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Merci beaucoup, monsieur le président.
Monsieur le président, j’ai souvent été présent à ces réunions, mais c’est la première fois que je suis de ce côté-ci de la table. J’espère que certains de mes manquements passés avec quelques témoins ne viendront pas me hanter aujourd’hui.
Cela étant dit et fait, je souhaiterais ardemment remercier le comité d’avoir permis à nos groupes d’être présents aujourd’hui pour prendre la parole et pour demander son aide d’urgence sur des questions qui touchent l’industrie de la pêche dans toutes les régions côtières du Canada.
J’assume deux rôles aujourd’hui. Le premier est celui de directeur exécutif de la Canadian Sablefish Association, et je me pencherai sur ce rôle dans un moment. Le deuxième est celui de coordonnateur du Canadian Fisheries Working Group.
Le Canadian Fisheries Working Group est un groupe spécial d’organisations de pêcheurs de partout au Canada — de la côte Est et de la côte ouest — qui se sont rassemblées pour se pencher ensemble sur les répercussions de l’absence de politiques fédérales suite à la décision Larocque du 23 juin dernier.
M’accompagnent aujourd’hui, pour représenter certains de ces intérêts, Robert Haché de l’Association des crabiers acadiens (Acadian Crab Association) ainsi que Phil Eidsvik du Salmon Gillnetters, secteur E, et Geoff Gould de l’Area A Crab Association en Colombie-Britannique. Je suis aussi très heureux d’avoir à mes côtés une personne avec qui j’ai déjà collaboré étroitement et qui fera sa propre présentation, Christina Burridge. Elle en dira plus sur son groupe dans quelques minutes.
La raison qui nous amène ici, monsieur le président et membres du comité, est l’événement d’une grande importance survenu le 23 juin dernier. Tout au long de l’année, Pêches et Océans Canada (MPO) a cherché à augmenter ses budgets en utilisant la pêche comme source de financement, c’est-à-dire en se servant des revenus des quotas de pêche pour payer des activités ministérielles. Cette pratique a toujours été très contestée, et je faisais en fait partie des membres du gouvernement qui ont probablement lancé cette pratique il y a de nombreuses années.
Nous devions effectuer des coupures budgétaires et cherchions à éliminer les déficits. Nous avons donc commencé à diminuer les budgets dans des secteurs comme la gestion des pêches et la recherche scientifique. Nous cherchions un moyen de financer ces activités nécessaires sans toucher directement au budget de base. Nous nous sommes donc tournés vers le produit de la pêche. Bien qu’au début un faible volume de pêche servait à financer un petit nombre de projets de recherche qui ne pouvaient être financés autrement, au fil des ans, le volume a augmenté graduellement pour atteindre des sommes importantes dans la plupart des pêcheries partout au Canada.
En effet, le ministère est devenu assez expert pour transformer le poisson en dollars, soulevant un certain nombre de préoccupations. Je ne crois pas qu’il soit nécessaire d’examiner cette question aujourd’hui. Cependant, une de ces préoccupations consiste à déterminer si cette pratique est conforme à la Loi sur la gestion des finances publiques ou si elle fait l’objet d’une reddition de comptes appropriée au Parlement.Toutefois, le point le plus important pour nous aujourd’hui est la décision Larocque qui a stipulé que l’utilisation des quotas de pêche pour financer des dépenses ministérielles était hors des compétences du ministre. La question qui nous préoccupe est de savoir si le ministre a poursuivi cette pratique après la décision de la cour.
Plus important encore, après la décision du 23 juin qui indiquait clairement que le ministère ne pouvait plus utiliser les quotas de pêche pour financer des activités comme les activités scientifiques et la gestion, le ministère s’est muré dans un silence étonnant. Tout ce que nous entendions du ministère, c’est que les choses fonctionnaient de manière habituelle. Nous savions que la décision de la cour rendait illégale à partir de cette date toute utilisation des quotas de pêche pour financer les activités ministérielles. Nous savions aussi qu’il était illégal de forcer ou d’inciter les entreprises de pêche à vendre leur poisson pour augmenter les ressources du gouvernement.
Alors, nos organisations de pêche ont cherché à connaître les orientations politiques du gouvernement. Nous avons demandé au ministère : « Que faisons-nous? Nous avons besoin de résultats d’évaluation. Nous avons besoin d’évaluations de populations afin d’établir un rendement économique durable pour nos pêches. Qu’allez-vous faire? »
Depuis juin, le ministère a gardé le silence. Le ministère nous a dit que tout suivait son cours habituel. Nous avons des ententes pour des projets conjoints qui sont très importants pour la cogestion de la pêche. Dans certains cas — comme pour mon secteur qui est la morue charbonnière — les ententes ont pris fin. J’ai rencontré les représentants du ministère et leur ai demandé : « Que faisons-nous? Nous ne savons pas qui doit payer quoi. Allez-vous financer les activités scientifiques? ». Et le ministère a encore répondu : « Nous n’avons pas de politique. » Cette politique se profile maintenant, et c’est une politique qui est synonyme de chaos, de difficultés et d’agitation pour ceux d’entre nous qui devons composer avec elle.
Ce que nous savons du gouvernement, en l’occurrence du ministère, c’est qu’une évaluation a été effectuée et que les revenus des quotas qui ont été utilisés pour financer des activités comme la recherche scientifique et certaines activités de gestion au ministère seraient d’environ 28 ou 30 millions de dollars par année. Mon seul secteur a versé deux millions de dollars l’an dernier, dont un million provenant de nos quotas a été alloué à la recherche scientifique — un secteur qui, à notre avis, est la responsabilité du gouvernement du Canada.
Nous savons que le gouvernement, en l’occurrence le ministère, affirme qu’il s’agit d’environ 30 millions de dollars, mais l’allocation budgétaire, soit le montant qui figure au budget, est de moins de onze millions de dollars. Cela signifie que seulement un tiers des activités scientifiques qui étaient effectuées à un niveau de base l’an dernier, avant la décision Larocque, pourra être effectué sur les crédits du Parlement. Cela signifie également que deux tiers des activités scientifiques fondamentales jadis jugées nécessaires par le ministère — le minimum indispensable à une gestion économique durable des pêches — devront être financés.
Cela laisse un énorme trou et signifie que le ministère devra choisir qui perd et qui gagne, sans aucun cadre pour définir l’allocation de ces ressources très amoindries.
Qui le fera? Celui qui a le plus beau poisson? Celui qui a les meilleures relations avec le représentant du MPO? Le fera-t-on sur la base du besoin? Ou le fera-t-on avec un certain degré d’équité, de parité et de transparence?
Nous avons posé ces questions. On nous a répondu par un silence étonnant.
Nous sommes ici aujourd’hui, et nous sommes vraiment heureux de cette occasion qui nous est donnée, pour vous parler de la valeur des activités scientifiques et de l’importance de voir le Parlement allouer un montant approprié afin que le gouvernement assume sa responsabilité juridique et fiduciaire de gestion de cette ressource publique. Nous faisons appel à vous pour que vous retourniez voir vos collègues du Parlement, du ministère et du Conseil du Trésor et que vous tentiez de convaincre le Cabinet d’accorder au Parlement les crédits nécessaires pour couvrir la valeur des quotas qui étaient utilisés dans les années précédentes pour financer des activités de recherche scientifique et de gestion.
Selon nous, l’absence de crédits ne peut mener qu’au chaos. Je ne sais pas encore où. Je ne sais pas pour quelle flotte. Je ne sais pas si ce sera sur la côte est ou sur la côte ouest. Mais je sais que quelqu’un, quelque part, en souffrira.
Le MPO nous dit qu’il ne peut le faire maintenant et que, si nous souhaitons le faire, nous pouvons y aller. La pêche à la morue charbonnière est un exemple. Nous effectuons une évaluation annuelle. Cette évaluation annuelle nous aide à évaluer la santé de la population de morues et nous donne notre total autorisé de captures (TAC). Le ministère nous revient et nous dit : « Nous ne pouvons plus financer ces évaluations à l’aide des quotas et, à propos, nous croyons vraiment qu’il suffit de les effectuer tous les trois ans et, à propos, si nous ne faisons ces évaluations qu’aux trois ans, vous n’aurez qu’une évaluation très approximative de la taille de la biomasse et, à propos, cela signifie un TAC plus bas. »
Un TAC plus bas signifie moins d’argent pour les pêcheurs, les collectivités vivant de la pêche, les installations de transformation du poisson et les autres personnes dont le travail est lié à la pêche, mais aussi des dizaines de millions de dollars de manque à gagner en recettes fiscales pour le gouvernement du Canada. Nous devons nous pencher sur ce problème à tous les niveaux. Si vous êtes réticents à l’idée de dépenser, pensez à tous les avantages qu’une industrie de la pêche dynamique sur toutes les côtes entraînera pour le gouvernement et les citoyens du Canada.
Nous sommes ici aujourd’hui pour raconter nos histoires. Nous sommes ici aujourd’hui pour vous dire que nous avons besoin du soutien de ce comité pour obtenir tous les crédits nécessaires du Parlement. Ces crédits devront probablement être de 20 à 30 millions de dollars pour couvrir les frais cette année, en attendant que le ministère s’attaque à la définition d’une politique et d’un processus visant toutes les pêches de toutes les côtes du Canada, le but étant de déterminer le volume approprié de recherche scientifique et son financement, et d’élaborer une structure équitable, transparente et paritaire.
Voilà pourquoi nous sommes ici, et je tiens à vous remercier de nous avoir permis d’y être.
Monsieur le président, nous partagerons notre temps à cette table avec quelques autres personnes.
Je souhaite maintenant passer la parole à Christina Burridge afin qu’elle puisse présenter son groupe et faire ses commentaires.
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Bonjour monsieur Blais et bonjour à vous, membres du comité. Je vous remercie beaucoup de nous avoir invités ici aujourd’hui.
Je suis ici au nom de la B.C. Seafood Alliance. Je suis accompagnée de Mike Featherstone, vice-président de l’Alliance. Il est également président de la Pacific Urchin Harvesters Association et copropriétaire d’Ocean Master Foods, une usine de transformation de la vallée du bas Fraser.
Je suis également accompagnée de Chris Cue, directeur principal des opérations de pêche de la société Canadian Fishing Company, la plus vaste société de poissons et de fruits de mer de la Colombie-Britannique et un important détenteur de permis. Il est le représentant élu de la pêche à la senne pour la pêche au saumon des secteurs A et B ainsi que pour le Comité consultatif de l’industrie du hareng. Il participe également à la pêche au poisson de fond et au flétan.
Ensemble, nous représentons la plupart des entreprises de pêche de la côte Ouest. J’espère que vous donnerez à mes collègues l’occasion de s’adresser à vous brièvement sur les enjeux de leurs pêches.
La B.C. Seafood Alliance est une organisation-cadre. Nos 17 membres représentent 90 p. 100 des poissons et des fruits de mer pêchés en Colombie-Britannique. Cela représente des ventes annuelles d’environ 750 millions de dollars.
Nous croyons que la durabilité et la rentabilité devraient aller de pair. Nous prônons une gestion efficace et efficiente des pêches qui permette à nos produits d’être concurrentiels tant sur les marchés locaux qu’internationaux. Je dois signaler que nous vivons à une époque où un saumon kéta pêché dans le nord du Japon, fileté en Chine et expédié à Vancouver se vend moins cher qu’un filet d’un saumon pêché dans nos eaux.
Pour demeurer concurrentielles dans ce contexte, les activités de pêche par les méthodes traditionnelles de capture, incertaines par nature, doivent aller de pair avec un accès aux ressources qui soit stable et durable, et avec un régime réglementaire prévisible. Sans cela, les pêcheurs et les transformateurs ne pourront investir pour satisfaire les besoins du marché et seront incapables d’attirer du sang neuf dans l’industrie de la pêche. À notre avis, cette stabilité doit reposer sur des recherches scientifiques solides parce qu’elles sont essentielles à notre santé future, à notre stabilité et à la durabilité économique de l’industrie.
En janvier 2007, nous avons écrit à Pêches et Océans pour exprimer notre désarroi devant le manque d’information provenant du ministère sur ce qu’il avait l’intention de faire pour composer avec les répercussions des décisions rendues dans les affaires Larocque et APPFA, tant à court qu’à long terme. Nous avons rappelé au ministre que nous avions eu une conférence sur la cogestion en 2002 et qu’une des recommandations, d’ailleurs approuvée par le MPO, était qu’il devait apporter des éclaircissements sur les politiques et les aspects juridiques des mécanismes de financement de la cogestion, et fournir des lignes directrices claires aux gestionnaires sur le terrain concernant leur utilisation.
En raison de pratiques arbitraires sur la côte est, nous avons actuellement sur la côte Ouest une situation où la politique officielle d’encouragement à la cogestion des pêches entre des organisations représentant les pêcheurs commerciaux et le MPO a été récusée. Elle comprenait diverses mesures, notamment l’utilisation des recettes de certains quotas de pêche pour financer des activités « supplémentaires » de recherche et de gestion.
Je crois que vous devez comprendre que ces quotas ne sont pas des poissons gratuits. Les pêcheurs avaient consenti à ce que ces quotas soient prélevés sur les TAC commerciaux. Nous n’irons pas jusqu’à dire que la politique était parfaite, nous avons d’ailleurs formulé ces commentaires en 2002, mais elle était fondée sur une approche coopérative et elle a fonctionné plutôt bien au cours des dix dernières années.
Dans notre lettre de janvier, nous avons demandé au ministre de donner au ministère la consigne de couvrir les frais nécessaires au fonctionnement normal des pêches en 2007, en attendant que le MPO élabore, de concert avec l’industrie, une nouvelle approche qui respecterait la loi, serait équitable pour les utilisateurs de la ressource, serait réalisable sur le long terme, et entraînerait les avantages que les Canadiens méritent et auxquels ils s’attendent.
Cela ne s’est pas concrétisé. À la place, nous n’avons assisté cette année qu’à une série de décisions de dernière minute, caractérisées par un manque total de cohérence, d’équité et de durabilité. Ce sont des décisions qui ont poussé les entreprises de pêche à se dresser les unes contre les autres et qui ont détérioré les relations de travail de tous avec le ministère. Il ne pouvait en être autrement. Pour l’année 2006, la région du Pacifique évalue les dépenses liées à l’utilisation des ressources halieutiques à au moins dix millions de dollars, peut-être même jusqu’à 15 millions de dollars. Cette année, seulement 3,5 millions de dollars peuvent être alloués à ces activités.
Les décisions de la Cour ont bouleversé l’industrie sur la côte ouest. Le MPO a été incapable de nous fournir quelque indication que ce soit sur ce qu’il entend faire pour gérer la situation ou sur les mécanismes auxquels nous raccrocher. On nous a dit que les nouvelles orientations politiques ne seraient pas définies avant juillet. D’ici là, la plupart de nos pêches seront terminées ou bien entamées. Au vu de ce décalage, il nous est difficile de croire que cette politique puisse se révéler cohérente et équitable.
En fait, nous sommes du même avis que le MPO : le ministère n’a pas les outils et les ressources nécessaires pour gérer les pêches efficacement en ce XXIe siècle. Je crois que nous sommes en désaccord avec le MPO lorsqu’il soutient que le projet de loi est une façon acceptable de lui fournir ces outils et ressources, mais c’est là une tout autre question que celle qui nous amène ici.
Je crois qu’il est important de comprendre que le financement de la recherche et des activités scientifiques était déjà insuffisant avant les décisions rendues par la cour, et la demande ne va cesser d’augmenter. Il y a la Loi sur les espèces en péril, la tendance vers une gestion des pêches axée sur les écosystèmes, et enfin, un marché qui réclame la vérification par une tierce partie de la gestion durable. Ces initiatives nécessiteront d’importantes ressources supplémentaires.
J’aimerais que l’on s’arrête un bref instant sur quatre activités de pêche de la côte ouest. Je commencerai par celle du hareng rogué. Par le passé, cette pêche a permis de financer les activités scientifiques et la recherche à hauteur de 4 millions de dollars par an grâce à des remises de prises volontaires définies dans des ententes. Ces fonds ont servi essentiellement à financer un programme de test de qualité de la rogue et une évaluation des stocks. À la dernière minute — notre pêche a débuté en mars — le MPO a libéré 900 000 $ pour le financement de ces deux activités, bien que toute cette somme n’ait pas été directement injectée dans les deux activités précédemment financées.
Nous avons besoin du programme de test de qualité de la rogue, car c’est la seule manière de maintenir notre réputation d’excellent fournisseur de rogue au Japon, qui est notre seul marché. Cette année, le programme de test de la rogue a été tout juste acceptable et l’évaluation des stocks a été, quant à elle, totalement insuffisante. On nous dit que pour l’année prochaine, le MPO ne sera pas en mesure de financer le programme de test de la rogue et que l’évaluation des stocks ne sera financée qu’en partie.
Sans ces deux activités, l’investissement de plusieurs millions de dollars, financé conjointement par le Programme international du Canada pour l'agriculture et l'alimentation (PICAA) d’Agriculture et Agroalimentaire Canada et par l’industrie pour repositionner la rogue canadienne sur un marché en évolution permanente, sera compromis. Au cours des dernières années, la pêche au hareng a rapporté entre 50 et 100 millions de dollars, c’est donc le sort d’une pêche très importante qui se joue ici. Nous comptons 1 550 détenteurs de permis, ce qui rend inapplicable, juridiquement et en pratique, la suggestion du MPO de financer cet investissement par le biais de contributions volontaires.
Comme le président me dit que nous manquons de temps, je mentionnerai très rapidement l’aiguillat pêché à la ligne. Cette pêche a perdu son marché, son unique marché, dans l’Union européenne à cause des tentatives des groupes européens voués à la protection des espèces de protéger l’aiguillat européen. La pratique de cette pêche requiert la certification du Marine Stewardship Council, qui demande en retour une évaluation des stocks. Pour cela, il faut compter 375 000 $ pour la première année — une somme dont ne dispose pas le MPO — et 70 000 $ par la suite.
Je crois que Geoff Gould va s’exprimer plus tard sur le crabe du secteur A. Là encore, nous sommes face à une situation où la pêche ne peut fonctionner à plein rendement en raison de la perte des financements pour l’échantillonnage du crabe à carapace molle.
Enfin, je voudrais vous dire quelques mots sur le saumon. Nous pratiquons la pêche expérimentale depuis des décennies. Pendant les 20 dernières années et plus, elle a été financée par les revenus du poisson. La décision Larocque interdit cette pratique. Nous avons déjà constaté une diminution des pêches et des captures expérimentales l’an dernier. Nous ne savons pas comment cela va fonctionner cette année. À titre d’exemple, nous avons réuni l’année dernière 500 000 $ grâce aux revenus du poisson. Cette somme a servi à l’amélioration et à la protection du saumon rouge de Cultus Lake. Ce travail est essentiel pour augmenter le niveau de capture de saumon rouge de montaison tardive. Cet argent est bien au chaud dans une banque et ne peut être utilisé.
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Je crois que l’existence du projet de loi est due au fait que le ministère a manqué d’orientations stratégiques pour corriger la décision Larocque. La Loi sur les pêches, je pense, n’existe pas parce qu’elle a été bien pensée, ni parce qu’elle a fait l’objet d’un vaste processus consultatif. Il n’y a eu aucune consultation, rien, zéro. Il n’y a eu aucune consultation. Ils l’ont sortie de leur tiroir. Le gouvernement précédent avait un projet de loi qui n’a pas abouti et ils ont dit que nous devions donner au ministre le pouvoir de prendre du poisson dans les ressources publiques et de l’utiliser sans que des crédits soient votés par le Parlement pour financer le tout. C’est la seule raison pour laquelle il me semble qu’un nouveau gouvernement irait de l’avant sans consulter personne.
Le projet de loi fournit au gouvernement un mécanisme pour mener une action qui, au mieux, est sujette à caution et pour laquelle, en vertu de la décision Larocque, le ministre n’a pas autorité. À mes yeux, nous ne devrions pas donner ce pouvoir à l’État si facilement. Je pense que vous devez être très prudent quand vous touchez au droit public sur le poisson. Cette ressource n’appartient pas à l’État. Il s’agit d’une ressource publique et c’est très différent. Ce projet de loi essaie d’aborder tout un tas d’autres sujets mais sa véritable raison d’être, c’est de faire cela. Et j’y suis fondamentalement opposé, tout comme la plupart des pêcheurs.
Le problème, c’est que par le biais de ce vil procédé, ils n’ont pas seulement financé les activités scientifiques et la gestion, ils ont aussi financé des associations. Alors on se retrouve avec des associations de pêcheurs qui, maintenant, n’ont aucun mécanisme pour mener leurs activités. Au sein du ministère, certains multiplient les efforts pour obtenir des appuis en faveur du projet de loi . Ils affirment que tous les problèmes seront réglés s’il est adopté puisqu’il est possible de l’amender pour corriger ses défauts. En tant qu’ancien président de ce comité, je pense que cela est impossible, mais ils disent que si vous le faites, il y aura un mécanisme de financement pour votre association. Je trouve que c’est là un argument particulièrement faible pour soutenir un mauvais projet de loi.
Le point fondamental, c’est qu’en l’absence d’une stratégie dictée par le gouvernement et en l’absence de législation acceptable, la très fragile industrie de la pêche fait face à un manque de financement de probablement 30 millions de dollars. Les entreprises de pêche peu solides n’y survivront pas ou, si elles parviennent à survivre, elles seront pénalisées sur le marché car elles ne pourront pas prouver, comme Christina l’a dit, qu’elles appliquent des méthodes de pêche durables.
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Monsieur Stoffer, je répondrai à cette question si vous le permettez.
Je fais partie de la Gillnetters Association, zone E, une association de pêche au saumon sur le fleuve Fraser. Nous avons un problème avec un stock qui a failli être protégé aux termes de la Loi sur les espèces en péril.
J’ai quelques photos. Il s’agit du lac où les poissons nagent et se reproduisent. C’est un tout petit lac très peuplé, comme vous le constaterez sur les photos, avec des bateaux, des marinas, des terrains de golf et des parcs aquatiques.
Les bonnes années, environ 5 000 poissons entrent dans le lac, parmi un stock de 10 à 15 millions de saumons rouges. Contrairement au petit stock, ces poissons-ci sont en bonne santé. Il faut donc reconstituer le stock malsain à l’aide d’écloseries et de moyens similaires.
Des responsables gouvernementaux sont revenus nous voir en mars dernier et nous ont dit : « Écoutez, si vous ne trouvez pas 500 000 $, vous ne pourrez pas pêcher dans le grand stock à un niveau approprié. » L’année dernière, cette pêche représentait l’équivalent de 100 à 150 millions de dollars pour notre flotte — et je parle de toute la flotte réservée à la pêche au saumon. Par conséquent, nous, pêcheurs, avons convenu entre nous que nous n’avions pas vraiment le choix entre 100 millions de dollars d’un côté et trouver 500 000 $ d’un autre. Le gouvernement a donc accepté de nous délivrer ce qu’il a appelé des permis scientifiques, destinés à la recherche scientifique.
En août, deux mois jour pour jour après la décision Larocque, un groupe de nos senneurs est parti à la pêche et a capturé l’équivalent d’un million de dollars de saumons rouges, et s’est rendu aux usines de transformation qui ont payé les pêcheurs pour leur prise. Ces usines ont ensuite versé un montant à une association qui a transféré l’argent à une autre association qui devait, à son tour, transmettre l’argent au MPO, sans passer par le Parlement pour le processus d’affectation des crédits, afin de financer l’écloserie et les autres moyens destinés à reconstituer cette prise en particulier.
À présent, on nous dit qu’à moins que nous ne trouvions un moyen de débloquer cet argent — Il se passe que notre association savait pertinemment que c’était illégal et a soulevé la question: « Nos administrateurs sont-ils impliqués dans cette affaire ou sont-ils complices d’un acte qui pourrait leur coûter une poursuite en justice, ou une accusation criminelle? » Nous ne savions pas. Nous avons donc écrit au MPO pour lui demander si l’acte était légal. Il nous a répondu que les fonds étaient gelés. Le stock qui devrait être reconstitué maintenant court le risque d’être relâché dans la nature où nous savons que près de 90 p. 100 des poissons mourront. Et dans quatre ans, nous aurons une industrie de pêche de 100 ou 200 millions de dollars avec très peu de prises — peut-être l’équivalent de 10 millions de dollars.
Encore une fois, le MPO nous dit : « Écoutez, trouvez un moyen de nous procurer de l’argent ». Tout cela est très déconcertant. Mais il est clair que le ministère souhaitait que nous réglions la facture si nous voulions pêcher. C’était bien clair.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
[Traduction]
Je souhaite la bienvenue à nos témoins.
La discussion d’aujourd’hui est très intéressante. Nous parlons d’activités scientifiques, de conservation et de durabilité. Je ne pense pas que quelqu’un présent à cette table puisse remettre en question l’importance des activités scientifiques pour faire face à la situation des pêches aujourd’hui, en assurer la durabilité et maintenir des niveaux de conservation appropriés.
Christina Burridge nous a expliqué qu’il s’agit d’un marché très compétitif. Nous avons des compétiteurs de l’autre côté de la planète qui peuvent produire et fournir des stocks sur notre marché pour une fraction du prix d’ici.
La dynamique du marché est aussi très variable . L’histoire des pêches des dernières années montre que d’importants bouleversements ont secoué l’industrie. Nous en sommes tous très conscients.
Pour ce qui est de la question des activités scientifiques, ces dernières présentent toutes sortes de branches différentes. Le MPO investit plus d’argent qu’avant dans ce type d’activité dans l’ensemble.
Afin d’éclairer le comité, je me demandais si vous pouviez nous aider. Nous parlons de divers types d’activités scientifiques: la pêche indicatrice, la pêche à l’essai, l’évaluation d’un stock et les études scientifiques. Quelqu’un pourrait-il nous expliquer ces types d’activités rapidement?
Si quelqu’un d’entre vous a déjà participé à la pêche à l’essai, j’apprécierais vos commentaires, si vous en avez.
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Je peux vous parler un peu des activités de pêche au hareng auxquelles nous venons de participer. Nous avons un programme complet de pêche au hareng. Par le passé, nous sortions tout le mois de mars et avions des systèmes d’affrètement, où nous testions le poisson, le conservions pour le rapporter à la station biologique qui évaluait le stock.
Cette année, au début du mois de février, nous avons enfin reçu ce que j’appelle un don d’environ 300 000 $ pour procéder à une version condensée de l’étude. On a appelé ça le programme de vérification de la qualité du hareng rogué, mais au lieu de le faire pendant un mois complet, nous n’avons fait que 12 ou 14 jours d’étude. Ce n’était pas suffisant pour dresser le portrait réel de ce qui se trouvait dans l’eau ce mois-là. C’était très condensé.
Christina a parlé de 900 000 $. Une bonne partie de ce montant est allée au personnel du MPO, qui a en quelques sortes pris la relève de nos activités de conservation du hareng, pour faire les études en plongée qui n’étaient faites que sporadiquement. Il n’a pas accompli la même quantité de travail scientifique que nous.
Pour ce qui est du hareng l’année prochaine, le total autorisé de captures (TAC) sera moins important que cette année, parce que nous n’avons pas répondu aux besoins en fait d’activités scientifiques en raison de l’approbation tardive des coûts de notre programme d’affrètement.
En ce qui a trait au saumon, nous avons des programmes d’affrètement selon lesquels on commence dans l’océan pour revenir jusqu’aux côtes. On obtient ainsi des informations régulières sur l’arrivée du poisson avant qu’il atteigne les lieux de frai. Sans cela, nous n’aurions aucun moyen de savoir combien de poissons viennent et quels sont les taux de détournement ou de préparer notre plan d’affaires sur la manière de pêcher le poisson.
Sans ces systèmes, on est en difficulté jusqu’à ce que le poisson arrive aux lieux de frai. Ce n’est pas l’idéal s’il y a trop de poissons à ce moment-là. Nous avons besoin de ces activités scientifiques axées sur l’avenir.
Depuis environ 2000, nous avons un programme d’affrètement pour les carapaces molles. Nous testons les crabes pour savoir quand ils muent. Les crabes s’accouplent au moment de la mue. Si nous pêchons un crabe en période de mue, il est très fragile. Nous le tuons. C’est simplement ridicule de pêcher les crabes en mue, car ils ne sont pas commercialisables et il est illégal de garder en captivité des crabes à carapace molle.
Nous avons commencé ces affrètements vers 2000. Avant cela, la pêche était ouverte 365 jours par année, et nous nuisions probablement à la ressource. Les entreprises de pêche ont instauré des dates d’interdiction ultra-conservatrices du 1er mars au 1er août pour protéger les crabes en mue. Nous avons commencé les affrètements vers la même année. Nous testons la dureté des carapaces de crabes et nous recueillons d’autres informations utiles sur la pêche, comme les codes des blessures, le sexe et la taille des crabes, afin de mieux évaluer les stocks, etc. Grâce à ces affrètements, nous avons obtenu 67 jours de pêche supplémentaires en moyenne par saison.
L’ouverture de la saison, qui se produit avant le 1er août, et parfois dès juin ou juillet, est la période où on pêche le plus de crabes. Nous capturons probablement 80 p. 100 de l’ensemble de la récolte de crabes pendant ces six premières semaines. Les crabes sortent des profondeurs et migrent vers l’eau peu profonde pour muer et s’accoupler. S’ils sont prêts à repartir en juin, comme on le prévoit cette année, et qu’on attend jusqu’au 1er août pour le pêcher, on risque de manquer complètement notre coup. Cette activité scientifique ne nous donne simplement pas de jours de pêche supplémentaires, elle nous permet de pêcher le crabe au moment où il est capturable et où il se présente dans le meilleur état possible du point de vue du marché, c’est-à-dire qu’il est propre et brillant, sans anatifes. Cela contribue beaucoup à sa commercialisation.
Cette année, nous avons demandé un financement au ministère qui nous a répondu qu’il n’en avait pas, c’est vous dire le chaos dans lequel nous nous trouvons. Nous étions ouverts en janvier et en février. Trois des quatre pêcheurs qui avaient déjà participé à ce test ont offert leur temps, leur bateau et les salaires de leur équipage pour procéder aux tests. Nous avons recueilli les données minimales que le représentant du ministère croyait nécessaire pour avoir des données cette année. Maintenant, la pêche est interdite. Nous devons faire les tests en mai, en juin et en juillet si nous voulons ouvrir la pêche avant le 1er août. Nos pêcheurs devront payer. Ils ne pourront pas pêcher le crabe autrement, parce que la pêche est interdite. Ils devront utiliser leur équipement et leur bateau, payer leur équipage et leurs appâts, en plus de payer leur carburant pour faire les tests. Sinon, ils n’auront pas de saison. Ces bateaux coûtent probablement 2 500 $ par jour environ. Les pêcheurs vont payer 100 000 $ ou plus de leur poche pour avoir une saison de pêche.
D’après les données recueillies jusqu’à maintenant, nous allons tout laisser passer si nous n’ouvrons pas la pêche avant le 1er août. Les crabes seront partis. Ils partent après avoir mariné dans l’eau peu profonde. Nous ne savons pas où ils vont, car nous n’avons pas ces données. Nous ne pouvons plus les capturer une fois qu’ils quittent l’eau peu profonde. Si nous ne faisons pas ces tests cette année, nous risquons de perdre la plus grande partie de notre pêche. À Prince Rupert, la valeur des crabes au débarquement est d’environ 22 millions de dollars par année. Nous risquons de manquer le bateau.
Si les affrètements étaient financés correctement par le MPO, le coût d’un affrètement complet s’élèverait à environ 300 000 $. C’est là un petit investissement pour beaucoup en retour.
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Monsieur Asselin, j’aborde cette question à partir de nombreux points de vue. J’ai passé dix ans ici, alors je comprends, ou du moins, j’espère que je comprends, l’intérêt public et le rôle du Parlement dans l’allocation des fonds pour soutenir les grands objectifs publics et honorer ses responsabilités constitutionnelles.
Je travaille auprès des entreprises de pêche de la Colombie-Britannique. C’est étonnant à quel point une industrie qui a contribué à bâtir le Canada d’un océan à l’autre reçoit peu d’attention. Je ne parle pas seulement de ce gouvernement, mais des gouvernements successifs et même du gouvernement dont je faisais partie. Il faut croire que le poisson n’est pas très séduisant.
Pour l’homme ou la femme ou la famille ou la collectivité côtière qui s’appuie sur cette ressource pour survivre et pour son avenir, c’est plutôt triste de voir que les gouvernements n’y accordent pas une plus grande importance. Le gouvernement actuel et les gouvernements précédents ont enregistré des milliards de dollars d’excédent. Ils les réinvestissent. J’ai entendu parler d’un programme d’aide agricole il y a quelques jours de plus d’un milliard de dollars — il s’agit d’un bon investissement pour les collectivités agricoles, et nécessaire en plus.
Nous parlons ici de petits investissements pour favoriser la durabilité d’une ressource qui pourra, année après année, générer ou augmenter les revenus des collectivités pour les famille qui y habitent et les gouvernements.
C’est très difficile d’obtenir de l’attention. J’ai occupé la place de monsieur le président et je sais à quel point ce comité a du mal à attirer l’attention des gouvernements. Mais il doit y parvenir. Comme l’a dit Christina, nous sommes scrutés à la loupe sur notre manière de gérer nos ressources. Nous pouvons perdre un marché en un clin d’œil et, une fois qu’il disparaît, bonne chance! Où trouverez-vous l’argent pour récupérer ce marché?
Nous nous sommes durement battus dans l’ensemble pour montrer que nous sommes des producteurs durables. Nous l’avons fait même si, chaque année, le gouvernement fait des coupures dans ce qui, à mon avis, relève de sa responsabilité légale de gérer les ressources publiques. Et l’industrie, parce qu’elle n’est pas très douée pour les échanges avec le gouvernement, ne cesse de dire que ce n’est pas grave s’il ne s’agit que de quelques dollars de plus.
Le puits s’est asséché dans quelques-uns de ces secteurs. Trente millions de dollars, ce n’est pas une affectation très importante pour le gouvernement du Canada pour une ressource durable et renouvelable. Je n’arrive pas à croire qu’on aura mis tant de temps à attirer l’attention sur cette question.
Pour répondre à votre question, je suis attristé du fait qu’il faille tant d’efforts pour obtenir si peu de ressources, même avec les ressources qui proviennent de nos entreprises de pêche, pour aider ces collectivités, ces familles et le Canada.
Il s’agit d’une petite demande, mais elle est très nécessaire.
Vous avez parlé d’une solution coopérative pour y arriver. C’est assez simple: le ministre doit aller voir le Conseil du Trésor ou le ministre des Finances et demander l’argent dont il a besoin pour faire le travail que le gouvernement est légalement tenu de faire. Ce n’est pas si difficile. Il cogne à la porte et dit : « J’ai besoin d’argent pour les activités scientifiques, pour faire des études, pour sortir cette ressource de l’eau et la commercialiser afin que les trois côtes du pays et nos pêcheries intérieures puissent survivre. » C’est n’est pas plus difficile que ça.
Il doit bien y avoir une raison pour expliquer qu’il n’y parvient pas. Il est peut-être difficile de se départir de ses vieilles habitudes, si c’est facile de demander aux pêcheurs d’offrir leur temps et leur argent pour faire quelque chose que le MPO est censé faire, ou encore, si, après la décision Larocque, on continue de faire la même chose parce qu’on pense que personne ne sera pris en flagrant délit. Cela montre que ce ministère, à mon avis — et je demande une enquête sur les pratiques et les politiques de ce ministère année après année — a pris une ressource magnifique sur les deux côtes et l’a complètement détruite.
En 1992, l’industrie morutière a connu un réajustement de 4 milliards de dollars au Canada et personne n’a été tenu responsable de cela au MPO. Personne. C’est comme dire aux forestiers de couper un paquet d’arbres pour payer la recherche forestière, ou dire à d’autres personnes d’autres industries —comme les députés — de venir travailler trois semaines, sans rémunération. « Vous n’êtes pas payés, vous offrez votre temps bénévolement. » Je me demande si nous aimerions ça.
La solution n’était-elle pas toute simple? Le ministre ne devrait-il pas s’adresser au Conseil du Trésor ou au ministre des Finances et insister sur l’importance d’avoir cet argent pour couvrir les frais des études scientifiques qui doivent être faites pour aider nos industries?
Ce n’est pas si difficile. Quand j’entends des réponses comme: « Nous n’avons pas l’argent maintenant, mais nous avons une idée pour collaborer avec vous — »! Je pense, Greg vous en avez parlé, qu’ils veulent collaborer avec vous et quand vous leur demandez « Que voulez-vous dire? », ils répondent qu’ils vous en reparleront. C’est un peu comme un clin d’œil et une tape dans le dos, ne pensez-vous pas?
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Monsieur Cuzner, vraiment on fait ce que l’on veut!
Pêches et Océans a donné une séance d’information au comité, je crois en janvier, à titre de suivi à un exposé qu’il a donné en décembre. Il a clairement indiqué — je ne vais pas chercher dans mes documents ici, mais je l’ai — que, dès que le jugement Larocque a été rendu, il a arrêté de faire ce que la cour lui a dit qu’il n’était pas autorisé à faire.
Cependant, il a continué de le faire. Dans le cas de la morue charbonnière, il est allé financer un relevé de un million de dollars le 1er septembre l’an dernier.
Il nie que cette activité aille dans le sens contraire de la décision judiciaire. Nous avons envoyé une lettre au ministre. J’ai attendu deux mois et demi pour obtenir une réponse, et je n’ai même pas reçu d’accusé de réception.
Nous ne voulons pas poursuivre le gouvernement fédéral. Ce n’est pas mon affaire. Nous voulons dire cependant, « C’est une ordonnance judiciaire, vous devez la respecter; vous ne pouvez pas risquer de contrevenir à la Loi sur la gestion des finances publiques ». Et au ministère, nous voulons dire : « Vous ne pouvez pas induire un comité parlementaire en erreur en allant à l’encontre de la vérité. »
Je ne veux pas d’argent. Peut-être que je changerai d’idée demain, mais aujourd’hui je veux simplement que le ministère reconnaisse qu’il s’est fait prendre et que la seule option qui s’offre, c’est établir une politique en réponse au jugement. Entre-temps, à cause de l’absence d’une telle politique, toutes les entreprises de pêche partout au Canada ne savent plus ce qu’il adviendra du financement des recherches scientifiques. Les pêcheries vont en souffrir.
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Il faut que je vérifie, monsieur Stoffer, pour savoir, mais la personne à qui nous avons parlé nous a également dit que cette décision n’était pas la leur, qu’elle avait été suggérée aux responsables à Ottawa.
Donc, quelqu’un à Ottawa a regardé ça et a conclu que les affaires sont les affaires; voilà qui était plutôt arrogant et ils ont gardé la même attitude. Le point que nous essayons de défendre dans nos entretiens avec le ministre, c’est tout simplement que vous devez abandonner cette approche paternaliste lorsque vous traitez avec l’industrie de la pêche.
La question de l’attribution de quotas est une chose, mais plus important encore est le contexte ou le milieu dans lequel le ministère, à l’échelon supérieur à Ottawa, traite avec les pêcheurs canadiens. Nous espérons que cela suffira à changer les choses, à faire en sorte que la cogestion se fasse véritablement en collaboration, pour tenter de changer le paradigme de la relation.
Je veux vous dire une chose, monsieur le président. Mes membres accepteraient de payer pour toutes les activités scientifiques de notre flotte si on nous permettait de gérer nous-mêmes notre flotte. Mais devoir payer et laisser la gestion à d’autres: ça, nous ne pouvons pas l’accepter. Si le gouvernement du Canada veut jouer le rôle principal dans la gestion des pêches, il doit payer une part proportionnelle, ou sa juste part, des activités scientifiques qui permettent de gérer ces espèces.
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Ils nous ont clairement fait savoir que si nous n’avions pas l’argent, les stocks ne seraient pas évalués, les rapports ne seraient pas rédigés, le modèle d’évaluation des stocks ne serait pas mis à jour et les quotas seraient revus à la baisse.
Alors il n’y a rien à faire pour une industrie qui a donné des millions de dollars depuis 10 ans pour la gestion et pour l’évaluation des stocks — à moins que je dise à mes membres : « En passant les gars, il faut que tout le monde se grouille. », même si 40 d’entre eux ne sortent même pas leur bateau parce que le marché a été détruit par la pêche INN, qui est un problème mondial.
Ça va vous montrer comment bien faire les choses. Notre industrie de la pêche aux oursins est reconnue comme l’une des plus durables au monde. Nous avons travaillé fort pour optimiser la valeur économique de cette pêche, mais voilà que le marché fait face à un problème et que, tout d’un coup, on n’est plus en mesure de gérer la pêche de manière durable, ni du point de vue de la conservation, ni du point de vue économique.
Il n’y a vraiment aucun moyen pour nous de récupérer cet argent. Et je crois que c’est vraiment déplorable, dans notre cas, d’avoir participé à ce programme de cogestion pendant tant d’années et d’y avoir consacré des millions de dollars. Maintenant que nous sommes en difficulté, le gouvernement se contente de dire que c’est dommage, pas de chance.
On injecte des millions de dollars, chaque année et pourtant, le ministère nous demande toujours plus d’argent. En plus de la somme convenue au départ, chaque année, il y a une augmentation pour financer la rémunération des biologistes, pour financer quelqu’un qui nous suit tous les jours quand on va à la pêche. C’est 600 000 $ par année pour la pêcherie, soit 5 500$ le permis.
Je parle de la pêche à l’oursin rouge, mais si on se penche sur la pêche à la panope du Pacifique, les pêcheurs versent 50 000 $ par année pour leur permis, pour la gestion. Trois biologistes, par exemple, sont sur la liste de paie, ce sont les pêcheurs qui les paient. Cette année, malgré le fait que ce sont les pêcheurs de panope qui payaient pour ces biologistes, le gouvernement les a affectés aux pêcheurs de harengs, qui n’avaient aucune ressource. Donc, les pêcheurs d’un secteur paient les biologistes, qui vont travailler avec les pêcheurs d’un autre secteur parce qu’ils n’ont pas l’argent pour les payer.
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Si on revient en arrière à l’époque qui suit immédiatement la décision Larocque, je crois qu’il faut admettre que le MPO a pris des mesures pour s’y conformer. Un groupe de travail national a été mis sur pied pour examiner toutes les ententes qui prévoient l’utilisation du poisson et pour élaborer une politique pour les prochaines ententes.
En toute équité, dans le cas de certaines des pêches dont vous avez parlé, qui ont été mises sur pied après l’affaire Larocque, les ententes avaient été prises avant l’affaire Larocque et avaient déjà été conclues avec l’industrie. Certains membres sonnent l’alerte en disant que le gouvernement fait dans l’illégalité, mais nous sommes dans une zone de transition ici; les ententes avaient été conclues avant l’affaire Larocque, et nous devons tous nous adapter à cette situation, y compris le ministère. Je crois qu’il est important de le préciser, monsieur Cue, les ententes que vous avez décrites ont été conclues avant que le juge rende sa décision dans l’affaire Larocque, sauf erreur de ma part.
Nous avons décrit ici comment les ententes varient grandement d’un secteur à l’autre. J’ai entendu M. MacDonald mentionner l’est et l’ouest, et j’en profite pour parler du grand clivage est-ouest. Les pêches sont très complexes. Elles diffèrent des pêches côtières et les ententes sont complexes à cet égard également.
Il faut ajouter à ces complexités la question du changement climatique. Pour atteindre nos buts en matière de conservation et de durabilité, il faudra mener beaucoup de recherches scientifiques en mer. On ne doit pas fermer les yeux, la question est complexe et le sera de plus en plus, j’en ai peur.
Il faut aussi composer avec la présence d’autres pêcheurs qui ne respectent pas les mêmes règles, sans parler des changements de température de l’océan. Quelle que soit la cause du changement climatique, c’est une réalité. Les animaux à sang froid — ceux qui occupent le haut de la chaîne alimentaire dans ce cas, les poissons — sont affectés par la température océanique, notamment les espèces migratrices. Il faut aussi parler des crustacés. Il y a des changements qui se font sentir le long de la côte de la Californie. Les dauphins et les petits rorquals qui s’échouent à cause de changements chez le plancton, des toxines dans l’eau, etc.
Admettons qu’il y ait ce changement de paradigme dont vous avez parlé, et qu’il y ait une demande pour des activités scientifiques. J’apprécie le portrait que vous avez fait de la situation, Christina, en comprenant que nous devrons trouver un moyen de répondre à cette situation, mais étant donné la complexité de la situation, il n’est pas raisonnable de croire qu’on pourra y remédier instantanément; nous avons par contre amorcé le processus.
Laissez-moi vous poser une question. On constate qu’un débat fait rage au sein du ministère, qui a adopté une position voulant qu’il y ait une différence entre les activités scientifiques minimales nécessaires pour assurer la conservation et la durabilité, et une plus grande participation. Les activités scientifiques ne sont pas absolument nécessaires pour atteindre ces buts, mais des activités supplémentaires ont été entreprises qui s’avèrent être directement et exclusivement bénéfiques aux groupes — c'est-à-dire l’industrie et les pêches, avec toute la considération qu’on doit accorder aux complexités de la pêche aux oursins. Je voudrais évidemment faire un suivi à propos d’une pêche illicite et non déclarée impliquant une flotte russe. Nous devons agir dans de tels cas afin de protéger nos stocks.
Je veux suggérer l’idée qu’une telle distinction existe. Convenez-vous du fait que cette distinction existe? Pourquoi? Pourquoi non? Pouvez-vous élaborer, Geoff?
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Est-ce que je peux répondre à ça? Nous sommes d’accord. Nous sommes d’accord, mais c’est le rôle du gouvernement, quand survient quelque chose d’imprévu qui relève de sa compétence, d’essayer de répondre à la situation promptement et de prendre les mesures qui s’imposent pour éviter toute conséquence négative. Fondamentalement, il doit y avoir parité dans la façon dont le gouvernement protège les gens qui pourraient être blessés ou réagit aux situations qui peuvent entraîner une blessure. Vous avez dit qu’après l’affaire Larocque, c’était la panique.
Une des raisons pour lesquelles nous continuons notre action depuis l’histoire de la morue charbonnière, c’est que le gouvernement a manqué de constance dans sa réponse et sa stratégie. Je cite le même document, utilisé dans la séance d’information de janvier : « Le ministère a déjà entrepris de financer, avec son budget de services votés, un certain nombre d’activités scientifiques, qui ont commencé en juillet 2006, y compris une somme de 2,2 millions de dollars pour mener une évaluation de la population de crabes après la saison de pêche. » Ils le mentionnent parce que, à cause de la décision Larocque, ils ont dû financer l’évaluation de la population après la saison, mais ils n’ont pas eu à le faire dans notre cas.
Tout ce que je veux — parce que j’ai travaillé dans le domaine de la politique publique — c’est une politique publique qui fasse place à la clarté, la parité et la transparence. Ce n’est pas la réponse que nous a donnée le ministère pendant cette période transitoire. Quand on ose le dire aux représentants du ministère, ils se fâchent parce qu’ils pensent qu’on les montre du doigt. Ce que l’on montre du doigt, ce sont les incohérences, en espérant pouvoir travailler avec les représentants du ministère pour les résoudre.
Ce dont nous avons besoin dans l’intervalle, monsieur le président, pendant que le ministère traverse cette période de transition, c’est évidemment que le Parlement finance toutes les activités scientifiques qui auraient été couvertes si on avait recouru aux revenus tirés des quotas de poissons. Ensuite, comme l’a si bien expliqué Christina, il faut définir un processus pour déterminer les besoins en matière d’activités scientifiques, la responsabilité fiduciaire du gouvernement, et la responsabilité de l’industrie — et nous voulons un processus qui soit transparent, pour éviter d’avoir à reprendre le travail pour chaque secteur de l’industrie.
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Je vous remercie de poser la question.
Vous venez tout juste d’apporter ce qui est probablement la première lueur de raison dans la façon dont nous pouvons gérer nos pêches à long terme. Plusieurs modèles sont axés sur les résultats, et non sur des règles.
J’ai déjà travaillé dans la foresterie en Colombie-Britannique. Nous avions un modèle axé sur des règles dans lequel on présumait que quiconque abattait un arbre allait détruire l’environnement. Le gouvernement nous a donc inondés de paperasse et d’une tonne de règlements qui ont coûté plus d’un milliard de dollars à l’industrie.
On peut employer un modèle axé sur les résultats, dans lequel on dit que les résultats obtenus sont bel et bien les résultats voulus, et on gère en fonction de ces résultats. On donne des récompenses à ceux qui obtiennent les résultats visés, ou sinon, on impose de lourdes pénalités. On adopte une approche plus prescriptive, axée sur les résultats surtout dans les cas de non conformité.
Il existe des modèles qui, selon moi, forceraient l’industrie à payer. Si l’industrie gérait vraiment les ressources en fonction d’objectifs fixés par le gouvernement selon une grille claire, qui comprend des conséquences, on la verrait répondre à l’appel.
Il existe de bons modèles de ce genre en Nouvelle-Zélande et en Australie, que vous pourriez étudier.
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Merci, Monsieur MacAulay.
Je voulais répondre à la question en disant que parce que la situation perdurait depuis 15 ans dans la pêche au saumon, et depuis 1997-1998 dans d’autres secteurs, la décision Larocque bouleversait bien des choses et on a essayé de s’organiser. La réalité, c’est que la décision était une décision unanime de la Cour d’appel fédérale. Trois de nos juges doyens ont dit que c’était illégal. Malgré tout, le ministère a autorisé la pêche et la vente de poissons pour une valeur de plusieurs millions de dollars en Colombie-Britannique. Le fait que cela était autorisé avant la décision Larocque n’a absolument rien à voir avec le moment où les pêches se déroulent. Les pêches ont eu lieu après la décision Larocque, dans un cas au moins deux mois plus tard, et dans un cas au moins trois mois plus tard, et dans le cas de l’argent de la pêche aux harengs, l’argent avait été collecté des années auparavant.
Nous avons accepté de donner un million de dollars provenant de la vente du saumon pêché. Si nous ne l’avions pas fait, le ministère ne nous aurait pas accordé un quota de 150 millions de dollars dans cette zone. Pouvions-nous vraiment refuser? On peut bien parler de financement volontaire, nous avons en effet signé tous les papiers qu’il fallait, mais dites-moi si nous avions vraiment le choix? La réponse est non.
Nous avons un avocat qui travaille chez nous et, tous les jours, il allait voir la personne qui administrait cette pêche et lui demandait comment allait la pêche illégale. Nous savions tous que c’était illégal. Tout le monde savait que c’était illégal. Le ministère n’aurait pas dû l’autoriser, mais en tant que pêcheurs, nous n’avions pas d’autre choix que de cracher l’argent. J’en parle aujourd’hui parce que nous en sommes toujours au même point. Le ministère ne fait pas ce qu’il faut pour redresser la situation. Ils nous disent que, cette année, notre taux de récolte sera très très bas parce qu’ils n’ont pas d’argent à mettre là-dessus. Dans quatre ans, il n’y aura pas de pêche parce qu’ils vont laisser le poisson frayer dans le lac cette année. Il faut s’occuper de cette situation dès aujourd’hui et les autres pêcheurs ont tout mon appui.
Il faut que le ministère s’engage à réaliser toutes les activités scientifiques qui avaient lieu avant la décision Larocque, il faut que ces activités soient financées dès maintenant.