:
Monsieur le Président, permettez-moi de préciser d'abord que je partagerai le temps qui m'est accordé avec notre chef adjoint, le député de Nova-Centre.
Il s'agit d'une question très importante. Les députés se souviendront que, lors des dernières élections, les libéraux ont dénigré et tourné en dérision nos très sérieuses propositions visant à donner à nos forces armées les ressources et les orientations dont elles ont besoin pour remplir leurs missions essentielles.
Nous avons été témoins depuis de nouveaux exemples encore plus troublants de la négligence dont les libéraux font preuve envers nos forces armées.
Comme nous le savons tous, une récente tragédie a plongé notre nation dans l'embarras. Je peux garantir aux députés que les membres de nos forces armées ne trouvent pas que la situation est amusante ou insignifiante, tout comme une majorité de Canadiens qui s'attendent à ce que leur gouvernement assure au moins la souveraineté de notre pays et la sécurité de notre société.
[Français]
Les libéraux semblent penser que le monde n'a pas changé depuis 30 ans, quand ils ont commencé à réduire le rôle et les ressources de nos forces armées. Le Parti libéral n'a pas changé, mais la situation mondiale a changé.
[Traduction]
Le Canada et ses alliés sont confrontés à une nouvelle réalité mondiale: menaces terroristes planétaires, États en sérieuse difficulté, régimes politiques abusifs et prolifération de différents types d'armes.
La réaction du gouvernement fédéral libéral à un nouvel environnement sur le plan de la sécurité, environnement demandant vision et vigueur, se résume à indifférence et incompétence.
Dans son Livre blanc sur la défense de 1994, le gouvernement présentait une série d'hypothèses critiques. Il prévoyait une diminution du rôle des forces armées canadiennes sur l'échiquier international. Il envisageait une diminution de la durée, de la fréquence et de la complexité des opérations militaires futures.
Toutes ses hypothèses se sont révélées fausses--dangereusement fausses--et pourtant le gouvernement n'a pas jugé et ne juge toujours pas bon de revoir cette politique. Alors que les pays alliés ont revu en profondeur leurs politiques en matière de défense après le 11 septembre 2001, le gouvernement libéral s'est entêté à s'accrocher à une politique déjà désuète depuis plusieurs années.
[Français]
Le Canada fait partie du G-8. Notre territoire national est le deuxième au monde en superficie. Notre système démocratique est respecté partout dans le monde. Au cours des deux guerres mondiales, de la guerre de Corée et lors de nombreuses interventions en faveur de la paix, notre pays a gagné l'admiration et la reconnaissance de ses alliés et de tous les amis de la liberté et de la démocratie.
Cependant, la triste réalité, c'est que nous ne sommes plus considérés comme une puissance militaire crédible aujourd'hui. Le gouvernement libéral a abdiqué non seulement ses responsabilités internationales, mais même ses obligations envers nos soldats et notre sécurité nationale.
[Traduction]
L'absence de directives politiques entraînant une perte de temps et de ressources, nos militaires se sont vu confier toutes les missions imaginables, aux quatre coins du monde, souvent sans saisir clairement toute l'importance fondamentale de leur rôle pour le bien-être du Canada, et parfois sans avoir l'équipement nécessaire pour s'acquitter efficacement de leurs missions.
Au cours de la dernière décennie, le gouvernement fédéral a considérablement réduit la capacité de nos forces armées, tout en multipliant leurs engagements et leurs obligations. À défaut de pouvoir compter sur un financement adéquat du fédéral, les forces armées ont été contraintes de puiser dans leur budget d'immobilisations pour pouvoir financer leurs opérations de base. En 2003, le pourcentage du budget de la défense consacrée aux dépenses en capital n'était plus que de 11,5 p. 100, soit une baisse de 50 p. 100 par rapport au niveau de 1993, lorsque le gouvernement actuel est entré en fonction.
Les dépenses en capital étant indispensables au renouvellement des capacités militaires, le gouvernement a sacrifié l'avenir de nos forces armées pour subvenir à leurs besoins quotidiens. Le premier ministre s'est récemment vanté des mesures qu'il a annoncées concernant l'acquisition de matériel militaire. Toutefois, d'après le plan d'immobilisations dans les compétences stratégiques du ministère de la Défense nationale, les mesures annoncées par le premier ministre sont insuffisantes de 20 milliards de dollars ou, en d'autres mots, sont inférieures de 75 p. 100 à ce que prévoit le plan d'équipement sur 15 ans établi par les forces armées.
Le premier ministre, qui aime parler de « solution valable pour une génération », affirme avoir réagi à la crise que traverse la défense nationale. En fait, il a seulement approuvé sept milliards de dollars, ou 25 p. 100 du plan d'immobilisations de 27,5 milliards sur 15 ans établi par les forces armées, plan qui s'appuie en partie sur la politique établie par le gouvernement en 1994 et sur les récentes leçons apprises dans le domaine opérationnel.
En pourcentage de notre économie, le budget de la défense du Canada, qui représente 1,2 p. 100 de notre PIB, place le Canada, sauf erreur, à l'avant-dernier rang des pays de l'OTAN. Il n'y a pas si longtemps, en 1985-1987 sous le gouvernement progressiste-conservateur, le budget de la défense du Canada représentait 2,2 p. 100 du PIB canadien, soit près de 50 p. 100 de plus qu'aujourd'hui, toutes proportions gardées.
Nous trouvons encore plus préoccupant la conception à courte vue et minimaliste de notre politique militaire, récemment adoptée par le gouvernement dans ses discussions sur le rôle futur des forces armées. La plateforme électorale des libéraux proposait des rôles restreints ou de petits créneaux d'intervention pour les forces armées, et tout semble indiquer que le premier ministre cherche maintenant à redéfinir le rôle des Forces canadiennes sur la scène internationale et à limiter ce rôle à des opérations policières.
Le Parti conservateur appuie les trois objectifs interconnectés poursuivis par le Canada en matière de sécurité, objectifs anciens et de plus en plus importants, à savoir: la sécurité du Canada, la collaboration à la défense de l'Amérique du Nord et la promotion de la paix et de la sécurité dans le monde.
Je suis convaincu que nous devrions porter à au moins 80 000 personnes l'effectif des Forces canadiennes afin de satisfaire aux exigences croissantes liées à la sécurité.
C'est pourquoi notre motion préconise la des forces plus puissantes, polyvalentes et aptes au combat pour améliorer la capacité d'intervention du Canada à l'échelon international. Pour assurer la paix dans ce nouveau contexte de sécurité, le Canada doit se doter de forces polyvalentes et aptes au combat capables d'assumer la conduite d'un ensemble d'opérations militaires allant du soutien humanitaire aux opérations de combat en défense de nos intérêts nationaux.
Bien que, historiquement, notre pays soit l'un des plus pacifiques du monde, les libéraux continuent d'oublier les leçons de cette histoire, à savoir que notre identité, nos libertés, notre démocratie et nos valeurs nous sont le plus souvent venues des hommes et des femmes disposés à revêtir l'uniforme et à donner au besoin leur vie.
Le monde peut changer, mais l'humanité, elle, ne change pas. Aujourd'hui comme à l'avenir, notre capacité de maintenir nos valeurs nationales et de les faire valoir dans un monde périlleux continuera de dépendre de la présence d'une armée solide. Voilà la réalité, voilà notre histoire, et aucun pays souverain ne doit jamais l'oublier.
En conclusion, j'aimerais saluer les hommes et les femmes de nos forces armées qui, depuis des décennies, tiennent le coup dans des circonstances difficiles, injustes et extrêmement dangereuses. Leur succès est dû seulement à leur professionnalisme et à leur dévouement. Il n'est certainement pas attribuable à la qualité et à l'orientation du leadership politique qui leur est venu d'ici. Ils ont connu beaucoup de petits succès. Ils acquis du respect à l'étranger non pas à cause des politiques du gouvernement, mais bien en dépit de celles-ci.
À la lumière de la tragédie qui a frappé au moins l'une de nos familles militaires récemment, nous devons nous rappeler encore une fois que les hommes et les femmes de nos forces armées qui nous défendent et qui nous protègent méritent que leur Parlement et leur gouvernement national se fixent comme priorité de les défendre et de les protéger à leur tour.
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Madame la Présidente, je commencerai par féliciter le leader de l'opposition ainsi que le motionnaire, le député de Carleton—Mississippi Mills, qui possède une grande expérience pratique personnelle, ayant lui-même servi dans les Forces canadiennes. Je sais que les députés présents et les Canadiens en général écouteront avec un vif intérêt ses observations et ses points de vue.
Je voudrais reprendre là où le chef de mon parti a laissé, à savoir la position des Forces canadiennes dans le monde aujourd'hui, et leur capacité d'exercer leurs lourdes responsabilités et de répondre fièrement aux attentes des Canadiens.
Comme le chef de mon parti l'a dit, un simple survol historique nous dira rapidement que notre pays s'est forgé une identité sur les champs de bataille loin de nos rives. Le sang que nos forces ont versé au nom des Canadiens pour défendre la liberté et d'autres valeurs devrait nous inciter tous à songer sérieusement aux dangers et aux périls auxquels nos forces sont exposées même aujourd'hui. En fait, les risques sont encore plus grands maintenant, comme on l'a vu très récemment.
Avec la montée du terrorisme dans le monde et le raffinement constant des groupes terroristes, nos forces ont certes besoin de technologie et de matériel, mais il n'en demeure pas moins qu'il restera toujours l'élément humain, c'est-à-dire qu'il devra toujours y avoir des gens qui accepteront de porter l'uniforme, qui voudront se battre pour protéger la souveraineté, la liberté et le rôle de notre pays dans le monde et protéger d'autres pays également.
C'est précisément sur la triste réalité que constitue la piètre qualité du matériel et du soutien accordés à nos forces que nous attirons l'attention de la Chambre aujourd'hui avec la présente motion. Je ne prétends pas parler au nom des députés présents et des militaires canadiens, mais je suppose que la dernière chose que les Canadiens veulent, c'est qu'un parti tente de tirer des avantages politiques du présent débat. Ce qui s'impose, c'est faire en sorte que nos forces armées obtiennent les ressources et le soutien nécessaires pour pouvoir faire leur travail.
De toute évidence, nous avons observé un recul et un repli complet dans l'application pourtant nécessaire d'un plan relatif au matériel et au soutien que les membres des forces armées ont le droit d'attendre de leur propre gouvernement. Ce n'est pas là un point de vue exclusif à l'opposition ni une observation partisane.
Cette réflexion, c'est aussi celle de la vérificatrice générale, d'observateurs indépendants et de gens qui s'y connaissent, comme les journalistes de la revue Jane's, qui observent les mesures prises par divers pays pour réagir à ces menaces mondiales. L'ambassadeur des États-Unis a tenu au sujet de l'état de nos forces armées des propos qui devraient tous nous alarmer. C'est une menace tout à fait réelle et de plus en plus lourde qui pèse sur notre sécurité en général en Amérique du Nord.
Nos forces armées sont victimes d'un sous-financement chronique depuis dix ans. Nous n'avons pas vu de livre blanc qui décrirait avec exactitude l'état actuel des forces armées, ce qui nous permettrait de savoir où se situent les besoins les plus criants et quelles sont les plus grandes priorités. Par le passé, on a tenté de remédier à la situation au moyen d'expédients, mais cela n'a fait que l'exacerber.
Ces dix dernières années, nous avons assisté à un déclin sans précédent dans de nombreux secteurs, et les décisions prises par le passé reviennent nous hanter. On a tenté de rogner sur les coûts en se contentant de remèdes superficiels alors que les forces armées étaient gravement atteintes.
Mon collègue de Prince George, en Colombie-Britannique, a parlé de l'état des logements. Ils sont dans un état déplorable. Nous avons vu diminuer le nombre de personnes disposées à servir dans les forces armées. Celles-ci ont été incapables de recruter et de former du personnel, incapables même de fournir de vraies munitions pour des exercices d'entraînement. Imaginez! Les soldats n'ont pas les fusils et les munitions qu'il faut tandis que nous dépensons plus de 2 milliards de dollars pour enregistrer les armes de chasse au Canada. Et nous ne pouvons fournir des fusils à nos forces armées.
Comparons. Nous avons engouffré 250 millions de dollars dans le scandale des commandites et nous n'avons pas assez d'argent pour acheter du matériel. Nous avons acheté des jets pour le gouvernement. Et l'interminable saga des hélicoptères se poursuit. C'est peut-être la plus grande tromperie dont les militaires canadiens ont été victimes. Le marché a été annulé et nous sommes encore enlisés dans un différend contractuel.
Cela montre que le gouvernement n'a manifestement pas de priorité et est incapable de comprendre la situation désespérée qui prévaut actuellement au sein des Forces canadiennes. Ainsi, on va même jusqu'à envoyer des militaires dans une zone de guerre, vêtus d'uniformes vert forêt alors qu'ils sont dans le désert. Autant leur faire porter des vestes de chasse orange.
Imaginez le sentiment de danger et d'humiliation que ces soldats ont dû ressentir lorsqu'ils ont eu à échanger leurs bottes et leurs casques en arrivant dans la zone de guerre. Il s'agit là de situations réelles qui mettent de vraies vies en danger et le gouvernement doit porter le poids de ces décisions.
L'état actuel de la situation, auquel a fait référence le chef de l'opposition, et les tentatives du premier ministre d'escamoter ce qui est arrivé et de laisser entendre qu'il y aura sous peu du financement adéquat et qu'une aide est imminente, faussent la réalité. Quand on considère ce que le premier ministre a dit sur la façon dont il s'y prend pour régler la crise, tout porte à croire que la situation se détériore encore davantage.
Le ministre de la Défense nationale, qui est ici, a fait des déclarations à la Chambre qui inciteraient les Canadiens à croire que le gouvernement a investi massivement dans les forces armées. Lorsqu'on examine les budgets et les coupures qui ont été effectuées dans ce ministère, on se rend bien compte que ces déclarations sont dénuées de fondement.
Le premier ministre se vante de certaines acquisitions qui ont été faites. Pourtant nous savons que le Plan d’investissement en capacité stratégique de la Défense nationale, dont le premier ministre a lui-même fait l'annonce, accuse un manque de fonds de 20 milliards de dollars, ce qui représente 75 p. 100 du budget du matériel militaire pour les 15 dernières années. Un déficit de 75 p. 100. Comment le ministre peut-il faire concilier cette réalité avec les chiffres qu'il a présentés à la Chambre des communes, et par conséquent, à la population canadienne?
Ce tour de passe-passe est dangereux. Il met la vie de personnes en danger et contribue au déclin de nos fières Forces canadiennes. Il est tout simplement incroyable que le premier ministre puisse prendre la parole en cette enceinte et dire aux Canadiens qu'il a réglé la crise, comme l'a mentionné mon chef, et qu'il apporte une solution pour toute une génération. C'est de la poudre aux yeux, car la réalité est tout autre.
La réalité, c'est qu'il n'a pas réglé la crise qui sévit à la Défense nationale. Il n'a pas approuvé la totalité des 27,5 milliards de dollars qui sont nécessaires uniquement pour l'équipement. Cela ne contribue en rien à corriger les problèmes d'enrôlement et de recrutement pour que nos forces armées aient l'effectif complet dont elles ont besoin, soit 80 000 militaires.
En guide de comparaison, il y a davantage d'agents de police en service actif dans la ville de New York que le Canada ne compte actuellement de militaires dans ses forces armées. Nous demandons à nos militaires de jouer un rôle de pacificateurs, de soldats et d'artisans de la paix en s'interposant entre des factions belligérentes à l'étranger. Pour ce faire, ils ont besoin d'une formation adéquate et d'équipement.
Maintien la paix, c'est un bel énoncé, que notre pays accepte avec une grande fierté. Les Canadiens prennent très à coeur l'état de leurs forces de maintien de la paix, pourtant composées de militaires. Ceux-ci ont un travail très dangereux à accomplir. Ils mettent jusqu'à leur existence en péril. Leurs familles attendent, au Canada, leur retour dans des habitations inférieures aux normes. Nombre de ces familles ont choisi d'habiter en dehors des réserves militaires, vu l'état des habitations. Souvent, ces habitations sont préjudiciables à leur santé en raison de la présence de plomb, de la pauvre qualité de l'eau et des conditions environnementales.
Il est plus que temps de s'attaquer de front à cet état de choses. Nous n'insisterons jamais assez sur l'urgence de la situation et sur l'extrême détresse dans laquelle se trouvent les membres des forces armée canadiennes, au pays comme à l'étranger. Les besoins sont criants et les Canadiens s'attendent à ce que leur gouvernement fasse simplement ce qu'il faut pour financer adéquatement les forces armées et qu'il comble immédiatement le déficit.
En conclusion, au nom du Parti conservateur du Canada, je donne l'assurance personnelle que nous respecterons et appuierons nos forces armées et continuerons à jouer pleinement notre rôle, au sein de l'opposition, pour porter cette question à l'attention de la Chambre et pour amener le gouvernement à procéder aux investissements indispensables dans nos forces armées. Je remercie les hommes et les femmes qui continuent à accomplir cette tâche très importante pour le compte des Canadiens, que ce soit au pays ou à l'étranger.
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Madame la Présidente, j'aimerais tout d'abord féliciter le chef de l'opposition et le député de Central Nova de la présentation de cette motion à la Chambre. J'ai hâte d'entendre les observations du porte-parole de l'opposition pour mon ministère, le député de Carleton—Mississippi Mills. Comme on l'a fait remarquer, sa présence est un plus pour la Chambre.
Je crois qu'il est important que nous ayons des occasions de faire ce que nous faisons aujourd'hui et que nous tiendrons à la Chambre de nombreuses discussions approfondies sur ces importantes questions d'actualité. Les Canadiens n'attendent rien de moins. La défense est l'une des responsabilités les plus importantes et les plus cruciales d'un gouvernement, chose que le gouvernement actuel reconnaît et à propos de laquelle il agit.
Les forces armées en général et la marine en particulier ont fait l'objet de beaucoup de discussions récemment pendant la Période des questions et maintenant au Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants. Toutefois, je me réjouis du dialogue d'aujourd'hui. Il ne fait pas de doute que nous devons soutenir les hommes et les femmes des Forces canadiennes, qui accomplissent leur important travail pour nous.
Je souscris entièrement aux propos du leader de l'opposition au sujet de la contribution que nos forces armées ont faite à l'histoire du Canada et à sa création. Nous leur devons ce que nous sommes aujourd'hui et nous leur devons cette reconnaissance. Il nous faut maintenant prendre le temps de réfléchir avec un esprit critique à ce que nous, comme pays, attendons de nos forces armées, et le débat d'aujourd'hui s'inscrit dans ce processus.
Les députés ne seront guère surpris d'apprendre que je rejette complètement le préambule de la motion. Le député de Central Nova a nié l'idée selon laquelle il s'agirait d'un débat partisan, mais il s'est rapidement laissé aller à l'hyperbole et à de fausses analogies sur lesquelles le député d'Elmwood—Transcona, qui a bonne mémoire, a eu la gentillesse d'attirer notre attention.
Nous devrions tous nous réjouir de l'occasion de débattre des rôles des Forces canadiennes et de déterminer ce qui constitue la sécurité du pays. J'espère démontrer à la Chambre que le gouvernement s'est engagé dans le processus même qui est exposé dans le dispositif de cette motion.
Comme les députés le savent, le gouvernement est en train de terminer un examen de la politique en matière de défense, de concert avec une étude générale de la place du Canada dans le monde. Il fait cela justement pour régler certaines questions soulevées par le chef de l'opposition et le député de Nova-Centre. Les critiques qu'ils ont formulées au sujet du plan d'immobilisations et de la capacité stratégique sont justement le genre de questions que nous devrions examiner ensemble dans le cadre de cet examen capital.
[Français]
En gros, cette révision de notre politique de défense nous permettra d'établir les grandes priorités du Canada en matière de défense et de déterminer les types de forces armées dont nous aurons besoin dans les années à venir. Son objectif principal sera de nous fournir une politique de défense efficace et à la mesure de nos moyens, c'est-à-dire une politique adaptée aux réalités d'aujourd'hui et de demain.
Je crois que tous les membres de cette Chambre conviendront que le Canada fait face actuellement à des problèmes de sécurité et de défense extrêmement complexes. En ce début du XXIe siècle, nous sommes confrontés à de nouvelles menaces comme le terrorisme international, la prolifération d'armes de destruction massive et le danger que représentent les États en faillite ou en voie de le devenir. À ces facteurs de déstabilisation traditionnels viennent s'ajouter de nouvelles menaces, comme les crises environnementales, les troubles civils et les pandémies.
En deux mots, la frontière entre la sécurité et la défense est de moins en moins claire, si elle n'est pas disparue complètement. Ce phénomène a une incidence considérable sur la façon dont nous abordons la sécurité nationale et continentale, nos relations avec nos proches alliés et partenaires, ainsi que la protection—et la projection—de nos intérêts et de nos valeurs à l'étranger.
Partout dans le monde, différents pays sont en train d'adapter—de transformer même—leurs forces armées pour qu'elles puissent répondre aux impératifs stratégiques du XXIe siècle. C'est le cas, par exemple, de nos alliés de l'OTAN, comme les États-Unis, le Royaume-Uni, les Pays-Bas et d'autres.
C'est exactement ce que nous voulons accomplir avec la révision de la politique de défense. Cette révision déterminera l'équilibre approprié entre les responsabilités nationales et internationales de nos forces armées. Elle nous donnera également des moyens d'améliorer la sécurité des Canadiens à l'intérieur de nos frontières. Ce processus s'est amorcé avec l'adoption de notre politique de sécurité nationale, la première dans l'histoire de ce pays.
Parmi les optiques que nous devons maintenant examiner, il y a l'accroissement de notre capacité de surveillance et de lutte contre le terrorisme et l'augmentation des effectifs et des capacités de réserve pour faire face aux crises nationales.
Notre sécurité et notre protection se doivent plus que jamais d'être envisagées dans un contexte continental. Nous sommes plus forts lorsque nous travaillons conjointement avec nos partenaires américains. C'est pourquoi la révision de la politique de défense examinera des façons nouvelles et innovatrices de collaborer avec les États-Unis à la défense de l'Amérique du Nord contre les menaces émergentes.
Au plan international, la révision bâtira sur l'approche multidimensionnelle du gouvernement en ce qui concerne les interventions à l'étranger, et elle examinera comment les Forces canadiennes pourront continuer à participer à une grande variété d'opérations internationales.
Nous nous attendons à terminer la révision cet automne, après quoi nous solliciterons l'opinion des comités parlementaires. Je crois que tous les députés conviendront que ce processus permettra à tout le monde d'exprimer son opinion et de contribuer au débat.
Cela dit, je tiens à souligner que j'ai hâte de travailler avec tous les députés de cette Chambre pour déterminer la voie à suivre dans le domaine de la défense.
[Traduction]
Alors que nous songeons à préparer les Forces canadiennes pour l'avenir, il nous faut d'abord et avant tout reconnaître les compétences, le professionnalisme et la capacité impressionnante de nos forces armées actuelles.
Ces dernières années, à titre de ministre des Affaires étrangères, et maintenant, à titre de ministre de la Défense, j'ai eu l'honneur de constater directement le travail exceptionnel accompli par les hommes et les femmes membres des Forces canadiennes dans des endroits aussi différents que la Bosnie, l'Afghanistan, Haïti et dans d'autres pays du monde.
Je suis extrêmement fier de nos hommes et de nos femmes en uniforme. Ils ont constamment répondu aux attentes et les ont même très souvent dépassées; aussi, dans cette optique, laisser entendre, comme le font le préambule de la motion et une bonne partie des observations des députés de l'opposition, que nos militaires ne peuvent s'acquitter de leur travail convenablement, c'est, à mon avis, manquer de respect envers les membres des Forces canadiennes.
Examinons pendant quelques minutes la nature de leur travail. Je pense aux efforts surhumains que déploient nos techniciens affectés aux activités de recherche et sauvetage, pour qui, une soirée typique peut consister à s'exposer aux pires conditions imaginables pour aider quelqu'un dans le besoin ici même, dans notre pays. Je pense aussi aux jeunes marins déterminés du NCSM Calgary qui allaient inspecter des navires à la cargaison douteuse dans la chaleur accablante du golfe Persique.
Je suis convaincu que les Forces canadiennes comptent parmi les plus efficaces et les plus compétentes dans le monde. Les Canadiens peuvent avoir la certitude que nos forces terrestres, navales et aériennes peuvent être déployées, au besoin, et que nos militaires peuvent se battre aux côtés des meilleurs de la planète.
Il y a deux ans, aux côtés des forces américaines, le contingent de militaires canadiens déployé en Afghanistan s'est attaqué aux vestiges du régime oppressif des talibans, sans parler des terroristes d'Al-Qaïda, dans une région très hostile. La contribution extraordinaire de ces militaires leur a valu des éloges de la part de nos alliés américains. L'opposition ferait bien de le reconnaître et de reconnaître aussi que ces militaires, munis du matériel nécessaire, avaient une mission dangereuse à accomplir et qu'ils l'ont accomplie.
Nous sommes retournés en Afghanistan l'année dernière dans le cadre d'une mission différente, mais tout aussi importante. Avec 2 000 militaires des Forces canadiennes à Kaboul, la capitale afghane, notre contingent était le plus grand de la Force internationale d'assistance à la sécurité dirigée par l'OTAN. Sous la gouverne compétente du lieutenant-général Rick Hillier, le Canada a assuré le commandement de l'ensemble de la mission internationale pendant six mois. Cette mission compte parmi les plus importantes à avoir été dirigée par un membre des Forces canadiennes depuis la crise de Suez en 1956.
Je me permets de rappeler aux députés d'en face qui dénigrent ce type de mission en disant que les Canadiens sont mal outillés et mal préparés que ce sont nos alliés de l'OTAN qui ont choisi les Canadiens pour diriger cette mission. Nos alliés de l'OTAN étaient prêts à envoyer leurs militaires en mission sous le commandement d'un officier canadien. C'est le signe que la famille des nations reconnaît la compétence de nos militaires, plutôt qu'une attaque de deux camps à la Chambre.
Dans le golfe Persique, on reconnaît largement notre marine pour ses compétences et les activités de répression de la contrebande et d'arraisonnement qu'elle mène. En 2003, la Marine canadienne a dirigé une force multinationale comptant plus de 20 navires dans le golfe Persique.
Comment peut-on avoir des doutes sur les compétences de nos forces? Les députés sauront certainement reconnaître que la situation que je viens d'exposer ne peut pas laisser croire à une dégradation des capacités de nos forces.
[Français]
Il faut faire mieux. Depuis 1999, ce gouvernement a investi plus de 10 milliards de dollars d'argent neuf dans la défense pour que nos Forces canadiennes aient les moyens de fonctionner efficacement au XXIe siècle. Seulement dans le budget 2004, ce gouvernement a affecté 1,6 milliard de dollars d'argent neuf à la défense.
Ce gouvernement de l'actuel premier ministre a affecté plus de 7 milliards de dollars à l'achat de nouveaux équipements pour les Forces canadiennes, y compris plus de 3 milliards de dollars pour les nouveaux hélicoptères maritimes, plus de 2 milliards de dollars pour les navires de soutien interarmées, plus de 1 milliard de dollars pour les nouveaux avions de recherche et de sauvetage et environ 700 millions de dollars pour les systèmes de canon mobile. Cela, c'est de l'équipement neuf.
Ces nouveaux équipements renforceront les capacités de pointe que les Forces canadiennes possèdent déjà comme nos véhicules de reconnaissance Coyote, nos nouveaux véhicules d'infanterie légers, les G-Wagen, nos frégates et navires de défense côtière de première classe ainsi que nos chasseurs CF-18 et avions de surveillance Aurora modernisés.
Dois-je rappeler aux députés de la Chambre que nos véhicules blindés légers, les Lavs-III, qui sont fabriqués à London en Ontario—notre président de comité serait bien content de cette référence—, sont également maintenant vendus à d'autres forces armées à travers le monde.
[Traduction]
Le gouvernement reconnaît que nous pouvons et devons en faire encore plus pour nos forces armées. Et nous ne restons pas sans bouger pendant l'examen de notre politique de défense.
Dans le récent discours du Trône, le gouvernement s'est engagé à ajouter 5 000 membres à nos forces régulières afin que nos militaires puissent contribuer encore davantage à faire respecter la paix, la sécurité et la démocratie dans les pays secoués par des conflits.
Nous prenons aussi les mesures nécessaires pour ajouter, comme nous l'avons promis, 3 000 membres à la réserve. Une réserve plus forte nous permettra non seulement de soutenir nos troupes en mission à l'étranger, mais permettra également de doter le Canada d'une capacité essentielle, soit celle de pouvoir réagir en cas de crises nationales, notamment d'attentats terroristes, d'urgences chimiques, biologiques et nucléaires et de catastrophes nationales.
Ce sont là les engagements les plus importants que nous avons pris en matière de défense en plus de dix ans. Ils traduisent bien la détermination du gouvernement à moderniser et à renforcer les Forces canadiennes.
Je tiens à préciser une chose. Contrairement à ce que la motion laisse entendre, la hausse de l'effectif des Forces canadiennes ne se fera pas au détriment de nos ressources actuelles. Je le répète, nous n'allons pas déshabiller Pierre pour habiller Paul. Les troupes supplémentaires seront subventionnées grâce à une nouvelle injection de fonds de la part du gouvernement. Je m'applique à faire inscrire ces nouveaux crédits dans le prochain budget fédéral. J'espère pouvoir compter sur la collaboration de mes collègues d'en face pour faire avancer ce dossier.
Le gouvernement tient à veiller à ce que les membres des Forces canadiennes soient prêts à toute éventualité et à ce qu'ils obtiennent la formation et le matériel dont ils ont besoin pour jouer leur rôle respectif tant pour défendre le Canada, ou encore l'Amérique du Nord, avec l'aide de nos alliés américains, que pour remplir les missions à l'étranger que leur confie le gouvernement.
Il est vrai que, ces dernières années, nos forces armées ont été de plus en plus appelées à intervenir dans des conflits aux quatre coins de la planète. Chaque mission, que ce soit en Afghanistan, en Bosnie, en Éthiopie, en Érythrée ou en Haïti, représentait des défis uniques.
En relevant ces défis, nos forces armées se sont taillé la réputation enviable d'appliquer les meilleures valeurs canadiennes pour contribuer à rétablir la sécurité et à alléger la souffrance dans certaines des régions les plus perturbées de la planète.
Nos forces armées ont montré qu'elles étaient capables de s'adapter à des milieux à la fois différents et difficiles. Elles travaillent avec les Affaires étrangères et l'ACDI pour intégrer des éléments de diplomatie, de défense et de développement dans une approche qui accroîtra l'efficacité des interventions du Canada sur la scène internationale. Elles sont devenues une ressource indispensable dans la recherche de la paix et de la sécurité à l'échelle mondiale. Leur expérience nous a permis d'apprendre que le monde veut profiter encore plus de leurs services.
Tous les Canadiens peuvent être fiers de leur contribution. Je sais que les Canadiens suivront avec intérêt les débats à la Chambre pendant que nous réaliserons l'examen de la défense et établirons les lignes directrices qui permettront à nos forces armées de relever les défis de l'avenir.
Le gouvernement s'est engagé à atteindre ce but, et nous appuyons cet engagement au moyen de nouveaux investissements considérables dont j'ai parlé un peu plus tôt. Nous reconnaissons aussi, bien sûr, comme c'est le cas de tous les pays qui veulent transformer leurs forces armées, qu'il faut en faire plus, mais qu'il faut le faire intelligemment et clairement. Il faut définir le rôle des forces armées. Il faut définir leur mission. Il faut étudier quels types d'investissements devraient être faits dans l'équipement et la formation. Cela sera notre tâche dans le cadre de l'important examen de la défense.
Mettons-nous donc au travail dès maintenant, non pas en nous attardant aux querelles partisanes du passé, mais en reconnaissant le rôle important que nos forces armées ont joué jusqu'à présent et en montrant notre détermination collective à travailler ensemble pour faire fond sur nos réalisations en vue d'améliorer une de nos plus précieuses institutions nationales de manière à ce qu'elle puisse continuer de nous défendre tout en contribuant à la sécurité de ceux qui vivent dans des conditions plus difficiles que les nôtres.
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Monsieur le Président, vous me permettrez de prendre quelques minutes pour saluer mes électeurs de Saint-Jean. C'est mon premier discours en Chambre depuis l'élection et je voudrais les remercier de la confiance qu'ils m'ont témoignée une quatrième fois. J'ai un rôle bien modeste là-dedans. La population de Saint-Jean, comme tous les habitants du Québec, ont compris que le Bloc québécois était actuellement leur meilleur véhicule pour défendre leurs intérêts. Je voulais dire aux gens de Saint-Jean que j'ai bien apprécié leur prise de position et que je les servirai du mieux que je peux pendant les prochains mois ou les prochaines années, selon le temps qui sera octroyé à la Chambre avant la prochaine élection.
Aujourd'hui, je suis heureux de livrer la position du Bloc québécois sur la question qui est devant nous. Dans l'Ordre projeté des travaux, on présente cela comme « Politiques de défense nationale ». Effectivement, la motion qui nous est proposée par le Parti conservateur parle de « politiques de défense nationale dépassées ». Toutefois, pour nous, il y a une contradiction dans cette motion. En effet, tout en disant cela dans le premier paragraphe, on dit aussi qu'il faut injecter des sommes importantes pour maintenir les capacités « des forces aériennes, terrestres et maritimes ». Relativement à cette motion, on campe immédiatement notre position: on ne sera pas d'accord avec celle-ci et je tenterai de vous expliquer pourquoi.
J'ai entendu le ministre de la Défense nationale et son secrétaire parlementaire nous déclarer qu'on aura une politique de défense très prochainement. Je tiens seulement à rappeler audit ministre qu'on entend cela depuis plusieurs années, et on attend depuis plusieurs années. Maintenant, ils ont peut-être l'air d'être sérieux, mais l'ex-ministre Eggleton était sérieux lui aussi. L'ex-ministre de la Défense, qui est maintenant ministre du Revenu national, était aussi sérieux. Néanmoins, la politique de la défense ne s'est pas faite.
Maintenant, avec cette motion—on dénonce aussi le gouvernement sur cet aspect—, on est en train de dire qu'on va injecter d'autres sommes d'argent pour rétablir certaines choses. Je concède que les forces armées canadiennes ont perdu beaucoup de crédibilité depuis plusieurs années, probablement à cause d'un sous-financement. Par contre, il ne faudrait pas oublier qu'on peut parler d'un sous-financement, mais le budget de la Défense a augmenté de quelque 40 p. 100 depuis ces dernières années. En effet, en 1998, le budget se chiffrait à 8 milliards de dollars, et aujourd'hui , il est de 13 milliards de dollars. On a donc quand même injecté de l'argent dans la Défense.
Je surprendrai peut-être bien des gens, mais nous nous sommes toujours objectés à l'injection d'argent supplémentaire. Pourquoi? Parce qu'on ne sait pas où l'on s'en va. Quand une petite famille décide d'acheter un véhicule pour se rendre au travail, elle ne s'achètera probablement pas un camion à dix roues, elle s'achètera peut-être une petite Volkswagen si elle n'a pas besoin de plus que cela. Un entrepreneur en construction qui, pour son entreprise, a besoin de transporter du matériel s'achètera peut-être un dix-roues plutôt qu'une Volkswagen.
Ici, on ne sait pas quelle sera la nouvelle politique. Je vous rappelle qu'elle est dépassée. Elle date de 1994. Du côté de la sécurité des Forces canadiennes—ce que je dirai là s'applique internationalement—, le 11 septembre a tout changé. Depuis des décennies, des siècles et même des millénaires, les armées se sont toujours affrontées en uniforme. On connaissait notre adversaire, on le voyait évoluer dans un théâtre d'opérations. On voyait ses manoeuvres. On étudiait ses doctrines qui étaient souvent des doctrines millénaires, à savoir comment il conçoit un théâtre d'opérations, comment il veut gagner ses propres guerres. Depuis 2001, tout cela a changé énormément. En effet, on ne voit plus nos adversaires aujourd'hui. On sait qui ils sont. On sait qu'ils appartiennent probablement à des groupes militants d'extrême-droite ou d'extrême-gauche, mais ils ne s'habillent pas d'une certaine façon pour démontrer qui ils sont. Ils ne se disent pas: « Moi, si je porte aujourd'hui un uniforme, c'est parce que je défends cette cause et que j'ai l'intention de vous attaquer. » Cela change complètement les doctrines qui ont cours depuis des millénaires.
Comme je le disais tout à l'heure, le 11 septembre a changé cela. La plus grande armée au monde—tout le monde conviendra que c'est celle des États-Unis—n'est même pas capable de contrer ce type d'attaque. En effet, les Américains n'ont pas été capables de voir venir l'attaque du 11 septembre. Des enquêtes ont eu lieu. Est-ce que l'utilisation d'un bouclier spatial réglera la question de l'utilisation d'avions pour détruire des immeubles et frapper des intérêts canadiens, américains ou européens?
Est-ce que ce sera avec la plus forte armée au monde, la plus grande infanterie au monde, la plus grande aviation au monde, la plus grande marine au monde que sont les Américains? Non. Ils ne pourront pas régler cette question comme cela.
C'est pour cette raison que depuis plusieurs années, nous demandons une révision de cette politique. En attendant, on voit les achats que fait le gouvernement. Le ministre en a parlé et j'ai des exemples à vous donner. Effectivement, on a annoncé des achats pour une valeur d'environ 7 milliards de dollars.
À cet égard, il y a plusieurs choses à dire. Tout d'abord, il y a le nouveau véhicule qui s'appelle le Striker. Cela semble vouloir dire qu'on passe maintenant à une politique plus offensive. Il y a un gros débat à ce sujet.
Concernant les chars d'assaut, il y a des gens dans l'armée canadienne qui ne sont pas tout à fait d'accord avec le fait que les chars d'assaut sont envoyés à la ferraille et qu'ils seront remplacés par des véhicules à chenilles ou à roues, mais qui ne sont certainement pas des véhicules blindés.
À ce sujet, on entend dire toutes sortes de choses. Beaucoup de lobbyistes nous disent: « On ne peut pas laisser aller les chars d'assaut. Regardez ce qui se passe en Irak, on en a besoin ». Donc, la situation est loin d'être claire à cet égard.
De plus, ce sont les lobbyistes et les grandes compagnies militaires qui en profitent. Ils font très bien leur travail et convainquent ce gouvernement d'acheter du matériel, même si le Canada n'a pas de politique de défense et même si nous ne savons pas où nous allons. On le voit régulièrement. Les soldats qui sont partis en Haïti n'avaient pas le matériel nécessaire. Il a fallu en emprunter. Tout cela parce qu'il n'y a pas de politique de défense, ce n'est pas compliqué.
Que voulons-nous, et surtout que veulent les contribuables canadiens et québécois? Cela est important. Jusqu'à maintenant, on a fait tous ces achats, soit les sous-marins en 1998 puis les Striker ainsi que les hélicoptères Sikorsky. Il y a beaucoup de choses dont on peut parler. Les contribuables n'ont pas été consultés à ce sujet. Pourtant ce sont eux qui payent la facture.
On doit donc se dire que le monde a changé. Je comprends qu'il soit différent d'il y a 2 000 ans, mais seulement depuis 2001, le monde est différent. Avant d'investir dans quoi que ce soit, pourquoi ne pas s'attarder à se faire une idée. Voulons-nous des forces offensives? Voulons-nous accompagner les Américains?
Le discours que nous entendons porte de plus en plus sur l'interopérabilité que nous voulons avoir avec les Américains. Cependant, cela a aussi des conséquences sur la souveraineté canadienne.
En effet, si on veut interopérer avec eux et qu'on envoie des fantassins dans leurs bataillons, à un moment donné, si les Américains décident d'aller en Irak, ou ailleurs, ces fantassins seront peut-être obligés de les suivre. Nous serons peut-être aussi obligés d'acheter des compagnies américaines si nous voulons être entièrement compatibles et opérationnels avec eux. Il y a donc beaucoup d'impacts à ce sujet.
Une politique de la défense nous donnerait les enjeux beaucoup plus clairement, avant que nous procédions à ce type d'achats. Cependant, c'est tout le contraire qui se passe. Au lieu de nous demander quel type d'armée, quel type de Forces canadiennes nous voulons, nous achetons du matériel.
Le danger qui nous guette est qu'on adopte une politique, maintenant, disant que cela n'a pas de bon sens, qu'on ne peut laisser nos hélicoptères Sikorsky à quai, ou sur les plateformes d'envol des bateaux, parce que cela ne concorde plus avec ce dont nous avons besoin. Il y a donc un énorme danger de tracer une politique de défense avec le matériel, en tenant compte du matériel qu'on vient déjà d'acheter.
C'est pour ces raison que nous nous objectons lorsqu'il y a des achats et des annonces comme cela. Ce n'est pas parce que nous n'aimons pas les Forces canadiennes. Nous pensons que c'est important. Je pense que dans un Québec souverain, nous aurons des forces du Québec. Cependant, nous aurons certainement une politique avant d'avoir des forces et nous allons savoir où nous allons avant d'acheter du matériel. J'espère, bien sûr, que nous aurons une partie du matériel canadien, mais, nous laisserons cela à la négociation.
Je veux revenir sur le matériel. J'ai parlé des hélicoptères et des Striker. On dit dans le discours du Trône qu'il y aura 5 000 soldats de plus et au-delà de 3 000 réservistes. Actuellement, il y a peut-être 50 000 ou 55 000 personnes dans les forces armées. Pourquoi en voulons-nous plus? Est-ce pour les envoyer dans des missions de paix? Est-ce pour les envoyer dans des missions offensives avec les Américains? Cela n'est pas spécifié dans le discours du Trône.
Donc, on y va à la pièce. On achète des sous-marins, des hélicoptères, des Striker et des nouveaux jeeps qui vont remplacer les vieux jeeps Iltis. Peut-être est-ce utile.
Si on avait une politique de la défense qui déterminait clairement que nos troupes doivent être équipées de telle façon pour remplir les missions que la politique va définir, cela aurait beaucoup plus de bon sens. On est donc en train de mettre un peu la charrue devant les boeufs.
J'aimerais soulever une autre chose. Il s'agit de la question du bouclier antimissile. Encore une fois, on nous fait des annonces à cet égard et on est témoins que depuis deux ans, cela a évolué. Je me rappelle qu'il y a deux ans, ici, ma collègue et moi avions posé des questions sur l'intention du gouvernement canadien de joindre le bouclier antimissile américain. On nous disait: « Ah! non, on a peut-être des petites discussions avec eux. » Maintenant, il commence à y avoir de très fortes discussions avec eux. De plus, on vient de modifier le traité de NORAD. Tout cela est fait en vue de se préparer à joindre les Américains peut-être à la fin novembre, selon les dernières rumeurs.
Or, quelle est cette politique de la Défense nationale qui date de 1994 concernant le bouclier antimissile? La politique star wars de l'époque de Reagan était révolue à ce moment-là, en 1994. Toutefois, aujourd'hui, cela a de l'impact, cela prend de l'importance. Pourtant, ce n'est pas conforme avec la politique de 1994, ni aux Affaires étrangères ni à la Défense nationale. C'est donc un exemple typique.
Je pense qu'on a démontré notre point de vue. Au Québec, on vient d'un pays pacifiste. Quant à ce type d'armement, on trouve qu'il y a déjà assez d'armement sur Terre. Il faudrait investir nos énergies dans des traités et des conventions qui vont parler de désarmement et de non-prolifération des armes. D'ailleurs, soit dit en passant, c'est un des arguments majeurs qu'on emploie pour étayer notre position contre le bouclier, à savoir que le Canada brise sa tradition multipartite. En effet, on s'entendait avec un certain nombre d'alliés. Tout le monde reconnaissait l'importance du Canada dans les conventions internationales et les protocoles internationaux sur le désarmement et la non-prolifération des armes.
Toutefois, aujourd'hui, le fait qu'on va adhérer à un bouclier antimissile fait en sorte qu'on perd cette crédibilité. C'est quand même dangereux, car c'est quelque chose qui est établi depuis longtemps. Lester B. Pearson a été reconnu en ce sens. Il a reçu un prix Nobel de la paix pour les missions de paix. Les Canadiens et les Québécois sont reconnus pour leur apport à un monde plus pacifiste, non pas pour qu'il soit encore plus militaire. À cet égard, on a vu des changements depuis l'arrivée du nouveau premier ministre. La voie de rapprochement avec les Américains, c'est la voie militaire. À ce sujet, on répond au gouvernement qu'il a complètement tort. Il devrait beaucoup plus se pencher sur des notions et des contacts économiques avec les Américains plutôt que d'encourager des industries militaires américaines et se rapprocher de George W. Bush par la voie militariste. On a beaucoup de difficulté avec cela. Quant à nous, c'est non. C'est non pour le bouclier, c'est aussi non pour l'achat d'équipement sans qu'on ait une politique.
Je conclus ainsi. Comme je le disais tout à l'heure, mes collègues et moi venons d'un pays pacifiste. N'eût été de nous,—je le dis en toute modestie—, je pense que le Canada aurait participé à la guerre en Irak. En effet, le gouvernement trouvait important de se coller sur nos amis américains. Pourtant, on a dénoncé l'illégalité du geste. Aujourd'hui, même le secrétaire général de l'ONU dit que c'était un conflit illégal. Selon moi, n'eût été des Québécois, le Canada aurait accompagné les Américains en Irak. On voit le bourbier actuellement. On voit qu'on a eu raison. Si on avait une politique de la défense et une nouvelle politique des affaires étrangères, cela nous donnerait un cadre, des paramètres et des modalités dans lesquels on pourrait évoluer. Cela justifierait beaucoup plus l'achat de tel type d'équipement ou une participation ou non à des projets qui peuvent être dangereux pour notre diplomatie et notre tradition pacifiste.
Ce n'est donc pas surprenant qu'on ne puisse pas être d'accord avec cet amendement. Comme je le disais au début—et je boucle la boucle—, la motion devant nous aujourd'hui dit que la politique de la défense est dépassée. Si cela s'arrêtait là, on dirait: « Oui, on va voter pour cela, car c'est vrai que c'est dépassé et qu'il en faut une même si cela fait longtemps qu'on a des promesses. » Toutefois, quand on rajoute dans un deuxième paragraphe qu'il faudra maintenir nos capacités de combat et de maintien de la paix sur terre, sur mer et dans les airs, on trouve qu'il y a là un problème. En effet, on ne sait pas si c'est ce qu'on va déterminer en vertu de la politique de la défense.
Je demande également au ministre de faire preuve de transparence lorsqu'il va établir cette politique de la défense. En effet, tout s'est passé en cercle fermé jusqu'à maintenant.
J'en ai donné des exemples tantôt. Le ministre décide qu'il fait une annonce sur telle affaire et personne n'est consulté sauf, probablement, le ministre des Affaires étrangères et, sûrement, le bureau du premier ministre. C'est tout. C'est une poignée d'individus qui sont en train de décider de ce que le contribuable va payer, dans quelles conditions et pourquoi il va le payer. Le contribuable se contente juste d'envoyer ses impôts et ce groupe d'individus est en train de décider pour tout le monde de ce que nous allons faire.
Je rappelle au ministre que sa politique est complètement dépassée, à moins qu'il ne veuille acheter du matériel et calquer sa politique sur le nouveau type de matériel. Pour nous, ceci est une erreur fondamentale. Il faut voir dans quel monde on évolue et quelle participation on veut avoir avant d'acheter l'équipement nécessaire pour satisfaire aux conditions de la nouvelle politique de la défense, ou de la nouvelle politique des affaires étrangères.
Pour tous ces motifs, je vous annonce que le Bloc québécois va être contre cette motion. Je trouve que les Québécois ont eu la juste note lorsqu'ils ont dit non à la guerre. Ils sont traditionnels, avec une position pacifiste. Nous sommes très fiers de notre non-participation à la guerre en Irak. Nous allons être très fiers, tantôt, comme Québécois, de nous doter d'une armée qui pensera beaucoup plus à la paix plutôt q'une armée avec une pensée militariste.
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Monsieur le Président, je veux remercier le député de Saint-Jean pour son discours très fort concernant le besoin de la guerre seulement comme dernière option, et pour son engagement pour un monde de paix.
[Traduction]
Je suis heureux d'avoir l'occasion de prendre la parole sur cette motion. La défense est une question qui préoccupe certes les Canadiens depuis la tragédie survenue récemment à bord du NCSM Chicoutimi. Il semble y avoir un consensus de plus en plus marqué au pays sur le fait que, par le passé, l'aide fournie par le gouvernement à nos forces armées a laissé à désirer, bien que nous ne soyons peut-être pas d'accord sur la façon de remédier à la situation parce nous ne nous entendons peut-être pas sur les formes d'aide dont nos militaires ont besoin. Néanmoins, il semble y avoir un consensus de plus en plus marqué sur la question. Pour utiliser une tournure à la Churchill, je dirais que : jamais a-t-on demandé de plus en plus à si peu de gens de faire toujours davantage avec de moins en moins de ressources. Il me semble que c'est ce que pensent un grand nombre de Canadiens. Même les députés ministériels ont compris que peut-être avec les meilleures intentions, financières et autres, les hommes et les femmes des Forces armées canadiennes ont été placés dans une position où on leur demande de faire le travail du Canada à l'étranger, en termes de maintien de la paix, de rétablissement de la paix et d'autres efforts internationaux, et qu'ils ont de plus en plus l'impression de ne pas avoir les ressources nécessaires pour le faire.
Il y a peut-être lieu de procéder à une réaffectation des ressources au sein du ministère de la Défense nationale. Certes, nombreux sont ceux qui vont affirmer que la Défense nationale est une administration trop lourde et que beaucoup d'argent est consacré aux hauts fonctionnaires, tant militaires que civils. Une réaffectation des ressources est possible, mais j'estime, et je crois qu'il en est de même pour tous les partis, que nous sommes prêts à envisager la nécessité de consacrer plus d'argent de façon absolue à nos forces armées si elles doivent accomplir le travail que nous leur demandons de faire.
Cependant, que voulons-nous exactement qu'ils fassent? C'est là que les points de vue des partis divergent. Je ne pense pas qu'il s'agisse de partisanerie au sens péjoratif. Nous devons tenir un débat dans ce pays et il y aura des opinions différentes. Cela n'est pas de la partisanerie, mais bien la nature même de la démocratie. La partisanerie, au sens péjoratif, c'est exagérer la situation ou continuer à citer des exemples qui manifestement n'ont plus aucune pertinence. Ce fut le cas un peu plus tôt à la Chambre, lorsqu'il a été question des Canadiens arrivant en Afghanistan avec les mauvais uniformes. Je pensais que cette question avait été réglée par les forces armées elles-mêmes au moment de leur comparution devant le comité il y a déjà quelque temps. Je ne pense pas qu'il soit d'aucune utilité pour le débat lui-même de continuer de ressusciter ces questions. C'est une forme de partisanerie dont nous pouvons nous passer.
Parfois, les partis s'entendent entre eux. C'est ce qui est arrivé hier. Nous avons eu de nombreux échanges entre libéraux et conservateurs à la Chambre aujourd'hui. On pourrait croire qu'ils ne s'entendent sur rien, mais c'est tout le contraire. Hier, au Comité des affaires étrangères, ils sont convenus de s'allier pour rejeter une motion appuyée par le NPD et, apparemment, le Bloc Québécois, relative à la tenue d'audiences publiques sur la question de la participation du Canada au système national de défense antimissile balistique que George Bush propose aux États-Unis et auquel il invite le Canada à se joindre.
Il arrive que les apparences soient trompeuses. D'une certaine façon, lorsqu'il s'agit de la plus importante décision que devra prendre le Canada dans un proche avenir en matière de politique étrangère et de défense, ils ne font qu'un. Ils font un sur le fond mais aussi sur le processus. Ils ne font qu'un sur le fond, car il a toujours été clair que le chef du Parti conservateur est en faveur de la participation du Canada à la défense antimissile balistique. S'il a changé leur position, les députés de l'autre côté n'ont qu'à prendre la parole et me dire que ce n'est plus le cas et qu'ils sont maintenant indécis ou quelque chose du genre. Cependant, ils ne sont certainement pas contre.
Pour ce qui est du processus, hier libéraux et conservateurs marchaient main dans la main au Comité des affaires étrangères en refusant au public canadien l'occasion de comparaître devant ce comité partout au pays pour s'exprimer sur l'opportunité d'une participation canadienne.
Si le gouvernement envisage d'autres façons de consulter les Canadiens, qu'il le dise. Il a accepté une motion, un amendement au discours du Trône, selon lequel la décision ne serait prise qu'à la suite d'un vote à la Chambre des communes et après que toute l'information pertinente aurait été communiquée. À qui va-t-on la communiquer? Comment les Canadiens auront-ils l'occasion de réagir à cette information, en supposant qu'elle soit adéquate et complète? S'agira-t-il d'une sorte d'exercice intra-muros, comme l'a été à ce jour l'examen par le gouvernement de la politique étrangère, ou allons nous effectivement donner aux Canadiens l'occasion de s'exprimer sur la question? Nous avons le temps. Nous pouvons le faire.
Pour ce qui est de la motion des conservateurs, elle laisse entendre que la politique libérale est nettement désuète, ce qui est vrai. De toute évidence, le Livre blanc de 1994 est désuet. Je crois que même le ministre de la Défense ne prendrait pas la parole ici aujourd'hui pour nous dire qu'il s'agit d'une description adéquate du monde et de ce que devrait être le rôle du Canada dans le monde.
Il se peut que le Livre blanc de 1994 n'ait jamais constitué une description adéquate de ce qu'était le monde, mais laissons ce débat aux historiens. Il est vrai cependant que, aujourd'hui, nous vivons dans un monde entièrement différent, comme certains l'ont déjà souligné, à savoir le monde d'après le 11 septembre 2001. Les réalités géopolitiques ne sont plus les mêmes. Les États-Unis sont devenus l'unique superpuissance mondiale. Il s'agit d'un monde unipolaire et non plus bipolaire comme durant la guerre froide. Dans ce monde, le terrorisme foisonne et prend de multiples formes, et non seulement celles d'organisations comme Al-Qaïda. Nous vivons dans un monde d'États avortons et de prolifération d'armes nucléaires.
Nous ignorons toujours où se trouve tout le matériel nucléaire que possédait l'ancienne Union soviétique. Où est-il passé? Le Canada et d'autres pays s'efforcent de déclasser des installations et des armes nucléaires, de localiser ces armes ou de s'assurer qu'elles ne tombent pas entre les mauvaises mains, mais il y a, un peu partout dans le monde, toutes sortes de matériaux de ce genre dont on ne connaît pas l'emplacement. Bien que la dangereuse époque de la confrontation nucléaire entre l'Union soviétique et les États-Unis soit maintenant révolue, il se pourrait que le monde dans lequel nous vivons aujourd'hui soit encore plus dangereux qu'il ne l'était, à cause de la possibilité que des intervenants non étatiques, dont on ne connaît ni l'identité ni l'emplacement, n'utilisent des armes nucléaires.
Notre époque est également beaucoup plus dangereuse à cause de la doctrine de la guerre préventive adoptée par George Bush. Il a déclaré dans un discours, je crois que c'était le 27 septembre 2002, qu'à l'avenir les États-Unis pourraient avoir recours à des frappes préventives s'ils estimaient, mais ce pourrait être à tort, qu'ils sont sur le point de subir une attaque. Cette doctrine modifie tout l'environnement stratégique d'une manière à laquelle le gouvernement canadien n'a pas encore réagi. Nous devrons pourtant faire connaître notre position en raison des liens étroits que nous entretenons avec les États-Unis sur le plan de la défense de l'Amérique du Nord, et parce que notre voisin attend de savoir ce que nous entendons faire.
Nous vivons dans un monde en mutation, marqué par une polarisation grandissante entre les riches et les pauvres, à l'intérieur des pays mais aussi entre eux. Cette situation est le résultat de 20 années de mondialisation, de libre-échange, de déréglementation et de toutes les autres choses qui ont contribué à déstabiliser le monde sur les plans social, environnemental et économique, sans parler du problème du réchauffement climatique.
Tout n'est évidemment pas lié à la défense, mais je voudrais néanmoins parler brièvement des changements qui surviennent dans le monde et auxquels nous devons réagir.
La motion présentée par les conservateurs est plutôt curieuse. Elle crée, peut-être de façon non intentionnelle, une dichotomie entre le maintien de la paix et les opérations de combat, que les conservateurs ont souvent critiquées. Autrement dit, il n'est pas rare d'entendre des conservateurs et d'autres faire remarquer, à juste titre, que le maintien de la paix n'est plus ce qu'il était à l'époque où nous sommes allés à Chypre. Souvent, il ne semble pas y avoir de paix à maintenir. Il faut plutôt la rétablir et l'imposer. Au fil des années, le maintien de la paix s'est transformé en rétablissement et en imposition de la paix, activités qui placent souvent nos militaires dans des situations de combat.
Par conséquent, on pourrait dire que le motionnaire a, semble-t-il, rédigé cette motion sans être au courant de situations comme celle de la poche de Medak, où les casques bleus canadiens ont dû avoir une capacité de combat pour se défendre et défendre la population, ou sans en tenir compte s'il était au courant.
Je trouve un peu paradoxal que les conservateurs présentent une motion qui semble renforcer cette opposition, car il est important pour les néo-démocrates et nombre de Canadiens, je suppose, que nos casques bleus disposent d'une capacité de combat puisqu'ils vont en avoir besoin dans les situations de plus en plus difficiles où ils seront envoyés.
Le maintien de la paix n'est plus ce qu'il était. Il va donc falloir que nos forces disposent de cette capacité lorsqu'elles seront envoyées dans pareilles situations. On l'a vu de manière assez concrète à un certain nombre de reprises.
Peut-être est-ce cela que voulait dire le secrétaire parlementaire lorsqu'il a dit, bien que ce ne soit pas une citation qu'il souhaite voir diffusée, que « le maintien de la paix, c'est une autre forme de guerre ». Voilà des propos intéressants de la part du secrétaire parlementaire du ministre de la Défense. Ce dernier pourrait peut-être, à un moment donné, nous expliquer ce que son secrétaire voulait dire par là.
Je vois des députés sourire là-bas. Ils voudront sans doute faire un peu de recherche pour savoir ce que cela voulait dire exactement.
Une voix: Sortez vos BlackBerry.
L'hon. Bill Blaikie: Monsieur le Président, quand il s'agit de la politique de défense des libéraux, il y a bien des choses à critiquer. Certes, la première chose qui me vient à l'esprit, c'est le véritable scandale que constitue le dossier du remplacement des hélicoptères Sea King, qui a traîné en longueur et a été géré de manière catastrophique. J'étais à la Chambre lorsqu'a été tenu le débat sur les hélicoptères EH-101. Je pense que, des deux côtés, des arguments légitimes ont été présentés. Cependant, le débat avait également une dimension politique au sens péjoratif du terme.
À l'époque, nous étions opposés à cet achat, mais je puis dire à la Chambre, au moins de mon point de vue, que si j'avais pensé que les conséquences de l'annulation du contrat d'achat de ces hélicoptères seraient que, 11 ans plus tard, les Sea King seraient toujours en service et qu'il faudrait 30 heures d'entretien, ou quelque chose du genre, pour chaque heure de vol, j'aurais peut-être changé d'avis. Je n'avais pas la moindre idée que même les libéraux pourraient aller jusque là. C'est vrai qu'ils ne sont pas des plus rapides. Je crois qu'il leur a fallu quelque chose comme 42 ans pour donner suite à leur promesse concernant la mise en place d'un régime d'assurance-maladie. J'aurais cru qu'ils feraient mieux dans le dossier des hélicoptères.
Or, nous voici 11 ans plus tard, et les hélicoptères n'ont toujours pas été remplacés. C'est absolument scandaleux. Je suis certain que ce sont les magouilles politiques au sein du Parti libéral qui sont en cause, comme dans bien d'autres cas, d'ailleurs. À qui va-t-on attribuer le contrat? Quels amis des gens en place va-t-il enrichir? Et ainsi de suite. Il n'y a pas que dans le cas de la publicité et des commandites que les magouilles politiques internes du Parti libéral sont une entrave.
Mais il n'y a pas que les Sea King. Il faut également parler de la manière dont les libéraux traitent les forces armées, tant le personnel civil que le personnel militaire. Je pense en particulier à la DMPS, la diversification des modes de prestation des services. Ça sonne bien. Ça donne l'impression que quelque chose de positif se passe.
Mais ce qui se passait en fait, c'est que des gens qui étaient syndiqués et qui recevaient un salaire décent pour leur travail en tant qu'employés civils à long terme des forces armées étaient mis à pied et congédiés pour que d'autres, ou peut-être eux même, soient engagés le lendemain par les entreprises à qui l'on avait confié le travail qu'ils faisaient auparavant. Ainsi, pour ce même travail, ils étaient payés la moitié de ce qu'ils recevaient auparavant. Il est fort probable que le dirigeant de l'entreprise à qui avait été confié le contrat avait des liens avec les forces armées ou était peut-être un militaire à la retraite ou quelque chose du genre.
Et c'est ainsi que fonctionnait la DMPS, soi-disant pour économiser de l'argent, mais d'une telle manière que l'on faisait fi de la loyauté du personnel civil des Forces canadiennes et de la qualité des services qu'il assurait.
Un autre bon exemple de ce qui ne va pas, c'est la situation qui existe dans nos forces de réserve, dans la réserve de l'armée canadienne. En 25 ans, je n'ai jamais entendu un député se dire contre l'augmentation des forces de réserve. En fait, depuis 25 ans, tous les députés y sont favorables. Aucun gouvernement n'a eu un prix politique à payer parce qu'il envisageait d'accroître les forces de réserve et, pourtant, cela n'est jamais arrivé. Pourquoi? Je crois que c'est en partie parce que la Force régulière elle-même met des bâtons dans les roues.
On a laissé nos forces de réserve se détériorer. Si nous visitons quelques-uns de nos manèges militaires, nous constatons que ce sont les seuls endroits où nous pouvons avoir l'impression que le temps s'est arrêté. J'avais l'habitude de fréquenter les manèges militaires Minto dans les années 60, lorsque j'étais cadet et que j'appartenais au Queen's Own Cameron Highlanders. Lorsque je visite des manèges militaires aujourd'hui, je remarque que rien n'y a changé.
Il y a des choses que je ne voudrais pas changer, mais il y en a d'autres qui ne fonctionnent plus. J'ai interrogé quelques-uns des militaires là-bas et on m'a dit, par exemple, qu'ils ne peuvent pas utiliser les stands de tir. Qu'est-ce qu'un manège militaire sans stand de tir? Et quand ils en ont un, ils n'ont pas de balles. Ils n'ont pas de munitions. On ne peut pas s'exercer et apprendre à se servir d'un fusil lorsqu'on reçoit deux balles par mois. Cela ne marche pas. Cela ne tient pas debout.
C'est le genre d'outrage que subissent nos forces armées sous la direction du Parti libéral. Je me réjouis donc de constater que, dans le discours du Trône, on s'engage à passer à la troisième étape de l'augmentation de la réserve de l'armée canadienne. J'espère que cela aura lieu.
L'autre point que je veux commenter encore une fois concerne la motion du Parti conservateur. J'ai parlé de la dichotomie entre les opérations de combat ou la capacité de combat dans les missions de maintien de la paix, mais, dans cette motion, les conservateurs semblent également établir une dichotomie entre cette nouvelle brigade de maintien de la paix, de 5 000 soldats supplémentaires, que le gouvernement a dit vouloir créer, et les capacités de combat. Je crois qu'il est trop tôt pour savoir si le gouvernement envisage ou non la création d'une brigade de maintien de la paix n'ayant aucune capacité de combat. Si tel est le cas, cette brigade ne sera pas très utile à la communauté internationale.
En fin de compte, nous souhaitons que les Forces canadiennes constituent une ressource importante, qu'elles soient prêtes et puissent se rendre sur le terrain lorsqu'il le faut, qu'elles aient le matériel nécessaire, pour être une ressource importante à la disposition de l'ONU et pour pouvoir intervenir à l'étranger lorsque le gouvernement du Canada estime que c'est justifié. Elles ne doivent pas être un dispositif interopérable au service de la politique étrangère et de défense des États-Unis, comme les Américains le souhaitaient lorsqu'ils ont déclenché la guerre en Irak.
Le gouvernement libéral a bien fait de refuser de faire la guerre en Irak, mais les décisions ponctuelles comme celle-là, même si elles sont bonnes, ne sauraient remplacer une politique étrangère globale, une politique prévoyant des Forces canadiennes vigoureuses qui nous vaudraient du respect dans le monde et constitueraient une ressource importante à la disposition de la communauté internationale. Cette politique devrait être intégrée à une bonne politique de développement, car, au bout du compte une bonne politique de développement international est une forme de prévention.
Le gouvernement se plaît à parler du droit de protéger. Il existe aussi une obligation de prévenir les situations qui finissent par nous obliger à aller protéger des populations. Nous pouvons pratiquer la prévention en appliquant une politique de développement semblable à celles que nous avions par le passé, en augmentant les budgets de développement au lieu de les diminuer, comme le Parti libéral l'a fait au fil des ans. J'ai parlé de défense, de développement et de diplomatie. Le ministère des Affaires étrangères a subi des compressions. Il n'a pas autant de ressources que par le passé.
Nous devons aussi déployer des efforts concertés pour assurer le désarmement et, tout d'abord, pour éliminer les armes nucléaires. Après la Guerre froide, nous avons eu l'occasion de nous débarrasser des armes nucléaires. Nous l'avons laissé filer, mais il n'est jamais trop tard pour rappeler au monde la nécessité d'éliminer complètement les armes nucléaires et d'autres armes de destruction massive. C'est dire qu'il faut chercher ces armes là où elles se trouvent, et non là où il n'y en pas, comme en Irak.
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Monsieur le Président, jusqu'à la fin de la guerre froide, les deux blocs militaires, l'OTAN et le Pacte de Varsovie, ont établi un ordre international stable grâce à leur énorme puissance militaire et à leur grande influence auprès des États clients du monde entier. Avec l'effondrement du communisme, la stabilité internationale est vite disparue. Les tensions sous-jacentes longtemps réprimées ont malheureusement donné lieu à des États non viables, à de l'épuration ethnique et à du terrorisme qui subsistent encore aujourd'hui.
En 1994, la dernière fois où il a entrepris un examen sérieux de sa politique en matière de défense, le gouvernement n'a pas prévu un changement aussi rapide de l'objet de la menace. À cause des répercussions de cette politique lacunaire sur l'état des forces et de la volonté de profiter des dividendes de la paix, les forces armées ont maintenant une structure inadéquate et leur équipement ou leurs effectifs ne permettent pas de relever les défis d'aujourd'hui et de demain. Au contraire, nos capacités militaires ne cessent de se détériorer. Les forces ne sont tout simplement plus à la hauteur des tâches qui leur sont confiées.
Pour s'acquitter du travail qu'on leur demande actuellement de faire, les Forces canadiennes ont besoin d'un financement annuel constant se situant entre 18 et 19 milliards de dollars. Le gouvernement autorise présentement des dépenses de 13,5 milliards de dollars, c'est-à-dire environ 5 milliards de dollars de moins par année.
Depuis dix ans, le gouvernement a sciemment sous-financé les forces armées, préférant récolter les prétendus dividendes de la paix dans un monde pourtant moins pacifique. Ce laisser-faire a des conséquences avec lesquelles nous devons composer aujourd'hui.
Pendant la dernière campagne électorale, le gouvernement a reproché à notre parti d'insister trop sur les forces armées. À l'époque, nous nous sommes engagés à rétablir la crédibilité de ces dernières en accroissant considérablement leur financement et en ramenant leurs effectifs aux niveaux où ils se trouvaient une dizaine d'années plus tôt.
Dans le cadre de notre plan, nous comptions investir dans du nouvel équipement, veiller à ce que l'équipement actuel soit bien entretenu et à ce que le personnel militaire reçoive la formation individuelle et de groupe nécessaire pour maintenir sa capacité de combat. Cette réalité est fort bien expliquée par le président libéral du Comité sénatorial de la défense, Colin Kenny, qui, le 8 septembre, a déclaré:
...les libéraux ont remporté les dernières élections en proposant un programme en matière de défense qui semblait presque pacifiste comparativement à celui préconisé par leurs adversaires conservateurs. L'équipe de Paul Martin a pris un risque astucieux et calculé en supposant que les électeurs canadiens ne verraient pas, dans la détérioration des forces armées de notre pays, un problème prioritaire.
Après nous avoir dépeints comme des belligérants, le gouvernement libéral a lancé l'idée de créer une nouvelle brigade constituée de 5 000 gardiens de la paix. Cela serait censé régler les multiples problèmes de la défense et nous permettre de jouer efficacement notre rôle sur la scène mondiale.
Même si les forces armées ont désespérément besoin de main-d'oeuvre, l'idée du gouvernement libéral de créer une brigade de gardiens de la paix laisse à désirer. Lorsque nous déployons des soldats à l'étranger dans des situations mettant en cause des États non viables, de l'épuration ethnique et des activités terroristes, ceux-ci doivent être prêts à participer à des opérations de combat pour instaurer la paix et pour assurer leur propre protection.
Les missions traditionnelles de maintien de la paix étaient possibles lorsqu'il y avait deux grands blocs militaires parce qu'on pouvait désamorcer les tensions dans les États-clients. Ce genre d'intervention n'est possible que si les deux opposants peuvent maîtriser leurs forces et qu'ils sont disposés à négocier pour parvenir à un règlement politique.
Compte tenu de la situation actuelle dans le monde, ce genre d'opération est de plus en plus rare. La majorité des déploiements à l'étranger participent à des opérations de rétablissement de la paix. Lorsque nos militaires participent aux opérations de rétablissement de la paix et de stabilisation, ils doivent être prêts à menacer les combattants de recourir à la force, et si les hostilités se poursuivent, ils doivent être prêts à mettre leur menace à exécution. Un soldat qui porte un béret bleu et une arme et qui encourage les gens à dialoguer et à résoudre leurs problèmes ne parviendra pas à rétablir la stabilité.
La bonne façon de préparer les membres de nos forces armées à accomplir leurs tâches, c'est de leur offrir la formation, le matériel et le soutien dont ils ont besoin pour assumer leur rôle le plus difficile, à savoir celui de combattant. Quelques modifications, et ils sont prêts à jouer un rôle plus effacé comme celui de gardien de la paix. Pour employer une analogie avec le civil, disons qu'un gardien de sécurité peut protéger un édifice mais qu'il ne peut pas participer aux interventions de l'équipe d'armes spéciales et tactique de la police. Par contre, un membre de cette équipe peut assurer la protection d'un édifice.
Je crois non seulement que le concept de la brigade de maintien de la paix est boiteux, mais également que le gouvernement ne devrait pas créer de nouvelles formations militaires, alors que le reste des forces armées manque de matériel, de formation et d'effectif.
Les 5 000 membres et l'argent requis pour leur matériel, à savoir quelque 2 milliards de dollars, devraient être consacrés à rétablir les capacités de combat actuelles des forces armées. Je peux comparer la situation à quelqu'un qui investirait de l'argent sur son chalet pendant que sa maison tombe en ruine et que sa voiture tombe en panne.
Le véritable défi des forces armées n'a rien à voir avec l'absence d'une force de maintien de la paix, mais découle du fait que le Parti libéral a accordé aux forces armées trop peu de fonds au cours de la dernière décennie. Les forces armées ont de la difficulté à remplir leurs rôles actuels, car elles manquent de personnel et elles n'ont pas l'équipement nécessaire. De plus, elles n'ont ni le soutien logistique ni le soutien pour l'infrastructure dont elles auraient besoin.
Les Forces canadiennes ont un effectif autorisé de 60 000 personnes. On évalue qu'elles paient actuellement 62 000 salaires de militaires. En raison des problèmes importants au chapitre du recrutement et de la formation, elles n'ont qu'un effectif actif d'environ 52 000 personnes. Cela signifie que 20 p. 100 de l'effectif n'est pas disponible pour travailler. C'est un pourcentage très important.
Le gouvernement promet depuis des années aux réservistes, qui jouent un rôle important dans le respect de nos engagements, que leur nombre sera accru et qu'ils seront équipés convenablement. Ils sont environ 20 000, ce qui est insuffisant pour ce qu'on leur demande de faire, et ce nombre n'a pas augmenté depuis plusieurs années.
De façon générale, les Forces canadiennes sont trop petites pour répondre aux exigences de la politique de défense actuelle. Notre armée est surchargée. L'armée peut déployer environ 13 500 militaires sur le terrain, mais certains soutiennent que c'est plutôt 12 500. Elle a du mal à satisfaire à ses engagements nationaux et internationaux. Chaque fois que le gouvernement s'engage à affecter un groupement tactique de 1 000 militaires à une opération de stabilité, l'armée doit en nommer trois autres pour appuyer l'engagement.
Dès le début de l'entraînement des militaires qui se préparent au roulement qui aura lieu dans six mois, on a un groupement tactique dans le théâtre des opérations, un groupement qui est rentré et se prépare à une nouvelle mission, un autre groupement tactique qui donne des séances de formation et d'information collectives en préparation à un éventuel déploiement et un quatrième groupement qui est constitué pour entrer à son tour dans la ronde. Lorsque moins de quatre groupements tactiques sont prévus, les militaires participent trop souvent à des missions à l'étranger, ce qui nuit à leur vie familiale et leur donne moins envie de rester dans les forces armées.
Une force de campagne qui peut tout au plus constituer neuf groupements tactiques est soumise à d'intenses pressions étant donné que l'engagement d'un groupement tactique sous-tend qu'il faut quatre groupements semblables au total. La force de campagne actuelle n'a tout simplement pas les effectifs voulus pour soutenir la cadence des missions à l'étranger, si bien que nous devons mettre fin à nombre des engagements que nous avions pris.
Les effectifs des forces terrestres, tout comme ceux des forces navales et aériennes, doivent être augmentés de façon importante, de manière à ce qu'ils puissent effectuer le travail qui leur est confié à l'échelle nationale et internationale. Globalement, les effectifs de la Force régulière doivent comprendre de nouveau de 75 000 à 80 000 membres, et ceux de la Force de réserve doivent passer à 40 000 ou 45 000 membres.
En raison de la cadence des opérations et du manque de financement adéquat, une grande partie de l'entraînement collectif au sein des forces armées ne peut avoir lieu. La plupart des efforts et des fonds pour l'entraînement servent à l'acquisition des habiletés requises sur une base individuelle. Par conséquent, cela a une incidence sur l'entraînement collectif.
Pour être efficaces, les militaires n'agissent pas en tant qu'individus, mais en tant que groupe, que ce soit un groupe opérationnel naval, un escadron aérien, un groupement tactique ou une brigade. Si l'on continue de négliger l'entraînement collectif, les Forces canadiennes perdront peu à peu leur capacité de mener des opérations militaires d'envergure.
Actuellement, de 12 à 13 p. 100, environ, des fonds du ministère sont alloués à la mise à niveau et au remplacement du matériel. Cette trop maigre contribution ne permet pas de répondre aux besoins à long terme énoncés dans le plan du ministère, lequel a besoin d'un investissement de plus de 20 p. 100 au titre du matériel. Autrement dit, on devra abandonner progressivement de plus en plus de matériel, ce qui affaiblira les capacités des militaires qui seront soumis à des pressions grandissantes.
Paradoxalement, le premier ministre s'est récemment vanté d'avoir annoncé des acquisitions de matériel de défense. Or, il manque quelque 20 milliards de dollars dans l'investissement du premier ministre pour atteindre l'objectif du Plan stratégique d'investissement dans les capacités du ministère de la Défense nationale, un plan stratégique s'étendant sur 15 ans. Il est inconcevable que le premier ministre puisse dire aux Canadiens qu'il a sorti la défense de la crise alors qu'il a refusé d'approuver intégralement le plan assorti d'une somme de 27,5 milliards de dollars pour le matériel militaire.
En clair, le premier ministre a seulement approuvé l'octroi de 7 milliards de dollars ou d'une somme représentant 25 p. 100 des besoins des militaires pour satisfaire aux exigences de la politique. Par opposition, l'an dernier, le Cabinet australien a approuvé un plan de dix ans et de 50 milliards de dollars pour l'équipement militaire, plan basé sur son livre blanc de 2000 et sur son examen de 2003 de la politique en matière de défense. L'Australie reconnaît avoir besoin d'un secteur militaire efficace. Le Canada devrait-il faire moins alors qu'on sait que, parmi les pays du G-8, il possède l'une des plus grosses économies?
Le manque d'investissement en nouvel équipement signifie qu'une grande partie de l'équipement actuellement utilisé par les Forces canadiennes arrive à la fin de sa durée de vie utile, si elle n'est pas déjà dépassée. Cela signifie également qu'il faut faire un entretien et des réparations hors de l'ordinaire pour garder l'équipement en état de fonctionnement. Cette demande de financement toujours croissante détourne les fonds du programme d'immobilisations. Le secteur militaire est aux prises avec la loi du rendement décroissant. De plus en plus d'efforts sont consentis pour maintenir des forces armées qui sont pourtant en constant déclin.
La Force aérienne en est un exemple fort éloquent puisque, en 1994, elle possédait environ 700 appareils dont le taux de disponibilité était de 85 p. 100. Théoriquement, au moins 580 avions pouvaient être en exploitation, n'importe quand. À l'heure actuelle, la Force aérienne possède environ 300 appareils dont le taux de disponibilité est de 55 p. 100, ce qui veut dire que 165 avions sont disponibles pour des vols. Autrement dit, la Force aérienne possède moins de 30 p. 100 de la capacité qu'elle avait il y a dix ans.
Autre exemple de sous-financement en matière d'équipement: les 12 bâtiments de défense côtière de la marine qui, à l'origine, devaient servir à repérer les mines susceptibles d'être placées à proximité de nos ports par des ennemis. Malheureusement, le projet n'a pas reçu un financement suffisant et ces bâtiments ne possèdent pas la capacité prévue initialement.
L'absence de transport aérien et maritime moderne et fiable constitue un handicap lors des déploiements des Forces canadiennes et nuit à la politique d'indépendance nationale, à une époque où les opérations militaires ont lieu dans des régions très éloignées. Les biens de transport rapide constituent un élément essentiel, tant pour les déploiements que pour l'approvisionnement des forces. Il y a quelques années, les Forces canadiennes ont mis six semaines pour déployer 900 soldats et de l'équipement léger en Afghanistan. C'est bien trop long.
Pour soutenir les Forces canadiennes, il faut suffisamment de pièces de rechange, de moyens de transport, de personnel et de fournitures du domaine médical, ainsi que de techniciens capables de réparer n'importe quelle pièce d'équipement. Sans un soutien adéquat, même les meilleurs fantassins ne seront pas à la hauteur. Malheureusement, il y a de sérieuses lacunes dans toutes ces catégories de soutien et le problème s'aggrave avec chaque déploiement opérationnel à cause de l'érosion des effectifs et du vieillissement de l'équipement.
Au même titre que l'équipement, l'infrastructure militaire est dans un état de détérioration grave. Le ministère de la Défense prévoit habituellement que les immeubles et structures dureront 50 ans. Ainsi, il doit investir chaque année environ 2 p. 100 de la valeur de remplacement pour maintenir cette infrastructure en état de fonctionner. Ce critère n'a pas été respecté depuis très longtemps, si bien que le ministère est confronté à une avalanche de demandes de remplacement et de réparation de son infrastructure.
Les logements familiaux sont un bon exemple. Il en existe des milliers au Canada. La plupart ont plus de cinquante ans et ont besoin d'être rénovés ou remplacés; pourtant le gouvernement s'interroge quant à savoir s'il devrait les garder et investir l'argent nécessaire pour les retaper, ou les abandonner. Entre-temps, ils continuent de se détériorer.
Le rétablissement de la capacité militaire du Canada ne se fera pas sans difficulté. Nous croyons que les différents éléments des forces armées devraient conserver ou acquérir, individuellement ou collectivement, la capacité nécessaire pour accomplir leurs missions actuelles et prévues. Nous rejetons la notion de rôles spécialisés pour nos forces armées, comme le maintien de la paix, parce que c'est inapplicable dans la pratique compte tenu de l'éventail des exigences auxquelles les gouvernements demanderont toujours à nos forces armées de répondre.
Toute tentative visant à réduire le rôle de nos forces armées à celui d'une force constabulaire est incompatible avec les besoins du nouveau contexte de sécurité. Une force structurée pour se livrer à des activités ordinaires de maintien de l'ordre et d'aide humanitaire serait incapable de tenir tête à des groupes armés qui menacent la stabilité d'un État, sans parler des organisations terroristes ou des dictateurs avec des visées hégémoniques.
Enfin, nous demandons au gouvernement de fournir à nos forces armées une orientation claire dans l'avenir. Il doit en outre débloquer les fonds nécessaires pour faire en sorte que nos forces armées disposent de la main d'oeuvre, de l'équipement et du soutien nécessaires pour être aptes au combat et assumer toutes les tâches qui incombent à un grand pays comme le nôtre.
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Monsieur le Président, je suis heureux de participer à ce débat sur la motion de l'opposition. J'ai écouté avec grand intérêt les députés des deux côtés de la Chambre.
Je suis heureux de voir ici certains nouveaux députés, notamment le porte-parole de l'opposition en matière de défense, qui possède une expertise et une expérience évidentes dans le domaine militaire. Je crois que tous les partis à la Chambre sont déterminés à faire tout ce qu'ils peuvent pour les hommes et les femmes des Forces canadiennes.
Je veux tout d'abord remercier les hommes et les femmes des Forces canadiennes pour leur dur labeur et pour leur engagement au nom des Canadiens, chez nous comme à l'étranger où ils oeuvrent pour la paix et la stabilité, dans un monde devenu dangereux.
Je ferai quelques observations sur le ton du débat d'aujourd'hui et sur celui du débat élargi et nécessaire qui a cours actuellement dans notre pays, aussi bien au Comité permanent de la défense nationale que dans les médias et le grand public.
Le ton du débat est très important. Je pense que les députés devraient s'efforcer d'adopter un ton aussi peu partisan que possible. Je suis bien conscient que cet endroit est caractérisé par la concurrence et l'esprit partisan. Il nous arrive, de temps à autre, d'être en sérieux désaccord et même de nous opposer avec véhémence sur certaines questions concernant la défense ou tout autre sujet.
Cependant, parce que nous parlons des Forces canadiennes et que nous faisons de notre mieux pour les hommes et les femmes qui risquent leur vie, souvent chaque jour, au service de leur pays, je crois qu'il nous incombe à tous de modérer quelque peu le ton de nos interventions et d'être un peu moins bruyant. Il y a déjà eu passablement de bruit ici jusqu'à maintenant. Nous pourrions peut-être nous montrer un peu plus respectueux et modérer nos propos, sans pour autant oublier nos désaccords ou diluer nos arguments. Nous avons été élus ici pour défendre nos points de vue respectifs, mais j'espère que nous saurons modérer nos propos et être un peu moins bruyants. Nous serons mieux à même d'examiner, dans un esprit de coopération des deux côtés de la Chambre, l'avenir que nous voulons pour les Forces canadiennes et les ressources dont elles ont besoin pour s'acquitter des missions que nous leur confions.
Je voudrais parler maintenant du fait que des députés d'en face, des députés de l'opposition officielle en particulier, ont fait valoir que les gouvernements libéraux précédents ont réduit de manière appréciable le budget de la défense nationale. C'est vrai. J'ai été élu en 1993. Je n'étais pas fier que nous réduisions autant ce budget, mais enfin ces réductions ont été faites. Je crois honnêtement et sincèrement que nous avons trop diminué les budgets, mais j'estime que cela est en train de changer et qu'il faut accélérer le changement.
Je tiens à signaler à mes amis d'en face que ce n'est pas le gouvernement libéral précédent qui a commencé à réduire le budget de la défense. En effet, nombre de députés savent que, de 1984 à 1999, soit pendant 15 années de suite, les gouvernements conservateurs et libéraux précédents ont réduit les dépenses militaires.
Ce que les gens d'en face nous disent maintenant, et ils ont une mémoire sélective à cet égard, sauf tout le respect que je leur dois, c'est que les compressions ont commencé il y a dix ans lorsque l'équipe Chrétien a accédé au pouvoir. En fait, les réductions ont commencé en 1984, voire avant, quand les gouvernements libéraux et conservateurs de l'époque ont diminué le budget de la défense de manière appréciable et, j'en conviens, sans doute trop.
Sur une note un peu moins partisane, il n'y a pas qu'un seul gouvernement qui soit à blâmer pour la réduction du budget de la défense dans notre pays.
Je voudrais souligner certaines des exagérations que j'ai entendues de part et d'autre de la Chambre aujourd'hui et dans le passé, tant de la part de députés libéraux que de députés de l'opposition. Les médias y vont aussi de leurs exagérations de temps à autre, et des particuliers le font également aux assemblées publiques que je tiens régulièrement dans ma circonscription à chaque saison de l'année. Je ne doute pas que mes collègues, lorsqu'ils communiquent d'une façon ou d'une autre avec leurs électeurs, entendent ce genre d'exagération au sujet de l'état des Forces canadiennes et de leur équipement.
La motion proposée par le porte-parole de l'opposition part de bonnes intentions, mais nous devons prendre garde au libellé et à quelques exagérations. Elle dit qu'on a « laissé péricliter les forces de combat ». On dirait que les forces armées ont été détruites, qu'elles n'existent plus. Je ne crois pas que c'est ce que le motionnaire voulait dire. Autrefois, j'ai été dans l'enseignement, et il m'est arrivé d'enseigner l'anglais. Selon moi, il y a une connotation très claire dans les termes employés. Si les forces ont périclité, c'est qu'elles sont maintenant détruites. Je ne crois pas un seul instant que ce soit ce que le député voulait dire, mais la question est très importante. Les mots ont une force, une signification, et il est très important de ne pas l'oublier.
Un mot à ce sujet. Je conviens qu'il y a eu un déclin dans les Forces canadiennes, et ce, probablement depuis un quart de siècle ou peut-être plus, en ce sens qu'elles sont en sous-effectif. La chose est admise, je crois. Le gouvernement actuel reconnaît que nous prenons du retard dans le remplacement de l'infrastructure. Il faut répondre à nos besoins en matériel, et certains besoins ont été satisfaits récemment ou le seront au prochain budget et dans des budgets ultérieurs.
Il y a toute une différence entre dire que les forces sont inexistantes ou totalement non fonctionnelles et admettre qu'il y a eu dans les Forces canadiennes un déclin qui est imputable, en toute justice, aux gouvernements précédents, qui n'ont pas tous été libéraux, et qu'il faut réagir, ce que nous faisons. Je tenais à souligner ce point, car je sais que l'intention du motionnaire n'allait pas dans ce sens, mais c'est l'interprétation qu'on peut faire de sa motion.
En fait, depuis 1999, des fonds supplémentaires de l'ordre de 10 millions de dollars ont été prévus pour répondre aux besoins des forces armées en matière d'infrastructure. J'ai déjà présidé le Comité permanent de la défense nationale et des affaires des anciens combattants et j'ai eu l'honneur d'être réélu à ce poste. Je suis heureux d'y travailler avec certains de nos collègues de l'opposition et du parti ministériel qui se sont engagés à y faire du bon travail.
J'ai présidé ce comité pour la première fois en 1999. Le comité a préparé un rapport, en grande partie sous la direction d'un de mes anciens collègues, M. Robert Bertrand. J'ai assumé la présidence du comité vers la fin de l'étude portant sur la qualité de la vie. Plusieurs ont qualifié ce rapport d'excellent. C'est ce que m'ont dit des membres des forces armées à plusieurs reprises, pas des généraux, mais de simples gradés, des soldats, dont certains que je connais personnellement ou à qui j'ai déjà enseigné autrefois. Ils m'ont dit qu'ils trouvaient que ce rapport était excellent, et je suis d'accord avec eux puisque c'est leur rapport. Les membre du comité de la défense ont parcouru le Canada d'un bout à l'autre. Nous nous sommes même rendus à l'étranger pour entendre ce que les militaires avaient à dire. Nous leur avons dit que nous ne voulions pas de hauts gradés dans la pièce, que nous leur donnions la chance de nous dire ce qu'ils pensaient réellement et qu'ils ne pourraient pas se plaindre par la suite. Ils l'ont fait. Ils ont dit tout ce qu'ils avaient sur le coeur. Nous en avons produit un excellent rapport sur la qualité de la vie des membres des forces armées et les défis auxquels les membres et leur famille font face.
Le budget de 1999 prévoyait pour la première fois en au moins 15 ans une hausse du budget des forces armées. Cette hausse visait à accorder à nos soldats une augmentation de salaire fort nécessaire et très bien méritée et à améliorer les logements mis à leur disposition. Elle découlait directement du travail que nous effectuions pour tenter d'améliorer les conditions de vie de nos militaires et de leurs familles.
Je crois que nous avons pris un virage important en 1999. Depuis lors, chaque nouveau budget prévoit de nouveaux fonds pour les Forces canadiennes. Nous devons agir un peu plus rapidement certes, mais reconnaissons l'état de la situation. Le premier ministre et le gouvernement ont reconnu la nécessité d'agir et se sont engagés à réinvestir dans les forces armées.
En parlant de cette hyperbole, je voudrais revenir sur ce que le chef adjoint du parti de l'opposition a déclaré un peu plus tôt aujourd'hui. J'ai voulu en discuter avec lui, dans un pur esprit de collaboration, mais je crois que cela l'a froissé. Les Forces canadiennes font face à de graves problèmes, nous le reconnaissons, et ces problèmes doivent être réglés. Le gouvernement s'attaque aux problèmes et j'espère que nous pourrons les régler dans un proche avenir, en comptant sur la collaboration des députés de tous les partis représentés à la Chambre. Toutefois, comme le faisait remarquer le porte-parole du NPD en matière de défense, il ne sert à rien de répandre des faussetés à ce sujet.
Je ne pense pas que le leader adjoint voulait induire la Chambre en erreur, mais il ignorait peut-être les déclarations faites par le Major-général Leslie au Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants autour d'avril ou de mai dernier. C'était lorsque toute cette question, qui a tant attiré l'attention des médias, a pris des proportions démesurées au sujet de nos propres troupes qui auraient été forcées, selon ce qu'on disait, d'aller combattre dans le désert sans tenues de camouflage pour le désert. On disait aussi que nos soldats se retrouvaient dans une situation dangereuse ou qu'ils étaient une cible du fait qu'ils n'avaient pas ces tenues. Ce n'est tout simplement pas vrai.
Ne me croyez pas sur parole. Croyez plutôt le Major-général Leslie qui était le commandant de nos forces en Afghanistan. J'ai ici son témoignage que je pourrai vous citer. Je pourrais le déposer si quelqu'un souhaite en obtenir une copie. Il est venu devant notre comité et il a dit très clairement qu'on avait ce type de tenues pour la plupart des soldats. Il a déclaré que c'est lui qui avait décidé de ne pas les utiliser. Il a expliqué très clairement pourquoi il avait fait ce choix. Il a dit que la plupart des opérations se déroulaient la nuit et qu'il était alors préférable que les troupes portent leurs uniformes verts. Il a dit qu'il voulait faire une distinction entre les Canadiens et les autres troupes là-bas, dont beaucoup portaient l'uniforme de couleur sable. Il n'y avait pas un uniforme distinctif pour les Canadiens et ces derniers voulaient avoir cela. D'ailleurs la population locale reconnaissait tout de suite les Canadiens.
Nous avons entendu le mot inepties bien des fois des deux côtés dans des débats animés. Cessons ces inepties lorsque nous jouons à des jeux partisans et arrêtons de dire des choses que nous savons être fausses. Nous reconnaissons que les Forces canadiennes sont confrontées à de véritables défis que nous devons relever. Cependant, ne continuons pas à perpétuer le mythe voulant que nos troupes en Afghanistan n'aient pas eu les uniformes de couleur sable, car ce n'est pas vrai et le Major-général Leslie l'a précisé très clairement.
Je reviens là-dessus, car je ne pense pas qu'en répondant à ma question précédente, le leader adjoint ait répondu à celle-là. Il a ajouté ensuite que je blâmais les militaires. Il n'en est rien. Je me rappelais du témoignage, que je suis prêt à déposer, du Major-général Leslie devant le Comité permanent de la défense national et des anciens combattants en avril ou mai dernier. Ce sont les faits qu'il nous a transmis.
Il nous incombe à tous de faire preuve de plus de retenue, de reconnaître les véritables problèmes qui existent et de collaborer pour essayer d'y trouver des solutions. Lorsque nous avons de nouveaux faits qui jettent un jour nouveau sur une affirmation incorrecte qui a été faite, ayons la franchise de le reconnaître, passons par-dessus et avançons.
Je suis d'accord avec certains des points soulevés par le chef de l'opposition. Mais, encore une fois, il a cédé à la tentation de l'hyperbole. À quel moment? Lorsqu'il a affirmé à la Chambre, en substance, que le Canada avait envoyé en missions dans le monde des troupes qui ignoraient le rôle qu'elles avaient à jouer. J'invite le chef de l'opposition à se rendre sur le terrain et à s'entretenir avec les hommes et les femmes des Forces canadiennes en mission. Je l'ai fait, au Kosovo, en compagnie de collègues des deux côtés de la Chambre.
M. Jay Hill: C'est vous qui formulez les règles d'engagement pour chaque mission, et vous le savez.
M. Pat O'Brien: Sans doute. Je comprends que le whip de l'opposition prenne la chose à coeur, tout comme moi. Je l'invite à me laisser faire mon intervention, après quoi je l'écouterai très attentivement lorsque viendra son tour, comme nous l'avons fait, tout naturellement, au sein du CPDNAC.
Le point de vue que j'essaie de faire prévaloir est le suivant. Si les Forces canadiennes sont envoyées en mission et si nous leur posons la question, selon mon expérience, leur moral est extrêmement bon et elles savent exactement la raison de leur présence à l'endroit où elles se trouvent. Elles sont convaincues du bien-fondé de leur action. Elles souhaiteraient peut-être disposer d'un équipement un peu plus récent, aucun doute à ce sujet, je le reconnais. En fait, il est simplement exagéré de laisser entendre que nos hommes et nos femmes, lorsqu'ils se trouvent sur les lieux de leur mission, n'ont aucune idée de leur rôle. Je ne le crois tout simplement pas, et c'est une hyperbole inutile dans la bouche du chef de l'opposition.
M. Jay Hill: Il n'a pas dit ça.
M. Pat O'Brien: Il a affirmé quelque chose de très semblable. Dès le début, j'ai dit qu'il l'avait affirmé en substance.
M. Jay Hill: Vous parlez d'hyperbole. N'en faites pas vous-mêmes.
M. Pat O'Brien: Nous pouvons consulter les bleus, mais c'est bel et bien ce que le chef de l'opposition a laissé entendre et, très franchement, il a tort à ce sujet. Je vous ai demandé de moins recourir à des figures de style, mais je vois que je me suis adressé à des sourds.
M. James Moore: C'est vous qui avez commencé.
M. Pat O'Brien: Ça ne me fera pas changer d'avis car j'ai des opinions aussi tranchées sur les Forces canadiennes que les députés d'en face. Certains d'entre eux le savent car nous avons travaillé ensemble. Ils devraient modérer leurs propos. Qu'ils le veuillent ou non, je dirai ce que j'ai à dire. On peut hurler, on peut monter le son, ça n'est utile à personne. Calmons-nous tous un peu et faisons preuve de respect à l'égard de nos collègues. Je n'interromps pas les députés quand ils parlent et je ne veux pas être interrompu quand c'est à mon tour de parler. Soyez obligeants.
Je veux parler d'équipement car les discours enflammés que nous entendons portent en majorité sur l'équipement. On lit dans la presse, on entend dire aux députés des deux côtés, y compris dans mon propre caucus, ce que je déplore, ainsi que de la part du public en général, que l'équipement des Forces canadiennes ne vaut rien. Il est trop vieux, il ne vaut rien, il est inadapté. J'invite les gens qui partagent cette opinion à venir dans ma circonscription, London—Fanshawe, et à y visiter une usine située sur la rue Oxford Est, qui, avant d'appartenir à General Dynamics, appartenait à General Motors. Le porte-parole en matière de défense sait parfaitement de quoi je parle. Je ne l'accuse pas, lui, d'avoir dit que tout l'équipement ne valait rien, mais des députés de son parti l'ont dit. Cette usine produit des véhicules blindés légers de transport de troupe ultramodernes, à la fine pointe de la technologie. C'est ce qu'il y a de mieux au monde. Les Américains en pensent tellement de bien, eux qui ont un énorme budget militaire, qu'ils sont en train de dépenser quelque 6 milliards de dollars pour en acheter. Ce véhicule est exporté dans plusieurs pays du monde. C'est ce qu'il y a de mieux en la matière. Ce n'est pas une panacée. Il ne répond pas à tous nos besoins en matière de véhicules militaires, mais pour ce qu'on lui demande de faire et ce pourquoi il a été conçu, il est excellent. C'est du matériel dernier cri.
Je vais essayer de conclure en disant tout simplement que l'examen de la défense est en cours. Je pense qu'il est temps que le Comité de la défense en soit saisi. J'attends avec impatience d'y participer. Le rocker irlandais, Bono, a dit que le monde avait besoin d'autres pays comme le Canada. Il a raison. Cela vaut également pour les Forces canadiennes, qui oeuvrent en faveur de la paix et de la sécurité tant sur notre territoire que dans le monde entier. Nous devons reconnaître le travail remarquable qu'accomplissent les hommes et les femmes de nos forces armées. Nous devons admettre que, depuis probablement un quart de siècle, les Forces canadiennes ont été négligées tant par les conservateurs que par les libéraux. Je le reconnais. Je pense que les compressions sont allées trop loin. Mais nous avons tourné la page. Le premier ministre et le gouvernement sont fermement déterminés à réinvestir dans les Forces canadiennes, ce qu'ils ont fait jusqu'à maintenant et ce qu'ils continueront à faire à l'avenir.
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Madame la Présidente, je partagerai mon temps de parole avec le député d'Oxford.
Je tiens à féliciter le député de Carleton—Mississippi Mills pour la motion qu'il a présentée au nom du Parti conservateur du Canada. En cette journée d'opposition, notre parti a choisi le sujet du débat et a présenté une motion qui fera l'objet d'un vote.
Il importe de reconnaître que nous avons, parmi les 308 députés que compte la Chambre, une personne qui possède l'expertise voulue pour éclairer le débat à la Chambre et lui donner l'heure juste sur l'état de nos forces armées. Je félicite le député non seulement pour son rôle au sein de notre parti mais pour sa contribution au débat national sur l'état des forces armées.
Reportons-nous aux événements du 11 septembre, il y a quelques années. Je pense qu'ils ont sonné le réveil partout dans le monde. Depuis cette date, le monde a changé. Je crois aussi que, ce jour-là, les militaires de tous les pays, et notamment le personnel du ministère de la Défense nationale du Canada, le ministre et le chef d'état-major ont soudainement réalisé que notre pays a réduit ses ressources militaires à un point tel que nous risquons de ne pas être en mesure de nous défendre contre des actes de ce genre.
Nous ne nous trouvons pas dans une situation de guerre ou de confrontation ordinaire. Nous sommes confrontés au terrorisme. Les terroristes n'utilisent pas des méthodes ordinaires. Nous devons être en mesure de défendre nos concitoyens. La responsabilité primordiale d'un gouvernement est d'assurer la sécurité et la protection de ses citoyens. Je crois que les événements du 11 septembre nous ont amenés à comprendre, en particulier au Canada, que les compressions imposées à nos forces armées depuis un certain nombre d'années nous font craindre de ne pas pouvoir assurer la protection de nos concitoyens.
La motion présentée aujourd'hui offre à tous les députés une belle occasion de dire ce qui, selon eux, devrait être fait. C'est là-dessus que porteront mes observations.
Certains partis, à la Chambre des communes, n'appuient pas les forces armées autant que nous le voudrions. En fait, aucun parti ne les appuie autant que mon propre parti le voudrait. Nous voulons un accroissement des effectifs des forces régulières et de la réserve. Nous voulons aussi un accroissement substantiel des fonds affectés au remplacement des immobilisations.
J'ai participé à deux visites, en Amérique du Nord, avec des membres des forces armées. La première fois, nous avons visité le quartier général du NORAD, à Colorado Springs, et nous sommes allés à l'intérieur du mont Cheyenne, où ont eu lieu les opérations le 11 septembre. C'était alors un Canadien qui commandait.
J'ai eu aussi l'occasion de me rendre de la base aérienne de Trenton à la Station des Forces canadiennes Alert à bord d'un Hercules en mission de ravitaillement. Le voyage a pris trois jours. Nous avons mis deux jours pour nous rendre et une journée et demie pour revenir. C'est une expérience inoubliable. La mission de ravitaillement qui fait le voyage chaque semaine, particulièrement en hiver, est le seul lien entre les gens qui se trouvent dans cette station et le reste du monde.
L'avion Hercules à bord duquel je me suis trouvé avec des militaires avait plus de deux fois le nombre d'heures de vol recommandé pour ce genre d'aéronef. On lui avait refait les ailes et on lui avait installé de nouveaux moteurs, mais il avait 40 000 heures de vol, alors que sa durée de vie normale est de 20 000 heures. Et on s'attend à ce que des gens montent à bord de ces appareils chaque semaine pour ravitailler cette station des Forces canadiennes. Ce n'est pas le seul cas d'ailleurs. Dans d'autres bases aussi, on dépend entièrement de cette flotte vieillissante d'aéronefs pour le ravitaillement.
Je sais très bien que l'équipage de cet aéronef était composé de personnes parfaitement qualifiées, qu'il s'agisse des deux manutentionnaires à l'arrière, du pilote, du capitaine, du navigateur ou de l'ingénieur de bord. Ils connaissaient très bien leur appareil. Personne ne faisait quoi que ce soit tant que l'ingénieur n'avait pas fait les vérifications de sécurité nécessaires. Dieu merci.
J'ai appris certaines choses sur le fonctionnement du secteur militaire. Je n'oublierai jamais cet équipage et son dévouement. Aucun de ses membres ne se plaignait. Tous connaissaient ma situation de député et savaient qu'ils avaient une occasion de dire certaines choses. Ils se sont montrés très ouverts, mais pas une seule fois je ne les ai entendus dire qu'ils regrettaient d'être entrés dans les forces armées. Ils aiment cette vie. Toutefois, ils sont déçus, dans une certaine mesure, du respect que leur manifestent certains milieux. En dépit de cela, ils font leur travail, semaine après semaine, et ils en sont fiers.
Lorsque nous avons pris connaissance du discours du Trône, quel choc nous avons eu voyant l'appui que le gouvernement prévoit donner au secteur militaire. Le discours contient même une forme de critique, notamment quand il y est dit que le secteur militaire doit prendre des décisions judicieuses, stratégiques et ciblées. Je suis d'accord avec tout cela, mais je doute et je crains qu'il ne s'agisse que de mots-codes pour dire encore la même chose, soit qu'il n'est pas nécessaire de réinvestir, qu'il faut en quelque sorte restructurer le secteur militaire pour en arriver à un commandement de moindre capacité.
J'estime qu'il nous faut garder ces propos à l'esprit au cours de l'exercice et du prochain processus budgétaire. L'opposition officielle aura pour tâche de talonner le gouvernement et de veiller à ce qu'il finance le secteur militaire comme il se doit, en tenant compte des attentes des Canadiens à cet égard. De plus en plus de nos concitoyens se rendent compte que ce sont nos militaires qui auront à nous protéger contre le terrorisme.
Songeons seulement au propos de l'ambassadeur Cellucci des États-Unis; il a déclaré que le Canada pouvait être, et non était, un tremplin pour le terrorisme où que ce soit en Amérique du Nord, y compris au Canada. Nous devons être très conscients de cela.
Une des questions qui revient le plus souvent est celle du financement. Parlons donc de la réalité. Le premier ministre a dit que les acquisitions de matériel de défense étaient conformes aux souhaits des militaires et que le gouvernement libéral s'occuperait de tout. Le fait est qu'il n'a approuvé que 7 milliards de dollars, ce qui représente le quart seulement des 27,5 milliards de dollars sur 15 ans réclamés par les militaires dans leur plan fondé sur la politique de 1994 et sur les récentes opérations.
On peut faire une comparaison avec l'Australie, un pays plus petit que le nôtre, qui a consacré 50 milliards de dollars, sur une période de 10 ans, au remplacement de son matériel militaire. Cela démontre la position du Canada sur la scène mondiale au chapitre de la puissance militaire.
Le président du Comité de la défense a parlé de dégradation. Ce que nous disons, c'est que la puissance et le matériel militaires du pays continuent de péricliter, non pas qu'ils sont réduits à rien, mais qu'ils connaissent un déclin.
Comme l'a mentionné plus tôt notre porte-parole, chaque fois qu'il y a un déploiement et que notre matériel militaire est utilisé à l'étranger ou au Canada, il s'use, se détériore et il devient davantage nécessaire de le remplacer. Or, on ne remplace pas le matériel militaire au rythme où il devrait l'être.
Nous pouvons considérer l'argent nécessaire pour le remplacement d'immobilisations et la réparation des infrastructures. Lorsque j'étais à la base aérienne de Trenton, j'avais l'impression que cela avait déjà été un site magnifique à une certaine époque mais que ces installations avaient maintenant besoin de sérieuses rénovations. En fait, il ne s'agissait que de petites choses. Le gazon était délabré, les stationnements avaient besoin de réparations et les bâtiments d'une bonne couche de peinture.
Lorsque je me suis rendu dans les bâtiments des opérations, j'ai eu une impression d'insalubrité. Ce n'était pas la faute des membres de nos forces armées qui y travaillent chaque jour. C'était parce qu'ils sont dans l'incapacité de faire le nécessaire en raison des coupures budgétaires.
Il nous faut aussi considérer les chiffres. Si nous voulons bien faire notre travail et défendre comme il se doit le Canada contre le terrorisme, nous avons besoin de personnel. Actuellement, notre processus de recrutement est tellement congestionné qu'il ne peut fonctionner correctement. Des files de gens attendent de se joindre aux forces armées mais ils en sont incapables car le système ne peut les accommoder.
Voilà certains des aspects que nous devrons examiner avant de pouvoir nous présenter comme il se doit devant n'importe quelle instance, y compris la Chambre des communes, et dire que nous faisons tout notre possible pour assurer la sécurité du Canada.
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Madame la Présidente, j'ai écouté plusieurs interventions aujourd'hui et je trouve très difficile de rester neutre. C'est probablement la nature des lieux. Je ne suis qu'un ancien policier, pas un professeur d'anglais, et il se pourrait donc que mes paroles ne soient pas à sa hauteur.
J'interviens à la Chambre aujourd'hui pour parler d'un autre problème auquel nos forces armées ont fait face et qui a injustement mis notre pays et notre gouvernement dans l'embarras. Le chef d'état-major et l'amiral de notre marine ont comparu hier devant le Comité permanent de la Chambre des communes sur la défense nationale et les anciens combattants pour expliquer pourquoi la marine canadienne a besoin de sous-marins. Ils semblaient tous deux aux prises avec ce que je qualifierais du remords de l'acheteur. C'est comme si j'achetais une voiture usagée, que le vendeur avait négligé de me mentionner que la voiture avait été accidentée à trois ou quatre reprises et que je ne l'avais appris qu'au moment où un mécanicien avait fait une vidange d'huile et jeté un coup d'oeil au véhicule.
En 1993, la marine britannique a retiré les sous-marins de classe Upholder du service parce qu'ils étaient mal fichus. Il n'y avait rien qui fonctionnait correctement sur ces appareils. On a relevé suffisamment de vices de conception pour exaspérer l'un des plus grands pays maritimes au monde.
Comme je suis nouveau dans cette enceinte, je considère mes commentaires comme étant ceux d'un observateur extérieur. Ces militaires d'expérience qui ont comparu devant le comité hier étaient pour ainsi dire bâillonnés. Ils ne pouvaient pas dire ce qu'ils croyaient réellement qui ne fonctionnait pas dans le programme des sous-marins.
J'irais même jusqu'à dire aux Canadiens que l'importance des sous-marins pour la marine canadienne ne fait aucun doute. Pourquoi ces militaires hautement qualifiés doivent-ils se contenter de ces quatre sous-marins défectueux? Je suis d'avis que c'est parce que le gouvernement en place a adopté l'attitude qui était courante dans le reste du monde à un certain moment. Après avoir sabré dans notre système de soins de santé, il ne pouvait s'arrêter et il s'est mis à sabrer frénétiquement dans les forces armées du pays.
Nous n'avons pas acheté ces sous-marins parce que c'était une bonne aubaine. Comme l'honorable Sheila Copps l'a dit hier soir en entrevue à la CBC, si ces sous-marins étaient une si bonne aubaine, pourquoi n'avaient-ils pas déjà été vendus cinq ans après être passés en cale sèche? Ou était la surenchère? L'Arabie saoudite a refusé, l'Espagne a refusé et les Australiens ont décidé de construire leurs propres sous-marins.
Si la marine a acheté ces sous-marins, c'est que le Cabinet de l'époque, qui, soit dit passant, était dirigé par l'actuel premier ministre qui était alors ministre des Finances, l'a convaincue de le faire. La marine s'est fait dire de trouver un sous-marin pas cher ou, comme les libéraux le diraient, économique. Autrement dit, la marine a été forcée de renoncer à faire l'acquisition de sous-marins de première classe et de se contenter d'acheter les meilleurs sous-marins possibles avec le dixième de ce dont elle avait besoin pour y arriver.
Nos forces armées acceptent n'importe quoi. Elles sont si flexibles qu'elles ont fait un compromis et accepté ces sous-marins qui leur ont présenté des défis que même la marine britannique n'a pas su relever. Ce qui a été encore plus difficile, c'est apprendre les plus récentes nouvelles au sujet du désastre du Chicoutimi au réseau d'informations hier soir.
Il y a des gens dans les forces qui risquent leur carrière pour veiller à ce que les Canadiens sachent la vérité sur ce qui est arrivé à bord de ce sous-marin. Le centre de Halifax a décrit le lieutenant Bryan comme étant désinvolte au téléphone. À quoi s'attendait-on? À ce qu'il soit complètement hystérique? Peut-être était-il simplement épuisé à cause de ce qui était arrivé quelques heures avant. Le lieutenant Bryan a affirmé avoir eu une bonne réception sur son téléphone cellulaire et que toutes ses paroles lui ont été répétées, y compris les mots « incendie majeur ». Le commandement de Halifax a dit que la réception n'était pas bonne, mais il a quand même entendu le mot « incendie », le nombre de blessés et le fait que le sous-marin était immobilisé. Cependant, quand il s'est adressé aux médias, il a dit qu'il s'agissait d'un incendie mineur.
Le lieutenant Bryan a également déclaré que son interlocuteur semblait très préoccupé à l'autre bout de la ligne et que le fait que ce dernier lui ait répété tout ce qu'il avait dit lui a fait croire que son message avait été compris. De plus, le centre de Halifax n'a pas enregistré l'appel. C'est donc sa parole contre celle du lieutenant Bryan. Quel paradoxe.
Le Chicoutimi n'a pas communiqué avec le centre d'appels pour vendre des services de nettoyage de tapis, soit dit sans manquer de respect au personnel des centres d'appels. Il s'adressait à des experts de la marine. Comment a-t-on pu donner à « majeur » le sens de « mineur »? Il appartient maintenant aux responsables de l'enquête militaire de voir si la marine a minimisé l'incident et, dans l'affirmative, si elle l'a fait intentionnellement ou s'il y a eu simplement un grave problème de communication. Peut-être aussi y a-t-il eu ingérence politique pour minimiser l'incident d'un sous-marin qui causait déjà des soucis. Peut-être le gouvernement voulait-il contrôler la situation pour dissiper un peu les appréhensions suscitées par son choix de sous-marins défectueux.
Cette hypothèse est délicate, certes, mais j'estime qu'il faut débattre la question. Ce ne serait pas la première fois que la politique cherche à cacher la vérité. Rappelez-vous le contrat signé sur une serviette de table pour la vente d'une participation dans un terrain de golf.
Le parti d'en face est capable de tout, lorsqu'il s'agit de montrer son mépris de l'intelligence des Canadiens. La solution à la crise des sous-marins reste à trouver. D'après ce que nous savons maintenant, il est clair que le Canada devrait envisager l'acquisition d'une flotte de six sous-marins neufs qui ont fait leurs preuves, comme ceux qui se construisent en Allemagne. Ces sous-marins sont compatibles avec le matériel de l'OTAN, ils sont sans danger pour l'environnement, ils fonctionnent au diesel et ils sont dotés d'un système AIP qui leur permettrait de naviguer sous les glaces de nos côtes septentrionales.
Lorsque mon parti sera porté au pouvoir, nous enlèverons le bâillon aux officiers militaires, nous les laisserons s'exprimer librement et réagir à nos contraintes financières. Ce qu'il faut maintenant, c'est un examen complet de nos forces armées. Le sous-financement de nos forces a été préjudiciable pour notre personnel et il a sapé notre fierté nationale. Il n'est pas exagéré de dire que nos forces sont au bord de la catastrophe.
Aujourd'hui, après avoir dépensé quelque 850 millions de dollars pour des sous-marins défectueux, nous n'avons même pas de programme concernant les sous-marins. Nous n'avons pas d'aéronefs de transport lourd pour accomplir nos opérations militaires à travers le monde. La rouille s'attaque à presque tous nos véhicules militaires. Nous avons même appris, au cours des dernières semaines, que nous ne sommes pas en mesure de fournir à nos soldats qui se trouvent à Haïti des gants, des gilets pare-éclats et des bottes convenables. Je me souviens d'un rapport selon lequel il a fallu près de 12 ans pour décider de l'acquisition d'un sac à dos. Et nous nous demandons pourquoi nous avons du mal à recruter de futurs soldats.
Au cours de la dernière campagne électorale, le gouvernement a affirmé qu'il enrôlerait 5 000 nouveaux membres dans nos forces armées. Si on procède à une estimation rapide, il faut deux ans et il en coûte annuellement près de deux milliards de dollars pour l'entraînement des nouveaux soldats. Quand avons-nous jamais entendu le gouvernement libéral augmenter le budget de la défense de deux milliards de dollars par année? Cela ne se produira pas. Ce ne sera qu'une autre promesse électorale non respectée. À mon avis, nous n'avons pas à chercher plus loin que de l'autre côté de la Chambre: ce parti a privé nos forces armées de toute vitalité.
Parmi nos alliés au sein de l'OTAN, seul le Luxembourg consacre une plus faible part de son PIB à sa défense nationale que le Canada. Cela en dit long sur le respect qu'éprouvent les libéraux à l'égard de nos forces armées et de la défense de notre pays. Le fait d'exercer des compressions pendant dix ans et de ne pas augmenter le budget de la défense de façon notable est une offense à la mémoire de chacun des soldats qui a fait l'ultime sacrifice pour notre pays bien aimé.
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Madame la Présidente, étant donné que c'est la première fois que je prends la parole en cette 38
e législature, j'aimerais prendre un peu de temps, premièrement pour vous féliciter pour votre nomination à titre de présidente suppléante de la Chambre, et deuxièmement, remercier mes concitoyens, les électeurs de mon comté de Rivière-des-Mille-Îles pour m'avoir réélu.
En effet, le 28 juin dernier, 64,9 p. 100 des électeurs ont renouvelé la confiance qu'ils avaient en leur député, et ce, pour la troisième fois. Cela me donne un avertissement clair de continuer mon bon travail. Ils me donnent ainsi un signal indiquant qu'ils approuvent mon travail en ce Parlement, ainsi que celui de mes collègues, les députés du Bloc québécois. Je tiens également à féliciter et remercier mes collègues du nord-ouest québécois, mes voisins de fauteuil, qui nous fournissent un appui moral lors de nos discours.
En outre, je tiens à m'excuser, car j'ai oublié de vous annoncer que je partagerai mon temps de parole avec le député de Jonquière—Alma.
C'en est maintenant assez des remerciements et des fleurs, allons maintenant au coeur du débat. Le Bloc québécois et moi sommes contre cette motion. Non pas qu'elle soit mauvaise en elle-même, mais elle demande qu'on investisse de l'argent dans la Défense nationale qui n'a malheureusement aucune politique en matière de défense. Il en est de même des politiques des Affaires étrangères du Canada, des affaires internationales. On n'a aucune politique à ce sujet.
La dernière fois qu'on a révisé un peu les politiques de la Défense nationale, c'était en 1994. Je me demande si la Défense nationale a encore ces politiques en vue. Si oui, elle devrait les modifier, puisque je pense que les notions de défense et d'armement militaires ont énormément évoluées depuis le 11 septembre 2001.
Nous n'avons plus devant nous une armée à affronter. Au contraire, il y a des gens qu'on appelle des terroristes, qui ne sont pas identifiés et on ne connaît pas encore la façon dont ils agissent. Par conséquent, il faut absolument que ce gouvernement élabore une politique de défense. En attendant que le gouvernement élabore cette politique, il devrait investir de l'argent dans les conditions de vie de nos militaires.
J'ai eu la malheureuse occasion de soutenir des jeunes hommes et des jeunes filles de l'âge de mon fils, qui revenaient de la guerre ou d'une mission de paix en Bosnie avec le syndrome du stress post-traumatique. Ces jeunes sont pratiquement devenus des loques humaines. Je m'excuse d'employer ce terme, mais ces jeunes ont besoin d'aide psychologique et psychiatrique. Malheureusement, nous faisons la sourde oreille à leurs demandes.
Il y a des jeunes dans mon comté qui, tous les jours ou toutes les semaines, vont faire un petit séjour à l'hôpital Sainte-Anne à Sainte-Anne-de-Bellevue. Malheureusement, ils auraient besoin de plus d'aide et de soutien. N'oublions pas que ces jeunes, comme tous nos militaires, ont été à la guerre ou en mission de paix dans le but de faire avancer la démocratie. Tel est le rôle qu'ils ont joué.
Les dangers qui nous guettent si nous investissons de l'argent dans nos forces armées sans avoir de politique de défense nationale sont que ces dépenses risquent d'être du gaspillage. Ici, j'aimerais vous donner quelques témoignages.
On se souvient qu'en 1998-1999, le budget de la défense nationale était de 8 964 millions de dollars et qu'en l'an 2003-2004, ce budget sera de 13 400 millions de dollars. C'est de l'argent! Quand on pense que nos concitoyens rêvent de gagner un million de dollars à la loterie! C'est donc une augmentation de 49,5 p. 100 des dépenses de la défense nationale depuis 1998.
Où est allé cet argent-là? Souvenons-nous, en 1993, lorsque ce gouvernement d'en face a dépensé 500 millions de dollars pour annuler le contrat pour les hélicoptères. Souvenons-nous qu'en 1998, sans venir consulter la Chambre, on a appris du jour au lendemain qu'on venait d'acheter quatre sous-marins usagés de la Grande-Bretagne, des sous-marins qui étaient hors service depuis 1993. En 1998, on en a fait l'acquisition pour 800 millions de dollars pour apparemment protéger nos côtes, l'Arctique et le Grand Nord. Les sous-marins n'étaient pas équipés pour aller sous les glaces dans le Grand Nord.
Depuis ce temps-là, on a investi quelques centaines de millions de dollars pour ces sous-marins. On est rendu à près d'un milliard de dollars dépensé pour quatre sous-marins qui sont présentement tous les quatre en cale sèche. Malheureusement, il est arrivé un accident au sous-marin HMCS Chicoutimi qui a coûté la vie au colonel Saunders.
J'aimerais dire, en attendant que mon collègue soit à sa place, que nous avons aussi un montant de 174 millions de dollars qui a été dépensé inutilement pour un satellite pour les communications. Il n'a pas été utilisé. Ceci est une dénonciation de notre vérificatrice générale.
Je terminerais ici mon allocution et mon collègue pourra continuer pour dix minutes,