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SDIR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 021 
l
2e SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 16 juin 2008

[Enregistrement électronique]

(1205)

[Français]

    Bienvenue à la 21e séance du Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international.

[Traduction]

    Nous accueillons des témoins que nous entendrons dans l'ordre selon lequel ils souhaiteraient faire leurs déclarations.
    Le révérend Majec El Shafie est président de One Free World International. Il parlera le premier.
    Je mentionne le reste des témoins selon l'ordre dans lequel ils interviendront. Notre second intervenant sera Chantal Desloges, une avocate spécialisée en droit de l'immigration. Elle sera suivie par Peter Bhatti, président de International Christian Voice. Le quatrième intervenant sera Suzanne Tamas, directrice du Bureau des relations gouvernementales pour la Baha'i Community of Canada. Le dernier témoin sera Firidon Zia, qui fera sa déclaration par l'intermédiaire de son interprète, Dany Yousif.
    Je tiens également à vous signaler que nous serons obligés de réserver un peu de temps à la fin de cette réunion pour un certain nombre de questions qui doivent être discutées à huis clos; nous serons donc obligés d'improviser un peu, mais il faudra nous réserver suffisamment de temps — au moins 20 minutes, je pense. Cela implique malheureusement tout ce qui accompagne les réunions à huis clos.
    Pour terminer, je rappelle aux membres du comité que notre greffier a fait le nécessaire pour que nous puissions déjeuner; vous êtes donc libres d'aller vous servir. Je n'ai l'intention de suspendre aucune de nos audiences pour que vous puissiez aller manger. Vous devrez donc prendre vos propres dispositions à cet égard, étant donné le peu de temps dont nous disposons.
    Avant de passer à nos témoins, Madame Deschamps, allez-y, s'il vous plaît.

[Français]

    Dans votre introduction, vous avez répondu à la question que je m'apprêtais à poser, à savoir si on aura suffisamment de temps pour discuter des travaux à la fin de la séance d'aujourd'hui. J'aurai quelques points à soulever.
    Oui. Je pense que 20 minutes suffiront.

[Traduction]

    Il y avait deux ou trois mémoires. Ont-ils été traduits et distribués?
    Oui, ceux de ce groupe l'ont été.
    Il y avait un mémoire écrit de M. El Shafie et un de Suzanne Tamas. Ils ont tous été distribués? Bien.
    Monsieur El Shafie, êtes-vous prêt, ou vous débattez-vous encore avec le problème technique?
    Il y a quelques difficultés techniques, monsieur le président. Ce que nous avons pris du comité était censé être traduit en français et en anglais, et apparemment, la bande se déroule; il n'y a donc pas de...
(1210)
    Si je comprends bien ce qui s'est passé, il devait y avoir une déclaration comprenant une traduction d'une présentation audiovisuelle? Est-ce exact?
    Oui. Notre déclaration était en anglais, et il fallait que nous la fassions traduire en français pour le comité. Pour une raison quelconque, la copie que nous avons reçue était vierge.
    De toute façon, je peux commencer. Je suis certain qu'ils trouveront bien une solution.
    Je suis sûr que nos interprètes seront capables de fournir une traduction simultanée.
    Veuillez donc commencer, monsieur El Shafie.
    Je suis le révérend Majed El Shafie. Je suis le fondateur et le président de One Free World International, un organisme de défense des droits humains qui s’intéresse particulièrement aux droits des minorités religieuses partout dans le monde.
    Je comparais aujourd'hui pour vous parler de trois pays — l'Irak, l'Égypte et le Pakistan — et des violations des droits de la personne qui accompagnent dans ces pays la persécution des chrétiens ainsi que des minorités.
    Permettez-moi de brosser un tableau d'ensemble de la situation des chrétiens persécutés dans le monde actuel. Toutes les trois minutes, un chrétien est persécuté. L'an dernier, plus de 165 000 chrétiens ont été tués à cause de la religion à laquelle ils appartenaient et 200 à 300 millions de chrétiens ont été persécutés dans le monde entier. Regrettablement, 80 p. 100 des chrétiens persécutés vivent dans des pays musulmans. Vingt autres pour cent vivent dans des pays communistes tels que la Chine, la Corée du Nord et Cuba. Certains d'entre eux vivent en Inde où ils sont victimes des extrémistes hindous. Je vous parlerai aujourd'hui plus particulièrement de l'Irak, de l'Égypte et du Pakistan, et je commencerai par l'Irak.
    L'Irak a une population de 27 millions d'habitants. À cause du régime actuel, quatre millions d'entre eux ont été déplacés; deux millions ont été déplacés à l'intérieur du pays et les deux autres millions ont été déplacés à la frontière de la Syrie et de la Jordanie. La population de l'Irak est composée de 60 à 65 p. 100 de chiites. Entre 32 et 37 p. 100 sont des musulmans sunnites.
    Les chrétiens ne sont aujourd'hui qu'une petite minorité de l'ordre de 3 p. 100 dans ce pays, ce qui représente de 800 000 à un million de personnes. La moitié d'entre eux ont fui leur foyer. L'autre moitié est soumise à des attaques en Irak. Ceux qui ont fui n'ont pas d'emploi. Ceux qui se trouvent à la frontière, par exemple, n'en ont pas. Ils n'ont pas d'assurance médicale. Ils n'ont ni écoles, ni nourriture, ni eau potable — ils n'ont pratiquement rien — et ils ne peuvent pas rentrer chez eux en Irak.
    Essentiellement, ils font face à des attaques d'extrémistes des deux bords, des sunnites comme des chiites, à cause de leur foi chrétienne. Premièrement, ils sont différents puisqu'ils n'ont pas la même religion. Deuxièmement, ce sont des chrétiens, comme le sont les Occidentaux. Aux yeux des extrémistes, ce sont des collaborateurs; ce sont des traîtres; ce sont pratiquement des espions. Ils appartiennent à la même religion que l'Amérique, que l'Ouest.
    Le gouvernement irakien ne peut pas les protéger. Pourquoi? Pour trois raisons. La première est que ce gouvernement est très faible. Ils ne peuvent pas se protéger. Deuxièmement, au gouvernement irakien, 90 p. 100 de ceux qui travaillent au maintien de l'ordre, dans la police ou dans l'armée, sont des sunnites ou des chiites. Ils prennent le parti de leur propre collectivité contre les chrétiens. Comme vous le dira un témoin tout à l'heure, certains de ceux qui ont enlevé son fils étaient membres de la police irakienne.
    Il y a une autre raison pour laquelle je ne crois pas que le gouvernement irakien puisse protéger les chrétiens et les autres minorités: c'est l'article 2. Aux termes de cet article de la loi irakienne, l'islam est la religion officielle d'État et la source fondamentale de toutes les lois. Aucune loi ni autre pratique religieuse — telle que celle des chrétiens et des minorités — ne peut contrebalancer la charia. Autrement dit, toute pratique ou loi contraire à la charia ne peut pas vraiment fonctionner en Irak.
(1215)
    Les Américains ne peuvent pas protéger les chrétiens et les autres minorités en Irak, premièrement, parce qu'ils font eux-mêmes face à un problème encore plus gros. Deuxièmement, si les Américains protégeaient ces chrétiens et minorités en Irak, en particulier les chrétiens, ce serait la preuve que les chrétiens sont en fait des traîtres; si les Américains les protégeaient, ce serait la preuve que les chrétiens collaborent avec eux. Les Américains ne protègent donc pas les chrétiens en Irak. Ceux-ci ne peuvent pas assurer leur propre protection, parce qu'ils sont essentiellement le seul groupe non armé en Irak. Les chiites, les sunnites et les Kurdes sont des groupes armés. Les chrétiens sont le seul groupe qui n'est pas protégé.
    Où est la preuve? Qu'est-ce qui le prouve? Comme vous pouvez le voir devant vous, les attaques ont commencé vers le 1er août 2004. Cinq églises ont subi une attaque à la bombe le même jour, quatre à Bagdad, une à Mosul. Il y a eu 12 morts et 60 blessés, dont un couple qui devait se marier cette fin de semaine-là.
    Voici l'église de Saint-Pierre-et-Saint-Paul à Bagdad. Dix personnes ont été tuées et deux blessées.
    Voici l'église de Mar Elia El Helri et la photo de Mazm Boulo, qui s'est sacrifié pour sauver les personnes qui se trouvaient à l'intérieur de l'église.
    L'église assyrienne Saint-Georges à Bagdad a été attaquée à deux reprises. La première attaque a eu lieu en octobre 2004. Auparavant, la croix était encore debout; l'église a été attaquée à nouveau en mai 2007.
    Voici l'église de Sayidat al-Najat, Notre-Dame-du-Salut, à Bagdad, et l'église de Sayidat al-Zohour, Notre-Dame-des-Fleurs. Depuis 2004 à ce jour, les attaques continuent.
    Certains des prêtres ont été enlevés et torturés. Beaucoup d'entre eux ont été tués. Quelques-uns sont revenus chez eux. Ceux qui sont revenus avaient des familles qui ont payé une rançon pour leur éviter d'être à nouveau torturés. Parmi ces derniers, le père Boulos Iskander, âgé de 52 ans, a été enlevé en 2006 à Mosul. Au bout de deux ans, on l'a retrouvé égorgé dans la rue. Après cela, le père Ragheed Ganni, âgé de 35 ans, a été abattu en 2007 à Mosul, avec trois de ses chantres parce qu'il avait refusé de fermer l'église.
(1220)
    Comme vous pouvez le voir, le père Ganni a été abattu de trois balles au visage. Un des coups a été tiré à bout portant, dans l'oeil.
    Arrêtons-nous là un instant. En mai 2007, dans le quartier de Dora à Bagdad, des extrémistes musulmans ont forcé la communauté chrétienne à payer un tribut qui s'appelle la jizya. Qu'est-ce que c'est? C'est une taxe que les gens sont contraints de payer pour garder la vie sauve. S'ils ne paient pas — et s'ils sont pauvres, et ne peuvent pas le faire — ils sont pratiquement contraints de fuir le quartier. Et en mai 2007, les chrétiens ont été obligés de fuir leurs foyers sans rien d'autre que les vêtements qu'ils avaient sur le dos.
    L'église que nous voyons maintenant est la cathédrale Sainte-Marie. Elle a subi une attaque à la bombe le 24 septembre. Deux personnes ont été tuées et deux, blessées. Nous avons ici un des survivants — en fait, un des héros qui ont tenté de protéger et de sauver les gens de leur milieu — il s'appelle M. Zia. Plus tard, il présentera son témoignage sur les événements qui se sont produits dans cette même église.
    Monsieur le président, il y a des gens, ou des policiers, ou même des militants pour le droit de la personne, qui appellent cela du « nettoyage ethnique ». Je ne sais pas si vous avez jamais entendu cette expression. Mais c'est une expression politiquement correcte, et je vais vous dire pourquoi: dire « nettoyage ethnique » n'a pas le même effet que dire « le début d'un génocide ».
     Il ne s'agit pas d'un « nettoyage ethnique » mais d'un génocide. C'est le début du génocide de la communauté chrétienne en Irak. Bien sûr, si nous disions qu'il s'agissait d'un génocide, cela forcerait les gouvernements à agir. Aux termes de la Convention internationale pour la prévention et la répression du crime de génocide, vous devez intervenir s'il y a un génocide.
    C'est pourquoi les gens disent que c'est un nettoyage ethnique, mais pas un génocide. C'est pourtant bien un génocide. Et je vais vous le prouver en vous lisant un passage de la Convention:
    Dans la présente Convention, le génocide s'entend de l'un des actes ci-après commis dans l'intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel:
a) meurtre de membres du groupe;
b) atteinte grave à l'intégrité physique ou mentale de membres du groupe;
c) soumission intentionnelle du groupe à des conditions d'existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle;
    Toutes ces conditions sont aujourd'hui réunies en Irak. Lorsque vous essayez de tuer, lorsque vous essayez de contraindre tous ces gens-là à partir, lorsque vous essayez de détruire la communauté, lorsque vous essayez d'imposer des conditions d'existence telles que le paiement de la jizya, c'est le début du génocide. Ce n'est plus du nettoyage ethnique. C'est le début, pur et simple, du génocide.
     Venons-en maintenant à l'Égypte — j'essaie d'aller vite à cause du temps dont nous disposons — je vous parlerai de trois groupes: les chrétiens persécutés en Égypte, la communauté juive et l'augmentation de l'anti-sémitisme en Égypte, et la communauté Baha'i.
    Je vous signale un fait historique au sujet de l'Égypte. C'était un pays chrétien au VIIe siècle, jusqu'au jour où un homme du nom de Amr ibn al-'As est arrivé en Égypte. Il a combattu les chrétiens et les a tués presque tous. Il a contraint les autres de se convertir à l'islam. Et aujourd'hui, l'Égypte que nous connaissons est un pays musulman.
    Actuellement, les chrétiens représentent environ 10 p. 100 d'une population totale d'environ 82 millions d'habitants. Donc, il y a de 8 à 10 millions d'Égyptiens qui sont chrétiens.
    Au moment même où nous parlons — dans ce bel et merveilleux endroit, le temple de la liberté au Canada — 6 000 à 7 000 activistes chrétiens sont emprisonnés en Égypte. Tout ce qu'ils demandent, c'est que leurs droits soient reconnus.
    Selon la loi égyptienne — appelée la loi El-Khat El-Hamayouni — vous ne pouvez pas construire une église. Vous pouvez construire des mosquées, des bars, des discothèques ou n'importe quoi, mais vous ne pouvez pas construire d'église. C'est ce que décrète la loi El-Khat El-Hamayouni. Vous ne pouvez même pas reconstruire ou restaurer les vieilles églises. Si vous avez besoin de réparer la vôtre, vous devez obtenir l'autorisation du président lui-même, ce qui pourrait vous demander 40 ans.
(1225)
    Les chrétiens sont victimes d'attaques quotidiennes. Certaines de ces attaques sont mineures, d'autres beaucoup plus graves, comme le massacre de El Kosheh, en janvier 2000, en est un exemple. C'était la seconde attaque contre le village de El Kosheh qui en avait déjà subi une en 1998.
    En 2000, des hordes d'extrémistes musulmans ont envahi le village et ont commencé à attaquer les membres de la communauté chrétienne. Vingt et un chrétiens ont été tués. Des centaines de maisons et de commerces ont été détruits; il n'y a pas eu d'arrestations et personne n'a jamais été trouvé coupable. Qui plus est, plus de 1 000 chrétiens — des victimes — ont été arrêtés par les autorités égyptiennes, alors que celles-ci n'ont pas arrêté les responsables du crime. Elles ont arrêté plus de 1 000 chrétiens dans le village de El Kosheh. Cela a eu lieu en 2000.
    Le gouvernement égyptien l'a nié et a dit qu'il nous mettait au défi de trouver le nom d'une seule personne qui aurait été arrêtée. Il avait raison: nous n'avons pas réussi à en présenter un seul. J'ai ici à la main une liste de noms de 1 014 personnes qui ont été arrêtées, avec leurs adresses, leurs âges, et la description des tortures qu'ils ont subies, la date de leur arrestation, la date de leur libération. Je l'ai ici en main, et je suis prêt à le remettre au comité. Cette liste est écrite en arabe, mais je peux la traduire et vous la remettre, si vous voulez.
    En octobre 2005, une église d'Alexandrie avait présenté une pièce de théâtre appelée J'étais aveugle, mais maintenant je vois la lumière. Il s'agissait d'un chrétien qui s'était converti à l'islam puis, de nouveau à la religion chrétienne. La communauté musulmane n'avait pas beaucoup apprécié et 5 000 musulmans ont attaqué l'église. Quatre-vingt-dix personnes ont été blessées, y compris une religieuse qui a été poignardée, et quatre personnes ont trouvé la mort. La police avait essayé d'arrêter la démonstration, mais elle n'était pas totalement parvenue à le faire.
    Lors d'un autre incident au cours d'une fête précédant Pâques, le 14 avril 2006, trois hommes armés de couteaux ont pénétré dans trois églises à Alexandrie — l'église de Mar Girgis, l'église des Saints à Sidi Bishr, et l'église à Abu Qir. La police était présente pour assurer la sécurité, mais elle n'a rien fait pour empêcher ces hommes armés de couteaux d'attaquer l'église au cours de cette célébration. Il y a eu un mort et 12 blessés. La police a arrêté un des attaquants; elle a dit que c'était un malade mental et celui-ci a été relâché par la suite.
    Le lendemain, au moment des funérailles des victimes, la police a attaqué, et il y a eu un affrontement entre les autorités et les communautés chrétiennes.
    Le vendredi 11 mai 2007, sept commerces et plusieurs maisons appartenant à des chrétiens ont été incendiés et détruits dans le village de Behma, au sud du Caire. Au moins dix chrétiens ont été blessés; certains ont subi des brûlures au premier degré, d'autres des fractures. L'incident avait été déclenché par des rumeurs selon lesquelles la communauté chrétienne construisait une église sans avoir de permis. Ce n'était qu'une rumeur.
    Après la prière d vendredi, l'imam, c'est-à-dire le chef de la mosquée locale, avait demandé à la communauté musulmane d'intervenir pour protéger la communauté chrétienne. Cet imam, ce prédicateur musulman, est rémunéré par le gouvernement égyptien. C'est celui-ci qui lui verse son salaire. Les attaques se sont produites le 11 mai 2007. La police a arrêté plusieurs musulmans qui ont été immédiatement relâchés, et personne n'a été jugé coupable.
    Il y a deux semaines, le samedi 31 mai 2008, dans un monastère du nom de Deir Abu-Fana, à 30 kilomètres au sud de Minya en haute Égypte, à 17 heures, 70 hommes armés ont attaqué le monastère; ils ont brûlé les bibles et détruit la croix et l'autel. Trois moines ont été enlevés et quatre autres ont été blessés.
(1230)
    Il y a aussi le cas de M. Magdi Youssef.
    À propos, M. Youssef devait être un de nos témoins aujourd'hui. Il n'est pas venu parce qu'il a une fille en Égypte et il craint pour sa sécurité.
    Le Canada a joué un rôle dans l'affaire de Magdi Youssef. Celui-ci est un Copte qui est venu au Canada où il a revendiqué le statut de réfugié parce qu'il était persécuté dans son pays. La Commission de l'immigration et du statut de réfugié s'est contentée de lui répondre que les chrétiens n'étaient pas persécutés en Égypte et qu'il mentait. Elle l'a renvoyé en Égypte. Il a été déporté le 14 septembre 2006.
    Dès son arrivée à l'aéroport du Caire, M. Youssef a été arrêté par le SRS, le Service de renseignement de sécurité. Il a été torturé à Tanta, au quartier général du SRS, par deux officiers. Le premier officier s'appelait El Hegab, et le second, Farok Hosney. Ils l'ont torturé tous les deux.
    Nous avons porté l'affaire devant le gouvernement canadien. L'honorable Jason Kenney nous a beaucoup aidés. Nous le remercions vivement de prendre la défense de Magdi Youssef qui se trouve aujourd'hui au Canada — mais à qui cela a coûté très cher car il a été torturé à deux reprises.
    Je voudrais maintenant vous parler de la communauté juive en Égypte et de la montée de l'anti-sémitisme. Cette communauté ne comprend que 100 à 200 personnes dont la plupart sont des personnes âgées. Même après l'accord de paix entre les Égyptiens et Israël qui remonte à plus de 25 ans, il y a une recrudescence de l'anti-sémitisme dans les écoles, dans le système éducatif, dans les médias. On enseigne pratiquement la haine aux générations nouvelles. Il y a une propagande hostile — dans les tribunes officielles et autres — où l'on accuse les Juifs d'être des nazis et des tueurs impitoyables, et où l'on nie l'existence de l'holocauste.
    Une des formes de propagande hostile est celle qui s'exprime dans le journal Al-Ahram, qui est en quelque sorte le journal officiel en Égypte. Il est financé par le gouvernement égyptien et contrôlé par celui-ci. Le rédacteur en chef, M. Ibrahim Nafi, a été nommé par le président égyptien.
    Le 10 octobre 2000, Ibrahim Nafi a publié un article dans lequel il déclarait que les Juifs utilisaient le sang d'enfants arabes pour faire des matzos pour la fête de Pessah. C'est ce que disait un article écrit par Ibrahim Nafi, dans l'Al-Ahram, le journal officiel de l'Égypte.
    La Ligue internationale contre le racisme et l'anti-sémitisme lui a intenté un procès à Paris. Le tribunal français l'a convoqué, mais il a refusé de comparaître. Il a utilisé son état de santé comme excuse. Voilà quelqu'un qui s'était rendu dans 35 pays différents et pourtant il ne pouvait pas venir en France.
    Les journaux égyptiens ont publié des bandes dessinées qui insultent les chrétiens et les Juifs. Dans l'une d'entre elles, Bush tient la croix comme s'il était un croisé, s'exprimant au nom de la foi chrétienne. Quant à l'anti-sémitisme, le 21 avril 2001, une bande dessinée a été publiée, qui montrait des Israéliens écrasant des Palestiniens pour en boire le sang. Cela s'est passé en 2001, mais du 6 au 12 mars 2008, l'hebdomadaire Al-Ahram, qui est un journal du gouvernement égyptien, a publié une bande dessinée présentant Barak et Olmert en train de faire bouillir des enfants palestiniens dans une marmite. Le mot « holocauste » est écrit sur celle-ci; ils sont en train de manger des enfants.
    Le 6 mars 2008, une caricature d'Ehud Barak a été publiée, debout sur une pile de... crânes, je crois, c'est bien le mot. L'anglais n'est pas ma première langue et lorsque la fatigue me gagne, j'en perds totalement le contrôle. Je m'en excuse. Dès le début, cette journée a été très stressante.
(1235)
    Ehud Barak est donc debout sur une pile de cadavres de Palestiniens. Il demande à l'aviation israélienne de tuer tous les Palestiniens et de provoquer un holocauste, il brandit un swastika.
    Le 7 février 2008, au moment où le Hamas franchissait la frontière égyptienne, le même journal égyptien publiait un dessin dans lequel l'Égypte était représentée par une femme qui demandait aux Hamas de ne pas attaquer la frontière de son pays, mais d'attaquer les Israéliens.
    J'ai ici un manuel d'études sociales pour les élèves égyptiens de 7e année. À la page 2, Israël ne figure pas sur la carte. Aux pages 73 à 75, on enseigne littéralement à ces enfants de 7e année qu'ils ne peuvent pas avoir confiance en la communauté juive, car celle-ci est l'ennemie, qu'il faut la combattre, et qu'il est vain de faire la paix avec elle. Voilà un manuel scolaire égyptien pour les élèves de 7e année.
    Pour terminer, je ne dirai pas grand-chose de la communauté Baha'i, car Susanne est ici et elle complétera mon témoignage. C'est une amie très chère, une personne merveilleuse, et elle prendra la parole après moi.
    L'Égypte a adhéré à la convention contre la torture. Elle a aussi signé le Pacte international relatif aux droits civils et politiques ainsi que le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Le gouvernement égyptien est tenu de respecter les droits des individus et des groupes dans son pays, mais il n'a pas réalisé cet engagement ni respecté les accords.
    Pour terminer, je vous parlerai du Pakistan. Le Pakistan est une république islamique d'environ 125 millions d'habitants. Il a acquis l'indépendance en 1947 à la suite de la séparation entre l'Inde hindoue et le Pakistan musulman. Les musulmans y représentent environ 97 p. 100 de la population. Les sunnites, 77 p. 100; les chiites 20 p. 100. Les autres minorités constituent environ 3 p. 100 de la population, y compris 1,69 p. 100 de chrétiens, d'Hindous, d'Ahmadis, etc.
    Je voudrais vous parler de trois questions au sujet du Pakistan. La loi sur le blasphème, les articles 295-B et 295-C du Code pénal pakistanais, entré en vigueur au début des années 1980. La loi sur le blasphème stipule que si vous dites quelque chose contre le prophète Muhammad, contre l'islam, contre le Coran, si vous discutez de l'idée même de l'islam, si vous vous disputez à son sujet ou si vous dites quoi que ce soit de négatif contre l'islam, vous méritez d'être immédiatement puni de mort. Voilà ce que disent les articles 295-B et 295-C au Pakistan.
    Cette loi a été régulièrement utilisée depuis pour terroriser les minorités; elle a aussi été utilisée dans les conflits personnels et comme outils pour persécuter les minorités et pratiquer la discrimination à leur égard.
    Par exemple, Jagdish Kumar, âgé de 22 ans, un jeune hindou travaillant dans une usine de fabrication d'articles en cuir, avait eu une discussion au sujet de ce que représente l'islam avec ses compagnons de travail musulmans. En fin de compte, ces derniers ont dit qu'il avait commis un crime contre la loi sur le blasphème et l'avait tué sur-le-champ. Ils avaient battu à mort ce jeune hindou.
    Le Dr Robin Sardar, le 2 mai 2008, a été accusé de blasphème à Hafizabad. On l'a accusé de commettre un crime contre la loi sur le blasphème, parce qu'il avait fait des remarques au sujet de la barbe du prophète Muhammad. Sa famille a été attaquée, la police l'a arrêté, et il se trouve aujourd'hui en prison où il est passible de la peine de mort. Nos sources indiquent que deux de ses clients s'étaient querellés avec lui. Le Dr Sardar sert sa communauté depuis plus de 30 ans où il a toujours aidé les pauvres, et en fin de compte, le voilà jeté en prison sans raison précise.
(1240)
    La seconde question concernant le Pakistan dont je vous parlerai est celle du viol, le viol de jeunes filles de la communauté chrétienne et d'autres minorités. Selon notre source, il y a plus de 300 cas par an de viol de jeunes chrétiennes et de jeunes filles appartenant à des minorités. Cela se produit tous les ans. Notez que je ne parle pas simplement du crime de viol au Pakistan, car c'est le pays où il y a le plus de viol. D'après la Commission des droits de la personne du Pakistan, il y a huit viols par jour. Cela donne à peu près 3 000 cas de viol au Pakistan par an — 3 000.
    Ce chiffre n'inclut pas le mari qui viole sa femme, car selon la loi pakistanaise, le viol d'une femme par son époux ou par l'homme qui doit l'épouser n'est pas considéré comme condamnable. Ces cas ne sont pas signalés, parce qu'ils n'enfreignent pas la loi pakistanaise. Je ne parle pas de cela, car dans ce pays, la loi sur le viol est une tout autre affaire. Il nous faudrait un autre comité pour cela.
    En vertu de la loi pakistanaise, toute femme qui a été violée doit présenter quatre témoins masculins pour confirmer le viol, sans quoi, elle sera accusée de zina, c'est-à-dire d'adultère, ou de quazf, c'est-à-dire de porter une fausse accusation. Si elle n'a pas quatre témoins masculins, elle se retrouvera donc en prison.
    Ce n'est pas de cela que je parle. Je parle des 300 cas de viols de jeunes chrétiennes et membres d'autres minorités au Pakistan, qui ont été employés pour les contraindre à se convertir à l'islam, ou pour punir leurs familles parce qu'elles ne s'étaient pas converties. C'est ce qui est arrivé à Neeho Moner. Elle a deux ans et demi. Son père était fermier, un fermier chrétien, à qui le propriétaire de la ferme a dit de se convertir à l'islam. Il lui a alors répondu, non, je vous respecte, vous me respectez et chacun a ses propres convictions. Abid Huseen, le fils âgé de 18 ans du propriétaire de la ferme, a alors attaqué la petite fille qui avait alors deux ans et demi. Il l'a violée.
    Présentez la vidéo, s'il vous plaît. C'est une interview au sujet de Neeha.
    [Présentation vidéo.]
(1245)
    Le rév. Majed El Shafie: Vous allez maintenant voir l'usine de fabrication de brique au Pakistan. Dans cette usine, les membres des minorités sont pratiquement traités comme des esclaves. Les propriétaires leur disent simplement: si vous venez travailler chez nous, nous vous accorderons un prêt et nous vous verserons un salaire. Mais, lorsqu'ils vont travailler à l'usine, ils ne touchent pas de salaire — ils n'ont rien — ils deviennent des esclaves qui travaillent dans cette usine. Il y en a qui ont été torturés. On y emploie aussi de la main-d'oeuvre enfantine, comme vous le verrez.
    [Présentation vidéo.]
    Le rév. Majed El Shafie: Il y a à peu près cinq briqueteries à des endroits différents au Pakistan. Voici celle que nous avons visitée en février dernier, elle est à environ une heure et demie au sud de Lahore. Les travailleurs y sont torturés et persécutés. Ceux qui essaient de s'enfuir se font amputer des doigts. Il n'y a que deux options pour s'en sortir: leur donner un rein ou se convertir à l'islam.
    Monsieur le président, je m'excuse de prendre tant de temps. Pour conclure, je ne présenterai pas de recommandations ni d'observations finales. Tout ce que je voudrais vous dire, c'est que je vous remercie d'avoir entendu ce témoignage. Je vous remercie de nous avoir invités. Je ne sais pas pourquoi cette persécution existe. Je ne sais pas pourquoi il y a des gens qui persécutent les autres parce que ceux-ci sont différents, mais voilà ce que je sais. Je sais que la liberté est à l'épreuve des balles. Je sais que nous triompherons. Je sais que ces gens-là peuvent tuer le rêveur, mais que personne ne peut tuer le rêve.
    Merci et que Dieu vous bénisse. J'ai terminé.
(1250)
    Merci beaucoup.
    Monsieur Sweet, vous avez la parole.
    Le témoin a présenté deux documents. Le premier était une liste de personnes qui ont été légalement arrêtées et détenues. Il faudrait que ce document soit traduit de l'arabe, je crois. Le second était un texte d'un manuel scolaire qui était ouvertement anti-sémitique. Je me demande si le témoin souhaiterait que ce document soit déposé à titre permanent auprès du comité. Nous pourrions ainsi le faire traduire et l'utiliser comme élément de preuve.
    Je souhaiterais également demander au témoin plus de détails sur les endroits où se trouvent ces briqueteries au Pakistan, et s'il pourrait également remettre au comité cette information.
    M. Sweet a demandé que ces trois documents soient remis au greffier pour qu'il les fasse traduire. À la fin de la réunion, notre greffier pourrait peut-être en discuter avec M. El Shafie.
    Je vous remercie.
    Continuons. Nous nous écartons de notre ordre du jour. Les interventions des témoins sont coordonnées, et c'est pourquoi la première déclaration a été beaucoup plus longue que ne le seront les autres; je tenais simplement à vous le préciser.
    Notre second témoin sera Mme Desloges. Vous avez la parole.
    Je m'appelle Chantal Desloges. Je suis avocate et me spécialise exclusivement dans les questions d'immigration et de statut de réfugié, et je suis une spécialiste agréée du Barreau du Haut-Canada. Je suis une des 14 personnes qui sont seules à réunir ces deux qualités.
    Pendant la plus grande partie de mes 14 années de travail dans le domaine de l'immigration, je me suis occupée de personnes qui sont persécutées pour diverses raisons, ainsi que de l'application des instruments du droit international aux personnes se trouvant dans ces situations. Ces cinq dernières années, une bonne partie de ma pratique a été axée sur les minorités religieuses persécutées de tous les coins du monde; non seulement certaines d'entre elles, mais en fait, n'importe quelle minorité religieuse, qu'elle soit juive, musulmane, chrétienne, hindoue, ou autre.
    Dans ma pratique, j'ai constaté l'augmentation exponentielle de la persécution de ces minorités, et je suis convaincue — ce n'est qu'une opinion personnelle — que c'est parce que la polarisation religieuse dans le monde entier s'accuse, non seulement pour ceux qui sont directement touchés par la persécution, mais pour nous tous. C'est la raison pour laquelle ce problème devrait de plus en plus être une préoccupation des pouvoirs politiques, mais je ne l'ai pas constaté.
     Votre sous-comité a aujourd'hui le privilège et la responsabilité de faire des suggestions et des recommandations à divers secteurs du gouvernement sur ce qu'il est possible de faire pour traiter les problèmes de droit de la personne internationaux. En concentrant son attention sur la persécution des minorités religieuses, le comité a la possibilité d'accroître la sécurité des Canadiens, de soutenir la réputation du Canada comme promoteur des droits humains internationaux et d'une façon générale, d'accroître notre prestige à l'étranger.
    Je mettrai l'accent aujourd'hui sur les domaines dans lesquels le traitement par le Canada des cas des minorités religieuses est discutable et je ferai des recommandations sur la manière de l'améliorer. Ce qu'il y a de bon, c'est qu'il est possible de tout faire sans avoir à réinventer la roue.
    Je souligne qu'une approche intégrée à la lutte contre la persécution religieuse sur le plan international est nécessaire. Ce que j'entends par là c'est que nous ne devons pas mener cette guerre sur un seul front. Premièrement, l'accent mis par les Affaires étrangères sur le commerce international et autres questions du même genre est important, comme l'accent est mis sur notre politique relative aux réfugiés et notre politique d'immigration. Si ces diverses questions ne relèvent pas toujours nécessairement du même ministère, il est important qu'elles soient coordonnées.
    Pourquoi est-ce si important? Premièrement, la persécution des minorités religieuses est comme le canari des mines de charbon. Lorsque ces minorités sont persécutées, ce sont presque toujours les femmes qui sont les victimes, et les homosexuels, les minorités politiques aussi. En nous attaquant directement au problème des minorités religieuses, nous protégeons du même coup les autres types de minorités et promouvons la démocratie.
    Du point de vue de la sécurité internationale, cela me paraît aussi important, car point n'est besoin d'être un génie pour se rendre compte que les pays où les minorités religieuses sont persécutées sont aussi les pays où le terrorisme est en train de s'implanter solidement.
     Une méthode d'action importante — mentionnée, je crois, dans le mémoire présenté par One Free World International — est le recours à l'utilisation des dispositions relatives au commerce et à l'aide afin d'encourager un comportement positif sur le plan des droits de la personne et de décourager tout comportement négatif à cet égard. Les cultures dans lesquelles la persécution religieuse est impunie ne renoncent habituellement pas à ce comportement pour la simple raison que, moralement, c'est un devoir. Il faut mettre en place un système qui impose le comportement positif. Naturellement, une des meilleures façons d'influer sur le comportement des gens, est de les frapper où cela fait mal, leur portefeuille. Je suis heureuse de voir que le gouvernement actuel se montre de plus en plus disposé à faire des déclarations concernant les droits de la personne sur la scène internationale; je songe en particulier à la Chine. Il faudrait que cela se produise plus souvent.
    Enfin, pour en venir à mon domaine d'expertise, l'autre façon de faire respecter les droits de la personne est d'offrir un refuge à ceux dont les droits n'ont pas été protégés et à ceux qui sont menacés par la persécution dans le monde entier. Offrir un refuge à ces personnes n'est pas seulement un geste humanitaire, c'est aussi une façon très claire de montrer aux autres gouvernements que leur comportement est inacceptable.
(1255)
    Examinons tout d'abord brièvement le système relatif aux personnes réfugiées au Canada. J'ai deux ou trois suggestions qui permettraient peut-être de mieux sensibiliser ce système aux droits des minorités religieuses. Malgré ce que vous avez pu lire ou entendre, malgré les faiblesses de notre système, notre processus de détermination du statut de réfugié, est en fait un bon système et il est équitable. Je crois que les problèmes que connaissent les minorités religieuses tiennent plus à un manque de compréhension de la part des membres du système et d'un manque de sensibilité à l'égard des croyants, qu'à un réel défaut de notre système.
    J'ai constaté que le laïcisme est naturellement une qualité très appréciée de notre fonction publique — comme ce devrait l'être — mais il arrive que ce laïcisme aille trop loin. Je constate souvent, en particulier lorsque je traite avec les agents des services d'immigration et des services pour les réfugiés qu'il existe une totale incompréhension de ce que ces croyants représentent, mais même, très souvent, une certaine hostilité à leur égard. Il est en fait absolument indispensable de comprendre comment fonctionnent les croyants lors de la détermination du statut de réfugié.
    Au lieu d'essayer de le définir abstraitement, je vais vous donner quelques exemples de situations dont j'ai moi-même été témoin. Il y a un mois environ, je plaidais une revendication du statut de réfugié présentée par un sujet iranien qui s'était converti de l'islam au christianisme. Au cours de cette instance, j'ai rencontré un membre de la Commission qui n'appartenait pas à une minorité ethnique. C'était une Blanche d'origine britannique qui n'avait jamais entendu parler d'une église chrétienne non confessionnelle. Lorsqu'au cours de son témoignage, mon client a déclaré qu'il était membre d'une église non confessionnelle, elle a été totalement abasourdie. Elle ne savait même pas que cela existait. Quand le témoin a ajouté que les réunions n'avaient même pas lieu dans un édifice religieux officiel mais qu'il appartenait à un groupe qui se réunissait pour prier dans un domicile privé, elle avait été tout aussi surprise. Heureusement, ce jour-là, nous avions la chance d'avoir un agent du tribunal chrétien, qui avait pu donner quelques explications au membre et lui dire qu'effectivement, il existe un grand nombre de chrétiens non confessionnels dans le monde.
     L'autre exemple est celui d'un demandeur dont je m'occupais il y a deux ou trois ans, à qui un membre de la Commission avait demandé d'expliquer pourquoi il avait abandonné l'islam pour se convertir au christianisme. Il était en train d'expliquer pourquoi il avait le sentiment que l'islam était violent et qu'il était attiré par le message d'amour qui lui paraissait émaner de la foi chrétienne. Le membre l'avait alors brusquement interrompu au milieu de sa description pour déclarer que l'Ancien Testament était tout aussi violent, sinon plus, que la religion musulmane et que son explication ne lui paraissait donc pas tenir debout. À mon avis, il était indiscutable que le membre avait failli à son devoir d'impartialité en exprimant une opinion personnelle au cours de l'audience, ce qui n'était pas acceptable, sans même parler du fait que c'était extrêmement intimidant pour le client qui déposait.
    Dans d'autres cas, j'ai remarqué que les membres de la Commission utilisent une série de questions standard qu'ils posent aux membres des minorités religieuses, non seulement les chrétiens, mais aussi les musulmans chiites, pour déterminer s'ils appartiennent vraiment à ce groupe confessionnel. Le problème est que les membres de la Commission semblent croire qu'un requérant doit être un théologien pour pouvoir être un vrai membre de cette communauté confessionnelle avant de le reconnaître. Les questions sont souvent vraiment difficiles, et les membres de la Commission ne semblent pas comprendre que les gens changent de religion pour une foule de raisons différentes, dont beaucoup n'ont rien à voir avec la connaissance des Saintes Écritures, de la théologie ou de la doctrine. Ils ne tiennent pas non plus compte du fait que si quelqu'un mettait la main sur une série de ces questions, un menteur très habile pourrait aisément corrompre le système en se contentant de mémoriser les réponses.
    Bien sûr, les membres de la Commission ne sont pas mauvais. Ils ne sont pas non plus stupides. Ce dont ils ont besoin, c'est d'être un peu mieux sensibilisés aux questions religieuses et aux particularités de certains groupes confessionnels.
    J'ai vu une foule de cas de personnes qui se sont vu refuser...
(1300)
    Excusez-moi de vous interrompre. Votre micro ne fonctionne pas bien; je vais demander qu'on vous en donne un second. Je crois que cela devrait arranger les choses.
    Merci.
    Je suis également d'accord avec les autres recommandations contenues dans le mémoire de One Free World International. L'une de celles que je mentionnerai plus particulièrement concerne le fait que je pense que la Commission devrait user de discrétion lorsqu'elle décide du choix des membres et des interprètes qu'elle va utiliser pour différents cas, car il arrive souvent que vous vous retrouviez avec un interprète ou un membre de la Commission qui appartient au groupe ethnique ou religieux qui persécutait le demandeur au départ. Je ne me permettrais jamais d'accuser ces personnes de partialité, mais c'est ainsi que le demandeur voit les choses. Imaginez que vous ayez été torturé dans votre pays par un membre d'un groupe religieux ou ethnique déterminé, et que lorsque vous vous présentez au tribunal le jour de votre audience; la personne qui vous toise est en fait un membre de ce groupe; cela crée manifestement un problème très sérieux. Cela empêche vraiment les gens d'être capables de se souvenir exactement des détails et d'être suffisamment à l'aise pour raconter leur histoire.
    Je recommanderais aussi que la Commission fasse plus largement appel à de véritables experts de la détermination des revendications religieuses. À la Commission du statut de réfugié, on s'appuie beaucoup sur des instruments généraux en matière de droits de la personne, tels que les mémoires préparés par des organisations comme Amnistie Internationale ou le Département d'État américain. Bien que cela puisse constituer une information de base intéressante, il est aisé de faire valoir que pratiquement n'importe quelle organisation qui rédige ces mémoires a tendance à avoir ses propres préjugés, en particulier le Département d'État américain, qui est manifestement un organe politique des États-Unis. Lorsque ces organisations écrivent leurs rapports sur les droits internationaux de la personne, elles ont tendance à se montrer plus sévères à l'égard de ceux qui ne figurent pas sur leur liste de favoris politiques du moment et sont plus indulgents à l'égard des pays avec lesquels ils veulent entretenir de bons rapports. Je l'ai particulièrement noté dans le cas de l'Égypte.
    Laissons maintenant de côté la Commission du statut de réfugié, je voudrais également faire quelques observations sur la détermination du statut de réfugié faite hors du Canada dans nos ambassades. Je traite un grand nombre de ce type de cas, c'est-à-dire, ceux des réfugiés qui se trouvent hors du Canada et qui font une demande de protection à notre ambassade pour pouvoir venir ici.
    Je suis constamment frappée par l'absence complète apparente de compréhension du droit des réfugiés que manifestent un grand nombre d'agents des visas. Ils ne semblent même pas comprendre les principes juridiques les plus fondamentaux de notre système de détermination du statut de réfugié — ce que je trouve absolument scandaleux. Ce qui arrive donc c'est que les personnes qui présentent une demande de statut de réfugié hors du Canada font l'objet d'une évaluation beaucoup moins bienveillante que celle dont ils bénéficieraient s'ils se trouvaient déjà ici. Pourquoi diable des personnes qui sont persécutées devraient-elles s'en remettre au pur hasard? Qu'elles soient capables de venir jusqu'à notre frontière et de faire une demande, ou non, elles devraient toutes être traitées de la même manière.
    Permettez-moi de vous donner un ou deux exemples de situations dont j'ai été témoin dans nos ambassades. J'ai vu une famille chrétienne irakienne dont la demande avait été rejetée pour des motifs de crédibilité, parce que l'agent ne parvenait pas à croire que le méchant terroriste pourrait écrire une menace de mort sur du papier à fleurs. Je ne plaisante pas — je n'ai besoin de rien inventer. Une autre famille avait vu sa demande rejetée parce que, même si tous les autres chrétiens en Irak se faisaient exterminer, on lui avait dit, « Il ne vous est encore rien n'arrivé ».
    Ce sont là des erreurs absolument enfantines, quelque chose qui ne serait jamais toléré à la Commission au Canada et que le tribunal pourrait aisément invalider. Cependant, beaucoup de ces gens-là n'ont pas suffisamment de ressources pour plaider leur cause devant le tribunal.
     Il y deux ou trois ans, il y avait une telle disparité entre le taux d'acceptation des dossiers de chrétiens irakiens au Canada et celui de ceux qui se trouvaient hors du pays, qu'un comité de chrétiens irakiens s'est constitué pour étudier le problème. Il a demandé à rencontrer la ministre, ce qu'il a pu faire en mars.
    Ce comité a fait de nombreuses recommandations à la ministre de l'Immigration. Premièrement, il voulait que l'on reconnaisse, d'une manière ou d'une autre, que les chrétiens d'Irak sont un sous-groupe particulièrement vulnérable, et il a apporté de nombreux documents pour le prouver. Je dois aussi noter que la France et l'Allemagne ont fait des déclarations publiques à cet effet au cours de ces dernières semaines.
    Deuxièmement, le comité recommandait l'augmentation du nombre des admissions de réfugiés chrétiens irakiens, parce que le gouvernement a ce qu'il appelle des « objectifs »; ce sont en fait plutôt des quotas correspondant au nombre de personnes de différentes régions qu'il peut accepter. Nous jugions que l'objectif était trop bas.
    Troisièmement, nous avons demandé que l'on permette aux personnes dont la demande avait été rejetée, de faire rouvrir leur dossier afin que celui-ci soit soumis à un second examen.
(1305)
    La quatrième recommandation concernait la nécessité de traiter le problème de l'emploi d'interprètes qui appartiennent au groupe persécuteur, ethnique ou religieux.
    Je suis très heureuse de dire que quelques semaines après cette rencontre, la ministre a annoncé qu'elle allait augmenter le nombre de réfugiés d'Irak qui seraient admis, mais elle n'a appliqué aucune des autres recommandations du comité, y compris celles qui concernaient la prise de dispositions spécifiques en faveur des minorités chrétiennes irakiennes. Soit dit en passant, elle n'a pas augmenté le nombre global de réfugiés. Tout ce qu'elle a fait c'est réduire le quota du Moyen-Orient pour étoffer le quota des Irakiens ce qui, à mon avis, revient à déshabiller Pierre pour habiller Paul. Cela ne résout pas vraiment le problème.
    Consulté par la suite pour régler ce problème, le secrétaire de presse de la ministre a déclaré que rien n'était envisagé pour reconnaître la vulnérabilité particulière d'un groupe religieux quelconque en Irak et que le Canada suivrait à cet égard la politique du Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, tout cela en dépit des preuves fournies au sujet de cette minorité.
    Honorables membres du comité, à ma connaissance, le HCR n'est pas le gouvernement démocratiquement élu du Canada. Il faut que nous prenions nos propres décisions et que nous établissions nos propres politiques lorsqu'il s'agit de la protection des réfugiés. L'Allemagne et la France donnent l'exemple sur ce point. Pourquoi avons-nous si peur de dire la vérité, de dire que les chrétiens irakiens sont plus en danger que n'importe quel groupe en Irak? Pourquoi avez-vous peur de le dire? Ce n'est pas juste.
     Un autre problème qui se pose dans le cas des chrétiens irakiens dont la plupart d'entre vous ignorent probablement tout, mais qui, à mon avis, ne devra pas tarder à attirer l'attention des médias, est celui du sous-groupe des chrétiens irakiens d'origine arménienne — qui sont assez nombreux en Irak. Notre ambassade à Damas a maintenant tendance à rejeter les dossiers arméniens et à dire à ceux qui les présentent, qui peuvent manifestement prétendre au statut de réfugié ici et ont été parrainés: « Non. Pourquoi voulez-vous venir au Canada? Pourquoi ne demandez-vous pas le statut de réfugié en Arménie? » C'est un pays où ils ne sont jamais allés, dont ils ne parlent pas la langue et où ils ne connaissent personne. Cela revient à peu près à dire aux Juifs de l'ancienne URSS: « Eh bien, pourquoi voulez-vous venir au Canada? Pourquoi devriez-vous obtenir le statut de réfugié chez nous? Vous pourriez tout simplement demander à être accueillis en Israël. » Cela n'a absolument aucun sens.
    Ma dernière remarque est extrêmement importante et, elle vient, je crois, en temps particulièrement opportun. De nombreux membres de minorités étrangères à l'étranger sont actuellement persécutés, mais pour toutes sortes de raisons juridiques techniques, elles ne satisfont pas à la définition de réfugié et ne réunissent pas les conditions requises pour bénéficier d'un autre programme d'immigration reconnu. Il faut absolument que ces personnes aient accès à une autre méthode de demande du statut de réfugié au Canada, et une des méthodes actuelles possibles les plus importantes est de demander que leurs requêtes soient prises en considération pour des raisons humanitaires. En réalité, ce que ces personnes disent, c'est, écoutez, je sais que je ne suis admissible à aucun programme, mais ma situation mérite la sympathie et je voudrais que vous considériez au moins ma demande et que vous nous laissiez savoir si vous pouvez faire une exception.
    Cependant, comme vous le savez tous, le projet de loi C-50 a été voté la semaine dernière, et un des pouvoirs que la ministre s'est octroyé est la possibilité accrue d'exercer un pouvoir discrétionnaire pour des motifs humanitaires à l'étranger dans nos bureaux des visas dans le cas de personnes où ces motifs sont invoqués, ce qui est précisément ce dont je vous parle. Personne ne sait comment la ministre a l'intention d'utiliser ce pouvoir mais, il s'agit manifestement d'une question extrêmement préoccupante pour les personnes qui se trouvent dans ce genre de situation.
    Permettez-moi de vous donner des exemples concrets de personnes qui seraient touchées si cette disposition était modifiée. Premièrement, il y a le cas réel de membres d'une famille de chrétiens irakiens, qui sont tous médecins, vivent ici au Canada et s'en sortent très bien. Ils ont parrainé leurs parents, qui vivent actuellement en Irak. Pas de problème en ce qui concernait le parrainage, ils étaient admissibles. L'ennui c'est qu'ils ont une vieille tante qui a vécu avec eux depuis leur naissance, qui ne s'est jamais mariée et n'a jamais eu d'enfant. Elle est âgée, c'est une chrétienne qui se retrouvera complètement seule si le reste de la famille vient au Canada. Sa seule option est de demander qu'on exerce en sa faveur un pouvoir discrétionnaire pour des motifs humanitaires — fort heureusement, sa demande a récemment été approuvée. Mais si l'on touche de quelque manière que ce soit à cette disposition de la loi, je crains qu'une personne placée dans la même situation, risque de ne plus être acceptée.
    Mon second exemple est celui d'une jeune catholique qui vit au Sri Lanka et qui est de race tamoule. À cause de sa religion et de l'ethnie à laquelle elle appartient, elle est actuellement soumise à de graves persécutions. Elle a une amie au Canada qui est prête à s'occuper d'elle. Elle n'était admissible à aucun programme d'immigration, car on ne peut pas être considéré comme réfugié tant que l'on vit dans son propre pays. Cela fait partie de la définition de réfugié. Encore une fois la seule option pour elle est d'invoquer des motifs humanitaires.
    À mon avis, on devrait demander instamment à la ministre de ne pas modifier la portée de son pouvoir discrétionnaire dans ce genre de cas.
(1310)
    Voilà ce que j'avais à dire, honorables membres; je vous remercie de m'avoir écoutée et je serais heureuse de répondre aux questions de la fin.
    Merci, madame Desloges.
    Notre troisième témoin est Peter Bhatti.
    Merci, monsieur le président.
    International Christian Voice est une organisation de défense des droits de la personne qui est la voix des minorités religieuses silencieuses du Pakistan. C'est la voix des opprimés, des victimes, de ceux qui sont soumis à un régime de terreur, qui souffrent de discrimination et qui sont persécutés parce qu'ils n'ont pas la même religion que la majorité musulmane. Nous recourons au dialogue, à des séminaires, à des conférences et à des réunions publiques, pour effectuer un travail de sensibilisation et pour mettre en lumière le sort des minorités religieuses du Pakistan.
    International Christian Voice aide aussi les nouveaux immigrants chrétiens pakistanais qui n'ont pas d'amis, de famille ni d'autres contacts au Canada. Notre aide leur permet d'éliminer les obstacles à l'intégration dans notre société canadienne.
    Je voudrais simplement vous donner quelques détails au sujet des minorités chrétiennes et autres minorités religieuses au Pakistan. Les chrétiens du Pakistan ont contribué à la création, au développement et à la prospérité de ce pays. Encore aujourd'hui, ces minorités chrétiennes servent loyalement le Pakistan.
    Le Pakistan n'a pas été créé comme un État théocratique, mais comme un État progressiste et démocratique. Le fondateur du Pakistan, Quaid-e-Azam Muhammad Ali Jinnah, dans son discours portant sur les politiques devant la première assemblée constitutionnelle du Pakistan, le 11 août 1947, déclarait catégoriquement:
Vous êtes libres; vous êtes libres de fréquenter vos temples. Vous êtes libres de fréquenter vos mosquées ou tout autre lieu de culte dans cet État du Pakistan. Vous êtes libres d'appartenir à une religion, une caste ou une croyance quelle qu'elle soit — cela n'a rien à voir avec les affaires de l'État — nous sommes tous des citoyens et des citoyens égaux d'un même État.
    Malheureusement, après la mort de Quaid-e-Azam, chaque chef d'État successif s'est servi de la religion pour prolonger son règne, et des lois discriminatoires ont été promulguées et intégrées à la constitution du Pakistan. Ces lois favorisent la discrimination à l'égard des minorités religieuses du Pakistan et les victimisent. Les organisations religieuses extrémistes ont été encouragées par l'existence de ces lois discriminatoires. Elles les ont utilisées pour persécuter, victimiser, terroriser et pratiquer la discrimination à l'égard des minorités religieuses. La loi sur le blasphème, comme le frère Majed l'a déjà dit, est largement exploitée par les extrémistes contre les chrétiens et les autres minorités religieuses.
    De nombreux chrétiens ont été tués pendant les procès, et beaucoup d'entre eux sont en prison où ils vivent dans des conditions lamentables. Leurs familles sont harcelées, attaquées et contraintes de quitter leurs maisons. Au cours de l'attaque de la coalition dirigée par les Américains contre l'Irak et l'Afghanistan, les églises, les institutions, les écoles et les autres biens chrétiens ont été attaqués. Pour les extrémistes islamiques, il n'y avait pas de différence entre les chrétiens pakistanais, les Américains et les Israéliens.
    Cette affiche vous en offre un exemple.
    La loi martiale actuelle et l'absence de mode de gouvernement démocratique au Pakistan a créé un vide dans la société pakistanaise, vide qui a été comblé par les organisations extrémistes. Aujourd'hui, ces organisations enfreignent la loi et l'ordre au Pakistan et ternissent l'image du pays.
(1315)
    Je voudrais donner quelques exemples de cette situation au comité. Cette personne s'appelle Javed Anjim; il avait 18 ans. Il s'était rendu dans une mosquée pour boire de l'eau, et les prêtres, qui étaient des prêtres Maulvi, lui avaient dit qu'il ne devait pas entrer dans la mosquée sans accepter l'islam. Il a été torturé à mort, mais il a refusé de se convertir.
    Notre évêque catholique, du diocèse de Faisalabad, s'est sacrifié pour protester contre la loi sur le blasphème. Plusieurs personnes ont eu des problèmes à cause de cette loi.
    Le révérend Majed El Shafie vous a déjà montré cette petite fille. C'est une photo récente prise depuis l'époque où elle a été attaquée.
    Je voudrais aussi vous montrer une photo d'une jeune fille de 18 ans. Elle a été violée dans une église sous la menace d'une arme. Un militant islamique qui était entré dans l'église l'a violée dans ce saint lieu. Il y a encore là-bas des victimes que l'on ne peut pas rejoindre, parce que tout le monde a peur des militants islamiques et de leurs forces.
    Cependant, le gouvernement démocratique, le Parti du peuple, qui vient de prendre le pouvoir au Pakistan, agit sagement. Le premier ministre pakistanais Yousaf Raza Gilani, a annoncé que le gouvernement rétablira les droits fondamentaux annoncés, les protégera et reconnaîtra officiellement les minorités au Sénat.
    Les minorités espèrent que l'engagement pris par le fondateur du Pakistan sera suivi et que des droits seront accordés aux minorités. Les minorités religieuses du Pakistan, en particulier les chrétiens, en dépit de leur victimisation et des attaques dont elles font l'objet, demeurent de loyaux citoyens du Pakistan. Leurs membres sont fiers d'être Pakistanais et ils sont prêts à se sacrifier pour le bien-être du Pakistan.
    Monsieur le président, au nom des chrétiens pakistanais et des autres minorités religieuses du Pakistan, je recommande au comité que le gouvernement canadien, les organisations internationales des droits de la personne et les partis politiques jouent un rôle dans la promotion de cultures démocratiques véritables, des droits de la personne, de la liberté religieuse et de l'amélioration du sort des minorités religieuses du Pakistan; et que le gouvernement canadien accorde le statut de réfugié aux minorités religieuses du Pakistan.
    Nous savons que la pauvreté est une des raisons de l'injustice sociale. Le gouvernement recherche donc, par l'intermédiaire d'organismes gouvernementaux et non gouvernementaux, des moyens d'assurer le développement socio-économique des minorités religieuses du Pakistan.
    J'espère que le gouvernement du Canada prendra ces questions très au sérieux et qu'il continuera de promouvoir les droits de la personne au Pakistan, y compris la liberté religieuse. J'ai le ferme espoir que les organisations de défense de la personne et d'autres organisations s'appuieront sur ces principes pour prendre position au sujet de cette importante question.
    Au nom de International Christian Voice et de la communauté chrétienne canado-pakistanaise, je remercie tous les membres du comité de m'avoir accordé le privilège de parler du sort des chrétiens du Pakistan avec vous et avec nos autres membres.
    Merci beaucoup.
(1320)
    Merci beaucoup, monsieur Bhatti.
    Susanne Tamas est notre quatrième témoin aujourd'hui. Vous avez la parole.
    Permettez-moi de commencer par remercier le Sous-comité des droits internationaux de la personne et M. El Shafie de l’invitation à parler de l’expérience de la communauté baha’ie dans le cadre de cette étude de la situation des minorités religieuses au Pakistan et ailleurs. Je crois comprendre que c'est sur le Pakistan, l'Égypte et l'Irak que l'on doit mettre l'accent.
    La situation des Baha’is varie d’un endroit à l’autre de la région. Certains pays reconnaissent dans leurs constitutions que les Baha'is sont une minorité religieuse. Ceux-ci pratiquent leur religion en toute liberté. Dans d'autres pays, le culte baha'i est proscrit et les Baha'is sont persécutés.
    Là où les droits de la personne des Baha’is sont violés, les violations sont couramment justifiées par des motifs théologiques ou politiques. Post-coranique, fondé après Muhammad, le culte baha'ie est souvent considéré comme une hérésie et ses pratiquants comme des apostats. Le fait que le Centre mondial baha'i se trouve à Haifa en Israël, pur accident de l'histoire, est considéré comme la preuve de ses liens avec le Sionisme.
    Je parlerai de la situation dans deux des trois pays et mentionnerai brièvement l'urgence de la situation dans un pays voisin. Je conclurai par quelques recommandations.
    Je commencerai par le Pakistan. Après ce que nous venons d'entendre, cela vous paraîtra surprenant, mais je crois qu'il y a une lueur d'espoir. Son Assemblée spirituelle nationale, l’organe consultatif élu qui administre les affaires de la communauté baha’ie, a été constituée en 1985 et où la foi baha’ie est reconnue parmi les minorités religieuses non musulmanes du pays dans les modifications apportées à la constitution en avril 1981.
    Les 9 900 Baha'is du Pakistan entretiennent des rapports cordiaux avec leur gouvernement. Leurs mariages sont reconnus. Leurs enfants peuvent obtenir un congé scolaire pour célébrer leurs journées saintes. Les publications baha'ies ont été offertes aux leaders politiques et autres. Un entretien d’une délégation baha’ie avec le président Musharraf en 1996 a été couvert par les actualités télévisées et les activités des Baha’is sont largement annoncées dans les médias nationaux et locaux du pays. En avril dernier, le président Musharraf a présenté « de sincères félicitations » aux Baha’is à l’occasion de la journée sainte du Ridvan, tandis que le ministre des Minorités a pris la parole lors des célébrations du Ridvan, organisées dans les locaux du ministère.
    Cela pourrait être un exemple encourageant d'un État musulman qui se montre capable de faire une place à une minorité post-coranique et donc, à toute autre minorité religieuse.
    Passons maintenant à l’Égypte où la foi baha’ie s’est établie en 1867 et où la communauté baha’ie a joui d’une liberté religieuse relative et a pu prospérer pendant une centaine d’années. Toutefois, depuis l’adoption du décret présidentiel 263 en 1960, qui interdit les institutions et les activités baha’ies et préconise la confiscation des biens baha’is, la communauté a été soumise à une surveillance constante de la police. Des Baha'is ont été emprisonnés uniquement à cause de la religion qu'ils pratiquaient. À six reprises, des groupes importants ont été arrêtés. Ils ne sont même pas autorisés à se rassembler pour observer les jours saints. Leurs maisons ont été fouillées, leurs publications ont été confisquées et détruites. Il leur a été impossible de se marier légalement à moins de se déclarer musulmans, ce qu'ils ne sont pas prêts à faire. Les enfants baha'is sont considérés comme illégitimes, ce qui crée des problèmes dans toutes sortes de domaines: retraite, héritage, divorce, pension alimentaire et garde des enfants.
    Depuis que les cartes d’identité nationales ont été informatisées, la situation des Baha’is est devenue critique. Les citoyens égyptiens sont tenus de porter la carte d’identité qu’ils doivent présenter pour obtenir des soins, faire des transactions bancaires, obtenir un emploi ou aller à l’école. Lorsque les cartes d’identité étaient faites à la main, les Baha’is étaient autorisés à laisser en blanc la case « Religion » ou même, dans certains cas, à y inscrire « Baha’i ». Depuis l’informatisation, ils doivent se déclarer chrétiens, juifs ou musulmans. Et s'ils ne le peuvent pas ou ne le veulent pas, ils n'obtiennent pas de carte d'identité, ce qui revient, dans la pratique, à les dépouiller de toute identité civique. Les Baha'is peuvent donc être arrêtés lors d'un contrôle par la police.
    Plusieurs Baha’is ayant intenté des procès, un tribunal de première instance a accordé à un couple baha’i, en avril 2006, le droit d’inscrire sa religion sur la carte d’identité. Le ministre de l'Information a interjeté appel de cette décision auprès de la cour administrative suprême et en décembre, le juge s'est prononcé contre les Baha'is. Cette affaire a suscité beaucoup d'intérêt dans les médias, dont certains se sont montrés favorables aux Baha'is. Un certain nombre d'organisations de défense des droits de la personne, qui avaient longtemps hésité à s'exprimer, ont pris leur défense.
    En janvier 2008, le tribunal de première instance s’est prononcé sur deux autres cas, permettant de laisser la case de la religion en blanc, d’y tracer un trait ou d’inscrire la mention « Autre », au choix du ministère de l’Information, le gouvernement égyptien n'a pas interjeté appel et a déclaré qu'il avait l'intention de confirmer ce jugement. Cependant, la décision de la cour n'est toujours pas entrée en vigueur — elle a été prise en janvier — et à ce jour, il demeure impossible pour les Baha'is d'obtenir des pièces d'identité.
(1325)
    Même si nous nous intéressons avant tout aujourd’hui au Pakistan, à l'Égypte et à l'Iraq, je voudrais maintenant dire quelques mots de la situation des 300 000 Baha’is qui vivent en Iran, où le gouvernement a pour politique officielle d’empêcher la plus importante minorité religieuse du pays de constituer une communauté viable. L'histoire du culte baha'ie en Iran a été marquée par des épisodes de persécution. Cependant, depuis le début de la révolution islamique, la persécution a été incessante, et tout récemment, elle s'est intensifiée.
    Il y aurait beaucoup à dire à ce sujet, mais je me limiterai à une affaire extrêmement urgente. Au début des années 1980, tous les membres de l'Assemblée spirituelle nationale, l'organe directeur des Baha'is d'Iran, étaient « disparus ». Les membres élus pour les remplacer ont été arrêtés et sommairement exécutés. Peu après, les Baha’is ont reçu l’ordre de démanteler leurs institutions officielles. Avec le temps, des groupes spéciaux ont été nommés pour servir la communauté du mieux qu’ils pouvaient au niveau local et national. Cela s’est fait au vu des responsables iraniens et avec leur consentement tacite. De temps en temps, les responsables convoquaient ces représentants pour les interroger.
    Le 14 mai 2008, les autorités iraniennes ont procédé à des raids, arrêtant six des 11 membres du groupe spécial national. Un septième membre avait été arrêté à Mashhad début mars. Dans les deux jours qui ont suivi, le ministre des Affaires étrangères du Canada a publié une déclaration protestant contre l’arrestation de toute la direction de la communauté baha’ie. De plus, l’affaire a fait l’objet d’une large couverture médiatique et d’un appui sans précédent de la part des intellectuels musulmans et des organisations de défense des droits de la personne. Mais les familles de ces prisonniers n'avaient pas eu de nouvelles de ceux-ci jusqu'à la semaine dernière où quelques-uns d'entre eux ont été autorisés à les appeler. Pour le moment, on demeure sans nouvelles des autres. Les responsables iraniens refusent toujours de confirmer l'endroit où se trouvent les prisonniers et aucune accusation formelle n'a été portée, bien qu'un porte-parole du gouvernement ait faussement allégué que ces personnes sont une menace pour la sécurité nationale.
     Selon le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la liberté de religion ou croyance, l'intolérance religieuse et la persécution des minorités religieuses sont en hausse. Elles s'accompagnent d'innombrables souffrances et constituent une menace pour la sécurité et le développement. La solution à la persécution sanctionnée par l’État des minorités religieuses implique de se fonder sur la primauté du droit, des critères objectifs et un cadre des droits de la personne plutôt que sur des aspects théologiques des relations de l’État avec les minorités religieuses. Nous encourageons donc vivement le SDIR à entreprendre une étude pour déterminer des initiatives efficaces en matière de politique étrangère afin de promouvoir le respect de la liberté de religion ou de croyance, empêcheraient l'intolérance religieuse et protégeraient les victimes de persécutions religieuses.
    En particulier, nous demandons instamment au SDIR d'encourager l'Égypte à appliquer immédiatement la décision du tribunal au sujet des pièces d'identité à tous les Baha'is égyptiens, d'effectuer une étude approfondie de la situation des droits de la personne en Iran — plusieurs membres m'ont assuré que c'était envisagé — et d'adopter la motion relative à l'arrestation des leaders baha'is.
    Je m'en tiendrai là mais je serais heureuse de pouvoir poursuivre la discussion et de vous proposer des stratégies. Je suis tout à fait disposé à rencontrer ceux d'entre vous qui souhaiteraient examiner plus à fond n'importe quel élément de mon témoignage.
    Je vous remercie de votre attention et de m'avoir offert cette possibilité de témoigner.
(1330)
    Merci.
    Nous allons maintenant passer à notre cinquième et dernier témoin. Firidon Zia parlera et M. Yousif lui servira d'interprète.
    Je m'appelle Firidon Qiryaqous Zia.
    Je tiens tout d'abord à remercier le fauteuil de me donner la possibilité de comparaître.
    Le 24 septembre 2006, j'étais à la messe dans une église de Bagdad. Juste après 10 heures, nous avons entendu l'explosion d'une bombe à l'extérieur. Nous savions que c'était un piège utilisé avant de faire exploser une bombe plus puissante. J'ai donc aidé deux autres personnes à empêcher les gens de sortir de l'église et à en fermer les portes.
    Tout le monde voulait fuir, et les occupants des immeubles voisins voulaient entrer dans l'église pour voir ce qui se passait. Tout le monde avait peur et c'était le chaos.
    Une seconde bombe a explosé 10 ou 15 minutes après la première, au moment où je me trouvais juste à l'extérieur de l'église. Tout ce dont je me souviens c'est que je me suis retrouvé sur le sol, entouré d'autres personnes. L'une d'entre elles était morte. J'étais complètement sourd et mes oreilles bourdonnaient. J'étais blessé à la jambe et je saignais beaucoup. Je hurlais pour que l'on vienne me secourir mais personne n'est venu pendant au moins 15 à 20 minutes.
    La première personne qui est venue me porter secours était le prêtre de l'église, qui m'a aidé à sortir. Les ambulanciers m'ont aidé à monter à bord de leur véhicule, car celui-ci ne pouvait pas venir devant l'église à cause de l'explosion des bombes.
    Il y avait déjà trois morts dans l'ambulance qui m'a transporté à un hôpital.
    Pendant le parcours, on m'a dit qu'il faudrait m'amputer de la jambe pour me sauver.
    Ce qui a été plus douloureux encore que ma blessure et que l'explosion dans l'église, c'est l'enlèvement de mon fils, qui a eu lieu quelques mois seulement après cet incident. Mon fils est âgé de 24 ans.
    J'ai reçu un appel trois jours après son enlèvement. J'ai emmené les femmes de la famille, mes filles et mon épouse, dans le nord de l'Irak pour qu'elles y soient en sécurité, et je suis resté à Bagdad.
(1335)
    La milice Mahdi, qui avait enlevé mon fils, négociait avec moi. Elle m'a offert trois options pour le sauver. La première était qu'il devienne musulman, ce qu'il a refusé, la seconde était qu'il accepte de participer à un attentat à la bombe, ce qui voulait dire qu'il utiliserait une auto chargée de bombes et qu'il se rendrait à un endroit donné pour les faire exploser; la troisième option était de donner 200 000 $ à la milice.
     Je ne faisais que leur dire, « Nous n'avons pas une telle somme. Nous avons au maximum 5 000 $ environ; c'est tout ce que nous pouvons vous donner. » Ils continuaient à insister et faisaient même des plaisanteries en me disant d'appeler le Pape pour lui demander de l'argent.
    Mon fils a été enlevé le 3 janvier 2007. Le 12 janvier 2007, ils m'ont rappelé une nouvelle fois et ils m'ont demandé si j'avais l'argent. Comme je ne l'avais pas, ils m'ont dit: « On va tuer ton fils; tu le trouveras à l'hôpital, là où ils gardent tous les morts. »
    Nous avions perdu tout espoir car nous étions convaincus que notre fils avait été tué. Quelques jours plus tard, nous avons eu des nouvelles par une connaissance, qui nous a appris qu'il y avait quelqu'un qui s'appelait Attra à l'hôpital, ce qui est le nom de mon fils, et qu'il était vivant... Je me suis alors rendu à l'hôpital pour voir si c'était bien lui. Je le croyais mort, et je voulais qu'on me rende son corps; j'ai donc pris sa carte d'identité avec moi.
(1340)
    Voici ce que Attra, mon fils, a entendu dans ses brefs moments conscients. Deux agents de police qui étaient à côté de lui bavardaient. L'un d'eux a demandé à l'autre, « Tu sais que ce gars-là est chrétien? Tuons-le. Descendons-le. » Le second agent avait répondu, « De toute façon, il est pratiquement mort. Pas la peine de le descendre pour avoir mauvaise conscience ensuite. »
    Je tiens à ajouter que lorsque la milice m'a appelé, on m'a dit, « Nous allons jouer la scène de la crucifixion avec lui. »
    Lorsque Attra, mon fils, a été libéré par la milice, il avait reçu deux balles dans le dos pendant qu'il était menotté, et il avait été abandonné dans la rue. À ma connaissance, personne ne s'était occupé de lui pendant quatre heures. Il a donc saigné pendant quatre heures. Une des balles avait pénétré sa moelle épinière, et l'autre avait traversé son corps de part en part, lui causant de graves lésions internes. Il a été soigné pendant deux mois en Irak, mais à cause du mauvais équipement et du manque de fournitures médicales, on n'a pas pu faire grand-chose pour lui. Nous n'avions pas de passeport pour toute la famille et nous avons donc été obligés d'en obtenir pour quitter le pays.
    Lorsque les passeports sont arrivés, je les ai envoyés à la famille, à la mère et aux filles, pour leur permettre d'aller en Syrie, où je les ai suivies au bout de deux mois environ avec mon fils, avec Attra, qui ne pouvait pas être déplacé plus tôt à cause de ses nombreuses blessures.
    Il a été transporté sur un brancard et embarqué sur un avion qui l'a amené d'Irak en Syrie. Il y a été immédiatement hospitalisé dans un établissement français, puis transféré dans un autre hôpital.
    Attra est maintenant paralysé au-dessous de la ceinture, et on lui a dit qu'il n'y avait aucun médicament ni aucun traitement possible pour lui en Syrie. C'est pourquoi j'espère qu'on pourra soigner mon fils ici au Canada, et je prie pour cela. J'ai apporté les dossiers médicaux de mon fils établis en Irak et en Syrie pour les remettre à quiconque pourra m'aider au Canada.
(1345)
    Je tiens à remercier le comité d'avoir bien voulu m'entendre et je remercie le père Majed de One Free World International de m'avoir aussi offert cette occasion de vous parler.
    C'est tout. Merci.
    Merci beaucoup.
    Les membres du comité auront remarqué que la séance a duré beaucoup plus longtemps que d'habitude. Sur le plan pratique, je ne crois pas que nous puissions passer en revue toutes les questions que nous avions l'intention d'examiner à huis clos. Sauf objection du comité, je propose de le faire au début de la réunion de demain. Cela nous évitera les problèmes de dépassement de temps qui nous en empêcheraient. Nous allons passer directement aux questions. Si le comité est d'accord, il faudra nous montrer extrêmement brefs. Il ne faudra pas dépasser trois à quatre minutes pour chaque intervention.
    Madame Deschamps?

[Français]

    Monsieur le président, j'aimerais savoir s'il est prévu qu'on reçoive d'autres témoins au cours de la séance de demain pour discuter du même sujet. Je n'étais pas du tout au courant. Nous n'avons pas reçu la liste des témoins avant la tenue de la séance d'aujourd'hui. Il aurait été préférable que nous soyons mis à contribution. En effet, nous aurions peut-être pu, nous aussi, suggérer des témoins.
    Par ailleurs, j'aimerais savoir si nous faisons une étude ou si nous traitons simplement d'une question soulevée dans la foulée de la motion de M. Sweet.

[Traduction]

    C'est une question qui a été soulevée. Je crois que c'est effectivement M. Kenney ou peut-être M. Sweet qui l'a posée; je ne m'en souviens pas exactement. Mais quoi qu'il en soit, un avis a été envoyé. Le problème tient peut-être au fait que Mme St-Hilaire, membre régulier du comité, est absente et que Mme Barbot l'a remplacée. Or, l'avis est expédié au bureau de Mme St-Hilaire.
    Je pense que le document a été reçu à temps; en tout cas il a certainement été envoyé en temps utile. Notre greffier pourra vous le dire.
    Il a été envoyé en temps utile, n'est-ce pas?
    L'avis de réunion, monsieur?
    Et la liste des témoins.
    Madame Deschamps, comme ceci empiète sur le temps qui nous reste pour poser des questions, je vous propose d'en discuter avec moi en dehors du comité, sans quoi, nous allons utiliser tout le temps dont nous disposons pour les questions.
    Cela vous convient-il?
    Monsieur Silva, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Permettez-moi de remercier tous les témoins qui ont comparu devant ce comité et de dire combien les déclarations et les témoignages qu'ils ont présentés aujourd'hui sont importants et précieux. Ils mettent vraiment en lumière les violations des droits de la personne qui ont lieu et la persécution qui règne dans les pays figurant sur la liste, en particulier dans le domaine dont nous nous occupons aujourd'hui, celui des persécutions religieuses.
    En ce qui concerne le bahaïsme, j'ai aussi une motion à présenter au comité. Elle concerne les Baha'is et les persécutions dont ils font l'objet en Iran. Nous n'avons pas parlé de l'Iran, mais nous savons que les Baha'is sont un groupe minoritaire dans ce pays. Ils sont persécutés depuis très longtemps. Ils sont extrêmement inquiets, non seulement à cause des arrestations qui ont lieu en Iran mais aussi à cause de la nouvelle loi présentée au Parlement qui contribuera à encore accroître les persécutions dont ils sont victimes.
    Notre communauté s'inquiète vivement de voir que les pays dont nous avons parlé ne protègent pas leurs minorités religieuses; elle s'inquiète également des persécutions dont elles font l'objet, qui sont sanctionnées par l'État. En tant que Canadiens et que parlementaires, nous avons le devoir non seulement de nous élever contre ces abus, mais aussi d'intervenir par le biais de nos lois, de nos politiques d'immigration et de nos politiques relatives aux réfugiés.
    Cela a aussi été une bonne idée d'inclure dans cette présentation une personne qui a eu affaire à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Certaines des déclarations qui ont été faites sont tout à fait justifiées. J'ai également été témoin de situations dans lesquelles des personnes qui avaient effectivement été persécutées se sont présentées devant la CISR. Il faudrait absolument que le CISR fasse preuve de plus de sensibilité, qu'on comprenne que ces personnes ont besoin de notre aide. Nous ne pouvons pas nous contenter de les renvoyer dans des endroits où ils savent qu'elles seront torturées ou persécutées. Nous nous faisons ainsi les complices d'une telle politique. Nous avons une responsabilité à l'égard de ces réfugiés et nous devons nous assurer qu'ils sont protégés et ne sont pas renvoyés là où ils seront persécutés.
    Il y a une foule de questions à poser, malheureusement, notre temps est extrêmement limité aujourd'hui. Je tiens à dire que tout cela nous préoccupe au plus haut point. Nous vous remercions de vos témoignages. Notre comité fera tout son possible pour vous aider.
    Quelqu'un souhaiterait peut-être que ce comité et ce gouvernement proposent d'autres plans d'action; je voudrais donc donner la parole à ceux qui ont un commentaire très bref à faire.
(1350)
    Merci.
    Madame Deschamps, vous avez la parole.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je me rallie à la déclaration de M. Silva pour épargner mon temps et poser une question plus précise à Mme Desloges au sujet de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés.
    La mise en place d'une section d’appel des réfugiés pourrait-elle aussi protéger certains réfugiés qui sont au Canada et qui font face à un renvoi dans un pays où ils sont menacés sans avoir la chance de s'exprimer?
    Le Canada fournit actuellement des millions de dollars au Pakistan par l'entremise de l'ACDI. Aussi, le flux commercial avec ce pays s'élève à un demi-milliard de dollars. Comment le gouvernement canadien pourrait-il influencer le comportement du gouvernement du Pakistan et contrer le laxisme de ce dernier? On a parlé de certaines solutions, comme la conclusion d'une entente commerciale avec les pays où les minorités sont victimes de traitements horribles.
    Votre présentation se terminait par une multitude de recommandations, monsieur El Shafie. Pouvez-vous les faire parvenir au comité?

[Traduction]

    En ce qui concerne mes recommandations au sujet de l'immigration — et je regrette de ne pas avoir le temps de les passer en revue — je crois que c'est Mme Desloges qui est la mieux placés pour en parler.
    Je dirai seulement ceci au sujet de l'immigration: En mai 1939, un navire, le St-Louis, est arrivé sur les côtes du Canada. Il était rempli de Juifs qui avaient fui l'holocauste. Notre premier ministre de l'époque, Mackenzie King, qui avait l'habitude de parler au fantôme de sa mère et de l'interroger à son chien lorsqu'il avait à régler des questions touchant des affaires étrangères, les a forcés à faire demi-tour, si bien que la plupart d'entre eux ont trouvé dans la mort dans l'holocauste. Je ne crois pas que le Canada puisse se permettre d'avoir un autre St-Louis sur la conscience. Voilà le premier point.
    En ce qui concerne ma recommandation au sujet des affaires étrangères, elle vise en partie à établir un lien entre le commerce et l'aide et l'amélioration du bilan des droits de la personne dans ces pays. Par exemple, nous nous sommes engagés à donner 300 millions de dollars à l'Irak entre 2003 et 2010, sans compter plus de 269 millions de dollars d'exportations en Irak et 1,5 milliard de dollars d'importations de ce pays. Les exportations au Pakistan se chiffrent à 450 millions de dollars; les importations, à 243 millions de dollars, et l'aide atteint 49,78 millions de dollars. Les exportations en Égypte s'élèvent à 348 millions de dollars, les importations, à 161 millions de dollars et l'aide à 25,8 millions de dollars. Tout cela provient des impôts payés par les Canadiens, et je ne crois pas que ceux-ci seraient heureux d'apprendre que l'argent de leurs impôts va servir à aider des gouvernements qui persécutent les minorités.
    Ce que vous pouvez faire, c'est non pas supprimer l'aide ou les exportations ou les importations, parce que si vous coupez l'aide, vous perdez vos moyens de pression, mais vous pouvez assujettir à l'aide d'améliorations. Si donc, la situation s'améliore dans ces pays, l'aide augmente, les exportations augmentent et les importations aussi. Si le bilan ne s'améliore pas, il faut commencer à réduire les relations, l'aide et tout le reste. Cela pourrait beaucoup aider les minorités là-bas.
(1355)
    Merci.
    Madame Desloges vous aviez une remarque à faire?
    Oui, parce que la première question concernait l'immigration. Je crois que vous parlez de la Section d'appel des réfugiés, qui n'existe pas encore, mais dont la création est prévue dans la loi.
    À la question de savoir si ce serait un moyen efficace de traiter la situation, je répondrai simplement à la fois oui et non. Je préférerais voir un système qui offre tout de suite les bonnes solutions au lieu d'introduire un autre niveau d'appel sans que les échelons inférieurs aient acquis les connaissances et la sensibilité nécessaires. Ce que l'on risque, si cette Section d'appel des réfugiés était créée, c'est de se retrouver avec le même genre de problèmes.
    Je préférerais donc, comme je l'ai dit, qu'au lieu de réinventer la roue, le gouvernement apporte ces modifications mineures au bas de l'échelle, car cela nous éviterait, au départ, de devoir aller aussi loin.
    Monsieur Marston, c'est votre tour.
    Merci, monsieur le président. Espérons qu'il n'y aura plus jamais de Komagata Maro ou de St-Louis. Nous en avons connu dans notre histoire. Pour rendre justice au gouvernement, cependant, il a présenté des excuses sur divers fronts, ce qui est probablement très surprenant pour certains, car ils n'auraient jamais pensé qu'on puisse en arriver là.
    Si je vous comprends bien, madame Desloges, notre système d'immigration a un problème systémique, aussi bien au niveau de la commission de l'immigration que peut-être aussi au niveau des politiques.
    Simplement pour notre gouverne, combien de directeurs de la Commission de l'immigration y a-t-il dans tout le pays? Dans vos premières remarques, vous avez mentionné certains problèmes particuliers, et on a presque l'impression qu'il s'agit moins de problèmes systémiques que de problèmes individuels. Les problèmes dont vous parlez vous paraissent-ils systémiques dans l'ensemble ou de nature plus individuelle? Bien entendu, cela soulève la question de savoir s'il est possible de donner des cours de sensibilisation aux gens.
     Une des choses dont nous entendons beaucoup parler dans ma circonscription — Hamilton Est — Stoney Creek, qui a beaucoup d'immigrants et de néo-Canadiens — est que le nombre des déportations augmente, et cela m'inquiète beaucoup en ce qui concerne les demandeurs du statut de réfugié. Quels que soient leurs antécédents religieux, nous devrions protéger le plus grand nombre possible de ces personnes; cela me préoccupe beaucoup.
    Pourriez-vous nous en parler, s'il vous plaît?
    Je n'ai pas bien saisi votre première question. Quand vous avez mentionné le nombre de directeurs, qu'entendiez-vous par « directeurs »?
    Dans tout le pays, dans le système que constitue la CISR, combien y a-t-il de personnes qui examinent ces demandes? Quel est leur nombre? Ce qui m'intéresse est de savoir si nous avons besoin d'une formation d'ensemble — une formation aux politiques — et à quelle échelle.
    Vous voulez parler du nombre des instances?
    Oui, je parle des commissions.
    Il est bien connu qu'il y a un nombre insuffisant de membres à la Commission des réfugiés en ce moment, ce qui est un autre problème. On n'en nomme pas suffisamment pour compenser l'usure des effectifs. Je ne connais pas les chiffres exacts, mais ils sont sensiblement inférieurs à ce qu'ils devraient être.
     Vous avez demandé si le problème est systémique. Je crois qu'il l'est parce que c'est la nature même des êtres humains qui est la source du problème. Chaque fois que vous avez affaire à un décideur humain, vous vous heurtez au problème que créent vos préjugés, qui ne sont pas nécessairement mauvais. Vous avez là des personnes issues de milieux différents. Il s'agit peut-être simplement de lacunes dans leurs connaissances, ou peut-être, encore ces personnes ne sont-elles pas suffisamment sensibilisées, comme ce serait nécessaire, à l'égard des croyants pour pouvoir siéger à ces instances. Donc, je crois effectivement que le problème est systémique, mais cela n'est en aucun cas une condamnation de notre système.
    En ce qui concerne votre troisième question, ou commentaire, au sujet des renvois dont le nombre semble augmenter, je n'ai absolument aucune objection à ce que notre gouvernement expulse les personnes qui méritent de l'être, qui font l'objet d'une mesure de renvoi justifiée, et dont les divers appels ont été rejetés. Je commence cependant à m'inquiéter lorsque le système ne fonctionne pas comme il le devrait. C'est là le vrai problème. Ce n'est pas le fait de renvoyer des personnes visées par des ordonnances d'expulsion. Je crois que le public canadien serait d'accord avec cela. Le problème est qu'il faut s'assurer que la prise de décisions est justifiée avant d'en arriver là.
(1400)
    C'était l'objet de ma question.
    Merci beaucoup.
    Je vois qu'il est 13 h 55. Cela permettra à un membre du gouvernement de poser une question et d'obtenir une réponse.
    En fait, je vais essayer de faire l'impossible. Comme il nous reste dix minutes, je vais en prendre une afin de permettre à mon collègue de poser aussi une question.
    Je tiens à remercier tous les témoins pour leurs extraordinaires témoignages. Je suis heureux que nous leur ayons consacré la plus grande partie de la réunion.
     Les questions relatives aux réfugiés et à l'immigration représentent la plus grosse partie du travail au bureau de ma circonscription. Je l'ai entendu répéter maintes fois et je suis heureux de l'avoir entendu dire encore une fois aujourd'hui par une avocate spécialiste du domaine — il y a un nombre sans précédent de situations dans lesquelles des personnes qui demandent le statut de réfugié sont interrogées par des gens qui, à certains égards, ressemblent à ceux qui les persécutaient. Je souhaiterais que l'on trouve un moyen d'étudier cette situation plus à fond, si elle se présente fréquemment dans nos bureaux consulaires.
    M. Silva y a fait allusion et je veux que nos témoins le sachent. Nous sommes prêts à accueillir toute recommandation qu'ils voudraient soumettre au comité.
    J'ai entendu deux genres de suggestions. Certains ont suggéré une politique élargie à l'égard des réfugiés afin de permettre à ceux qui sont persécutés de quitter l'Irak; d'autres ont dit qu'ils voudraient que nous nous assurions que le nombre des réfugiés ne diminue pas car cela compromettrait la sécurité de ceux qui ont été laissés derrière. À un moment quelconque, j'aimerais qu'un mémoire écrit soit présenté à ce sujet.
    Je remercie tous les témoins, en particulier ceux qui sont venus d'outre-mer, M. Bhatti et M. Zia.
    Est-il exact qu'ils sont respectivement venus du Pakistan et d'Irak?
    Ils vivent ici maintenant. Ils vivent tous deux à Toronto.
    Excusez-moi. Je croyais que vous aviez fait venir vos témoins d'outre-mer. Quoi qu'il en soit, je tiens à remercier tous les témoins d'avoir soulevé publiquement ces questions ici, au Canada, et d'inspirer les parlementaires que nous sommes, à réagir d'une manière conforme aux valeurs les plus précieuses du Canada. Je vous remercie.
    Je remercie encore une fois nos témoins au nom de tous les membres du comité.
    Mme Deschamps a soulevé une question intéressante tout à l'heure. Allons-nous passer ensuite à une étude? C'est au comité d'en décider. Il y a là suffisamment de matière pour justifier une étude sous une forme ou sous une autre. Nous vous avons invités à soumettre d'autres recommandations à notre comité; il est donc tout à fait possible que nous procédions de cette manière, si le comité le veut.
    Merci à tous. La séance est levée.