:
Je déclare la séance ouverte.
Bienvenue à tous. Le Comité permanent des comptes publics étudie le rapport sur les allégations concernant les régimes de retraite et d'assurances de la GRC, publié le 15 juin 2007.
Nous avons le plaisir d'accueillir aujourd'hui, chers collègues, trois témoins. Nous entendrons tout d'abord M. William Elliott, le commissaire de la Gendarmerie royale du Canada. Au nom du comité, monsieur Elliot, je vous félicite pour votre nomination et je vous offre mes meilleurs voeux de succès dans vos fonctions à ce poste très important.
Nous accueillons aussi Mme Beverley Busson, commissaire retraitée. Mme Busson a témoigné devant le comité à plusieurs occasions dans le passé. Je ne pense pas me tromper en disant que ce sera sans doute sa dernière comparution devant le comité sur cette question particulière. Mme Busson demeure maintenant en Colombie-Britannique et a pris des dispositions spéciales pour être ici. Comme toujours, elle s'est montrée très coopérative et je la remercie infiniment pour tous les efforts qu'elle a déployés pour le comité.
Nous sommes ravis d'accueillir Mme Linda Duxbury, professeure à la School of Business de l'Université Carleton. Mme Duxbury a rédigé des articles et a mené des recherches approfondies en gestion des ressources humaines à la GRC, dont elle nous présentera les principales conclusions.
Je crois comprendre que le commissaire Elliott et Mme Duxbury ont préparé une déclaration préliminaire. J'ajouterais que nous aimons habituellement que les déclarations préliminaires ne dépassent pas cinq minutes.
Commissaire Elliot, vous pouvez commencer.
:
Merci, monsieur le président.
Je suis heureux de pouvoir me présenter devant votre comité aujourd'hui. Comme vous le savez, cela fait moins de deux mois que je suis devenu commissaire de la GRC. Lorsque ma nomination au poste de commissaire a été annoncée, le 6 juillet 2007, j'ai dit:
[Traduction]
Il est de la plus haute importance que la GRC puisse continuer sa longue et fière histoire en misant sur ses points forts, en travaillant avec les collectivités de partout au Canada et avec ses partenaires tant sur le plan intérieur qu'international, afin de veiller à ce qu'elle soit une organisation moderne et efficiente assurant aux Canadiens des services de police du plus haut niveau.
[Français]
Une force policière qui encourage le travail d'équipe, l'intégrité et le respect et une organisation dont tous les Canadiens peuvent continuer d'être extrêmement fiers.
[Traduction]
Les dernières semaines ont confirmé que j'ai bel et bien raison.
Ma première priorité a été de me renseigner sur la GRC et sur les services essentiels que nous offrons aux Canadiens, ce que j'ai fait en rencontrant les hommes et les femmes de la GRC, à leur lieu de travail, partout au pays.
Jusqu'à présent, j'ai visité les employés des bureaux, des laboratoires et des détachements de la Colombie-Britannique, de l'Alberta, de la Saskatchewan, du Manitoba et du Québec. J'ai également rencontré le personnel et les cadets de la Division Dépôt de la GRC à Regina — reconnu internationalement comme l'un des meilleurs centres de formation policière au monde. J'ai également rencontré de nombreux employés ici, à Ottawa. Et enfin, j'ai l'intention de visiter chaque division dès que mon horaire me le permettra.
Au cours de mes déplacements, j'ai été grandement impressionné par le professionnalisme et le dévouement des hommes et des femmes que j'ai rencontrés, depuis les membres réguliers des détachements isolés dans les collectivités autochtones, aux commis de détachement soutenant les services de police municipaux, aux scientifiques et aux techniciens dévoués à améliorer nos services de laboratoire, en passant par les maîtres-chiens, les instructeurs du Dépôt et les agents d'exécution de la loi à Montréal et les employés qui contribuent aux enquêtes sur la sécurité nationale. J'ai vu des gens de tous les grades et de toutes les classifications, qu'ils soient fonctionnaires ou membres civils ou réguliers de la GRC.
J'ai été impressionné certes, mais nullement étonné. La GRC, malgré quelques lacunes, est grandement respectée au Canada et par ses partenaires internationaux.
[Français]
Les gens que j'ai rencontrés ont à coeur la GRC et les collectivités que nous protégeons. Je n'ai aucun doute que nos employés fournissent des services de police de premier ordre. Ils peuvent être fiers à juste titre du travail qu'ils accomplissent, tout comme je suis fier du travail que nous faisons. J'ai également rencontré l'équipe de gestion supérieure et l'état-major supérieur ainsi que le Comité exécutif national du représentant des relations fonctionnelles.
[Traduction]
Le programme RRF est le programme de relations de travail officiel destiné aux membres réguliers et civils, de même qu'aux constables spéciaux de partout au Canada. J'ai aussi rencontré des représentants du Syndicat des employés du Solliciteur général. Bref, j'ai vu du bon travail partout, le fruit d'un groupe exceptionnel de personnes.
La GRC fait certainement face à des défis. Ces derniers doivent être relevés si nous voulons continuer à assurer le niveau de service auquel les Canadiens ont droit. Plusieurs questions ont été soulevées à la lumière de l'étude menée par le présent comité du Rapport de l'enquêteur indépendant sur les allégations concernant les régimes de retraite et d'assurances de la GRC, du rapport de M. David Brown et du chapitre 9 du Rapport de novembre 2006 de la vérificatrice générale du Canada.
Comme vous le savez, le 16 juillet, le gouvernement a mis sur pied un groupe de travail pour examiner la gouvernance et les changements culturels au sein de la GRC. Ce groupe de travail, présidé par M. David Brown, compte parmi ses membres Mme Linda Black et MM. Richard Drouin, Norman Inkster et Larry Murray.
J'ai demandé au sous-commissaire Bill Sweeney d'assurer la collaboration de la GRC avec le groupe de travail et d'aligner nos activités de façon à répondre promptement aux besoins de celui-ci. Plus tôt en août, le sous-commissaire Sweeney et moi-même avons rencontré M. Brown afin de nous porter garants de la collaboration la plus grande et la plus absolue de la GRC.
Un comité directeur chargé de gérer les activités de la GRC en rapport avec ce groupe de travail a également été mis sur pied. Il est composé des sous-commissaires Sweeney, Killam et Bourduas. M. Bill Austin est le directeur exécutif de ce groupe de travail et agira comme membre d'office du comité directeur. Le comité exécutif national du représentant des relations fonctionnelles assurera également un rôle consultatif stratégique pour le comité directeur.
[Français]
Ma première rencontre avec les cinq membres du groupe de travail s'est tenue le 22 août 2007. Des informations préliminaires à propos de la mission, de la structure, des processus du gouvernement et du cadre de responsabilisation de la GRC ont alors été échangées.
[Traduction]
À la demande de M. Brown, le 16 août 2007, nous avons fait parvenir par courriel une lettre du président du groupe de travail à l'attention de tout le personnel de la GRC. Cette lettre a également été distribuée à tous les membres de l'Association des anciens de la GRC. La lettre comprend des informations relatives au groupe de travail et demande aux membres du personnel de faire part de leurs opinions sur toute question comprise dans le mandat du groupe de travail.
Au cours des échanges que j'ai eus avec des gens de partout au pays, ainsi que par l'entremise de mes bulletins électroniques adressés à tout le personnel, j'ai encouragé les employés à profiter de cette occasion de communiquer directement avec le groupe de travail. En fait, le site intranet de la GRC comprend un lien direct menant à la lettre de M. Brown. Ce lien permet aux employés de trouver facilement les coordonnées du groupe de travail.
J'ai également souligné l'importance d'établir et de maintenir des lignes de communication ouvertes au sein de la GRC, tout comme j'ai encouragé les employés à faire part de leurs idées ou de leurs préoccupations à leur commandant ou directement à moi. En fait, plusieurs employés ont déjà communiqué avec moi par courriel à cet effet. Cette rétroaction nous sera utile pour notre travail et celui du groupe de travail, alors que nous nous pencherons sur les huit questions précises constituant le mandat de ce dernier.
Comme je l'ai dit lors de la cérémonie de passation du commandement le 10 août 2007, la GRC doit miser sur ses points forts, reconnaître et corriger ses faiblesses et se montrer à la hauteur des normes élevées que nous nous sommes fixées et auxquelles les Canadiens sont en droit de s'attendre.
Je compte sur la séance d'aujourd'hui et le rapport du comité pour aider la GRC ainsi que moi-même à cerner les mesures à adopter pour donner suite à ces objectifs.
[Français]
Je vous remercie de votre attention. Il me fera maintenant plaisir de répondre à vos questions.
:
Ce n'est pas un problème. Je comprends. Je connais la procédure.
Je vous remercie de m'avoir invitée. En fait, je ne suis pas certaine. Attendons de voir comment je me sentirai à la fin du processus.
Je suis une universitaire et j'ai collaboré avec la GRC pour la première fois quand nous avons réalisé une étude nationale à très grande échelle sur la conciliation travail-vie et le stress. Trente-trois mille personnes, 100 organismes et la GRC ont pris part à l'étude parce que le commissaire à l'époque, M. Murray, voulait vraiment comprendre ses employés.
Plusieurs milliers de membres de la GRC se sont portés volontaires pour participer aux travaux complémentaires. Nous nous sommes entretenus avec 300 participants à la première étape de l'étude. Nous les avons interrogés longuement sur divers sujets. Mes observations sont donc fondées sur l'examen des mêmes personnes à deux périodes différentes, la première étant juste après le changement à la direction et la seconde, plusieurs années après.
Avant de passer aux constatations, il est très important que j'insiste sur le fait que la majorité des employés de la GRC sont des êtres remarquables qui se soucient de leur pays et veulent véritablement contribuer à changer le cours des choses. Il importe de le souligner, car la plupart des membres de la GRC à qui nous avons parlé ont l'impression que nous jetons bien souvent le bébé avec l'eau du bain. Nous dépeignons tout le monde sous un jour défavorable alors qu'en fait, la majorité des gens aiment leur travail. Ils ont à coeur ce qu'ils font, et travaillent de façon remarquable.
Cela dit, mon rapport indique qu'il y avait quelques problèmes très importants. Par exemple, nous avons découvert, à la seconde étape de l'étude, que près de 40 p. 100 des employés aux deux grades les plus inférieurs de la GRC ont carrément répondu qu'ils recommanderaient à leurs propres enfants de ne pas joindre les rangs de la GRC. Près de la moitié des gens de notre échantillon ont dit qu'ils prévoyaient quitter leur emploi plus tôt et travailler ailleurs sans même toucher leur pension à cause de certaines situations au sein de la GRC.
En fait, puisque je ne l'avais pas fait depuis longtemps, j'ai dû lire mon rapport juste avant de venir ici pour éviter que vous ayez à le faire. Il y a quelques points qui sont réellement importants. À vrai dire, il y en a plusieurs. Vous devriez tous le lire. Il y a toutefois quelques points que je tiens à mettre en relief.
Premièrement, je fais observer dans le rapport que la culture d'une organisation — qui est vraiment ce sur quoi nous misons ici —, plutôt que les politiques rédigées, peut être la plus grande force d'une organisation ou sa plus grande faiblesse. Un véritable problème se pose lorsqu'une organisation qui a connu un immense succès dans le passé ne reconnaît pas comment son milieu a changé. Il ne modifie pas sa culture pour l'adapter aux nouvelles réalités.
Dans le rapport, je fais observer qu'un énorme changement s'est opéré au Canada. Le 11 septembre a eu une incidence sur la GRC. Des changements démographiques importants ont été enregistrés puisque nous avons maintenant les couples à deux revenus, les exigences familiales supérieures, les pénuries de main-d'oeuvre, etc.
Le problème que j'ai relevé dans la culture, c'est que les employés estimaient que si vous travaillez pour la GRC, vous vous concentrez énormément sur le travail, et non pas sur la famille. Cette tendance s'est amplifiée au fil des ans. Rien n'importait plus que la GRC. Les charges de travail augmentaient de façon phénoménale et les employés travaillaient des heures considérables. Les employés n'avaient pas l'impression que les politiques de la GRC les soutenaient. Ils ne se sentaient pas à l'aise. Ils croyaient qu'on les sanctionnerait s'ils recouraient aux soutiens mis à leur disposition. Ils n'étaient pas d'accord pour dire que des discussions ouvertes et respectueuses étaient menées au sein de l'organisation et ils approuvaient tous l'affirmation selon laquelle la GRC décourageait, en fait, le recours aux politiques en place pour leur venir en aide. Ils ont déclaré que la culture organisationnelle donnait le choix entre le travail ou la famille et croyaient qu'un refus de prendre plus de travail mènerait à des sanctions ou nuirait à leur carrière.
Il était très intéressant de voir que les entretiens ont permis de découvrir une autre facette de la culture, que j'ai appelée à l'époque « jouer le jeu ». Environ 15 à 20 p. 100 des répondants en ont parlé. Aux grades de constable, de caporal, de sergent et de sergent d'état-major, le pourcentage des répondants qui se sont dits mécontents des politiques de l'organisation est beaucoup plus élevé. Ils ont dit vraiment aimer leur domaine de travail et leur employeur . Toutefois, ce qui les préoccupait, c'était de demeurer à leur poste et de se concentrer sur le travail. Ils voulaient garder leur poste, car ils risquaient moins de devoir se préoccuper des politiques de l'organisation et de devoir jouer le jeu. Un grand nombre de répondants estimaient que l'obtention d'une promotion à la GRC était basée sur les personnes que vous connaissez et la façon de jouer le jeu plutôt que sur les compétences.
L'autre différence très intéressante, c'est que notre étude montre vraiment que les gens ne travaillent pas pour une organisation; ils travaillent pour la personne de qui ils relèvent. Nous avons constaté une hausse marquée de l'absence de soutien des supérieurs et une baisse du soutien offert par ceux-ci au fil du temps. Ce manque de soutien était plus visible aux grades de sergent et de sergent d'état-major, qui relèvent directement de la haute direction. À la première étape, 80 p. 100 des employés ont dit qu'ils aimaient leur gestionnaire et que celui-ci leur offrait du soutien à l'occasion, par rapport à 40 p. 100 environ, à la deuxième étape. C'est une baisse considérable.
Ce qui les exaspérait, c'est le style de gestion descendante, les gestionnaires qui sont peu soucieux du bien-être de leurs employés, qui ne leur font pas confiance ou qui ne les respectent pas, l'inaptitude des gestionnaires à communiquer efficacement avec le personnel, les programmes motivés par des intérêts politiques, les gestionnaires qui sont perçus comme des carriéristes gouvernés par leurs objectifs personnels et les gestionnaires qui ne joignaient pas le geste à la parole. Ils ont également indiqué que les gestionnaires nuisaient à leur productivité, en raison de leurs compétences médiocres en gestion des ressources humaines, de leur style de gestion axée sur le pouvoir hiérarchique, de leurs décisions prises malgré un manque d'informations et de leur inefficacité à communiquer ce qui devait être fait, à microgérer leur personnel et à faire preuve d'innovation.
C'est en gros ce que je voulais dire.
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Bien sûr, vous avez déjà comparu devant le comité aussi.
Juste avant de passer au premier tour de questions, chers collègues, je demande aux membres de poser des questions brèves, directes et pertinentes. Nous sommes ici pour nous en tenir à l'objectif de la séance qui est, à mon avis, à tout le moins, de nous concentrer sur l'avenir, d'examiner des questions relatives à la gouvernance et d'effectuer des vérifications pour nous assurer que le régime de reddition de comptes approprié est en place.
Je demanderais également aux témoins de fournir des réponses brèves et pertinentes. Nous avons trois témoins très coopératifs aujourd'hui, alors profitons-en.
Nous commençons le premier tour de questions par M. Wrzesnewskyj. Vous avez sept minutes.
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Merci, monsieur le président.
Merci, madame Busson, d'avoir témoigné devant nous aujourd'hui.
Je profite de l'occasion pour vous remercier. Vous avez accepté un travail très difficile. Surtout lorsqu'il s'agit du régime de retraite et d'assurances, des contrats truqués, des allégations de camouflage, on ne vous a pas laissé une tâche facile en tant que commissaire intérimaire, mais dans l'ensemble, je pense que vous avez accompli beaucoup pendant cette courte période, et surtout en vous attaquant au coeur du problème — la culture au sein de la GRC, que l'on qualifie de corrompue aux échelons supérieurs.
Les ressources humaines peuvent être un outil incroyable. Comme Mme Duxbury a semblé le dire, cet outil peut être utilisé de façon tant positive que négative. Nous avons entendu parler des mutations punitives, des congédiements déguisés, des récompenses accordées à des auteurs d'actes répréhensibles qui ont pu s'en tirer sans ennui lorsqu'il n'était plus possible de les défendre.
Je tiens d'abord à vous remercier d'avoir rendu hommage aux personnes qui ont eu le courage dans cette culture particulière de ne pas déroger à leurs principes et d'intervenir. Vous avez organisé un dîner privé, mais vous avez aussi remercié publiquement ces personnes.
Juste avant de partir, vous avez également parlé de M. Gauvin et du fait qu'il soit cité dans le rapport de M. Brown. J'imagine qu'il a fait son témoignage quelques jours avant le dépôt du rapport et que cette information n'était pas disponible à ce moment-là. Bien des gens estiment que vous avez permis à M. Gauvin — car il était indéfendable qu'il reste — de s'en tirer plutôt bien.
Juste avant que vous répondiez, j'aimerais lire un extrait à la page 51 du rapport Brown:
Le comm. Zaccardelli a demandé à M. Ewanovich de démissionner lorsqu’il a été informé des résultats de la vérification interne, mais il lui a permis de s’en tirer plutôt bien vu les circonstances. En effet, M. Ewanovich a continué d’occuper un poste à la GRC dans un autre immeuble situé tout près, de toucher son salaire et d’accumuler des gains ouvrant droit à pension. Les personnes qui avaient travaillé tellement longtemps pour divulguer les problèmes attribuables à la gestion de M. Ewanovich voyaient que ce dernier occupait toujours un emploi à la GRC. Cela ne faisait que confirmer à leurs yeux que des règles différentes s’appliquaient aux membres de la direction.
Nous avons lu à ce sujet dans le rapport que Mme Duxbury nous a fourni. Pourquoi M. Gauvin a-t-il pu continuer de travailler à la GRC?
Monsieur Elliott, la semaine au cours de laquelle le rapport Brown a été publié... je suis sûr que vous êtes très occupé, mais je pense que vous avez probablement lu quelques-unes des transcriptions, surtout étant donné que de sérieux problèmes sont en jeu. Seulement quelques jours avant, il est devenu clair, à la suite du témoignage d'un officier bien étayé — nous avions le témoignage et des documents qui le prouvaient —, que M. Gauvin avait téléphoné à cet officier dans la salle de conférence du commissaire, juste avant de divulguer les documents, pour obtenir les dépenses du commissaire, afin de donner suite à la demande de l'AIPRP. Il a essayé de manigancer ceci: il avait préparé une série de documents différents dans les bureaux du contrôleur et tentait de faire pression sur l'officier pour faire un échange — prendre les documents originaux et lui remettre les documents qu'il avait préparés. Nous avons entendu ce témoignage.
Si nous avons pu découvrir cette manigance ici même, avez-vous entrepris une enquête quelconque sur M. Gauvin? Il a dû faire d'autres manoeuvres malhonnêtes. Si nous avons pu mettre cette affaire au grand jour, avez-vous entamé l'enquête pour connaître ce qui s'est passé dans le bureau de M. Gauvin?
:
Merci, monsieur le président.
Bonjour, mesdames et messieurs.
Monsieur Elliott, j'ai été tout à fait surpris, étonné et déçu plus tôt quand vous nous avez fait part de vos commentaires préliminaires, entre autres lorsque vous avez parlé de « quelques lacunes » à la GRC. Ça fait partie de mon étonnement. On peut penser à l'affaire Maher Arar, à celle d'Air India, à l'incompétence dans l'affaire Airbus, aux enquêtes sur les commandites menées par la GRC qui n'aboutissent pas, au scandale touchant le ministère du Développement des ressources humaines ainsi qu'aux fraudes entourant le régime de retraite et d'assurances de la GRC. Il me semble que vous banalisez beaucoup les événements qui se sont passés et qui, à mon sens, ont énormément terni l'image de la GRC au Canada et au Québec. Vous abordez votre mandat en banalisant ainsi ces lacunes, et ça me laisse très sceptique.
Avant d'être nommé commissaire à la GRC, vous avez été conseiller spécial auprès du premier ministre actuel, M. Harper, et de son prédécesseur, M. Martin. Vous occupiez un poste de conseiller spécial en matière de sécurité publique au moment où une bonne partie de ces événements se sont produits. Vous avez même, dans l'affaire Maher Arar, avoué que vous étiez partie prenante à la décision concernant la censure d'une partie importante du rapport O'Connor. On a biffé entre 1 500 et 2 000 mots de ce rapport avant qu'il ne soit rendu public, ce qui a démontré que le gouvernement savait ce qui était arrivé à M. Arar. C'était un manque flagrant de transparence. Vous êtes maintenant à la tête d'une organisation qui a besoin d'être réformée et, par le fait même, d'acquérir beaucoup plus de transparence.
Vous avez dit avoir rencontré pendant l'été divers employés de la GRC à plusieurs endroits. Je pense qu'il serait également important pour vous de rencontrer la population. Ça vous permettrait de comprendre que l'appréciation des gens à l'égard de la GRC a considérablement diminué. Compte tenu que votre passé révèle un manque de transparence, je ne vous fais pas confiance pour ce qui est de mener à bien cette réforme. Selon moi — et c'est aussi l'avis de mon parti, le Bloc québécois —, seule une enquête publique pourra mettre au jour toutes les lacunes. Vous en avez soulevé certaines, mais je parle ici de tous les problèmes qu'on a constatés à la GRC au cours des dernières années, et même de ceux qu'on ne voit pas. Je pense que le public a besoin de connaître ces lacunes et qu'il en a le droit.
Pour ce qui est de l'affaire Maher Arar, soit toute la question qui a conduit le juge O'Connor à produire son rapport, j'aimerais que vous nous disiez si vous avez participé à des consultations préalables à ce rapport ainsi qu'à la décision de le censurer. Avez-vous travaillé en ce sens?
:
Merci, monsieur le président.
Comme je l'ai mentionné hier, j'ai attendu avec impatience la tenue de cette séance, car il me semble que nous sommes rendus à une phase où les choses commencent enfin à bouger dans le processus. Je sais par contre qu'il reste quelques détails à régler.
Mais je tiens d'abord à vous féliciter, madame Busson, pour votre leadership. Il s'agit d'une période très difficile. Je ne peux imaginer à quel point il a dû être difficile pour vous d'accomplir le travail que vous avez dû faire dans une organisation qui vous tient tellement à coeur et de passer à travers toute cette épreuve. Vous l'avez fait de façon remarquable. Je vous en félicite.
Monsieur Elliott, lorsque j'écoute les commentaires de Mme Duxbury, je ne peux m'empêcher de constater à quel point votre travail sera ardu. J'aimerais en savoir un peu plus sur vos rencontres et vos discussions avec les membres de la GRC partout au pays. Que vous disent-ils? Comment se porte leur moral à ce stade-ci et quels changements souhaitent-ils?
Tout d'abord, le travail réalisé par Mme Duxbury est une pièce maîtresse. Mais nous disposons de données pertinentes plus récentes. La GRC a déployé beaucoup d'efforts pour mener des sondages détaillés auprès de ses employés. Si vous me le permettez, j'aimerais vous faire part de quelques-uns de ces résultats.
Les sondages en question ont été effectués en 2003, en 2005 et en 2007. Voici quelques-unes des réponses des employés. À la question de savoir si la GRC traite ses employés de façon équitable, la moitié des participants au dernier sondage ont répondu par l'affirmative; c'est une hausse par rapport au taux le plus bas enregistré, soit 42 p. 100. Par ailleurs, 69 p. 100 des répondants estiment que les collègues de la GRC se traitent les uns les autres avec respect, en hausse par rapport à 59 p. 100. À la question de savoir s'ils contribuent activement à la réussite de la GRC, 92 p. 100 croient que oui, en hausse par rapport à 89 p. 100. Enfin, 73 p. 100 se disent satisfaits de leur carrière au sein de la GRC, en hausse par rapport à 67 p. 100.
Je ne veux pas insinuer que ces résultats sont aussi positifs que nous l'aurions voulu, mais je crois qu'il s'agit d'un pas dans la bonne direction.
Lors de mes rencontres avec les employés partout au pays, j'ai été assez impressionné par la réaction positive que j'ai reçue. Plusieurs m'ont avoué franchement avoir été déçus de la nomination d'une personne de l'extérieur de l'organisation. Quoi qu'il en soit, les gens avec qui je me suis entretenu ont tous affirmé, sans l'ombre d'une hésitation, que certaines questions devaient être réglées. Je dirais qu'ils sont très fiers de leur travail. En tout cas, il y a certaines blessures, car ils trouvent que ces fâcheux incidents ont terni aussi bien la réputation de l'organisation entière que celle des hommes et des femmes qui la constituent. Toutefois, ils sont convaincus de l'excellence des services qu'ils offrent, avis que je partage.
On m'a également proposé de m'entretenir avec les Canadiens. J'ai rencontré plusieurs de nos partenaires et parties intéressées, ainsi que des représentants des gouvernements provinciaux, des fonctionnaires municipaux et des dirigeants autochtones. Encore une fois, personne, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de l'organisation, ne prétend que la GRC est parfaite, car il existe de graves problèmes auxquels on doit s'attaquer, mais je crois que les gens sont assez positifs et optimistes. Je crois qu'avec les efforts que nous déployons pour appuyer le groupe de travail, les gens s'attendent à voir un changement concret.
:
J'accepte certainement la prémisse de votre question. Nous devons mettre en place des mécanismes et des processus pour appuyer le type de culture dont j'ai parlé dans mes observations préliminaires, c'est-à-dire une culture fondée sur l'équité et le respect. Cette culture ne devrait pas reposer uniquement sur les épaules des individus. Certes, on a besoin d'individus qui croient aux valeurs de l'organisation et qui les mettent en pratique, mais on a aussi besoin de structures et de processus qui appuient ces valeurs.
Cela dit, le jour de ma nomination à titre de commissaire, le gouvernement a annoncé, un peu par coïncidence, la création du groupe de travail et lui a confié un mandat assez précis, soit celui de régler huit questions, comme je l'ai mentionné tout à l'heure. Nous nous appliquons à seconder le groupe de travail. En réalité, je ne crois pas que nous allons apporter des changements radicaux à l'organisation de la GRC ni même nous prononcer sur les mécanismes et les structures appropriés avant que le groupe de travail n'ait mené à bien ses travaux.
C'est encore très tôt et, comme je l'ai dit, je suis en poste depuis moins de deux mois. Mais notre travail, dont une partie avait commencé avant la création du groupe de travail par la commissaire Busson, consistera certainement à faire valoir notre point de vue au groupe de travail et à fournir une réponse à son rapport et à ses recommandations.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je vous remercie tous d'être venus aujourd'hui.
Bien que je respecte les propos de mon collègue du Bloc, j'ai quelques observations à faire à cet égard. J'aimerais d'abord vous indiquer que les Canadiens sont encore fiers de la GRC et la soutiennent toujours. Il s'agit plutôt d'un manque de confiance envers la capacité de la GRC d'être à la hauteur des attentes des Canadiens. Je n'appuie donc pas votre argument de départ.
En ce qui concerne votre nomination, je ne crois pas que le fait que vous n'apparteniez pas à la GRC soit nécessairement quelque chose de négatif. Recruter quelqu'un de l'extérieur s'avère parfois la bonne solution. Que vous ne soyez pas un agent assermenté ni un policier proprement dit ne pose aucun obstacle. Par contre, je crois que le gouvernement a fait preuve d'imprudence lorsqu'il a imposé simultanément ces deux types de changements pendant que nous sommes aux prises avec une autre crise. Je veux tout simplement faire cette mise au point. Je ne pense pas que c'était le moment propice d'apporter ces changements. Selon moi, cela rend votre travail plus difficile pour rien.
Cela dit, avant de revenir sur vos observations, j'aimerais remercier l'ancienne commissaire Busson.
Je suis d'accord avec mes collègues. Je crois et j'espère que vous recevrez un appui unanime de tous les partis pour l'excellent travail que vous avez accompli. À chacune de vos comparutions devant le comité, on pouvait sentir clairement dans votre regard, vos paroles, vos gestes et votre réceptivité que vous ne ménagiez aucun effort pour remettre la GRC sur la bonne voie. Ce n'est pas toujours une tâche facile. Je comprends le point de vue. Mais vous avez fait un travail remarquable pour la GRC et le Canada. Notre Parlement est fier de vous. Merci pour ce que vous avez fait.
Je m'adresse maintenant à l'actuel commissaire. Parmi les principaux changements à apporter, vous avez parlé des subalternes et des autres niveaux d'employés. Mais, pour vous dire franchement, une grande partie du dommage a été causée par les hauts gradés. Si les subalternes ne s'étaient pas présentés comme témoins et ne s'étaient pas pliés à la norme de la GRC, nous ne serions pas ici aujourd'hui. Pouvez-vous me dire ce que vous envisagez comme prochaines étapes pour inculquer ce message aux hauts gradés? De façon générale, il n'y a rien à reprocher à la plupart d'entre eux, mais il est évident que certains ont agi de façon très décevante et ont gravement porté atteinte à l'intégrité de l'organisation. Comment allez-vous procéder pour changer cela? Il faut reconnaître qu'il y a pratiquement des dizaines de milliers de policiers en uniforme, dans les rues, qui comptent sur vous pour redresser la barre afin qu'ils puissent continuer d'avoir confiance en la GRC.
Permettez-moi de préciser que lorsque je dis avoir été impressionné par la réaction positive que j'ai reçue, cela s'applique non seulement aux membres dans les détachements partout au pays, mais aussi aux hauts gradés.
La structure de la haute direction a récemment subi plusieurs changements, depuis l'arrivée de la commissaire Busson. Ainsi, nous venons tout juste de nommer un nouveau chef par intérim des ressources humaines, le commissaire adjoint Clark. Je suppose que plusieurs des questions auxquelles nous devons nous attaquer concernent les ressources humaines. J'ai également doté notre équipe d'un sous-commissaire très respecté de la division du Nord-Ouest, le sous-commissaire Bill Sweeney qui sera certainement un très bon ajout au quartier général. Nous avons également un chef par intérim des finances. Nous devrons prendre des mesures pour combler ce poste dans un proche avenir.
Bref, on a apporté plusieurs changements. Je dirais certainement que l'équipe des hauts gradés et de la haute direction du ministère, ce qui comprend les commandants de chaque division au pays, a accueilli très favorablement le groupe de travail et les travaux que nous menons pour cerner des changements positifs.
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Comme vous le savez évidemment, c'est au fruit qu'on jugera l'arbre. Ce qui comptera, ce sont les mesures prises après la publication du rapport, son degré de profondeur et sa mise en œuvre.
Mais encore une fois, je vous recommande fortement de reconnaître que, selon nous, tous les agents en uniforme qui travaillent sur le terrain et qui se trouvent en première ligne, comptent sur vous pour le changement qui sera apporté non seulement par vous à titre de commissaire, mais aussi par ces hauts gradés. Tous les agents de première ligne avec qui j'ai parlé m'ont indiqué qu'ils étaient déçus surtout de ce point. Ce qui est grave, ce n'est pas nécessairement la faiblesse humaine — après tout, ce sont des choses qui arrivent —, mais le fait qu'il y en avait tant du côté des très hauts gradés. C'est démoralisant, car si ces derniers ne croient pas en l'organisation, pourquoi les gens sur le terrain devraient-ils le faire? Ce sont eux qui risquent leur vie. C'est donc une question très cruciale.
J'ai tant de questions à poser.
Madame Duxbury, j'aimerais vous poser deux petites questions, par simple curiosité. J'ai passé en revue votre rapport et j'ai remarqué qu'aux pages 10 et 11, vous parlez spécifiquement des employés mâles — je suis sûr qu'il y a une raison logique qui explique pourquoi ce détail est resté gravé dans ma mémoire, mais je n'arrive tout simplement pas à mettre le doigt dessus. Je ne pouvais pas trouver le passage où l'on faisait une distinction entre les femmes et les hommes. Sans qu'on s'y attende, on tombe sur ces deux observations concernant les employés mâles. Je me demande donc pourquoi on parle spécifiquement des hommes.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
J'espère que nous pouvons nous tourner vers l'avenir au lieu de regarder en arrière et chercher partout quelque chose qui puisse ternir la réputation de quelqu'un.
Tout d'abord, permettez-moi de vous féliciter encore une fois, monsieur l'ancien commissaire Busson, pour le travail phénoménal que vous avez accompli dans des circonstances extrêmement difficiles. Le Parlement et tous les Canadiens apprécient beaucoup votre travail. Vous prenez votre retraite. Vous pouvez la prendre la tête haute sachant que vous avez fait un magnifique travail.
Monsieur Elliott, vous êtes maintenant sur la sellette. On a mentionné plus tôt à propos du directeur financier, M. Gauvin, que le processus de mise en disponibilité prendra deux ou trois ans avant qu'il puisse être licencié. Nous avons connu cette situation avec M. Crupi, avec M. Ewanovich et avec d'autres personnes. Des personnes qui ont fait preuve d'incompétence dans leur travail — dans le cas de M. Crupi, il peut y avoir de graves allégations de nature criminelle ou autre — et on ne pouvait pas les licencier.
Allez-vous faire quelque chose à ce sujet, afin que les gens qui dépassent les limites au sein de la GRC, les gens qui méritent d'être licenciés, soient licenciés? Pensez-vous qu'il soit approprié d'attendre deux ou trois ans avant de licencier quelqu'un qui mérite assurément d'être licencié?
Voilà qui conclut notre première série de questions. Nous passons à la deuxième série.
Mais avant, j'ai une question à poser à M. Elliott, une question portant sur le processus.
Je pense qu'en fin de compte nous voulons un régime de responsabilité fondée sur la performance de la GRC. Nous avons entendu hier le témoignage du conseiller en matière d'éthique, du commissaire aux plaintes du public et de l'autre commissaire, et il me semble que les mécanismes régulateurs, je pense que la plupart des gens sont d'accord avec moi, sont nettement inadéquats et que la structure de la gouvernance doit être totalement refaite, bien que vous aviez précisé, et vous avez tout à fait raison, que les valeurs existent et que beaucoup de bon travail a été fait. Pour l'avenir, M. Lake vous a posé la question sur ce que vous envisagiez, vous avez dit que vous attendiez les rapports du groupe de travail avant d'apporter des changements, et cela se comprend très bien. Mais au sujet du processus, j'ai des questions sur pratiquement trois domaines.
Premièrement, est-ce que les échelons élevés de la Gendarmerie royale du Canada font partie du groupe de travail?
Deuxièmement, vous avez mentionné plus tôt avoir parlé au public. Je pense que c'est très important. Le groupe de travail se réunit à huis clos. Nous ne savons pas qui il rencontre et ce qu'il fait, mais je pense qu'il devrait y avoir un dialogue avec le public et surtout avec les membres de la Gendarmerie royale du Canada.
La troisième question est peut-être beaucoup plus complexe — et ce n'est pas juste de vous la poser puisque vous êtes au poste depuis seulement deux ou trois mois; finalement, il s'agit d'une question très difficile concernant la confidentialité liée à l'application de la loi. Nous ne voulons pas que l'organisme d'application de la loi du pays soit dirigé par la politique, mais il doit y avoir un certain lien avec le peuple canadien et le meilleur moyen de le faire est par le Parlement. Envisagez-vous un lien avec le Parlement, comme c'est le cas du SCRS, que vous connaissez très bien en raison de vos antécédents professionnels?
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Merci, monsieur le président.
Tout d'abord, je pourrais donner des précisions sur l'un de mes propos, celui auquel vous venez de faire référence. J'ai indiqué, ou je voulais indiquer, que je n'envisageais d'apporter des changements structurels importants avant de recevoir le rapport du groupe de travail, mais cela ne veut pas dire que nous ne faisons rien ou que nous ne pouvons rien faire. Comme je l'ai dit, j'ai déjà apporté quelques changements au niveau de l'état-major supérieur et j'en prévois d'autres. À titre d'exemple, j'ai mentionné que nous devions trouver un directeur financier permanent et le ou la recruter.
L'état-major supérieur de la force participe très activement au groupe de travail. Comme je l'ai indiqué dans mes remarques préliminaires, nous avons formé un comité directeur pour effectuer le travail dans huit domaines entrant dans le mandat du groupe de travail. Ce comité directeur comprend trois sous-commissaires. Le sous-commissaire Sweeney y est notre « maître d'oeuvre ». Nous avons aussi le surintendant de la police en chef Graham Muir qui est notre directeur des politiques et de la planification stratégique et qui travaille pratiquement à plein temps au sein du groupe de travail. L'état-major supérieur, comité dont je suis le président, collabore aussi régulièrement avec tous les sous-commissaires qui en font partie. Et il y a d'autres personnes : le directeur des ressources humaines, notre principal conseiller juridique et le comité directeur pour le programme des RRF.
Je conviens qu'il est nécessaire de dialoguer à la fois au sein de la force et avec les Canadiens. J'ai aussi mentionné que M. Brown a invité, au nom du groupe de travail, tous les membres et employés ainsi que les anciens de la GRC à communiquer directement avec le groupe de travail. J'ai aussi souligné qu'il fallait que nous engagions des discussions au sein de l'organisation.
Il existe aussi un certain nombre de mécanismes officiels visant à accroître la participation des Canadiens. Dans quelques semaines, je rencontrerai le comité consultatif du commissaire sur les questions autochtones. Nous avons aussi un comité consultatif sur les questions relatives aux minorités visibles. Nous avons des mécanismes pour communiquer avec nos partenaires contractuels.
En ce qui concerne la confidentialité liée à l'application de la loi, il faut certainement trouver un équilibre. Mais, certains éléments d'une enquête criminelle ne doivent pas être divulgués entièrement. Par exemple, il n'est pas nécessaire que les gens faisant l'objet d'une enquête en soient informés. Il n'est pas nécessaire de leur divulguer, ou à d'autres personnes, les détails de l'enquête ni les techniques d'enquête.
La surveillance indépendante de la police et de la GRC est certainement une exigence, vous avez entendu M. Kennedy. Je ne contesterai certainement pas que les mécanismes mis en oeuvre ne sont pas adéquats. Nous avons entrepris un travail intéressant à cet effet. Nous participons à un projet pilote en Colombie-Britannique auquel participe le personnel de M. Kennedy. Ce personnel est, dès le départ, tenu informé des enquêtes menées sur des allégations de comportements inappropriés au nom des membres de la GRC.
Encore une fois, je pense qu'il y a des lacunes, comme l'indique le rapport du juge O'Connor en ce qui a trait à l'affaire Arar. il faut améliorer ces mécanismes.
Honnêtement, je ne saurais dire si un comité parlementaire spécial ou un processus spécial seront établis pour s'occuper des questions relatives au maintien de l'ordre.
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Merci, monsieur le président.
Monsieur Elliott, j'aimerais vous poser trois petites questions. Je prends note que vous avez été avocat durant la plus grande partie de votre carrière professionnelle. Vous êtes un ancien avocat général de ministères responsables au gouvernement fédéral, si je comprends bien. Donc, je vous pose une question d'avocat à avocat, étant donné que nous sommes diplômés de la même école de droit.
Dans le rapport rédigé par M. Brown en deux mois, le long délai que lui a donné le ministre — deux mois pour enquêter sur cette affaire — l'éléphant dans la pièce est le fait qu'il demande à la Police provinciale de l'Ontario d'étudier très attentivement ce qui s'est passé entre le Service de police d'Ottawa... dans son enquête de la GRC.
Tout d'abord, pouvez-vous nous dire si la Police provinciale de l'Ontario mène actuellement une enquête?
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D'accord. Puis-je alors posé la question sur le chapitre 8 du rapport, page 47 « Rétablir la confiance »? Elle complémente les remarques faites par le président.
Je dois vous dire que vos commentaires sur la consultation ou la participation ne me rassurent pas du tout. Je pense que le rapport rédigé par M. Brown est rempli de références à une culture de la peur, de l'autorité, de l'autoritarisme, du risque — pour quelqu'un qui poserait des questions — une culture d'obéissance aux ordres et cela pourrait très bien être la culture d'une organisation paramilitaire telle que la GRC. Je n'ai jamais travaillé à la GRC. Je ne suis pas sûr de cela, mais je suis très préoccupé par le fait que dans le rapport, M. Brown dit maintenant, même si le rapport qu'il a rédigé est rempli de références au secret et au manque de transparence, que le groupe de travail apparemment censé surveiller une nouvelle gouvernance et un changement culturel dans l'organisation sera lui-même secret. En fait, toutes les délibérations sérieuses sont supposées se faire à huis clos. Vous dites qu'une lettre a été distribuée par voie électronique à, je suppose, 26 000 membres de la GRC, mais je pense que personne n'acceptera que ce soit là une consultation ou une participation significative.
Je crois que la plupart des gens auront peur d'adresser une lettre à vous ou à n'importe quel membre du groupe de travail. Êtes-vous confiants que ce processus, ce groupe de travail d'ici au 15 décembre —environ trois mois — sera pressé par le gouvernement? En sommes-nous certains? Êtes-vous confiants que cela ouvrira toutes les portes et que les gens qui travaillent à la GRC et qui ont désespérément quelque chose à dire seront en mesure de le faire?
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J'aimerais revenir aussi sur le point soulevé par M. McGuinty. Nous participons à un processus, un groupe de travail qui va s'occuper de la culture, de la gouvernance, etc. Je ferai remarquer quelque chose que je constate très souvent au Parlement : beaucoup de députés croient que dès qu'ils ont identifié un problème, ils peuvent le résoudre en commandant un résultat — en adoptant une loi, etc. — et le problème disparaîtra comme par magie.
Les choses ne se passent pas de cette façon. Les questions et les problèmes sont trop complexes pour disparaître sur commande.
Ce qui me préoccupe, c'est que dans les organisations modernes qui réussissent, les organisations de haut niveau, le personnel de première ligne s'implique et participe énormément, me semble-t-il. Il peut servir de modèle de référence à ceux qui veulent construire des organisations solides. On forme une équipe et on demande aux membres d'y participer.
Je pense qu'il est essentiel que lorsque le groupe de travail recommandera des changements et que nous participerons à leur mise en oeuvre, les milliers de membres de la GRC partout au pays participent à ces changements, souscrivent à ses idées, les appuient et comprennent ce que nous essayons de faire. Sinon, je ne pense pas que nous obtiendrons les résultats que nous voulons.
C'est simplement quelque chose que je voulais vous dire.
Je pense aussi qu'il est très important... Il y a beaucoup de peur à la GRC. Cette peur n'est, en grande partie, pas nécessaire et je pense qu'il incombe à la GRC de faire en sorte que les gens n'aient plus peur.
Je voulais aussi dire à l'ancien commissaire que j'ai parlé à beaucoup de policiers de première ligne en Saskatchewan et qu'ils avaient beaucoup confiance en son leadership.
Je veux maintenant soulever une question. Les membres de la GRC avec lesquels je communique — depuis un grand nombre d'années — ne font pas confiance aux dirigeants de la GRC, cela ne s'applique pas à l'ancien commissaire, mais à d'autres commissaires et à des haut gradés. Ils parlent de choses comme celles mentionnées par Mme Duxbury : il y a trop de politique à la haute direction de la GRC; il ne s'agit pas de l'application de la loi, et du travail de la police, etc., mais de toute une série d'autres choses. Beaucoup de membres pensent que les promotions à la GRC ne reposent pas sur le mérite ou la performance au travail, mais sur d'autres critères.
Pouvez-vous peut-être nous expliquer ce que veulent dire les membres par « il y a trop de politique à la haute direction de la GRC »? Que veulent-ils dire?
Je demande à...
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Excusez-moi. Je vous écoutais en disant « oui, oui, je suis d'accord ».
Je pense que dans mes entrevues — 300 entrevues d'une heure, d'une heure et demie ou de deux heures, pour certaines — beaucoup de personnes ont dit que les agents, même s'ils n'étaient pas d'accord, acquiesçaient devant leurs supérieurs pour ne pas être pris en grippe. Le concept de « la politique » et... À la GRC, la culture était de tirer sur le messager. Aussi, très franchement, la politique était que si vous pensiez qu'on allait vous tirer dessus, il valait mieux ne rien dire du tout.
L'ensemble des membres, les officiers et les simples agents de la GRC associaient ce genre de politique au léchage de bottes — leur langage étant quelquefois beaucoup plus libre que cela — et ils pensaient que ces personnes se conduisaient ainsi pour protéger leur emploi au lieu de protéger leurs membres. Ce n'était pas toujours vrai partout, mais c'est ce qu'ils ont perçu chez les personnes occupant des postes supérieurs.
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Merci, monsieur le président.
J'ai d'emblée une observation à faire sur une partie de la conversation et des questions qui entourent le rapport Brown.
Je pense qu'il importe de souligner pour le compte rendu que M. Brown s'est inspiré de multiples enquêtes, y compris du travail de ce comité, et qu'en neuf semaines, il a rassemblé des pages et des pages d'information. Je pense qu'il y a déjà 35 000 documents et des milliers de courriels qui ont été fouillés et dont l'examen a culminé avec la publication d'un rapport. Donc bien qu'on répète constamment le chiffre de neuf semaines, c'est l'aboutissement d'années d'études à différents niveaux.
Monsieur Elliott, je suis content d'entendre que les statistiques sur la confiance montent et que vous vous rendez compte qu'il reste encore beaucoup à faire. Je suis aussi très content d'entendre parler d'un véritable examen confidentiel et exhaustif. Vous avez mentionné que cette stratégie avait fonctionné dans d'autres organismes dont vous avez fait partie. J'espère que vous irez de l'avant. Cette initiative fera croître la confiance, et les gens seront plus ouverts.
À cet égard, nous avons reçu hier le président de la Commission des plaintes du public contre la Gendarmerie royale du Canada, de même que la présidente du Comité d'examen de la Gendarmerie royale du Canada et la commissaire adjointe Conlin. Les questions ont justement tourné autour du thème des initiatives qui sont prises en ce moment pour faire de la place à des membres comme Denise Revine, le sergent d'état-major Lewis ou le surintendant de police en chef Macaulay, afin qu'il sachent qu'ils sont protégés quand ils ont une inquiétude à exprimer, qu'ils ont accès sans entrave à un endroit où ils peuvent facilement obtenir une résolution équitable quand un autre membre contrevient aux valeurs de la mission et de la vision de la GRC. Chaque fois, quand nous posions la question, il semblait qu'il n'y avait nulle part où aller. La commissaire adjointe Conlin a mentionné que ces personnes pouvaient bien sûr s'adresser à elle, mais qu'elle n'avait pas le pouvoir d'apporter des changements concrets.
Je vais vous poser la même question qu'à la commissaire adjointe. Ce groupe de travail est à la tâche. Je comprends que vous vous vouliez attendre les résultats de son travail et que vous n'êtes en poste que depuis quelques mois. Cependant, en tant que leader, avez-vous déjà une idée de quelques-unes des recommandations que vous allez faire au groupe de travail pour que jamais plus les membres n'aient peur de porter plainte lorsque leur plainte touche les valeurs centrales de la mission et de la vision de la GRC?
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Je suis résolument convaincu qu'il nous faut des mécanismes, des processus et des pratiques pour permettre aux gens de s'exprimer. Je pense qu'il doit y avoir plusieurs volets. Il faut commencer par des mécanismes internes. L'idéal serait que nous puissions relever les problèmes et les résoudre sans avoir à prendre des mesures extraordinaires. Le mot « extraordinaires » n'est peut-être pas bien choisi.
Par exemple, nous avons parlé un peu de la procédure de grief. À mes yeux, la plupart des griefs sont un signe que l'organisation n'a pas réussi à résoudre tels problèmes. Quoi qu'il en soit, il restera nécessairement des problèmes irrésolus, et il faut prévoir des mécanismes internes comme un processus de grief. Les superviseurs, les directeurs et les hauts fonctionnaires ont certainement leur rôle à jouer, mais je pense qu'il faut aussi nous pencher sur l'accès à des ressources externes.
Je pense qu'il faudrait envisager de nommer un ombudsman investi de pouvoirs plus définis que ceux de la commissaire en matière d'éthique en ce moment. Parmi les options qu'étudie le groupe de travail, il y a bien sûr celle d'un conseil sur l'éthique policière. Je sais que dans les échanges d'hier, il a été dit que dans d'autres administrations, comme au Québec et en Colombie-Britannique, il existe des mécanismes de redressement externes aux forces policières.
Je suis convaincu que la commissaire à l'intégrité du secteur public peut elle aussi jouer un rôle important relativement à la GRC, un rôle que prévoient la loi et le mandat de la commissaire, d'ailleurs.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je m'adresse moi aussi au commissaire Elliott et je continue dans la même veine que M. Sweet. J'aimerais que vous m'expliquiez encore un peu comment vous allez essayer de distinguer ceux qui sont considérés comme des employés mécontents de ceux qui ont une plainte légitime.
C'est une question très dure. Je la pose de cette façon parce qu'il ne faut pas oublier qu'il n'y a pas si longtemps, après avoir entendu les agents de police supérieurs avant de convoquer qui que ce soit et même de nous entendre, nous nous sommes fait dire que le monde était merveilleux et qu'il n'y avait pas de problème. S'il y avait des problèmes, ils étaient attribués à autre chose, mais ce n'était pas parce qu'il y avait de véritables problèmes.
L'opposition a voté en bloc, dans un vote officiel contre le gouvernement, pour sommer les Frizzell, Macaulay, Revine et Lewis à comparaître. N'oubliez pas que quand c'est arrivé, ils étaient perçus comme des fauteurs de trouble. C'était des employés mécontents. C'est écrit dans le hansard. Je ne donnerai pas de noms, mais il y a des députés du gouvernement qui ont dit qu'ils ne les laisseraient pas venir ici afin de leur donner une tribune pour vociférer contre des agents de police supérieurs simplement parce qu'ils étaient mécontents. Nous les avons fait comparaître ici et nous avons commencé à les entendre. C'est là que nous avons commencé à découvrir le pot aux roses.
Il n'y a pas si longtemps, les noms Frizzell, Macaulay, Revine et Lewis, que je répète, qui seront dorénavant connus comme ceux de héros légendaires à la GRC, étaient associés à des fauteurs de trouble. Ce n'était qu'il y a quelques mois.
J'aimerais savoir ce que vous allez faire. Je sais que vous ne connaissez pas encore tous les détails, mais comment prévoyez-vous arriver à les séparer? Il y a des travailleurs et des employés mécontents, mais il y a aussi des personnes honnêtes qui ont des plaintes légitimes à porter au sujet de l'organisation. Comment allez-vous faire?
Je vais mentionner une dernière chose, parce que je ne poserai pas d'autre question.
Nous avons entendu le président Kennedy de la Commission des plaintes du public contre la GRC, la présidente Ebbs du Comité d'examen de la GRC et l'ancien commissaire adjoint John Spice, l'ancien conseiller en matière d'éthique, recommander la désignation d'un ombudsman. J'aimerais savoir à quel point vous appuyez les recommandations qu'ils ont faites.
Je pense que vous allez trouver que notre rapport appuie beaucoup leurs propositions, tant pour ce qui est des modifications à la loi que de la création d'une fonction d'ombudsman. J'aimerais savoir où vous vous situez à cet égard et avoir une idée de l'appui que vous êtes prêt à donner à leurs recommandations.
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Merci. J'ai plusieurs choses à dire en réponse.
Il existe différents modèles, mais je pense qu'il nous faut des mécanismes et des processus pour que les gens puissent sortir de l'ombre et nous communiquer de l'information ou faire des accusations sans crainte de représailles. Nous devons nous doter d'un mécanisme d'examen indépendant de ces renseignements et de ces accusations. Il y a plusieurs façons de le faire.
Je ne suis pas encore en mesure de faire des recommandations particulières sur le meilleur mécanisme pour la GRC. Je pense qu'il faut, dans une certaine mesure, adapter ce mécanisme à la réalité de l'organisation dont il s'agit.
Je voudrais aussi vous dire ceci: je ne suggère pas que c'est une solution en soi. D'ailleurs, j'aimerais connaître le point de vue de Mme Duxbury, mais à mon avis, le leadership compte. Le fait que la commissaire Busson ait reconnu les personnes que vous avez nommées pour avoir fait ce qu'elles ont fait ne compte pas seulement pour elles, mais aussi pour toute l'organisation. Comme d'autres, je dis aux gens que s'il y a des problèmes, ils doivent les signaler. Les gens vont être traités avec respect, et nous allons mener les enquêtes voulues et réagir aux situations.
Il ne suffit pas de le dire. Il nous faut des mécanismes et des processus. J'ai hâte de prendre connaissance des recommandations de ce comité et du groupe de travail pour nous aider à les mettre en place. Certains d'entre eux seront du ressort de la GRC et d'autres, je suppose, seront externes et pourront devoir faire l'objet d'une loi.
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Récapitulons. Je veux être convaincu que si le même incident se reproduisait, les choses se passeraient différemment.
Si l'on regarde la séquence des événements, on voit que Mme Revine s'est acquittée de ses responsabilités. Elle avait pour mandat de réviser les services votés, mais en cours de route, elle a relevé un problème. Elle l'a porté à l'attention de son superviseur direct, le surintendant principal Macaulay. Il en a avisé le commissaire à l'éthique. Je pense que c'était la chose raisonnable à faire. Le représentant des relations fonctionnelles, le sergent d'état-major Lewis, est ensuite intervenu et a informé le commissaire qu'il y avait un problème. Il semble qu'à l'interne, ces personnes ont fait tout ce qu'elles devaient faire.
Rien ne s'est passé, donc ils se sont tournés enfin vers ce qu'ils voyaient comme leur dernier recours. En février 2004, le sergent d'état-major Lewis a écrit une lettre à la présidente du Conseil du Trésor, la ministre responsable de la GRC, qui était à l'époque Anne McLellan, ainsi qu'à la vérificatrice générale concernant toute la question du régime de retraite. Dans cette lettre, il déclarait qu'en tant que chef de la GRC, le commissaire Zaccardelli n'avait pas rempli ses obligations en vertu de la Loi sur la GRC, dans le contexte des accusations graves d'actes fautifs qui auraient été commis par des gestionnaires supérieurs. En gros, il est allé partout où il le pouvait et a fait tout ce qu'il pouvait à l'interne, mais rien ne s'est passé. Il s'est finalement adressé à la ministre. Il semble que la ministre soit le plus haut niveau, le dernier recours absolu.
Je sais qu'il y a d'autres mécanismes en place désormais, mais à l'époque, que ces personnes auraient-elles pu faire de plus? Si vous aviez été commissaire à l'époque, qu'auriez-vous attendu de la ministre dans cette situation?
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Je donne un cours de doctorat sur la gestion du changement. J'enseigne au MBA. Je pense que si vous lisez mon rapport, vous allez voir que la GRC n'est absolument pas prête pour gérer le changement. Le grand problème, bien sûr, c'est le manque de confiance et le doute profond que la GRC va vraiment tenir parole cette fois-ci.
Les membres de la GRC, comme beaucoup de fonctionnaires, comme beaucoup d'autres personnes, craignent le changement. Ils ont vécu beaucoup de vagues de changements depuis quelques dizaines d'années, mais il y a eu très peu de suivi.
Le tout premier conseil que j'aurais à vous donner serait de ne pas vous attendre à changer le monde immédiatement. Vous devez vous bâtir une crédibilité. Vous devez gagner la confiance des gens. La crédibilité et la confiance ne se gagnent pas par des paroles, mais par des gestes. Je pense qu'il est très important qu'au cours des six prochains mois, vous montriez que les choses vont être légèrement différentes, qu'il y a du respect.
En fait, je pense qu'il faut changer vos cadres de responsabilité. La GRC reconnaît vraiment qu'il est nécessaire de commencer par modifier ses politiques et ses structures, mais ces efforts ne serviront à rien si la culture demeure axée sur la politique plutôt que sur la pratique.
Je pense vraiment qu'il faut reconnaître que c'est une tâche incroyablement difficile que celle à laquelle... Je l'ai appelé Bill moi aussi, je vous prie de m'en excuser, mais je suis une universitaire et je n'ai pas le sens des convenances de toute façon. J'estime très important de reconnaître que bien qu'il faille prendre des mesures radicales, il existe des risques bien réels. Je serais portée à dire qu'en ce moment, la majorité des membres de la GRC sont sur leurs gardes et qu'ils se disent: « Voyons voir ce qui se passe, pas ce qu'ils disent, mais ce qu'ils font. »
Je tiens à souligner à quel point c'est important.
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Monsieur le président, j'aimerais seulement commencer par dire que je suis offensé qu'un honorable député m'accuse de me cacher derrière ceci ou cela. Quand j'étais fonctionnaire, j'avais l'obligation envers les gouvernements que je servais de prodiguer des conseils francs et confidentiels. Il serait malvenu que je révèle ces conseils.
Pour ce qui est de la question de la sécurité nationale et de la confidentialité, je souligne pour le compte rendu que la Cour fédérale du Canada a jugé qu'il était justifié de biffer certains renseignements.
Pour ce qui est des questions dont nous avons discuté aujourd'hui, monsieur le président, je tiens à rappeler que je suis très honoré d'être le commissaire de la GRC. La GRC se compose de milliers d'hommes et de femmes qui offrent des services exemplaires aux Canadiens. Il y a certainement des imperfections. Je dirais qu'il y a plus d'une faiblesse que nous devons corriger, mais même à cela, je pense qu'il y a beaucoup plus de positif que de négatif concernant la GRC. Il y a beaucoup plus de bien dans la GRC qu'il n'y a d'éléments à corriger. Les éléments à corriger sont nombreux et très importants, et je suis déterminé à faire tout en mon pouvoir pour collaborer avec l'institution, le groupe de travail, le ministre, le gouvernement et les parlementaires pour apporter les améliorations nécessaires, des améliorations dont la GRC a besoin et dont les Canadiens ont besoin aussi.
Merci.
Je tiens à remercier le comité pour les aimables commentaires qu'il a faits au sujet de mon leadership.
J'aimerais aussi me faire l'écho du commissaire Elliot. Je crois sincèrement que le leadership est important. Dans cette organisation, ce changement, comme l'a dit M. Lake, ne sera ni facile, ni immédiat. Je crois que cette manifestation de leadership de la part de la haute direction, et le genre de changements et d'initiatives, l'espèce de confiance que cette organisation est en train d'établir, de haut en bas et de bas en haut, avec la population du Canada, constituent un progrès très important. La haute direction de cette organisation est là pour stimuler le courage et appuyer le travail phénoménal qui se fait sur les terrains chaque jour. Et je pense que le message émanant des sphères supérieures, comme l'a dit Mme Duxbury, confirmé à maintes reprises par les actes, consolidera encore cette confiance tant parmi les membres de l'organisation que parmi le public. Il y a un travail incroyable à faire chaque jour. C'est du travail dangereux, et la sécurité du pays est en jeu.
Je tiens à remercier le comité. Cela a été un réel privilège pour moi que d'être pendant 32 ans et demi au service de l'organisation, et un véritable honneur que d'en avoir été commissaire pendant la courte période où je l'ai été. Je veux remercier le comité pour le soutien qu'il fournit pour l'avancement de l'organisation.
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Oui. J'aimerais énoncer une mise en garde pour le comité.
Le changement culturel est le type de changement qui est le plus difficile à effectuer. La plupart des tentatives de changement culturel échouent. Nous savons que même si toutes les étoiles sont bien alignées, il faut cinq à dix années pour que se confirme le changement culturel. Et toutes les étoiles ne sont pas alignées ici, alors j'aimerais prévenir le comité qu'il nous faudra laisser à la GRC une chance de faire ses preuves. Nous ne pouvons nous attendre à des miracles, ni à ce que des changements surviennent du jour au lendemain.
L'autre chose, c'est que le leadership est effectivement important, particulièrement en matière de changement culturel, parce que le leader illustre la culture par son propre comportement. Le leader a aussi accès aux ressources et aux leviers nécessaires à ce type de changement, comme la modification du cadre de responsabilité, des structures de récompense, etc.
Je tiens aussi à préciser que le leadership n'est pas affaire de position. Pour être leader, il faut avoir des suiveurs, et je pense qu'il importe de faire cette distinction. Il peut y avoir des leaders à tous les niveaux de l'organisation. Ils auront un énorme défi à relever, et je leur souhaite bonne chance.
Pour terminer, je tiens à vous remercier, commissaire Elliott, d'être venu aujourd'hui. Vous avez endossé des fonctions très lourdes, qui représentent une véritable gageure. Tout le monde, ici, au comité, vous souhaite la meilleure des chances. J'aimerais aussi reprendre le commentaire que vous avez fait au sujet des 17 000 membres de la Gendarmerie royale du Canada qui sont jour et nuit au service des Canadiens. Les études que nous faisons sont centrées sur les sphères supérieures et jamais ne reconnaissent l'énorme travail que font actuellement les membres de votre organisation.
Madame Busson, j'aimerais encore reprendre les commentaires qui ont été faits auparavant. Vous avez fait une brillante carrière dans la GRC. Vous avez comparu devant ce comité à quatre ou cinq reprises sur ce sujet particulier, et nous tenons à vous remercier pour votre aide et de votre contribution.
Madame Duxbury, merci encore. Votre rapport sera précieux pour le comité, dans sa réflexion sur ce sujet particulier.
Cela étant dit, chers collègues, j'annonce une pause. Je précise pour les membres que nous faisons une pause de dix minutes, puis nous reprendrons la séance, à huis clos.
[La séance se poursuit à huis clos.]
[La séance publique reprend.]
Dans votre rapport et quand vous l'avez présenté, vous aviez eu deux mois pour vous acquitter de cette tâche dans les limites du mandat qui vous avait été confié, selon les délais fixés. Vous avez fait de votre mieux. Vous avez toutefois fait deux ou trois affirmations très catégoriques. Quand on vous a demandé s'il devrait y avoir ou non une enquête publique, vous avez affirmé que cela n'apporterait rien de nouveau, ou du moins rien de nouveau qui en vaille la peine. Ce sont vos propos.
C'est curieux, parce que deux jours à peine plus tôt, vous aviez parlé de M. Gauvin et du fait qu'il avait abdiqué son devoir qui est de contrôler et d'obliger le ministère à rendre des compte. Deux jours à peine plus tôt, et alors que les versions définitives de ce rapport étaient rédigées, nous avons appris que c'était plus qu'une question de ne pas s'acquitter de son devoir; il avait en fait été assez proactif. Dans la salle du conseil du commissaire, il avait essayé d'exercer des pressions sur un agent de la section de l'AIPRP qui était sur le point de libérer des documents, et il avait voulu remplacer ces documents par d'autres de son cru, préparés à son bureau. C'est un commissaire adjoint.
Hier à peine, nous avons entendu de nouvelles allégations. Nous allons peut-être entendre des témoins qui contrediront le témoignage du commissaire devant nous ici, alors comment pouvez-vous afficher une telle assurance en disant qu'il n'y a rien de nouveau et qu'un processus de reddition des comptes au public n'apporterait rien de valable, et qu'en fait, ce qu'il faut, c'est un groupe de travail oeuvrant en secret derrière des portes closes?
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Cela fait plusieurs questions. Si j'en manque une, peut-être pourrez-vous me la rappeler à la fin, et j'essaierai d'y revenir.
Tout d'abord, en ce qui concerne le délai, il est vrai que nous n'avons eu que neuf semaines, et cela ne fait en réalité que huit semaines de travail, parce qu'il nous a fallu une semaine pour nous organiser et nous mettre en branle.
Pour accomplir le travail qui a été fait avant cette période, il a fallu que je m'assure d'avoir les ressources nécessaires pour le faire. Il est rapidement devenu clair qu'il existait déjà une grande quantité de documents d'information. Plusieurs études avaient déjà été faites, comme vous le savez. Votre comité, ici, avait entrepris son étude depuis déjà un certain temps; vous aviez entendu des témoins, qui avaient fourni d'amples renseignements.
Nous avons pu, très rapidement, obtenir tous les renseignements que nous jugions nécessaire de la part de la GRC. Nous les avons reçus très rapidement. J'ai pu mettre un effectif sur pied très rapidement, dans les deux ou trois jours qui ont suivi ma nomination. J'ai interrogé les cinq plus grands groupes de juricomptabilité du pays et j'en ai choisi un qui avait les ressources nécessaires, et qui pouvait les exploiter sur le terrain ici. Alors dès le départ, nous avons eu en mains une quantité phénoménale de matériel, et nous avons eu les ressources nécessaires pour mener notre étude.
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Absolument. Je dis que c'était involontaire, et je suis aussi convaincu qu'il y a eu des erreurs de jugement, et des erreurs de gestion.
Ce problème était bien connu dans toute la GRC. L'un des grands problèmes qu'a posés l'inaction du commissaire et de la haute direction, c'est que l'effectif de la GRC était au courant de ce qui se passait, et que rien n'était fait pour y remédier. Ce n'était pas un secret.
Ce que vous avons constaté, c'est que la direction, y compris le commissaire, n'a pas su reconnaître la gravité de la situation, ni comprendre les messages que recevaient ceux qui connaissaient les conséquences de leur inaction. Ils n'ont pas su vraiment le comprendre et réagir.
Le commissaire pensait avoir réglé le problème. Il a démis deux personnes de leurs fonctions, et il a supposé que c'est tout ce qu'il avait à faire.
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Là-dessus, je vais quand même vous interrompre, monsieur Brown. Je dépose au comité la copie du protocole d'entente. Vous parlez d'une erreur typographique, mais deux paragraphes traitent des liens entre l'inspecteur responsable de l'enquête et le commissaire adjoint Gork. Au point 3.1 de cette entente, il est dit — et je pense qu'on parle ici de l'inspecteur Roy —:
L'inspecteur [...] sera chargé de l'enquête de la GRC. Pendant toute la durée de celle-ci, il relèvera directement du commissaire adjoint D. Gork.
S'il y a une erreur typographique, il faudrait savoir où elle se trouve. Encore au sujet de l'enquêteur principal, on dit ceci au point 3.2:
La GRC, en la personne du commissaire adjoint Gork, supervisera son travail et pourra lui fournir au besoin certaines instructions pour l'aider dans son enquête.
Pour ma part, je considère que l'inspecteur Gork pouvait à sa guise diriger cette enquête puisqu'il avait, tel que spécifié dans l'entente, le pouvoir de superviser le travail de l'enquêteur et de lui fournir au besoin certaines instructions. Je crois que nous sommes loin de simples erreurs typographiques. Il ne s'agit pas ici d'un mot inexact: tout un paragraphe dit clairement que la GRC supervisait le travail de l'enquêteur du Service de police d'Ottawa.
Je pense que cette situation nous permet assez facilement de conclure que l'enquête n'était pas indépendante. En effet, le Service de police d'Ottawa n'a pas conduit son enquête de façon indépendante, étant donné qu'il était supervisé par un supérieur immédiat de la GRC. Je ne comprends pas que vous n'ayez pas vous-même pris connaissance de cela. On vous a signalé une erreur typographique, mais il me semble qu'un document d'une telle portée aurait dû faire l'objet d'un examen et d'une analyse de votre part. Je trouve qu'à cet égard, vous avez vraiment fait preuve de laxisme.
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Non, je n'ai pas eu la moindre difficulté à cet égard.
L'un des aspects de mon mandat était que je pouvais faire des recommandations si je le jugeais nécessaire, et j'étais prêt, quand je me suis lancé dans cette entreprise, à devoir faire ce genre de recommandations. Il se trouve que personne ne m'a refusé l'accès au moindre document. Personne n'a refusé de témoigner. Nous avons obtenu tous les documents électroniques dont nous avons eu besoin. Nous pouvions voir que des témoignages contradictoires avaient été présentés à ce comité, alors j'ai bien compris qu'il me fallait essayer d'aller au fond des choses. Je savais qu'il fallait que j'obtienne un accès absolu aux disques durs des ordinateurs, etc., pour savoir ce qui s'était passé. On ne nous a rien refusé.
Comme je l'ai dit dans le rapport, on ne sait jamais ce qu'on ne sait pas. Peu importe l'envergure d'une enquête; il y aura toujours cette petite voix qui nous chuchote à l'oreille qu'on manque peut-être autre chose. Il n'y a pas eu la moindre indication, dans ce que j'ai vu, pouvant donner à croire qu'il puisse y avoir des choses qui, en toute franchise, éveilleraient des soupçons chez moi.
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La deuxième question dont j'aimerais vous entretenir en est une qui, je pense, préoccupe tous les membres de ce comité. Elle concerne certains employés qui sont au service de la GRC. Très franchement, j'ai trouvé que la conduite de certains de ces individus a frisé l'outrage.
Je pensais, d'après ce que je savais de la loi, que vous auriez tous les motifs voulus pour mettre fin à leur emploi immédiatement. Tout le monde nous a dit, que ce soit l'ex-commissaire Zaccardelli ou d'autres personnes, que les conventions collectives et le régime syndical en place ne permettent plus ce genre d'actions. On paie ces gens-là pendant deux ans pour rester assis chez eux à toucher leur pension et leurs avantages sociaux, ou on les mute à un autre ministère. Apparemment, ils sont même recommandés à d'autres ministères, etc., et ils surgissent ailleurs.
Je trouve tout cela très déconcertant. Il me semble que pour les dénonciateurs à la GRC, ce doit être extrêmement frustrant. Ils sont rétrogradés, ils sont mutés pour avoir fait leur devoir, et les véritables coupables, bien souvent, sont ceux qui, vraiment, ne subissent pas la moindre pénalité, à cause de conflits sur des conventions collectives, etc.
Est-ce que le groupe de travail va se pencher sur ce problème et essayer de le comprendre pour voir ce qui peut être fait?
Merci, monsieur Brown. Je viens à peine de faire votre connaissance avant le début de la séance et je vous souhaite la bienvenue parmi nous.
J'ai trouvé cela curieux que, presque d'entrée de jeu, vous nous disiez ne pas avoir de déclaration à faire parce que vous pensez n'avoir rien de neuf à nous apprendre. J'aimerais poursuivre là-dessus.
Comme vous le savez, nous avons été nombreux au cours de nos délibérations à croire que nous ne serions pas en mesure de faire toute la lumière sur cette affaire avec les moyens limités dont notre comité dispose. Il faut instituer une enquête publique complète. Vous n'êtes pas d'accord avec nous là-dessus, et c'est votre droit. Je dois toutefois vous dire que votre rapport ne m'a pas appris grand-chose que nous ne savions pas déjà.
Je vous dirais, monsieur, que, si le gouvernement avait fait comme vous, vous n'auriez jamais réalisé ce que vous avez réalisé, parce que vous n'auriez pas pu aller aussi loin que nous. C'est la persévérance dont nous avons fait preuve dans cette affaire qui nous a permis d'en savoir autant. Nous avons demandé aux témoins de prêter serment, ce que vous n'avez pas fait. Vous n'avez fait prêter serment à personne, et les gens ne vous ont peut-être pas menti, mais ils l'ont peut-être fait et ils vous ont peut-être dit la vérité, mais peut-être pas toute la vérité.
Ici, les quatre partis représentés au sein du comité ainsi que nos analystes professionnels ont eu la possibilité d'examiner la question sous tous les angles. Qui plus est, le grand public a pu savoir ce que nous cherchions.
Si nous avons pu faire évoluer le dossier, c'est en partie grâce à la réaction du public, particulièrement des employés de la GRC qui ont suivi nos audiences et qui ont communiqué avec nous pour nous faire part de ce qu'ils savaient, ce qui nous a amenés à inviter un tel ou un tel à témoigner. Nous avons fait prêter serment aux gens et nous avons ordonné la production de documents, le cas échéant. Tous les documents sont du domaine public.
Vous n'avez rien fait de cela, monsieur. Je vous dirais donc que vous n'avez pas découvert grand-chose de nouveau. Je ne peux pas beaucoup contester ce que vous avez dit, mais vous n'avez rien dit que nous n'avions pas déjà montré.
J'aimerais vous demander si — non pas vous personnellement en tant que professionnel — mais si votre enquête a ajouté quelque chose au travail du comité et si vous pensez que vous seriez allé aussi loin si vous n'aviez pas pu vous inspirer de notre travail.
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Je ne veux pas être impoli, mais je vais vous interrompre parce que le temps file. Comme il n'y aura pas de deuxième tour, je dois me dépêcher.
J'ai toujours beaucoup de mal à comprendre pourquoi votre examen, avec ou sans le groupe de travail, est aussi valable et légitime qu'une enquête publique. Sans vouloir vous offenser, je pense qu'à peu près n'importe quel journaliste qui a suivi nos audiences aurait pu écrire votre rapport. Tout était là. Tout ce que vous pouvez avoir ajouté est suspect. Personne n'a prêté serment.
Nous avons fait prêter serment à des témoins sans aucun doute respectables, et nous avons quand même dû les talonner, revenir à la charge et leur dire que leurs réponses n'étaient pas complètes et qu'ils ne nous disaient pas tout. Des gens qui ont entendu leurs témoignages nous appelaient ensuite pour nous suggérer de convoquer telle ou telle personne qui nous dirait le contraire.
Vous n'avez rien fait de cela, monsieur. Comment alors pouvez-vous affirmer que vous avez apporté une valeur ajoutée à ce que nous avons fait étant donné que le grand public ne sait pas plus que nous qui vous avez rencontré et quand?
Pourriez-vous à tout le moins nous donner la liste de tous les témoins que vous avez entendus, la transcription de vos discussions et tous les documents que vous avez réunis, avec les dates des audiences pour que nous et le grand public puissions examiner de plus près ce que vous nous dites? Je peux vous croire sur parole, mais ce n'est pas suffisant pour proposer des mesures législatives. Je vous demande donc, à tout le moins, de déposer toutes ces informations pour que nous puissions y jeter un coup d'oeil et voir ce que vous avez fait.
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Merci, monsieur Christopherson.
Avant de passer à M. McGuinty, j'aimerais vous poser une brève question, monsieur Brown. J'ai lu le mandat du groupe de travail et les huit tâches qui vous ont été confiées. Je remarque qu'on passe sous silence toute la question de l'examen parlementaire.
Je sais que c'est très complexe. Il faut trouver un juste équilibre entre le droit de savoir du public et l'indépendance des forces policières. Je crois que le juge O'Connor a été aux prises avec ce problème. Dans la partie II de l'enquête sur l'affaire Maher Arar, il en a fait mention.
Votre premier mandat vous a été conféré par le pouvoir exécutif. Il venait du ministre et c'est à lui que vous avez adressé votre rapport. Votre deuxième mandat vous est aussi donné par le ministre, à qui vous allez rendre des comptes.
Un des piliers du pouvoir exécutif est le secret et la concentration du pouvoir — ce n'est pas le cas du présent gouvernement, mais c'était le cas des trois gouvernements précédents.
Je répète que c'est important. Il faut en discuter — pour savoir si c'est nécessaire — parce que la population a moins d'égards et est plus informée. Et je crois qu'il faudra à l'avenir dialoguer vraiment ouvertement avec le service de police national du Canada, probablement par l'intermédiaire du Parlement d'une certaine façon. J'espère que c'est quelque chose que votre groupe examinera, mais je ne vois cela nulle part dans votre mandat.
Auriez-vous des observations à faire à ce sujet?
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Comme vous le savez, j'ai conclu que l'enquête n'était pas indépendante et la vérificatrice générale a constaté qu'il n'y avait pas eu apparence d'indépendance. J'ai remarqué non seulement que l'enquête n'était pas indépendante, mais qu'on ne savait pas si elle comportait des erreurs.
Il est certain qu'une enquête doit se dérouler de la façon la plus indépendante possible. Je comprends qu'il est possible d'avoir une grande indépendance mais pas assez d'expertise ou encore l'expertise nécessaire, mais pas assez d'indépendance, et qu'il faut trouver un certain équilibre quelque part. Je ne sais pas si cet équilibre a été trouvé.
Je ne sais pas non plus si cela a influencé d'une façon quelconque les résultats de l'enquête. Quand on y pense, cette affaire a été mise au jour parce que des membres de la GRC qui faisaient partie de l'équipe d'enquête et qui n'étaient donc pas indépendants ont rendu l'affaire publique.
Des efforts diligents ont été effectués par des membres de la GRC. Toute la question des paiements d'assurance a été soulevée pendant l'enquête. Elle a été révélée par des employés de la GRC et, plus tard, par la vérification interne de la GRC.
J'avais des renseignements des deux côtés. Les avocats de la Couronne affirmaient que les preuves n'étaient pas suffisantes pour porter des accusations criminelles. Je ne sais pas si c'était parce que l'enquête comportait des lacunes ou parce que les preuves manquaient.
Pour moi, la meilleure façon de le savoir était de demander à des spécialistes des enquêtes de vérifier ce que le service de police d'Ottawa avait fait, d'examiner les dossiers et de voir si oui ou non l'enquête manquait d'objectivité. Je crois comprendre que cette vérification est en cours.
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Monsieur Brown, merci de votre rapport.
J'aimerais d'abord souligner que les témoins que nous avons reçus durant notre étude ne partagent pas l'obsession de l'opposition pour une enquête publique. Je veux que vous sachiez que beaucoup d'autres éminents témoins — en fait la plupart sinon tous — n'ont pas demandé d'enquête publique. Encore hier, l'ancienne ministre de la Couronne et ancienne vice-première ministre, Mme McLellan, a occupé votre fauteuil et a dit qu'une enquête publique n'était pas nécessaire.
Donc, j'aimerais vous rassurer en commençant, en vous disant que bien d'autres éminents témoins sont d'avis comme vous qu'il y a d'autres façons de faire.
Il y a une autre question qui m'intéresse, et c'est celle du personnel.
Après une vérification interne, Jim Ewanovich a été relevé de ses fonctions en octobre 2003, mais il n'a pas été renvoyé pour un motif valable. Il a continué d'être rémunéré par l'État jusqu'à ce qu'une entente de cessation d'emploi soit conclue en avril 2004, plus d'un an plus tard.
Dominic Crupi a été relevé de ses fonctions le 23 novembre 2003. Grâce à des crédits de congé, il a pu rester au sein de la GRC jusqu'à ce qu'il démissionne en juin 2005. Quand il a comparu devant notre comité, nous avons été surpris d'apprendre qu'il était toujours rémunéré par l'État et il l'est resté jusqu'à il y a quelques mois quand notre gouvernement a demandé activement son renvoi.
Il s'agit de personnes impliquées de près dans ce gâchis. Qui plus est, on savait qu'elle étaient mêlées à cette affaire. J'aimerais savoir pourquoi les employés de l'État ne sont jamais renvoyés? Quelle recommandation pouvez-vous formuler pour veiller à ce que le coupable d'actes répréhensibles de cette nature, si nous le connaissons, perde son emploi et ne continue pas d'être rémunéré ou d'obtenir des promotions?
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Certainement. Comme vous le savez, monsieur le président, nous sommes cinq, et je les citerai selon un ordre d'est en ouest.
Larry Murray est l'un des membres de notre groupe de travail. Bon nombre d'entre vous le connaissez peut-être. Il est un ancien sous-ministre ayant pris sa retraite il y a quelques mois seulement. Je crois que le dernier poste qu'il a occupé a été celui de sous-ministre des Pêches et des Océans. Il compte une longue expérience dans le domaine militaire, et à Pêches et Océans, une partie de ses responsabilités étaient liées à la Garde côtière.
Richard Drouin, qui a été pendant une grande partie de sa carrière le PDG d'Hydro-Québec, a, depuis son départ à la retraite, entrepris un certain nombre d'initiatives commerciales et siège à quelques conseils d'administration. Il a également oeuvré au sein d'une des organisations québécoises de surveillance des forces policières. Il apporte donc au groupe de travail non seulement un sens des affaires et une connaissance de ce qui se déroule aux tables des conseils d'administration, mais aussi une certaine expérience de la surveillance des forces policières.
Norman Inkster, ancien commissaire de la GRC, est aussi membre du groupe de travail. Depuis qu'il est retraité, il agit à titre de consultant en matière de questions policières auprès de services policiers.
Linda Black, une avocate de Calgary, siège également à un conseil d'administration des services policiers là-bas. Elle est en fait originaire de Terre-Neuve, où elle a grandi et pratiqué le droit, mais elle habite à Calgary.
Et bien sûr, il y a moi-même.
Voilà pour les cinq membres de notre groupe. Je suis fort heureux de l'éventail de compétences et de la variété des expériences que nous retrouvons à la table. Norman Inkster est le seul que j'avais déjà rencontré. En fait, les membres de notre groupe ne se connaissaient pas, mais nous interagissons bien, et je crois que les points de vue exprimés autour de la table nous seront vraiment utiles.
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Merci de faire une pause assez longue pour me permettre de répondre à une série de questions, ce que je vais m'efforcer de faire immédiatement. Si vous pouviez vous montrer aussi respectueux à mon égard que je le suis envers vous — c'est-à-dire attendre que vous ayez terminé avant de répondre — je l'apprécierais.
Je le répète, je trouve ironique que tout cet épisode qui s'est déroulé sous le régime libéral, au cours d'une période pendant laquelle nous n'avons vu aucune action concernant une question très sérieuse... et je ne pointe aucun coupable du doigt parmi les députés. Je dis simplement que rien n'a été fait.
Je vais réitérer mes propos. Lorsque j'ai été avisé de la situation, j'ai d'abord interrogé le commissaire, qui m'a dit que la vérificatrice générale examinait le dossier; j'ai alors communiqué avec celle-ci en lui disant qu'il me tardait de consulter ses délibérations à ce sujet. En fait, nous les attendions tous avec impatience. Je l'ai rencontrée en novembre à ce sujet, et elle m'a confirmé qu'elle transmettrait publiquement ses observations sur toute la question. Elle l'a fait le 21 février, je crois, devant votre comité. Le 28 mars, les allégations faites à ce comité concernant des actes répréhensibles étaient si graves — ce qui a surpris nombre d'entre nous — que le lendemain même, le 29 mars, j'ai annoncé que cela devrait faire l'objet d'une enquête et, en date du 12 avril, nous annoncions qu'un organisme serait créé à cet effet. Les membres du comité ont commencé leurs travaux, dont ils ont présenté les résultats le 15 juin.
Je suis d'accord avec le président. Je ne pense pas que ce dossier devrait sombrer dans la partisanerie. Vous êtes certes reconnu pour avoir adopté cette position dans ce dossier précis — encore une fois, c'est assez ironique, puisqu'il s'agit d'une mauvaise gestion des libéraux — mais vous avez le droit d'agir ainsi.
J'ai pris des mesures. J'ai agi énergiquement, sans vouloir miner, bien sûr, le travail de la vérificatrice générale, mais en souhaitant entendre tous les détails. Elle avait le droit de parler de la question, pas seulement à moi mais aussi au comité, au public. Sachant que rien n'avait été fait pendant des années, mes collègues et moi avons jugé qu'il était temps d'agir. Nous voulions des mesures concrètes, des réponses, et ce, le plus tôt possible, mais nous souhaitions aussi qu'on agisse avec précaution dans toute cette enquête afin de pouvoir progresser.
C'est bien ce que j'ai fait, et je crois que l'expérience montre que mes actions à cet égard n'étaient pas seulement exemplaires parce qu'elles étaient recommandées par des gens plus avisés que moi — y compris des membres de votre caucus —, mais aussi parce que la population canadienne voulait des réponses aux questions soulevées — de graves questions. Nous les avons prises très au sérieux, y avons réagi et continuons en ce sens.
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Bonjour, monsieur le ministre. Vous disiez que les problèmes se sont produits durant le règne des libéraux et que vous avez travaillé à les régler. Hier, M. Fitzpatrick parlait de ceux qui ont conçu la GRC, et je me demandais à la blague si la GRC était née d'un père conservateur et d'une mère libérale, ou vice versa. Dans la même foulée, je vous dirais qu'aujourd'hui, la GRC a des problèmes génétiques, des problèmes graves, qui ont été soulevés au cours des derniers mois.
Le Comité permanent des comptes publics en est aujourd'hui à sa 18e réunion sur ce sujet. Vous êtes peut-être le dernier témoin que le Comité permanent des comptes publics va entendre. Nous avons entendu aujourd'hui le nouveau commissaire Elliott qui nous a parlé de sa stratégie pour redonner confiance et reconstruire. Pourtant, la nomination d'un homme qui a travaillé à établir une certaine censure dans le rapport O'Connor nous laisse un goût amer quand on pense au besoin de transparence dans cette réforme.
Nous avons constaté que M. Brown, que nous avons vu plus tôt et à qui vous avez confié la présidence d'un groupe de travail d'enquête et qui a rédigé un rapport, n'avait même pas pris connaissance lui-même de toutes les informations que je juge pertinentes. Je pense notamment à l'indépendance du rapport d'enquête du Service de police d'Ottawa sur les problèmes qui existaient à la GRC. Nous nous sommes rendu compte qu'il en avait parlé dans son rapport, mais qu'il n'en avait pas pris connaissance lui-même. Il y a donc des manquements importants.
Je reviens à la nécessité d'une enquête publique — je l'ai souligné ce matin et plusieurs autres le font également — afin qu'on puisse vraiment faire la lumière. Nous n'avons pas l'impression d'être plus avancés, je vous le dis franchement. Nous avons reçu quelques bribes d'information. Il est certain qu'après 18 réunions, nous en savons plus, mais nous avons l'impression que nous pourrions en découvrir d'autres. Par ailleurs, nous n'avons pas l'impression que le Comité permanent des comptes publics a pour mandat d'aller au fond des choses. Nous ne sommes pas des enquêteurs et nos moyens sont limités.
M. Brown a proposé un groupe de travail en circuit fermé, encore une fois, pour régler des problèmes qui relèvent d'un manque de transparence. Cela nous paraît assez incohérent. Plusieurs demandent une enquête publique. Nous ne sommes pas les seuls à la demander, des journaux l'ont fait à maintes reprises.
Qu'en pensez? Avez-vous l'impression que la population pourra vraiment retrouver confiance en la GRC? Il s'agit vraiment d'une grave crise de confiance.
Ce matin, M. Elliott nous a parlé de quelques lacunes. Je regrette — et je lui en ai reparlé —, il ne s'agit pas de quelques lacunes, mais d'un problème fondamental de structure.
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En ce qui a trait à vos premières observations, j'ai également pris note des remarques de Mme McLellan. Je les ai passées en revue hier. Je dirais qu'il est difficile, dans une ambiance lourdement chargée de discours partisans, d'adopter une position neutre. Or, je crois que c'est ce qu'elle a fait en se prononçant sur ma façon de gérer la situation. Bien sûr, si elle avait désapprouvé ma gestion du dossier, j'aime à penser que cette affirmation serait vraie également.
Je crois qu'elle adoptait un point de vue juste. Elle sait ce que c'est que de se trouver dans cette position, et elle est consciente de la longueur et de la complexité d'une enquête publique. Même si elle et moi avons pu être en désaccord sur un certain nombre de questions et de politiques pendant la période où nous siégions l'un en face de l'autre à la Chambre des communes, je suis convaincu qu'elle cherchait toujours à trouver un moyen efficace pour que le travail se fasse, surtout en ce qui a trait à la sûreté et à la sécurité.
Mesdames et messieurs, disons-le: autour de cette table, nous savons tous ce qu'est la partisanerie politique. Nous nous y livrons tous en tant que partie nécessaire, vitale et dynamique de la démocratie. Mais lorsqu'il s'agit de la sûreté et de la sécurité de notre pays, plus nous pourrons mettre de côté la partisanerie, mieux ce sera pour nos citoyens. Je crois que c'est vraiment ce à quoi ils s'attendent dans ce domaine.
J'ai donc apprécié les remarques de Mme McLellan selon lesquelles je m'étais acquitté de mes responsabilités de façon plus ou moins adéquate. Je n'ai pas été étonné de la voir reconnaître que le recours à une enquête publique complète n'était pas l'idéal à cause de la durée — et l'argent est une considération, sans être la seule. Mais nous voulons des réponses et des solutions, et c'est pourquoi nous avons agi dans ce dossier.
Quant à la dernière partie de votre question au sujet de l'enquête O'Connor, toutes les recommandations liées à la GRC sont en voie d'être pleinement implantées, si ce n'est déjà fait. Dès le départ, moi-même, le premier ministre et notre gouvernement avons déclaré, lorsque ces recommandations ont été publiées, que nous les approuvions et voulions assister à leur mise en place.
Je pense que s'il y a un côté positif dans ce sombre tableau que forment les graves problèmes de ce type — l'affaire Arar et celle qui nous occupe —, c'est qu'il se produit des changements qui améliorent le système. Avec les modifications que la GRC a instaurées — le protocole d'entente et l'entente opérationnelle conclus entre la GRC et le SCRS, de même que l'entente opérationnelle entre les agences de sécurité au Canada et à l'étranger, notamment aux États-Unis, pour ce qui est du type de renseignements qui devraient être partagés et de la façon dont ils devraient l'être —, de grandes améliorations ont été apportées.
Il aura fallu une situation tragique pour que ces améliorations voient le jour, mais en fait, juste pour répondre à cette question, une implantation fort réussie des recommandations a découlé de l'enquête sur l'affaire Arar.
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Excellent. Merci. J'ai maintenant la parole.
Je vais ralentir le débit pour les interprètes. Merci.
J'aimerais commencer par... et monsieur le ministre, je vous donnerai la chance de faire des commentaires. Je vais vous poser une question, mais avant, j'ai plusieurs choses à dire. Je vais vous laisser du temps. J'aimerais tout simplement expliquer pourquoi, à mon avis, vous avez choisi cette option plutôt que d'instituer une enquête publique. De toute façon, je pense que ce n'est pas quelque chose qui est très difficile à savoir.
En fait, si vous demandiez à des gens — à la ministre actuelle, à l'ancien ministre, à des employés ordinaires ou à n'importe qui dans la salle — s'ils aimeraient qu'on fasse une enquête publique sur leur travail, je vous assure que la plupart seraient peu enthousiastes. C'est compréhensible du point de vue humain, et cela explique pourquoi l'ancienne ministre McLellan a ainsi pris position. Elle aurait été malavisée de se prononcer autrement.
À mon avis, si vous avez agi ainsi, monsieur le ministre, c'est parce que nous ne vouliez pas avoir à composer avec les conséquences. Vous n'avez aucun contrôle sur les résultats de l'enquête. Lorsque des événements sont mis au jour, ils deviennent une réalité incontournable. Nous avons vu ce qui s'est passé dans l'affaire Maher Arar, de même que dans l'affaire Air India. À mon avis, vous tentez d'éviter tout cela. Vous ne voudriez surtout pas ouvrir la voie à toute une nouvelle série de litiges.
On peut voir que votre stratégie a porté fruit, sur le plan politique, puisque vous êtes encore à la barre et que nous n'avons toujours pas d'enquête publique. Jusqu'à présent, c'est vous qui l'emportez. Cependant, je crois que vous n'aidez pas les choses et que vous ne servez aucunement les intérêts de la GRC.
J'ai donné la possibilité à votre enquêteur de répondre à mon allégation selon laquelle il n'avait pas apporté grand-chose à l'enquête, car il se trouve que ce qu'il a dévoilé était déjà connu et relevait même du domaine public. Il n'a pas nié mon affirmation. Il n'a ajouté que quelques précisions; je pense que c'est une preuve suffisante.
Et c'est pourquoi nous insistons pour qu'il y ait une enquête publique, pour les mêmes raisons que les affaires Maher Arar et Air India. Permettez-moi de vous dire ce qui, à mon avis, est à l'origine de tout cela, puis je vais vous donner la possibilité de vous expliquer.
C'est ce qui m'intéresse, monsieur le ministre. Et je conviens tout à fait que les actes n'ont pas été commis sous votre gouverne, et que les libéraux sont en grande partie responsables. Cette affaire vous concerne peu, néanmoins, vous êtes le ministre au pouvoir.
Si les choses s'étaient déroulées différemment et que la première fois que des témoins ont comparu dans le cadre de notre étude du rapport de la vérificatrice générale, lorsque des hauts placés du service de police d'Ottawa et de la GRC nous ont appris que l'enquête se déroulait bien, et que les malversations n'étaient, en fait, que des problèmes d'ordre administratif, nous avions accepté cette version des faits, monsieur le ministre, tout ce que le comité a découvert n'aurait jamais été su. Nous ne nous serions penchés que sur la vérification. Il va sans dire que cela n'aurait pas fait autant la manchette. L'histoire se serait terminée là. Mais pour vous, le problème serait toujours réel et ce serait à votre ministère de le régler, sans notre aide.
Voici donc ma question: compte tenu de la façon dont vous gérez votre ministère, comment seriez-vous parvenu à régler le problème, si nous n'étions pas intervenus?
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Pour répondre à la première partie de votre question, David, comme le veut la tradition... Tout d'abord, sachez que nous ne perdons habituellement pas notre temps, particulièrement en comité, sur des hypothèses, mais je suis tout de même prêt à répondre à votre question. Ensuite, nous n'essayons pas de prêter des intentions à un autre membre. Nous pouvons juger à partir de ses actes et de ce qu'il fait ou dit à la Chambre, mais pour ce qui est des motivations... Je trouve cela un peu étrange que vous vous attardiez autant là-dessus.
Si ce que vous dites est vrai — on mène une enquête publique et on découvre toute la vérité — et en même temps, vous dites qu'aucune des fautes n'a été commise sous notre gouverne. Par conséquent, si j'étais partisan, je n'aurais pas hésité à tenir une enquête publique afin de mettre les libéraux dans l'embarras. Nous n'avons rien à cacher puisque nous n'avons rien à nous reprocher.
Je conviens, David, que nous avons des opinions différentes. Vous préféreriez qu'on institue une enquête publique, qui s'étendrait certes sur plusieurs années. Comme beaucoup d'autres gens, je suis d'avis que les problèmes au sein de la GRC doivent être réglés le plus rapidement possible, et que pour tous ces hommes et femmes qui travaillent très fort tous les jours, je souhaite que cette force nationale continue d'être aussi réputée dans le monde... Je pense que c'est ce qu'ils veulent aussi.
Je dirais que l'une des preuves décisives du processus que nous avons mis en place, comme je l'ai fait lorsque j'ai annoncé que M. Brown serait chargé de l'enquête, c'est que tous les agents qui ont joué un rôle clé en dénonçant les problèmes — et je crois comprendre que le comité souhaite qu'on les félicite pour ce qu'ils ont fait, et je suis tout à fait d'accord avec lui, et c'est d'ailleurs ce que M. Brown a recommandé — eux-mêmes, en général, ne disent pas qu'il s'agit d'un mauvais processus. En fait, ceux que j'ai interrogés ont dit qu'ils souhaitaient aller de l'avant avec le processus afin qu'on puisse clore le dossier.
Par conséquent, les personnes qui sont probablement les plus concernées, celles qui ont le plus investi — c'est-à-dire celles qui ont pris un grand risque, en signalant ces problèmes au détriment de leur carrière — ne réclament pas d'enquête publique, parce qu'elles considèrent que le processus va bon train.
Il faut maintenant attendre de voir les recommandations qui seront publiées en décembre. Si nos opinions divergent beaucoup et que nous ne parvenons pas à accomplir ce que nous voulons, il peut arriver que je vous dise que vous aviez raison ou tort sur certains points. Chose certaine, le groupe de travail a besoin de temps pour travailler et aller au fond des choses.
Toute l'information a été mise à la disposition de M. Brown. Comme je l'ai dit précédemment, il a consulté presque 4 000 courriels et parcouru 35 000 pages de documents; il a passé en revue 100 heures de témoignages et a eu accès à toutes les personnes concernées. Le commissaire de la GRC...
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Merci beaucoup, monsieur Christopherson.
Avant de céder la parole à M. McGuinty, j'aimerais faire une dernière remarque. Je veux m'assurer qu'il n'y a pas de malentendu.
Le comité se réunit fréquemment à huis clos, particulièrement pour discuter de ses rapports et de ses travaux. Toutefois, lorsque nous entendons des témoins, il est extrêmement rare, voire même inhabituel, que nous le fassions à huis clos. Nous l'avons fait par le passé. Tout bien pesé, ce n'était probablement pas la meilleure chose à faire. C'est quelque chose qui s'est produit, si je ne m'abuse, une ou deux fois depuis les sept ans que je siège à ce comité. Cela ne se reproduirait plus aujourd'hui.
Par ailleurs, Monsieur Day, j'ai une question qui me chicote, et j'aimerais connaître votre avis là-dessus.
Vous êtes le ministre responsable de la Gendarmerie royale du Canada et, en plus, vous dirigez beaucoup d'autres organismes qui veillent à la sécurité nationale. Vous assumez une fonction très grande et importante. Pendant longtemps, une certaine indépendance existait entre vous et les organismes d'application de la loi. Cela a peut-être bien fonctionné, mais lorsque les choses dérapent — et nous l'avons vu dans l'enquête sur Maher Arar, de même que dans le cas qui nous occupe... Nous respectons cette tradition depuis longtemps et celle-ci nous a été bien utile, mais il serait peut-être temps de la revoir.
De nombreux organismes relèvent de vous. Qu'avez-vous à nous dire à ce sujet?
:
Merci, monsieur le président.
Monsieur le ministre, je vous remercie d'être venu aujourd'hui.
Je vais essayer de faire les choses selon les règles, monsieur le ministre, même si je dois admettre que cela a été plutôt difficile jusqu'à présent. À mon avis, vous avez fait des commentaires quelque peu désobligeants aujourd'hui. Depuis que vous avez été nommé au Cabinet et que votre gouvernement est au pouvoir, vous avez pris l'habitude de jeter le blâme sur les autres. D'ailleurs, je crois que M. Poilievre, qui a travaillé avec vous pendant trois ans, a été bien formé.
Toutefois, j'aimerais vous poser une question. L'auteur du rapport a comparu devant notre comité et nous a dit que les dépenses du groupe de travail s'élevaient à 3,5 millions de dollars et qu'il avait accordé un contrat de 375 000 $ à son cabinet d'avocats ou son ancien sans demande de proposition, avec l'autorisation du président du Conseil du Trésor. Le saviez-vous, premièrement, et l'avez-vous autorisé?
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Pas du tout, puisque vous demandez à des gens de s'exprimer. Comme pour le dernier document qui a été produit, semblable à celui-ci, des gens témoigneront et donneront des exemples concrets de situation où ils ont jugé que leur direction ou leur structure ne répondait pas à leurs attentes.
Comme c'est le cas pour de nombreux organismes semblables, lorsque vous demandez des renseignements à des gens qui craignent que d'autres, disons moins enclins à améliorer les choses, les utilisent contre eux, à moins que vous ne leur garantissiez un certain niveau de confidentialité, vous limitez la capacité de ces gens de participer et de dire: « Voici les changements dont nous avons besoin. » Ceux-ci se confieraient probablement aux membres du groupe de travail en leur expliquant pourquoi ces changement sont nécessaires. Ils parleraient aussi de leurs collègues, ainsi que des obstacles à leur avancement et à leur carrière. À cette fin, je crois qu'il est essentiel d'assurer une certaine confidentialité durant la période de questions.
Il semble que nous ne soyons pas d'accord là-dessus, David, mais à mon avis, il est important de mettre les gens en confiance. Des gens viendront témoigner au nom des travailleurs sur diverses questions et différences dans la structure. Qu'il s'agisse de cadres supérieurs, d'employés, de gens du domaine législatif ou encore de personnes qui veulent tout simplement parler de leur milieu de travail, ceux-ci doivent pouvoir s'exprimer en privé.
Le fait que ce groupe de travail est indépendant ne signifie pas qu'il a quelque chose à cacher. En fait, son objectif est de découvrir ce que les gens ont peur de dire, puis formuler des recommandations en conséquence. Il semblerait que vous ne soyez pas d'accord, mais je respecte votre opinion.
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Je dois admettre qu'il s'agit d'une question un peu délicate, quoique très pertinente. Pour être honnête avec vous, au début du processus, avec tous les médias qui ont couvert l'enquête Maher Arar, et certes celle-ci, je me suis demandé si la confiance de nos alliés, particulièrement sur le plan de la sécurité, ne s'était pas effritée, en grande partie à cause de la publicité.
J'ai rencontré nos partenaires — et non seulement nos alliés traditionnels, c'est-à-dire la collectivité des cinq, qui inclut la Grande-Bretagne et la Nouvelle-Zélande —, mais aussi les ministres du G8 responsables de la sécurité, y compris notre homologue russe, à l'occasion du Sommet, et je leur ai, en fait, posé la question. J'ai commencé en disant que j'avais une confiance absolue envers la GRC, mais que je me demandais, compte tenu de tout ce qu'on entend dans les médias, si leur confiance s'en trouvait diminuée. Tous m'ont répondu que non, en aparté, étant donné que je n'ai pas posé la question publiquement. Je n'ai pas tenu une conférence des forces policières internationales pour demander cela. Toutefois, ils ont tous dit qu'ils nous comprenaient et qu'aucune force policière n'était parfaite, mais qu'ils savaient que des mesures draconiennes avaient été prises pour remédier au problème. Ils ont indiqué que leur confiance n'avait pas du tout été ébranlée, sur le plan opérationnel, et qu'ils étaient reconnaissants de la collaboration de la GRC.
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Ce que j'aime bien faire, c'est non seulement me rendre dans les divers détachements, mais aussi m'arrêter sur le bord de la route lorsque des agents y mènent des opérations, et ce n'est pas parce qu'un policier m'a indiqué de me ranger. Comme nous le savons tous, c'est comme lorsqu'on fait du porte-à-porte dans les circonscriptions; on obtient directement le point de vue des gens, sans intermédiaire. Lorsque je parle à des agents littéralement sur le bord de la route, ou dans la rue, ou encore dans les détachements, ils s'expriment assez honnêtement puisque leurs supérieurs ne sont pas là.
Ce que les agents nous disent assez régulièrement, c'est qu'ils souhaiteraient qu'on mette en place un système visant à régler le problème et non pas à le camoufler. Ils sont presque tous d'accord sur le fait qu'il y avait des problèmes aux niveaux supérieurs, et cela les préoccupe. Ils sont fiers de la profession qu'ils exercent.
Dimanche prochain, j'assisterai à une cérémonie à la Division Dépôt de Regina à la mémoire des agents tués en service, et le lendemain, je serai présent dans une classe de finissants. Ce sont les deux extrêmes. Aux yeux des finissants, ni la crainte de mourir en service ni les accusations qui ont été faites avant qu'ils soient recrutés ne suffisent à éliminer leur sentiment qu'ils sont faits pour faire ce métier, c'est-à-dire protéger leurs concitoyens.
En général, les simples agents vivent un sentiment de frustration. Ils souhaitent qu'on mette un système en place en vue de régler ce genre de problème. Ils croient bien, comme l'a mentionné la vérificatrice générale, et cela a d'ailleurs été prouvé, que le fonds de pension en tant que tel est intact. Les sommes qui avaient été prises illégitimement pour être versées dans le régime d'invalidité et le régime d'assurance, qui totalisaient 1,3 million de dollars, ont été remises. Les agents sont certains de cela, mais ils veulent que des mesures soient prises. Ils veulent qu'on s'occupe du problème comme il se doit. Ils ne veulent pas de camouflage et ils attendent avec impatience le jour où une structure sera mise en place de sorte qu'ils puissent accomplir leur travail sans avoir cette épée de Damoclès suspendue au-dessus de leur tête.
C'est cette épée de Damoclès qui préoccupe certains d'entre eux. Ils m'ont tous affirmé par contre qu'ils sont fiers d'être des agents, qu'ils aiment leur travail et qu'ils savent que, comme dans toute autre organisation, la vaste majorité des gens, une très grande proportion, agissent correctement et continueront de le faire.
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Non. En ce qui concerne leur travail, ils ont une opinion favorable, notamment au sujet de leur formation, et ils ont le désir de bien accomplir leur tâche.
Je ne veux pas faire de commentaires partisans, mais je dois dire qu'un certain nombre d'agents m'ont mentionné qu'ils approuvent les nouvelles lois que nous proposons, notamment l'incarcération obligatoire pour les personnes qui commettent des crimes avec une arme à feu. Ils sont d'accord sur le fait que les délinquants qu'ils arrêtent doivent purger une peine d'emprisonnement appropriée et ne pas s'en tirer facilement. Les agents sont frustrés à propos de certains éléments du système et j'espère que nous pourrons y apporter des changements.
Ils sont aussi ravis que nous respections notre engagement concernant l'embauche d'un millier d'agents au sein de la GRC dans l'ensemble du pays, qui a donné lieu à un agrandissement de 37 millions de dollars de la Division Dépôt de Regina. Ils sont également heureux de constater que 64 millions de dollars seront consacrés à la mise en oeuvre d'une stratégie antidrogue et que 6 millions de dollars supplémentaires seront attribués au centre de lutte contre l'exploitation sexuelle. Ils sont satisfaits de ce genre de mesures.
L'insatisfaction et la frustration qu'ils ont exprimées viennent du fait qu'ils sont confrontés à des obstacles quand il s'agit d'empêcher les délinquants de sévir. Ils souhaitent que le gouvernement élimine ces obstacles et ils veulent une baisse des taux de récidive. Ils veulent protéger les droits des citoyens et ils demandent au gouvernement de prendre des mesures en ce sens.
Encore une fois, je ne veux pas faire de commentaires partisans, mais j'espère que le Sénat, qui est majoritairement libéral, adoptera certains des projets de loi qu'il retient actuellement, car les agents de la GRC et les policiers en général y sont très favorables puisque ces mesures les aideraient à assurer la protection de notre pays.