J'ai eu une petite discussion avec M. Boulakia, mais je n'ai pas eu l'occasion de parler avec Mme Taub avant son arrivée. Je commencerai par faire un survol de la question, et M. Boulakia entrera ensuite dans les détails.
La question de la mise en place d'un système équitable de reconnaissance du statut de réfugié a fait l'objet de bien des débats, auxquels je participe depuis 1977, pour autant que je me souvienne. J'imagine que cela vous donne une petite idée de mon âge.
J'estime qu'il est important de revenir aux principes de base. L'un d'entre eux est le suivant: pour faire en sorte que tout système de reconnaissance de statut de réfugié mis en place au Canada soit équitable, les décisions rendues à cet égard doivent être prises par les membres d'un organisme indépendant. Si j'attire votre attention là-dessus, c'est qu'on a évoqué la possibilité d'installer des agents d'immigration à la frontière pour rendre des décisions rapidement. Une telle pratique respecterait-elle les dispositions de la Charte? J'ai de très graves préoccupations à cet égard. Chose certaine, une telle pratique contreviendrait aux principes fondamentaux de l'équité.
Le système doit être équitable. Il doit y avoir un certain type d'examen indépendant, et il doit être efficient. Nous savons que l'efficience du système actuel de reconnaissance du statut de réfugié a été sérieusement critiquée. Je me pencherai sur cette question dans quelques instants, et je crois que M. Boulakia aura des observations supplémentaires à faire sur ce sujet.
La mise en place de la Section d'appel des réfugiés a été inscrite dans les mesures législatives en raison des plaintes qui ont été formulées pendant de nombreuses années selon lesquelles le mécanisme d'examen de la Cour fédérale n'était pas satisfaisant. La Cour fédérale est le tribunal qui procède aux contrôles judiciaires, et quiconque connaît le droit administratif comprendra la notion de retenue, une notion juridique à propos de laquelle la Cour suprême du Canada s'est exprimée à maintes et maintes reprises. D'après cette notion, un tribunal qui procède à un examen judiciaire doit faire preuve de retenue à l'égard de la décision rendue par le tribunal d'instance inférieure et ne peut intervenir que si celui-ci a commis des erreurs très évidentes au chapitre des constatations de fait ou s'il a clairement erré en droit.
Ceux qui, comme moi, oeuvrent au sein du système de reconnaissance du statut de réfugié, sont convaincus que la Cour fédérale ne constitue pas un mécanisme de contrôle adéquat, et c'est la raison pour laquelle nous avons vigoureusement fait campagne en faveur de la création de la Section d'appel des réfugiés. La Section d'appel — et j'ai eu de longues discussions avec Peter Showler, qui était le président au moment où la LIPR est entrée en vigueur — peut effectuer des contrôles efficients et adéquats en quelques mois. Par conséquent, il n'est pas justifié, à mon avis, de craindre que l'ajout d'un autre niveau d'appel aurait pour effet de prolonger déraisonnablement le processus.
En outre, comme nous l'avions mentionné à l'époque, si la Section d'appel des réfugiés était en place, nous pourrions réévaluer la pratique selon laquelle il est automatiquement sursis à une mesure d'expulsion pendant que la Cour fédérale procède au contrôle judiciaire de la décision. En effet, du moment où un deuxième tribunal de révision, à savoir la Section d'appel des réfugiés, effectue un contrôle judiciaire sur le fond, on pourrait faire valoir que rien ne justifie qu'un sursis soit accordé automatiquement à une personne dont la décision a déjà fait l'objet de deux contrôles judiciaires distincts. Il demeurerait loisible à la Cour fédérale d'accorder un sursis si elle estime que cela est nécessaire, mais lorsque la création de la Section d'appel des réfugiés a été envisagée, la suppression du sursis automatique faisait partie des mesures qui allaient être prises.
Ainsi, pour l'essentiel, le fait de supprimer le sursis automatique pendant un contrôle judiciaire de la Cour fédérale et en mettant sur pied la Section d'appel des réfugiés n'aurait pas pour résultat de prolonger le processus. Selon moi, à ce jour, les problèmes posés par la LIPR et l'arriéré sont en grande partie attribuables au fait que la Commission manque de personnel.
Pour conclure ma déclaration préliminaire, je tiens à souligner que, à mon avis, la mise sur pied de la Section d'appel des réfugiés ne prolongerait pas indûment le processus et contribuerait à la création d'un système de reconnaissance du statut de réfugié plus équitable.
Il est important de mentionner que d'autres mesures qui permettraient de rendre le processus plus équitable peuvent être prises sans que des modifications de grande envergure soient apportées à la loi. Si le gouvernement actuel est préoccupé par l'efficience, il peut tirer profit des suggestions que de nombreuses personnes ont faites au fil du temps en vue de rendre le système plus équitable. M. Boulakia en mentionnera quelques-unes.
Simplement pour vous donner un exemple, à l'heure actuelle, il existe un processus, l'ERAR, l'examen des risques avant renvoi, qui exige un temps et des ressources considérables. Dans un rapport récent, on a laissé entendre que la mise sur pied de la Section d'appel des réfugiés, la SAR, permettrait de combler le manque créé par la suppression de l'ERAR. L'ERAR a été instauré parce qu'il s'écoule souvent une ou deux années entre un rejet et l'exécution d'une mesure de renvoi, et parce que les mesures de renvoi doivent faire l'objet d'un contrôle judiciaire. Toutefois, si la SAR a le pouvoir de rouvrir un appel et de rendre une décision en se fondant sur de nouveaux éléments de preuve, on peut se débarrasser de l'ERAR, épargner beaucoup d'argent et accroître l'efficience à long terme du processus de reconnaissance du statut de réfugié.
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Tout le monde a intérêt à ce que la Commission de l'immigration du statut de réfugié soit efficiente. Certaines personnes croient, à tort, que le système de reconnaissance du statut de réfugié est le lieu d'une lutte entre les personnes qui défendent la cause des réfugiés et celles qui souhaitent qu'on leur fasse la vie dure, ou, si vous préférez, une lutte entre la gauche et la droite. En fait, en ce qui concerne la question des réfugiés, il n'y a ni gauche ni droite. Je représente des capitalistes, des communistes, nommez ce que vous voudrez, et ces gens reçoivent tôt ou tard l'appui de personnes de toutes les tendances politiques.
Personne n'apprécie le manque d'efficience. Une personne qui est blessée parce qu'elle a subi de la torture et dont la famille est coincée dans un camp de réfugiés à quelque part veut que sa cause soit entendue rapidement. Il déteste le manque d'efficience, comme tout le monde. Tout ce que nous voulons, c'est vous aider à faire en sorte que le système fonctionne mieux et qu'il fasse preuve d'intégrité.
Pour de nombreuses raisons, il est important qu'un tribunal soit indépendant. Les commissaires occupent un poste équivalent à celui d'un juge, et un juge doit bénéficier de l'indépendance et de l'inamovibilité. Pour renforcer l'inamovibilité des commissaires, il suffit de prolonger la durée de leur mandat. Cette mesure, qui n'exigerait aucune modification de la LIPR, éviterait aux commissaires d'avoir à passer par tous ces processus de renouvellement. Le ministre Kenney a affirmé que chaque modification du processus de nomination entraîne de longs délais parce qu'il faut doter en personnel la Commission; cela n'est pas nécessairement toujours de notre faute.
Prolongez la durée des mandats, nommez des commissaires et gardez-les en place. Cela évitera tous les chamboulements qui accompagnent chaque fois la tenue d'une élection et l'arrivée d'un nouveau gouvernement. La Commission est une institution qui a besoin de stabilité.
En ce qui concerne l'efficience du processus, dans un rapport intitulé « The Quality of Mercy », rédigé en 1994 par Davis et Waldman à la demande du gouvernement de l'époque, il est recommandé que les agents qui s'occupent des réfugiés, que l'on appelle à présent les agents de protection des réfugiés, soient en mesure de rendre une décision favorable.
S'il y a 50 000 dossiers à examiner, ces agents pourraient les éplucher et retenir les plus évidents, ceux qui tombent sous le sens. Ces dossiers pourraient être retirés du système et ainsi permettre aux commissaires de se concentrer sur les cas qui exigent une enquête plus poussée. On retire du système les dossiers évidents, ceux qui concernent des personnes à qui le gouvernement reconnaîtra le statut de réfugié. Vous retirez ces dossiers du système et faites ainsi en sorte que les commissaires, qui touchent un salaire deux fois plus élevé que les agents de protection des réfugiés, se concentrent sur les cas qui semblent exiger la tenue d'une audience. Cela permettra de réduire l'arriéré. Lorsque M. Fleury était à la tête de la Commission, il a demandé aux agents de protection des réfugiés d'éliminer complètement l'arriéré, ce qui a été fait. Toutefois, il s'agissait d'employés à court terme, et non pas de fonctionnaires permanents, et beaucoup d'entre eux ont été mis à pied une fois que l'arriéré a été éliminé. Alors, que s'est-il passé? Nous avons mis la main sur des courriels qu'ont reçus des agents de protection des réfugiés de Toronto, où des agents de Montréal leur conseillaient de ne pas supprimer l'arriéré, s'il y en a un, parce qu'ils seront congédiés par la suite.
C'est comme si vous trouviez une mine et que, dès que vous en aviez extrait de l'or, vous vous faisiez tuer. C'est stupide. Nous avons besoin que les postes d'agent de protection des réfugiés soient occupés par des fonctionnaires permanents qui bénéficient de l'inamovibilité, et il n'est pas nécessaire de modifier la loi pour cela. De cette manière, les agents pourront prendre en charge une bonne partie du travail. Ainsi, les dossiers qui concernent des personnes provenant d'un pays soulevant des préoccupations particulières pourront être traités plus rapidement, vu que le système aura été désengorgé.
Pour faire cela, il n'est pas nécessaire de modifier la loi. Sous le régime de la LIPR, un président peut donner une directive — on les appelle les directives du président. Une directive pourrait être donnée selon laquelle les agents de protection des réfugiés ont le pouvoir d'examiner un dossier et de faire une recommandation à son égard. Ensuite, automatiquement, une décision favorable aux réfugiés sera rendue au nom du président. Cela n'exige aucune modification de la loi.
Cela instaurerait une sorte de système automatisé. Si un agent de protection des réfugiés indique que tel ou tel dossier ne présente aucun problème particulier, on le retire du système et on fait en sorte que l'affaire soit instruite plus rapidement dans le cadre d'une audience.
Passons à l'importance de mettre en place la Section d'appel des réfugiés. Il doit s'agir d'un processus d'appel en bonne et due forme, d'un processus d'appel complet. Il ne peut pas s'agir simplement d'une procédure technique, puisque les deux parties doivent avoir l'occasion de plaider leur cause en appel. Si le gouvernement estime qu'un demandeur est un menteur qui essaie de lui en passer une petite vite, ou s'il se révèle qu'un demandeur a été désavantagé du fait qu'il a été représenté par un très mauvais avocat, qu'il s'est représenté lui-même ou qu'il était atteint d'incapacité mentale, il faut pouvoir soumettre des éléments de preuve dans le cadre d'une audience d'appel. Il doit s'agir d'un processus d'appel en bonne et due forme.
Un processus d'appel complet permet d'éviter beaucoup de problèmes d'ordre politique. Chaque jour, nous entendons des histoires dont les médias ne font pas toujours état. Seules les histoires véritablement spectaculaires parviennent à faire les manchettes. Mais la Cour fédérale est sans cesse appelée à se pencher sur des décisions qui, en fait, ne sont rien d'autre que des décisions stupides. Les juges ne sont pas appelés à instruire un appel fondé sur une obscure question d'ordre philosophique ou portant sur le droit des réfugiés ou quoi que ce soit d'autre. Il s'agit simplement d'examiner une décision entachée d'erreurs rendue par un commissaire qui a fait totalement fausse route. La SAR permettrait à la Commission de réparer ses propres erreurs. Ainsi, les affaires dont serait saisie la Cour fédérale seraient représentatives du bon travail effectué par la Commission, plutôt que d'être gênantes pour elle. En outre, cela réduirait énormément le nombre de litiges présentés à la Cour fédérale.
De surcroît, avec un tel système, la probabilité que les médias aient des histoires aberrantes à se mettre sous la dent serait réduite de façon draconienne. S'il arrive encore qu'un commissaire puisse accueillir une demande que 99 p. 100 des commissaires auraient rejetée, c'est parce qu'il n'y a pas de section d'appel des réfugiés. S'il arrive encore qu'un réfugié voie sa demande rejetée, par exemple un réfugié de la Birmanie — je sais que le ministre Kenney s'intéresse particulièrement aux gens de ce pays — et que nous devons faire appel aux médias pour faire bouger les choses, c'est parce qu'il n'y a pas de section d'appel des réfugiés. Si la SAR était en place, vous recevriez moins d'appels téléphoniques et vous feriez moins souvent les manchettes.
Désolé, j'ai fait erreur sur la personne. Je voulais parler non pas de vous, mais de la Commission. C'est le genre de problème qui survient lorsqu'on s'exprime à l'improviste. C'est la raison pour laquelle je ne serai jamais un politicien.
Nous ne voulons pas que la Commission de l'immigration et du statut de réfugié soit un éternel sujet de débat. Nous voulons qu'elle soit une institution saine et capable de se représenter elle-même. Les décisions rendues par la Commission doivent être représentatives de la véritable philosophie de la Commission et des vues de la majorité des commissaires. La SAR permettrait à la Commission de régler ses propres problèmes.
Il est très important que la Commission soit également indépendante par rapport au gouvernement, c'est-à-dire qu'elle ait la capacité de préserver l'intégrité de son système et de faire en sorte qu'elle ne fasse l'objet d'aucune pression politique de quelque nature que ce soit. Nous entretenons des relations commerciales avec la plupart des pays du monde, y compris des pays dont les antécédents en matière de droits de la personne sont sujets à caution. La Commission ne peut fonctionner à l'intérieur d'un système où un gouvernement peut remettre en question l'admission au pays de tels ou tels réfugiés — voulons-nous compromettre nos relations commerciales avec le pays dont ils proviennent? Le pays d'aujourd'hui sera très différent de celui de demain.
Tous les gouvernements se croient exceptionnels. Ainsi, un système où des personnes sont tenues de rendre des comptes directement à un ministre, ou alors un système où les personnes ne sont pas indépendantes et se voient confier uniquement un mandat à court terme est un système qui n'est pas vraiment judicieux et qui ne bénéficie pas véritablement du pouvoir qu'offre l'indépendance. Cela pose un problème, car un pays qui vous semble aujourd'hui raisonnable au chapitre du respect des droits de la personne vous paraîtra peut-être demain éminemment contestable. Mais alors, que faire? Que dire à ces pays? Comment doit réagir le ministre des Affaires étrangères?
Je dirai simplement qu'en mettant sur pied la SAR et en diffusant une directive du président, nous pourrions rendre le système beaucoup plus efficace sans avoir à modifier la loi de fond en comble.
Merci.
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Je représente le point de vue opposé. D'après moi, dans son état actuel, depuis son instauration en 2002, l'ensemble du système de reconnaissance du statut de réfugié est complètement dysfonctionnel et s'en va à la dérive. Cela a pavé la voie à des abus et a servi de point d'entrée à de nombreux groupes terroristes bien établis au Canada.
À mon avis, tout le système doit être réformé de fond en comble. Le fait d'ajouter la Section d'appel des réfugiés à un système dysfonctionnel ne fera qu'empirer les choses.
Je vois certains d'entre vous hocher la tête. Je souligne au passage que je consacre la moitié de ma pratique à représenter des demandeurs d'asile. En outre, j'estime que la Cour fédérale traite les appels dont elle est saisie de façon plus que satisfaisante. Mon dossier devant la Cour fédérale est assez reluisant, comme vous pouvez le constater dans mon curriculum vitae, qui vous a été distribué.
La solution que je propose consiste tout d'abord à nommer à la Cour fédérale un plus grand nombre de juges spécialisés dans les affaires d'immigration. Je fais davantage confiance à un juge de la Cour fédérale, dont l'expérience et l'expertise ont été examinées soigneusement, qu'à une personne désignée à un autre palier d'appel par suite d'une nomination partisane.
Comme il est indiqué à la page 4 de mon exposé, il existe déjà un nombre suffisant de recours pour les demandeurs d'asile déboutés qui souhaitent interjeter appel. Un demandeur d'asile débouté peut interjeter appel devant la Cour fédérale, et, s'il décide de ne pas le faire, il fera l'objet d'un examen des risques avant renvoi. S'il échoue à cet examen, il a de nouveau l'occasion d'interjeter appel devant la Cour fédérale.
Durant tout ce processus, un demandeur d'asile peut, à tout moment, présenter une demande de résidence permanente fondée sur des motifs d'ordre humanitaire depuis le Canada. Si cette demande est rejetée, il peut encore une fois interjeter appel devant la Cour fédérale.
Ce processus peut s'étaler sur plusieurs années, comme cela s'est vu dans de nombreux cas très médiatisés où des demandeurs d'asile n'ont pas quitté le Canada après avoir été déboutés. Mentionnons, par exemple, le cas de Leon Mugusera. En 2005, la Cour suprême du Canada a conclu que Leon Mugusera, l'implacable leader hutu en exil, était un criminel de guerre, et elle a pris une mesure d'expulsion contre lui parce qu'il avait contribué à la perpétration du génocide qui a ravagé le Rwanda. Sa demande d'asile a été rejetée en 1995, et devinez où il se trouve toujours aujourd'hui? Au Canada.
Je possède une liste de cas semblables. Je ne vais pas vous la lire; vous pouvez vérifier par vous-même. Cette liste comprend de nombreux cas de demandeurs d'asile qui sont soit des criminels de guerre, des terroristes ou des criminels et qui se trouvent toujours au pays des années après avoir soumis leur première demande d'asile.
L'une des principales réformes que j'aurais à proposer consisterait à dresser une liste de pays d'origine sûrs dont les citoyens ne seraient tout simplement pas autorisés à présenter une demande d'asile au Canada, par exemple les pays faisant partie de l'Union européenne; cette dernière compte 27 pays et ressemble beaucoup aux États-Unis. Tous les citoyens de l'un de ces 27 pays ont le droit de travailler et de vivre dans l'un ou l'autre des pays faisant partie de l'Union.
Par exemple, prenons le cas des Roms tchèques. S'ils éprouvent des difficultés à vivre en République tchèque, ils peuvent aller vivre ou travailler dans l'un des 26 autres pays de l'Union européenne. Le Canada n'a pas à admettre la moindre demande d'asile provenant de l'Union européenne — et par « admettre », j'entends non pas le fait de rendre une décision favorable à leur égard, mais le simple fait de les traiter. Cela vaut également pour la Suisse. Et pour les États-Unis. Il devrait y avoir une liste de pays d'origine sûrs.
Allez-vous continuer à faire cela, monsieur? C'est plutôt impoli.
Je propose également qu'un agent de protection des réfugiés soit présent à chaque audience pour passer au préalable chaque cas au peigne fin. J'estime que cela est important. Par ailleurs, s'il y a un problème au chapitre de l'équité et de la cohérence des décisions rendues par les commissaires de la CISR, le gouvernement devrait peut-être envisager de nommer des fonctionnaires aux postes de commissaire plutôt que de procéder à des nominations partisanes, qui ne permettent pas toujours de garantir que les personnes les plus compétentes sont nommées aux postes de commissaire.
C'est tout ce que j'ai à dire pour l'instant. Merci.
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Le fait que la SAR puisse créer un autre palier préoccupe les gens, mais je crois que la SAR pourrait être mise en place rapidement, et qu'elle pourrait être efficiente.
La différence entre la SAR et la Cour fédérale, c'est que les juges de la Cour fédérale procèdent à ce que l'on appelle un contrôle judiciaire. Dans le cadre d'une telle procédure, le juge n'a pas le pouvoir de faire de nouvelles constatations de fait. Il n'a pas le pouvoir d'accueillir ou de rejeter une demande. Le seul pouvoir d'un juge qui effectue un contrôle judiciaire consiste à indiquer si la Commission a commis une erreur ou pas. Du point de vue du demandeur d'asile, la meilleure chose qui peut arriver, c'est que le juge conclut que la décision qui a été rendue est erronée et que l'affaire doit être examinée de nouveau. Le processus de contrôle judiciaire entraîne donc déjà la nécessité d'un deuxième palier.
Il n'est arrivé qu'une ou deux fois que la Cour fédérale a conclu effectivement qu'une demande d'asile devait, sans aucune équivoque, être accueillie. Une proportion d'environ 99 p. 100 des affaires sont renvoyées aux fins d'une deuxième audience, et cela entraîne inutilement la nécessité d'un deuxième palier. Les juges de la Cour fédérale ne peuvent examiner les constatations de fait. Même s'ils estiment que la décision est erronée, ils ne peuvent la casser que s'ils croient qu'elle est manifestement erronée, en raison de ce dont je vous ai parlé plus tôt, à savoir la retenue.
Je tiens à souligner que c'est la première fois que quiconque mentionne le rapport que j'ai rédigé il y a 15 ans. Je croyais qu'il avait été tout à fait oublié sur une tablette quelconque. Je suis content que quelqu'un ait fait allusion à cette idée.
La mise en place de la SAR aurait un double avantage. D'une part, la SAR peut corriger les erreurs de fait commises par le tribunal de première instance. D'autre part, si elle conclut qu'une erreur a été commise, la SAR peut y remédier en rendant une décision positive, de manière à ce qu'il ne soit pas nécessaire de tenir une nouvelle audience. Il s'agit là de deux différences fondamentales entre le rôle que jouerait la SAR et celui que serait appelée à jouer la Cour fédérale.
Comme je l'ai mentionné, on pourrait rendre le système beaucoup plus efficient en réalisant d'autres économies. Par exemple, des mécanismes de contrôle pourraient être mis en place au sein de la Commission de manière à déceler les demandes qui ne posent aucun problème et faire en sorte qu'elles soient accueillies rapidement. Quant aux cas qui présentent des faiblesses évidentes, ils pourraient être traités de façon accélérée et faire l'objet d'une audience dans les plus brefs délais de manière à ce que la Commission puisse concentrer ses énergies sur les cas qui restent, ceux qui soulèvent des difficultés. Il y a beaucoup de choses que l'on pourrait faire. Comme je l'ai dit précédemment, à mes yeux, l'existence de la SAR rendrait obsolète le processus d'examen des risques avant renvoi. On pourrait s'en débarrasser.
Admettons que votre demande d'asile a été rejetée en 2005, mais qu'une mesure d'expulsion n'a été prise contre vous qu'en 2009. Quelque chose a pu se produire dans votre pays dans l'intervalle, et c'est la raison pour laquelle il faut procéder à un examen des risques avant renvoi. Quelqu'un doit examiner la situation qui règne dans votre pays, parce qu'elle a peut-être changé. Si le processus se déroule plus rapidement, il serait toujours possible pour vous d'interjeter appel auprès de la SAR et de demander que votre cas soit réexaminé en faisant valoir que bien des choses ont changé dans votre pays en un an et demi. La SAR devrait avoir le pouvoir de rouvrir une affaire. À la place de demander un ERAR, le demandeur d'asile présenterait une demande écrite, mais tout serait traité à un seul et même endroit.
Il est possible de rendre le système plus efficient tout en mettant en place la SAR.
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J'ai essayé d'y faire allusion, mais c'est bien difficile, en quelques minutes, de parler de quelque chose qui est vraiment la tragédie de toute ma carrière.
Je suis avocat depuis presque 20 ans, et ma vocation est de défendre la loi. J'ai honte, quand un de mes clients arrive de l'étranger, de devoir lui dire franchement que l'acceptation de sa demande dépend du hasard et du commissaire. Il ne devrait pas en être ainsi. C'est ce que j'ai déjà essayé de dire.
Les gens disent souvent qu'ils ne peuvent pas faire appel auprès de la Cour fédérale ni présenter de nouvelles preuves. L'absence d'un tribunal d'appel joue aussi contre le gouvernement. Par exemple, si, lors d'une audience, une personne a fait des manoeuvres, le gouvernement pourrait faire le preuve, en Cour fédérale, qu'elle n'a pas dit la vérité.
Je dis aux gens qu'ils ne peuvent pas faire appel. Une section d'appel des réfugiés serait le seul mécanisme d'appel. Comme vous le dites, une telle section assurerait l'uniformité des décisions du tribunal. En fin de compte, les décisions d'un tribunal reflètent ce qu'il veut dire et représenter.
Il y a aussi d'autres façons de créer un tribunal plus efficace. On s'est plaint que certains demandeurs viennent de pays où il est évident qu'il n'y a pas de problèmes. Des gens du Portugal ont présenté une demande d'asile parce qu'une firme de consultants en avait fait la promotion. Comme avocat, je fais du travail d'aide juridique. Croyez-vous que je vais aller dans un autre pays faire la promotion de mon bureau? Je suis déjà tanné d'essayer de survivre en ne recevant que le tarif de l'aide juridique. Les avocats ne font pas une telle promotion. Si vous ne laissez pas les consultants comparaître devant le tribunal, ce genre de promotion n'aura pas lieu.
Il y a moyen de régler des problèmes communs de façon efficace. Comment une section d'appel des réfugiés fonctionnerait-elle? Les décisions d'un tribunal d'appel sont déterminantes. Si 500 personnes venaient du Portugal, le tribunal d'appel prendrait une décision concernant ce pays, peu importe que la personne dise la vérité ou non. Il déciderait qu'il y a pas de problèmes au Portugal, puisque l'État offre une protection. La question serait réglée. Vous pouvez faire des choses, si vous comprenez la loi.
Mon premier devoir est de défendre la loi et je n'aime pas avoir honte de ce que je sers.
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Je m'excuse de devoir parler en anglais. Je comprends le français, mais c'est difficile pour moi de le parler.
[Traduction]
Je tiens simplement à répondre à ce qui a été dit en ce qui concerne cette idée selon laquelle il existe de nombreux paliers d'appel et d'autres recours du genre. Pour l'essentiel, on a affirmé que beaucoup d'options s'offrent à un demandeur d'asile débouté.
Il est vrai que l'ERAR existe. Toutefois, dans les faits, ce mécanisme d'examen n'est pas efficient. Si je ne m'abuse, le taux d'acceptation s'élève à 2 p. 100 ou 3 p. 100. Une quantité astronomique de ressources sont affectées à un processus qui, au bout du compte, ne donne vraiment aucun résultat utile. C'est pourquoi je ne cesse de répéter que, selon moi, la réaffectation de ces ressources à la SAR et la suppression de l'ERAR rendrait le processus plus équitable.
Quant aux demandes fondées sur des motifs d'ordre humanitaire, cela remonte à... c'est drôle, mais j'avais totalement oublié ce rapport, et voilà que M. Bevilacqua me le rappelle. Je crois que, en principe, il est possible de présenter 20 ou 30 demandes fondées sur des motifs d'ordre humanitaire — il est vrai que, juridiquement, il est possible de le faire. Le gouvernement aurait peut-être intérêt à se pencher là-dessus, car dans les faits, dans la grande majorité des cas, après une demande pour des motifs d'ordre humanitaire, le demandeur sait à quoi s'en tenir. À moins que le demandeur ait omis de signaler des points importants, il est peu probable qu'un deuxième agent qui examine le même ensemble de faits rende une décision différente de celle qui a été rendue à l'origine. J'estime que des mesures pourraient être prises pour mettre un frein à ce type d'abus de la procédure de demandes pour des motifs d'ordre humanitaire.
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Il est très facile avec ce système de prolonger son séjour au Canada; c'est aussi simple que ça. Vous présentez une demande d'asile, par exemple si vous êtes un diplomate, un étudiant étranger ou un visiteur, et que vous ne voulez pas retourner dans votre pays ou ne pouvez pas faire renouveler votre visa. Certains clients m'ont déjà demandé s'il n'était pas possible pour eux de présenter une demande d'asile afin de pouvoir demeurer au Canada. C'est cela, la réputation du Canada.
Nous avons le taux d'acceptation le plus élevé; il se situe autour des 50 p. 100; dans l'Union européenne, c'est plutôt en moyenne 12 p. 100. Est-ce que les responsables des pays de l'Union européenne sont tous stupides, ou sommes-nous si incroyablement brillants que nous savons des choses qu'ils ne savent pas? C'est trop facile. Les taux d'acceptation sont les plus élevés, et ça se sait dans tous les pays. Nous devons vraiment revoir le système. Essentiellement, les commentaires que j'ai entendus visaient en fait une réforme du système.
Je dois revenir à l'année 2002, quand nous devions mettre la SAR sur pied au moment de l'adoption de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés. Pour une raison ou pour une autre, le gouvernement libéral a refusé de créer cette Section. Il avait le temps. Il aurait pu le faire en 2002, mais il a choisi de s'abstenir parce que, à son avis, cela équivalait à introduire une nouvelle instance d'appel. Le gouvernement actuel n'est donc pas le seul à dire qu'il s'agirait d'une instance d'appel supplémentaire.
Si vous voulez introduire une entité comme la SAR, il faut repenser le système dans son entier.
J'ai également une correction à apporter: la Cour fédérale peut renverser une décision si elle estime que la constatation des faits est manifestement déraisonnable. Il m'est arrivé à une ou deux reprises de voir la décision cassée et le dossier, renvoyé pour cette raison.
Ce que nous cherchons à faire, aujourd'hui, c'est de mettre la SAR sur pied de la façon prévue en 2002. Il ne s'agit pas de la mettre sur pied parallèlement à tous ces changements (élimination de l'ERAR, nomination de différentes personnes, augmentation des qualifications des commissaires). Ce qui était valable en 2002 est dans la loi aujourd'hui. C'est de cela seulement que l'on doit s'occuper: créer la SAR et garder tout le reste. C'est de cela dont il est question, pas des changements que tout le monde suggère.
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Pour répondre à ce que l'on vient d'entendre, il est important de souligner que nous tous, les avocats, sommes frustrés par les retards et l'inefficacité du système et que nous désirons tous contribuer de façon positive afin que le système fonctionne plus équitablement. C'est pourquoi, lorsque M. Boulakia et moi-même avons parlé de la SAR, c'était dans le contexte général. Contrairement à ce que l'on vient de laisser entendre, nous ne voulons pas uniquement mettre sur pied une SAR sans rien changer d'autre. Si l'on veut instituer une SAR, il faut aussi apporter d'autres changements, dont nous avons parlé, ce qui, au bout du compte, déboucherait sur un système plus équitable et plus efficient, un système qui ne donnerait pas lieu au grand nombre de plaintes que le gouvernement reçoit actuellement.
Alors, si vous me demandez de décrire le système... Eh bien, on pourrait avoir un système différent si l'on modifiait les lois. Mais s'il n'y a pas de modifications des lois, une personne pourrait présenter une demande, l'agent d'audience examinerait tous les dossiers et choisirait les demandes qui sont de toute évidence fondées et pour lesquelles il n'y aurait pas lieu de tenir audience, et on pourrait ainsi, probablement, régler rapidement 20 p. 100 des demandes. Cela permettrait d'éliminer une bonne partie de l'arriéré. L'agent pourrait aussi cerner les demandes qui, manifestement, ne sont pas fondées et les renvoyer rapidement pour audience. Il y aurait donc une audience devant la section des réfugiés. Si la demande est acceptée et que le ministre n'interjette pas appel, c'est terminé. Si la demande est rejetée, il y aura audience devant la SAR, et celle-ci, si l'on se fie à ce qui est proposé, consisterait en un contrôle rapide débouchant normalement sur un compte rendu écrit — il serait aussi possible qu'il y ait une audience, et celle-ci doit se tenir dans les deux ou trois mois. Si la SAR ne veut pas d'audience, on pourrait toujours recourir à un contrôle judiciaire; ce qui fait la différence, c'est que, alors qu'aujourd'hui il est automatiquement sursis à la mesure d'expulsion pendant que la Cour fédérale examine le dossier, s'il y avait une SAR, cela ne serait plus nécessaire parce qu'il y aurait déjà eu deux contrôles. La Cour fédérale pourrait toujours surseoir à la mesure d'expulsion, mais cela ne se ferait pas automatiquement.
Si le système fonctionnait plus rapidement, on n'aurait pas besoin de l'ERAR. Si l'expulsion était retardée pendant un certain temps ou s'il y avait de nouveaux éléments de preuve, l'ERAR pourrait être faite par la SAR, comme nous l'avons déjà dit. On éliminerait ainsi tous les coûts d'une ERAR faite isolément de la SAR.
Je dirais donc qu'on peut fonctionner aussi rapidement qu'avant, ou peut-être plus rapidement, et qu'en même temps, une SAR éliminerait une partie du processus. Je crois que l'on peut dire que l'on cherche ici à tenir compte de la volonté du gouvernement de mettre sur pied un système plus efficace, mais aussi des préoccupations concernant la nécessité du contrôle.
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Ce qui me frappe dans tout ce qui se dit ici, c'est qu'il semble tout à fait insensé de mettre sur pied une SAR sans d'abord apporter d'importants changements. C'est un peu comme si l'on mettait la charrue devant les boeufs.
De plus, en ce qui concerne les coûts de l'aide juridique, je crois que les contribuables de l'Ontario et du Québec auraient peut-être quelque chose à dire au sujet des coûts que suppose une section d'appel.
Vous avez raison, madame Taub: ça n'empêchera personne d'interjeter appel devant la Cour fédérale. Je ne sais pas si vous n'avez pas justement le devoir, comme avocate, de conseiller aux gens, de façon automatique, d'interjeter appel d'une décision qui ne leur est pas favorable ou de trouver d'autres moyens pour contester cette décision. Cela coûterait en fait encore plus d'argent aux contribuables.
Nous sommes au courant du fait que certaines personnes se trouvent ici depuis 15 ou 20 ans. Dans un cas particulier, un pirate de l'air, qui a tiré sur ses otages, est ici depuis 20 ans. Je crois que vous le connaissez. Si je ne me trompe pas, il s'agit de Parminder Singh Saini, qui a fait un stage dans votre cabinet. Les tribunaux canadiens pensent qu'il devrait quitter le pays, qu'il représente un danger, mais pourtant, 15 ans plus tard, il est toujours ici.
Je crois que les contribuables ont le droit d'avoir des institutions auxquelles ils peuvent faire confiance, comme vous l'avez laissé entendre, et qu'ils ont le droit à un gouvernement qui selon toute apparence travaille dans leur intérêt. Nous avons aussi la responsabilité de faire en sorte que notre pays soit sûr et nos collectivités, en sécurité.
Je termine là-dessus, monsieur le président. Merci de m'avoir donné un peu plus de temps. J'espère que nous aurons l'occasion d'entendre encore une fois ces témoins.
Vous n'avez pas à me répondre. Je voulais tout simplement dire ce que j'ai sur le coeur.
Merci de m'avoir invitée à vous parler ce matin du projet de loi C-291, qui rendrait obligatoire la mise sur pied de la section d'appel des réfugiés.
[Français]
Le Conseil canadien pour les réfugiés encourage le comité à compléter son étude très rapidement, étant donné que le projet de loi a déjà été étudié, tant par la Chambre que par le Sénat, lors de la dernière législature. Il est très important d'adopter rapidement ce projet de loi, et ce, pour trois raisons.
La première est que le projet de loi est important. Offrir aux demandeurs d'asile le droit d'appel peut sauver des vies. La conséquence de mauvaises décisions sur la reconnaissance du statut de réfugié peut être le renvoi des réfugiés vers la persécution, la torture, voire la mort. Contrairement à une opinion assez largement répandue dans le public, il n'y a actuellement aucun droit d'appel sur le fond pour les demandeurs d'asile. Les recours très limités qui sont disponibles ne peuvent pas corriger plusieurs erreurs faites pendant le processus de reconnaissance du statut de réfugié.
La deuxième raison est que le projet de loi doit être rapidement adopté. Plus de six ans se sont déjà écoulés depuis l'entrée en vigueur de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, sans le droit d'appel pourtant prévu par la loi. Par conséquent, depuis six ans, les demandeurs d'asile voient leur sort déterminé par un seul décideur, dans le cadre d'un processus qui n'a jamais été approuvé par le Parlement. Il y a déjà trop longtemps que les réfugiés attendent que cette injustice soit corrigée.
La troisième raison est que le projet de loi était sur le point d'être adopté. Tout ce qui restait était le vote par la Chambre des communes sur les amendements du Sénat. L'adoption du même texte par la Chambre et le Sénat devrait donc être une affaire simple.
[Traduction]
Pendant que vous discutez de ce projet de loi et de la question plus générale touchant la modification possible du système de détermination du statut de réfugié, nous aimerions que vous gardiez à l'esprit les points suivants.
Premièrement, la protection des réfugiés est une question qui relève des droits de la personne. Un système de détermination du statut des réfugiés doit d'abord et avant tout garantir que les droits fondamentaux des personnes qui demandent notre protection soient respectés. Évidemment, vous avez la responsabilité de veiller à ce que le système fonctionne de manière efficiente et qu'il ne soit pas ralenti, par exemple, par le grand nombre de demandes présentées par des personnes qui n'ont pas besoin de la protection du Canada. Notre grande préoccupation devrait toujours être de s'assurer que le système ne renvoie pas dans son pays, où elle sera persécutée ou torturée, une personne qui a besoin de la protection du Canada. Ce qui nous inquiète, c'est donc que l'on semble consacrer plus de temps et d'énergie à s'occuper des demandes non fondées qu'à s'inquiéter au sujet des demandeurs qui ont été refusés par erreur et qui risquent d'être persécutés ou torturés à leur retour, tout cela parce qu'il n'y a pas dans le système canadien d'appel sur le fond.
Deuxièmement, le processus de détermination du statut de réfugié a pour objectif de protéger des êtres humains qui ont besoin de protection. L'efficacité de ce processus sera établie s'il nous permet de reconnaître les personnes qui ont besoin de protection. Il ne s'agit pas de savoir si le taux d'acceptation général est élevé ou faible. Aux yeux d'une personne qui a besoin de protection et qui vient d'être refusée, peu importe que le taux d'acceptation au Canada soit élevé. Nous voulons souligner les répercussions dramatiques de l'absence d'un processus d'appel sur la vie des gens.
Je vous invite à lire l'histoire de Juan Manuel, dans le document qui a été distribué, à la page 3, dans l'encadré latéral. Juan Manuel a présenté une demande d'asile au Canada, et sa demande a été rejetée. Peu après son retour au Mexique, il a été brutalement attaqué par les personnes qu'il fuyait au départ. Il est resté aux soins intensifs pendant 12 jours. Il a eu de la chance, il a survécu. Si des passants n'étaient pas intervenus, il aurait été tué.
Il y a aussi l'histoire d'une autre personne qui risquait d'être torturée; c'est le Comité contre la torture des Nations Unies qui est intervenu pour empêcher que le Canada ne l'expulse.
[Français]
C'était en décembre 2004. Le Comité contre la torture a alors conclu que le Canada avait manqué à son devoir de protection à l'égard d'Enrique Falcon Rios, une victime de torture. Le comité a également évoqué certaines faiblesses du système de détermination du statut de réfugié canadien, notamment le manque de tout recours ou d'un appel efficace pour corriger les erreurs décisionnelles de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié.
[Traduction]
Il y a un troisième point que je vous encouragerais à garder à l'esprit. Le système des réfugiés suscite beaucoup de malentendus. Malheureusement, ce système, qui est très complexe, est souvent mal compris ou mal expliqué. Pendant que vous examinez les problèmes du système et que vous envisagez des changements, nous vous recommandons fortement de vérifier que vos informations sur ce système sont exactes. Par exemple, les gens pensent souvent que tous les retards observés dans le système des réfugiés sont liés aux demandes pour motifs d'ordre humanitaire, qu'on appelle couramment les demandes CH. Nous en avons parlé plus tôt. Mais il semble que tout le monde ne sait pas qu'il n'y a pas sursis à la mesure de renvoi quand on attend une décision sur une demande CH. Donc, ce n'est pas vrai qu'une personne peut retarder son expulsion tout simplement en présentant une demande CH.
Voici un autre exemple de malentendu: on suppose généralement que c'est la loi qui pose problème s'il faut tant de temps pour expulser un demandeur débouté. En fait, le problème tient plus souvent aux processus et priorités bureaucratiques. Malgré l'augmentation de l'arriéré, à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, de nombreux demandeurs mexicains ont pu obtenir rapidement une audience parce que leurs demandes ont été jugées prioritaires par la Commission. Pourtant, en ce qui concerne ceux dont la demande a été refusée, rien n'aurait été fait pour les expulser, pendant des mois ou des années, parce qu'ils ne sont pas considérés comme une priorité par un autre secteur du gouvernement.
Le Conseil canadien pour les réfugiés et ses organismes affiliés ont une très longue expérience de ce système. Nous savons ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas. Nous vous supplions de recommander au ministre de consulter les ONG qui s'occupent des réfugiés avant de rédiger une loi quelconque.
Il y a un quatrième et dernier point sur lequel je voudrais attirer votre attention.
[Français]
Les discussions sur les enjeux liés aux réfugiés doivent être respectueuses et bien informées. On a entendu de nombreuses et de graves inexactitudes dans les commentaires publics récents sur le système d'asile canadien, visiblement souvent engendrées par une hostilité à l'égard des demandeurs d'asile. Ceci ne favorise pas une discussion pondérée sur les grands enjeux en matière de politiques. Les réfugiés sont parmi les personnes les plus vulnérables d'une société et sont les cibles d'attaques faciles, en tant que non-citoyens dans un pays étranger.
[Traduction]
Nous aimerions que, pendant que vous débattez de ces questions, vous vous rappeliez toujours que nous parlons ici d'êtres humains qui méritent d'être traités avec respect.
Merci beaucoup.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Notre système d'octroi de l'asile est en réalité sens dessus dessous. Il ne répond pas aux besoins des véritables demandeurs d'asile, il coûte des sommes énormes, il encourage et récompense les clandestins, il représente un risque grave pour la sécurité de notre pays, il sape notre programme d'immigration et il a entraîné la dégradation de nos relations avec de nombreux pays amis. Il met en péril le commerce et l'industrie du tourisme; c'est la principale raison pour laquelle notre frontière, au sud, est, en fait, militarisée et pour laquelle les biens, les services et les résidents du Canada ne peuvent plus traverser si rapidement et si librement la frontière.
Je ne connais aucun autre pays du monde où il est même possible de penser à accueillir quelqu'un simplement parce qu'il prétend être persécuté. Pourtant, au cours des 25 dernières années, nous avons permis à plus de 700 000 personnes qui prétendaient être persécutées d'entrer au pays. L'an dernier, 37 000 demandeurs sont venus au Canada, et environ 3 000 autres se présentent chaque mois.
Encore aujourd'hui, ces personnes qu'on laisse entrer n'ont pas à remplir les exigences en matière d'immigration. Il n'y a pas d'examen médical avant leur entrée; il n'y a pas de vérification judiciaire avant leur entrée; il n'y a pas non plus de contrôle de sécurité avant leur entrée; il leur suffit de prétendre qu'ils sont persécutés. Alors, nous les accueillons, nous les installons dans des hôtels, nous leur indiquons à quel bureau ils peuvent se présenter pour obtenir des prestations d'aide sociale. Ils ont le droit de travailler, ils peuvent obtenir gratuitement des soins médicaux et ils peuvent aller là où ils veulent dès qu'ils ont quitté l'aéroport. Nous n'avons pas la moindre idée de leurs allées et venues ni de ce qu'ils font.
Ces gens viennent de nombreux pays. En 2002, des citoyens de 152 pays ont demandé l'asile au Canada. Il y avait des Allemands, des Suédois et des Suisses, c'est-à-dire des gens qui venaient de pays démocratiques qui reconnaissent la primauté du droit, des pays ont signé la Convention des Nations Unies sur les réfugiés et qui ont l'obligation de s'occuper des demandeurs d'asile, tout comme nous en avons l'obligation.
Il y a donc une énorme brèche dans notre politique, et elle est là depuis de nombreuses années — je dirais depuis 25 ans. Chaque fois que nous avons tenté de revoir le système, même pour apporter des modifications modestes de façon que notre politique sur les demandeurs d'asile soit harmonisée avec celle de la plupart des autres pays de l'Occident, nous avons vu les groupes d'intérêts spéciaux résister avec acharnement.
En 1989, le Parlement a adopté une nouvelle loi sur l'octroi de l'asile. Elle avait été conçue dans le but de créer un système juste et équitable pour les demandeurs d'asile, tout en étant réaliste, compte tenu du fait qu'un organisme quasi judiciaire quelconque, qu'il s'agisse d'un tribunal ou de la CISR — la Commission de l'immigration et du statut de réfugié — ne peut fonctionner si son accès est universel. Sans une forme quelconque de sélection initiale, tout organisme quasi judiciaire s'effondrera en raison du seul volume de demandes.
M. Edward Ratushny — la plupart d'entre vous avez probablement déjà entendu parler de ce professeur distingué de la faculté de droit de l'Université d'Ottawa — a été nommé par Lloyd Axworthy et chargé d'étudier les lois sur les demandeurs d'asile et de recommander de nouvelles dispositions. Dans son rapport, M. Ratushny recommande entre autres d'abord que l'accès à un nouveau système soit limité et que l'on écarte d'abord toutes les demandes clairement non fondées ou farfelues, sans quoi le système serait paralysé par toutes les personnes qui demandent l'asile simplement pour entrer au Canada.
M. Ratushny a expliqué comment le très généreux système d'octroi de l'asile de l'Allemagne a été exploité et utilisé frauduleusement. En 1980, l'Allemagne a reçu 108 000 demandes d'asile et a dépensé 250 millions de dollars en prestations d'aide sociale pour les demandeurs qui attendaient une décision. Ce montant, comme l'a souligné le professeur Ratushny, aurait été d'une incroyable utilité s'il avait pu aider le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés à prendre en charge les véritables demandeurs d'asile qui se trouvent dans des camps partout dans le monde. Il a ajouté, dans son rapport, que le Canada était privilégié parce qu'il pouvait s'attaquer à des problèmes potentiels de ce type avant qu'ils ne se présentent dans la réalité. Cependant, prévient-il, il n'y a vraiment pas de raison de se reposer sur ses lauriers.
En 1980, le Canada a reçu 1 600 demandes d'asile.
Les Allemands ont resserré le système, mais ils ne l'ont pas resserré assez, car, en 1993, ils ont reçu 438 000 demandes d'asile. Le gouvernement allemand a été si alarmé qu'il a dû modifier sa constitution, qui permettait à n'importe quelle personne provenant de n'importe quel pays de venir présenter une demande en Allemagne. Les Allemands ont modifié leur constitution en 1993, et leurs lois sont maintenant très rigides. Et c'est difficile, parce qu'ils bloquent l'accès à des gens qui proviennent de pays qui sont tenus, en leur qualité de signataires de la Convention des Nations Unies, de protéger les demandeurs d'asile, qui ont adopté un régime démocratique et respectent la règle de droit.
En 1989, les lois adoptées s'appuyaient solidement sur les recommandations de M. Ratushny et permettaient aux auteurs de la loi de concevoir un système d'asile qui serait un modèle international. Le tribunal serait indépendant, et la procédure, non accusatoire. Et c'est très important, car cela signifie que, en fait, le tribunal devrait essentiellement accepter le récit du demandeur d'asile. Il ne pourrait pas y avoir de contre-interrogatoire.
On a envisagé un tribunal de deux commissaires, et, dans le cas d'une décision négative, les deux commissaires devaient être du même avis. Le refus devait être unanime, autrement dit. De plus, les commissaires n'étaient pas obligés de rédiger des motifs écrits lorsque la décision était positive, mais, s'ils déboutaient un demandeur, ils devaient rédiger leurs motifs. Et un demandeur débouté pouvait interjeter appel avec la permission de la Cour fédérale.
Toutefois, un système aussi généreux ne pouvait exister si on ne limitait pas l'accès au tribunal, et la solution qu'on a adoptée à ce moment-là consistait à habiliter le gouvernement à dresser la liste des pays considérés comme sécuritaires pour les réfugiés. Encore une fois, tous les pays de l'Union européenne ont mis cette solution en œuvre il y a longtemps. Une personne provenant d'un pays démocratique qui respecte la règle de droit et a signé la Convention des Nations Unies ne peut pas demander le statut de réfugié dans un pays européen.
Alors cette loi était sur le point d'être adoptée. Trois jours avant sa promulgation, la ministre de l'Immigration de l'époque a déclaré qu'elle entrerait en vigueur, mais que les dispositions relatives au « pays sûr » ne serait pas mises en place. Par conséquent, bien sûr, tout le système s'est effondré, et il est toujours dans cet état aujourd'hui. Alors, le défaut d'utiliser les dispositions relatives au « pays sûr » est très grave.
Quant à la question à l'étude aujourd'hui, il n'est absolument pas raisonnable d'ajouter une autre instance d'appel dans le système déjà en vigueur — pas à cette étape, puisque le ministre a déposé un projet de loi à la Chambre et que nous avons un arriéré de 62 000 demandes. Si on ajoute cette deuxième instance d'appel, on verra que l'arriéré se chiffrera à 80 000, 90 000 et 100 000 demandes et que la période d'attente, qui s'étend de trois à cinq ans à l'heure actuelle, sera probablement de cinq, six ou huit ans. Ce n'est tout simplement pas raisonnable.
J'en ai encore beaucoup à dire à ce sujet, mais je vais conclure en disant que quiconque suggère au comité d'accepter ce projet est... Comme le diraient mes petits-enfants, c'est simple comme bonjour.
Merci.
:
Bonjour. Je vous remercie de nous avoir invités.
Brièvement, la Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes est un regroupement, une coalition de 137 organismes membres de partout au Québec. Collectivement, nous avons plus de 35 ans d'expérience, de services sur le terrain et de connaissance des problèmes, des lois, des amendements, des règlements, des politiques, des opérations et, comme un fonctionnaire nous a dit, des façons de faire, parfois. J'y reviendrai plus tard.
Nous appuyons individuellement et collectivement la position du Conseil canadien pour les réfugiés. Je ne veux donc pas répéter tout ce que Mme Dench a dit. Toutefois, je peux vous dire qu'au cours de mes années d'expérience, j'ai parlé à presque tous les ministres de l'immigration, c'est à dire plus de 20 depuis 30 ans. Trop souvent, c'est le même vocabulaire — pas tout le temps — qui revient depuis des années: la porte d'en avant et la porte d'en arrière, les faux réfugiés, les faux demandeurs, les faux revendicateurs, tout ce qui discrédite les demandeurs d'asile.
[Traduction]
L'expression « faux demandeurs » est très malheureuse, car une personne peut croire sincèrement que sa cause est solide et être déboutée. Vous pouvez être victime de violence et être exclu de la définition. Certaines personnes arrivent ici avant la médiatisation. Nous avons vu ce phénomène, si on remonte à l'époque où M. Bissett travaillait au ministère, avec les Salvadoriens et les Guatémaltèques. Les Sri-Lankais sont arrivés avant la médiatisation. Lorsque les Tamouls sri-lankais ont vraiment été victimes de persécution et sont venus dans les années 1980, nous ne comprenions pas pourquoi ils venaient, car nous croyions que le Sri Lanka était un pays démocratique et était signataire du plan de Colombo. Eh bien, nous avons appris. Alors, parfois, ce sont les réfugiés qui nous font connaître l'histoire.
Je vais seulement dire que la convention de 1951, que le Canada a seulement ratifiée il y a 40 ans — mais nous en sommes fiers et nous célébrons le 40e anniversaire —, a notamment été motivée par l'absence totale de protection pour les Juifs et les Roms et bien d'autres peuples pendant la Deuxième Guerre mondiale et l'Holocauste. La convention a été créée pour tenter d'éviter qu'une telle catastrophe se reproduise. Malheureusement, ça ne fonctionne pas toujours.
Nous devons bien choisir nos mots. Nous nous dirigeons vers une impasse si nous tentons d'accélérer un processus en fonction des ressources disponibles plutôt que de concentrer nos efforts sur les ressources et les places nécessaires, le type de ressources, le moment et l'analyse de ce qui se passe, contrairement aux types et aux nombres de processus qui sont sans cesse renvoyés de Caïphe à Pilate. Ces choses varient selon le conférencier et le ministre. Je ne jette pas le blâme sur les ministres; on leur donne l'information.
Je ferais valoir, comme l'a dit un conférencier à l'autre séance, qu'on a besoin de bonnes statistiques. Il faut déterminer le nombre de gens qui se soumettent vraiment à des processus, et à combien — l'état réel des choses. Il faut voir pourquoi le processus accéléré, expéditif est si rarement adopté par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Seulement environ 10 p. 100 des cas sont accueillis par cette instance. Seulement 65 p. 100 des gens obtiennent réellement la permission d'interjeter appel. De cela, combien poursuivent leurs démarches et déposent une demande pour motifs d'ordre humanitaire? J'espère que vous avez les chiffres; ce serait une bonne idée de les avoir.
[Français]
Les ressources et la mise en oeuvre de certains processus ne sont pas inclus dans la loi et ne le seront jamais. La question est donc la suivante. Pourquoi, cela traîne-t-il, à certains moments? C'est une question de ressources et de volonté, parfois une question de bureaucratie. Il n'y a pas d'appel.
[Traduction]
Il n'y a pas d'appel. À l'instant même, si quelqu'un vous dit qu'il y a une possibilité d'interjeter appel sur le fond, sachez que ce n'est pas le cas. C'est faux. Une portion minime, comme l'a dit notre conférencier précédent, est renvoyée à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Cette pratique est coûteuse et elle n'est pas efficace. On ne pourrait l'éviter en mettant en place une instance d'appel.
Aucun système n'est infaillible, et on ne le répétera jamais assez. Même les experts font des erreurs, et c'est pourquoi une instance d'appel est en place même pour les contraventions au code de la route, les impôts et la conduite en état d'ébriété.
[Français]
Ce n'est pas banal de répéter que c'est une question de vie ou de mort.
[Traduction]
L'approximation n'est pas suffisante. Le fait que nous ayons aidé un nombre x de gens ne justifiera jamais le renvoi d'une seule personne dans un pays où elle sera torturée, mise à mort ou incarcérée. Je crois que nous devons aussi nous rappeler que les ressources ont été échangées sous le régime de la LIPR. Nous avons réduit — et l'ensemble des ONG ont convenu de ramener le nombre de commissaires du tribunal de deux à un seul, car nous nous souciions des ressources : il y aurait donc un membre à la première instance, à condition qu'il y ait une possibilité d'appel. Nous avons donc réduit le tribunal à un commissaire, mais le système d'appel n'a jamais été établi. On a oublié. Maintenant, on en parle comme si rien n'avait été sacrifié pour le processus d'appel, alors qu'il y a eu un sacrifice. Maintenant, il n'y a qu'un seul commissaire, et aucune possibilité d'interjeter appel.
La mémoire institutionnelle, qui tient le registre de tout ce qui est arrivé, malheureusement, relève parfois des organismes communautaires, et ce n'est la faute de personne.
[Français]
Des députés font partie du comité, mais ils partent. Vous avez beaucoup de bonne volonté, vous possédez une expertise, mais l'année prochaine, vous ne serez peut-être plus là. Certaines personnes qui étaient là n'y sont plus. C'est la même chose au ministère: la plupart des gens qui sont là n'y étaient pas il y a 10 ans. Par conséquent, nous seuls avons cette expertise.
[Traduction]
Je crois qu'il aurait été beaucoup plus équitable et rentable d'investir dans l'audience et l'instance d'appel en 1989, lorsque mon savant collègue était le directeur de l'immigration. Il faut se rappeler que, en 1989, il y avait deux instances. Il fallait prouver l'existence d'un minimum de fondement pour qu'une affaire soit instruite, mesure qui détectait supposément les causes non fondées. Plus de 90 p. 100 de ces causes étaient portées à une deuxième instance pour une instruction approfondie. Alors, ce n'est pas efficient.
Loin de moi l'idée de vous dire qu'il faut revenir aux bons vieux jours, mais, même à cette époque, nous aurions pu mettre en place un système à deux paliers, qui aurait été beaucoup plus rentable, il y a 20 ans. L'ERAR n'empêche pas le renvoi Comme nous l'avons dit, l'ERAR n'est pas un appel. On l'a conçue pour qu'elle soit réalisée après l'appel. L'ERAR...
[Français]
l'ERAR, était après l'appel.
[Traduction]
Pour conclure, je veux faire valoir deux choses. Tout le monde se plaint du fait que seulement 10 p. 100 des Mexicains sont accueillis. Eh bien, rappelons-nous que 10 p. 100 de plusieurs milliers de personnes correspondent à des centaines de personnes. Des centaines de personnes ont besoin de notre protection contre un pays comme le Mexique, que certains perçoivent comme un endroit où il n'y a pas de problème. Nous affirmons qu'il y en a.
Je terminerai en faisant valoir ceci, monsieur le président. Le personnel des ONG a beaucoup d'expérience et d'expertise. Nous avons vu ce qui fonctionne. Nous avons vu ce qui ne fonctionne pas. Nous voulons tous la même chose. Nous voulons que les réfugiés soient rapidement protégés. Nous voulons que ceux qui n'ont pas besoin de notre protection fassent l'objet d'une décision rapide, mais nous ne sacrifierons pas les garanties nécessaires pour que personne soit refusé à tort. À mon avis, nous devons nous rappeler que, selon le livret de l'HCNUR, que vous pouvez obtenir du représentant ici présent, il n'existe pas de pays sûr. Un réfugié peut provenir de n'importe quel pays. Il faut éviter de décider qu'il est impossible d'être réfugié de certains pays.
Je vous implore de mentionner, dans vos recommandations, que le milieu des ONG devrait participer à la discussion préalable à l'adoption de la loi, pour que nous puissions mettre notre expertise à contribution. Une fois que la loi est adoptée, c'est un peu trop tard. Nous avons beaucoup à offrir. Nous vous offrons, gratuitement, pour l'essentiel, nos conseils et notre expertise et tout ce qui nous a donné des cheveux gris en raison de notre travail de si longue date à ce chapitre.
Merci au groupe de témoins d'être venus.
Je dois faire valoir une chose. Certains des témoins disent que les faux demandeurs d'asile qui viennent ici sont des terroristes. La majorité des gens qui demandent l'asile au Canada sont des personnes sincères qui tentent d'échapper à la persécution dans leur propre pays. Si on prend l'exemple de personnes qui sont ici depuis 20 ans, un très faible pourcentage, 1 ou 2 p. 100 des gens, ne doivent pas faire l'objet du débat, car le Canada est un pays qui présente aux gens qui viennent ici pour demander l'asile une occasion de prospérer. Le fait que certains de mes collègues ici tentent à toute force d'assimiler les réfugiés aux terroristes est déplorable.
J'ai une question à poser aux témoins. À chaque échelon de délibérations — le Régime de pensions du Canada, l'assurance-emploi ou le POSPH, les prestations de soutien aux personnes handicapées ou la CSPAAT ou peu importe à quel organisme vous déposez une demande — il existe plusieurs instances d'appel internes. Si vous présentez une demande au Régime de pensions du Canada, vous vous adressez tout d'abord à la première instance, puis, si on n'accède pas à votre demande, vous vous adressez à la Commission. Et, si on n'accueille toujours pas votre demande, vous pouvez vous adresser à l'ombudsman. Lorsque quelqu'un dépose une demande pour obtenir quelque chose dans le domaine non juridique, indépendant des procédures judiciaires, en leur qualité de citoyens canadiens, ils ont la possibilité de s'adresser à une seconde et à une troisième instances, alors pourquoi refusons-nous d'accorder la même occasion aux gens qui viennent au Canada? Pourquoi les excluons-nous en déclarant que, s'ils demandent l'asile, leur cause a été entendue et que, s'ils contestent la décision, ils devraient aller à la Cour fédérale? Les gens qui présentent une demande au Régime de pensions du Canada peuvent faire entendre leur cause par trois instances avant de devoir aller à la Cour fédérale. Pourquoi les traite-t-on différemment? Pouvez-vous, s'il vous plaît...
:
Merci, monsieur le président.
Monsieur Bissett, je ne vous poserai pas de question. J'ai été un peu surpris par votre témoignage. J'ai l'impression que vous avez porté beaucoup d'accusations gratuites et lancé en l'air des messages qui ne correspondent pas à ce que l'on observe sur le terrain. Cela me semble un peu facile.
Avant le référendum sur la souveraineté de 1995, on a accordé la citoyenneté à des milliers de Canadiens, et ce, à toute vitesse. Dans le lot, il y avait un terroriste. Aucun souverainiste ne dira que le fédéralisme encourage le terrorisme. Cela n'a rien à voir. Il y a des processus, mais des terroristes réussiront à passer à travers les grilles. Ce n'est pas une raison pour foutre en l'air notre système.
Je m'adresserai maintenant à Mme Dench et à Mme Augenfeld. Le gouvernement nous dit qu'il y aura une réforme en profondeur. On va refaire le système au complet, ce n'est donc pas le moment d'ajouter une nouvelle section d'appel des réfugiés. Selon la loi, le gouvernement a un an pour faire cette réforme, dont on parle depuis huit ans.
Pensez-vous que l'on devrait attendre de voir s'il y aura finalement une réforme et si elle sera bonne, ou devrait-on plutôt créer immédiatement la section d'appel des réfugiés et adopter le projet de loi? L'année suivante, si le gouvernement nous amène quelque chose d'intéressant, on l'analysera à ce moment-là.
Nous nous penchons beaucoup sur les possibilités d'améliorer l'efficience du système. Beaucoup d'éléments du système ne fonctionnent pas très bien. L'un des problèmes, c'est qu'il y a de plus en plus de catégories de personnes qui n'ont pas le droit de demander le statut de réfugié, alors elles n'ont jamais l'occasion de plaider leur cause devant la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Mais, beaucoup de ces personnes ont peut-être besoin de protection, alors il faut mettre en place un autre type de mécanisme qui déterminera si elles ont besoin de protection. L'examen des risques avant renvoi permet de le faire. Si vous parlez aux gens qui connaissent l'ERAR, l'examen des risques avant renvoi, la majorité vous dira que ce n'est pas une grande réussite. Nous croyons fermement qu'il faudrait essayer de consolider nos processus pour garantir un processus beaucoup plus simple à toutes les personnes qui réclament la protection du Canada, qui devrait relever de la Commission de l'immigration et de la protection des réfugiés.
Par exemple, nous avions recommandé, entre autres, au moment de l'adoption de la loi, que, plutôt que de mettre en oeuvre un examen des risques avant renvoi pour déterminer si de nouveaux renseignements doivent être pris en compte, ce qui signifie qu'il faut ouvrir un tout nouveau dossier et créer une toute nouvelle fonction, on accorderait simplement l'occasion à la personne de rouvrir son dossier à la Commission de l'immigration et de la protection des réfugiés. Le dossier existe déjà. Dans le cas d'un demandeur débouté qui s'est fait dire qu'il n'avait pas besoin de protection, on pourrait prendre la demande et examiner les nouveaux éléments de preuve; la Commission de l'immigration et de la protection des réfugiés pourrait alors simplement voir si ces éléments ont assez de poids pour qu'elle réexamine la demande. Cette démarche serait beaucoup plus efficiente.
Nous pourrions faire des suggestions toute la journée. Malheureusement, nous n'avons pas le temps de toutes les aborder ce matin, mais nous serions certainement heureux d'avoir l'occasion de discuter de toutes ces choses avec des représentants du ministre ou du gouvernement, pour entrer dans les détails des suggestions que nous avons à présenter, dans le but de rendre le système plus efficient et plus équitable afin de s'assurer que le Canada honore ses obligations internationales.