Bonjour, mesdames et messieurs les membres du comité.
Bienvenue aux témoins. J'aimerais régler rapidement une ou deux petites choses avant que nous n'entendions vos exposés. Quoi qu'il en soit, nous tenons à souhaiter ici aujourd'hui une chaleureuse bienvenue à nos invités, qui représentent l'Institut canadien d'information sur la santé, le Conseil canadien de la santé, la Fondation canadienne de la recherche sur les services de santé et les Instituts de recherche en santé du Canada.
Encore une fois, merci beaucoup de vous joindre à nous. Si vous pouviez patienter cinq minutes environ, cela nous permettrait de liquider une ou deux choses.
Mesdames et messieurs les membres du comité, vous avez devant vous un budget pour payer les frais des témoins — mesdames et messieurs les témoins, veuillez vous boucher les oreilles — et voici ce sur quoi nous devons nous prononcer: que le budget proposé de 111 700 $, pour l'étude sur les ressources humaines en santé, soit adopté et que la présidente présente ledit budget au Sous-comité du budget du Comité de liaison.
Si vous êtes tous d'accord, puis-je avoir le feu vert du comité pour adopter le budget?
Des voix: D'accord.
La présidente: En ce qui concerne le budget principal des dépenses, la période des crédits prendra fin le 23 juin. C'est ainsi que nous ferons comparaître les agences le 12 mai. Nous discuterons de cela lors de la prochaine réunion, je crois.
Nous allons donc maintenant passer aux témoins, et commencerons avec l'Institut canadien d'information sur la santé. Jean-Marie Berthelot est le vice-président, Programmes, et directeur exécutif régional du Québec, et Francine Anne Roy est la directrice de l'Information sur les ressources de santé.
Jean-Marie, auriez-vous l'obligeance de commencer? Merci.
Je tiens, au nom de l'ICIS (Institut canadien d'information sur la santé), à vous remercier de nous avoir invités à participer à cette table ronde sur les ressources humaines en santé.
[Français]
L'ICIS — c'est l'acronyme français — est un organisme autonome sans but lucratif qui fournit de l'information essentielle sur le système de santé du Canada et sur la santé des Canadiens. Fondé en 1994, l'ICIS est financé par les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux. Nous relevons d'un conseil d'administration indépendant qui représente les ministères de la Santé, les régies régionales de la santé, les hôpitaux et les dirigeants du secteur de la santé de tout le pays.
L'ICIS travaille en collaboration avec les intervenants du secteur de la santé pour élaborer et tenir à jour une vaste gamme de bases de données, de mesures et de normes en matière d'information sur la santé. Nous produisons des rapports sur les services de santé, la santé de la population, les dépenses de santé et les ressources humaines de la santé.
S'il ne nous incombe pas de faire des recommandations en matière de politiques, nous espérons tout de même que notre information impartiale vous sera utile.
[Traduction]
Le secteur de la santé emploie directement plus d'un million de personnes au Canada — 6 p. 100 de l'ensemble de la main-d'oeuvre au pays —, dont environ 80 p. 100 de femmes.
Depuis sa fondation, l'ICIS recueille des données détaillées sur les médecins et les infirmières. Dans le cadre de la stratégie pancanadienne relative aux ressources humaines en santé, dont Mme Kathryn McDade de Santé Canada a discuté avec le comité, l'ICIS a créé de nouvelles bases de données qui fournissent de l'information détaillée sur les caractéristiques démographiques et la main-d'oeuvre des ergothérapeutes, des pharmaciens, des physiothérapeutes, des technologistes de laboratoire médical et des technologues en radiation médicale. L'ICIS recueille en outre des données agrégées sur 17 autres groupes de professionnels de la santé, dont les chiropraticiens, les sages-femmes et les psychologues.
Nous avons fait distribuer aux membres copie d'un rapport qui comprend un profil de ces 24 professions. Et étant donné que nos données les plus complètes portent sur les médecins et les infirmières, mon intervention portera surtout sur ces professionnels.
Du point de vue démographique, le nombre de médecins au Canada a augmenté un peu plus rapidement que la population depuis 2003. En 2007, dernière année pour laquelle des données publiées sont disponibles, le Canada comptait près de 64 000 médecins actifs. Le nombre de nouveaux médecins est en croissance depuis 2003.
L'âge moyen des médecins au Canada frôlait les 50 ans en 2007, tandis qu'un médecin sur cinq avait 60 ans ou plus. Quant à leurs habitudes de retraite, elles sont généralement différentes de celles de bien d'autres travailleurs canadiens. En effet, bon nombre d'études ont révélé que les médecins ont tendance à partir progressivement à la retraite plutôt que de cesser d'exercer à un âge déterminé.
Les jeunes médecins ainsi que les femmes médecins de tous âges ont tendance à exercer différemment de leurs collègues du sexe masculin plus âgés et privilégient davantage la conciliation travail-vie personnelle.
Bien que le ratio de médecins par 1 000 habitants du Canada soit plus bas que la moyenne des pays de l'OCDE, son ratio d'infirmières est quant à lui plus élevé, probablement en raison des différences dans les modèles de soins. Les pays d'Europe centrale comptent généralement plus de médecins, alors que le modèle britannique, plus près de celui du Canada, fait davantage appel aux infirmières.
[Français]
Les infirmières réglementées, qui sont plus de 332 000, forment le plus grand groupe de professionnels de la santé réglementés au Canada. Ce groupe a connu une croissance globale de 7,5 p. 100 de 2003 à 2007, période durant laquelle la population canadienne a augmenté d'un peu plus de 4 p. 100. L'âge moyen des infirmières réglementées est de 45 ans, soit environ 5 ans de moins que chez les médecins, et près de 22 p. 100 d'entre elles avaient plus de 55 ans en 2007.
Sur le plan de la migration interprovinciale et intraprovinciale, une étude de l'ICIS portant sur la migration des professionnels de la santé au Canada démontre que plus de 18 p. 100 d'entre eux ont déménagé de 1996 à 2001, ce qui représente un taux similaire à celui de la main-d'oeuvre canadienne en général pendant la même période. Ces données sont basées sur le recensement de 2001.
Toujours selon notre étude, la migration se fait surtout à l'intérieur des provinces. Les professionnels de la santé, tout comme la main-d'oeuvre canadienne en général, ont tendance à se déplacer vers les zones de croissance économique.
Qu'en est-il de la migration vers le Canada et vers l'étranger? Pour une quatrième année de suite, un plus grand nombre de médecins ont déclaré, en 2007, être rentrés au Canada que d'en être partis. Pour ce qui est des professionnels formés à l'étranger, nos données indiquent que la proportion d'infirmières réglementées formées à l'étranger est restée relativement stable depuis 30 ans, soit environ 7 p. 100. Le taux de médecins diplômés à l'étranger était de 23 p. 100 en 2007, ce qui représente une baisse par rapport au taux de 33 p. 100 enregistré à la fin des années 1970. On a noté une baisse graduelle du nombre de médecins formés à l'étranger dans la population de médecins qui travaillent au Canada, depuis cette période.
[Traduction]
À l'ICIS, nous nous efforçons d'améliorer et d'uniformiser l'information sur la santé et les services de santé au Canada et de la rendre disponible; à ce titre, nous apprécions l'intérêt que vous portez à notre travail sur les ressources humaines de la santé.
Je me ferais un plaisir de répondre à vos questions dans la langue officielle de votre choix.
Merci. Thank you.
:
Bonjour. Il me fait grand plaisir d'être ici en tant que représentante du Conseil canadien de la santé.
[Traduction]
Je pense que les membres du comité ont reçu le texte de notre déclaration, alors je vais simplement traiter de certaines des questions qui y sont examinées.
Je travaille comme chercheure à Calgary, et ce depuis huit ans, et examine dans le cadre de mon travail tout le domaine des ressources humaines en santé, l'optimisation de la main-d'oeuvre, les modèles de prestation de services et ainsi de suite. Je vais donc saupoudrer l'exposé du Conseil canadien de la santé de certaines de mes propres observations et expériences tirées de mon travail de recherche.
Nous avons souligné dans notre rapport de juin 2008 que la mise en place d'un nombre suffisant de prestateurs de soins de santé, là où il le faut, constituait un élément central des deux accords de santé. L'un des éléments des accords de 2004 était l'élaboration d'un cadre pancanadien en vue de la planification de ressources humaines en santé qui a été approuvé par tous les membres et toutes les juridictions.
Je pense qu'il est important de souligner qu'il s'agissait d'un cadre de planification des ressources humaines en santé axé sur les besoins qui devait nous éloigner d'un modèle de planification des ressources humaines en santé axé sur l'offre.
M'appuyant sur mes propres observations et expériences, je peux dire que nous n'avons pas beaucoup progressé dans toute cette approche de planification axée sur les besoins, mais, dans le cadre de nos recherches, mon équipe et moi avons certainement fait des efforts en ce sens. L'une des choses qui est devenue très claire est que lorsque vous commencez à vous pencher sur les besoins de la population, et une part importante de notre recherche a été concentrée sur les soins actifs de courte durée, une très forte proportion des jours-lits dans les hôpitaux pour adultes — environ 42 p. 100 à Calgary — correspond à des personnes âgées de plus de 65 ans, dont bon nombre souffrent de maladies chroniques multiples. Or, notre recherche a fait ressortir un énorme écart des savoirs chez les professionnels de la santé offrant des services à cette population relativement à l'évaluation du facteur de risque gérontologique, et ainsi de suite. Il a été démontré que cette connaissance insuffisante des facteurs de risque dans certaines catégories de la population, quelles que soient les maladies dont sont atteints leurs membres, mène en vérité à des complications évitables dans le protocole de soins et une qualité de soins moins qu'optimale. J'estime donc, et c'est mon opinion personnelle, qu'il est très important d'asseoir la planification sur les besoins.
Il nous apparaît par ailleurs clairement que, bien que nous parlions beaucoup d'une pénurie d'infirmières, de médecins et ainsi de suite, les pénuries qui existent peuvent être pires que ce que nous croyons ou moins graves que nous nous l'imaginons, mais il y a beaucoup de preuves, en tout cas dans le domaine des soins infirmiers, qui est l'un des domaines sur lesquels nous avons beaucoup travaillé, que la sous-utilisation de professionnels de la santé est en fait un élément de tout le problème de l'offre. Nous avons dans bien des cas des infirmières autorisées qui font du travail qui pourrait être fait par des infirmières auxiliaires autorisées, des aides-soignants, des concierges, des aides domestiques et d'autres si le modèle de prestation de services était différent de ce qu'il est.
Il nous faut donc beaucoup réfléchir à la façon dont nous structurons la prestation de soins et vérifier si les personnes qui assurent les soins sont véritablement en train d'exercer au maximum de leurs connaissances et compétences. Même si le gros de notre recherche a porté sur les soins actifs, nous en menons à l'heure actuelle dans le contexte de réseaux de soins primaires, de réseaux de médecine familiale, etc. Il existe là encore des preuves d'une sous-utilisation des professionnels de la santé et du potentiel de rectifier le tir en envisageant différemment nombre des questions sur lesquelles nous nous penchons.
Dans le cadre de nos rapports sur « La valorisation de l'argent », nous avons traité de la question de savoir si nous utilisons nos ressources humaines en santé pour offrir des services rentables. Encore une fois, je pourrais vous fournir quantité de preuves que ce n'est à mon avis pas le cas. Mais en nous concentrant réellement sur les besoins des populations, sur les facteurs de risque, sur la gestion des personnes par opposition à la gestion des maladies, il nous serait peut-être possible d'empêcher un grand nombre des réadmissions que nous constatons à répétition, entre autres choses. Sur la base de ma propre expérience, donc, je dirais qu'il y aurait amplement l'occasion de faire les choses très différemment.
Dans nos rapports, nous citons un commentaire que nous avons reçu sur notre site Web « La valorisation de l'argent »: « il semble que les gouvernements et les institutions soient engagés dans une course pour réduire le financement et supprimer des postes en raison des circonstances que nous connaissons aujourd'hui ». Voilà quelque chose que nous avions constaté dans les années 1990. Il y a eu suppression de beaucoup de postes — dont des postes d'infirmière —, et cela a été le fait de décisions myopes, car ces suppressions de postes ont amené les pénuries que nous subissons aujourd'hui.
Je pense qu'avec la nouvelle crise économique à laquelle nous faisons face il nous va falloir être très prudents dans notre réflexion sur d'éventuelles réductions.
Il nous faut par ailleurs faire correspondre les ressources dont nous disposons avec les programmes dont nous parlons. Nous parlons d'améliorer la santé de la population, de mettre davantage l'accent sur la prévention de la maladie, et ainsi de suite. Or, nous utilisons la majorité de nos prestateurs de soins de santé dans le panier de la gestion des maladies, au lieu de songer à ce que les prestateurs de soins de santé pourraient réellement contribuer pour faire avancer le dossier de la promotion de la santé, l'encadrement de la population, et ainsi de suite.
J'estime qu'il est important que nous ayons un plan national qui commence à cerner les réelles pénuries, là où elles se trouvent, et tout le reste, mais nous devrions faire cela à la lumière des orientations politiques. Dans quelle situation voulons-nous nous trouver d'ici 10 ans? Formons-nous le bon nombre et les bonnes catégories de prestateurs de soins pour pouvoir amener le résultat escompté?
À la page trois, nous soulignons le manque de données sur les résultats. Il est important de faire le lien entre le programme de ressources humaines en santé et les genres de résultats que nous souhaitons obtenir. Si nous commençons à discuter réellement d'améliorer la santé, le bien-être, l'autogestion de la santé, et ainsi de suite, cela supposera un menu différent de prestation de soins par rapport à ce qui existe lorsqu'on met principalement l'accent sur la configuration de morbidité ou de mortalité.
Il n'y a aucun doute dans mon esprit qu'il nous faut véritablement discuter de ce que pourraient offrir au Canada des modèles de services médicaux en concertation. Nous discutons beaucoup depuis plusieurs années du concept de soins en équipe, mais le modèle de la pratique collective, en appliquant la définition de Santé Canada, insiste sur l'intervention des patients et des familles dans le processus décisionnel, dans les soins et dans la vérification que les soins qui leur sont offerts correspondent à leurs besoins, objectifs, etc. Nous disposons de beaucoup de preuves que le système est davantage axé sur le prestateur que sur le client ou la famille. Il s'agit là encore d'un volet grâce auquel, munis d'une vision claire de ce vers quoi nous voulons tendre, nous pourrions apporter quantité d'améliorations à la prestation des soins de santé.
Je vais m'arrêter là. Vous pourrez me poser des questions plus tard si vous en avez.
Merci de nous avoir donné l'occasion de comparaître devant vous.
:
Bonjour, madame la présidente.
[Français]
Je vous remercie de l'occasion que vous m'offrez de discuter avec vous cet après-midi. Le problème que le comité entend étudier est très complexe et comporte de nombreuses facettes, et les solutions sont tout aussi complexes. Si c'était aussi simple que d'ajouter plus d'argent ou plus de ressources, nous ne serions pas ici aujourd'hui, j'en suis certaine.
La Fondation canadienne de la recherche sur les services de santé a été créée en 1997, afin de soutenir la recherche sur les services de santé et d'aider les décideurs à faire usage de la recherche courante, pour le plus grand bien des patients. Aujourd'hui, j'aimerais bien partager avec vous quelques histoires qui illustrent bien comment les partenariats et la recherche permettent de trouver des solutions dans le domaine des ressources humaines de la santé et comment, à mon avis, nous pourrions en faire encore plus dans l'intérêt des patients.
[Traduction]
Il y a quelques années, nous nous sommes associés à plusieurs groupes, y compris la Fondation « Change » de l'Association des hôpitaux de l'Ontario, pour commander une recherche visant à répondre à des questions cruciales en ce qui a trait aux ressources humaines en santé. La main-d'oeuvre canadienne était, et est encore, un enjeu important. C'est ce que nous ont déjà dit Jeanne Besner et l'ICIS. En fait, selon l'étude réalisée en 2002 par l'Association des infirmières et infirmiers du Canada, si nous continuons à employer les effectifs infirmiers de la même manière que par le passé, le Canada sera confronté à une sérieuse pénurie d'infirmières autorisées d'ici 2011, et à une pénurie encore plus grave, soit de 113 000, d'ici 2016.
Nous avions au départ décidé d'examiner deux questions. Premièrement, nous voulions connaître l'impact du milieu de travail sur la santé du personnel infirmier et aussi, potentiellement, sur les résultats pour les patients. Deuxièmement, nous voulions connaître les solutions à mettre en oeuvre pour améliorer le milieu du travail infirmier, de même que les résultats pour les patients. Il n'y a pas que le nombre de personnes dans chaque catégorie qui importe; la façon dont elles sont organisées, la nature de leur lieu de travail, la façon dont elles travaillent les unes avec les autres sont autant d'éléments qui déterminent si le nombre est en fait approprié.
Les chercheurs mandatés par la FCRSS et ses partenaires ont donc recensé la documentation dans le domaine et mené des entrevues auprès d'infirmières, de gestionnaires de services de santé, de fonctionnaires et d'éducateurs. Les résultats de cette recherche ont été publiés dans un rapport, Engagement et soins, qui a cerné des problèmes qui étaient connus, et dont vous allez sans doute beaucoup entendre parler encore. Vous avez entendu d'autres témoins cet après-midi en faire état: stress au travail, sécurité d'emploi, soutien des gestionnaires et des collègues, sécurité au travail. Jeanne Besner a mentionné les décisions difficiles et les mauvaises décisions prises lors de la dernière période de contraction de l'économie canadienne et du financement public. Les infirmières en ont tout particulièrement souffert, nombre d'entre elles se voyant reléguées à des postes à temps partiel, avec des avantages sociaux réduits. L'ambiance au travail n'était guère porteuse.
En même temps, les chercheurs ont découvert à y regarder de plus près qu'il existait déjà quantité de solutions ingénieuses, tant au sein des systèmes de santé canadiens qu'à l'étranger, des innovations locales méritant qu'on en parle beaucoup plus largement. Par exemple, il y avait des hôpitaux-aimants, comme on les a appelés, des hôpitaux jouissant d'une excellente réputation en tant que milieu de travail auprès du personnel infirmier, avec un personnel infirmier stable et au taux de satisfaction professionnelle élevé, pouvant servir de modèle ailleurs.
Le rapport citait également l'exemple du ministère de la Santé de la Colombie-Britannique qui a, en 2001, lancé un programme visant à soulager les infirmières-chefs d'une proportion de 20 à 30 p. 100 des soins aux patients en échange de services de mentorat auprès des jeunes infirmières sans expérience. Des solutions novatrices de ce genre revêtent beaucoup d'importance non seulement pour les infirmières, mais également pour les patients, car la recherche nous montre que le niveau de satisfaction au travail chez le personnel infirmier est l'un des plus importants déterminants du niveau de satisfaction d'ensemble des patients à l'égard du système de soins de santé. S'il vous est arrivé de passer un peu de temps dans un hôpital, vous savez que c'est le personnel infirmier qui est toujours à la tâche, qui fait le travail.
Il est également prouvé — et cela est quelque peu inquiétant si vous êtes un patient — que de bonnes relations au sein des équipes de travail ont des effets positifs sur les patients et même sur les taux de mortalité. Si une équipe ronchonne est attroupée autour de votre lit, vous devriez vraisemblablement vous inquiétez, car il a été prouvé que les résultats pour les patients sont meilleurs lorsqu'il y a une bonne collaboration parmi les infirmières et entre le personnel infirmier et les médecins.
Le centre des sciences de la santé de Hamilton a réussi à implanter le concept novateur d'équipes de ressources infirmières, qui sont envoyées en renfort au fur et à mesure que différentes unités dans l'hôpital deviennent débordées. Il y a donc une équipe disponible pour aider lorsque la situation devient aigüe dans un secteur ou qu'un service manque de personnel.
Cela peut sembler intervenir à un niveau très micro, mais il est un fait que les changements dans les soins de santé surviennent à un niveau très micro, entre les personnes qui offrent les soins et les patients.
[Français]
J'ai un autre exemple très intéressant, celui de l'Agence de la santé et des services sociaux de la Montérégie. Cette agence utilise la recherche pour comprendre les besoins de sa clientèle et modifier la prestation des services aux patients. Ainsi, l'agence a relevé 15 problèmes de santé et sociaux importants comme déterminants de l'offre de services. Elle a commencé par traiter les problèmes de santé et a organisé ses services autour de ces problèmes.
Elle a ensuite créé des équipes interdisciplinaires pour chacun des problèmes. Ces équipes ont ainsi défini des continuums de services destinés à prévenir les problèmes, à les traiter et à offrir du soutien aux populations à risque. Cette approche cible les besoins en santé et en services sociaux de populations précises et met à contribution une grande variété de professionnels et de services de santé.
Le résultat est une organisation fortement axée sur la santé publique et déterminée à utiliser les données issues de la recherche comme assise de toutes les décisions administratives ou cliniques.
[Traduction]
Ces innovations sont parvenues à nos oreilles par le truchement des programmes de la Fondation ainsi que des partenariats que nous avons établis. La recherche portant sur les soins infirmiers et les infirmières que j'ai mentionnée a été financée dans le cadre d'un programme de fonds de recherche en sciences infirmières de 10 ans, qui prend fin cette année.
J'ai mentionné la région de la Montérégie. Les dirigeants dans cette région sanitaire au Québec participent à divers programmes. C'est le cas de neuf hauts dirigeants et du PDG. Cette région compte également des boursiers de notre programme de formation en utilisation de la recherche pour les cadres qui exercent en santé. Ce programme est lui aussi un programme de 10 ans, financé par Santé Canada, et il a pour but de développer la capacité et le leadership afin d'optimiser l'utilisation des données issues de la recherche dans la gestion des soins de santé au Canada.
Ces histoires devraient servir de source d'encouragement, mais devraient également nous porter à réfléchir. De telles initiatives réussies devraient être monnaie courante à l'intérieur du système de soins de santé canadien. Malheureusement, ce n'est pas le cas. En tant que nation, nous devons consacrer beaucoup plus de ressources au soutien d'initiatives qui sont bénéfiques non seulement pour les professionnels de la santé, mais également, et ce qui est plus important, pour les patients.
Comme nous le savons, les chiffres montrent que nous dépensons de plus en plus pour les soins de santé et, pourtant, notre investissement est vraiment minime lorsqu'il s'agit de mener des études sur l'organisation, la gestion et la prestation des services et d'en partager les résultats. Selon les estimations de l'Institut canadien d'information sur la santé, nous avons dépensé, en 2008, 172 milliards de dollars au chapitre des services de santé. En comparaison, le budget de la Fondation canadienne de la recherche sur les services de santé, combiné au financement de la recherche sur les services de santé des Instituts de recherche en santé au Canada, totalise moins de 50 millions de dollars. Le montant que nous consacrons à la réflexion et à l'examen de la prestation concrète de services de soins de santé se chiffre à environ 50 millions de dollars sur un budget total d'environ 172 milliards de dollars. Si vous vous demandez dans quel intervalle nous pourrons apporter les améliorations pratiques qui sont nécessaires en vue de disposer d'un système de soins de santé novateur à financement public, alors il nous faudra revoir encore ces chiffres.
Il nous faudra également consacrer beaucoup plus de temps et d'énergie à diffuser les histoires des innovations réussies, non seulement auprès des professionnels de la santé, mais également auprès des responsables des politiques, des politiciens et du grand public. Chacun a un rôle à jouer pour faire avancer l'innovation au niveau du système de santé, car nous savons que ce n'est qu'ainsi que nous pourrons avoir un plus solide système de soins de santé pour tous les Canadiens.
Merci.
:
Merci, madame la présidente.
[Traduction]
Mesdames et messieurs les députés, je suis heureux d'avoir ainsi l'occasion de vous livrer la perspective des Instituts de recherche en santé du Canada dans le cadre de votre étude sur les ressources humaines en santé.
Les IRSC sont l'organisme fédéral responsable du financement de la recherche et de la formation en santé au Canada. Notre mandat, tel qu'énoncé dans notre loi habilitante, est d'« exceller, selon les normes internationales reconnues d'excellence scientifique, dans la création de nouvelles connaissances et leur application en vue d'améliorer la santé de la population canadienne, d'offrir de meilleurs produits et services de santé et de renforcer le système de santé au Canada ».
Les IRSC financent près de 12 000 chercheurs et stagiaires dans le pays. Ceux-ci doivent être considérés comme faisant partie intégrante et essentielle de la main-d'oeuvre canadienne en santé.
[Français]
Aux Instituts de recherche en santé du Canada, nous sommes convaincus que la recherche est la pierre angulaire du mieux-être de notre population et d'un système de santé efficace, adapté aux besoins et ancré sur des bases scientifiques solides.
[Traduction]
Vos investissements dans la recherche en santé contribuent à l'amélioration de la santé des Canadiens. Permettez-moi de vous donner deux exemples.
Au Canada, le taux de mortalité après infarctus a baissé de près de moitié au cours de la dernière décennie, grâce à des innovations en matière de traitement et à des améliorations apportées aux systèmes de soins de santé en vue de livrer des soins en temps opportun. Pour vous citer un autre exemple, lors de la crise du SRAS en 2003, les IRSC ont mobilisé une équipe de 58 chercheurs canadiens en vue de séquencer le génome du virus responsable du SRAS, et leurs études ont débouché sur des résultats en matière de diagnostic, de traitement et de vaccination.
Ces exemples — et il y en a quantité d'autres — dépendent de la création de connaissances scientifiques de base et de l'application réussie de ces connaissances en milieu clinique. Les deux aspects sont essentiels à l'amélioration de la santé. Il nous faut disposer de la capacité non seulement de faire la recherche, mais également d'en traduire les résultats en de meilleurs soins et en un système de soins de santé durable, comme vient de nous en entretenir Mme O'Neil.
[Français]
Ceci m'amène à la question des ressources humaines, qui vous préoccupe aujourd'hui. Les chercheurs en santé, qu'ils soient scientifiques ou professionnels de la santé, doivent impérativement être pris en compte dans ce décompte. Et force est de reconnaître que cela n'a pas toujours été le cas jusqu'ici.
Qui sont-ils, ces chercheurs en santé? Ce sont d'abord des scientifiques, détenteurs d'un Ph. D. et leurs étudiants, doctorants ou post-doctorants. Ceux-ci travaillent aussi bien en recherche fondamentale que dans des secteurs plus appliqués de la recherche en santé: épidémiologie, organisation des systèmes de santé — comme vient de le mentionner Mme O'Neil —, économie de la santé, etc. Et n'allez pas croire que ces chercheurs soient confinés aux tours d'ivoire de l'université: on oublie trop souvent que plus de 80. p. 100 de la recherche en santé au Canada, toutes catégories confondues, s'effectue sur les campus hospitaliers. Il y a ensuite les professionnels de la santé: médecins, infirmières, physiothérapeutes, ergothérapeutes, psychologues. Ceux-ci partagent le plus souvent leur temps entre leurs tâches cliniques et leurs activités de recherche. Ils constituent la clé de voûte du système de transfert de connaissance vers la pratique clinique et l'organisation des soins.
[Traduction]
Mais il vous faut savoir que la capacité de recherche axée sur les patients du Canada est rapidement en train de se détériorer. Dans le cas des médecins — et la situation est pire encore pour les infirmiers et infirmières —, seule une petite proportion d'entre eux consacre un temps considérable à faire de la recherche, et cette proportion ne va pas croissant.
Comme vous pouvez le voir dans ce graphique, il ne s'agit pas d'une carte de la distribution d'armes de destruction massive, mais cela indique le nombre total de médecins au Canada — et nous parlons ici de spécialistes. Ce sont eux qui passent en vérité moins de 5 p. 100 de leur temps à faire de la recherche. Ceux qui comptent véritablement, ceux qui consacrent au moins 20 p. 100 de leur temps à faire de la recherche, sont représentés par la ligne en bleu foncé ici au bas du graphique.
Le temps que les cliniciens consacrent à la recherche n'est pas protégé, et il n'est pas non plus prisé comme il se doit, ni rémunéré en conséquence. Comment pouvons-nous concurrencer les demandes accrues sur le plan des soins face à des ressources humaines insuffisantes? Le temps consacré à la recherche n'entre jamais en ligne de compte dans les décisions de dotation dans le secteur de la santé. L'on est confronté à des difficultés lorsqu'il s'agit d'attirer et de retenir des cliniciens-chercheurs; par ailleurs, une insuffisance de possibilités et des cheminements de carrière incertains découragent ceux qui en ont le talent et le goût. Or, ces cliniciens-chercheurs sont absolument essentiels, non seulement pour améliorer la santé et les soins de santé, mais également pour veiller à ce que les professionnels des soins des santé soient informés sur la toile de fond scientifique nécessaire à une médecine fondée sur des preuves.
Il nous faut asseoir un système de renouveau qui prépare de nouveaux professionnels de la santé à des carrières dans la recherche. Il nous faut veiller à ce que le système valorise comme il se doit ces chercheurs en santé prometteurs, tout en créant un environnement qui soit stimulant sur les plans scientifique et intellectuel. C'est ce que nous nous efforçons de faire aux IRSC. Je suis fermement convaincu qu'en tant qu'organisation il nous faut consacrer davantage de temps et de ressources à la recherche axée sur les patients.
Au fil des années à venir, les IRSC seront le fer de lance d'une nouvelle stratégie de recherche axée sur les patients en vue de renforcer la culture de soins fondée sur la connaissance à tous les niveaux dans le cadre du système de soins de santé.
[Français]
Notre objectif est non seulement de développer d'importantes ressources humaines dans ce secteur, mais aussi de mieux exploiter notre système universel de soins. Sachons utiliser — et encore une fois, je fais écho aux propos de Mme O'Neil — les ressources que nous offre ce système: banques de données, dossiers médicaux bientôt informatisés, on l'espère, pour assurer un meilleur suivi des malades et améliorer la viabilité et les coûts du système lui-même. Nous avons là une occasion unique de développer une niche d'excellence à l'échelle mondiale, ce qui nous permettra non seulement de mieux servir notre collectivité, mais aussi de retenir et de renforcer l'industrie de la santé. Il ne tient qu'à nous de transformer en investissement nos dépenses en santé.
[Traduction]
Si nous faisons en la matière un meilleur effort, le résultat sera une expertise en recherche clinique reconnue à l'échelle mondiale. Nous produirons des études canadiennes faisant oeuvre de pionnier et, ce qui est plus important, nous améliorerons la prestation des soins de santé aux Canadiens.
Pour conclure, les IRSC ont pour responsabilité d'assurer un leadership en matière de recherche en établissant l'environnement et la main-d'oeuvre requis pour renforcer l'infrastructure et la capacité de recherche du Canada. Nous exécuterons notre mandat. Il nous faut votre soutien continu.
Mon message pour vous aujourd'hui est que la recherche en milieu hospitalier n'est pas un luxe, mais constitue plutôt la clé à l'amélioration des soins de santé. L'on ne peut pas faire de planification en matière de ressources humaines en santé sans intégrer la recherche à chaque palier; cela est essentiel à la qualité et aux résultats en matière de soins de santé.
Merci beaucoup.
:
Cela nourrit l'humilité que d'être membre d'un comité et d'une équipe chargée d'ajouter de la valeur à tout le dossier des ressources humaines en santé, et d'avoir le privilège d'entendre des personnes comme vous qui êtes des leaders dans le domaine et qui avez consacré votre carrière à un volet de la question. Celle-ci est fort complexe. Ma première carrière, je l'ai consacrée à améliorer l'état de santé des forêts, ce qui n'a rien à voir avec les soins de santé. Je suis donc pleine d'humilité ici.
Je vais me concentrer sur la question de la prévention, car, à mon sens, c'est un domaine dans lequel nous pourrions faire beaucoup plus que nous ne faisons, et j'estime qu'il y a un déséquilibre entre les fonds consacrés au rétablissement des malades et ceux consacrés à la prévention de problèmes de santé.
J'aimerais vous livrer encore une donnée biographique personnelle. J'ai trois enfants adultes, et je n'ai jamais été à l'hôpital sauf pour rendre visite à quelqu'un, alors j'ai la grande chance d'être très en santé. D'après mon expérience et ma façon de penser, la clé réside dans la prévention, et c'est là-dessus que j'aimerais me concentrer.
En ce qui concerne les commentaires qui ont été faits au sujet de la recherche, quelqu'un pourrait-il me dire s'il se fait, à son avis, suffisamment de recherche sur les professionnels en soins de santé complémentaires et en médecine parallèle, comme les naturothérapeutes, ainsi que sur les soins qu'ils offrent et les modalités qu'ils emploient?
:
Merci beaucoup, madame la présidente.
Je remercie également les témoins d'être parmi nous cet après-midi. Je vais revenir sur quelques points de vos présentations.
Madame Besner, vous nous avez dit qu'à votre avis, il y avait une mauvaise utilisation des ressources, que les infirmières devraient avoir plus de responsabilités et qu'il faudrait modifier les pratiques de façon à les adapter davantage au fait que les patients veulent maintenant être plus impliqués dans le processus des soins qu'ils reçoivent.
Madame O'Neil, vous nous avez dit que l'environnement de travail des infirmières devrait être revu pour qu'elles soient plus satisfaites de leur travail. Vous avez mentionné le stress et le fait que les relations avec les supérieurs étaient parfois difficiles.
Vous affirmez tout cela devant un comité fédéral de la santé. Mais ne trouvez-vous pas que vous vous adressez au mauvais forum, puisque les interlocuteurs les plus aptes à apporter des modifications à cet égard se trouvent dans d'autres parlements? D'après ce que je peux voir, vos constats sont fondés sur des études faites avec rigueur, avec sérieux, suivant certains modèles scientifiques de recherche. Avez-vous fait part de ces constats à ces interlocuteurs qui, selon moi, sont plus appropriés?
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Merci beaucoup pour votre question. Nous sommes au comité parce que nous y avons été invités, et non pour faire du lobby concernant les constatations de nos recherches. J'ai mentionné qu'on avait travaillé avec l'Ontario Hospital Association et qu'on était très impliqués avec le ministère de la Santé de la Colombie-Britannique.
C'est vrai qu'au Canada, on a souvent peur de faire des comparaisons entre les provinces. C'est ce que l'ICIS fait, mais cela rend tout le monde très nerveux. Néanmoins, c'est ce dont on a besoin. Les Canadiens ont besoin de savoir comment cela se passerait s'ils étaient atteints d'un certain type de cancer, selon qu'ils habitent en Ontario, à Montréal ou en Alberta. Les provinces ne sont pas tellement intéressées à se comparer entre elles. Pourtant, en matière d'innovation, on sait que l'OCDE et les pays n'ont pas de problème à se comparer entre eux.
Si on veut avancer, on doit vraiment savoir ce qui se passe. Vous avez raison de dire qu'au Canada, il y a 13 systèmes de santé différents. Comme Mme Besner l'a dit, il faudrait beaucoup de temps pour changer les choses. On doit quand même faire des changements dans chaque système de santé. Pour cette raison, la recherche est très importante, car elle permet de comparer les différents systèmes.
Je ne sais pas si les Canadiens qui habitent en Ontario sont au courant de ce qui se passe dans le domaine des soins primaires au Québec, et vice versa. Comme citoyens, nos impôts paient la moitié des dépenses en soins de santé dans chaque province. Donc, il faut vraiment savoir ce qui se passe ailleurs et si on a le système de santé dont on a besoin.
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Merci, madame la présidente.
Merci à vous tous d'avoir en vérité donné le coup d'envoi à notre étude, qui requiert votre participation et vos conseils en ce qui concerne les macro-questions qui sont en jeu.
Je pense que vous avez chacun dit, sous une forme ou une autre, que nous sommes tout à fait aux prises avec une crise pour ce qui est des ressources humaines en santé, que l'on parle de pénurie, de sous-utilisation ou de conditions de travail difficiles, ce qui amène, bien sûr, de longues listes d'attente, un manque de confiance à l'égard de notre système de soins de santé et pourrait en fait amener la rupture de notre modèle d'assurance-maladie.
Les études se sont succédé au cours des 20 années depuis que je suis ici. Je pense que le comité doit entendre vos vues sur ce que nous devons recommander, sur ce sur quoi il nous faut nous pencher en premier, afin de nous armer d'une stratégie concrète qui nous mène quelque part.
Premièrement, conviendriez-vous tous qu'il nous faut dans ce dossier une approche nationale qui tienne compte, comme il se doit, du caractère unique du Québec, mais qui assure une coordination, chose qui devait, je pense, ressortir de la rencontre des ministres de 2003-2004? Je pense que c'est ainsi que le Conseil canadien de la santé a vu le jour. Convenez-vous qu'il nous faut ce genre de stratégie? Quels devraient en être les éléments? Comment faire en sorte que cela prenne forme ici, au gouvernement fédéral?
Peut-être que vous pourriez commencer, Jeanne.
Oui, je pense qu'il importe qu'il y ait une vision nationale, bien que je convienne que nous avons au moins 13 administrations intervenant dans le domaine de la santé. Premièrement, nous savons que les professionnels de la santé et les prestateurs de services se déplacent. Ils ne restent pas tous au même endroit. Il est d'ailleurs important de comprendre où ils se trouvent.
Je considère qu'il y a quelque chose d'encore plus profond, en un sens. Vous avez exprimé votre frustration face aux nombreuses discussions portant sur ce qui va être fait et sur la manière d'innover dans le cadre d'un système de soins de santé à financement public de manière à ce que les gens puissent en être fiers. Je pense que l'un des premiers obstacles à surmonter est le fait que les Canadiens pensent disposer du meilleur système de soins de santé au monde. Ce n'est en réalité pas le cas. Nous aimerions que notre système soit le meilleur, mais si nous faisons des comparaisons internationales, nous constatons qu'il y a d'autres systèmes de soins de santé financés par l'État qui font des choses différemment et qui, dans certains cas, les font mieux.
Je pense que le comité a un très important rôle à jouer en disant: nous voulons avoir le meilleur système qui soit, et voici les choses qui feront qu'il sera meilleur. Je pense que l'invitation à soumettre des commentaires sur ce que signifie la valorisation de l'argent, lancée par le Conseil canadien de la santé, est extrêmement importante. Je pense que le fait que l'ICIS continue de publier des statistiques sur la façon dont les choses tournent est également très important, mais il nous faut également reconnaître que dans le cas des gouvernements provinciaux, entreprendre quoi que ce soit dans le domaine de la santé est si toxique sur le plan politique, je pense, que les gens feront une ou deux choses, puis retiendront leur souffle en espérant survivre aux élections suivantes sans trop souffrir d'avoir tenté quoi que ce soit de terriblement novateur. Je pense que cela freine en vérité l'action.
La grosse question, donc, est celle de savoir comment créer au Canada une atmosphère... en reconnaissant, bien sûr, qu'il s'agit d'un domaine qui relève principalement des provinces. Mais n'oubliez pas que nous allons dans cinq ans renégocier le Transfert canadien en matière de santé. C'est un petit montant d'argent qui est versé aux soins de santé, mais cette discussion s'en vient.
La période qui vient serait le moment idéal pour nous concentrer sur ces questions qui touchent le pays tout entier. Même si d'aucuns disent qu'il ne s'agit pas de questions nationales — leur résolution n'appartient pas au seul gouvernement fédéral —, les Canadiens vivent néanmoins des difficultés d'un bout à l'autre du pays. Ils veulent avoir de meilleurs systèmes et ils veulent conserver l'accessibilité dont ils jouissent.
La question est de savoir comment enclencher ce débat. Comment bâtir quelque chose à partir de la question des ressources humaines en santé — en d'autres termes, les fournisseurs? Comme nous le savons, depuis la Commission royale Hall, qui s'est entendue sur un régime de paiement mais qui a convenu de ne pas aborder la question de l'organisation des services, tout le monde a été confronté à la question de savoir comment innover dans l'organisation des services. Comment faire pour avoir un système de paiement qui paye pour plus que les médecins dans les soins de santé primaires, qui couvre à l'occasion des infirmières praticiennes, ou les médecins et les infirmiers et infirmières dans les hôpitaux, et certains des autres professionnels que plusieurs d'entre vous avez mentionnés aujourd'hui?
J'estime que le comité a ici une occasion à saisir. La question est de savoir quelle envergure vous donnez à la question. Examinez-vous les ressources humaines en santé après avoir déterminé que de l'innovation est nécessaire et que le gouvernement fédéral n'en détient pas tous les leviers — ce que tout le monde sait, bien sûr? Comment faire pour poser la question de manière à ce qu'elle débouche sur une discussion utile et qu'elle ne tombe pas dans le piège que l'on voit si souvent au niveau provincial en particulier lorsqu'une chose est tentée? Qu'il s'agisse de la décision Chaoulli au Québec ou de la question d'autoriser davantage de cliniques privées en Colombie-Britannique, dès qu'une question est posée, des camps se forment, et le discours n'est plus très utile, avec des bannières qui disent « Pas de système de soins de santé à deux paliers ici » d'un côté et « Seulement ce que nous avons maintenant » de l'autre.
Il semble que l'on ne veuille jamais prendre le départ. Mais vous avez ici la possibilité de vous adonner à une réflexion plus large autour de cette question.
Je pense que nombre des réponses sont là, et c'est également ce pour quoi les comparaisons internationales peuvent être si utiles, pour voir comment d'autres pays organisent les services, au lieu de ne s'intéresser qu'au nombre de postes qu'ils ont, ou au nombre d'infirmières ou de physiothérapeutes, l'important étant de savoir comment les services sont véritablement organisés et financés.
Je pense que l'une des questions importantes à cerner est celle de la manière dont l'argent transite d'un gouvernement provincial aux hôpitaux et aux régions sanitaires, et qui soit encourage une organisation tendant le plus vers des résultats positifs, soit ne le fait pas. La manière dont l'argent circule entrave-t-elle ou non l'innovation dans le mode d'organisation des services? Cela crée-t-il des obstacles? La situation sera différente dans différents endroits.
Dans le domaine des soins de santé, il est impossible d'échapper à ce niveau de détail si l'on veut comprendre où les leviers véritables de changement se situent. Comment se fait-il qu'au niveau fédéral nous ayons dépensé 800 millions de dollars sur plusieurs années en vue d'une transition dans les soins de santé primaires, alors que lorsque nous regardons autour et nous demandons dans quelle province les soins de santé primaires ont véritablement été réorganisés — et nous savons que les soins de santé primaires sont essentiels si nous voulons faire des gains d'efficience supérieurs à l'avenir —, c'est très difficile à faire. Quels sont les obstacles? Pourquoi la chose est-elle si difficile?
La difficulté, je pense, est que ces choses sont liées entre elles, mais pour avoir des discussions, il faut les démêler et dire « Aha. Si nous voulions faire les choses différemment, alors nous ne voudrions pas établir toutes sortes de règles pour les hôpitaux et la façon dont ils dépensent leur argent. Peut-être que nous souhaiterions leur accorder un budget global, ou peut-être que leur budget devrait faire partie d'une région sanitaire ».
Ces choses semblent si mystérieuses, or, si vous cherchez des moyens de changer les choses et de répondre à la question de savoir pourquoi rien ne se fait, alors il vous faut descendre à ce niveau de détail et ensuite, en un sens, chausser les chaussures d'un ministre de la santé de la province et demander si c'est vraiment ce que vous auriez voulu entreprendre, car chaque fois que vous apportez un changement, cela dérange quelqu'un quelque part. Si vous trouvez qu'il est moins efficient d'avoir un service d'urgence dans un petit hôpital, vous pouvez être certain que le ministre va en entendre parler si vous décidez de faire quelque chose de plus efficient.
Il nous faut continuer d'essayer. Il nous faut sans cesse travailler à ces choses. Le refus d'accepter l'économie politique fondamentale et le désir de continuer de faire les choses de la même manière empêchent en vérité la mise en oeuvre de résultats de recherche en matière d'organisation de services que l'on connaît depuis des années.
Je conviens que cette entrée en matière a été très utile, mais cette question de la poule et de l'oeuf est vraiment troublante quant à savoir si nous allons changer notre façon de faire les choses ou si nous allons décider qu'il nous faut des ratios médecins-patients et des ratios infirmières-patients dans le cadre de l'ancien moule, quels que soient les chiffres de l'OCDE et tout le reste. Si nous décidions véritablement de changer les choses et de travailler en équipe, en quoi les choses seraient-elles différentes?
J'aimerais beaucoup entendre en la matière M. Beaudet. Est-il possible de se tenir à jour dans le domaine de la médecine ou des soins infirmiers s'il ne se fait pas d'enseignement? Le plus important qui nous arrive à tous est qu'un jeunot vienne nous dire « Comment se fait-il que vous faites toujours cela, et pourquoi ne faites-vous pas ceci? »
Si vous rêviez en technicolor de ce que pourraient être des soins en collaboration, véritablement axés sur les patients, qu'il s'agisse de pratiques fondées sur des preuves ou de preuves fondées sur la pratique, à quoi cela ressemblerait-il, et parlerait-on toujours de champs d'activité? Car ce qui se passe au Nunavut est très différent de ce qui se passe dans le centre-ville de Toronto. Je pense que cette nouvelle expression « compétences de base » signifie que si vous faites partie d'une équipe, certaines personnes vont en savoir un petit peu plus sur ceci ou cela ou autre.
Depuis la clinique pour membres cassés de l'Alberta jusqu'à certains des centres de santé communautaires, en passant par certaines des choses qui sont réellement des pratiques exemplaires, devrions-nous travailler en patinant vers l'endroit où nous pensons que la rondelle va se retrouver, ou bien devrions-nous faire le travail qui doit être fait mais en nous concentrant sur le commerce étranger de médicaments, la multiplication des créneaux et l'augmentation de la formation?
Ce que j'aimerais sans doute savoir c'est comment, dans le cadre d'une approche globale aux ressources humaines en santé, vous auriez organisé notre étude si c'était vous qui alliez véritablement rédiger le rapport.
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En ce qui concerne le travail que nous faisons au Conseil canadien de la santé, nous sommes très dépendants à l'égard des provinces, des territoires et du gouvernement fédéral pour une part importante de l'information et des perspectives qu'ils nous livrent, car ils sont actifs sur le terrain et sont responsables de la prestation de la plupart des services.
Pour ce qui est de leur réaction à nos constats et recommandations de temps à autre, il y a moins de suivi, pour être juste envers nous et gentil à leur égard. Cela s'explique en partie du fait qu'ils soient sans cesse en train d'intervenir, que les programmes évoluent, et qu'ils bougent très rapidement.
Une partie du travail que nous faisons est quelque peu rétrospectif: voici ce à quoi vous vous êtes engagés dans le cadre des accords, voici où nous en sommes aujourd'hui, et nous essayons de faire des projections. Il y a en quelque sorte un décalage.
Si je peux utiliser un exemple de situation où les différents paliers sont intervenus ensemble il y a quelques années, c'était le cas des inscriptions en faculté de médecine. Les paliers de gouvernement se sont entendus. Ils ont pris une décision. Rétrospectivement, nous pouvons dire que la décision était peut-être la mauvaise.
Les gouvernements peuvent agir et agissent lorsqu'ils estiment qu'il est dans leur intérêt de le faire, collectivement. Les accords en sont un exemple. Nous croyons que, lorsqu'ils se penchent sur les délais d'attente et d'autres questions, lorsque celles-ci sont considérées comme étant importantes eu égard à l'intérêt public, à l'intérêt public national, alors ils s'accordent.
Ce qu'il nous faut, et ce que nous essayons de faire par le biais de nos processus ici et du travail que font d'autres, c'est dire que la planification des ressources humaines dans le domaine des soins de santé est encore un autre élément devant être défini comme s'inscrivant dans l'intérêt national. Il nous faut cela, sans quoi, d'ici cinq ou 10 ans, le comité va de nouveau poser exactement les mêmes questions.
Nous avons une population vieillissante, et nous connaissons les paramètres en matière de soins qui vont être requis. Si donc nous fixions certains objectifs et concevions les services autour d'eux, nous pourrions alors organiser les besoins en ressources humaines dans ce contexte.
Les ministres de la santé du Canada n'en sont pas là en ce moment. Je pense que ce que peut faire le comité c'est les pointer dans cette direction.
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Merci, madame la présidente.
Je vous pose trois questions et je vous laisse tout le temps qui reste pour y répondre. Je vais m'appuyer sur des propos tenus par Mme O'Neil.
Vous nous disiez tout à l'heure, madame O'Neil, que c'est à l'échelle locale que les améliorations se font, que de meilleures pratiques sont développées, mais qu'il faut trouver des façons de partager les bons coups. J'avais l'impression qu'il existait des publications, pas seulement ici mais des publications internationales qui permettaient de faire cela, qu'il y avait des forums, qu'il y avait des conférences. J'aimerais simplement savoir si ces outils de transmission de l'information sont utiles et s'ils font bien leur travail.
L'autre commentaire que vous faisiez se rapportait à l'étendue de notre étude, qui serait peut-être un peu trop vaste. J'aimerais que vous nous disiez, chacun d'entre vous, si on ne devrait pas restreindre notre étude. Si oui, sur quels aspects devrait-elle porter?
La troisième question, je vais l'adresser plus particulièrement à M. Beaudet. Mme O'Neil nous disait que la recherche était un parent pauvre, donc qu'elle est sous-financée. Êtes-vous du même avis?
Toutes ces questions s'adressent à l'ensemble du panel.
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Je ne peux pas parler de tous les groupes, mais il est certain que lorsque nous demandons à différents professionnels de la santé s'ils estiment posséder des connaissances et des compétences susceptibles de résulter en des résultats pour la santé meilleurs mais que l'on n'y fait pas appel, la majorité d'entre eux répondent par oui.
Je pense que la situation est sans doute pire dans certaines régions par rapport à d'autres. Nous avons surtout étudié jusqu'ici les soins infirmiers. Nous avons interviewé différents professionnels; ce que nous avons relevé dans tous les cas est que l'accent est mis sur les tâches et qu'il y a beaucoup de chevauchement, sur le plan des tâches, entre les différents professionnels de la santé. Le fait d'administrer des médicaments, par exemple, ne relève pas exclusivement des pharmaciens, médecins et infirmières. Les patients eux aussi en donnent, et ainsi de suite, et cette concentration sur les tâches vient donc estomper certaines des particularités sur le plan des connaissances des différents professionnels, et il est ressorti de tout le travail que nous avons fait une certaine ambiguïté quant aux différents rôles.
Pour ce qui est de l'aspect sous-utilisation, je ne peux que parler des soins infirmiers, car c'est sur eux que je me suis concentrée. Nous avons à l'heure actuelle au Canada des infirmières autorisées de niveau baccalauréat. Lorsque nous avons fait ce virage, les choses ont varié selon la province, alors nous ne pouvons pas citer un moment précis, mais l'attente, lorsque nous avons opté pour des programmes de préparation au baccalauréat, était que les infirmières autorisées allaient contribuer davantage sur le plan approche axée sur la population, prévention de la maladie, et ainsi de suite. Or, en faisant une véritable étude de leur pratique, nous avons constaté que les infirmières sont très biomédicalisées, pour employer le terme que nous utilisons. Elles s'occupent beaucoup de gestion médicale — non pas parce qu'elles ne devraient pas s'en occuper, mais c'est surtout à cela qu'elles se consacrent.
Dans le cadre de certains travaux que nous avons effectués, nous avons constaté qu'il est très difficile de distinguer la pratique des infirmières autorisées de celle des infirmières auxiliaires autorisées, du fait de cette concentration sur les tâches. Dans le cadre de certains de nos travaux, nous avons commencé à voir qu'une partie de la raison pour laquelle les infirmières autorisées ne font pas ce qu'elles pourraient faire est que nous n'avons pas suffisamment d'infirmières auxiliaires autorisées et d'aides-soignants parmi l'effectif.
C'est alors que l'on est amené à se demander en quoi les choses seraient différentes si nous changions de modèle de prestation de services et avions des modèles de pratique coopérative intégrant les trois. Nous commençons tout juste à explorer ce volet de recherche, mais je peux vous donner un tout petit exemple d'une unité médicale qui a adopté un modèle de pratique coopérative. Pour un quart de jour, par exemple, l'on y est passé de 9,5 équivalents d'infirmières autorisées et de deux aides-soignants à six aides-soignants, cinq infirmières autorisées et quatre infirmières auxiliaires autorisées. L'on commence à changer les choses et l'on obtient des résultats supérieurs, une meilleure satisfaction au travail et quantité d'autres choses. L'exemple de cette seule unité donne une idée du potentiel qui existe pour commencer à travailler différemment, mais fait également ressortir un problème dans le mélange de personnes à notre disposition: il n'est pas possible de mettre en oeuvre ce modèle dans de nombreux endroits du fait qu'il n'y ait pas suffisamment d'infirmières auxiliaires autorisées en Alberta, et ainsi de suite.
Voilà juste un petit exemple initial d'expérimentation avec un nouveau modèle de prestation de services dans le cadre d'une pratique coopérative. Que cela signifie-t-il? Nous avons des ergothérapeutes qui nous disent qu'on leur demande de venir et de faire partie d'une équipe de soins lorsqu'un prestateur a une idée précise de ce que peut faire l'ergothérapeute. Comme l'a dit un ergothérapeute « On me traite comme si j'étais un technicien. On fait appel à moi lorsque quelqu'un souhaite que je fasse passer un test donné, mais si on avait fait appel à moi plus tôt, j'aurais peut-être pu empêcher la décision d'envoyer le patient en soins de longue durée au lieu de le retourner chez lui ».
Voilà juste quelques exemples.
J'aimerais revenir sur la question de la Dre Bennett sur les recommandations de haut niveau que vous feriez si cette étude était la vôtre et si vous vouliez montrer la voie, et je vais également aborder les commentaires qui ont été faits au sujet de la sous-utilisation des ressources et de visions pancanadiennes.
Mon contexte, bien sûr, est la Colombie-Britannique. Nous y faisons appel à des sages-femmes, du fait qu'il n'y ait pas suffisamment d'obstétriciens, mais il s'est en vérité fait de la recherche qui appuie les résultats qu'obtiennent les sages-femmes. Nous tendons également vers des équipes de soins primaires englobant des naturothérapeutes, etc. En Colombie-Britannique, les docteurs en médecine chinoise font partie d'une profession réglementée, avec un collège, et j'aimerais savoir dans combien d'autres provinces c'est le cas. Peut-être que cette situation existe dans moins de la moitié des provinces. Lorsque nous voulons une vision pancanadienne et voulons faire intervenir tous les professionnels en soins de santé, y compris ceux qui exercent en médecine parallèle, nous nous trouvons confrontés à un gros problème.
Pensez-vous qu'il serait avantageux d'avoir une orientation pancanadienne en matière d'équivalences sur les plans de la réglementation et des champs d'activité à l'échelle du pays, de telle sorte que la Nouvelle-Écosse sache ce qu'est un naturothérapeute et que les sages-femmes puissent faire leur travail et jouir de droits hospitaliers partout au pays? Pensez-vous que ce soit possible? Pensez-vous que ce serait bénéfique? Dans quelle mesure de telles équivalences en matière de champs d'activité et de réglementation sont-elles importantes pour une vision pancanadienne, ou bien pouvons-nous travailler autour de ce problème?
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Permettez-moi de vous emmener dans une autre direction dont nous n'avons jusqu'ici pas traité.
J'approuve et apprécie tous vos commentaires concernant tout le modèle de prestation de services, l'idée de réfléchir à l'extérieur de la boîte, les approches multidisciplinaires, les pratiques de médecine holistique, etc., etc., etc.
Le fait est que nous sommes aujourd'hui au Canada confrontés à une très sérieuse crise. Les Canadiens essaient désespérément d'obtenir de nous des réponses et ils comptent sur le Parlement. Nous avons une stratégie de ressources humaines en santé qui vient tout juste d'être renouvelée, mais qui, selon l'analyse des cinq dernières années, n'a pas livré grand-chose. Quels conseils pourriez-vous donc donner aujourd'hui au gouvernement fédéral et au ministre de la santé en vue de renforcer cette supposée stratégie nationale de ressources humaines en santé? La stratégie est dotée d'argent, en ce sens que des fonds ont été puisés pour elle dans le transfert en vue de traiter de questions liées aux ressources humaines en santé. Que pourrait-on faire au moins à court terme sur ce front?
Deuxièmement, entrevoyez-vous un rôle fédéral dans le court terme relativement à certaines des pénuries? Par exemple, par le passé, c'est le gouvernement fédéral qui construisait les collèges pour les médecins. Ces jours-ci, tout le monde s'en lave plus ou moins les mains en disant ce n'est pas de notre faute, c'est aux provinces de faire quelque chose. Si nous n'obtenons pas une certaine coordination au niveau fédéral, le tout va s'effondrer avant même que nous ayons l'occasion de mettre en place toutes ces choses dont nous parlons depuis 30 ans. J'aimerais donc, je suppose, entendre certaines recommandations à court terme, ainsi que des suggestions visant la résolution de certains de ces problèmes.
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Premièrement, je suis absolument fascinée par le comité. J'aurais peut-être dû choisir celui-ci.
Merci beaucoup d'être venus. Mes antécédents sont dans l'enseignement en entrepreneurship, mais il se trouve que j'ai travaillé dans un collège qui offrait deux années d'études en soins infirmiers, pour ensuite passer à quatre. Un grand nombre des étudiants venaient de l'étranger. Nombre d'entre eux étaient des immigrants. J'ai un certain nombre de questions portant là-dessus, surtout en ce qui concerne les sciences infirmières. Du fait que je vienne de la Colombie-Britannique, je ne peux qu'utiliser des modèles britanno-colombiens dans mes commentaires et questions.
Premièrement, en ce qui concerne l'enseignement infirmier, nous avons entendu dire qu'il y a une pénurie d'infirmières, mais j'ai également entendu qu'il y a une pénurie d'infirmières enseignantes. Il pourrait y avoir à cela des raisons très complexes, et j'ignore si vous vous êtes penchés sur cette question. Très souvent, le financement est un aspect, mais il y a également une insuffisance d'infirmières désireuses de travailler dans le milieu universitaire, où elles formeraient des infirmières mais feraient également de la recherche. Nous avons cette ressource, un bassin de personnes possédant réellement l'expérience. J'ignore si votre étude s'est intéressée à la question des ressources en enseignement infirmier et au modèle qui pourrait être utilisé afin de mettre à profit ces riches ressources. Voilà ma première question.
La deuxième question concerne les professionnels de la santé formés à l'étranger. Il est vrai que nous perdons certains de nos médecins en faveur de pays étrangers, ceux-ci offrant de meilleures conditions de travail et ainsi de suite, mais en même temps, nous enregistrons un afflux de personnes qui possèdent déjà la formation et auxquelles il ne faut que la reconnaissance de leurs titres étrangers et de la formation supplémentaire. Revenant encore au modèle britanno-colombien, plusieurs collèges qui sont depuis passés au rang d'université offrent des programmes spéciaux d'un an aux infirmières de formation étrangère titulaires d'un diplôme. Ces institutions les préparent en leur assurant une expérience pratique dans la province et les compétences linguistiques nécessaires pour passer l'examen d'infirmière autorisée. Est-on jamais intervenu à ce niveau-là? Madame Besner, dans vos études au sujet des sciences infirmières, j'ignore si cela a été envisagé en tant que solution possible aux pénuries.
Ma troisième question concerne la mobilité. Je conviens à 100 p. 100 pour dire que le mot « pénurie » est un terme relatif. Même à l'intérieur d'une même province, il peut y avoir une pénurie de médecins ou d'infirmières dans le Nord, alors qu'ailleurs des infirmières ou d'autres professionnels sanitaires attendent toujours des emplois. Il y a donc également une question de distribution. Je ne sais pas si vous vous êtes penchés là-dessus dans le cadre de vos travaux de recherche.
J'ai des tonnes de questions, car je suis nouvelle au comité. J'ignore si vous allez revenir nous voir, mais je tenais à vous poser ces questions.
Merci.