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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 051
TABLE DES MATIÈRES
Le lundi 7 février 2005
1100 |
Les travaux des subsides |
Le Président |
1105 |
Initiatives parlementaires |
La Loi sur les aliments et drogues |
M. Gary Carr (Halton, Lib.) |
1110 |
1115 |
M. Dean Allison (Niagara-Ouest—Glanbrook, PCC) |
1120 |
1125 |
Mme Nicole Demers (Laval, BQ) |
1130 |
Mme Jean Crowder (Nanaimo—Cowichan, NPD) |
1135 |
M. Werner Schmidt (Kelowna—Lake Country, PCC) |
1140 |
1145 |
M. Alan Tonks (York-Sud—Weston, Lib.) |
1150 |
1155 |
L'hon. David Kilgour (Edmonton—Mill Woods—Beaumont, Lib.) |
L'hon. Roy Cullen (secrétaire parlementaire de la ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.) |
1200 |
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.) |
1205 |
Le président suppléant (M. Marcel Proulx) |
M. Charlie Penson |
Le président suppléant (M. Marcel Proulx) |
Initiatives ministérielles |
Le Code criminel |
L'hon. Jean Lapierre |
L'hon. Paul Harold Macklin (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.) |
1210 |
1215 |
1220 |
1225 |
M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, PCC) |
1230 |
M. Richard Marceau (Charlesbourg—Haute-Saint-Charles, BQ) |
1235 |
1240 |
1245 |
M. Peter Stoffer (Sackville—Eastern Shore, NPD) |
1250 |
1255 |
M. Ken Boshcoff (Thunder Bay—Rainy River, Lib.) |
1300 |
1305 |
M. Peter Stoffer (Sackville—Eastern Shore, NPD) |
1310 |
M. Ken Boshcoff |
L'hon. Don Boudria (Glengarry—Prescott—Russell, Lib.) |
1315 |
1320 |
1325 |
1330 |
La présidente suppléante (L'hon. Jean Augustine) |
Adoption de la motion; troisième lecture et adoption du projet de loi |
La Loi sur les télécommunications |
Initiatives ministérielles: projet de loi C-37 |
L'hon. Jacques Saada |
L'hon. Don Boudria (Glengarry—Prescott—Russell, Lib.) |
1335 |
1340 |
M. James Rajotte (Edmonton—Leduc, PCC) |
1345 |
1350 |
M. Mario Laframboise (Argenteuil—Papineau—Mirabel, BQ) |
1355 |
1400 |
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS |
La santé |
M. Lloyd St. Amand (Brant, Lib.) |
L'industrie laitière |
M. Dave MacKenzie (Oxford, PCC) |
North Vancouver |
M. Don Bell (North Vancouver, Lib.) |
Jean-Jacques Martel |
M. Marc Lemay (Abitibi—Témiscamingue, BQ) |
1405 |
Le Club communautaire Crescentwood |
Mme Anita Neville (Winnipeg-Centre-Sud, Lib.) |
Le Président |
La journée de l'alphabétisation de la famille |
Mme Nicole Demers (Laval, BQ) |
Les produits de santé naturels |
M. James Lunney (Nanaimo—Alberni, PCC) |
L'aide aux victimes du tsunami |
Mme Yasmin Ratansi (Don Valley-Est, Lib.) |
1410 |
Le prix des jeunes bénévoles |
Mme Beth Phinney (Hamilton Mountain, Lib.) |
Les Grands Frères Grandes Soeurs du Canada |
M. Peter MacKay (Nova-Centre, PCC) |
La Somalie |
M. Borys Wrzesnewskyj (Etobicoke-Centre, Lib.) |
Le passage frontalier Windsor-Détroit |
M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD) |
Albert Redekopp |
Mme Joy Smith (Kildonan—St. Paul, PCC) |
1415 |
La Paix des braves |
M. Bernard Cleary (Louis-Saint-Laurent, BQ) |
La Saskatchewan |
M. Gerry Ritz (Battlefords—Lloydminster, PCC) |
Les aidants naturels |
M. Michael Savage (Dartmouth—Cole Harbour, Lib.) |
QUESTIONS ORALES |
La défense nationale |
L'hon. Stephen Harper (chef de l'opposition, PCC) |
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.) |
1420 |
Le Président |
L'hon. Stephen Harper (chef de l'opposition, PCC) |
L'hon. Bill Graham (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
L'hon. Stephen Harper (chef de l'opposition, PCC) |
L'hon. Bill Graham (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
M. Peter MacKay (Nova-Centre, PCC) |
L'hon. Bill Graham (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
M. Peter MacKay (Nova-Centre, PCC) |
L'hon. Bill Graham (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
1425 |
L'environnement |
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ) |
L'hon. Stéphane Dion (ministre de l'Environnement, Lib.) |
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ) |
L'hon. R. John Efford (ministre des Ressources naturelles, Lib.) |
M. Michel Gauthier (Roberval—Lac-Saint-Jean, BQ) |
L'hon. Stéphane Dion (ministre de l'Environnement, Lib.) |
M. Michel Gauthier (Roberval—Lac-Saint-Jean, BQ) |
L'hon. Stéphane Dion (ministre de l'Environnement, Lib.) |
L'Irak |
M. Jack Layton (Toronto—Danforth, NPD) |
1430 |
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.) |
M. Jack Layton |
L'environnement |
M. Jack Layton (Toronto—Danforth, NPD) |
Le Président |
L'hon. Stéphane Dion (ministre de l'Environnement, Lib.) |
La défense nationale |
M. Gordon O'Connor (Carleton—Mississippi Mills, PCC) |
L'hon. Bill Graham (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
M. Gordon O'Connor (Carleton—Mississippi Mills, PCC) |
Le Président |
M. Gordon O'Connor |
L'hon. Bill Graham (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
M. Dave MacKenzie (Oxford, PCC) |
1435 |
L'hon. Bill Graham (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
Le Président |
L'hon. Bill Graham |
Les affaires étrangères |
M. Dave MacKenzie (Oxford, PCC) |
L'hon. Dan McTeague (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, Lib.) |
Les congés parentaux |
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ) |
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ) |
La fiscalité |
Mme Paule Brunelle (Trois-Rivières, BQ) |
L'hon. Ralph Goodale (ministre des Finances, Lib.) |
1440 |
Mme Paule Brunelle (Trois-Rivières, BQ) |
L'hon. Ralph Goodale (ministre des Finances, Lib.) |
Le programme des commandites |
M. James Moore (Port Moody—Westwood—Port Coquitlam, PCC) |
L'hon. Scott Brison (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
M. James Moore (Port Moody—Westwood—Port Coquitlam, PCC) |
Le Président |
Mme Helena Guergis (Simcoe—Grey, PCC) |
L'hon. Scott Brison (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
Mme Helena Guergis (Simcoe—Grey, PCC) |
L'hon. Scott Brison (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
La santé |
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.) |
1445 |
L'hon. Ujjal Dosanjh (ministre de la Santé, Lib.) |
Le logement |
L'hon. Ed Broadbent (Ottawa-Centre, NPD) |
L'hon. Joe Fontana (ministre du Travail et du Logement, Lib.) |
La pauvreté chez les enfants |
L'hon. Ed Broadbent (Ottawa-Centre, NPD) |
L'hon. Ralph Goodale (ministre des Finances, Lib.) |
Les travaux publics et les services gouvernementaux |
M. Monte Solberg (Medicine Hat, PCC) |
L'hon. Scott Brison (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
M. Monte Solberg (Medicine Hat, PCC) |
1450 |
L'hon. Scott Brison (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
Le Sénat |
M. Ken Epp (Edmonton—Sherwood Park, PCC) |
Les travaux publics et les services gouvernementaux |
M. Monte Solberg (Medicine Hat, PCC) |
L'hon. Scott Brison (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
Le Président |
Les affaires autochtones |
M. Bernard Cleary (Louis-Saint-Laurent, BQ) |
L'hon. Ethel Blondin-Andrew (ministre d'État (Nord canadien), Lib.) |
M. Bernard Cleary (Louis-Saint-Laurent, BQ) |
1455 |
L'hon. Ethel Blondin-Andrew (ministre d'État (Nord canadien), Lib.) |
Les Forces canadiennes |
Mme Cheryl Gallant (Renfrew—Nipissing—Pembroke, PCC) |
L'hon. Reg Alcock (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, Lib.) |
Le programme de péréquation |
M. Brian Fitzpatrick (Prince Albert, PCC) |
L'hon. Ralph Goodale (ministre des Finances, Lib.) |
Les langues officielles |
L'hon. Don Boudria (Glengarry—Prescott—Russell, Lib.) |
Le Président |
L'hon. Don Boudria |
L'hon. Scott Brison (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
L'industrie pharmaceutique |
M. Steven Fletcher (Charleswood—St. James—Assiniboia, PCC) |
1500 |
L'hon. Ujjal Dosanjh (ministre de la Santé, Lib.) |
Le Président |
L'hon. Ujjal Dosanjh |
Le Président |
M. Steven Fletcher (Charleswood—St. James—Assiniboia, PCC) |
L'hon. Ujjal Dosanjh (ministre de la Santé, Lib.) |
L'immigration |
Mme Meili Faille (Vaudreuil-Soulanges, BQ) |
L'hon. Joseph Volpe (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.) |
L'industrie pharmaceutique |
M. Russ Powers (Ancaster—Dundas—Flamborough—Westdale, Lib.) |
L'hon. Ujjal Dosanjh (ministre de la Santé, Lib.) |
Les Jeux mondiaux des policiers et des pompiers |
M. Richard Marceau (Charlesbourg—Haute-Saint-Charles, BQ) |
1505 |
L'hon. Jacques Saada (ministre de l'Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec et ministre responsable de la Francophonie, Lib.) |
AFFAIRES COURANTES |
Les soins de santé |
L'hon. Ralph Goodale (ministre des Finances, Lib.) |
Nominations par décret |
L'hon. Dominic LeBlanc (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.) |
La Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces |
L'hon. Ralph Goodale (ministre des Finances, Lib.) |
Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi |
Délégations interparlementaires |
L'hon. Peter Adams (secrétaire parlementaire de la ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences, Lib.) |
1510 |
Les comités de la Chambre |
Patrimoine canadien |
Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest—Nepean, Lib.) |
La Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales |
M. John Maloney (Welland, Lib.) |
Adoption de la motion; première lecture et impression du projet de loi |
Pétitions |
La pornographie juvénile |
M. Gary Goodyear (Cambridge, PCC) |
Le mariage |
M. Gary Goodyear (Cambridge, PCC) |
Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.) |
Le remboursement de la dette |
Mme Nina Grewal (Fleetwood—Port Kells, PCC) |
L'autisme |
M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, PCC) |
Questions au Feuilleton |
L'hon. Dominic LeBlanc (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.) |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
La Loi sur les télécommunications |
M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD) |
1515 |
1520 |
1525 |
Mme Yasmin Ratansi (Don Valley-Est, Lib.) |
1530 |
M. David McGuinty (Ottawa-Sud, Lib.) |
1535 |
1540 |
M. Bradley Trost (Saskatoon—Humboldt, PCC) |
1545 |
1550 |
M. Paul Crête (Montmagny—L'Islet—Kamouraska—Rivière-du-Loup, BQ) |
1555 |
L'hon. Paddy Torsney (secrétaire parlementaire de la ministre de la Coopération internationale, Lib.) |
1600 |
1605 |
Mme Nina Grewal (Fleetwood—Port Kells, PCC) |
1610 |
1615 |
L'hon. Andrew Telegdi (Kitchener—Waterloo, Lib.) |
1620 |
1625 |
M. Gurmant Grewal (Newton—Delta-Nord, PCC) |
1630 |
1635 |
Le président suppléant (M. Marcel Proulx) |
M. Marc Godbout (Ottawa—Orléans, Lib.) |
1640 |
M. James Moore (Port Moody—Westwood—Port Coquitlam, PCC) |
1645 |
1650 |
Le président suppléant (M. Marcel Proulx) |
Adoption de la motion; renvoi à un comité |
1655 |
Loi sur le ministère du Commerce international |
L'hon. Jim Peterson (ministre du Commerce international, Lib.) |
1700 |
1705 |
1710 |
M. Gary Lunn (Saanich—Gulf Islands, PCC) |
L'hon. Jim Peterson |
1715 |
Mme Diane Bourgeois (Terrebonne—Blainville, BQ) |
L'hon. Jim Peterson |
1720 |
M. Rodger Cuzner (Cape Breton—Canso, Lib.) |
L'hon. Jim Peterson |
La présidente suppléante (L'hon. Jean Augustine) |
Mme Belinda Stronach (Newmarket—Aurora, PCC) |
1725 |
1730 |
L'hon. Roy Cullen (secrétaire parlementaire de la ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.) |
Mme Belinda Stronach |
1735 |
M. Peter Stoffer (Sackville—Eastern Shore, NPD) |
Mme Belinda Stronach |
M. Charlie Penson (Peace River, PCC) |
1740 |
1745 |
M. John Cannis (Scarborough-Centre, Lib.) |
1750 |
M. Charlie Penson |
M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ) |
1755 |
1800 |
1805 |
1810 |
M. Yvon Lévesque (Abitibi—Baie-James—Nunavik—Eeyou, BQ) |
M. Claude Bachand |
1815 |
Mme Diane Bourgeois (Terrebonne—Blainville, BQ) |
M. Claude Bachand |
1820 |
M. Peter Julian (Burnaby—New Westminster, NPD) |
M. Claude Bachand |
M. Peter Julian (Burnaby—New Westminster, NPD) |
La présidente suppléante (L'hon. Jean Augustine) |
M. Peter Julian |
1825 |
MOTION D'AJOURNEMENT |
1830 |
L'entreprise Noranda |
M. Paul Crête (Montmagny—L'Islet—Kamouraska—Rivière-du-Loup, BQ) |
L'hon. Jerry Pickard (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie, Lib.) |
1835 |
M. Paul Crête |
1840 |
L'hon. Jerry Pickard |
La présidente suppléante (l'hon. Jean Augustine) |
CANADA
Débats de la Chambre des communes |
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COMPTE RENDU OFFICIEL (HANSARD)
Le lundi 7 février 2005
Présidence de l'honorable Peter Milliken
La séance est ouverte à 11 heures.
Prière
* * *
[Français]
Les travaux des subsides
Le Président: Conformément à l'article 81(14) du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre la motion qu'elle abordera demain lors de la prise en considération des travaux des subsides.
Que la Chambre constate l'insuffisance du plan d'aide aux industries du vêtement et du textile rendu public par le gouvernement après l'annonce de la fermeture de six usines à Huntingdon et lui demande de le compléter, notamment, sur la base des éléments suivants: l'utilisation des mesures de sauvegarde prévues aux accords commerciaux, la mise en place de mesures d'encouragement à l'utilisation des textiles québécois et canadiens et la création d'un programme d'aide aux travailleurs et travailleuses âgés. |
Cette motion, inscrite au nom de l'honorable député de Joliette, fera l'objet d'un vote. Des copies de la motion sont disponibles au Bureau.
[Traduction]
Comme il est 11 h 5, la Chambre passe maintenant à l'étude des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.
Initiatives parlementaires
[Initiatives parlementaires]
* * *
[Traduction]
La Loi sur les aliments et drogues
La Chambre reprend l'étude, interrompue le 24 novembre, de la motion: Que le projet de loi C-206, Loi modifiant la Loi sur les aliments et drogues (étiquettes de mise en garde au sujet de la consommation de boissons alcooliques), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
M. Gary Carr (Halton, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député de Mississauga-Sud du travail qu'il a fait à l'égard de cette mesure législative. Si les gens prennent la peine de jeter un coup d'oeil sur l'édition d'aujourd'hui du Globe and Mail, ils y trouveront un excellent article sur ce projet de loi. L'auteur y indique, entre autres, comment le député a mis le processus en branle.
J'ai l'intention d'appuyer ce projet de loi et j'invite les autres députés à en faire autant. C'est une mesure législative judicieuse. Je tiens à souligner clairement que d'autres administrations se sont penchées sur la question et prennent des mesures. J'estime que nous devons examiner attentivement cette question.
Jetons un coup d'oeil sur les statistiques: 45 p. 100 des collisions automobiles sont attribuables à l'alcool; 30 p. 100 des incendies sont liés à l'alcool; 50 p. 100 des cas de violence familiale sont également liés à l'alcool; 40 p. 100 des chutes sont dues à l'alcool ainsi que 50 p. 100 des hospitalisations à la suite d'une chute.
L'Ontario a examiné la situation et a adopté une mesure législative appelée loi de Sandy qui vise cette réalité particulière. Conformément à cette nouvelle loi, les étiquettes apposées sur les contenants de boissons alcooliques comportent des mises en garde concernant le syndrome d'alcoolisation foetale.
Le député a produit un rapport sur le syndrome d'alcoolisation foetale. Les statistiques sont claires: ce syndrome cause des dommages permanents au foetus. J'invite les députés à prendre connaissance du projet de loi et à se faire leur propre idée sur la question.
Les paquets de cigarettes portent des messages d'avertissement relatifs au tabagisme. Nous connaissons tous les conséquences de l'alcool au volant. Il serait utile de mettre aussi les gens en garde contre ces dangers-ci.
J'aimerais parler un peu du syndrome d'alcoolisation foetale puisqu'il s'agit d'un sujet méconnu. Je dois admettre, moi qui ai fait partie du gouvernement provincial pendant 13 ans, que je n'étais pas au courant de tous les problèmes liés au syndrome d'alcoolisation foetale. Je crois que le projet de loi du député provincial Ernie Parson, qui a été adopté à l'unanimité par le gouvernement ontarien et que l'on appelle la loi de Sandy, a ouvert bien des yeux. Ce projet de loi met les gens en garde contre les dangers du syndrome d'alcoolisation foetale.
Comme je l'ai dit tout à l'heure, je crois que bien des gens ne sont pas au courant des problèmes liés au syndrome d'alcoolisation foetale. La plupart des gens qui se renseignent à ce sujet savent qu'il s'agit d'une maladie qu'il est tout à fait possible de prévenir. Si le Parlement peut faire quoi que ce soit pour faire la lumière sur cette maladie et faire en sorte que quelques personnes soient mises au courant et demeurent à l'abri de cette terrible maladie, il doit le faire.
Nous savons que les foetus absorbent l'alcool consommé par leur mère. Le problème est que bien des femmes qui savent qu'elles sont enceintes continuent à consommer de l'alcool pendant leur grossesse. Les étiquettes qui seraient apposées sur les produits alcoolisés, tel que le projet de loi le propose, mettraient en garde les gens qui tentent d'avoir un enfant.
J'ai été particulièrement touché par une lettre, citée dans le hansard, écrite par une femme dont le fils est né avec le syndrome d'alcoolisation foetale. Elle ne savait même pas qu'elle était enceinte lorsqu'elle a consommé de l'alcool. Bien des gens qui tentent de concevoir un enfant ne sont pas conscients du danger. Le projet de loi permettrait de les mettre en garde. Je crois que nous savons tous qu'il est déconseillé aux femmes enceintes de consommer de l'alcool.
Nous espérons encourager les gens à parler de cette question comme ce fut le cas pour l'alcool au volant. Conduire après avoir bu de l'alcool n'a pas toujours été un geste aussi réprouvé qu'il ne l'est aujourd'hui. Il y a eu une évolution et cette évolution s'est produite grâce au programme de sensibilisation qui a rendu totalement inacceptable la conduite avec facultés affaiblies par l'alcool.
Il reste encore beaucoup à faire à cet égard, mais je crois que tous les députés à la Chambre seraient en faveur de mesures plus strictes pour sévir contre l'alcool au volant. Il reste encore beaucoup à faire, mais nous avons déjà fait beaucoup grâce au programme de sensibilisation. Je crois que ce projet de loi fera de même.
Le projet de loi préconise l'utilisation d'étiquettes expliquant les risques reliés à une consommation abusive de boissons alcooliques. Il demande tout particulièrement que l'on appose des étiquettes de mise en garde sur les contenants de boissons alcooliques pour informer les femmes enceintes et la population en général des risques. Il convient de noter que les boissons alcooliques sont le seul produit de consommation que l'on sait être dangereux et contre lequel les consommateurs ne sont pas prévenus au moyen d'une étiquette.
Le processus de sensibilisation peut commencer. Comme nous le savons, et le rapport du Globe and Mail en fait état, ce député a travaillé très fort. Au cours des dernières législatures, il a obtenu l'appui de 95 p. 100 de la Chambre. J'oublie le nombre exact de votes, mais je crois que c'était environ 211, ce qui donne 95 p. 100. Nous sommes passés si près à tant d'occasions. J'espère que, dans le cadre de ce gouvernement minoritaire, tous les partis s'entendront, car il s'agit d'une question non partisane. Il arrive que la Chambre soit saisie de telles questions, et je crois sincèrement que dans le cas présent tous les partis peuvent donner leur appui.
Les États-Unis apposent des étiquettes d'avertissement. J'ai remarqué que, dans l'article d'aujourd'hui, certaines personnes associées aux groupes de producteurs d'alcool ont indiqué qu'il n'y aurait pas assez d'espace sur les étiquettes. Ce problème ne semble pas se poser aux États-Unis. Il y a des étiquettes. On peut voir les étiquettes dans la photo du député parue dans le Globe and Mail d'aujourd'hui.
Il y en a qui disent que ça ne marchera pas, mais je crois que le processus éducatif marchera, notamment en ce qui a trait au syndrome d'alcoolisation foetale, qui n'est pas très bien connu. Je crois, en fait, que faire figurer cette mise en garde sur les étiquettes incitera un bon nombre de personnes à se pencher sur ce problème. C'est un sérieux problème, comme nous pouvons le constater lorsque nous voyons la tragédie humaine qui se conjugue à la tragédie sociale, et la tragédie médicale qui l'accompagne.
Mon collègue de Mississauga-Sud a fait un gros travail. Comme le rapporte le Hansard, il a l'accord de l'Association médicale canadienne sur cette question. Il a également l'accord et l'appui de l'Association des infirmières et infirmiers du Canada ainsi que de la Fondation de la recherche sur la toxicomanie. Toutes appuient l'étiquetage proposé dans ce projet de loi. Je crois que ces associations ont raison à 100 pour 100 de l'appuyer. Nous devons appuyer ces excellentes associations qui font du bon travail. Si le Parlement peut adopter ce texte législatif, je pense que cela sera une bonne chose.
Je tiens à dire clairement que l'alcool est un produit légal. Beaucoup d'entre nous boivent à l'occasion et de manière responsable, et c'est de cela qu'il s'agit avec cet étiquetage. Il s'agit de consommation d'alcool responsable. Il s'agit de faire en sorte que les mises en garde soient là. Je me préoccupe aussi en particulier de l'éducation de nos jeunes. Comme nous le savons, nous dépensons des sommes importantes sur cette question. J'étais membre du gouvernement ontarien lorsque nous avons consacré beaucoup de temps à la manière de mettre en garde nos jeunes contre les méfaits de la cigarette. Cela n'a pas toujours marché, mais nous avons tenté d'éduquer les gens.
Je dis à tous les députés que voilà un bon texte législatif. On peut l'appuyer. Nous pouvons prévenir des tragédies humaines si nous adoptons ce projet de loi. J'encourage les députés de tous les côtés de la Chambre à le faire. Pour conclure, je tiens à remercier le député de Mississauga-Sud pour sa patience et son dévouement. Voilà un excellent et utile projet de loi et je suis heureux de l'appuyer. J'attends le débat avec impatience.
M. Dean Allison (Niagara-Ouest—Glanbrook, PCC): Monsieur le Président, avant tout, je tiens à mentionner que j'ai discuté du projet de loi avec le député de Niagara Falls. Comme nous ne disposons que de très peu de temps, nous ne le partagerons pas, mais nous nous sommes consultés au sujet de cette position. Sans déprécier le caractère sérieux du projet de loi, qui porte sur la réduction de la conduite en état d'ivresse et des risques en matière de santé associés à une consommation excessive d'alcool, je prie la Chambre de se demander si les étiquettes de mise en garde sont le moyen le plus efficace pour régler ce problème.
Je me réjouis de pouvoir commenter la proposition rendant obligatoires les étiquettes de mise en garde sur les boissons alcoolisées. En général, je me range toujours du côté des mesures qui permettent aux Canadiens de faire des choix éclairés au sujet de leur santé. L'étiquetage des produits semble bien conforme à cette philosophie.
Le projet de loi est manifestement le résultat de bonnes intentions, mais je pense que nous devons résister à la solution facile qui se résume à mettre en oeuvre une mesure apparemment banale visant à informer les consommateurs des risques potentiels pour leur santé et leur sécurité. À première vue, le projet de loi propose une mesure qui semble claire. Certaines personnes pourraient être tentées d'appuyer le projet de loi sans étudier d'abord ses répercussions pour l'avenir et ce qu'il présume du consommateur canadien moyen.
Soyons réalistes. Y a-t-il vraiment des millions de Canadiens qui ne savent pas que la consommation d'alcool nuit à la capacité de conduire ou de manoeuvrer une machine? Je n'ai pas encore entendu qui que ce soit avoir recours au moyen de défense voulant qu'on doive acquitter un individu accusé de conduite avec facultés affaiblies, car il n'était pas au courant qu'il était dangereux de conduire après avoir consommé de l'alcool. Y a-t-il des millions de femmes enceintes qui ignorent qu'elles devraient éviter l'alcool dans l'intérêt du foetus?
Pour dire les choses sans détours, je trouve le projet de loi inutile et condescendant. De bien des façons, il est typique d'un État providence libéral, le gouvernement croyant que la population est incapable d'assumer ses responsabilités sans être guidée par le gouvernement. Jusqu'où ira-t-on? Devrions-nous apposer des étiquettes sur les immeubles ou de grandes structures comme les collines et les montagnes pour dire aux gens qu'ils pourraient se blesser ou se tuer s'ils décident de sauter du haut de ces immeubles ou structures? Pourquoi pas des étiquettes sur les bonbons et les tablettes de chocolat pour dire aux gens qu'une surconsommation combinée à un manque d'exercice pourrait conduire à l'obésité? Qu'en est-il des baignoires? L'étiquette pourrait dire que le fait d'absorber le contenu de la baignoire au complet pourrait conduire à l'étouffement ou à la noyade.
Le fait est que les Canadiens sont parfaitement conscients des dangers d'une mauvaise utilisation de l'alcool. Les étiquettes ne sensibiliseront pas davantage les gens à ce sujet. Où sont les preuves scientifiques de l'efficacité des étiquettes? Les États-Unis ont étudié l'efficacité des étiquettes, car leur loi de 1989 sur l'étiquetage des boissons alcooliques exigeait une évaluation explicite. Les dernières données de suivi pour l'évaluation ont été recueillies en 1995.
L'étiquette apposée sur les boissons alcooliques aux États-Unis dit ceci:
Avertissement: 1) Selon le Surgeon General [le responsable de la santé publique aux États-Unis], les femmes ne devraient pas boire de boissons alcooliques durant la grossesse à cause des risques d'anomalies congénitales. 2) La consommation de boissons alcooliques nuit à votre capacité de conduire une automobile ou de manoeuvrer une machine et pourrait causer des problèmes de santé. |
Les conclusions des études américaines montrent que le recours à des étiquettes aux États-Unis n'a pas réduit l'incidence du syndrome d'alcoolisation foetale. La perception des risques associés à la consommation d'alcool mentionnés sur les étiquettes, c'est-à-dire la consommation d'alcool lorsqu'on est enceinte, la conduite avec facultés affaiblies et le reste, était élevée avant que des étiquettes ne soient apposées sur les produits. La situation n'a pas beaucoup changé par la suite.
Ces conclusions permettent de croire que les étiquettes elles-mêmes ne sont pas particulièrement efficaces pour ce qui est d'accroître la perception des risques précis reliés à la consommation d'alcool. Des études publiées quatre ans après l'apposition d'étiquettes sur les produits n'ont pas relevé des changements de comportement importants attribuables aux étiquettes, particulièrement chez les buveurs excessifs. Le plus inquiétant, c'est que le nombre de femmes américaines qui ont déclaré consommer de l'alcool pendant leur grossesse a augmenté en fait entre 1989 et 1993.
Il ressort de ces constatations que, à court et moyen terme, les étiquettes d'avertissement concernant les méfaits de l'alcool ne sont pas des moyens efficaces de modifier les comportements des personnes qui en boivent à l'excès.
Également, au Canada,on n'a pas évalué les étiquettes. Dans les Territoires du Nord-Ouest et au Yukon, où il existe des étiquettes d'avertissement depuis déjà plusieurs années, l'incidence d'alcoolisme n'a pas diminué et, à notre connaissance, aucune étude n'a été entreprise pour démontrer l'efficacité des étiquettes.
En Ontario, comme l'a dit mon vis-à-vis, on a adopté en 2004 le projet de loi 43, appelé aussi « la loi de Sandy », dont le règlement d'application vient d'être proclamé ce mois-ci.
À compter du 1er février, les bars et restaurants autorisés, les débits de la LCBO, les débits de fabricants de boissons alcoolisées et les brasseries libre-service seront tenus d'afficher bien à la vue de tous les clients un avertissement relatif au syndrome d'alcoolisation foetale. Selon moi, c'est ce qui est préférable. Ne convient-il pas d'afficher l'avertissement à l'endroit où les gens peuvent acheter de l'alcool? Il faut évaluer l'efficacité de ces affiches d'avertissement avant de passer à d'autres formes d'avertissement.
Pose également problème le fait que les affiches d'avertissement constituent une mesure générale qui ne cible pas les populations les plus touchées. Selon les résultats d'une enquête de 2004 sur la toxicomanie rendue publique le 23 novembre par le Conseil exécutif canadien sur les toxicomanies, ou CECT, Santé Canada et le Centre canadien de lutte contre l'alcoolisme et les toxicomanies, plus de 85 p. 100 de la population consomme l'alcool de façon responsable ou s'en abstient, ce qui confirme que nous devons cibler une très faible minorité de la population.
La mesure à l'étude affecterait des ressources restreintes à la vaste majorité des consommateurs d'alcool, qui n'a besoin ni d'information, ni d'aide. Du nombre des Canadiens ayant consommé de l'alcool au cours de la dernière année, on évalue à 17 p. 100, soit 13,6 p. 100 de la population dans son ensemble, la proportion des consommateurs à haut risque. Je propose à la Chambre que c'est à ce groupe, le groupe des consommateurs à haut risque, que nous devons affecter nos budgets de sensibilisation
De plus, l'analyse différenciée des données selon les sexes donne des résultats fort révélateurs. La proportion des femmes de la catégorie des consommateurs à haut risque n'est que de 8 ,9 p. 100 alors que celle des hommes est pratiquement trois fois plus élevée, soit de 25,1 p. 100.
Une intervention plus efficace en matière d'étiquetage consisterait à cibler les groupes à haut risque, comme les jeunes et les futures mères, au moyen de programmes d'information et de sensibilisation. Voilà qui nous conviendrait tout à fait.
L'ajout d'étiquettes de mise en garde coûtera du temps et de l'argent aux producteurs de boissons, et c'est cela qui me préoccupe en tant que représentant parlementaire. Le député de Niagara Falls et moi comptons dans nos circonscriptions un grand nombre de vignobles appartenant à de petits entrepreneurs qui doivent pouvoir vendre leurs produits. Ils ne s'opposent pas à ce que des étiquettes soient apposées de manière visible, mais ils se préoccupent certainement de l'obligation de les apposer sur les bouteilles. Ce n'est pas seulement une question d'argent, ils s'inquiètent aussi de l'image de marque de leurs produits. S'ils doivent remplacer soudainement les étiquettes sur toutes leurs bouteilles, cela va être coûteux et entraîner des difficultés.
Si quelqu'un peut me donner la preuve concrète, et pas une preuve à la Jean Chrétien, l'ex-premier ministre, quand il disait qu'une preuve était une preuve, que cette mesure préviendra les risques pour la sécurité et la santé, j'appuierai sans hésiter le projet de loi. L'étiquetage constitue une mesure qui plaît au gouvernement. Cette solution ne requiert pas d'effort ou de réflexion de la part du gouvernement, qui donne ainsi l'impression d'avoir agi. C'est une solution de facilité.
Nous pouvons tous appuyer l'ajout d'étiquettes de mise en garde et nous en féliciter, mais, hélas, cela ne va pas entraîner une réduction des accidents de la route dus à l'alcool ni du nombre d'enfants souffrant du syndrome d'alcoolisme foetal. Nous savons que des programmes comme RIDE contribuent à la réduction de la conduite avec facultés affaiblies. Si nous voulons réduire davantage la consommation abusive d'alcool, nous devons consacrer plus de ressources à l'application des lois relatives à la consommation d'alcool par des mineurs et des lois concernant la conduite avec facultés affaiblies ainsi qu'à la tenue de campagnes de sensibilisation destinées aux groupes à risque élevé. Une hausse des dépenses consacrées à la recherche médicale et comportementale serait également utile parce que cela nous permettrait de centrer nos efforts là ils auraient un maximum d'efficacité.
Je suppose que des députés appuieront le projet de loi parce qu'ils ne veulent pas que leur opposition à ce dernier soit interprétée comme une opposition à la santé et à la sécurité. Cependant, je voterai contre le projet de loi pour deux raisons: il est inefficace et induit le public en erreur en lui faisant croire que le gouvernement agit. J'espère que ceux qui pensent comme moi n'hésiteront pas à exprimer leur désaccord au moment du vote.
[Français]
Mme Nicole Demers (Laval, BQ): Monsieur le Président, c'est à titre de membre du Comité permanent de la santé qu'il me fait grandement plaisir d'intervenir aujourd'hui au sujet de ce projet de loi déposé par notre collège député de Mississauga-Sud. D'ailleurs, ce projet de loi a déjà été présenté deux fois, soit en 1995 et en 1999.
On dit souvent qu'il faut préconiser la prévention au niveau de la santé, et je crois que cela s'inscrit très bien dans cette optique. Le Bloc québécois est naturellement en faveur de ce projet de loi, qui informe et fait de la prévention.
Les effets de la consommation d'alcool comme tels peuvent aller de la fausse couche au retard de croissance utérine et, finalement, au syndrome d'alcoolisme foetal.
La prévention du syndrome d'alcoolisme foetal est très importante, car, comme nous le savons, la consommation d'alcool pendant la grossesse peut amener des anomalies au foetus, dont les plus observables sont le petit poids des bébés et les déformations du visage. Par contre, ce ne sont pas là les plus graves. En effet, les conséquences neurologiques qui découlent de ce syndrome font place à de bien pire handicaps. On parle de dysfonctions du système nerveux central, de retard du développement de l'intelligence, de problèmes de compréhension, d'inattention, d'apprentissage et de mémoire, ainsi que de troubles du langage et d'aptitudes motrices.
Au Canada, le syndrome d'alcoolisme foetal est considéré comme l'une des principales causes d'anomalies congénitales et du retard de développement de l'enfant. On estime que plus de 350 nouveau-nés souffrent de ce syndrome chaque année au Canada. Avec le problème de dénatalité que nous connaissons aujourd'hui, il est encore plus de notre devoir de nous assurer que le peu d'enfants qui viennent au monde ont toutes les chances de leur côté pour croître en santé physique et mentale.
N'oublions pas que ces enfants qui naissent aujourd'hui seront nos dirigeants demain. Il est aussi primordial de parler des coûts de soins de santé et des autres frais qui découlent de ce syndrome. On évalue que les coûts supplémentaires seulement au niveau de la santé, de l'éducation et des services sociaux pendant la vie d'une personne atteinte de ce syndrome se chiffrent à 1,4 million de dollars. C'est beaucoup, quand on sait que les coûts faramineux du système de santé s'élèvent de plus en plus chaque année en raison du vieillissement de la population, des problèmes de santé que l'on connaît de plus en plus, et des recherches permettant de guérir et de trouver des cures à ces problèmes. Par contre, les recherches coûtent extrêmement cher. Quand on parle d'avoir à dépenser, en plus, 1,4 million de dollars pour des problèmes qui pourraient être réglés en faisant de la prévention, je pense qu'il faut y porter attention.
Le Québec est la province où l'on retrouve le plus de femmes qui disent avoir consommé de l'alcool pendant leur grossesse. Dans une étude effectuée en 1997-1998 et 2000-2001 dans le cadre du rapport « L'état de la situation sur le syndrome d'alcoolisme foetal au Québec », on apprenait qu'une femme sur quatre avait consommé de l'alcool pendant sa grossesse et une femme sur dix au Canada.
Nous avons tous et toutes une responsabilité sociale, en tant que citoyens, mais plus encore comme représentants de ceux-ci, de faire les choix nécessaires pour protéger la santé des gens et les sensibiliser à ce qui pourrait nuire à celle-ci.
Je devrai m'objecter à l'intervention de mon collègue venant d'affirmer qu'il ne revenait pas à nous de nous mêler de la santé des gens et de leur bien-être. Il n'est pas question de se mêler de leur santé, mais de les sensibiliser à ce qui n'est pas bon pour celle-ci. Il est question de les informer, et non de décider pour eux ce qui est bon ou non. Il s'agit de leur donner les informations nécessaires afin qu'ils puissent en décider eux-mêmes. Tel est ce que nous demande cette loi.
Une vie humaine n'a pas de prix. Naturellement, on ne peut affirmer avec certitude que ce moyen serait efficace à 100 p. 100, comme nous le font remarquer les lobbys de brasseurs de bière. Cependant, une étiquette descriptive indiquant les dangers liés à la consommation d'alcool viendrait appuyer les publicités et les actions de sensibilisation déjà entreprises par les différents intervenants des milieux concernés par ce fléau.
Les entreprises de bière nous disent que l'affichage ne sera pas efficace, que c'est l'action dans des groupes et des lignes d'aide, dans lesquels ils disent investir beaucoup d'argent, qui fait la différence. Quand ils parlent d'investissements, d'aide communautaire et d'action de prévention, j'aimerais connaître leur implication monétaire dans les communautés les plus touchées, particulièrement chez les peuples autochtones, où le syndrome d'alcoolisme foetal est le plus fréquent.
Il ne faudrait pas oublier les dégâts causé par l'alcool chez les jeunes conducteurs. Ceux-ci, sous l'effet de l'alcool, sont de quatre à cinq fois plus susceptibles d'avoir un accident, peut-être même mortel, étant donné leur inexpérience.
En tant que porte-parole de la famille, la prévention et la sensibilisation auprès des jeunes me tient aussi beaucoup à coeur. Cette responsabilité sociale dont je parle est déjà présente dans les Territoires du Nord-Ouest et du Yukon. Une partie du site web de la Société des alcools est entièrement dédiée à cela et explique que les étiquettes de mise en garde son en vigueur dans cette province depuis 1992.
Il est certain qu'il est difficile de déterminer si cela a eu un effet positif, parce que les femmes qui sont victimes de danger pendant la grossesse à cause d'un abus d'alcool sont sorties de la province. On les retire des Territoires du Nord-Ouest et on les envoie ailleurs pour accoucher. Donc, on n'a pas données relatives au taux de natalité avec syndrome d'alcoolisme fœtal des Territoires du Nord-Ouest et du Yukon qui pourraient appuyer le fait que la nouvelle loi a eu un impact sur ceux-ci.
Cette province a même fait imprimer des mises en garde sur les sacs d'emballage, avec un slogan pour chaque saison, concernant la conduite au volant et un pour la consommation durant la grossesse. Nous pourrions facilement faire des parallèles avec les mises en garde sur les médicaments et les cigarettes. Leur introduction ne fut pas une chose facile mais c'est grâce à ce type d'information que les gens sont amenés à changer leurs habitudes de consommation.
C'est notre responsabilité de nous assurer que les gens connaissent les impacts de ces habitudes de consommation, surtout lorsque les séquelles sont si dramatiques. Nous savons très bien que nous ne pouvons pas obliger les gens à ne pas boire ou ne pas fumer, mais nous pouvons leur permettre d'être au courant des risques pour leur santé et, de cette façon, les amener à réfléchir et permettre la prévention au lieu de la guérison. Il s'agit là d'un pas dans la bonne direction pour réduire les coûts de santé.
Il est donc d'une importance primordiale qu'une telle loi soit adoptée par tous les parlementaires, pour démontrer l'importance que nous portons à la santé des gens et, surtout, à notre devoir d'informer la population.
En terminant, j'aimerais ajouter que les députés du Bloc québécois sont toujours là pour défendre les intérêts de leurs commettantes et de leurs commettants, peu importe la source des projets de loi déposés. C'est pourquoi nous appuyons notre collègue dans ce projet. J'encourage tous mes collègues en cette Chambre à faire de même, car cela sera un excellent outil de sensibilisation et de prévention.
[Traduction]
Mme Jean Crowder (Nanaimo—Cowichan, NPD): Monsieur le Président, moi aussi j'appuie le projet de loi. Cependant, il est attristant que nous discutions à nouveau de cette question. La Chambre a déjà accordé un appui massif à une motion en ce sens. Nous constatons l'inaction du gouvernement. Nous le prions d'appuyer ce projet de loi dans l'espoir qu'il soit adopté.
Lors d'une séance du Comité de la santé tenue le 26 avril 2001, le ministre de la Santé de l'époque a déclaré:
À cet égard, j'aimerais attirer votre attention sur la motion adoptée l'autre jour par la Chambre des communes, une motion présentée par ma collègue [de Winnipeg-Nord]. Son initiative, appuyée par [le député de Mississauga-Sud] et les membres de notre parti, a concentré de nouveau l'attention sur un nouveau moyen de répondre à ce défi du syndrome et des effets de l'alcoolisme foetal. Je tiens à assurer le comité—et notamment mon amie la députée de Winnipeg-Nord—que nous donnerons suite avec diligence à cette question. |
Si « avec diligence » signifie que trois ans plus tard rien n'a encore été fait au sujet de l'étiquetage, je m'inquiète de la définition qu'a le gouvernement du mot « diligence ».
Si l'on en croit les évaluations, depuis 2001, en moyenne, 3 000 enfants atteints du syndrome et des effets de l'alcoolisme foetal sont nés chaque année. Quelles sont les conséquences de ce phénomène sur l'ensemble de notre société et sur le coût des soins de santé? Nous n'avons toujours pas donné suite à cette initiative, qui a été bien définie et qui jouit de l'appui de beaucoup de nos concitoyens ainsi que des associations médicales et d'autres organismes oeuvrant auprès des enfants et des femmes. Il s'agit de l'une des anomalies congénitales les plus faciles à prévenir et, pourtant, nous continuons à nous traîner les pieds. C'est honteux de le constater, du point de vue de notre engagement envers nos enfants. Nous devons nous demander pourquoi nous n'avons pas encore adopté un tel projet de loi.
Les étiquettes de mise en garde ne sont pas la panacée en elles-mêmes. Elles ne sont qu'un élément d'une stratégie d'ensemble visant à éduquer et à sensibiliser les gens en ce qui concerne le syndrome et les effets de l'alcoolisme foetal. Les femmes qui tiennent à boire ne vont pas s'en priver uniquement parce qu'une étiquette est apposée sur une bouteille. Mais nous avons vu à l'occasion d'autres campagnes d'éducation et de sensibilisation que celles-ci parviennent à sensibiliser l'ensemble de la société et à faire pression sur les intéressés. Les femmes ne liront sans doute pas l'étiquette, mais leur entourage le fera peut-être et les incitera à ne pas boire.
Il importe également de situer la proposition dans une stratégie globale d'information et de sensibilisation. Je sais qu'on débloque actuellement des fonds pour lutter contre les SAF/EAF. Chez moi, il existe une société du SAF qui travaille très fort pour informer et sensibiliser la population. Un propriétaire de pub de ma circonscription, Nanaimo—Cowichan, a volontairement apposé des étiquettes sur tous les contenants d'alcool vendus au Cold Beer and Wine Store. Ce propriétaire de pub très progressiste et clairvoyant mérite des félicitations pour ses préoccupations au sujet des effets de l'alcool sur les enfants avant leur naissance.
Oui, il y a eu une campagne d'étiquetage, ce qui me semble intéressant, bien que mon collègue d'en face ait parlé de l'étude réalisée sur la campagne américaine d'étiquetage qui dure depuis 1989, étude selon laquelle cette campagne n'aurait eu aucun effet vérifiable. Parfois, on fait dire aux chiffres ce qu'on veut. Si un pays comme les États-Unis a pu aller de l'avant et apposer des étiquettes sur les contenants d'alcool—depuis 1989, je le rappelle—, sans qu'il y ait une diminution notable dans l'industrie, je soutiens que le Canada peut faire la même chose.
Nous avons à notre disposition un certain nombre de moyens pour accroître la sensibilisation à la consommation d'alcool, et l'étiquetage est un élément important. On devrait informer les consommateurs des conséquences possibles de leur comportement par des moyens comme l'étiquetage. Il est certain qu'on le fait depuis un certain nombre d'années pour le tabac. Il semble tout simplement raisonnable d'en faire autant pour l'alcool.
Il s'agit ici d'une initiative très importante qui pourrait bien servir la cause de la sensibilisation, et nous voudrions qu'elle s'intègre à une stratégie globale d'information et de sensibilisation au sujet des effets de l'alcool sur les enfants non encore nés. J'exhorte tous les députés à appuyer cette initiative cruciale, et puis je prie instamment le gouvernement de mettre cette mesure en oeuvre.
M. Werner Schmidt (Kelowna—Lake Country, PCC): Monsieur le Président, j'aimerais faire part à la Chambre d'une expérience que j'ai eue peu après m'être installé dans la région de Kelowna, en Colombie-Britannique.
Trois mois après mon arrivée dans cette région, un homme en état d'ébriété a causé un grave accident. Au moment où il grillait un feu rouge sur une artère principale, il a fauché une belle jeune fille qui réussissait particulièrement bien dans ses études. Cette jeune fille douée faisait vraiment plaisir à voir. Elle obtenait des notes fantastiques et elle allait assurément avoir une brillante carrière.
Elle a été tuée par un homme qui avait consommé de l'alcool de façon irresponsable. Cet homme connaissait pourtant les effets de l'alcool. En effet, il avait été incarcéré à quelques reprises pour avoir conduit sa voiture sous l'emprise de l'alcool et pour d'autres infractions. Il connaissait les conséquences de ses gestes. Je ne crois pas que l'étiquetage aurait pu faire une différence pour lui.
Permettez-moi de parler d'un autre cas. En rentrant chez elle après sa journée de travail, une enseignante a été frappée de plein fouet par une personne ivre alors qu'elle était engagée dans un carrefour giratoire. Elle est maintenant dans un fauteuil roulant. Elle avait une brillante carrière et était une excellente conseillère. Tant les enseignant que les élèves lui demandaient conseil. Bien sûr, son handicap physique, causé par une personne ayant bu de façon irresponsable, ne l'empêche pas d'être efficace.
Mon épouse, maintenant à la retraite, enseignait dans une école maternelle. Elle a souvent été témoin du syndrome de l'alcoolisation foetal. Cela l'attristait que des jeunes femmes enceintes consomment de l'alcool.
Certains affirment que la consommation d'alcool ne présente aucun effet bénéfique. Là n'est pas le problème. Le problème, c'est la consommation excessive et irresponsable d'alcool chez certaines personnes.
Ce matin, aucun des intervenants n'a abordé l'autre aspect de la question, à savoir que la consommation de vin a des effets bénéfiques sur la santé. Des données scientifiques indiquent clairement qu'une consommation de vin responsable et modérée, surtout le vin rouge, a d'importants effets bénéfiques sur la santé, notamment un effet hypolypémiant sur le cholestérol et des propriétés antioxydantes pouvant prévenir le cancer.
Si nous étiquetions les bouteilles de vin de la même manière que les autres boissons alcoolisées, et le projet de loi C-206 ne prévoit pas de distinction à ce sujet, nous devrions alors mentionner aussi les avantages que présente la consommation de certaines boissons alcoolisées. On a observé qu'une consommation modérée et raisonnable de vin offre une protection contre la coronaropathie et le cancer de la prostate.
Je suppose que le projet de loi vise à sensibiliser la population. Si c'est le cas, je pense que l'étiquetage n'est pas le meilleur outil d'information à notre disposition dans le monde. Il y a de nombreuses façons d'informer les jeunes et les adultes. Il y a de nombreuses façons de faire appel au sens des responsabilités des adultes.
L'autre jour, j'étais en présence d'un groupe de jeunes dans un pub. Certains d'entre eux consommaient trop d'alcool, mais ils avaient désigné un chauffeur dans leur groupe. Ils savaient que la personne qui allait les reconduire ne serait pas sous l'effet de l'alcool. Ces jeunes auraient certes été trouvés coupables de facultés affaiblies, mais ils allaient être passagers et non pas conducteurs du véhicule.
Nous devons sensibiliser nos jeunes. J'ai été très fier l'autre jour d'un groupe de jeunes femmes; certaines étaient enceintes et n'ont pas bu une goutte d'alcool. Elles ont été très responsables. Elles savaient exactement quelles étaient les répercussions. Aucune d'elles n'a eu besoin d'une étiquette sur une bouteille, et nous ne faisons ici absolument aucune distinction entre les différentes formes de consommation, comme si toute consommation était mauvaise.
Ce projet de loi revêt un caractère universel, comme s'il s'appliquait à toutes les situations. C'est illogique. Il ne cadre pas avec la réalité et rien ne prouve qu'il entraînerait une baisse de la consommation.
Je veux parler de l'expérience américaine à cet égard. En 1989, l'étiquette suivante a été apposée sur les bouteilles de boissons alcoolisées:
Mise en garde du gouvernement: 1) Selon le directeur du Service de santé publique des États-Unis, les femmes ne devraient pas consommer d'alcool pendant leur grossesse en raison des risques d'anomalie congénitale. 2) La consommation d'alcool réduit votre capacité de conduire un véhicule et de faire fonctionner de la machinerie et elle peut causer des problèmes de santé. |
Je suis d'accord. Cela ne pose aucun problème. La consommation exagérée d'alcool me dégoûte au plus haut point.
Toutefois, je crois qu'on va un peu loin en disant que cette mesure va prévenir la consommation d'alcool. Voici un petit résumé des faits. Entre 1989 et 1993, aux États-Unis, le nombre de femmes ayant admis avoir consommé de l'alcool alors qu'elles étaient enceintes a augmenté. Après quatre années d'expérience, peut-on dire que l'étiquetage a permis d'atténuer le problème? Pas du tout. Pourquoi ne consacrons-nous pas plutôt nos énergies à sensibiliser les jeunes à la question et à nous assurer qu'ils comprennent bien toutes les conséquences que cela peut entraîner? Nous pouvons faire tout ce que nous voulons avec les connaissances que nous avons dans ce dossier.
L'inventeur de la dynamite n'a certainement jamais, au grand jamais, pensé qu'on pourrait s'en servir un jour pour détruire des vies. Mais nous, nous le savons. Nous pouvons faire ce que nous voulons de nos connaissances. Nous pouvons nous en servir à bon ou à mauvais escient. Nous pouvons en faire mauvais usage, ou encore en tirer profit. Il suffit de penser à ce que la dynamite nous a permis de faire. Elle a été extrêmement utile dans notre société. C'est un outil essentiel en construction un peu partout.
Il ne faut donc pas prendre une règle et la simplifier au point de croire qu'elle pourra nous permettre de résoudre tous nos problèmes de santé, que nous pourrons ainsi résoudre le problème de la consommation excessive et irresponsable d'alcool et qu'il suffira pour cela d'apposer une étiquette sur les bouteilles indiquant que la consommation pourrait être dangereuse. Cela ne fonctionnera pas.
M. Alan Tonks (York-Sud—Weston, Lib.): Monsieur le Président, je félicite et remercie le député de Mississauga-Sud de ses efforts soutenus pour réduire la consommation irresponsable d'alcool. Je voudrais également lui faire mes compliments. C'est peu dire qu'il est un grand parlementaire. Il travaille avec acharnement sur ces questions pour tenter de faire valoir son argument auprès de tous les députés.
On a abondamment parlé de la recherche et des statistiques. Les députés sont unanimes à penser que les gens ne devraient pas conduire lorsqu'ils sont en état d'ébriété, que les femmes enceintes ne devraient pas consommer d'alcool et que la consommation irresponsable et prolongée d'alcool risque de nuire à la santé.
Quoi qu'il en soit, selon la recherche, la sensibilisation de la population à ces faits montre déjà que 99 p. 100 des Canadiens sont conscients du fait que la consommation d'alcool risque de nuire à leur capacité de conduire un véhicule. Cela est bien clair, et les résultats de sondages montrent que 96 p. 100 des Canadiens et 98 p. 100 des femmes en âge de procréer savent que la consommation d'alcool pendant la grossesse augmente les risques d'anomalie congénitale chez les foetus.
Faut-il continuer d'apposer des étiquettes de mise en garde sur les bouteilles ou autres contenants pour rappeler aux gens une vérité qu'ils connaissent? Aujourd'hui, des gens conduisent de façon irresponsable, non pas parce qu'ils ignorent les risques, mais parce que cela leur importe peu ou qu'ils sont incapables de s'aider eux-mêmes. Qui voulons-nous sensibiliser et quel est le meilleur moyen de le faire?
Il a déjà été mentionné que, depuis les trente dernières années, le Canada a très bien réussi à réduire le nombre de personnes qui conduisent en état d'ébriété. Cela a été rendu possible grâce aux efforts combinés du gouvernement, des corps policiers, des groupes d'intérêt et de l'industrie de la bière, du vin et des spiritueux, qui ont mené des campagnes sérieuses et bien financées, et non pas grâce à des mesures comme des étiquettes d'avertissement. Nous ne devons pas nous laisser détourner de l'analyse de l'ampleur du problème et des réactions équilibrées à ses causes et à ses effets.
Les cas qui restent à régler sont les cas des conducteurs qui sont de gros buveurs. Ces individus conduisent complètement saouls, avec des taux d'alcool dans le sang qui dépassent la limite permise de 200 à 300 p. 100 et en sachant dès bien qu'ils ne devraient pas conduire. Ce sont des irresponsables. Comment pouvons-nous concevoir un programme très bien ciblé pour ces cas?
Pour ce qui est du syndrome d'alcoolisme foetal, il est intéressant d'examiner les programmes qui ont été financés conjointement par le secteur public et le secteur privé. Avec le soutien des brasseurs canadiens, le programme pour les mères à risque du Sick Kids Hospital offre un service téléphonique sans frais où on peut obtenir de l'information sur l'usage d'alcool et de drogues pendant la grossesse. Depuis 1999, plus de 28 000 personnes ont utilisé ce service.
Santé Canada s'associe avec l'industrie pour soutenir le centre d'information sur le syndrome d'alcoolisme foetal qui a été mis sur pied par le Centre canadien de lutte contre l'alcoolisme et les toxicomanies. Le centre fournit évidemment de l'information sur le syndrome et les effets de l'alcoolisme foetal, il tient la liste des organismes qui s'occupent de ce syndrome et dresse la liste des programmes de prévention et d'information.
En outre, Santé Canada travaille avec ses partenaires pour mettre sur pied programmes comme le projet Risques associés à la consommation d'alcool: évaluation et intervention, qui a été élaboré par le Collège des médecins de famille du Canada afin de donner aux médecins les outils dont ils ont besoin pour intervenir à un stade précoce auprès des personnes susceptibles d'avoir un problème d'alcoolisme.
Ce sont des exemples d'interventions mieux ciblées, plus pertinentes et adaptées à ce problème de comportement humain. La recherche a démontré leur efficacité.
Je crois, et j'ai entendu de nombreux députés des deux côtés le dire, que nous voulons véritablement interpeller le public au sujet de cette question. Nous devons nous poser sérieusement la question suivante: est-ce ce que nous faisons lorsque nous jetons une ombre sur une industrie où la recherche a démontré l'efficacité des programmes d'interventions? Nous risquerions de détourner l'attention du public du problème fondamental auquel nous voulons sensibiliser le public.
Je ne dirai pas que cette mesure est de la poudre aux yeux; ce serait banaliser un grave problème. Elle pourrait nous donner l'impression rassurante que nous faisons quelque chose pour montrer au public que nous prenons la question au sérieux, alors que, en fait, ce serait le contraire. Nous donnons l'impression qu'il est possible de remédier à ce très sérieux problème par des solutions simples. De façon générale, je pense que le public s'attend à plus de notre part dans ce dossier.
Des projets et des initiatives conjoints, auxquels ont participé l'industrie brassicole et l'industrie vinicole, ont permis de lutter efficacement contre le problème.
J'espère que le message qui émanera de la Chambre est que nous ne nous intéressons pas aux apparences, c'est-à-dire que nous ne voulons pas donner l'impression que nous avons trouvé une solution à un problème très sérieux. Nous devons aborder ce grave problème en tenant compte de tous ses aspects et élaborer un programme avec le secteur privé. Nous devons nous y attaquer avec le sérieux et l'efficacité voulus.
Je dis cela avec tout le respect dû au député qui a présenté le projet de loi. Je pense que c'est l'objectif qu'il poursuit. Demandons-nous si c'est la façon dont nous voulons nous attaquer au problème, ou s'il n'y aurait pas de meilleures façons de marquer des points dans ce dossier.
Je pense qu'il faut plutôt opter pour le genre de programmes et de collaboration avec l'industrie dont je parlais. C'est pourquoi je n'appuierai pas le projet de loi.
L'hon. David Kilgour (Edmonton—Mill Woods—Beaumont, Lib.): Monsieur le Président, avec tout le respect que j'ai pour ce que mon collègue vient de dire, le député de Mississauga—Sud a écrit un livre sur la question du syndrome d'alcoolisation foetale. Cela lui a demandé d'énormes recherches. Cette question est extrêmement importante pour un très grand nombre de personnes dans notre pays. Il a proposé ce projet de loi de bonne foi, pensant que cela faciliterait une solution. Avec tout le respect que je dois au député de Toronto, ce n'est pas équitable pour le projet de loi à l'étude que de dire simplement que nous ne devrions rien faire tant que nous n'avons pas la solution parfaite, ce qui semble être ce qu'il propose.
Beaucoup de députés, ce matin, ont expliqué que le projet de loi contribuera à réduire le terrible tribut du syndrome d'alcoolisation foetale. J'exhorte les députés à voter en faveur de cette mesure.
L'autre jour, à bord d'un avion, j'ai rencontré une sondeuse professionnelle qui m'a dit que les photos horribles sur les paquets de cigarettes donnent de bons résultats, en fait. Il y a 18 photos différentes. Je ne sais pas s'il y a quelqu'un qui savait cela. Elle m'a fait remarquer que certaines photos sont beaucoup plus efficaces que d'autres; leur efficacité varie en fonction des divers groupes.
La cible de ces messages ou de ces photos est bien clair. Si nous pouvions convaincre une mère de ne pas faire quelque chose qui aboutirait à la naissance d'un enfant avec ce terrible handicap, je crois que cela en voudrait la peine.
Dans le cadre de la recherche d'une solution, je rends hommage au député de Mississauga-Sud d'avoir soulevé cette question. Je félicite d'autres collègues à la Chambre qui ont pris position en faveur de ce texte.
Un collègue du Parti conservateur a déclaré que nous devrions mettre des avertissements sur les baignoires, si j'ai bien entendu, parce que les baignoires peuvent créer des accidents. Je dois avouer qu'en ma qualité d'avocat, j'ai entendu beaucoup d'arguments ridicules devant les tribunaux au fil des ans, mais jamais un aussi mauvais que celui-là.
J'espère que les collègues choisiront de voter en faveur du projet de loi, qui représente un pas dans la bonne direction.
L'hon. Roy Cullen (secrétaire parlementaire de la ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole au sujet du projet de loi C-206, qui vise à modifier la Loi sur les aliments et drogues pour qu'on mette des étiquettes de mise en garde au sujet de la consommation de boissons alcooliques. Je voudrais féliciter le député de Mississauga-Sud pour le travail qu'il a fait sur cette question au fil des ans. Je sais combien elle lui tient à coeur. Je le félicite de l'avoir portée à l'attention de la Chambre des communes.
Je connais le parcours difficile qu'il a dû franchir. Je me suis démené pendant des années pour que mon projet de loi d'initiative parlementaire soit présenté à la Chambre. Il a certainement des intentions louables. Néanmoins, je n'appuierai pas ce projet de loi.
Il y a deux grandes brasseries dans ma circonscription, Labatt et Molson. J'ai travaillé avec les brasseurs pendant de nombreuses années. Des gens connaissant très bien la question me disent que les avertissements sur les étiquettes n'auront pas l'effet recherché. On a constaté aux États-Unis qu'ils sont inefficaces. Ils n'ont eu aucune incidence sur la consommation d'alcool des femmes enceintes, des opérateurs de machinerie ou des conducteurs.
D'après les sondages effectués au Canada, environ 96 p. 100 des Canadiens savent qu'il y a un lien entre la consommation excessive d'alcool et les anomalies congénitales. Les femmes en âge de procréer sot encore plus conscientes du problème; en effet, 98 p. 100 d'entre elles sont au courant de ce lien. En ce qui concerne l'ivresse au volant, les chercheurs ne s'attardent même plus sur la question étant donné que, au début des années 90, 99 p. 100 de tous les répondants reconnaissaient que la consommation d'alcool entraînait un affaiblissement des facultés.
Ce sont là des chiffres importants. Nous reconnaissons tous que la consommation irresponsable d'alcool est à décourager; depuis quelque temps, l'industrie brassicole canadienne élabore des programmes efficaces et de haute importance concernant la consommation responsable d'alcool, de bière notamment. En effet, l'industrie fait preuve de beaucoup d'initiative pour décourager les gens de se livrer à la consommation excessive de boissons alcoolisées, de bière surtout.
Les brasseries font aussi énormément de travail dans le dossier du syndrome d'alcoolisation foetale et des effets de l'alcool sur le foetus. Comme l'a indiqué mon collègue de Weston, elles appuient le programme pour les mères à risque. Les femmes peuvent appeler un numéro sans frais pour se renseigner sur les dangers de la consommation d'alcool pendant la grossesse.
Pour en revenir aux commentaires de mon collègue de l'Alberta, on a naturellement tendance à croire que si l'initiative a marché pour les cigarettes, elle devrait marcher pour la bière, les spiritueux et le vin. La différence est que personne ne prétendra que le fait de fumer quelques cigarettes est bon pour la santé; en revanche, le fait de boire de façon responsable, à raison de quelques bières par semaine, est bon pour la santé. Ce sont les gens qui consomment abusivement qui sont un problème. Ce n'est pas en mettant des étiquettes sur les bouteilles que nous allons les convaincre de boire de façon responsable. Et la bière à pression? Et la bière en gros, et la bière vendue dans les tavernes, etc.?
Je refuse respectueusement d'appuyer ce projet de loi.
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, de toute évidence, il importe de se pencher sur certaines des préoccupations portées à l'attention des députés. J'ose espérer que ce dossier sera renvoyé au Comité permanent de la santé où nos collègues pourront les examiner de façon exhaustive.
Je réitère certaines de mes préoccupations. Voici des statistiques qui retiendront peut-être l'attention des députés.
Plus de 19 000 décès surviennent chaque année à cause de la consommation excessive d'alcool; on peut lui attribuer 45 p. 100 des collisions de véhicules motorisés, 30 p. 100 des incendies, 30 p. 100 des suicides, 60 p. 100 des homicides, 50 p. 100 des incidents de violence familiale, 65 p. 100 des accidents de motoneige, un éclatement de la famille sur six, 30 p. 100 des noyades, 5 p. 100 des malformations congénitales, 65 p. 100 des situations de violence faite aux enfants; 40 p. 100 des chutes ayant entraîné des blessures et 50 p. 100 des urgences hospitalières. Par surcroît, la consommation abusive de boissons alcoolisées entraîne, pour notre système de soins de santé, des coûts additionnels de plus de 15 milliards de dollars.
Au nombre des produits de consommation, seules les boissons alcoolisées peuvent nous causer des dommages si elles sont mal utilisées et ne comportent aucune mise en garde à cet égard.
Comment se fait-il que l'industrie des alcools de bouche ne soit pas tenue de véhiculer des messages pour sensibiliser le public?
Ce matin, dans le journal, les représentants de l'industrie de l'alcool de bouche ont déclaré qu'il n'y a pas suffisamment d'espace sur les bouteilles d'alcool et qu'on y trouve déjà trop d'information. Or, ces représentants ont omis de dire que, en vertu de la loi américaine en place depuis 1989, l'industrie est tenue d'apposer une mise en garde sur tous les emballages, canettes et bouteilles de boissons alcoolisées exportés aux États-Unis. Par conséquent, l'argument voulant qu'il n'y ait pas suffisamment d'espace est carrément invalide. En fait, l'industrie de l'alcool de bouche économiserait si elle n'avait pas à produire deux étiquettes différentes. Elle pourrait utiliser la même étiquette pour les deux pays et ainsi économiser au chapitre du conditionnement.
Cinquante pour cent des personnes incarcérées dans les prisons canadiennes souffrent du syndrome d'alcoolisation foetale ou d'autres déficiences congénitales causées par l'alcool. De 30 à 40 p. 100 des femmes admettent avoir consommé de l'alcool pendant leur grossesse. La consommation d'alcool par les femmes enceintes est la première cause connue de déficiences congénitales et mentales au Canada. Cinquante pour cent des grossesses sont imprévues. Le foetus est plus sensible à l'alcool entre le 15e et le 22e jour de son développement. La plupart des femmes ne savent même pas qu'elles sont enceintes à ce moment.
Le message lancé par Santé Canada, les ONG et l'industrie des boissons alcooliques est faussé. Les femmes ne peuvent attendre de savoir qu'elles sont enceintes. Elles doivent savoir que s'il y a une possibilité qu'elles soient enceintes, elles devraient s'abstenir de consommer de l'alcool. Cela élimine tout risque pour le foetus.
Des députés ont suggéré que cette mesure pourrait ne pas être efficace et ne pas permettre d'éradiquer le syndrome d'alcoolisation foetale. Si nous devions attendre de trouver des solutions garanties à 100 p. 100, aucune loi ne serait promulguée au Canada. Soyons réalistes. Il faut comprendre que les étiquettes de mise en garde font partie d'un programme complet d'éducation du public au sujet des risques pour les foetus et également pour les autres.
La dernière fois que la Chambre a été saisie de ce projet de loi, nous avions l'appui de tous les ministres provinciaux et territoriaux de la Santé, de Mothers Against Drunk Driving, du Conseil national de prévention du crime, de l'Association des infirmières et infirmiers du Canada, de l'Association canadienne des policiers, de l'Association canadienne des chefs de pompiers et de dizaines d'ONG.
Peu importe l'issue du vote, j'aimerais avoir le consentement unanime de la Chambre pour procéder à un vote par appel nominal. Je demande à cinq députés de se lever afin que nous puissions passer au vote demain soir et juger de l'appui, ou de l'opposition, à ce projet de loi. Ainsi, lorsque le projet de loi sera renvoyé en comité, nous saurons exactement à quoi nous en tenir.
[Français]
Le président suppléant (M. Marcel Proulx): Comme il est 12 h 7, la période réservée aux débats est expirée. Le vote porte sur la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter cette motion?
Des voix: D'accord.
Le président suppléant (M. Marcel Proulx): La motion est adoptée.
[Traduction]
Des voix: Non.
Le président suppléant (M. Marcel Proulx): J'ai demandé s'il plaisait à la Chambre d'adopter la motion et tous ceux qui ont répondu ont dit oui.
M. Charlie Penson: Monsieur le Président, je vous ai entendu demander à ceux qui étaient en faveur de dire oui, mais vous n'avez pas demandé à ceux qui étaient contre de dire non.
Le président suppléant (M. Marcel Proulx): J'ai le regret de vous informer que la question était «Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?». Recommençons donc puisqu'il semble qu'on ne m'ait pas bien compris.
[Français]
Le vote porte sur la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter cette motion?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Le président suppléant (M. Marcel Proulx): Que tous ceux qui appuient la motion veulent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Le président suppléant (M. Marcel Proulx): Que tous ceux qui s'y opposent veulent bien dire non.
Des voix: Non.
Le président suppléant (M. Marcel Proulx): À mon avis, les oui l'emportent.
Et plus de cinq députés s'étant levés:
[Traduction]
Le président suppléant (M. Marcel Proulx): Conformément à l'article 93 du Règlement, le vote est reporté au mercredi 9 février, immédiatement avant la période des initiatives parlementaires.
Initiatives ministérielles
[Initiatives ministérielles]
* * *
[Français]
Le Code criminel
L'hon. Jean Lapierre (au nom du ministre de la Justice et procureur général du Canada) propose que le projet de loi C-10, Loi modifiant le Code criminel (troubles mentaux) et modifiant d'autres lois en conséquence, soit lu pour la troisième fois et adopté.
L'hon. Paul Harold Macklin (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, c'est un plaisir pour moi de prendre la parole aujourd'hui pour exprimer mon appui au projet de loi C-10 et pour encourager tous les députés de cette Chambre à appuyer cette réforme.
Le Comité permanent de la justice et des droits de la personne a procédé, en 2002, à une révision des dispositions du Code criminel relatives aux troubles mentaux. Le travail du comité se reflète dans le projet de loi C-10.
[Traduction]
Le public se souviendra peut-être de l'ancienne loi qui contenait l'expression «non coupable pour cause d'aliénation mentale». Le droit pénal moderne parle de personnes déclarées non criminellement responsables pour cause de troubles mentaux et de personnes reconnues inaptes à subir un procès. Ces expressions reflètent mieux la réalité, mais la loi n'est pas bien connue et, en fait, est souvent mal comprise. Le public continue de croire que si une personne ayant commis une infraction est déclarée non criminellement responsable, cela veut dire qu'elle n'est pas punie pour son méfait. Or, ce n'est pas le cas. Il y a des conséquences et dans certains cas elles peuvent sembler plus graves que lorsque l'accusé est condamné.
Le droit pénal s'appliquant aux personnes déclarées non criminellement responsables pour cause de troubles mentaux et reconnues inaptes à subir un procès prévoit des conséquences: en règle générale, il est question de traitement et de supervision pouvant durer indéfiniment, et dans certains cas, de détention dans une institution psychiatrique à haute sécurité.
[Français]
La partie XX.1 du Code criminel prévoit un régime ou un code exhaustif visant à réglementer de façon juste et efficace la supervision et le traitement d'un accusé atteint de troubles mentaux et la protection de la sécurité publique.
J'ai indiqué que ce domaine du droit n'est pas bien compris, même par certains avocats. Pour les victimes d'actes criminels, dans l'ensemble, le droit pénal et le système de justice criminelle sont bouleversants, complexes et souvent rébarbatifs. Les victimes ont rarement besoin de connaître le droit jusqu'à ce qu'elles se trouvent en plein coeur du système judiciaire.
Lorsque l'accusé est déclaré inapte à subir son procès, ou non criminellement responsable pour cause de troubles mentaux, les victimes d'actes criminels se trouvent alors dans une confusion encore plus grande et se butent à des obstacles supplémentaires dans leur quête en vue d'obtenir réparation d'un préjudice.
[Traduction]
Les victimes d'actes criminels souhaitent obtenir des renseignements sur le système judiciaire et sur l'affaire à laquelle elles sont mêlées, et elles méritent de les obtenir. Les réformes du droit, les changements d'orientation et l'élargissement des services ont donné aux victimes un plus grand rôle dans les poursuites criminelles.
Par exemple, on a modifié le Code criminel en 1988 pour y intégrer la déclaration de la victime comme mécanisme permettant aux victimes d'actes criminels de décrire les dommages ou les pertes qu'elles ont subis à cause de l'infraction. Des dispositions prévoyant des ordonnances de non-publication pour protéger l'identité des victimes d'agression sexuelle ont également été promulguées en 1988.
D'autres modifications apportées au Code criminel au cours des 15 dernières années ont permis d'accroître le rôle des victimes d'actes criminels, tout en respectant les droits des accusés.
En réponse au rapport publié en 1998 par le Comité permanent de la justice et des droits de la personne et intitulé Les droits des victimes—Participer sans entraver, le gouvernement a adopté une série de modifications au Code criminel en 1999 afin, notamment, de voir à ce que les victimes soient informées de la possibilité de présenter une déclaration de la victime.
Nous voulions également voir à ce qu'on tienne compte de la sécurité de la victime dans les décisions concernant la mise en liberté provisoire, préciser l'imposition automatique d'une suramende compensatoire et établir le montant de celle-ci et enfin donner aux juges le pouvoir discrétionnaire de rendre une ordonnance de non-publication pour protéger l'identité de toute victime ou de tout témoin lorsque cela est nécessaire dans l'intérêt de la bonne administration de la justice.
[Français]
Les modifications de 1999 visent aussi la victime d'une infraction commise par un accusé atteint de troubles mentaux et prévoient la rédaction et le dépôt d'une déclaration de la victime au tribunal ou à la commission d'examen lors d'une audience pour déterminer la décision, à l'article 672.541, à rendre à l'égard d'un accusé qui n'est pas tenu criminellement responsable, pour cause de troubles mentaux.
Le tribunal ou la commission d'examen doit prendre en compte toute déclaration déposée « en vue de rendre une décision ou de fixer des modalités au titre de l'article 672.54 ». Cependant, c'est la victime qui, dans chaque cas, décide si elle rédigera et déposera une déclaration.
[Traduction]
La déclaration de la victime est prévue au paragraphe 672.5(14), qui dit ceci:
La victime peut diriger et déposer auprès du tribunal ou de la commission d'examen une déclaration écrite qui décrit les dommages ou les pertes qui lui ont été causés par la perpétration de l'infraction. |
Lorsque l'accusé n'est pas tenu criminellement responsable pour cause de troubles mentaux, la commission d'examen doit décider comment l'accusé sera supervisé.
Les victimes d'actes criminels sont souvent négligées et reçoivent peu de renseignements sur ce qui arrivera ensuite ou encore pour ce qui est de savoir si elles auront ou non un rôle à jouer ou si elles auront accès ou non à quelque information que ce soit.
Dans le cadre de son examen du projet de loi C-10, le comité permanent a envisagé d'autres modifications pour accroître le rôle des victimes. Le comité a entendu plusieurs témoins, dont certains prônaient un plus grand rôle pour les victimes et d'autres qui n'appuyaient pas les intérêts des victimes. Le comité a rejeté clairement les instances de ceux qui cherchaient à restreindre le rôle des victimes. Le comité a également examiné les dispositions actuelles du Code criminel et d'autres mesures qui devraient être envisagées sur le plan administratif plutôt que législatif pour améliorer le traitement réservé aux victimes.
Les modifications figurant au projet de loi C-10 donneraient plus de poids au rôle des victimes lorsque l'accusé est déclaré non criminellement responsable pour cause de troubles mentaux. Cependant, les nouvelles dispositions relatives aux victimes respectent intégralement les différences entre le régime applicable aux personnes qui sont criminellement responsables, qui sont condamnées et qui doivent subir une peine, et celui aplicable aux personnes qui ne le sont pas.
L'accusé déclaré non criminellement responsable pour cause de troubles mentaux n'est pas responsable de ses agissements et la décision rendue en vertu de l'article 672.54 doit tenir compte de plusieurs facteurs, notamment du besoin de protéger le public, de la condition mentale de l'accusé , et de la réinsertion de l'accusé dans la société. Il est possible que la déclaration de la victime ne soit pertinente que relativement à certains des facteurs. Lorsque le tribunal ou la commission d'examen envisage une libération conditionnelle, la déclaration de la victime peut être pertinente pour la détermination des modalités particulières des conditions; par exemple, il peut être ordonné à l'accusé de ne pas contacter la victime ou de ne pas se rendre sur certains lieux. Il peut aussi être avantageux pour la victime de présenter une déclaration même si la condition de l'accusé n'a pas changé.
[Français]
Il convient de signaler encore une fois que l'administration de la justice et la prestation des services aux victimes sont des questions de compétence provinciale. Les services offerts aux victimes dans le cadre de l'administration de la justice relèvent aussi des provinces.
La mise à la disposition des formulaires de déclaration de la victime, l'aide qui lui est accordée pour remplir la déclaration, la collecte et la présentation des déclarations à la Couronne ou à la cour sont généralement gérées dans le cadre des programmes provinciaux de services aux victimes.
[Traduction]
Dans son examen de 2002, le comité permanent a recommandé que les tribunaux ou les commissions d'examen tenant une audience de révision informent la victime lorsque celle-ci en a exprimé l'intérêt. Le projet de loi C-10 oblige notamment tribunal tenant l’audience initiale pour déterminer la décision à rendre ou à la commission d'examen tenant cette audience lorsque le tribunal ne l'a pas fait, à s'enquérir auprès du poursuivant ou de la victime si celle-ci a été informée de la possibilité de rédiger une déclaration. Suite à l'amendement adopté par le Comité, un avis de l'audience et des dispositions pertinentes du Code criminel, y compris celles sur la déclaration de la victime, sera donné à celle-ci de la manière et dans le délai prévus par les règles du tribunal ou de la commission d'examen. Il existe d'autres initiatives de nature non-législatives qui oblige à informer les victimes des dispositions du Code qui s'appliquent à elles, de la date des audiences, de la décision et d'autres renseignements essentiels.
[Français]
Il faut se rappeler que la victime devrait, jusqu'à ce que l'accusé ait été déclaré non responsable criminellement, bénéficier de l'application de toutes les dispositions du code destinées à faciliter la participation des victimes et à protéger leur sécurité et leur vie privée. Ce n'est que lorsque l'accusé a été déclaré non responsable criminellement que l'application des nouvelles dispositions spéciales du code est nécessaire pour assurer la participation de la victime aux audiences de la commission d'examen.
Le projet de loi C-10 contient également les dispositions suivantes, qui ont pour objet de renforcer le rôle des victimes d'actes criminels.
[Traduction]
Il serait permis aux victimes de présenter oralement la déclaration de la victime à l’audience de la commission d'examen. La déclaration serait préparée à l'avance et la victime pourrait en donner lecture à haute voix ou, dans certains cas, d'une autre façon.
Après le prononcé du verdict d’inaptitude de l’accusé à subir son procès ou de non-responsabilité pour cause de troubles mentaux, le tribunal ou le président de la commission d'examen doit demander à la Couronne, à la victime ou à un représentant de la victime si celle-ci a été informée de son droit de présenter une déclaration de la victime.
[Français]
La première audience peut être ajournée pour permettre à la victime de préparer une déclaration si elle le souhaite. Les commissions d'examen auront de nouveaux pouvoirs leur permettant d'imposer une ordonnance de non-publication visant l'identité des victimes et des témoins lorsque cela sert la bonne administration de la justice.
[Traduction]
Selon l'amendement du comité, sur demande de la victime, celle-ci serait avisée de l'audience ou de toute autre disposition du Code criminel. Les règles de la cour ou de la commission d'examen détermineraient la façon dont cet avis serait donné.
Selon un autre amendement adopté par le comité, les commissions d'examen seraient tenues de donner un avis précis aux victimes lorsque, sur la base d'un rapport d'évaluation de l'accusé qui indiquerait une amélioration de sa condition, elles prévoient que l'accusé pourrait être libéré inconditionnellement ou mis en liberté sous condition. La victime serait alors informée de la possibilité de préparer et de présenter une déclaration.
[Français]
Dans la mesure du possible, le projet de loi C-10 comprend des dispositions à l'intention des victimes qui sont analogues à celles du Code criminel qui sont applicables lorsqu'un accusé est trouvé coupable et condamné à une peine.
[Traduction]
Le gouvernement accorde une haute priorité à la prise en considération des préoccupations des victimes de crime. Ce sentiment est partagé par tous les députés, comme le montrent les améliorations apportées au projet de loi C-10 par le Comité permanent. Les amendements au projet de loi C-10 sont une contribution à l'évolution de notre système de justice qui reconnaît le rôle des victimes de crime.
J'encourage les députés à appuyer le projet de loi C-10. Je crois que ces amendements confèrent une plus grande protection aux accusés affectés de troubles mentaux ainsi qu'un rôle accru aux victimes de crime.
M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, PCC): Monsieur le Président, j'ai le plaisir aujourd'hui, pour la première fois, d'intervenir sur le projet de loi C-10 et de dire pourquoi je l'appuie.
Le débat sur le projet de loi à la Chambre et au comité devrait servir d'exemple de la façon dont le Parlement devrait fonctionner. Je voudrais remercier le député de Provencher et les autres membres du Comité de la justice du rôle qu'ils ont joué dans l'amélioration du projet de loi C-10.
Le projet de loi moderniserait les dispositions du Code criminel relatives aux troubles mentaux afin de rendre le code plus efficace et plus équitable, tout en préservant le cadre général des dispositions.
Le projet de loi C-10 explique et modernise les dispositions du Code criminel traitant des troubles mentaux. Le projet de loi apporte aussi, par voie de conséquence, quelques modifications à plusieurs lois connexes afin que celles-ci soient conformes aux dispositions du Code criminel relatives aux troubles mentaux.
Le projet de loi C-10 tente de respecter les droits individuels tout en préservant la sécurité publique. Ses modifications portent sur: les attributions des commissions d'examen; les accusés déclarés inaptes à subir leur procès; les victimes; l'abrogation des dispositions non proclamées de la réforme du Code criminel de 1992; le transfert interprovincial des accusés jugés inaptes à subir leur procès; et les pouvoirs de la police. Elles traitent de l'ensemble de la question.
Le projet de loi C-10 représente la deuxième mesure prise par le gouvernement fédéral pour clarifier, dans le Code criminel, la défense fondée sur les troubles mentaux. La première a été le projet de loi C-30.
En 1985, le ministère de la Justice publiait la dernier de plusieurs rapports sur les troubles mentaux, rendus publics entre 1979 et 1985. S'appuyant sur ce rapport, le ministre de la Justice proposait, en 1986, un avant-projet de loi traitant de la défense fondée sur l'aliénation mentale. Des consultations ont été tenues au sujet de cet avant-projet de loi jusqu'aux élections de 1988.
La nécessité d'une modification est apparue évidente après la décision historique rendue en 1991 par la Cour suprême dans la cause R. c. Swain, et qui portait sur ce moyen de défense. La Cour suprême avait alors déclaré inconstitutionnelles les dispositions législatives et les pratiques de common law relatives à ce moyen de défense
À la suite de cette décision, rendue en 1991, l'ancien gouvernement progressif conservateur a présenté le projet de loi C-30 pour moderniser ce moyen de défense, pour corriger les dispositions que la Cour suprême avait jugées contraires à la Charte des droits et libertés et pour autoriser les tribunaux à déterminer en fonction de certains critères précis l'inaptitude [de l'accusé] à subir son procès.
Le projet de loi C-30 modernisait la notion d'aliénation mentale en remplaçant les expressions « imbécillité naturelle » et « maladie mentale », figurant au paragraphe 16(1) du Code criminel, par l'expression « troubles mentaux ». Cependant, l'expression « troubles mentaux » a continué d'être définie à l'article 2 du Code criminel comme étant une « maladie mentale », ce qui fait que les règles de la common law ont continué de régir l'application de ce qu'on appelait auparavant la « défense fondée sur l'aliénation mentale ».
Le projet de loi C-30 donnait une nouvelle définition et de nouveaux critères relatifs à l'« inaptitude [de l'accusé] à subir son procès », définie à l'article 2 du Code criminel, et autorisait les tribunaux à imposer à un accusé atteint de troubles mentaux un traitement sans son consentement.
Le projet de loi C-30 prolongeait le nombre maximal d'années, qui était de 10 ans, pendant lesquelles pouvait être détenue une personne atteinte de troubles mentaux accusée de sévice grave à la personne, infraction passible de 10 ans d'emprisonnement ou plus. Ces dispositions ont permis aux tribunaux d'ordonner que de tels contrevenants soient détenus à vie plutôt que pendant 10 ans. Le projet de loi C-30 a reçu la sanction royale en 1992.
Réagissant au rapport du Comité permanent de la justice et des droits de la personne publié en 2002, le gouvernement a présenté le projet de loi C-10 pour répondre à certaines préoccupations relatives aux dispositions du Code criminel en matière de troubles mentaux.
Le rapport présenté en 2002 a reçu l'approbation de tous les partis. Le résultat de cette étude montre bien que les comités peuvent travailler dans un esprit de collaboration, lorsqu'ils s'attardent à l'objet des délibérations plutôt qu'à des manoeuvres partisanes. Ce rapport fait la preuve d'une telle collaboration et de la valeur des travaux des comités. Je souhaite qu'un plus grand nombre de comités prennent conscience qu'il est possible de travailler dans un esprit de collaboration et d'atteindre des objectifs communs.
Le projet de loi C-10 intègre bon nombre des recommandations du rapport du Comité de la justice de juin 2002 ainsi que d'autres apports découlant de la consultation du ministère de la Justice avec les parties intéressées.
Les modifications contenues dans le projet de loi C-10 visent six domaines: tout d'abord, élargir les attributions des commissions d'examen; deuxièmement, permettre au tribunal d'ordonner la suspension de l'instance à l'égard de l'accusé déclaré inapte; troisièmement, permettre la lecture de la déclaration de la victime; quatrièmement, abroger les dispositions non en vigueur; cinquièmement, simplifier les dispositions relatives au transfèrement entre provinces; sixièmement, élargir les pouvoirs des agents de la paix dans l'application d'ordonnances d'évaluation et de décisions.
Le projet de loi C-10 a été présenté et adopté à l'étape de la première lecture le 8 octobre 2004. Le 22 octobre 2004, sur adoption de la motion à cet effet, le projet de loi a été renvoyé au Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile avant l'étape de la deuxième lecture. Le Comité de la justice a tenu six réunions et entendu 24 témoins. Il a fait rapport à la Chambre avec des propositions d'amendement le 10 décembre 2004. Le projet de loi C-10 a été adopté à l'étape du rapport le 4 février 2005.
Les amendements apportés au projet de loi C-10 ont surtout été des amendements de forme mineurs, notamment: un amendement assouplissant la description des types de professionnels de la santé pouvant évaluer un accusé ayant des troubles mentaux; des amendements précisant la façon de fournir des copies de documents aux commissions d'examen; des amendements concernant les droits des victimes, concernant le moment et la manière de les aviser de la tenue d'audiences et la déclaration de la victime; des amendements portant sur l'assignation de l'accusé; des amendements sur la façon de déterminer l'aptitude de l'accusé à subir un procès; un amendement intégrant le libellé recommandé par la Cour suprême dans l'affaire portant sur la clarté de la preuve, bien que notre parti n'ait pas été en accord avec ce libellé étant donné que le sens donné à l'expression « clarté de la preuve » n'était pas clair, justement; un amendement visant à préciser une disposition accordant plus de souplesse aux autorités policières; plusieurs amendements visant à préciser certaines expressions en français et à assurer qu'elles reflètent le sens et l'esprit des expressions anglaises équivalentes.
En terminant, je tiens à remercier les députés et les membres du Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile de l'esprit de collaboration qu'ils ont manifesté tout au long du débat visant la modification de cette loi importante.
[Français]
M. Richard Marceau (Charlesbourg—Haute-Saint-Charles, BQ): Monsieur le Président, c'est avec un très grand plaisir que je prends la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi C-10 présentement devant cette Chambre. D'ailleurs, comme beaucoup de projets de loi se retrouvant devant le Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile, il s'agit d'un projet de loi fort important parce qu'il touche, d'un côté, les droits et libertés de plusieurs individus, en l'occurrence les gens souffrant de troubles mentaux, et, d'un autre côté, la sécurité de la population en général.
Nous avons donc le devoir, en tant que parlementaires, notamment ceux siégeant au Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile, de trouver l'équilibre nécessaire entre ces deux positions fondamentales dans notre société, à savoir le respect des droits et libertés des individus et le bien-être de la population en général, ce qui inclut bien évidemment la sécurité de la personne.
Nous, du Bloc québécois, avons toujours en tête la nécessité de maintenir cet équilibre tellement fragile dans nos sociétés, souvent plus fragile qu'on ne le pense. En l'occurrence, cet équilibre a été, à notre avis, rompu par les projets de loi C-36 et les lois antiterroristes présentés par ce gouvernement lors de la législature précédente. Nous sommes donc vigilants de nature à l'égard de ces enjeux parce qu'ils nous préoccupent beaucoup, d'autant plus que par le passé, ce gouvernement a rompu cet équilibre par le biais d'autres projets de loi et législations qu'il a fait adopter en cette Chambre. Cela nous rend doublement vigilants face à des enjeux semblables.
À ce sujet, je me ferai l'écho de mon prédécesseur conservateur. J'ai pris part à ce processus dans une volonté de coopération. J'ai personnellement testé le fonctionnement du gouvernement minoritaire depuis l'élection du 28 juin dernier. À cette date, comme vous le savez, 54 députés du Bloc québécois ont été élus. Il s'agit d'une brillante victoire de notre parti, notamment en raison de la performance assez exceptionnelle de notre chef, le député de Laurier—Sainte-Marie, lors de cette campagne. Par conséquent, le gouvernement a maintenant le devoir et l'obligation de travailler en collaboration avec les autres partis. Il n'a pas le choix.
Par le passé, je dois avouer que ce n'était pas tellement le cas. Le Parti libéral du Canada, se sentant trop fréquemment propriétaire du siège du gouvernement, a eu tendance à manifester une arrogance démesurée et désagréable non seulement pour la population canadienne en général, mais aussi pour les députés de tous les partis de cette Chambre. Souvent, le gouvernement prenait une décision, consultait peu, coopérait très peu avec les partis d'opposition et disait simplement que, puisqu'il détenait la majorité, il ferait en sorte de faire adopter tel projet de loi. Trop souvent, à mon avis, cela se faisait au détriment non seulement de cette Chambre, mais de l'appareil législatif. Ce faisant, le Québec et le Canada dans son entier se privaient de l'apport positif que pouvaient amener les députés, en particulier ceux de l'opposition.
Il est important de dire que la période de questions, qui commencera dans environ une heure trente, bien qu'elle soit une partie fort importante de l'activité parlementaire, a une connotation très axée sur la confrontation. En effet, l'opposition demande des comptes au gouvernement, qui, lui, a à répondre à la Chambre. C'est une atmosphère très axée sur la confrontation. D'ailleurs, dans un Parlement de tradition britannique, les sièges sont disposés de façon à favoriser le face à face.
Or, ce qui est peu connu de la population en général, c'est qu'en comité, il y a possibilité, si la volonté existe, bien entendu, de travailler ensemble, conjointement, sans partisanerie, pour faire en sorte d'atteindre les objectifs qui, dans le fond, sont très similaires pour l'ensemble des partis, à l'exception, bien entendu, de la volonté du Bloc québécois de faire du Québec un pays souverain.
J'ai donc fait un test relativement à cette volonté de collaborer affichée par le gouvernement. J'ai trouvé, de la part du ministre de la Justice et de son secrétaire parlementaire, une volonté de s'asseoir avec nous, une volonté de nous consulter et une volonté de nous expliquer leur point de vue. En outre, pour la première fois depuis fort longtemps—je suis député depuis 1997—, j'ai trouvé de leur part une volonté d'écouter ce que les membres de l'opposition ont à dire concernant les différents projets de loi, entre autres le projet de loi C-10.
Je dis au secrétaire parlementaire et au ministre de la Justice que je suis prêt à continuer à travailler avec eux dans cet esprit de collaboration qui a été le leur lors du projet de loi C-10. J'espère que cette volonté de collaboration continuera pour le bien-être de la population en général. Cette volonté de collaboration a été illustrée non seulement lors des amendements que le Bloc québécois a proposés relativement au projet de loi C-10, lesquels étaient basés bien évidemment sur une recherche et une analyse légale et juridique approfondies du projet de loi C-10, mais aussi sur les nombreux témoignages qui ont été faits devant le comité.
La qualité des témoins qui se présentent devant le Comité permanent de la justice est exceptionnelle. Nous avons avantage à bien les écouter, à bien retenir leurs suggestions, parce que les hommes et les femmes qui viennent nous donner leur point de vue le font d'une façon admirable et connaissent le dossier à fond. Souvent même, on peut se le dire entre nous, ils le connaissent beaucoup mieux que les députés, du moins au départ du processus législatif. Ainsi, ils peuvent mettre en lumière certains enjeux qui, lors de notre première analyse, auraient peut-être pu être mis de côté ou, en tout cas, auraient pu ne pas avoir reçu l'attention que ces enjeux méritaient.
Deux enjeux ont fait l'objet d'un travail en comité, particulièrement par le Bloc. Je voudrais m'y arrêter quelques instants. D'abord, il s'agit de la personne qui ferait l'évaluation psychiatrique des gens. L'on sait que beaucoup de gens parmi nous en cette Chambre viennent de régions où les psychiatres ne sont pas légion. Il était important de faire en sorte que les personnes qui doivent être évaluées puissent l'être non seulement par des psychiatres, mais aussi, en l'occurrence, par des personnes qui peuvent être qualifiées, peut-être de façon différente, mais qui seront choisies par le gouvernement des différentes provinces.
Cela permet aux gens qui souffrent de troubles mentaux de pouvoir être évalués dans leur région et de ne pas avoir à passer du temps dans les grandes villes ou encore pour éviter que les gouvernements provinciaux aient à débourser des sommes d'argent fort importantes pour envoyer le psychiatre dans une région où il n'y en a pas.
Cet amendement, qui avait été suggéré par plusieurs témoins, a été présenté en comité par le Bloc. Bien que la formulation ait été changée, le gouvernement et moi-même avons réussi à nous entendre quant à une formulation commune. Cet amendement a été présenté et adopté en comité.
Nous avons travaillé sur un autre amendement. C'est celui concernant les victimes. On le sait, les victimes sont trop souvent les personnes oubliées dans le lourd processus judiciaire. Or, elles sont aussi les personnes qui sont blessées par un acte quelconque. En effet, elles peuvent être blessées d'une façon physique, d'une façon psychologique ou elles peuvent être blessées trop souvent des deux façons. C'est tellement important que j'en fais un enjeu fondamental dans toutes les discussions que j'ai à titre de porte-parole du Bloc québécois en matière de justice. C'est pour moi une préoccupation fondamentale de tous les instants de faire en sorte que ces hommes et ces femmes victimes de violence criminelle ne se sentent pas perdus dans la lourdeur du système judiciaire, qui est très complexe et où même les avocats en perdent leur latin.
Un des amendements que nous avons proposé, qui a aussi été modifié en collaboration avec le gouvernement, fait en sorte que les droits des victimes soient pris en considération.
Il y a aussi quelques amendements que j'avais proposés en comité. Pour ceux et celles qui ont suivi les travaux du comité, j'avais déposé l'amendement BQ-1 que j'ai retiré, suite à un engagement de la part du gouvernement.
Comme je le disais tout à l'heure au secrétaire parlementaire, juste avant mon discours, suite au retrait de mon amendement qui visait à redéfinir l'inaptitude à subir son procès ou à se voir imposer une peine, le gouvernement avait pris l'engagement que cet enjeu serait soulevé lors d'une réunion des ministres fédéral, provinciaux et territoriaux de la Justice. D'ici la fin de cette session, avant l'ajournement pour l'été, le gouvernement reviendrait devant le comité pour expliquer où en seront les travaux dans cette partie du projet de loi. Cet engagement m'a été répété par le gouvernement tout à l'heure.
À part l'amendement BQ-1 et tous les amendements conséquents, il y a un autre amendement fort important qui a été retiré. Il s'agit de l'amendement BQ-10. Je m'excuse d'être très technique. Le gouvernement a promis de revenir sur ce sujet. Il s'agit de l'amendement à l'article 672.5(8), qui était inscrit en mon nom. Le gouvernement m'avait demandé de le retirer parce que, à son avis, cela créait une obligation assez lourde pour les provinces et, entre autres, pour le système d'aide juridique.
Le gouvernement s'est engagé à revenir devant le comité après avoir soulevé cet enjeu, encore une fois, à une conférence fédérale-provinciale. J'attends avec beaucoup d'impatience ce que le gouvernement aura à nous dire à ce sujet. En effet, comme je le disais en introduction, tout projet de loi qui touche à l'équilibre entre les droits et les libertés des individus et de la société mérite toute notre attention et il a donc toujours besoin d'amélioration.
Alors selon la réponse du gouvernement suite aux discussions avec les provinces, j'aurais peut-être à revenir avec un projet de loi, ou revenir en comité, pour essayer d'amender à nouveau ce projet de loi.
Enfin, l'amendement BQ-19 est le dernier amendement que j'avais retiré, suite à des discussions avec le gouvernement. Je ne peux pas passer à travers tous les amendements. Cela s'est fait suite à une rencontre fort fructueuse que j'ai eue avec les différents fonctionnaires du ministère de la Justice, à mon bureau, avant d'aller en comité.
Tout cela pour dire qu'à cette étape-ci, nous appuyons le projet de loi C-10 qui a été amélioré par le travail consensuel des différents partis à la Chambre des communes. Je souhaite que cette atmosphère de collaboration et de coopération continue.
Au nom du Bloc québécois, je prends l'engagement de continuer à travailler en ce sens car l'intérêt des Québécois, des Québécoises, des Canadiens et des Canadiennes est beaucoup mieux servi lorsque les différents parlementaires et les différentes formations politiques travaillent ensemble pour donner les meilleurs législations possibles à la population qui nous élit.
[Traduction]
M. Peter Stoffer (Sackville—Eastern Shore, NPD): Madame la Présidente, il est difficile d'être à la hauteur de mon collègue du Bloc québécois, qui s'exprime avec tant d'éloquence dans les deux langues officielles.
Le Nouveau parti démocratique appuiera le projet de loi C-10. Avec les membres du comité et les autres acteurs qui sont favorables à ce projet de loi, nous ferons notre possible pour qu'il soit adopté rapidement. Au nom de notre collègue de Windsor-Tecumseh, porte-parole du NPD en matière de justice, j'aimerais donner brièvement les raisons de notre appui.
Premièrement, le projet de loi est une réponse au rapport de juin 2002 du Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile, qui portait sur les dispositions du Code criminel relatives aux troubles mentaux. Le projet de loi porte sur la marche à suivre dans le cas où un accusé est inapte à subir son procès, c'est-à-dire lorsque son incapacité est telle qu'on ne peut pas tenir un procès pour déterminer sa culpabilité ou son innocence.
Des commissions d'examen, dont les membres sont nommés par les provinces, sont chargées de déterminer le degré de supervision que nécessite un accusé inapte. Le projet de loi C-10 vise à élargir les attributions des commissions d'examen en leur permettant d’ordonner une évaluation de l’accusé, d'exiger la présence de l'accusé à une audience et d'augmenter au besoin le délai séparant les audiences d'examen. Il vise aussi à permettre la présentation orale de la déclaration de la victime à l’audienceet à autoriser les ordonnances limitant la publication de renseignements, dans le but de protéger les victimes et les témoins.
Le projet de loi prévoit en outre des modifications à la Loi surle système de justice pénale pour les adolescents ainsi qu'à la Loi sur la défense nationale pour que ces deux lois soient conformes aux nouvelles dispositions du Code criminel sur les troubles mentaux. Les changements proposés à la Loi sur la défense nationale portent sur les procès devant une cour martiale.
Si je peux faire une légère digression, nous avons parlé des commissions d'examen et des instances provinciales, ainsi que des droits des accusés. Il y a au Canada deux problèmes flagrants auxquels il faut s'attaquer. J'espérais qu'on le fasse pour faciliter l'adoption du projet de loi, car, une fois le projet de loi adopté, la Chambre n'en sera plus saisie. Nous nous en serons en quelque sorte lavé les mains.
Il y a dans l'ensemble du Canada une très grave pénurie de psychiatres et de psychologues. Bien des personnes atteintes de troubles mentaux ne reçoivent pas l'aide dont elles ont besoin pour la simple raison que ces spécialistes ne sont pas assez nombreux au Canada. Il coûte également très cher d'engager et de former des psychologues et des psychiatres pour aider ceux qui ont des troubles mentaux.
Si les provinces n'ont pas des ressources financières suffisantes pour engager ces spécialistes, une mesure comme le projet de loi C-10 risque de rater la cible. Si les victimes qui ont des difficultés mentales ou répondent aux critères des troubles mentaux ne peuvent recevoir l'aide voulue ou si les tribunaux ne peuvent recourir à des spécialistes pour analyser la situation, des problèmes risquent de surgir.
Il y a aussi la question des pauvres et de l'aide juridique. D'un bout à l'autre du Canada, il n'y a pas une province, pas un territoire où les services juridiques ne manquent pas de ressources. Il manque d'avocats et de techniciens parajuridiques et on n'accorde pas assez d'attention à l'aide juridique.
Un des principes fondamentaux à la base de notre pays précise que tous les Canadiens sont égaux devant la loi et que tous ont le droit de faire valoir leur point de vue. Nous savons toutefois qu'il y a deux systèmes de justice au Canada, un pour les riches et un autre pour les pauvres. Il ne devrait pas en être ainsi. Tous ceux qui sont accusés de quoi que ce soit, et tout particulièrement les gens qui sont aux prises avec des désordres mentaux, devraient avoir droit à une évaluation psychologique et à de l'aide et ils devraient avoir accès à l'aide juridique s'ils n'ont pas les moyens de payer les services d'un avocat. C'est très important.
Dans ma circonscription, nous devons souvent traiter des dossiers de gens qui ont été accusés d'un délit ou qui doivent comparaître devant les tribunaux. Très peu de Canadiens comprennent vraiment le système judiciaire tant qu'ils n'ont pas eux-mêmes à se défendre devant un juge ou un jury. L'assistance judiciaire et l'aide juridique peuvent s'avérer très utiles dans ces cas. Nous sommes loin d'avoir au Canada les ressources dont nous avons besoin, tant en ce qui a trait au nombre de psychologues et de psychiatres qu'aux programmes d'assistance judiciaire. Si nous pouvons faire quelque chose à ces niveaux d'un bout à l'autre du pays, les personnes visées par le projet de loi C-10 et tous ceux qui auront affaire à l'appareil judiciaire pourront obtenir l'aide dont ils auront besoin en temps opportun pour pouvoir se défendre devant la loi ou à tout autre niveau.
Mon collègue de Windsor—Tecumseh et moi tenons à préciser que les membres du comité ont travaillé très fort dans ce dossier. Comme mon collègue du Parti conservateur l'a souligné, c'est ainsi que cela devrait fonctionner au Parlement. En cas de divergence d'opinions, nous devons nous pencher ensemble sur la question et en venir à une solution acceptable pour tous.
La Chambre devrait être en mesure d'adopter le projet de loi C-10 assez rapidement. Toutefois, nous ne pouvons pas laisser tomber la question du financement et de la formation pour le personnel technique et professionnel dans le domaine psychiatrique et pour tous les intervenants du système d'assistance judiciaire au pays.
M. Ken Boshcoff (Thunder Bay—Rainy River, Lib.): Madame la Présidente, je suis heureux de traiter du projet de loi C-10, qui modifie le Code criminel et d'autres lois en conséquence.
Je remercie les intervenants précédents de reconnaître que le projet de loi montre que les comités peuvent collaborer pour le bien commun. Cet esprit de collaboration est des plus rassurant pour tous les Canadiens, qui constatent que tous les partis témoignent leur appui au projet de loi.
Le projet de loi C-10 modifiera les dispositions du Code criminel qui régissent les personnes déclarées inaptes à subir leur procès ou non criminellement responsables pour cause de troubles mentaux.
[Français]
Ces dispositions se trouvent à la Partie XX.1 du Code criminel.
[Traduction]
Je souligne également que, par souci d'uniformité, le projet de loi C-10 modifie également la Loi sur la défense nationale, qui comprend des dispositions semblables.
Pour faire un historique, en 1991, le Parlement a opéré des réformes considérables pour moderniser les lois régissant les personnes déclarées non coupables pour cause de troubles mentaux. Les réformes de 1991 reflétaient la nécessité d'établir un équilibre entre les droits des malades mentaux et la protection de la sécurité publique.
Les réformes que prévoit le projet de loi C-10 tiennent compte et s'inspirent des mêmes objectifs que ceux qui étaient énoncés dans les réformes de 1991. Le projet de loi C-10 modernisera les lois davantage et assurera un juste équilibre entre les droits des malades mentaux qui ont des démêlés avec la justice et le droit de la population à être en sécurité.
Les réformes complètent et renforcent les dispositions actuelles de la partie XX.1 et, de façon plus générale, de tout le Code criminel, dans la mesure où il vise les personnes déclarées inaptes à subir leur procès ou non criminellement responsables pour cause de troubles mentaux.
Il est important de nous rappeler que, lorsque nous étudions un projet de loi modifiant un texte comme le Code criminel, nous devons examiner la façon dont les modifications proposées cadrent avec ce texte. Le projet de loi C-10 ne constitue pas un régime autonome qui vise à régir les personnes accusées qui souffrent de troubles mentaux. Le Code criminel comprend déjà un régime complet qui continuera de s'appliquer, mais qui sera amélioré à plusieurs égards importants par les modifications prévues dans le projet de loi C-10.
[Français]
On reproche à ce projet de loi, comme on l'a fait pour d'autres avant lui, d'être trop compliqué et impossible à comprendre pour un non-juriste. On ne peut nier qu'il soit difficile de se donner une vue d'ensemble du résultat à la simple lecture des modifications. Or, cette complexité est en grande partie inévitable. En effet, le projet de loi doit reprendre la terminologie du code et employer la langue juridique appropriée.
[Traduction]
Certains témoins qui sont venus devant le comité permanent ont fait remarquer qu'un guide à l'intention des non-juristes serait utile. Je reconnais qu'on devrait préparer de la documentation destinée expressément au grand public et aux victimes de contrevenants atteints de troubles mentaux. Le comité voudrait certainement encourager le ministère de la Justice à travailler à un tel projet avec les autres parties intéressées.
Les députés se souviendront que les modifications promulguées en 1991 prévoyaient que la loi serait soumise à un examen parlementaire cinq ans après sa proclamation. Le Comité permanent de la justice et des droits de la personne a effectué cet examen au printemps 2002. Ce fut un examen exhaustif et approfondi. Des présentations orales et écrites ont été faites par 30 intervenants, y compris des membres du barreau, des procureurs de la Couronne, des administrateurs d'hôpitaux psychiatriques, des présidents de commissions d'examen, des fournisseurs de services et des défenseurs des droits des personnes souffrant de troubles mentaux.
En juin 2002, le Comité permanent de la justice et des droits de la personne a déposé son rapport et fait des recommandations réclamant une réforme législative et d'autres initiatives. Le comité a trouvé que, de façon générale, la loi fonctionnait très bien. Cependant, il a mentionné dans son rapport que certaines réformes s'imposaient et a proposé des modifications précises.
[Français]
Les principales recommandations du comité visaient ce qui suit, à savoir l'accroissement des pouvoirs des commissions chargées d'examiner la situation de l'accusé.
[Traduction]
L'abrogation des dispositions de 1991 jamais entrées en vigueur, y compris les dispositions sur la durée maximale de surveillance ou de détention des accusés; une révision de la procédure et des directives de transfèrement des accusés entre provinces ou territoires; l'inclusion de nouvelles dispositions visant les personnes dont l'inaptitude à subir leur procès est permanente; et l'amélioration des mesures de protection des victimes de crimes qui se rendent aux audiences des commissions d'examen, par exemple en interdisant la publication de leur identité dans certaines circonstances appropriées et en leur donnant la possibilité de préparer une déclaration de la victime.
Le comité a aussi fait des recommandations demandant d'approfondir la recherche et la consultation sur les questions émergentes. Il a également fait ressortir la nécessité d'étudier les ressources disponibles pour répondre aux besoins des accusés atteints de troubles mentaux, y compris les jeunes, et d'améliorer la recherche et la collecte de données. Le projet de loi C-10 reflète les conseils et les avis du comité et de tous ceux qui ont comparu devant lui. Il prévoit aussi d'autres réformes nécessaires qui visent à répondre aux problèmes relevés dans la jurisprudence et dans les consultations menées par le ministère de la Justice, au cours des dix dernières années, auprès des principaux intervenants.
Le projet de loi C-10 a été renvoyé au Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile après la première lecture. Comme on l'a mentionné dans le débat sur la motion de renvoi du projet de loi au comité, les députés étaient vraiment impatients d'examiner le projet de loi C-10 en profondeur pour s'assurer que ces réformes correspondaient aux recommandations faites en 2002.
Le comité permanent a fait une étude approfondie du projet de loi et, partant de son examen et des témoignages qu'il a reçus, a accepté de le modifier de manière à clarifier certaines dispositions tant du Code criminel que de la Loi sur la défense nationale, laquelle prévoit aussi un mécanisme à l'égard des personnes non responsables criminellement pour cause de troubles mentaux.
Le projet de loi C-10, présenté par le ministre de la Justice et modifié par le comité permanent, offre un excellent exemple de la collaboration de tous les députés. Il reflète notre but commun, celui de fournir une loi criminelle équitable et équilibrée visant les personnes souffrant de troubles mentaux qui sont inculpées et d'assurer la sécurité publique.
[Français]
Les principales caractéristiques du projet de loi C-10, après examen et modification par le comité, sont les suivantes.
[Traduction]
La mesure confère aux commissions d'examen établies dans les provinces et les territoires de nouveaux pouvoirs leur permettant de prendre des décisions clés à l'égard des accusés handicapés mentalement ou inaptes à subir un procès. Les commissions d'examen pourraient commander une évaluation de l'état mental d'un accusé, de manière à ce que les mesures appropriées puissent être prises à son égard, qu'il s'agisse d'une libération, d'une mise en détention dans un hôpital ou d'une libération assortie de conditions.
Une nouvelle disposition permettrait au tribunal de déterminer si l'instance doit être suspendue à l'égard d'un accusé déclaré à jamais inapte à subir son procès, s'il est convaincu que l'accusé ne présente aucun danger important pour la sécurité du public, lorsque cela servirait la bonne administration de la justice.
Un amendement du comité prévoit clairement une condition préalable, à savoir que l'accusé est inapte et qu'il demeurera vraisemblablement inapte à subir son procès. Le tribunal doit baser son verdict d'inaptitude sur des faits précis. Une évaluation doit être commandée dans tous les cas.
Récemment, dans l'arrêt Demers, la Cour suprême du Canada a déclaré que nos lois doivent prévoir l'arrêt des procédures criminelles contre les personnes qui ne seront sans doute jamais aptes à subir un procès et ne posent pas de danger important pour la sécurité publique. Le projet de loi C-10 contient des dispositions soigneusement élaborées pour garantir que les accusés qui ne seront vraisemblablement jamais aptes à subir un procès et qui ne représentent pas un danger bénéficieront d'un sursis d'instance, mais qu'il sera tenu compte de la sécurité du public et des autres facteurs pertinents.
La nécessité de modifier les lois en ce sens a été signalée par le comité en 2002 et rendue nécessaire par la Cour suprême dans l'arrêt Demers. Le comité a examiné les modifications et y a proposé des améliorations qui reflètent clairement les objectifs.
Les victimes pourront lire leurs déclarations à haute voix lors des audiences des commissions d'examen ou les présenter par d'autres moyens sur lesquels on se sera entendu. En outre, les victimes recevront un avis des audiences ainsi que des dispositions du Code criminel en cause conformément aux règles qui seront données par les tribunaux ou les commissions d'examen. Ces commissions seront aussi tenues de donner sur demande aux victimes avis des audiences pouvant résulter en une libération conditionnelle d'un accusé hospitalisé ou en une absolution inconditionnelle.
Les dispositions sur les transfèrements seront rationalisées pour permettre le transfèrement sûr et efficace d'une province ou d'un territoire à un autre d'une personne qui n'a pas été déclarée criminellement responsable en raison de troubles mentaux ou parce qu'elle est inapte à subir un procès.
Les policiers disposeront de davantage d'options pour faire exécuter une ordonnance d’évaluation ou une décision en tenant compte de la nécessité de continuer le traitement de l'accusé. Dans certains cas, les policiers pourront libérer un accusé après son arrestation contre promesse de comparaître devant un juge qui déterminera ce qu'il faut faire de cet accusé en attendant les prochaines audiences de la commission d'examen.
L'abrogation des dispositions de 1991 qui n'ont jamais été promulguées, des dispositions fixant une durée maximale de la détention et des autres dispositions concernant les accusés dangereux atteints de troubles mentaux et des dispositions sur les ordonnances de détention dans un hôpital a reçu un solide appui.
[Français]
Une série de modifications de forme et de clarification vise à garantir l'atteinte effective des objectifs de la loi.
Le comité permanent a rédigé plusieurs amendements pour clarifier le projet de loi C-10.
[Traduction]
Par exemple, le comité a appuyé les motions visant à élargir la participation des victimes, à préciser le test concernant la suspension d'instance et à améliorer les dispositions d'application.
Tel qu'indiqué précédemment, le projet de loi C-10 constitue la prochaine étape pour nous assurer de l'efficacité, de l'efficience et de l'équité de nos lois à l'égard des accusés atteints de troubles mentaux. Ces réformes sont nécessaires sans modifier considérablement le régime s'appliquant aux accusés atteints de troubles mentaux. La loi donne de bons résultats et, grâce au projet de loi C-10, le fera encore mieux qu'auparavant.
Les dispositions du Code civil sont demeurées inchangées depuis 1991, mais la jurisprudence a évolué et de nouvelles questions ont fait leur apparition, notamment l'élargissement du rôle des personnes victimes de crimes.
La Cour suprême du Canada confirme que notre loi doit respecter deux objectifs: la protection des droits des personnes atteintes de troubles mentaux et le maintien de la sécurité publique.
Le Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile a attentivement examiné le projet de loi C-10 et l'appuie vigoureusement. Je sais que les membres du comité partagent mon objectif de faire adopter rapidement cette mesure législative à la Chambre. J'ose espérer que les députés appuieront les amendements proposés.
M. Peter Stoffer (Sackville—Eastern Shore, NPD): Madame la Présidente, je remercie le député de son appui au projet de loi.
Avant qu'il ne prenne la parole, je parlais des lacunes au chapitre du financement de la formation des psychiatres et des psychologues. C'est, dans toutes les provinces, un grave problème, attribué notamment à l'insuffisance des ressources mises à la disposition des praticiens et au financement déficient de l'aide juridique.
On sait que les personnes qui n'ont pas les moyens de retenir les services des meilleurs avocats doivent souvent faire appel à l'aide juridique. Malheureusement, les avocats de l'aide juridique, aussi bien dans les provinces que dans les territoires, ne disposent pas des ressources suffisantes pour faire leur travail comme ils le voudraient. J'aimerais connaître le point de vue du député sur ces deux questions.
Le député est-il disposé à intervenir auprès de son gouvernement pour qu'il assure un financement adéquat qui permette aux provinces de former suffisamment de psychiatres et de psychologues à la grandeur du pays, et pour que les services d'aide juridique puissent compter sur un budget suffisant, de façon à ne pas se voir contraints de refuser de venir en aide à des personnes, faute de fonds?
M. Ken Boshcoff: Madame la Présidente, le député a soulevé deux points tout à fait pertinents.
Début janvier, les ministres de la Justice des territoires et des provinces se sont rencontrés et ont créé un comité de travail chargé de se pencher sur la question du financement. En ce qui concerne l'aide juridique, le gouvernement a renouvelé son engagement pour trois ans et s'est engagé à élargir le programme à l'échelle nationale.
Je voudrais également aborder la question en tant que président du sous-comité de la condition des personnes handicapées, parce qu'elle concerne tout le monde, non seulement les handicapés physiques mais aussi les personnes atteintes de troubles mentaux. Le projet de loi C-10 ferait beaucoup à cet égard. C'est pourquoi il serait très rassurant, pour tous ceux qui siègent à ce comité, que ce travail donne des résultats concrets.
Je suis très sensibilisé au problème d'insuffisance des soins psychiatriques à l'échelle nationale, dont parlait le député. Grâce au travail des ministres de la Santé et à leur collaboration récente avec les ministres de la Justice au sein du groupe de travail créé récemment, je suis convaincu que le Canada fait tout ce qu'il faut pour parvenir à lutter efficacement contre le problème.
[Français]
L'hon. Don Boudria (Glengarry—Prescott—Russell, Lib.): Madame la Présidente, c'est un plaisir pour moi de prendre parole aujourd'hui pour exprimer mon appui au projet de loi C-10 et pour encourager tous les députés de cette Chambre à appuyer ces réformes.
Je prendrai quelques moments pour vous en parler, car nous ne voulons pas retarder l'adoption de ce projet de loi. D'ailleurs, il y a un certain enthousiasme pour faire un renvoi au comité parlementaire dès aujourd'hui et de passer au prochain projet de loi, ce que j'appuie.
Comme nous l'avons mentionné plus tôt, le Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile a procédé, en 2002, à une révision des dispositions du Code criminel relatives aux troubles mentaux. Le travail du comité se reflète dans le projet de loi C-10 qui est devant nous aujourd'hui.
Le public se rappelle peut-être les anciennes dispositions dans lesquelles il était question de non-culpabilité pour cause d'aliénation mentale. C'est un terme que nous connaissons à peu près depuis toujours. Pour ceux qui ont étudié l'histoire de Louis Riel dans notre pays, souvenez-vous par exemple qu'il y avait tout un groupe de gens qui voulait lui faire plaider non-coupable pour des raisons d'aliénation mentale, ce que Riel a refusé de faire. Nous connaissons ce qui lui est arrivé par la suite. Il n'en demeure pas moins que ces mesures sont très anciennes et c'est un terme que nous connaissons depuis toujours.
Toutefois, les règles modernes du droit criminel parlent des personnes déclarées non criminellement responsables pour cause de troubles mentaux et de personnes déclarées inaptes à subir leur procès. Cette description traduit mieux la réalité. Cependant, le droit en cette matière est mal connu et, souvent, mal compris.
Malheureusement, les gens continuent d'avoir l'impression qu'une personne qui commet une infraction et qui est déclarée non criminellement responsable « est impunie » pour ce crime. Cela n'est pas le cas. Il existe des conséquence. Dans certains cas, elles peuvent paraître plus sévères que celles que subit un prévenu déclaré coupable. Encore une fois, c'est un concept qui n'est pas tellement bien connu. Le droit régissant les personnes déclarées inaptes à subir leur procès et les personnes déclarées non criminellement responsables pour cause de troubles mentaux comporte des conséquences. Habituellement, un traitement et une supervision peuvent durer longtemps, voire indéfiniment, et, dans certains cas, il y a une détention dans un établissement psychiatrique sécuritaire. Ultimement, cela pourrait même être la vie dans un endroit carcéral spécial pour des gens souffrant des problèmes en question. Il ne s'agit pas de ne pas punir ceux qui commettent un crime et qui, en même temps, ne sont pas coupables pour les raisons que nous venons de décrire. Bien entendu, la punition est différente, mais les personnes ne sont pas exonérées pour autant.
Le Code criminel comporte une partie entière—la partie XX.1—qui prévoit un régime ou un code exhaustif visant à réglementer de façon juste et efficace la supervision et le traitement d'un accusé atteint de troubles mentaux et la protection de la sécurité publique.
J'ai indiqué que ce domaine du droit n'est pas bien compris, même par certains avocats. Pour les victimes d'actes criminels, dans l'ensemble, le droit pénal et le système de justice criminelle sont souvent bouleversants, complexes et rébarbatifs. Les victimes ont rarement besoin de connaître le droit jusqu'à ce qu'elles se trouvent en plein coeur du système de justice. Lorsque les accusés sont déclarés inaptes à subir leur procès ou non criminellement responsables pour cause de troubles mentaux, les victimes d'actes criminels se trouvent alors dans une confusion encore plus grande et se butent à des obstacles supplémentaires dans leur quête en vue d'obtenir réparation d'un préjudice.
Les victimes souhaitent obtenir des renseignements sur le système judiciaire et sur l'affaire à laquelle elles sont mêlées, et elles méritent de les obtenir.
Les réformes du droit de même que les changements d'orientation et l'élargissement des services ont donné aux victimes un plus grand rôle dans les poursuites criminelles. Par exemple, on a modifié le Code criminel en 1988—j'étais à la Chambre à cette époque—pour y intégrer la déclaration de la victime comme mécanisme permettant aux victimes d'actes criminels de décrire les dommages ou les pertes qu'elles ont subis à cause d'une infraction.
Avant cette date, le tort causé à la personne n'était pas pris en compte ou en tout cas n'était pas expliqué par la victime. Cela faisait en sorte que les gens sentaient à tort ou à raison, parce que je suis convaincu qu'il y en avait des deux, que leurs doléances personnelles ne s'étaient pas reflétées dans la sentence prononcée quant à l'infraction.
Des dispositions prévoyant des ordonnances de non-publication pour protéger l'identité des victimes d'agression sexuelle ont également été promulguées en 1988. Encore une fois, il y a eu des changements importants à cet égard. Les modifications apportées au Code criminel au cours des 15 dernières années ont permis d'accroître le rôle des victimes d'acte criminel, tout en respectant le droit des accusés. Bien sûr, il faut ajouter cet élément tout en respectant le droit des accusés, parce qu'un accusé n'est pas forcément coupable. Il est innocent jusqu'à preuve du contraire, bien sûr. Après cela, il ne devient plus un accusé; il devient coupable, si c'est le cas.
En réponse au rapport publié en 1998 par le Comité permanent de la justice et des droits de la personne, intitulé « Les droits des victimes: participer sans entraver », le gouvernement a adopté une série de modifications au Code criminel en 1999 afin, notamment, de voir à ce que les victimes soient informées de la possibilité de présenter une déclaration de la victime—laquelle j'ai décrit tout à l'heure; de voir à ce que l'on tienne compte de la sécurité de la victime dans les décisions concernant la mise en liberté provisoire; de préciser l'imposition automatique d'une « suramende » compensatoire et d'établir le montant de celle-ci; et, finalement, de donner au juge le pouvoir discrétionnaire de rendre une ordonnance de non-publication pour protéger l'identité de toute victime ou de tout témoin, lorsque cela est nécessaire dans l'intérêt de la bonne administration de la justice.
Les modifications de 1999 visaient aussi la victime d'une infraction commise par un accusé atteint de troubles mentaux et prévoyaient la rédaction et le dépôt d'une déclaration de la victime au tribunal ou à la commission d'examen lors d'une audience pour déterminer la décision à rendre à l'égard d'un accusé qui n'est pas tenu criminellement responsable pour cause de troubles mentaux. Dans ce cas, il s'agirait d'un accusé sous l'égide de l'article 672.541 du Code criminel, et je cite:
[...] le tribunal ou la commission d'examen doit [...] prendre en compte toute déclaration déposée [...] en vue de rendre une décision ou de fixer des modalités au titre de l'article 672.54. |
Cependant, c'est la victime qui, dans chaque cas, décide si elle la rédigera et déposera une déclaration de ce genre. La déclaration de la victime est prévue au paragraphe 672.5(14), qui dit ceci:
La victime peut rédiger et déposer auprès du tribunal ou de la commission d'examen une déclaration écrite qui décrit les dommages ou les pertes qui lui ont été causés par la perpétration de l'infraction. |
Lorsque l'accusé n'est pas tenu criminellement responsable pour cause de troubles mentaux, la commission d'examen doit décider comment l'accusé sera supervisé. Les victimes d'actes criminels sont souvent négligées et reçoivent peu de renseignements sur ce qui arrivera ensuite, sur la façon dont on répondra à leurs préoccupations en matière de sécurité ou encore pour ce qui est de savoir si elles auront ou non un rôle à jouer ou si elles auront ou non accès à quelque information que ce soit.
On a tous entendu parler de cas d'électeurs victimes d'actes criminels et qui s'interrogent, à savoir si le détenu, quand il sera relâché de façon provisoire ou autrement, le sera justement et parfois à quelques kilomètres ou quelques mètres de la résidence de la victime. Du moins, c'est ce qu'on craint. Ce sont donc des inquiétudes qu'ont souvent nos électeurs. Ici, il y a des outils pour justement s'attaquer à ce problème.
Dans son examen du projet de loi C-10, le comité permanent s'est penché sur d'autres modifications visant à accroître le rôle de la victime. Le comité a entendu plusieurs témoins; certains qui préconisaient un plus grand rôle pour les victimes et d'autres qui n'appuyaient pas les intérêts des victimes. Le comité a, il est très important de l'ajouter, clairement rejeté les observations des personnes qui cherchaient à restreindre le rôle des victimes.
Nous sommes donc allés plus loin, au niveau du comité—et ensuite au niveau du gouvernement, bien sûr—, en ce qui a trait au rôle des victimes parce que c'est l'approche que nous voulions prendre dans le but d'offrir et d'augmenter la protection des victimes de crimes.
Le comité a aussi examiné les dispositions actuelles du code ainsi que des mesures qui devraient s'inscrire dans un cadre de politiques plutôt que dans celui d'un texte législatif visant à mieux répondre aux préoccupations des victimes.
Les modifications proposées dans le projet de loi C-10 renforceront le rôle des victimes d'actes criminels dans les cas où l'accusé a été reconnu non criminellement responsable. Toutefois, les nouvelles dispositions concernant les victimes tiennent pleinement compte des différences entre les dispositions qui régissent les personnes criminellement responsables—et reconnues coupables et condamnées à une peine—, par rapport à celles qui ne sont pas criminellement responsables.
L'accusé qui est déclaré non criminellement responsable en raison de troubles mentaux n'est pas tenu responsable de sa conduite, cela va de soi. Dans sa décision, le tribunal doit prendre en compte plusieurs facteurs dont la nécessité de protéger le public, l'état mental de l'accusé et la nécessité de réintégrer éventuellement l'accusé dans la société.
Les conséquences de l'acte criminel sur la victime peuvent ne concerner que certains critères. Lorsque le tribunal ou la commission d'examen envisage d'accorder une libération conditionnelle, la déclaration de la victime peut donner lieu à l'imposition de certaines conditions, notamment l'obligation pour l'accusé de ne pas entrer en contact avec la victime ou l'obligation d'éviter d'aller dans certains endroits.
Cependant, la victime peut également bénéficier du dépôt d'une déclaration même si la situation de l'accusé ne change pas.
Il convient de signaler, encore une fois, que l'administration de la justice et la prestation des services aux victimes sont des questions de compétence provinciale. Les services offerts aux victimes dans le cadre de l'administration de la justice relèvent aussi des provinces. Je sais qu'il y a eu une question à cet égard il y a quelques minutes.
La mise à la disposition des formulaires de déclaration de la victime, l'aide qui lui est accordée pour remplir la déclaration, la collecte et la présentation des déclarations à la Couronne ou à la cour sont généralement gérées dans le cadre des programmes provinciaux des services aux victimes.
Le comité permanent, dans son examen de 2002, a recommandé que les tribunaux ou les commissions qui effectuent un examen en avisent la victime lorsque cette dernière en a manifesté le désir.
Le projet de loi C-10 renferme des dispositions qui obligent un tribunal qui tient une audience initiale, ou une commission d'examen qui tient une telle audience lorsque le tribunal ne l'a pas fait, à demander à la Couronne ou à la victime si cette dernière a été informée de la possibilité de rédiger une déclaration.
À la suite d'un amendement adopté par le comité—comme on l'a dit plus tôt, le gouvernement en a adopté plusieurs—, la victime recevra un avis de l'audience et les dispositions applicables du Code criminel, y compris les dispositions pertinentes aux déclarations des victimes.
La manière et le délai pour procéder à cet avis seront établis par les règles du tribunal ou de la commission d'examen. D'autres mesures non législatives sont aussi nécessaires en vue d'informer les victimes d'actes criminels des dispositions du code qui s'appliquent dans leur cas, et au sujet des dates des auditions, des modalités d'une décision et autres renseignements indispensables.
Il faut se rappeler que la victime devrait, jusqu'à ce que l'accusé ait été déclaré non criminellement responsable, bénéficier de l'application de toutes les dispositions du code destinées à faciliter la participation des victimes et à protéger leur sécurité et leur vie privée. Ce n'est que lorsque l'accusé a été déclaré non responsable criminellement que l'application des nouvelles dispositions spéciales du code est nécessaire pour assurer la participation de la victime aux audiences de la commission d'examen.
Le projet de loi C-10 contient également les dispositions suivantes qui ont pour objet de renforcer le rôle des victimes d'acte criminel.
Les victimes pourraient présenter verbalement leur déclaration à l'audience de la commission d'examen. Donc, il n'y aurait pas besoin d'avoir beaucoup d'expertise pour rédiger. Une personne pourrait faire cela verbalement. La déclaration serait rédigée d'avance et la victime pourrait la lire à voix haute ou, dans certains cas, faire sa déclaration autrement, par exemple, en fournir une copie si cela s'applique. Il appartient toujours à la victime de décider de rédiger une déclaration et même de la lire. Dans ces cas, c'est la victime qui a ces alternatives. Il est tout à fait normal que cela soit ainsi et je suis content que le projet de loi C-10 le permette.
À la suite du verdict déclarant une personne non responsable criminellement pour cause de troubles mentaux, le tribunal ou le président de la commission d'examen doit demander aux poursuivants, à la victime ou au représentant de la victime si cette dernière a été informée qu'elle peut présenter une déclaration.
La première audience peut être ajournée pour permettre à la victime de préparer une déclaration, si elle le souhaite.
Les commissions d'examen auront de nouveaux pouvoirs leur permettant d'imposer une ordonnance de non-publication visant l'identité des victimes, ou de la victime, et des témoins lorsque cela sert la bonne administration de la justice.
À la suite d'un amendement au comité, un avis d'audience et les autres dispositions du code seront donnés à la victime lorsque celle-ci en fait la demande dans les délais et de la manière prévus par les règles du tribunal ou de la commission d'examen.
Vous voyez que le gouvernement est allé assez loin en tentant de mieux représenter les victimes d'actes criminels de ce genre et, bien sûr, à protéger et la victime et le grand public tout en protégeant les droits des accusés.
J'inciterais tous mes collègues à appuyer le projet de loi C-10. Les modifications qui y sont prévues offrent une meilleure protection aux accusés atteints de troubles mentaux et accordent—dois-je le rajouter encore une fois—un plus grand rôle aux victimes d'actes criminels.
[Traduction]
La présidente suppléante (L'hon. Jean Augustine): La Chambre est-elle prête à se prononcer?
Des voix: Le vote.
La présidente suppléante (L'hon. Jean Augustine): Le vote porte sur la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)
* * *
La Loi sur les télécommunications
(Projet de loi C-37. L'ordre du jour appelle: Initiatives ministérielles:)
Le 13 décembre 2004--Le ministre de l'Industrie--Deuxième lecture et renvoi au Comité permanent de l'industrie, des ressources naturelles, des sciences et de la technologie du projet de loi C-37, Loi modifiant la Loi sur les télécommunications.
L'hon. Jacques Saada (au nom du ministre de l'Industrie) propose:
Que le projet de loi C-37, Loi modifiant la Loi sur les télécommunications, soit renvoyé sur-le-champ au Comité permanent de l'industrie, des ressources naturelles, des sciences et de la technologie. |
L'hon. Don Boudria (Glengarry—Prescott—Russell, Lib.): Madame la Présidente, je suis heureux d'amorcer aujourd'hui le débat concernant le renvoi à un comité du projet de loi C-37, Loi modifiant la Loi sur les télécommunications. Ce projet de loi vise à accroître les pouvoirs du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, le CRTC, afin d'établir un système plus efficace pour protéger les consommateurs contre le télémarketing non sollicité au Canada.
La question fondamentale dont nous sommes saisis est la création, à l'intention des télévendeurs, d'une liste nationale de personnes ne désirant pas être contactées. Je suis certain que nous sommes nombreux à avoir déjà reçu ce genre d'appels, peut-être même au cours du week-end dernier.
Je tiens à donner aux députés l'assurance que nous proposons dans ce projet de loi un modèle de réglementation du télémarketing qui a fait ses preuves. Il s'inspire d'un système déjà en place aux États-Unis. À ceux qui voudraient faire valoir que cela nuit indûment à la capacité des entreprises de faire leur travail, je signale que pareil système existe dans un autre pays.
C'est un modèle qui cherche à établir un juste équilibre entre le désir des consommateurs canadiens de voir leur vie privée respectée et d'être protégés contre les appels importuns, parfois au milieu de la nuit, et le droit des entreprises de télémarketing légitimes de faire leur travail dans un cadre de réglementation leur permettant de soutenir la concurrence.
Permettez-moi d'assurer à la Chambre que les consommateurs seraient en faveur de ce projet de loi, et 79 p. 100 des répondants d'un récent sondage ont indiqué qu'ils seraient pour l'établissement d'une liste nationale d'abonnés auto-exclus. L'industrie serait favorable à l'établissement d'une liste nationale ainsi que d'une façon plus efficiente et économique de gérer les listes de personnes non réceptives à la sollicitation.
Laissez-moi expliquer à la Chambre le cadre législatif et réglementaire qui régit actuellement les appels non sollicités de télémarketing. En vertu de l'article 41 de la Loi sur les télécommunications, le CRTC peut interdire ou réglementer l'utilisation par qui que ce soit des installations de télécommunication en vue de la fourniture de télécommunications non sollicitées. L'article donne au conseil le pouvoir de prévenir tous inconvénients anormaux en tenant compte de la liberté d'expression.
En 1994, le CRTC a adopté des règles qui définissaient les appels non sollicités comme étant des appels pour lesquels le destinataire n'avait pas donné son consentement explicite avant de les recevoir. La sollicitation était définie comme étant la vente ou la promotion d'un produit ou d'un service, ou la sollicitation d'argent ou d'une valeur pécuniaire, directe ou indirecte, y compris les sollicitations faites au nom d'une autre partie. Cependant, les restrictions du CRTC ne s'appliquent pas aux appels non sollicités dont le but n'est pas la sollicitation. Ces appels comprennent, par exemple, les appels pour des fins d'urgence, la perception de comptes, les études de marché et les sondages.
Enfin, aux termes des règles de 1994, les entreprises de télémarketing doivent tenir des listes d'abonnés auto-exclus. En d'autres mots, l'entreprise de télémarketing ABC peut être avisée que nous ne voulons pas recevoir d'appels, mais l'entreprise de télémarketing DEF n'est pas au courant et elle rappellera la fin de semaine après que la première entreprise aura été avisée de ne pas appeler.
Ces règles sont en vigueur et sont appliquées depuis 10 ans par le CRTC, mais elles sont inefficaces, principalement pour trois raisons. Premièrement, les règles ont engendré une certaine confusion chez les consommateurs. Peu de consommateurs savent qu'ils ont le droit de s'inscrire à une liste d'abonnés auto-exclus ou comment s'y prendre. Environ 14 p. 100 des répondants du sondage Environics ont déclaré avoir tenté de porter plainte au sujet d'un appel non sollicité, mais même pour les consommateurs qui souhaitent profiter de ces listes, la tâche est trop lourde.
Les consommateurs qui ne souhaitent pas recevoir d'appels doivent s'inscrire sur les listes de centaines d'entreprises et d'agences de télémarketing, ce qui nous ramène au problème que j'ai décrit un peu plus tôt. Ces inscriptions sont valides pour trois ans après quoi le consommateur doit recommencer le processus.
Comme si toute cette situation n'était pas déjà suffisamment embrouillée, certains appels proviennent de télécopieurs. Cela se produit. Mon fils m'expliquait justement qu'une entreprise quelconque tentait de lui faire parvenir un message publicitaire—impossible de savoir de quoi il s'agit, bien entendu—chez lui par télécopieur. Ce message arrive habituellement au beau milieu de la nuit. Puisque mon fils ne possède pas de télécopieur, le téléphone sonne.
Bien entendu, il est indiqué sur le message comment se retirer de la liste d'envoi et faire cesser ces appels, mais mon fils ne peut évidemment pas lire ce message puisqu'il ne possède pas de télécopieur pour le recevoir. Le message lui est envoyé encore et encore. La famille a un bébé de sept mois. Ils se font souvent réveiller au milieu de la nuit. Cette situation est absolument insoutenable.
Mon fils a tenté d'obtenir l'identité des coupables auprès de la compagnie de téléphone et de toutes sortes de gens, mais, bien entendu, impossible de savoir de qui il s'agit. Il ne lui reste que deux options: la première est d'acheter un télécopieur afin de recevoir le premier message pour pouvoir téléphoner aux solliciteurs et leur dire de ne plus recommencer; la seconde est de s'abonner au service de messagerie téléphonique et de tenter d'obtenir le numéro de téléphone des coupables de cette façon. La seconde option pourrait fonctionner, en supposant que le numéro de téléphone en question puisse recevoir des appels, ce qui n'est bien souvent pas le cas. Donc, même s'il obtenait le numéro, il ne serait pas en mesure de leur téléphoner.
Ce n'est là qu'un exemple de consommateurs prisonniers de ces pratiques commerciales qui leurs sont imposées.
Voilà pourquoi je suis d'avis qu'il faut améliorer la base de données des abonnés auto-exclus conformément aux recommandations du gouvernement et pourquoi l'Association canadienne du marketing recommande l'établissement d'une liste de numéros de téléphone exclus. Cela ne signifie pas que toute activité de télémarketing est nécessairement préjudiciable ou frauduleuse, mais certaines personnes pratiquent ce type de commerce selon un code d'éthique pour le moins douteux.
Comme je l'ai dit, le régime actuel n'est pas très efficace car il est difficile à appliquer. Lorsque les gens reçoivent de nouveaux appels de sociétés même après avoir pris la peine de s'inscrire sur leur liste des abonnés auto-exclus, il leur est difficile de prouver qu'ils étaient inscrits sur la liste de cette société en particulier. Ce problème m'est arrivé. Dans la plupart des cas, chez moi, les appels consistent en des messages télécopiés. Il y a un numéro de téléphone au bas de la télécopie. On peut rappeler la compagnie mais, comme la plupart des gens, après avoir téléphoné à la compagnie pour nous inscrire afin d'éviter qu'elle nous rappelle, si c'est bien ce que nous voulons faire, d'ordinaire nous jetons ce papier. Si l'entreprise recommence un mois plus tard, il est plutôt difficile de prouver qu'il s'agissait de la même compagnie.
Quoiqu'il en soit, les gens qui ont été exposés à ce genre de sollicitation savent que l'en-tête semble changer assez souvent. Je ne suis pas certain que l'on puisse se rendre compte s'il s'agit des mêmes personnes qui appellent ou d'un groupe de personnes totalement différentes.
Les entreprises de télécommunication comme Bell ou Telus ont l'obligation de faire respecter ces listes d'abonnés auto-exclus mais, là encore, ces compagnies se font concurrence pour offrir leurs services aux télévendeurs. Elle sont donc dans une situation plutôt difficile.
Quoiqu'il en soit, en ce qui concerne les agissements que je viens d'exposer, en tout cas ceux que moi-même et d'autres membres de ma famille ont personnellement vécus, je ne suis pas sûr que nous puissions demander à la compagnie de téléphone d'intervenir, car il n'y a pas de relevé des appels qui ont été faits, à ma connaissance du moins.
Les entreprises de télécommunications sont réticentes à agir contre les compagnies en faute. Du point de vue du consommateur, il est difficile de déterminer quelle est l'entreprise de télécommunications auprès de laquelle il doit porter plainte. Pour résumer, en ce qui concerne l'application de la loi, il serait peut-être excessif de dire qu'elle est inexistante, mais le processus est très complexe dans le meilleur des cas.
Le temps est venu d'adopter une approche efficace de réglementation du télémarketing non sollicité, une approche qui profitera à la fois aux consommateurs et à l'industrie du télémarketing, et qui sera plus facile à appliquer. Voilà pourquoi j'appuie ce projet de loi.
M. James Rajotte (Edmonton—Leduc, PCC): Madame la Présidente, j'essaierai de faire connaître tous mes arguments dans la période de dix minutes à ma disposition.
Je suis heureux d'intervenir aujourd'hui pour parler du projet de loi C-37, Loi modifiant la Loi sur les télécommunications. Au départ, permettez-moi de préciser très clairement la position du Parti conservateur sur un registre des abonnés auto-exclus. Le Parti conservateur appuie l'établissement d'un tel registre dans le cadre des paramètres qui sont clairement définis par le Parlement avec des exceptions raisonnables pour les oeuvres de bienfaisance, les partis politiques, les maisons de sondage et les sociétés qui souhaitent communiquer avec leurs clients actuels. Malheureusement, ces exemptions ne sont pas prévues dans ce projet de loi. De plus, le pouvoir d'établir ces détails a été délégué à un organisme de réglementation plutôt qu'aux élus.
Il s'agit également de signaler que le Conseil de la radiotélédiffusion et des télécommunications canadiennes a rendu en mai 2004 une décision qui précisait qu'il était impossible au CRTC de créer et d'administrer de façon efficace un registre national des abonnés auto-exclus. Il a précisé également dans sa décision que, même si le CRTC avait les outils appropriés pour administrer un registre national, il recommanderait un administrateur séparé. Il y a ainsi une certaine confusion relativement à ce projet de loi puisque l'article 41.2 du C-37 donne au CRTC le pouvoir de « gérer des systèmes informatiques [...] et des banques de données » dans le but de créer une liste nationale de numéros de téléphone exclus.
Je suis inquiet de voir que les paramètres ne sont pas établis par le Parlement dans cette mesure législative—qui donne très peu de détails—et de voir qu'aucune exemption n'est prévue. Au Parti conservateur, nous allons appuyer la création d'un registre pourvu que les paramètres soient fixés par le Parlement. Sauf erreur, ce projet de loi sera renvoyé au comité avant l'étude en deuxième lecture, avec dissidence fondamentalement, pour que nous puissions essayer de corriger les lacunes qu'on y retrouve.
Je voudrais préciser certaines exemptions que nous voudrions voir dans le projet de loi. D'autres seront peut-être soumises à l'étape du comité.
Tout d'abord, les oeuvres de bienfaisance. La plupart d'entre elles au Canada vous diront que le télémarketing est le moyen le plus efficace pour elles de recueillir des dons. Je pense que la plupart des Canadiens ne s'opposeraient pas à cela.
Vient ensuite la question des partis politiques. Sous sa forme actuelle, le projet de loi ferait en sorte qu'il soit illégal pour les partis politiques et les candidats politiques de communiquer avec les citoyens par téléphone. Comme nous le savons tous, nous appelons les gens, chose certaine durant le jour du scrutin, pour les inciter à aller voter. Aux termes de ce projet de loi, sous sa forme actuelle, nous croyons que cela serait interdit au Canada.
Il y a, troisièmement, les maisons de sondage qui cherchent à obtenir le point de vue des Canadiens sur diverses questions.
La quatrième exception que nous voudrions voir dans le projet de loi concerne les sociétés qui communiquent avec leurs clients actuels. Par exemple, une banque, une institution financière ou une société de téléphone dont nous sommes clients devrait pouvoir communiquer avec nous. Cela constitue une exception raisonnable. La plupart de ces exemptions figurent dans la loi américaine, dont a parlé le député qui a pris la parole avant moi. Il est intéressant d'entendre le gouvernement dire que la loi américaine lui a servi de modèle parce que, en fait, cette dernière est beaucoup plus détaillée que celle dont nous sommes saisis aujourd'hui à la Chambre.
Je voudrais vous donner quelques exemples pour illustrer mon propos. Mothers Against Drunk Driving est certainement un excellent organisme. Je pense que tous les députés en conviendront. Non seulement cet organisme ne pourra pas appeler ses donateurs actuels, mais encore il ne pourra pas, aux termes de la loi, appeler d'autres personnes pour solliciter des dons. Nous devrions, en tant que législateurs, pouvoir habiliter cet organisme à communiquer avec ses propres donateurs et à solliciter des dons par téléphone.
En outre, le projet de loi, dans son libellé actuel, rendrait illégal pour les partis politiques ou les candidats à des élections de faire des campagnes téléphoniques pour faire sortir le vote. De plus, il serait illégal pour des organismes sans but lucratif comme EGALE, les Travailleurs canadiens de l'automobile ou la Coalition nationale pour la vie, notamment, de communiquer avec leurs membres ou des non-membres par téléphone, ce qui semble plutôt antidémocratique.
Les députés qui étaient à la Chambre durant la dernières session parlementaire ont également eu l'occasion de débattre un projet de loi d'initiative parlementaire d'une députée ministérielle, la députée de Burlington, qui prévoyait des exemptions à cet égard. Je ne comprends pas pourquoi le gouvernement ne s'est pas servi de son projet de loi comme modèle pour inclure ces exemptions. Je suppose que nous l'apprendrons durant l'étude en comité.
Une voix: Parce que le projet de loi était sensé.
M. James Rajotte: Comme le dit le député de Kelowna, le projet de loi était sensé. C'était un bon modèle. Le gouvernement aurait dû s'en servir.
L'autre question a trait à la gestion et à la mise à jour d'une liste de numéros de téléphone au Canada, car, ainsi que le savent nombre de députés et de Canadiens d'un bout à l'autre du pays, le gouvernement a fait preuve d'incurie dans la gestion de registres semblables, celui des armes à feu étant évidemment celui qui vient tout de suite à l'esprit.
Il y a certaines questions que, selon moi, les législateurs que nous sommes devraient étudier à ce stade-ci. Comment maintiendra-t-on la liste à jour? Comment pourra-t-on avoir accès à la liste? Qui la tiendra à jour? Si ce n'est pas le CRTC, quelle organisation s'en occupera? Qu'exigera-t-on des télévendeurs? À quelle fréquence doivent-ils consulter la liste? Des droits d'entretien seront-ils imposés aux télévendeurs? Qui paiera pour la liste? Qui paiera pour l'actualisation, la surveillance et la mise en application de la liste?
Le projet de loi ne donne aucune réponse à ces questions et il faut que des réponses leur soient données avant que le Parlement n'adopte ce texte.
Pourquoi n'exige-t-on pas un rapport annuel au Parlement sur le coût d'administration de la liste? En vérité, nous, au Parlement, devons avoir davantage d'informations détaillées sur la façon dont le CRTC se propose de constituer, d'administrer et de réglementer ce registre de numéros de téléphone exclus.
Outre le projet de loi d'initiative parlementaire mentionné, il existe deux excellents exemples de registres de numéros de téléphone exclus, un au Royaume-Uni et l'autre aux États-Unis. Je vais aborder brièvement la liste américaine, car je crois qu'elle offre au Canada certaines orientations.
La loi américaine de protection des consommateurs relative au téléphone est extrêmement détaillée. Elle restreint l'utilisation d'appareils téléphoniques et de télécopieurs pour transmettre des publicités non sollicitées, et elle limite les heures pendant lesquelles les télévendeurs peuvent appeler, aspect qui a été signalé par l'intervenant précédent; nous recevons les mêmes plaintes lorsque les télévendeurs appellent le dimanche matin ou tard le soir. Ce sont là des restrictions raisonnables que nous pouvons imposer aux télévendeurs.
Toutefois, ce que je veux souligner, c'est que tout cela est bien énoncé dans la loi américaine. Les Américains s'y sont pris de la bonne façon. Ils ont rédigé des dispositions détaillées, au lieu de se contenter de présenter un projet de loi ne comportant pas de détails et d'espérer que le comité remédie aux lacunes.
Le 26 juin 2003, la Commission fédérale des communications des États-Unis, la FCC, a revu ses règles pour mettre en oeuvre cette nouvelle loi de protection des consommateurs relative au téléphone. De concert avec la Commission fédérale du commerce, la FCC a établi un registre des abonnés auto-exclus. Le registre est de dimension nationale et il comprend pratiquement tous les télévendeurs, à l'exception d'organisations politiques, d'organisations caritatives et des sondages par téléphone, trois des exceptions dont j'ai fait mention.
Un télévendeur ou vendeur peut appeler un consommateur avec lequel il entretient des rapports commerciaux établis dans un délai de 18 mois après le dernier achat du consommateur, la livraison ou le paiement, même si le numéro du consommateur est inscrit au registre national des numéros exclus. Les consommateurs inscrits au registre national pourront accorder par écrit une autorisation expresse préalable aux entreprises de qui ils souhaitent continuer de recevoir des appels de télévente.
Le projet de loi initial présenté au Congrès ressemblait beaucoup au projet de loi C-37. La principale différence était que le projet de loi du Congrès prévoyait un mécanisme de surveillance selon lequel la Federal Communications Commission et la Federal Trade Commission étaient tenues de présenter à la Chambre des représentants dans les 45 jours suivant l'entrée en vigueur du projet de loi un rapport analysant les des règlements relatifs au télémarketing, signalant les cas d'incompatibilité entre les règlements et leurs conséquences pour les consommateurs et les personnes payant pour accéder à la liste, et proposant des mesures correctives.
De plus, le projet de loi américain prévoyait que le rapport annuel devait contenir certains détails, en l'occurrence le nombre de personnes utilisant la liste, les frais exigés pour y avoir accès et une analyse des progrès réalisés et du fonctionnement et de la mise en oeuvre de la liste.
Le Parti conservateur croit que notre projet de loi devrait s'inspirer de ce modèle américain. Nous pouvons sûrement prendre comme modèle le projet de loi d'initiative parlementaire présenté par le député de Burlington à la dernière session. Il serait intéressant de savoir en fait pourquoi le gouvernement n'a pas pris l'un ou l'autre de ces deux projets de loi pour modèle lorsqu'il a rédigé son projet de loi C-37.
Pour conclure, je tiens à déclarer sans équivoque que le Parti conservateur appuiera la création d'une liste nationale à la condition qu'elle soit définie de façon détaillée dans le projet de loi, à condition que les paramètres soient déterminés par le Parlement, à condition que nous sachions exactement qui administrera la liste et que les détails soient clairement énoncés, à condition que des exemptions raisonnables soient prévues pour les organismes de bienfaisance, les organisations politiques et les entreprises qui souhaitent communiquer avec leurs clients existants.
J'estime que les demandes de notre parti sont toutes raisonnables. Nous espérons vraiment que ce projet de loi pourra être corrigé par le comité et que ce genre de texte ou de liste entrera très bientôt en vigueur au Canada.
[Français]
M. Mario Laframboise (Argenteuil—Papineau—Mirabel, BQ): Madame la Présidente, il me fait plaisir, au nom du Bloc québécois, de prendre la parole au sujet du projet de loi C-37. Permettez-moi de lire un peu le sommaire annexé à ce projet de loi qui modifie la Loi sur les télécommunications:
Le texte modifie la Loi sur les télécommunications afin de permettre au Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes de gérer des banques de données en vue d’exercer le pouvoir prévu à l’article 41 de cette loi, à savoir le pouvoir d’interdire ou de réglementer, dans la mesure qu’il juge nécessaire—compte tenu de la liberté d’expression—pour prévenir tous inconvénients anormaux, l’utilisation par qui que ce soit des installations de télécommunication de toute entreprise canadienne en vue de la fourniture de télécommunications non sollicitées. |
Il prévoit en outre des pénalités pour toute contravention ou tout manquement à une mesure prise par le Conseil au titre de cet article. |
Ce projet de loi fait suite à des sondages réalisés à travers le Canada et le Québec. En effet, un sondage Environics mentionnait que 79 p. 100 des Canadiens avaient affirmé appuyer une liste nationale d'abonnés auto-exclus.
Pour ceux qui ne l'auraient pas compris, ce projet de loi a pour but de permettre aux Québécoises et Québécois et aux Canadiennes et Canadiens qui le désirent de s'auto-exclure de toute promotion de télémarketing. Que ce soit par télécopieur, par courriel ou par téléphone, nous sommes inondés par les compagnies de télémarketing qui veulent nous vendre, tout un chacun, le meilleur produit du monde. Cela crée souvent des inconvénients, cela engendre beaucoup de communications, on surcharge nos comptes de courriel ou on nous surcharge de papiers.
Il existe une volonté populaire à l'effet de s'auto-exclure de ces sollicitations. Le projet de loi C-37 offrirait cet avantage. Évidemment, le Bloc québécois sera en faveur de ce principe. Nous sommes d'accord à ce que les Québécoises et les Québécois n'aient pas à subir ces sollicitations et qu'ils puissent, s'ils le désirent, s'inscrire à une liste qui sera gérée par le CRTC.
Automatiquement, lorsqu'on s'inscrirait à cette liste, toutes les compagnies de télécommunications n'auraient plus le droit de nous solliciter, sous peine de pénalités et d'amendes relativement sévères. Il s'agit de 1 500 $ lorsque ce sont des individus, c'est-à-dire des personnes physiques, qui nous sollicitent et de 15 000 $ si c'est une personne morale. Évidemment, l'employeur est responsable du mandat qu'il a confié à une personne désignée, c'est-à-dire que la compagnie est responsable des actions commises par ses employés. Un manquement à cette obligation impliquerait donc des pénalités importantes.
Par contre, nous nous questionnons au sujet d'une certaine réalité. Le CRTC a déjà avoué qu'il n'était pas en mesure de gérer ce programme, donc qu'il avait besoin d'un budget important pour ce faire. Quant à nous, il devrait incomber aux compagnies de verser une part des profits qu'elles réalisent dans le télémarketing afin de maintenir cette liste d'auto-exclusion.
D'ailleurs, l'Association canadienne du marketing a déjà avoué que ce serait plus facile pour elles de savoir à l'avance si des gens s'auto-excluaient. De cette façon, cela leur coûterait moins cher, que ce soit en personnel ou en frais de télécopieur ou d'utilisation du courriel. Le fait de savoir quelles personnes ne veulent pas être sollicitées leur permet d'éviter certaines dépenses. Elles seraient donc prêtes à débourser les frais engendrés par un tel appareil.
Par contre, une grande question demeure toujours lorsque le gouvernement gère un registre. Souvenons-nous du registre des armes à feu, qui a englouti des sommes faramineuses. Je suis conscient du fait que l'industrie voudra être soumise à des coûts préétablis, pour éviter de s'embarquer dans une dépense aussi rocambolesque que l'a été le registre des armes à feu. Celui-ci devait coûter quelque 2 millions de dollars au début, mais dépasse maintenant les 2 milliards de dollars.
Il est donc important que nous, en tant que députés, puissions encadrer la mise en place de ce registre. Ainsi, les compagnies auraient un coût raisonnable à payer. Plus important encore, les citoyens et les citoyennes seraient très rapidement respectés dans leur choix d'adhérer à cette liste d'auto-exclusion.
Nous voudrions également voir certains amendements être apportés au projet de loi. Il devrait prévoir des exclusions, c'est-à-dire établir des paramètres clairs dans le texte de loi, que l'on ne retrouve pas notamment en ce qui a trait aux groupes qui seraient exclus.
Il faut comprendre que si l'on met en place une telle liste, des citoyens et citoyennes pourraient s'auto-exclure de toute distribution. Charité bien ordonnée commence toujours par soi-même. Les partis politiques ont fait des demandes de façon à ce les citoyens ne puissent s'auto-exclure des communications que nous pouvons leur envoyer.
Souvent, ils reçoivent de l'information de la part de leur député. Comme les députés du Bloc québécois sont très près de la population, nous envoyons régulièrement de la documentation pour expliquer aux gens les travaux que font les charmants collègues, hommes et femmes, du Bloc québécois qui se dévouent pour le Québec.
Évidemment, nous souhaiterions que les partis politique puissent toujours être capables de correspondre avec les citoyens.
Il y a aussi les organismes de bienfaisance sans but lucratif. Trop souvent, la seule façon pour les organismes de se financer est d'être capable d'avoir un lien direct avec la population. Ils nous font souvent parvenir des demandes d'aide par courrier ou autrement. Il faudrait la permission, pour les organismes de bienfaisance, d'être encore capables de correspondre avec les Québécoises et les Québécois qui sont des gens extrêmement généreux, comme nous l'avons prouvé par le passé et comme nous le prouverons toujours lorsque le besoin se fera sentir.
Il y a également les entreprises qui ont déjà des liens d'affaires avec leurs clients et leurs clientes. Nous ne voulons pas non plus que les banques ou les compagnies de téléphone—ne serait-ce que pour les Pages Jaunes—ne puissent plus communiquer avec les femmes et hommes d'affaires pour être capables de leur vendre de la publicité. C'est surtout dans le cas de relations avec une clientèle existante. Nous voulons un principe d'encadrement pour permettre aux entreprises d'être capables de communiquer avec des hommes et des femmes qui ont eu la chance de leur faire confiance dans le passé pour ne pas qu'elles soient pénalisées par cette pratique et dans leur façon de faire affaire avec leurs clients.
Or, si ces principes étaient clairement énoncés dans la loi, si la protection était assurée à un coût raisonnable—c'est que ce je souhaite et c'est ce que fera le Bloc québécois dans les amendements qui seront proposés—, nous allons nous assurer qu'il y ait un registre. Nous nous assurerons aussi que ce registre puisse permettre à tous les Québécoises, les Québécois, les Canadiennes et les Canadiens—on parle évidemment de ceux qui le voudront,—de s'auto-exclure de toute publicité par télémarketing. De même, nous nous assurerons que les entreprises qui auront à payer pourront le faire à un coût raisonnable, que ce registre soit appuyé par le gouvernement et qu'il ne confie pas cela à une entreprise privée. Entre autres, l'Association canadienne du marketing l'a demandé, ce qui serait évidemment comme de confier au loup le soin de garder la bergerie.
Vous aurez compris que nous souhaitons qu'il y ait une entité indépendante de l'industrie, appuyée par l'industrie à des coûts raisonnables connus à l'avance pour ne plus vivre le problème du registre des armes à feu, et de permettre à des groupes qui font déjà affaire avec la population de continuer à le faire. Nous pensons à des organismes de bienfaisance, aux partis politiques, aux commerces, aux banques, aux compagnies de téléphone et aux entreprises qui font déjà affaire avec leur clientèle par l'entremise des télécommunications. Il faut qu'ils puissent continuer de le faire. Si cela est dans la loi, il fera plaisir aux députés du Bloc québécois d'appuyer ce projet de loi qui sera d'une grande utilité et qui empêchera des Québécoises et des Québécois d'être harcelés pour des choses qu'ils ne veulent pas.
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
[Article 31 du Règlement]
* * *
[Traduction]
La santé
M. Lloyd St. Amand (Brant, Lib.): Madame la Présidente, je voudrais rendre hommage à M. Jon Lynne-Davis, de la circonscription de Brant que je représente, qui est l'auteur de l'ouvrage intitulé From Couch Potato to Baked Potato. M. Lynne-Davis a consacré toute sa vie à sensibiliser les Canadiens aux dangers de l'obésité. L'obésité accroît les risques d'hypertension, de diabète de type 2, d'insuffisance coronaire et de bon nombre d'autres maladies graves.
En décembre 2004, M. Lynne-Davis et ses collaborateurs ont créé un site Web, le WhyIamFat.com. Ce site et les services qui y sont offerts ont été mis sur pied avec l'aide d'éducateurs, de médecins, de diététistes et de physiologistes de l'exercice. On y trouve des renseignements sur les problèmes courants reliés à l'obésité et des mesures qui peuvent venir en aide aux gens qui veulent vraiment perdre du poids.
J'exhorte mes collègues à se joindre à moi pour féliciter M. Lynne-Davis de son bon travail et de son dévouement à l'égard de cette maladie silencieuse.
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L'industrie laitière
M. Dave MacKenzie (Oxford, PCC): Madame la Présidente, au cours des derniers mois, nous avons beaucoup entendu parler des effets de l'ESB sur l'industrie bovine, mais très peu des conséquences négatives que toute cette crise peut avoir eues sur l'industrie laitière.
La ville de Woodstock, dans ma circonscription, Oxford, est la capitale laitière du Canada. Près de 7 p. 100 de toutes les fermes laitières de l'Ontario se trouvent à Oxford. Nos agriculteurs dévoués et leurs familles méritent notre reconnaissance pour tout le travail qu'ils font pour l'industrie laitière du pays, malgré tous les défis qu'ils doivent relever.
Les augmentations de prix adoptées récemment par la Commission canadienne du lait devraient permettre, espérons-le, de réduire les écarts entre les coûts d'exploitation et le salaire des exploitants de ferme laitière.
J'exhorte la Chambre à appuyer cette industrie fondamentale au pays et à voir à ce qu'elle soit financièrement viable, et j'aimerais remercier les exploitants de ferme laitière canadiens et leurs familles pour leurs durs labeurs et leur dévouement.
Enfin, j'aimerais souhaiter la bienvenue aux Producteurs laitiers du Canada qui sont réunis à Ottawa pour leur conférence annuelle sur la politique laitière. J'espère qu'ils aimeront leur séjour dans la capitale nationale.
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North Vancouver
M. Don Bell (North Vancouver, Lib.): Madame la Présidente, le matin du 19 janvier, des résidants de ma circonscription de North Vancouver se sont réveillés en apprenant qu'un glissement de boue avait causé des dommages considérables à des résidences des secteurs Blue Ridge et Riverside, tout en entraînant la mort d'une résidante de North Vancouver, Mme Eliza Kuttner, et en blessant gravement son mari, Michael. Nous adressons nos condoléances à la famille et aux amis de Mme Kuttner, qui ont à composer avec cette terrible tragédie.
J'ai participé au cours du week-end à une merveilleuse activité communautaire de financement destinée à la famille Dykes—Harvey, Colette et leur fille Jacintha—, dont la résidence a également été touchée par l'écoulement de boue et de débris et qui, par miracle, ont survécu au désastre.
À un moment donné, il a fallu, par précaution, évacuer jusqu'à 100 familles. Dix familles attendent encore l'autorisation d'occuper à nouveau leur maison.
Je suis extrêmement fier de la façon dont ont réagi aux événements tragiques mes anciens collègues du palier municipal: le maire Harris, l'agent principal de l'administration James Ridge et le chef du service des incendies Gary Calder. L'équipe d'intervention d'urgence au grand complet s'est mobilisée dans les minutes qui ont suivi l'annonce de l'événement et personne n'a quitté son poste tant qu'il a subsisté un danger et que ceux qui avaient été évacués n'eurent pas été traités et mis à l'abri.
Nous avons été fort encouragés, le maire Harris et moi-même, de recevoir un appel du premier ministre, qui était à Tokyo et tenait à nous manifester son inquiétude et ses encouragements. Une telle tragédie, espérons-le, ne se répétera pas.
* * *
[Français]
Jean-Jacques Martel
M. Marc Lemay (Abitibi—Témiscamingue, BQ): Madame la Présidente, c'est avec grande tristesse que la région de l'Abitibi-Témiscamingue pleure le départ d'un de ses bâtisseurs, M. Jean-Jacques Martel.
Né en 1927, prospecteur, M. Martel a fait beaucoup pour le développement minier de l'Abitibi. Homme généreux, impliqué et bâtisseur de notre belle région, il a occupé les fonctions de député fédéral dans l'ancien comté de Chapleau du 31 mars 1958 au 18 juin 1962. Il a su, grâce à son attachement sans équivoque à la région, défendre avec ferveur les intérêts de ses concitoyens.
Mes collègues du Bloc québécois se joignent à moi pour offrir toutes nos condoléances à la famille Martel et à la communauté témiscabitibienne.
* * *
[Traduction]
Le Club communautaire Crescentwood
Mme Anita Neville (Winnipeg-Centre-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour rendre hommage au Club communautaire Crescentwood, qui célèbre ses 60 ans d'existence.
Situé au coeur de Winnipeg-Sud, le Club communautaire Crescentwood a vu le jour en 1945 dans un wagon de train converti. En 1949, un local permanent a été construit entièrement par des bénévoles. Le club a été agrandi en 1997 et de nouvelles améliorations sont prévues. Les programmes évoluent sans cesse au rythme des besoins de la collectivité.
Pour lancer les célébrations entourant le 60e anniversaire du Club qui se dérouleront cette semaine, un thé est prévu pour rendre hommage à ceux dans le passé qui ont contribué à bâtir la communauté. La fête se poursuivra toute la semaine avec une foule d'activités pour toute la famille.
Fait intéressant, ce club a joué un rôle important sur la scène musicale de Winnipeg et du Canada. Plusieurs futures superstars se sont produites à la cantine de Crescentwood, notamment Burton Cummings, Randy Bachman, Fred Turner et Neil Young, qui faisaient partie de groupes tels que les Deverons, les Squires, Pink Plum et les Orfans.
Félicitations à la communauté historique de...
Le Président: La députée de Laval a la parole.
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[Français]
La journée de l'alphabétisation de la famille
Mme Nicole Demers (Laval, BQ): Monsieur le Président, la septième Journée de l'alphabétisation de la famille s'est tenue le 27 janvier dernier.
Cette journée encourage la lecture en famille, qui contribue à maintenir le niveau d'alphabétisation des adultes et à encourager la formation des enfants et des adultes qui apprennent à lire.
Pour cette occasion, les organismes d'alphabétisation, les écoles et les bibliothèques organisent des activités pour promouvoir l'alphabétisation familiale et permettre aux organismes de tisser des liens avec leur communauté.
Il est important d'encourager l'alphabétisation sous toutes ses formes, quand on sait que 22 p. 100 des adultes canadiens de plus de 16 ans se classent dans le niveau le plus faible en capacité de lecture.
J'aimerais souligner le travail de l'organisme Le Groupe Alpha Laval, qui oeuvre depuis bientôt neuf ans. Cet organisme prévient l'analphabétisme en sensibilisant la population et en mettant en place des activités d'alphabétisation.
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[Traduction]
Les produits de santé naturels
M. James Lunney (Nanaimo—Alberni, PCC): Monsieur le Président, le projet de loi C-420 est à nouveau inscrit au programme législatif. Avec l'aide de mon collègue d'Oshawa, le projet de loi C-420 a été redéposé le 21 octobre 2004. Le projet fera bientôt l'objet d'une deuxième heure de débat avant le vote de deuxième lecture.
Ce projet porte sur la réglementation des produits de santé naturels. Il concerne la liberté de choix dans le domaine des soins de santé personnels.
Les Canadiens veulent que le gouvernement comprenne que les vitamines, les minéraux, les herbes et les amino-acides ne sont pas des médicaments. Ces produits se retrouvent en nous. Les Canadiens veulent que les produits de santé naturels soient réglementés par une direction qui traiterait ces produits comme des aliments, non comme des médicaments. Voilà le but du projet de loi C-420.
Le projet de loi C-420 modifierait la Loi sur les aliments et drogues. Il élargirait la définition d'aliment de manière à inclure les produits de santé naturels. Il réviserait la définition de drogue pour exclure les aliments. Il abrogerait aussi les paragraphes 3(1) et 3(2), ainsi que l'annexe A, qui sont dépassés et qui interdisent de faire des allégations relatives à la santé en ce qui concerne les produits de santé naturels, même si ces dernières ont un fondement scientifique.
En vertu du projet de loi C-420, nous établirons de bonnes pratiques de fabrication et d'inspection, et nous évaluerons rigoureusement les allégations relatives à la santé.
Il est temps que les produits naturels prennent leur place à la base d'une stratégie de bien-être et de prévention pouvant contribuer à mettre le Canada à l'avant-plan d'une véritable réforme des soins de santé.
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L'aide aux victimes du tsunami
Mme Yasmin Ratansi (Don Valley-Est, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais d'abord rendre hommage au peuple canadien pour sa générosité à la suite de l'horrible tsunami qui a dévasté l'Asie du Sud-Est le 26 décembre 2004.
Je voudrais aussi rendre hommage au premier ministre et au gouvernement canadien pour la rapidité de leur coopération avec la communauté internationale afin d'aider les survivants du tsunami à reconstruire leurs vies dévastées.
Ce désastre m'a personnellement touchée lorsque des habitants de ma circonscription m'ont demandé de les aider à rejoindre des êtres chers au lendemain du tsunami.
Dans un cas, des habitants du village où six jeunes volontaires canadiens au service d'Entraide universitaire mondiale du Canada travaillaient à un projet d'aide les ont conduits vers des hauteurs.
Ce n'est là qu'un récit de survie alors que des centaines de milliers de personnes ont été touchées par le désastre, mais je peux assurer aux députés que ce petit épisode a eu une signification immense pour la famille et les amis de ces volontaires dans ma circonscription de Don Valley-Est.
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Le prix des jeunes bénévoles
Mme Beth Phinney (Hamilton Mountain, Lib.): Monsieur le Président, le Hamilton Spectator a récemment décerné à Matthew Mitterling le prix des jeunes bénévoles pour l'année 2004.
Matthew est un adolescent comme les autres qui participe à diverses activités parascolaires à l'école Hillfield-Strathallan. Il est néanmoins exceptionnel parce qu'il montre que, grâce à la participation de chacun, il est possible de changer le monde. Une de ses initiatives bénévoles de collecte de fonds a notamment permis de creuser un puits pour approvisionner un village zambien en eau potable.
Cinq autres jeunes exceptionnels étaient en lice pour le prix des jeunes bénévoles décerné par le Hamilton Spectator, il s'agit de Brian Hua, d'Amanda Lammers, de Jessica McPhee, de Carla Tancredi et de Madeline Wilson.
J'invite les députés à se joindre à moi pour féliciter le lauréat du prix, Matthew Mitterling, et les autres candidats, et pour souligner les réalisations et la contribution de ces jeunes à la collectivité.
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Les Grands Frères Grandes Soeurs du Canada
M. Peter MacKay (Nova-Centre, PCC): Monsieur le Président, je voudrais aujourd'hui porter à l'attention de la Chambre le travail merveilleux des 170 associations de grands frères et de grandes soeurs du Canada.
Depuis plus de quatre-vingts ans, cette organisation nationale répond aux besoins des jeunes en leur donnant un ami ou une amie sur lesquelles ils peuvent compter. Des études montrent que les enfants profitent grandement de la présence à leurs côtés d'un adulte constituant un modèle à leurs yeux. En moyenne, les enfants qui ont cette chance réussissent mieux leurs études.
En tant que grand frère, je suis bien placé pour dire à la Chambre l'immense satisfaction que l'on ressent à faire partie de ce mouvement formidable. Mon amitié avec Matt a été l'une des expériences les plus enrichissantes de ma vie.
Récemment, une petite soeur de notre programme local a écrit ce qui suit:
Ma mère est morte du cancer quand j'avais 9 ans. Ma « grande soeur » occupe une très grande place dans ma vie. Elle m'apprend des choses et m'emmène un peu partout. Nous sommes souvent ensemble. Quand je serai grande, je veux que mon père et ma grande soeur soient fiers de moi. |
Je félicite Margie Grant, directrice de l'association des grands frères et des grandes soeurs de Pictou et Antigonish, ainsi que tous les bénévoles, participants et bienfaiteurs au grand coeur qui manifestent une si grande générosité et qui font tant pour améliorer la qualité de vie des grands et des petits.
Le 16 février, Les Grands Frères Grandes Soeurs du Canada organisent une réception ici, sur la colline du Parlement. J'exhorte tous les députés à se rendre ce jour-là à la salle 200 de l'édifice de l'Ouest pour appuyer cette organisation fantastique.
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La Somalie
M. Borys Wrzesnewskyj (Etobicoke-Centre, Lib.): Monsieur le Président, les habitants de ce pays ravagé par la guerre qu'est la Somalie, et la diaspora somalienne, ont accueilli avec beaucoup d'optimisme l'élection récente du président de transition Abdullahi Yusuf Ahmed et la nomination du premier ministre Ali Mohamed Gedi.
La Somalie est un État qui a trahi la confiance de son peuple. Le nouveau gouvernement offre un nouvel espoir de paix et de stabilité aux Somaliens, que la guerre a tant accablés.
La semaine dernière, le Parlement somalien, basé au Kenya, a envoyé des délégations pour évaluer les conditions de sécurité et la possibilité de retourner dans un pays qui n'a connu aucun gouvernement central depuis plus d'une décennie.
Les Canadiens participent directement au processus de démocratisation de la Somalie et à la création d'une société civile dans ce pays. En effet, 11 députés du Parlement somalien sont des Canadiens d'origine somalienne, sans parler du fait que des Somaliens naturalisés canadiens occupent des postes clés au cabinet du premier ministre et d'autres ministres.
Le Canada se doit d'assumer le rôle de leader international en reconnaissant officiellement le nouveau gouvernement de transition de la Somalie, gouvernement qui, confronté tel qu'il l'est à des défis internes de taille, a besoin d'un appui international.
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Le passage frontalier Windsor-Détroit
M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD): Monsieur le Président, le premier rapport indépendant sur les mesures à adopter au sujet du passage frontalier Windsor-Détroit a été rendu public à la mi-janvier.
L'expert Sam Schwartz a consacré une année à étudier la façon de faciliter le trafic au passage frontalier le plus fréquenté au Canada et à réduire le nombre de camions dans les rues de Windsor. Quarante-deux pour cent des échanges commerciaux du Canada passent par cet endroit et la situation actuelle témoigne de la négligence de l'infrastructure, des scandales et des lenteurs qui caractérisent les libéraux.
Le premier ministre affirme qu'il est favorable à une solution qui émanerait de Windsor. À l'endroit des habitants de ma ville, il a pris l'engagement formel qu'aucune solution ne leur serait imposée. Tout récemment, cependant, le premier ministre a affirmé que le financement faisait toujours « l'objet de négociations » et aucune date n'a été annoncée pour une décision.
Le report de décision à ce sujet coûte chaque année au moins six milliards de dollars à notre économie. Combien de temps les libéraux vont-ils encore attendre avant de prendre un engagement concret au sujet du corridor commercial le plus important du pays et avant de respecter les citoyens de l'endroit?
* * *
Albert Redekopp
Mme Joy Smith (Kildonan—St. Paul, PCC): Monsieur le Président, la circonscription de Kildonan—St. Paul a appris le décès soudain d'Albert Redekopp. Il n'avait que 59 ans, et toute notre collectivité est sous le choc.
Après ses études de droit à l'université du Manitoba, Albert a ouvert son cabinet à North Kildonan et s'est spécialisé en droit commercial; cela ne l'a pas empêché de consacrer beaucoup d'heures aux moins bien nantis, car il n'a jamais refusé un client qui ne pouvait pas payer ses honoraires.
Il a également consacré beaucoup de temps en séances d'information sur les dispositions testamentaires et sur d'autres questions juridiques dans des résidences de personnes âgées. Il a été un pilier de notre collectivité, une personne grandement respectée. Je suis fière qu'il ait été pour moi un électeur, un propriétaire et un ami.
Si l'héritage d'un homme se mesure au nombre de vies qu'il a touchées, Albert laisse une marque qui ne s'effacera jamais. Il nous manquera à tous, mais son influence dans la circonscription de Kildonan—St. Paul ne s'éteindra jamais.
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[Français]
La Paix des braves
M. Bernard Cleary (Louis-Saint-Laurent, BQ): Monsieur le Président, j'ai le plaisir aujourd'hui de souligner en cette Chambre le troisième anniversaire de la signature de l'entente de la Paix des braves, conclue le 7 février 2002 entre la nation crie et le gouvernement du Québec.
L'entente a établi une nouvelle relation entre la nation québécoise et la nation crie, caractérisée par la coopération, le partenariat et le respect mutuel. Elle a mis en place des structures qui permettent aux Cris de travailler avec les Québécois dans un esprit de collaboration.
La Paix des braves représente encore aujourd'hui l'entente la plus progressiste conclue entre un gouvernement et une nation autochtone. Je souhaite qu'à pareille date l'année prochaine, nous puissions souligner la conclusion d'une seconde entente de la Paix des braves entre le gouvernement fédéral et la nation crie.
* * *
[Traduction]
La Saskatchewan
M. Gerry Ritz (Battlefords—Lloydminster, PCC): Monsieur le Président, le Parti libéral nomme les ministres responsables des diverses régions du Canada, mais il l'oublie facilement lorsque son choix s'avère mauvais. Nous en avons un parfait exemple en la personne du ministre des Finances, qui est censé être le ministre responsable de la Saskatchewan. Le ministre a déclaré que la Saskatchewan, dont le revenu moyen par habitant est plus bas de 5 000 $ par rapport à la moyenne nationale, est une province riche. On peut dire qu'il voit la vie en rose. Les listes d'attente pour les examens par IRM, sans parler des chirurgies telles que le remplacement d'une hanche, sont les plus longues au Canada. Notre taux de chômage est bas parce que nos jeunes s'exilent. Notre fardeau fiscal et notre économie néo-démocrate vaudou font peur aux investisseurs étrangers.
Qu'en est-il de la formule de péréquation libérale complexe et tout à fait désuète? Elle pénalise doublement nos ressources non renouvelables. D'abord, le gouvernement fédéral et les néo-démocrates les soumettent à des taxes indues, puis la formule prévoit des pénalités sur les paiements dûs à la Saskatchewan, ce qui a pour effet de déprimer l'économie.
Avec cette soi-disant aide du ministre des Finances, la Saskatchewan demeurera à jamais une province pauvre.
* * *
Les aidants naturels
M. Michael Savage (Dartmouth—Cole Harbour, Lib.): Monsieur le Président, dans le discours du Trône de 2004, le gouvernement fédéral annonçait qu'il consulterait les Canadiens sur un éventail de mesures visant à appuyer les aidants naturels.
Le 21 janvier, j'ai eu le plaisir de présenter le ministre d'État à la famille et aux aidants naturels, qui animait la deuxième table ronde d'une série de consultations sur la prestation de soins par les aidants naturels, dans la circonscription que je représente, Dartmouth—Cole Harbour.
Cette importante table ronde réunissait des intervenants clés dans le cadre de discussions sur les enjeux et les possibilités dans le domaine de la prestation de soins aux aînés et aux personnes handicapées. Les aidants naturels sont les héros méconnus de notre système de soins de santé. En effet, non seulement permettent-ils des économies de plus de 5 milliards de dollars, annuellement, mais encore permettent-ils aux proches de tous âges à qui ils prodiguent des soins de vivre mieux et plus dignement.
Le gouvernement libéral continue de consulter les provinces sur le rôle des aidants naturels. Nous nous sommes engagés à verser un milliard de dollars sur cinq ans, et je suis fier de dire que nous doublerons le crédit d'impôt aux aidants naturels, qui passera à 10 000 $.
Je sais par expérience ce que signifie la prestation de soins à des être chers car mes parents en ont besoin.
Au nom des aidants naturels, je félicite le ministre d'État pour son travail. Je suis ravi de voir qu'il mène de réelles consultations auprès de tous les intervenants afin de déterminer les meilleures façons de fournir de l'aide aux familles qui le méritent bien.
QUESTIONS ORALES
[Questions orales]
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[Traduction]
La défense nationale
L'hon. Stephen Harper (chef de l'opposition, PCC): Monsieur le Président, le fait d'entendre aujourd'hui que des millions de dollars ont été dépensés pour emprunter des avions afin de transporter la DART en Asie devraient rappeler aux Canadiens que cela fait 12 ans que nos forces armées sont sous-financées par le premier ministre. Nous pouvons ajouter à cela les écrasements d'hélicoptères, les incendies à bord des sous-marins, les jeeps rouillées et, ce qu'on voit depuis quelque temps, l'envoi de soldats mal équipés dans des missions sans cesse plus dangereuses.
Comme le gouvernement a manifestement induit les Canadiens en erreur au sujet de la taille de l'excédent durant la dernière campagne électorale, le premier ministre s'engagera-t-il aujourd'hui à accroître le financement des forces armées dans le prochain budget?
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, ce fut un grand honneur pour moi d'être aux côtés du ministre de la Défense nationale lors de l'installation du nouveau chef d'état-major de la défense, le général Hillier. D'ailleurs, je profite de l'occasion pour féliciter le général Henault pour sa nomination à la présidence du Comité militaire de l'OTAN.
Le ministre de la Défense nationale a fait des recommandations exhaustives sur les besoins en matière d'accroissement des dépenses militaires. Nous sommes très ouverts et continuerons de protéger...
Le Président: Le chef de l'opposition a la parole.
L'hon. Stephen Harper (chef de l'opposition, PCC): Monsieur le Président, comme le premier ministre était tellement heureux d'assister à l'installation du nouveau chef d'état-major de la défense, je me demande s'il s'est donné la peine d'écouter ce que ce dernier avait à dire au sujet de la tendance à sous-financer nos forces armées. Voici ce qu'il a dit:
Nous ne pourrions probablement pas donner aux hommes et aux femmes de nos forces armées suffisamment de ressources pour qu'ils puissent faire tout ce que nous demandons d'eux, mais nous pouvons leur en donner trop peu, et c'est ce que nous faisons dans le moment. |
Le premier ministre admettra-t-il enfin que, au cours des 12 dernières années, son gouvernement a presque anéanti nos forces armées en les privant des ressources dont elles ont besoin?
L'hon. Bill Graham (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, les chefs d'état-major de la défense, et cela fait d'ailleurs partie de leur travail, ont toujours signalé aux gouvernements que les militaires auraient besoin de plus de ressources. Je suis convaincu que le général Hillier fera de même en vue d'obtenir les meilleures ressources possibles pour les forces armées.
Le gouvernement et le premier ministre ont promis d'accroître la taille des Forces canadiennes. Nous avons promis de mieux les équiper, et c'est ce que nous faisons. Nous tiendrons cette promesse.
L'hon. Stephen Harper (chef de l'opposition, PCC): Monsieur le Président, il ne s'agit pas là d'une déclaration ordinaire, mais bien d'un appel à l'aide venant de chef de nos forces armées après une décennie de négligence et d'abus.
Le président libéral du Comité sénatorial de la défense a décrit nos forces armées comme étant désespérées et incapables de s'acquitter des obligations internationales de base. Voici ce que le sénateur a dit:
Les Canadiens sont-ils vraiment contents d'être réputés, à l'échelle mondiale, comme étant des pique-assiettes et des gens qui ne portent pas leur part du fardeau? |
C'est le sénateur Kenny, un libéral, qui a dit cela. Le premier ministre est-il d'accord avec son ami le sénateur Kenny?
L'hon. Bill Graham (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, encore une fois, le président du comité sénatorial cherche activement à obtenir des ressources supplémentaires pour les forces armées, et notre gouvernement ne fait pas la sourde oreille. C'est pourquoi, dans notre programme électoral, nous avons promis d'accroître la taille de nos forces de réserve et de nos forces d'active. C'est aussi pourquoi, au cours des dernières années, nous avons promis 7 milliards de dollars de plus au titre des dépenses de capital pour les forces armées.
Nous sommes sur la bonne voie. Nous avons amorcé le virage. Nous accroissons la taille de nos forces armées. Nous augmentons leur capacité à remplir leur rôle exceptionnel de gardiens de la paix partout dans le monde.
M. Peter MacKay (Nova-Centre, PCC): Monsieur le Président, dans de nombreux rapports, le sénateur Colin Kenny, un libéral, et le Comité sénatorial de la défense nationale ont exprimé de l'inquiétude devant le manque d'engagement envers l'armée. Ils ont réclamé une augmentation marquée du budget du ministère de la Défense nationale.
Dans le rapport de 2003, le sénateur s'est dit d'avis que le premier ministre actuel n'était pas à la veille de se porter à la rescousse de l'armée. Hier, dans le Guardian de Charlottetown, le sénateur a déclaré que le gouvernement n'avait absolument rien fait d'autre que de parler de mieux soutenir l'armée canadienne mal en point et que le premier ministre avait passé beaucoup plus de temps à parcourir la planète qu'à travailler à redonner au Canada un rôle de premier plan sur la scène mondiale.
Est-ce que le gouvernement s'engage à augmenter le budget de l'armée dans le prochain budget?
L'hon. Bill Graham (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, il est évident que le ministre des Finances envisage de prévoir dans le budget exactement ce qu'il faut pour répondre aux besoins de l'armée canadienne et aux autres besoins du gouvernement du Canada.
Je travaille personnellement avec le ministre des Finances. Nous travaillons tous avec lui pour nous assurer que le budget sera bien équilibré pour les Forces canadiennes au moment où nous nous apprêtons à atteindre l'objectif du premier ministre, qui est de nous assurer que le Canada peut aider un monde qui a bien besoin de lui.
M. Peter MacKay (Nova-Centre, PCC): Monsieur le Président, ces paroles sonnent creux.
Le sénateur Kenny a également critiqué le projet du gouvernement d'augmenter de 5 000 le nombre de militaires des Forces canadiennes. Il a déclaré que cela ferait très peu pour aider l'armée canadienne à relever les défis qui l'attendent et que le gouvernement devait soit commencer à investir sérieusement dans la défense soit cesser d'assister aux réunions de l'OTAN, du G-8 ou de l'ONU parce que nous n'avons rien à y offrir.
Le nouveau chef d'état-major de la défense, le général Hillier, a exhorté franchement le gouvernement à augmenter les dépenses militaires s'il veut respecter ses engagements. Est-ce que le gouvernement va se décider à contrer l'image qu'il projette de plus en plus d'un pays qui veut garder une stratégie de défense minable, à cesser d'hésiter et à augmenter dès maintenant le budget de la défense?
L'hon. Bill Graham (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, je remercie très sincèrement les députés de l'opposition pour certains de leurs arguments en faveur de l'augmentation du budget de la défense. Je peux leur affirmer que le premier ministre et le ministre des Finances travaillent ensemble pour présenter un budget équilibré pour le Canada, notamment pour les Forces armées.
Je pars demain pour une réunion de l'OTAN qui aura lieu mercredi. Je peux rassurer le député en lui disant que l'OTAN est extrêmement reconnaissante de l'aide que nous apportons en Afghanistan. Cette organisation attend plus d'aide de la part du Canada, mais nos vis-à-vis n'ont pas à s'inquiéter. L'OTAN et nos alliés nous apprécient. Le rôle que le Canada joue dans le monde est très apprécié.
* * *
[Français]
L'environnement
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, le gouvernement a trop misé sur la bonne foi des grands pollueurs pour atteindre les objectifs de Kyoto. Ce fut une grave erreur. À preuve, le président de l'Association canadienne des constructeurs de véhicules, Mark Nantais, parle d'une entente avec Ottawa si possible. Il ajoute que son industrie ne se sent aucunement liée par l'entrée en vigueur du protocole dans 10 jours.
Puisque l'approche volontaire est un échec, pourquoi le premier ministre ne sert-il pas la vis dès maintenant aux constructeurs automobiles qui refusent de faire leur part pour réduire les émissions de gaz à effet de serre?
L'hon. Stéphane Dion (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, je ne sais pas où le chef du Bloc va trouver l'information à l'effet qu'ils refusent de faire leur part. Nous sommes en négociation avec les gens de l'industrie automobile. Bien entendu, nous préférons avoir une entente avec eux afin qu'ils fassent leur part dans le plan pour Kyoto. Ces négociations ne sont pas conclues. Je ne vois pas pourquoi le député conclut déjà lui-même à l'échec.
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, quand le président de l'association parle d'une entente si possible et qu'il ne se sent pas lié par le Protocole de Kyoto, je ne sais pas ce qu'il faut de plus au ministre pour comprendre.
Je demande ceci au premier ministre. Le Protocole de Kyoto entre en vigueur la semaine prochaine; les grands pollueurs refusent, dans les faits, de collaborer, tandis que le gouvernement ne prend pas ses responsabilités. Le premier ministre a tout fait pour empêcher le gouvernement précédent d'adopter le Protocole de Kyoto. Quand va-t-il enfin faire preuve de leadership et adopter les mesures qui s'imposent pour forcer l'industrie à réduire ses émissions de gaz à effet de serre, comme le demandent 92 p. 100 des Québécois?
[Traduction]
L'hon. R. John Efford (ministre des Ressources naturelles, Lib.): Monsieur le Président, je ne sais pas où le député prend son information. Elle diffère de celle que le ministre de l'Environnement et moi avons reçue de l'industrie automobile. En fait, nous avons eu une excellente discussion. J'ai bon espoir que, en collaborant avec l'industrie automobile, il nous sera possible de respecter nos obligations.
Avant de présenter de l'information à la Chambre et de poser une autre question reposant sur des données fausses, le député devrait vérifier l'exactitude de l'information dont il dispose.
[Français]
M. Michel Gauthier (Roberval—Lac-Saint-Jean, BQ): Monsieur le Président, le 19 novembre dernier, le ministre de l'Environnement indiquait à son homologue québécois qu'il y aurait nécessité d'accélérer le rythme des négociations en vue d'arriver à une entente avec Québec sur l'application du Protocole de Kyoto.
Comme le 16 février correspond à la date d'entrée en vigueur de ce protocole, le ministre de l'Environnement peut-il nous dire quel est le résultat de cette accélération des négociations dont il parlait au mois de novembre? A-t-on signé un protocole bilatéral avec Québec au moment où l'on se parle?
L'hon. Stéphane Dion (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, il est certain que dans l'amélioration de notre plan pour Kyoto, il y aura aussi amélioration de notre capacité d'agir avec les gouvernements des provinces. Nous avons des ententes avec certaines provinces. Celle avec le gouvernement du Québec progresse très bien, d'autant mieux que le Bloc ne s'en mêle pas.
M. Michel Gauthier (Roberval—Lac-Saint-Jean, BQ): Monsieur le Président, je ne comprends pas l'attitude du ministre. Quand on parle de protéger l'environnement, c'est au-delà des partis et des personnes. C'est un objectif de la société. Cela fonctionnerait beaucoup mieux s'il cessait de politiser ce dossier et s'il faisait son travail.
Le ministre va-t-il reconnaître et accepter les efforts qu'a faits le Québec et l'argent investi dans l'hydroélectricité? Va-t-il reconnaître, dans son entente bilatérale, le fait que le Québec est l'endroit où l'on pollue le moins et où l'on émet le moins de gaz à effet de serre par habitant au Canada? Tiendra-t-il compte de cela?
L'hon. Stéphane Dion (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, vous savez qu'en effet le Bloc québécois va arrêter de tout politiser mais cela lui est difficile quand on sait que son objectif est de faire en sorte que le Québec sorte du Canada.
* * *
[Traduction]
L'Irak
M. Jack Layton (Toronto—Danforth, NPD): Monsieur le Président, il faut comprendre que les Canadiens soient un peu confus ce matin face à la réaction suscitée par la proposition de George Bush et d'autres suggérant aux Canadiens d'envoyer des troupes en Irak. Le chef du Parti conservateur ne semble pas d'accord. Pourtant, il avait demandé d'envoyer des soldats canadiens en Irak. Quant au gouvernement du Canada, il tergiverse sur la question après en avoir fait un argument de sa campagne électorale.
Le premier ministre respectera-t-il l'engagement qu'il a pris envers le Parlement de tenir un vote à la Chambre avant d'envoyer des soldats canadiens en Irak?
Le très hon. Paul Martin (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, il y a deux ans, nous avons refusé d'envoyer des soldats canadiens en Irak. Nous maintenons cette décision. Les soldats canadiens n'iront pas en Irak.
[Français]
Soyons très clairs, je vais répéter. Nous avions refusé, il y a deux ans, d'envoyer des troupes canadiennes en Irak. Cette décision demeure telle quelle. Les troupes canadiennes n'iront pas en Irak.
[Traduction]
M. Jack Layton: Monsieur le Président, je remercie le premier ministre de sa réponse. Nous attendons qu'il prenne le même engagement de non-participation à l'égard du bouclier antimissile de l'administration de George Bush et nous demandons que le Parlement vote à ce sujet. Cela fait des mois que nous attendons.
* * *
[Français]
L'environnement
M. Jack Layton (Toronto—Danforth, NPD): Monsieur le Président, concernant un autre dossier, nous attendons une action en ce qui a trait à la pollution. Ici, il y a du smog au mois de février. C'est absolument incroyable. Nous n'avons pas encore de normes pour les émissions des automobiles, nous n'avons pas de plans pour les gros pollueurs, et nous avons du smog au mois de février.
Est-ce que le premier ministre peut nous dire s'il est acceptable d'avoir de l'argent...
Le Président: L'honorable ministre de l'Environnement a la parole.
L'hon. Stéphane Dion (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, le préambule était trop long, je n'ai pas entendu la question. Toutefois ce qu'on peut dire concernant le smog, c'est que le problème actuel, dans la région de Montréal, est principalement dû à la croissance d'utilisation du chauffage au bois. Effectivement, avec le gouvernement du Québec, nous regardons ce qui peut être fait pour changer les habitudes qui ont été prises au fil des années à ce sujet.
En ce qui concerne la pollution en général, je veux dire que les chiffres du chef du Nouveau Parti démocratique sont complètement faux. La diminution de la pollution de l'air est frappante au Canada.
* * *
[Traduction]
La défense nationale
M. Gordon O'Connor (Carleton—Mississippi Mills, PCC): Monsieur le Président, le gouvernement a mis deux semaines à envoyer la DART au Sri Lanka, à bord d'un avion commercial nolisé. Ce retard est le résultat de l'hésitation politique et d'une capacité de transport aérien insuffisante. Faute de pouvoir déplacer rapidement la DART, les Forces canadiennes vont demeurer tributaires, au cours des années à venir, de vols commerciaux peu fiables.
Pourquoi les gouvernements libéraux successifs ont-ils négligé ce besoin fondamental des Forces canadiennes?
L'hon. Bill Graham (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, la question repose sur deux fausses prémisses.
Tout d'abord, il est faux de dire que nous n'avons pas envoyé la DART à cause d'une capacité de transport aérien insuffisante. Nous l'avons envoyée au moment opportun.
Deuxièmement, il n'est jamais arrivé, et je pense que le député le sait, que nous ne puissions avoir accès à un nombre suffisant d'avions nolisés pour transporter nos forces à l'étranger. Au lieu de dépenser des sommes considérables pour l'acquisition de moyens de transport qui seraient utilisés de manière intermittente, nous avons opté pour la solution la plus prudente, la plus éclairée et la plus efficace, et nous continuerons de le faire dans l'intérêt des Forces canadiennes.
M. Gordon O'Connor (Carleton—Mississippi Mills, PCC): Monsieur le Président, voilà un bel exemple de caquetage. Les gouvernements libéraux successifs se sont montrés incapables de protéger notre souveraineté dans le Nord...
Des voix: Oh, oh!
Le Président: Il y a trop de baragouin à la Chambre. Le bruit incessant empêche le député de Carleton—Mississippi Mills de s'entendre lui-même, sans parler des autres. J'ai de la difficulté à entendre. Le député de Carleton—Mississippi Mills a la parole. Je demande aux députés d'être un peu moins bruyants.
M. Gordon O'Connor: Monsieur le Président, les gouvernements libéraux successifs se sont montrés incapables de protéger notre souveraineté dans le Nord. Nous n'avons pas les moyens d'assurer une surveillance continuelle de notre territoire. Nous sommes incapables de transporter rapidement nos troupes vers le Nord. Et voilà que nous apprenons que nos hélicoptères Sea King ne sont pas en mesure de voler dans cette région du pays. À cause de l'ingérence politique, les hélicoptères de remplacement ne pourront pas être livrés avant 2008 ou 2009.
Le ministre va-t-il reconnaître que les politiques libérales ont nui à notre capacité de protéger la souveraineté du Canada?
L'hon. Bill Graham (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, je ne doute pas que le député se réjouira, comme moi, du fait que nous avons opté pour le Cyclone. Nous sommes impatients de l'acquérir. En attendant, les Sea King continuent de faire leur travail. Nous en assurons l'entretien. Nous les utilisons et continuerons de le faire dans toutes les conditions. Ces hélicoptères servent bien notre pays, mais nous avons cependant hâte de les remplacer par les Cyclone, qui constitueront un atout formidable pour nos forces armées.
M. Dave MacKenzie (Oxford, PCC): Monsieur le Président, quelques jours à peine après sa nomination au poste de chef d'état-major de la défense, le général Rick Hillier a mis un terme à l'examen de la politique de défense actuel, qui a été qualifié d'ennuyeux, d'aride et de lamentable. Le ministre a reporté à plusieurs reprises le dépôt du rapport d'examen à la Chambre. Or, on apprend maintenant que l'exercice va reprendre à zéro.
Le ministre de la Défense nationale appuie maintenant pleinement la refonte du plan détaillé de la défense, auquel il souhaite voir apporter des idées nouvelles. Le ministre peut-il expliquer ce virage à 180 degrés?
L'hon. Bill Graham (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, je reconnais que les documents que je rédige sont souvent ennuyeux, arides et pas très intéressants, mais c'est là un problème personnel. L'examen de la défense est le fruit du travail de nombreuses personnes dans mon ministère. Nous y avons travaillé fort.
Je suis enchanté que le général Hillier, qui est maintenant de la partie, contribue à faire de ce document l'un des meilleurs qui soient. J'attends avec impatience la publication de notre ED...
Des voix: Oh, oh!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Je croyais qu'il y avait trop de baragouin à la Chambre. Le ministre a la parole; il répond à la question qui lui a été posée.
L'hon. Bill Graham: Monsieur le Président, les députés reconnaîtront certainement la différence entre des propos ennuyeux et un caquetage de haut vol.
* * *
Les affaires étrangères
M. Dave MacKenzie (Oxford, PCC): Monsieur le Président, après une campagne de presque dix ans pour devenir premier ministre, après d'innombrables discussions et tables rondes sur la politique et après un an de travail bureaucratique sur l'examen de la politique étrangère, le premier ministre vient de renvoyer le document tant attendu et de faire appel à un universitaire libéral pour donner plus de tonus au document. Quelle forme la politique étrangère du Canada devrait-elle prendre, aux yeux du premier ministre? Nous ne le savons toujours pas.
Le premier ministre peut-il dire à la Chambre quand le document remanié sera prêt et combien cela coûtera?
L'hon. Dan McTeague (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, le député sait, comme tous les autres députés, que le monde a profondément changé depuis 35 ou 40 jours. Il y a eu les incidents survenus en Ukraine et, bien entendu, le tsunami.
Il est important de consulter le monde entier, tous les spécialistes, pour proposer une bonne politique. Le député ne doit certainement pas vouloir qu'on précipite la publication d'un document aussi important, si, comme je le crois, il le prend très au sérieux et veut qu'on le traite en conséquence.
* * *
[Français]
Les congés parentaux
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, des négociations intensives en vue de signer une entente avec Québec sur les congés parentaux devaient se tenir en fin de semaine.
Comment la ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences peut-elle justifier que le principe du plein financement du programme pour la première année, qui avait fait l'objet d'un accord en 1997, soit aujourd'hui remis en question par son gouvernement?
L'hon. Lucienne Robillard (présidente du Conseil privé de la Reine pour le Canada, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences, Lib.): Monsieur le Président, les discussions se continuent avec le gouvernement du Québec, soit avec mon collègue, le ministre Claude Béchard. Nous espérons en arriver à une conclusion dans un proche avenir.
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, contrairement à ce qu'affirmait la ministre, si l'entente n'est pas signée sous peu, ce sont des milliers de familles qui n'auront pas accès, en janvier 2006, au régime québécois des congés parentaux, qui est pourtant plus généreux.
Comment la ministre peut-elle remettre en question le principe accepté en 1997 et porter ainsi un préjudice sérieux à 8 000 familles qui risquent d'être victimes de son recul?
L'hon. Lucienne Robillard (présidente du Conseil privé de la Reine pour le Canada, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences, Lib.): Monsieur le Président, nous appuyons l'approche assez novatrice du gouvernement du Québec en matière de congé parental, et c'est pourquoi les discussions se continuent à l'heure actuelle avec mon collègue.
Encore une fois, nous espérons en arriver à une conclusion dans un proche avenir.
* * *
La fiscalité
Mme Paule Brunelle (Trois-Rivières, BQ): Monsieur le Président, l'économiste Armine Yalnizyan a examiné les budgets fédéraux des 10 dernières années. L'étude démontre, chiffres à l'appui, que les femmes ont été indûment pénalisées pendant les années où Ottawa enregistrait des déficits et qu'elles sont largement laissées pour compte depuis que le fédéral a enregistré des surplus budgétaires.
Comment expliquer aux femmes que les décisions budgétaires du gouvernement libéral ont toujours été prises au détriment des femmes et des programmes sociaux? N'est-ce pas un constat honteux pour l'actuel premier ministre?
[Traduction]
L'hon. Ralph Goodale (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, je dois dire avec le plus grand respect que le gouvernement a travaillé très fort sur les questions d'égalité entre les sexes. Par exemple, lorsque nous avons étudié les propositions de politique présentées en prévision du budget que je suis en train de préparer, j'ai demandé à mes collaborateurs de me remettre pour chaque mesure budgétaire une analyse montrant qu'on a tenu compte des conséquences pour les deux sexes. Il est très important d'intégrer ce genre de principe à la prise des décisions à l'intérieur du gouvernement.
[Français]
Mme Paule Brunelle (Trois-Rivières, BQ): Monsieur le Président, je suis heureuse de savoir qu'il y aura une analyse en faveur de l'égalité des genres. Toutefois, est-ce que le ministre des Finances peut nous assurer que les engagements pris par le gouvernement d'Ottawa à la conférence de Pékin, en 1995, seront respectés lors du prochain budget?
[Traduction]
L'hon. Ralph Goodale (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, je vais faire de mon mieux pour respecter les principes de l'égalité entre les sexes dans la préparation du budget et de tous les budgets qui suivront. Je suis très heureux que le gouvernement ait été un chef de file dans des dossiers comme la prestation fiscale pour enfants, les garderies et diverses autres mesures qui témoignent du grand sérieux avec lequel nous abordons l'égalité des sexes.
* * *
[Français]
Le programme des commandites
M. James Moore (Port Moody—Westwood—Port Coquitlam, PCC): Monsieur le Président, Jean Carle, le protégé de Jean Chrétien a admis, vendredi, qu'une transaction des commandites de 125 000 $ était un blanchiment d'argent. On parle ici d'une offense criminelle.
Le premier ministre nous a promis la justice. Va-t-il vraiment chercher les coupables si cela inclut les deux Jean, Carle et Chrétien?
[Traduction]
L'hon. Scott Brison (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, je rappelle qu'il ne convient pas de parler de témoignages particuliers. De plus, récemment, 130 des juristes les plus respectés au Canada ont envoyé une lettre au chef du Parti conservateur lui indiquant qu'il ne comprend pas les lois du pays.
Si lui-même ne comprend pas les lois du pays, son parti ne devrait pas tenter de mener une enquête judiciaire parallèle à la Chambre des communes.
M. James Moore (Port Moody—Westwood—Port Coquitlam, PCC): Monsieur le Président, vendredi dernier, Alfonso Gagliano, qui était membre du Cabinet dont faisait partie l'actuel premier ministre, a dit, à propos du rôle de ce dernier dans le scandale des commandites: « Il était là, il participait et donnait son accord. Tous les ministres étaient d'accord sur la stratégie. » Jean Carle a admis que ce programme équivalait à une opération de blanchiment d'argent.
Quand le premier ministre témoignera devant la commission, s'engage-t-il à être plus honnête avec le juge Gomery qu'il ne l'a été avec la Chambre ou avec la population canadienne?
Des voix: Oh, oh!
Le Président: À l'ordre s'il-vous-plaît. Comme le député le sait très bien, tous les députés disent toujours la vérité dans cette enceinte. Le simple fait de laisser entendre qu'un député a fait de fausses affirmations va bien au-delà de ce qui est accepté au Parlement. Passons à la prochaine question.
Mme Helena Guergis (Simcoe—Grey, PCC): Monsieur le Président, il semble bien évident que le programme de commandites n'était rien de plus qu'une vache à lait pour les partisans du Parti libéral. M. Jacques Corriveau s'est plaint de ne pas avoir été payé pour le travail qu'il a effectué pendant les élections de 1997. Il a donc reçu des millions de dollars provenant de l'argent durement gagné par les contribuables pour des contrats du programme de commandites.
Quand le premier ministre va-t-il ordonner au Parti libéral de rembourser l'argent des contribuables?
L'hon. Scott Brison (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, une commission d'enquête judiciaire présidée par le juge Gomery effectue ses travaux quotidiennement et atteint l'objectif que visent les Canadiens, à savoir découvrir la vérité sur cette question.
Si cette commission d'enquête existe et que la députée peut commenter les témoignages présentés au jour le jour, c'est parce que notre premier ministre a eu le courage de faire ce qui convenait, soit créer la Commission Gomery et prendre des mesures pour obtenir ces renseignements.
Je suis absolument consterné que l'opposition, le Parti conservateur, ne comprenne ni la Charte des droits, ni la Constitution, ni même la nature indépendante d'une commission d'enquête judiciaire.
Mme Helena Guergis (Simcoe—Grey, PCC): Monsieur le Président, la Commission Gomery n'est pas quelque chose dont le Parti libéral peut s'enorgueillir. Le gouvernement ne l'a créée que parce qu'il s'est fait prendre. En dépit de ce qu'affirment le premier ministre ou ses copains, la vérificatrice générale nous a dit que des millions de dollars provenant de l'argent des contribuables sont manquants et que les Canadiens ont le droit de récupérer cet argent.
Quand le premier ministre ordonnera-t-il le remboursement aux Canadiens de l'argent que ses acolytes ont détourné pour financer ses campagnes?
L'hon. Scott Brison (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, les Canadiens qui regardent cette période des questions doivent être perplexes de constater que l'opposition, le Parti conservateur, ne pose pas de questions qui les intéressent.
Pourquoi ne pose-t-il pas de questions au sujet de la santé, de l'agriculture, de dossiers qui importent vraiment aux yeux des Canadiens, au lieu de crier au scandale? Pourquoi ne laisse-t-il pas le juge Gomery faire son travail?
* * *
La santé
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, la consommation d'alcool par les femmes enceintes est la principale cause reconnue de déficience mentale au Canada. Les chercheurs croient également que 50 p. 100 des détenus des prisons canadiennes souffrent du syndrome d'alcoolisation foetale ou de malformations congénitales causées par l'alcool.
Ma question s'adresse au ministre de la Santé. Pourrait-il préciser à la Chambre si le syndrome d'alcoolisation foetale figure parmi les priorités de Santé Canada? Si c'est le cas, quelles initiatives sont prévues pour contrer la tragédie de plus en plus fréquente bien qu'évitable du syndrome d'alcoolisation foetale?
L'hon. Ujjal Dosanjh (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à féliciter le député pour tout le travail qu'il a accompli depuis quelques années. Il a saisi la Chambre du projet de loi C-206 et je veux lui donner l'assurance que nous appuierons le projet de loi.
Je veux également informer la Chambre que Santé Canada est en train d'élaborer une stratégie d'ensemble sur l'EFA et les autres problèmes reliés à l'alcoolisme, qui ont des incidences sociales et économiques dans tous les coins du pays.
* * *
Le logement
L'hon. Ed Broadbent (Ottawa-Centre, NPD): Monsieur le Président, j'ai une question pour le ministre des Finances.
Dans les années 1990, les libéraux ont complètement détruit le programme national de l'habitation. De ce fait, bon nombre d'enfants vivent aujourd'hui dans la pauvreté par suite de l'état terrible du logement. Particulièrement dans cette ville, quelque 13 000 familles attendent un logement abordable.
Est-ce que, dans le prochain budget, le ministre va ramener le budget du logement à ce qu'il était avant 1993? Va-t-il garantir 25 000 unités de logement abordable?
L'hon. Joe Fontana (ministre du Travail et du Logement, Lib.): Monsieur le Président, au contraire, c'est le gouvernement fédéral qui croit que le logement constitue le fondement de communautés, de familles et de populations vigoureuses. En fait, c'est l'actuel gouvernement qui investit 2 milliards de dollars chaque année pour venir en aide à 636 000 Canadiens. C'est l'actuel gouvernement qui a engagé un milliard de dollars pour lutter contre l'itinérance. C'est l'actuel gouvernement qui a affecté 1 milliard de dollars au logement abordable.
* * *
La pauvreté chez les enfants
L'hon. Ed Broadbent (Ottawa-Centre, NPD): Monsieur le Président, c'est ce gouvernement qui, dans les années 1990, est devenu le seul gouvernement du monde industrialisé, le seul des leaders du monde industriel, à ne pas avoir un programme national du logement.
Si des enfants vivent dans la pauvreté, c'est aussi parce que bon nombre de leurs familles, même si leurs deux parents travaillent, ne gagnent pas assez pour acheter les vêtements et les aliments dont ils ont besoin. Ma question au ministre des Finances est la suivante: va-t-il s'attaquer à ce problème dans le prochain budget et au moins porter la prestation fiscale pour enfants à 4 900 $?
L'hon. Ralph Goodale (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement s'enorgueillit beaucoup d'avoir créé la prestation fiscale pour enfants. Ce programme est en train de devenir un des principaux programmes sociaux de notre pays. Il est en voie de dépasser le seuil des 10 milliards de dollars par année. Nous allons continuer, à chaque occasion, de tenter de le bonifier.
* * *
Les travaux publics et les services gouvernementaux
M. Monte Solberg (Medicine Hat, PCC): Monsieur le Président, le ministre responsable des épinglettes change sans cesse son fusil d'épaule. Il a déclaré au départ que les limites de notre accord commercial l'avaient forcé à acheter ces épinglettes en Chine. Il est ensuite allé dans les ateliers de pressurage à Travaux publics et il a découvert que ce n'était pas vraiment la politique et que ces épinglettes pouvaient maintenant être fabriquées au Canada. Il ne semble pas avoir la moindre idée de ce qui se passe dans son propre ministère.
Je me demande ce qu'on retrouve aujourd'hui à l'endos de la serviette de papier. Les épinglettes seront-elles fabriquées au Canada ou en Chine?
L'hon. Scott Brison (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, je suppose que je devrais expliquer la décision très lentement au député, car il est évident qu'il ne porte pas attention.
J'ai déclaré qu'en tant que gouvernement, nous devions respecter nos règles commerciales, ce qui signifie que nous devons respecter le principe du traitement national et, de ce fait, nous conformer aux règles commerciales pertinentes lorsque nous achetons de tels articles pour les Canadiens et les parlementaires. Il existe une exemption pour les achats parlementaires et nous achèterons donc les épinglettes destinées aux parlementaires à des fabricants établis au Canada.
M. Monte Solberg (Medicine Hat, PCC): Monsieur le Président, toutes les prétentions du ministre au sujet de ce qu'il peut faire ou ne peut pas faire sont remises en question. Il prétend depuis un certain temps déjà que ses points de vue sur le scandale des commandites sont tellement importants que, s'il donnait son opinion, cela nuirait à toute l'enquête. Un petit peu d'humilité, je vous en prie.
N'est-il pas vrai que c'est une autre position forgée à la va-vite par le ministre responsable des épinglettes?
L'hon. Scott Brison (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, je le répète, en tant que gouvernement, nous respecterons les paramètres de nos accords commerciaux. En même temps, nous chercherons à l'intérieur de ces accords à obtenir des exemptions nous permettant d'acheter à des fabricants canadiens. Il est important de savoir que l'entreprise concernée était une société canadienne qui se procurait les épinglettes chez un fabricant chinois.
De plus, je suis consterné de voir maintenant que ce parti, le Parti conservateur, s'oppose semble-t-il au respect de nos accords commerciaux. Comme je l'ai dit l'autre jour, je savais qu'il n'était plus progressiste. Maintenant, je sais qu'il n'est même pas conservateur.
* * *
Le Sénat
M. Ken Epp (Edmonton—Sherwood Park, PCC): Monsieur le Président, j'en ai assez d'entendre le premier ministre dire qu'il appuie la réforme du Sénat, mais pas à la pièce.
Les Albertains ne veulent pas de changement; au contraire, ils veulent que le premier ministre continue de nommer les sénateurs à partir d'une liste de candidats. Tout ce qu'ils demandent, c'est que la liste qu'il utilise soit celle qu'ils lui fournissent par voie démocratique. Ils n'acceptent pas cette attitude arrogante et dominatrice du premier ministre, qui croit mieux savoir que les Albertains qui ils veulent pour les représenter au Sénat.
Pourquoi le premier ministre n'arrête-t-il pas d'être aussi timoré et ne comble-t-il pas les vacances à partir de la liste de la population?
L'hon. Mauril Bélanger (leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes, ministre responsable des langues officielles, ministre responsable de la réforme démocratique et ministre associé de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, j'ai un peu de difficulté avec l'affirmation selon laquelle l'Alberta ne demande aucun changement. C'est bien le contraire.
Quoi qu'il en soit, l'Alberta fait partie du Conseil de la fédération, un organisme créé par les provinces. Deux premiers ministres provinciaux ont reçu comme mandat du Conseil de la fédération d'examiner la question du Sénat. Ils étudient actuellement la question et n'ont pas encore fait rapport. Attendons de voir si un consensus se dégagera au sein de cet organisme au sujet du Sénat; nous verrons alors ce qu'il conviendra de faire.
* * *
Les travaux publics et les services gouvernementaux
M. Monte Solberg (Medicine Hat, PCC): Monsieur le Président, le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux aime bien parler à l'emporte-pièce de son expérience commerciale à l'échelle internationale, mais celle-ci semble s'être limitée à vendre des frigos à bière aux étudiants universitaires. J'imagine qu'on pourrait dire qu'il a brassé plus de bière que d'affaires.
N'est-il pas vrai que le ministre responsable des épinglettes n'a pas la moindre idée de la teneur de la politique concernant les achats parlementaires?
L'hon. Scott Brison (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, il serait plus juste de dire que le député n'a pas la moindre idée de ce que supposent nos accords commerciaux ou nos achats parlementaires.
Comme nous l'avons dit dès le début, notre gouvernement s'efforcera de respecter nos accords commerciaux. Nous respecterons le principe du traitement national parce que nos accords commerciaux visent à protéger les emplois au Canada et les manufacturiers canadiens qui soutiennent la concurrence partout dans le monde.
Même Ken Georgetti est maintenant en faveur du libre-échange. Je suis consterné de voir que ce n'est pas le cas du député. Le libre-échange a créé 1,8 million d'emplois au Canada dans les six ans qui ont suivi l'entrée en vigueur de l'ALENA. Cette volte-face est étonnante de la part du Parti conservateur, qui ne s'oppose plus aux aspects progressistes...
Le Président: Le député de Louis-Saint-Laurent a la parole.
* * *
[Français]
Les affaires autochtones
M. Bernard Cleary (Louis-Saint-Laurent, BQ): Monsieur le Président, le 7 février marque le troisième anniversaire de la signature de la Paix des braves entre le Québec et la nation crie. L'entente exclut toute poursuite judiciaire, et les Cris, qui veulent une entente du même genre avec Ottawa, constatent que le négociateur fédéral n'a toujours pas de mandat, ce qui risque de faire avorter toute l'affaire.
Qu'attend le gouvernement fédéral pour montrer sa bonne foi et donner un mandat clair à son négociateur?
[Traduction]
L'hon. Ethel Blondin-Andrew (ministre d'État (Nord canadien), Lib.): Monsieur le Président, au fil des ans, nous avons effectué un travail colossal relativement aux accords conclus entre les Cris et le gouvernement fédéral. Nous continuerons ce travail. Nous prendrons en considération toute suggestion du député et nous poursuivrons nos efforts dans ce dossier.
[Français]
M. Bernard Cleary (Louis-Saint-Laurent, BQ): Monsieur le Président, j'ai une question additionnelle. Tout délai peut retarder l'application de certaines parties de l'entente signée entre le Québec et la nation crie. S'il n'y a pas de progrès significatif d'ici le 31 mars, les Cris pourraient retourner devant les tribunaux pour faire valoir leurs revendications.
Qu'attend le gouvernement fédéral pour imiter le Québec et signer une entente de nation à nation avec les Cris?
[Traduction]
L'hon. Ethel Blondin-Andrew (ministre d'État (Nord canadien), Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement fédéral travaille en permanence avec les Cris. Nous avons déjà signé des accords avec eux. Un processus de mise en application est en place. Nous avons créé une table de négociation avec les Cris il y a des années, et beaucoup d'énergie et de ressources ont été déployées à cette fin. Nous continuerons notre travail en ce sens. Le recours aux tribunaux n'est pas la solution. Nous poursuivrons notre travail afin de trouver une solution aux problèmes signalés par les Cris.
* * *
Les Forces canadiennes
Mme Cheryl Gallant (Renfrew—Nipissing—Pembroke, PCC): Monsieur le Président, compte tenu de l'accroissement du coût des vivres, des loyers et de la contribution-santé illégale de l'Ontario, les soldats ont besoin de l'augmentation de salaire qui leur a été promise l'année dernière. On leur dit maintenant d'attendre encore, car l'argent nécessaire n'est pas disponible. En fait, le salaire net des soldats a diminué.
Pourquoi le ministre refuse-t-il de prendre position en faveur des soldats et de demander le remboursement de la contribution-santé illégale introduite par les libéraux de l'Ontario?
L'hon. Reg Alcock (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, Lib.): Monsieur le Président, le ministre a pris la défense des militaires et il a insisté énergiquement pour que leurs salaires soient augmentés. Des informations à ce sujet seront communiquées sous peu.
* * *
Le programme de péréquation
M. Brian Fitzpatrick (Prince Albert, PCC): Monsieur le Président, la formule de péréquation libérale est très inéquitable envers la Saskatchewan. Par exemple, le Manitoba a une population à peu près égale à celle de la Saskatchewan, mais un revenu par habitant plus élevé de 1 500 $.
Or, que touche le Manitoba en vertu de la formule de péréquation? Plus de 1,4 milliard de dollars. Quelle est la part de la Saskatchewan? Seulement 77 millions de dollars. C'est une insulte.
Pourquoi le ministre des Finances refuse-t-il d'offrir à la Saskatchewan le même accord de péréquation qu'il a récemment conclu avec Terre-Neuve-et-Labrador?
L'hon. Ralph Goodale (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, l'intérêt tout nouveau que le Parti conservateur manifeste pour la péréquation est franchement incroyable. C'est ce même parti qui, il y a de nombreuses années, militait en faveur de l'abolition pure et simple du programme de péréquation. Il n'en avait que faire à l'époque. Et voici qu'il s'y intéresse soudainement.
Le plus gros problème de la Saskatchewan n'est pas la péréquation. Depuis 15 ans, la Saskatchewan croule sous la dette que lui a imposée le gouvernement conservateur de Grant Devine. C'est cela qui a jeté la Saskatchewan au tapis. C'est ce fardeau dont nous essayons de nous délivrer. Ce parti a vraiment tout un culot.
* * *
[Français]
Les langues officielles
L'hon. Don Boudria (Glengarry—Prescott—Russell, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux.
Le 20 janvier dernier, la commissaire aux langues officielles...
Des voix: Oh, oh!
L'hon. Don Boudria: Je pense que les langues officielles n'intéressent pas les gens d'en face.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! L'honorable député de Glengarry—Prescott—Russell a la parole.
L'hon. Don Boudria: Le vendredi 20 janvier dernier, la commissaire aux langues officielles dénonçait la lenteur du gouvernement à mettre en place des politiques visant à garantir la publicité gouvernementale dans la langue de la minorité.
Pourquoi le gouvernement a-t-il mis en oeuvre seulement cinq des dix-huit recommandations de la commissaire aux langues officielles et quand va-t-on adopter les treize autres?
L'hon. Scott Brison (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, mon ministère s'est engagé à accepter les recommandations de la commissaire qui s'appliquent à Travaux publics Canada. Trois de ces recommandations sont déjà en place, et les autres recommandations devraient être en place en mars.
Travaux publics Canada demeure entièrement engagé envers la promotion des langues officielles dans les communautés minoritaires.
* * *
[Traduction]
L'industrie pharmaceutique
M. Steven Fletcher (Charleswood—St. James—Assiniboia, PCC): Monsieur le Président, après avoir entendu un membre important de son propre parti lui demander de mettre un terme à ses projets irrationnels, le ministre de la Santé devrait maintenant savoir qu'il doit revoir son plan en vue de mettre un terme aux activités de l'industrie pharmaceutique canadienne en ligne. En effet, le président du Conseil du Trésor a dit espérer que le ministre de la Santé ne détruirait pas une industrie qui fournit des milliers d'emplois aux Canadiens.
Pourquoi le président du Conseil du Trésor se prononce-t-il sur des questions de santé qui devraient relever du ministre de la Santé? Qui est-ce qui mène cette barque?
L'hon. Ujjal Dosanjh (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, j'ai beaucoup parlé de cette question depuis un certain temps déjà. Le président du Conseil du Trésor et moi sommes du même avis à ce sujet. Ce que nous avons dit...
Des voix: Oh, oh!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Nous devons pouvoir entendre la réponse du ministre. Il essaie de nous expliquer son point de vue, mais il est difficile de l'entendre à cause du bruit. L'honorable ministre de la Santé a la parole.
L'hon. Ujjal Dosanjh: Monsieur le Président, il est clair que les députés d'en face ont du mal à comprendre certaines de mes explications.
Le président du Conseil du Trésor et moi avons dit très clairement que nous voulions que les Canadiens de partout au pays, y compris au Manitoba, aient accès à des services médicaux de qualité, basés sur de hautes valeurs éthiques. Nous verrons à ce que les pratiques médicales soient assurées en fonction...
Le Président: Le député de Charleswood St. James—Assiniboia a la parole.
M. Steven Fletcher (Charleswood—St. James—Assiniboia, PCC): Monsieur le Président, certaines personnes semblent avoir subi une lobotomie. Si c'est le ministre qui mène la barque, les réunions du Cabinet doivent ressembler à un échange de coups de feu dans une pièce plongée dans l'obscurité.
Le Toronto Star sait que le ministre cède aux pressions des Américains et qu'il semble résolu à prendre une décision avant que le Comité de la santé ne présente son rapport sur la question après l'avoir étudiée en profondeur, rigoureusement et dans des délais opportuns.
Le ministre respectera-t-il le processus parlementaire et permettra-t-il au comité de terminer son important travail, oui ou non?
L'hon. Ujjal Dosanjh (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, j'ai toujours dit que nous voulons protéger le système de prix dans notre pays. C'est le député d'en face qui a du mal à se brancher.
Le 1er décembre, en l'espace d'une minute, le député a d'abord dit que nous devions protéger le coût des produits pharmaceutiques dans l'intérêt des Canadiens. Deuxièmement, il a dit que nous devions tenir compte des retombées économiques d'une nouvelle industrie qui compte plus de 4 000 emplois. Troisièmement, il a dit que les permis d'exportation seraient un bon début. Quatrièmement, il a dit qu'ils seraient mauvais parce qu'ils pourraient entraîner la fermeture de cette industrie. Cinquièmement, il a dit qu'il nous fallait agir de manière non équivoque.
Il est temps que le député se branche.
* * *
[Français]
L'immigration
Mme Meili Faille (Vaudreuil-Soulanges, BQ): Monsieur le Président, Mohamed Cherfi est en détention aux États-Unis depuis que le Canada l'a renvoyé, après l'avoir expulsé d'une église de Québec. Depuis, un groupe de citoyens québécois tente de le parrainer. Des fonctionnaires d'Immigration Canada s'étaient engagés à donner une réponse au groupe le 7 janvier dernier. Un mois plus tard, la réponse se fait toujours attendre.
Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration peut-il nous expliquer pourquoi son ministère se traîne les pieds, retardant ainsi la décision de Québec concernant le statut de Mohamed Cherfi?
L'hon. Joseph Volpe (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, le cas est encore en train d'être étudié. Nous voulons prendre toutes les décisions de la façon la plus correcte possible. Je m'engage à lui donner une réponse qui soit conforme à tous les règlements du ministère.
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[Traduction]
L'industrie pharmaceutique
M. Russ Powers (Ancaster—Dundas—Flamborough—Westdale, Lib.): Monsieur le Président, la question des pharmacies sur Internet fait actuellement les manchettes. On a laissé entendre que le ministre de la Santé présenterait un projet de loi pour freiner leurs activités.
Le ministre de la Santé pourrait-il assurer aux Canadiens que notre approvisionnement de médicaments vendus au détail et en gros sera protégé si un projet de loi est présenté?
L'hon. Ujjal Dosanjh (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, c'est justement dans ce but que nous agirons: pour protéger la médecine en nous fondant sur une bonne éthique et pour protéger le régime d'établissement des prix afin que tous les Canadiens puissent avoir accès à des médicaments à des prix abordables.
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[Français]
Les Jeux mondiaux des policiers et des pompiers
M. Richard Marceau (Charlesbourg—Haute-Saint-Charles, BQ): Monsieur le Président, le gouvernement fédéral doit, depuis longtemps, compléter sa participation financière pour la tenue, à Québec cet été, des Jeux mondiaux des policiers et des pompiers.
Lors de sa récente visite à Québec, le ministre des Transports, responsable politique pour la région, s'est engagé à solliciter plusieurs ministères fédéraux pour arriver à dégager les 700 000 $ requis pour assurer le succès de cet événement d'envergure internationale.
Le ministre peut-il nous informer des résultats obtenus auprès de ses collègues ministres?
L'hon. Jacques Saada (ministre de l'Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec et ministre responsable de la Francophonie, Lib.): Monsieur le Président, dans ce dossier, il faut d'abord absolument prendre connaissance des projets concrets avant de se prononcer en détail sur ce qui est admissible ou non.
AFFAIRES COURANTES
[Affaires courantes]
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[Traduction]
Les soins de santé
L'hon. Ralph Goodale (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de déposer, dans les deux langues officielles, trois documents issus de la rencontre des premiers ministres du 13 au 15 septembre 2004 portant sur l'avenir des soins de santé, qui s'intitulent: Un plan décennal pour consolider les soins de santé, Fédéralisme asymétrique qui respecte les compétences du Québec, Améliorer l'état de santé des Autochtones: Rencontre des premiers ministres, des leaders territoriaux et des dirigeants autochtones.
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Nominations par décret
L'hon. Dominic LeBlanc (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, quelques décrets annonçant des nominations faites récemment par le gouvernement
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La Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces
L'hon. Ralph Goodale (ministre des Finances, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-39, Loi modifiant la Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces et édictant la Loi concernant l'octroi d'une aide financière à l'égard d'équipements diagnostiques et médicaux.
(Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
Délégations interparlementaires
L'hon. Peter Adams (secrétaire parlementaire de la ministre des Ressources humaines et du Développement des compétences, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 34(1) du Règlement, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le rapport de la délégation canadienne de l'Association parlementaire Canada-Europe concernant sa participation à la réunion du Comité permanent des parlementaires de la région de l'Arctique, tenue à Bruxelles (Belgique) du 28 au 30 novembre 2004.
Je tiens à remercier les membres du personnel de l'Association parlementaire Canada-Europe. Ces réunions avaient lieu dans le cadre des travaux du Conseil de l'Arctique, dont font partie les huit pays de la région polaire et trois grands groupes autochtones du Nord.
Les réunions ont surtout porté sur l'évaluation des répercussions climatiques du réchauffement de la planète sur le climat de l'Arctique. On y a également traité de l'Université de l'Arctique, qui bénéficie d'une participation canadienne d'envergure.
Je tiens à féliciter Clifford Lincoln, notre ancien collègue, de son excellent travail au sein de cette association durant de nombreuses années.
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Les comités de la Chambre
Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest—Nepean, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le septième rapport du Comité permanent du patrimoine canadien, qui porte sur les buts et les objectifs de la programmation de CBC et Radio-Canada.
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La Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales
M. John Maloney (Welland, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-323, Loi visant à modifier le nom de la circonscription électorale de Welland.
--Monsieur le Président, le projet de loi d'initiative parlementaire que je présente a pour but de changer le nom de ma circonscription électorale, qui s'appellerait désormais Niagara Sud--Centre au lieu de Welland.
Le nom « Welland » prête à confusion parce que la ville de Welland n'est que l'une des quatre municipalités régionales qui font partie de la circonscription, ainsi qu'une partie d'une cinquième municipalité. Je crois qu'il n'est pas juste que le nom de la circonscription désigne une seule de ces municipalités, sans compter que c'est une source de confusion pour les électeurs qui n'habitent pas dans la ville de Welland.
J'estime que le nom « Niagara Sud--Centre » serait un bon compromis. De plus, il n'est utilisé pour désigner aucune circonscription provinciale de la région actuellement.
(Les motions sont réputées adoptée, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
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Pétitions
M. Gary Goodyear (Cambridge, PCC): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36 du Règlement, je présente trois pétitions.
La première pétition demande au Parlement de protéger nos enfants en prenant toutes les mesures nécessaires pour que les documents et les images qui font la promotion ou l'apologie de la pédophilie ou du sado-masochisme impliquant des enfants soient déclarés illégaux.
* * *
M. Gary Goodyear (Cambridge, PCC): Monsieur le Président, les deuxième et troisième pétitions demandent au Parlement de respecter et de maintenir la loi qui définit actuellement le mariage comme l'union d'un homme et d'une femme à l'exclusion de toute autre forme d'union.
Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36 du Règlement, je présente une pétition au nom de la population des villages de Melbourne et Mount Brydges, dans la circonscription de Lambton—Kent—Middlesex.
Les pétitionnaires demandent instamment au Parlement de définir le mariage dans la loi fédérale comme l'union pour la vie d'un homme et d'une femme à l'exclusion de toute autre forme d'union.
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Mme Nina Grewal (Fleetwood—Port Kells, PCC): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter aujourd'hui une pétition signée par des électeurs de Fleetwood--Port Kells qui demandent que le gouvernement fédéral prenne immédiatement des mesures pour abaisser les paiements d'intérêt sur la dette et fasse des efforts sérieux pour rembourser cette dette dans un délai raisonnable.
Les pétitionnaires réclament également une enquête sur le gaspillage délibéré et sur ceux qui en ont profité.
* * *
M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, PCC): Monsieur le Président, j'ai l'honneur moi aussi de présenter une pétition. Elle provient de personnes d'Edmonton et des environs qui exhortent le Parlement à s'occuper du dossier des enfants autistes. Les pétitionnaires présentent deux demandes très précises, mais très longues, aussi ne les lirai-je pas ici. Cependant, ils exhortent le Parlement à s'occuper du dossier des enfants souffrant du trouble du spectre de l'autisme.
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Questions au Feuilleton
L'hon. Dominic LeBlanc (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions soient reportées.
Le Président: Est-ce d'accord?
Une voix: D'accord.
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Initiatives ministérielles]
* * *
[Traduction]
La Loi sur les télécommunications
La Chambre reprend l'étude de la motion.
M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD): Monsieur le Président, c'est un plaisir de prendre part aujourd'hui au débat sur le projet de loi C-37, qui prévoit la création d'une liste de numéros de téléphone exclus. Cette mesure figurait dans le programme électoral des néo-démocrates, au côté d'autres mesures en faveur des consommateurs, comme la réduction et le contrôle du taux d'intérêt des cartes de crédit et la réduction de la TPS. Tout cela faisait partie d'un train de mesures que nous proposions pour les consommateurs.
Des voix: D'excellentes idées du NPD.
M. Brian Masse: Absolument. Excellente idée. Nous avons également préconisé ces mesures au niveau provincial.
Le projet de loi sera très important pour nous attaquer à des questions de détail plus fines dont la loi ne tient pas encore compte. Nous allons appuyer le renvoi à un comité d'un projet de loi dont nous approuvons le principe, mais il y a quelques éléments qui méritent examen.
Situons d'abord le contexte. Nous savons que l'Association canadienne du marketing a déjà un service de retrait d'adresse et de numéro pour ceux qui ne veulent pas figurer sur une liste d'appel. Toutefois, un grand nombre de mes électeurs ont réclamé une intervention législative pour imposer des sanctions à ceux qui ne respectent pas ce mécanisme. Ils veulent que la loi exige des comptes. Si des gens veulent vraiment se faire rayer de la liste et s'ils savent que les entreprises sont tenues de se conformer, ils pourront vérifier tous les 90 jours s'ils sont oui ou non sur la liste.
Le respect de la vie privée est une des choses auxquelles les Canadiens sont très attachés. Nous n'en parlons pas assez. Le respect de notre vie privée et de celle de notre famille est essentiel à la démocratie. Il faut qu'on puisse se sentir libre chez soi et en société. Or, le télémarketing constitue jusqu'à un certain point une intrusion.
Il y a de formidables télévendeurs, et la mesure permettrait aux personnes qui désirent un tel service d'y accéder à partir de chez elles. Par ailleurs, il y a des télévendeurs déterminés qui téléphonent souvent. Ils recourent à différentes stratégies pour vérifier s'il y a quelqu'un à la maison. Ils téléphonent à différentes heures selon la région et le fuseau horaire. Cela incommode bien des gens.
Par exemple, j'ai un fils d'un an et une fille de quatre ans et je peux vous dire que les appels des télévendeurs à l'heure des repas m'incommodent grandement. Je dirais que la plupart d'entre eux respectent de plus en plus l'intimité des gens au foyer, mais malheureusement d'autres rappellent sans arrêt, insistent ou profitent de la technologie pour réitérer les appels et vous relancer.
Le type d'appel peut aussi poser problème. Les gens se sentent parfois harcelés ou poussés lorsque des télévendeurs les appellent. Je connais des aînés qui se sont sentis obligés d'acheter ou de dire quelque chose pour se débarrasser de télévendeurs. J'ai travaillé auprès de personnes handicapées dans le passé et je sais qu'elles ont eu des expériences semblables, soit qu'elles aient souhaité que l'intrus au bout du fil raccroche, soit qu'elles aient été victimes d'un malentendu qui déclenchait un engagement comme, par exemple, l'achat d'un billet, une contribution à faire ou l'expédition d'un produit qui serait facturé ultérieurement. L'examen du projet de loi s'impose.
Une de mes préoccupations au sujet du projet de loi est que le CRTC, qui surveillerait et fournirait le service, pourrait recourir à l'impartition. Nous savons que des renseignements personnels n'ont pas été protégés à cause de la Patriot Act. Nous savons que le gouvernement effectue des vérifications au sein de plusieurs ministères, et cela me préoccupe. Les Canadiens doivent payer des millions de dollars pour que le travail soit recommencé. Certes, je suis ravi qu'on agisse enfin, mais je tiens à fournir un exemple de mes préoccupations.
Quand le gouvernement a décidé de confier le recensement à un sous-traitant, il savait que la collecte de données serait faite par Lockheed Martin, l'un des fabricants d'armement les plus importants au monde, qui a obtenu le contrat, ce qui est déjà en soi assez controversé; qui plus est, il confiait la collecte de données à une entreprise américaine. Cette impartition a entraîné une violation de la sécurité des Canadiens et une violation de leur vie privée qui nous a coûté cher. Jusqu'à maintenant, le gouvernement a refusé de préciser combien cela nous a coûté, mais il a dû prendre un certain nombre de mesures, et c'est pourquoi je suis très curieux de voir comment cette impartition se déroulera.
Selon le statisticien en chef, le gouvernement admet avoir pris au moins une mesure, soit demander à au moins trois entreprises indépendantes, spécialistes de la sécurité de la technologie de l'information, de mener une vérification de sécurité sur les lieux où seront traitées les données du recensement de 2006. De surcroît, bien que le prérecensement se fasse à l'administration centrale de Statistique Canada, le statisticien en chef a quand même demandé qu'une vérification de sécurité indépendante des lieux soit réalisée.
Le gouvernement a aussi pris trois autres types d'initiatives. Entièrement convaincu de l'incompétence de la fonction publique—bien qu'elle ait toujours procédé elle-même au recensement, et ce, depuis de nombreuses années—le gouvernement a décidé de confier le contrat à un sous-traitant et a ainsi entraîné une violation de la vie privée des Canadiens.
C'est ce qui me préoccupe avec le CRTC en l'occurence: il est possible que d'autres services soient sous-traités, entraînant ainsi d'autres violations de la vie privée des Canadiens. Les gens qui appelleront pour s'inscrire sur la liste de numéros de téléphone exclus devront pour ce faire donner certains renseignements afin de mettre fin au harcèlement et à la sollicitation de la part de ces entreprises. C'est très important. Si nous comptons confier au CRTC cette responsabilité qu'il assumera indépendamment, nous devons savoir dans quelles conditions afin de garantir qu'il n'y aura pas de nouvelles violations de la vie privée des Canadiens.
Divers aspects du projet de loi sont très importants. Ce sont des mesures spéciales qui ne seront plus volontaires, comme c'était le cas jusqu'à présent. Il s'agit, en premier lieu, de sanctions administratives pécuniaires. Pour un appel illégal, des pénalités de 5 000 $ pourront être imposées à des particuliers et de 15 000 $, à des entreprises.
Une procédure permettra également de poursuivre les particuliers et les entreprises qui violeraient cette loi. Nous nous trouvons en fait à renforcer les mesures législatives en vigueur. C'est très important, parce que si ce type d'activité fait l'objet seulement d'un avertissement ou d'une tape sur les doigts et si le dépôt de plaintes ne mène pas à des pénalités, on sera peu enclin à mettre fin à une telle pratique et à respecter la vie privée des gens.
Nous, néo-démocrates, sommes vraiment fiers d'avoir enfin amené le gouvernement à faire ce qu'il fallait pour que les amendes ne soient plus déductibles d'impôt. Auparavant, les amendes imposées pour préjudice à l'environnement et certains prélèvements ou certaines pénalités imposés par des tribunaux à des entreprises coupables de pratiques ou de comportement contrevenant à la loi étaient déductibles d'impôt. Nous éliminons enfin cette déduction.
Cette mesure avait pourtant été promise dans le discours du budget, mais ne s'était jamais concrétisée. Nous avons obligé le Comité de l'industrie à l'adopter dans son rapport à la Chambre des communes, et le gouvernement a finalement accepté de l'inclure dans le projet de loi C-33. Cette mesure importante va enfin entrer en vigueur. Il est vraiment incroyable que, de nos jours, une entreprise puisse se voir imposer une amende et ensuite la déduire de son impôt comme dépense.
À mon avis, beaucoup de Canadiens qui ont à payer une contravention pour infraction au code de la route ou aux règles de stationnement aimeraient réclamer une déduction d'impôt en fin d'année et obtenir remboursement d'une partie de la somme. Comment il se fait qu'une entreprise ait pu procéder ainsi depuis toujours, je n'en ai pas la moindre idée. Depuis 2002, il nous a fallu trois ans pour corriger cette mesure. Je suis très fier que nous ayons pu crier victoire dans ce dossier, puisqu'il était insensé d'augmenter les amendes à des gens qui pouvaient ensuite augmenter d'autant leur remboursement d'impôt. Pourquoi le gouvernement leur accordait ces sommes, je l'ignore, mais nous avons mis fin à cette pratique.
Nous examinerons les répercussions du projet de loi sur les organismes de bienfaisance. Ces derniers tirent souvent une bonne partie de leurs revenus de la sollicitation par téléphone. Il est important de souligner que le projet de loi contient des dispositions qui permettront à ces organismes de poursuivre cette pratique. Nous voulons nous assurer que le projet de loi n'interdise pas la sollicitation par téléphone à des fins précises.
Le comité examinera certaines de ces fins. À l'heure actuelle, par exemple, les partis politiques ne figurent pas parmi les organismes autorisés à faire des appels non sollicités. Cette situation complique grandement les appels auprès des électeurs et le recrutement de bénévoles, auxquels on a souvent recours dans nos systèmes de partis actuels. Ce sont des aspects qui devront être abordés, pour faire en sorte qu'il soit possible de contacter les gens.
Il sera utile d'entendre le point de vue des organismes de bienfaisance au sujet de la liste des abonnés auto-exclus. Un certain nombre d'organismes ont déjà appelé pour exprimer leurs préoccupations sur certains points, mais aussi pour apporter leur appui, si les choses sont faites de façon adéquate.
Le projet de loi aurait également des répercussions sur les entreprises, qui se disent très préoccupées et dont nous aimerions connaître le point de vue. Une personne a écrit au nom de Beautyrock Inc.. Elle se disait inquiète au sujet de la liste des abonnés auto-exclus et des violations de la Charte des droits et libertés. L'auteur de la lettre écrivait ce qui suit: « Je pense que M. Trudeau se retournerait dans sa tombe si on interdisait aux particuliers et aux entreprises de se faire entendre ». Cette préoccupation se rapportait à la Charte des droits et libertés.
Il m'apparaît important d'entendre les entreprises qui vont formuler des doléances au sujet du projet de loi et qui comprennent les répercussions qu'il aura sur elles et sur leurs employés. Par ailleurs, il ne faut pas oublier la chose la plus importante, c'est-à-dire la possibilité, pour les gens, de pouvoir contrôler l'environnement pour lequel ils payent, c'est-à-dire leurs résidences. Ils doivent être en mesure d'exercer un contrôle pour protéger leur vie privée.
C'est pourquoi nous sommes d'accord sur le renvoi du projet de loi au comité. Nous pourrons ainsi régler les détails et protéger la vie privée des gens tout en permettant aux organismes et groupes de bienfaisance de faire campagne et de profiter des fruits de leur réussite.
Mme Yasmin Ratansi (Don Valley-Est, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse de prendre la parole aujourd’hui à l’occasion du débat sur le projet de loi C-37, Loi modifiant la Loi sur les télécommunications.Ce projet de loi vise à instaurer une réglementation propice à un télémarketing responsable et intelligent. Nous voulons protéger la vie privée des Canadiens et leur droit de décider avec qui ils veulent communiquer.
Le projet de loi C-37 porte sur les appels non sollicités de télévendeurs et propose de créer une liste nationale des abonnés auto-exclus pour le télémarketing. Une telle liste, administrée par le CRTC, est préférable aux autres options davantage axées sur la réglementation. Par ce projet de loi, le gouvernement prend des mesures pour donner aux Canadiens un moyen efficace et facile de faire obstacle au télémarketing intrusif et de protéger leur vie privée.
Le Canada n’est pas le seul pays à devoir concilier les souhaits des consommateurs et les besoins de l’industrie du télémarketing. Je rappelle à la Chambre que les activités de télémarketing sont extrêmement variées: elles vont des appels légitimes d'une entreprise à ses clients aux appels frauduleux visant les aînés et les gens sans méfiance.
Les entreprises de télémarketing légitimes et l’industrie du marketing ont besoin d’un environnement où elles peuvent mener leurs activités d’une façon qui est acceptable aux yeux de la plupart des Canadiens. Elles ont demandé un contexte réglementé où leur intégrité ne sera pas minée par les activités d’entreprises moins scrupuleuses.
Le projet de loi crée un modèle qui favorisera l’émergence d’un climat permettant aux entreprises légitimes de communiquer avec les consommateurs dans un cadre bien réglementé. Les modifications renforceraient le rôle que confère la Loi sur les télécommunications au CRTC à l’égard de la réglementation des installations de télécommunications servant à des communications non sollicitées, pour réduire les nuisances.
Les sondages d’opinion révèlent que les télécommunications non sollicitées sont en effet devenues un dérangement et une nuisance pour de nombreux Canadiens. Dans un sondage mené en 2003, au moins 97 p. 100 des personnes interrogées ont exprimé une réaction négative aux appels non sollicités. Parmi eux, 38 p. 100 ont affirmé qu’ils toléraient les appels, 35 p. 100, qu’ils les trouvaient importuns, et 24 p. 100, qu’ils détestaient les recevoir. La majorité, soit presque quatre sur cinq, appuyaient la création d’une liste nationale de numéros à ne plus composer. Environ les deux tiers ont précisé qu’ils s’inscriraient sur une telle liste.
Je rappelle à la Chambre que le CRTC a restreint le télémarketing en 1994. Le Conseil a notamment exigé que les entreprises de télémarketing tiennent chacune une liste des numéros à ne plus composer. Cette disposition oblige cependant les consommateurs à inscrire leur numéro auprès de chaque entreprise. Comme il peut y avoir des centaines de listes, le consommateur n’a aucune façon de savoir quand une autre entreprise composera son numéro. Il n’est donc pas surprenant que de nombreux consommateurs jugent cette solution insatisfaisante.
Plus tôt cette année, toutefois, l'organisme de réglementation a rendu sa Décision de télécom CRTC 2004-35, intitulée Examen des règles de télémarketing. Le CRTC y accorde un grand mérite au principe d'une liste nationale de numéros à ne plus composer et il recommande l'adoption d'une telle liste comme étant une solution préférable aux autres méthodes de réglementation. Dans sa décision, l'organisme de réglementation souligne aussi que des changements devront être apportés à la loi pour lui permettre de gérer efficacement une telle liste de numéros à ne plus composer.
Quels sont les besoins?
Le projet de loi permettrait au CRTC de faire trois choses: d'abord, imposer des amendes dans le cas d'inobservation des dispositions; deuxièmement, confier à un tiers l'administration d'une base de données; troisièmement, fixer des droits permettant de récupérer les coûts liés à la tenue à jour de la liste.
Si ce projet de loi est adopté, nous prévoyons que le CRTC entreprendra des consultations pour trouver un administrateur de la liste d'abonnés auto-exclus. Il définira aussi la façon dont la liste sera utilisée et ce que tout cela coûtera.
Le CRTC s'interrogera en outre sur la question de savoir si certains genres d'appels devraient être exemptés des restrictions liées à la liste.
En particulier, je voudrais faire une recommandation qui vient de l'un de mes électeurs de Don Valley-Est. À toutes les heures du jour et de la nuit, il est harcelé par des télécopies non souhaitées. Tout comme des appels téléphoniques indésirables aux fins de sollicitation, les télécopies indésirables peuvent être tout aussi intrusives et amener autant de gaspillage de papier dans les bureaux à domicile.
Lorsque le CRTC a annoncé des règles provisoires sur le télémarketing par suite de la Décision de télécom CRTC 2004-35, les membres de l'industrie ont soutenu qu'elles imposaient un fardeau réglementaire excessif. L'industrie préfère elle-même une liste nationale de numéros à ne plus composer. Le CRTC a suspendu l'application de ses règles provisoires et attend l'adoption de ce projet de loi pour créer un nouveau régime réglementaire.
En fait, l'industrie pourrait bien accroître son efficacité et sa productivité par suite de la création de la liste nationale d'abonnés auto-exclus. Elle éliminera les appels destinés à des personnes qui ne souhaitent pas en recevoir, ce qui réduira le nombre d'appels infructueux. En adoptant ce projet de loi, nous permettrons au CRTC d'agir rapidement dans ce dossier.
Le télémarketing est devenu de plus en plus répandu. Rien n'indique que ce soit passager. En outre, l'incapacité de limiter l'accès des entreprises de télémarketing aux téléphones de nos résidences et de nos commerces est devenue une source de mécontentement pour un fort pourcentage de Canadiens et de Canadiennes. Avec ce projet de loi, nous donnerons au CRTC les outils nécessaires pour créer une liste nationale de numéros à ne plus composer. Nous donnerons aussi aux Canadiens un moyen facile et efficace de limiter le nombre d'appels intrusifs. En somme, nous prendrons des mesures pour protéger leur vie privée.
J'exhorte les députés à appuyer ce projet de loi.
M. David McGuinty (Ottawa-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui pour appuyer le projet de loi C-37 modifiant la Loi sur les communications.
Ce projet de loi répond aux besoins des consommateurs canadiens, qui en ont assez des appels non sollicités et non désirés émanant d'entreprises de télémarketing. Je suis convaincu que chaque député pourrait témoigner du mécontentement éprouvé par des parents, des amis ou des voisins. Nombreux sont ceux parmi nous qui pourraient parler de leur propre cas. Tout le monde a déjà été interrompu par des agents de télémarketing au milieu d'un repas, au moment de mettre les enfants au lit ou pendant une période de repos.
[Français]
Il y a des périodes où nous sommes disposés à écouter des gens qui veulent nous vendre quelque chose ou nous convaincre de verser un don à une bonne oeuvre. Il y en a d'autres où ces démarches nous dérangent et ne sont que des nuisances.
Mais nous n'avons plus à nous fier à des indications anecdotiques pour savoir ce que les Canadiens pensent du télémarketing. En 2003, Environics a fait une enquête sur les attitudes des consommateurs face au télémarketing, et 81 p. 100 des répondants ont dit avoir déjà reçu des appels non sollicités. En moyenne, les répondants recevaient 3,43 appels non sollicités par semaine.
[Traduction]
Parmi les consommateurs qui reçoivent au moins un appel par semaine, 44 p. 100 sont plus susceptibles d'affirmer qu'ils reçoivent des appels d'organismes de bienfaisance; 24 p. 100 disent recevoir des appels d'entreprises auxquelles ils ont eu affaire dans le passé; 27 p. 100 reçoivent des appels d'entreprises auxquelles ils n'ont jamais eu affaire auparavant.
Les députés ne seront pas surpris d'apprendre que de nombreux Canadiens n'aiment pas recevoir des appels non sollicités d'entreprises de télémarketing. Le sondage nous indique que 38 p. 100 les tolèrent; 35 p. 100 les trouvent agaçants; 24 p. 100 les détestent. En fait, environ 14 p. 100 des personnes interviewées par Environics ont dit avoir essayé de se plaindre d'un appel non sollicité.
Parmi elles, 39 p. 100 ont indiqué que la plainte avait été réglée et une forte majorité—59 p. 100—a affirmé le contraire. Voilà qui montre que le système ne fonctionne pas. Lorsque près de trois plaignants sur cinq vous disent que leur plainte n'a pas été réglée, vous savez qu'il y a des lacunes dans les lois cadres régissant le télémarketing.
Il est temps que les règles du télémarketing imposent un régime de responsabilisation et garantissent le respect des consommateurs. C'est précisément ce que prévoit ce projet de loi. Il fournit aux Canadiens un moyen efficace et facile de limiter le télémarketing intrusif et il crée le pouvoir d'imposer des amendes aux entreprises de télémarketing qui méprisent les règles.
Au coeur de ce projet de loi figure la décision du gouvernement de créer une liste nationale des abonnés auto-exclus. La recherche d'Environics indique que 79 p. 100 des personnes interviewées appuieraient l'établissement d'une telle liste et que 66 p. 100 s'y inscriraient probablement.
[Français]
Le projet de loi donne au CRTC le pouvoir de créer une instance indépendante qui administrera cette liste et le pouvoir d'imposer des amendes aux entreprises de télémarketing qui continuent d'appeler les gens inscrits sur la liste. Le projet de loi autorise en outre le CRTC à fixer des droits en vue de récupérer les coûts de gestion du système.
Une fois le projet de loi adopté, le CRTC entreprendra des consultations publiques en vue de cerner les détails de sa mise en oeuvre. Il sollicitera les commentaires du public sur les catégories d'organismes qui devraient être tenus d'utiliser la liste des abonnés auto-exclus et sur les intervenants qui devraient payer les frais de fonctionnement afférents à la liste.
[Traduction]
Pour se faire une idée de la façon dont ce système fonctionnerait, il suffit de regarder comment les choses se passent au sud de la frontière, puisque les États-Unis ont un système comparable. Les médias ont sensibilisé le public canadien au succès qu'a eu dans ce pays un registre national des abonnés auto-exclus, destiné à réglementer le télémarketing.
Aux-États-Unis, les entreprises de télémarketing sont tenues de s'enregistrer auprès de l'instance de réglementation. Au moins une fois tous les trois mois, elles doivent télécharger une liste actualisée d'abonnés auto-exclus. Ces abonnés sont des consommateurs qui ont demandé qu'on ne les appelle plus. Les entreprises de télémarketing sont tenues d'éliminer des bases de données qu'elles utilisent pour faire leurs appels tout numéro figurant dans le registre des abonnés auto-exclus.
Au Canada, il y aura des sanctions contre les télé-vendeurs qui passeront outre à la liste des abonnés auto-exclus: les télévendeurs individuels s'exposeront à une amende de 1 500 $ par infraction, et les sociétés, à une amende de 15 000 $ par infraction. La décision du CRTC d'imposer ces amendes sera assujettie à une révision par le CRTC lui-même et elle pourra être renvoyée à la Cour d'appel fédérale.
Des groupes de défense des consommateurs, y compris le Centre pour la défense de l'intérêt public, appuient déjà la création d'une liste nationale d'abonnés auto-exclus. Nous savons que 79 p. 100 des personnes interviewées par Environics ont également dit être favorables à la mise sur pied d'une telle liste. Je suis convaincu que, si les députés consultent leurs électeurs, ils constateront que ceux-ci abondent dans le même sens.
Je sais que nombreux sont mes collègues de l'opposition qui favorisent aussi cette façon de réglementer le télémarketing. Je tiens en particulier à souligner le travail du député d'Île de Vancouver-Nord dans ce dossier.
La Chambre a quelquefois l'occasion d'accomplir de grandes choses qui profitent à un grand nombre de Canadiens. Il s'agit parfois de questions d'une portée énorme, comme l'amélioration de notre régime de soins de santé ou l'accès des familles à faible revenu à l'enseignement supérieur. Cependant, je dirais que peu de projets de loi pourraient recevoir un appui aussi vaste que celui dont nous discutons aujourd'hui.
Ce projet de loi créera une réglementation propice à un télémarketing responsable et intelligent. Il protégera la vie privée des Canadiens et leur droit de décider avec qui ils souhaitent communiquer. En outre, pour des milliers de Canadiens qui choisiront de s'inscrire sur une liste nationale d'abonnés auto-exclus, il garantira des soirées paisibles en compagnie de leur famille, à l'abri des interruptions commerciales.
J'exhorte mes collègues à se joindre à moi pour appuyer ce projet de loi.
M. Bradley Trost (Saskatoon—Humboldt, PCC): Monsieur le Président, je suis ravi d'aborder aujourd'hui une question qui intéresse de nombreux Canadiens.
On peut affirmer que peu de gens apprécient le fait de recevoir l'appel d'une entreprise de télémarketing pendant le repas du soir. En fait, la frustration du public à l'égard de la persistance de ces appels téléphoniques importuns est entrée dans la culture populaire. Je ne sais pas si les députés se rappellent de l'épisode de l'émission de Jerry Seinfeld où ce dernier avait inversé les rôles et se disait trop occupé pour répondre et demandait au représentant son numéro de téléphone pour pouvoir le rappeler pendant le dîner. Cette situation amusante illustre le sentiment d'intrusion que ressentent nombre de mes électeurs lorsque le téléphone sonne juste au moment où ils s'apprêtent à manger ou à faire quelque chose avec leurs enfants. On les appelle pour leur vendre quelque chose, leur poser des questions dans le cadre d'un sondage ou leur faire entendre un enregistrement.
De toute évidence, le Parti conservateur et moi, à titre de représentant de la circonscription de Saskatoon--Humboldt, n'appuyons pas ce genre d'intrusion dans la vie privée.
Je me permets de souligner que le principe de cette mesure législative, son objectif sous-jacent est très louable. Toutefois, le projet de loi dont nous sommes saisis présente certains problèmes. Lorsqu'une mesure législative comporte des lacunes mais vise un objectif louable, il faut la remanier. Malheureusement, le gouvernement est bien connu pour élaborer de telles mesures législatives.
Tel que souligné trop souvent dans le passé, les gouvernements libéraux tentent de régler des questions importantes en proposant des solutions partielles. Que les députés interrogent n'importe quel agriculteur de ma circonscription au sujet de la perte possible de ses terres que laisse planer la Loi sur les espèces en péril, sans pour autant donner l'assurance d'une indemnisation, et ils auront une idée de ce que j'entends par mesure législative laissant à désirer.
Permettez-moi de faire une digression pour dire quelque chose au sujet de la Loi sur les espèces en péril, pour montrer le problème que posent les mesures législatives mal élaborées. Si le gouvernement fédéral avait au moins eu la présence d'esprit de consulter les agriculteurs et les éleveurs, partout au Canada, il aurait pu faire des pas de géant au chapitre de la protection de l'habitat faunique. Les députés du Parti conservateur reconnaissent que nos agriculteurs et nos éleveurs sont les intendants de la terre. Ceux-ci sont plutôt disposés à préserver l'habitat et à collaborer avec des groupes comme Canards Illimités Canada, mais les libéraux, avec leur mentalité anti-rurale et leur trop fréquent manque de réflexion, ont présenté une mesure législative ne tenant pas compte des détails. Dans des projets de loi comme la Loi sur les espèces en péril, ce sont les détails qui posaient problème, comme c'est le cas dans la présente mesure législative.
Le projet de loi C-37 est mal rédigé en ce qu'il demeure vague sur d'importants éléments. Il permettrait au Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, le CRTC, de dresser une liste nationale des abonnés auto-exclus. En vertu du projet de loi C-37, le CRTC aurait le pouvoir d'imposer des pénalités sévères aux entreprises de télémarketing. Par contre, il n'est pas spécifié dans le libellé du projet de loi comment cette liste nationale d'abonnés auto-exclus serait maintenue. Il n'y a aucune indication dans le projet de loi sur la nature des renseignements que les consommateurs devraient fournir pour que la liste constitue une base de données efficace, ni sur la façon dont les entreprises de télémarketing consulteraient la liste afin de se conformer à la loi. Le projet de loi ne précise pas à quelle fréquence les entreprises de télémarketing devraient vérifier la liste afin d'agir en toute conformité. Ce sont là d'importants détails et les détails peuvent avoir une grande incidence sur une mesure législative.
En résumé, en vertu du projet de loi C-37, les télévendeurs individuels qui ne respectent pas la liste des abonnés auto-exclus pourraient se voir imposer une amende de 1 500 $ par appel téléphonique répréhensible. Pour les entreprises, cette pénalité serait de 15 000 $ par appel. Par contre, il n'est pas précisé dans le libellé du projet de loi comment les télévendeurs individuels et les entreprises de télémarketing s'y prendraient pour vérifier la liste et ainsi se conformer à la loi.
De plus, le projet de loi n'explique pas qui aurait accès à la liste des abonnés auto-exclus. Imaginez un peu: une base de données nationale contenant des numéros de téléphones, des noms d'abonnés et Dieu sait quels autres renseignements, sans paramètre régissant l'accès à l'information. Nous devons nous assurer que ce projet de loi qui vise à protéger la vie privée des Canadiens n'ait pas l'effet inverse.
Pour couronner le tout, le projet de loi C-37 ne prévoit aucun compte rendu sur la façon de gérer la liste. Voyons quelles pourraient être les conséquences. Il s'agirait d'une énorme base de données dont personne ne rendrait compte. C'est une omission étonnante dans le projet de loi.
Je croyais que le premier ministre voulait marquer son gouvernement au coin d'une plus grande transparence et d'une plus grande reddition de comptes. Apparemment, l'examen opportun des programmes gouvernementaux n'entre pas dans les priorités des libéraux. Nous devons connaître les détails. On doit nous montrer de façon concrète comment fonctionnerait le projet de loi.
Trop souvent, on nous fait des promesses qu'on ne tient pas. Autre exemple d'activité gouvernementale, mon collègue d'Edmonton-Leduc attend toujours l'examen complet de Partenariat technologique Canada promis par trois ministres de l'Industrie.
Les Canadiens qui regardent ce débat seront heureux d'apprendre que les libéraux sont parvenus à récupérer le pourcentage renversant de 5 p. 100 des 2 milliards de dollars que ces derniers ont investis dans PTC depuis 1996, à même l'argent du contribuable. Après un tel excès, les libéraux s'apprêtent à investir dans une liste de numéros de téléphone exclus sans exiger qu'on rende des comptes. Ils doivent formuler leurs promesses en toutes lettres si l'on veut qu'ils les tiennent.
Cela nous rappelle le registre national des armes à feu, un programme de 2 millions de dollars dont le coût s'élève maintenant à 2 milliards. À présent, les libéraux veulent créer une autre mégabase de données pour permettre au CRTC d'établir et de gérer comme il l'entendrait une liste de numéros de téléphone exclus.
Cette liste ressemblera-t-elle au registre des armes à feu par son coût et sa gestion? Je ne le souhaite vraiment pas, mais, avec ce gouvernement, cela est plus que possible. L'établissement d'une telle liste, son administration et sa mise en application, y compris l'imposition de pénalités, sont-ils conformes au mandat du CRTC?
Enfin, je veux parler des conséquences de ce projet de loi sur les oeuvres de bienfaisance. Celui-ci ne prévoit aucune exception pour ces oeuvres ou pour les entreprises qui souhaitent rester en contact avec leur clientèle existante et qui le font par téléphone.
Outre les différentes oeuvres de bienfaisance, les maisons de sondage et les organisations politiques, notamment les partis, pourraient se prévaloir de cette possibilité. Nombre d'oeuvres de bienfaisance et d'organismes sans but lucratif font des campagnes de télémarketing. Si l'on n'y réfléchit pas, si l'on ne prévoit pas d'exceptions pour les oeuvres de bienfaisance, le projet de loi C-37 va réduire considérablement l'apport de beaucoup d'organismes à leurs concitoyens et aux étrangers, par exemple aux victimes des tsunamis.
Personnellement, je ne sais pas ce que les libéraux reprochent aux organismes de charité et aux groupes de bénévoles. Ils ont rédigé le projet de loi C-21, la Loi régissant les organisations à but non lucratif, qui fait porter aux organisations à but non lucratif un lourd fardeau bureaucratique permanent pour respecter les exigences en matière de rapport d'Industrie Canada.
Même les représentants d'Industrie Canada ont décrit ce projet de loi comme étant très détaillé et très technique. Le projet de loi C-21 prévoit de nombreux règlements. Les groupes de bénévoles et les clubs philanthropiques devront changer leurs règlements administratifs et leurs constitutions pour se conformer à cette nouvelle loi. En raison des nombreuses exigences du projet de loi, les organisations à but non lucratif auront plus de difficulté à attirer de bons bénévoles et de bons administrateurs.
Les libéraux ont déposé le projet de loi C-37 sans prévoir d'exemption ou d'exception pour les organismes de charité. Nous nous retrouvons avec un autre exemple où les libéraux font passer la valeur symbolique avant la substance. Le cabinet du premier ministre est très heureux d'avoir une photo montrant le premier ministre qui boit un verre d'eau purifiée par l'Équipe d'intervention en cas de catastrophes (DART). Le premier ministre a cependant dit durant cette séance de photos qu'il aurait besoin d'un peu de scotch, alors que les militaires se trouvent dans un camp où la consommation d'alcool est interdite.
Pendant que le premier ministre visite les zones ravagées par les tsunamis, les libéraux à Ottawa cherchent à faire adopter une loi qui nuirait aux efforts déployés par les organismes de charité et les groupes à but non lucratif pour recueillir des fonds pour d'autres. J'espère qu'il s'agisse simplement d'inconscience.
Une liste des abonnés auto-exclus permettrait aux Canadiens de ne pas se faire déranger par des appels offrant des services non sollicités lorsqu'ils passent du temps avec leur famille, qu'ils mangent ou qu'ils regardent la télévision. J'appuie le principe en cause, mais je crois qu'il faut adapter les détails.
[Français]
M. Paul Crête (Montmagny—L'Islet—Kamouraska—Rivière-du-Loup, BQ): Monsieur le Président, je suis très heureux de prendre la parole aujourd'hui sur ce projet de loi qui modifie la Loi sur les télécommunications. Il faut se rappeler quel est l'objectif de la loi. On sait tous ce qu'est le télémarketing. Ce que cela veut dire, de façon concrète, c'est qu'on reçoit souvent chez nous un appel téléphonique un vendredi soir, parfois un samedi matin ou un jour de semaine, pour nous vendre le meilleur produit du monde. Souvent, nous ne sommes pas très intéressés parce que, déjà, on a tous les services nécessaires.
Par exemple, si on vient de renouveler notre portefeuille d'assurances, on nous appelle pour nous offrir des services d'assurances, un vendredi soir, dans une soirée ou une activité familiale. S'il y avait les moyens de se passer d'être interrompu par un appel de ce genre, plusieurs personnes le feraient. À preuve, dans un sondage de la firme Environics, on disait que 79 p. 100 des Canadiens ont affirmé soutenir une liste canadienne des abonnés auto-exclus et 66 p. 100 des répondants ont indiqué qu'ils souscriraient à un tel service. Autrement dit, deux citoyens sur trois souhaiteraient pouvoir être exclus de la liste pour ne pas être importunés par ce type d'appel.
Aux États-Unis, il y a déjà une pratique, une législation qui s'est développée en ce sens et elle donne des résultats intéressants. En anglais, cela s'appelle do not call list. Par exemple, on dit que dès la première année de l'adoption de cette loi, 62 millions d'Américains étaient inscrits sur la liste et il y avait eu 428 000 plaintes formulées contre les compagnies contrevenantes. Il y a donc moyen de se donner un outil qui va contrôler cette question.
On l'a déjà vu dans d'autres secteurs où cela était plus facile, comme la distribution des dépliants publicitaires que l'on reçoit chaque semaine dans ce qu'on appelle le publisac. Si nous n'en voulons pas, ils n'en laissent pas à notre maison et l'adresse est corrigée.
Au niveau des services de télécommunications, on ne s'était pas encore rendus à ce niveau. Maintenant, nous avons même des services de télémarketing automatisés. Une machine vous appelle, vous parle, vous importune pendant quelques minutes. Vous devez répondre à cette machine. Personnellement, je pense que me faire appeler par une machine, cela ne m'intéresse pas beaucoup. De plus, lorsque ce sont des sujets qui ne nous préoccupent pas, il faudrait absolument que l'on trouve une façon de corriger la situation.
Cependant, dans le projet de loi qui est déposé et en faveur duquel le Bloc québécois va voter, il y a quand même des éléments qui sont assez imprécis. Par exemple, le projet de loi ne précise aucune modalité d'exclusion quant à la liste des appels qui ne seraient pas permis et ceux qui le seraient.
Nous souhaiterions que les organismes à but non lucratif à caractère caritatif soient exclus de cette liste. On a vu cela durant les derniers événements internationaux. Je pense que cela peut être pertinent de ne pas enlever cet outil aux organismes qui ont vraiment une vocation caritative, qui cherchent à amasser des sommes pour l'aide internationale ou l'aide dans notre milieu pour lutter contre la pauvreté. Cependant, il faudrait que cela soit très bien réglementé pour s'assurer que les gens ne feront pas par la bande ce qu'ils ne pourraient plus faire directement.
Il faudrait donc s'assurer que les organismes qui sont exemptés aient toutes les permissions et permis nécessaires et qu'on s'assure qu'effectivement leur vocation est caritative. On pense aussi aux partis politiques pour la qualité de la vie démocratique, il serait important que ceux-ci soient exemptés de cette liste. C'est la même chose en ce qui concerne les liens d'affaires. C'est-à-dire, on appelle quelqu'un, on a déjà établi un lien et on nous rappelle. Il faudra que cela soit précisé le plus possible pour qu'on puisse, en bout de ligne, avoir une loi opérationnelle et qui donnera les résultats escomptés.
Ce qui est prévu dans la législation, c'est de permettre au Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes de gérer les banques de données dans le but d'exercer le pouvoir qui est prévu à l'article 41 de cette loi, à savoir le pouvoir de:
[...] interdire ou réglementer, dans la mesure qu'il juge nécessaire--compte tenu de la liberté d'expression--pour prévenir tous inconvénients anormaux, l'utilisation par qui que ce soit des installations de télécommunications de l'entreprise canadienne en vue de la fourniture de télécommunications non sollicitées. |
Je pense qu'il va aussi falloir s'assurer d'une autre chose. Il y a beaucoup de centres d'appels situés à l'extérieur du Canada, et même à l'extérieur de l'Amérique du Nord. Il arrive qu'on reçoive des appels qui peuvent provenir de n'importe où dans le monde et qu'on doive les contacter. Il faudra s'assurer que cet aspect de notre législation soit solide et ferme.
En effet, si jamais on interdit à des firmes du Québec ou du Canada de faire ce type d'actions mais que, par la bande, elles pourraient le faire par l'entremise de succursales aux États-Unis ou ailleurs dans le monde, on ne sera pas gagnants. On va tout simplement avoir avantagé, encore une fois, l'exportation des emplois.
Il faut s'assurer que, de ce côté-là, il y aura aussi une protection suffisante pour permettre de répondre à ces questions et que les mécanismes pour poursuivre ces entreprises soient précis et clairs pour qu'on ne se retrouve pas dans une bataille juridique.
On connaît le CRTC pour les études qu'il fait ainsi que pour l'émission de brevets et de licences. Ces processus sont souvent très longs. Il faudra donc s'assurer, dans l'application de la présente loi, qu'il fonctionne à une autre vitesse et lui donner les moyens nécessaires pour assumer son mandat. Il faudra également qu'il assure un suivi quant à l'application de cette loi, suivi qui sera différent de celui qu'il fait dans le cas de plaintes au sujet des licences ou des permis, afin d'éviter de s'embourber dans la multitude des plaintes.
Aux États-Unis, au courant de la première année, 428 000 plaintes ont été formulées contre les compagnies contrevenantes. Si, au Canada, il y en avait tout simplement 42 000 ou 40 000, il faudrait être capable de les traiter afin de fournir un service adéquat. Si quelqu'un s'inscrit à la liste pour ne pas recevoir ce type d'appels, qu'il en reçoive, qu'il dépose une plainte et que la situation ne soit pas corrigée, ce service aura l'effet contraire à celui souhaité au départ.
Il faut donc s'assurer que ce système sera étanche, opérationnel et effectif, et que les pénalités imposées aux compagnies seront suffisamment sévères pour leur enlever complètement le goût de mener ce type d'action lorsqu'elles n'ont pas le droit de le faire. Si l'on vend un produit de haute valeur qui vaut, par exemple, 100 $, 200 $ ou 500 $, et que la pénalité pour avoir logé un tel appel illégal soit de 3 $ ou de 5 $, on calculera qu'en raison du prix de vente, on peut prendre la chance et agir dans l'illégalité.
Il faudra donc qu'en comité parlementaire, on procède à une opération assez détaillée. Le principe du projet de loi nous est acceptable et nous sommes d'accord pour voter en sa faveur. Cependant, le Bloc québécois souhaite que le travail en comité permette d'apporter des amendements en quantité suffisante pour en faire un projet de loi implacable qui répondra véritablement aux exigences actuelles et à venir de l'industrie.
On voit à quelle vitesse évolue le secteur des télécommunications. Souvent, les réglementations sont en retard par rapport aux télécommunications existantes. Il faudra qu'en ce domaine, la loi que nous adopterons en troisième lecture soit actualisée au maximum en fonction de ce que nous savons être à venir en termes de télécommunications. Il faudra s'assurer qu'il n'y aura pas de problèmes de ce côté.
Le projet de loi déposé devant nous est souhaitable. Il correspond au type d'action dont la population nous a mandaté en élisant un gouvernement minoritaire, c'est-à-dire corriger les choses qui étaient inadéquates par le passé. Il s'agit souvent de dossiers dans lesquels le lobby des entreprises était plus fort que celui des citoyens. En revanche, la situation minoritaire du gouvernement permet aux citoyens d'exercer un meilleur lobby sur ce dernier. C'est ce qu'il faut mettre de l'avant.
Nous avons devant nous l'exemple concret d'un résultat positif. Souhaitons que nous verrons le même genre de résultat dans le prochain budget que déposera le gouvernement. Là encore, il faudra y retrouver des éléments présentés par les partis d'opposition et que le gouvernement aura fait siens. D'ailleurs, plusieurs correspondent à des engagements qu'il avait pris pendant la campagne électorale. Souvent, au lendemain d'une l'élection, un gouvernement majoritaire a oublié les engagements qu'il avait pris. En revanche, un gouvernement minoritaire est obligé de les suivre, sinon il retourne devant l'électorat et risque d'en payer le prix.
Il est des actions dans lesquelles le gouvernement a encore à faire ses preuves. Dans le secteur des télécommunications, sur la question du télémarketing, il s'agit d'un geste posé dans la bonne direction. Souhaitons que le travail en comité permettra d'atteindre les objectifs réels visés par le gouvernement et par l'ensemble de cette Chambre, et que nous apporterons les amendements pertinents. Le Bloc québécois collaborera à s'assurer d'obtenir ce résultat.
L'hon. Paddy Torsney (secrétaire parlementaire de la ministre de la Coopération internationale, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureuse de parler du projet de loi C-37. Il était très important que le ministre présente ce projet de loi. J'étais très surprise, au cours de ce débat, d'entendre le député de Saskatoon—Humboldt.
[Traduction]
En matière de protection des consommateurs par la constitution d'une liste de numéros de téléphone exclus, la Saskatchewan a été une province avant-gardiste. SaskTel assure un service spécifique destiné à aider les consommateurs qui veulent faire cesser les appels dont ils ne veulent pas.
Soyons clairs. L'industrie de télémarketing est une industrie importante au Canada. Elle joue un rôle légitime dans le domaine du marketing, qui est important. Les marchands doivent faire parvenir leurs produits aux bonnes personnes, au bon moment, au bon endroit, mais ils veulent faire en sorte de ne pas incommoder les consommateurs. Nous tous, en qualité de députés, avons entendu des habitants de nos circonscriptions nous parler du temps précieux qu'ils consacrent à leur famille, du fait qu'ils essaient de lui inculquer des valeurs et de partager des moments de tranquilité avec elle; cependant, ils sont inondés d'appels. Ils ont besoin d'une liste des numéros de téléphone exclus.
L'autre jour, je donnais un coup de main à quelqu'un qui avait été absent de chez lui pendant deux ou trois jours. J'ai ouvert sa boîte vocale et constaté que sept appels sur dix provenaient d'intrus. Voilà le genre d'appels que je veux voir inscrire dans la loi par le ministre, ces appels qu'on laisse tout simplement dans la boîte vocale, comme on l'a déjà mentionné.
Le télémarketing est important pour notre pays. Il est une source importante d'emplois. Il est important pour le milieu des affaires, qui donne d'ailleurs un appui particulier au projet de loi. L'Association canadienne du marketing et moi-même nous consacrons à cette question. Le projet de loi d'initiative parlementaire C-520, que j'ai déposé au cours de la dernière législature, était appuyé par les associations de protection du consommateur et les entreprises, qui souhaitent nettoyer l'industrie.
Au moment où je vous parle, les différentes compagnies maintiennent toute une série de registres afin d'éviter d'appeler les personnes qui ne veulent se faire appeler par elles. Il sera plus économique, et plus efficace, surtout pour les Canadiens, d'avoir une seule liste des abonnés auto-exclus contenant leurs noms, leur adresse et leur numéro de téléphone au cas où il y aurait deux personnes vivant sous la même toit et partageant la même ligne téléphonique. Elle doit viser précisément la personne et l'adresse concernées au cas où des numéros de téléphone seraient réattribués à d'autres personnes.
Le député de Saint-Léonard—Saint-Michel a aussi présenté à la Chambre un projet de loi d'initiative parlementaire relatif à cette question. J'encourage les députés à voter en faveur du projet de loi C-37 et du projet de loi d'initiative parlementaire. Ainsi, les deux projets de loi seront examinés et, grâce aux détails sur les mesures à prendre au sujet de la liste des numéros exclus, sur la manière dont le CRTC procédera aux consultations à ce sujet, en espérant qu'il le fera immédiatement, la liste pourra être opérationnelle aussi rapidement, efficacement et économiquement que possible. Il est logique de se doter d'une liste unique pour tous les Canadiens.
Le député de Saskatoon—Humboldt a parlé des exemptions. Mon projet de loi exempte les organismes de bienfaisance, à juste titre selon moi. Les entreprises qui communiquent avec leurs clients existants seraient également exemptées. Il faut bien l'admettre, cela est logique.
J'ai récemment été ciblé par une campagne de télémarketing du Globe and Mail, dont je reçois les éditions du vendredi et du samedi, sur abonnement, dans ma circonscription. On a communiqué avec moi pour me faire une offre alléchante sur l'édition dominicale du New York Times. Il s'agissait d'un appel de télémarketing légitime, parfaitement à-propos et pertinent. J'étais ravi d'être informé de ce service et d'avoir la possibilité de m'abonner. Il se serait agi d'une mauvaise pratique commerciale si l'on s'était acharné à me harceler au sujet d'un service qui ne m'intéressait pas. Dans le premier cas, les entreprises devraient être exemptées. Par contre, dans le second, elles auraient intérêt à enlever de leurs listes les noms des clients qui ne veulent pas être sollicités.
La nécessité de ce projet de loi a fait l'objet de bien des discussions. J'encourage tous les députés à participer. Encore une fois, il nous faut reconnaître une certaine préoccupation dans l'industrie au sujet de ceux qui exploitent des centres d'appels dans toutes les circonscriptions. Il est plus efficace de pouvoir choisir les appels pertinents qui ciblent les bonnes personnes que de subir le tintamarre auquel est soumise la population à l'heure actuelle.
Il en va de même du marketing direct et des dépliants qui nous arrivent par courrier. Si nous faisons le ménage dans l'industrie, nous ne verrons plus que ceux qui nous intéressent. J'ai déposé un projet de loi d'initiative parlementaire qui comportait des éléments intéressants en matière de protection du consommateur. Ils ont d'ailleurs été adoptés par le ministre de l'Industrie de l'époque. Il s'agissait notamment d'une liste d'abonnés auto-exclus dans la dernière mise à jour de la Loi sur la concurrence, pour garantir un bon nettoyage et les normes les plus rigoureuses à l'avantage des Canadiens et aussi pour faire en sorte que les activités de marketing des entreprises, dont il faut reconnaître l'importance, soient efficaces.
Nous en avons un exemple, comme l'a dit le député du Bloc québécois. Il a parlé de l'importance de tenir compte de ce que font nos voisins du Sud. Ils ont établi ce genre de répertoire depuis plusieurs années. Leur secteur du télémarketing est néanmoins fort dynamique. Il continue d'exister des possibilités de mise en marché par téléphone. Ce qui importe davantage, c'est que les consommateurs ont la possibilité de faire supprimer leur nom des listes et d'être ainsi protégés et d'avoir la paix sans se faire harceler par des indésirables.
Lors de ses consultations, je tiens à ce que le CRTC, contrairement au sens de sa décision la plus récente, se penche sur les appels qui nous laissent un message sur la boîte vocale en notre absence. Ce genre d'appel suscite beaucoup d'inquiétude, surtout chez les personnes qui n'en comprennent pas le fonctionnement ou le principe. Je pense par exemple au cas d'un appel d'une entreprise de déménagement, qui peut déconcerter la personne qui n'a entendu aucune sonnerie et qui a tout à coup l'impression de parler avec le représentant d'une entreprise qui est en train d'organiser son déménagement. Plusieurs électeurs nous ont appelé à ce sujet et nous ont manifesté leur perplexité.
Pour tous ceux qui ont à composer avec les premiers stades de la démence chez un être cher, ce phénomène peut-être fort troublant également. Il nous faut protéger le consommateur.
Certains des appels qui s'apparentent davantage au harcèlement m'inquiètent considérablement. Encore une fois, il importe que le secteur ait ses propres lignes de conduite mais, malheureusement, ce ne sont pas tous les intéressés qui les respectent.
Dans le cadre de ce système, tous devront se conformer aux lignes directrices, sous peine de sanctions. Selon le projet de loi du ministre, on compte une infraction par appel et par jour. Le mien prévoyait des sanctions très strictes: une amende d'au plus 25 000 $ ou une peine d'emprisonnement de six mois sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire ou, sur mise en accusation, une amende d'au plus 1 million de dollars ou une peine d'emprisonnement d'au plus cinq ans.
Il est important d'assainir cette industrie. Tous doivent suivre les mêmes règles. Il faut qu'on cesse de harceler les gens pour qu'ils donnent de l'argent ou achètent des produits qui ne les intéressent pas. Toutefois, nous savons que les gens se font parfois beaucoup intimider par leur interlocuteur. Comme je l'ai dit, hier, sept appels sur dix étaient une ennuyeuse perte de temps pour moi et pour ces personnes.
Il est aussi possible d'envoyer des messages par télécopieur au moment où le destinataire s'y attend le moins. Cela n'est pas gratuit. Il faut acheter les cartouches et le papier. Ces entreprises-là aussi doivent se conformer aux lignes directrices. Je renvoie ces messages, comme tous les députés le font, et je demande que mon nom soit rayé de la liste. Pourtant, j'en reçois toujours.
Avant que le projet de loi ne soit adopté par la Chambre et le Sénat, je veux que le CRTC commence des consultations. Les Canadiens sont prêts pour ce projet de loi. Nous en avons besoin. Nous devons protéger les consommateurs. Nous devons nous assurer que le télémarketing et les autres formes de marketing sont aussi efficaces que possible.
Pourquoi ne pas fixer les normes le plus haut possible? Pourquoi ne pas établir un système unique pour l'ensemble du pays? Pourquoi ne pas aider les gens à donner suite à cette mesure législative?
J'ai reçu passablement de correspondance à ce sujet. SaskTel a un système permettant à une personne de retracer les demandeurs qui ont composé son numéro. Voilà un élément important du dispositif qui nous garantira que, si nous faisons enlever nos noms de la liste, il y aura moyen de sévir contre ceux qui ne respectent pas la loi. Si nous voulons établir des normes élevées, nous devons être capables de savoir d'où viennent les appels téléphoniques.
Ironiquement, j'ai téléphoné à un télévendeur qui avait composé le numéro que j'ai vérifié hier. Et j'ai dû malheureusement composer une autre série de numéros pour faire cesser ces appels. Ça m'a coûté temps et argent. Il m'a fallu faire des interurbains.
L'ironie de la chose, c'est que, comme la plupart des gens de la Chambre, je ne suis jamais chez moi, alors je reçois rarement des appels de télémarketing. Cependant, j'ai été inondé de tels appels dernièrement. J'aimerais que ces télévendeurs enlèvent mon nom et mon numéro de téléphone de leur liste. Je suis disposé à acheter leurs produits, mais seulement s'ils ne me téléphonent pas.
Voilà qui est intéressant. En tant que consommateur, je veux savoir ce que vivent les électeurs de ma circonscription qui reçoivent régulièrement des appels de télévendeurs. Dans mon cas, le demandeur raccroche souvent parce que je n'y suis pas.
En outre, comme l'a mentionné un député d'en face, nous sommes en présence d'un système qui laisse le demandeur accaparer la ligne téléphonique, ce qui a des conséquences pour les gens qui vivent des urgences et pour nous tous lorsque des gens essaient de nous joindre. Nous devons donner un bon coup de balai dans cette industrie avec un système unique et simple d'inscription pour les électeurs de partout au pays.
Je félicite le ministre de l'Industrie d'avoir présenté ce projet de loi à la Chambre. C'est une importante mesure de protection des consommateurs. J'espère que le projet de loi sera renvoyé au comité le plus rapidement possible et que celui-ci étudiera d'autres exemples de projet de loi d'initiative parlementaire qui portent également sur ce problème.
Mme Nina Grewal (Fleetwood—Port Kells, PCC): Monsieur le Président, je suis heureuse de prendre la parole aujourd'hui au nom des électeurs de Fleetwood—Port Kells dans le cadre du débat sur le projet de loi C-37, Loi modifiant la Loi sur les télécommunications, à l'étape de la deuxième lecture.
Le projet de loi habiliterait le CRTC, le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, à constituer et à faire fonctionner un registre national des abonnés auto-exclus similaire à ceux qui existent déjà aux États-Unis et en Grande-Bretagne. Le projet de loi C-37 donnerait également au CRTC le pouvoir d'imposer de lourdes pénalités aux entreprises de télémarketing et de passer un marché avec une tierce partie du secteur privé afin qu'elle exploite le service.
Je tiens à appuyer le concept, mais le projet de loi met à côté de la plaque. Le projet de loi, qui comporte cinq maigres pages, est extrêmement avare de détails. Il ne nous dit rien d'éventuelles exceptions à la liste, des modalités de tenue de la liste, de la façon dont les entreprises de télémarketing consulteraient la liste, de la fréquence à laquelle ils doivent la consulter, de l'identité des personnes ou parties qui auraient accès à la liste ou de tout rapport sur la façon dont la gestion de la liste est faite. Tous ces détails cruciaux ne figurent pas dans le règlement.
Le secteur du télémarketing emploie plus de 270 000 Canadiens et, chaque année au Canada, il se vend par téléphone des biens et des services d'une valeur de 16 milliards de dollars.
Bon nombre de mes électeurs gagnent leur vie grâce à cette industrie. L'an dernier, le géant financier américain JPMorgan Chase & Co. est devenu la plus récente entreprise à établir un centre d'appels à Surrey par suite de l'ouverture de son centre de service à la clientèle employant plus de 800 personnes dans le centre-ville de Surrey. Les centres d'appels ont permis d'accroître considérablement le niveau de l'emploi dans le Lower Mainland au cours des quelques dernières années.
En plus de la JPMorgan, la société RMH Teleservices Inc. emploie maintenant plus de 1800 personnes à Surrey-Nord et devraient recruter d'autres travailleurs au cours de l'année. En août 2003, eBay a fait part de ses plans en vue de l'expansion de son centre d'appels de Burnaby dont le personnel devait passer de 200 à 1000 employés en deux ans.
Il y a actuellement environ 14 000 emplois reliés à des centres d'appels dans la région métropolitaine de Vancouver. Ces centres engagent bon nombre de travailleurs arrivant sur le marché du travail. En plus du personnel de première ligne, pour la plupart des employés de bureau gagnant de 9 à 13 dollars de l'heure, ces centres emploient également du personnel chargé de la supervision, de la gestion, des ventes et des systèmes d'information.
On ne sait pas réellement quelles pourraient être les conséquences de l'adoption d'une liste nationale denuméros de téléphone exclus pour l'industrie canadienne du télémarketing. Cela dépendra en partie des exemptions qui pourraient être accordées.
Aux États-Unis, les responsables de l'industrie s'attendent à ce que plus du tiers des travailleurs perdent leur emploi au cours des deux prochaines années à cause de l'adoption de règles interdisant les appels non sollicités chez nos voisins du Sud.
Au Canada, les règlements obligent déjà les télévendeurs à conserver une liste de gens ne souhaitant pas être contactés et à respecter leur demande pendant trois ans. Toutefois, la plupart des gens ne sont pas au courant de l'existence d'une telle liste et ils raccrochent tout simplement lorsqu'ils reçoivent un appel d'une télévendeur. S'ils restaient en ligne, ils se verraient demander s'ils désirent voir leur numéro exclus de toutes les listes conservées par l'agence de télémarketing, et pas seulement d'une liste utilisée pour un client en particulier. Cela se fait depuis l'automne dernier.
L'Association canadienne du marketing, dont les 800 membres collectifs comprennent les principales institutions financières du Canada, les compagnies d'assurance et les organismes de charité, a ardemment défendu l'adoption d'une liste nationale denuméros de téléphone exclus. Elle tient d'ailleurs une telle liste pour ses propres membres depuis 1988. Cette liste restreint également le nombre d'offres transmises par courrier et par fax et elle comprend maintenant plus de 450 000 numéros de téléphone. Cette liste n'a pas une grande valeur légale et elle est très peu connue et seulement 80 p. 100 des télévendeurs membres de l'association la respectent.
Aux États-Unis, le service de retrait d'adresse et de numéro de téléphone est entré en vigueur le 1er octobre 2003. Des millions d'Américains s'y sont inscrits depuis et le registre compte maintenant plus de 62 millions de numéros de téléphone. Une compagnie de télémarketing qui appelle un numéro inscrit sur la liste peut se voir imposer une amende pouvant atteindre 11 000 $ par appel.
Aux États-Unis, cependant, la loi exempte certains des plus gros utilisateurs de télémarketing, par exemple, les sociétés de téléphonie interurbaine, les sociétés aériennes, les banques et les coopératives de crédit, les compagnies d'assurance, les organismes de bienfaisance, les sondeurs, les organisations politiques. En outre, une entreprise qui a déjà des rapports commerciaux avec une personne n'a pas à tenir compte de son inscription sur la liste des personnes auto-exclues. Avec toutes ces exemptions, je ne sais trop qui les Américains peuvent éviter en s'excluant.
L'Association canadienne du marketing et l'Association des banquiers canadiens soutiennent que le cadre réglementaire qui a été instauré par le CRTC est coûteux, inefficace et trop général. Ces associations veulent que ce cadre soit remplacé par un système d'auto-exclusion semblable au système américain. Actuellement, en plus d'exiger des listes d'auto-exclusion, le CRTC exige que, avant même de commencer le message de vente, la personne qui appelle s'identifie, dise pour qui elle travaille et offre de donner un numéro de téléphone sans frais où quelqu'un répondra pendant les heures normales d'affaires.
L'Association canadienne du marketing et l'Association des banquiers canadiens estiment que ces règles ne devraient pas s'appliquer aux clients existants d'une entreprise. Selon le président de l'Association canadienne du marketing, John Gustavson, ces règlements sont mauvais pour l'industrie et suscitent de l'insatisfaction chez les clients.
Le projet de loi C-37 ne ferait pratiquement que permettre au CRTC de créer des bases de données, d'émettre des ordonnances concernant ces bases de données, de déléguer ses pouvoirs sur ces bases et de faire respecter ces pouvoirs au moyen d'amendes. Les dispositions sur les amendes sont beaucoup plus longues que les dispositions sur les bases de données qui pourraient être créées.
Les détails du fonctionnement des listes d'auto-exclusion sont entièrement laissés à la discrétion du CRTC. J'estime que c'est là un affront fait au Parlement. En tant que députés, nous ne devrions pas nous en tenir uniquement au principe d'un projet de loi. Nous devrions pouvoir nous prononcer également sur les détails de la loi proposée.
On peut voir d'un bon oeil l'idée d'un registre des abonnés auto-exclus, mais avant de pouvoir appuyer le projet de loi, il importe aussi de savoir si, par exemple, la loi s'appliquera aux organismes caritatifs et aux sondeurs ou aux candidats qui tentent d'entrer en communication avec leurs électeurs pendant une campagne électorale et, le cas échéant, selon quelles modalités, si elle ne visera que le baratin publicitaire ou les messages enregistrés et télécopiés, et quels seront les frais que devront payer les télévendeurs pour avoir accès à la base de données.
Tout l'aspect monétaire est particulièrement préoccupant. Le gouvernement prétend que le registre s'autofinancera, mais il ne dit rien de plus. Il faut veiller à ce que le registre des abonnés auto-exclus ne devienne pas une réplique du registre des armes à feu, en ce qui concerne aussi bien les coûts que la gestion. Les électeurs de ma circonscription en ont assez des télévendeurs qui les appellent, mais ils ne veulent pas pour autant d'un autre fiasco de deux milliards de dollars.
À titre de consommatrice, je n'aime pas recevoir d'appels de télévendeurs. Un registre des abonnés auto-exclus est pour les consommateurs une façon de protéger leur foyer contre des intrusions qui peuvent être particulièrement envahissantes. Bref, il offre un choix aux consommateurs.
À titre de parlementaires, nous devons protéger le droit à la vie privée et de réduire le risque de télémarketing abusif. Pour ce faire, nous devons toutefois adopter un projet de loi clair, qui expliquera le fonctionnement exact d'un registre des abonnés auto-exclus, y compris les exemptions prévues et les coûts qui s'ensuivront pour les consommateurs.
Le projet de loi C-37 est avare de détails. Presque tout sera précisé dans le règlement à ce sujet. Il serait irresponsable qu'à titre de députée, j'appuie l'adoption du projet de loi dans sa forme actuelle. Je vais donc m'opposer au projet de loi, à moins qu'il ne soit considérablement amendé de manière à préciser tous les détails de la liste proposée.
L'hon. Andrew Telegdi (Kitchener—Waterloo, Lib.): Monsieur le Président, je suis ravi de prendre la parole aujourd'hui pour appuyer le projet de loi C-37, Loi modifiant la Loi sur les télécommunications.
Il est évident que les consommateurs salueront un projet de loi leur fournissant un moyen simple et efficace d'enrayer le télémarketing non sollicité. Nombre d'entre eux pourraient décider de placer leur numéro de téléphone sur la liste des numéros exclus afin de protéger leur vie privée.
Quels effets ce projet de loi aura-t-il sur l'industrie du télémarketing? Quels effets aura-t-il sur les centres d'appel qui fournissent des emplois à des Canadiens? Ce projet de loi est peut-être une bonne nouvelle pour les consommateurs, mais en est-il une mauvaise pour l'industrie?
Le Canada est devenu un endroit clé pour les centres d'appel. C'est à un personnel très qualifié et multilingue qu'il doit sa réputation dans ce secteur. Il mise aussi sur une excellente infrastructure de télécommunications, sur des coûts de main-d'oeuvre concurrentiels et sur de bas coûts d'entreprise, dans l'ensemble.
Nombre d'entreprises ont établi leurs centres d'appel au Canada afin de tirer profit de ces avantages. Selon une étude sur les centres d'appel effectuée en 2004, il y a au Canada plus de 6 000 centres d'appel qui emploient 360 000 personnes. On estime que 128 centres d'appel créant 40 000 nouveaux emplois ont été créés ou agrandis au Canada en 2002 et 2003.
La mise en vigueur, par le CRTC, d'une liste de numéros de téléphone exclus menacerait-elle ces emplois? Afin de trouver une réponse à cette question, la Chambre doit comprendre la nature changeante de l'industrie du centre d'appel. J'aimerais faire le survol de la différence entre les activités de télémarketing visant la population en général et celles visant une clientèle établie.
Certains centres d'appel font ce qu'on appelle des appels impromptus à des clients potentiels, des clients avec lesquels aucune relation n'existe; ils s'adressent à la population en général. Mes collègues qui n'ont jamais reçu d'appel de ce type de télévendeurs ne le savent peut-être pas, mais ces derniers se font dire bien des non avant d'obtenir un oui à leurs questions. C'est la nature même des appels impromptus. Les télévendeurs doivent faire des tas d'appels avant de trouver une personne qui sera intéressée par le produit ou le service offert.
Les chances d'obtenir un oui sont grandement améliorées lorsque ces télévendeurs travaillent à partir d'une liste qui exclut les personnes refusant explicitement d'être contactées. Il s'agit là d'une façon efficace de réduire le nombre d'appels infructueux, et partant, d'augmenter l'efficacité et la productivité des employés de ce secteur de l'industrie.
En fait, l'Association canadienne du marketing est elle-même d'avis que la création d'une liste des abonnés auto-exclus constitue une solution préférable aux autres formes de réglementation.
Par exemple, la réglementation actuelle oblige les sociétés de télémarketing à tenir leur propre liste d'abonnés auto-exclus. Ce qui ne satisfait personne. Les télévendeurs sont mécontents parce que la tenue d'une liste comporte des coûts administratifs. Les consommateurs sont eux aussi insatisfaits parce que, même s'ils s'inscrivent sur la liste d'exclusion d'une société, ils sont tout de même importunés par de nombreuses autres sociétés de télémarketing.
La création d'une liste nationale d'abonnés auto-exclus constituerait un mode de réglementation plus économique et plus efficace. Les consommateurs s'inscriront sur la liste et les télévendeurs paieront pour s'y s'abonner, contribuant ainsi à son maintien.
D'autre part, compte tenu des changements importants qui se produisent actuellement dans l'industrie des centres d'appels, le projet de création d'une liste des abonnés auto-exclus arrive à point nommé. La transition vers un système d'appels d'arrivée est en cours. Les centres d'appels de ce nouveau type de télémarketing sont appelés les centres de contact de la gestion des relations-clients. Ces centres d'appels constituent la majeure partie de l'industrie actuelle. Ce secteur d'activité en rapide croissance gère les commandes de clients et les ventes par catalogue, fournit de l'aide pour les ventes en ligne et compte des centres de service qui s'occupent des appels d'arrivée.
Le projet de loi à l'étude n'aurait aucune incidence sur les appels d'arrivée.
Il serait peut-être utile de jeter un coup d'oeil sur ce qui s'est passé dans l'industrie aux États-Unis, où un registre national des abonnés auto-exclus est en vigueur depuis plus d'un an.
Aux États-Unis, les appels d'arrivée des centres d'appel représentent une part de moins en moins importante de leurs activités commerciales depuis 1998, soit cinq ans avant l'adoption de la loi sur les listes d'abonnés auto-exclus. Par contre, le pourcentage d'appels d'arrivée est en croissance.
On observe la même tendance au Canada, où 90 p. 100 des centres d'appels pratiquent surtout des appels d'arrivée, comparativement à 10 p. 100 pour les communications sortantes. La nature des activités des centres d'appels au Canada a d'ores et déjà changé.
Je crois que cette tendance se maintiendra une fois que le CRTC aura mis en place un régime national de listes d'abonnés auto-exclus. Les centres d'appels verront davantage à assurer aux personnes qu'ils appelleront, un service de meilleure qualité pour des produits et services qu'elles ont déjà, au lieu d'essayer de les persuader d'acheter quelque chose. Je crois que cette activité commerciale constitue une source de création d'emplois beaucoup plus stable.
Nous voulons une réglementation qui permette aux consommateurs de mieux contrôler ceux qui veulent les contacter. Nous voulons une réglementation qui permette aux télévendeurs qui appliquent un plan d'entreprise bien conçu, de prospérer. Le projet de loi assurera un tel équilibre.
J'invite la Chambre à appuyer ce projet de loi.
M. Gurmant Grewal (Newton—Delta-Nord, PCC): Monsieur le Président, je suis très heureux d'intervenir aujourd'hui au nom de mes électeurs de Newton—Delta-Nord afin de participer au débat sur le projet de loi C-37, Loi modifiant la Loi sur les télécommunications.
Le projet de loi va permettre au CRTC de créer un registre des abonnés auto-exclus et de l'appliquer. Plus particulièrement, le projet de loi C-37 va modifier la disposition de la Loi sur les télécommunications qui porte sur le télémarketing en ajoutant le pouvoir d'établir des bases de données et de prendre des ordonnances relatives à ces dernières. Ce pouvoir peut être délégué à toute personne, y compris un organisme créé par le CRTC. La personne ou l'organisme exerçant les pouvoirs délégués peut imposer des tarifs, et les sommes perçues sont réputées ne pas être des fonds publics. Le projet de loi prévoit également des sanctions administratives pouvant aller, pour toute contravention, jusqu'à 1 500 $ dans le cas d'une personne physique et jusqu'à 15 000 $ pour une personne morale.
Ce projet de loi a été présenté pour la première fois au cours de la dernière législature, mais il est mort au Feuilleton.
Nous avons tous reçu des appels non sollicités venant de gens qui voulaient nous vendre un produit ou un service. Le télévendeur peut vouloir nous vanter les mérites du journal local, d'une compagnie de carte de crédit, d'un service de nettoyage, d'une oeuvre de bienfaisance ou même d'un membre de la classe politique qui souhaite obtenir notre vote. Parfois, nous pouvons accueillir avec plaisir l'appel. Il peut nous donner des renseignements utiles sur un produit ou un service qui nous intéresse, mais d'autres fois, il ne fait que nous déranger.
De nombreux députés ont peut-être reçu des appels à des heures indues. Parfois, nous recevons des appels lorsque nous n'en voulons pas. J'en ai déjà reçu à quatre heures du matin et, lorsque j'ai répondu, j'ai entendu le son d'un télécopieur. La fois suivante, j'ai mis en marche le télécopieur et j'ai découvert qu'il s'agissait d'une entreprise de télémarketing essayant de vendre un service quelconque.
Dans mon bureau de comté, je reçois souvent des télécopies vantant les mérites de produits ou de services, mais les bureaux des députés n'ont absolument rien à voir avec ces produits ou services. Parfois, c'est dérangeant et entraîne un énorme gaspillage de temps. D'un autre côté, il arrive qu'il s'agisse de renseignements utiles dont les gens veulent.
À mon arrivée au Canada, c'est une entreprise de télémarketing qui m'a offert mon premier emploi. J'ai travaillé deux ou trois semaines pour cette entreprise. J'ai découvert qu'elle vendait aux aînés aux États-Unis des billets de loterie. C'était une escroquerie. La société leur soutirait de l'argent. Les aînés peuvent développer une dépendance à l'égard de choses comme des billets de loterie. Ils perdent probablement plus d'argent qu'ils ne peuvent en gagner. J'ai jugé que c'était une pratique tout à fait contraire à l'éthique et j'ai immédiatement quitté mon emploi, car je ne pouvais faire cela.
Un sondage réalisé par le Centre de recherche Décima, probablement par téléphone, a révélé qu'une grande majorité de Canadiens, soit 75 p. 100, souhaitent que le gouvernement mette sur pied une liste d'abonnés auto-exclus pour les protéger contre le marketing téléphonique. Je suis d'accord avec les résultats de ce sondage. Les gens ne veulent pas recevoir d'appels indésirables. Je suis d'accord avec l'esprit du projet de loi, mais, comme les députés peuvent le constater, il est mal conçu et représente plus une intention qu'une réelle ligne directrice. Il contient beaucoup de vent et très peu de mesures concrètes.
Le sondage a également révélé que les Canadiens ne veulent pas payer pour faire partie de cette liste. Soixante pour cent des répondants ont dit ne pas être prêts à payer pour ce service.
En 2003, les États-Unis ont établi en grande pompe une liste nationale d'abonnés auto-exclus pour contrer la sollicitation téléphonique non désirée. Le gouvernement canadien tente maintenant de suivre l'exemple des Américains, bien entendu.
Il existe déjà des listes d'abonnés auto-exclus au Canada. L'Association canadienne du marketing enregistre des consommateurs dans sa base de données d'abonnés auto-exclus depuis 1988. De plus, le CRTC exige déjà que toutes les entreprises de télémarketing aient leur propre liste d'exclusion. Les consommateurs peuvent demander d'être ajoutés à cette liste. Le seul problème est qu'ils doivent d'abord être appelés par les télévendeurs. Les listes d'auto-exclusion sont valides pendant trois ans.
À la lecture du projet de loi C-37, la première chose que l'on remarque est son manque de contenu. La majorité des détails sont laissés aux règlements. Nous ne savons donc pas s'il y aura des exceptions à la liste, combien cela coûtera-t-il, qui en sera responsable et ainsi de suite. Ce sont là d'importants aspects sur lesquels nous devrions nous pencher.
Comment pouvons-nous faire notre travail de députés si les projets de loi sont si dénués de contenu? Le gouvernement nous demande de lui donner carte blanche. Ce n'est malheureusement pas la première fois qu'il procède ainsi.
C'est une réalité incontournable: les textes législatifs arrivent à la Chambre sans les règlements d'application. Une grande partie du droit qui encadre les Canadiens ne figure pas aux Lois du Canada, mais aux milliers de règlements pris en vertu des pouvoirs conférés par les lois adoptées par le législateur fédéral.
Chaque année, le gouvernement fédéral prend environ 1 200 nouveaux règlements. Depuis 1975, le gouvernement en a pris plus de 28 000. Il y en a pour plus de 122 000 pages de règlements.
Il présente des projets de loi faibles et peu précis qui sont souvent incomplets et rédigés en termes trop généraux. Les règlements suivent les lois que nous adoptons et il arrive qu'ils soient en conflit avec l'objet de celles-ci. Il arrive que les règlements soient complètement hors sujet. Le Parlement perd tout contrôle à partir de l'adoption de la loi, mais le règlement d'application peut aller jusqu'à contredire la loi.
Cela laisse le champ libre au gouvernement de prendre des règlements ayant une portée juridique sans qu'il y ait des mécanismes de contrôle. Ce faisant, le gouvernement libéral a littéralement vidé le processus parlementaire de toute notion de responsabilité et de transparence dans la formulation des lois. Le Parlement n'est plus au centre du processus législatif.
Vingt pour cent des textes législatifs que nous voyons au pays sont adoptés à la Chambre. Les 80 p. 100 qui restent viennent s'y ajouter subrepticement sous forme de règlements qui ne font pas l'objet d'un débat et qui ne sont pas soumis à l'examen du public. À toutes fins pratiques, le gouvernement fédéral libéral ne gouverne pas le Canada, il le régit.
Les députés débattent avec passion les projets de loi présentés à la Chambre et votent ensuite pour ou contre, selon le bien-fondé de la mesure législative proposée. Les règlements, par contre, ne font l'objet de pratiquement aucun débat à la Chambre ou à l'autre endroit, d'aucune étude ou consultation publique, voire d'aucun examen par les médias. C'est une atteinte à la démocratie.
Le Comité mixte permanent d'examen de la réglementation est le seul à faire un examen des règlements adoptés par le Parlement, et il s'agit souvent d'un examen limité. Les députés et les sénateurs qui font partie du comité, ainsi que le conseiller juridique et le personnel travaillent d'arrache-pied pour passer au peigne fin les milliers de textes sur des sujets arides, techniques et juridiques. Dans le cadre de leur mandat ingrat, ils n'ont pas l'occasion d'examiner les mesures législatives dans leur ensemble, car leur mandat est limité.
Comme députés, la plupart d'entre nous voulons mettre un terme au fléau des appels de télémarketing, mais le libellé du projet de loi laisse à désirer et ne traite pas des questions importantes qui en découlent.
Il y a au Canada un grand nombre de problèmes auxquels il faudrait accorder une priorité plus élevée. Les gens peuvent faire des choix. Les priorités du gouvernement ne sont pas les bonnes. Ses méthodes ne sont pas appropriées. Par conséquent, je ne peux appuyer la mesure législative proposée. En toute honnêteté, il me faut davantage d'informations. D'une part, je veux savoir combien ce programme va coûter et, d'autre part, il y a un grand nombre dossiers qui sont aussi pressants.
Enfin, j'accepte le principe en soi, mais pour qu'il puisse fonctionner, il nous faut davantage d'information. Je ne peux donc appuyer ce projet de loi tant qu'il n'aura pas été amendé.
Le président suppléant (M. Marcel Proulx): Conformément à l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre la question qu'elle abordera à l'heure de l'ajournement ce soir, à savoir: le député de Montmagny--L'Islet--Kamouraska--Rivière-du-Loup, La société Noranda.
[Français]
M. Marc Godbout (Ottawa—Orléans, Lib.): Monsieur le Président, j'ai le plaisir de prendre la parole aujourd'hui pour appuyer le projet de loi C-37, Loi modifiant la Loi sur les télécommunications.
J'aimerais, d'entrée de jeu, prendre quelques secondes pour remercier la députée de Burlington de l'excellent travail qu'elle a fait dans le passé, et qui a fait sienne cette cause de limiter les appels de télémarketing.
Le CRTC a adopté, en 1994, des règlements pour restreindre le télémarketing non sollicité. Cependant, selon ces règlements, les personnes ne voulant pas être dérangées par des appels d'entreprises voulant leur vendre quelque chose risquent d'avoir à s'inscrire sur des centaines de listes tenues par des entreprises individuelles.
[Traduction]
Ce n'est certainement pas un système fonctionnel. Le projet de loi qui nous est soumis crée un meilleur cadre réglementaire puisqu'il donne au CRTC les outils nécessaires pour créer une liste unique des abonnés auto-exclus pour tout le pays. Dans sa décision de télécom 2004-35, le CRTC recommandait qu'on lui accorde des pouvoirs additionnels pour qu'il puisse établir un régime national contre les appels non sollicités. Entre-temps, il a établi de nouvelles règles de télémarketing pour renforcer le régime actuel.
Le secteur du télémarketing s'est opposé aux nouvelles règles destinées à renforcer le cadre réglementaire actuel. L'Association canadienne du marketing, l'Association des banquiers canadiens et trois entreprises de télémarketing ont demandé au gouvernement de suspendre ces règles provisoires.
Je souligne que l'Association canadienne du marketing a un service de liste d'exclusion depuis 1989. Depuis 1993, les 800 entreprises qui sont membres de cette association ont l'obligation de respecter cette liste. Or, malgré ce registre établi volontairement, les Canadiens continuent d'être insatisfaits des moyens qu'on leur donne pour mettre fin aux appels non sollicités.
L'Association canadienne du marketing elle-même a demandé que le gouvernement adopte une loi établissent une liste des abonnées auto-exclus. Certains acteurs du secteur du télémarketing réclament une réglementation intelligente. Le gouvernement a fait de l'adoption d'une telle réglementation une priorité, et ce projet de loi vise justement à soumettre les centres d'appel du Canada à une réglementation intelligente.
D'autres pays ont adopté de nouveaux règlements visant à protéger les consommateurs contre les appels de télémarketing non désirés. En 2003, la Federal Trade Commission des États-Unis a mis sur pied un registre national d'abonnés auto-exclus. Quelque 62 millions d'Américains se sont inscrits au cours de la première année seulement.
En janvier dernier, un sondage en ligne a révélé que le registre américain est une réussite. Plus de la moitié des adultes inscrits ont déclaré n'avoir reçu aucun appel de télémarketing ou beaucoup moins qu'avant. Selon ce sondage, mené par Harris Interactive, le nombre d'appels non sollicités reçus par ceux qui se sont inscrits au registre est tombé, en moyenne, de 30 à 6 appels par mois.
Le fonctionnement du registre américain est simple. Les gens inscrivent leur numéro de téléphone à la maison, et non leur nom, en ligne ou en composant un numéro sans frais. Les vendeurs et entreprises de télémarketing des États-Unis doivent payer pour avoir accès au registre. Ils doivent le consulter tous les 90 jours pour supprimer de leurs listes les noms qui s'y trouvent.
[Français]
Pour certains genres d'appels, les entreprises de télémarketing ne sont pas tenues de respecter le registre: mentionnons les appels à des clients actuels, les appels faits à des fins d'enquête ou de sondage et ceux faits pour le compte d'organismes de bienfaisance. Les entreprises de télémarketing travaillant pour des organismes de bienfaisance doivent toutefois tenir leur propre liste de personnes ne voulant pas être appelées.
Les coûts du registre américain sont relativement modestes. Dans sa première année d'existence, AT&T assure l'exploitation du registre. Celui-ci a coûté 3,5 millions de dollars américains. Les coûts sont recouvrés auprès des entreprises de télémarketing et des autres vendeurs par le biais de droits d'accès au registre. Aux États-Unis, les consommateurs ne paient rien pour s'inscrire sur la liste.
Qu'en est-il dans d'autres pays? En 1999, le Royaume-Uni a adopté des dispositions législatives créant un service d'indication des préférences en matière d'appels téléphoniques pour protéger les gens contre les appels téléphoniques ou les envois par télécopieurs non désirés émanant d'entreprises de télémarketing. Les mesures législatives ont été modifiées en 2003, de façon à ce qu'elles s'appliquent à toutes les télécommunications.
Au Royaume-Uni, les restrictions imposées à l'industrie du télémarketing s'appliquent à une vaste gamme d'activités, dont la vente de biens ou de services, mais aussi à la promotion des buts et des idéaux des organismes, y compris les organismes de bienfaisance ou les partis politiques sollicitant des fonds ou un appui.
Les coûts du service sont recouvrés auprès de l'industrie du marketing direct. Encore une fois, les consommateurs n'ont à payer aucun droit d'inscription.
En fin de compte, la mise en oeuvre des régimes de protection contre les appels de télémarketing a constitué dans d'autres pays un moyen rentable de mettre les consommateurs à l'abri du télémarketing non sollicité. L'expérience des autres pays nous donne des exemples dont nous pouvons nous inspirer pour créer un système canadien. Le projet de loi à l'étude dote le CRTC des outils dont il a besoin pour établir une liste d'abonnés auto-exclus adaptée aux besoins du Canada. Le CRTC désignera un administrateur indépendant qui s'occupera de la liste.
Il créera un régime d'amendes. Il consultera l'industrie et les consommateurs pour désigner les organismes qui devraient être exemptés du régime de réglementation.
[Traduction]
Les faits sont clairs. Presque toutes les parties et le CRTC lui-même reconnaissent que les règles actuelles ne servent pas les intérêts des Canadiens touchés par le télémarketing excessif. L'industrie estime que les règles provisoires du CRTC sont trop onéreuses et d'un océan à l'autre les Canadiens applaudiront les efforts que nous déployons pour les libérer des appels téléphoniques dérangeants.
J'exhorte les députés à appuyer le projet de loi et à le soumettre à l'examen du comité. Ce projet est bon pour la protection de notre vie privée et bon pour les Canadiens.
M. James Moore (Port Moody—Westwood—Port Coquitlam, PCC): Monsieur le Président, je prends la parole au sujet du projet de loi C-37, Loi modifiant la Loi sur les télécommunications.
J'ai remarqué que le projet de loi n'a pas de titre abrégé. S'il en avait, ce serait la loi sur le contrôle des télévendeurs.
Si on demandait au Canadien moyen de dresser une liste des plus grands irritants de la vie, les télévendeurs y seraient sûrement en tête. En effet, le sentiment qu'ils inspirent est si vif que quand la Federal Trade Commission a dressé un registre national de numéros de téléphone à exclure aux États-Unis, il a reçu plus de 1 000 demandes par seconde sur son site Web. De toute évidence, le public appuie la création d'une liste de numéros exclus.
Cependant, le CRTC est l'un des organismes gouvernementaux les moins bien vus au pays. En effet, un nombre croissant de Canadiens estiment qu'il est insensible aux changements de plus en plus rapides qui bouleversent l'industrie des télécommunications, que son approche de la réglementation est archaïque et qu'il ne répond pas aux besoins des citoyens canadiens. Et c'est à cet organisme que le gouvernement voudrait confier la création de cette liste.
Pour de nombreux Canadiens, cela reviendrait à confier notre système de soins de santé aux anciens dirigeants d'Enron. Tous les Canadiens veulent un système de soins de santé, mais ils ne font pas confiance à des gestionnaires de style Enron.
Qui plus est, les propres cadres du CRTC ont affirmé que l'organisme n'a pas les moyens de gérer une telle liste et de la faire respecter. En outre, même si le CRTC était l'organisme idéal pour dresser une liste de numéros exclus et disposait des pouvoirs nécessaires pour veiller à ce qu'elle soit respectée, il a déjà du mal à s'acquitter de ses responsabilités actuelles.
Le CRTC est actuellement sur la sellette pour avoir révoqué la licence de CHOI-FM au Québec, pour la façon dont il a traité la situation avec Al Jazeera et Fox News et pour l'incompétence totale dont il a fait preuve dans l'élaboration d'une politique relative à la télévision par satellite. Il suffit de demander à la plupart des Canadiens ce qu'ils pensent de la capacité du CRTC à mener des consultations sérieuses pour constater que les réponses sont peu encourageantes. Certains diraient même que les décisions du CRTC sont sans conséquence. Seul le CRTC attribuerait une catégorie 2 à une chaîne à contenu ethnique tout en exigeant qu'elle diffuse des programmes canadiens et qu'elle convainque une compagnie de câblodistribution ou de télévision par satellite de la distribuer.
La question des chaînes à contenu ethnique a été renvoyée par le CRTC à divers comités de la Chambre, et vice versa, sans que la question ne soit vraiment réglée. D'aucuns diront que le CRTC n'a pas tenu de consultations, mais que le lien entre ces consultations et des politiques concrètes profitant aux Canadiens est souvent, au mieux, très mince.
Par conséquent, je ne trouve aucun réconfort dans le communiqué du 13 décembre du ministre de l'Industrie, dans lequel il annonce son intention de présenter un projet de loi.
Dans le communiqué, il dit:
Si le projet de loi est adopté, le CRTC consultera les Canadiens sur la mise en oeuvre d'une liste nationale des abonnés auto-exclus. Le CRTC prévoit lancer ces consultations peu après l'adoption du projet de loi par le Parlement. Les consultations porteraient notamment sur la question de savoir s'il faut prévoir que certaines organisations soient exemptées des restrictions associées à un registre des abonnés auto-exclus. |
Or, si on lit attentivement le projet de loi C-37, on constate, non sans surprise, que ce dernier n'oblige aucunement le CRTC à tenir des consultations. Le projet de loi ne ferait qu'ajouter un nouvel article 41.2 à la Loi sur les télécommunications, qui se lirait essentiellement comme suit:
Pour l’application de l’article 41, le Conseil peut: |
a) gérer des systèmes informatiques, administratifs ou opérationnels et des banques de données; |
b) trancher toute question et rendre toute ordonnance en ce qui touche ces systèmes et banques de données. |
Plus on lit le projet de loi C-37, plus on se rend compte de son objectif réel: permettre au gouvernement libéral de se targuer d'avoir maté les sociétés de télémarketing soit avoir rien fait en réalité.
Le projet de loi C-37 n'est donc qu'un miroir aux alouettes. Il laisse entendre qu'un organisme affichant un piètre bilan en matière de consultations publiques peut consulter le public, qu'il pourrait forcer un organisme surchargé à assumer de nouvelles responsabilités sans lui accorder de nouvelles ressources. Il ne tient pas compte du fait que le CRTC affirme lui-même ne pas disposer des outils voulus pour gérer une telle liste ni du pouvoir nécessaire lui permettant de le faire correctement.
La version anglaise du projet de loi C-37 n'a que deux pages et demi et utilise le mot « may » vingt fois. Le CRTC peut dresser une liste, déléguer des pouvoirs, imposer des peines. Il n'est pas tenu de faire quoi que ce soit et, en outre, il a dit au gouvernement qu'il ne disposait pas des ressources nécessaires pour gérer cette liste.
Si le gouvernement veut vraiment dresser une telle liste, le Parlement doit en définir clairement les paramètres et accorder des exemptions raisonnables aux organismes de bienfaisance, aux partis politiques, aux maisons de sondage et aux sociétés qui souhaitent communiquer avec leurs clients actuels. Nous devons veiller à fournir les ressources voulues à l'organisme chargé de la mise en oeuvre et de l'application de cette idée.
Il est utile à cet égard de prendre connaissance de l'expérience législative des États-Unis. En 1994, le Congrès des États-Unis a adopté la loi sur le télémarketing, la fraude et les abus à l'égard des consommateurs, 15 U.S.C., s.s. 1601-1608.
L'article 3 de cette loi se lit comme suit:
La [Federal Trade] Commission établira des règles interdisant les actes ou pratiques de télémarketing trompeurs et autres actes ou pratiques abusifs en matière de télémarketing. |
L'article 10 se lit comme suit:
Cinq ans après la date de première promulgation des règles correspondant à l'article 3, la Commission se penchera sur la mise en oeuvre de la présente loi et sur ses effets sur les actes ou pratiques trompeurs en matière de télémarketing et fera rapport de son examen au Congrès. |
La loi étasunienne impose des obligations à la Federal Trade Commission et, plus important encore, elle la contraint de faire rapport au Congrès, soit à l'assemblée législative.
La FTC a effectivement fait rapport et, le 28 janvier 2003, le représentant du troisième district du Congrès pour la Louisiane, Billy Tauzin, a proposé à la Chambre la résolution 395, loi autorisant la Federal Trade Commission à prélever des droits visant la création et la mise en application d'une liste des abonnés auto-exclus.
Selon l'article 4 de la loi, la FTC doit transmettre annuellement des rapports détaillées à divers comités du Congrès. Ces rapports doivent englober les aspects suivants: une analyse de l'efficacité de la liste des abonnés auto-exclus à titre de répertoire national; le nombre de consommateurs y ayant inscrit leur nom; le nombre de personnes payant des droits d'accès à la liste et le montant de ces droits; une analyse des résultats des efforts de coordination et de mise en application de la liste des abonnés auto-exclus; un examen des mesures d'application.
Dès le lendemain, soit le 29 janvier 2003, le Comité de l'énergie et du commerce de la Chambre des représentants s'est posé une question fondamentale: combien cela coûtera-t-il? Voilà une question cruciale que les libéraux ne se sont pas posée au sujet du projet de loi.
Le 4 février 2003, la Commission des finances du Congrès a estimé que les amendes s'élèveraient à environ 18 millions de dollars et qu'il en coûterait quelque 13 millions par année au trésor américain. Le président Bush a signé la loi HR 395 le 11 mars 2003.
Il faut savoir que le registre américain des numéros de téléphone exclus ne vise aucunement les oeuvres de bienfaisance, les organisations politiques, les maisons de sondage téléphonique et certaines grosses entreprises. Selon moi, le gouvernement n'a pas bien réfléchi aux tenants et aux aboutissants de ce projet de loi, ou encore ne les a pas parfaitement compris ou n'a pas vraiment consulté au sujet de ce dernier; et, aspect plus important pour les contribuables, il est assez clair que le gouvernement ne voit pas l'importance de le soumettre à une analyse coût-bénéfice en bonne et due forme.
Le registre américain bénéficiera vraiment aux citoyens de ce pays. La Commission fédérale du commerce a le pouvoir nécessaire pour en assurer la mise en application. Elle a imposé des pénalités à des entreprises comme California Pacific Mortgage et AT&T. En outre, les plus gros contrevenants comme Faxes.com se sont fait signifier des amendes atteignant 5,4 millions de dollars.
De grandes entreprises de télémarketing, par exemple Mainstream Marketing Services, contestent la constitutionnalité du registre américain, invoquant le premier amendement qui garantit la liberté d'expression. Il n'en demeure pas moins que, d'après la Direct Marketing Association des États-Unis, le télémarketing auprès des 50 millions de membres et plus inscrits à son registre a été supprimée à 90 p. 100.
Je suis entièrement favorable à un tel registre. Malheureusement, ce que proposent les libéraux pourrait nous empêcher de mener des sondages auprès de nos propres électeurs. Nous n'avons qu'à songer au débat sur le mariage entre homosexuels pour constater combien il importe que les députés restent en contact avec leurs électeurs et défendent leurs valeurs à la Chambre.
Je souhaite que le gouvernement nous procure un authentique registre de numéros de téléphone exclus, qui puisse être véritablement mis en application. Je réclame une vaste consultation pour que nous soyons sûrs de faire ce qu'il faut et de pouvoir réussir du premier coup. Avant de créer son registre, la Commission fédérale du commerce a procédé à une étude de trois ans, a tenu nombre d'ateliers et de rencontres et a reçu plus de 64 000 mémoires de la population.
Je suis fatigué d'entendre le CRTC dire que nous ne pouvons pas le faire. Si le gouvernement veut créer un registre denuméros de téléphone exclus, je tiens à ce que le Parlement exerce une surveillance serrée sur tout le processus et qu'il s'assure de la disponibilité des ressources appropriées pour le mettre en oeuvre.
Le gouvernement libéral a l'habitude de présenter une idée ou de proposer une solution à un problème sans prévoir des moyens pour en assurer la réalisation. Les libéraux font l'éloge de nos forces armées. Ils les appuient en parole et sont toujours prêts à participer à des séances de photos à leurs côtés, mais ils ne leur fournissent pas les ressources dont elles ont besoin pour faire leur travail et accomplir ce qu'elles doivent accomplir pour que les libéraux puissent participer à ces séances de photos.
Que ce soit dans le dossier des soins de santé, dont les libéraux ne cessent de souligner l'importance auprès des Canadiens sans offrir le financement adéquat, ou dans celui des forces armées, dont les libéraux ne cessent de faire l'éloge et aux côtés desquelles ils sont toujours prêts à se faire photographier sans leur accorder les fonds dont elles ont besoin, le gouvernement libéral fait des promesses qu'il ne tient pas et il ne fournit pas les ressources nécessaires à la réalisation des objectifs.
Le projet de loi C-37 n'est qu'un squelette de ce dont nous avons réellement besoin. Je suis d'avis qu'il faut le renvoyer aux rédacteurs pour que le gouvernement puisse le soumettre à nouveau sous une forme qui respecte la volonté du Parlement. Pour que cette mesure législative ait un certain sens et qu'elle empêche réellement les entreprises de télémarketing d'envahir nos maisons et de causer le genre d'ennuis et de maux de tête que nous voulons tous voir disparaître, il est essentiel que nous consultions la population, que nous prévoyions des ressources pour faire appliquer la loi et que nous donnions suffisamment de mordant à cette mesure législative pour garantir que cette liste de numéros exclus sera aussi efficace qu'elle l'est aux États-Unis.
[Français]
Le président suppléant (M. Marcel Proulx): La Chambre est-elle prête à se prononcer?
Des voix: Le vote.
Le président suppléant (M. Marcel Proulx): Le vote porte sur la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter cette motion?
Des voix: D'accord.
Des voix: Avec dissidence.
Le président suppléant (M. Marcel Proulx): En conséquence, le projet de loi est renvoyé au Comité permanent de l'industrie, des ressources naturelles, des sciences et de la technologie.)
(La motion est adoptée et le projet de loi est renvoyé à un comité.)
* * *
[Traduction]
Loi sur le ministère du Commerce international
L'hon. Jim Peterson (ministre du Commerce international, Lib.) propose: Que le projet de loi C-31, Loi constituant le ministère du Commerce international et apportant des modifications connexes à certaines lois, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
--Monsieur le Président, j'ai aujourd'hui le grand plaisir d'intervenir au sujet d'une mesure législative qui officialise la création du ministère du Commerce international. Dans ce dossier, je suis ravi d'avoir l'aide du secrétaire parlementaire chargé des marchés nouveaux et émergents.
Le 12 décembre 2003, le gouverneur en conseil a pris un décret scindant le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international en deux entités distinctes.
La mesure législative dont nous sommes saisis aujourd'hui officialise les changements effectués en vertu de ce décret. Elle pose un jalon dans la création des deux ministères qui fonctionnent indépendamment l'un de l'autre depuis l'annonce que le premier ministre a faite il y a un an.
[Français]
La raison d'être du nouveau ministère est simple, c'est le commerce international et la création de richesses pour les Canadiens.
La politique internationale est une réalité extrêmement complexe et aux facettes multiples qui associe des éléments aussi divers que les droits de la personne, le développement, la diplomatie, la défense, la sécurité internationale et le commerce.
Dans ce nouveau siècle, le rôle actif du Canada sur la scène mondiale doit être fondé sur des stratégies intégrées qui reconnaissent les liens entre ces divers éléments. Cependant dans ce ministère, notre priorité est évidemment celle du commerce international.
[Traduction]
Le projet de loi C-31 prévoit la constitution d'un ministère du Commerce international dirigé par un ministre qui assure, au Canada comme à l’étranger, la direction et la gestion du ministère. Les attributions du ministre sont énoncées aux paragraphes 6 et 7 du projet de loi où il est notamment prévu:
6.(2) Dans le cadre de ses attributions, le ministre: |
b) conduit les négociations internationales; |
c) dirige et coordonne les relations du Canada à l’égard du commerce et des investissements internationaux; |
e) favorise le développement du droit international et son application, en ce qui concerne le Canada, au commerce et aux investissements internationaux; |
7. Le ministre peut, avec l’agrément du gouverneur en conseil, conclure avec les gouvernements et administrations provinciaux des accords relatifs à l’application de programmes... |
Derrière ces mots se cache une réalité: notre économie mondiale. C'est un monde en évolution dans lequel les entreprises s'internationalisent à un rythme étourdissant, un monde qui nous entraîne dans sa course. Les investissements commerciaux et tous les autres aspects du commerce moderne nous ancrent solidement dans cette économie, des partenariats en sciences et technologie aux accords d'octroi de licences, des petites entreprises de design et d'innovation éloignées les unes des autres au plan géographique jusqu'à la distribution mondiale de produits et services renommés mondialement en passant par les milliers de petites et moyennes entreprises. Notre prospérité en tant que nation est attribuable à notre réussite dans l'économie mondiale. Cette prospérité nous permet de faire les choix qui façonnent notre identité en matière de programmation sociale, de culture, de développement économique durable—et l'identité de la myriade d'intervenants qui contribuent à offrir au Canada la qualité de vie qui fait l'envie du monde entier.
Une réussite soutenue dans le commerce international ne saurait être une question de chance. Une telle réussite est vitale pour tous les Canadiens, et c'est pour cela que la Chambre est saisie de ce projet de loi portant création d'un ministère du Commerce international qui défendra notre compétitivité internationale dans le cadre de négociations, de relations et d'expansion commerciales, dans le cadre d'investissements, ainsi que dans le cadre d'un régime juridique équitable et transparent et de programmes offerts avec nos partenaires du gouvernement fédéral, des gouvernements provinciaux et territoriaux, du milieu des affaires et de tous les autres intervenants.
Je rappelle aux députés que les exportations sont à la base d'un emploi sur quatre au Canada, que les exportations de produits et services représentent 38 p. 100 de notre PIB, soit près d'un billion de dollars par année, et que notre commerce bilatéral avec les États-Unis représente plus de 1,2 million de dollars la minute. Les investissements étrangers au Canada dépassent 357,5 milliards de dollars et, ce qui est peut-être plus important, les investissements directs des Canadiens à l'étranger avoisinent les 400 milliards de dollars.
[Français]
Il n'y a pas une seule entreprise au Canada qui ne dépende, directement ou indirectement, des ventes à l'exportation ou des intrants importés, de la technologie étrangère, des compétences de nos immigrants ou, en un mot, d'un aspect quelconque du commerce international. Il n'y a pas un seul Canadien qui, d'une façon ou d'une autre, ne participe à l'économie mondiale. Même dans nos relations commerciales avec les États-Unis, nous les fournissons et, à leur tour, ils fournissent le monde.
C'est ainsi que l'avionique canadienne aboutit dans les airbus européens. Il en est de même du fonctionnement de nos chaînes d'approvisionnement ici, au Canada. Bien que de plus en plus d'entreprises tournent leur regard en direction de l'étranger, d'autres vendent bien leurs services sur le marché interne, sans se rendre compte qu'elles contribuent à la compétitivité internationale de leurs clients.
[Traduction]
La prospérité du Canada dépend de notre commerce mondial et c'est pourquoi le maintien de notre compétitivité sur les marchés internationaux est une priorité du gouvernement. Dans le dernier discours du Trône, on mettait le Canada au défi de pousser son rendement économique d'un cran en prenant l'engagement de l'excellence et en adoptant une vision tournée vers les possibilités et les défis que le monde présente.
Les échanges et les investissements internationaux constituent un des cinq éléments clés qui étaient soulignés. Même si Commerce international Canada n'aura pas d'existence juridique tant que le projet de loi n'aura pas été adopté, je peux assurer à la Chambre que nous existons bel et bien et que nous travaillons dur pour aider les Canadiens à relever les défis de l'économie moderne. Nous avons des outils pour tous les besoins d'affaires critiques, à commencer par la liste de contacts établie par les gens sur le terrain et les renseignements commerciaux que nous pouvons fournir aux 1 200 clients commerciaux canadiens inscrits auprès du service du délégué commercial virtuel.
Les outils ne sont utiles qu'en proportion des objectifs qu'ils permettent d'atteindre. Ceux que nous offrons servent en particulier à s'assurer et à conserver un accès au marché nord-américain et à faire en sorte que les entreprises canadiennes aient accès à des possibilités d'affaires que l'on trouve de plus en plus chez les nouvelles puissances économiques comme la Chine, l'Inde et le Brésil.
Nous voulons positionner le Canada avantageusement au palmarès des pays du monde grâce à des initiatives innovatrices et au renforcement de la collaboration économique avec des puissances économiques établies comme les États-Unis et le Japon.
[Français]
Ce travail ne s'effectue pas uniquement à l'étranger. En fait, nous ne pouvons pas dire vraiment où se situe réellement la frontière de notre économie. C'est pourquoi, conformément à l'approche définie dans le discours du Trône, nous oeuvrons pour faire en sorte qu'aucun facteur interne qui concourt à l'innovation et à la compétitivité ne soit négligé. Si nous ne réussissons pas au niveau national, nous ne pourrons pas réussir à l'étranger.
[Traduction]
Je veux rappeler à la Chambre certains des défis auxquels nous sommes confrontés et certaines choses que nous avons faites.
Tout d'abord, grâce à notre partenariat permanent avec Affaires étrangères Canada--et, en passant, j'apprécie la collaboration et la bonne volonté de mon collègue le ministre des Affaires étrangères--nous avons pu gérer une transition complexe et importante tout en améliorant le niveau de service aux entreprises. Le ministère sert maintenant ses clients à partir de 12 bureaux régionaux répartis au Canada et de ses bureaux commerciaux établis dans plus de 140 villes du monde.
Nous renforçons nos partenariats avec les entreprises, les provinces, les territoires, les municipalités et d'autres intervenants. Je rencontrerai personnellement mes vis-à-vis provinciaux et territoriaux à Winnipeg dans dix jours pour des consultations et un échange de vues sur les défis et les possibilités du commerce international. Cela fait partie de notre dialogue permanent avec tous les intervenants canadiens.
[Français]
J'ajouterai que les députés ont été et, je l'espère, continueront d'être pour moi des sources indépendantes d'avis et de conseils dans la poursuite des objectifs stratégiques du Canada en matière de commerce international.
[Traduction]
Je suis reconnaissant au sous-comité, présidé par le député de Scarborough-Centre, d'entreprendre des audiences pancanadiennes sur ces questions.
Les États-Unis sont notre principal partenaire économique, et nos relations avec le Mexique gagnent rapidement en ampleur et en maturité.
En décembre dernier, le premier ministre et le président Bush ont reconnu la nécessité de briser le cercle vicieux du protectionnisme qui a nui à l'efficacité des mécanismes de règlement des différends de l'ALENA dans des dossiers comme celui du bois d'oeuvre, mais le poids politique des intérêts protectionnistes ne disparaîtra pas comme par magie: nous devons cultiver nos rapports avec nos alliés, afin de leur montrer comment deux économies qui sont étroitement liées et qui, ensemble, font face à une concurrence de plus en plus farouche à l'échelle mondiale ne peuvent laisser de telles aberrations se produire.
Par conséquent, nous avons poursuivi nos représentations dans les régions des États-Unis visées par l'IRA, initiative qui nous a permis d'ouvrir sept nouveaux consulats et d'en promouvoir deux autres au rang de consulat général. Cette stratégie nous permet de renforcer notre capacité à défendre les intérêts du Canada, non seulement dans les différends dont j'ai parlé, mais aussi en ce qui concerne des sujets variés et importants comme l'énergie ou l'accessibilité des marchés pour nos produits agricoles comme le blé, le boeuf ou le porc.
Cette initiative nous permettra de tisser des liens plus étroits avec les façonneurs d'opinions et les décideurs de partout aux États-Unis; je compte m'appuyer sur cette base solide pour diriger personnellement des journées de sensibilisation dans des centres clés des États-Unis. J'espère que les parlementaires de toutes les allégeances participeront activement à ce projet.
Dans une perspective d'avenir, le premier ministre et le président ont annoncé un nouveau partenariat visant la prospérité et la sécurité. Son volet commercial vise à multiplier les possibilités qui s'offrent à nous en rendant nos entreprises plus concurrentielles sur les marchés internationaux. Cela renforce les décisions que mes homologues de l'ALENA et moi-même avons prises relativement au programme de travail de l'ALENA.
Le lancement du partenariat Canada-Mexique a aussi été couronné de succès au cours de la dernière année. Ce partenariat offre des possibilités à de petites et moyennes entreprises, il améliore les échanges commerciaux et le mouvement des investissements, il encourage l'établissement de liens entre les groupes à vocation culturelle et les groupes de chercheurs et d'universitaires, et il permet d'améliorer la compétitivité de nos économies respectives à l'échelle mondiale, le tout s'inscrivant dans le contexte nord-américain.
[Français]
En planifiant pour le futur, nous ne pouvons pas perdre de vue les enjeux importants d'aujourd'hui. Nous avons défendu les intérêts du Canada dans le domaine du bois d'oeuvre, en intentant des actions dans le cadre de l'ALENA et de l'OMC et en agissant en étroite collaboration avec les provinces et l'industrie. Nous avons obtenu quelques succès. Nous demeurons résolus, tout en faisant preuve de souplesse dans notre détermination de trouver une solution permanente et équitable à ce problème.
De même, nous aurons recours aux outils à notre disposition pour défendre les intérêts de nos producteurs de blé, entre autres, qui sont confrontés au protectionnisme américain.
[Traduction]
Les Canadiens ont d'importants intérêts dans de nombreuses régions du monde, de l'Autriche au Chili, de la Russie au Golfe persique. Je parlerai cependant de l'Union européenne et du Japon, qui sont d'importants partenaires du Canada dans les domaines du commerce, de l'investissement, des sciences et de la technologie. Comme les États-Unis, ces pays sont également les forces vives des réseaux à valeur ajoutée qui caractérisent de plus en plus la production mondiale.
En mars dernier, nous avons accepté la mise en place d'un cadre d'accord Canada-Union européenne sur l'amélioration du commerce et de l'investissement. Cet accord, qui permettrait de consolider et d'étendre le partenariat économique, constituerait un complément de la politique de l'OMC visant à faciliter l'accès aux marchés. Le Canada et l'Union européenne négocient actuellement des mandats.
Le Royaume-Uni, l'Allemagne et la France ainsi que d'autres États européens comptent parmi nos partenaires commerciaux les plus importants et constituent des cibles majeures en matière d'investissement. C'est une relation qui mérite d'être renforcée. Toutes aussi importantes sont les discussions bilatérales engagées avec le Japon en vue de structurer un nouveau cadre d'amélioration de nos relations économiques avec ce pays.
Je suis également en train d'élaborer une nouvelle approche dynamique en vue de positionner les entreprises canadiennes sur les marchés émergents, notamment la Chine, l'Inde et le Brésil, et chez certains de leurs partenaires stratégiques, comme la Corée. Nous avons récemment tenu des consultations et organisé récemment des tables rondes auxquelles participaient des entreprises, des universitaires et des sociétés civiles, en vue de façonner cette stratégie et pour évaluer les priorités. Le dialogue se poursuit.
[Français]
Nous prenons déjà des mesures pour élargir nos options. Le premier ministre a annoncé l'ouverture des pourparlers exploratoires en vue de la conclusion éventuelle d'un accord de libre-échange avec la Corée. J'ai déjà dépêché une équipe pour engager ces discussions.
L'année dernière, nous avons repris le dialogue avec la Chine et l'Inde concernant les négociations sur la protection des investissements. En novembre dernier, j'ai dirigé une mission commerciale au Brésil. Je viens de retourner en Chine, où j'ai accompagné le premier ministre, et j'envisage d'entreprendre une mission commerciale en Inde au début du printemps. L'honorable Gar Knutson, à l'époque ministre d'État responsable des marchés nouveaux et émergents, a conduit une mission commerciale en Amérique centrale.
[Traduction]
En outre le secrétaire parlementaire du ministre responsable des marchés nouveaux et émergents a récemment entrepris une mission commerciale en Syrie, dans les Émirats arabes unis, au Qatar, au Yémen et en Égypte.
Il y aurait encore beaucoup à dire, notamment sur le programme de développement de l'Organisation mondiale du commerce établi à Doha, sur d'autres éléments de notre politique de commerce et d'investissement dynamique, sans oublier la façon dont mon ministère est organisé pour chercher et mettre en oeuvre de nouvelles solutions au profit de divers groupes clients comme les petites et moyennes entreprises. sur divers moteurs de la concurrence, notamment la science, la technologie et l'investissement, et divers obstacles à contourner sur la route du succès auprès de partenaires économiques établis et émergents.
Nous aurons d'autres occasions de discuter de stratégie générale ou de questions précises comme la mise à jour commerciale annuelle. Pour l'instant, je suis impatient de m'unir à tous les députés pour promouvoir la prospérité du Canada par l'amélioration des échanges commerciaux et de l'investissement. Je demande humblement aux députés d'appuyer le projet de loi C-31, afin de permettre la poursuite de cet important travail que nous avons entrepris.
M. Gary Lunn (Saanich—Gulf Islands, PCC): Madame la Présidente, j'ai écouté l'intervention du ministre. En qualité d'ancien porte-parole en matière de commerce international, je constate que nous sommes aujourd'hui confrontés aux mêmes problèmes qu'il y a quatre ans.
J'ai jeté un coup d'oeil au projet de loi C-31. Cette mesure législative prévoit en fait de scinder le ministère et de consacrer beaucoup d'argent au processus. Le gouvernement est au pouvoir depuis onze ans, mais il est encore aux prises avec les mêmes problèmes et les mêmes luttes qu'à son arrivée. L'écart de productivité ne cesse de croître. Il va sans dire que, de ce côté-ci de la Chambre, nous prônons un renforcement du libre-échange et de la mondialisation, perspective qui se profile d'ailleurs à l'horizon. Le gouvernement semble avoir échoué à maints égards et ne s'occupe pas de cette question.
Le ministre a fait une intervention remarquable, mais il n'a pas vraiment parlé du coût lié à la division du ministère. Comment cette mesure peut-elle contribuer à régler les problèmes? Si après onze ans le gouvernement n'a pas réussi à régler les problèmes comment la division du ministère peut-elle faire une différence? Comment une telle initiative va-t-elle aider les contribuables canadiens? Comment va-t-elle aider nos entreprises à réussir à l'étranger? Comment se fait-il que le gouvernement soit encore aux prises avec les mêmes difficultés qu'il y a onze ans? Les mêmes ministres qui tentent de trouver une solution à ces questions depuis si longtemps occupent toujours les banquettes ministérielles.
L'hon. Jim Peterson: Madame la Présidente, les questions du député sont très légitimes.
Je parlerai d'abord du coût. La scission d'un ministère en deux ministères distincts n'entraînera aucun coût en soi. Cela ne veut pas dire que je ne demanderai pas de fonds supplémentaires pour la promotion du commerce international et de l'investissement. Après tout, notre nouveau mandat comprend les marchés émergents et nous avons toute une gamme de nouvelles responsabilités.
Permettez-moi d'ajouter que, d'après moi, le fait de scinder le ministère et d'en créer un qui est exclusivement responsable du commerce international illustre l'importance capitale que le premier ministre attribue au commerce et à l'investissement, qu'il estime essentiels à la prospérité des Canadiens. Nous aurons au Cabinet une voix distincte pour faire valoir ces questions. Nous pourrons faire preuve d'une plus grande souplesse et ainsi répondre plus rapidement aux changements qui ont lieu à l'échelle mondiale. Le gouvernement investira davantage dans des centres internationaux. Nous assumons aujourd'hui ces fonctions, qui revenaient anciennement à Industrie Canada. Ceci nous permet de répondre à tous les besoins de la clientèle canadienne à partir d'un même ministère.
Je me permets d'ajouter, en conclusion, que nous ne sommes pas le premier pays à comprendre qu'il est important d'avoir un ministère distinct responsable du commerce international et de l'investissement; le Royaume-Uni, le Japon et l'Union européenne l'ont compris, et ont des ministres distincts. Aux États-Unis, le secrétaire au commerce relève directement de la Maison-Blanche.
[Français]
Mme Diane Bourgeois (Terrebonne—Blainville, BQ): Madame la Présidente, le ministre nous a brossé un tableau un peu sombre de ce qui se passerait si les deux ministères, soit Commerce international et Affaires étrangères, n'étaient pas scindés.
Il y a à peu près un an, j'ai eu la chance d'aller au Mexique, à Ciudad Juarez principalement, où on retrouve des maquilladoras. L'équivalent de 2 millions de personnes y vivent dans une extrême pauvreté. Parmi ces maquilladoras, il y en a 50 p. 100 qui sont des compagnies canadiennes, que je ne nommerai pas actuellement. Les gens gagnent 1 ou 2 $ par jour pour travailler. Ces gens vivent dans l'extrême pauvreté.
Certaines compagnies négocient des contrats pour leurs employés en dessous du barème international. C'est ce que nous avons appris. Le Canada le sait très bien. Il est complice de cela.
De plus, le Canada n'a pas ratifié la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille. Des Mexicains viennent travailler ici. Ils ont de la difficulté avec des compagnies canadiennes. Le Canada n'a pas ratifié la convention américaine relative aux droits de l'homme.
Maintenant, le ministre vient nous parler de faire du commerce avec les États-Unis, le Mexique et la Chine, elle qui ne respecte pas les droits de l'homme.
Je poserai la question suivante au ministre. C'est bien de faire du commerce, mais est-ce que dans votre projet de loi, il est fait mention de la protection des droits humains?
L'hon. Jim Peterson: Madame la Présidente, dans le domaine des droits de la personne, je constate qu'il est très important que le Canada ait des relations soit diplomatiques soit commerciales avec les autres pays, même les pays qui n'exigent pas, comme nous, le respect des droits de la personne. C'est par l'engagement constructif qu'on peut apporter des changements dans le reste du monde. Telle est notre attitude envers la Chine. C'est ce que nous avons fait quand nous y étions avec notre mission commerciale. En effet, le premier ministre a soulevé les questions des droits de la personne avec le président de la République populaire de Chine. Tel est le moyen de faire du progrès dans cet important domaine.
Je souhaite que, lorsque tous les membres du gouvernement, tous les députés de ce Parlement, de même que tous les commerçants et tous les hommes d'affaires s'engagent dans d'autres pays, ils soulèvent la question des droits de la personne. C'est le moyen par lequel nous pourrons changer les conditions mondiales. Nous pouvons être un leader à cet égard, parce que nos sociétés et nos compagnies sont partout dans le monde. En effet, le Canada est un grand commerçant mondial. Ce sont donc les Canadiens qui peuvent changer ces conditions mondiales et qui doivent le faire.
[Traduction]
M. Rodger Cuzner (Cape Breton—Canso, Lib.): Madame la Présidente, je suis tout à fait d'accord avec le ministre pour dire que le Canada est une nation commerçante et que la vitalité de notre économie dépend de notre capacité à faire du commerce.
Je suis aussi d'accord avec la décision du premier ministre de scinder les ministères et de créer un ministère indépendant responsable du commerce afin de rendre le Canada plus présent sur les marchés du monde.
Cependant, j'aimerais que le ministre nous renseigne à propos de la position des entreprises canadiennes qui seraient les plus concernées par cette mesure, du genre de consultations qui ont été menées auprès d'elles et de leurs réactions.
L'hon. Jim Peterson: Madame la Présidente, je vais simplement lire la liste. Nous avons l'appui de l'Association québécoise de l'aérospatiale, du B.C. Lumber Trade Council, de l'Alliance canadienne du commerce agroalimentaire, du Conseil de commerce Canada-Inde, de l'Association canadienne des importateurs et exportateurs, du Conseil canadien pour les Amériques, de la Chambre de Commerce du Canada, du Conseil canadien des chefs d'entreprises, de la Fédération canadienne de l'agriculture, de Produits forestiers du Canada, du président de l'Indo-Canada Chamber of Commerce, de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, du Conference Board du Canada, de l'Association des produits forestiers du Canada, du président d'IT&T Trading, de Manufacturiers et exportateurs du Québec, de MDS Service Support, de...
Une voix: La liste est longue.
L'hon. Jim Peterson: Dois-je en dire plus?
La présidente suppléante (L'hon. Jean Augustine): Nous reprenons le débat. La députée de Newmarket—Aurora a la parole.
Mme Belinda Stronach (Newmarket—Aurora, PCC): Madame la Présidente, je partagerai le temps qui m'est alloué avec le député de Peace River.
J'aborde aujourd'hui une loi qui semble souffrir de personnalités multiples. D'une part, le projet de loi C-31 est d'ordre administratif et ne vise qu'à donner une structure légale à un processus bureaucratique de séparation du ministère du Commerce international du ministère des Affaires étrangères. C'est clairement l'impression que veut nous donner le gouvernement.
D'autre part, le projet de loi est trompeur puisqu'il modifie notre façon d'appuyer nos objectifs commerciaux nationaux. En ce sens, il n'est pas aussi aride qu'à première vue. Il aura des retombées bien concrètes.
L'aspect le plus important du projet de loi est l'aide qu'il apportera aux entreprises canadiennes afin de leur permettre d'être plus concurrentielles sur le marché mondial. En bout de ligne, c'est de cette façon qu'il faut l'aborder pour juger de sa valeur.
Il est absolument vital pour la qualité de vie des Canadiens que le gouvernement accorde un rang prioritaire au commerce à l'échelle nationale. Le commerce est la pierre angulaire de notre pays et il est donc important que nous nous penchions sur nos façons de faire à cet égard.
L'évaluation du projet de loi viendra plus tard, car il reste beaucoup de questions sans réponses. Si le gouvernement pense qu'il peut présenter sa décision de diviser l'appareil de politiques étrangères et commerciales comme un fait accompli à un Parlement endormi qui ne s'intéresse pas aux répercussions, il se trompe et sous-estime la Chambre.
Le projet de loi C-31 est curieux. Il donne tout simplement effet à une décision de gestion prise il y a plus d'un an et au processus bureaucratique de division des ministères qui a débuté, sans l'approbation du Parlement, et qui se poursuit. Ce qui importe, c'est la décision initiale et non ce projet de loi d'ordre administratif.
Que le gouvernement en convienne ou non, on nous demande d'appuyer ou de rejeter la décision du premier ministre de former un ministère du Commerce international distinct, non pas simplement de fournir une approbation pour la forme. Si la Chambre rejetait le projet de loi C-31, elle renverserait la décision initiale du premier ministre.
Pour compliquer les choses davantage, la division bureaucratique s'est déjà produite. Le couple s'est séparé et a été forcé de diviser ses biens, et maintenant quelque d'autre demande à la cour d'approuver le divorce officiel sans avoir entendu les parties.
Nous savons d'après ce qui se dit à l'édifice Lester B. Pearson que la séparation n'est pas sans heurt. L'architecte de cette décision n'avait pas anticipé toutes les complications en cause.
S'opposer à la loi aurait pour effet de renverser le processus et de refusionner les deux ministères. Le gouvernement espère peut-être que, puisque le processus a déjà été entamé, le coût d'un tel vote serait perçu comme étant prohibitif. Par conséquent, la Chambre se trouve devant un fait accompli et une tactique d'intimidation.
Ce n'est ni une bonne façon d'aborder la Chambre ni une bonne façon d'administrer la politique publique.
Au nom du Parti conservateur, je recommande que nous renvoyions le projet de loi C-31 au Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international pour que nous puissions mieux en examiner le fondement, les répercussions et les coûts.
Par l'intermédiaire du ministre du Commerce international, le premier ministre devra présenter de meilleurs arguments à la Chambre sur la façon que les entreprises canadiennes seront mieux servies si le volet commerce est séparé du volet affaires étrangères. Peut-être est-ce une bonne idée; peut-être pas. Le dossier a ses tenants et ses détracteurs. Nous ne devons cependant pas nous contenter de dire que les choses doivent se dérouler ainsi et qu'il faut signer les documents de divorce.
Le prédécesseur du premier ministre, Pierre Trudeau, l'archétype absolu du libéral, a brûlé beaucoup de capital politique, pendant les années 70, pour achever la consolidation et l'intégration, en 1982, des fonctions respectives des affaires étrangères et du commerce international. La dérive du premier ministre dans un sens diamétralement opposé est bien timide en comparaison des arguments convaincants évoqués il y a vingt ans en faveur de la consolidation des instruments de politique étrangère.
Les circonstances entourant l'origine de cette décision de scinder les ministères sont plutôt mystérieuses et font penser à un mirage dans le désert.
Qui a demandé d'apporter des changements à une structure intégrée de politique internationale qui est aussi favorable au Canada depuis vingt ans? Nous savons que ce ne sont pas les Manufacturiers et exportateurs du Canada, l'un des principaux porte-étendard des entreprises canadiennes.
Les MEC ont dit au nouveau ministre du Commerce international, en juillet 2004, que la communauté des affaires ne demandait pas une telle scission et que ses membres étaient très satisfaits du MAECI tel qu'il existait, en intégrant les relations commerciales, économiques et politiques. Les MEC ont dit aussi qu'ils s'inquiétaient que les maigres ressources disponibles puissent être utilisées aux fins de la gestion de ce divorce, au détriment des entreprises.
Nous savons que ce n'est pas non plus l'association nationale des anciens ambassadeurs canadiens, car ceux-ci s'opposent absolument à cette scission.
Dans le cadre de consultations auprès d'experts indépendants du commerce international, de l'extérieur du ministère du Commerce international, j'ai trouvé quelques rares défenseurs de l'idée et de la décision originales.
Nous devons ouvrir les fenêtres de l'édifice Langevin, qui sont généralement fermées, pour avoir une meilleure idée du pourquoi et du comment de cette décision. Qui le premier ministre a-t-il consulté qui lui a confirmé que cette décision était dans l'intérêt supérieur du Canada? Qu'en est-il soudainement des consultations publiques sans fin auxquelles le gouvernement a généralement recours pour ralentir les dossiers?
On constate un net décalage entre les décisions prises et, par conséquent, les projets de loi connexes C-31 et C-32, et l'examen par le gouvernement de la politique internationale, examen longtemps attendu et désormais rétrogradé au rang de simple déclaration concernant la politique internationale. Ce décalage est manifeste aussi bien dans le contenu que dans le temps.
Lorsque ce qui devait être un examen devient une simple déclaration, on peut bien imaginer quel sera l'effet sur le résultat de l'exercice.
L'objectif devrait rester le même: présenter une évaluation stratégique intégrée des intérêts nationaux du Canada dans le monde et un plan visant à les favoriser.
La séparation entre le commerce international et les affaires étrangères va certainement à contresens d'une politique étrangère canadienne intégrée qui exploite à notre avantage de façon coordonnée tous les atouts dont nous disposons. Il y a là un illogisme sur le plan de la politique publique.
Il est fort possible que la séparation des ministères explique déjà en partie l'incapacité du gouvernement d'effectuer l'examen de sa politique internationale. Pourquoi débattre d'un projet de loi concernant la déstructuration de la politique internationale du Canada avant d'avoir mené à terme l'examen de la politique internationale?
La qualité des conseils donnés aux gens d'affaires canadiens en sera-t-elle améliorée? Ces conseils seront-ils plus valables et plus pratiques? Seront-ils plus coûteux? Cette séparation fera-t-elle en sorte que nous ne ferons pas avec dix années de retard des consultations sur une stratégie concernant la Chine ou un marché en émergence? Si l'on peut répondre par l'affirmative à l'une ou l'autre de ces questions, le Parti conservateur est toute ouïe.
La décision du premier ministre, et de ses conseillers de l'édifice Langevin, de démanteler l'ancien ministère des Affaires étrangères et du Commerce international suscite de nombreuses questions. Nous avons certains doutes sur son opportunité et sur le processus qui lui a donné lieu, mais nous allons passer à l'étape de l'étude en comité du projet de loi C-31 en gardant l'esprit ouvert.
L'hon. Roy Cullen (secrétaire parlementaire de la ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, Lib.): Madame la Présidente, ma question est souvent soulevée au sein des cercles commerciaux internationaux. De quel type de stratégies le Canada devrait-il se doter?
D'aucuns soutiennent que les États-Unis nous offrent un vaste marché facile d'accès et à proximité. Nous comprenons la culture de ce pays et celui-ci a un marché énorme et très riche. En même temps, c'est avec nos voisins que nous réalisons quelque 86 p. 100 de nos échanges commerciaux. Des gens d'affaires diraient qu'une diversification du marché s'impose.
D'autres soutiennent que nous devrions nous détourner des États-Unis et regarder vers l'Asie et au-delà pour atteindre cet objectif de diversification.
Je me demande ce que la députée pense de cela en particulier.
Mme Belinda Stronach: Madame la Présidente, au plan des priorités, nous devons examiner la manière dont le Canada obtient sa richesse. C'est le commerce qui fournit au Canada plus de 42 p. 100 de sa richesse, si bien que le commerce est prioritaire. Par ailleurs, c'est avec nos voisins du Sud, les États-Unis, que nous réalisons plus de 80 p. 100 de ces échanges commerciaux. Nous devons donc faire en sorte que les ressources appropriées soient allouées de manière à ce que le Canada bénéficie de cette relation et qu'il prospère.
Toutefois, c'est du projet de loi C-31 dont nous sommes saisis. Nous devons examiner comment ce projet de loi peut le mieux servir à la fois les intérêts de notre pays et ceux du monde des affaires canadien de manière à ce que nous puissions exporter davantage.
Le projet de loi C-31 laisse nombre de questions sans réponses. Pourquoi fractionner le ministère? Comment le commerce sera-t-il mieux servi? Quel est le but du projet de loi? Que vise-t-il? Quand ses effets se feront-ils sentir? Si le gouvernement compte vraiment faire du commerce une priorité, pourquoi ne confie-t-il pas les recours commerciaux appropriés au ministère? Pourquoi l'administration des recours commerciaux reste-t-elle du ressort du ministère des Finances?
Voilà quelques-unes des questions auxquelles il faut répondre si on veut assurer que la nouvelle structure proposée serve les véritables intérêts du Canada et des entreprises canadiennes.
M. Peter Stoffer (Sackville—Eastern Shore, NPD): Madame la Présidente, je souhaite à la députée bonne chance pour ce qui est d'obtenir la réponse aux questions qu'elle a posées de façon si éloquente. Comme la députée le sait, nous sommes préoccupés notamment lorsque le gouvernement démantèle des ministères et organismes et essaie ensuite de les rétablir. On peut prendre le cas de notre Garde côtière.
En 1995, la Garde côtière faisait partie du ministère des Transports. À la suite d'un examen des programmes, ce service a été transféré au ministère des Pêches et des Océans, ce qui était une décision catastrophique. Si la députée parle à son collègue assis à côté d'elle, elle saura ce qu'il en est. Son collègue sait pertinemment à quel point la Garde côtière a éprouvé des difficultés au sein du ministère des Pêches et des Océans.
La Garde côtière est maintenant un organisme autonome, mais on parle de la ramener dans le portefeuille de la vice-première ministre.
Tout ce débat coûte aux contribuables beaucoup d'argent, en plus d'inquiéter les employés de ces ministères. De plus, il envoie à nos alliés le signal que nous ne savons pas vraiment ce que nous faisons à cet égard.
La question que je souhaite poser à la députée porte sur le regroupement des Affaires étrangères et du Commerce international. Si elle obtient jamais des réponses à ses questions, j'aimerais bien les entendre.
La confusion en l'occurrence provient notamment de ce qui suit. Nous avons signé un traité interdisant les mines terrestres. Nous avons soutenu sa ratification pour éliminer les mines terrestres dans le monde. En même temps, nous avons permis que les fonds du RPC soient investis sur les marchés boursiers et du même coup dans des entreprises qui fabriquent des mines terrestres.
La députée voit-elle des discussions au sujet de ce problème? Lorsque notre politique étrangère contredit notre politique commerciale, que ferait-elle pour corriger ces lacunes?
Mme Belinda Stronach: Madame la Présidente, je ne pense pas pouvoir donner des tuyaux quant aux actions reliées aux mines terrestres aujourd'hui.
Nous devons nous assurer de ne pas perdre toute cohérence quant au rôle important du Canada dans le monde. Il faut veiller à ce qu'il y ait une cohérence entre les ministères et organismes responsables des affaires étrangères, du commerce et des relations canado-américaines.
Dans la structure actuelle, un comité spécial s'occupe des relations canado-américaines et fait rapport directement au Cabinet. Étant donné qu'il s'agit de l'une de nos relations les plus importantes pour ce qui est de la richesse du pays, je crains que la structure ait perdu une certaine cohérence. C'est le point que nous allons soulever au comité.
M. Charlie Penson (Peace River, PCC): Madame la Présidente, j'aimerais remercier ma collègue, la porte-parole en matière de commerce international et députée de Newmarket--Aurora pour son excellent discours et pour m'avoir ainsi donné l'occasion de parler aujourd'hui de mes idées dans ce domaine important.
La députée de Newmarket--Aurora apporte dans ce dossier une certaine expérience sur la scène internationale. Il est très important de comprendre le point de vue des autres pays lorsqu'ils regardent la position du Canada. Elle est capable de nous aider à comprendre ce point de vue grâce à sa perspective de cadre d'une entreprise multinationale.
Je suis heureux de prendre part à ce débat. J'ai été le porte-parole de mon parti en matière de commerce international pendant environ huit ans.
L'hon. Jim Peterson: Et un très bon porte-parole.
M. Charlie Penson: Je suis d'accord avec le ministre. Ce fut sans doute un privilège pour moi de travailler avec certains ministres du Commerce international d'en face: Roy MacLaren, Sergio Marchi, Art Eggleton et maintenant le nouveau ministre. J'ai aimé ce travail. Tout compte fait, le ministère du Commerce international a été un très bon ministère. Cependant, je crains qu'aujourd'hui, l'ensemble du tableau soit en train de nous échapper.
Le ministre a présenté un projet de loi pour scinder le ministère, et ce sera peut-être une mesure importante. Seul le temps nous le dira. Je réserve mon jugement pour plus tard à ce sujet. Cependant, nous devons nous occuper des problèmes fondamentaux et prendre un peu de recul. La division du ministère ne sera pas une panacée comme certains voudraient nous le faire croire. Il me semble que nous souffrons de deux gros problèmes dans ce domaine, l'un au pays et l'autre sur la scène internationale. Je vais simplement prendre un moment pour parler en premier lieu de l'aspect international de la question.
Il reste encore énormément de travail à faire dans le commerce international pour faire avancer la cause du libre-échange afin que les producteurs canadiens aient un libre accès à des marchés comme celui de l'Union européenne. Il faut vraiment obtenir une réduction des subventions à l'industrie, qui sont encore versées non seulement au secteur agricole, mais encore à d'autres industries. Il importe en outre de s'attaquer à la question des subventions à l'exportation et des énormes droits de douane. Je crains que le Canada ne joue pas un rôle de chef de file, comme il devrait le faire dans ce dossier. Je crains qu'en raison de certaines de nos politiques intérieures, nous ne mettions pas assez l'épaule à la roue pour pouvoir ouvrir les marchés.
Il me semble que, depuis un demi-siècle, nous avons amplement de preuves des bienfaits de la libéralisation du commerce. Je pense que c'est assez clair pour la plupart des gens. Nous croyions que des progrès étaient réalisés durant le cycle de Doha avec l'Union européenne et d'autres groupes commerciaux pour mettre un terme à la terrible utilisation des subventions à l'industrie et à l'exportation qui font mal aux producteurs canadiens. Mais c'est plutôt un recul que nous observons encore, et cela me préoccupe. Il y a du travail à faire dans ce dossier.
Il faut retravailler l'ALENA. Le mécanisme de règlement des différends que nous avons nous sert mal. Nous le savons. Il ne nous aide pas dans le dossier du bois d'oeuvre. À mon avis, notre secteur du bois d'oeuvre fait l'objet de harcèlement depuis très longtemps et les choses ne changent pas. Nous devons faire évoluer ce mécanisme. Nous devons renforcer nos relations avec les États-Unis et avec le Mexique afin de tenter d'ouvrir l'ALENA pour qu'il soit à l'avantage des Canadiens.
Comme ma collègue de Newmarket--Aurora, porte-parole officielle de mon parti, je me demande de quoi il retourne au juste. Il faut que le changement serve la population. S'il ne sert pas le Canadien moyen, il est inutile. Ce n'est pas un processus théorique. Il y va de l'amélioration de la vie ou du niveau de vie de vrais Canadiens. Il faut améliorer l'ALENA.
Il est clair que nous voulons que cessent l'utilisation de droits compensateurs et le dumping qui nous blessent tant. Il est on ne peut plus ironique que le Canada ait introduit ces lois commerciales il y a plus de 100 ans. Aujourd'hui, certains de nos concurrents commerciaux les utilisent contre nous. Là aussi il faudra faire quelque chose.
Je réserve probablement mon jugement le plus sévère à la situation qui existe chez nous. Je reproche au gouvernement libéral la politique gouvernementale qu'il suit depuis plusieurs années et qui n'a pas permis à nos industries de saisir les occasions qui s'offrent à elles et de devenir plus concurrentielles et productives. Même si le ministre veut apporter des changements au sein du ministère, ce qui est peut-être un objectif louable, à moins que nous mettions de l'ordre dans notre politique et notre réglementation fiscales, ce sera en pure perte parce que l'industrie ne pourra pas prospérer. Il nous faut réduire nos taux d'imposition. Le ministère du Commerce international a fait de nombreuses études à ce sujet lorsque j'étais porte-parole de mon parti en la matière. L'industrie dit exactement la même chose: le Canada fait fausse route. C'est l'un des pays dans le monde où les impôts sont les plus élevés.
Nous ne sommes pas concurrentiels par rapport à notre principal partenaire commercial, les États-Unis, eu égard au taux d'imposition des sociétés actuellement en vigueur. On pourrait débattre de cela. Le ministre a soulevé la question de savoir s'il est préférable de multiplier nos échanges commerciaux avec les États-Unis ou d'intensifier notre commerce avec d'autres pays dans le monde. Nous devons certainement considérer les États-Unis comme le pays présentant pour nous le meilleur potentiel. Nous partageons avec nos voisins du Sud une culture, une langue et des pratiques communes, mais nous devons permettre aux société canadiennes de profiter de facteurs qui les rendent plus concurrentielles.
Je voudrais d'abord parler de la politique fiscale. J'espère voir quelque chose à ce sujet dans le prochain budget. J'espère que le ministre du Commerce international incite le ministre des Finances à réduire les taux d'imposition des sociétés.
L'impôt sur les gains en capital est un autre aspect à considérer. La déduction pour amortissement n'est pas suffisamment adaptée à la nouvelle réalité. Certains produits et équipements que nous utilisons deviennent désuets plus rapidement, notamment en matière de technologie de l'information. Si le gouvernement n'est pas à l'écoute, nous ne sommes pas concurrentiels.
Le ministre a aussi parlé brièvement de toute la question des investissements actuellement faits par son ministère. Nous accusons un sérieux retard au chapitre des investissements. À l'échelle mondiale, le pourcentage des investissements étrangers directs qui reviennent au Canada est en baisse depuis des années. Notre pays n'est plus perçu comme un endroit aussi intéressant où investir. Nous devons surmonter ce problème, sinon nous n'obtiendrons pas le genre d'investissement qui nous procurera la nouvelle technologie dont nous avons besoin.
Les Canadiens trouvent plus profitable d'investir à l'étranger. C'est assurément révélateur, notamment de la politique que poursuit le gouvernement. Pourquoi les libéraux ne se rendent-ils pas à l'évidence? Depuis des années, notre compétitivité est en perte de vitesse. Notre productivité est d'environ 84 p. 100 de celle des États-Unis. Et ce n'est pas parce que les travailleurs canadiens moyens sont moins dynamiques. En fait, ils travaillent plus fort. Cette situation est plutôt attribuable à la politique du gouvernement, qui empêche les travailleurs et les entreprises de profiter des possibilités d'investissement et de livrer concurrence là où il le faut.
Ce sont là des facteurs limitatifs, et à moins que nous ne fassions ce qui s'impose pour y remédier, ils continueront de nous nuire. Le ministre a des aspirations pour le nouveau ministère. Je lui souhaite bonne chance. J'espère qu'il nous écoute et qu'il saura convaincre ses homologues, de l'autre côté, qu'ils doivent faire quelque chose pour que le nouveau ministère oeuvre en terrain fertile et que ses efforts portent fruit. Autrement, je crains que nous n'aboutirons à rien, et le fait d'avoir scindé le ministère en deux ne fera rien de plus qu'ajouter à la bureaucratie au cours des prochaines années.
Cela étant dit, apportons des modifications à l'ALENA à la prochaine occasion. Tous les cinq ans, nous avons la possibilité de revoir l'accord. Je sais que le ministre n'était pas en fonction la dernière fois, mais nous n'avons pas saisi cette occasion. Nous n'avons pas cherché à remédier aux lacunes de l'accord ou à y apporter des améliorations. J'étais très déçu.
Je sais que le gouvernement veut protéger certaines industries, mais cela ne cadre pas avec le concept de libre-échange. Je pense que nous devons faire mieux. Si un élément de l'accord laisse à désirer, nous devons nous efforcer, avec les États-Unis et le Mexique, de l'améliorer dans notre intérêt à tous. Nous devons améliorer nos relations avec notre principal partenaire commercial et faire avancer ce dossier dans l'intérêt du niveau de vie de tous les Canadiens.
M. John Cannis (Scarborough-Centre, Lib.): Madame la Présidente, je voudrais faire une autre observation et poser une question à mon collègue de Peace River, qui a fait des observations critiques très constructives. Je sais qu'il manifeste un intérêt pour cette question depuis des années.
Il a constamment rappelé le travail considérable qui doit être fait, et nous sommes d'accord. Il a dit que « le Canada ne joue pas le rôle de premier plan en matière de commerce international, comme il devrait le faire ». Il a parlé du travail qui doit être fait au sujet de l'ALENA, de la fiscalité et de l'investissement.
Il a absolument raison. C'est peut-être pourquoi cette initiative est si importante, surtout si l'on tient compte de ce qui est arrivé dans le monde après le 11 septembre. Nous avons le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. Nous pouvons voir que d'autres pays ont plutôt deux ministères distincts, l'un chargé du commerce et des investissements et l'autre chargé, bien sûr, des affaires étrangères.
Voilà une mesure importante. J'ai aussi écouté très attentivement la députée de Newmarket—Aurora parler de la situation d'il y a vingt ans, lors de l'ère Trudeau, et de l'époque contemporaine avec le premier ministre actuel. Je dirais certainement à mes collègues que nous savons que les choses ne se passent pas aujourd'hui comme il y a vingt ans. Les choses doivent changer si nous voulons rester concurrentiels. Voilà pourquoi le projet de loi C-31 est si important.
Mon collègue de Peace River est probablement au courant du fait qu'il y a un sous-comité sur les accords internationaux sur le commerce et les investissements qui travaille très dur. Nous nous efforçons de trouver des solutions à nos problèmes concernant l'ALENA et les marchés émergents, ainsi qu'à l'EBS et au bois-d'oeuvre qui sont des dossiers très importants pour nous. Le sous-comité se concentre sur cette question, tandis que le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international porte surtout son attention non pas sur cette question mais sur d'autres questions qui relèvent des affaires étrangères. Le député pense-t-il que ce sous-comité devrait aujourd'hui devenir un véritable comité permanent de la Chambre des communes?
M. Charlie Penson: Madame la Présidente, je ne sais pas si je pourrai répondre directement à la question de mon collègue. Je n'ai pas suivi les activités de ce ministère au cours des dernières années. J'aurais besoin d'en savoir davantage, mais je crois qu'il pourrait éventuellement réaliser de bonnes choses.
Je sais que le ministère et le comité permanent ont fait de l'excellent travail, mais je suis préoccupé par le fait que le député affirme que nous ne pouvons pas faire les choses comme nous les faisions il y a 20 ans. Je suis bien d'accord, mais le problème est que le gouvernement agit exactement comme il y a 20 ans.
Pourquoi le gouvernement ne peut-il pas se permettre de réduire le fardeau fiscal des entreprises canadiennes? Une partie de l'explication réside dans l'augmentation de la taille du gouvernement, et ce, à tous les paliers, pas seulement au niveau fédéral. Il y a 30 ans, le fonctionnement du gouvernement représentait environ 30 p. 100 du PIB du pays. Notre principal partenaire commercial, les États-Unis, se situait également à environ 30 p. 100.
Aujourd'hui, la taille du secteur public par rapport au PIB est de 29 p. 100 aux États-Unis. Le Canada, lui, a porté la taille de son secteur public à 42 p. 100 du PIB. Si toute cette activité était constructive, il n'y aurait rien à redire. Cependant, je constate beaucoup de gaspillage dans le secteur public. Je n'accepte pas l'argument selon lequel le secteur public ferait mieux que le secteur privé dans les domaines de spécialisation de ce dernier. Je ne m'explique pas notre présence encore aujourd'hui dans certains de ces domaines. Au Canada, nous n'avons pas encore reconnu l'existence d'un problème de productivité, qui est d'ailleurs en gestation depuis une trentaine d'années. Il est attribuable en partie, selon moi, justement à la taille du secteur public, et à l'ampleur des impôts que nous prélevons des Canadiens pour financer l'État.
Pour ce qui est de notre participation à l'Organisation mondiale du commerce, le député a déclaré que le Canada fait preuve de leadership. Permettez-moi tout simplement de signaler que, comme je l'ai dit plus tôt, il est généralement accepté que la libéralisation des échanges a permis à bon nombre de pays de hausser considérablement leur niveau de vie. Il me semble généralement admis que, moins il y a de droits tarifaires et de subventions, plus les économies fonctionnent bien, plus les biens et les services sont échangés à des prix abordables.
Comment le Canada peut-il se présenter aux pourparlers de l'Organisation mondiale du commerce, qu'il s'agisse des anciens cycles de l'Uruguay ou de Doha, et revendiquer l'accès aux débouchés pour les produits canadiens tout en interdisant l'accès à nos marchés pour certains produits? Il y a incohérence. J'ai toujours prétendu qu'une telle attitude nous marginalise, du fait que les observateurs nous perçoivent non pas comme des adeptes du libre-échange mais comme des gens qui souhaitent voir leurs produits bénéficier d'un traitement de faveur.
Voilà quelques aspects que je voulais signaler au député.
[Français]
M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Madame la Présidente, il me fait plaisir aujourd'hui de prendre la parole au sujet du projet de loi C-31. Il est un peu difficile de le faire sans parler nécessairement aussi du projet de loi C-32. Toutefois, je concède que si l'on décide de scinder le ministère en deux et si l'on veut codifier les termes du décret adoptés le 12 décembre 2003, il faut naturellement que deux projets de loi soient déposés.
Aujourd'hui, nous discutons du projet de loi déposé par le député de Willowdale. Probablement qu'au courant de la semaine ou que la semaine prochaine, nous discuterons du projet de loi qui sera possiblement déposé par le député de Papineau.
Il serait important de regarder l'historique du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. Ce ministère n'a pas débuté sous ce titre, forcément. À la lecture des documents qui m'ont été soumis, j'ai remarqué que l'ensemble de la démarche du ministère a changé au cours des années. Il ne faut pas s'en inquiéter ni s'en surprendre.
Toutefois, la principale dynamique de changement jusqu'à récemment avait toujours concerné la question budgétaire. Les gouvernements s'étaient endettés rapidement, et pendant tout ce temps, on procédait au renouvellement de la définition du ministère et des modalités des différents ministères. La base fondamentale était toujours la même: comment peut-on réformer les différents ministères pour faire en sorte de diminuer les coûts et que le déficit ne soit pas trop élevé? Même si les différents gouvernements n'ont pas tellement réussi à réduire le déficit, sauf le gouvernement actuel—et je vous expliquerai pourquoi tantôt—, il n'en demeure pas moins que l'explication fondamentale pour la tenue d'une réforme demeurait la question budgétaire.
Le ministère a été créé en 1909 et exerçait à cette époque très peu d'influence, naturellement. En étudiant la situation budgétaire des différentes années, on s'aperçoit que les grandes périodes de déficit et de dette nationale ont débuté dans les années 1980. Le ministère a donc connu une évolution continue. En 1971, entre autres, sous le gouvernement Trudeau, on a intégré l'ensemble du personnel de soutien aux affaires des gens qui travaillaient à l'extérieur du Canada, pour faire en sorte de créer un comité de coordination pour assurer une certaine logique dans la gestion des ressources humaines.
On continue de filer pour arriver dans les années 1980. On commence justement à éprouver des problèmes déficitaires. À travers les différentes politiques, on annonce qu'il faudrait réfléchir, évaluer et repenser l'ensemble du ministère. On continue ainsi jusqu'en 1992, soit l'avant- dernière année du régime conservateur. Encore une fois, pour des raisons budgétaires, on indique qu'il faut absolument réformer le ministère. On revient à l'essentiel. C'est d'ailleurs en ces termes qu'on parle. Les hauts fonctionnaires se réunissent avant le budget pour tenter de retourner aux activités essentielles du ministère tout en diminuant les coûts.
Arrive ensuite le nouveau gouvernement du Parti libéral en 1993, en même temps que la première vague de députés bloquistes, dont je suis très fier, tout comme l'ensemble de mes collègues. En 1993, le seul geste que pose le gouvernement, par l'entremise du premier ministre de l'époque, Jean Chrétien, c'est d'affirmer que la structure du ministère est très bien ainsi. Il procède cependant à un changement de nom en le nommant ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. Le gouvernement affirme alors que ce changement de nom souligne l'importance accordée au retour à l'essentiel et que le ministère est ainsi encouragé à se concentrer sur ce qu'il fait de mieux, soit promouvoir les intérêts du Canada à l'étranger.
De fil en aiguille, pendant 10 ans, le gouvernement libéral adopte cette attitude. Alors qu'il commence à éprouver moins de problèmes budgétaires, la réforme n'est plus conditionnée par son impact budgétaire, mais par la nouvelle politique internationale et étrangère que le gouvernement devrait adopter. Cela se poursuit ainsi jusqu'à ce que survienne un changement de garde à Ottawa et que le nouveau premier ministre arrive au pouvoir. La première action qu'il pose, nous la trouvons plus que bizarre.
La journée de son assermentation, il dépose un décret au Conseil des ministres, au gouverneur en conseil. Et voici ce que dit le décret: « Décret transférant certains secteurs du ministère des Affaires étrangères au ministère du Commerce international: "Sur recommandation du premier ministre et en vertu de l'alinéa 2a) [...] »
Voici ce qu'on transfère:
a) transfère au ministère du Commerce international la responsabilité à l'égard des secteurs ci-après de l'administration publique qui font partie du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international: |
(i) la Direction du développement du commerce international, |
(ii) la Direction de la politique commerciale, économique et environnementale, [...] |
(iii) les secteurs de la Direction générale des communications et du Bureau des services exécutifs [...] |
(iv) les secteurs de la Direction des relations académiques internationales qui s'occupent de la promotion du commerce international, |
(v) les secteurs de la Direction de la promotion des arts et des industries culturelles qui s'occupent de la promotion du commerce international,[...] |
Et ainsi de suite.
Quand je disais qu'on trouvait cela bizarre, c'est plus que bizarre. C'est un changement de cap à 180o de la politique étrangère du gouvernement fédéral. On se demande bien pourquoi.
C'est ce même premier ministre qui disait: « Vous savez, nous souffrons, au Canada, d'un grave déficit démocratique et je dis à tous les Canadiens et les Canadiennes que je vais changer cela ». C'est lui qui disait cela. La première chose qu'il a faite lorsqu'il est devenu premier ministre, sans consultation d'aucune sorte, a été de faire adopter ce décret par le Conseil des ministres.
Forcément, nous sommes obligés d'ajuster par voie de législation la décision du premier ministre. Cependant, nous pouvons nous interroger sur son intention. On peut aussi s'interroger sur les différentes politiques que nous attendons, depuis des années, en cette Chambre.
Est-ce que cela va être la nouvelle politique des affaires étrangères? Est-ce qu'il y aura maintenant une politique de commerce international complètement dissociée et séparée de ce que faisaient affaires étrangères faisaient? On pourrait s'interroger à ce sujet.
On attend aussi, forcément, la nouvelle politique de la défense nationale et probablement celle du commerce international. Elle devrait venir elle aussi. En effet, cela va être différent. Ce sera deux entités différentes qui agiront dans des forums internationaux—puisque les deux sont internationales—, mais sans consultation ou sans coordination entre elles.
On peut se demander à quoi cela servira. Je vais vous donner un exemple purement fictif. J'espère qu'aucun personnage ne pourra se reconnaître dans cet exemple. Admettons que le premier ministre va en Chine et il veut parler des chantiers maritimes; cela a un intérêt pour lui. Il dit donc qu'il vient pour parler des chantiers maritimes. À ce moment, le premier ministre de la Chine est un peu mal à l'aise, parce qu'il sait que les conditions de travail dans les chantiers maritimes chinois ne sont pas très bonnes et que la qualité de vie des travailleurs chinois n'est pas très bonne. Il y a peut-être même des enfants qui travaillent là, ce qui n'est pas très bon.
Toutefois, le but de la rencontre ne concerne pas les droits humains mais le commerce international. Est-ce que c'est ce que le premier ministre veut avoir, de connivence avec le club des milliardaires canadiens?
J'écoutais le ministre du Commerce international qui répondait à une question de ma collègue, tout à l'heure, qui lui parlait des droits humains. Le ministre répondait que lorsque le milliardaire se rendrait en Chine, ou ailleurs, il allait poser des questions sur les droits humains. Peut-on douter de cela? Va-t-il être intéressé de savoir qu'il fait travailler des enfants et peut-être des travailleurs à 2 $ par jour? Non!
Ce qui va intéresser le milliardaire qui va en Chine, c'est le commerce international, l'avantage pour son entreprise et s'il peut payer son bateau—pour reprendre l'exemple dont je parlais—quelques millions de dollars moins que ce qu'il devrait payer s'il devait le faire construire au Canada. C'est cela qui va l'intéresser.
De plus, si j'étais à sa place, après avoir fait construire mon bateau, je m'arrangerais pour le mettre sous drapeau libyen pour éviter de payer les taxes qui sont extraordinaires. Il ne peut plus être compétitif, cet armateur, s'il fait construire son bateau ailleurs et qu'il ne met pas le drapeau d'un autre pays, parce que cela va lui coûter bien trop cher de taxes.
Je ne suis pas sûr que mon exemple soit loin de la triste réalité du premier ministre.
Il est tout à fait dommage de constater que, le jour où le premier ministre a été assermenté—ce premier ministre qui disait qu'il était important de corriger le déficit démocratique—, telle a été la première chose qu'il a faite, sans aucune consultation, sauf probablement une consultation avec certaines personnes de son entourage immédiat qui ont probablement les mêmes intérêts que lui.
D'ailleurs, l'actuel ministre responsable, de passage en 2004 devant le Comité des affaires étrangères et du commerce international, disait que la consultation se poursuivait. Ah oui, quelle consultation? Quels travailleurs, quelles personnes dans le comté de Saint-Jean savent aujourd'hui qu'il y a des consultations relativement à l'importance de diviser le commerce international et les affaires étrangères? Je pense que très peu de gens le savent.
On a donc d'énormes réticences. Nous ne pourrons certes pas être d'accord avec ce projet de loi, parce que le commerce international est un outil et un instrument de grande importance pour une politique étrangère. En effet, quand on fait des représentations internationales, les gens sont intéressés à commercer. S'ils sont intéressés à commercer, ils sont peut-être intéressés à faire des avancées ou modifier des comportements qui leur sont propres et qui sont inacceptables pour une société libre et démocratique comme la nôtre. C'est absolument dramatique.
Il ne faudra pas se surprendre, dorénavant, lorsque les différents ministres ou le premier ministre fileront vers d'autres cieux pour faire des représentations internationales, que la question des droits de la personne ou des droits humains ne soit plus traitée. Parce que cela apporterait une entrave au commerce international, et c'est cela qu'on veut privilégier ici, soit le commerce international. La vision économique et commerciale vient d'avoir raison de la politique des affaires étrangères canadiennes. Ce n'est pas compliqué. C'était déjà très faible et ce l'est encore au moment où l'on se parle. De fait, le premier ministre, lors des rencontres à huis clos, nous dit toujours qu'il a fait sa part. Cependant, on peut douter grandement que telle est la première préoccupation.
Autrement dit, ce qui se passe en Chine quant aux conditions de travail et à la qualité de vie, cela n'a pas d'importance pour le premier ministre. Ce qui l'intéresse—et la preuve, c'est que la journée de son assermentation, il a présenté le décret—, c'est le commerce international et le fait que le club des milliardaires puisse s'enrichir. Pendant ce temps, en plus, au grand désarroi de tous les Québécois et des Canadiens, les usines sont en train de fermer au Canada. Toutefois, cela va enrichir nos amis. En effet, au lieu de faire usiner le textile à Huntingdon, à Saint-Jean ou à Drummondville, on va le faire usiner en Chine et on va pouvoir payer les Chinois meilleur marché, nous diront-ils. Toutefois, cela va coûter cher socialement tout à l'heure, parce que maintenant, ces gens du Québec n'ont pas de travail.
C'est donc proprement scandaleux pour nous de diviser cela. On se prive, comme je vous l'ai dit, de l'instrument majeur de conviction pour nos gens dans le domaine international. Il faut qu'ils respectent la qualité de vie de leurs gens et il faut qu'il y ait des pratiques commerciales qui ne soient pas condamnables. Ce n'est pas ce que le projet de loi propose aujourd'hui; c'est tout le contraire. Il dissocie du commerce la question des droits humains et des droits de la personne. À mon avis, dans le fond de son coeur et de son intellect, c'est ce que le premier ministre voulait.
Par conséquent, le Bloc québécois sera contre. Pourquoi? Parce que les employés qui sont en poste à l'étranger avaient une cohérence dans la gestion des ressources humaines. En effet, c'est le ministère qui s'en occupait et tout le monde se trouvait sous le parapluie du ministère des Affaires étrangères. À partir d'aujourd'hui, ce ne sera plus le cas. Qu'arrivera-t-il dans les ambassades? De qui relèvera le personnel? Devra-t-on, dorénavant, faire une cloison entre les deux? Parce que c'est ce que le gouvernement fait en divisant les deux. Il va se passer des choses du côté des droits de la personne et des tribunaux internationaux du travail. De l'autre côté, ce sera le commerce international. Le fleuron sera le commerce international, peu importe les conséquences sur les gens au Canada, au Québec, en Chine, en Corée, en Inde ou au Pakistan. Ce qui importera sera que le club des milliardaires puisse aller où il veut sans se soucier des conditions de vie des gens, pour faire en sorte que le compte en banque desdits milliardaires augmente encore plus.
On avait donc deux vocations importantes au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. Les gens travaillaient en étroite collaboration et pouvaient se dire que si ils rencontraient le premier ministre ou un ministre de ce pays demain, ils essaieraient de lui dire qu'il y a un surplus de la balance commerciale du Canada en leur faveur.
On va leur dire: « Écoutez, nous savons que vous avez plus d'argent dans la balance commerciale avec les échanges que nous avons. Nous sommes d'accord pour cela. Toutefois, nous aimerions que vous modifiiez certaines choses du côté des relations humaines, des conditions de travail et des conditions de vie de vos gens. Pouvez-vous faire cela? Sinon, nous serons obligés de passer aux actes et faire de moins en moins de commerce avec vous. » Je ne dis pas qu'il faut tout arrêter, mais comme il existe ces deux possibilités dans le même ministère, soit le commerce et la représentation internationale, on peut le faire.
À partir du moment où nous avons deux machines différentes, une cloison, dans le consulat ou dans l'ambassade, où des gens opèrent distinctement, sans coordination—je n'ai pas besoin de vous faire de leçon sur la coordination interministérielle dans cette Chambre—, il y en a pas et il n'y en aura pas plus.
Nous venons donc de nous priver d'un instrument fondamental pour l'évolution de la condition humaine. C'est dommage, car je pense que le Canada avait une certaine appréciation: les gens reconnaissaient que les droits humains étaient importants pour eux. Cependant, nous continuons de voir une dégradation depuis quelques années. Le commerce international, la vision économique et commerciale prennent le dessus sur les droits de la personne et les droits humains.
Nous avons devant nous l'aboutissement de tout cela aujourd'hui. Nous le verrons tout à l'heure, lorsque le ministre des Affaires étrangères viendra déposer le projet de loi C-32. Dorénavant, il s'occupera uniquement des consulats, des ambassades, des passeports, de la paperasse, un petit peu de l'immigration et de tout ce qui concerne le droit humain, mais sans en parler trop fort.
De l'autre côté, il y a la machine commerciale, la machine industrielle, la machine financière, dont la seule préoccupation est de savoir comment faire plus de profit. Je suis sûr que les grands exportateurs canadiens vont remercier le gouvernement du fait qu'il vient de scinder un ministère en deux.
Par contre, le Bloc québécois ne défend pas les mêmes intérêts. Nous défendons les petits travailleurs qui viennent de perdre leurs emplois. Nous défendons les droits humains aussi. Nous n'hésitons pas pour en parler lorsque nous allons en pays étranger. Pour nous, ce n'est pas tout à fait le commerce international qui passe en premier. Je ne dis pas que nous le reléguons dans la garde-robe, mais ce qui prime pour le Bloc québécois, c'est la notion fondamentale des droits humains et des droits de la personne.
Pour cette raison, nous ne serons pas d'accord avec le projet de loi que l'honorable ministre nous présentera aujourd'hui. Nous ne serons pas plus en accord avec le projet de loi que son collègue de Papineau nous présentera plus tard cette semaine.
M. Yvon Lévesque (Abitibi—Baie-James—Nunavik—Eeyou, BQ): Madame la Présidente, j'ai écouté attentivement les interventions de ma collègue de Newmarket—Aurora, de mon collègue de Peace River et de mon confrère de Saint-Jean. Cela me donne l'envie de retourner un peu en arrière pour rappeler la restructuration faite par l'actuel premier ministre, au moment où il était ministre des Finances.
À ce moment, il a diminué et fermé carrément des bureaux dans les régions, un peu partout au Canada, pour diminuer le personnel. On n'a jamais diminué le personnel à Ottawa. On a même continué à l'augmenter, alors qu'il n'y avait plus de service dans les régions éloignées.
Aujourd'hui, on crée et on multiplie les ministères, sans aucun pouvoir additionnel. Aujourd'hui, il est question du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. Il y a quelques temps, il était question du ministère de l'Agence du développement économique du Canada pour le Québec. C'est encore un autre exemple où l'on scinde des ministères, on crée des ministres, on crée des limousines, on crée des dépenses additionnelles. Pendant ce temps, les régions et les provinces sont étouffées.
Mon collègue a avancé des points sur lesquels nous sommes parfaitement d'accord. Je parle d'un point additionnel, soit la main-d'oeuvre canadienne qui écope en général pour satisfaire les besoins du gouvernement au pouvoir, du Parti libéral. En ce sens, je demande à mon collègue s'il y a réellement nécessité à scinder des ministères. Est-ce qu'on ne pourrait pas tout simplement créer des départements dans un même ministère, avec un seul ministre qui peut les administrer? De toute manière, le ministre n'est jamais présent dans les régions. Alors même s'il demeurait dans son bureau, il pourrait nommer des gens dans les régions, justement pour donner des services adéquats.
M. Claude Bachand: Madame la Présidente, je remercie mon collègue de sa question et lui dis qu'il a entièrement raison. D'ailleurs, on avait fait une démonstration très claire. Toutes les années où ce premier ministre était ministre des Finances, cela a fait en sorte que la vie difficile de tous les jours a été déplacée sur le dos soit des chômeurs soit des provinces. Le député a raison.
Il n'y a presque pas eu d'efforts pour gérer de façon serrée ce qui se passait ici, à Ottawa. Ce sont les autres qui ont porté le fardeau, soit les chômeurs, le Québec et les provinces. On voit tous les problèmes auxquels ils sont confrontés actuellement.
Effectivement, on vient de créer un autre ministère. Il y avait quand même une autorité au-dessus de ce ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. On ne peut pas dire que le ministre actuel était un ministre junior, mais c'est quand même le ministre des Affaires étrangères qui avait sous son parapluie le commerce international. Maintenant, il ne pourra plus l'avoir. Il n'aura plus cet instrument. Il ne pourra pas se servir du commerce international pour dire que si les personnes ne respectent pas les droits humains, si elles ne suivent pas des normes internationales acceptables, nous allons diminuer notre commerce avec elles.
Il a raison sur les deux points. Nous aurions pu très facilement laissé le ministère comme il est là, comme le premier ministre Jean Chrétien l'avait dit en 1993. Cela atteint tous les objectifs. Sous ce parapluie, on a tous les instruments nécessaires pour faire en sorte de favoriser un plus grand respect des populations sur cette planète.
Je pense qu'avec la création de ce ministère distinct, cela va coûter probablement plus cher. Je n'en veux pas au ministre du Commerce international qui vient d'acquérir plus de responsabilités, mais le fait demeure que cela risque probablement de coûter plus cher. Ce qui est encore plus désastreux, c'est que la coordination entre les deux ministères ne se fera plus. Donc, on n'aura plus le commerce international comme un instrument important de la politique des affaires étrangères. Maintenant, les deux ministères seront distincts. Ce sera deux choses différentes.
Mme Diane Bourgeois (Terrebonne—Blainville, BQ): Madame la Présidente, je félicite mon collègue de son discours qui était en somme assez clair. Il a quand même clairement démontré l'activité futile que l'on fait actuellement puisque tout était déjà en place, coulé dans le béton par décret. En ce qui me concerne actuellement, je pense que c'est un cirque qu'on est en train de faire.
Le premier ministre avait annoncé la révision de la politique internationale. On sait qu'il n'était pas heureux de ce que ses fonctionnaires lui avaient remis. Il a donc demandé à un professeur d'Oxford de faire cette révision de la politique internationale. D'après ce que l'on sait, d'après ce que les journalistes nous disent, il semble que l'on va recentrer la politique internationale sur la collectivité, sur les citoyens.
Ma première question est la suivante. Mon collègue ne pense-t-il pas qu'il eut mieux valu attendre ce qui ressortait de cette étude sur la politique internationale et le travail de cette spécialiste, avant de scinder les deux ministères?
Deuxièmement, le Canada a souscrit aux objectifs de développement du millénaire présenté par l'ONU. L'un de ces objectifs est de poursuivre la mise en place d'un système commercial qui suppose un engagement en faveur d'une bonne gouvernance, du développement et de la lutte contre la pauvreté, tant au niveau national qu'international. C'est un des objectifs auquel le Canada a souscrit.
Je voudrais demander à mon collègue comment le Canada va faire pour répondre à cet objectif maintenant qu'il dispose de deux comités, deux ministères totalement différents qui, possiblement, ne se parleront plus?
M. Claude Bachand: Madame la Présidente, pour répondre à la première question, le problème que je constate dans la politique et des affaires étrangères et de la défense nationale et du commerce international, c'est que c'est toujours exécuté en vase clos. Depuis des années, j'atteste que ceux qui paient pour le salaire des députés et des ministres et pour les nouvelles politiques des différents gouvernements, ce sont les contribuables. Quand viendra enfin le jour où l'on tiendra une large consultation pour entendre ce que les gens veulent comme politique des affaires étrangères?
Si la commission réalisant une étude à ce sujet venait au Québec, les gens lui diraient que le Commerce international doit demeurer sous l'égide du ministère des Affaires étrangères pour les raisons que j'ai invoquées. Je n'ai pas parlé pour rien; le Bloc québécois a toujours eu comme objectif d'écouter ce que la population du Québec lui dit. Si nous l'affirmons, c'est parce que nous croyons que c'est ce que l'ensemble des Québécois pensent. Toutefois, il serait important de les consulter et que le processus ne s'exécute pas seulement en vase clos avec des hauts fonctionnaires et des académiciens, pour ensuite présenter au bon peuple les nouvelles politiques sur lesquelles il n'aura pas un mot à dire.
Quant à l'importance des traités internationaux, entre autres sur la lutte contre la pauvreté internationale, ma collègue a entièrement raison. Nous avions un ministre senior des Affaires étrangères qui regroupait des fonctionnaires sous lui. Maintenant, il annoncera tout simplement, dans un contexte ou un forum international, qu'il ne peut pas parler du fait de se conformer à des normes internationales sur le commerce, mais que ce sera plutôt à son collègue de Willowdale de le faire dorénavant. Effectivement, cela pose problème. C'est une raison fondamentale pour laquelle le Bloc québécois s'objecte au projet de loi tel que rédigé actuellement.
M. Peter Julian (Burnaby—New Westminster, NPD): Madame la Présidente, j'ai écouté avec grand intérêt l'intervention du député de Saint-Jean. J'ai trouvé intéressant le parallèle qu'il a établi. En effet, ce qu'apporterait la création d'un deuxième ministère, c'est d'investir davantage dans les limousines, plutôt que de traiter véritablement des besoins des vraies gens à travers ce pays, entre autres relativement à l'assurance-emploi.
Depuis 15 ans, nous vivons dans un régime de libre-échange. Je voudrais connaître l'opinion de mon collègue de Saint-Jean vis-à-vis de la qualité des emplois qui se sont créés pendant cette période. À son avis, est-ce mieux qu'il y a 15 ans?
M. Claude Bachand: Madame la Présidente, quant à la question de la libéralisation des échanges internationaux, que ce soit le libre-échange ou toute la question de l'OMC actuellement, mes collègues l'ont souvent dit et je le répète: il faudra y apporter un visage humain. Cela n'a plus de bon sens que les grands milliardaires de la planète aient une incidence aussi forte sur les gouvernements et qu'ils continuent de s'enrichir aux dépens de la classe des travailleurs et de la classe pauvre. Il faut y réfléchir sérieusement. Malheureusement, on dirait qu'ici, en cette Chambre, dans ce genre de forum, ce sont le commerce international et le club des milliardaires qui passent en premier.
Je connais les positions du Nouveau Parti démocratique qui sont très similaires à celles du Bloc québécois. Nous sommes ici pour défendre l'intérêt public et nous continuerons de le faire. Compte tenu de l'ensemble du contexte international de négociation, ce projet de loi devant nous aujourd'hui ne rend pas service à l'intérêt public ni aux gens qui se trouvent dans chacun de nos comtés.
M. Peter Julian (Burnaby—New Westminster, NPD): Madame la Présidente, étant donné que nous approchons la fin de la période prévue pour l'étude de ce projet de loi, je ne ferai qu'une partie de mon intervention aujourd'hui. De plus, je partagerai le temps de parole qui m'est imparti avec le député de Sackville—Eastern Shore. Lorsque nous étudierons à nouveau ce projet de loi, je terminerai mon intervention, puis le député de Sackville—Eastern Shore poursuivra avec sa présentation.
[Traduction]
La présidente suppléante (L'hon. Jean Augustine): La Chambre autorise-t-elle le député à partager son temps de parole?
Des voix: D'accord.
M. Peter Julian: Madame la Présidente, avant de commenter le projet de loi C-31, Loi constituant le ministère du Commerce international, j'aimerais commencer par exprimer mon inquiétude à l'égard de cette division en deux secteurs.
En 1982, nous avons intégré le service du délégué commercial du Canada au ministère qui s'appelait alors le ministère des Affaires extérieures. À l'époque, la politique commerciale a été intégrée à notre politique des affaires extérieures, ou Affaires étrangères, y compris notre engagement envers les droits humains. Il a fallu quelque 15 ans sous des régimes conservateurs et libéraux pour mettre au point cette intégration. Cela a été long, mais tous croient maintenant, comme cela a été confirmé par des observateurs qualifiés, que cette intégration fonctionne. Par la suite, pour couronner le tout, nous envisagerions la possibilité de les fractionner en deux ministères distincts. Cela n'a pas beaucoup de sens.
Dans le discours du Trône, il y avait cette déclaration du premier ministre: « Tout comme notre politique intérieure doit aller de pair avec notre politiqueinternationale, nos efforts dans les domaines de la défense, de la diplomatie, dudéveloppement et du commerce doivent eux aussi aller de pair. »
Maintenant, le projet de loi C-31 scinde effectivement les deux ministères. Par conséquent, il y aura moins de concertation, au lieu de plus, entre ces deux divisions, ces deux impotants moteurs de la politique étrangère du Canada. D'aucuns ont formulé de inquiétudes à l'égard de cette approche.
Bill Clark, un ancien ambassadeur qui a occupé plusieurs postes importants, a déclaré que bien des observateurs s'interrogent sur la raison de ce changement. Il a ajouté qu'on peut se demander si une bonne discussion ouverte s'est tenue avant que ce projet de loi soit présenté à la Chambre. Ces propos se trouvent dans le numéro de janvier/février 2005 du magazine Diplomat & International Canada
L'Association des chefs de mission à la retraite, l'ACMAR, un groupe qui pourrait fournir des renseignements très importants, une opinion impartiale dont on aurait besoin sur ce projet de loi, n'a pas été consultée. En fait, cette association a aussi critiqué le projet de loi.
Ce projet de loi a été déposé et ceux qui auraient dû être consultés le critiquent. De nombreux observateurs se demandent pourquoi procéder à ce changement, car ce n'est pas très logique.
[Français]
C'est ce qu'il y a dans la loi qui est mise de l'avant et dans la décision qui est proposée à la Chambre des communes. En même temps, on n'a pas de justification pour ce faire, car on est en train de contredire ce qui a été dit dans le discours du Trône.
Il est difficile d'imaginer le pourquoi d'une division de ces deux aspects importants de notre politique extérieure, soit le commerce international et, bien sûr, les affaires étrangères.
[Traduction]
Jeffrey Simpson a écrit un article dont je voudrais lire un extrait:
Les nouveaux gouvernements aiment les choses qui, en somme, sont nouvelles. La nouveauté et la volonté politique d'être différents leur masquent souvent la réalité. Les Affaires étrangères et le Commerce international, regroupés dans un seul ministère en 1982, avaient leurs problèmes, mais ceux-ci n'avaient guère trait au fait que les ministères avaient été fusionnés. Leurs problèmes venaient plutôt largement d'une dilution systématique... des actifs nécessaires à la protection des intérêts canadiens et à la projection des valeurs canadiennes par la diplomatie, la défense et l'aide. L'argent, et non la structure, était le problème fondamental. Les nouveaux gouvernements, toutefois, sont parfois tentés de rechercher la mauvaise solution pour le mauvais problème parce que cela crée l'impression qu'ils agissent, qu'ils présentent des approches nouvelles. De fausses actions peuvent parfois camoufler une réalité décourageante. |
M. Simpson ajoutait qu'il n'est pas possible, dans le monde réel, de séparer le commerce de la politique étrangère. Quand un ministre du Commerce se plaint du manque de protection juridique accordée aux investissements, une question commerciale, il soulève aussi la question politique de savoir comment la Chine considère ses obligations en tant que membre de la communauté internationale. Il concluait en ces termes:
Dépouillées de leur responsabilité en matière de commerce, privées de la maîtrise de l'aide étrangère, luttant avec la Défense, se soumettant à d'autres organismes pour la sécurité nationale, impuissantes face à l'Immigration et maintenant inféodées aux organismes centraux pour les relations canado-américaines, les Affaires étrangères tentent de déterminer ce qu'il leur reste et comment faire leur travail. Ainsi les Affaires étrangères annonceront bientôt une autre réorganisation interne pour mieux gérer la politique étrangère--ce que, bien sûr, elles sont incapables de faire maintenant que le commerce international leur a été enlevé. |
C'était dans le Globe and Mail il y a quelques semaines.
Voilà la difficulté à laquelle nous sommes confrontés. On nous présente un projet de loi qui est contesté par ceux qui connaissent le mieux le sujet au sein de la population. De plus, nous ne voyons aucune justification satisfaisante pour ce projet de loi.
Madame la Présidente, je conclurai mes observations à la prochaine séance.
MOTION D'AJOURNEMENT
[L'ajournement]
* * *
L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.
* * *
[Français]
M. Paul Crête (Montmagny—L'Islet—Kamouraska—Rivière-du-Loup, BQ): Madame la Présidente, je suis intervenu en cette Chambre le 21 octobre 2004, au moment il y avait une menace à l'effet que Noranda Mines devienne la propriété d'une compagnie chinoise, sans que le gouvernement fédéral soit vraiment prêt à intervenir et sans qu'il ait adopté une façon de voir ou d'analyser ces dossiers qui tienne compte de la nouvelle réalité.
À ce moment-là, on parlait entre autres de la question des droits de la personne, mais on a aussi parlé de la question de la sécurité des approvisionnements. Effectivement, la Chine est maintenant devenue une puissance mondiale. Elle est à la recherche d'investissements massifs, particulièrement dans le domaine des richesses naturelles. Elle veut s'assurer que, autant au niveau de l'acier, du pétrole ou de toute autre ressource naturelle, elle puisse alimenter son immense économie qui a un rythme de croisière assez hallucinant. On parle d'une croissance de 8, 9 ou 10 p. 100 par année dans les dernières années, et cela va se maintenir dans le futur.
À ce moment-là, j'avais interpellé le ministre de l'Industrie pour savoir si, effectivement, il tiendrait compte de la question des droits humains dans sa position et dans son analyse.
Depuis ce temps, ce dossier s'est un peu calmé. Maintenant, Noranda négocie avec Minmetals mais aussi avec d'autres groupes. Cependant, la question demeure la même. Le ministre avait fait des déclarations disant qu'il se préparait à proposer des modifications à la loi sur les investissements étrangers pour la rendre plus moderne, pour lui donner une réalité, une façon d'agir et plus de mordant, ce qui lui permettrait de prendre des positions qui soient claires, nettes et qui donnent l'indication très claire aux pays qui veulent faire des achats chez nous dans ce domaine sur la façon dont leurs investissements seront gérés et dans quelles conditions ils peuvent obtenir que les ventes soient réalisées.
Je viens juste de sortir d'une rencontre avec les exportateurs et les manufacturiers canadiens. C'est une association très dynamique qui vise à assurer que notre marché d'exportation et nos échanges dans le nouveau marché mondial puissent se faire dans les meilleures conditions possibles de réalisation.
Ils souhaitent aussi que le gouvernement fasse connaître ses règles du jeu le plus rapidement possible. Dans le fond, c'est le complément de la question que j'adresse aujourd'hui au représentant du ministère, soit le secrétaire parlementaire. Est-ce que le gouvernement fédéral va se décider à nous proposer une loi sur la question des investissements étrangers? La loi doit être dépoussiérée et le ménage doit y être fait. En bout de ligne, on pourra avoir un outil de gestion de nos ressources naturelles qui soit adéquat.
On le voit de façon concrète au niveau du pétrole, des mines et de l'acier. On pourrait même le voir au niveau de l'eau. Il faut que nous soyons mieux équipés que nous ne le sommes présentement pour faire face à de telles demandes. Ces demandes peuvent nous provenir de la Chine mais aussi d'autres pays en développement. C'est comme si on avait gardé une vieille recette, alors que tout l'environnement dans lequel on travaille a changé.
Est-ce que le gouvernement fédéral va mettre sur la table une nouvelle recette, une nouvelle façon de faire? Va-t-il consulter la population et les intervenants économiques pour qu'on ait une loi qui gère les investissements étrangers et qui corresponde à la réalité du XXIe siècle?
[Traduction]
L'hon. Jerry Pickard (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie, Lib.): Madame la Présidente, nous reconnaissons tous que l'investissement étranger direct compte pour part non négligeable de l'économie canadienne.
L'investissement étranger direct aide les Canadiens à participer à l'économie mondiale. Il est à notre avantage que des entreprises étrangères amènent au Canada leurs connaissances, leurs capacités, leur productivité supérieure, leur efficacité et leur technologie. Bien sûr, l'investissement étranger direct stimule l'économie canadienne. Ce type d'investissement se traduit par des emplois de meilleure qualité et des salaires plus élevés et, grâce à eux, les Canadiens peuvent garder le plus haut niveau de vie du monde.
Le Canada est confronté à une concurrence internationale féroce lorsqu'il s'agit d'attirer l'investissement étranger direct en raison de tous ses avantages. Il nous incombe de créer et de maintenir un climat positif qui fait comprendre au reste du monde que le Canada est un très bon endroit où faire des affaires.
Des étrangers investissent au Canada et des Canadiens investissent à l'étranger, ce qui est aussi avantageux pour le Canada. Les entreprises canadiennes font beaucoup d'acquisitions à l'étranger. En 2003, l'investissement étranger direct au Canada a atteint 358 milliards de dollars tandis que l'investissement canadien direct à l'étranger a atteint 399 milliards de dollars. En outre, selon Statistique Canada, de 1997 à 2002, des entreprises étrangères ont fait l'acquisition de 345 entreprises canadiennes, mais les entreprises canadiennes ont fait l'acquisition de 447 entreprises étrangères dont la valeur est évaluée à 124 milliards de dollars.
Cela dit, permettez-moi de donner l'assurance aux députés qu'avec la Loi sur Investissement Canada, notre pays dispose d'un mécanisme pour examiner l'acquisition de grandes entreprises canadiennes par des sociétés étrangères.
Bien que les dispositions de la loi qui protègent la confidentialité ne me permettent pas de faire de commentaires sur une transaction particulière, je peux dire qu'en général, l'acquisition d'une entreprise canadienne, pour un prix dépassant 237 millions de dollars, par une entreprise issue d'un pays qui adhère à l'Organisation mondiale du commerce, fait l'objet d'un examen tel que prévu dans la loi. Pour obtenir l'approbation du ministre de l'Industrie, qui est responsable de l'application de la loi, l'acquéreur doit faire la preuve que le Canada sort gagnant de la transaction.
On trouve dans la loi une liste de facteurs à considérer pour déterminer si le Canada y trouve son compte. Ces facteurs comprennent: l'effet de l'investissement sur l'économie, la productivité, l'efficacité du secteur, le caractère innovateur et concurrentiel des produits, la participation de Canadiens, la conformité aux politiques économiques et culturelles ainsi que l'accroissement de la capacité concurrentielle du Canada sur les marchés internationaux.
La Loi sur Investissement Canada précise que la décision ne se résume pas à un oui ou un non. Elle dit que nous avons le pouvoir de demander des engagements fermes de l'investisseur pour que, dans sa forme définitive, la transaction constitue un gain net pour le Canada. Je peux assurer la Chambre que chaque transaction projetée devant faire l'objet d'un examen sera scrutée attentivement par le gouvernement du Canada.
Dans le cadre de l'examen prévu par la loi, le ministre consulte les autres ministères et organismes fédéraux, les provinces, les entreprises canadiennes et tous ceux qui sont concernés par la transaction. Le Canada a besoin des investissements étrangers. Toutefois, je peux assurer la Chambre que les acquisitions par des investisseurs étrangers sont approuvées uniquement si, dans l'ensemble, elles sont avantageuses pour le Canada.
[Français]
M. Paul Crête: Madame la Présidente, j'ai bien aimé les informations qui ont été données par le secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie sur le fonctionnement de la loi actuelle. Finalement, le ministre de l'Industrie a annoncé qu'il verrait une révision de la loi et qu'il voudrait y ajouter d'autres critères, des éléments additionnels importants.
Le secrétaire parlementaire a bien précisé comment les demandes sont étudiées présentement. Il y a là des aspects qui fonctionnent très bien, mais il y a des aspects qui concernent la nouvelle réalité économique. Par exemple, on est dans un marché mondial, et chaque fois qu'on autorise un pays étranger à investir ici—un pays comme la Chine qui a une forme ou une intervention gouvernementale très développée—, ne serait-il pas pertinent qu'on puisse aller évaluer comment les gens qui travaillent pour ces entreprises en Chine ou ailleurs dans le monde sont traitées; quel genre de travail ils accomplissent; quelles sont leurs conditions de travail; quelles sont les conditions environnementales? Différents sujets comme ceux-là ne sont pas des entraves à l'investissement étranger, mais précisent les règles dans lesquelles on est prêts à intervenir.
Je dois avouer que je suis un peu étonné. Je pose la question au secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie. Vient-il me dire que le ministre a enterré sa volonté de revoir la loi et qu'il a décidé de continuer à fonctionner avec la loi actuelle parce le dossier de Minmetals est moins actif? Néanmoins, n'y a-t-il pas d'autres situations où il faudrait que l'on soit proactifs, que l'on agisse maintenant et que l'on donne un nouveau cadre législatif à l'arrivée de nouveaux investissements?
[Traduction]
L'hon. Jerry Pickard: Madame la Présidente, la situation de l'investissement étranger préoccupe énormément le Canada. Le gouvernement garantit que, en vertu de la loi, le Canada est protégé. Les acquisitions faites par les investisseurs étrangers font l'objet d'un examen approfondi et sont approuvées uniquement s'il est établi qu'elles se traduisent par un avantage net pour le Canada.
Dans l'éventualité où un investisseur étranger ne respecte pas les engagements qu'il a pris en vertu de la Loi sur Investissement Canada, le ministre a le pouvoir d'intervenir pour remédier à la situation. Il ne fait pas l'ombre d'un doute que l'actuel gouvernement canadien s'assure que les investissements faits au Canada sont autorisés. Le gouvernement veille également à assurer la protection des citoyens et des entreprises canadiennes lorsque la situation l'exige.
[Français]
La présidente suppléante (l'hon. Jean Augustine): La motion portant que la Chambre s'ajourne maintenant est réputée adoptée. La Chambre demeure donc ajournée jusqu'à demain, à 10 heures, conformément à l'article 24(1) du Règlement.
(La séance est levée à 18 h 41.)