire qu'un homme du calibre de René Lévesque, un peuple en produit un par cent ans environ. J'ai eu la chance de travailler avec lui.
M. Lévesque disait: «Quand ça ne va pas, fermez votre bureau et allez voir la population; la vérité se trouve là.» Je me rappelle qu'en 1981 ou en 1982, après la deuxième élection de M. Lévesque, on était en pleine crise économique, ça allait vraiment mal et c'était la déprime totale. M. Lévesque avait dit: «On ferme le Parlement, et je demande à chaque député, peu importe le parti qu'il représente, de retourner dans sa région, dans son comté, pour rencontrer les gens et revenir avec des solutions.» Cela, à mon point de vue, c'est de la démocratie bien appliquée.
Pour répondre à mon collègue, je peux vous dire que si M. Lévesque avait cette loi devant lui, il retournerait voir les premières nations et dirait: «Voici, dans ma générosité, j'ai pondu une belle loi. Dites-moi ce qui ne fonctionne pas là-dedans et ce qu'on pourrait faire pour l'améliorer.» C'est ensemble qu'on travaille. On ne travaille pas pour le plaisir de dire qu'on a été député pendant tant d'années ou qu'on fait partie d'un gouvernement invincible, extraordinairement intelligent. On est ici pour être au service des gens qui veulent se développer.
Je vais vous raconter une petite histoire. Un jour, je revenais de La Tuque, et j'ai vu quelqu'un portant un poncho qui faisait de l'autostop sur le bord du chemin. Je me suis arrêté et je l'ai fait monter dans ma voiture. C'était dans les années 1970. J'ai vu que le monsieur, âgé d'une trentaine d'années, était un peu triste. J'ai essayé de le faire parler, mais il ne voulait pas trop. Finalement, il a décidé de me dire que son pays était autour du lac Gagnon, dans le nord de la Mauricie. Il était le dernier; son peuple avait disparu. Ce matin-là il en venait; il avait enterré son père la veille. Son père voulait absolument qu'il reste avec lui, pour que ses restes soient enterrés avec ceux de ses ancêtres au bord du lac Gagnon.
J'ai commencé à le faire parler de son peuple, et je me suis aperçu qu'il avait été complètement exterminé. Cette communauté, qu'il appelait son pays, située au bord du lac Gagnon, ne nuisait à personne. Au contraire, elle meublait bien ce coin du Québec. Ensuite, je l'ai regardé et je lui ai dit: «Il me semble que tu dois m'en vouloir un peu.» Il s'est demandé pourquoi il m'en voudrait, puisqu'il semble que tel est leur sort. Je lui ai dit que ce n'était pas vrai, que si j'étais à sa place, je n'accepterais pas que ce soit mon sort ni celui de ma communauté.
Ces peuples ont le droit d'être respectés comme tout le monde. Ils ont le droit de vivre et de se développer comme tout le monde. Leurs aspirations valent les miennes. Nous avons le droit, le devoir de leur donner les outils dont ils ont besoin pour se développer.
Gilles Vigneault dit, dans une chanson: «Demandez aux pierres, demandez aux rois. Personne n'est étranger sur cette terre. Tout le monde a ses droits.»
On doit avoir le minimum de respect. Ce n'est pas vrai que cela coûterait trop cher, qu'on perdrait de l'autonomie ou qu'on se rapetisserait à respecter davantage les autres.
[Traduction]
L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, avant de parler du discours du député, je tiens à dire qu'il s'en est pris gratuitement à notre parti au début de son discours. Il a laissé entendre que nous pensions tout savoir.
Je crois que c'est plutôt le Bloc qui est dans cette situation. Il vote toujours de la même façon. Les bloquistes ne réfléchissent jamais aux diverses positions. Ils pensent toujours que la souveraineté est la seule solution. Les bloquistes pensent qu'ils détiennent la vérité, alors que dans le cas de ce projet de loi, lorsque les premières nations l'ont présenté, les bloquistes n'ont pas présenté un argument en faveur du projet de loi.
De notre côté, nous avons des députés en faveur du projet de loi et d'autres qui sont contre. Nous ne prétendons pas détenir la vérité. Un certain nombre de députés libéraux se sont prononcés contre le projet de loi. J'ai signalé que la chef Roberta Jamieson et le chef Paibomsai s'étaient mis en rapport avec moi et qu'ils étaient contre ce projet de loi. J'ai essayé de discuter des questions qu'ils ont soulevées. Je ne pense pas que le député devrait laisser entendre que nous sommes ceux qui pensent avoir toutes les bonnes réponses.
Le député a soulevé la question du caractère facultatif et il a signalé que notre collègue néo-démocrate avait déclaré que ce n'était pas facultatif. Je tiens à préciser clairement à tout le monde que ce projet de loi est tout à fait facultatif. Si les membres des premières nations veulent adhérer à l'une de ces institutions financières, ils y adhèrent. Aucune première nation ne doit signer. Aucune première nation n'est forcée de percevoir des impôts fonciers. Il y en a déjà une centaine environ qui perçoivent des impôts fonciers. Elles ont choisi de le faire aux termes de la Loi sur les Indiens. Elles ont ce pouvoir aux termes de cette loi.
Elles peuvent continuer d'être visées par la Loi sur les Indiens et toujours percevoir des impôts. Elles pourraient cesser de percevoir des impôts, ou percevoir des impôts aux termes de ce projet de loi. L'objectif visé ou la raison pour laquelle les premières nations nous ont demandé de faire cela, c'est pour les aider à obtenir un financement qu'elles étaient incapables d'obtenir auparavant.
On ne fait que leur donner le pouvoir de percevoir des impôts, pouvoir qu'elles ont depuis de nombreuses années, dans le cadre d'une structure les aidant à obtenir les garanties nécessaires. C'est totalement leur...
Le président suppléant (M. Bélair): À l'ordre. Veuillez adresser vos observations à la présidence. Le député de Champlain a la parole.
[Français]
M. Marcel Gagnon: Monsieur le Président, je ne sais pas s'il y a une question dans les propos du député. En tout cas, s'il pense que le Bloc québécois possède la vérité, c'est complètement faux. J'espère que ce n'est pas l'impression que nous donnons. Au contraire. J'ai mentionné les déclarations du député de Saint-Hyacinthe—Bagot, entre autres, qui a défendu ce dossier chez les autochtones. Il est allé jusqu'à Vancouver avec le collègue du Nouveau Parti démocratique. Ils ont été décorés tous les deux de la Plume d'aigle parce qu'ils avaient bien défendu le dossier, parce qu'ils avaient été consulter les premières nations.
Je dis tout simplement que c'est ce qu'on doit faire. On doit consulter les premières nations. Le député de Saint-Hyacinthe—Bagot a quand même un peu d'expérience ici. Il dit que si on prenait quelques semaines supplémentaires—quelques semaines sur des années—, nous aurions l'unanimité, sinon un très grand consensus. Nous ne disons pas que nous avons la vérité. La vérité est dans le champ, elle est chez les peuples des premières nations. La vérité est là. On demande juste d'aller la chercher là.
M. Jean-Yves Roy (Matapédia—Matane, BQ): Monsieur le Président, j'ai moi aussi une petite histoire à raconter à mon collègue. C'est une histoire plutôt triste. Elle ne sera pas longue.
Il y a à peu près un an, un chef autochtone du comté de Matapédia—Matane, que je ne nommerai pas, vint me rencontrer. On s'était parlé à plusieurs reprises. Son problème était que le début de l'année scolaire approchait et il s'apprêtait à engager des enseignants. Toutefois, il n'avait reçu aucune garantie du gouvernement fédéral à savoir s'il serait capable d'engager les enseignants nécessaires pour enseigner aux jeunes autochtones. Il a rencontré le fonctionnaire responsable au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. Cependant, j'ai dû intervenir parce qu'on tardait à régler le dossier. On lui a répondu: «Votre ch... de chèque, vous allez l'avoir». On a été totalement méprisant envers le chef autochtone en question.
Je voudrais savoir de la part de mon collègue si ce genre d'attitude est acceptable?
M. Marcel Gagnon: Monsieur le Président, il est sûr que lorsque, justement, on a des lois paternalistes, quand on adopte des règlements en tant qu'êtres supérieurs pour le peuple que l'on veut administrer, on risque de développer des attitudes comme celle-là. C'est relativement répandu de voir des gens qui pensent qu'on donne tout aux premières nations, alors que nous avons tout pris d'elles, alors qu'elles étaient ici avant nous, qu'elles se sont développées avant nous. C'est pour cela qu'il faut arrêter d'être paternalistes.
Il faut leur donner les outils pour qu'elles puissent se développer suivant leurs compétences et leurs aspirations, mais sans penser que lorsqu'on leur remet un chèque, on leur fait un cadeau. C'est faux. Cela leur appartient. Le pays leur appartenait avant notre arrivée. Ils ont certainement des droits ancestraux d'au moins 10 à 12 000 ans, à certains endroits au Québec.
M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, j'ai le plaisir de participer au débat sur l'ancien projet de loi C-19, qui est maintenant le projet de loi C-23. Je le fais, parce que je sais que lorsqu'on a les pieds au Parlement fédéral, il faut se préoccuper des premières nations.
C'est d'abord et avant tout la responsabilité du gouvernement fédéral puisque, en vertu de la Constitution canadienne, il est le fiduciaire des peuples autochtones qui sont, comme chacun le sait, non seulement des nations mais les premières nations.
Lorsque l'on dit que les peuples autochtones forment les premières nations, on renvoie évidemment à deux réalités. D'abord, on dit qu'ils figurent parmi les premiers occupants de cette partie-ci de l'Amérique et on dit qu'ils forment une nation. Or, former une nation, cela veut dire quelque chose sur le plan sociologique et cela veut aussi dire quelque chose sur le plan politique.
Ce que cela veut dire, c'est qu'ils ont une cohérence de groupe, une volonté de vivre en commun, le contrôle d'un territoire, une histoire commune, des traditions et des symboles, une interprétation du monde qui leur confèrent une cohésion comme groupe qui donne tout à fait un caractère de grande légitimité à leurs revendications, à savoir que l'on puisse avoir un rapport différent à eux.
Je pense que c'est ce que disait notre critique en matière d'affaires autochtones, le sympathique député de Saint-Hyacinthe—Bagot, dont tout le monde sait qu'il a comme première vertu de toujours garder son calme dans toutes les circonstances. C'est un homme placide, serein et qui chemine dans la vie avec une très grande maîtrise de lui-même. Sachez que ses qualités proprement cardinales, si je peux me permettre de le dire, sont d'une grande inspiration pour le caucus.
Or, le député de Saint-Hyacinthe—Bagot a eu l'occasion de déplorer à plusieurs reprises que quelques projets de loi ont été soumis à l'attention des parlementaires et que ç'aurait été l'occasion pour le gouvernement fédéral, comme le disait le député de Champlain, de mettre fin à cette philosophie tutélaire, à cette philosophie coloniale, à cette philosophie de contrôle, où on estime que le gouvernement fédéral sait ce qui est mieux pour les premières nations et s'inscrit dans un rapport de domination.
C'est d'autant plus important qu'on ne peut pas oublier, comme parlementaires, un certain nombre d'éléments. J'étais député à la Chambre, mon collègue l'était aussi, et je pense que le député de Champlain l'était également lorsque la Commission Erasmus-Dussault a déposé son rapport en 1999. Non, le député de Champlain se faisait déjà attendre, monsieur le Président, et vous savez que la distance crée le désir, n'est-ce pas? C'est connu.
Donc, lorsque la Commission Erasmus-Dussault a déposé son rapport, la ministre du temps, l'ex-ministre du Développement des ressources humaines, avait présenté ses excuses aux premières nations, parce qu'on devait reconnaître que, depuis la Commission Laurendeau-Dunton jusqu'à ladite Commission Erasmus-Dussault, un certain nombre de documents publics prouvaient combien le fédéral s'était mal acquitté de ses responsabilités de soutien au développement aux premières nations.
De quelque point de vue que l'on regarde, que ce soit la question du logement, la question du travail, la question du développement de la petite enfance, la question de la mobilité professionnelle, de quelque manière que l'on regarde la santé des populations autochtones, on se rend compte, quand on fait la comparaison, que tous les indicateurs sont présents pour en faire une nation plus stigmatisée, où les indices de développement ne sont pas aussi prospères que ce qui existe ailleurs chez d'autres groupes.
Par conséquent, la ministre de l'époque des Affaires indiennes et du Grand Nord canadien avait présenté ses excuses aux premières nations. Nous avons cru qu'avec le rapport Erasmus-Dussault, il y avait là la matière première pour avoir un nouveau partenariat, un nouveau dialogue, qui fasse en sorte que l'on puisse se parler de nation à nation. Ce n'était pas la première fois que des excuses étaient faites. Mon ami, le député de Berthier—Montcalm, le sait. Le premier ministre Mulroney s'était excusé auprès de la communauté nippone, par exemple.
À la Chambre, nous avons voté sur une motion pour s'excuser auprès des Arméniens. Nous sommes également venus très près de voter sur une motion pour déplorer le comportement de la Couronne britannique et de Sa Majesté chef de l'État du Canada—pour des raisons constitutionnelles qu'on connaît—à l'endroit des Acadiens, qui ont été injustement déportés.
Comme parlementaires, nous nous reconnaissons une responsabilité à l'endroit d'un groupe particulier, dans ce cas-ci les premières nations, les autochtones. En 1982, à une époque où j'étais d'une jeunesse fougueuse et robuste, j'étais encore aux études.
Une voix: Il y a longtemps!
M. Réal Ménard: Il n'y a pas tellement longtemps de cela, contrairement à ce que mon collègue peut penser. Cela fait quand même une bonne vingtaine d'années.
On disait qu'en 1982, c'était l'ère des autochtones. Il y a eu le triste rapatriement de la Constitution, avec les conséquences qu'on connaît pour le Québec. Cela amenait quand même un côté positif pour les autochtones qui avaient été invités à la table de négociations. À ce moment-là, on parlait de constituante. On disait que les provinces et le gouvernement fédéral, avec les représentants des différents groupes, étaient des constituantes. On voulait réécrire une Constitution. Bien sûr, encore une fois, on avait occulté les aspirations légitimes du Québec, et on connaît tout le contexte du rapatriement dans lequel cela s'est fait, avec la nuit des longs couteaux.
Le fait est que l'article 35 de la Constitution de 1982 autorisait beaucoup d'espoir pour les autochtones en ce qui concerne un véritable développement, le droit à l'autodétermination, le droit d'avoir des institutions originales et la capacité d'avoir un modèle de développement porteur d'équilibre entre leurs aspirations ancestrales et les défis à relever pour l'avenir.
Je me rappelle avoir lu des chapitres importants du rapport Erasmus-Dussault. Fait intéressant, par exemple, on disait que la notion de leadership n'est pas la même chez les autochtones. On est beaucoup plus en présence d'un leadership consensuel. Le rapport à la sagesse n'est pas le même. On valorise beaucoup les aînés, le savoir, la tradition. Ce sont des choses qui sont extrêmement valorisées.
Quand la ministre responsable des Affaires autochtones s'est excusée auprès des premières nations, on aurait souhaité que le gouvernement nous présente un certain nombre de législations pour respecter le développement des premières nations.
Mon ami le secrétaire parlementaire ne peut pas ignorer qu'il y a eu dans cette Chambre une mobilisation sans précédent contre la Loi sur la gouvernance des premières nations. Il reste que tous les partis d'opposition se sont opposés à cette loi. On a passé des heures en comité, avec le député de Saint-Hyacinthe—Bagot, fidèle à lui-même. Mon ami le député du NPD était présent en comité.
Je dois dire que je n'oublierai jamais combien les députés libéraux ont eu un comportement cavalier à l'endroit de l'opposition. On a été très près. On a manqué de respect aux partis d'opposition et aux premières nations. À la dernière journée des travaux du comité, des femmes autochtones sont venues encercler le comité. Les sociétés autochtones ont une tradition matrilinéaire. On a fait beaucoup plus de place aux femmes dans certaines communautés. Ce n'est pas ainsi partout, mais c'est le cas dans certaines communautés. Les femmes avaient encerclé le comité en signe de désolation face au caractère malheureusement irrémédiable de l'adoption de la Loi sur la gouvernance.
Comment se fait-il que le gouvernement n'ait pas compris la leçon que nous voulions lui donner et qu'il n'ait pas déposé des projets de loi qui permettraient d'aménager un autre rapport qui soit beaucoup plus respectueux de ce que sont les premières nations et du rapport Erasmus-Dussault? De ne pas l'avoir fait est d'autant plus inconcevable que la Cour suprême avait rendu un certain nombre de décisions reconnaissant les droits ancestraux des premières nations.
Qu'est-ce qui ne fonctionne pas avec le projet de loi devant nous? D'abord, ce n'est quand même pas une donnée insignifiante dans le débat.
Le gouvernement essaie de balayer cela du revers de la main comme si c'était quelque chose d'insignifiant, mais 61 p. 100 des chefs des premières nations s'opposent au projet de loi. Imaginez-vous, si 61 p. 100 des chefs des premières nations sont des porte-parole autorisés, donc des représentants de leur communauté qui s'y opposent, cela doit quand même vouloir dire quelque chose.
J'espère que le secrétaire parlementaire se lèvera tout à l'heure et nous dira comment son gouvernement se situe face à cette faculté de bafouer l'autorité légitime des chefs des premières nations. Alors, ce ne sont ni les députés du Bloc québécois, ni les députés du Nouveau Parti démocratique, ni ceux du Parti conservateur du Canada: 61 p. 100 des chefs élus par leurs pairs en vertu d'un processus démocratique s'opposent à ce projet de loi. Il faudra quand même que le gouvernement réagisse un peu et soit un petit peu plus en phase avec le respect des premières nations.
Ce dont les premières nations ont besoin, ce sont bien sûr de ressources, mais c'est davantage, comme le disait le député de Champlain, un contrôle sur les ressources qui existent sur leurs territoires. Quand on a étudié le projet de loi sur les premières nations, je me rappelle qu'on voulait céder une partie du contrôle des ressources. On disait que les premières nations pourraient aménager certaines ressources et décider de leur utilisation. Toutefois, quand aux ressources plus importantes, on continuait ce lien fiduciaire, ce lien de contrôle qui ne permet pas aux premières nations de décider de leur avenir en aménageant elles-mêmes des scénarios de développement qui soient respectueux de ce qu'ils sont.
On se pose des questions. Pour les premières nations qui ne vont pas se prévaloir de ce droit concernant les institutions financières et le droit d'emprunter sur les marchés obligataires et facultatifs, est-ce qu'on peut penser—et ce sont des préoccupations légitimes—qu'il n'y aura pas des représailles? Qu'est-ce qui nous dit qu'elles ne seront pas pénalisées dans leur développement? Ce sont des questions que l'on doit et que l'on peut poser légitimement.
On aurait pu souhaiter que le gouvernement fédéral s'inspire de l'héritage de M. René Lévesque. Je pense que les gens du Canada anglais connaissent quand même un peu M. René Lévesque. Ce n'est quand même pas possible d'avoir vécu dans cette partie-ci du monde, d'avoir plus de 15 ans et de ne pas connaître M. René Lévesque.
Néanmoins, laissez-moi vous le présenter. M. René Lévesque a d'abord été l'un des premiers chefs souverainistes à se faire élire à l'Assemblée nationale. C'est d'ailleurs quelque chose dont on est très fiers, comme souverainistes.
Dans l'histoire du mouvement souverainiste québécois, il y a trois leaders politiques qui ont formé des partis politiques. Notre parti, notre projet de souveraineté, a toujours eu des racines démocratiques extrêmement importantes. Je pense bien sûr à Pierre Bourgault, qui avait fondé le RIN. Je pense bien sûr à René Lévesque, qui avait fondé le Mouvement souveraineté-association et le Parti québécois et, plus près de nous, M. Lucien Bouchard qui a fondé cette formidable force de progrès social, de changement qu'est le Bloc québécois.
Toujours est-il que René Lévesque a été député et ministre responsable de la nationalisation de l'électricité sous Jean Lesage. Après, comme on le sait, il a quitté le Parti libéral quand celui-ci est devenu une espèce de ramassis de dogmes où on voulait bloquer l'avenir du Québec.
Est-ce que mon temps est terminé, monsieur le Président? Non, pas du tout, j'ai l'impression qu'il me reste une bonne quinzaine de minutes. Est-ce que je me trompe, monsieur le Président? Il m'en reste bien cinq?
Le président suppléant (M. Bélair): Non, je vous faisais un signe, parce que je commençais à douter de la pertinence de votre propos. Je m'attends avidement à ce que les propos que vous venez de tenir sur vos anciens chefs se rattachent au projet de loi dont nous débattons actuellement.
Cela étant dit, il vous reste cinq minutes.
M. Réal Ménard: Monsieur le Président, laissez-moi vous dire le lien qui existe entre la formation des partis souverainistes et le projet de loi. Le lien est le suivant, c'est que le Québec est appelé à un avenir brillant. Si on donne les outils de développement aux autochtones, leur avenir va être tout aussi brillant. Je pense que c'était cela le lien. Je suis surpris que ce lien vous ait échappé mais vous avez eu la gentillesse de me permettre de le rétablir avec beaucoup de fermeté.
Dans les années 1980, René Lévesque a déposé une motion qui reconnaissait le droit au développement de 11 nations autochtones. Ce n'était pas courant. Peu de gens dans la vie politique s'intéressaient à l'avenir des premières nations. On a commencé dans les années 1980. Tantôt, je disais que lors du rapatriement de la Constitution en 1982, où il y avait oeuvre de constituant, on a invité les premières nations. À l'article 35 du projet de loi, en 1982, on leur reconnaissait un certain nombre de droits.
Comme la Loi sur la gouvernance, comme les deux ou trois derniers projets de loi que les ministres responsables successivement des premières nations au Canada nous ont présentés, je crois qu'il faut bien reconnaître que le projet de loi dont nous sommes saisis n'est certainement pas respectueux de ce que sont les premières nations, ni de l'héritage de René Lévesque, ni de la Commission Erasmus-Dussault.
Je dois vous dire que nous sommes inquiets que 61 p. 100 des chefs des premières nations se soient trouvés inconfortables avec le projet de loi. Je me demande s'il ne serait pas de notre devoir, comme parlementaires, de rappeler ce projet de loi-là pour prendre le temps qu'il faut pour rencontrer et entendre les gens. Ce n'est pas quelque chose que nous devons faire à la hâte.
Un philosophe allemand disait que la vitesse est l'ennemie de l'intelligence. C'est une pensée que je voudrais spécialement vous dédier, monsieur le Président. Chaque fois que, comme parlementaires, nous avons voulu agir avec précipitation, nous n'avons pas été à la hauteur des responsabilités qui étaient les nôtres. La question des autochtones est un sujet trop sérieux pour qu'on agisse avec précipitation. La députée de Québec, qui a bien étudié cette question, va me poser une question.
Je vais conclure en disant ceci. Nous sommes tout à fait désireux, au Bloc québécois, de travailler à ce que l'on puisse avoir un véritable partenariat qui donnera un contrôle sur les ressources naturelles et sur les outils de développement. Par exemple, dans nos communautés, dans les années 1980, lorsqu'il y a eu une crise économique sans précédent, on s'est donné des outils de développement. Le député de Champlain était alors député de l'Assemblée nationale, sous René Lévesque. Par exemple, à Montréal, cela s'est appelé les Corporations de développement économique et communautaire.
Ce qu'il faut pour les premières nations, ce sont des outils de développement ajustés à ce qu'elles sont et à leurs besoins. Ce n'est pas suffisant que le projet de loi soit facultatif. Ce n'est pas de cela dont on a besoin. Le projet de loi ne reconnaît pas que les autochtones sont des premières nations. Il y a un test significatif dans le fait que 61 p. 100 des chefs des premières nations, qui sont élus par leurs pairs et qui sont des porte-parole autorisés de leur communauté, n'appuient pas le projet de loi. Tantôt le secrétaire parlementaire voulait faire bonne économie de ce fait-là. Je regrette, mais quand quelque chose amène les premières nations à se mobiliser dans des proportions comme celles que je vous exprime, ce n'est pas vrai qu'il n'est pas de la responsabilité des partis d'opposition de se faire l'écho de cela à la Chambre des communes.
Nous pensons que si René Lévesque était avec nous, il s'opposerait à ce projet de loi. Nous pensons que si Lucien Bouchard était également avec nous aujourd'hui, il s'opposerait à ce projet de loi. En effet, dans chacun des gestes que nous avons posé comme groupe parlementaire, chaque fois que nous avons analysé les besoins des premières nations, nous avons voulu les considérer comme des nations à part entière, capables de choisir leur développement. Ce n'est pas vrai que c'est ce que propose le projet de loi. Ce que nous aurions de mieux à faire, c'est de rappeler ce projet de loi.
M. Jean-Yves Roy (Matapédia—Matane, BQ): Monsieur le Président, je voudrais simplement rectifier ce que mon collègue de Champlain a dit tout à l'heure. C'est d'ailleurs lui qui m'a donné la correction. Il citait une chanson de Gilles Vigneault, qui dit:
Demandez aux pierres
Demandez aux bois
Chacun est chez soi
Sur la terre.
Mon honorable collègue d'Hochelaga—Maisonneuve vient de faire une excellente intervention, avec son humour habituel, mais il traitait d'une question hautement sérieuse et extrêmement grave. Elle reflète un peu l'histoire de ce pays et de ce gouvernement. Il faut se rappeler que dès 1867, après la Conquête, dès la création du premier Parlement, la gestion des autochtones avait été confiée au gouvernement fédéral. On peut regarder ce qui s'est passé depuis 1867. En 2004, nous sommes encore en train de tenter d'imposer aux nations autochtones leurs propres vues et leurs propres moyens pour régler leurs problèmes.
On ne peut pas refaire ni modifier l'histoire. On peut au moins modifier le présent et tenter d'influencer l'avenir. Je pense que c'est ce que mon collègue voulait nous dire et nous signaler. Oui, je vais lui poser ma question.
À l'heure actuelle, et comme il l'a demandé, est-ce que ce serait possible que ce gouvernement réagisse et fasse en sorte que la majorité des nations autochtones soient d'accord avec le projet de loi en le rappelant et en le modifiant. Il faudrait avoir une véritable consultation, pas uniquement comme dans le passé mais une consultation où on écoute vraiment les nations autochtones.
M. Réal Ménard: Monsieur le Président, je remercie mon collègue de sa question, et de sa mise à niveau littéraire. Je sais que le député est féru de littérature. C'est un érudit. C'est un esprit qui s'inspire du Siècle des lumières. Je le remercie de ses mises au point.
Cela étant dit, il n'y a pas de honte, comme parlementaires ou comme gouvernement à admettre qu'on s'est trompé. On peut grandir dans l'erreur. Si le gouvernement, aujourd'hui, sollicitait l'appui des parlementaires pour que le projet de loi soit rappelé, on donnerait notre consentement unanime. Je sais que nous avons avec nous, aujourd'hui, le chef des Mohawks de la baie de Quinte, M. Donald Maracle, qui est contre le projet de loi. Quand des personnes aussi éminentes s'opposent au projet de loi, je pense que cela doit nous alerter. On doit sortir un carton jaune.
Je suis triste de cette espèce de persévérance, d'entêtement malsain du gouvernement. Je suis un peu triste de la complaisance du secrétaire parlementaire parce que c'est un homme à qui on avait reconnu une certaine souplesse par le passé. Il était capable d'être critique face à son gouvernement. Je dois dire que ces qualités-là lui font, aujourd'hui, cruellement défaut. Je lui conserve mon amitié, il n'y a pas de rancune à avoir là-dessus, mais je pense qu'il devrait se lever et demander le consentement unanime pour que le projet de loi soit retiré. Nous allons donner notre consentement. Nous allons retourner au Comité permanent des affaires autochtones, du développement du Grand Nord et des ressources naturelles. Nous allons pouvoir compter sur toute la sagesse et l'érudition du député de Saint-Hyacinthe—Bagot pour bonifier le projet de loi et surtout poser les jalons d'un véritable dialogue de nation à nation avec les premières nations. Il faudrait un dialogue qui soit respectueux de leur développement.
Je ne sais pas si je l'ai dit, mais la raison pour laquelle nous sommes contre le projet de loi, c'est que nous ne voyons pas en cela la passation d'outils capable d'assurer le véritable développement des premières nations. Rappelez-vous que tous les indicateurs, depuis Laurendeau-Dunton jusqu'à la Commission Erasmus-Dussault, nous rappellent que quelque soit le secteur d'activités considéré, santé ou autres, les premières nations n'ont pas eu le développement qui était à la hauteur des aspirations les plus légitimes auxquelles elles étaient en droit de s'attendre.
La motion d'ajournement
[L'ajournement]
* * *
L'ajournement de la Chambre est réputé proposé en conformité de l'article 38 du Règlement.
* * *
[Traduction]
L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Monsieur le Président, le 3 mai, j'ai posé une question au ministre des Pêches et des Océans afin de savoir pourquoi il avait demandé une suspension de huit mois de la recommandation du comité scientifique relative à la protection de 12 espèces marines, y compris 4 populations de morue franche. Par cette décision, le ministre a retardé une mesure nécessaire et urgente visant à protéger ces espèces en péril.
La réponse du ministre était contradictoire. Il a dit que la conservation et l'exploitation durable de toutes les ressources marines constituaient sa priorité absolue, pour ensuite finir par dire que si ces espèces étaient protégées, une telle mesure aurait un impact significatif sur les collectivités côtières. Il a également recommandé un processus de consultation d'une durée de neuf mois sur les espèces, ces mêmes espèces que les scientifiques avaient déjà déclarées en péril, menacées ou préoccupantes. Pour aggraver la situation, le ministre a permis la mise en marché de 6 500 tonnes de morue.
Compte tenu du message énergique de la communauté scientifique qui recommande un statut d'espèce en péril, ce délai de neuf mois et la permission de capturer quelque 6 500 donnes de morue mettront en danger cette espèce identifiée comme en péril, menacée et préoccupante.
Permettez-moi de signaler à l'attention de la Chambre les avis des scientifiques. Tout d'abord, des 12 espèces aquatiques portées à la liste allongée en voie d'élaboration, 9 ont été désignées menacées ou en voie de disparition, les 3 autres, préoccupantes. La morue de l'Atlantique de Terre-Neuve-et-Labrador est désignée comme étant en voie de disparition, sa population ayant fléchi de 97 p. 100 depuis le début des années 70 et de 99 p. 100 depuis le début des années 60. Selon les scientifiques, il n'y a eu pratiquement aucun rétablissement des stocks. Ces derniers affirment de plus que la pêche et les changements attribuables à la pêche sont deux des principales menaces qui pèsent sur la population de morue.
En deuxième lieu, selon les données statistiques, la population de morue de l'Atlantique du nord du golfe du Saint-Laurent est également à son plus bas. Elle a fléchi de 80 p. 100 au cours des 30 dernières années et l'espèce y est jugée menacée à cause de la surpêche. Un déclin de la morue de l'Atlantique est également constaté dans les Maritimes, pour la même raison.
Troisièmement, on peut dire que l'annonce du ministre des Pêches et des Océans d'une levée du moratoire visant la morue et d'une réouverture de la pêche montre bien que la priorité est accordée aux intérêts commerciaux plutôt qu'à l'application de la Loi sur les espèces en péril, qui confère au gouvernement les pouvoirs nécessaires pour protéger toute espèce, y compris la morue, lorsqu'elle devient en voie de disparition.
Pour les scientifiques, la pêche est le facteur primordial qui menace de disparition la morue de l'Atlantique. Pourquoi donc rouvrir la pêche à la morue, à l'encontre des recommandations bien étoffées des scientifiques?
Par conséquent, j'exhorte ce soir le secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans à revenir sur la décision de suspendre les recommandations scientifiques et à plutôt permettre d'adopter sous le régime de la Loi sur les espèces en péril l'inclusion recommandée des 12 espèces marines dont il est question.
L'hon. Larry Bagnell (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais rendre hommage au député, comme je l'ai déjà fait à maintes reprises. J'ai écouté attentivement son discours et je tiens à souligner son énorme contribution à la Chambre au fil des ans.
Je suis heureux d'avoir l'occasion d'intervenir sur les préoccupations soulevées par le député de Davenport. Au coeur du débat de ce soir se trouve la préoccupation du député relative à la prolongation du processus de consultation sur la désignation de certaines espèces sous le régime de la Loi sur les espèces en péril, notamment en ce concerne la morue du Golfe.
Nous sommes d'avis que la morue du Golfe a besoin de fermes mesures de conservation. Nous croyons aussi que l'ajout de cette espèce à la liste des espèces en péril aurait des effets importants sur les activités des premières nations, les pêcheurs récréatifs et commerciaux ainsi que les Canadiens en général.
Le gouvernement croit fermement que les citoyens inquiets doivent être informés des effets possibles de la décision d'inscrire cette espèce sur la liste des espèces en péril et avoir l'occasion d'exprimer leurs points de vue et leurs idées sur la meilleure façon de protéger et de rétablir l'espèce.
C'est pourquoi le gouvernement a décidé de prolonger de neuf mois la période de consultation. Cela permettra la réalisation de consultations plus poussées auprès des intervenants touchées ainsi que davantage de recherche et une plus grande évaluation des stocks.
Bien que la morue du golfe doive encore donner lieu à des consultations étendues, remarquons qu'un précieux travail de conservation des stocks est déjà en cours. Ainsi, les équipes fédérales-provinciales de rétablissement de la morue qui ont été mises sur pied travaillent actuellement à l’élaboration d’objectifs de rétablissement des stocks et à la mise en œuvre de mesures de rétablissement.
Le ministère des Pêches et des Océans oeuvre en collaboration avec les représentants du secteur à la mise en place d'une intendance partagée de la gestion de la pêche de la morue du golfe. Par intendance partagée, j'entends que les pêcheurs participeront effectivement au processus décisionnel relatif à la gestion de ces pêches, qu'ils mettront à contribution leurs connaissances spécialisées et leur expérience et qu'ils seront en dernière analyse partiellement responsables des résultats obtenus.
Le ministère des Pêches et des Océans et le Conseil pour la conservation des ressources halieutiques soutiennent la position du ministre, selon laquelle cette approche coopérative offrirait le meilleur moyen de protéger et de conserver cette ressource pour les générations futures.
Le premier ministre s'est clairement engagé à faire de nouveau participer les Canadiens à la vie politique du pays. Le ministre des Pêches et des Océans partage cet engagement en faveur de la coopération et la met diligemment en application dans le secteur des pêches. Le prolongement de la période de consultation, dont nous discutons ce soir, est une autre preuve de cet engagement.
Enfin, on ne doit pas oublier que les évaluations du COSEPAC représentent le début du processus d'établissement d'une liste et que c'est le gouverneur en conseil qui prendra la décision finale.
Avant de prendre cette décision finale, il est indispensable que le gouverneur en conseil comprenne parfaitement l'impact de l'inscription des espèces de morue du golfe à cette liste sur la vie et les moyens de subsistance de la population. Il convient donc d'effectuer suffisamment de consultations et de recherches, non seulement pour les espèces, mais également pour connaître l'effet de mesures de cette nature sur les collectivités.
Tel est l'objectif de ces consultations supplémentaires. C'est pourquoi j'approuve pleinement la décision du gouvernement de prolonger la période de consultation.
L'hon. Charles Caccia: Monsieur le Président, je remercie le secrétaire parlementaire de sa réponse très complète. Je dois avouer que je n'envie pas son rôle de défenseur de l'indéfendable, car dans son exposé, il est tombé dans le même piège que le ministre, lorsqu'il a dit que la morue a besoin de vigoureuses mesures de préservation, mais en même temps, nous permettons la prise d'environ 6 500 tonnes de l'espèce qui, justement, est en péril. Simultanément, pendant que l'espèce est en péril, on lance un processus de consultation.
Toutes ces mesures semblent entrer en conflit les unes avec les autres, aller dans des sens opposés. Tout ce que je peux dire en guise de conclusion, c'est que c'est là une forme de développement non durable qui nécessite attention et réexamen.
Les scientifiques formulent des recommandations fondées sur des faits et des données, et non sur des considérations politiques. Lorsqu'il s'agit des espèces en péril, nous devrions écouter davantage les scientifiques que céder aux pressions des groupes d'intérêts.
L'hon. Larry Bagnell: Monsieur le Président, puisqu'il ne me reste qu'une minute, je désire parler de la morue dans le nord du golfe Saint-Laurent. Évidemment, la Loi sur les espèces en péril permet que l'on mène des activités nuisant dans une certaine mesure à des espèces en péril, pourvu que ces activités ne mettent pas en danger leur survie ou leur redressement. On permet la réouverture de la pêche à la morue du Nord, mais à un niveau très bas, fixé à 3 500 tonnes. Nos plans de gestion des pêches comportent des mesures conservation de la ressource pour veiller à ce que la pêche continue d'être viable et qu'elle soit effectuée de façon à protéger la ressource pour les générations à venir.
Bien que le COSEPAC ait déterminé que les stocks de morue dans nord du golfe Saint-Laurent sont menacés, il est important de noter qu'il ne s'agit que d'une recommandation. C'est au gouvernement du Canada de déterminer si et quand des mesures de protection doivent être adoptées.
[Français]
Le président suppléant (M. Bélair): La motion portant que la Chambre s'ajourne maintenant est réputée adoptée. La Chambre demeure donc ajournée jusqu'à demain, à 10 heures, conformément à l'article 24(1) du Règlement.
(La séance est levée à 18 h 39.)