ENVI Réunion de comité
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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité permanent de l'environnement et du développement durable
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 3 février 2005
Á | 1105 |
Le président (M. Alan Tonks (York-Sud—Weston, Lib.)) |
M. Dale Marshall (membre, Coalition du budget vert) |
Á | 1110 |
Á | 1115 |
Á | 1120 |
Le président |
M. Mark Rudolph (coordonnateur, Clean Air Renewable Energy Coalition) |
Á | 1125 |
Á | 1130 |
Á | 1135 |
Le président |
M. Bradley Trost (Saskatoon—Humboldt, PCC) |
M. Dale Marshall |
M. Bradley Trost |
M. Mark Rudolph |
Á | 1140 |
M. Bradley Trost |
M. Mark Rudolph |
Le président |
M. Brian Jean (Fort McMurray—Athabasca, PCC) |
Á | 1145 |
M. Dale Marshall |
M. Brian Jean |
M. Dale Marshall |
M. Brian Jean |
M. Dale Marshall |
M. Brian Jean |
M. Dale Marshall |
M. Brian Jean |
Le président |
M. Bernard Bigras (Rosemont—La Petite-Patrie, BQ) |
Á | 1150 |
M. Dale Marshall |
Le président |
Á | 1155 |
M. Mark Rudolph |
M. Christian Simard (Beauport—Limoilou, BQ) |
M. Dale Marshall |
Le président |
 | 1200 |
L'hon. Bryon Wilfert (Richmond Hill, Lib.) |
M. Mark Rudolph |
M. Dale Marshall |
L'hon. Bryon Wilfert |
 | 1205 |
M. Mark Rudolph |
L'hon. Bryon Wilfert |
M. Mark Rudolph |
L'hon. Bryon Wilfert |
M. Mark Rudolph |
L'hon. Bryon Wilfert |
M. Mark Rudolph |
M. Dale Marshall |
 | 1210 |
L'hon. Bryon Wilfert |
Le président |
M. Nathan Cullen (Skeena—Bulkley Valley, NPD) |
M. Dale Marshall |
M. Mark Rudolph |
 | 1215 |
Le président |
M. Nathan Cullen |
M. Dale Marshall |
 | 1220 |
M. Nathan Cullen |
M. Mark Rudolph |
Le président |
M. Nathan Cullen |
Le président |
M. Dale Marshall |
Le président |
M. Dean Allison (Niagara-Ouest—Glanbrook, PCC) |
M. Dale Marshall |
M. Dean Allison |
M. Dale Marshall |
 | 1225 |
M. Dean Allison |
M. Dale Marshall |
M. Dean Allison |
M. Dale Marshall |
M. Dean Allison |
M. Dale Marshall |
M. Dean Allison |
M. Dale Marshall |
Le président |
M. Francis Scarpaleggia (Lac-Saint-Louis, Lib.) |
M. Dale Marshall |
 | 1230 |
M. Francis Scarpaleggia |
M. Dale Marshall |
Le président |
M. Bernard Bigras |
 | 1235 |
M. Dale Marshall |
M. Bernard Bigras |
M. Dale Marshall |
Le président |
M. David McGuinty (Ottawa-Sud, Lib.) |
 | 1240 |
Le président |
M. Nathan Cullen |
 | 1245 |
M. Mark Rudolph |
Le président |
M. Nathan Cullen |
M. Dale Marshall |
M. Nathan Cullen |
 | 1250 |
M. Dale Marshall |
Le président |
M. Nathan Cullen |
Le président |
Mme Yasmin Ratansi (Don Valley-Est, Lib.) |
M. Dale Marshall |
Mme Yasmin Ratansi |
 | 1255 |
M. Dale Marshall |
Le président |
M. Mark Rudolph |
Le président |
M. Brian Jean |
· | 1300 |
M. Dale Marshall |
M. Brian Jean |
M. Bradley Trost |
M. Mark Rudolph |
M. Bradley Trost |
Le président |
M. Bradley Trost |
Le président |
M. Mark Rudolph |
M. Bradley Trost |
M. Mark Rudolph |
M. Bradley Trost |
M. Mark Rudolph |
Le président |
· | 1305 |
M. Bradley Trost |
Le président |
CANADA
Comité permanent de l'environnement et du développement durable |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le jeudi 3 février 2005
[Enregistrement électronique]
* * *
Á (1105)
[Traduction]
Le président (M. Alan Tonks (York-Sud—Weston, Lib.)): Bonjour, chers collègues.
Bonjour à tous. Je souhaite la bienvenue à nos témoins et je salue toutes les personnes qui suivent les délibérations de notre comité.
Nous discutons aujourd'hui de la mise en oeuvre au Canada du Protocole de Kyoto et nous allons essayer de nous concentrer sur la réforme financière et les questions connexes dans le cadre du plan d'action climatique.
Nous accueillons aujourd'hui M. Dale Marshall, de la Coalition du budget vert, qui va nous faire un exposé. Bienvenue, monsieur Marshall.
Nous avons aussi M. Mark Rudolph, de la Clean Air Renewable Energy Coalition.
Je crois que vous allez tous les deux faire un exposé et nous avons hâte de pouvoir ensuite avoir un échange d'idées avec vous. Nous accordons normalement 10 minutes à chaque témoin pour son exposé, mais je suis assez souple à cet égard. Nous aimons faciliter les échanges entre le comité et les témoins.
Bienvenue donc. Avez-vous décidé qui allait commencer?
Dale, vous pourriez peut-être commencer et ensuite nous entendrons Mark.
Merci beaucoup.
M. Dale Marshall (membre, Coalition du budget vert): Merci.
Tout d'abord, merci de nous avoir invités à venir vous parler du plan du Canada pour Kyoto. C'est évidemment une question très importante actuellement.
Je m'appelle Dale Marshall. Je suis analyste des politiques en matière de changement climatique à la Fondation David Suzuki, mais je représente ici la Coalition du budget vert, dont nous sommes membres.
La Coalition du budget vert regroupe 20 groupes environnementaux qui s'occupent de questions financières et budgétaires liées naturellement à l'environnement et à sa protection.
[Français]
Aujourd'hui, je ferai ma présentation entièrement en anglais, mais je suis prêt à répondre à vos questions en français ou en anglais.
[Traduction]
Aujourd'hui, je vais vous donner mon point de vue sur les progrès accomplis par le Canada dans la mise en oeuvre de Kyoto et dans la réduction des gaz à effet de serre; je vais vous parler un peu des instruments financiers qui font naturellement partie du mandat de la Coalition du budget vert, mais je vais aussi vous parler d'autres formules de réglementation potentielles qui pourraient être utilisées pour appuyer les mesures fiscales.
Le gouvernement du Canada semble toujours appuyer le protocole de Kyoto. Le discours du Trône de l'automne dernier a réaffirmé nos engagements à cet égard. Le ministre de l'Environnement, Stéphane Dion, est allé à Buenos Aires en décembre et a lui-même répété la volonté du Canada de respecter ses obligations dans le cadre du protocole de Kyoto. Toutefois, les mesures prises par le Canada en ce sens ont jusqu'à présent été largement inefficaces. Les émissions de gaz à effet de serre ont augmenté de 20 p. 100 depuis 1990 alors que, comme vous le savez, notre objectif est de réduire nos émissions de gaz à effet de serre de 6 p. 100 par rapport aux niveaux de 1990.
Le Canada est aujourd'hui plus loin de ses objectifs de Kyoto que tous les autres pays de l'annexe I, c'est-à-dire ceux qui se sont fixés des objectifs en vertu du protocole. Cela inclut les États-Unis qui ont évidemment refusé de ratifier Kyoto et qui ne font donc plus partie du processus de Kyoto.
Les trois secteurs dans lesquels les émissions de gaz à effet de serre ont le plus progressé depuis 1990 sont le secteur du pétrole et du gaz, celui de l'électricité et celui des véhicules personnels.
Les raisons pour lesquelles le Canada n'a pas réussi à réduire ses émissions de gaz à effet de serre depuis 14 ans sont claires. L'Organisation de coopération et de développement économiques affirme, dans son évaluation des programmes canadiens contre le changement climatique, que le Canada s'appuie trop sur des initiatives volontaires et qu'il devrait recourir à une réglementation et à des mesures de dissuasion.
Voici la citation exacte de l'OCDE:
... les approches volontaires doivent être complétées par des instruments plus classiques, réglementaires... et économiques. Le réexamen des subventions préjudiciables à l'environnement dans les secteurs comme le transport et l'énergie... doit devenir systématique. Cela pourrait permettre de mettre en évidence un certain nombre d'actions qui s'imposent pour combler l'écart qui subsiste dans le cadre du plan sur les changements climatiques. |
La commissaire à l'environnement et au développement durable du Canada s'est penchée sur les instruments fiscaux et a souligné que le gouvernement fédéral avait fait des promesses de réforme fiscale écologique dans toutes sortes de domaines. Néanmoins, les représentants du ministère des Finances ont dit à la commissaire à l'environnement et au développement durable que le gouvernement du Canada n'avait pas encore mis en place systématiquement cette écologisation de la fiscalité.
Un document fédéral ayant fait l'objet d'une fuite et publié dans les médias le mois dernier confirme ces deux évaluations. Dans ce document, on affirme que « l'approche volontaire et les incitatifs limités ne sont pas suffisants pour amener un changement substantiel ». Il s'agit du changement climatique et de la mise en oeuvre de Kyoto. On ajoute encore dans ce document que « ce qu'il faut à la place, c'est envisager davantage de règlements et de taxes ».
Permettez-moi de vous présenter rapidement quelques propositions que la Coalition du budget vert a proposées en matière d'écologisation de la fiscalité et de changement climatique.
La réforme fiscale écologique en matière de changement climatique vise à faire en sorte que les diverses activités économiques, notamment la production et l'utilisation d'énergie, reflètent la totalité des coûts environnementaux et sanitaires. Les textes économiques montrent clairement que l'internalisation des coûts environnementaux et autres mène à une plus grande efficacité économique et naturellement à de meilleurs résultats pour l'environnement.
Á (1110)
Alors comment faut-il faire? Premièrement, le gouvernement fédéral doit comprendre les répercussions de ses politiques fiscales et budgétaires sur la protection de l'environnement et du climat.
Dans ses propositions de cette année, la Coalition du budget vert suggère que le gouvernement fédéral entreprenne une évaluation environnementale stratégique des questions budgétaires pour déterminer exactement les effets de son budget sur l'environnement. Ce n'est pas nouveau. Le Comité permanent de l'environnement et du développement durable avait dit exactement la même chose en 1995, et dans sa réponse de 1996, le gouvernement s'est dit d'accord avec ces recommandations. Naturellement, cette démarche n'a pas été appliquée de manière systématique. Le gouvernement fédéral a lancé une ou deux études sur des questions très précises, mais il n'a pas entrepris une évaluation généralisée des répercussions de ses mesures fiscales sur la protection de l'environnement.
Une fois que nous aurons déterminé les répercussions du budget du Canada sur l'environnement, il faudra éliminer les subventions aux formes très polluantes d'énergie. Une étude que le Pembina Institute vient de publier cette semaine montre que les dépenses du gouvernement fédéral dans le secteur pétrolier et gazier dépassent le milliard de dollars par an. Il faut manifestement réduire ces dépenses si nous voulons sérieusement freiner le changement climatique. C'est une des propositions de la Coalition du budget vert cette année.
Une autre de nos propositions serait de modifier la taxe fédérale d'accise sur les carburants pour qu'elle reflète davantage les coûts sanitaires et environnementaux. À titre d'exemple, la taxe d'accise fédérale sur l'essence est de 0,10 $ le litre, mais il ne semble pas y avoir de cohérence dans l'application de ces taxes d'accise sur les carburants; dans le cas du diesel, c'est 0,04 $ le litre, alors que le diesel a des incidences plus graves sur la santé, notamment pour les communautés urbaines.
On utilise du charbon pour alimenter les centrales thermiques, mais naturellement il n'y a pas de taxe d'accise sur ce charbon. Il faut rectifier cela pour mieux refléter les coûts environnementaux et sanitaires. On montrerait ainsi aux gens qui utilisent divers combustibles pour les transports ou la production d'énergie qu'ils doivent s'orienter vers des formes d'énergie moins nocives pour la santé humaine et pour l'environnement.
Il n'est pas question de taxe sur le carbone dans les recommandations de la Coalition du budget vert, mais il est néanmoins intéressant de noter que quand nous avons rencontré les hauts fonctionnaires d'une série de ministères fédéraux—Ressources naturelles Canada, Environnement Canada et Finances—ils nous ont dit, spontanément et indépendamment les uns des autres, qu'une taxe sur le carbone serait le meilleur moyen de lutter contre le changement climatique. À la lumière de la piètre performance du Canada dans la mise en oeuvre de Kyoto à ce jour, je suggère au gouvernement de revenir sur sa décision de ne pas imposer une taxe sur le carbone.
Je vais maintenant passer aux règlements qui me semblent essentiels pour atteindre nos objectifs de Kyoto. Les instruments fiscaux sont naturellement importants, mais l'OCDE, entre autres, a déclaré que des règlements pouvaient renforcer ces mesures fiscales. La Coalition du budget vert se concentre sur les questions budgétaires, évidemment, mais elle sait très bien que ces mesures ne sont pas toujours suffisantes.
Les premiers règlements à mettre en place concernent les grands émetteurs finaux, c'est-à-dire les grandes industries canadiennes, exception faite des fabricants d'automobiles qui ont leurs propres engagements. Il faut faire respecter la promesse de 55 mégatonnes faite dans le plan du Canada sur le changement climatique. C'est déjà un recul important des émissions de gaz à effet de serre de ces industries. Les industries du Canada sont responsables de la moitié de nos émissions de gaz à effet de serre et la réduction de leurs émissions qu'on leur demande ne représente qu'un très faible pourcentage de l'engagement total du Canada.
Á (1115)
Si nous n'obligeons pas ces industries à respecter l'engagement des 55 mégatonnes, le résultat sera clair. Ce sera au gouvernement fédéral et aux contribuables de payer la différence. Là encore, ce document provenant du gouvernement fédéral est très clair. Si nous n'obligeons pas l'industrie à respecter ses engagements, nous allons probablement devoir acheter des permis internationaux, des crédits internationaux, et ce sont le gouvernement fédéral et les contribuables qui paieront la facture. Donc, plutôt que de devoir dépenser des centaines de millions de dollars et même peut-être plus d'un milliard de dollars par an pour acheter ces crédits, il faut exiger que ces divers secteurs de l'économie respectent leurs promesses initiales.
Le second type de réglementation concerne le rendement énergétique des véhicules. Les constructeurs automobiles ont été traités séparément des grands émetteurs finaux parce que dans leur cas les émissions concernaient l'utilisation de leurs produits, c'est-à-dire les automobiles, plutôt que la fabrication même de ces véhicules. C'est logique. Mais cela veut dire qu'il faut exiger que ces constructeurs appliquent des normes plus rigoureuses d'efficacité pour leurs véhicules.
La troisième intervention que peut effectuer le gouvernement fédéral consisterait à n'autoriser la vente au Canada que des appareils ménagers portant l'étiquette ENERGY STAR. Naturellement, cela ne doit pas se faire du jour au lendemain. Il faudrait donner aux fabricants un délai suffisant pour leur permettre de mettre à niveau leurs appareils. Mais c'est un moyen de réduire considérablement les émissions.
Enfin, le gouvernement doit collaborer avec les provinces. Ce sont naturellement elles qui sont responsables de tout un tas de choses, l'électricité par exemple ou les codes du bâtiment. Le gouvernement fédéral doit donc veiller avec les provinces à consolider les cadres de réglementation.
En conclusion, les évaluations internes et externes du rôle du Canada dans le contexte de Kyoto sont claires. Nous ne respectons pas nos engagements de lutte contre le changement climatique et nos engagements dans le cadre de Kyoto parce que notre pays n'a pas su se doter d'instruments fiscaux puissants, notamment de mesures dissuasives, et qu'il ne s'est pas doté d'un cadre de réglementation solide. Le Canada doit donc travailler dans cette voie à l'avenir.
Merci.
Á (1120)
Le président: Merci, monsieur Marshall.
Nous allons entendre M. Rudolph et ensuite nous passerons aux questions.
Monsieur Rudolph.
M. Mark Rudolph (coordonnateur, Clean Air Renewable Energy Coalition): Bonjour. Je m'appelle Mark Rudolph. Je suis président d'un petit groupe de consultation appelé Just Environment. C'est par le biais de Just Environment que je suis devenu coordonnateur de la Clean Air Renewable Energy Coalition. Souvent, on parle ici de la coalition CARE, mais pour éviter toute confusion avec l'organisation humanitaire CARE Canada, nous n'utilisons pas cette expression pour désigner notre coalition.
L'exposé que je vais vous faire est un modèle réduit de la discussion générale que vous avez à votre comité depuis un certain temps, je crois. Les éléments de réforme fiscale concernent tout un éventail d'incitatifs et de programmes que le gouvernement pourrait mettre en place avec l'aide du secteur privé, des provinces, etc., dans le domaine de ce que nous appelons l'énergie renouvelable à faible incidence : les éoliennes, les centrales hydroélectriques au fil de l'eau, la biomasse, etc. Si je devais donner un titre à mon exposé, je proposerais : « du créneau à la norme ».
Je crois que le greffier vous a distribué notre dossier. Si vous le voulez bien, je vais survoler cet exposé, et ensuite Dale et moi nous ferons un plaisir de répondre à vos questions.
Je vais vous faire un petit historique de notre coalition. Elle a été formée il y a environ quatre ans par Suncor Energy et le Pembina Institute. Je dirais que la Coalition regroupe de façon tout à fait paradoxale des entités très disparates. Il y a 20 organisations dont 14 représentent de grandes sociétés, et six sont des ONGE ou des ONG. Nous nous concentrons exclusivement sur la promotion de l'énergie verte au Canada.
Quand nous nous réunissons, en atelier ou lors de conférences téléphoniques mensuelles, nous n'avons qu'une règle : « Tu laisseras tes préjugés à la porte ». C'est ainsi que nous pouvons faire travailler ensemble des groupes comme Shell et Les Amis de la Terre, alors que ces derniers ne sont pas censés avoir le moindre rapport avec la société Shell. Ou encore, c'est la Toronto Environmental Alliance, qui s'en prend régulièrement à l'OPG, qui est amenée à faire des exposés en collaboration avec ce même OPG. Tous les participants veulent promouvoir la cause de l'énergie verte au Canada, et c'est ce que nous faisons collectivement.
La diapositive suivante vous montre nos membres. Je vais vous donner quelques indications d'ordre géographique.
Nous avons six ONG, dont le fondateur, Pembina, Pollution Probe, la Toronto Environmental Alliance, les Amis de la Terre, l'Institut international du développement durable à Winnipeg et la Fédération canadienne des municipalités qui représente les municipalités.
Pour ce qui est des grandes sociétés, la grande majorité d'entre elles viennent de Calgary. Suncor, Shell, BP, Enbridge, Canadian Hydro Developers et Benign Energy Canada Inc. sont tous situés à Calgary.
Pour ce qui est de la Colombie-Britannique, nous avons B.C. Hydro, une petite entreprise d'hydroélectricité au fil de l'eau appelée Cloudworks, et une entreprise géothermique appelée Western GeoPower.
En Ontario, nous avons la Ontario Power Generation, de même que Toronto Hydro et une entreprise appelée AIM PowerGen, qui utilise l'énergie éolienne.
Pour ce qui est du Québec, nous avons la société Axor, qui a lancé et qui exploite le champ d'éoliennes de la Gaspésie.
C'est un groupe très intéressant. Nous avons longuement travaillé à l'élaboration d'une vision et à la promotion de diverses idées au niveau fédéral.
Notre objectif fondamental est que l'énergie renouvelable à faible incidence représente 7 p. 100 de la production canadienne d'électricité en 2010, et 15 p. 100 en 2020. Ces chiffres ne nous semblent pas exagérés ou démesurés. En fait, ils sont probablement modérés si l'on tient compte de la prudence d'une bonne partie de nos membres.
Nous pensons que ce sont des chiffres réalistes. À notre avis, avec quelques stimulants de démarrage—et non pas des subventions permanentes—l'industrie peut très bien y parvenir. En un mot, ce que nous essayons de créer au Canada, c'est toute une nouvelle industrie qui produirait environ 35 000 mégawatts d'ici l'an 2020. En outre, elle permettrait la création d'environ 20 000 emplois d'ici 2015 et continuerait ensuite d'en créer régulièrement.
Pour que cette vision puisse se matérialiser, l'un des éléments essentiels consiste à élaborer une stratégie nationale en matière d'énergie renouvelable axée sur l'énergie renouvelable à faible incidence, ou l'énergie verte. Cela découle probablement d'une stratégie nationale en matière d'électricité qui pourrait très bien être elle-même un élément d'une stratégie nationale en matière d'énergie—j'espère que nous ne nous emmêlerons pas dans les acronymes.
Á (1125)
Il faut que ce soit un tout. En fait, dans le discours du Trône du 5 octobre, le gouvernement semblait être favorable à cette démarche puisqu'il a déclaré qu'il « entreprendra de mettre au point, de concert avec les intervenants, des approches globales visant à promouvoir la production et l'utilisation d'énergie propre et renouvelable ».
Si vous avez une stratégie, nous serons enchantés d'y participer. Elle inclurait naturellement le gouvernement fédéral, les gouvernements provinciaux et territoriaux, le secteur privé, les ONG et d'autres intervenants. Nous avons fait beaucoup de recherche sur divers éléments possibles de cette stratégie. Il y en a sept que je voudrais passer rapidement en revue avec vous, et ensuite vous pourrez nous poser des questions plus détaillées.
Tout d'abord, il y a un programme de NRCan, avec l'acronyme EPÉÉ (en anglais, cela fait « whoopee »), l'Encouragement à la production d'énergie éolienne, qui a été lancé dans le budget de M. Martin présenté le 10 décembre 2001, Vous vous souviendrez que ce budget parlait essentiellement de paix et de sécurité trois mois après le 11 septembre. Nous avons donc trouvé très encourageant le fait qu'il parle d'encouragement à la production d'énergie éolienne puisque cela traduisait l'intérêt du gouvernement pour l'énergie verte.
Nous souhaiterions une expansion de ce programme de 1 000 mégawatts, ce qui était prévu au départ, à 4 000 mégawatts. Nous pensons que cela doit se faire à un niveau de soutien d'au moins 0,01 $ par kilowatt, c'est-à-dire le niveau actuel.
Notre coalition estime qu'il ne s'agit pas simplement de l'énergie éolienne. Il existe d'autres technologies commerciales qui pourraient produire d'importantes quantités d'électricité si on leur proposait des stimulants semblables à ceux qui sont proposés pour l'énergie éolienne, et déclencher ainsi des investissements qui encourageraient leur développement.
C'est ce que nous appelons la mesure d'incitation à la production d'énergie verte. Je précise que je préfère que les gens n'utilisent pas en anglais l'acronyme « guppy », puisque ce nom de petit poisson donnerait l'impression que nous sommes bien peu de choses dans un océan de requins. Nous préférons donc nous en tenir à l'expression mesure d'incitation à la production d'énergie verte. En fait, on pourrait regrouper les mesures d'incitation à la production d 'énergie éolienne et les mesures d'incitation à la production d'énergie verte sous forme d'une incitation à la production d'énergie renouvelable, ou d'une incitation à la production d'énergie à faible incidence, quelque chose comme cela.
Ce genre d'incitatif pourrait aussi s'appliquer à l'énergie hydroélectrique à petite échelle, l'énergie de la biomasse, l'énergie géothermique, l'énergie marémotrice, l'énergie des vagues, etc. D'après notre évaluation d'ensemble, l'essentiel des incitatifs serait probablement axé sur le domaine de l'énergie éolienne, de la biomasse et de l'hydroélectricité au fil de l'eau. Ces trois secteurs représenteraient probablement 95 à 98 p. 100 du total de la production d'électricité exploitable à assez grande échelle; l'énergie solaire étant une autre histoire.
Le troisième point, c'est l'expansion de ce qu'on appelle le Programme de stimulation du marché. C'est un programme de RNCan et d'Environnement Canada. À l'époque du programme de 2000 sur le changement climatique, ou quelque chose comme cela, je crois qu'on a décidé de le financer à hauteur de 5 millions de dollars par an. Il permet aux distributeurs d'électricité de sensibiliser le public à l'énergie verte. Comme vous le savez bien, vous, les politiciens, la publicité coûte cher, et 5 millions de dollars saupoudrés parmi toutes les grandes entreprises de distribution d'électricité au Canada, cela ne donne pas grand-chose. Par conséquent, les Canadiens sont très peu informés sur l'énergie verte. Nous recommandons donc d'accroître ce financement. Je crois que nous demandons 30 millions de dollars par an, en partant du principe que si l'on veut des résultats, il faut voir grand. Si l'on veut vraiment éduquer le public, il faut le faire correctement.
Notre quatrième recommandation est d'augmenter les achats gouvernementaux d'électricité de source renouvelable. D'après ce qui a été annoncé dans le passé, le gouvernement s'engage à ce que 20 p. 100 de ses achats d'électricité proviennent d'énergie renouvelable d'ici 2006. Nous pensons qu'il faudrait passer à 30 p. 100 en 2010 et à 80 p. 100 en 2020. Quatre-vingt pour cent, cela vous paraît peut-être beaucoup, mais en Alberta, M. Klein s'est déjà engagé à passer à 90 p. 100.
Nous avons aussi des recommandations visant un programme d'énergie solaire. C'est un cas différent des autres puisqu'on peut facilement installer un toit solaire sur sa maison. Ce n'est pas la même chose que de fabriquer de l'électricité qui sera distribuée à la population au moyen d'un réseau. Vous fabriquez de l'électricité pour votre consommation. Nous avons donc proposé la création d'un programme de 100 000 toits solaires au Canada et nous proposons que le gouvernement offre un rabais de 30 p. 100 sur les coûts d'achat.
Á (1130)
Nous pensons aussi qu'il faut faire une évaluation des ressources d'énergie renouvelable au Canada. On a déjà fait un certain travail dans le domaine éolien. Il faut le faire dans tous les autres domaines pour savoir exactement ce que nous avons et ce que nous pouvons utiliser.
Enfin, le montant consacré à la R-D au Canada pour ce genre de technologies par habitant est à peu près le dixième de ce qu'il devrait être comparativement au Royaume-Uni, à l'Allemagne et aux États-Unis.
Dans la diapositive suivante, nous avons regroupé tous les coûts des différents programmes de 2005 à 2020. Sur une base annuelle moyenne, cela représente environ 130 millions de dollars par an. Traditionnellement, le Canada a toujours aidé les technologies émergentes, et nous trouvons que 130 millions par an pour aider au démarrage de certaines industries, ce n'est pas mal comme investissement. En fait, si on compare cela à EACL—et il ne s'agit nullement de minimiser l'intérêt ou l'utilisation de l'énergie nucléaire, ou de nous prononcer pour ou contre—il faut reconnaître qu'il s'agissait aussi d'une technologie émergente il y a 52 ans, quand on a créé EACL. Je ne sais pas si les parlementaires de l'époque pensaient qu'on continuerait à financer cet organisme au bout de cinq ans, de 10 ans ou de 20 ans. Mais 52 ans après, les crédits annuels du Parlement pour EACL en 2003 se sont élevés à 145 millions de dollars. En 2002, ils étaient de 210 millions de dollars. Voilà les crédits annuels votés pour EACL dans le budget.
La diapositive suivante est un tableau présentant une vision optimiste et une vision pessimiste des énergies renouvelables comparativement au nombre de mégawatts équivalent pour le charbon ou le gas. Vous voyez que dans la version optimiste, les énergies renouvelables peuvent créer plus d'emplois que n'importe quelle option. En fait, quand on fait la moyenne des deux tendances d'ici 2015, on obtient une création de 20 000 emplois par an.
Donc, en fin de compte, quels sont les avantages? Les avantages, c'est qu'on crée une industrie entièrement nouvelle pour le Canada; on investit dans des technologies novatrices d'exploitation des sources d'énergie renouvelable et durable; on aide à diversifier l'approvisionnement énergétique du Canada; on appuie ce qu'on pourrait appeler une nouvelle révolution industrielle; on a des installations de production faites au Canada; et on encourage le développement économique régional; on investit de nouveaux capitaux et on crée des emplois; on favorise la capacité concurrentielle; on purifie l'air; et pour revenir à votre sujet d'aujourd'hui, on réduit les émissions de gaz à effet de serre.
Essentiellement, comme je le disais tout à l'heure, il s'agit de créer toute une nouvelle industrie et d'aider le Canada à avoir des ressources durables pour l'avenir. La réduction des gaz à effet de serre est aussi un grand avantage. Trop souvent, on examine l'énergie renouvelable dans le contexte du changement climatique et on la compare à tous les autres éléments du changement climatique. Si les députés retiennent une seule chose, j'aimerais que ce soit l'idée qu'il ne s'agit pas simplement de changement climatique.
En conclusion, l'énergie verte n'est pas un créneau. Comme je le disais tout à l'heure, s'il fallait donner un titre à cet exposé, je l'intitulerais « Du créneau à la norme ». C'est une énergie qui présente de nombreux avantages économiques et environnementaux pour la société canadienne. Le public veut une énergie plus propre et plus durable, et pour cela nous devons commencer par élaborer une stratégie nationale d'énergie renouvelable incluant certains des éléments clés dont j'ai parlé qu'il faudra financer, et qui seront financés, je l'espère, dans le prochain budget.
J'ai terminé mon exposé. Merci.
Á (1135)
Le président: Bien. Merci, monsieur Rudolph.
Nous passons maintenant aux questions des membres du comité.
Voici ce que nous faisons. Chaque parti a 10 minutes pour ses questions. Nous commençons par le Parti conservateur, puis le Bloc et nous passons ensuite aux libéraux et au NPD. Ensuite, nous alternons entre l'opposition et le côté gouvernemental. D'accord?
Monsieur Trost, vous allez commencer, et vous serez suivi par M. Bigras et M. Simard.
M. Bradley Trost (Saskatoon—Humboldt, PCC): Je ne suis pas un des membres réguliers du Comité de l'environnement. Je remplace M. Mills aujourd'hui. Généralement, je siège au Comité de l'industrie et des ressources naturelles. J'ai trouvé votre exposé intéressant car nous avons justement entendu l'autre jour des représentants de certains secteurs énergétiques, notamment le secteur éolien, le secteur solaire, et celui des oléoducs et gazoducs.
Je suis un spécialiste de la géophysique minière et j'ai un diplôme en économie, et toutes ces questions sont un de mes passe-temps depuis des années. Je voulais que vous compreniez bien dans quelle optique je me place pour vous poser mes questions.
Je ne connais pas bien le bagage de tous les membres de vos groupes. Vous avez fait des recommandations, en particulier M. Marshall, et aussi M. Rudolph, qui portent sur la physique, la climatologie, l'environnement, l'économie, etc. Je me demandais quel bagage vous avez dans tous ces domaines, car ils sont très techniques. Je suis un géophysicien, ce qui impressionne beaucoup le public, mais je m'intéresse aussi accessoirement à l'étude du climat. Ce n'est pas ma spécialité. Je voudrais donc savoir qui, dans vos organisations, est habilité à prendre des décisions aussi techniques. Je me demande quelles compétences vous avez. C'est quelque chose qui m'agace chez de nombreux témoins. Ils viennent nous faire la leçon, mais je veux savoir exactement sur quelle expertise spécifique ils s'appuient.
M. Dale Marshall: Je regarde ici la liste des groupes qui font partie de la Coalition du budget vert et je crois que nous n'avons pas de spécialiste de la science atmosphérique. Toutefois, tous les groupes qui travaillent sur le climat doivent comprendre cette science. Les membres de la Fondation David Suzuki lisent tous les rapports publiés par exemple par le Groupe intergouvernemental sur le changement climatique, y compris l'évaluation du changement climatique sur l'Arctique. Il faut comprendre la science du climat pour pouvoir proposer des changements. Et les données scientifiques semblent claires à cet égard : il y a un changement climatique provoqué par l'homme et nous devons réagir.
M. Bradley Trost: Monsieur Rudolph.
M. Mark Rudolph: Dans les 20 organisations de notre coalition, il y a tout un éventail d'experts auxquels nous faisons toujours appel. En fait, du point de vue de la science du climat, nous avons fait appel aux ressources de Shell Canada et de Shell International. Il y a des docteurs en climatologie à l'Institut international du développement durable qui fait aussi partie de la Coalition du budget vert. Toutes sortes de chercheurs scientifiques sont présents dans nos organisations. En fait, nous avons fait appel à des experts fiscaux brillants de Suncor, de Shell et de BP qui nous ont aidés à concevoir nos programmes depuis le début. Si vous cherchez des experts sur toutes les questions que nous mettons de l'avant, nous en avons une bonne brochette.
Á (1140)
M. Bradley Trost: J'ai vu cela, mais ce qui me frappe, c'est que ce sont toujours des gens qui ont un intérêt financier dans la question. Les groupes de pression environnementaux aux États-Unis ont des combines pour recueillir chaque année 2 milliards de dollars.
J'ai remarqué avec intérêt que vous avez mentionné le groupe sur l'Arctique. Il était composé de 250 scientifiques dont deux seulement étaient des climatologues. Il y en avait donc 248 qui se contentaient simplement de reprendre à leur compte les recherches de deux individus.
Vous avez parlé du Groupe intergouvernemental sur le changement climatique. J'ai un document d'un des grands météorologues climatologues à ce sujet, qui aboutit à une conclusion tout à fait différente en s'appuyant sur des recherches réalisées par l'American Geophysical Union et l'American Meteorological Society. Selon un sondage Gallup, 49 p. 100 des climatologues interrogés estiment qu'il n'existe pas de causes du réchauffement directement attribuables à l'homme, 33 p. 100 n'étaient pas certains et 18 p. 100 le pensaient.
Il y a donc beaucoup de gens qui sont soit intéressés financièrement, soit ignorants de la question. Vous venez de me confirmer que c'était le cas.
Ma deuxième question s'adresse à M. Marshall.
Allez-y, monsieur Rudolph.
M. Mark Rudolph: Pour des raisons politiques évidentes, on a discuté de tout un éventail de données concernant le dossier sur Kyoto. Au bout du compte, il y aura toujours ceux qui estiment qu'on assiste à des changements climatiques et ceux qui n'y croient pas. À ma connaissance, le Parti conservateur fait partie de ceux qui estiment que nous n'assistons pas à un changement climatique. Il suffit de penser aux articles publiés dans le National Post récemment sur le graphique en forme de bâton de hockey. Il me semble évident que vous souscrivez à ce point de vue.
Par contre, il faut savoir qu'il existe d'autres thèses, auxquelles nous donnons notre appui. Comme vous pourrez le constater, beaucoup de nos membres qui s'intéressent aux ressources renouvelables actuellement ont également des intérêts dans les grandes sociétés d'exploitation de sables bitumineux.
Cela fait des années que je participe au débat sur les politique environnementales. Au fil du temps, j'ai vu beaucoup de choses dans le domaine de la protection de l'environnement, notamment les discussions portant sur les pluies acides, les CFC, etc.
J'ai toujours noté l'existence de quatre étapes; et là je vous parle à titre de président de Just Environment et non comme coordonnateur de la Clean Air Renewable Energy Coalition. J'ai remarqué que les grandes entreprises—et j'en sais quelque chose puisque ça fait 27 ans que je travaille dans ce domaine—réagissent aux questions de protection de l'environnement en suivant un cheminement de quatre étapes. Premièrement, elles nient l'existence du problème. Deuxièmement, elles affirment qu'elles ne contribuent pas au problème. Troisièmement, elles prétendent qu'il n'existe aucune technologie qui permettrait de régler le problème. Quatrièmement, elles prétendent ne pas avoir suffisamment d'argent pour acheter la technologie en question.
Il y en a encore beaucoup qui nient toujours l'existence du problème. Mais d'autres, comme nous, ont déjà fait un petit bout de chemin.
Le président: Monsieur Trost, M. Jean aimerait dire quelque chose là-dessus.
Monsieur Jean
M. Brian Jean (Fort McMurray—Athabasca, PCC): J'ai eu la chance d'aller en Islande et d'assister à une partie de la conférence ministérielle. Je vous avoue que les preuves qui ont été avancées m'ont convaincu que le changement climatique est une réalité. Par contre, il me serait impossible de dire avec certitude si ce phénomène est causé par l'activité humaine ou non. D'après ce que j'ai pu constater, il s'agirait plutôt d'un phénomène cyclique extrêmement long. Le climat a changé de façon très marquée, surtout récemment et dans le Nord. Je n'en doute aucunement.
Monsieur, je suis originaire de Fort McMurray et connais donc beaucoup de vos participants. D'ailleurs, j'ai eu avec eux de longues discussions sur les énergies de remplacement. Mais je dois vous dire qu'il n'en existe aucune qui répondrait à leurs besoins. Par exemple, ils payent actuellement le baril de gaz naturel 6 $ alors qu'ils voudraient s'en débarrasser et préféreraient que ce soit le consommateur qui l'utilise.
Je vais maintenant passer à ma question. Je suis convaincu que c'est du côté des nouvelles technologies qu'on va trouver les solutions à nos problèmes. Si on obligeait les consommateurs à recourir aux technologies intelligentes, par le biais par exemple de codes du bâtiment, savez-vous dans quelle mesure les émissions seraient réduites? Il existe maintenant des maisons intelligentes en Europe et en Australie où les lumières s'éteignent automatiquement quand il n'y a plus personne à la maison. Il est clair que si nous n'adoptons pas les normes californiennes, nos fabricants automobiles en subiront les conséquences rapidement.
Y a-t-il des études qui ont été faites pour déterminer dans quelle proportion les émissions seraient réduites si de nouvelles technologies étaient adoptées dans ces deux secteurs?
Á (1145)
M. Dale Marshall: Je peux vous donner une réponse. Si j'ai bien compris, ce sont les secteurs du bâtiment et de l'automobile qui vous intéressent.
M. Brian Jean: C'est bien ça. Ce sont vraiment les consommateurs qui m'intéressent et non les fabricants, c'est-à-dire les grands émetteurs.
M. Dale Marshall: Dans les deux cas, autant pour le bâtiment que pour l'automobile, il est clair que les investissements faits dans le but d'améliorer l'efficacité énergétique sont pris en compte dans le calcul permettant de déterminer les économies réalisées justement grâce à cette efficacité accrue. Pour l'industrie du bâtiment, nous avons publié un rapport qui s'intitule Kyoto and Beyond qui s'intéresse aux budgets de construction, en termes de matériaux et en termes de coûts supplémentaires à assumer pour qu'il soit possible de rentrer dans ses frais en dix ans, ce qui est bien plus court que la durée de vie d'un immeuble.
Il en va de même dans le cas de l'efficacité énergétique automobile. Les coûts supplémentaires qu'exige la production de voitures vertes sont amortis sur cinq ans. Cette période est beaucoup plus courte pour les véhicules utilitaires sports qui sont les voitures les moins efficaces qui existent. En effet, on parle souvent d'une période d'amortissement de deux ou trois ans.
Le consommateur risque donc de devoir payer un peu plus au moment de l'achat mais récupérera cet argent supplémentaire avec le temps, et pour sa maison, et pour sa voiture.
M. Brian Jean: Ma question portait précisément sur le défi que nous pose le protocole de Kyoto et sur les objectifs qu'on est censé atteindre dans un avenir rapproché. Grâce à ces mesures, de combien pourrait-on se rapprocher de notre cible du protocole de Kyoto?
Bien honnêtement, d'après les grands émetteurs de ma région, les consommateurs sont responsables de 50 à 70 p. 100 du problème. Il est facile de pointer du doigt une société qui crache de la fumée dans l'air et les 3 000 ou 4 000 employés qui y travaillent, mais il est bien plus difficile d'inciter les 30 millions de Canadiens à éteindre la lumière.
M. Dale Marshall: C'est justement pour ça que nous avons proposé des mesures visant le secteur responsable de ces émissions. Il est effectivement beaucoup plus difficile de convaincre 30 millions de personnes de réduire leurs émissions respectives de 3 tonnes que de mettre en place des politiques gouvernementales visant les industries polluantes. Au bout du compte, nous sommes tous consommateurs et contribuables et devrons, à titre individuel, assumer notre part de responsabilité. Mais il n'en demeure pas moins qu'il est bien plus facile de s'attaquer au problème au niveau industriel qu'au niveau individuel.
M. Brian Jean: L'application des mesures est beaucoup plus facile au niveau industriel. Êtes-vous d'accord? Il serait plus difficile de convaincre les quelque 8 millions d'électeurs qui choisissent le gouvernement que les 10 ou 20 gros émetteurs.
M. Dale Marshall: C'est tout simplement parce que les électeurs sont beaucoup plus dispersés.
M. Brian Jean: Merci.
Le président: Merci, monsieur Jean.
Monsieur Bigras.
[Français]
M. Bernard Bigras (Rosemont—La Petite-Patrie, BQ): Merci, monsieur le président. Merci, chers témoins, de votre présence au comité.
J'ai tiré deux conclusions de votre présentation. Pour atteindre l'objectif de Kyoto, il faut avoir deux approches: une approche fiscale, laquelle doit être accompagnée d'une approche réglementaire. Naturellement, l'approche fiscale touche de près le budget et la reconversion de l'aide à l'industrie des hydrocarbures. Vous avez bien fait de mentionner l'augmentation de 33 p. 100, entre 1996 et 2002, des subventions à l'industrie des hydrocarbures. D'autre part, l'approche réglementaire touche plus spécifiquement les programmes et les politiques.
Je suppose qu'au cours des dernières semaines, comme nous, vous avez eu des rencontres avec le ministre des Finances afin de lui faire part de vos préoccupations. En effet, vous nous proposez aujourd'hui tout un bouquet de mesures fiscales. J'aimerais, dans un premier temps, que vous nous indiquiez ce qui constituerait pour vous un budget vert minimal qui soit acceptable, dans la mesure où le budget sera déposé le 22 février. Croyez-vous ou avez-vous obtenu des garanties à l'effet que le prochain budget fédéral sera un budget vert? C'est ma première question.
Ma deuxième question s'adresse plutôt à M. Rudolph, puisqu'elle touche davantage la réglementation. Le prochain budget fédéral devrait contenir une garantie à l'effet qu'on quadruplera l'aide à l'industrie éolienne en instaurant un incitatif fiscal en fonction des kilowattheures produits par cette dernière à la source. Ce qui me préoccupe, c'est l'adaptation du programme. J'ai été surpris de voir qu'à Hydro-Québec, sur les 1 000 mégawatts au programme au cours des dernières années, seulement 200 pouvaient être couverts par le programme fédéral pour l'énergie éolienne. J'ai également été surpris de constater, dans les documents de travail de Ressources naturelles Canada, que bien qu'on ait laissé une place à l'énergie éolienne, ce dont je suis bien heureux, des entreprises du domaine de l'hydroélectricité qui décideraient de construire de nouveaux barrages ne pourraient toucher de crédits en vertu de la réglementation potentielle sur Kyoto.
Sur le plan fiscal, quelles sont vos attentes à court terme relativement au budget fédéral? Enfin, quelle réglementation pourrait-on obtenir qui nous permette d'atteindre l'objectif de Kyoto, autant dans le cadre de la programmation actuelle que dans une programmation future?
Á (1150)
M. Dale Marshall: Au sujet du budget, nous avons rencontré le ministre Goodale, nous lui avons présenté notre plan, et il ne s'est engagé à rien, ce qui ne nous a pas surpris. Cependant, il a indiqué que certaines mesures l'intéressaient et qu'un budget vert était possible. Encore une fois, il ne s'est pas engagé envers nous ni envers quiconque l'ayant rencontré précédemment à cet égard.
Ce que nous voudrions voir dans le budget, ce sont des mesures en réponse aux suggestions que je vous ai énumérées aujourd'hui, entre autres celles d'éliminer les subventions à l'industrie pétrolière et autres industries polluantes, et de mettre en place des mesures pour absorber les coûts environnementaux et les coûts relatifs à la santé humaine engendrés par les industries de production d'énergie et autres.
Il y a aussi certaines autres mesures. Monsieur, tout à l'heure, nous a parlé des édifices. Le programme en vigueur à Ressources naturelles Canada dispose d'un budget lui permettant d'améliorer moins de 1 p. 100 des édifices au Canada. Pourtant, le but fixé est de rénover 20 p. 100 des édifices au pays. Ainsi, ce programme ne dispose pas d'un budget suffisant. Il connaît beaucoup de succès, mais il n'y a pas assez d'argent pour procéder à toute la reconstruction nécessaire afin d'augmenter l'efficacité énergétique de nos maisons et de nos édifices.
Voilà quelques mesures que nous souhaitons retrouver dans le budget. Nous avons également des propositions, tout comme la coalition de M. Rudolph, à l'égard des énergies renouvelables. De plus, nous appuyons sa suggestion à l'effet qu'on quadruple le programme EPÉÉ afin qu'il passe de 1 000 à 4 000 mégawatts. Nous proposons toutes sortes de mesures que nous souhaitons retrouver dans le budget.
[Traduction]
Le président: Voulez-vous répondre à la question sur l'énergie éolienne?
Á (1155)
M. Mark Rudolph: Je vais répondre à la question de M. Bigras. Celui-ci a raison lorsqu'il parle des plafonds provinciaux. Lorsque l'EPÉÉ a été élaboré, on était parti du principe qu'il y aurait un nombre x de dollars qui pourraient favoriser la production de 1 000 mégawatts. J'ignore si cette décision était une décision opérationnelle de la bureaucratie, des milieux politiques ou d'un autre intervenant, mais en fait, on avait ainsi décidé, un peu comme pour les Pères de la Confédération, que chaque province aurait sa part.
Mais en réalité, lorsqu'on songe à l'énergie éolienne, c'est une ressource qui n'existe pas nécessairement en abondance dans toutes les provinces, or toutes ont reçu une part. Certaines provinces plus vastes en ont reçu une plus grande. Je pense qu'il s'agissait d'environ 300 mégawatts. Ce qui se passe, c'est que l'énergie éolienne intéresse de plus en plus le Canada en raison de l'encouragement en question, mais aussi parce que les provinces sont en train de produire ce qu'elles appellent des normes pour le portefeuille renouvelable, normes en vertu desquelles un pourcentage x de l'énergie électrique doit être produit par des sources vertes. Tout cela mis ensemble a produit un excellent climat d'investissement de sorte que dans des provinces comme le Québec, l'Alberta et l'Ontario, ce plafond de 300 mégawatts peut être facilement atteint.
Une raison qui a motivé la recommandation de la Coalition du budget vert, la recommandation du chapitre canadien de l'AME visant à faire passer le programme de 1 000 mégawatts à 4 000 mégawatts, était en premier lieu qu'il fallait avoir les moyens nécessaires pour étendre le programme et ensuite qu'il fallait faire tomber ces plafonds provinciaux de manière à ce que lorsqu'une compagnie a un projet viable reposant sur une bonne banque de données éoliennes, cette compagnie puisse exprimer sa volonté de lancer un projet sans être pour autant limitée parce qu'elle est trop loin dans la liste pour espérer pouvoir obtenir une partie de l'argent. Toute cette idée, donc, d'élargir l'EPÉÉ repose en partie sur l'argument qu'il ne faut pas que de bons projets ne soient admissibles pour la seule raison qu'ils se sont mis sur la liste un peu plus tard que d'autres.
En Alberta, les compagnies font littéralement la paix pour pouvoir investir. Certaines de ces compagnies ont maintenant décidé de temporiser parce que, sur le plan technique, elles n'auraient pas droit au financement de l'EPÉÉ. Lorsqu'on produit de l'électricité qui coûte 7 ou 8 cents le kilowattheure contre 3 ou 4 cents pour les sources de production classique, une subvention d'un cent par kilowattheure fait toute la différence. L'expansion du programme EPÉÉ est donc en partie conçue pour faire sauter ces plafonds provinciaux parce qu'ils ne procèdent d'aucune logique.
Il y a également des plafonds d'échelle et j'ignore encore comment ou si cette question va être résolue. En d'autres termes, une compagnie pourrait proposer de produire 1 000 mégawatts alors que toute une série de compagnies pourraient proposer chacune 50 mégawatts. Doit-on laisser une compagnie s'approprier les 1 000 mégawatts en laissant sur la touche toutes sortes d'autres investisseurs et promoteurs?
J'ignore ce qu'on va faire pour toute cette idée des plafonds d'échelle, mais,étant donné l'intérêt que le programme suscite, les plans d'expansion du programme consistent en partie à se débarrasser de ces plafonds provinciaux qui ont fait obstacle à la croissance qui était pourtant nécessaire. D'ailleurs, en élargissant l'EPÉÉ à tout le secteur de production énergétique vert atteste bien à notre avis qu'il n'y a pas que l'énergie éolienne. S'il y a par exemple un petit site hydroélectrique dont l'exploitation pourrait être viable moyennant une subvention, eh bien il devrait également pouvoir profiter du programme, et c'est pour cette raison que nous avons recommandé un cent par kilowattheure.
[Français]
M. Christian Simard (Beauport—Limoilou, BQ): Monsieur Rudolph, vous répondez très longuement. Je crois que la réponse de M. Marshall sera courte.
On a dépensé 3,7 milliards de dollars et on rate l'objectif de Kyoto, à l'heure actuelle, de 28 p. 100. Compte tenu de ce que l'on a vu depuis le début, croyez-vous que le gouvernement ait la volonté nécessaire pour atteindre les objectifs du Protocole de Kyoto? On se rappelle qu'il est le dernier pays de l'Annexe 1, derrière l'Australie et les États-Unis, qui n'ont pas signé le Protocole de Kyoto.
Pensez-vous que ce gouvernement a véritablement l'intention de respecter ses obligations internationales?
M. Dale Marshall: Je ne peux pas deviner quelles sont les intentions du gouvernement. Tout ce que je peux vous dire, c'est que j'espère qu'il aspire encore à atteindre les objectifs du Protocole de Kyoto.
Vous avez raison, 3,5 milliards de dollars dépensés jusqu'à présent, c'est beaucoup d'argent. Cela démontre au moins qu'il existe une intention de faire quelque chose.
Selon moi, jusqu'à aujourd'hui, les approches utilisées n'ont pas été les bonnes. C'est ce que je vous ai dit dans mon discours. Le gouvernement doit envisager d'autres politiques, d'autres types de réglementation et de nouveaux outils fiscaux. Il ne faut pas seulement donner de l'argent pour diminuer la pollution, mais aussi imposer des taxes pour provoquer un changement de comportement de l'industrie et des citoyens du Canada.
[Traduction]
Le président: Merci beaucoup.
Nous allons maintenant passer du côté libéral avec, dans l'ordre, M. Wilfert, M. Scarpaleggia et M. McGuinty.
 (1200)
L'hon. Bryon Wilfert (Richmond Hill, Lib.): Merci, monsieur le président, et merci également à nos témoins pour leur présence ici aujourd'hui.
J'aimerais parler de deux choses différentes. En premier lieu, il y a toute la question de la mise en oeuvre par le biais d'une structure gouvernementale et, en second lieu, vos recommandations budgétaires.
Dans le premier cas, l'exaspération que ressentent parfois certains d'entre nous vient du compartimentage de l'administration fédérale. En particulier, le gros des discussions que nous allons avoir tout prochainement concerne les instruments fiscaux, et nous parlons ici du ministère des Finances. Il y a également tout le dossier du changement climatique qui nous appelle à traiter avec Agriculture Canada, Industrie Canada, Ressources naturelles Canada et ainsi de suite.
Le problème tient au fait qu'un dossier ne relève pas d'un seul ministère. Peut-être faudrait-il un secrétariat, quelque chose qui puisse servir d'intermédiaire, afin qu'au bout du compte il n'y ait qu'une seule voix, que cette voix soit claire et précise et que lorsque nous faisons quelque chose dans un domaine, nous sachions bien ce qui se passe dans un autre domaine puisque tout sera bien canalisé. Souvent il y a là une question de cause à effet.
Alors pour commencer, dites-moi ce que vous en pensez parce que cela me semble être une partie intégrante du problème.
L'autre question est la recommandation que le comité avait formulée en 1995 qui avait d'ailleurs été acceptée en ce qui concerne une démarche intégrée. Je ne vais pas entrer dans le détail des tenants et des aboutissants—je n'étais pas encore là—mais j'aimerais savoir comment, selon vous, il faudrait modifier la structure, quels seraient les avantages éventuels qu'il y aurait à le faire pour que nous puissions ensuite passer à la seconde phase, c'est-à-dire l'examen de la question fiscale, ce qui est en fait l'objet de votre présence ici aujourd'hui.
M. Mark Rudolph: Cette question est tout à fait pertinente. Lorsque je représentais la Coalition, nous en parlions effectivement beaucoup, et lorsque j'assumais mes fonctions normales, c'était également le cas. La réalité est que le changement climatique, tout comme n'importe quel autre dossier qui intéresse le gouvernement, représente quelque chose d'extrêmement complexe. Cette question n'intéresse pas seulement Environnement Canada et elle ne devrait pas non plus intéresser exclusivement Ressources naturelles Canada ou n'importe quel autre ministère. Comme vous le savez, mesdames et messieurs, il y a des agences centrales qui font certaines choses et il y a les ministères qui sont censés faire autre chose. L'intégration de l'information, la conduite des programmes et le financement des programmes, tout cela ne se fait pas fort bien dans le cadre de ce système et effectivement, il y a un compartimentage. Ces compartiments étanches—je ne pense pas apprendre quoi que ce soit à quiconque s'intéresse à ce dossier-ci—donnent lieu effectivement à une véritable guerre de tranchées qui nuit à tout le monde.
Il nous est arrivé, au Bureau du Conseil privé, de parler de l'idée d'un secrétariat central. C'est peut-être un tout petit groupe, mais un groupe composé de gens qui sont censés réunir l'information et fouetter les différents ministères. Personnellement, je dirais que ce n'est pas une mauvaise idée et que ce n'est pas non plus un mauvais modèle. D'après ce que je sais, le Bureau du Conseil privé fait certaines choses qui concernent les affaires parlementaires, les affaires du Conseil des ministres et que sais-je encore. Il fait également beaucoup de choses lorsqu'il est en mode de gestion de crise, mais il ne s'occupe guère de fonctions de secrétariat pour la gestion des dossiers. Dans ce sens, rien encore n'a été fait et il semble y avoir une certaine répugnance à le faire.
J'ai le sentiment que c'est ce qui devrait se faire à l'avenir si l'on veut que tout cela soit bien ficelé, si l'on veut avoir la garantie que cela finira par être mis en oeuvre. Je vous dirais quant à moi que c'est ce qui devrait se produire dans toute une palette de dossiers complexes qui intéressent le gouvernement; il n'y a pas que le changement climatique, mais celui-ci est un excellent exemple.
M. Dale Marshall: Je voudrais ajouter un mot à cela. La Fondation David Suzuki et la Coalition du budget vert ont également réclamé publiquement ce genre d'agence centrale. Nous ne savons pas vraiment si cette agence devrait relever du Bureau du Conseil privé ou du Cabinet du premier ministre, mais toute cette guerre interne qui a cours actuellement, surtout dans le dossier climatique, et qui oppose surtout Environnement Canada et Ressources naturelles Canada, fait qu'il est extraordinairement difficile d'arriver à vraiment réaliser quelque chose. Nous semblons avoir bien expliqué la situation actuelle du Canada dans le dossier du changement climatique et celui de la mise en oeuvre du protocole de Kyoto, de sorte qu'il faudrait effectivement une structure d'un genre différent qui ait une responsabilité clairement définie.
L'hon. Bryon Wilfert: Je vous remercie pour ces éclaircissements.
Je puis vous dire qu'en ma qualité de secrétaire parlementaire du ministre de l'Environnement, j'ai pu effectivement constater qu'il y avait certains progrès. Mais manifestement, nous sommes encore loin d'être arrivés là où nous voudrions être.
S'agissant du budget, tout revient au ministère des Finances. J'ai aussi été le secrétaire parlementaire du ministre des Finances et, à ce titre, je puis vous dire que tous les chemins conduisent aux finances. Ils n'en sortent pas nécessairement, mais tous y conduisent. C'est un ministère d'une très très grande importance.
J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt les recommandations de la Clean Air Coalition et je puis vous dire d'après mon expérience au portefeuille des finances que les gens avaient l'habitude de venir nous trouver en disant : « Ce n'est qu'un milliard de dollars ». La première fois que j'avais entendu cela, j'avais répondu « Vous voulez dire un million? », mais on m'avait rétorqué : « Non, non, non, 1 milliard ». Où aurions-nous été cherchés cet argent à leur avis, je n'en ai aucune idée.
Vous avez vous-même trituré tous ces chiffres. Les avez-vous soumis au ministère des Finances? Les a-t-il examinés? Y a-t-il eu un examen indépendant? Sur quoi vous basez-vous pour avancer ces chiffres? Je vois ici que vous parlez de 131 millions de dollars par an.
 (1205)
M. Mark Rudolph: Comme vous pouvez le voir sur le tableau, il s'agit d'une moyenne. Il peut y avoir des hauts et des bas. Tous ces chiffres ont été soumis au ministère de l'Environnement, à Ressources naturelles Canada, au ministère des Finances, au Cabinet du premier ministre et au Bureau du conseil privé.
L'hon. Bryon Wilfert: Et leur réponse...?
M. Mark Rudolph: Nous n'avons rien entendu de négatif.
L'hon. Bryon Wilfert: Mais avez-vous entendu quelque chose?
M. Mark Rudolph: Uniquement ce que j'ai pu lire dans le journal.
Non, nous avons bien entendu... Il y a eu certains signaux. Je suis raisonnablement content des bruits que nous entendons sur certains fronts. Mais nous ne serons fixés que lorsque quelque chose surgira du 140, rue O'Connor.
L'hon. Bryon Wilfert: En effet.
Ce sera ma dernière question, monsieur le président.
Je suis intimement convaincu de l'engagement du ministre de l'Environnement—absolument—dans ce dossier et je pense qu'il y a apporté quelque chose d'inusité et d'intéressant pour ce qui est de la compétitivité et de l'économie verte qui ne sont pas nécessairement antagonistes. La semaine prochaine, nous allons entendre le ministre des Finances. S'il y avait une chose que vous aimeriez lui dire dans la perspective de son prochain budget, au sujet de ce qui est pour vous sans doute l'instrument le plus important pour faire avancer ce dossier, étant donné que le budget proposera une myriade d'activités, je n'en doute pas, que voudriez-vous lui dire?
Comme vous le savez pertinemment, le ministère des Finances, j'entends par là l'entité, oppose une résistance. Il a affirmé qu'il n'avait pas recours au système fiscal, ce qui est évidemment une parfaite idiotie, puisque, ayant moi-même pratiqué le dossier, je sais que je l'ai utilisé pour le pétrole, le gaz et l'industrie minière. Alors, que lui diriez-vous?
M. Mark Rudolph: Je vais laisser Dale répondre à la question sur un plan plus général.
En ce qui concerne tout particulièrement l'énergie renouvelable à faible incidence, nous avions fait il y a quatre ans une série de recommandations à caractère fiscal en faveur d'un crédit d'impôt à la production ainsi que d'un crédit d'impôt à la consommation afin d'aider le secteur de la demande. Et effectivement le ministère des Finances avait rétorqué qu'il ne voulait pas rendre le système fiscal plus complexe encore et donc on ne pouvait pas passer par la fiscalité.
Ensuite, ils ont concocté cette idée d'un encouragement à la production qui a été appliqué à l'énergie éolienne. Le ministère des Finances adore le programme EPÉÉ parce que personne ne touche un sou avant d'avoir produit quelque chose. Le producteur doit fournir des informations comptabilisées et vérifiables qui attestent qu'il a produit un nombre x de kilowattheures et, partant, il pourrait toucher un cent de cet argent. Le ministère des Finances adore ce genre de choses.
S'agissant des énergies renouvelables, puisque le ministère des Finances a bien aimé cette formule de l'EPÉÉ, nous pensons qu'il faudrait l'élargir à d'autres technologies et le faire de façon équitable. Si on veut créer, au Canada, une industrie qui assainisse l'air, réduise les émissions de gaz à effet de serre et créer 20 000 emplois en utilisant une mesure d'encouragement de la production qui reçoit l'assentiment du ministère des Finances, ce ne serait pas une mauvaise façon de s'y prendre.
M. Dale Marshall: Ce que nous essayons de faire essentiellement, c'est de réduire les émissions de gaz carbonique. Comme je le disais dans mon exposé, si nous voulons réduire les émissions de gaz à effet de serre, surtout le gaz carbonique, la meilleure solution serait certainement une taxe sur le carbone. Est-ce que je m'attends que le prochain budget annonce une taxe sur le carbone? Non.
Si ce n'est pas une taxe sur le carbone, il faut quelque chose de beaucoup plus systématique qui s'applique individuellement à chaque secteur. Il faut voir les émissions produites par les immeubles. Comment peut-on les réduire? On doit voir aux émissions produites par le réseau de transport. Comment peut-on réduire ces émissions?
De façon plus générale, une bonne partie de la solution consisterait à appliquer les deux mécanismes que j'ai décrits. D'abord, nous devons nous débarrasser des subventions et tenir compte du coût réel de la consommation d'énergie et des besoins de production dans les prix et, deuxièmement, il faut en même temps un régime réglementaire qui produise des synergies entre ces deux éléments.
Le programme des grands émetteurs finaux en est un excellent exemple. On fixe un seuil, soit 55 mégatonnes, aux émissions produites par les grands émetteurs finaux, mais on permet ensuite un échange d'émissions entre ces grands émetteurs. Cela représente une combinaison idéale d'un cadre réglementaire et de mécanismes financiers qui est assez souple pour permettre à l'industrie d'atteindre ses objectifs.
 (1210)
L'hon. Bryon Wilfert: Merci. Je dois vous quitter bientôt parce que je dois prononcer un discours au nom du ministre, mais je tenais à vous remercier de vos interventions.
Le président: Merci.
Nous allions manquer de temps de toute façon, mais je vais revenir à la liste d'intervenants.
Monsieur Scarpaleggia, vous serez le prochain à poser des questions au moment des échanges.
Je donne maintenant la parole à M. Cullen.
M. Nathan Cullen (Skeena—Bulkley Valley, NPD): Je remercie les témoins d'être venus.
Je regrette que le secrétaire parlementaire doive partir. Il aurait peut-être aimé mes questions vu qu'il a déjà posé celle par laquelle je comptais commencer.
Je ne veux pas tellement parler des principes et des propositions qui ont été formulés parce que, dans bien des cas, nous avons déjà évalué les coûts et examiné divers moyens d'offrir des incitatifs qui nous permettraient de répondre à certaines de nos préoccupations environnementales, mais plutôt de l'atmosphère et des attitudes qui entourent ces pourparlers. Je rappelle ce que le ministre des Ressources naturelles avait dit après un déversement de pétrole au large de la côte Est. Il avait laissé entendre que cela représentait certainement une perte vu que le prix du pétrole est de 50 $ le baril et que c'était malheureux, sans tenir compte des considérations environnementales plus subtiles.
Je voudrais notamment rappeler aux nouveaux partisans de la cause environnementale que ce que notre comité fera au cours des mois à venir est d'examiner l'application du protocole de Kyoto et de la réforme financière, non pas le changement climatique lui-même. Je vous remercie de vos réponses qui montrent que nous devons trouver des solutions qui nous permettent de tenir ces promesses.
Mes questions portent donc davantage sur la culture qui existe ici sur la Colline et sur l'absence de leadership. Nous savons depuis longtemps que c'est un problème. Je voudrais pouvoir croire aux promesses du gouvernement.
Je ne veux pas revenir encore sur le vieux dicton selon lequel un libéral n'a jamais fait une promesse qu'il n'aimait pas, mais quand on examine les promesses qui ont été faites ces dernières années, surtout pour les incitatifs financiers et la réforme financière, je reconnais que c'est une bonne idée et que nous devrions opter pour cette solution, mais nous nous trouvons encore exactement dans la même situation qu'auparavant. Rien ne se fait.
Dans quelle mesure pensez-vous pouvoir faire confiance à ce supposé budget vert qui nous sera présenté, et j'ai bien hâte de voir dans quelle mesure il sera vraiment vert, et pensez-vous que la culture qui existe maintenant au Conseil des ministres ou au Cabinet du premier ministre va permettre d'apporter certaines de ces réformes financières dont vous avez parlé? Qu'est-ce qui vous fait croire ou croyez-vous que cela va vraiment arriver?
M. Dale Marshall: On ne peut pas faire le travail que je fais sans être quelque peu optimiste. Cela étant dit, le gouvernement au pouvoir n'a certes pas résolu le problème dans le passé. Je voudrais bien voir un budget vert. Je suis quelque peu sceptique à ce sujet, mais j'espère que c'est ce que nous aurons.
Les sondages montrent encore que les Canadiens appuient le protocole de Kyoto et qu'ils sont d'accord pour que le Canada prenne des mesures énergiques relativement au changement climatique. Nous en sommes maintenant à un point où il est bien clair que les programmes actuels au Canada ne donnent pas les résultats voulus et que nous devons réexaminer sérieusement les politiques que nous devons instaurer pour atteindre nos objectifs.
Cela est en partie relié au budget. Je continuerai certainement d'être optimiste, mais je ne serai pas vraiment étonné si je suis déçu.
M. Mark Rudolph: Je voudrais dire deux choses. D'abord, je pense que vous soulevez quelque chose de très important. À la fin du compte, peu importent quel parti est au pouvoir et les programmes qu'il met en oeuvre. Il existe des problèmes systémiques dans le système. Il y en a toujours eu et il y en aura toujours.
En Ontario, on aurait cru pouvoir réaliser des progrès importants relativement à l'environnement pendant la période de 1990 à 1995 quand un gouvernement néo-démocrate était au pouvoir. Si vous me permettez un commentaire sectaire, je suis très fier du travail que j'ai fait de 1985 à 1990 au sein du gouvernement libéral Peterson. Il y a aussi des gouvernements progressistes-conservateurs qui ont eu beaucoup de succès relativement à la conservation, mais pas beaucoup pour protéger l'environnement.
Selon moi, on ne peut pas simplement voir quel parti est au pouvoir pour juger s'il a donné suite à ses promesses ou non. Il existe des problèmes systémiques au gouvernement, surtout en ce qui concerne l'environnement. À mon avis, il existe des problèmes systémiques dans notre société. Nous avons discuté des choses qu'on peut faire pour économiser l'énergie ou favoriser l'efficacité énergétique auprès des consommateurs. Le fait est qu'il y a bien des choses qu'on peut faire. C'est une cible facile à atteindre. Cependant, comme nous l'avons constaté en Ontario pendant la période de 1985 à 1990, il faut trouver des solutions commodes, faciles à comprendre et courantes. C'est le cas de la boîte bleue. Nous avons besoin d'une boîte bleue pour les consommateurs relativement au changement climatique.
Il existe donc un problème systémique au gouvernement et au niveau de la société. Le gouvernement prend-il des mesures ou non? Je l'ignore. Il y a des années, après avoir été chef de cabinet du ministre de l'Environnement du gouvernement Peterson, quelqu'un qui a plus tard été premier ministre était à l'époque critique de l'environnement pour le Parti libéral du Canada. J'avais eu le privilège de passer du temps avec lui à l'époque et je pense qu'il était très engagé à l'égard de l'environnement. Il fait face maintenant à diverses contraintes comme premier ministre et ces mêmes contraintes existent pour M. Goodale à titre de ministre des Finances. Aurons-nous un budget vert? Il semblerait que oui. Est-ce que ce sera suffisant? Je ne pense pas que cela satisfasse bien des gens, mais je pense que le premier ministre est engagé envers l'environnement et qu'il faudra attendre que le budget soit déposé pour voir ce qui en est.
Peut-on pointer du doigt un parti en particulier? Je dois reconnaître, vu mes antécédents politiques, que je ne suis pas ici pour défendre le gouvernement actuel, mais tous les partis représentés ici ont eu l'occasion de faire quelque chose quand ils étaient au pouvoir au niveau fédéral et dans les provinces relativement à l'environnement et ils ont tous échoué.
 (1215)
Le président: Monsieur Cullen.
M. Nathan Cullen: Que ce soit une bonne chose ou non, la partisanerie fait partie de mon travail. Voici ce que j'essaie de comprendre. Oui, j'ai déjà entendu dire que le premier ministre se soucie vraiment de l'environnement, mais plus que les sentiments ou les mots, ou même plus qu'un discours du Trône, ce que je voudrais comprendre—et la question s'adresse à vous, nos témoins—c'est pourquoi il y a tant de résistance. Vous avez établi quels seront les coûts. Nous avons fait de même lorsque nous avons proposé un plan pour l'accord de Kyoto il y a quelques semaines. Plus personne ne propose de solutions en matière d'environnement sans essayer d'en évaluer les coûts et sans essayer de conjuguer les enjeux économiques et les enjeux environnementaux. Il est certain que les consommateurs aimeraient pouvoir faire le plein d'essence pour 15 $ plutôt que pour 40 $, quel que soit le montant qu'il en coûte dans votre province.
Que faudra-t-il faire de plus, si la population est si favorable à ces mesures—et je ne suis pas certain que les annonces de M. Mercer sur le défi d'une tonne, entre autres, permettront vraiment de se rallier la population, parce que personne ne comprend de quoi il s'agit—si vous avez évalué les coûts, si vous dites que la transformation créera un grand nombre d'emplois et qu'on créera encore plus d'emplois en améliorant l'efficacité des véhicules?
J'aimerais que vous informiez notre gouvernement minoritaire des possibilités que cela offre, puisque vous avez eu 11 ans de... Il est certain que le premier ministre est limité dans ce qu'il peut faire, mais, vous savez, lorsqu'il a voulu réduire l'impôt des grandes sociétés, il a pris la chose en main et il l'a fait. Que faudra-t-il pour que ce gouvernement minoritaire—et vous pouvez le voir de façon aussi partisane que vous voulez—prenne toutes ces mesures...? Il semble que toutes les avenues soient possibles. Le mouvement écologique a beaucoup gagné en maturité pour ce qui est d'évaluer les coûts de ces propositions. Que faudra-t-il pour que vous décidiez d'approuver ce budget et le qualifiiez de budget vert? Que faudra-t-il faire dans ce comité, à la Chambre ou ailleurs pour obliger ce gouvernement minoritaire à nous présenter une réforme fiscale?
Je pense qu'il faut agir avec vigueur, car le gouvernement a eu la possibilité d'agir. L'avantage d'un gouvernement majoritaire, c'est qu'il a la possibilité d'agir. Il y a des limites, mais il peut faire à peu près tout ce qu'il veut. La vérificatrice générale a dit au ministère des Finances qu'il n'a pas respecté sa promesse de modifier sa culture, de changer sa mentalité afin qu'il y ait des résultats et que nous puissions dire que le budget de 2005 était excellent, qu'il a été un sommet.
Que faudra-t-il? Êtes-vous prêts à faire ce qu'il faut? Que faudra-t-il pour que vous appuyiez le ministre ou le premier ministre et que vous qualifiiez ce budget de budget vert?
M. Dale Marshall: Que faudra-t-il? Il est bien difficile de répondre à cette question. Nous avons expliqué ce qu'il faudra, à notre avis. Il faudra des signaux clairs de ce qu'il existe un engagement.
Vous avez raison de dire que les paroles ne signifient rien. Un gouvernement ne peut être jugé que par ses actes. Depuis que nous avons signé le protocole de Kyoto et depuis 1990, nous avons eu deux gouvernements qui ont permis aux émissions de gaz à effet de serre d'augmenter de plus de 20 p. 100. C'est par cela seulement que nous pouvons juger ce gouvernement.
Que faudra-t-il? Le fait que le gouvernement soit minoritaire ouvre des possibilités d'exercer des pressions pour qu'il passe vraiment aux actes. Pour ce qui est de savoir si cela se produira ou non, ce sont là les questions partisanes qui relèvent de vous et des autres partis minoritaires.
 (1220)
M. Nathan Cullen: Ce que le gouvernement cherche, entre autres, c'est votre approbation. C'est une des fonctions des ONG, et plus particulièrement—vous avez parlé je crois d'« entités disparates »—si Shell emboîte le pas. On attend votre approbation. Voilà les politiques que je recherche.
Je veux savoir si vous avez des objectifs. Dites-vous qu'à moins que telle chose soit faite...? Vous présentez-vous...? Le secrétaire parlementaire a posé une bonne question. Quelle en était la réponse? On ne peut pas compter sur les fuites rapportées par les journalistes.
M. Mark Rudolph: Je puis vous dire que pour ce qui est de la coalition—du moins en ce qui concerne une partie de son travail—nous souhaitons l'expansion du programme EPEE, la création d'une mesure incitative pour la production de véhicules écologiques, l'approvisionnement écologique, et surtout le programme de toitures solaires. Si toutes ces mesures sont adoptées...
De plus, j'ai discuté avec des députés de tous les partis. D'une façon générale, ils sont tous d'accord avec ces idées et tous abordaient ce sujet dans leur programme électoral, ou du moins, dans une certaine mesure; les conservateurs, pas autant que les autres. Après avoir discuté avec M. Mills et d'autres, je sais que tous s'entendent d'une façon générale à ce sujet. Tant que nous ne prononçons pas ce mot qui commence par la lettre « K », les quatre partis semblent d'accord.
Nous serions prêts à appuyer un programme qui comprendrait tous ces éléments, tout comme les quatre partis politiques.
Le président: Monsieur Cullen, nous allons manquer de temps. Pourrions nous passer à des périodes de cinq minutes...
M. Nathan Cullen: Autorisez-vous M. Marshall à répondre?
Le président: Pour conclure? D'accord.
M. Dale Marshall: Il est certain que la Coalition du budget vert et la Fondation David Suzuki ont un mandat beaucoup plus étendu que la simple question de l'énergie renouvelable. Nous croyons savoir que le plan de mise en oeuvre de l'Accord de Kyoto, que nous attendons, sera rendu public à peu près en même temps que le budget. Ce que nous sommes prêt à approuver, c'est un engagement clair non seulement à respecter l'Accord de Kyoto, mais aussi à en atteindre les objectifs et un plan comprenant toutes les mesures que nous estimons nécessaires. Cela signifie que le budget et le régime fiscal doivent comporter des mesures d'incitation et de dissuasion fiscales, que le cadre réglementaire doit être solide, surtout en ce qui a trait aux industries, aux véhicules, aux immeubles et aux électroménagers.
Si toutes ces mesures sont prises, ce sera un premier pas—vraiment un premier pas—vers la mise en oeuvre de l'Accord de Kyoto.
Le président: Merci, monsieur Marshall.
Nous allons maintenant entendre M. Allison, puis M. Scarpaleggia, avant de revenir à M. Bigras.
Monsieur Allison.
M. Dean Allison (Niagara-Ouest—Glanbrook, PCC): Messieurs, je vous remercie d'être venus nous rencontrer aujourd'hui. Puisque je ne siège pas normalement au comité de l'environnement, mes questions correspondront peut-être à celles que poseraient un Canadien moyen au sujet de la situation actuelle et des progrès qui ont été réalisés.
Je pense que l'une des grandes préoccupations de notre parti a toujours été de savoir combien tout cela coûtera en fin de compte, et nous croyons que le gouvernement n'a pas été entièrement honnête. Vous avez fait aujourd'hui des propositions qui semblent logiques, mais nous ne savons toujours pas combien tout cela coûtera.
Brièvement, à quoi ont été dépensés les 3,7 milliards de dollars jusqu'à présent? Pour le Canadien moyen, cela signifie que nous avons dépensé près de 4 milliards de dollars. Cet argent a-t-il servi à des recherches, à des analyses, ou...? Vos réponses n'ont pas besoin d'être détaillées.
M. Dale Marshall: Malheureusement, c'est difficile à dire. L'argent a été distribué entre des douzaines de programmes distincts. Dans bon nombre de cas, il s'agit simplement d'incitatifs. Il y a aussi des programmes d'éducation du public.
À notre avis, ce n'est pas très solide. Au lieu de voir ce qui pourrait être fait en matière de réglementation ou de mesure de dissuasion, l'argent a servi à toutes sortes de programmes. Nous appuyons certains d'entre eux, mais en raison de l'absence d'autres programmes, une bonne partie de l'argent a été dépensé sans grand résultat.
M. Dean Allison: Encore une fois, on parle du fait que le gouvernement s'est engagé en faveur du plan de Kyoto sans véritable stratégie quant à la manière de l'appliquer. Le financement est éparpillé.
Combien a véritablement été affecté à la recherche et au développement? Nous avons parlé de cela comme étant peut-être un encouragement puissant à examiner certains de ces... à faible impact... Combien d'argent environ a été affecté à la R-D ou est disponible pour les programmes?
M. Dale Marshall: Le dernier budget prévoyait 1 milliard de dollars. L'argent provenait de Petro-Canada, et 200 millions de dollars étaient affectés à Technologies du Développement durable Canada, voilà donc de la R-D, et les 800 autres millions de dollars ont été affectés à la recherche. Cela fait au moins une somme de 1 milliard de dollars affectée à la recherche.
Évidemment, TDDC a été créé avant cette année, et a reçu des centaines de millions de dollars aussi. Il y avait donc beaucoup d'argent qui allait à la recherche, et cela fait partie du problème. C'est bien de consacrer des fonds à la R-D : il nous faut des solutions technologiques à long terme. Il y a cependant toutes sortes de technologies déjà parfaitement viables commercialement, y compris l'énergie éolienne, les véhicules efficaces et quantité d'autres choses que l'on peut faire actuellement, mais que l'on néglige. La recherche effectuée, c'est pour l'avenir. Cela ne réduit pas les émissions à court terme, et peut-être même à long terme.
 (1225)
M. Dean Allison: Bien.
Enchaînons rapidement. Penchez-vous en faveur des mesures budgétaires ou réglementaires? La répartition devrait-elle être moitié-moitié? Il faut adapter ces choses, mais vous, en tant qu'expert, pensez-vous qu'il faudrait mettre l'accent sur le budgétaire ou sur le réglementaire?
M. Dale Marshall: Ce qui devrait être fait ou ce qui a été fait?
M. Dean Allison: Eh bien, qu'est-ce que vous en pensez? Qu'est-ce que vous recommandez?
M. Dale Marshall: Les deux sont complémentaires. Je ne sais pas. On ne peut pas vraiment donner un pourcentage, mais dans bien des cas ce qu'il faut, c'est une démarche réglementaire appuyée par des mesures budgétaires. Il faut un dosage des deux.
J'ignore quel est le pourcentage, mais il faut un meilleur dosage que ce qui a existé jusqu'à présent.
M. Dean Allison: Très bien.
Monsieur Rudolph, notre parti—moi en tout cas—appuie votre position en faveur de la création de mesures incitatives pour encourager les gens. C'est tout à fait censé. C'est une excellente façon de se responsabiliser et de passer à l'action.
Par contre, je ne pense pas que cela va mettre en pratique le protocole de Kyoto. D'après ce que me disent mes collègues, si l'on veut que Kyoto marche, il faut des impôts et de la réglementation. Le problème ici, c'est qu'il y a des entreprises qui vont supprimer des emplois si elles sont alourdies par des impôts ou une réglementation. C'est aussi simple que ça.
Je sais qu'il est possible qu'une autre industrie soit créée, mais je pense que si l'on est vraiment honnête—et c'est vraiment ce qu'on essaie de comprendre—au bout du compte, si nous créons des impôts et de la réglementation, des emplois vont disparaître.
Est-ce juste? Pour moi, c'est inéluctable.
M. Dale Marshall: Eh bien, je vais vous donner des exemples qui montrent pourquoi à mon avis cette crainte n'est pas fondée. D'abord...
M. Dean Allison: Il n'y a pas lieu de craindre pour les emplois?
M. Dale Marshall: Évidemment, les emplois sont une source de préoccupation, mais de là à dire que des emplois disparaîtront... J'ai rédigé un rapport qui examine l'effet de Kyoto sur l'emploi et je suis arrivé à la conclusion qu'il y aura des suppressions d'emplois, mais qu'il y aura davantage de création d'emplois; les gains se feront dans des secteurs comme l'énergie renouvelable, où nous aurons un secteur florissant là où d'autres pays prennent des mesures.
En termes de coûts, le sous-ministre de Ressources naturelles Canada a confirmé qu'il en coûterait en fait au secteur du pétrole et du gaz 7 cents le baril pour respecter Kyoto. Ce coût ne se soldera par aucune perte d'emplois.
Le président: Nous allons maintenant passer à M. Scarpaleggia.
M. Francis Scarpaleggia (Lac-Saint-Louis, Lib.): Merci, monsieur le président.
Merci, monsieur Marshall, ainsi que vous, monsieur Rudolph, d'être venus ici aujourd'hui. J'ai trouvé votre exposé professionnel, concis, clair, captivant et instructif et j'estime que si les témoins qui comparaissent devant les comités procédaient comme vous, le gouvernement comprendrait beaucoup les idées et les causes justes et les défendrait.
Je suis d'accord. Il est très important, voire fondamental pour le gouvernement d'examiner ces décisions stratégiques à travers le prisme de l'environnement. Espérons que ce sera le cas cette fois-ci. Nous aurons des structures en place dans les ministères et en particulier au ministère des Finances pour le faire.
Ma question est plus précise que certaines qui vous ont été posées. J'aimerais savoir ce que vous pensez des cartes d'abonnement au transport en commun déductibles. Nous avons entendu des fonctionnaires du ministère des Finances ici avant Noël et ils n'ont pas eu l'air convaincus.
En quelques instants, pourriez-vous nous en parler?
M. Dale Marshall: Cette proposition se trouve dans notre trousse. Essentiellement, l'idée serait d'égaliser les chances. Actuellement, une place de stationnement gratuite offerte par l'employeur n'est pas considérée comme un avantage social imposable; l'abonnement au transport en commun, en revanche, l'est. Dans la pratique, on n'en tient pas compte. Le stationnement est un avantage imposable, mais si vous l'offrez gratuitement, le ministère des Finances ne sait pas comment le calculer et n'en tient donc pas compte dans la perception des impôts.
Ce que nous suggérons pour mettre tout le monde sur un pied d'égalité est d'autoriser l'employeur à fournir un abonnement qui ne soit pas imposable. Cette mesure influerait sur la décision de l'employeur. Cela encouragerait ceux qui le font déjà à continuer et à s'en prévaloir.
Est-ce efficace? Pour être honnête, c'est une petite mesure, mais qui aurait de l'effet. Nous la préconisons, mais d'autres idées auraient de plus grands effets.
 (1230)
M. Francis Scarpaleggia: Par exemple, les Finances disent avoir fait leur calcul et disent qu'une carte déductible d'impôt n'aurait aucun effet sur le nombre de passagers. Je suis curieux de savoir, parce que l'idée me semble bonne à bien des égards. C'est un signal et ça allège l'impôt de ceux qui font quelque chose pour l'environnement. Avez-vous des études fiables qui montrent que le nombre de passagers augmenterait? C'est ma première question.
Ensuite, si je vous ai bien compris, vous dites que la raison pour laquelle vous êtes en faveur de la déductibilité des cartes d'abonnement au transport en commun, c'est que lorsqu'un employeur fournit gratuitement le stationnement, ce n'est pas un avantage imposable. Pensez-vous que le stationnement gratuit devrait l'être? À l'échelle municipale, il a été question d'imposer le stationnement pour que les gens prennent le train pour aller en ville, pour aller au travail, au lieu de la voiture.
M. Dale Marshall: Une partie de la réforme budgétaire écologique, c'est la reconnaissance du coût de nos activités. Le coût de l'utilisation des voitures dépasse le simple coût que paie chaque personne qui décide de prendre sa voiture plutôt que l'autobus chaque jour. Les places de stationnement devraient-elles être imposées à leur véritable coût pour la société? Oui.
Pour ce qui est d'études solides et fiables sur l'efficacité de cette mesure, toute mesure d'encouragement augmentera la fréquentation du transport en commun. Si vous baissez le coût de quelque chose, plus de gens s'en serviront. Est-ce que l'employeur qui fournit actuellement une carte d'abonnement jouira d'un avantage en contrepartie de quelque chose qu'il fait déjà, autrement dit va-t-il resquiller? Bien sûr, mais ça ne me dérange pas d'encourager celui qui fait déjà ce qu'il faut faire.
Le président: Je vous remercie.
M. Bigras, la parole est à vous, puis ce sera au tour de M. McGuinty.
[Français]
M. Bernard Bigras: Merci, monsieur le président.
J'ai lu vos documents et j'appuie à peu près toutes vos propositions. J'ai une seule déception. Ce n'est pas une critique. Si c'en est une, elle est positive. On peut rédiger des formules, des propositions, des mesures fiscales, mais si le gouvernement n'a pas la volonté de mettre en oeuvre une stratégie de développement durable, nous n'y arriverons pas. La preuve est qu'il existe une directive depuis 1994, qui émane d'en haut--l'évaluation stratégique environnementale--, et c'est un échec lamentable.
Monsieur le président, je parle de cela ici, au comité, parce que si je parlais de cette notion à la Chambre des communes, je crois que le premier ministre penserait que je viens d'une autre planète. Selon moi, c'est là que se situe le problème. Si nous ne réussissons pas à faire en sorte que cette évaluation stratégique environnementale devienne obligatoire par le biais d'une obligation réglementaire... C'est peut-être la solution. Tant et aussi longtemps que les trois « p », les plans, les politiques et les programmes--vous nous parlez beaucoup de programmes, mais un gouvernement a aussi des plans et des politiques--ne tendront pas à cela, nous n'y arriverons pas.
Puisque vous êtes les premiers témoins que nous recevons, ne devrions-nous pas commencer à mener cette réflexion, à nous pencher sur cette politique, l'évaluation stratégique environnementale, dans le cadre de notre étude de Kyoto?
Non seulement réussirions-nous à nous rapprocher de l'application du Protocole de Kyoto, mais nous réussirions aussi à aborder la question du développement durable dans son ensemble. Je pense qu'il faut retenir cette approche. Cela a été une des grandes conclusions d'un chapitre du rapport de la commissaire à l'environnement et au développement durable.
Croyez-vous que, plutôt que s'en tenir à l'approche quasi volontaire du gouvernement actuel, nous devrions imiter certains pays dont le gouvernement a adopté une approche réglementaire obligatoire quant à l'évaluation stratégique environnementale?
 (1235)
M. Dale Marshall: Je suis d'accord avec vous.
La David Suzuki Foundation a publié un rapport qui s'appelle Sustainability within a Generation. On y trouve les objectifs à atteindre dans toutes sortes de sphères relatives à l'environnement. Le gouvernement doit s'engager face à ces objectifs et mettre en oeuvre--comme vous dites--les politiques, les programmes et une évaluation régulière, pour savoir s'il est en mesure de respecter ces engagements.
En ce qui a trait aux changements climatiques, les données scientifiques font conclure qu'il faut au moins une diminution de 50 p. 100 de nos gaz à effet de serre. Certains ont compris qu'il fallait atteindre cet objectif dans une génération, dans 25 ans. Toutefois, on a besoin d'objectifs tout au long de ces années, et le gouvernement doit s'engager, mettre en oeuvre ces mesures, et faire régulièrement une évaluation pour voir s'il atteint ses objectifs ou non.
M. Bernard Bigras: Je comprends qu'il faut des moyens de contrôle pour voir si on atteint nos objectifs, mais la question se situe en amont de la décision. Avant de prendre une décision relativement à une mesure, qu'elle soit fiscale ou autre...
Prenons l'exemple du projet de loi C-48. On vient d'accorder 250 millions de dollars en incitatifs fiscaux, principalement à l'industrie pétrolière. Comment peut-on adopter une mesure comme celle-là alors que le gouvernement dit vouloir mettre en oeuvre le Protocole de Kyoto? N'aurait-il pas été adéquat, avant de déposer le projet de loi C-48, d'évaluer cette mesure, d'évaluer le projet de loi, pour voir si cela va dans le sens des engagements internationaux que prend le gouvernement et dans le sens de ce qu'il nous dit vouloir faire? Il ne faut pas adopter le projet de loi C-48 et ensuite voir si ce projet répond aux objectifs que nous nous sommes fixés. Je pense donc que cela doit être intégré à la décision, plutôt que de voir après coup la commissaire venir nous dire que le projet de loi qui a été adopté ne va pas dans le sens du développement durable.
Croyez-vous qu'il faut adopter au Canada une approche réglementaire, faire une loi de la directive de 1994, et que tous les ministères--que ce soit Transports Canada ou Agriculture Canada--soient tenus par la loi de respecter les éléments contenus dans l'approche et dans la directive de 1994?
M. Dale Marshall: Je vous répondrai rapidement que je suis entièrement d'accord avec vous. Le programme de développement durable au Canada, qui existe depuis plus de 10 ans maintenant, devrait faire exactement cela. Chaque fois que le gouvernement prend une décision à caractère financier ou en termes de programmes, il devrait y avoir une évaluation de ses effets sur la protection de l'environnement.
[Traduction]
Le président: Sur la même lancée, monsieur Bigras, on me rappelle que nous allons aussi entendre le témoignage de l'Agence canadienne d'évaluation environnementale ultérieurement. Il serait bon de lui poser aussi ce genre de questions.
Monsieur McGuinty.
M. David McGuinty (Ottawa-Sud, Lib.): Je vous remercie, monsieur le président, et merci beaucoup à nos deux témoins de leur présence parmi nous ce matin.
Monsieur le président, j'aimerais répondre aux propos de certains de mes collègues puis revenir sur certaines remarques des témoins.
J'aimerais répondre à ce que M. Trost a dit en premier, à savoir qu'il mettait en doute notre capacité d'appuyer certaines des instances des deux témoins. Ce n'est que justice. Il a soulevé des doutes non seulement au sujet des deux grands ensembles de témoins réunis ici cet après-midi, mais aussi de la société canadienne. Or, s'il y a quelque chose que les Canadiens savent bien, c'est que notre société ne consacre pas assez de ressources aux études scientifiques et économiques qui nous permettraient d'appuyer bon nombre de nos décisions.
Toutefois, les arguments de M. Trost deviennent carrément faux, et il trahit son ignorance du Protocole de Kyoto et de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, car ces deux documents disent de manière explicite, en ce qui a trait aux aspects scientifiques et économiques du changement climatique, qu'il n'existe pas de certitude absolue. De toute façon, ce n'est pas de certitude qu'il s'agit ici, mais bien de connaissance pleine et entière. Or, je vous demande, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité, quand la connaissance scientifique est-elle jamais pleine et entière?
À cet égard, monsieur le président, le Protocole de Kyoto est très clair. C'est pourquoi le gouvernement a décidé d'agir et de suivre les progrès scientifiques, y compris dans les sciences sociales, et particulièrement la capacité de modélisation propre aux sciences. Nous allons aussi suivre l'évolution économique et rectifier le cap à mi-parcours le cas échéant. Un gouvernement qui ne tiendrait pas compte des progrès économiques ou scientifiques serait inconséquent et irresponsable. Voilà comme première observation.
Maintenant, pour ce qui est des remarques arbitraires faites par notre député du NPD voulant que les libéraux ne résistent jamais à l'envie de faire des promesses, je répondrai que le NPD quant à lui ne résiste jamais à l'envie de proposer des coûts.
Cela n'avance guère notre cause que de blâmer le gouvernement, et celui-ci en particulier. N'oublions pas qu'au cours de la dernière décennie, il a créé le poste de commissaire à l'environnement et au développement durable—l'un des deux seuls de ce genre à exister au monde, a adopté la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, a adopté la Loi sur les espèces en péril, a été un chef de file en éco-efficience parmi les pays de l'OCDE, a signé le Protocole de Kyoto, d'ailleurs malgré les vives protestations du Parti conservateur et de son chef, a été à l'avant-garde de la création d'un Atlas mondial des vents, a créé la Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie, a considérablement investi dans les villes canadiennes, jusqu'à hauteur 100 milliards de dollars échelonnés sur 12 ans, a soutenu les fonds verts municipaux et fait encore beaucoup d'autres choses.
Le bilan de ce gouvernement est très positif. En dépit des affirmations de M. Allison, d'après lequel nous avons dépensé 3,7 milliards de dollars, si les membres du comité se donnent la peine de vérifier les chiffres, ainsi que je le leur recommande, ils verront que le gouvernement a affecté 3,7 milliards de dollars et en a dépensé 2 milliards. Je tenais simplement à rectifier les faits, monsieur le président.
Par ailleurs, j'aimerais enjoindre les témoins de garder deux choses à l'esprit lorsqu'ils tirent leurs conclusions et font des instances auprès du gouvernement et ailleurs dans notre pays. Premièrement, je n'ai pas encore observé de souci de concerter les appels à l'action de la part du gouvernement fédéral et les provinces.
À notre époque, à mon avis, la plupart des Canadiens se rendent compte qu'il n'y a qu'un seul contribuable, et que les différents gouvernements doivent collaborer, le gouvernement du Québec avec le gouvernement fédéral, par exemple, et aussi avec le gouvernement de l'Ontario, afin de réduire considérablement les gaz à effet de serre ainsi que le réclame la population. Les Canadiens de la région du Toronto métropolitain y tiennent particulièrement.
Voilà pour la première remarque à l'intention des témoins.
En deuxième lieu, je suis d'accord avec d'autres propos tenus plus tôt par le député du NPD, à savoir que les Canadiens ont beaucoup de difficultés à s'y retrouver dans toute cette question du changement climatique. À mon avis, ils ont de la difficulté à distinguer entre le changement climatique et la diminution de la couche d'ozone, entre le climat et le réchauffement climatique. À cet égard, les médias n'ont pas bien renseigné les Canadiens.
Par conséquent, plutôt que de parler de changement climatique, je propose qu'on discute d'énergie, étant donné que 86 % de tous les gaz à effet de serre rejetés dans l'atmosphère au Canada proviennent de l'exploitation, de la transformation et de la consommation de combustibles fossiles. Les Canadiens comprennent la question de l'énergie, mais non celle du réchauffement climatique. Compte tenu de cela, il est très difficile de se faire comprendre.
 (1240)
Si nous tenons à atteindre la population et à solliciter sa participation ainsi que vous le proposez, monsieur Marshall—et nous le devrions—il nous faut exprimer les choses de telle manière que citoyens et industriels puissent collaborer harmonieusement pour réduire les gaz à effet de serre. Je prie donc instamment les témoins d'aujourd'hui et tous les autres qui suivront de parler d'un débat énergétique plutôt que du changement climatique.
Je vous remercie, monsieur le président.
Le président: Je vous remercie, monsieur McGuinty.
Est-ce que l'un des témoins souhaite intervenir? Non?
Très bien, dans ce cas, la parole est à M. Cullen.
M. Nathan Cullen: C'est intéressant.
Hier soir, à la télévision, avec notre président et M. Mills, j'ai parlé de l'unité que notre comité peut créer. J'ai peut-être exagéré en affirmant que l'engagement de réduire les émissions de 20 % ayant mené à une augmentation de 20 % de ces mêmes émissions, c'est une promesse non tenue. J'ai peut-être mal compris ce que signifie une promesse. Cela dit, sur cette question, nous sommes du même avis ici. Il faut absolument qu'on agisse dès le prochain budget, tout en tenant compte des réformes financières dont nous avons besoin dans notre pays.
Mon collègue a soulevé quelque chose de très important. La longue liste n'était peut-être pas partielle, mais ça n'est pas l'étude du changement climatique qui est le problème le plus grave ici. Lorsqu'on ignore que faire, on étudie pour apprendre si on a raison de ne rien faire. J'ai participé à une table ronde avec deux ministres de l'Environnement des provinces, et ils m'ont dit et ont dit au public qu'ils attendent, que l'aspect interprovincial...et ici je permettrai à mes collègues du Bloc de me dire quel est l'état d'esprit des négociateurs du Québec. Quoi qu'il en soit, je me demande quel dirigeant doit prendre les devants, doit commencer à répondre, car les Canadiens, face au Défi d'une tonne et à tout le reste, s'efforcent de le savoir.
Vous avez mentionné les codes du bâtiment. Pensons à ce qui pourrait se passer à cet égard au cours des trois prochains mois. Pensez-vous que ce gouvernement fédéral ayant à sa tête un gouvernement minoritaire pourrait remplir le vide que je voie entre les deux niveaux de compétence? Que peut-on faire pour que les provinces entendent l'appel qui leur est lancé et y répondent toutes? En guise de prétexte pour s'abstenir d'agir, on peut toujours dire que les provinces ne réussiront pas à s'entendre. Qu'il s'agisse du prochain budget ou de ce qui pourrait se passer au cours des trois prochains mois en matière de réforme fiscale, est-ce que les provinces pourraient s'entendre sur certaines initiatives précises puis accepter de venir à la table pour résoudre ce qui nous paraît être un problème croissant?
 (1245)
M. Mark Rudolph: Je vais mentionner quelques domaines, d'abord à titre de porte-parole de la coalition, puis ensuite à titre général.
Je vais d'abord m'exprimer en porte-parole de la coalition. Il y a trois ans de cela, lorsqu'est arrivé le programme d'encouragement à la production d'énergie éolienne, ce que nous avons vu clairement, c'est que cela contribuait à créer un climat propice aux mesures environnementales, du moins pour certaines choses, et cela a plus tard encouragé les provinces à mettre en place des ensembles de normes relatives aux énergies renouvelables. Si vous donnez plus d'ampleur aux programmes d'encouragement à la production d'énergie éolienne, tout comme nous le recommandons, et que vous créez autre chose pour les autres énergies renouvelables, je ne serais pas surpris si l'on en faisait tout à coup beaucoup plus au niveau provincial au chapitre des normes pour le portefeuille des énergies renouvelables, et aussi dans les provinces où rien n'est fait à cet égard en ce moment.
Il y a autre chose qui peut en quelque sorte servir de modèle. Je ne veux pas m'inspirer du modèle américain en toute chose, mais comme vous le savez, aux États-Unis, c'est l'EPA qui règle ce genre de chose au niveau fédéral, et l'administration met en place des politiques que les États doivent observer. Les États les observent parce qu'on leur donne de l'argent pour le faire. Ils peuvent dépasser aussi les niveaux prescrits s'ils le veulent.
Au sujet du changement climatique ou de diverses autres questions environnementales, je suis d'avis que si le gouvernement fédéral voulait donner l'exemple, il pourrait créer un partenariat fédéral-provincial, un fonds de partenariat, ou peu importe comment vous l'appelleriez, et dire : « Pour nous aider à respecter les engagements que nous avons pris à l'échelle internationale, vous pourriez faire x »—c'est Mark Rudolph qui parle, et non la coalition—« il faut que vous fassiez x pour que nous puissions nous acquitter de nos obligations, et pour ce faire, voici de l'argent. »
Je ne sais pas en quoi consisterait toutes ces choses, mais en réponse à ce que M. McGuinty a dit, un exemple est cet engagement que l'Ontario a pris de fermer les centrales au charbon. C'est tout un engagement. La simple fermeture de Nanticoke, une centrale de 8 x 5 mégawatts, ce qui correspond à 4 000 mégawatts, réduirait de 14 mégatonnes les émissions de gaz à effet de serre, si mon souvenir est exact. C'est beaucoup de mégatonnes. Est-ce que l'Ontario mérite une aide financière pour faire cela, de telle sorte qu'elle pourrait investir dans d'autres énergies plus propres? Je ne crois pas que ce soit une mauvaise politique gouvernementale. Je crois que vous pouvez créer, que vous devriez créer ce genre de partenariats, et vous devriez avoir de l'argent sur la table pour les créer.
Le président: Monsieur Cullen, permettez. Je vais dire un mot. Je veux qu'on passe à quelqu'un d'autre, il vous reste donc une minute, après quoi je céderai la parole à Mme Ratansi, puis de nouveau à M. Jean.
Monsieur Cullen.
M. Nathan Cullen: Je permettrai à M. Marshall d'employer cette minute.
M. Dale Marshall: D'accord. Je suis d'accord pour dire qu'il faut qu'il y ait une coopération fédérale-provinciale. Quand le gouvernement fédéral met de l'argent sur la table, ça aide, mais le gouvernement fédéral doit être sérieux dans ses propres champs de compétence : pour les automobiles et divers autres domaines. Il doit être sérieux lorsqu'il a en fait autorité pour agir. Il a manifestement autorité pour agir dans le domaine des grands émetteurs finaux. S'il était sérieux pour ce qui concerne l'efficacité des électroménagers, il enverrait un signal aux provinces pour leur faire savoir que c'est un problème sérieux.
M. Nathan Cullen: Une dernière question, rapidement. Un bon nombre d'entreprises, particulièrement dans le secteur minier, viennent nous voir pour nous dire que ça fait des années qu'ils réduisent leurs émissions. Est-ce que vous seriez favorables—et répondez simplement par un oui ou un non—à ce qu'on leur accorde un crédit quelconque pour les grands émetteurs finaux, disons pour les cinq dernières années, étant donné ce que ces sociétés ont fait pour réduire les émissions de gaz à effet de serre dans leur industrie? Est-ce que vous me suivez?
Une fonderie vient me voir et me dit, écoutez, nous avons fait diminué nos émissions de gaz à effet de serre, mais en vertu du règlement actuel, on ne nous accorde pas le moindre crédit pour ça. Cela va donc nous coûter maintenant beaucoup plus cher pour en faire plus. Est-ce qu'on a songé à cela? Il s'agit de droits acquis, dans un sens. Diriez-vous que c'est une bonne idée?
 (1250)
M. Dale Marshall: Je ne m'oppose pas du tout à ce que des crédits...
Le président: Vous pouvez répondre par un oui ou un non. Nous devrons peut-être y revenir plus tard, monsieur Cullen, étant donné que nous manquons de temps et que ce n'est pas vraiment juste envers les autres membres du comité.
M. Nathan Cullen: Ils hochent la tête. Ça me suffit.
Le président: Mme Ratansi, suivie de M. Jean.
Mme Yasmin Ratansi (Don Valley-Est, Lib.): Merci, monsieur le président, et merci à nos témoins.
Je crois que nous voulons tous nous assurer d'avoir un environnement plus propre, de léguer une société plus propre à nos petits enfants. Nous sommes les intendants de ce monde.
On dit que notre comité s'occupe d'économie viable. Et pourquoi? Parce que lorsque l'on s'occupe d'environnement et que l'on ne parle pas de l'autre côté de la médaille, les gens cessent de vous écouter. C'est pourquoi il faut parler de « l'impact économique de l'environnement » pour que nous nous engagions à demeurer compétitifs tout en nous préoccupant de l'environnement.
Vous avez dit qu'on allait créer 20 000 emplois. Vous avez parlé du coût des divers secteurs où nous pourrions apporter des améliorations. Avez-vous fait une analyse coût-avantage de ces domaines où nous allons perdre des emplois—par exemple, dans le secteur automobile? Vous voyez, quand on trace un bilan et qu'on ne montre qu'un seul côté de la solution, on doit savoir ce qu'il y a de l'autre côté pour qu'il y ait équilibre. Je veux donc savoir si vous avez fait cela, c'est ma première question.
Deuxième question, on ne cesse de blâmer le gouvernement. Et je n'avais jamais cru que nous étions dans un État... Je viens d'un État policier, et je ne pensais donc pas que le Canada était un État policier aussi. Mais est-ce que l'éducation du consommateur n'est pas une responsabilité fondamentale pour nous tous? Donc, s'il y a un marché, une offre et une demande pour les VUS, que faisons-nous? Et je vois que les industries pétrolières et gazières sont représentées dans votre groupe, mais je ne vois pas de représentants de l'industrie automobile. D'où viennent donc ces tensions? J'aimerais qu'on réponde à cette question.
Troisième questions, vous parlez d'incitatifs fiscaux pour la TTC. Il a fallu environ quatre ans pour bâtir la ligne North York. Quand a-t-on ratifié Kyoto? Un an et demi? Donc combien de temps faut-il pour mettre en place les infrastructures...? Soyons pratiques, et tâchons de trouver des solutions pratiques. Nous croyons tous à cela, mais j'aimerais vraiment savoir d'où vous partez et comment nous pouvons tous travailler ensemble.
M. Dale Marshall: En ce qui concerne l'emploi, vous avez mentionné l'industrie automobile. On ne perd pas d'emplois en rendant les véhicules plus efficients. En fait, le syndicat qui représente ces travailleurs, les Travailleurs canadiens de l'automobile, est en faveur des améliorations au rendement du carburant, a déclaré obligatoires les améliorations au rendement du carburant. Il a même produit sa propre stratégie pour écologiser son parc automobile.
Le Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier est le plus grand syndicat du secteur énergétique au Canada, et il est favorable au Protocole de Kyoto parce que c'est pour lui une question d'emploi et de santé. Est-ce que Kyoto va nous faire perdre et gagner des emplois? Oui, cela arrive tous les jours dans notre économie. Donc la question est de savoir si la lutte au changement climatique est une priorité suffisamment importante pour que l'on cible dans quels secteurs on va perdre des emplois et pour que l'on atténue de tels effets. J'ai l'absolue conviction que cela peut être fait. Et en fait, la plupart des travailleurs du Canada croient que cela doit être fait. Il semble que ce soit le secteur industriel, et non pas les gouvernements ou les travailleurs eux-mêmes, qui résistent à l'action en matière du changement climatique.
En ce qui concerne l'éducation, absolument, l'éducation publique est un élément essentiel dans ce genre de transition, mais elle doit être encouragée. Il faut faire savoir au public que la grande industrie fait sa part et que le gouvernement fait la sienne. Et l'on ne voit aucun de ces signaux.
Mme Yasmin Ratansi: Des sociétés comme TransAlta et BioCan y participent depuis 1970. Ils considèrent l'environnement comme une fiducie. Avez-vous travaillé avec ces gens-là? Vous accusez l'industrie, mais avez-vous travaillé avec l'industrie? Est-ce que toutes les industries sont mauvaises? Est-ce que toutes les industries ne font pas leur travail? Soyons sérieux.
 (1255)
M. Dale Marshall: Bien sûr, ce n'est pas vrai. Il y a divers secteurs... et M. Rudolph pourra répondre après cela. Il fait partie d'une coalition composée de toutes sortes d'industriels qui manifestement sont pour. Il y en a d'autres, dans d'autres secteurs, qui sont contre. Ce nous disons, c'est qu'il faut donner des incitatifs à ceux qui veulent vraiment faire ce qu'il faut faire et assurons-nous que chacun prend ses responsabilités, y compris ceux qui sont résistants à la chose.
Le président: Désolé madame Ratansi, M. Rudolph a signalé qu'il voulait dire ce qu'il pensait de tout cela.
Veuillez être bref, s'il vous plaît.
M. Mark Rudolph: Je serai très bref.
À mon avis, et je parle en mon nom propre, ce ne sont pas toutes les grosses sociétés qui sont des gros méchants pollueurs, tout comme ce ne sont pas toutes les ONG qui sont des extrémistes verts prêts à embrasser les arbres. Certaines grosses sociétés sont extrêmement progressives, même s'il y a évidemment quelques dinosaures, si je peux me permettre. Personnellement, je pense que les membres de notre coalition font partie des grandes sociétés progressives. Ils ont fait beaucoup de bonnes choses au niveau de l'environnement.
Donner une image si noir et blanc, c'est un petit peu étrange, honnêtement. Vous comprenez le concept du développement durable, mais d'une certaine façon, vous revenez en arrière, à une époque où ce concept de développement durable n'avait même pas été présenté. Les choses ne sont pas en noir et blanc comme cela.
Vous avez posé des questions sur les sociétés automobiles et autres. L'an dernier, General Motors était un membre observateur de notre coalition tout comme Toyota. Auparavant, Dofasco a été un membre de la coalition, DuPont également, tout comme TransAlta.
Beaucoup de grandes sociétés font de très bonnes choses. Malheureusement, les médias aiment les controverses. C'est ce dont on entend parler et c'est ce qu'on voit dans les journaux. Bonne nouvelle, pas de nouvelle. C'est pour cela que vous n'êtes pas au courant de certaines des choses que nous faisons.
Le président: Merci.
Merci, madame Ratansi.
Monsieur Jean.
M. Brian Jean: Tout d'abord, monsieur Marshall, j'apprécierais si vous pouviez me fournir un exemplaire du rapport sur les listes d'emplois que vous avez mentionnées et également votre curriculum vitae, indiquant vos titres de compétence pour faire l'ébauche d'un tel rapport.
Deuxièmement, monsieur McGuinty, je suggérerais, avec tout le respect que je vous dois, que je n'ai jamais vu ce gouvernement prendre des mesures efficientes ou efficaces, sauf pour parrainer l'effondrement de ce pays, en toute honnêteté. C'est ma propre opinion sur le commentaire que vous avez fait plus tôt.
Je voudrais dire également que je suis ce que l'on considère un environnementaliste passionné, mais je pense que, à moins que vous n'ayez été voir les sables bitumineux, vous ne pouvez apprécier leur valeur. J'ai visité ces sites depuis 1967. J'ai vu la ville passer de 2 500 habitants à 70 000 aujourd'hui. J'ai visité les sites de Suncor, de Syncrude et de Albion Sands. Suncor n'existerait pas aujourd'hui si le gouvernement ne l'avait pas aidé lorsque l'investissement dans les sables bitumineux a commencé dans les années 1966. Sans l'investissement du gouvernement, cette société ne serait pas là.
Honnêtement, je voudrais dire très clairement aux téléspectateurs et à toute personne dans cette salle que, en Alberta, 130 000 emplois sont directement reliés à l'industrie du pétrole et du gaz. Vingt milliards de dollars par année, provenant de l'industrie albertaine du pétrole et du gaz rentrent dans les coffres des gouvernements fédéral et provincial. Suggérer que nous ne devrions pas aider l'industrie du pétrole et du gaz, par l'intermédiaire d'incitatifs gouvernementaux, me semble absolument ridicule, à cause de la taille gigantesque des projets là-bas. Tant que vous ne l'avez pas vu, vous ne pouvez absolument pas vous rendre compte de ce dont il s'agit.
Je crois fermement qu'une partie de votre présentation est tout à fait inexacte, parce que, pour être tout à fait honnête, si les sables bitumineux n'étaient pas rentables, l'économie s'arrêterait là. Suncor et Syncrude, par exemple, sont tous les deux des énormes investisseurs dans le développement durable. Je sais ce qu'ils font pour la collectivité. Ils sont des participants actifs à nombre de programmes verts. Ils sont des participants actifs dans des programmes pour les employés. Ils donnent énormément à la collectivité, à l'Alberta et au pays. Je trouve qu'il est répréhensible de votre part de suggérer, simplement à cause des ramifications à long terme, que de ne pas investir dans de nouveaux projets sur les sables bitumineux ne causerait pas un tort profond à l'économie.
Ce que je veux dire, et c'est la question que je vous pose, c'est que je crois qu'il y a une façon difficile et une façon facile pour nous d'approcher Kyoto, et de le mettre en oeuvre. La façon difficile, d'après moi, est une approche à long terme qui serait efficace et efficiente, et qui passerait par des mesures de réglementation et de technologie de la consommation, tels que des programmes de recyclage nationaux, des codes du bâtiment, la construction de véhicules et l'application de cette loi. Je pense que cela stimulerait l'économie, cela créerait des emplois, puis nous serions dans une bonne position pour être des exportateurs dynamiques de ces technologies à d'autres pays.
Ma question, monsieur Marshall, après 10 minutes de cabotinage, quelle information précise avez-vous sur ce type de technologies, sur ces types de progrès que nous pourrions faire par l'intermédiaire de mesures de réglementation des consommateurs, plutôt que par l'intermédiaire des gros émetteurs de pollution? Possédez-vous des documents de référence que vous pourriez suggérer au comité ou à moi personnellement?
· (1300)
M. Dale Marshall: En réalité, tout le monde doit prendre ses responsabilités dans cette affaire-là. On demande à l'industrie de réduire ses émissions de 55 mégatonnes. Elle est responsable de 50 p. 100 des émissions, mais 55 mégatonnes, c'est bien en deçà de notre engagement de 50 p. 100.
J'ai visité Fort McMurray. J'ai vu les sables bitumineux. J'ai également parlé aux gens qui travaillent là. Et je vais faire référence une fois encore au sous-ministre des Ressources naturelles, qui a dit qu'en ce qui concernait le pétrole provenant des sables bitumineux, cela coûterait entre 20 et 25 ¢ du baril pour être conforme à Kyoto. Ce n'est pas un poids très imposant pour l'industrie des sables bitumineux. Je reconnais tout à fait la valeur économique que notre industrie du pétrole et du gaz possède au Canada, pour notre économie et pour nos collectivités. Ce que je dis, c'est que cette industrie doit également prendre ses responsabilités, ce qui veut dire être d'accord avec l'engagement qui a été pris, et faire sa part.
En ce qui concerne l'industrie, le fruit le plus accessible est le secteur du pétrole et du gaz. Les mesures destinées à réduire les émissions au coût le plus bas sont de loin celles qui touchent le secteur du pétrole et du gaz, et c'est ce secteur qui accuse la croissance la plus élevée en termes d'émissions depuis 1990. Tout ce que je dis, c'est que tout le monde doit se sentir responsable. Les consommateurs, les Canadiens, tous doivent faire leur part, ainsi que les grosses industries.
M. Brian Jean: Si l'on parle de fruit accessible, c'est celui que les Canadiens mangent tous les jours et c'est celui qui fournit notre substance quotidienne. Je voulais juste suggérer, monsieur Marshall, qu'il serait bien meilleur de fournir des incitatifs à l'industrie du pétrole et du gaz, par l'intermédiaire du gouvernement, si l'industrie était prête à se conformer à certaines conditions. L'une de ces conditions, bien sûr, serait certaines normes en termes d'émissions. C'est simplement ce que je pense.
M. Trost a également un commentaire à faire.
M. Bradley Trost: Juste pour finir tout cela rapidement, et tout en respectant ma question d'origine, messieurs, vous semblez être capables de tourner pas mal autour du pot, alors je vais poser une question très directe. Seriez-vous prêts à soumettre à ce comité et à mon bureau les curriculum vitae des chercheurs, des scientifiques et des économistes qui vous ont fourni ces données et ces informations et qui travaillent avec vos organisations?
M. Marshall est d'accord pour soumettre son curriculum vitae afin que nous puissions juger de ses antécédents. Est-ce que M. Rudolph serait prêt à le faire également?
M. Mark Rudolph: Sincèrement, je serais très heureux de vous fournir mon curriculum vitae à tout moment. Je ne sais pas, parmi les 14 sociétés et les milliers de milliers de gens qui y travaillent, qui aurait délégué...
M. Bradley Trost: Mais, monsieur, il s'agit de...
Le président: Et il s'agit de la présidence, Brad. Veuillez adresser vos remarques par l'intermédiaire de la présidence.
M. Bradley Trost: Monsieur le président, avec votre respect, je voudrais juste une réponse par oui ou par non. Nous avons besoin de ces informations afin de comprendre et de juger de la validité des données qui nous ont été présentées. C'est la raison pour laquelle je le demande. J'ai l'habitude de voir des témoins qui comparaissent et qui nous fournissent toutes sortes d'informations, mais comme je l'ai remarqué pour l'étude d'impact sur l'Artique, seuls deux des 250 scientifiques étaient en réalité qualifiés d'une façon ou d'une autre pour pouvoir faire des commentaires sur ce qui avait été publié dans la presse.
Le président: Vous comprenez le pourquoi de cette question. D'une manière générale, nous ne pouvons forcer des témoins à nous fournir ces informations, mais reconnaissant la raison pour laquelle M. Trost a posé cette question, si vous pouvez nous fournir les curriculum vitae et accéder à notre demande, c'est quelque chose que nous apprécierons.
M. Mark Rudolph: Pour chaque membre dirigeant de la coalition, je serais heureux d'envoyer un courriel leur demandant leur curriculum vitae. Je ne peux garantir cependant que je les obtiendrai.
M. Bradley Trost: Non, mais vous allez essayer. C'est de bonne guerre.
M. Mark Rudolph: Si je puis me permettre, dans la même ligne d'idées que l'histoire du greffe en bâton de hockey et les climatologues, en ce qui concerne les deux messieurs qui ont écrit l'article, il y a un économiste et un géologue. Ni l'un ni l'autre ne sont climatologues, donc j'ai quelques problèmes avec votre demande.
M. Bradley Trost: Non, monsieur, ce n'est pas juste, car j'ai cité le scientifique en chef du groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat pour les Nations Unies, le scientifique en chef—pas le bureaucrate en chef—et vous avez continué. Nous n'allons pas être d'accord. Vous pensez que je suis vieux jeu et moi je pense que vous êtes des Luddites. Chacun son opinion. C'est une différence de politique. Mais j'aimerais voir ce qui est sous-jacent...
M. Mark Rudolph: Je pense que le président devrait...
Le président: M. Trost et M. Rudolph, je vais devoir vous donner un conseil judicieux. Vous avez fait cette demande. Vous l'avez fait clairement. Les témoins ont indiqué que, parce qu'ils comprennent la nature de votre demande et la raison pour laquelle vous l'avez faite, ils vont essayer d'obtenir ces informations si elles sont disponibles.
J'aimerais en rester là. J'aimerais exercer mon autorité, puisque nous en arrivons à la fin de la séance.
Je voudrais résumer ainsi. L'objectif de ce comité est de considérer le parcours dans lequel nous nous sommes engagés en ce qui concerne Kyoto et savoir s'il faut corriger le cap. Nous avons demandé à des témoins experts ou à des témoins ayant des opinions se sont déjà avérées pertinentes par rapport à ce parcours. L'objectif ultime, tel que je le comprends, et si je peux le formuler au nom du comité, est d'examiner tout cela et de faire des suggestions sur la façon de procéder. C'est peut-être lors de la première phase, c'est peut-être lors de la seconde. Nous participons à un exercice d'évaluation assez exhaustif visant à déterminer comment nous en sommes arrivés où nous sommes, où nous aimerions aller, ainsi que les cartes qui seront nécessaires à ce parcours.
J'aimerais dire qu'en temps que président, j'essaie d'éviter le type d'ambiance que nous avons dans la période de questions. J'espère que nous pouvons nous assurer que le comité respecte son mandat et que, dans la mesure du possible, nous ne tombions pas dans la partisanerie.
· (1305)
M. Bradley Trost: J'ai une question de privilège personnel, monsieur le président.
J'apprécie ce que vous essayez de faire, mais vous avez permis à M. McGuinty de m'attaquer de façon directe et personnelle il y a quelques minutes et vous n'êtes pas intervenu. De la part d'un président, ce n'est pas une position impartiale. Je déposerai ce fait.
Le président: J'apprécie votre intervention et je la prendrai en délibération. Telle n'était pas mon intention. Mon intention était d'être aussi équitable que possible, de laisser les personnes utiliser leur temps de manière à ce qu'ils correspondent aux objectifs de ce comité. Il est vrai que de temps à autre, les membres de ce comité peuvent ressentir qu'on est allé trop loin. Je vais tâcher de remettre de l'ordre à mesure que nous procédons ici.
Je puis vous assurer, monsieur Trost, comme je le dirais à tout le monde, je vais toujours essayer d'être équitable là-dessus. Je crois que cela s'est produit des deux côtés aujourd'hui. Nous essaierons de faire mieux lors de la prochaine réunion.
Je remercie nos témoins et je vous remercie, mesdames et messieurs. Vous pouvez comprendre qu'il y a énormément de spécialisation et de connaissance parmi les membres de ce comité. Nous vous remercions de vos commentaires et de vos réponses aux questions. Merci d'être venus.
Le séance est levée.