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Bonjour, mesdames et messieurs. Nous allons maintenant commencer. Je constate que deux de nos témoins ne sont pas là; ils ont dû penser qu'ils ne prendraient la parole que pendant la deuxième heure. Dès qu'ils seront de retour, on leur donnera leurs 10 minutes de gloire pour ensuite passer aux questions.
Bienvenue à tous. Ce matin, nous allons débattre de façon approfondie de l'OMC : que s'y passe-t-il, que ne s'y passe-t-il pas, qu'est-ce qui devrait s'y passer et que devrions-nous faire dans l'avenir. Nous allons aborder tous ces aspects. Je suis convaincu que la discussion sera fructueuse et les questions intéressantes.
Commençons. D'après l'ordre du jour, nous devions en premier lieu accorder la parole aux représentants des Producteurs canadiens de lait, de la volaille et des oeufs.
Je constate que vous êtes bien là. Très bien. Je vous demanderais de commencer.
Nous accordons aux témoins 10 minutes pour leurs exposés. Je constate que vous êtes deux par groupe. C'est à vous de voir comment vous voulez vous répartir le temps qui vous est alloué. Vous avez donc 10 minutes et ensuite on passera aux questions.
Messieurs, à vous de débuter.
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Merci, monsieur le président, de nous avoir invités à comparaître.
Nous entrons dans la dernière phase des négociations sur l'agriculture à l'OMC. Le président des négociations sur l'agriculture, Crawford Falconer, a diffusé le 9 juin un document complet sur l'accès aux marchés. L'OMC a pour objectif une entente sur les modalités d'ici la fin de juillet 2006 en vue de conclure le Cycle de négociations de Doha d'ici la fin de l'année.
Le Canada a entamé ces négociations avec une position équilibrée. Les producteurs de lait, de volaille et d'oeufs du Canada ont appuyé la position initiale de négociation en 1999 car elle offrait la meilleure possibilité de garantir un succès pour l'ensemble de l'agriculture canadienne. Le Canada a pour mandat d'éliminer les subventions à l'exportation, de réduire sensiblement le soutien interne affectant les échanges, d'élargir de beaucoup l'accès aux marchés et de défendre les mesures à l'importation qui sont nécessaires pour une bonne gestion de l'offre. À ce jour, les gains obtenus pour les secteurs agricoles qui ne sont pas en gestion de l'offre au Canada sont positifs.
À Hong Kong, les membres de l'OMC ont convenu d'éliminer les subventions à l'exportation d'ici 2013. Le soutien interne affectant les échanges sera réduit dans une proportion pouvant aller jusqu'à 70 p. 100 et les plus fortes compressions seront faites par l'Union européenne, les États-Unis et le Japon. D'après Falconer, « la zone réelle d'engagement » de la formule de réduction tarifaire par palier entraînerait une réduction sensible des tarifs réguliers, soit de 45 à 75 p. 100. On ne peut pas en dire autant pour les secteurs en gestion de l'offre au Canada, car il reste beaucoup d'incertitude au sujet des produits sensibles. La seule chance de survie de la gestion de l'offre réside dans un résultat favorable dans la catégorie des produits sensibles.
Les secteurs des produits laitiers, de la volaille et des oeufs au Canada ont appuyé activement la stratégie canadienne visant à obtenir de réductions tarifaires élevées selon la formule habituelle compte tenu du fait qu'il n'y aurait pas de lien entre la formule et le traitement des produits sensibles. Toutefois, il y a maintenant un lien direct entre la formule de réduction tarifaire générale et ce qui est exigé pour les produits sensibles. C'est ainsi que nous nous trouvons devant une réduction de 15 à 25 p. 100 des tarifs hors contingent. Bien que nos tarifs hors contingent semblent élevés, dans de nombreux cas, ils sont dangereusement bas et ils ne donnent pas le résultat qui est visé. Pour dire les choses simplement, nous n'avons aucune marge pour réduire nos tarifs hors contingent.
La réduction des tarifs hors contingent nous priverait de notre capacité de prévoir la quantité des importations qui arrivent au Canada. Nous ne pourrions pas non plus assortir l'offre avec la demande de sorte que nous serions incapables de garantir qu'il y aurait suffisamment de produits cultivés au Canada pour répondre aux besoins des Canadiens et des Canadiennes d'un bout à l'autre du pays. Il pourrait s'ensuivre une déstabilisation du prix des aliments que les Canadiens et les Canadiennes paient et que nous touchons pour notre travail. Si tous les autres pays sont disposés à subir une réduction de leurs tarifs hors contingent, c'est tout simplement parce qu'ils ont une marge suffisante pour le faire sans risquer un accès élargi à leurs marchés.
Ce sont ces mêmes pays qui s'opposent vigoureusement à l'élargissement de l'accès aux CT. Pourquoi? Parce que l'élargissement des contingents tarifaires équivaudrait à offrir un accès réel aux marchés. Le Canada a déjà offert un accès réel dans le dernier cycle de négociations. En fait, nous autorisons un accès encore plus large que les autres pays. Ceux-ci ne sont même pas disposés à offrir un accès réel aux marchés en respectant nos niveaux d'accès. Si ces pays ne sont pas disposés à offrir l'accès qu'ils auraient dû offrir dans le dernier cycle, le Canada ne doit pas augmenter l'accès minimal à ses marchés en gestion de l'offre.
Je vais terminer mon exposé en français.
[Français]
Le président a reconnu dans son texte que le Canada avait défendu avec vigueur la gestion de l'offre.
Sur ce point, le gouvernement a été critiqué au Canada. On a dit qu'il avait été isolé, étant seul contre 148 pays. Examinons ce prétendu isolement.
En premier lieu, il n'y a pas eu 148 pays contre le Canada, car il n'y a pas eu de vote. Le texte a été le produit d'une seule personne, le président des négociations sur l'agriculture, M. Falconer. Au mieux, on peut dire que les quelques 25 pays qui participent activement aux négociations sur l'agriculture pourraient ne pas appuyer entièrement la position du Canada.
En deuxième lieu, ce qui s'est passé est loin de constituer un désavantage. Si le Canada a été mentionné expressément par le président, c'est donc que le Canada a un problème important qui doit être réglé. Le Canada dispose donc ainsi d'une marge de négociation. Il s'agit d'une situation semblable à celle de l'Union européenne, qui a été pointée du doigt pour le peu d'accès à son marché, à celle des États-Unis relativement au soutien interne, à celle de l'Inde relativement aux services et à celle des pays du G10 relativement au choix des produits sensibles.
En outre, en ce qui a trait à la formule de réduction tarifaire générale, M. Falconer a mentionné certains membres du G10 et les a prévenus qu'ils pourraient faire obstacle au consensus. Le fait est qu'il y a eu au-dessus de 200 mentions entre crochets dans le texte sur l'accès au marché seulement, pour des points sur lesquels il n'y a pas de consensus. Chacune de ces mentions entre crochets soulève des questions qui sont importantes pour les membres de l'OMC et qui doivent être réglées au cours des négociations.
Les commentaires attribués aux premiers ministres de l'Ouest me laissent quelque peu perplexe. D'une part, ils affirment que le Canada s'est isolé et qu'il devra maintenant accepter un règlement. D'autre part, ils affirment que le Canada tout seul fera s'effondrer tout le cycle de Doha. Ils allèguent que le gouvernement délaisse maintenant son intérêt pour les produits qui ne sont pas régis par la gestion de l'offre. En fait, la position ferme du Canada ne servira qu'à renforcer sa capacité d'obtenir un accès réel aux marchés dans le monde tout en préservant la gestion de l'offre.
Si le gouvernement doit respecter son mandat dans ces négociations, l'intérêt de la gestion de l'offre doit être la toute première priorité pour les produits sensibles. Il est impensable qu'une solution moindre puisse être avantageuse pour l'agriculture canadienne, car la seule alternative nous ferait subir manifestement de fortes pertes.
Pendant plusieurs années, les industries des produits laitiers, de la volaille et des oeufs au Canada ont voulu faire le ménage dans la façon dont les pays utilisaient les contingents tarifaires. Il y aurait eu ainsi des résultats favorables pour tous les secteurs de l'agriculture canadienne. Comme cela est impossible maintenant, nous en sommes réduits à accepter l'option peu avantageuse qui consiste à classer nos produits dans la catégorie des produits sensibles. Il n'y a plus de marge pour un réajustement. Soyons clairs: si le gouvernement ne révise pas ses priorités, ce cycle sera une catastrophe pour la gestion de l'offre.
Vous verrez au cours de cette présentation que nous avons aussi incorporé l'apport économique des industries des produits laitiers, de la volaille et des oeufs au Canada.
Je termine ici ma présentation.
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Merci, monsieur le président. Merci de tenir cette audience sur le commerce international et de nous inviter à présenter au comité nos observations sur les politiques commerciales dont ont besoin les quelque 100 000 éleveurs de bovins canadiens.
Je m'appelle Darcy Davis. Je siège au conseil d'administration de l'Association canadienne des éleveurs de bovins et je suis vice-président du comité du commerce extérieur. Je suis propriétaire d'une exploitation vache-veau près d'Acme, en Alberta.
M. John Masswohl m'accompagne — il dirige le bureau d'Ottawa de l'Association.
Les éleveurs de bovins du Canada dépendent fortement du commerce international pour gagner leur vie. Nous avons appris d'une manière très douloureuse à quel point la perte de l'accès aux marchés internationaux peut toucher notre industrie. Lorsque nous avons perdu tous nos marchés d'exportation pour les bovins et le boeuf le 20 mai 2003, nous avons perdu les débouchés pour près de 60 p. 100 de notre production nationale. Jusqu'à ce que les États-Unis et le Mexique rétablissent des importations restreintes de boeuf canadien à l'automne de 2003, notre industrie perdait environ 11 millions de dollars par jour.
Nous avons progressivement réintégré le marché international, grâce à une série de mesures. La population se souviendra peut-être que nous avons atteint un jalon important avec la reprise de certaines exportations de bovins vivants aux États-Unis en juillet dernier, mais il y a encore beaucoup de chemin à parcourir. Aujourd'hui, nous estimons que l'industrie perd de 1,2 à 2 millions de dollars par jour en raison de l'accès restreint au marché américain. À l'échelle mondiale, nous disposons d'un accès partiel à cinq de nos dix principaux marchés d'exportation en 2002.
Toutefois, les éleveurs de bovins sont persévérants et déterminés. Nous ne serons plus aussi vulnérables que nous l'étions en mai 2003. D'abord, nous avons appris que nous devons dépendre moins de l'exportation de bovins vivants. Nous avons donc augmenté notre capacité d'abattage au Canada, passant de 72 000 têtes de bétail par semaine à un peu plus de 100 000 têtes.
Au lieu de simplement exporter le boeuf excédentaire aux États-Unis, nous devons diversifier nos marchés. Cela nous mène directement à l'importance des négociations dans le cadre de l'OMC. Une protection tarifaire et des barrières non tarifaires très élevées dans plusieurs pays gênent l'exportation de notre boeuf de haute qualité dans leurs marchés.
L'Europe empêche les producteurs de boeuf canadien d'accéder à un marché qui consomme 8 millions de tonnes de boeuf par année. Le Japon impose un tarif de 38,5 p. 100 aux importations de boeuf, mais se réserve la possibilité de l'accroître à 50 p. 100 afin de protéger son marché national. La Corée impose un tarif de 40 p. 100 aux importations de boeuf. Les marchés qui offrent un potentiel énorme, tels que la Chine et l'Inde, imposent des tarifs de 25 à 35 p. 100 aux importations de boeuf. Ou bien l'accès à ces marchés importants sera amélioré, ou bien le Canada devra réduire le nombre de ses producteurs de boeuf.
Nous sommes conscients du fait que l'Europe en particulier a l'intention d'attribuer au boeuf la désignation de produit sensible. Pour cette raison, il faut demander aux négociateurs canadiens de veiller tout particulièrement à ce que les produits sensibles ne soient pas exclus de l'accès accru aux marchés. Pour être plus précis, les exportations canadiennes de boeuf vers l'Europe sont visées par un quota minuscule de 11 500 tonnes, partagé avec les États-Unis, à un tarif douanier de 20 p. 100. Au-delà de ce quota de 11 500 tonnes, on impose au boeuf canadien des droits de plus de 3 000 € la tonne, soit environ 140 p. 100.
Il faut que les négociateurs canadiens visent un résultat qui aurait les trois effets suivants sur le tarif européen sur le boeuf: premièrement, il faut augmenter la taille du quota établi pour le boeuf nord-américain à environ 300 000 tonnes; deuxièmement, il faut éliminer le tarif de 20 p. 100 imposé au boeuf faisant partie du quota; et troisièmement, il faut obtenir une réduction significative du tarif douanier imposé aux importations de boeuf au-delà du quota.
Je tiens également à signaler que le boeuf exporté en Europe doit répondre aux normes européennes. Ainsi, il faut élever les bovins sans utiliser de stimulateurs de croissance et il faut que la transformation du boeuf ait lieu dans une installation configurée d'une manière particulière. Si, à titre d'éleveur de bovins, je décide de produire pour le marché européen, je dois prendre l'engagement d'élever mon troupeau en respectant les normes européennes — soit environ deux ans d'élevage pour chaque animal. Il est plus coûteux d'élever un animal de cette façon, si bien que j'irai de l'avant si et seulement si je sais que j'aurai accès au marché. Un quota de 11 500 tonnes est insuffisant pour justifier qu'un éleveur s'engage pendant deux ans et il est insuffisant pour justifier les investissements requis de la part des installations d'abattage.
Nous croyons que l'Europe devrait permettre l'importation de 10 à 15 p. 100 de sa consommation de boeuf. Présentement, elle autorise environ 2 p. 100.
J'aimerais aussi formuler des observations au sujet des initiatives bilatérales de libre-échange qui sont en cours ou qu'on envisage de lancer, notamment avec le Japon et la Corée. Pour le Canada, ces pays étaient les troisième et quatrième plus importants marchés d'exportation de boeuf en 2002.
Nous serions heureux de disposer d'un accès exempt de droits à ces marchés et nous appuyons la conclusion d'accords de libre-échange avec ces deux pays pour cette raison. Toutefois, nous craignons que ni la Corée ni le Japon ne respectent ses obligations sanitaires et phytosanitaires. L'Organisation mondiale de la santé animale, l'OIE, exige l'acceptation du boeuf de pays touchés par l'ESB provenant d'animaux de moins de 30 mois. Présentement, le Japon accepte le boeuf désossé canadien provenant uniquement d'animaux de moins de 21 mois, tandis que la Corée n'autorise aucun accès.
J'espère que la possibilité d'accords de libre-échange contribuera à régler ces problèmes et à assurer un accès encore plus important que celui que nous avions en 2002. Toutefois, avant que le Canada ne paraphe un accord, nous devrons vérifier si les obligations présentement en vigueur sont respectées.
En ce qui a trait à l'importation du boeuf, aux termes de ses obligations dans le cadre de l'OMC, le Canada doit autoriser l'importation de 76 409 tonnes de boeuf provenant des pays autres que ses partenaires de l'ALENA. Au-delà de ce seuil, les importations devraient être assujetties à des droits de 26,5 p. 100. Toutefois, avant la crise de la vache folle en 2003, le ministre du Commerce international autorisait régulièrement des importations supplémentaires, si bien qu'on acceptait environ 130 000 tonnes d'importations annuelles provenant de l'Australie, de la Nouvelle-Zélande et de l'Amérique du Sud.
Sans de telles importations supplémentaires, les consommateurs de boeuf canadien ont acheté du boeuf canadien provenant de notre nouvelle capacité d'abattage. Si nous voulons conserver cette nouvelle capacité d'abattage, il faudra que l'interruption des importations supplémentaires soit permanente. Cela dit, nous ne nous opposerions pas à un accès amélioré réciproque qui découlerait de négociations commerciales.
Ma présentation d'aujourd'hui a surtout porté sur l'accès aux marchés, mais je voulais aussi signaler que l'industrie du boeuf dépend dans une large mesure d'un secteur céréalier durable. Qu'il s'agisse de maïs, d'orge ou de blé, nous savons tous que de nombreux facteurs, y compris les subventions qui faussent les échanges, ont un impact sur les producteurs de céréales canadiens.
J'entrevois trois avenirs possibles pour ces producteurs: premièrement, l'OMC réussira à réduire de manière significative les subventions à la production et au commerce partout dans le monde qui faussent les échanges. Deuxièmement, les céréaliers protesteront devant le Parlement chaque année pour obtenir ce que leurs homologues des autres pays ont obtenu ou, troisièmement, il y aura moins de producteurs de céréales.
Les éleveurs de bovins canadiens ne veulent pas de diminution de la culture des céréales au Canada. L'avenir des quelque 100 000 éleveurs de bovins du Canada est vraiment un enjeu mondial. Faute d'exportations, il faudrait que de 50 000 à 60 000 d'entre nous trouvions un autre moyen de subsistance.
Nous vous prions de veiller à ce que le Canada adopte des politiques ambitieuses axées sur l'exportation qui stimuleront la croissance du secteur canadien du boeuf et de la plupart du secteur agricole canadien.
Nous serons heureux de répondre à vos questions.
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Merci, monsieur le président.
J'aimerais remercier le comité de nous accueillir aujourd'hui. Je crois qu'il est important qu'on prenne le temps d'entendre les commentaires de tous et chacun concernant ces négociations qui sont très importantes à ce stade-ci.
L'Union des producteurs agricoles, l'UPA, ainsi que les fédérations concernées par la gestion de l'offre au Québec, soit celles du lait, du poulet, du dindon, des oeufs de consommation et des oeufs d'incubation, tiennent d'abord à remercier le Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire de les avoir invitées à exprimer leurs positions sur les négociations en agriculture à l'OMC et à participer à ses audiences.
Notre présentation d'aujourd'hui portera plus particulièrement sur trois sujets. Dans un premier temps, nous rappellerons les raisons qui ont amené le Canada à implanter la gestion de l'offre il y a 30 ans. Nous vous ferons part ensuite, de façon plus technique, de nos plus grandes inquiétudes à l'égard des négociations actuelles, qui touchent de plus près nos productions sous gestion de l'offre. Enfin, nous reviendrons sur la position du gouvernement canadien dans ce dossier.
Je vais maintenant passer la parole à M. Serge Lebeau.
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Merci, monsieur le président.
Messieurs les membres du comité, tout d'abord, j'aimerais faire un petit rappel sur les raisons qui ont amené le Canada à implanter la gestion de l'offre il y a 30 ans. À l'origine, il y a plus de 30 ans, les systèmes canadien et québécois de gestion de l'offre furent mis en place pour stabiliser les revenus agricoles et supprimer l'injection massive de fonds gouvernementaux à leur soutien, deux objectifs atteints au fil du temps et toujours d'actualité.
Les négociations en agriculture à l'OMC étant maintenant rendues à une étape cruciale, soit celle de l'établissement de l'ensemble des modalités, nous pressons le Canada d'intervenir en faveur de la gestion de l'offre dans ce dossier. À cet effet, l'UPA a certaines craintes vis-à-vis de l'importance, de la rapidité et de la tangente que prennent les négociations actuelles en agriculture. Ces inquiétudes touchent les négociations proprement dites et plusieurs points techniques, mais également la position du gouvernement canadien dans ce dossier.
Permettez-nous tout d'abord de passer en revue un certain nombre de points techniques liés à la négociation en cours.
En premier lieu, je vais parler du traitement des produits sensibles et des principes de l'accord-cadre de juillet 2004. L'accord-cadre de juillet 2004 précisait, et je cite : « La réforme des trois piliers de la négociation forme un tout interdépendant et doit viser l'équilibre et l'équité. » Ce principe inscrit à l'intérieur de l'accord-cadre de juillet 2004 est très important pour le Canada. Alors que les pays du G10, de l'Union européenne et des États-Unis subventionnent directement les agriculteurs, leur permettant ainsi d'abaisser les prix de revient et les tarifs qui, ultimement, permettent de protéger leur marché de toute importation, le Canada doit assurer le maintien des secteurs sous gestion de l'offre en faisant en sorte qu'ils conservent la seule protection à leur disposition, soit les barrières tarifaires.
Pourquoi avons-nous plus d'efforts à faire en matière d'ouverture de marché que les autres pays? M. Pascal Lamy, le directeur général de l'OMC, lors d'une rencontre que nous avons eue avec lui le 5 juin dernier, nous disait que pour maintenir nos systèmes de gestion de l'offre, il suffisait d'utiliser les boîtes bleue et verte. Mais, du même souffle, il avouait que pour protéger tout le marché, il suffisait de combler le manque à gagner par un paiement direct, ce que font exactement Européens, Américains et membres du G10. Cela ne nous intéresse pas vraiment.
Le deuxième point technique est la sélection des produits sensibles. Le Canada a besoin de 7 p. 100 de lignes tarifaires au minimum pour couvrir les quelques 100 lignes tarifaires hors contingent des produits sous gestion de l'offre. Les propositions avancées jusqu'à maintenant font varier ce taux de 1 p. 100 — c'est la proposition américaine —, à 4 p. 100 — c'est la position européenne — et à 15 p. 100, soit la position du G10. L'expression de la sélection des produits sensibles en pourcentage nous inquiète. En effet, l'Europe, à titre d'exemple, aurait besoin du même nombre de lignes tarifaires que le Canada, soit environ une centaine. Ce nombre, exprimé en pourcentage, représente 4 p. 100 des lignes tarifaires européennes, ce qui couvre les produits sensibles que l'Europe souhaite inscrire à l'OMC. Si le pourcentage des lignes tarifaires pour sélectionner les produits sensibles est la méthode retenue, il faudra qu'il y ait suffisamment de latitude pour faire en sorte que les pays puissent y procéder en toute équité.
Passons à la question des contingents tarifaires. Rappelons que lors du cycle d'Uruguay, les pays se sont donné des lignes directrices fixant l'accès minimum au marché à 5 p. 100 de la consommation intérieure. Cependant, les pays n'ont pas tous appliqué ces consignes de façon identique. À titre d'exemple, le Canada autorise l'importation d'environ 4 p. 100 de la consommation nationale de produits laitiers, 7,5 p. 100 dans le cas du poulet, 5 p. 100 pour le dindon, 5 p. 100 pour les oeufs de consommation et plus de 20 p. 100 dans le secteur des oeufs d'incubation.
Les États-Unis, quant à eux, n'autorisent qu'un accès de 2,75 p. 100 pour les produits laitiers, alors que l'Europe n'offre que 0,5 p. 100 dans les secteurs avicoles. Globalement, les pays ont accordé moins de 2 p. 100 d'accès à leur marché sous contingent tarifaire. Pour des raisons d'équité, il nous apparaît essentiel de fixer un niveau d'accès minimum commun avant d'augmenter les contingents tarifaires.
Parlons maintenant de la question des entreprises commerciales d'État. Sachant que nos entreprises commerciales d'État constituent le seul outil à la disposition des agriculteurs pour concurrencer les gros joueurs du secteur privé présents sur la scène internationale et ce, à tous les maillons de la chaîne, il nous apparaît important de conserver les acquis de la Conférence ministérielle de Hong Kong, à savoir que ce ne sont pas les entreprises commerciales d'État ni leur pouvoir de monopole qui sont remis en question, mais plutôt leurs pratiques.
En ce qui a trait à la position du gouvernement, le ministre fédéral de l'Agriculture, M. Chuck Strahl, affirmait le 31 mai dernier que pendant les négociations, lorsque le vote est de 148 voix contre une en notre défaveur, nous avons le choix : abandonner la partie ou défendre nos intérêts en matière de gestion de l'offre.
À la lumière de ce commentaire, nous craignons la signature d'une entente par le Canada, indépendamment du fait que celle-ci soit acceptable ou non pour l'agriculture et la gestion de l'offre. Il importe également de rappeler que si l'économie canadienne dans son ensemble est fortement tributaire des exportations, il n'en va pas du tout de même pour l'agriculture, contrairement à ce qui est souvent véhiculé. Le marché le plus important pour les agriculteurs et transformateurs canadiens est de loin le marché intérieur. Les producteurs et les transformateurs retirent annuellement plus de 91 milliards de dollars de leurs ventes. La vaste majorité de ces ventes, soit 70 p. 100, provient des ventes faites au Canada. Il en va de même à l'échelle du globe puisque seulement 10 p. 100 de la production mondiale agricole fait l'objet de commerce international. Pourquoi alors devrait-on sacrifier notre agriculture au nom de celui-ci?
Par conséquent, le Canada doit maintenir une position ferme dans le dossier agricole — à l'instar de la Norvège en juillet 2004 — et invoquer l'exception si nécessaire pour assurer la pérennité de nos systèmes de gestion de l'offre. Qui plus est, un sondage Léger Marketing, commandé par les producteurs et réalisé du 16 au 21 mai dernier auprès de 1 500 répondants, a révélé notamment que 85 p. 100 des Canadiens conviennent que le gouvernement fédéral doit appuyer l'approche de la gestion de l'offre du lait, de la volaille et des oeufs et que 83 p. 100 d'entre eux croient que la gestion de l'offre est une meilleure approche que les subventions financées par les contribuables pour assurer un revenu stable aux producteurs.
En conclusion, je dirai que le cabinet fédéral, selon nos informations, a renouvelé récemment le mandat de ses négociateurs. Il est essentiel que celui-ci soit sans équivoque pour que, à la conclusion des négociations en cours et avant d'appuyer toute modification aux règles de commerce en agriculture à l'OMC, les secteurs régis par la gestion de l'offre ne soient soumis à aucune réduction des tarifs hors contingent ni à aucune augmentation des contingents tarifaires. Il faut que ces secteurs puissent continuer à procurer aux producteurs des revenus provenant du marché leur garantissant une juste rémunération; que les consommateurs continuent d'avoir accès à des produits d'excellente qualité, en quantité suffisante et à des prix raisonnables; que les transformateurs continuent de bénéficier d'une grande stabilité d'approvisionnement et d'obtenir des résultats financiers enviables; et enfin que l'État, et par le fait même les contribuables, continuent à ne verser aucune subvention pour soutenir les revenus des agriculteurs et des agricultrices concernés.
Je vous remercie.
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Bonjour, monsieur le président, membres du comité. Je vous remercie de nous donner l'occasion de comparaître aujourd'hui devant vous. Nous félicitons le comité de tenir cette audience sur l'OMC.
Je suis productrice de céréales et de graines oléagineuses en Saskatchewan et je suis vice-présidente de l'Alliance canadienne du commerce agroalimentaire. Je suis accompagnée aujourd'hui de Tyler Bjornson, du Conseil canadien du canola. Ce conseil est l'un des 15 membres de l'ACCAA.
L'ACCAA est une coalition de 15 organisations qui représente des producteurs agricoles, des transformateurs, des distributeurs et des exportateurs, ainsi que des distributeurs de produits agroalimentaires. Nous représentons la majorité des agriculteurs du Canada et des producteurs de toutes les denrées agricoles importantes pour l'exportation. Nous représentons également les partenaires de la chaîne de valeur agricole. Nous sommes la seule organisation de promotion du commerce qui représente l'ensemble de la chaîne de valeur agricole.
Nos membres ont un chiffre d'affaires qui s'élève à environ 50 milliards de dollars par an et ils emploient un demi-million de Canadiens. Il importe de remarquer que 91 p. 100 des producteurs agricoles du Canada dépendent des marchés internationaux, soit pour fixer le prix des produits qu'ils vendent sur le marché national ou, plus directement, pour exporter leurs produits.
Nous avons distribué un mémoire. Je me contenterai aujourd'hui de quelques observations pour passer en revue le mémoire que nous avons distribué aux membres du comité.
Le Canada est le pays membre du G-8 qui dépend le plus des échanges commerciaux. Il est en importance le quatrième exportateur de produits agricoles et agroalimentaires. Un emploi sur trois au Canada dépend des exportations.
Alors que les membres de l'ACCAA sont fortement tributaires du commerce international, nous sommes toujours contraints à être concurrentiels au sein d'un marché largement faussé par les subventions, les tarifs prohibitifs et les barrières non tarifaires. Le secteur de l'agriculture et de l'agroalimentaire canadien a besoin d'excellentes réglementations internationales qui s'attaqueront à ces distorsions pour que la contribution de ce secteur à l'économie canadienne puisse augmenter.
Il résulterait d'un système commercial plus ouvert une augmentation des possibilités pour les producteurs, les transformateurs et les exportateurs canadiens. On estime les bénéfices d'un commerce plus ouvert à 56 milliards de dollars US par an au niveau mondial.
Les négociations du cycle de Doha pour le développement à l'OMC, débutées en novembre 2001, représentent une rare occasion pour les pays de pouvoir s'attaquer aux subventions et barrières déloyales. De même, cela permet aux pays comme le Canada qui sont tributaires du commerce, d'instaurer un cadre commercial meilleur tout en servant aussi d'outil au développement pour aider des millions d'habitants de pays pauvres à sortir de cette pauvreté.
Le Canada a été un fervent partisan des objectifs ambitieux énoncés en 2001 dans le mandat de Doha: une forte réduction du soutien intérieur qui fausse le commerce, une amélioration importante de l'accès aux marchés et la réduction de toute forme de subventions à l'exportation avec l'intention d'une suppression complète graduelle.
Le Canada est ensuite allé plus loin lorsqu'il a signé en 2004 un cadre de négociations. Ce cadre contenait trois engagements: il demande aux pays une date de fin des subventions à l'exportation; il demande aussi l'harmonisation des coupures de subventions internes en s'assurant que ceux qui subventionnent généreusement fassent plus de coupures; il prévoit en outre une amélioration importante de l'accessibilité aux marchés pour tous les produits, incluant ceux qui sont catégorisés comme sensibles — c'est-à-dire sensibles du point de vue politique.
Cela pourrait nous faire croire que le Canada s'est engagé à atteindre des objectifs ambitieux à l'OMC et que, puisqu'il est l'un des plus grands pays exportateurs du monde, il pourrait même être un chef de file dans ces négociations. Si je suis devant vous aujourd'hui, c'est pour vous dire que rien ne saurait être plus loin de la vérité. Même si nous avons l'une des meilleures équipes de négociation au monde, le travail des négociateurs est compliqué et entravé par les messages et instructions venant de nos dirigeants politiques.
Je vais vous en donner trois exemples. En novembre dernier, la Chambre des communes a adopté à l'unanimité une motion qui demandait au Canada de ne pas accepter de baisse des droits hors contingent et d'augmentation de contingents tarifaires pour les produits sensibles. Cette motion a eu de graves conséquences pour la position de négociation du Canada.
Alors que tous les ministres participant à la Conférence ministérielle de Hong Kong en décembre étaient disposés à accepter des pourparlers sur l'accès aux marchés agricoles, seul le ministre canadien a refusé les discussions, empêchant ainsi tout progrès en matière d'accès aux marchés agricoles et mettant en péril les négociations de l'OMC.
Le troisième exemple, qui est peut-être le plus alarmant, remonte à quelques semaines à peine. Le 5 mai, lors d'une session de négociation sur les produits sensibles, le négociateur canadien fut le seul à rejeter un consensus en cours de réalisation qui aurait engendré au moins une baisse des droits hors contingent. Nous avons entravé le progrès des négociations à cette étape critique, et le Canada s'est retrouvé seul dans sa position — à 148 contre 1.
Il faut savoir pourquoi la position actuelle du Canada sur les produits sensibles pose un problème. Les plus importantes exportations agricoles canadiennes proviennent du secteur de la viande ainsi que de celui des grains et produits à base de grain. Les produits de la viande et du grain sont les deux produits les plus sensibles dans le monde. La résistance canadienne à négocier dans le sens d'un quelconque compromis sur les produits sensibles condamne les agriculteurs et transformateurs canadiens à continuer d'être aux prises avec les droits prohibitifs et les contingents tarifaires de la majorité des pays membres de l'OMC, car dans ces pays, nos principales exportations sont sensibles.
L'isolement du Canada dans les négociations sur l'accès aux marchés agricoles comporte aussi d'autres risques pour nos intérêts en matière de commerce international.
Premièrement, elle compromet notre position dans le cadre des autres négociations, portant sur la concurrence à l'exportation et le soutien interne.
Deuxièmement, elle compromet la progression de toute la ronde de négociations, puisque les progrès réalisés dans le dossier agricole auront un impact direct sur nos aspirations en matière de services, de règles, de tarifs industriels et d'autres secteurs où le Canada possède d'importants intérêts. L'isolement du Canada risque d'entraver les progrès du cycle tout entier puisque celui-ci repousse déjà d'importantes échéances.
Troisièmement, elle compromet la capacité du Canada de participer activement aux négociations sur les modalités qui se font au sein d'un petit groupe qui précise les négociations au programme.
L'amélioration des règles commerciales est d'une importance cruciale pour la grande majorité des agriculteurs canadiens ainsi que pour les industries qui en dépendent. Il est primordial d'éliminer une partie des distorsions du marché international et d'assurer un meilleur avenir aux Canadiens qui en dépendent.
L'ACCAA exhorte le comité à demander au gouvernement du Canada d'agir à trois niveaux. Premièrement, déclarer publiquement et de façon non équivoque son engagement face au cycle de Doha et aux résultats ambitieux des trois piliers de négociations agricoles, incluant un accès amélioré pour les produits sensibles. Donner des directives claires aux négociateurs canadiens pour les aspirations à avoir dans les trois piliers de négociations, incluant l'accès aux marchés agricoles. Avoir un rôle de premier plan dans ces négociations en participant activement à tous les niveaux de négociations ministérielles, de façon à créer un consensus pour un résultat ambitieux.
Merci de votre attention. Je serai ravie de répondre à vos questions.
Je vais maintenant demander à Tyler de vous parler de la situation des producteurs de canola, qui ont été victimes des préjudices dont je vous ai parlé.
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Pour illustrer les propos d'Alanna, nous avons choisi de vous parler de la situation des producteurs de canola. Vous verrez ainsi dans quelle mesure l'isolement du Canada dans certains dossiers à l'OMC met en péril sa marge de manoeuvre dans d'autres dossiers.
Comme le savent la plupart d'entre vous, le secteur du canola est fortement tributaire du commerce. Notre situation n'est pas unique au Canada, comme nous vous l'avons illustré; en effet, notre secteur compte pour une part des 91 p. 100. En effet, 75 p. 10 de notre production annuelle est exportée. Pourquoi l'exemple du canola est-il probant? Eh bien, il se trouve que 75 p. 100 du canola échangé sur les marchés internationaux provient du Canada. Quatre-vingt pour cent des exportations de graines de canola exportées le sont à partir du Canada. Nul autre pays n'a un tel intérêt direct pour le canola. Ce qui veut dire que si le Canada ne participe pas aux négociations et n'est donc pas en mesure d'exiger des réductions tarifaires, le secteur du canola sera laissé pour compte.
Il ne s'agit pas simplement d'une situation hypothétique; au contraire, nous en avons déjà fait l'expérience. En 1994, en vertu de l'accord de l'OMC, les producteurs de canola ont été laissés pour compte, à trois niveaux en particulier. Tous nos marchés clés sont assortis de tarifs discriminatoires: le Japon, la Chine, l'Inde et le Pakistan. Dans chacun de ces pays, les droits s'appliquant au canola sont plus élevés que ceux qui s'appliquent à nos produits concurrents, à savoir le soja et l'huile de palme.
Ensuite, nous souffrons de la progressivité tarifaire. Dans la plupart des pays, les produits à valeur ajoutée sont assujettis à des droits plus élevés que les matières premières. Ce qui veut dire que notre canola à valeur ajoutée ne peut tout simplement pas être vendu sur la plupart de ces grands marchés.
En dernier lieu, nos concurrents subventionnent fortement leurs produits. Le meilleur exemple est celui du secteur du soja aux États-Unis.
Voilà, je voulais tout simplement vous donner quelques chiffres pour illustrer le fait que si le Canada est exclu des négociations, ce sont les producteurs de canola qui vont être perdants, parce qu'aucun autre pays ne s'intéresse à ce produit.
Merci.
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Monsieur le président, je voudrais parler d'abord de la question de l'accès aux marchés.
Monsieur le président, la gestion de l'offre permet en fait des importations au Canada, à un niveau d'accès bien supérieur à celui de bon nombre d'autres pays pour de nombreux produits de base. Je n'ai qu'à regarder l'industrie laitière et l'industrie avicole. Pour l'industrie laitière, c'est environ 5 p. 100, pour l'industrie du dindon, c'est environ 5 p. 100, pour l'industrie de l'oeuf de consommation, c'est environ 5 p. 100 également. Le secteur du poulet est d'environ 7,5 p. 100 de plus que la production nationale, et pour nos producteurs d'oeufs d'incubation, on permet un accès de 21 p. 100 du marché.
En fait, monsieur le président, la gestion de l'offre n'est pas fermée. Nous permettons un plus grand accès du marché que bon nombre d'autres pays dans le monde. Il suffit de regarder l'Union européenne qui ne permet que 0,5 p. 100 de volailles, ou les États-Unis, qui permettent moins de 2,5 p. 100 des produits laitiers. Le système de gestion de l'offre du Canada n'est donc pas fermé, et nous laissons entrer une quantité considérable d'importations au pays.
Pour donner une idée de l'ampleur, dans l'industrie du poulet, nous laissons entrer des importations qui sont l'équivalent de la production annuelle en Saskatchewan et dans la région de l'Atlantique.
C'est le niveau des importations de notre industrie, donc ce n'est pas un marché fermé.
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Je pense que ce qui est extrêmement important, c'est que l'agriculture canadienne gagne à l'OMC. Voilà ce dont il s'agit. Il faut que l'agriculture canadienne gagne; ce n'est pas un secteur qui s'oppose à un autre. Lorsque nous regardons les négociations dans le secteur de l'agriculture — et j'ai participé à ces délibérations avant que le Canada établisse sa position initiale pour les négociations en 1999 — le Canada est arrivé avec une position très équilibrée.
Leur objectif est clair, monsieur le président. L'objectif consiste à s'assurer que nous réussirons à maintenir un système de gestion de l'approvisionnement efficace au Canada et aussi à offrir autant de possibilités à nos industries qui ne sont pas assujetties à la gestion de l'offre, grâce à différents moyens, grâce aux négociations.
Lorsque je regarde les négociations et le pilier des subventions à l'exportation, je constate que nous avons clairement une situation gagnante pour nos industries qui ne sont pas visées par la gestion de l'offre lorsque nous avons un échéancier d'exportation pour 2013. Si je regarde le pilier du soutien national en agriculture, encore une fois je vois une situation gagnante pour nos produits de base qui ne sont pas assujettis à la gestion de l'offre. Nous avons des positions qui vont couper certains pays qui dépensent beaucoup comme les États-Unis, l'Union européenne et le Japon — encore une fois, une situation gagnante pour les produits de base canadiens qui ne sont pas assujettis à la gestion de l'offre.
Et si je regarde le troisième pilier de l'agriculture sous l'aspect de l'accès aux marchés, le Canada a beaucoup mis l'accent sur une formule de réduction générale qui visait énergiquement encore une fois à permettre à nos industries qui ne sont pas assujetties à la gestion de l'offre d'avoir un meilleur accès aux marchés dans le monde.
Monsieur le président, pour que le Canada maintienne son équilibre, il doit mettre l'accent uniquement sur les produits sensibles pour la gestion de l'offre, le seul domaine qu'il nous reste pour ces industries. Si le gouvernement a du succès à cet égard, il aura ramené une situation gagnante pour l'agriculture canadienne, un équilibre pour les agriculteurs assujettis à la gestion de l'offre et pour ceux qui ne le sont pas. Et cela, monsieur le président, est ce qui est important au cours de ce cycle: une situation gagnante pour l'agriculture canadienne.
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Merci, monsieur le président.
Je vous remercie pour vos témoignages.
Dans le cadre des négociations à l'OMC et du cycle de Doha, l'agriculture canadienne et québécoise est en train de vivre un point tournant. Plus les négociations avancent, plus de fortes inquiétudes se manifestent.
Messieurs Lebeau et Lefebvre, vous vous trouvez souvent à Genève aux fins de ces négociations. Vous n'y êtes pas pour vous amuser ou prendre des vacances: vous suivez de très près ces négociations et pour ce faire, vous travaillez très fort. Nous apprécions grandement ce que vous faites pour l'agriculture québécoise.
Puisque vous êtes davantage présents que nous sur les lieux, vous en savez sans doute plus long sur ce qui se passe. Tous les autres pays exercent des pressions, et la survie de la gestion de l'offre est vraiment en jeu. En fait, il ne s'agit pas seulement des autres pays. Ce matin, nous avons entendu des témoignages assez édifiants de la part de producteurs canadiens. Les ministres de l'agriculture du Manitoba, de l'Alberta et de la Saskatchewan ont pour leur part écrit au ministre de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire du Canada pour plaider en faveur d'un plus grand accès au marché. Pascal Lamy, le directeur général de l'OMC, est venu à Montréal nous dire qu'il fallait faire des compromis et qu'à cet effet, la gestion de l'offre était ce qu'il fallait considérer. Le ministre de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire, M. Strahl, nous a dit le 30 mai dernier, lorsque nous avons abordé les négociations à l'OMC, que le Canada était isolé, en l'occurrence seul contre 148 autres, et qu'en fin de compte, il devait faire partie de l'OMC et signer une entente. Une telle déclaration faite publiquement ne pouvait à mon avis que nous affaiblir considérablement.
Vous êtes sur place et pouvez par conséquent consulter les négociateurs canadiens de même que les textes préliminaires. C'est pourquoi j'aimerais connaître votre point de vue. Comment voyez-vous l'évolution de ce dossier?
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Monsieur le président, pour répondre à M. Bellavance, je mentionnerais tout d'abord qu'on se rend à Genève en équipe. Plusieurs intervenants, dont le mandat est de défendre la gestion de l'offre, sont continuellement présents à Genève. Je crois que c'est important.
Je céderai la parole à M. Lebeau afin qu'il réponde aux points plus techniques, mais j'aimerais également souligner le fait que le Canada, lors des dernières rondes de négociations, a volontairement rendu plus accessibles les marchés de ses produits régis par la gestion de l'offre. C'était une directive à l'époque; ce n'était rien d'officiel, ce n'était pas écrit dans un texte. Je pense que le Canada, à cet égard, a été bon joueur et a véritablement collaboré en pensant que les autres pays, eux aussi, élargiraient l'accès à leur marché.
Cependant, ce n'est pas ce qui s'est produit. Je pense qu'il est important de le mentionner, ce que l'on ne fait pas assez souvent. On a souvent la perception que nous avons donné parce que nous y étions obligés. Or, nous n'avions aucune obligation, c'était volontaire. Je crois que le Canada a été bon joueur et que les producteurs de produits régis par la gestion de l'offre ont aussi été bons joueurs à cet égard.
Dans certains domaines, on a donné plus que ce qui était demandé. On parle de 7,5 p. 100 et de 20 p. 100 des oeufs d'incubation. C'est beaucoup plus que ce qui avait été demandé.
J'ai été présent à Genève avec plusieurs de nos collègues, bien entendu. Il s'y passe beaucoup de choses. On a l'occasion de discuter avec des gens d'autres pays qui sont à Genève pour négocier. On est en mesure de constater que nous avons, sur certains points, certains alliés. Malheureusement, il y a aussi d'autres groupes qui ne le sont pas et il y a de la dissension au sein de notre grand pays à cet égard.
Comme l'a mentionné M. Fuller, je crois qu'une position équilibrée — comme celle qui est recherchée — va servir l'ensemble des agriculteurs du Canada. On n'a qu'à penser que si les pays augmentaient l'accessibilité de leur marché de 5 p. 100 — comme le demande la directive —, on doublerait le commerce mondial des produits agricoles. Ce n'est pas rien. C'est ce qu'on demande. Il faut amener les autres pays à la base que le Canada s'est donnée et, par la suite, on pourra discuter. Pensons-y : si chaque pays faisait le même exercice, on doublerait le commerce mondial des denrées agricoles, ce qui n'est pas rien.
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Je vais compléter cette réponse.
En ce qui a trait à la question des produits sensibles, il est sûr que nous avons des alliés. Le G10 compte plusieurs pays européens. Le Japon également fait partie de ce groupe. Tous ces pays veulent absolument préserver un certain nombre de leurs productions.
Les Européens et les Américains ont aussi des produits sensibles. Je crois qu'il y a maintenant unanimité sur les produits sensibles, et les gens l'ont reconnu en juillet 2004. Maintenant, il s'agit de voir de quelle façon on va traiter cette question des produits sensibles. Le texte de juillet 2004 nous donnait certaines assurances. On a l'impression que, présentement, on est en train de banaliser cette question des produits sensibles, et cela nous inquiète.
La raison pour laquelle certains pays, notamment des pays d'Europe, banalisent autant les produits sensibles, est qu'ils ont, comme je l'expliquais précédemment, baissé leur prix de soutien. Ils recommencent à accorder des subventions directes et, de cette façon, sont en mesure de baisser leurs tarifs. Je crois qu'il est très important de souligner qu'il est absolument illusoire de croire que l'Europe et les États-Unis vont élargir l'accès à leur marché, surtout l'Europe. Des gens très au fait de l'état des négociations nous ont dit, notamment en ce qui a trait au secteur des produits laitiers, que les Européens ne bougeront pas d'un iota, qu'on n'aura pas plus accès aux marchés de ces produits.
Comme je l'expliquais, c'est comme David contre Goliath. Il s'agit d'une lutte vraiment inégale. Ils ont repris leurs subventions alors que nous avons continué à nous servir des tarifs. C'est la raison pour laquelle je soulignais l'interdépendance des trois piliers de la négociation. Il est très important de le faire valoir.
Le dernier élément dont j'aimerais parler est qu'il faudrait faire comme la Norvège, qui a pu bénéficier de traitements spéciaux relativement à la boîte bleue, parce que celle-ci contenait plein de subventions. On a demandé des réductions, on a réduit la période et il y a eu des concessions qui ont été faites. La petite histoire mentionne que les négociateurs norvégiens couchaient devant la salle de réunion parce qu'ils n'avaient pas le droit d'entrer dans cette salle pour faire valoir leur point de vue. Or, un jour, ils ont rencontré le négociateur américain et ont fait valoir leur point de vue. Il faudrait peut-être faire la même chose. Je crois que dans notre cas, à la fin, on devra probablement mentionner la question de l'exception, comme l'a fait la Norvège, si on n'est pas en mesure de s'entendre avec les autres pays.
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Je vais répéter essentiellement ce que je disais. La notion de produits sensibles a été reconnue en 2004. Les pays le plus près de notre position à cet égard sont les pays du G10, dont la Norvège, la Suisse, le Japon, Israël et la Corée. Des pays de tous les continents sont membres de ce groupe. Ce sont vraiment nos plus grands alliés.
Prenons le cas des Japonais. Quand ils ont fixé les tarifs en 1994 pour le riz, par exemple, ils les ont fixés en valeur absolue, c'est-à-dire en dollars par kilogramme, en yens par kilogramme, alors qu'on a fonctionné en pourcentage. En ramenant ces dollars par kilogramme en pourcentage, leur tarif pour le riz était de 700 p. 100. Ils n'étaient pas morts de rire, mais ils se disaient sans doute que, si on réduisait leur tarif de 50 p. 100, ils en seraient très peu affectés. L'iniquité existait déjà en 1994.
Face à une baisse de tarif de 20 p. 100, les Japonais sont beaucoup moins sensibles que nous. À 299 p. 100 dans le secteur du beurre ou à 238 p. 100 dans le secteur du poulet, nous sommes à la limite de ce que nous pouvons accepter.
Le poulet brésilien peut presque entrer sur le marché en raison de la force du dollar canadien. À une époque, la poudre de lait écrémé ou le beurre pouvaient entrer sur le marché canadien, selon les prix internationaux. Ce sont nos alliés, mais il s'avère néanmoins difficile d'être sur un pied d'égalité avec eux pour les raisons que je viens d'évoquer. Les événements passés les avantagent et font en sorte qu'ils sont capables d'assumer une baisse de tarif, ce que nous ne pouvons pas faire.
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Merci, monsieur le président.
Je suis convaincu que nous avons de fortes chances d'accroître l'accès aux marchés pour nos céréales, notre canola et nos denrées qui ne sont pas sous le régime d'une gestion de l'offre. Nous pensons que la possibilité existe que des pays réduisent leur appui à ces denrées. Dès lors, on peut espérer que le prix du marché mondial va grimper, ce qui sera avantageux pour les denrées qui ne font pas l'objet d'une gestion de l'offre.
Il est vrai qu'on dit que le Canada est isolé. Les États-Unis doivent l'être aussi car ils font cavalier seul à propos de la période de base pour l'appui qu'ils accordent au système de traite automatisée. Les pays du G-10 sont isolés également lorsqu'ils réclament un plafonnement pour les produits sensibles. Les pays de l'Union européenne aussi étaient isolés à propos de la souplesse d'accès aux marchés qu'ils réclamaient. Je ne pense pas qu'on puisse dire que le Canada, parce qu'il est seul, est isolé.
Les pays sont regroupés, le G-20, etc. Prenez le cas du G-6 — l'Union européenne, les États-Unis, l'Australie, le Brésil, l'Inde et la Chine — dont le Canada est exclu. À mon avis, c'est ce groupe-là qui mène les négociations. Les autres groupes traînent tous de l'arrière.
Dire que le Canada n'est pas à la table de négociation n'est pas exact. D'après tout ce que j'ai entendu dire à Genève, on estime que le Canada jette des ponts pour faire avancer les négociations. J'ai entendu la même chose à Hong Kong, à Cancun, et à plusieurs reprises, à Genève.
À mon avis, le Canada n'est pas isolé. Nous sommes de bons coéquipiers et nous essayons d'aplanir les différends en rapprochant les points de vue. À mon avis, le soutien interne, les subventions à l'exportation et la formule générale de réduction permettent d'obtenir un accès accru aux marchés pour nos denrées qui ne sont pas visées par la gestion de l'offre. En outre, le Canada est encore très présent au sein de l'équipe de négociation à Genève.
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Peut-on augmenter l'accès au marché sans toucher à la gestion de l'offre? C'est tout à fait possible.
On a mentionné un peu plus tôt que, selon une étude sérieuse, si tout le monde respectait les accords du cycle d'Uruguay, qui prévoyaient une augmentation nette de 5 p. 100 de l'accès au marché, on augmenterait de 80 p. 100 le commerce des produits agricoles. Malheureusement, cette règle n'a pas été respectée. Je pense qu'il y a là de l'espace.
Par ailleurs, je pense que le Canada devrait — et je pense qu'il l'a fait — mettre énormément l'accent sur la question du soutien. On a étudié le prix des céréales au Canada, par exemple. Ce n'est pas une question de marché, c'est vraiment une question de subventions que les Américains octroient à leurs producteurs. Cela fait en sorte qu'il est difficile pour nous de continuer à produire et même à être concurrentiels. Je pense qu'il y a là des gains majeurs à faire et que le Canada devrait s'atteler à les faire.
D'autre part, il y a aussi la question de la formule générale de la diminution des tarifs. Je pense qu'il y a là aussi une marge de manoeuvre. Si on s'attaquait aussi à cette question, on pourrait bénéficier d'un accès supplémentaire.
En ce qui a trait aux produits sensibles, c'est l'exception. On devra travailler à cette question.
Vous avez aussi demandé si le Canada était toujours autour de la table. Oui, il est toujours autour de la table. La preuve en est qu'il y aura probablement une réunion ministérielle à la fin du mois de juin et que le Canada fait partie des 30 pays invités. Jusqu'à maintenant, je n'ai jamais entendu dire que le Canada était exclu des salles de réunion, même quand on parle des salles qui contiennent de 25 à 30 pays ou même des salles vertes qui contiennent encore moins de pays. Je ne pense pas que le Canada ait été isolé jusqu'à maintenant. Je suis confiant qu'il pourra continuer à être autour de la table.
Je vois cela non pas tellement sous l'angle de ce qui s'est passé jusqu'à maintenant, mais plutôt de ce qui pourrait se passer. Que pourrait-il arriver au cours des prochaines semaines et quelles sont les possibilités? Et que doit faire le Canada pour obtenir un accès maximum pour les exportateurs canadiens de denrées agricoles et pour réduire les subventions internes?
Je suis très content de voir que le ministre Strahl dans la chronique qu'il écrit et publie chaque semaine, a bien précisé cette semaine qu'il irait. Je crois qu'il a dit que le ministre Emerson ira à Genève à la fin du mois. Tout cela est donc très positif et nous les remercions pour leurs efforts. Comparez cela à ce qui s'est passé il y a deux semaines. Il y a eu une réunion à l'OCDE de ministres de certains pays, et le Canada n'était pas présent.
Vous avez mentionné d'autres groupes, notamment le G-6. Je me demande si le Canada aurait pu être membre du G-6. Si nous avions adopté une position différente, si nous avions été plus ambitieux dès le départ, nous aurions pu être membres du G-6. Je conviens que c'est probablement le G-6 qui donne l'impulsion à tout cela et que c'est peut-être au sein de ce groupe que le consensus va émerger. Je pose donc la question: Pourquoi le Canada n'en est-il pas membre? Nous aurions pu l'être, mais nous nous sommes abstenus.
Peut-être que l'on joue parfois sur les mots en disant que nous sommes isolés ou que quelqu'un d'autre est isolé dans un dossier donné. La véritable question est celle-ci: Qu'est-ce que le Canada doit obtenir pour ses exportateurs agricoles et son secteur agricole, et que faut-il faire pour y parvenir?
Donc, si nous pouvons obtenir que nos ministres aillent là-bas... Essentiellement, ce sont les produits sensibles qui vont représenter la clé des discussions. En écoutant le débat, j'essayais de trouver la réponse à la question : Où se trouve le terrain commun? J'ai entendu des arguments voulant que le secteur de la gestion de l'offre fournit un accès au Canada, en fonction d'un pourcentage du soutien national. C'est essentiellement ce que nous réclamons en Europe. Nous voulons obtenir un certain pourcentage du marché intérieur européen.
Maintenant, nous pouvons débattre et négocier ce pourcentage. Nous voudrions qu'il se situe autour de 10 p. 100 du marché européen du boeuf pour les importations. Voilà le noeud de l'affaire pour les exportateurs et les éleveurs de bovins dans le dossier des produits sensibles du boeuf. Je suis très mal à l'aise quand on pose la question : « Qui sont les alliés du Canada? » et que la réponse est : « Eh bien, c'est l'Europe, c'est le Japon et c'est la Norvège », alors que tous ces pays veulent empêcher le boeuf d'entrer sur leur marché. Cela rend les éleveurs de bovins canadiens très nerveux.
Par conséquent, au lieu de s'embourber parfois dans certains dossiers périphériques, allons directement au coeur de l'affaire. Je pense que tout le monde autour de cette table serait d'accord pour dire que ce ne serait pas une mauvaise chose que d'avoir un meilleur accès en Europe pour les exportateurs de boeuf, de viande ou de céréales. La question est de savoir comment obtenir cet accès?
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Vous avez dit que le Canada a été bon joueur et qu'on devrait s'en satisfaire sans penser à ouvrir davantage nos marchés. Cette affirmation suscite chez moi plusieurs réactions.
Malheureusement, on peut dire de tous les pays qu'ils sont bons joueurs parce que tout le monde respecte les règles. En effet, l'ensemble des pays se conforment aux règles d'accès établies en vertu d'accords passés. D'ailleurs, je pourrais même vous donner des exemples qui montrent que le Canada n'a pas respecté certains de ses engagements à l'égard de différents produits, mais cela serait futile.
En fait, tout le monde respecte les règles du jeu. Par conséquent, ce que nous devons faire, c'est améliorer les règles pour que nous puissions mieux nous défendre et que nous obtenions les conditions établies dans le cadre du cycle de Doha, à savoir la réduction des subventions, la réduction des mesures ayant pour effet de fausser le marché et l'élargissement de l'accès aux marchés pour l'ensemble des produits.
Il me semble que vous avez soulevé la question des 5 p. 100. À ce sujet, je voulais vous dire que l'idée de limiter l'accès à 5 p. 100 n'enthousiasme pas les autres parties. D'ailleurs, ce n'est pas quelque chose qui fait partie des négociations actuellement et on n'en parle nullement dans les documents sur l'accès aux marchés que le président a fait circuler dernièrement. De toute façon, pour la plupart des marchés d'intérêt pour le Canada, qu'ils soient assorti de contingents tarifaires ou de droits de douane élevés, nous importons déjà plus de 5 p. 100 de la consommation nationale. Par conséquent, une limite de 5 p. 100 généralisée n'aiderait pas beaucoup les exportateurs canadiens. S'il est vrai que la stratégie des 5 p. 100 peut sembler intéressante comme point de départ, le Canada n'en profiterait pas beaucoup et, de toute façon, ce n'est pas une question qui fait partie des négociations actuelles.
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Bonjour. Je veux dire aux participants que pour savoir où l'on s'en va, il faut savoir d'où l'on vient.
L'agriculture canadienne s'est développée au cours des 100 dernières années à la suite des guerres mondiales et de ce qui s'est passé dans le monde. L'Ouest du Canada, avec ses très grandes superficies, a pu voir croître son industrie des grains, ce qui a constitué un énorme succès canadien. L'Est du Canada a vu ses secteurs du lait et des viandes constituer aussi un très grand succès canadien. Nous observons deux énormes succès s'affronter, car ils veulent se poursuivre. Cela est très important, et il faut le retenir.
Le Canada en est présentement à un point tournant de son agriculture. Tout le monde l'a dit aujourd'hui, nous voulons que tous les intervenants puissent en vivre et que les deux agricultures puissent croître.
Le Canada compte 161 millions d'acres cultivables. Cela représente un beau grand jardin pour 30 millions de personnes. Il est sûr qu'il faudra toujours exporter ou transformer notre production en produits exportables ou en produits que nous serons capables de consommer et qui amélioreront les revenus des Canadiens. Présentement, au Canada, le revenu moyen de ces 161 millions d'acres est de 192 $ l'acre, ce qui ne pourra pas faire vivre tout le monde.
Parlons de l'industrie de l'éthanol. Croyez-vous que les investissements que nous pourrons faire dans ce domaine au cours des 10, 15 ou 20 prochaines années pourront réduire notre dépendance aux exportations? Cela pourrait-il régler une partie du problème et permette à nos deux grands succès de se poursuivre? J'attends votre réponse. Je vous remercie.
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Merci d'avoir posé cette question tout à fait pertinente. Par votre intermédiaire, monsieur le président, j'aimerais y répondre de façon différente.
D'abord et avant tout, il faut que nous nous demandions si le secteur agricole canadien pourra survivre, parce qu'à moins qu'on puisse s'attaquer aux subventions accordées aux producteurs par les autres grands pays exportateurs, les agriculteurs auront tout simplement disparu. Il suffit pour s'en convaincre d'examiner l'évolution de la rentabilité des agriculteurs et de se dire que la tendance se maintiendra pendant, disons, 25 ans. Ainsi, la première chose à faire, c'est de lutter contre les mesures de soutien interne qui sont accordées aux agriculteurs à l'étranger. Après tout, il s'agit de sommes d'argent importantes dans certains cas. Il faudra donc s'attaquer à ce problème-là si on veut que dans 25 ans il y ait toujours des producteurs.
Nos activités se déplaceront-elles davantage vers l'étranger? Je ne peux répondre à cette question. Ce qui me préoccupe pour l'instant, c'est de savoir comment le secteur agricole évoluera au cours des cinq prochaines années. Je suis, moi aussi, producteur de céréales et d'oléagineux et j'ai vu disparaître peu à peu mes collègues agriculteurs, peu importe le secteur. Pour que notre secteur agricole puisse survivre, il faudra qu'on mette en place à l'OMC un système fondé sur des règles qui offre des débouchés à l'ensemble des agriculteurs canadiens. Il faut que la rentabilité soit notre premier objectif.
Il est illusoire de vouloir améliorer l'accès aux marchés étrangers si nous perdons de l'argent chaque fois que nous exportons nos produits.
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Merci, monsieur le président.
Je voudrais d'abord remercier tous les intervenants pour les présentations, très représentatives de la réalité, qu'ils nous ont offertes et pour les réponses qu'ils nous ont données. On remarque un désir, une volonté de trouver des solutions visant à préserver tous les secteurs. Ce n'est pas particulièrement facile, mais je pense que c'est nécessaire pour notre pays.
[Traduction]
J'habite dans la vallée de l'Annapolis. Quand la crise de l'ESB a éclaté, personne n'aurait pu prédire que l'impact serait ressenti aussi rapidement dans cette région. Mais il est vrai que nous avons des éleveurs-naisseurs et beaucoup d'agriculteurs qui, en plus de leurs autres activités, élèvent du bétail. De plus, nous avons un secteur qui relève de la gestion de l'offre, à savoir l'industrie laitière. Pour les producteurs laitiers, les revenus générés par les vaches de réforme constituent une part non négligeable des recettes agricoles et comme ils ont disparu du jour au lendemain, ça a été très difficile.
Dans ma région, il y a également des éleveurs de porcs, des éleveurs de visons, et des producteurs de céréales et d'oléagineux, de légumes et de fruits, tous régis par la gestion de l'offre. Ils connaissent tous des difficultés d'ordre cyclique, c'est vrai, mais ce qui est très déconcertant, c'est que la situation a été précaire partout, à l'exception des secteurs régis par la gestion de l'offre. En effet, ça fait longtemps que les collectivités en question vivent de ces secteurs-là. Ce qui est encore plus important, c'est qu'avec le secteur du vison sans doute, il s'agit du seul secteur qui suscite un certain espoir, c'est-à-dire qu'on y investit toujours et que les jeunes restent dans les communautés rurales car ils ont confiance en la stabilité du secteur. Il est impensable que nous perdions cela.
Il y a même des transformateurs de légumes et de jus de fruits qui ont été chassés de notre région par les importations en provenance de Chine. En effet, on ne peut tout simplement pas concurrencer les prix des concentrés chinois. Il est donc important, à la lumière de ces nouveaux développements, qu'on maintienne une certaine stabilité dans le secteur agricole. C'est également important pour les consommateurs parce que les prix qu'on obtient sont établis par le biais des mécanismes de la gestion de l'offre.
On a bien défendu l'ouverture des marchés. Tout le monde en est convaincu. Les agriculteurs de ma région ne cessent de dire que si à l'échelle internationale, tout le monde était traité sur un pied d'égalité, les Canadiens pourraient être concurrentiels. Certains pensent que nous avons des opinion divergentes et c'est de là qu'émanent les questions que nous abordons aujourd'hui. Par exemple, ce matin, certains ont déclaré qu'en raison de notre position à l'égard de la gestion de l'offre, que j'appuie en espérant qu'elle sera maintenue — nous sommes isolés. D'autres prétendent le contraire.
J'espère que nous allons pouvoir atteindre une position équilibrée. D'après vous, le Canada pourra-t-il garder la gestion de l'offre pendant deux générations encore tout en améliorant son accès aux marchés internationaux, ce qui permettrait de stabiliser le secteur agricole à l'échelle du pays?
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Merci, monsieur le président, et merci à l'ensemble des témoins.
Ma circonscription est dans la partie centrale de l'Ontario et, comme dans la région de M. Thibault, on y retrouve toute une panoplie de producteurs, du producteur de fourrure à l'éleveur de bovins en passant par le producteur laitier qui produit dans certains cas du lait biologique, et le producteur de maïs. J'ai des rencontres régulières avec un conseil agricole impartial qui s'y est formé et à l'occasion desquelles nous discutons des questions abordées aujourd'hui. En général, c'est moi qui pose les questions et j'ai pu constater que sur certains dossiers tout le monde est d'accord, mais ce n'est pas toujours le cas.
J'ai une question qui s'adresse aux représentants de la Canadian Cattlemen's Association. Vous avez parlé d'accords commerciaux bilatéraux. À l'OMC, le Canada met l'accent sur les accords commerciaux multilatéraux. Récemment, j'ai eu l'occasion d'aller à Taïwan comme membre d'un groupe parlementaire et ai pu constater à quel point les Taïwanais sont avides d'accords bilatéraux. Il en va de même pour la Corée. D'ailleurs, je ne pense pas que la Corée négocie uniquement avec le Canada. Il y a aussi les États-Unis.
Je ne sais pas si on peut parler de deux écoles de pensée, l'école de pensée multilatérale par rapport à l'école de pensée bilatérale, mais j'aimerais savoir où nous en sommes. Vous avez mentionné la Corée et le Japon et je voudrais savoir si le gouvernement devrait accorder plus d'importance aux accords bilatéraux.
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Vous posez une question très pertinente et je vous en remercie. D'ailleurs, je suis entièrement d'accord avec ce qu'a dit David plus tôt. Le secteur de l'élevage bovin a grandement bénéficié de l'ALENA, qui est un accord trilatéral. Cet accord a permis au secteur visé de croître. Mais quand on parle d'accords bilatéraux, c'est alors qu'on constate que le nombre de producteurs et la taille du cheptel augmentent, et c'est ce qu'on a constaté au cours des 15 dernières années. On est passé de l'exportation de matières premières à une structure qui nous permet d'ajouter de la valeur à ce qu'on retire de nos terres.
Dans le cadre d'accords bilatéraux, il y a toujours quelque chose qui est mis de côté, et en général, il s'agit du soutien interne. C'est exactement ce qui s'est passé dans le secteur des céréales dans le cadre de l'ALENA. Le secteur de l'engraissement dans le sud de l'Alberta est dans une posture délicate en raison des subventions accordées aux producteurs de maïs américains. Il faut qu'ils se battent pour les bovins d'engraissement, qui se transportent facilement. En effet, on peut les transporter jusqu'au Nebraska ou au Texas, entre autres, et on demande aux producteurs albertains de rester concurrentiels face aux subventions accordées aux producteurs de maïs aux États-Unis.
C'est de la structure multilatérale de l'OMC que ressortent les réponses. On y traite de l'accès aux marchés d'une part et du soutien interne de l'autre. C'est dans le cadre de l'OMC que les États-Unis pourraient réduire de 65 à 70 p. 100 leurs subventions, ce qui se traduirait par une diminution du marché du côté des céréales et même peut-être des produits laitiers. Nous travaillons dans un environnement concurrentiel, et l'acceptons, mais nous estimons qu'il faut que tout le monde soit sur un pied d'égalité, et c'est en passant par l'OMC qu'on va y parvenir.
Par contre, si on n'y arrive pas, je reviendrai vous parler d'accords bilatéraux avec des douzaines de pays. Mais pour conclure de tels accords, il faudra que le gouvernement y consacre beaucoup d'efforts. C'est vrai que cela demandera beaucoup plus de travail, mais nous continuerons tant que nous n'aurons pas obtenu ce que nous recherchons. Il faudra qu'on songe à conclure de tels accords avec la Corée et le Japon, avec ces pays qui peuvent se payer nos animaux nourris au grain.
Merci beaucoup.
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Je garde un excellent souvenir de cette journée parce que j'ai déposé moi-même cette motion. Je peux dire au comité que toute la journée, on a négocié avec le ministre de l'Agriculture de l'époque, M. Mitchell. De plus, le parti qui est actuellement au pouvoir, le Parti conservateur, a également appuyé unanimement cette motion. Je me rappelle très bien avoir vu M. Duceppe en discuter avec M. Harper. J'en ai discuté avec la porte-parole en matière d'agriculture de ce parti à cette époque, Mme Finley. Le NPD a également voté en faveur de cette motion. Tant du côté du Parlement canadien que du côté de plusieurs assemblées provinciales, on comprenait à quoi cela allait servir. Elle a été utile à Hong Kong et elle l'est encore aujourd'hui. Je n'accepte pas qu'on nous dise que cela a nui aux négociations canadiennes.
Madame Koch, j'aimerais que vous commentiez un sondage qui a été réalisé très récemment, du 16 au 21 mai, et qui a été commandé par les producteurs qui font partie de la Coalition GO5. Ce sondage révèle que 85 p. 100 des Canadiens conviennent que le gouvernement fédéral doit appuyer l'approche de la gestion de l'offre dans les secteurs du lait, de la volaille et des oeufs et que 83 p. 100 d'entre eux croient que la gestion de l'offre est une meilleure approche que les subventions financées par les contribuables pour assurer un revenu stable aux producteurs.
Je ne veux pas qu'on oppose les exportateurs aux gens qui veulent protéger la gestion de l'offre, mais il est clair pour la population que le système de la gestion de l'offre, que veulent ébranler d'autres pays, doit être protégé. Un peu plus tôt, vous avez semblé dire que j'étais d'accord sur ce que M. Lamy est venu dire. Bien entendu, je le dénonce. Je ne pense pas que nous devions avoir toute la pression sur les épaules et faire toutes les concessions alors que les autres pays, légitimement, veulent eux aussi protéger leurs marchés, tout en accédant aux marchés des autres pays.
Que pensez-vous du fait que la population canadienne appuie le système de la gestion de l'offre?
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Quant au sondage dont vous parliez, je n'en connais pas les détails, ni les questions précises qui ont été posées, ni la façon dont elles ont été posées, ni les résultats. Mais vous avez dit que les Canadiens sont en faveur de la gestion de l'offre et pensent que le gouvernement canadien devrait continuer de la soutenir.
Ma position n'est pas incompatible avec cela. Je ne pense pas que ma position soit incompatible avec ce que manifestement les Canadiens ont exprimé dans ce sondage. Je dis seulement que les intérêts de nos membres, les exportateurs, ne doivent pas être oubliés.
Il ne s'agit pas d'un jeu où quelqu'un perd et l'autre gagne. Il s'agit de défendre la meilleure position pour le Canada. C'est regrettable, mais nous n'avons pas d'alliés. Nous n'avons pas de marge de manoeuvre à l'OMC pour nous permettre de rester intransigeants en ce qui concerne les produits sensibles.
Comme je l'ai dit tout à l'heure, ce n'est pas la gestion de l'offre que nous négocions à l'OMC, mais plutôt l'accès aux marchés et le traitement réservé aux produits sensibles. Cela ne signifie pas la fin de la gestion de l'offre, mais simplement qu'il faut que nous nous adaptions.
Comme je suis productrice de céréales et d'oléagineux, j'aurai sans doute des ajustements à faire lorsqu'un accord sera signé à l'OMC. Je suis prête à les faire, parce que je crois que de nombreuses occasions s'offriront à moi.
Il est faux de dire que le Canada est le seul pays à faire des concessions à l'OMC. Beaucoup d'autres pays protectionnistes sont prêts à faire des concessions et des ajustements. Même le G-10, les dix pays les plus protectionnistes au monde, reconnaissent qu'ils auront à faire des ajustements dans leurs propres systèmes.
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Très bien, la motion est proposée par M. Easter. Voulez-vous en discuter?
Lorsque nous dépassons une certaine marge de remboursement des témoins qui comparaissent devant le comité, David, il nous faut une motion pour que cela soit autorisé. Il s'agit ici d'un montant de 13 000 $ pour rembourser certains témoins.
Très bien, je dois les lire pour le compte rendu et je vous demande votre indulgence.
En ce qui concerne la Commission canadienne du blé : « Que le budget opérationnel de 13 300 $ pour la session d'information sur la Commission canadienne du blé soit adopté. » C'est le montant attribué aux témoins qui ont comparu, pas à la Commission.
Nous avons également entendu des témoins sur la stratégie sur les biocarburants et la motion se lit comme suit : « Que le budget opérationnel de 6 900 $ pour l'étude du Comité sur la stratégie sur les biocarburants soit adopté. »
La troisième motion porte sur les wagons-trémies, c'est-à-dire les audiences que nous avons eues jusqu'à présent sur ce sujet. Elle se lit comme suit : « Que le budget opérationnel de 10 800 $ pour l'étude du Comité sur les wagons-trémies soit adopté. »
M. Easter propose la première motion.
Nous avons la deuxième sur la stratégie sur les biocarburants, et nous avons besoin d'une autre personne pour proposer cette motion.
M. Thibault propose la motion.
Quelqu'un veut-il proposer la motion portant sur le budget des audiences sur les wagons-trémies?
M. Steckle propose la motion.
Voulez-vous en discuter?
(Les motions sont adoptées)