FINA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité permanent des finances
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mardi 12 avril 2005
Á | 1110 |
Le président (M. Massimo Pacetti (Saint-Léonard—Saint-Michel, Lib.)) |
M. Paul-Henri Lapointe (sous-ministre adjoint, Direction de la politique économique et fiscale, ministère des Finances) |
Á | 1115 |
Á | 1120 |
Á | 1125 |
Á | 1130 |
Á | 1135 |
Á | 1140 |
Á | 1145 |
Le président |
M. Paul-Henri Lapointe |
Á | 1150 |
M. Charlie Penson (Peace River, PCC) |
Le président |
L'hon. Maria Minna (Beaches—East York, Lib.) |
Le président |
M. Paul-Henri Lapointe |
Á | 1155 |
Le président |
M. Charlie Penson |
M. Paul-Henri Lapointe |
M. Peter DeVries (directeur général, Cabinet du sous-ministre, ministère des Finances) |
M. Charlie Penson |
M. Paul-Henri Lapointe |
 | 1200 |
M. Charlie Penson |
M. Paul-Henri Lapointe |
M. Peter DeVries |
M. Charlie Penson |
M. Paul-Henri Lapointe |
M. Charlie Penson |
M. Paul-Henri Lapointe |
M. Charlie Penson |
M. Paul-Henri Lapointe |
Le président |
M. Pierre Paquette (Joliette, BQ) |
 | 1205 |
M. Paul-Henri Lapointe |
M. Pierre Paquette |
M. Paul-Henri Lapointe |
M. Pierre Paquette |
M. Paul-Henri Lapointe |
 | 1210 |
M. Pierre Paquette |
M. Paul-Henri Lapointe |
Le président |
L'hon. Maria Minna |
M. Paul-Henri Lapointe |
 | 1215 |
L'hon. Maria Minna |
M. Paul-Henri Lapointe |
M. Peter DeVries |
 | 1220 |
L'hon. Maria Minna |
Le président |
M. Brian Pallister (Portage—Lisgar, PCC) |
M. Paul-Henri Lapointe |
 | 1225 |
M. Brian Pallister |
M. Paul-Henri Lapointe |
M. Brian Pallister |
M. Paul-Henri Lapointe |
M. Brian Pallister |
Le président |
M. Don Bell (North Vancouver, Lib.) |
M. Peter DeVries |
 | 1230 |
M. Don Bell |
M. Peter DeVries |
M. Don Bell |
M. Peter DeVries |
M. Don Bell |
Le président |
M. Guy Côté (Portneuf—Jacques-Cartier, BQ) |
 | 1235 |
M. Paul-Henri Lapointe |
Le président |
M. Charlie Penson |
M. Paul-Henri Lapointe |
M. Peter DeVries |
M. Charlie Penson |
M. Paul-Henri Lapointe |
 | 1240 |
M. Charlie Penson |
M. Peter DeVries |
M. Charlie Penson |
Le président |
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ) |
 | 1245 |
M. Paul-Henri Lapointe |
M. Yvan Loubier |
M. Paul-Henri Lapointe |
M. Yvan Loubier |
 | 1250 |
M. Paul-Henri Lapointe |
M. Yvan Loubier |
Le président |
M. Paul-Henri Lapointe |
M. Yvan Loubier |
Le président |
M. Charlie Penson |
M. Paul-Henri Lapointe |
Le président |
M. Paul-Henri Lapointe |
Le président |
M. Paul-Henri Lapointe |
Le président |
M. Paul-Henri Lapointe |
Le président |
M. Paul-Henri Lapointe |
Le président |
 | 1255 |
M. Paul-Henri Lapointe |
Le président |
M. Paul-Henri Lapointe |
Le président |
M. Paul-Henri Lapointe |
Le président |
M. Paul-Henri Lapointe |
Le président |
M. Paul-Henri Lapointe |
Le président |
CANADA
Comité permanent des finances |
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l |
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l |
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 12 avril 2005
[Enregistrement électronique]
* * *
Á (1110)
[Français]
Le président (M. Massimo Pacetti (Saint-Léonard—Saint-Michel, Lib.)): Bonjour à tous. Nous allons commencer maintenant parce qu'il semblerait que la présentation de M. Lapointe soit assez longue.
Nous sommes ici pour étudier, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, les prévisions fiscales fédérales. Nous recevons MM. Lapointe, DeVries et Rochon, qui sont tous trois du ministère des Finances. Bienvenue.
Vous disposez de 30 minutes, mais il serait apprécié que, dans la mesure du possible, vous procédiez plus rapidement.
M. Paul-Henri Lapointe (sous-ministre adjoint, Direction de la politique économique et fiscale, ministère des Finances): Je vais procéder le plus rapidement possible, monsieur le président.
D'abord, j'aimerais vous remercier de nous avoir invités à comparaître devant le Comité permanent des finances.
Je vais présenter brièvement les collègues qui m'accompagnent aujourd'hui. Peter DeVries est conseiller principal auprès du sous-ministre des Finances, et Paul Rochon est directeur de la Division de la politique fiscale.
[Traduction]
J'aimerais aborder trois choses. Premièrement, très rapidement, je vous donnerai un aperçu de notre processus de prévision. Deuxièmement, je vous parlerai du risque dont nous tenons compte quand nous mettons à jour nos prévisions budgétaires, et j'aborderai aussi les récentes prévisions faites par les quatre économistes du secteur privé qui ont comparu devant le comité il y a quelques semaines. Enfin, je vous ferai part de quelques remarques au sujet du CBO.
[Français]
Je vais d'abord dire quelques mots sur le processus des prévisions. Lorsque nous mettons à jour nos projections financières, nous réalisons d'abord une enquête auprès des économistes du secteur privé. Nous faisons cette enquête tous les trimestres. Nous obtenons leurs projections sur la croissance économique et celle du PIB, de même que sur l'inflation, les taux d'intérêt et d'autres variables économiques importantes. La moyenne de ces projections nous sert ensuite de base lorsque nous faisons nos propres projections financières.
Ensuite — et c'est une chose que nous faisons chaque automne —, nous rencontrons un groupe consultatif composé des chefs économistes des banques ainsi que des chefs des quatre firmes de modélisation canadiennes. Nous discutons avec eux des résultats de l'enquête effectuée auprès des économistes du secteur privé et des risques économiques qu'ils envisagent. Lorsque les données financières portant sur l'année précédente sont disponibles, nous discutons de l'interprétation que nous faisons des résultats, de même que des développements financiers de l'année en cours.
Nous devons ensuite procéder à une allocation. Par exemple, nous obtenons du secteur privé des données sur la croissance du produit intérieur brut nominal. Par la suite, il faut faire une allocation pour les différentes composantes, soit les bénéfices des sociétés, les salaires, etc. Cette partie du processus est quand même assez importante. Nous utilisons ensuite ces données avec les modèles pour générer nos projections financières sur la base des comptes nationaux, puis nous convertissons ces projections financières sur la base des comptes publics.
À l'automne, nous utilisons les quatre modèles du secteur privé pour traduire des hypothèses économiques en projections financières, et nous faisons une moyenne de ces projections. Par la suite, nous convertissons ces chiffres sur la base des comptes publics, et nous rapportons ensuite cela dans la mise à jour à l'automne.
Pour le budget, nous traduisons nous-mêmes les hypothèses économiques en projections financières.
[Traduction]
Une fois le budget déposé, nous suivons régulièrement l'évolution de la conjoncture économique au cours de l'année. Le principal événement économique, si vous me passez l'expression, c'est la publication des comptes nationaux du premier trimestre à la fin de mai. C'est important, parce que Statistique Canada révise aussi ses estimations de la croissance économique pour l'année précédente. Cela nous aide nous, et les économistes aussi, à comprendre la conjoncture économique actuelle mais surtout, les perspectives économiques.
Bien entendu, nous examinons aussi les comptes nationaux qui sont publiés le reste de l'année. Ainsi, les comptes nationaux du deuxième trimestre, qui sont publiés à la fin d'août, serviront de base pour la mise à jour de l'automne, et les comptes nationaux du troisième trimestre serviront de base pour le budget.
Á (1115)
En outre, nous vérifions les indicateurs économiques tels l'emploi, le chômage et les ventes de détail, à titre d'exemple, ainsi que les données relatives au commerce international.
Du côté budgétaire, le principal facteur, c'est évidemment les résultats financiers définitifs pour l'exercice se terminant à la fin de mars. Si les résultats sont meilleurs, nous devons évaluer dans quelle mesure il s'agit de facteurs ponctuels et dans quelle mesure il s'agit d'autres facteurs dont les effets dureront pour le restant de l'année sinon pour des années à venir. Cela nous aide aussi à interpréter les résultats définitifs de l'exercice en cours.
Nous examinons aussi les résultats financiers mensuels publiés dans La revue financière. Les résultats financiers sont importants non seulement parce qu'ils donnent une idée de la performance escomptée pour l'année, mais aussi parce qu'ils sont parfois des indicateurs des révisions que Statistique Canada apportera à son analyse de la performance économique. C'est que Statistique Canada considère souvent les statistiques financières comme indicateur de la force du revenu des particuliers, par exemple, ainsi que des traitements et salaires.
Lorsque nous faisons notre mise à jour financière à l'automne, nous utilisons normalement les résultats compilés jusqu'au mois de septembre, c'est-à-dire pour les six premiers mois de l'année, tandis que pour le budget, selon le moment où le budget sera déposé, nous nous servons des résultats compilés jusqu'au mois de novembre ou de décembre.
Dans le cadre de notre surveillance continue, nous rencontrons régulièrement des représentants de l'ARC pour discuter des faits nouveaux concernant le revenu. En outre, nous sommes régulièrement en rapport avec le Bureau du contrôleur général au Conseil du Trésor et le Bureau du vérificateur général pour évaluer les obligations. Par ailleurs, nous suivons de près les dépenses ministérielles autorisées par le Parlement et, enfin, nous sommes continuellement en contact avec les sociétés d'État, dont les livres sont incorporés dans les états financiers du gouvernement. Il est important que nous sachions ce qui se passe et les conséquences éventuelles de tout cela pour nos résultats financiers.
Pour illustrer l'importance de la surveillance mensuelle et le soin avec lequel nous étudions les résultats mensuels, je vous donnerai à titre d'exemple les recettes provenant de l'impôt des sociétés. Les sociétés sont tenues de verser des acomptes provisionnels mensuels basés sur l'impôt de l'année précédente ou une évaluation de l'impôt pour l'année en cours. Dans le cas des sociétés dont l'exercice financier se termine en octobre, principalement les banques, si le bénéfice se révèle supérieur aux estimations qui ont servi de base pour le calcul des acomptes provisionnels mensuels, des ajustements s'imposeront. En effet, elles devrons nous verser ce que nous appelons un paiement de règlement en décembre. En revanche, les sociétés non financières dont l'exercice financier se termine en décembre sont tenues de verser un paiement de règlement en février ou en mars.
Par conséquent, une bonne partie des recettes provenant de l'impôt des sociétés n'est perçue que durant les trois ou quatre derniers mois de l'exercice. Si vous regardez les données relatives aux quatre derniers mois, par exemple, vous constaterez que les recettes provenant de l'impôt des sociétés durant les quatre derniers mois de l'année peuvent représenter environ 60 p. 100 des recettes totales de l'année. Certaines années, elles peuvent avoisiner les 35 p. 100 des recettes totales pour l'année provenant de l'impôt des sociétés. En raison des paiements de règlement effectués durant ces derniers mois, nous devons faire attention quand nous interprétons les données mensuelles.
À ce propos, je voudrais signaler que ces paiements sont effectués durant l'exercice financier. Ils ne sont pas effectués l'année suivante comme l'a laissé entendre Jim Stanford lors de sa récente comparution devant le comité.
Permettez-moi de passer maintenant à la gestion du risque et au risque avec lequel nous devons composer quand nous établissons des prévisions budgétaires. Premièrement, je vous rappellerai que le solde budgétaire équivaut à la différence entre deux sommes substantielles. Quand nous faisons des projections budgétaires, nous nous fions aux prévisions économiques. Nous savons que les économistes peuvent parfois se tromper sur les perspectives de l'économie, et nous devons donc traduire des prévisions économiques en projections budgétaires et pour ce faire, nous devons suivre plusieurs étapes. Cet exercice risque d'ajouter une variation entre les projections budgétaires et la performance économique. D'autre part, il y a l'ajustement que nous devons apporter en appliquant la comptabilité d'exercice.
Á (1120)
Comme vous le savez, d'après les résultats de l'année dernière, nous avons enregistré des recettes totales déclarées de 186 milliards de dollars et des dépenses de 177 milliards de dollars. Or, en réalité, l'assiette des recettes que nous devons prévoir est supérieure à ce montant, car c'est l'État fédéral qui perçoit les impôts, notamment l'impôt sur le revenu des particuliers, pour le compte de neuf des dix provinces, l'impôt des sociétés pour six des dix provinces et ainsi de suite. De plus, nous percevons les cotisations au titre du RPC. Le champ d'erreur peut donc être plus grand qu'on le croit souvent.
Même chose du côté des dépenses : les dépenses inscrites au budget sont déclarées sur une base nette, mais aux fins de prévisions, nous devons examiner les dépenses brutes. L'assiette totale des recettes et des dépenses que nous devons prévoir devrait dépasser légèrement 150 milliards de dollars, comme vous pouvez le voir sur ce graphique. Une erreur de 1 p. 100 du mauvais côté pourrait se traduire par un écart de 4,6 milliards de dollars dans le solde budgétaire, soit plus que la somme de la réserve pour éventualités et des mesures de prudence économique.
Je voudrais ajouter que d'aucuns estiment que pour le rapport revenu-PIB, il est raisonnable de postuler, à des fins de prévision, que ce rapport est stable. Or, dans une économie de 1,3 billion de dollar, une erreur de un dixième de un pour cent dans ce rapport pourrait se traduire par un changement de 1,3 milliard de dollars au chapitre des recettes. Par conséquent, une erreur minime dans la projection du rapport revenu-PIB signifierait une erreur substantielle dans le solde budgétaire. Comme le montre le graphique suivant, le rapport revenu-PIB n'est pas stable. En effet, il a chuté considérablement depuis 1999-2000 par suite de réductions d'impôt, et il a continué de baisser légèrement dans les années suivantes sous l'effet d'allégements fiscaux supplémentaires, neutralisés en partie par la force de l'économie.
Permettez-moi de passer maintenant à l'incertitude associée à la prévision économique.
Á (1125)
[Français]
Comme je le disais, nous utilisons la moyenne des prévisionnistes du secteur privé. Les économistes ont beaucoup de difficulté à prévoir les points de retournement à l'intérieur du cycle économique, de même que les phases d'accélération de la croissance économique. En période d'expansion rapide, les économistes ont tendance à sous-prévoir la croissance économique.
Comme je le mentionnais plus tôt, les données économiques que les économistes utilisent pour faire leurs projections sont sujettes à des révisions historiques assez importantes. Or, il est difficile de prévoir ce qui va arriver aujourd'hui si on n'arrive pas à faire une bonne lecture des développements économiques actuels ou récents.
Il faut aussi considérer la composition des revenus. Comme je l'ai précisé plus tôt, les économistes du secteur privé nous font part d'un chiffre relatif à la croissance économique. Cependant, aux fins de la projection financière, il faut avoir une idée de la façon dont sont répartis entre autres les bénéfices des sociétés et les salaires ainsi que les dépenses de consommation et les dépenses d'investissement. Ces facteurs influent sur les taxes que l'on perçoit.
Pour illustrer ces changements, je préciserai qu'entre 1997 et 2004, les bénéfices des sociétés, en pourcentage du produit intérieur brut nominal, ont augmenté de 4,7 p. 100. Ce chiffre peut paraître assez minime, mais dans le contexte économique actuel, cela représente une différence d'environ 60 milliards de dollars additionnels. Par ailleurs, la part consacrée aux salaires et aux revenus d'investissement a diminué. Comme le taux d'imposition moyen sur les bénéfices des sociétés est nettement supérieur au taux moyen sur l'impôt personnel, un changement comme celui-là va certainement contribuer à accroître plus rapidement nos revenus.
Le graphique que voici indique les projections qui ont été faites par les économistes du secteur privé et les chiffres qui ont été publiés. Précisons, à titre d'exemple, que dans le budget de 1994, les économistes prévoyaient pour l'année une croissance économique de 4,4 p. 100. En fait, la croissance du revenu nominal a été de 6 p. 100, ce qui représente une différence de 1,6 point de pourcentage. Si on fait la moyenne pour l'ensemble de ces 10 années, on se rend compte que la croissance a été sous-estimée d'environ 1 p. 100 par année. Le même phénomène s'applique aux taux d'intérêt, mais la différence est dans ce cas moins importante, à l'exception de certaines années, dont 2001.
Comme je le disais plus tôt, traduire nos prévisions économiques en prévisions budgétaires constitue également une source d'incertitude. La première chose que je dois signaler à cet égard est que les projections économiques du secteur privé sont faites sur la base des comptes nationaux. Or, il s'avère que dans les comptes nationaux, à cause des buts de cette comptabilité, on ne comptabilise ni les revenus de pension ni les gains en capitaux. Ces derniers, comme vous le savez, sont extrêmement volatiles. Donc, si on s'en tient uniquement à la croissance du revenu sur la base des comptes nationaux, en période où il y a des gains de capitaux importants, on sous-estime la croissance de l'assiette fiscale. L'inverse s'applique lorsqu'il y a des pertes de capital.
[Traduction]
Il faut ensuite préparer les comptes publics à partir des projections des comptes nationaux.
Voici très brièvement la différence qui existe entre les deux systèmes de comptabilité :les comptes publics constituent un état détaillé de la position financière des activités financières du gouvernement tandis que les comptes nationaux mesurent la production et les revenus courants des divers secteurs de l'économie, des particuliers et du gouvernement tout au long de l'exercice.
Permettez-moi maintenant de vous expliquer les principales différences entre les deux systèmes de comptabilité. Le premier décrit le périmètre des comptes nationaux. Les comptes nationaux ne tiennent pas compte de certaines sociétés d'État qui sont incluses dans les comptes publics parce qu'elles dépendent dans une grande mesure du financement provenant du gouvernement.
Á (1130)
Il y a des différences appréciables dans le traitement des immobilisations. Les provisions pour les responsabilités légales ne sont pas consignées dans les comptes nationaux. Par exemple, les responsabilités au titre des Autochtones ne seraient pas comptabilisées dans les comptes nationaux.
Les comptes nationaux font toutefois état des fondations et des fiducies. La transaction serait consignée quand la fiducie ou la fondation effectue un versement au bénéficiaire final. Dans les comptes publics, la transaction serait comptabilisée quand le gouvernement émet un chèque à la fondation ou à la fiducie.
Nous consignons aussi dans les comptes publics le passif au titre des avantages sociaux des employés tels le coût des soins de santé et les prestations versées aux anciens combattants. Nous devons comptabiliser le coût intégral de ces prestations et ne pas les comptabiliser uniquement selon le mode de répartition.
Nous devons apporter quelques ajustements aux comptes nationaux quand nous les utilisons pour préparer les comptes publics. Nous en avons eu un bon exemple lors de la mise à jour économique de l'automne dernier où nous avons dû apporter des ajustements aux comptes nationaux. Nous devons constamment examiner les deux méthodes de comptabilité et effectuer un rapprochement des projections élaborées pour chacune des deux méthodes.
Nous devons ensuite évaluer les changements de comportement résultant de modifications apportées au régime fiscal et notamment les dispositions du régime actuel qui permettent aux particuliers ou aux sociétés de reporter le versement de l'impôt. La principale différence entre notre approche et celle du CBO tient au fait que quand nous mettons en vigueur une réduction de l'impôt, par exemple, nous comptabilisons le coût mais nous ne tenons pas compte de la réaction éventuelle des particuliers à ces réductions d'impôt car il n'existe aucun modèle économique qui nous permet de mesurer l'amplitude de la réaction ni de déterminer à quel moment elle se produira. Je crois que les Américains ont constaté, pour l'avoir fait dans le passé, que cela peut donner de très mauvais résultats. Souvenez-vous qu'à l'époque de Reagan, l'administration américaine projetait une augmentation considérable des revenus après avoir annoncé des réductions d'impôt, projections qui ne se sont jamais réalisées.
Nous devons aussi tenir compte du montant que les particuliers contribueront à leurs REER puisque cela détermine le montant d'impôt collecté en fin d'exercice.
Enfin, la Loi de l'impôt sur le revenu permet aux sociétés de reporter leurs pertes prospectivement sur 10 ans ou rétroactivement sur trois ans. Cela estompe le lien entre les bénéfices et l'impôt payable pour l'année.
Selon nos estimations, il y a à l'heure actuelle 120 milliards de dollars de pertes qui n'ont pas été déclarées aux fins de l'impôt. Il est difficile d'établir le lien entre les pertes cumulatives et les bénéfices puisque les sociétés qui déclarent des bénéfices une année ne sont pas nécessairement celles qui avaient dans le passé un important report de pertes. Il est difficile d'établir un lien entre le report prospectif des pertes et les bénéfices déclarées au cours d'une année.
Il suffit de prendre le cas de la TPS pour illustrer l'absence de corrélation entre l'activité économique et le montant des recettes fiscales. Comme vous pouvez le voir si vous vous reportez à la dernière colonne de ce tableau intitulé « Assiette fiscale », la croissance est relativement stable mais il y a de grandes variations dans le montant de TPS reçu pendant l'année. Cela tient au fait qu'il n'y a pas de concordance parfaite entre les rentrées brutes et les remboursements que nous devrons effectuer quand les sociétés réclament le crédit de taxe sur les intrants. Cela entraîne de grandes variations dans les recettes provenant de la TPS.
Á (1135)
La dernière catégorie de risque dont j'aimerais traiter est celui lié à la comptabilité d'exercice et au fait que nous devons constater les revenus pour l'exercice au cours duquel ils sont gagnés et non quand l'argent est effectivement reçu. Dans le cas de l'impôt sur le revenu que paient les particuliers, nous constatons une importante rentrée de fonds aux mois d'avril et de mai. Toutefois ces rentrées appartiennent à l'exercice précédent de sorte que nous devons effectuer les rajustements au courant de l'été.
La diapositive suivante illustre ce phénomène pour les quelques dernières années. Le tableau illustre les ajustements que nous devons apporter pour comptabiliser l'impôt sur le revenu des particuliers selon la méthode de la comptabilité d'exercice. Comme vous pouvez le constater, les revenus variaient entre -5 milliards de dollars en 2001-2002 à +3 milliards de dollars l'an dernier. Cela crée énormément d'incertitude quand on examine les données financières mensuelles et que nous tentons de projeter le résultat final en fin d'exercice.
Les autres éléments des revenus sont constatés principalement selon la méthode de la compatibilité de caisse mais là aussi nous devons effectuer des rajustements jusqu'à la fin du mois de mai afin de nous assurer que les revenus sont attribués au bon exercice.
Nous devons ensuite constater les charges qui, comme je l'ai dit plus tôt, ne sont pas constatées dans les comptes nationaux. Ces charges incluent les obligations du gouvernement au plan de l'environnement, des Autochtones ainsi que les autres obligations légales. Nous devons constituer des provisions pour l'encours des prêts et des garanties de prêts et nous devons tous les ans effectuer des rajustements au titre des charges associées aux avantages sociaux des employés du secteur public fédéral.
Permettez-moi de faire très rapidement quelques commentaires sur les résultats du dernier exercice. Si vous vous reportez à l'écart entre les résultats et les projections du budget, vous constaterez que l'écart est surtout imputable aux revenus plus élevés que prévu. L'impôt sur le revenu des particuliers a rapporté 1,4 milliard de dollars de plus que prévu, l'impôt sur le revenu des sociétés, 1,5 milliard de plus que prévu et les autres revenus, 1,3 milliard de dollars. Les dépenses ont été de 2 milliards de dollars inférieurs aux projections, surtout en ce qui a trait aux dépenses de programmes directes en raison surtout des crédits ministériels non utilisés.
Si vous vous reportez aux chiffres dont nous disposions quand nous avons préparé les prévisions budgétaires en mars 2004, vous constaterez que nous projetions un taux de croissance pour l'année de 2 p. 100. Le taux de croissance réel a été de 4,7 p. 100. Si vous examinez les détails, vous verrez que la croissance des revenus provenant de l'impôt sur le revenu des particuliers a augmenté de 1,6 p. 100 pour la période se terminant en janvier. Nous comptions obtenir de meilleurs résultats pour les autres mois de l'année mais nous avons fait mieux que nos projections et j'ai mentionné plus tôt que nous avons dû effectuer un rajustement en fin d'exercice qui s'élevait à 3 milliards de dollars pour l'an dernier.
La hausse des revenus provenant de l'impôt sur le revenu des sociétés s'établissait à 24,8 p. 100 en raison surtout des importants versements que nous avons reçus en décembre du secteur bancaire; nous ne savons pas au juste quelle était la source de ces paiements considérables.
Nous avions projeté une croissance des bénéfices d'environ 10 p. 100 en 2003. Cela étant, nous avons prévu une croissance de 16,7 p. 100 mais les résultats ont été meilleurs que les projections; les revenus provenant de l'impôt sur le revenu des sociétés ont été de 1,5 milliard de dollars supérieurs aux projections.
Nous avons prévu des recettes provenant de la TPS inférieures à celles de l'exercice précédent parce que le total des remboursements croissait plus rapidement que les rentrées brutes. Nous avons projeté un renversement de la tendance. De fait, la tendance s'est renversée mais la reprise a été meilleure que prévu.
Á (1140)
Les « autres revenus » aussi, qui provenaient surtout des sociétés d'État, étaient un peu plus élevés que ce que nous avions connu l'année précédente, et nous nous attendions à ce que ces effets se relâchent dans les derniers mois de l'année. Le contraire s'est produit. Les autres revenus ont continué d'augmenter, principalement du fait des provisions pour prêts par rapport aux prévisions des sociétés d'État.
Permettez-moi de passer aux prévisions récentes qui ont été présentées au comité comparativement aux prévisions budgétaires. On peut voir que le Conference Board et François Vaillancourt s'attendent tous deux à un excédent beaucoup plus imposant en 2004-2005, 2005-2006 et 2006-2007. Le CCPA prévoit un excédent beaucoup plus élevé, soit 7,2 p. 100 et 7,4 p. 100 de plus.
Leurs prévisions prennent toutes en compte les résultats financiers de janvier. Les résultats financiers de janvier montrent une croissance dans les revenus de 7,1 p. 100 comparativement aux 5,2 p. 100 que nous prévoyons dans le budget.
L'impôt sur le revenu des particuliers rapportait plus que ce qu'on attendait, avec 7,3 p. 100, mais cela est dû à la période de versement supplémentaire de janvier, et nous nous attendons à ce que cela diminue dans les mois à venir. Nous croyons qu'une croissance de 5 p. 100 dans l'impôt sur le revenu des particuliers est une estimation qui demeure parfaitement raisonnable pour l'année.
L'impôt des sociétés correspond dans une large mesure à ce que nous avions prévu dans le budget.
La taxe sur les produits et services rapporte davantage, et c'est encore une fois parce que les remboursements sont effectués à un rythme beaucoup moins rapide que les recettes brutes, comme nous le signalons dans le budget. Nous nous attendons à ce que cette tendance se renverse dans les mois à venir, mais si ce n'est pas le cas, nos recettes seront supérieures cette année mais inférieures l'an prochain parce qu'il faudra bien effectuer les remboursements à un moment donné, et ce sera cette année ou l'an prochain.
On note une croissance dans les « autres revenus », de 10,2 p. 100, qui est attribuable dans une large mesure à la vente de Petro-Canada, chose qu'on ne reverra pas.
Avec l'appréciation du dollar canadien, qui va abaisser les gains sur les opérations de change, nous nous attendons à une croissance de 8,6 p. 100 pour l'année.
Si vous regardez du côté des dépenses, vous allez voir que les prestations versées aux aînés correspondent tout à fait à ce que nous attendions. Les prestations d'assurance-emploi ne sont qu'un peu plus faibles que ce que nous prévoyions. La grande différence se situe dans les transferts aux provinces et dans les charges directes des programmes. À noter ici le fait que les résultats jusqu'en janvier ne reflètent pas les paiements de santé et de péréquation résultant des accords de septembre et d'octobre dernier, et les charges directes des programmes ne reflètent pas non plus les autres mesures qui ont été annoncées dans le budget, qui feront sentir leurs effets lorsque la loi aura été votée.
Je vais passer à chaque prévision individuelle, en commençant pas celle du Conference Board. Ce que l'on remarque ici, c'est qu'on a cette année des recettes quelque peu plus élevées provenant de l'impôt sur le revenu des particuliers, mais c'est pas mal la même chose en 2005-2006 et plus bas en 2006-2007. On prévoit des recettes plus fortes provenant de l'impôt sur les sociétés, car selon ces estimations, les profits des entreprises seront plus élevés que ce à quoi on s'attendait au moment où le budget a été déposé.
On prévoit également des « autres revenus » quelque peu plus élevés, en dépit du fait que ses prévisions tiennent compte de l'appréciation du dollar canadien. Je pense qu'il est parti de l'hypothèse que les autres revenus, si l'on exclut la vente de Petro-Canada, augmenteront proportionnellement au PIB nominal, mais nous croyons que cette croissance sera bien sûr plus faible du fait que nos gains sur les opérations de change seront moindre.
Á (1145)
Une chose à remarquer—et on le voit aussi dans les autres prévisions—c'est qu'on prévoit des cotisations à l'assurance-emploi plus faibles mais aussi des prestations d'assurance-emploi beaucoup plus faibles que ce que nous prévoyons dans notre budget. Étant donné l'annonce du budget et notre hypothèse selon laquelle nos recettes correspondront aux prestations versées, il y a une certaine contradiction ici. Si les prévisionnistes s'attendent à ce que les prestations soient beaucoup plus faibles, les cotisations d'assurance-emploi qu'ils prévoient devraient être également plus faibles pour tenir compte du fait que...
Le président: Monsieur Lapointe, pour les trois ou quatre prochains points, nous pourrions peut-être aller plus vite, parce que nous allons manquer de temps.
M. Paul-Henri Lapointe: Je devrais peut-être passer au prochain point.
Ils prévoient un excédent beaucoup plus élevé en 2005-2006 et en 2006-2007. Vous allez voir que cela est essentiellement attribuable aux recettes plus élevées provenant de l'impôt sur les sociétés. Tout comme nous, ils s'attendent à une croissance plus faible au niveau des profits des entreprises, mais ils prévoient qu'on appliquera moins de pertes accumulées aux bénéfices des entreprises au cours des deux prochaines années. Ils partent de l'hypothèse qu'à ce stade-ci du cycle, les pertes accumulées ont déjà été déclarées. Mais comme on l'a vu plus tôt, ce n'est pas le cas, je crois donc que leurs prévisions sont manifestement risquées ici, si l'on garde à l'esprit aussi la validité des revenus provenant de l'impôt sur les sociétés.
[Français]
Je vais maintenant parler brièvement de François Vaillancourt. Ce dernier a fait des projections relatives aux quatre composantes des revenus que voici et a utilisé les projections du budget dans le cas de toutes les autres composantes, incluant les dépenses. Ce qui est remarquable ici, c'est la croissance de l'impôt des individus. Ces projections indiquent une augmentation des recettes de l'ordre de 5 milliards de dollars en 2004-2005, et de 4,7 milliards de dollars en 2005-2006.
D'ailleurs, la prochaine diapositive montre que ses projections dépassent nettement celles des autres prévisionnistes. Cela s'explique par le fait qu'en faisant la conversion de ses projections de la base des comptes nationaux à celle des comptes publics, il a utilisé un facteur d'ajustement de 3,4 ou 3,5 milliards de dollars. Cet ajustement, que nous avions appliqué dans le cadre de la mise à jour, n'est plus approprié aujourd'hui.
Á (1150)
[Traduction]
M. Charlie Penson (Peace River, PCC): Monsieur le président, rappel au Règlement. Je sais que c'est un bon témoignage que nous entendons et un bon exposé des fonctionnaires du ministère des Finances, mais je crains que nous manquions de temps pour poser des questions, ce qui est la raison principale, à mon avis, pour laquelle nous recevons des fonctionnaires aujourd'hui. J'avais cru comprendre que vous aviez demandé un exposé d'une demi-heure, et cet exposé prend plus de temps. J'aimerais qu'on passe aux questions des députés, monsieur le président.
Le président: Nous avons commencé avec 15 minutes de retard parce que les députés sont arrivés en retard. Nous n'avons pas entendu d'exposé comme celui-là, et étant donné la complexité du sujet, je crois que ça vaut la peine de l'entendre. S'il le faut, nous les convoquerons de nouveau pour qu'ils répondent à nos questions, mais je crois que ça vaut la peine d'écouter l'exposé, parce qu'ils se sont donné du mal pour...
L'hon. Maria Minna (Beaches—East York, Lib.): Il est sûr que j'aimerais l'entendre.
Le président: ...et ça va bien.
Monsieur Lapointe, continuez.
[Français]
M. Paul-Henri Lapointe: Je prendrai au plus cinq minutes.
J'aimerais soulever un autre point concernant M. Vaillancourt. Le prochain graphique indique une différence assez marquée quant aux cotisations à l'assurance-emploi. M. Vaillancourt attribue cette baisse à des mesures budgétaires du dernier budget. Or, à ma connaissance, il n'y a pas eu de mesures comme celles-là qui justifieraient une réduction des cotisations à l'assurance-emploi pour 2004-2005. Comme vous pouvez le voir, ses estimations concernant les cotisations à l'assurance-emploi pour l'an prochain de même que pour 2006-2007 sont nettement inférieures à la moyenne établie par les autres.
[Traduction]
Je terminerai très rapidement en parlant du CBO, parce que je sais qu'on s'intéresse beaucoup ici au CBO. Pour ce qui est de savoir ce que fait le CBO, comme vous le savez, il s'agit d'un bureau indépendant qui conseille le Congrès. Il produit également des mises à jour semestrielles des projections économiques et financières pour les dix prochaines années. Il analyse le budget qui a été déposé, il établit les coûts de toutes les dépenses pour les lois et les mesures qui ont été adoptées par le Congrès, et il analyse les résultats financiers mensuels.
Mais quand on compare ses prévisions à celles de l'OMB, qui est le prévisionniste de l'administration, il n'y a pas beaucoup de différence. Certaines années, ses prévisions sont meilleures; d'autres années, elles sont moins bonnes. Si vous comparez les deux lignes sur le tableau qu'on voit ici, en moyenne, ses prévisions ne sont pas supérieures à celles de l'OMB. Au cours de la période se terminant en 1999-2000, les deux instances ont sous-évalué l'excédent budgétaire; au cours des trois années qui ont suivi, les deux ont sous-évalué le déficit, et l'an dernier, tous deux ont surévalué le déficit.
Enfin, je vais simplement vous donner une idée de ce qui s'en vient pour ce qui est des mises à jour et des calculs ultimes. Nous allons nous pencher sur les résultats de mars; ils seront disponibles au début de mai. Nous allons examiner l'encaisse pour toute l'année. En avril et en mai, nous aurons les paiements sur production et nous allons effectuer les remboursements, qui seront tous vérifiés au cours de l'été. À la fin de l'été, nous allons calculer les rajustements de l'impôt, et une fois que nous aurons tous les chiffres, ceux-ci seront examinés par le vérificateur général. Ces chiffres paraîtront dans le rapport financier annuel qui est publié à la mi-septembre ou au début d'octobre, et les résultats ultimes sont normalement présentés dans les Comptes publics du Canada plus tard à l'automne.
Je tiens à vous remercier pour votre attention.
Á (1155)
Le président: Merci, monsieur Lapointe.
M. Penson.
M. Charlie Penson: Merci, monsieur le président. Je voudrais également remercier les représentants du ministère des Finances qui sont ici aujourd'hui. Je sais, messieurs, que vous avez de longs et éminents états de service au ministère, une composante importante de la fonction publique.
Monsieur le président, j'espère que les fonctionnaires qui sont ici admettront que ce que nous essayons de faire, c'est de mieux nous informer afin que nous ayons les chiffres nécessaires pour pouvoir prendre les décisions de politique publique qui sont importantes pour nos concitoyens. Les chiffres concernant le Parlement, comme je me plais à les appeler, ont leur importance pour nous.
Je voudrais également remercier les fonctionnaires pour l'aide qu'ils nous ont apportée au sujet des résultats du quatrième trimestre. Je pense que cela a son importance et j'espère que nous allons pouvoir continuer à compter sur la même coopération à mesure que nous avancerons dans nos travaux.
Monsieur le président, comme mon temps est compté, je voudrais poursuivre promptement. J'aurais essentiellement trois questions à poser à M. Lapointe.
Pour commencer, j'aimerais savoir, à votre avis, quand nous pourrions avoir les données définitives pour l'exercice qui vient de se terminer.
Je vais peut-être vous poser toutes mes questions en un seul bloc et vous laisser y répondre à votre guise. Afin d'arriver à un ensemble de données historiques rétrospectives, nous vous demanderions de revoir les tableaux de référence pour 2004 en donnant les états bruts de manière à produire une ventilation. Nous aimerions que vous remontiez aussi loin en arrière que possible, mais pour nous, l'exercice 2003-2004 a beaucoup d'importance afin que nous puissions avoir avec plus de transparence la ventilation des recettes et des dépenses.
Je vais m'arrêter ici en attendant que vous répondiez à ces deux premières questions.
M. Paul-Henri Lapointe: En règle générale, les données définitives sont rendues publiques vers la fin d'août ou de septembre car, comme je l'ai déjà dit, il faut reprendre toutes les données de l'été et procéder aux ajustements comptables nécessaires sur le plan fiscal, c'est-à-dire intégrer les recettes fiscales et les obligations, par exemple, et ces chiffres doivent être revus par le vérificateur général. Pour certains exercices, il y a eu des retards, surtout depuis que nous avons adopté la comptabilité d'exercice étant donné que cette méthode présentait un degré de complexité auquel nous n'étions pas accoutumés. Mais je vous dirais que ces chiffres définitifs seront disponibles d'ici la fin août ou le début septembre.
Pour ce qui est des détails dont vous parlez, vous les trouverez dans les Comptes publics, où ils sont généralement mentionnés vers la fin du moins d'octobre.
M. Peter DeVries (directeur général, Cabinet du sous-ministre, ministère des Finances): En fait, monsieur le président, il existe dans les Comptes publics un sommaire décennal qui donne tous les chiffres bruts.
La vérificatrice générale avait par ailleurs signalé qu'à son sens, la présentation des chiffres bruts et des chiffres nets dans les Comptes publics prêtait à confusion, de sorte que l'an dernier, nous avons décidé que les Comptes publics ne donneraient que les chiffres bruts. Si vous consultez la partie 1 du volume 1 des Comptes publics, vous y trouverez un résumé pour 10 ans qui donne tous les éléments de recettes et tous les éléments de dépenses en chiffres bruts.
M. Charlie Penson: Je vous remercie.
Monsieur Lapointe, vous avez dit que les chiffes définitifs doivent tenir compte des ajustements dus aux engagements. De quel ordre de grandeur sont ces ajustements? S'agit-il de 10 p. 100? Quel en serait le pourcentage? Quel serait le donnant-donnant?
M. Paul-Henri Lapointe: Vous avez vu pour l'an dernier que les ajustements que nous avons effectués pour l'impôt sur le revenu des particuliers se sont concrétisés par une augmentation de 3 milliards de dollars. Nous avons dû procéder à d'autres ajustements après le 31 mars pour d'autres éléments de recettes comme la TPS et l'impôt sur le revenu des entreprises. S'agissant des dépenses, nous devons chiffrer les engagements pris par les ministères avant la fin mars, mais aussi les autorisations budgétaires utilisées, ce que nous faisons également pendant l'été. L'an dernier, cela s'est chiffré à 3,5 milliards de dollars environ, ce qui vous donne donc une idée du genre d'ajustements dont nous parlons ici.
Ensuite, il faut prévoir les éléments de passifs éventuels comme l'environnement, les recours judiciaires autochtones et les prêts. Certaines années, cela donnera un résultat positif. Admettons par exemple que nous nous étions attendus à un passif dans tel ou tel dossier, mais que la question a pu être réglée à moindre frais, il est évident que certaines des provisions que nous avions inscrites dans les livres ne seront pas nécessaires. Il est difficile de vous donner un chiffre parce que cela varie d'une année à l'autre.
 (1200)
M. Charlie Penson: Merci, monsieur Lapointe.
Autre chose maintenant : permettez-moi de revenir à ce que vous venez de nous dire concernant la publication dans les Comptes publics et au fait que ce que nous cherchons, ce sont les ajustements dans les tables de référence. C'est cela que nous voudrions avoir.
M. Paul-Henri Lapointe: Oh, mais cela se trouve généralement dans les rapports financiers annuels.
M. Peter DeVries: Monsieur le président, l'élément clé est ici qu'il nous faut pas mal de temps pour pouvoir préparer les résultats et y mettre la dernière main. Comme l'a dit M. Lapointe, ces chiffres doivent ensuite être vérifiés par le Bureau du vérificateur général du Canada, et le rapport de celui-ci à ce sujet n'est généralement pas disponible avant le début septembre.
Ce retard s'explique en grande partie par le fait qu'il faut totaliser toutes les recettes fiscales. L'Agence canadienne du revenu commence à traiter les données concernant l'impôt sur le revenu des particuliers en utilisant son évaluation du 31 mai, de sorte qu'elle doit attendre cette date avant de pouvoir avoir accès aux dossiers, ce qui ne lui est généralement possible au minimum qu'à la fin juin. À partir de là, il lui faut au moins quatre ou cinq semaines pour traiter les données afin de pouvoir les analyser et les faire vérifier soit à l'interne, soit par le Bureau du contrôleur général et le Bureau du vérificateur général. Voilà donc pourquoi un laps de temps aussi grand s'écoule entre le 31 mars et la date à laquelle nous sommes véritablement en mesure de rendre publics ces chiffres, c'est-à-dire à un moment donné en septembre.
M. Charlie Penson: Voilà qui est fort utile et je vous en remercie.
Je voudrais maintenant vous demander quels sont les problèmes que nous pourrions selon vous rencontrer ici au comité si nous tentions de créer un bureau indépendant chargé d'effectuer des prévisions. Nous savons qu'il y a déjà d'autres pays qui ont un bureau comme celui-là. Cela présenterait-il des difficultés selon vous? Y a-t-il des problèmes que nous risquons de rencontrer en cours de route, monsieur Lapointe?
M. Paul-Henri Lapointe: En toute modestie, je vous dirais que quiconque effectue des prévisions—je vous ai parlé des risques que nous courons nous-mêmes et nous avons vu l'expérience du Congressional Budget Office —il y aura toujours des différences entre les prévisions et les résultats réels, de sorte qu'il ne faudrait pas nourrir trop d'espoir...
M. Charlie Penson: J'en conviens, monsieur Lapointe, mais nous savons d'après nos entretiens avec les représentants du CBO que dans les deux cas, les écarts sont aussi élevés pour les positifs que pour les négatifs. Il n'y a pas uniquement des écarts dans un sens. De sorte qu'effectivement, les organismes qui font les prévisions peuvent se tromper, je comprends fort bien cela car c'est là la nature des choses, mais cela ne se produit pas toujours dans un seul sens seulement.
Pourrait-il selon vous y avoir des problèmes? Aux États-Unis, la loi ordonne à l'administration de fournir des données brutes au CBO. Faudrait-il faire la même chose ici?
M. Paul-Henri Lapointe: Nous serions tout à fait disposés à travailler avec l'organisme qui établirait les prévisions, quel qu'il soit, et à lui expliquer comment nous interprétons les résultats, un peu comme cela se fait aux États-Unis.
Au moment du budget, cela aurait été difficile, voire impossible, compte tenu de notre charge de travail.
Nous verrons ce que Tim O'Neil va recommander. Il doit entre autres étudier comment il serait possible d'améliorer le processus prévisionnel et les prévisions proprement dites.
M. Charlie Penson: Quand comptez-vous recevoir son rapport?
M. Paul-Henri Lapointe: Le mois prochain.
Le président: Je vous remercie, monsieur Penson.
M. Paquette, puis ce sera au tour de Mme Minna.
[Français]
M. Pierre Paquette (Joliette, BQ): Merci, monsieur le président.
Merci pour vos présentations. Il est toujours très instructif de connaître votre point de vue.
Avant de revenir au sujet principal du débat, j'aimerais poser deux questions techniques.
J'ai constaté que dans le cadre des prévisions budgétaires, on utilisait pour calculer la croissance de l'indice des prix du produit intérieur brut. Au cours des dernières années, ce dernier a toujours été inférieur à l'indice des prix à la consommation. On sait que les salaires sont négociés en fonction de l'indice des prix à la consommation, qui affiche une augmentation d'environ 2 p. 100. Or, cela a fait qu'on a sous-estimé la croissance nominale. J'ai pu le constater quand M. Manley a fait sa mise à jour à Halifax. Il y avait alors des problèmes liés au SRAS et à des incendies en Colombie-Britannique, et M. Manley a décidé de diminuer la croissance réelle sans toucher au taux d'inflation. Pour cette raison, nous nous sommes retrouvés avec un surplus beaucoup plus important que prévu.
Je comprends que pour calculer la croissance nominale sur un plan macroéconomique, on doive utiliser l'indice des prix à la consommation. Il me semble cependant que cela crée un biais lorsqu'il s'agit de calculer l'assiette fiscale. Par exemple, du fait que le dollar canadien est fort, le taux de change favorise actuellement la baisse des taux d'inflation et de l'indice des prix du produit intérieur brut.
J'aimerais savoir comment vous gérez cette situation. J'ai constaté que dans le cas de deux budgets au moins, cela avait donné lieu à une importante sous-estimation de la croissance des revenus.
 (1205)
M. Paul-Henri Lapointe: Pour déterminer l'assiette fiscale, il est important d'utiliser un indice des prix qui soit le plus global possible. Pour cette raison, l'indice dégonfleur du PIB est celui qui est approprié. Il est évident que certaines années, il croît moins rapidement. Par exemple, si les prix des matières premières chutent, il est fort probable que la croissance du dégonfleur du PIB sera moindre. Cette façon de procéder reflète beaucoup mieux la croissance de l'assiette fiscale que si on avait recours à l'indice des prix à la consommation. Ce dernier n'est qu'une composante.
M. Pierre Paquette: Je suis d'accord avec vous. Toutefois, on devrait peut-être établir un indice des prix propre à la dynamique budgétaire plutôt que de se fier à l'indice des prix du PIB. Vous avez d'ailleurs mentionné que les matières premières n'avaient pas nécessairement d'effet sur la croissance ou la non-croissance de l'assiette fiscale. Je vous suggère de regarder de ce côté. Je peux vous dire qu'en ce qui concerne le cas de M. Manley, j'aurais été en mesure de prévoir exactement le surplus parce que j'avais utilisé l'indice des prix à la consommation plutôt que l'autre indice cette année-là. Le phénomène s'est confirmé l'année suivante également.
À la page 6, vous parlez du solde budgétaire et de l'écart entre deux grands chiffres. J'imagine que vous soulevez cette question pour montrer qu'aussi bien à l'égard des revenus qu'à celui des charges, il n'est pas toujours possible de tout prévoir. Pour ce qui est des revenus, on voit qu'il y a eu une importante sous-estimation. Dans le cas des charges, s'agit-il des charges brutes qui ont suivi les décisions prises dans le cadre des budgets subséquents?
Par exemple, M. Chrétien avait annoncé à la Conférences des premiers ministres de janvier 2003 que s'il y avait un surplus, deux milliards de dollars additionnels seraient consacrés à la santé. Est-ce que cette somme a été imputée au budget auquel elle devait être imputée?
M. Paul-Henri Lapointe: Il s'agissait de l'année financière 2003-2004.
M. Pierre Paquette: Quand on gonfle cela, cela fausse un peu la comparaison. Lorsque le gouvernement sait en fin d'année, soit au mois de mars, qu'il aura des surplus additionnels, il est évident que le temps est venu de régler certains problèmes. On l'a vu dans le cas de M. Martin.
Le fait de savoir qu'on aura des surplus additionnels a comme effet de gonfler après coup les dépenses brutes. Cela réduit par le fait même les surplus imprévus. En poussant plus loin l'analyse, j'aimerais pour ma part qu'on élimine les effets des décisions politiques prises après coup. Le même phénomène s'est produit cette année dans le budget de M. Goodale.
La question suivante est plus fondamentale. Le Fonds monétaire international a publié son rapport en mars dernier. On y précisait que parmi les pays de référence, le Canada affichait la plus importante erreur moyenne dans ses prévisions budgétaires et qu'il était le seul pays à afficher systématiquement une importante sous-estimation de ses soldes budgétaires. Comment avez-vous réagi, au ministère, face à cette assertion du Fonds monétaire international? C'est un rapport récent: il date de mars 2005.
M. Paul-Henri Lapointe: D'abord, je dois dire que j'ai trouvé excellentes l'analyse des processus de prévision réalisée par le Fonds monétaire international de même que les comparaisons qu'il a établies à l'égard de la performance des différents pays. Je pense que cela sera très utile à M. O'Neill lorsqu'il va préparer son rapport.
Il est important de noter que le Fonds monétaire international a émis plusieurs commentaires, le premier étant qu'au cours des sept dernières années, la croissance économique du Canada a régulièrement excédé ce qui avait été prévu par les économistes, autant du secteur public que privé. Il note aussi que l'économie canadienne, plus que celle des autres pays pris en considération, est exposée à une importante volatilité, notamment en raison de sa plus grande dépendance envers les matières premières.
Lorsqu'il compare ces pays entre eux, il note également que ceux qui sont sujets à une plus grande volatilité ont tendance à être plus prudents dans leurs projections économiques et financières. Il y a là une forme de logique. Le rendement du Canada s'est avéré supérieur à ce que tout le monde avait prédit pour cette période. Comme je l'ai mentionné dans ma présentation, on a sous-estimé la croissance, mais le fait que la situation soit plus volatile ici que dans bien d'autres pays où l'on fait des projections économiques et financières doit inciter à la prudence.
 (1210)
M. Pierre Paquette: Le budget tient déjà compte de cela. On a une réserve pour éventualités, et on a même ajouté une mesure de prudence économique. Normalement, cela devrait faire en sorte que les facteurs de prudence soient inclus dans l'évaluation de ces réserves. Ces dernières augmentent à mon avis un peu artificiellement avec les années, de façon à cacher l'importance des surplus. Cependant, votre réponse laisse entendre qu'en fin de compte, la malchance a frappé le ministère. Au cours des dernières années, les prévisions du Bloc québécois et même du Centre canadien de politiques alternatives ont toujours été plus exactes que celles du ministère en ce qui concerne les surplus. Je ne veux pas dire par là que ce fut toujours le cas. Vous avez été plus malchanceux que nous.
M. Paul-Henri Lapointe: Bien sûr, certains ont obtenu de meilleurs résultats que nous. C'est d'ailleurs pour déterminer si nous pouvons améliorer nos projections économiques que nous procédons à l'examen de nos méthodes de prévision.
Cela étant dit, je reviens à ce que je disais plus tôt. Nous avons connu une période assez particulière: une très forte croissance prévalait et, au même moment, la part des bénéfices des sociétés augmentait. Comme je l'ai mentionné, le taux d'imposition est plus élevé que dans les autres secteurs d'activité économique. Qui aurait pu prédire que les bénéfices des sociétés atteindraient aujourd'hui un niveau supérieur à celui des 30 dernières années? Bref, une série de facteurs ont un effet favorable sur la situation budgétaire.
Le président: Nous avons déjà atteint neuf minutes.
Madame Minna.
[Traduction]
L'hon. Maria Minna: Merci, monsieur le président.
Merci d'être venus. J'ai appris pas mal de choses aujourd'hui surtout si je compare avec ce que les prévisionnistes que nous avons déjà rencontrés nous ont dit.
J'aimerais revenir un peu sur les prévisions du Centre canadien de politiques alternatives. Elles semblent être les plus positives ou les plus favorables : le surplus est plus important que celui des autres prévisionnistes; depuis 10 ans, ses prévisions sont cohérentes et assez justes, pour ce qui est de l'excédent en tout cas. Je voulais vous poser une ou deux questions au sujet de ses projections.
J'aimerais aussi que vous précisiez ce que vous avez dit à propos de l'impôt sur les sociétés. Stanford nous a dit que les versements et les impôts des sociétés continuent pendant quelques années après le revenu réel de la société ou que l'économie de l'entreprise a commencé à baisser. Expliquez-nous si vous le pouvez comment cela se fait—et est-ce bien le cas? Vous attendez-vous à ce que cela se produise dans la façon dont ils ont fait cette hypothèque ou pas, ou est-ce qu'ils le surestiment? Il est difficile de dire qui...
M. Paul-Henri Lapointe: Il y a deux choses qu'il dit que je conteste. Dans mon exposé, j'ai parlé des paiements de règlement que les sociétés font si leurs versements ont été insuffisants dans le courant de l'année. Il postule que les règlements seront effectués l'année d'après, ce qui n'est pas le cas. Ils se font pendant l'exercice financier courant. Vous ne pouvez pas compter sur des recettes d'impôt de sociétés plus fortes parce que vous pensez que les bénéfices seront plus élevés et que les sociétés auront donc des paiements de règlement plus importants à faire. Ils sont faits dans l'exercice courant.
Deuxièmement, il avance que vu où nous en sommes dans le cycle économique, après plusieurs années de bénéfices d'entreprise assez vigoureux, les entreprises auront employé la totalité de leurs pertes accumulées pour réduire leurs impôts. Cela signifie que même si la croissance des bénéfices des entreprises risque de ralentir dans l'année à venir, celles-ci vont payer plus d'impôts pour les bénéfices qu'elles déclarent tout au long de l'année.
Vous avez vu les chiffres sur les pertes accumulées. Elles sont encore énormes. Je ne crois donc pas que l'on puisse tabler sur l'hypothèse que le taux d'imposition moyen des profits d'entreprise progressera dans les années à venir par suite du fait que les entreprises ont épuisé leurs pertes accumulées. Ce n'est pas le cas.
 (1215)
L'hon. Maria Minna: Je reviens sur cette organisation parce que c'est celle que je suis d'un peu plus près depuis quelques années. La question que je vous pose est la suivante: Comment expliquez-vous qu'elle ait vu juste? Comment se fait-il que ses prévisions, à l'exception de l'impôt des sociétés, aient été si justes? Est-ce la seule fausse note?
Dans son dernier témoignage ici et dans les précédents, ils nous ont toujours dit que la principale raison pour laquelle nous sous-estimons notre surplus c'est que nous estimons mal les recettes et les dépenses. Le problème n'est pas le PIB ou d'autres données de base; ce sont les recettes et les dépenses que nous estimons mal.
C'est ce qu'ils ont dit. Comme je l'ai rappelé, le Centre a toujours été plus exact dans ses prévisions du surplus ou en tout cas dans l'analyse...
M. Paul-Henri Lapointe: J'admets qu'en moyenne ses résultats sont légèrement meilleurs, mais je tiens à souligner qu'il a nettement exagéré sa longueur d'avance sur les autres. Quand vous examinez ses prévisions, normalement autour du budget, il compare sa propre prévision sur la base du statu quo avant les mesures du budget à notre prévision du budget après les mesures du budget. On compare donc des pommes et des oranges.
Si vous enlevez des projections du budget les initiatives qui sont contenues dans le budget, la différence entre les deux prévisions n'est pas aussi importante qu'il l'affirme; elle est en fait bien inférieure à ce qu'il prétend. Mais j'admets qu'en moyenne ses résultats sont meilleurs.
Je pense que son hypothèse a fini par être meilleure, que le ratio revenu-PIB ne tomberait pas malgré les réductions d'impôt que nous avons eues. Au bout du compte, il a été plus proche de la vérité à cause de ce que j'appellerais l'heureux hasard d'une économie forte et, comme on l'a dit plus tôt, du changement dans la composition du revenu en faveur d'éléments sur lesquels nous appliquons un taux d'imposition plus élevé que sur d'autres. Je pense que c'est une bonne partie de l'explication.
Je ne sais pas si Peter ou Paul veulent ajouter quoi que ce soit.
M. Peter DeVries: Oui, monsieur le président, je veux ajouter une chose.
Comme M. Lapointe l'a dit, avant, ils présentaient leurs chiffres mais sous forme globale. Normalement, on trouve trois lignes—le total des revenus, le total des charges de programmes, les frais de la dette publique—et l'on ne pourrait jamais voir les chiffres sous-jacents qui les justifiaient.
Un des avantages de l'exercice que le comité a entrepris est que nous voyons dorénavant les détails de sa prévision; en les consultant, il est beaucoup plus facile désormais d'analyser pourquoi il postule ce qu'il postule. Comme M. Lapointe l'a dit, dans le cycle actuel, il mise sur une croissance extraordinairement forte de l'impôt des sociétés en se fondant sur ce que nous estimons être deux hypothèses fausses.
Au bout du compte, il se peut bien que les recettes tirées de l'impôt des sociétés soient beaucoup plus élevées que ce que nous prédisons. Mais si c'est basé sur ce qu'il a dit au comité en avril dernier, alors j'aurais des doutes. Si ça se fonde sur l'hypothèse selon laquelle les sociétés auront d'immenses paiements de règlement l'année prochaine ou pendant l'exercice financier courant parce que les chiffres de l'an dernier étaient inférieurs à la réalité, alors ce n'est pas le cas parce que comme M. Lapointe l'a dit, ces paiements de règlement sont effectués dans l'exercice financier, pas entre les exercices, et il en va de même pour le report des pertes.
Un des gros avantages c'est que l'on a pu voir dans sa prévision les hypothèses qu'il a retenues et que l'on peut les contester.
 (1220)
L'hon. Maria Minna: Une dernière question, ou plutôt une observation.
Étant donné que, comme vous l'avez dit, il y a un écart de 1 p. 100, un écart de quatre milliards, ou peu importe, c'est une grosse différence. La question n'est peut-être donc pas tant de l'exactitude de la prévision mais plutôt de savoir ce que l'on fera du surplus quand on en a un.
Il y a maintenant un mécanisme qui affecte automatiquement le surplus à la réduction de la dette. Les Canadiens, eux, trouvent qu'il y a beaucoup de problèmes qu'il pourrait servir à combattre et la vérificatrice générale a dit à un moment donné qu'il ne doit pas forcément servir à réduire la dette. Peut-être est-ce la façon dont on traite le surplus et le mécanisme législatif dont on a besoin pour s'en occuper au lieu de s'inquiéter à ce point de l'exactitude des prévisions, mais plutôt décider ce que nous faisons du surplus. Il s'agit peut-être plus d'une question de politique, mais il y a sans doute lieu de s'interroger.
Merci.
Le président: Merci, madame Minna.
M. Pallister.
M. Brian Pallister (Portage—Lisgar, PCC): Merci, monsieur le président.
Merci, messieurs, d'être ici. Vos présentations nous seront très utiles.
Je crois que toute cette entreprise est des plus utiles. Cela a provoqué une discussion comme nous n'en avions pas eu encore et comme nous devrions en avoir de nouveau à l'avenir. Il est utile d'être suffisamment nombreux au Parlement pour pouvoir obtenir de vous une réponse, pour que vous puissiez nous dire pourquoi ils ont raison ou tort, et pourquoi vous êtes d'accord ou pas avec eux, car pendant longtemps les Canadiens ont été privés de la possibilité d'avoir un débat sur ce qu'il convient de faire avec cet excédent déclaré en partie seulement.
J'ai un commentaire à faire et ensuite je poserai une question. Voici mon commentaire. Si vous vous étiez trompés une année—et vous avez passé pas mal de temps à essayer de nous expliquer pourquoi il est si difficile de faire des prévisions—je pourrais comprendre. Franchement, je comprends mieux maintenant qu'avant votre présentation, et si vous vous trompez deux ou trois fois, je peux encore comprendre cela, mais lorsque c'est systématique—comme le FMI l'a dit, c'est nous qui nous trompons le plus souvent—ce n'est pas... Vous n'avez pas encore expliqué cela. Cela reflète un parti pris.
Je ne sais pas si vous êtes golfeur, mais si jamais vous participez à un Texas scramble—où l'on choisit le meilleur coup—, vous aurez peut-être quatre personnes dans votre équipe, et si la première frappe la balle vers la gauche et que la deuxième fait la même chose, vous douterez peut-être de sa capacité à viser, mais si la troisième fait la même chose, vous douterez de son intelligence, et si la quatrième fait la même chose, vous supposerez qu'elle fait exprès. Je pense que c'est ce qui se produit ici. On peut légitimement se demander si vous faites exprès pour vous tromper.
Alors j'aimerais que vous me disiez quand c'est devenu la politique. Quand est-ce que le Canada a décidé que nous devions être délibérément prudents dans nos prévisions?
M. Paul-Henri Lapointe: Je dois vous signaler que l'objectif du gouvernement n'est pas d'avoir un budget équilibré sur une moyenne de 10 ans; l'objectif est d'avoir un budget équilibré chaque année. C'est pourquoi nous faisons preuve de prudence dans l'établissement de la réserve pour éventualités et nous examinons chaque élément afin de faire l'évaluation la plus raisonnable possible.
Prenons l'exemple des rajustements de l'impôt sur le revenu des particuliers apportés en fin d'exercice. Nous avons des observations pour les trois dernières années, depuis que nous avons adopté la comptabilité d'exercice. Ainsi, nous n'avons pas beaucoup de données antérieures sur lesquelles fonder nos évaluations. Nous devons essayer de faire la meilleure évaluation.
 (1225)
M. Brian Pallister: Une réserve pour quelles éventualités? C'est comme une police d'assurance pour être sûr de ne pas avoir de déficit, et le prix qu'on paie pour cette assurance est de sous-estimer l'excédent et de priver ainsi le pays de la possibilité de débattre de la manière d'utiliser cet argent. Est-ce une bonne analogie?
M. Paul-Henri Lapointe: Je ne me prononcerai pas là-dessus. J'ai essayé de décrire comment nous faisons nos prévisions financières et, comme je l'ai dit, nous constituons par mesure de prudence une réserve pour éventualités afin d'être en mesure de composer avec certains événements économiques, de faire face à des changements qui n'étaient pas prévus au moment où nous avons établi nos prévisions.
Ensuite, nous devons formuler des hypothèses. Par exemple, dans le dernier budget, nous avons tenu compte du fait que les bénéfices des sociétés étaient à leur point culminant depuis 30 ans et formulé l'hypothèse qu'ils continueraient à s'accroître ou resteraient constants. D'après la meilleure évaluation possible à ce moment-là, nous avons présumé que les bénéfices des sociétés fléchiraient légèrement ou resteraient constants au cours des années à venir. Nous pouvons nous tromper, mais voilà la situation. Il y a beaucoup d'incertitude. Nous faisons de notre mieux pour prévoir l'évolution de certains facteurs, mais nous pouvons nous tromper.
M. Brian Pallister: Poussons l'analogie un peu plus loin. Un fort pourcentage des coups roulés qui ne se rendent pas près du trou sont ratés. Il semblerait que cela arrive dans pas moins de 90 p. 100 des cas.
En fait, vos prévisions pour éventualités, votre politique de prudence, et ainsi de suite, privent les Canadiens de... Par exemple, si les associations d'agriculteurs demandent de l'aide financière pour surmonter la crise causée par la maladie de la vache folle, le gouvernement répond qu'il n'a pas le moyen de les aider, en se fondant sur des prévisions qui sont nettement plus faibles que ce qu'il en est dans les faits. C'est ce qui arrive depuis huit ou neuf ans.
Dans ces conditions, comment faire pour obtenir plus rapidement des chiffres plus exacts? Voilà où je veux en venir. Vous avez dit que les données économiques accusent toujours un certain retard et que l'on essaie d'actualiser les chiffres dès que possible de manière à pouvoir discuter de l'évolution de la situation économique en connaissance de cause. Vous avez mentionné des délais de deux ou trois mois environ. De combien de ressources auriez-vous besoin pour pouvoir nous fournir des données exactes plus vite—par exemple, dans un délai de un mois? Je suis curieux.
M. Paul-Henri Lapointe: Pour établir nos prévisions économiques et financières, nous dépendons des données que nous transmettent Revenu Canada et Statistique Canada. Beaucoup de facteurs influent sur la rapidité et la qualité de l'information qu'on peut obtenir, et il est évident que certaines améliorations pourraient être apportées, mais il y a des limites. Nous devrons toujours travailler avec des données imparfaites qui accusent un certain retard. Si des correctifs mineurs étaient apportés, dans certains cas on pourrait peut-être avoir accès plus rapidement à certaines données, mais ces données seraient de piètre qualité.
Je ne prétends pas que tout est parfait et que rien n'a besoin d'être changé, parce que nous apportons des changements. L'année dernière, par exemple, nous avons décidé de suivre de plus près les sociétés d'État, parce qu'elles nous avaient occasionné quelques surprises au cours des années précédentes. Nous espérons obtenir plus rapidement de l'information sur leur situation financière et comment...
M. Brian Pallister: Nous aussi, nous aimerions avoir de l'information sur certaines sociétés d'État.
Merci.
Le président: Merci.
M. Bell, puis ce sera au tour de M. Côté et de M. Penson.
M. Don Bell (North Vancouver, Lib.): Merci, monsieur Lapointe.
À la diapositive 21, qui traitait des différences conceptuelles, vous avez évoqué l'univers des comptes publics. Pourriez-vous revenir sur cet aspect, au début de cette partie qui porte sur le traitement des immobilisations?
M. Peter DeVries: À propos de l'univers comptable, le gouvernement inclut dans ses états financiers toutes les entités qu'il régit; dans ce contexte, cela comprend donc toutes les sociétés d'État, entre autres, EDC et la SCHL, de même que toutes les sociétés d'État qui sont financées par le gouvernement pour l'accomplissement de leur mandat, par exemple la CBC-SRC, VIA Rail, EACL, etc.
En ce qui a trait aux comptes nationaux, ils ne comprennent que les éléments du secteur public auxquels le gouvernement fournit au moins la moitié du financement. Dans le cas de VIA Rail, supposons, cette entreprise n'appartient pas à la catégorie des comptes nationaux car elle ne relève pas du secteur public fédéral. Elle fait partie du secteur privé. Il en va de même pour la SCHL, EDC et EACL. C'est l'un des contextes dans lesquels nous devons en tenir compte. Lorsque nous faisons nos prévisions en fonction des comptes nationaux, nous devons tenir compte de ces entités.
Pour ce qui est du cumul des dépenses fiscales, les comptes nationaux fondent leurs ajustements sur la valeur du marché. Le gouvernement fonde ses ajustements sur la valeur historique. Il faut donc effectuer la conversion dans ce cas.
En ce qui concerne les éléments de passif, les comptes nationaux ne contiennent aucune disposition à cet égard. Le gouvernement applique strictement la comptabilité d'exercice. Jusqu'à présent, il a reconnu tout le passif estimé dans le domaine de l'environnement, des revendications autochtones et de toute poursuite judiciaire dont il fait l'objet. Dans le système des comptes nationaux, ces éléments ne sont pas inscrits tant qu'il n'y a pas règlement final.
Pour les fiducies et les fondations, nous inscrivons le passif au cours de l'exercice durant lequel nous nous sommes engagés à verser l'argent à ces fondations ou à ces fiducies. Dans le système des comptes nationaux, si nous transférons de l'argent à des provinces, par exemple, au moyen d'une entente de fiducie, la dépense ne sera inscrite que lorsque la province recevra l'argent, ce qui peut prendre un an, trois ans ou quatre ans.
Dans le cas des fondations, comme M. Lapointe l'a dit, les comptes nationaux n'inscrivent les montants que lorsque le bénéficiaire ultime reçoit l'argent. Dans le cas d'une fondation comme la Fondation canadienne pour l'innovation, nous inscrivons un élément de passif dans l'exercice durant lequel ce passif a été créé. Statistique Canada enregistrera le résultat économique de l'événement, par exemple lorsque l'Université de Toronto construira le nouveau laboratoire. Cela pourrait se produire bien plus tard dans l'avenir.
 (1230)
M. Don Bell: Je suppose que c'est à ce sujet qu'il faut poser des questions. Il est très difficile de suivre la trace de cet argent, puisque la dépense n'est inscrite qu'au moment où l'argent est vraiment utilisé. Est-ce exact?
M. Peter DeVries: C'est exact. C'est ce qui se produit dans le système des comptes nationaux.
M. Don Bell: Il n'y a donc pas de lien. Compte tenu du laps de temps, il n'y a pas de comptabilité annuelle, je suppose.
M. Peter DeVries: Il existe une comptabilité annuelle dans la mesure où la Fondation canadienne pour l'innovation signale le transfert de l'argent au bénéficiaire ultime. Et cela nous ramène à la raison d'être des comptes nationaux. Le but des comptes nationaux est d'enregistrer les effets de l'activité économique. Leur but est de fournir un ensemble d'états financiers au Parlement en fonction des affectations de fonds et des pouvoirs conférés par les lois au sujet de l'argent que le gouvernement a reçu au cours de l'année.
M. Don Bell: Cela répond à ma question, merci.
Le président: Merci.
M. Côté.
[Français]
M. Guy Côté (Portneuf—Jacques-Cartier, BQ): Merci, monsieur le président.
Merci beaucoup. Je vais lire très attentivement toute cette documentation, qui nous a été remise un peu en retard.
Comme M. Pallister, nous sommes étonnés de voir qu'année après année, il y a eu des écarts dans les prévisions, alors que celles du Bloc québécois et d'autres organismes à vocation économique ont été beaucoup plus justes.
Vous avez mentionné plus tôt que le gouvernement n'était pas en affaires pour prévoir ses budgets sur une période de 10 ans, mais qu'il le faisait une année à la fois. Sauf le respect que je vous dois, je vous ferai remarquer que dans le cadre du dernier budget, les prévisions couvrent cinq ans. Les prévisions du gouvernement ne portent donc pas uniquement sur l'année en cours, mais elles tentent aussi d'établir un cadre budgétaire pour les cinq prochaines années.
Naturellement, il est un peu décevant de se faire désigner par le Fonds monétaire international en tant que pire pays en matière de prévisions parmi les pays de référence. Des erreurs font en sorte que l'année dernière, par exemple, nous sommes passés de 1,9 à 9,1 milliards de dollars. En outre, ce phénomène se produit systématiquement. Quelques témoins, entre autres les prévisionnistes indépendants qui travaillent pour le Comité permanent des finances, nous ont clairement fait voir que sur le plan des dépenses, les prévisions du ministère étaient néanmoins assez exactes. De ce côté-là, les choses vont plutôt bien.
Cependant, vu qu'on parle ici de variations économiques, j'aimerais savoir comment il se fait que seuls les revenus sont systématiquement sous-évalués. Ce n'est pas seulement que le chiffre final indiquant l'excédent budgétaire n'est pas juste. Le montant des dépenses, pour sa part, est presque toujours exact, mais les revenus sont toujours sous-évalués. Comment expliquez-vous cela?
 (1235)
M. Paul-Henri Lapointe: J'aimerais que vous ayez raison lorsque vous dites que nous faisons des erreurs uniquement à l'égard des revenus, mais je dois avouer que nous en faisons également en ce qui a trait aux dépenses.
Pour revenir à la question des revenus, comme le disait plus tôt M. Peter DeVries en réponse à une autre question, il était difficile par le passé de nous comparer aux prévisionnistes du secteur privé parce que bien souvent, nous n'avions pas suffisamment de détails. À l'heure actuelle, l'exercice réalisé de concert avec des économistes du secteur privé a comme avantage de nous procurer plus de détails sur leurs projections financières.
Lorsque je regarde les présentations que ces gens ont faites il y a deux semaines, je constate, bien sûr, que leurs prévisions de surplus sont plus élevées que celles du budget. La première chose qui me frappe, c'est la présence d'écarts considérables entre les projections, mais ce qui me frappe plus encore, ce sont les détails. Un des prévisionnistes a fait des projections de recettes au chapitre de l'impôt des sociétés nettement plus élevées que celles du budget. Elles les dépassent d'environ 20 ou 25 p. 100. Au même chapitre, un autre prévisionniste a fait des projections inférieures à celles que l'on trouve dans le budget. Si l'on considère chaque composante des revenus, on ne peut pas parler de consensus. Je trouve que cela exprime très bien les difficultés auxquelles tous les prévisionnistes sont confrontés lorsqu'ils font des projections financières de ce genre.
Aucun point de vue ne fait l'unanimité.
Le président: Monsieur Penson, puis monsieur Loubier.
[Traduction]
M. Charlie Penson: C'est très utile, et ce que vous dites est très important. Les projections diffèrent selon les prévisionnistes, mais ne croyez-vous pas, monsieur Lapointe, qu'il est important pour tous, y compris pour vous, que nous ayons des renseignements à temps ou des mises à jour en temps opportun?
M. Paul-Henri Lapointe: Cela ne fait aucun doute.
M. Peter DeVries: L'une des raisons pour lesquelles nous publions La revue financière chaque mois, c'est que nous voulons fournir constamment, au moins, de l'information sur ce qui se fait.
M. Charlie Penson: Oui, et c'est très utile, monsieur DeVries, mais la présentation de nos finances nationales n'est peut-être pas aussi claire qu'elle le devrait. Vous avez parlé de La revue financière; les Canadiens peuvent consulter un certain nombre de publications, et on peut facilement s'y perdre : le Budget, La revue financière, les Comptes publics, les tableaux de référence économique et le rapport financier annuel. Si nous pouvions fixer une meilleure norme, nous serions mieux en mesure de nous y retrouver.
Voici un exemple de la transparence que nous recherchons. Dans le document budgétaire qui vient d'être présenté, pourquoi votre ministère n'inscrit-il pas l'impôt sur le revenu des particuliers en fonction des sommes brutes et pourquoi la prestation fiscale pour enfants n'est-elle pas indiquée comme une dépense?
M. Paul-Henri Lapointe: Nous faisons la ventilation en fonction du revenu brut et du revenu net dans le rapport financier annuel, et nous inscrivons les chiffres en fonction du revenu net dans le budget.
Mais cela fait partie des choses que nous examinons, à savoir si nous devrions à l'avenir indiquer les chiffres relatifs aux revenus et aux dépenses sur une base brute. C'est l'une des choses que nous examinons à l'heure actuelle, afin d'uniformiser la présentation d'un document à l'autre, même si à l'heure actuelle, le rapport financier annuel fait la réconciliation entre le budget les comptes publics.
 (1240)
M. Charlie Penson: Je suis bien d'accord, monsieur Lapointe, mais le problème c'est que ce rapport est publié bien plus tard. Un an plus tard, n'est-ce pas? Ce n'est donc pas très utile.
Vous aborderez probablement aussi l'autre élément de ma question, c'est-à-dire la prestation fiscale pour enfants.
M. Peter DeVries: Permettez-moi d'ajouter quelque chose à ce sujet. Vous vous souviendrez que durant la mise à jour de l'automne, nous avions fourni une réconciliation complète entre les chiffres des comptes nationaux et ceux des comptes publics. Dans cette réconciliation, nous avions inscrit à notre liste la prestation fiscale pour enfants du Canada. Nous avons donc fait cette mise à jour .
La raison pour laquelle nous présentons les montants sur une base nette dans le budget, c'est que c'est la façon dont le Parlement a autorisé le gouvernement à dépenser son argent. La prestation fiscale pour enfants s'inscrit en fait dans notre régime d'impôt sur le revenu. Est-ce une raison suffisante? C'est comme cela. Cela fait partie des dépenses fiscales et non des charges directes de programmes.
Il en va de même du crédit au titre de la taxe sur les produits et services. Ce montant est déduit de la TPS sur une base nette. Si nous procédons ainsi, c'est qu'il ne s'agit pas de remboursement, comme tout autre remboursement qui fait partie du régime de la TPS.
Même les fonds qui sont affectés par le Parlement au gouvernement le sont sur une base nette, et c'est pour cela que les revenus des ministères provenant du recouvrement des coûts sont déduits du total des sommes qui leur sont affectées. C'est de cette façon que le Parlement approuve l'affectation de fonds aux ministères, et c'est ce que nous inscrivons dans le budget.
M. Charlie Penson: Je ne doute pas de l'exactitude de ces renseignements, mais cela prête à confusion. Bien des gens pourraient se demander pourquoi la prestation fiscale pour enfants n'est pas comptabilisée comme une dépense. Bon, voilà l'explication.
Je trouve ce processus très utile et je me réjouis que vous, au ministère des Finances, soyez du même avis.
Dans d'autres pays qui se sont dotés d'autres systèmes de poids et contrepoids, l'un ou l'autre des services d'établissement de budget—par exemple, celui du Congrès ou celui de l'administration aux États-Unis—peut se tromper quelque peu, mais au moins chacun peut voir ce que l'autre fait. L'administration fournit les données dont a besoin le Congressional Budget Office, et je crois qu'un tel système serait bénéfique.
J'ai terminé, monsieur le président.
Le président: Merci.
M. Loubier.
[Français]
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Merci, monsieur le président.
Bonjour, monsieur Lapointe, monsieur Rochon et monsieur DeVries.
Monsieur Lapointe, vous savez tout le respect que je vous porte. Vous savez que j'ai beaucoup d'admiration pour votre travail, votre expérience et votre contribution. En vous écoutant parler, tout à l'heure, je me disais que quelque chose ne fonctionnait pas dans ce qu'on venait de nous dire. Vous dites que c'est une bonne chose qu'on ait engagé des économistes car on est en mesure de constater, en comparant, qu'il existe des écarts considérables. Mais il n'y a pas tant d'écart que cela. Il y a bien Global Insight qui se trompe complètement par rapport aux autres, mais si on regarde la moyenne des autres, on est capable d'arriver à quelque chose de très bien.
Vous trouvez aussi que c'est intéressant, enrichissant. Pourquoi ne l'avez-vous pas fait auparavant? Vous choisissez cinq intervenants, vous retirez la prévision la plus optimiste et la prévision la moins optimiste, vous conservez les trois autres et vous en faites la moyenne. Vous auriez pu faire la même chose au ministère des Finances. Lorsque vous avez vu, après deux ou trois ans, que cela ne fonctionnait pas et que vous n'arriviez pas à faire des prévisions correctement, vous auriez pu faire exactement ce qu'on a fait, faire venir des prévisionnistes, enlever les données trop pessimistes et les données trop optimistes et garder la moyenne.
Deuxièmement, vous dites qu'on consulte trimestriellement les grands économistes pour les paramètres macroéconomiques, comme les taux d'intérêt et la croissance du PIB. Je vous crois, mais ce que vous en avez fait a semblé poser de gros problèmes depuis 1997-1998, en particulier, depuis qu'on a réalisé les premiers surplus. Je ne me rappelle pas l'année exacte, mais je me souviens d'une année, lors du dépôt du budget — il s'agissait de prévisions trimestrielles —, où sur trois années, il y avait trois zéros inscrits pour les surplus du gouvernement fédéral. Cela n'avait aucun sens.
Je me demande parfois si vous n'avez pas été un peu aspiré par la machine politique. Le ministre des Finances ne voulait pas avoir de débat sur les surplus et sa véritable marge de manoeuvre, et il a entraîné la fonction publique dans ce geste politique. C'est techniquement impossible. Seulement, de 1997-1998 à 2003-2004, à la fin de chacun des exercices, on enregistrait un surplus. Ce surplus cumulatif est autour de 70 milliards de dollars.
De plus, si on regarde les nouvelles initiatives, année après année — et une année auparavant, on nous disait qu'il n'y avait pas de surplus —, on voit que les nouvelles initiatives comme les baisses d'impôt et les investissements de toutes sortes du gouvernement fédéral totalisent 140 milliards de dollars. Cent quarante milliards et 70 milliards, cela donne un total de 210 milliards de dollars sur la période de 1997-1998 à 2003-2004. Il me semble que c'est une grosse erreur. Vous êtes très prudent pour chacun des postes de revenus. Toutefois, il me semble que quelque chose cloche dans les arguments que vous nous présentez. Je préférerais que vous me disiez qu'il y avait une commande politique quelque part, car j'y croirais un peu plus. Cela n'enlève rien au respect que j'ai pour vous et votre compétence, mais cela me semble illogique.
 (1245)
M. Paul-Henri Lapointe: Je ne discuterai pas de votre arithmétique, mais on pourrait en débattre longuement.
M. Yvan Loubier: Je suis bien prêt à en discuter.
M. Paul-Henri Lapointe: Je ne peux que répéter ce que j'ai dit plus tôt: la performance économique du Canada en a surpris beaucoup, depuis plusieurs années.
Je me rappelle, par exemple, que lorsqu'on avait préparé le budget en 2001, juste après les événements du 11 septembre, tous les économistes avaient une vue très pessimiste de la croissance économique pour l'année 2002. En effet, on avait déjà constaté un ralentissement de l'économie mondiale, et on s'attendait à ce que ces événements aient des impacts considérables sur la croissance de l'économie.
Effectivement, on a observé une croissance assez faible dans le trimestre qui a suivi, mais ensuite, une reprise absolument phénoménale a surpris tout le monde. La croissance économique était de 2 p. 100 plus élevée en 2002 que ce que l'on avait prévu. On a eu plusieurs surprises comme celle-là.
Je mentionnais également, tout à l'heure, la croissance des bénéfices des sociétés. On est tous un peu surpris par cette croissance. Nous discutons actuellement avec d'autres économistes pour mieux comprendre ce phénomène. Il s'avère que les taux d'impôt qu'on applique aux bénéfices des sociétés sont plus élevés, et que cela contribue à notre croissance des revenus durant cette période, pour une croissance économique donnée.
Vous me direz que c'est peut-être de la chance, mais, effectivement, une série de facteurs ont fait en sorte qu'on a eu plusieurs surprises positives du côté économique.
Je mentionnais également tout à l'heure qu'on avait pour but d'équilibrer le budget pour chacune des années. Pour préserver cet objectif, on inclut la réserve pour éventualités et la prudence économique. Lorsqu'on regarde chacun des éléments des dépenses ou des revenus, on doit juger quelles hypothèses sont les plus raisonnables.
Oui, on commet des erreurs dans certains cas. Toutefois, plusieurs facteurs ont fait en sorte que nous ayons des surprises positives ces dernières années.
M. Yvan Loubier: Vous avez eu des surprises les sept années que j'ai mentionnées On a même eu la surprise de voir, une année — je ne me rappelle pas précisément laquelle, le temps passe tellement vite — où il y avait le SRAS...
 (1250)
M. Paul-Henri Lapointe: En 2003.
M. Yvan Loubier: ...et la grippe aviaire. Il y avait tout. En 2003, c'est ça.
Malgré tout cela, les surplus ont bondi et ont fait tourner votre 1,9 à 9,1. Il y avait donc des indices que la situation n'était pas si mauvaise. D'ailleurs, chaque fois que le ministre des Finances fait sa mise à jour économique, il se trouve toujours deux ou trois économistes qui, le lendemain, disent que c'est exagéré, que les surplus vont être de beaucoup supérieurs. Certains lancent des chiffres, et certains chiffres se rapprochent davantage de la vérité.
Je vous ai posé une question plus tôt: comment se fait-il que pour l'un des budgets — je pense que c'était 2002 —, il y avait une prévision pour les trois prochaines années où on mettait trois zéros pour les surplus. Cela ressemble un peu à du maquillage politique.
Si vous me dites que le ministre n'est pas intervenu pour vous demander de mettre la pédale douce dans vos prévisions et de présenter le scénario le plus pessimiste, je vais avoir du mal à vous croire.
Bien sûr, vous ne me direz pas tout aujourd'hui. Toutefois, je sais que le ministre des Finances du temps ainsi que les ministres qui l'ont suivi, M. Manley et M. Goodale, ne sont pas des gens qui aiment beaucoup débattre des possibilités, de la marge de manoeuvre dont le gouvernement dispose, parce qu'ils susciteraient beaucoup d'attente.
Si vous me donnez une explication comme celle-là, je l'accepterai, et pour la suite des choses, on sera plus rigoureux. Autrement, c'est invraisemblable et surréaliste.
Le président: Rapidement, s'il vous plaît.
M. Paul-Henri Lapointe: Les trois zéros dont vous parlez résultent, d'une part, des mesures que l'on inclut dans le budget. Comme je le mentionnais tout à l'heure, il y a toujours la réserve pour éventualités et la prudence économique qui est de 1 milliard de dollars la première année et qui augmente à 3 milliards de dollars la troisième année. Ce ne sont donc pas trois zéros.
Vous semblez suggérer...
M. Yvan Loubier: [Inaudible]
[Traduction]
Le président: Monsieur Penson, rapidement s'il vous plaît.
M. Charlie Penson: Monsieur le président, je sais que j'ai dit que j'avais terminé, mais je ne peux résister à la tentation d'intervenir sur cette question.
Monsieur Lapointe, si nous sommes tous ici aujourd'hui c'est que les surplus ont engendré un sérieux problème de crédibilité, qui ne cesse de s'aggraver. M. Loubier dit que vous aviez prévu un surplus nul pour les cinq prochaines années. Étant donné l'accumulation de surplus au cours des sept dernières années, ce genre de prévision mine votre crédibilité. Et non seulement la vôtre, mais celle de tous les gens qui participent au processus... le consensus sur les prévisions moyennes du secteur privé, et tout le reste.
Au moment où l'on observe tout un éventail de malversations commises par des entreprises au Canada, il importe que les fonctionnaires gouvernementaux se montrent aussi crédibles que possible. Par conséquent, nous devons absolument y voir plus clair. C'est pour cela, entre autres, que nous réclamons un modèle prévisionnel que nous puissions utiliser nous-mêmes. Votre ministère doit bien reconnaître qu'il a un sérieux problème de crédibilité.
M. Paul-Henri Lapointe: Permettez-moi de rappeler encore une fois qu'un examen est en cours et que nous attendons avec impatience les recommandations de M. O'Neill. Effectivement, on peut améliorer les méthodologies prévisionnelles; il s'agit de savoir comment et nous espérons que le rapport de M. O'Neill nous aidera à faire mieux notre travail.
Le président: Merci, monsieur Lapointe.
Le gouvernement a dit très clairement qu'il souhaite présenter un bilan positif ou une amélioration des chiffres du gouvernement. N'est-ce pas là une partie de la réponse? Au cours des dernières années, le gouvernement a fait savoir sans équivoque qu'il ne veut pas encourir de déficit. Sa volonté n'était-elle pas claire à cet égard?
M. Paul-Henri Lapointe: L'objectif visé c'est un budget équilibré ou mieux, ce à quoi contribuent la réserve pour éventualités et la prudence que nous exerçons. Le gouvernement ne cherche pas à faire des surplus. Il veut à tout prix garder l'équilibre et éviter de nouveaux déficits.
Le président: Comment faire pour que le bilan de l'exercice courant soit positif? Je n'ai pas très bien compris si les fonctionnaires du ministère des Finances doivent travailler avec cet organisme indépendant. Va-t-on créer un service du budget? Quelles seraient vos recommandations?
Je sais que l'année dernière vous avez engagé quatre experts-conseils indépendants pour la mise à jour économique, mais c'était en vertu d'un contrat temporaire et vous n'avez pas répété l'expérience cette année.
M. Paul-Henri Lapointe: Ce processus remonte à 1999. Dans la mise à jour financière de l'année dernière, nous avons donné plus de détails sur la façon dont nous utilisons les prévisions financières provenant des quatre entreprises de modélisation relativement aux comptes publics. Nous avons également donné plus de précisions sur les renseignements contenus dans la mise à jour de l'automne.
[Français]
Le président: C'est fait une fois par année?
[Traduction]
M. Paul-Henri Lapointe: Oui, c'est au cours de l'automne.
[Français]
Le président: Ce n'était pas fait pour le budget de 2005.
M. Paul-Henri Lapointe: Non. Nous faisons l'exercice avec les prévisionnistes des quatre firmes pour la mise à jour de novembre.
Le président: Comment l'exercice peut-il être juste si on les engage une fois par année pendant deux ou trois semaines et qu'on leur donne les chiffres que nous voulons, que vous voulez? Comment les résultats peuvent-ils être justes?
 (1255)
M. Paul-Henri Lapointe: Voici ce que nous faisons pour la mise à jour: nous leur donnons les résultats de l'enquête des prévisionnistes, des prévisions économiques; nous leur donnons également des détails sur la composition de la croissance entre les bénéfices des sociétés et les salaires; puis ils génèrent des projections financières à partir de leurs modèles. C'est pour la mise à jour. D'accord?
Entre la mise à jour et le budget, nous menons, en décembre, une autre enquête auprès des économistes du secteur privé, pour avoir une mise à jour de leurs projections économiques. Ensuite nous les traduisons en projections financières.
Enfin, dans le budget, on donne généralement une mise à jour, et on a fait dans ce budget-ci un rapprochement des projections du budget par rapport aux projections présentées dans la mise à jour automnale, qui reposaient sur les prévisions du secteur privé.
Le président: Ne pensez-vous pas qu'il serait utile d'utiliser des prévisionnistes indépendants plus souvent, peut-être à chaque trimestre?
M. Paul-Henri Lapointe: C'est certainement quelque chose qu'on pourra envisager. Encore une fois, nous attendons le rapport du Dr O'Neill. Il examine tous ces aspects: la transparence, les méthodologies et l'accessibilité aux chiffres.
Le président: Mais la préférence...
M. Paul-Henri Lapointe: On verra ensuite quels sont...
Le président: D'accord. Quelle serait la préférence du ministère?
M. Paul-Henri Lapointe: Je ne veux pas m'engager sur les recommandations que le Dr O'Neill va faire.
Le président: M. Lapointe n'a-t-il pas une opinion?
M. Paul-Henri Lapointe: Je préfère attendre les résultats du rapport.
Le président: Merci.
[Traduction]
Merci.
Sur cette note la séance est levée.