AFGH Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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CANADA
Comité spécial sur la mission canadienne en Afghanistan
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TÉMOIGNAGES
Le mercredi 11 juin 2008
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Je déclare la séance ouverte.
J'aimerais vous souhaiter la bienvenue, chers collègues, monsieur Mulroney et nos auditeurs, à la 7e réunion du Comité spécial sur la mission canadienne en Afghanistan.
Ce soir, M. David Mulroney comparaît de nouveau devant nous. Pour les auditeurs, M. Mulroney est le sous-ministre chargé du Groupe de travail sur l'Afghanistan. Il témoignera ce soir pour discuter du premier rapport du comité du Cabinet sur l'Afghanistan. Vous vous souviendrez sans doute, chers collègues, que le comité du Cabinet sur l'Afghanistan a été créé en février 2008, essentiellement à la suite d'une recommandation formulée par le groupe d'experts de M. Manley.
Pas plus tard qu'hier, il a rendu public son tout premier rapport trimestriel intitulé L’engagement du Canada en Afghanistan : Tracer la voie vers 2011. M. Mulroney est ici aujourd'hui avant tout pour discuter du rapport avec nous. Bien entendu, mes collègues des différents partis politiques auront l'occasion de lui poser des questions sur le rapport.
Monsieur Mulroney, merci de vous être libéré pour nous. Je vous cède la parole sans plus tarder.
Monsieur le président et honorables députés, je suis vraiment ravi d'être de retour et d'avoir l'occasion de faire le point sur la situation et de répondre aux questions que vous pourriez avoir sur le rapport qui a été déposé hier.
[Français]
Vous savez sans doute que le premier rapport au Parlement sur l'engagement du Canada en Afghanistan, intitulé « Tracer la voie vers 2011 », a été déposé hier à la Chambre des communes.
Le rapport souligne la transformation de l'engagement du Canada en Afghanistan, ce qui comprend des priorités claires et des buts réalistes pour la période de 2008 à 2011. Notre but ultime demeure le même, c'est-à-dire laisser aux Afghans un pays viable qui se gouverne mieux et où règne un meilleur climat de paix et de sécurité.
Dans le rapport du groupe d'experts dirigé par M. Manley, on demande au gouvernement d'adopter, pour la mission en Afghanistan, une nouvelle stratégie plus complète, à la mesure de nos moyens et qui donne des résultats concrets.
La motion du gouvernement adoptée en mars reprenait de nombreuses recommandations du rapport.
[Traduction]
Depuis ma dernière comparution, beaucoup de travail a été accompli. Le gouvernement a maintenant établi six priorités ciblées pour notre travail en Afghanistan. Quatre se concentrent sur Kandahar et deux sont à l'échelle nationale. Si vous me permettez, je vais les énumérer rapidement: premièrement, améliorer la sécurité et promouvoir la loi et l’ordre en renforçant la capacité de l’Armée nationale afghane et de la Police nationale afghane et en soutenant les efforts complémentaires au chapitre des moyens judiciaires et des mesures correctionnelles; deuxièmement, à Kandahar, créer des emplois et offrir des services d'éducation et des services essentiels comme l'eau; troisièmement, fournir une aide humanitaire aux gens dans le besoin à Kandahar, y compris les réfugiés; quatrièmement, renforcer le dialogue et la gestion de la frontière entre l'Afghanistan et le Pakistan; cinquièmement, bâtir au pays des institutions afghanes qui sont au coeur de nos priorités, surtout celles à Kandahar, et soutenir les processus démocratiques comme les élections; et enfin, contribuer aux efforts de réconciliation visant à affaiblir les groupes rebelles et à favoriser une paix durable.
Ces priorités accroissent considérablement l'attention que nous portons à la province de Kandahar; la proportion des programmes qui y sont consacrés passera de 17 à 50 p. 100 d'ici l'an prochain. Nos ressources militaires et civiles concentreront leurs efforts à aider à bâtir une province de Kandahar plus sûre et mieux dirigée pouvant offrir des services essentiels à ses citoyens grâce à l'appui d'un gouvernement national qui possède les moyens de mieux gérer ses frontières et de soutenir à long terme les gains réalisés en matière de stabilité et de reconstruction.
Dans l'ensemble, le Canada fait passer son allocation décennale pour le développement et la reconstruction de l'Afghanistan de 1,3 à 1,9 milliard de dollars jusqu'en 2011. Trois projets de premier plan — la réfection du barrage Dahla, la construction et la remise en état de 50 écoles dans la province de Kandahar et l'éradication de la polio partout en Afghanistan — seront des exemples manifestes de notre engagement permanent envers l'avenir de l'Afghanistan. En répondant aux besoins les plus visibles et les plus urgents de la population de Kandahar et de l'ensemble du pays, l'aide des Canadiens visera uniquement à améliorer la vie des Afghans et permettra au gouvernement d'acquérir la capacité de gouverner l'Afghanistan dans l'avenir.
Les objectifs pour 2011 établis par le gouvernement sont ambitieux et non sans risque. Je crois toutefois qu'ils sont aussi réalisables tant que les efforts du Canada demeureront résolument ciblés et étroitement alignés sur ceux du gouvernement afghan, en tenant compte, avec nos alliés, de la sécurité sur le terrain.
Le rapport déposé hier est le premier d'une série de rapports qui seront soumis au Parlement chaque trimestre, reflétant nos efforts en vue de mieux informer les Canadiens sur notre mission en Afghanistan et répondant directement au libellé de la motion en mars.
Je serai heureux d'entendre vos commentaires ou vos questions sur ce premier rapport.
[Français]
La population canadienne a de quoi être fière des réalisations de tous les Canadiens qui travaillent sur le terrain en Afghanistan, et de la façon dont ils améliorent la vie des Afghans.
[Traduction]
Merci beaucoup.
J'attends vos questions.
Merci, monsieur Mulroney, pour votre déclaration et votre résumé du premier rapport du comité du Cabinet sur l'Afghanistan.
J'aimerais procéder à deux séries de questions. Sept minutes seront accordées à la première, et cinq, à la seconde. La deuxième heure de la séance sera consacrée aux travaux du comité.
Je vais commencer par M. Dosanjh; vous avez sept minutes.
Si je termine avant que mes sept minutes soient écoulées, j'aimerais partager mon temps de parole avec mon collègue.
Vous risquez de trouver la première question que je vais vous poser inappropriée. Nous avons remarqué pour la première fois depuis le début de la mission que le père d'un jeune homme qui a perdu la vie — la dernière victime en Afghanistan — a beaucoup critiqué la mission. Tout d'abord, permettez-moi juste de dire que peu importe ce que le père a dit, il était tout à fait dans son droit de le dire. Ses sentiments sont légitimes; il a perdu un être cher. Nous avons envoyé son fils risquer sa vie.
D'après ce que vous savez de la mission, et peut-être des familles des soldats, avez-vous remarqué un changement d'attitude chez les membres de la famille immédiate ou éloignée des militaires qui sont envoyés là-bas? C'est peut-être une question injuste et, si c'est le cas, n'y répondez pas. Ça m'a frappé quand c'est arrivé. Si je me souviens bien, c'est la première fois que quelqu'un a dit cela.
Je ne peux pas vraiment parler pour les membres de la famille, si ce n'est pour dire que — et je crois que le chef d'état-major de la Défense a très bien résumé la situation — nous ne pouvons pas imaginer l'angoisse que ressent un parent, et nous sommes de tout coeur avec les gens qui ont perdu un être cher.
Pour ceux d'entre nous qui travaillent sur la mission, cela fait ressortir encore plus clairement notre responsabilité d'expliquer efficacement ce que nous faisons et pourquoi nous le faisons. C'est essentiellement ce que nous avons essayé de faire dans ce rapport et dans la série de séances d'information techniques que nous avons tenues. Nous comprenons que nous devons aux Canadiens d'être aussi rigoureux, francs, directs et honnêtes que possible, et aussi de continuellement les tenir au fait et de leur expliquer ce que le Canada tente d'accomplir.
Des incidents comme ceux que nous avons vus et celui dont vous avez parlé ne font que nous faire prendre conscience de notre responsabilité envers les Canadiens.
Merci. Je vous prie de m'excuser si vous avez trouvé que la question était inappropriée.
Voici ma deuxième question. Quand la résolution à la Chambre a été adoptée, il était entendu qu'au cours de l'année qui restait environ avant le début du prolongement de la mission, la priorité et l'orientation de la mission changeraient. Vous nous avez dit ce qui se passe — il y a cinq nouvelles écoles, etc. Expliquez-nous, en termes simples pour que les Canadiens comprennent, de quelle façon et dans quelle mesure la mission et son orientation sont en train de changer. Allons-nous réussir à concrétiser ce changement?
Les éléments fondamentaux d'un ensemble, que je trouve sincèrement en transformation, car je travaille sur cette mission depuis longtemps, sont les suivants.
Tout d'abord, nous avons établi clairement six priorités fondamentales pour le Canada. Ce sont les six points sur lesquels nous allons nous concentrer. Ils orienteront nos projets. Ils orienteront nos efforts de diplomatie bilatérale avec le président Karzaï, conjointement avec nos alliés. Le Canada se concentrera sur ces priorités, qui relient toutes les activités des différents intervenants canadiens en Afghanistan.
Ensuite, nos programmes, l'argent dépensé par l'ACDI, par les Affaires étrangères — il s'agit de la plus grande part des programmes — seront et sont en train d'être axés directement sur ces priorités. Les programmes ne seront donc pas largement répartis; ils viseront précisément l'atteinte de ces résultats. Comme je l'ai dit au début, ces priorités permettront aussi de faire en sorte qu'une plus grande part de l'argent que nous dépensons sera consacrée à Kandahar, où le Canada a un niveau de responsabilité très élevé, où les Forces canadiennes sont déployées et où nous jouons un rôle de chef de file. En outre, nous établissons des indicateurs publics, qui mesureront les progrès sur lesquels nous devrons faire rapport chaque trimestre. C'est nouveau. Même si un ou deux autres pays ont peut-être établi des indicateurs, je n'en connais aucun qui rend des comptes à la population, comme nous le ferons tous les trimestres.
Enfin, l'autre partie de la transformation de la mission touche l'aspect humain. Pour réaliser ce que nous voulons faire pour ces projets à Kandahar — la réfection du barrage Dahla, la construction des écoles, la campagne d'immunisation contre la polio et les autres projets que nous mènerons là-bas —, nous avons besoin d'encore plus de civils d'un niveau plus élevé que ceux que nous avons déjà. Nous avons quelque 24 civils à Kandahar. Nous avons affecté un nouveau haut responsable civil qui dirige les activités là-bas. D'ici la fin de l'année, nous porterons le nombre de civils à Kandahar à 70 et à des niveaux encore plus élevés. C'est un changement profond dans notre façon de procéder. Le plan que nous avons mis au point sur ce que nous faisons à Kandahar ne sera plus un plan militaire comportant des aspects de gouvernance et de développement. Ce sera un plan pangouvernemental qui est appuyé par l'armée. C'est un énorme changement.
Je vais poser deux questions en une. On essaie de toute évidence d'obtenir la sympathie et l'adhésion du peuple afghan. D'après ce que nous avions lu sur la fréquence des actes de violence dans d'autres régions de l'Afghanistan, de même que dans la province de Kandahar, nous avions compris que le nombre d'attaques au cours des derniers mois avait augmenté comparativement à la même période l'an dernier. Sommes-nous en train de gagner la lutte pour gagner le coeur du peuple afghan? La violence augmente-t-elle, pas seulement dans notre région, mais aussi dans d'autres régions de l'Afghanistan, ou est-elle en baisse?
Je pense que le rapport qui a été déposé hier essaie d'être le plus clair et honnête possible pour décrire la situation sur le plan de la sécurité. Cette tâche est difficile car, d'une part, nous tentons d'examiner l'ensemble du pays et que, d'autre part, la nature de l'insurrection est en train de changer. Ce que dit le rapport, c'est essentiellement que la situation est difficile au chapitre de la sécurité et peut se dégrader davantage, car nous sommes confrontés à une menace asymétrique, comme on l'appelle. Cela veut dire que les talibans ont appris, dans le sillage de l'opération Méduse et d'autres missions, de ne pas affronter directement les forces de la FIAS, les Forces canadiennes, mais de recourir au terrorisme, aux dispositifs explosifs de circonstance et aux embuscades pour vraiment ébranler les niveaux de confiance et la capacité des ONG et d'autres organismes. C'est une menace grave que nous prenons au sérieux et dont nous devons être conscients.
L'autre chose, c'est qu'il est très difficile de trouver une mesure appropriée pour les niveaux de sécurité. Vous pouvez compter le nombre d'incidents. Je crois que ceux qui les comptent à Kaboul diraient que le nombre d'attaques a en fait diminué comparativement aux autres années. Toutefois, de par leur nature, les attaques, celles de l'hôtel Serena et à la parade, avaient pour but de miner la confiance internationale à l'égard de l'Afghanistan. C'est donc une menace insidieuse. C'est une menace que nous prenons au sérieux, et nos alliés et nous croyons être en train d'acquérir des capacités pour y faire face.
[Français]
Merci, monsieur le président.
Permettez-moi d'abord de m'informer sur un point. On ne nous avait pas annoncé qu'il faudrait travailler à ce rapport. On l'a reçu hier, au cours de l'après-midi. Il n'était pas précisé que c'était l'objet de la rencontre d'aujourd'hui.
Est-ce que je me trompe?
Hier, M. Bachand a assisté à la réunion de notre sous-comité. On y a discuté du fait que M. David Mulroney comparaîtrait devant nous. On a aussi convenu que le rapport du Cabinet serait distribué tout de suite après la période des questions et que si, en raison d'une partie, il n'était pas favorable à une présentation ce soir, il entrerait en contact avec le greffier ou avec moi avant midi aujourd'hui. Or, on n'a reçu aucun appel. On a donc décidé de continuer.
Je n'en ai pas eu connaissance. J'aurais souhaité à tout le moins que vous informiez l'ensemble des membres du comité que nous allions travailler à ce rapport.
Oui, je comprends, mais les autres membres du comité n'ont pas nécessairement été mis au courant. En tout cas, moi, je ne l'ai pas été.
À la fin de la réunion du sous-comité, M. Hawn a dit à tous ceux qui étaient présents de s'assurer de parler à leurs collègues, étant donné qu'il fallait savoir avant midi aujourd'hui si on allait tenir la réunion ce soir avec M. Mulroney. Je n'ai reçu aucune plainte. Hier à la fin de la réunion, j'ai dit ouvertement que cette rencontre aurait lieu si personne ne se manifestait à ce sujet.
Désolée, je n'étais pas au courant. Je vais donc céder mon tour à celui qui était présent. Il va vous poser des questions.
Monsieur le président, j'aimerais tout d'abord remercier le personnel et les gens qui accompagnent les députés de ne m'avoir laissé que des tomates. J'apprécie beaucoup qu'on s'occupe de mon régime. Je veux les remercier sincèrement de ne m'avoir rien laissé à manger. Je voulais aussi remercier Dawn Black de m'avoir donné la moitié d'un hamburger pour que je puisse survivre jusqu'à 20 h 30.
Une voix: Et maintenant, tu manges ton temps.
M. Claude Bachand: En effet, mais pour les députés, il était important que je souligne ce point, à mon avis.
Monsieur Mulroney, j'ai regardé votre rapport. À mon avis, il est bon. Vous n'êtes pas sans savoir qu'une importante réunion va avoir lieu à Paris demain.
Y serez-vous?
Vous devez avoir breffé M. Emerson à propos de ce qui va se passer à Paris demain et de la position que va défendre le Canada.
Le rapport qui est devant nous représente-t-il la position que va défendre M. Emerson demain à Paris?
Le sujet de la réunion à Paris est la poursuite de la Stratégie de développement national de l'Afghanistan. Dans le cadre de ce processus, le Canada est un joueur très important. Le rapport contient tous les chiffres et tous les détails permettant de préciser la nature de l'appui canadien à l'Afghanistan. M. Emerson va probablement expliquer qu'entre 2001 et 2011, le Canada aura offert une aide totalisant 1,9 milliard de dollars et qu'il va probablement continuer à être le troisième plus important partenaire bilatéral de l'Afghanistan.
M. Emerson va donc défendre le rapport que nous présente ce soir le groupe que vous présidez. Il ne peut pas faire abstraction des normes qui y sont établies, n'est-ce pas?
D'accord.
Est-ce que la décision de Paris concernant le nouveau pacte pour l'Afghanistan risque de changer le contenu de ce rapport? M. Emerson va défendre ce rapport, mais il reste qu'une quarantaine de pays vont se pencher sur le pacte. Ils vont probablement proposer de nouvelles normes ou de nouveaux critères pour évaluer ce qui s'est passé au cours des dernières années, ce qui va avoir comme effet de relancer ce pacte.
Avez-vous l'intention de comparaître de nouveau devant le comité après la réunion de Paris, afin qu'on évalue ensemble les répercussions des décisions qui y auront été prises?
La direction de l'aide internationale en Afghanistan est faite par le Pacte pour l'Afghanistan qui a été établi il y a 10 ans. Lorsque nous avons établi nos priorités, nous avons été guidés par la direction adoptée par ce pacte. Nous croyons donc que cela va continuer. Comme vous pouvez le constater dans le rapport, nous avons jumelé chaque priorité à celles qui sont contenues dans le pacte.
Le Pacte pour l'Afghanistan comprend beaucoup de balises. Il y en a pour la gouvernance, l'aide humanitaire, le soutien à la sécurité. Toutes ces balises ne se trouvent pas nécessairement là-dedans.
Si la réunion de Paris se conclut sur un nouveau contexte qui va plus loin ou qui diffère des balises fixées par le Canada dans ce rapport, allez-vous en faire mention? Seriez-vous prêt à venir devant le comité pour nous expliquer qu'à Paris, on a retenu d'autres types de balises auxquelles le Canada va se conformer et qui pourraient ne pas être nécessairement conformes au rapport que vous avez déposé hier?
Le programme de la réunion a été établi dans le but de renforcer le Pacte pour l'Afghanistan. Il ne sera donc pas question de cela à Paris. Tout le monde accepte de se laisser guider par le pacte. Je suis d'accord avec vous: il est important que tout le monde agisse comme le Canada et respecte les buts du pacte. Le Canada veut profiter de cette réunion pour mettre l'accent sur nos progrès et sur le fait que le Pacte pour l'Afghanistan est un guide très important pour tout le monde.
Je n'ai plus de questions. Cela dit, je trouve qu'il s'agit d'un bon travail et j'aurais aimé que le ministre Emerson le défende à Paris. Si, lors de la réunion de Paris, on va plus loin que ce qui est contenu dans ce document, qu'on nous en fasse rapport.
Êtes-vous au courant de ce que présentera demain le Canada à Paris?
Je crois qu'il s'agira d'un message lié à notre rapport, et que le message de M. Emerson va renforcer notre soutien au gouvernement afghan et aux buts du pacte.
Merci beaucoup.
Merci beaucoup, monsieur Mulroney, d'être des nôtres. Moi aussi, j'ai passé en revue le rapport qui m'a semblé être une évaluation beaucoup plus réaliste de la situation que ce que j'ai entendu de la part du gouvernement. Je vous en suis reconnaissante.
À la page 6, on peut lire ce qui suit:
La majorité des Afghans n'ont pas accès à l'eau potable et à d'autres services essentiels; environ 80 p. 100 n'ont pas l'électricité. Pendant ce temps, l'économie de l'opium permet de financer la corruption et la violence insurrectionnelle tout en prospérant dans le désordre social qu'elle provoque du même coup. Le développement est un impératif urgent.
Je suis d'accord là-dessus, et c'est ce que je ressens depuis le début de notre intervention en Afghanistan.
De plus, à la page 17, sous « Priorité 6 », vous parlez de réconciliation politique. Mon parti croit que la réconciliation politique est d'une importance primordiale et que c'est notre seul moyen d'instaurer véritablement une paix durable en Afghanistan. Vous indiquez que la réconciliation devrait être dirigée par l'Afghanistan et facilitée par le Canada. Quels types de ressources sont-ils consacrés à cette partie de notre mission? Quel montant sommes-nous prêts à dépenser pour cette tâche? Si le gouvernement afghan demandait au Canada une aide directe dans les pourparlers de paix, pourrions-nous la lui accorder et, le cas échéant, de quelle manière?
Il s'agit d'une priorité qui, à nos yeux, est inévitable. Comme l'ont mentionné de nombreux commentateurs, en cas d'insurrection et de conflits, des solutions purement militaires ne suffisent pas; il faut donc une solution politique. Mais il y a un autre point important, et nous en avons parlé auparavant: le véritable objectif, c'est d'accueillir les gens dans la constitution et la primauté du droit de l'Afghanistan. Cela ne consiste pas à morceler l'Afghanistan et à permettre à certaines parties du pays de retourner à la situation horrible qui avait cours sous le régime des talibans.
Ce que nous devons faire, entre autres, c'est utiliser nos bons offices et ceux de pays aux vues similaires, y compris l'ONU — la Mission d'assistance des Nations Unies en Afghanistan joue un grand rôle là-dedans — afin d'encourager le gouvernement afghan à élaborer davantage sa politique. Pour être tout à fait honnête, le gouvernement afghan a lui-même transmis des messages un peu contradictoires, mais il reste que ces messages doivent venir de lui. Le gouvernement afghan a établi son initiative de « paix par la puissance » qui, selon nous, n'a pas vraiment démarré.
Il s'agit donc d'un processus auquel nous avons consacré, je crois, environ 14 millions de dollars. Il ne s'agit pas d'un domaine qui nécessite d'importantes dépenses en capital. Ce qu'on essaie de faire, c'est tout d'abord d'encourager le gouvernement à élaborer ses propres processus et à adopter une vision commune sur la voie à suivre, en organisant peut-être des réunions et des échanges. La deuxième chose, c'est d'encourager les activités qui doivent avoir lieu au niveau régional et local, ce que nous appellerions la justice « transitoire »: ainsi, les gens reconnaissent réellement qu'il existe certaines situations qui ne peuvent être conciliées ni acceptées et qui doivent être poursuivies en justice. Il y a un processus de guérison naturel... et cela se produit uniquement aux premières étapes.
L'autre chose qui, selon nous, devrait se produire, c'est que le gouvernement doit être en mesure de communiquer plus efficacement avec le peuple afghan pour expliquer ce qu'il fait et pourquoi. Nous observons donc ici un lien entre certaines de nos activités.
À titre d'exemple, nous croyons que le projet de remise en état du barrage Dahla — qui, d'après nos prévisions, créera environ 10 000 emplois saisonniers d'ici 2011 — représente également une étape assez importante dans la réconciliation parce qu'on crée des débouchés pour des gens qui pourraient autrement perdre confiance dans le gouvernement ou être tentés d'accepter l'argent offert par des insurgés et terroristes.
Par conséquent, toutes ces choses sont liées, mais ce qui importe le plus dans la priorité visant la réconciliation, c'est qu'il faut travailler avec la MANUA, l'ONU et les pays aux vues similaires afin d'encourager le gouvernement afghan à déployer son programme et à le mettre en branle.
Vous faites également mention, dans le rapport, des « signes de réconciliation entre les Afghans ». Quels sont-ils? Quels indicateurs sont utilisés pour appuyer cette déclaration dans le rapport?
Dans certains cas, des talibans aux échelons inférieurs et intermédiaires, faisant partie de l'insurrection, ont fini par accepter la primauté du droit et la constitution de l'Afghanistan. Cela se passe dans différentes provinces à différents rythmes. Nous aimerions voir une approche nationale plus uniforme. À l'heure actuelle, je crois que cela dépend de l'efficience et de l'efficacité des gouverneurs. Il faut tout simplement davantage uniformiser cela à l'échelle nationale.
Vous avez également mentionné le projet de remise en état du barrage Dahla en disant que c'est l'un des... comment l'appelle-t-on déjà? L'un des « projets de premier plan » du Canada?
Il y a une certaine divergence d'opinions dans la communauté du développement quant aux programmes de premier plan. Cela veut-il dire qu'on arborera les gros drapeaux du Canada? Qu'est-ce que ça signifie?
De plus, vous avez dit que 10 000 Afghans pourraient être employés pour faire ce travail. Qui serait l'entrepreneur ou la personne chargée d'un tel mégaprojet?
Le ministre a parlé hier des projets de premier plan et il a indiqué clairement que ceux-ci ne consistent pas tout simplement à apposer l'emblème de la feuille d'érable canadienne ou à hisser un drapeau. Cela fait écho à ce que le groupe d'experts de M. Manley avait conseillé au gouvernement, à savoir qu'en cas d'insurrection, on doit envisager le développement et l'aide sous un tout nouvel angle. Toutes les minutes comptent. Quand bien même on suit une voie traditionnelle qui s'est avérée la bonne au fil du temps, si elle s'étale sur une décennie ou deux, alors on risque de perdre à court terme: les gens finissent par perdre la foi et ce, encore plus rapidement puisqu'ils sont exposés à une pression intense de la part des insurgés.
Je crois que le groupe d'experts a certes compris tous les arguments en faveur de l'efficacité de l'aide. Le conseil qu'il donne, c'est que si le Canada et la communauté internationale ne parviennent pas, au bout de plusieurs années à Kandahar, en Afghanistan, à fournir de l'eau, des soins de santé et des services d'éducation, alors ils vont perdre la faveur de la population. Un projet de premier plan consiste vraiment à assurer les Afghans qu'ils peuvent croire en certaines choses: nous allons irriguer la vallée d'Arghandab, nous allons aider à remettre en valeur les terres agricoles, nous allons créer ces emplois — c'est ce que votre gouvernement est en train de faire relativement à la communauté internationale.
Donc, le message des projets de premier plan, c'est vraiment d'interpeller les Kandaharis. Si ces projets interpellent les Canadiens aussi, alors tant mieux, mais ce qui importe avant tout, c'est de transmettre le message aux gens au niveau local.
Pour ce qui est de la passation de contrats, on diffusera une demande de propositions au cours des prochains jours pour sélectionner un entrepreneur — que ce soit au Canada ou à l'étranger — qui concevra la première phase du projet. La main-d'oeuvre sera afghane. Pour ce qui est de l'entrepreneur, cela dépendra un peu de son savoir-faire et des résultats de l'appel d'offres.
Mais il s'agit surtout d'un projet afghan. Le ministre Zia en a parlé aujourd'hui en Afghanistan. Nous voulons nous assurer qu'à mesure que le projet avancera, nous laisserons au ministère local des ressources hydriques la capacité de s'en occuper dans l'avenir. Le ministère des ressources hydriques est une opération assez petite pour l'instant. Nous devons la renforcer.
Très bien.
Merci beaucoup, monsieur Mulroney.
Nous passons maintenant à M. Hawn du Parti conservateur.
Merci, monsieur le président.
Merci, monsieur Mulroney, d'être venu malgré un préavis si court.
Il n'y a pas si longtemps, plusieurs d'entre nous étaient en visite en Afghanistan, et je dois dire que les priorités correspondent beaucoup à ce que le conseil provincial de Kandahar, par exemple, et d'autres personnes nous ont dit là-bas. Je suis juste curieux de savoir comme vous en êtes arrivés à ces priorités? Quelle sorte de processus avez-vous suivi? Comment envisagez-vous l'éventualité de les modifier, s'il y a lieu?
Certaines des priorités ont découlé de notre analyse dans le cadre du groupe d'experts de M. Manley et des directives que nous avons reçues. D'autres étaient tout à fait évidentes, comme la défense des forces de sécurité nationale de l'Afghanistan. Je crois que de l'avis général, c'est la première des tâches.
Nous avons consulté soigneusement les Afghans et nos alliés, et nous sommes passés par un processus très rigoureux. Au bout du compte, l'idée, c'est que nous devons nous limiter et nous concentrer sur ce que nous pouvons faire avec les ressources et le temps dont nous disposons. Conformément à ce processus, nous avons déterminé, grâce aux meilleurs conseils et analyses professionnelles, que ces six domaines sont les plus importants pour l'Afghanistan, qu'ils correspondent le plus aux forces du Canada et qu'ils sont les plus pertinents pour Kandahar.
Est-il juste de dire qu'à la lumière de ce qui se passe à Paris et à des réunions de ce genre, et en travaillant en collaboration avec tous nos alliés, y compris les Afghans, ces priorités pourraient évoluer au cours des prochaines années?
Je crois qu'elles sont également bien ancrées dans le Pacte de l'Afghanistan, comme je l'ai dit à M. Bachand; ainsi, les priorités canadiennes ne dépassent en rien la portée du Pacte. Des gens comme le président Karzaï, se sont concentrés sur un certain nombre de choses, comme le barrage Dahla, qu'il considère comme très importantes. Par conséquent, ces priorités sont conçues de façon à pouvoir les transmettre aux dirigeants afghans au fil du temps.
Relativement à la « Priorité 4 », concernant la gestion frontalière entre l'Afghanistan et le Pakistan, etc., dans quelle mesure croyez-vous pouvoir convaincre les Pachtounes et les Baloutches, séparés par la ligne Durand, que c'est une bonne idée?
Là-dessus, nous essayons d'être réalistes. C'est une frontière longue, difficile, dangereuse et compliquée. Quoi qu'il en soit, nous avons jugé que si nous n'abordions pas du tout cette question, alors nous nous déroberions à notre responsabilité. C'est pourquoi nous surveillons une partie de la frontière à Kandahar, en insistant particulièrement sur le principal passage frontalier à Kandahar: Spin Boldak. Nous nous sommes dit: « Soyons réalistes et honnêtes par rapport à ce que nous pouvons faire. Si nous parvenons à rendre le mécanisme frontalier plus efficace, si nous pouvons amener les Afghans et les Pakistanais à dialoguer sur cette partie de la frontière, c'est un petit pas, mais qui n'est pas sans importance. »
Nous avons organisé une série de séminaires avec les responsables afghans et pakistanais. Nous en avons organisé à Dubaï, d'autres à Kaboul et d'autres à Islamabad. Les résultats de cette toute première étape ont, en fait, dépassé nos attentes. Au bout du compte, les gens des deux côtés nous ont dit des commentaires, comme: « Nous aurions dû faire cela il y a longtemps, mais nous ne l'avons pas fait. Il y a des niveaux élémentaires de partage d'information que nous n'avons pas établis, mais qui faciliteraient notre vie des deux côtés. » On a également entendu des gens dire: « Il faut bien un pays comme le Canada pour faire quelque chose de ce genre. Seul un pays de la trempe du Canada peut nous rassembler, mais maintenant que nous sommes rassemblés, nous voyons pourquoi nous devons continuer. »
Permettez-moi de dire qu'il s'agit d'une mesure encore modeste, mais nous comptons poursuivre ce programme. Nous allons examiner le financement pour l'équipement dont nous avons besoin afin que les mouvements à la frontière se déroulent sans heurt. Nous nous assurerons d'être au courant des conversations que les Forces canadiennes ont avec l'armée nationale afghane et les forces pakistanaises de l'autre côté de la frontière, et nous ferons également rapport à des organismes comme le G-8, qui commencent à examiner la question générale. Donc, nous croyons que c'est maintenant dans ce domaine que le Canada peut faire une contribution certes petite, mais non sans importance.
En ce qui concerne la « Priorité 5 », c'est-à-dire la mise en place d'institutions afghanes, etc., spécifiquement pour Kandahar, l'équipe consultative stratégique (ECS) a fait du bon travail dans le passé au niveau national. On ramène beaucoup de choses au niveau plus provincial, local. Envisagez-vous la possibilité que l'ECS devienne une EAP — une équipe d'aide provinciale? Est-ce un des rôles qui seront adoptés par l'élément civil accru à Kandahar?
Nous voyons la SAT comme faisant partie d'une évolution naturelle. Ces gens ont fait un excellent travail. La SAT a été créée à un moment où il y avait très peu de civils sur place. Je pense que lorsque la SAT a été créée, il y avait environ quatre personnes à notre ambassade de Kaboul. D'ici la fin de l'année, nous en aurons plus d'une trentaine.
L'autre chose, c'est qu'avec l'établissement des priorités, une partie de mon travail sera d'être très rigoureux avec les gens de l'autre côté de la ville et les gens de Kaboul et de Kandahar de sorte que nous restions concentrés sur ce que nous avons dit que nous ferions. Le travail de renforcement des capacités, le genre de choses que fait la SAT, sera de plus en plus concentré sur ces domaines prioritaires. Je pense que nous verrons arriver plus de civils spécialisés, mais la prochaine étape naturelle est de penser à la façon d'amener cela à Kandahar.
De même, lorsque des gens comme le ministre de l'Éducation Atmar et le ministre de la Reconstruction et du Développement Zia viennent à Kandahar, nous aidons à les mettre en contact. Nous discutions du barrage Dahla avec le ministre Zia et nous discutions avec le ministre Atmar: « Si nous vous donnons de l'argent pour l'éducation au niveau national, comment pouvez-vous nous aider à Kandahar? » Nous avons vraiment travaillé pour mettre ces ministres en contact, parfois en allant aussi loin qu'en aidant à les transporter et en leur faisant rencontrer les bonnes personnes au niveau provincial.
Nous avons entendu là-bas, et nous avons également entendu cela ici au cours des derniers jours, que l'ANA et la PNA constituaient notre plan de sortie. Je pense que vous avez fait allusion à cela également. Est-ce que...?
Cela est absolument au centre de la vision que nous avons pour Kandahar en 2011. Cela ne veut pas dire que Kandahar sera une ville développée dans un pays développé, mais les Afghans seront en mesure de contribuer beaucoup plus qu'à l'heure actuelle au maintien de leur sécurité, et c'est par là que tout commence.
Comme vous le savez, monsieur Hawn, nous estimons avoir parcouru beaucoup de chemin avec l'Armée nationale afghane. La Police nationale afghane est encore une oeuvre inachevée, mais des programmes comme Objectif Développement des districts, qui consistent à donner une formation aux policiers, commencent à porter fruit. Il s'agit d'un processus à long terme.
Je vais vous poser quelques courtes questions pointues. Je vais les regrouper et vous demander ensuite d'y répondre, monsieur Mulroney.
Hier, dans un rapport de la RAND Corporation, Seth Jones a indiqué qu'il croyait qu'il y avait un problème très réel au Pakistan, que le Pakistan demeurait un endroit qui offrait un appui substantiel aux talibans. Apparemment, le gouvernement pakistanais a nié catégoriquement ce rapport. Il s'agit d'une divergence d'opinion plutôt importante. Quel est notre position à cet égard, dans l'analyse du point de vue de la RAND Corporation comparativement à celui du gouvernement du Pakistan? C'est ma première question.
Deuxièmement, est-ce que des programmes pan-afghans ont été abolis par suite de l'accent mis sur Kandahar, particulièrement en ce qui concerne les femmes et en ce qui concerne certains autres projets qui, à ma connaissance, fonctionnaient à partir de Kaboul?
Troisièmement, est-ce que le gouvernement a songé à l'éducation postsecondaire en tant qu'investissement à long terme pour l'Afghanistan, en particulier, en faisant en sorte que nos établissements participent à la formation des Afghans et s'engagent auprès d'eux? Peut-être pourrions-nous considérer d'autres exemples — la bourse Fulbright, la bourse du Commonwealth ou la bourse Rhodes — ou d'autres façons pour essayer véritablement d'offrir une éducation et une formation culturelle comme moyen pour résoudre les problèmes à long terme causés par l'extrémisme en Afghanistan.
Ma dernière question est ironique. J'ai remarqué que la « Priorité 5 » est « la capacité démocratique » de l'Afghanistan et que le Canada jouera un rôle dans la création d'une commission électorale indépendante de l'Afghanistan. Je suppose qu'elle s'appellera « Élections Afghanistan »?
Des voix: Oh, oh!
M. Bob Rae: Merci, Monsieur le président.
Vous n'avez pas à répondre à la dernière question. Je voulais simplement qu'elle figure au compte-rendu.
Nous avons beaucoup de respect pour Seth Jones et nous pensons que le rapport est exact en attribuant une part substantielle du problème au fait que la frontière est poreuse et que l'on n'en fait pas assez du côté pakistanais de la frontière. Il s'agit d'une conclusion inéluctable. Là où vous pourriez avoir un avis divergent, c'est dans quelle mesure le gouvernement afghan pourrait-il en faire davantage. Nous pensons qu'il pourrait en faire plus. C'est pourquoi nous travaillons sur des questions comme la frontière. Je pense qu'il nous incombe — et cela fait partie de notre stratégie diplomatique — de travailler avec ceux qui pensent comme nous afin de nous assurer de transmettre un message cohérent à Islamabad.
Avec l'arrivée du nouveau gouvernement, nous sommes témoins de certaines expériences sur la façon d'aborder les problèmes dans la région frontalière. Je pense qu'il est encore un peu tôt pour parler, sauf pour dire que nous nous attendons que peu importe ce qu'il fera dans les régions frontalières — comme c'est le cas du côté afghan —, cela exigera que les gens respectent la primauté du droit et qu'ils cessent de faire semblant de ne rien voir lorsque les terroristes sont à l'oeuvre. Nous avons besoin d'un effort concerté. Ils ont peut-être besoin d'une certaine forme de programme de réconciliation là-bas aussi, mais ce qui compte surtout, c'est de s'assurer que le Pakistan ne devient pas un refuge pour les talibans. Aucune insurrection ne peut être mâtée si les gens peuvent circuler aussi facilement de part et d'autre de la frontière. Alors, c'était un problème sérieux.
Notre financement a augmenté de manière substantielle depuis un an ou deux; il est passé d'environ 100 millions de dollars par année auparavant à environ 300 millions de dollars et plus cette année. Il sera maintenu autour de 280 à 290 millions de dollars au cours des trois prochaines années, mais une plus grande part ira à Kandahar. L'argent n'a pas encore été attribué de manière précise pour l'avenir, mais moins d'argent sera dirigé vers certains des fonds fiduciaires multilatéraux. Nous allons nous assurer qu'il y a de l'argent pour les programmes qui sont absolument essentiels pour maintenir les finances du gouvernement. Il y a certains programmes pour lesquelles le Canada est un contributeur important. Nous avons également essayé de protéger tous les programmes dirigés par les ONG canadiennes qui font vraiment certaines des choses dont vous avez parlé. Alors, nous allons essayer de réduire le plus possible les effets sur les programmes qui intéressent les Canadiens et qui sont importants. Mais il y aura des répercussions au niveau national au fur et à mesure que nous essaierons d'en faire davantage à Kandahar.
L'éducation postsecondaire est un domaine pour lequel on a manifesté un intérêt initial. Nous faisons certaines choses en collaboration avec l'université à Kandahar. Ce n'est encore qu'un début. Nous avons concentré nos efforts sur le primaire et le secondaire. Les discussions les plus intéressantes que nous avons eues concernaient des choses comme le télé-apprentissage, parce qu'il est encore difficile de procéder à des échanges réels ou de faire venir des gens en Afghanistan. C'est un domaine où nous devrons être présents dans l'avenir.
Il s'agit simplement d'une observation, monsieur le président.
Nous sommes placés devant une lutte idéologique à long terme. Nous ne devrions pas nous faire d'illusions à cet égard. Je pense que cela été le cas dans l'histoire et il est important que nous tirions certaines leçons. Plus nous voyons cela comme une question idéologique à long terme et plus l'éducation et la formation culturelle ainsi que le maintien de notre participation dans cet aspect de notre travail prennent de l'importance. Et je pense que c'est tout aussi important que de former l'Armée nationale afghane. Je pense que nous devons considérer cela comme un moyen de résister au terrorisme qui est tout aussi important que toutes les autres choses que nous faisons.
Merci, monsieur le président.
Merci, monsieur Mulroney, d'être venu aujourd'hui. Je pense qu'hier, lorsque le gouvernement a déposé le premier rapport trimestriel, c'était un moment dont nous pouvons tous être fiers. Nous vous félicitons et nous félicitons le gouvernement d'avoir fait cela. Le ministre Emerson a indiqué clairement qu'il avait l'intention de présenter ce rapport à tous les trimestres. Alors, vous avez respecté cet engagement.
Une des bonnes choses que l'on retrouve dans ce rapport, c'est qu'il annonçait une augmentation substantielle de l'aide financière à l'Afghanistan — 600 millions de dollars d'ici 2011. Et comme vous l'avez dit à maintes reprises, il annonce également que l'aide dans la région de Kandahar — comme on l'indique dans le rapport — passera de 17 à 50 p. 100 de l'aide financière du Canada.
J'ai trois questions. Premièrement, est-ce qu'une des raisons pour lesquelles nous avons fait cela, c'est pour que les Afghans puissent faire le lien entre les fonds additionnels consacrés à Kandahar et le Canada, ce qui en fait ainsi un projet de premier plan? Deuxièmement, sauf pour les trois projets de premier plan qui sont annoncés ici pour la province de Kandahar, il n'y a pas beaucoup d'autres détails précis sur la façon dont l'argent sera dépensé. Est-ce que l'argent ira au MAECI? Ira-t-il à l'ACDI? Avez-vous une ventilation des dépenses qui indiquerait combien sera affecté à Service correctionnel, par exemple? Combien passera par le ministère de la Défense nationale? Y a-t-il une répartition pour ces quatre ministères?
Je pense que l'objectif du projet de premier plan, comme je le disais plus tôt, vient de l'observation faite par le groupe d'experts indépendant. Lorsqu'ils ont discuté avec les gens à Kandahar, les membres du groupe n'ont pas vraiment senti que du côté afghan, on était suffisamment conscient de la contribution que le Canada a essayé de faire. Le message qu'on nous a transmis, c'est qu'à moins que cela se traduise par des effets plus importants que peuvent percevoir les gens de Kandahar, nous allions perdre la bataille pour conquérir le coeur et l'esprit des Afghans. Je devrais dire que je pense que ce n'est pas uniquement l'ACDI, mais également les autres organismes d'aide d'autres pays qui sont aux prises avec ce problème. Les approches traditionnelles au renforcement des capacités à long terme pourraient ne pas être suffisantes en elles-mêmes dans des endroits où vous avez une insurrection et où vous avez le genre de problèmes que nous avons dans le sud de l'Afghanistan.
Les gens de Kandahar constituent la cible réelle des projets de premier plan. Je pense qu'il est important que dans nos communications, nous aidions les Canadiens à comprendre ce que nous essayons de faire, et le fait d'avoir des projets de premier plan aidera probablement à cet égard. Ces projets ont tous été choisis parce qu'ils sont liés à des services de base auxquels les gens sont en droit de s'attendre de la part de leur gouvernement. L'ACDI est le principal contributeur d'argent, mais le MAECI est un contributeur de plus en plus important. Sa contribution vient de ce qu'on appelle le Fonds pour la paix et la sécurité mondiales et vient vraiment compléter le financement du ministère de la Défense nationale, en ce sens qu'il s'adresse à la police. Il s'adresse également à la formation de juges et d'avocats et à la prestation de services correctionnels. Ces gens travaillent en collaboration avec Service correctionnel Canada. Le financement vient du MAECI, mais la planification est faite par la GRC et Service correctionnel Canada, en ce qui concerne des améliorations précises, comme l'approvisionnement en eau, les génératrices et des choses du genre pour les prisons, de sorte qu'elles puissent fonctionner d'une manière plus humaine qui respecte les normes attendues.
Alors, la bonne nouvelle, c'est que la totalité de la somme additionnelle de 600 millions de dollars ne va pas simplement dans les coffres du ministère de la Défense nationale; l'argent est réparti entre les quatre ministères. Je pense que c'est à peu près ce que vous avez dit.
Vous avez parlé, et le rapport en a également fait état, d'une période de transition. Nous sommes dans une période de transition au cours de laquelle il faudra réorienter les programmes. Le rapport indique également que certains programmes seront abolis. Je pense qu'il s'agit peut-être d'une autre bonne nouvelle, parce que cela démontre qu'il y a une évaluation continue des programmes qui ont du succès et d'autres programmes qui pourraient être meilleurs. Cependant, le rapport ne précise pas quels projets seront abolis. Je me demande seulement si vous pourriez nous dire un mot sur certains des programmes qui pourraient être abolis, parce qu'une évaluation indiquerait qu'il serait peut-être préférable de dépenser l'argent ailleurs.
Dans la conclusion du rapport, on parle de l'importance de la gouvernance. On peut noter qu'aucun des projets de premier plan n'a quoi que ce soit à voir avec la gouvernance. Je me demande si vous pouvez nous dire si de l'argent sera dépensé pour améliorer la gouvernance en Afghanistan.
Merci, monsieur le président.
Au niveau national, les effets se feront surtout sentir dans le cas des programmes auxquels le Canada contribue et qui sont financés par le biais de ce qu'on appelle les fonds fiduciaires multilatéraux. Il s'agit de fonds créés par des organismes de l'ONU ou d'autres organismes multilatéraux pour financer de vastes programmes nationaux échelonnés dans le temps en Afghanistan. Dans certains cas, nous sommes en train de nous retirer graduellement et dans d'autres cas, nous réduisons nos paiements de manière à pouvoir nous concentrer davantage sur Kandahar. C'est un résultat direct des observations faites par le groupe d'experts de M. Manley selon lequel une trop grande part de notre aide financière était attribuée à des domaines qui étaient éloignés de un ou deux niveaux. Nous n'avions pas une idée claire des effets que nous avions sur le terrain. Ils n'étaient pas palpables directement. C'était trop à long terme.
Nous continuons tout de même de financer certains de ces programmes. Comme je le disais à M. Rae, il y aura les programmes destinés à faire en sorte que les chèques de paie soient distribués au niveau central et qui font en sorte que le gouvernement puisse continuer de fonctionner. Mais je pense que nous pouvons également dire que le Canada n'est pas obligé de tout faire. Nous ne sommes pas obligés de tout faire au niveau national et au niveau de Kandahar. Il y a d'autres programmes où d'autres pourraient prendre notre relève — nous sommes au troisième rang des pays contributeurs — pendant que nous nous mettons à l'oeuvre pour apporter des changements réels à Kandahar.
Par gouvernance, nous entendons un certain nombre de choses. Par exemple, lorsque nous travaillons sur le barrage Dahla, cela a des répercussions à différents niveaux. Un de ces effets est une irrigation améliorée dans la région d'Arghandab, pour qu'enfin, les agriculteurs commencent à recevoir de l'eau de ce réservoir. Le résultat de ce projet, c'est la création d'emplois. Cela signifie également qu'ils peuvent pratiquer d'autres types de cultures. Le pavot est abondant à cause de l'absence de respect de la loi et parce qu'il n'y a pas suffisamment d'autres choix pour les agriculteurs. Alors, cela crée des possibilités, et en faisant cela, nous allons travailler avec les gens responsables des ressources en eau pour créer une capacité afin que les Afghans puissent faire cela.
Pendant que nous travaillons sur le programme de vaccination, nous travaillons également avec les autorités de santé publique, de manière qu'elles puissent apprendre comment fonctionnent des programmes comme celui-là. Un des défis que nous avons à Kandahar, c'est que nous avons affaire à une population nomade, les Kuchi, qui sillonne le sud de l'Afghanistan. Entrer en contact avec eux et les aider est à la fois un art et une science, et nous voulons être certains que les autorités de santé publique locales ont cette capacité. Nous laisserons le ministère de l'Éducation mieux équipé pour faire son travail une fois que les écoles auront été construites et que les enseignants auront été formés. Nous envisageons de transmettre l'expertise aux Afghans en cours de route.
[Français]
Monsieur Mulroney, vous avez six priorités. Quatre de ces priorités ne touchent que Kandahar, et les deux autres, l'ensemble de la société afghane. Ai-je bien compris?
J'aimerais savoir, étant donné que vous comptez nous donner des rapports successifs sur les progrès accomplis, où en sont ces six priorités actuellement. Je sais que vous ne pouvez pas me répondre tout de suite, mais il me semble que si on pouvait avoir pour toile de fond un document qui nous donne l'état de la situation, on pourrait mieux faire notre évaluation. Je comprends qu'on ne puisse pas tout quantifier. Par exemple, vous nous dites que vous allez construire 50 écoles d'ici 2009. J'aimerais savoir combien d'écoles le Canada a déjà construites. Sont-elles en fonction? Ont-elles été détruites? J'aimerais que vous nous fassiez état de ce qu'il en est chaque fois que vous en construirez de nouvelles.
Nous allons préparer un rapport sur chaque priorité et ses progrès tous les trois mois. Les mesures pourront varier. Ce sera parfois une quantité, parfois une évaluation du progrès. À d'autres moments, nous allons préparer des sondages. En effet, l'opinion des gens de Kandahar est très importante. Chaque rapport donnera donc des détails sur le progrès de ces six priorités.
Je comprends cela, mais je vous demanderais de me dire où on en est actuellement. Combien d'écoles le Canada a-t-il déjà construites dans la région de Kandahar?
Oui, mais qu'y a-t-il actuellement? Pour pouvoir évaluer les efforts qui sont faits, il me semble qu'il serait pertinent de savoir quels résultats nous avons obtenus jusqu'à présent. C'est en ce sens que je pose la question.
Le rapport parle des mesures que nous allons utiliser, et pendant l'été, nous allons communiquer la nature de chaque groupe de mesures pour chaque priorité. Dans le prochain rapport, qui sera déposé à l'automne, nous allons expliquer les mesures de nos progrès. Elles diffèrent pour chaque priorité.
Bien sûr, je comprends cela, mais il semble que je n'arrive pas à vous expliquer mon idée. Qu'a fait le Canada en termes de construction d'écoles?
[Français]
Notre programme a commencé il y a un an. Notre contribution s'est faite à l'échelle nationale. Il nous est donc plus difficile de mesurer nos progrès. Maintenant, nous allons suivre le processus à Kandahar et apporter nos contributions de manière plus spécifique, comme construire 50 écoles à Kandahar. Avant, c'était difficile pour nous d'évaluer l'impact dans chaque région et à Kandahar. Cela va changer.
C'est au point où vous n'êtes pas capable de me dire combien d'écoles exactement le Canada a déjà construites.
Nous avons déjà contribué à la construction d'une dizaine d'écoles, mais je vais vérifier ce qui s'est fait à Kandahar.
Quand vous déposerez le prochain rapport, j'aimerais bien obtenir ces détails. Pour pouvoir évaluer ce que représente la construction de 50 écoles d'ici 2009, j'aurais besoin de savoir ce qu'on a fait dans ce domaine depuis 2002. Comme je l'ai dit, je comprends que l'évaluation des progrès est parfois difficile quand il s'agit, par exemple, de contacts diplomatiques, mais quand on peut les quantifier et nous donner l'état de la situation, cela nous aide à vraiment comprendre en quoi consistent les efforts actuels.
Ce que j'ai essayé de dire, c'est qu'il nous était plus difficile d'être spécifiques quant à l'impact de nos contributions, parce qu'elles se faisaient à l'échelle nationale. Maintenant, nous allons concentrer sur Kandahar 50 p. 100 de notre aide, et nous allons essayer d'être plus spécifiques quant à l'impact de nos contributions dans la région. Avant, nous faisions des estimations. On peut dire que nous avons aidé à la construction d'une dizaine d'écoles, mais notre assistance étant vraiment d'ordre national, c'est plus difficile de parler de l'impact.
[Traduction]
Merci beaucoup, chers collègues.
Merci beaucoup, monsieur Mulroney. Encore une fois, nous vous sommes très reconnaissants d'être ici ce soir, si tôt après la publication du rapport. Merci beaucoup de vos observations et de vos réponses à nos questions.
Chers collègues, nous allons suspendre nos travaux quelques instants. Nous allons discuter des travaux du comité à huis clos.
[La séance se poursuit à huis clos.]