Merci également, monsieur le président, de nous permettre de faire cette présentation aujourd'hui.
Je souhaite tout d'abord vous parler des différents progrès technologiques qui pourraient avoir une incidence sur le futur mode de fonctionnement des radiodiffuseurs, dont Radio-Canada, et plus particulièrement sur les transmissions en direct, celles qui ont lieu sur l'air ou par antenne. Je traiterai d'abord de la télévision à haute définition, de la télévision numérique, de la télévision mobile, de la radio numérique et, finalement, de la radiodiffusion d'urgence et des réseaux d'émetteurs distribués pour la couverture régionale.
L'introduction de la télévision à haute définition constitue l'un des principaux progrès actuels dans le domaine de la radiodiffusion. La plupart des téléviseurs vendus aujourd'hui peuvent afficher des images en haute définition. Nous pouvons désormais regarder des centaines de canaux de télévision, et certains de ces programmes sont en haute définition. Ils sont transmis par satellite et par câble grâce à l'efficacité des systèmes de transmission numérique. Mais avant de pouvoir livrer ces programmes de TVHD en direct dans chaque foyer par la voie des airs, il faut d'abord remplacer les anciens émetteurs analogiques par de nouveaux émetteurs numériques.
De nouveaux émetteurs numériques en direct sont actuellement exploités à Toronto, Montréal, Ottawa, Québec et Vancouver. Ces émetteurs peuvent transmettre gratuitement aux spectateurs canadiens des émissions de télévision en haute définition dont les images sont d'une pureté très grande. Pour admirer ces images, il faut simplement se munir d'un téléviseur haute définition, d'un syntonisateur numérique et d'une antenne. Il faut aussi avoir un émetteur dans sa région. Seulement 15 de ces émetteurs ont été installés au Canada jusqu'à présent. En guise de comparaison, près de 1 500 sont exploités aux États-Unis.
Ces émetteurs numériques offrent également aux radiodiffuseurs la possibilité d'offrir de nouveaux services à leurs clients. J'en décrirai quelques-uns.
[Traduction]
Les nouvelles stations de TVN en direct peuvent servir à transmettre une émission de TVHD aux téléspectateurs ou bien plusieurs émissions simultanément. Les images ne seront pas présentées en HD, mais leur qualité ressemblera à celle d'un DVD. En outre, il sera possible de choisir parmi les nombreuses émissions d'une seule station. Par exemple, une seule station de la Canadian Broadcasting Corporation (CBC) permettrait à ses spectateurs de regarder la programmation ordinaire de la CBC, CBC Newsworld ou la programmation régulière de Radio-Canada, comme le Réseau de l'information (RDI) ou ArtTV. Le nombre d'émissions offertes grâce à cette option pourrait varier entre quatre et six.
La télé numérique permet aussi aux diffuseurs d'offrir plus qu'une bande sonore. Tout comme on peut choisir l'anglais, le français ou l'espagnol quand on regarde un DVD, le diffuseur peut offrir à ses auditeurs un choix de langues différentes.
Comme vous pouvez le constater, la flexibilité de la télé numérique permet d'offrir un éventail d'options, qu'il s'agisse du choix de multiples émissions et de multiples langues, à partir d'un seul radiodiffuseur.
[Français]
La télévision numérique en direct pourrait également offrir la possibilité de réception dans des endroits comme les voitures, les autobus ou les trains. Des services de télévision mobile sont déjà offerts aujourd'hui par les réseaux de communication cellulaire et par certaines technologies utilisées en Europe et en Asie.
En Amérique du Nord, on étudie les améliorations proposées pour la norme de transmission de la télévision numérique qui est utilisée actuellement pour la télévision à haute définition. Grâce à ces améliorations, il sera possible de recevoir une émission de télévision en haute définition à la maison sur de grands écrans, mais aussi une seconde émission avec un petit poste portatif ou à l'aide de petits écrans qui seraient installés dans les voitures, les trains. Cette deuxième émission pourrait être identique à l'émission de télévision en haute définition, mais à plus basse résolution, ou elle pourrait être différente et présenter du contenu intéressant, plus particulièrement pour les gens en déplacement. D'un point de vue technique, la télévision mobile pourrait être offerte gratuitement ou en vertu d'un abonnement, et ce, en concurrence ou en collaboration avec les autres entreprises de télécommunications telles que les réseaux de téléphonie cellulaire.
[Traduction]
Jusqu'à maintenant, j'ai parlé des changements dans le monde de la télévision, mais n'oublions pas que la même révolution touche la radio. La radio numérique est maintenant offerte au Canada par deux fournisseurs de services satellitaires par abonnement. Les Canadiens peuvent également écouter des stations de radio de partout dans le monde à l'aide d'Internet. Les lecteurs comme le iPod nous permettent maintenant de télécharger toutes sortes d'émissions de radio.
Les stations de radio terrestres AM et FM sont aussi touchées par la révolution numérique. Il existe maintenant des technologies permettant de diffuser des émissions numériques en direct. Comme dans le cas de la télé numérique, cette technologie peut être utilisée pour diffuser plus d'une émission de radio provenant d'une station, ce qui nous donne le choix. Les systèmes numériques peuvent également être utilisés pour offrir de nouvelles possibilités, comme des cartes donnant des directions pour se rendre à un événement ou des photos d'un artiste qui chante à la radio. La technologie de la radio numérique peut aussi être utilisée pour diffuser des émissions de télé à faible résolution sur un téléphone portable ou un appareil de poche.
[Français]
Depuis le début de leur développement, les réseaux de radiodiffusion se sont avérés de grandes sources d'information et de divertissement, mais ils ont aussi servi d'outils essentiels en situation d'urgence. Beaucoup de gens se rappellent avoir regardé la télévision et écouté la radio pendant la tempête de verglas de 1998. La radio était la seule source d'information durant la dernière grande panne électrique qui a frappé la majeur partie de l'Ontario à l'été 2003.
Il faut préserver cette fonction de soutien en cas d'urgence, même le jour où tous les réseaux de radiodiffusion du Canada auront adopté le format numérique. Il est très agréable de regarder des émissions à la télévision à haute définition ou d'avoir accès à des cartes avec une radio d'automobile, mais en situation d'urgence, on a surtout besoin de renseignements qui sont essentiels compte tenu de la situation dans laquelle on se trouve.
Les technologies numériques en cours de déploiement permettraient aux réseaux de radiodiffusion de fournir différents types de renseignements essentiels en cas d'urgence.
[Traduction]
Les technologies numériques peuvent aussi couvrir plus efficacement de grandes régions en utilisant un certain nombre d'émetteurs distribués à faible puissance dont la couverture est limitée à une région peuplée. Les coûts de construction et d'exploitation de tels réseaux sont inférieurs à ceux des stations centrales à forte puissance utilisées par les systèmes de radiodiffusion analogique.
Veena, à vous la parole.
Je voudrais d'abord vous remercier, membres du comité permanent, de me donner l'occasion de partager avec vous ma vision des choses, ma compréhension du pouvoir des nouvelles technologies sur le diffuseur public.
[Traduction]
Comme vous le savez, étant professeur d'université, je suis appelé à parler pendant trois heures consécutives. Il me sera donc assez difficile de me limiter à huit minutes. Je vais néanmoins m'efforcer d'être concis.
[Français]
J'ai la chance, depuis une quinzaine d'années, de travailler à la confluence des médias traditionnels et des technologies émergentes. Vous remarquerez que dans mon discours d'aujourd'hui, je ne pense pas faire référence aux nouveaux médias. Je pense que c'est une expression qui est un peu révolue. Il est plus dynamique, selon moi, de traiter de la dimension organique des technologies émergentes, puisque c'est en effusion constante. Je prendrai à témoin la page titre de
[Traduction]
The Economist: Lorsque tout se touche.
[Français]
Je pense qu'un des mandats du diffuseur public canadien est justement de tenter de multiplier les points de contact et de connexion avec ses usagers, les citoyens et citoyennes du Canada.
Parce que je m'intéresse beaucoup aux technologies émergentes, je suis à même d'observer les tendances lourdes de l'heure. Je prends un plaisir certain à observer notamment les nouveaux comportements d'écoute que manifestent les jeunes en particulier, ceux qu'on appelle les millennials ou les digital natives.
Je pense qu'on a énormément d'occasions ici d'observer cette espèce de fractionnement, d'éclatement. Le multitasking prend véritablement forme et donne lieu à de nouveaux modes de communication, et impose à Radio-Canada de nouveaux modes de distribution de ses contenus et aussi, bien entendu, de production de ses contenus.
Un des dirigeants de la Australian Broadcasting Corporation disait, il y a quelques jours:
[Traduction]
Les médias numériques sont maintenant présents dans tout ce que nous faisons. Ils ne sont pas des ajouts, ils ne sont pas des nouveautés, ils sont la réalité aussi bien que l'avenir.
[Français]
La BBC, j'y reviendrai dans quelques minutes, a modifié son mandat à la fin de 2006 pour maintenant octroyer et reconnaître l'espace qu'occupent les nouvelles technologies et les technologies émergentes dans le rôle et le mandat du radiodiffuseur public qu'est la BBC.
Sur ce plan, on remarque comment les jeunes utilisent les contenus visuels ailleurs qu'à la télévision. Je pense qu'il est tout à fait pertinent que je cite quelques statistiques ici. Une étude récente, faite il y a quelques mois, révèle que lorsqu'on demande aux jeunes quelles plateformes ils utilisent lorsqu'ils regardent des contenus visuels ailleurs qu'à la télévision, 75 p. 100 d'entre eux, évidemment, répondent qu'ils le font sur un ordinateur,
[Traduction]
... 46 p. 100 sur un ordinateur portatif, 16 p. 100 sur un lecteur vidéo portatif, 13 p. 100 sur un iPod et, maintenant, le dernier arrivé sur le marché, sur un téléphone mobile cellulaire, qui est de toute évidence promis à un bel avenir.
À telle enseigne qu'un homme du nom de Michael Eisner, qui dirigeait une petite entreprise appelée Disney, a pris sa retraite il y a quelques années, pour ensuite lancer une série de 80 webisodes ou mobisodes, des clips de 90 secondes. La série s'intitule Prom Queen et tombe à point nommé à la fin de l'année scolaire. Ces clips de 90 secondes visent ce marché particulier et sont destinés à être visionnés sur des téléphones mobiles, des appareils mobiles ou des ordinateurs portatifs. Ces clips sont liés aux magasins Victoria's Secret et à tous les magasins de vêtements ou de bijoux pour filles qui font de la publicité sur les clips. Bref, ils s'intègrent à une vaste infrastructure commerciale.
Je pense que cela est indicatif des technologies qui sont maintenant en développement. Il est évident que le radiodiffuseur public doit s'adapter et adopter certaines de ces importantes nouveautés. Car elles ne seront pas un feu de paille.
[Français]
On peut reconnaître que toutes ces technologies... Le temps qu'accordent les jeunes et les citoyens en général aux nouvelles plateformes et aux contenus numériques est en croissance exponentielle. Non seulement Radio-Canada/CBC est-elle en concurrence désormais avec les plus grands producteurs de contenu du monde, mais aussi beaucoup avec un nouveau phénomène qui s'appelle le fameux
[Traduction]
... le contenu créé par les usagers et le réseautage social. Il s'agit en l'occurrence des sites MySpaces, Facebooks, YouTubes et autres. Ce sont d'énormes compétiteurs maintenant.
[Français]
On remarque ainsi un glissement des médias traditionnels vers les nouvelles plateformes numériques. Non seulement s'agit-il d'un glissement de contenu, mais aussi et surtout du modèle d'affaires. En effet, le glissement des assiettes publicitaires vers les nouvelles plateformes menace de façon significative non seulement le radiodiffuseur public mais également l'ensemble des radiodiffuseurs canadiens.
Il y a une phrase que j'entends souvent à l'université et que je trouve fort emblématique. À la fin d'une classe, les étudiants disent:
[Traduction]
« Je t'appellerai ce soir » ou « Je te verrai au gymnase » ou « Je te verrai sur Facebook ».
[Français]
Pour moi, c'est un univers complètement fictif, mais à la fois très réel. La constante mouvance des développements technologiques est un phénomène extraordinaire. J'enseigne dans le domaine des nouvelles technologies à l'université. La semaine dernière, on discutait des contenus sur
[Traduction]
... les téléphones mobiles. Les étudiants comparaient leurs expériences personnelles avec une série de nouveautés. L'un d'eux nous a parlé de son expérience avec Facebook et de l'observation que lui a faite un autre étudiant: « Vraiment, Coleman, tu es en retard de dix minutes. »
Ce phénomène où nous tentons sans cesse de rattraper la concurrence nous force de toute évidence à penser à des façons nouvelles de réemballer notre contenu. Un dogme du milieu des nouvelles technologies veut qu'il faut distribuer ses produits en de multiples exemplaires. J'estime que l'un des plus grands producteurs de contenu au Canada est la CBC/Société Radio-Canada. Je pense que nous devons donner à cet organisme public les moyens non seulement de continuer de produire une plus grande variété possible d'émissions, mais encore de les diffuser sur le plus grand nombre possible de plateformes différentes.
[Français]
J'imagine que le temps est limité, alors je vais conclure.
L'exemple de la BBC est probablement pour moi le plus éloquent. En effet, l'État reconnaît dans ce cas le rôle central du radiodiffuseur public dans le nouvel environnement numérique. De par son mandat, la BBC a maintenant l'obligation de produire et de diffuser sur les nouvelles plateformes, notamment le fameux
[Traduction]
... la vidéo sur demande, qui constitue la prochaine révolution qui s'apprête à nous tomber dessus.
[Français]
Il y a aussi toute la question du budget. La BBC, notamment, a commencé des travaux en vue de mettre en ligne
[Traduction]
... plus d'un million d'heures de documents archivés tant à la radio qu'à la télévision du radiodiffuseur public. Je pense que cela en dit long sur les possibilités que représentent les technologies numériques pour la radiodiffusion publique, et j'espère que le comité reconnaîtra qu'il faut de façon impérative exercer des pressions sur le gouvernement pour qu'il modifie et modernise le mandat de la SRC afin qu'il s'accorde complètement avec les tendances technologiques actuelles qui la touchent.
Merci.
:
Merci beaucoup. C'est pour moi un grand plaisir d'être ici avec vous.
Je vais faire la plus grande partie de ma présentation en anglais, mais si vous avez des questions en français, je pourrai y répondre.
[Traduction]
J'enseigne depuis deux ans au département des études en communications et en multimédias de l'Université McMaster. Avant cela, j'ai travaillé pendant 16 ans à la Canadian Broadcasting Corporation, où je n'étais pas un expert en technologies des nouveaux médias. Je faisais plutôt le genre de travail que les ingénieurs faisaient avec les gens du CRC ainsi que la présentation des applications destinées aux diffuseurs au CRTC. Je m'occupais, notamment, d'expliquer en langage courant pourquoi un radiodiffuseur public devrait consacrer des deniers publics à ce genre de technologie. Tout repose sur certains des principes qui s'appliquent à un radiodiffuseur public.
À l'instar de Pierre, je n'aime pas le terme « nouveaux médias ». Quand on examine l'histoire des télécommunications au Canada et dans le monde, on trouve une série d'articles datant des années 1940 qui portaient sur les nouveaux médias de l'époque. Un nouveau média était appelé à changer le monde. Il allait, entre autres choses, remplacer la radio. Savez-vous quel était ce média? C'était la télévision.
Diverses plateformes ont vu le jour, pour ensuite disparaître. Pendant toute cette évolution, le radiodiffuseur public du Canada et d'autres dans le monde ont sans cesse réinventé leur rôle pour s'adapter aux nouveaux médias, mais ils sont restés fidèles à des principes clés. C'est de cela que je veux parler aujourd'hui, afin d'alimenter la discussion sur certaines des perspectives internationales en matière de nouveaux médias et de radiodiffuseurs publics.
La question est la suivante. Les radiodiffuseurs des pays démocratiques ont été forcés de réinventer sans cesse la façon de diffuser leurs émissions et d'améliorer la communication démocratique entre les citoyens. Celles qui ont été couronnées de succès dans les années 1940, 1980 et maintenant sont soutenues par la population dans trois secteurs: les multiplateformes, les services publics et le financement public.
D'abord, en ce qui a trait aux multiplateformes, les meilleurs radiodiffuseurs publics dans le monde, y compris celui du Canada, ne croient pas aux plateformes. Ils croient plutôt au contenu qui vient des collectivités locales, ils croient qu'il faut raconter l'histoire des Canadiens d'un bout à l'autre du pays, et ne croient guère que les médias les plus récents soient la solution au problème de la communication avec les auditoires. Ils veulent souvent s'impliquer eux-mêmes. Leur foi est confirmée lorsqu'ils atteignent leurs auditoires et se connectent avec eux de manières nouvelles.
Ensuite, en ce qui concerne les services publics, tout se résume à la question de savoir si la prestation de services sur un large éventail de plateformes est clairement dans l'intérêt des services publics. Franchement, quand on étudie l'évolution de la radiodiffusion dans le monde, on se rend compte qu'au fil du temps les principes du service public et de la diffusion d'un contenu n'ont guère changé, que ce soit pour la forme ou la substance, bien qu'ils se soient adaptés aux particularités locales et aux possibilités des nouvelles plateformes.
Troisièmement, puisque nous sommes ici — et vous maîtrisez un peu les cordons de la bourse à cet égard —, en ce qui concerne le financement public, ces radiodiffuseurs publics qui ont pu s'adapter aux nouveaux médias, encore une fois dans les années 1940, 1980 et dans le nouveau millénaire, sont en mesure de jouer un rôle de chefs de file dans l'expérimentation relative aux nouvelles plateformes aussi bien que de maintenir les traditions de la meilleure radiodiffusion publique. Ainsi, ils sont toujours comme c'était il y a 10 minutes, il y a 80 minutes. Ils restent toujours attachés aux principes, aux objectifs et aux passions qui ont été celles des Graham Spry et Alan Plaunt il y a presque 80 ans.
Je présenterai, comme je l'ai fait dans ma déclaration préliminaire, quatre recommandations clés qui s'appuient sur les dernières nouveautés relativement à la réflexion sur la redéfinition du rôle de la radiodiffusion publique en fonction des nouveaux médias. Ce sont quatre recommandations sur lesquelles je vous demande de vous pencher lorsque vous songerez à vos propres recommandations.
D'abord, je pense qu'il est toujours utile pour nos parlementaires d'exprimer le souhait des Canadiens de réaffirmer constamment le rôle de la radiodiffusion publique et, notamment, le rôle central de la SRC dans le système de radiodiffusion.
Ensuite, comme le diraient mes étudiants, cela tombe sous le sens. La SRC est au coeur des nouveaux médias. Peu importe que la Loi sur la radiodiffusion continue de ne pas parler des nouveaux médias — les nouvelles plateformes numériques qui font que la SRC continue d'être officiellement un diffuseur public d'émissions de radio et de télévision.
En troisième lieu, c'est un problème, le comité devra sans doute commencer à penser aux façons de réexaminer l'exemption générale du CRTC relative aux nouveaux médias. C'est tout un débat. Nous pourrions peut-être en parler davantage. Mais dans la mesure où nous pouvons intégrer du contenu des nouveaux médias, qui est à certains égards non souhaitable, dans le cadre réglementaire, en cas d'échec de la solution réglementaire, nous avons à notre disposition une façon de financer la présence canadienne dans les nouveaux médias par le truchement de la SRC.
Cela m'amène à la quatrième recommandation. Je sais que vous refléteriez les souhaits des Canadiens en appuyant un financement accru de la SRC en fonction des mesures objectives du niveau de financement que d'autres grands pays démocratiques occidentaux accordent à leur radiodiffuseur public.
La SRC, à l'instar d'un grand nombre d'autres radiodiffuseurs dans le monde, s'adapte aux nouveaux rôles, aux nouvelles responsabilités et aux nouvelles possibilités dans le contexte des changements technologiques, démographiques, sociétaux et linguistiques, ainsi que dans le contexte d'une politique gouvernementale dynamique. Pour la SRC, c'est à la fois le moment idéal et le pire moment. Nombre d'entre nous ont envisagé sérieusement la possibilité très réelle que la SRC disparaisse — une possibilité à laquelle ont songé aussi d'autres radiodiffuseurs publics de par le monde. Mais un sort pire encore que la disparition menace la SRC: c'est la perte graduelle et lente de sa pertinence dans la vie des Canadiens.
Cependant, il est également possible que les outils que permettent certains des médias les plus nouveaux en réseautage social, en matière de production de contenu par les usagers, donnent l'occasion de faciliter la participation publique à la constitution dont rêvaient initialement des visionnaires comme Graham Spry et Alan Plaunt.
Le fait est que les radiodiffuseurs publics comme la SRC ont clairement un rôle à jouer dans l'ère numérique. Le comité l'a confirmé il y a trois ans lorsqu'il l'a mis au coeur du rapport Lincoln:
... plusieurs gouvernements occidentaux continuent d'investir massivement dans la radiodiffusion publique. Cela tient au fait qu'ils ont compris que la radiodiffusion publique demeure un outil essentiel pour promouvoir les valeurs et l'identité nationales.
Presque un an après que vos prédécesseurs — je pense que M. Abbott siégeait au comité initial — eurent produit ce rapport, la BBC a amorcé le processus de renouvellement de sa charte. Elle a en fait repris certains éléments de votre rapport, mais, comme Pierre l'a dit, en accordant une réelle importance aux plateformes numériques.
Elle a produit un merveilleux document intitulé Building public value, que vous connaissez tous sans doute. Elle a souligné que toute sa programmation relative aux nouveaux médias devrait se fonder sur son mandat initial de radiodiffuseur public. Elle a dit au sujet du monde numérique:
Ce monde présente la possibilité de choix illimités pour les consommateurs individuels. Mais il présente aussi le risque que la radiodiffusion ne devienne qu'une autre marchandise, avec pour seule mesure la rentabilité. Une nouvelle BBC [place] l'intérêt public devant tout le reste... certains principes clés ne sont pas négociables si l'on veut que la BBC reste la BBC. Ces principes-là sont que la BBC doit être accessible à tous, en donner pour leur argent à tous et être ouverte à tous. L'intérêt public doit rester au coeur de tout ce que fait la BBC.
Je vois que le président me pointe du doigt. Je vais donc en profiter, si vous me le permettez, pour vous présenter une personne qui a des idées... et qui est certainement infiniment plus belle que moi. Il s'agit d'une de mes étudiantes à l'Université McMaster, Christina Oreskovich.
Christina a suivi quelques-uns de mes cours ces dernières années. Le dernier qu'elle a suivi concerne la politique canadienne en matière de communications, tout en ayant le bonheur de suivre ce que nous appelons le cours sur les statistiques, soit le cours de méthodologie de la recherche quantitative. Christina et un certain nombre d'autres étudiants ont rendu la politique intéressante en suivant le cours sur les statistiques et en l'utilisant en fait pour réaliser un sondage auprès des étudiants universitaires de première année. Ils se sont penchés sur la situation actuelle des médias, soit le début de ce dont Pierre a parlé, dans la vie des autres étudiants.
Je voudrais donc vous présenter...
:
D'accord. Alors, je serai très brève.
Essentiellement, comme l'a dit le professeur, nous avons fait un sondage sur les médias auprès des étudiants de première année en communications à l'Université McMaster juste pour voir quelles étaient leurs perceptions et leurs attitudes en ce qui concerne les médias et les nouveaux médias. Nous nous sommes servis des données pour tracer le profil général des rapports des étudiants avec les médias.
Selon les données que nous avons recueillies, l'étudiant universitaire normal a un téléphone cellulaire et un ordinateur portatif et il a accès aux services à large bande à la maison ou à certains endroits sur le campus. Il télécharge souvent de la musique gratuite. Quelque 93 p. 100 des étudiants sondés, si je ne m'abuse, téléchargent de la musique illégalement. Je pense que c'est une donnée intéressante.
L'étudiant normal est un avide usager de YouTube, de MySpace et de Facebook. Disons-le d'emblée, Facebook est un grand succès à mon université. Tout le monde s'en sert, et si vous ne vous en servez pas, on vous trouve vraiment bizarre. Sa popularité est immense.
Il consulte parfois un blogue, mais il n'en tient pas un lui-même, même si certains de ses amis le font.
Il regarde la télé au moins une fois par jour, et il écoute régulièrement la radio, mais, malheureusement, rarement la radio de la SRC. Il lit aussi régulièrement des magazines, au moins une ou deux fois par semaine. Pour une source d'information sérieuse, il se tourne vers les médias conventionnels ou Internet. J'ai été assez surprise de constater qu'autant d'étudiants lisent les journaux, mais c'est pourtant le cas semble-t-il.
Il se sert d'Internet pour rester en contact avec un large éventail d'amis. Mais c'est étrange parce qu'il s'inquiète de passer moins de temps avec sa famille et ses amis parce qu'il est si souvent sur Internet. C'est une sorte de contradiction. Il craint que le temps qu'il passe sur Internet ne le rende moins productif dans ses études, mais, en même temps, il se sert d'Internet pour trouver beaucoup d'informations et il pense qu'Internet lui fournit un large éventail d'avis.
Ce sont là quelques traits de l'étudiant normal. Je vais maintenant aller à la conclusion.
Durant toute notre étude, une importante facette des médias ou des nouveaux médias était l'interactivité. Je sais qu'il a déjà été mentionné à quel point cela était devenu important. Quatre-vingt-trois pour cent des étudiants interrogés ont dit qu'ils consultent des blogues et ce genre de chose. C'est une sorte d'interactivité dans la mesure où les gens ordinaires ont la possibilité de devenir auteurs, d'exprimer leur opinion et de dire aux autres ce qu'ils pensent sur divers sujets de leur choix.
Si vous voulez savoir si les nouveaux médias sont en train de remplacer les médias conventionnels, nos données ne le confirment pas du tout. Les gens s'intéressent autant aux médias conventionnels qu'aux nouveaux médias. Ce qu'ils font, toutefois, c'est utiliser les nouveaux médias à titre de complément de ce qu'offrent les médias conventionnels. Ainsi, si je manque l'émission Grey's Anatomy à 20 heures, je peux aller sur YouTube pour en visionner des extraits, ou je peux télécharger l'émission à partir du site Internet alluc.org. Je peux donc profiter des médias conventionnels, mais pas directement. C'est plutôt par l'entremise des nouveaux médias.
Je sais qu'il s'agit du radiodiffuseur public et de l'avenir de la SRC, de sorte que je vais aller droit au but. Essentiellement, ce que nous demandons, c'est: est-ce qu'Internet remplit le rôle de radiodiffuseur public? Autrement dit, Internet fournit-il un espace pour un discours à l'abri des intérêts commerciaux? On ne peut nier qu'Internet fournit de toute évidence aux gens une tribune sur laquelle ils peuvent exprimer leurs opinions au moyen de sites Web, de blogues et d'autres dispositifs. Toutefois, l'existence même d'une telle tribune ne garantit pas que tous ont la même possibilité de se faire entendre. Par exemple, il n'y a qu'une poignée de moteurs de recherche populaires. Si votre site n'est pas lié à Yahoo! ou à Google, notamment, vous n'aurez pas la possibilité de vous faire entendre autant qu'un autre qui l'est.
Ainsi, le rôle de radiodiffuseur public est au coeur même de l'édification de l'identité canadienne. Nous ne pouvons pas laisser cette responsabilité à l'incertitude d'Internet.
Voici simplement quelques données. Vingt-sept pour cent des étudiants interrogés ont dit être quelque peu ou fortement en désaccord sur l'idée qu'on trouve plus d'information canadienne sur Internet que dans les médias conventionnels, et une grande partie d'entre eux n'étaient ni d'accord ni en désaccord. En conséquence, ou bien les gens ne cherchent pas cette information, ou bien elle n'est pas fournie. Puis il y a quelque chose comme src.com. Toutes les fois que je faisais un travail ou une recherche et que j'avais besoin d'une information canadienne solide et crédible, c'est sur le site de la SRC que j'allais en premier parce que je savais que j'y trouverais une information digne de foi.
Nous croyons donc qu'il est fondamentalement important que la SRC profite des nouvelles plateformes pour accroître sa popularité auprès des jeunes auditoires parce que nous avons besoin que notre radiodiffuseur public soit plus fort que jamais.
:
Ce concept de service doit être un élément de base. En effet, pour concevoir l'avenir, il est crucial que la CBC pense en fonction du bien public et du partage plutôt qu'en termes de monopole et de concurrence.
[Traduction]
En matière de bilan, avant de parler des nouvelles technologies, je voudrais souligner que la SRC devrait être plus englobante qu'elle ne l'est maintenant. Je vous donne un exemple. Lorsque j'étais commissaire à la cinématographie, la seule façon pour la SRC de travailler avec l'ONF était d'absorber l'ONF, essentiellement; il n'y avait pas d'autre façon de travailler avec cet organisme. Ainsi, à CTV ou Global, il y a plus de produits de l'ONF qu'il y en a à la SRC. C'est assez étrange qu'une institution de 1,5 milliard de dollars ne puisse travailler avec une autre de 80 millions de dollars. Or, la SRC trouve assez d'argent pour acheter un réseau comme le Documentary Channel, après avoir acheté aussi un réseau appelé Country Canada, qui, en ce qui me concerne, en ce qui concerne l'auditoire, n'est pas vraiment visible sur l'écran.
Une autre initiative qu'aurait pu prendre la SRC au fil des ans — la SRC n'a pas fait preuve de leadership dans ce dossier — concerne les réseaux provinciaux.
[Français]
Dans le cas de Télé-Québec, TVOntario, Knowledge Network, CTV Saskatoon,
[Traduction]
La SRC aurait pu jouer un rôle de chef de file parce que ces réseaux sont très pauvres. Ils n'ont pas les moyens de s'afficher. Pourtant, ils offrent beaucoup de très bons produits, et si la SRC pouvait jouer un rôle de fédérateur dans ce domaine, cela pourrait nous aider à accoucher d'une vision pour l'ensemble du pays, d'une province à l'autre.
Nous investissons beaucoup dans notre cinéma national par l'entremise de Téléfilm, à l'aide de crédits d'impôts et d'une foule d'autres formules. Dans le reste du monde, tous les grands radiodiffuseurs publics ont une division qui investit dans le cinéma. Pas la SRC. La SRC est certes libre de choisir les films dans lesquels elle investira des fonds et de déterminer à quelle hauteur elle le fera.
[Français]
En France, en Angleterre et en Allemagne, les chaînes publiques financent le cinéma.
[Traduction]
Je citerai M. Andreas Weiss, de l'ARD en Allemagne, qui a dit que le film La Vie des autres, qui a remporté l'Oscar du meilleur film étranger en 2007, a pu être réalisé grâce à ces investissements de la télévision publique, et personne ne l'a contredit.
Avant de passer aux nouvelles technologies, je voudrais attirer votre attention sur un autre point qui concerne la SRC et le développement international. À ce jour, j'ignore tout à fait, à mon grand étonnement, ce que fait la SRC sur la scène internationale. Par exemple, la BBC, dont on a parlé et dont je parlerai aussi, s'est dotée d'une structure appelée BBC Worldwide, qui génère des revenus de 1,7 milliard de dollars en vendant son produit, son format et son concept. En ce sens, je cherche toujours ce que la SRC fait sur ce front.
En plus, outre le fait de vendre des programmes, qui n'est pas l'affaire de l'heure — ce concept d'il y a 10 minutes —, il y a l'activité plus prometteuse de la vente de signaux, de réseaux. On pourrait être à Buenos Aires aujourd'hui ou à Istanbul et regarder un réseau japonais, coréen ou britannique. Pas au Canada. Où sommes-nous? Quand on parle de marché mondial, où sont ces images canadiennes qui devraient être vues partout dans le monde? La SRC aurait pu jouer un rôle de chef de file à ce niveau. Et cela m'amène aux nouvelles plateformes.
[Français]
Quand ils sont venus vous rencontrer ici, les représentants de la CBC vous ont demandé un vote de confiance de 10 ans afin qu'ils puissent amorcer le virage en matière de nouvelles plateformes et technologies.
[Traduction]
C'est un énorme acte de foi à demander, à l'heure où nous connaissons des changements technologiques à un rythme presque mensuel. Je suis plus généreux que mon collègue.
[Français]
Dans le domaine des nouvelles plateformes, la CBC parle plus souvent de contenants et de tuyaux plutôt que de contenu, c'est-à-dire ce qu'elle va mettre dans les tuyaux. Alors qu'une véritable révolution s'amorce, c'est comme si elle plaçait quelques arbres devant la forêt pour cacher celle-ci.
En termes concrets, comment va-t-elle se démarquer des diffuseurs privés? À mon avis, les enjeux qui s'amorcent vont avoir pour nous tous des conséquences si faramineuses que je recommande à votre comité d'élargir ses discussions et ses décisions, de façon à pouvoir entendre un plus grand nombre d'experts, comme vous le faites maintenant, et pas uniquement les dirigeants de la CBC. Dans le cadre de la télévision traditionnelle, la CBC a souvent joué la carte de la concurrence, mais maintenant, on ne peut concevoir l'avenir technologique que si l'on agit en tant que partenaire avec d'autres.
S'il y a au monde un réseau qui a entamé le virage technologique, c'est bien la BBC, en Angleterre.
[Traduction]
Nous ne nous sommes pas consultés là-dessus, mais chacun d'entre nous a donné la BBC comme modèle.
[Français]
La BBC, par exemple, s'est alliée à YouTube et a élargi son moteur de recherche avec Google.
[Traduction]
YouTube attire 20 millions de visiteurs par mois. Comme le directeur des médias numériques de la BBC Worldwide l'a dit, ils peuvent nous apprendre beaucoup de choses.
Le partenariat avec Google entraînera la création de trois nouvelles chaînes sur Internet et pour les usagers de téléphones cellulaires.
Dans le même ordre d'idées, la BBC a conclu des accords avec la Corée du Sud par le truchement de TU Media Corporation. Elle a également conclu des ententes avec des sociétés américaines comme Azureus, un distributeur en ligne, BitTorrent, et Joost, une entreprise de distribution à large bande P2B appartenant aux créateurs de Skype.
Dans le nouveau marché mondial, la SRC ne peut faire comme si elle était seule au monde. Les changements les plus importants ne viendront pas uniquement des choix technologiques, ils viendront aussi du contenu.
La révolution, cela a été dit encore, c'est le contenu d'une nouvelle source: celui produit par les usagers. J'insiste là-dessus parce que ce contenu vient de particuliers -- pas seulement de professionnels -- de tous les coins du pays qui veulent que leurs oeuvres soient vues par leurs pairs au Canada et dans le monde.
[Français]
Des expériences de ce genre ont lieu en ce moment au Canada, entre autres Homeless Nation, un projet dans le cadre duquel des jeunes créent leur propre réseau dans la rue et s'entraident pour trouver leurs propres solutions. CITIZENShift et Parole citoyenne sont des sites Internet où les citoyens créent et échangent entre eux. ZTV, que diffusait auparavant la CBC, avait ce genre de potentiel, mais on a préféré la sacrifier et transférer ces investissements vers des projets plus traditionnels et commerciaux.
Les nouvelles plateformes sont en train de changer radicalement la notion de réseau, de format de produit, de processus de création ainsi que de droit d'auteur. La CBC ne veut pas se placer au-dessus de la mêlée, mais elle doit intégrer ces changements. Il ne s'agit pas ici de procéder à des modifications cosmiques consistant par exemple à appeler les Canadiens à voter pour le nom du plus bel endroit au pays, mais d'impliquer véritablement les citoyens dans une redéfinition en profondeur de la notion de service public.
Un des patrons de la chaîne allemande ARD, qui appuie le concept de
[Traduction]
... de contenu généré par l'usager, a dit ce qui suit: « Le CGU ne peut avoir une incidence sur la connaissance publique que s'il est diffusé sur les plateformes interactives générales. » Les radiodiffuseurs publics peuvent jouer un rôle clé en fournissant une tribune puissante, mais impartiale, pour les débats publics.
Y a -t-il quelqu'un au Canada qui nous conseille de prendre de telles mesures? Alors qu'IPTV, Internet protocol networks, voit le jour à un coût minime, la SRC consacre toujours ses énergies à étudier les plus vieux réseaux, comme les chaînes documentaires, et reste prisonnière encore une fois du vieux paradigme et du concept de compétition plutôt que de se convertir à celui de la complémentarité.
[Français]
Des représentants de la CBC sont venus vous voir pour vous demander 60 millions de dollars de plus en vue d'amorcer des changements technologiques. La BBC, de son côté, a vu son plan de refonte être réduit de 8,61 milliards de dollars sur une période de six ans par le gouvernement anglais. Ce dernier a demandé à la BBC de remettre l'équivalent de 3,9 milliards de dollars canadiens pour assurer des changements technologiques. À la CBC, c'est le contraire qui se passe: on ramène tout à de nouvelles demandes de financement supplémentaire. L'approche est simple: « Vous payez; on fait ».
C'est peut-être vrai que la CBC a besoin de plus de moyens pour se convertir à la haute définition et c'est vrai qu'elle a besoin de plus de moyens pour continuer à être dans la course, mais avant de parler de nouveaux investissements de la part de l'État canadien, assurons-nous, comme dans le cas de la BBC ou de la NHK au Japon, qu'elle a d'abord mis de l'ordre dans sa maison. En effet, on ne peut pas vouloir être tout pour tout le monde en même temps, à la radio, à la télévision. On ne peut pas concurrencer dans le domaine numérique, faire du rattrapage technologique, sans faire des choix.
[Traduction]
Mais pour ce faire, elle doit changer de peau: la SRC ne peut continuer d'investir dans les studios, les espaces à bureaux, son effectif actuel, et croire qu'elle pourra se réinventer de l'intérieur.
En conclusion, je dirai aux membres du comité que vous êtes confrontés à une situation assez complexe. Je ne pense pas qu'on devrait laisser à la SRC le soin de définir son avenir, mais je vous invite à faire ce que nos prédécesseurs ont fait dans le passé. Je vous rappelle une commission appelée Commission Applebaum-Hébert. Je pense qu'il est temps que le pays ait le courage d'instituer une commission qui contribuerait à redéfinir ce que sera la solution pour la SRC en matière de nouvelles plateformes. Personne ne conteste le fait que nous allons y arriver. Comment nous allons y arriver, dans quel état d'état d'esprit, voilà ce qui importe le plus, à mon avis.
Merci.
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Vous m'avez adressé trois questions. En ce qui concerne la SRC sur le plan international, je pense qu'en tant qu'institution publique, la SRC doit jouer un rôle de chef de file en regroupant les radiodiffuseurs publics et privés pour s'attaquer au marché international. C'est assez facile.
Aujourd'hui, lorsque les Coréens ou les Japonais peuvent se retrouver dans les différents choix de réseaux dans le monde, c'est simplement parce qu'ils exportent leurs émissions après avoir libéré les droits pour pouvoir le faire.
Je vous rappelle que la SRC a tenté de le faire aux États-Unis il y a cinq ans environ, mais qu'elle a vendu ce réseau et ne l'a jamais racheté. À mon avis, la SRC ne pense pas en fonction du monde; elle pense à vendre son produit, mais pas son signal.
Prenons, par exemple, Tout le monde en parle une émission du réseau français de la SRC qui a remporté un grand succès, dont le concept a été acheté à la France. Nous sommes donc passés de la formule habituelle de vente d'un produit à la vente d'un signal.
Et il y a une demande dans le monde pour la qualité que pourrait atteindre la SRC si elle parvenait à fédérer les réseaux publics et privés. Par exemple, Bell pourrait s'unir à la SRC pour créer un réseau TV5 canadien, si vous voulez, qui serait diffusé dans le monde entier. C'est faisable. Nous pourrions nous pencher sur les détails d'un tel projet.
La deuxième question avait trait aux producteurs indépendants. C'est relativement simple. Cela est fait dans le monde entier, et c'est pourquoi je demande si la SRC a besoin de l'infrastructure qu'elle a dans tout le Canada. A-t-elle besoin de tout cet effectif d'un océan à l'autre?
Prenons par exemple Alliance Atlantis ou tout autre réseau. Lorsque Channel 4 a été créé au Royaume-Uni, il n'y avait pas d'infrastructure. On n'a pas besoin d'une infrastructure parce que, comme il a été dit, elle devient assez rapidement désuète.
Ne conservons que le strict minimum et fonctionnons comme cela. L'argent ainsi économisé ira dans le monde des producteurs indépendants parce que c'est de là que proviennent les productions de toute façon.
À l'heure actuelle, ce qu'on voit, c'est que la SRC protège son vieil univers. Elle puise à deux mains dans le Fonds canadien de télévision. Elle profite de son propre produit. Elle profite des revenus qu'elle tire de la publicité. Pour quoi faire? Maintenir une énorme infrastructure.
Pour pouvoir recourir aux producteurs indépendants, la SRC doit d'abord se libérer de son vieil univers au profit de l'univers des nouvelles plateformes, de sorte qu'elle pourra investir dans le secteur des indépendants et enrichir ce qui doit être fait dans notre pays en ce qui a trait aux producteurs indépendants.
Votre troisième question, qui porte sur les films de long métrage, est assez simple. En France, il y a un organisme appelé CNC. En Angleterre, il y a le UK Film Council. La loi prévoit que les radiodiffuseurs privés et publics doivent investir dans le développement de l'industrie du film de long métrage. La France et l'Angleterre ont ainsi créé un organisme chargé d'investir dans la production de films de long métrage.
Pouvez-vous imaginer ce que nous pourrions faire avec au moins le double des 240 millions de dollars qui sont actuellement consacrés à Telefilm Canada?Je ne pense pas me tromper en disant qu'on pourrait obtenir des fonds des radiodiffuseurs qui finiront par diffuser ces films. Mais ils attendent que les films soient terminés afin de les avoir pour 2 cents au lieu de prendre le risque d'investir dans le développement de notre industrie du cinéma.
Cela, à mon avis, est la réponse à vos trois questions.
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Depuis sept ou huit ans, je gère une veille technologique sur une base quotidienne avec un groupe de recherche de l'université. J'aime penser que la plupart de ces grandes tendances sont couvertes par nos travaux.
Un phénomène assez important s'est produit aux États-Unis l'automne dernier. Il a suivi d'un an l'entrée sur le marché du fameux iPod vidéo qu'Apple avait lancé à l'automne 2005.
ABC, CBS et les grands réseaux privés américains ont mené, de concert avec Apple, une étude-pilote de trois ou quatre mois pour voir si le transfert d'émissions vedettes telles que Desperate Housewives et Lost sur cette nouvelle plateforme répondait à une demande. Il me fera plaisir de vous communiquer les chiffres à cet égard. Six mois plus tard, les résultats sont à ce point encourageants qu'ABC affiche maintenant sur son site Web
[Traduction]
C'est un moment très déterminant, je pense, dans l'histoire récente des communications ou des médias de communication traditionnels. Si on va sur le site web abc.com aujourd'hui, non seulement on nous invitera à regarder Lost à 21 heures et Ugly Betty à 22 heures et aussi l'émission qui joue à 23 heures. On nous invitera aussi à regarder Lost ce soir à 21 heures et demain sur la toile.
Cela représente pour moi un énorme changement de paradigme. Je vous dis qu'il n'est plus nécessaire de programmer votre magnétoscope. C'est maintenant mon travail traditionnel que de passer à ces autres plateformes. Nous avons maintenant les iPods pouvant afficher des vidéos, et nous pouvons maintenant aller sur iTunes pour acheter l'émission que nous avons manquée hier soir.
M. Bensimon a parlé de la BBC et de YouTube. Eh bien, prenez la LNH et YouTube; il n'est pas nécessaire de regarder le match ce soir entre les Sénateurs et les Sabres parce qu'il suffit d'aller sur YouTube à 23 heures pour voir tous les buts marqués au cours du match.
On voit donc que tous les radiodiffuseurs ont intérêt à explorer les possibilités et la viabilité de modèles commerciaux novateurs sur diverses plateformes.
[Français]
Les chiffres sont abondants maintenant. On a entendu les déclarations que Bill Gates a faites hier au sujet des nouvelles plateformes mobiles, etc. J'en ai une ici.
[Traduction]
Selon le président du réseau de câblodistribution Comcast aux États-Unis, il n'y aura plus de médias linéaires purs -- c'est-à-dire la notion de produit distribué en de multiples exemplaires.
[Français]
Nonobstant les commentaires de M. Bensimon, qui sont tout à fait pertinents dans cette perspective, Radio-Canada demeure une des institutions culturelles les plus importantes du pays. Elle raconte le Canada aux Canadiens à partir de ses différentes têtes de réseau un peu partout au pays. L'idée de disséminer les contenus le plus largement possible et les plateformes mobiles... La tempête se lèvera dès qu'on aura les fameux réseaux WiFi
[Traduction]
..., la technologie de réseau sans fil. Toronto a été la première ville canadienne à posséder ce nuage numérique. Elle en a fait l'expérience pendant six mois. La technologie sera maintenant totalement mise en oeuvre. Certes, il faudra payer, mais elle s'adresse surtout aux gens d'affaires.
Imaginez ce que ce sera dans 10 ans. Quand nous avons commencé à nous brancher sur Internet, nous payions un tarif horaire, comme s'il s'agissait d'appels interurbains. Nous payons maintenant 35 $ ou 40 $ pour un usage illimité. C'est comme la taxe d'eau. Personne n'évalue notre consommation, ce qui pourrait être un problème, mais sur Internet, l'utilisation est illimitée.
Il y a un certain nombre de plateformes émergentes dont nous devons tenir compte afin d'optimiser la valeur et l'intérêt public de ce que fait la SRC. À l'heure actuelle, le mandat de la SRC la limite vraiment à la radio et à la télévision. Je pense que nous devons intégrer ce nouvel univers qui est extrêmement populaire et qui s'agrandit chaque jour.
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Je suis conscient du temps depuis l'époque où je faisais de la musique et où nous devions quitter l'estrade.
Mais je suis très contrarié. C'est le temps du dialogue, mais il semble y en avoir si peu. Je vais poser trois questions tout de go, et attendre les répondre.
Je voudrais commencer, Mme Rawat, avec la question des transmetteurs numériques à faible puissance.
L'une des questions est celle de savoir ce qu'il faut faire avec les tours analogiques qui relient le pays et permettent aux gens de capter les signaux de télévision avec des antennes en V, qui pourraient disparaître. La seule option qui sera offerte aux gens pour regarder les émissions du radiodiffuseur public sera, semble-t-il, de s'abonner aux services d'un câblodistributeur. Comme première question, je voudrais savoir s'il y a moyen de transformer les tours analogiques que nous avons actuellement en tours numériques. Combien coûterait la transformation des émetteurs analogiques en émetteurs numériques?
Ma deuxième question s'adresse à vous, M. Bensimon, en raison de votre expérience à l'Office national du film.
L'Office national du film a connu d'énormes difficultés financières, mais cela ne l'a pas empêché, à mon avis, de produire des films d'une qualité toujours inégalée. Elle est une des grandes réussites du Canada. Je pense à toute une série d'icones culturelles qui ont été créées pour représenter le Canada du XXe siècle. Nous avons Téléfilm qui, selon certains, est très contestée. Nous avons la SRC. Nous avons l'Office national du film. Nous avons le Fonds canadien de télévision. Or, il ne semble pas y avoir de point de vue holistique dans cet univers multidimensionnel; nous avons une série d'organismes qui sont financés et parmi lesquels certains font sans doute très bien, et d'autres, très mal.
Y a-t-il moyen de redéfinir complètement tous ces organismes pour qu'il y ait un peu de cohésion et que nous obtenions le genre de succès qui devrait être le nôtre en télévision?
Ma troisième question s'adresse à nos universitaires.
Nous avons entendu parler du million d'options qui existent dans les nouveaux médias. Par exemple, sur la toile, il y a 10 millions de blogues et ils sont tous absolument ennuyants. Mes enfants naviguent sans arrêt sur Internet pour trouver du contenu. Le bon contenu coûte cher. Ce qui a changé, selon moi, c'est qu'ils regardent toujours la télévision, mais jamais à 20 heures. Ils regardent la télévision en achetant des DVD. Nous regardons Buffy contre les vampires soir après soir, à l'heure de leur choix. Ils regardent YouTube. Maintenant, ils regardent The Mighty Boosh et Never Mind the Buzzcockstous les soirs -- à l'heure de leur choix.
Il y a donc la question du contenu, mais quelqu'un doit produire ce contenu. Comment pouvons-nous le diffuser? Je voudrais entendre votre point de vue là-dessus.
En guise de complément à cela, je voudrais savoir si vous avez lu le rapport LaPierre intitulé Une charte canadienne des citoyens branchés sur la culture : Culture canadienne en ligne . C'est une des études les plus sérieuses que j'aie lues ces dernières années -- et elle dort sur les tablettes quelque part au ministère du Patrimoine. M. LaPierre a parlé de la nécessité de créer une capacité culturelle en ligne pour promouvoir la notion de citoyenneté au XXIe siècle... Je n'ai jamais entendu parler de ce rapport depuis qu'il a été présenté. Est-il pertinent?
Je vais le faire circuler.
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Pour ce qui est de ma partie de la question, tel a été le message que je vous ai adressé, en tant que comité permanent. Publiquement, nous investissons près de 5 milliards de dollars en tant pays dans les communications et l'audio-visuel. À mon avis, aujourd'hui -- et cela comprend l'Office national du film, compte tenu du succès avec lequel il doit composer. Je le dis depuis cinq ans. Il faut résister à l'idée d'examiner le mandat de la SRC sans examiner en même temps celui de tous les organismes culturels du pays, car ce serait rendre un mauvais service au pays que d'évaluer la SRC sans penser aux conséquences de cette évaluation sur tous les protagonistes. Et cela comprend Téléfilm. Cela comprend la SRC. Cela comprend le Conseil des arts. Cela comprend tous les intéressés. Si on ne le fait pas, je pense qu'on ratera l'occasion de tout réexaminer.
L'ONF remporte un Oscar, mais, en même temps, il investit dans un concept appelé Hothouse grâce auquel les enfants peuvent créer leurs propres produits, avec les moyens accessibles aujourd'hui -- c'est la même chose qu'on a ici -- et ils peuvent vous le montrer presque immédiatement.
Mais je ne prêche pas pour un modèle en particulier. Je pense que nous avons besoin d'un point de vue général.
Revenant à la question du contenu, la beauté du contenu aujourd'hui, c'est qu'au même moment où nous ne sommes plus forcés de regarder une émission à 20 heures, les émissions d'aujourd'hui ont fait exploser le concept de la demi-heure, de l'heure et de l'heure et demie, qui était conçu pour la consommation de publicité et pour les besoins des radiodiffuseurs.
Aujourd'hui, les produits et le contenu ont explosé. Ils durent trois minutes, une heure, deux heures. La beauté de tout cela, c'est que le contenu est produit par toutes sortes de gens. Il y a des professionnels chevronnés qui font de la télévision haute définition qui coûte plus de 1,5 million de dollars pour une émission de trois minutes et d'autres producteurs qui créent des émissions coûtant 5 000 $ au moins. Je pense qu'il va continuer d'y avoir une industrie professionnelle dans le secteur de la musique, mais qu'il y aura en même temps de simples citoyens qui seront capables de créer eux aussi à ce niveau. Il y a donc un univers multidimensionnel où le contenu n'a pas qu'une définition.
En ce qui concerne le rapport LaPierre, je suis heureux que vous en ayez parlé parce que je suis d'accord avec vous. Il dort sur les tablettes, et c'est dommage, car il renferme une foule de bonnes idées. Mais telle est la réalité. J'ai donné l'exemple d'Homeless Nation, qui sert essentiellement à relier les jeunes sans-abri du pays de diverses façons. Qu'ils accèdent au site au moyen de leur propre ordinateur ou de celui d'un magasin, par exemple, ils créent, communiquent entre eux et trouvent des solutions entre eux sans avoir à recourir à une intervention de l'extérieur.
À mon avis, cela est aussi lié à ce que dit le rapport La Pierre, à savoir que les citoyens devraient faire partie du processus de création. Nous avions coutume d'avoir des professionnels pour ceci et pour cela et nous croyions avoir créé -- la génération dont je fais partie -- des professionnels de l'audio-visuel. Aujourd'hui, nous sommes tous des professionnels de l'audio-visuel. Nous avons une langue pour décoder les images; par conséquent, nous sommes maintenant capables de produire des images.
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Je vais commencer avec ce qui a été en quelque sorte un catalyseur. Il y a environ un an, à l’apparition de la télévision mobile, les diffuseurs ont été un peu surpris d’apprendre que cette nouvelle technologie serait traitée à part et qu’essentiellement le CRTC n’interviendrait pas dans le domaine.
Je pense qu’il est temps de faire preuve de beaucoup d’imagination. Il faut que le CRTC prenne un peu plus de risques pour promouvoir vraiment les principes de la loi en ce qui concerne les mécanismes de soutien à la production et à la distribution de la programmation canadienne. Je ne peux dire précisément comment cela devrait se faire. Je pense toutefois que cette question doit être soulevée.
Dans son Ordonnance d’exemption de 1999 relative aux entreprises de radiodiffusion de nouveaux médias, le CRTC a essentiellement dit qu’il reviendrait sur cette question en fonction de l’évolution de la situation. De toute évidence, il ne l’a pas encore fait. Le rapport Lincoln lui a pourtant demandé de le faire. Le CRTC a probablement manqué de temps et de ressources. Je pense qu’il est probablement temps qu’il lance un débat public et qu’il recueille toutes les suggestions à cet égard.
J’ai l’impression qu’il y aura de larges domaines où les organismes responsables seront incapables de réglementer le contenu. En effet, pendant qu’ils seront occupés à mettre au point des moyens d’imposer un seuil minimum de contenu canadien à une nouvelle technologie, il y en aura déjà une plus nouvelle encore à l’horizon.
D’autres États dans le monde se sont déjà saisis de la question. Ce qui devient de plus en plus évident, c’est qu’il existe un outil d’intervention encore plus efficace que la réglementation du contenu pour promouvoir la production locale. Je veux parler du diffuseur public. Je suis donc d’accord avec M. Bensimon sur le fait qu’il faut coordonner toute une gamme d’organismes.
Je me méfie un peu de l’idée de réinvestir une partie du budget de la SRC dans des mécanismes comme le Fonds canadien de télévision, compte tenu des événements des derniers mois. En effet, certains intervenants du secteur de la télédiffusion et des télécommunications souscrivent à une telle perspective. Ils veulent simplement récupérer leur mise et se retirer.
Il faut donc nous inspirer de ce qui se fait dans le monde, et prendre notamment l’exemple de la BBC, qui est un modèle à cet égard. Lorsqu’on veut promouvoir l’expérimentation, favoriser le contenu local, il faut utiliser les ressources du diffuseur public, de façon à ce qu’il y ait un choix. Il faut offrir un choix aux Canadiens en matière de contenu.
Actuellement l’amalgamation a la cote. Selon les étudiants à qui nous avons parlé, le site web Facebook est une sorte de bricolage. Par exemple, j’y définis mon personnage, mon propre personnage médiatique. Je décide si je mettrai dans mon site des clips de Will Farrell ou des éléments tirés des archives de la SRC.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
C’est étonnant de voir combien nous aimons tous la présidence, qui frappe du marteau et nous interrompt, notamment, si je puis faire allusion à M. Angus.
J’ai été ravi d'entendre M. Savage parler de la raison d’être historique de la SRC. D’emblée, je pense que l’identité canadienne, pour bien des raisons que tous comprennent, est dans le meilleur des cas fragile. Avec la mondialisation et la prolifération de toutes ces nouvelles technologies, notre identité se fragilise donc à vue d’oeil et nous nous posons de plus en plus de questions à cet égard, ainsi que sur nos valeurs.
Pour commencer, j’ai un certain nombre de questions très précises à poser. Je pense en fait qu’il y en a pour tout le monde.
Du point de vue d’Industrie Canada, en mentionnant l’infrastructure nécessaire pour permettre au Canada d’être un acteur dans ce domaine, vous avez identifié le problème. Par contre, je n’ai pas entendu de solution. J’aimerais que vous m’en suggériez une.
Je vais d’abord lancer toutes mes questions. Ensuite, je m'arrêterai.
Deuxièmement, M. Bélanger, tout évolue très vite dans ce domaine. En effet, j’ai changé d’avis au moins deux fois pendant les discussions d’aujourd’hui. Il y a 20 ans, je croyais que l’interactivité avec les ordinateurs serait le nouvel aboutissement des médias. Mes enfants ont respectivement 22 ans, 20 ans, et 15 mois. À 22 ans et 20 ans, contrairement au gens de ma génération, ils n’ont eu aucune patience à l’égard de la télévision, car elle n’était pas interactive.
Puis j’ai décidé que l’interactivité n’était pas le problème. C’était plutôt le fait que la télévision était axée sur le consommateur. Vous avez mentionné cet aspect en précisant que la nouvelle technologie permettrait de saisir l’information spontanément, plutôt que de la consommer de façon linéaire.
Puis j’ai encore changé d’avis lorsque quelqu’un a parlé de point de vue du citoyen et de Rodney King. Cela me fait penser au système d'éducation et à tous les étudiants dans les salles de classe, équipés d’appareils-photo et de téléphones, en train de prendre des photos de leurs professeurs. On peut en conclure qu’en bonne partie ces progrès viennent des écoles et des étudiants car ils représentent l'avant-garde.
J’aimerais donc adresser cette question à M. Bélanger. Je voudrais simplement savoir si j’ai raison au sujet de cette nouvelle tendance?
M. Savage, ce que vous aviez à dire sur la fonction publique me fascine, mais je crains que cela ne nous éloigne du sujet. Tout à coup, je commence à penser comment nous pourrions utiliser le diffuseur public pour mobiliser les Canadiens en tant que communauté nationale. Ils ne demandent qu’à s'engager. Je pense qu’au début les gens ont vu les ouvertures potentielles, mais cela signifierait l’émergence d’une dimension tout à fait nouvelle de l’engagement des citoyens, notamment dans l’administration publique. Je pense que ma question risquerait de nous éloigner du sujet.
Finalement, en ce qui concerne le rapport entre la SRC et l'examen du mandat, ainsi que les autres institutions dans le pays qui seraient complémentaires, pourrait-il en être autrement? Ne pourrions-nous pas simplement, dans le cadre de l'examen de son mandat, demander à la SRC de mieux jouer son rôle au sein des institutions préoccupées par cette question, plutôt que d’agir comme si elle était la seule institution concernée?
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Laissez-moi vous parler un peu de vos enfants. Aujourd’hui, contrairement à la génération de vos enfants, les jeunes passent plus de temps devant leurs médias qu’à l’école. Il faut donc en tenir dûment compte. Au moment où ils font leur apprentissage de citoyens, ils passent davantage de temps à naviguer les ondes mondiales qu'à l'école.
Vous vous demandez si la SRC est en mesure de se charger du rôle de rassembleur et de fédérateur. Jusqu’à un certain point, mais je dois me baser sur le bilan du diffuseur public. Jusqu’à maintenant, la SRC s'est comportée davantage comme un portier que comme un fédérateur.
La voix de la technologie nous dit que nous devons adopter une attitude totalement différente et faire preuve d’ouverture, de façon à ce que les 35 millions d’habitants de ce pays — bien que j’imagine mal les masses se transformer en cinéastes — participent au dialogue collectif grâce aux images, comme nous l’avons fait grâce à la presse à imprimer et au journal local, parallèlement au Globe and Mail, au journal La Presse ou aux autres quotidiens.
La SRC pourrait se comporter davantage comme un fédérateur? Le rôle d’un « fédérateur », à mon avis, consiste à mobilier les plus grands esprits du pays pour les faire participer au processus de création, mais aussi à l'aspect technologique des choses. Je n’ai pas de réponse, mais jusqu’à maintenant, compte tenu du bilan de la SRC, ce n'est pas le cas.
En réalité, nous sommes en train de vivre une guerre mondiale. Lorsqu'on observe ce qui se passe actuellement, par exemple Fox acquérant MySpace, on doit se demander quelle est la place du Canada dans tout ça. Devrons-nous habiter l’espace des autres pour exister? Sommes-nous plutôt en train de transformer ce pays en consommateur qui, de temps en temps, tôt ou tard, verra ses productions diffusées par d'autres médias?
La question qui a été posée au sujet du CRTC recoupe le point que vous avez soulevé : le Canada peut-il vraiment faire quelque chose dans ce contexte? Je pense qu’il sera difficile de réglementer les ondes, mais vous pourriez à tout le moins unir vos efforts pour mettre au point des outils de recherche qui mettront en valeur ce qui est canadien dans cet environnement mondial. Quelle place occupe vraiment le contenu canadien dans YouTube, MySpace et les autres forums dont nous avons parlé? Si nous disposions de tels outils, nous pourrions le découvrir.
Je rentre tout juste de France, où je participais à un événement connu sous le nom de marché MipTV, où le monde entier se réunit pour parler des nouveaux produits. Dans ce bazar, la BBC a introduit Content 360, un concept où les acteurs de la jeune génération se réunissent et font la promotion de leurs produits.
Au moins, la BBC est à l'écoute du monde, car c’est le monde entier qui fait sa promotion, y compris les Canadiens. Plutôt que de rester en retrait, la BBC est attentive au pouls de la production mondiale de contenu médiatique. Elle y parvient en se positionnant sur la scène mondiale.
Cela me ramène au fait qu’il est essentiel d'amalgamer tous ces éléments pour trouver une réponse, à condition bien sûr qu’il puisse vraiment y avoir une réponse simple à toutes les questions.