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Bonjour, mesdames. Il me fait grand plaisir d'être ici, de vous revoir et de vous rencontrer. Je vais parler en anglais. Je n'ai pas de notes à distribuer, mais je peux vous en transmettre par la suite, en fonction des questions qui vous intéressent.
[Traduction]
J'aimerais faire cinq observations, aujourd'hui, très brièvement.
Je vous remercie de tenir cette séance alors que nous traversons une période si singulière dans l'histoire de notre économie et à un moment tellement important pour les hommes et les femmes.
Tout d'abord, j'aimerais parler du taux de population active et vous expliquer comment, lorsque la situation se complique, les femmes s'organisent. Elles le font, bien sûr, sans être rétribuées, mais ce qui compte, c'est qu'elles ont su se mobiliser en période difficile pour aider leur famille. J'aimerais parler aussi des taux de chômage sans précédent, expliquer pourquoi il y a maintenant moins de femmes sans emploi que d'hommes et à quoi cela tient. Je vous dirai qui bénéficie de l'assurance-emploi et à quelles conditions et quel rôle joue le salaire des femmes à cet égard. Enfin, je conclurai en parlant de ce que nous pouvons faire pour changer les choses.
Le taux de participation des femmes à la population active est passé de 22 p. 100 juste après la guerre, en 1946, à environ 30 p. 100 en 1960, pour atteindre à peu près 35 p. 100 en 1975. Il n'a cessé d'augmenter. Au Canada, les femmes jouent de plus en plus un rôle actif dans l'économie.
Aujourd'hui, et depuis le milieu des années 1990, les femmes représentent environ 47 p. 100 du marché de l'emploi. Nous sommes donc pratiquement à égalité avec les hommes. Ce pourcentage est grosso modo le même pour le chômage. Environ 44 p. 100 des personnes sans emploi aujourd'hui sont des femmes.
Il y a eu des variations dans le temps. En regardant les chiffres, j'ai remarqué qu'au cours des deux plus grosses récessions que nous avons traversées depuis la Seconde Guerre mondiale — la crise de 1981-1982 et celle de 1990-1991 —, le taux de chômage des femmes était en baisse. Les femmes ont mis la main à la pâte pendant que leur mari perdait leur emploi et que leur famille allait à la dérive. Le taux de chômage des femmes baissait vraiment. Ce qui est fascinant, c'est que depuis la récession de 1990, ce taux s'est maintenu à un bas niveau, même si les femmes forment une part importante des chômeurs.
Cela fait très longtemps déjà que les femmes ramassent les pots cassés pour leur famille. En réalité, depuis le milieu des années 1980, il faut deux revenus dans un ménage pour faire partie de la classe moyenne et y demeurer. Et avec la situation qui s'annonce, les conséquences seront énormes. Actuellement, il n'y a pas cette armée de réserve que représentent les chômeurs pour occuper des postes à temps partiel afin de maintenir le revenu du ménage. Les familles pédalent aussi vite qu'elles le peuvent. Cela a d'énormes conséquences quand quelqu'un perd son travail. Nous avons les taux divulgués aujourd'hui concernant l'assurance-emploi, et l'augmentation du nombre de chômeurs chez les hommes a augmenté de manière significative.
Je travaille actuellement à la rédaction d'un document portant sur les récessions, le chômage et les prestations d'assurance-emploi depuis les années 1920. Pour la première fois de notre histoire, nous traversons une récession créée par des forces extérieures à notre pays; les exportations nous le montrent. Nous n'avons pas commencé à voir encore, dans les chiffres officiels qui circulent, les répercussions, à l'échelle nationale, de cette contraction de l'économie. Nous savons qu'au cours des trois à six prochains mois — peut-être même plus — Statistique Canada produira des données très alarmistes pour démontrer de quelle façon l'économie de notre pays se contracte.
Vous en avez eu un aperçu. Vous voyez les effets des mises à pied chez les hommes qui travaillent essentiellement dans les secteurs de la production primaire et manufacturière. Mais nous savons que la prochaine vague de pertes d'emplois frappera les femmes.
Même si les femmes occupent 47 p. 100 du marché de l'emploi, en général, leurs salaires sont inférieurs à ceux des hommes. Le Canada a été une puissante machine de création d'emplois au cours des dix dernières années. Entre 1997 et 2007, nous nous classions au premier rang des pays du G7 pour la création d'emplois. Mais tous ces emplois n'étaient pas bien rémunérés. En réalité, ces dernières années, nous avons vu que la proportion d'emplois rémunérés au salaire minimum avait augmenté dans beaucoup de provinces. Je veux parler notamment de l'Île-du-Prince-Édouard, de la Nouvelle-Écosse, du Québec, de l'Ontario et du Manitoba, qui ont toutes connu une augmentation du nombre d'emplois payés au salaire minimum. Les femmes occupent 60 p. 100 de ces emplois. En outre, plus d'un tiers de ces emplois sont pour des personnes dans la force de l'âge — 25 ans et plus —, et on observe aussi un accroissement de la proportion de personnes âgées de 65 ans et plus dans ces emplois payés au salaire minimum.
Cette augmentation du nombre d'emplois payés au salaire minimum constitue donc un problème, puisqu'on en compte maintenant 750 000, dont beaucoup dans le secteur des services, qui sera bientôt frappé lui aussi. Ce sont tous des emplois subalternes qu'on n'a pas nécessairement besoin de garder quand on rationalise ses activités. Et nous savons que 60 p. 100 des femmes occupent ce type d'emplois.
Cela m'amène à vous parler des prestations d'assurance-emploi et du paiement de ces prestations. Pendant la forte période de chômage des années 1970, environ 85 p. 100 des sans-emploi étaient couverts et recevaient des prestations lorsqu'ils étaient au chômage. Pendant la récession de 1981-1982, ce pourcentage est tombé à 76 p. 100. Dans les années 1990, alors que nous étions témoins d'une restructuration massive, à l'échelle du continent, de la capacité de notre industrie et que les gens perdaient leur emploi dans les secteurs manufacturier et primaire, ce pourcentage est remonté jusqu'à 83 p. 100. Donc, 83 p. 100 des sans-emploi, au cours de la dernière récession, touchaient des prestations d'assurance-emploi. Entre 1989 et 1997, ce pourcentage a chuté de manière vertigineuse pour s'établir à 44 p. 100. C'est pratiquement la moitié. Ainsi, nous entrons dans cette nouvelle récession avec 43 p. 100 des personnes sans emploi admissibles à des prestations.
Il y a une autre tendance inquiétante, et c'est que les règles du système d'assurance-emploi permettent aux gens de se constituer un petit revenu d'appoint et ainsi de ne pas être complètement pénalisés. La proportion de gens qui exercent de petits boulots, tout en continuant de toucher les prestations d'assurance-emploi, a aussi augmenté. C'est davantage le cas pour les femmes que pour les hommes, parce que celles-ci ne peuvent pas vivre avec 55 p. 100 d'un bas salaire. Cela leur permet de s'assurer un revenu d'appoint. Mais cela signifie qu'au lieu que l'assurance-emploi devienne un programme d'assurance sociale pour protéger les chômeurs, c'est le travail qui est devenu un moyen de compléter l'assurance-emploi. Et lorsque les emplois disparaissent, cela devient excessivement difficile pour les gens de vivre en comptant uniquement sur ces mesures de soutien du revenu.
Cela m'amène à parler de mon dernier point, à savoir ce que nous pouvons faire face à cette situation. Le régime d'assurance-emploi s'est réduit comme peau de chagrin entre 1990 et 1996, mais il peut être bonifié. La couverture d'assurance-emploi a été grandement améliorée dans les années 1950, puis en 1971. Si le gouvernement et tous les parlementaires le voulaient, avec ou sans ajustements budgétaires, vous pourriez faire des changements dès maintenant, pour que davantage de personnes soient couvertes, en modifiant les règles d'admissibilité, en accordant une forme de soutien du revenu et en relevant les niveaux de revenu. Si vous n'améliorez pas le taux de remplacement du revenu en le faisant passer de 55 à 60 p. 100, vous pourriez faire d'autres choses pour garantir, par exemple, une couverture pour les travailleurs autonomes. Vous pourriez notamment doubler le montant du crédit remboursable au titre de la TPS.
Ce sont autant de mesures que vous pouvez prendre afin de protéger les gens contre la tempête. Et cela ne s'adresse pas uniquement aux femmes; c'est pour tout le monde, parce que les femmes ne peuvent plus soutenir seules leur famille. Il faut l'intervention du gouvernement, une intervention massive, pour empêcher que cette crise déjà sévère ne s'aggrave davantage, et c'est absolument évitable. Ce serait rendre un très mauvais service à notre nation que de ne pas prendre toute cette histoire très au sérieux.
Je vous remercie beaucoup de m'avoir donné l'occasion de m'exprimer devant vous aujourd'hui.
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Je vous remercie, madame la présidente.
Merci aussi aux membres du Comité venus discuter de cette question d'une extrême importance.
Je suis surprise qu'apparemment personne d'autre au gouvernement fédéral n'ait pris ce dossier autant au sérieux, mais soulagée de voir que votre comité s'intéresse à la question depuis — comme tout le monde aurait dû le faire — que les discussions ont commencé sur la façon d'ajuster la politique fédérale aux nouvelles réalités économiques, il y a de cela plusieurs mois.
J'aimerais faire une série de commentaires, tous destinés à vous convaincre que même s'il y a dix ans le Canada occupait le premier rang mondial pour l'Indice de développement humain des Nations Unies, qui mesure les principaux éléments du développement socioéconomique, et s'il a été aussi numéro un pendant quatre ans selon l'indicateur sexo-spécifique de développement humain des Nations Unies, depuis plusieurs années notre pays est pointé du doigt, car il fait l'objet d'études, d'articles et de critiques de la part de l'Organisation de coopération et de développement économiques, l'OCDE, qui regroupe un peu plus de 30 pays industrialisés parmi les plus développés au monde, ainsi que du Fonds monétaire international et d'autres agences des Nations Unies, dont le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes.
Le Canada s'est beaucoup détourné de ce qui, comme l'a souligné ma collègue, lui avait assuré un niveau de développement économique élevé et avait amené une grande égalité entre les hommes et les femmes sur plusieurs fronts, mais je pense que les gens n'en perçoivent pas encore toutes les conséquences. Permettez-moi de vous donner un chiffre qui m'a stupéfaite, il y a quelques semaines, lorsque j'en ai pris connaissance.
J'ai examiné un document sur le programme de développement des Nations Unies, qui fournit des informations à jour par pays. On y dressait un portrait de la situation économique en 2008. J'ai été choquée de voir que le Canada se situait au 83e rang parmi 157 pays pour ce qui est du nouvel indice développé par les statisticiens des Nations Unies, appelé Indice de disparité entre les sexes, qui mesure en quelque sorte les différences factuelles entre le développement économique et social des femmes et celui des hommes. On est loin de la première place. C'est un problème sérieux.
Ce problème tient justement à la manière dont les règles de l'assurance-emploi fonctionnent actuellement. Ce problème ne sera pas réglé au moyen des stratégies que propose le parti au pouvoir. Si des mesures audacieuses ne sont pas prises pour traiter les femmes comme des citoyennes et des personnes à part entière au Canada, comme le sont les hommes, et pour les considérer avec autant d'égards, la situation demeurera très préoccupante. Permettez-moi de vous expliquer pourquoi aussi brièvement que possible.
Dans le document que je vous ai distribué, il y a un petit graphique, à la page 6, qui présente la distribution des revenus au Canada. Ce graphique se fonde sur les statistiques de 2004. On pourrait avoir les données mises à mise à jour pour 2005. La situation ne serait pas très différente; elle ne serait que légèrement pire. Cela représente la part du revenu des hommes par rapport à celui des femmes au Canada. C'est là que commence le problème, parce que les femmes et les hommes ont des milliers de raisons de croire que ce devrait être différent, mais le fait est que cela n'a pas toujours été ainsi au Canada. Il faut que ça change. C'est différent dans d'autre pays. En réalité, on pourrait modifier radicalement la situation en changeant un tout petit peu les politiques sociales.
Mais la réalité dans laquelle les règles en matière d'assurance-emploi fonctionnent est modelée par l'accès qu'ont actuellement les hommes et les femmes à l'argent. Les règles régissant l'assurance-emploi sont élaborées en fonction de la réalité du moment et elles reproduisent simplement le statu quo; elles ne peuvent le briser. Sauf que, comme l'a souligné ma collègue, elles ont changé à certaines époques, comme dans les années 1980 et 1990, lorsqu'on a modifié le régime d'assurance-emploi.
Le principal changement a été qu'au fil des ans, le régime d'assurance-emploi au Canada est devenu de plus en plus restrictif, au point de se limiter à ce que nous pourrions appeler le modèle d'emploi standard. Cela présuppose que tous ceux qui travaillent moyennant rémunération le font en respectant un cadre standard — c'est-à-dire qu'ils occupent un emploi permanent à plein temps, avec toute une série d'avantages sociaux, 12 mois par année, de manière indéterminée ou jusqu'à ce qu'ils trouvent quelque chose de mieux.
Mais en regardant de plus près ce qui est arrivé aux femmes depuis qu'elles sont entrées massivement sur le marché du travail, ces 30 dernières années, on voit qu'il y a deux types de main-d'oeuvre. Il y a la main-d'oeuvre standard, qui est fortement dominée par les hommes, même lorsqu'on examine les chiffres. Ici, les hommes reçoivent 60 p. 100 du revenu et les femmes 40, les hommes occupent plus de 60 p. 100 des emplois à temps plein, contre un peu moins de 40 p. 100 pour les femmes. C'est une économie ségréguée dans laquelle les femmes occupent 69 p. 100 des emplois à temps partiel et où les hommes n'en occupent qu'une très petite partie. C'est donc une économie très mal équilibrée, et c'est ce qui explique pourquoi, lorsqu'on regarde les trois principaux indicateurs du statut des femmes, celles-ci ne peuvent s'en sortir mieux. Les femmes gagnent déjà 40 p. 100 de moins que les hommes en travaillant à temps partiel, parfois en occupant plusieurs emplois ou des emplois à temps plein peu garantis. En plus, elles doivent continuer à faire les deux tiers de tout le travail non rémunéré au Canada. Cela fait de longues journées pour une maigre rétribution, quand elles en reçoivent une. Et au bout du compte, c'est la personne qui a travaillé le plus qui se retrouve avec le moins d'argent en poche.
Que fait le régime d'assurance-emploi pour satisfaire aux besoins de ce groupe extrêmement vulnérable? À ce stade-ci, si on se fonde sur les changements séquentiels observés depuis une vingtaine d'années, on voit que les femmes doivent tendre vers des emplois à temps plein pour recevoir les indemnités maximales du régime d'assurance-emploi. Mais même ainsi, étant donné que leur niveau de revenu déterminera le montant des prestations d'assurance-emploi auxquelles elles seront admissibles, elles ne toucheront qu'environ les deux tiers ou les trois quarts des prestations que recevront les hommes. Les prestations maximales hebdomadaires des hommes sont de 413 $, alors que celles des femmes tournent autour de 312 $, et je parle de femmes qui ont une bonne situation. Les autres ne reçoivent pas de prestations du tout. Au départ, comme l'a indiqué ma collègue, 70 à 80 p. 100 des femmes étaient couvertes, mais aujourd'hui, certains statisticiens ont calculé que seulement 32 p. 100 des femmes sont protégées par l'assurance-emploi.
Voilà en gros ce que je voulais dire. Et aussitôt que vous prenez en compte le contexte plus large des changements récents en matière de politiques budgétaires et sociales, aussitôt que vous examinez l'impact que cela a sur les femmes qui subissent de multiples inconvénients, vous voyez qu'en fait, la femme moyenne dont je parle est plutôt chanceuse.
Merci.
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Les besoins sont énormes en ce qui concerne les travailleurs autonomes et, d'une certaine manière, ce sont des besoins qui exigent une attention particulière — notamment dans le cas des travailleuses autonomes, qui gagnent moins que les hommes dans la même situation. En effet, lorsque ces personnes se retrouvent au chômage ou en congé de maternité, il faut qu'elles assurent leur situation, alors que toute l'entreprise disparaît et fait l'objet d'une sorte de liquidation.
Les personnes qui sont en âge de prendre leur retraite se trouvent pour leur part dans un piège politique qui s'est formé au cours des dernières années. Voici comment cela fonctionne. Si une personne d'un certain âge peut prendre sa retraite, la situation économique actuelle est telle que leur conseiller financier — qu'il s'agisse du syndicat ou d'un autre intervenant — lui recommandera de voir si elle peut continuer de travailler encore quelques années afin d'augmenter sa contribution de base pour avoir un revenu un peu plus élevé, étant donné que chaque fonds de pension fait l'objet d'une évaluation des actifs et d'un processus de restructuration des engagements.
Tout cela est bien beau pour les hommes, qui, historiquement et statistiquement, gagnent des revenus plus élevés; mais les femmes qui sont dans cette situation sont prises au piège, parce que si elles prennent leur retraite, elles pourraient instantanément transformer le revenu de leur conjoint en une somme beaucoup plus importante grâce aux avantages fiscaux du fractionnement du revenu de retraite, avantages qui, à des niveaux de revenu modéré à élevé, pourraient se traduire par des milliers de dollars pour les gens qui sont dans cette situation.
Il existe donc une sorte de courant sous-jacent qui pourrait pousser certaines femmes de quitter le marché du travail. Elles n'obtiendront pas de prestations d'assurance-emploi et deviendront un abri fiscal pour leur conjoint.
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Trente-troisième. Quoi qu'il en soit, c'est dramatique que le Canada se retrouve à ce niveau.
Vous n'avez pas à me convaincre, je suis déjà convaincue. Avec ma collègue, je travaille fort pour dénoncer le régime, qui constitue une faille quant à l'accession des femmes à l'égalité. J'ai fait une tournée en présentant un projet de loi qui a été refusé parce qu'on a dit qu'il nécessitait la recommandation royale. Je trouve encore discriminatoire d'avoir une telle réponse, parce que le projet de loi reflétait une réalité et un déséquilibre encore plus grand entre les hommes et les femmes au regard de l'accessibilité au régime de l'assurance-emploi. Encore pour des raisons monétaires, on refuse d'améliorer la situation et le sort des femmes. Je trouve ça aberrant de la part d'une société comme la nôtre. On va rappliquer et présenter de nouveau un projet de loi semblable.
J'arrive d'une mission parlementaire en Algérie et en Tunisie. J'ai été fortement impressionnée de voir, surtout en Tunisie, les avancées que les femmes ont faites en peu d'années. L'égalité entre les sexes est reconnue par ces gouvernements et est inscrite dans leur Constitution. La réalité est peut-être tout autre, mais le fait de reconnaître ce principe est déjà une ouverture plus grande que celle dont on fait preuve ici.
On parle beaucoup de l'iniquité de ce régime, à savoir que les femmes sont désavantagées par rapport aux hommes. Une question concernant l'équité salariale me brûle et j'ai vraiment envie de vous la poser. Les statistiques le prouvent: les femmes de l'ensemble du Canada sont déjà défavorisées et gagnent moins. On veut intégrer ce principe aux négociations collectives. J'aimerais beaucoup connaître votre position là-dessus.
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Nous sommes ici pour discuter de l'assurance-emploi, mais, sans vouloir manquer de respect, je ferais remarquer qu'il est très difficile d'ignorer le ton de la réponse. Le gouvernement a réagi au stimulus économique dont notre pays a besoin actuellement, et l'abolition de la parité salariale n'a pas sa place dans ce plan d'action. C'est un illogisme qui ne devrait pas figurer dans le budget, et j'irais jusqu'à dire qu'il n'aurait jamais dû faire partie d'une initiative du gouvernement, car il laisse supposer que ce dernier croit que la négociation est la source de toute force. Nous savons que le gouvernement doit être un arbitre d'une force inégalée en matière de négociation et que les femmes se sont battues pendant des décennies pour obtenir une égalité garantie par la loi.
Mais, si on met de côté la question de la parité salariale, il faut se demander ce que nous pouvons faire maintenant, en dehors d'un contexte législatif, pour améliorer l'accès à un régime que les femmes, les hommes, les familles et toutes les citoyens ont désespérément besoin. Nous allons assister à un déluge de perte d'emplois dans les prochains mois, et le régime n'est pas prêt pour cet hécatombe. Tous autant que nous sommes, nous avons une part de responsabilité dans ce qui est advenu du régime. Ce sont les coupures que les conservateurs et les libéraux ont apportées au début des années 1990 qui ont fait diminuer l'accès au point où il en est maintenant. Dans les années 1970, quand quelqu'un se retrouvait au chômage et que le taux de chômage était de 8 ou de 9 p. 100, il fallait environ 100 heures pour se prévaloir des prestations si on fait la conversion. Pendant la récession des années 1980, il en fallait environ 200, et c'est maintenant plus de 500. Nous savons ce qu'il faut changer pour que les citoyens bénéficient d'une certaine protection.
J'ajouterai ici qu'il ne s'agit pas seulement de justice, d'équité ou de beaux principes. C'est une question économique, parce que si on continue de laisser le pouvoir d'achat dégringoler, si on se croise les bras et on se dit qu'on arrangera un peu les infrastructures par-ci et autre chose par-là — ce qui est nécessaire, au demeurant —, cela ne suffira pas à combler le vide qui va se former avec la contraction du secteur privé. L'étude des récessions qui ont frappé au cours des sept dernières décennies montre que l'ampleur de celle qui nous attend nécessite une contre-attaque vigoureuse. Lorsqu'on prend des mesures comme celles relatives à la parité salariale et qu'on ignore la modification du régime d'assurance-emploi, on ne corrige pas le système et on n'empêche pas la chute libre du pouvoir d'achat dans un nombre trop grand de ménages. Ce n'est plus une question de justice; ce qui compte, c'est empêcher la récession d'être plus grave et plus longue qu'elle ne le devrait et d'entraîner des millions de ménages dans la débâcle. Et je n'exagère pas.
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Je vous remercie, madame la présidente.
Je voudrais profiter de l'occasion pour remercier tous les témoins qui sont venus aujourd'hui. En tant que nouvelle députée, je suis sensible au fait que vous ayez pris le temps de venir. Comme je suis nouvelle au sein du Comité, je réalise qu'une bonne partie des questions que nous examinons ont probablement déjà été étudiées, mais il y a toujours plus à faire. Avec les difficultés économiques auxquelles nous somme confrontés, il est très important de se pencher sur ces questions.
Aujourd'hui, nous avons été mandatés pour traiter précisément du Programme d'assurance-emploi. Vous avez fait référence à la parité salariale, et j'accepte vos observations, mais, avec tout le respect que je vous dois, je ne suis pas d'accord. Je suis convaincue que les syndicats ont une responsabilité, et, en tant que femme, je tiens vraiment à être traitée équitablement. Je veux être sûre que si je faisais partie d'un syndicat ou d'un groupe de négociation, je recevrais le même traitement que mes collègues masculins en veillant à ce que l'on ait la parité salariale. Je ne dis cela qu'en passant.
Je crois qu'en tant que gouvernement — et certains de mes honorables collègues ont déjà été du côté du gouvernement — il nous incombe certainement d'équilibrer les programmes et d'aider les gens qui sont dans le besoin, tant les hommes que les femmes, avec le gouvernement concerné. Nous sommes responsables à l'égard des contribuables et du secteur privé, qui supportent eux aussi un lourd fardeau pour les programmes généraux que le gouvernement met en oeuvre. Nous sommes également dans une récession économique à laquelle nous n'avons pas contribué, et vous avez également parlé de la question, madame. C'est une situation qui nous frappe de plein fouet. Je crois que nous devons être un gouvernement responsable et ne pas pénaliser le secteur privé pour quelque chose qui ne relève pas de son contrôle. Ainsi, en tant que gouvernement, en tant que parlementaires et en tant que défenseurs des droits des femmes, comment concilions-nous ce que nous faisons comme gouvernement avec l'aide que nous voulons apporter aux citoyens? Je crois que c'est là ce que nous voulons vraiment découvrir. La vie est toujours une question d'équilibre, n'est-ce pas? C'est notre objectif.
Madame Lahey, un des points qui vous préoccupe est que le 2 milliards de dollars que notre gouvernement a annoncé dans son budget pour les prestations d'assurance-emploi semblent exclure les femmes. C'est le terme que vous avez employé, ce qui n'est guère flatteur, et ce n'est pas quelque chose que nous voulons vraiment encourager. Vous avez fait référence précisément au fait suivant, et je cite:
Les nouvelles travailleuses qui pourraient se qualifier aux termes de ces améliorations sont celles qui sont restées longtemps à la maison à s'occuper de leurs enfants, et non celles qui se sont prévalues d'un congé de maternité pour ensuite retourner à un travail non admissible.
Ce passage m'a frappée, car de nombreuses femmes de ma circonscription sont mariées à des producteurs et à des agriculteurs qui traversent une période très difficile. Les cinq dernières années ont été particulièrement ardues pour le secteur de l'élevage, avant même que ne frappe la crise économique. Bon nombre des femmes habitant en région rurale — et je crois que je parle au nom de plusieurs d'entre elles — mettent l'accent sur l'exploitation familiale ou leur maison; elles doivent toutefois se réorienter pour retourner sur le marché du travail et trouver un emploi. Mais dans bien des cas, elles cherchent en fait un emploi qui n'est pas trop exigeant, qui leur permet d'effectuer un certain nombre d'heures pour ensuite retourner chez elles et s'occuper de que qui compte le plus à leurs yeux. Selon moi, ces nouvelles travailleuses sont très différentes de, par exemple, une femme qui a reçu toutes ses prestations de maternité et qui veut retourner travailler. Saisissez-vous la différence entre ces deux travailleuses, et reconnaissez-vous que nous avons fourni...? Vous avec mentionné 910.... Nous avons réduit le nombre d'heures que les travailleurs doivent effectuer avant de pouvoir se prévaloir des prestations d'assurance-emploi, mais je vois une différence entre une nouvelle travailleuse et une femme qui a reçu des prestations de maternité et qui réintègre le marché du travail. C'est une de mes premières questions.
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Je vais répondre brièvement à la question. Ma collègue a également quelques commentaires à formuler sur le sujet.
La main-d'oeuvre est très diversifiée. La famille prend des formes si variées qu'on ne peut toutes les répertorier, et de nouvelles se font jour constamment. Le régime d'assurance-emploi lui-même comprend un certain nombre de sous-programmes et vise à régler de façon juste et équitable les situations qui touchent ces différents secteurs.
Mais ce que doit absolument accomplir un gouvernement responsable dans ce genre de situation, c'est accorder la priorité aux plus vulnérables. Et ces plus vulnérables, ce sont celles qui sont si pauvres qu'elles n'ont pu prendre tous leurs congés de maternité, celles qui n'ont pu vivre dans une famille où, même ensemble, la famille a pu bénéficier de la totalité des congés de maternité, et celles dont les revenus sont si bas qu'elles ne peuvent être admissibles à l'assurance-emploi.
Il ne fait donc aucun doute que dans certaines situations, il serait souhaitable d'injecter des fonds au régime d'assurance-emploi pour régler ces cas dont vous parlez. L'ennui, c'est qu'en élaborant des solutions, on n'a pas effectué d'analyse systémique avant de déterminer les groupes. Voilà le problème.
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Il faut réduire le nombre d'heures qui rendent les travailleurs admissibles, uniformiser l'accès à l'échelle nationale et permettre aux gens d'adhérer au régime, ne serait-ce que pour deux ans, alors que vous prolongez de cinq semaines la période de prestations. Même si ce n'est que pour deux ans, faites-le maintenant. Agissez aussi rapidement que possible. Oubliez l'adoption du budget. Préparez un tout nouveau projet de loi et commencez dès maintenant, parce que le temps presse.
Si nous observons les statistiques sur l'augmentation effrénée du chômage et le déclin du PIB et ce qui s'est passé au cours des deux ou trois dernières récessions, nous savons que nous allons être frappés de plein fouet. Nous savons ce qui nous attend et nous ne sommes pas prêts pour cette débâcle économique.
Nous vous demandons instamment de travailler ensemble pour élargir l'accès. Si c'est tout ce que vous accomplissez, c'est déjà quelque chose. De plus, bien des gens ne pourront survivre avec 55 p. 100 du revenu d'un emploi à temps partiel rémunéré au salaire minimum. Ainsi, en augmentant le soutien du revenu, avec des mesures comme le crédit pour taxe sur les produits et services, on veille de façon efficace à ce que le pouvoir d'achat profite à ceux qui dépensent tous leurs revenus.
Le Fonds monétaire international a indiqué que si on veut donner un stimulus économique sous la forme de soutien du revenu, qu'il s'agisse de réforme fiscale ou d'une forme quelconque de revenu, il faut cibler les plus démunis. Pourquoi? Ils dépensent tous leurs revenus. Nous offrons, depuis janvier 2009, une toute nouvelle réforme fiscale: le compte d'épargne libre d'impôt. Or, ce sont les épargnants qui vont profiter de cette mesure. Mesdames, nous sommes devant une crise. Il faut que les gens dépensent et non qu'ils mettent de l'argent de côté. Même s'il est prudent d'épargner si on en est capable, les contribuables ne devraient pas subventionner les gens qui peuvent se permettre d'épargner en cette période, alors que nous avons désespérément besoin d'un plus grand pouvoir d'achat, d'une demande globale plus élevée. C'est une manière inadéquate de répartir les rares ressources dont nous disposons. En utilisant le même montant d'argent pour accroître les revenus des personnes les plus démunies, on stimulerait le pouvoir d'achat et l'économie locale.
Il y a donc beaucoup de mesures que nous pouvons prendre, et ce, très rapidement. Si nous n'agissons pas promptement avec la certitude que c'est quelque chose qui va réellement appuyer et stimuler l'économie, nous allons prolonger et aggraver cette récession beaucoup plus que nécessaire. Il est tout à fait possible de prévenir cette situation. C'est ce qui rend ce moment si crucial.
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Je crois que nous devrions nous rappeler que jusqu'en 2008, le Compte d'assurance-emploi avait plus ou moins un surplus de 54 milliards de dollars. Lorsqu'on a mis sur pied la société d'État, 2 milliards de dollars de ce montant ont été déposés dans un compte de réserve et nous savons que les actuaires — je ne me rappelle pas du titre exact, mais c'est l'équivalent du vérificateur général — ont indiqué que dans le revirement de situation auquel nous croyons être confrontés, nous allons probablement accumuler un déficit de 10 à 15 milliards de dollars dans ce fond.
En réalité, les 54 milliards de dollars ne sont pas là. Ils ont déjà été donnés en réductions d'impôts et utilisés à d'autres fins. Nous avons donc l'occasion de faire vraiment quelque chose. Il y a eu des coûts d'option au cours de la dernière décennie pour corriger les coupures effectuées au début et au milieu des années 1990. De nombreux membres du Comité ont entendu divers témoins et moi-même expliquer comment, en période économique difficile, la lutte au déficit s'était faite au détriment des pauvres, particulièrement les femmes, et que le financement du programme n'a jamais été rétabli une fois l'économie au beau fixe. Je n'ai donc pas besoin de le répéter. Je dirais simplement que certains choix ont été faits en cours de route sur la manière de dépenser les ressources publiques et qu'il a des arguments en faveur des réductions d'impôts, de la réduction de la dette et de l'augmentation des dépenses. Chaque gouvernement choisira ses priorités de cette manière, mais en vérité, l'argent est là quand on en a besoin.
Si on examine attentivement l'histoire économique de notre pays, nous avons décidé ce qu'il fallait faire et l'avons fait, pour ensuite chercher à savoir comment nous paierions. À partir des années 1990, le mot d'ordre a été l'équilibre budgétaire. Depuis le début et le milieu des années 1990, les gouvernements ont mis l'accent sur la responsabilisation et les efforts pour ne pas dépenser plus d'argent qu'ils n'en avaient. Mais en fait, nous pouvons réunir les fonds pour faire ce que nous croyons prioritaire. Nous avons créé le régime d'assurance-emploi à partir de rien parce que nous en avions besoin. Nous l'avons élargi dans les années 1950, et de nouveau dans les années 1970. Quand un besoin se fait sentir, nous pouvons le combler si c'est ce que nous voulons collectivement. Mais pour y arriver, il faut que l'ensemble du Parlement donne son aval. Il faut que tout le gouvernement approuve la mesure et dise oui, nous allons agir pour protéger les citoyens. Je crois que c'est là où on en est, madame Mathyssen.
Les autres documents relatifs au budget fédéral dont vous parlez ont été préparés par une coalition de groupes qui demande quelles mesures nous pourrions prendre pour stimuler l'économie et ce que nous pourrions faire pour nous sortir de la récession. Nous sommes partis d'un point de départ différent en disant : nous avons un budget d'un certain montant, comment allons-nous l'utiliser? Nous avons commencé par un stimulus de 2 p. 100 du PIB, étant donné que le Fonds monétaire international, l'OCDE et tous les autres pays considéraient qu'il fallait prendre cette mesure de concert et qu'il est très important de synchroniser nos actions pour pouvoir soutenir le système financier. Le gouvernement s'est empressé de collaborer avec les autres partenaires afin de stimuler le système financier — et c'est fort bien —, mais lorsque le temps est venu d'appliquer des stimulus,on a assisté à une valse-hésitation, non seulement au Canada, mais partout dans le monde. On s'est beaucoup interrogé sur la manière de procéder. En fait, nous savons tous que le gouvernement doit agir, parce que la contraction du secteur privé — les ménages, les banques et les entreprises — est telle qu'il est le seul à pouvoir intervenir. S'il n'agit pas, et de manière énergique, nous allons nous enfoncer dans la récession.
Nous avons donc pris le 2 p. 100 préconisé par le Fonds monétaire international et nous nous sommes demandé combien d'emplois nous pouvions créer et quels étaient les éléments multiplicateurs les plus efficaces à appliquer. Les réductions d'impôts n'ont pas été envisagées parce qu'elles ne permettent pas de créer suffisamment d'emplois. Nous avons donc affecté la majorité des fonds aux infrastructures, dans des projets écologiques et avancés, ainsi que dans la formation et le soutien du revenu. Toutes ces mesures non seulement permettent de soutenir l'économie pendant la période actuelle, mais nous préparent pour la prochaine étape d'expansion, qui est inévitable. Nous nous sortirons de la période actuelle et nous sommes mal préparés pour affronter les problèmes auxquels nous serons confrontés sur le plan de la main-d'oeuvre au cours des cinq à dix prochaines années, alors que mon groupe d'âge et d'autres comme moi prendront leur retraite. Nous n'aurons pas suffisamment d'enseignants, de médecins et d'infirmières, et nous ne profitons pas du moment présent, pourtant idéal pour en former en vue de cette prochaine étape.
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Merci beaucoup de votre question, madame O'Neill-Gordon.
J'ignore si vous vous en rappelez, mais lors de l'élection de 1984 qui avait été remportée par Brian Mulroney, la campagne avait pour mot d'ordre « emplois, emplois, emplois », et en 1985 et 1986, ce discours s'était transformé en « formation, formation, formation ». Je dois dire que, malheureusement, j'étais dans les parages à cette époque, à assister au transfert des fonds consacrés à la formation.
On peut inscrire beaucoup de gens à des formations à titre de mesure provisoire, pour pouvoir affirmer qu'on fait quelque chose. Maintenant, l'argent dont vous parlez ira en fait à l'ouverture d'un nombre accru de places en formation. Cette initiative est une très bonne nouvelle, mais la formation ne crée pas nécessairement des emplois. Nous ne sommes pas dans Le champ de rêves; il ne s'agit pas de former les gens pour que les emplois apparaissent. Il faut que des mécanismes de création d'emplois soient en place, car nous savons que la part de travailleurs autonomes sur le marché du travail augmente lorsqu'il n'y a pas d'emplois.
Le fait d'avoir davantage de formation est excellent. C'est formidable. Mais un problème nous attend sur le plan stratégique. Il ne faut pas seulement de la formation en tant que mesure anticyclique, mais aussi de la formation en préparation au marché du travail pour pallier les lacunes et remplacer tous ces gens qui quitteront le marché du travail. Ils pourraient avoir à retarder leur retraite de quelques années parce que leur épargne-retraite vient de fondre. Mais nous savons qu'au cours des dix prochaines années, il y aura une pénurie de main-d'oeuvre. Vous croyez qu'on a une pénurie de travailleurs dans le domaine des soins de santé? Attendez de voir dans dix ans. Nous n'avons pas de plan stratégique. Dans quoi investissons-nous l'argent destiné à la formation? Allons-nous garantir la prestation de ces services que les Canadiens sont en droit d'obtenir en vertu de la loi — la santé et l'éducation — dans le secteur public? Aurons-nous suffisamment d'organismes pour fournir les services de santé et d'éducation auxquels s'attendent les Canadiens en tant que droits découlant de leur citoyenneté, et qu'ils attendent d'un pays aussi choyé que le nôtre?
Il est primordial de mettre en place un stimulus anticyclique, et la formation est toujours la bienvenue. Il vaut toujours mieux être plus intelligent que plus stupide. Si vous pensez que la formation n'est pas une solution, qu'en est-il de l'ignorance? Mais la vérité, c'est que nous avons besoin d'un plan stratégique qui s'appuie sur cet argent, sur ce magnifique montant d'argent qui est là, et qui prévoit l'établissement d'un plan en collaboration avec nos partenaires provinciaux, parce que nous savons ce qui nous attend au tournant, et nous nous préparons en conséquence.
Mais ce plan brille par son absence.
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Merci, madame la présidente.
Mesdames Lahey et Yalnizyan, bonjour. Je dois vous avouer que j'ai un peu de difficulté présentement. Je suis moi aussi passionnée, mais je n'aime pas me fâcher.
Ça va bientôt faire trois ans que je siège au Comité de la condition féminine. Depuis trois ans, on discute de façon approfondie de toutes sortes de problématiques qui concernent les femmes et on dépose des rapports. Or, on n'est pas écoutées. On dit que notre comité ne veut rien dire, qu'il n'a aucune importance et, surtout, qu'il n'a aucune influence.
Plutôt que de chercher à comprendre et à trouver des solutions à la crise économique actuelle, qui touche les femmes plus que n'importe qui d'autre, on est en train d'essayer de trouver des justifications en disant que son côté est plus fort que l'autre, que c'est son côté qui a raison.
J'aimerais entendre tous les témoins qui viennent ici avec un esprit ouvert. Or, plutôt que d'essayer d'écouter ce que vous nous dites avec un esprit ouvert, on nous lit des lignes écrites par le parti. Si je veux connaître ces lignes, je vais lire le budget. J'en ai assez!
On vous a convoquées ici pour nous suggérer des façons de sortir les femmes de la misère dans laquelle elles se trouvent. Cinquante-quatre milliards de dollars ont été volés aux chômeurs. Or, cet argent pourrait être redonné aux chômeurs. Je paie des primes d'assurance pour ma maison, et en cas d'incendie, je serais remboursée. J'ai commencé à travailler à l'âge de 13 ans. Toute ma vie, j'ai cotisé à l'assurance-emploi, et j'ai reçu des prestations d'assurance-emploi pendant environ cinq semaines. Je considère que je ne volais pas le gouvernement. Je ne restais pas assise chez moi en touchant des prestations d'assurance-emploi et en me disant que j'étais mieux ainsi.
Excusez-moi, mesdames. L'année passée, vous nous avez donné des conseils sur la budgétisation sexospécifique en nous expliquant que tous les ministères sont censés être au courant de la budgétisation sexospécifique, et qu'ils ne doivent accepter aucun projet qui ne soit spécifiquement accepté en fonction de la budgétisation sexospécifique. Ils n'en ont pas tenu compte du tout dans le budget. Les femmes ne sont avantagées nulle part. Que s'est-il passé, selon vous?
Madame la présidente, comme Mme Yalnizyan l'a dit, j'espère que nous allons pouvoir discuter en faisant preuve d'ouverture et de bon sens. Peu importe ce qu'on va dire, on est ici avant tout pour faire avancer la cause des femmes. Ce doit être un objectif commun, peu importe notre orientation politique, qu'elle soit à gauche, à droite ou au centre. On devrait siéger avec ouverture et bon sens et tenir compte des expériences de tous, et pas seulement de ce qui est écrit.
J'ai des tantes et des oncles qui sont dans l'Ouest et qui ont des fermes. Ils en profiteront, mais s'ils n'ont pas d'emploi, quand bien même ils recevraient toute la formation nécessaire, ils ne pourront pas plus travailler. C'est ça qu'il faut se dire.
Merci, madame la présidente.
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Comme vous et une grande partie des membres du Comité le savez probablement, toute l'information relative à l'assurance-emploi est disponible dans un document administratif. Aux États-Unis, on produit chaque semaine des bulletins d'information sur ce qui se passe en matière d'assurance-emploi. En fait, on pourrait soutenir qu'il y aurait lieu de collaborer avec le ministère chargé de produire ces renseignements d'ordre administratif pour publier ces relevés de façon plus régulière.
Je ne pense pas qu'il serait nécessaire de les déposer au Parlement. Je crois que ce document est là, et qu'il n'en tient qu'aux parlementaires et aux gens qui participent au processus extra-parlementaire de révéler l'information consignée dans une base de données administrative, et de s'assurer que le public puisse y accéder facilement selon les paramètres que vous jugerez les plus importants en cette période de ralentissement économique. Beaucoup de ces données se trouvent déjà là; vous pouvez simplement accélérer le rythme auquel elles sont publiées. Statistique Canada, bien sûr, a publié ce matin les données sur les bénéficiaires de l'assurance-emploi. Cette information est basée sur les données administratives. On ne verra pas d'autre publication de ce genre avant la fin du mois prochain.
J'aimerais simplement revenir à votre question, en précisant que le gouvernement conservateur avait déclaré explicitement dans ses documents budgétaires — pas dans le budget de 2009, mais dans celui de 2008 — qu'il adopterait, dans un délai d'un an, un plan pour les femmes. Je n'en vois pas grand trace. J'espère vraiment que les membres conservatrices de ce comité et les autres femmes membres du caucus conservateur, s'il y a lieu, pourront influer sur la forme qu'un tel plan pourrait prendre. Elles pourraient également demander des analyses différenciées selon les sexes plus approfondies.
Je comprends que le ministère des Finances produit chaque année une analyse de budget sensible à la sexospécificité. Lorsque je me trouvais à la séance d'information à huis clos sur le budget, cette année, j'ai demandé à la championne de l'analyse comparative entre les sexes, Louise Levonian, que vous avez entendue l'an dernier, si cette analyse avait été effectuée. Elle a répondu que oui, c'était le cas. Je lui ai demandé si les résultats avaient été rendus publics, et elle a répondu par la négative. Je lui ai ensuite interrogée pour savoir selon quels paramètres l'analyse budgétaire comparative entre les sexes avait été réalisée et, bien sûr, c'était encore une fois en fonction des réductions d'impôt. Les réductions d'impôt font partie de la question, mais quelles sont les modifications en matière de dépenses qui aideront les femmes?
Nous vivons une crise. Nous n'allons pas perdre beaucoup d'argent en tergiversant sur ce à quoi ressemblent ces rapports, mais les données dont on dispose devraient être publiées, puisqu'il est du domaine public que ce gouvernement et le précédent ont déclaré que l'analyse comparative entre les sexes appliquée au budget est importante pour faire en sorte que les gouvernements travaillent pour tous les Canadiens, hommes et femmes, dans une mesure égale. On ne devrait rien avoir à cacher.
Pour rester dans l'esprit de votre question, Madame Mathyssen, ce sont simplement des renseignements publics supplémentaires pour que nous puissions évaluer ensemble ce qu'il y a lieu d'améliorer à cette étape. Les maigres ressources publiques seront-elles attribuées d'une manière efficace et non sexiste à un moment où les femmes paieront la note, comme à chaque récession?
Il n'y a plus rien pour boucher les trous; il n'y a plus d'excédent dans le système. Les gens fonctionnent le plus frugalement possible. S'il n'y a plus d'emplois, je ne sais pas exactement ce que les gens devront faire. Donc, utilisons au mieux nos ressources publiques.
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Merci, madame la présidente. Nous nous sommes peut-être légèrement éloignées, au fil de la discussion d'aujourd'hui, de l'objet de notre réunion. Je vais donc essayer de ramener la discussion sur le sujet.
Je représente effectivement l'une des collectivités dont il est question. Ma circonscription compte six nations autochtones. Je réside dans une région où les forêts sont ravagées par le dendroctone du pin. La conjoncture actuelle nous porte donc un coup terrible.
Je suis retournée dans ma circonscription la semaine dernière, et je crois utile de vous rapporter quelques propos tenus par mes électeurs. Sachez tout d'abord que, sans jouer à l'autruche, ils estiment qu'il faut se montrer optimistes. Selon eux, le seul fait d'évoquer de sombres lendemains et la ruine y mène inévitablement. Peut-être serait-il préférable de modérer nos propos. Nous vivons bien entendu des moments difficiles, mais...
À vrai dire, ils désirent que le gouvernement concentre ses ressources sur les perspectives d'emploi. Ils sont très ouverts aux idées nouvelles. L'assurance-emploi est bien sûr importante, mais il y a moyen d'aider nos collectivités à se créer un avenir à long terme, une notion qu'Il ne faut pas perdre de vue.
Les petites entreprises ont effectivement mentionné des allègements fiscaux, en ce sens qu'ils les aideraient à maintenir leurs employés en poste, et la mesure est efficace.
Voici que l'occasion se présente d'agir sur le plan des prestations de maternité et prestations parentales de l'assurance-emploi. D'après ce que je comprends, il est actuellement plutôt facile d'accéder au régime — 91 p. 100 des employés y sont admissibles avec un minimum exigé de 600 heures — et nous allons créer un groupe d'experts chargé d'examiner la situation des travailleurs autonomes canadiens. Quand je pense que j'avais droit à 12 semaines environ lorsque j'ai eu mes enfants, il y a de cela bien des années, j'aimerais vraiment que nous nous attardions quelques instants aux observations du groupe d'experts en matière d'accès aux prestations de maternité et prestations parentales pour les travailleurs autonomes.
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En fait, j'aimerais faire écho à ce que vous disiez, madame McLeod, à propos des dépressions qui engendrent des dépressions. Il est important de ne rien exagérer, de ne pas sombrer dans un noir pessimisme, par crainte d'aggraver la crise de confiance. C'est pourquoi la Crise de 1929 portait le nom de grande dépression. Le manque de confiance de ces années-là a empêché longtemps les forces du marché de fonctionner normalement, et les deux phénomènes s'entretenaient l'un l'autre. Nous y serons peut-être nous-mêmes confrontés. La vérité toutefois, c'est que si le gouvernement ne rétablit pas la confiance, s'il ne rassure pas et s'il ne promet pas de créer des emplois, les gens n'ont plus de points d'appui.
Dans le secteur privé, tout le reste se fait tout petit et tente de survivre. Il n'est plus question d'un repli conjoncturel, mais bien d'un endettement structurel. Les banques, les entreprises et les ménages sont surendettés. Les gens observent ce qui se passe, se disent qu'ils vont tout perdre s'ils perdent leurs emplois et ils se replient sur eux-mêmes. Lorsque le secteur privé tout entier se contracte, y compris les exportations, il n'y a alors plus rien pour combler le vide. La solution? Il faut que quelqu'un puisse montrer avec assurance comment utiliser la crise pour être prêts à profiter de la prochaine période de croissance.
C'est habituellement le travail du gouvernement. Je sais à quel point c'est difficile. Pendant 30 ans, on nous a répété que le problème était la trop grande intervention de l'État et la solution, les marchés. On ne change pas les mentalités du jour au lendemain. Toutefois, les gouvernements ne sont effectivement pas le problème. En ce moment, les gouvernements sont la solution qui permettra de créer les débouchés à long terme dont vous parlez.
Vous avez dit que nous nous sommes éloignées du sujet et qu'il faut parler de l'assurance-emploi. Voici donc ce que j'ai à dire au sujet de l'accès des travailleuses autonomes aux prestations de maternité. Est utile tout ce qui aide davantage les gens à élever leurs enfants sans qu'ils aient à se demander d'où viendra le repas suivant. Vous avez un plan d'adhésion fantastique pour ceux qui peuvent se permettre d'y contribuer.
Cependant, permettez-moi seulement d'ajouter, en tant que féministe et qu'économiste, qu'il vaudrait mieux que les prestations de maternité et les prestations parentales ne fassent pas partie des programmes d'assurance sociale destinés aux chômeurs. Il faut soutenir les parents dans les quelques mois suivant l'adoption ou la naissance de leur enfant. Créez un pareil programme qui protège toutes les personnes ayant un enfant et non seulement celles qui sont admissibles à l'assurance-emploi. À coup sûr, nous voulons que les gens soient en mesure de rester à la maison dans les premiers mois suivant l'arrivée du nouvel enfant. Je me réjouis de toute mesure visant à améliorer le soutien aux jeunes familles, mais celle qui est à l'étude aidera celles qui ont le plus les moyens de se le permettre. Les gens très pauvres ne seront pas en mesure d'y adhérer, et le système ne leur viendra pas vraiment en aide. Pourquoi ne pas le revoir de manière à vraiment aider les jeunes familles?
Sur une tout autre note, je conviens qu'il faut envisager des solutions à long terme en matière d'emploi et non pas d'assurance-emploi. Toutefois, le but de la discussion est de nous demander ce qui peut être fait à propos de l'assurance-emploi. La réponse est d'en libéraliser l'accès.