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HUMA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées


NUMÉRO 043 
l
2e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 9 juin 2009

[Enregistrement électronique]

(1115)

[Français]

    Bienvenue à la 43e séance du Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et des la condition des personnes handicapées. Nous sommes le mardi 9 juin.
    Tout d'abord, je voudrais accueillir nos témoins. Nous n'avons pas les cartes pour vous, mais on est en train de les fabriquer. Vous allez donc recevoir des cartes portant votre nom dans quelques secondes.
    Nous accueillons plusieurs groupes: Fondations communautaires du Canada, Canada's Association for the Fifty-Plus, ainsi que Citizens for Public Justice.

[Traduction]

     En attendant d'avoir les cartes, je demanderais à Mme Monica Patten, présidente-directrice générale, et à Mme Sara Lyons, conseillère en chef, de commencer.
    Nous poursuivrons après avoir entendu vos remarques préliminaires. Je ne voudrais pas que l'on perde du temps inutilement.
    Je m'appelle Monica Patten, présidente-directrice générale des Fondations communautaires du Canada, et voici ma collègue, Sara Lyons.
    Madame Patten, allez-vous parler la première?
    Je vais commencer, puis je vais céder la parole à Mme Lyons.
    Votre groupe dispose de 10 minutes, que vous pouvez partager à votre guise. Ce sera ensuite au tour de I'Association canadienne des plus de 50 ans, qui pourra aussi utiliser les 10 minutes qui lui sont allouées comme elle l'entend. Il en ira de même pour le groupe Citizens for Public Justice, qui occupera les 10 dernières minutes. Nous entamerons par la suite la première ronde de questions.
    Madame Patten, la parole est à vous.
    Merci beaucoup. Merci de nous avoir invitées à nous joindre à vous aujourd'hui, madame la présidente.
    Je vais d'abord vous parler brièvement des Fondations communautaires du Canada, avant de toucher très rapidement au rôle des organismes caritatifs privés dans la lutte contre la pauvreté.
    Sachez premièrement que les fondations communautaires sont des organismes subventionnaires locaux. C'est ainsi que nous les désignons. À l'échelle du pays, 165 fondations locales accordent au total entre 175 et 200 millions de dollars en subventions chaque année. Évidemment, les montants versés dépendent énormément de l'économie et du rendement de nos investissements.
    Les fondations communautaires connaissent très bien leurs collectivités. Elles comprennent la complexité des enjeux communautaires, une question à laquelle nous reviendrons dans un moment, et elles sont conscientes qu'aucun secteur ne peut s'attaquer seul à des problèmes aussi complexes, tenaces et bien ancrés que la pauvreté (pas plus le gouvernement que le secteur privé, le secteur à but non lucratif ou le secteur caritatif). Et nous savons que le secteur caritatif a un rôle à jouer dans la résolution des problèmes systématiques dont il a été question.
    Si les fondations communautaires arrivent à faire ce qu'elles font, c'est parce qu'elles connaissent leurs collectivités comme le fond de leur poche. Pour bien faire notre travail, il nous est en effet absolument essentiel de connaître les réseaux, les enjeux, les atouts et les ressources communautaires. Nous pouvons compter sur des conseils d'administrations bénévoles hautement responsables. Du personnel et des bénévoles des plus compétents travaillent également au sein de nos organisations. Nous croyons donc que nous sommes en excellente position pour observer et comprendre les nouvelles tendances, ainsi que les causes sous-jacentes à ces tendances et à ces enjeux, et pour savoir comment traiter avec les différents intervenants.
    Je prierais maintenant ma collègue, Sara, d'utiliser le peu de temps qu'il nous reste pour vous décrire plus en détail quelques-unes des mesures prises par les fondations locales pour lutter contre la pauvreté.
    Plusieurs de nos membres, des fondations communautaires d'un peu partout au pays, mais surtout de Winnipeg et de Hamilton, ont lancé des initiatives stratégiques pluriannuelles à grande échelle en vue de réduire la pauvreté dans leurs collectivités. Les Fondations communautaires du Canada, qui se sont donné le mandat d'aider les autres fondations communautaires du pays à entreprendre des initiatives semblables, ont réuni les leçons apprises par leurs pairs dans une trousse Web, si on peut l'appeler ainsi, qui s'appelle « Lutter contre les causes de la pauvreté ». Cet outil s'adresse aux fondations communautaires et autres bailleurs de fonds au Canada. Nous ferons circuler de l'information à ce sujet.
    Récemment, le gouvernement du Nouveau-Brunswick a invité les fondations communautaires de la province à contribuer à l'élaboration d'une initiative provinciale et à jouer un rôle de premier plan dans la mise en oeuvre de cette stratégie. Bref, la lutte contre la pauvreté est au coeur de nos principes philanthropiques et de justice sociale depuis plusieurs années, et c'est sur ce travail que reposent nos commentaires d'aujourd'hui.
    Le comité veut savoir comment le gouvernement fédéral peut contribuer à réduire la pauvreté à l'échelle du pays, et il souhaite qu'on lui propose des solutions innovatrices pour remédier à ce grave problème. Les fondations communautaires, et il est important de le souligner, ne sont pas des organisations de première ligne et ne travaillent pas directement à des services ou à des programmes de réduction de la pauvreté. Nous avons toutefois une vue d'ensemble unique des tendances et des priorités au sein des collectivités, et des approches globales adoptées pour opérer un changement véritable. Il faut certes repenser certains programmes nationaux, comme celui de l'assurance-emploi, et accorder plus de ressources aux communautés autochtones, mais le gouvernement fédéral doit aussi s'engager dans des initiatives communautaires. C'est ce dont nous allons vous parler plus en détail.
    Plusieurs évidences s'imposent aux fondations communautaires dans le cadre de leur travail. Le problème de la pauvreté est complexe. C'est un problème à long terme qui requiert des solutions à long terme. Il faut du temps pour apprendre à connaître les différents intervenants — tant les professionnels ou les experts en la matière que les personnes vivant dans la pauvreté —, établir un climat de confiance, être à l'affût des initiatives entreprises par les organisations et les particuliers, et créer des processus transparents, mais il est essentiel de le faire.
    Nous devons par ailleurs offrir des solutions à court terme tandis que nous nous engageons à explorer et à corriger les difficultés systémiques profondes. Intégrer les programmes et les initiatives dans les établissements locaux en place, comme les bibliothèques, les centres communautaires et les écoles, favorise grandement la viabilité. Il ne suffit pas d'injecter de l'argent pour combattre la pauvreté. Il faut cerner les forces de chacun et en tirer parti, apprécier et respecter les citoyens, adhérer à une politique publique qui favorise la justice et l'équité, et nourrir une culture d'espoir; et ce ne sont là que quelques-uns des éléments nécessaires pour remédier au problème de la pauvreté.
    Pour s'attaquer à la pauvreté, il faut intervenir sur différents fronts simultanément, et les secteurs non gouvernemental et caritatif ont un rôle distinct à jouer dans cette entreprise. Il est par ailleurs primordial de veiller à la complémentarité des différentes composantes.
    On exerce une pression constante pour qu'on investisse dans les programmes, particulièrement dans ceux qui sont axés sur la réduction de la pauvreté, mais il est tout aussi important de se concentrer sur la coordination des efforts déployés et de tenter de déterminer quelles sont les solutions systémiques pour que nous puissions réellement changer la situation des personnes vivant dans la pauvreté, plutôt que de se contenter d'alléger leur fardeau. Nous devons résister à l'envie, sans toutefois l'ignorer, de prendre des mesures d'atténuation à court terme.
    Certaines portions de notre population sont plus touchées par la pauvreté. Les membres du comité le savent sans doute. On parle des femmes, des personnes âgées, des nouveaux arrivants, etc.
    Finalement, les fondations communautaires s'appliquent activement à recueillir des données et à acquérir de nouvelles connaissances, des atouts stratégiques. Des données exhaustives sur la pauvreté au sein des collectivités peuvent orienter le choix d'une approche, l'établissement d'idées communes et la mesure des progrès réalisés. Le gouvernement fédéral, celui qui recueille les données nationales, a un rôle clé à jouer en s'assurant que les collectivités ont accès à ces informations gratuitement ou à peu de frais, et de façon opportune.
(1120)
    Nous avons indiqué plus tôt que les fondations communautaires ne sont pas des fournisseurs de services de première ligne. C'est vrai, mais nous pouvons néanmoins compter sur de très importants réseaux et une perspective unique, comme Monica le mentionnait, pour comprendre ce qui se passe dans les collectivités. La Fondation communautaire de Hamilton, co-hôte de la table ronde de Hamilton sur la réduction de la pauvreté, en est un exemple probant. Elle réunit des dirigeants d'entreprise, des représentants gouvernementaux, des intervenants du secteur à but non lucratif, des éducateurs, des personnes vivant dans la pauvreté, des philanthropes et d'autres leaders locaux, dans le but de « faire de Hamilton le meilleur endroit pour élever des enfants ».
    C'est grâce à ce partenariat, la table ronde, qu'ils ont établi des solutions communautaires, tout en tenant compte des politiques et systèmes globaux. À l'issue d'un long processus de consultation et de collaboration visant à élaborer un cadre de changement, la table ronde a cerné cinq secteurs critiques d'investissement, dont la plupart solliciteraient la contribution du gouvernement fédéral. Ces secteurs sont: la prestation d'une éducation préscolaire de qualité, y compris des centres d'activité dans les quartiers défavorisés; l'acquisition de compétences grâce à l'éducation, à l'activité et à la récréation, à l'intérieur et à l'extérieur des écoles; le développement ciblé des aptitudes, surtout axé sur les jeunes; l'emploi, l'accent étant mis sur la création de possibilités d'emploi valables pour les nouveaux immigrants; l'accumulation d'avoirs et la création de richesses, en aidant les personnes à faible revenu à faire des épargnes et à accumuler des avoirs qui pourraient leur permettre de grimper les échelons en matière de logement, pour passer du logement social au logement locatif, et peut-être plus tard devenir propriétaires.
    En terminant, je vous rappelle que ce sont là les priorités établies et les mesures prises par une collectivité en particulier grâce à un processus communautaire. Des priorités semblables pourraient être établies dans bien des endroits, et des processus similaires à celui entrepris à Hamilton pourraient être lancés. Les Fondations communautaires du Canada sont prêtes à contribuer à l'élaboration et à la mise en oeuvre de solutions, de même qu'à l'établissement de processus visant à élaborer les solutions en question. Nous nous sommes donnés comme objectif de réduire la pauvreté dans l'ensemble de nos collectivités.
    Merci beaucoup.

[Français]

    Nous passons maintenant à la Canada's Association for the Fifty-Plus, représentée par Mme Eng et Mme Gravel. Qui prendra la parole d'abord?

[Traduction]

    Je m'appelle Susan Eng, et je travaille pour la CARP. Notre organisme portait autrefois le nom d'Association canadienne des individus retraités; cependant, comme beaucoup d'entre nous ne sont pas retraités ou n'ont pas les moyens de prendre leur retraite, nous utilisons maintenant l'acronyme seulement. Il s'agit d'une organisation nationale à but non lucratif et non partisane qui compte 330 000 membres et 23 sections locales à l'échelle du pays. Notre principale préoccupation est la qualité de vie des Canadiens vieillissants, et la sécurité financière est un de nos trois grands piliers de revendication.
    Je vais surtout vous parler aujourd'hui de la sécurité financière des Canadiens âgés. Le débat entourant la pauvreté est majoritairement axé sur les enfants et leur famille, et nous appuyons et encourageons sans contredit toutes les recommandations visant à améliorer la condition de l'ensemble des Canadiens qui vivent dans la pauvreté.
    Nous tenons toutefois à mettre en lumière une difficulté propre au vieillissement de la population. C'est tout d'abord une question de démographie; la population vieillit. La cohorte des 65 ans ou plus se chiffre aujourd'hui à 4,6 millions de personnes, ou 13,7 p. 100 de la population, selon les données de 2008 de Statistique Canada. On estime que d'ici 2031, 9,1 millions de Canadiens, ou 23 p. 100 de la population, seront âgés de 65 ans ou plus, soit presque le double d'aujourd'hui.
    Nous nous préoccupons aussi des personnes âgées de 55 ans ou plus, et de 45 ans ou plus, parce qu'elles partagent les mêmes inquiétudes à l'aube de leur propre retraite. À l'heure actuelle, on dénombre 8,5 millions de personnes âgées de 55 ans ou plus, ou 25 p. 100 de la population, et on s'attend à ce que ce nombre grimpe à 14 millions d'ici 2031, ou 35 p. 100 de la population. Le groupe des 45 ans ou plus compte 13,8 millions de personnes et représente presque 41 p. 100 de la population canadienne. Si nous suivons les 45 ans ou plus, c'est qu'ils incarnent la dernière vague de la génération du baby-boom, le plus grand groupe démographique de l'heure. D'ici 2031, ils représenteront presque la moitié de la population canadienne, avec quelque 19 millions de personnes. Un nombre impressionnant de personnes sont ainsi considérées comme des « Canadiens âgés ».
    Notre association est affiliée au magazine ZOOMER, autrefois intitulé CARP, qui s'adresse aux baby-boomers.
    Statistique Canada projette que d'ici 2015, les Canadiens âgés de 65 ans ou plus seront plus nombreux que les enfants de moins de 15 ans. Ce vieillissement rapide de la population est attribuable au vieillissement des baby-boomers, comme je l'ai indiqué plus tôt, ainsi qu'aux faibles taux de natalité et à l'évolution de l'espérance de vie. Les projections montrent que le vieillissement de la population, qui a déjà commencé, prendrait de la vitesse à compter de 2011, année à laquelle la première cohorte de la génération du baby-boom, née en 1946, atteindra l'âge de 65 ans. On prévoit que ce vieillissement rapide se poursuivra jusqu'en 2031 au moins, alors que les aînés représenteront entre 23 p. 100 et 25 p. 100 de l'ensemble de la population, presque le double de la cohorte actuelle, qui s'élève à 13 p. 100.
    Pour ce qui est de savoir dans quelle mesure la pauvreté touche les personnes âgées, les données ne sont pas aussi fiables qu'on le voudrait. Honnêtement, le phénomène n'a pas fait l'objet d'études très poussées en ce qui a trait à la cohorte des aînés. Il existe différents moyens pour mesurer la pauvreté. La mesure utilisée le plus souvent est celle du seuil de faible revenu après impôt. Il y en a d'autres, mais les différences sont moins marquées. En 2005, Statistique Canada a estimé l'incidence de la pauvreté par tranche d'âge et par sexe à l'aide de cette mesure. Le taux de pauvreté estimé chez les personnes de 65 ans ou plus était alors de 6,7 p. 100. Si on applique ce pourcentage à la population de 2008, on arrive à un nombre estimé de plus de 300 000 aînés canadiens vivant dans la pauvreté. Si rien n'est fait et si ce pourcentage se maintient jusqu'en 2031, selon les mesures de Statistique Canada, plus de 600 000 personnes âgées vivront alors dans la pauvreté.
    Ce qui est encore plus flagrant, cependant, c'est l'écart entre les hommes et les femmes. Le taux de pauvreté chez les femmes âgées est de 8,6 p. 100, presque le double de celui enregistré chez les hommes âgés, qui est de 4,4 p. 100. Pour les personnes âgées vivant seules, 28 p. 100 des hommes et 38 p. 100 des femmes, presque 40 p. 100 ou la moitié de la cohorte, ont un faible revenu.
(1125)
    Les causes sont connues. Les femmes gagnent de moins bons salaires, ont plus de difficulté à se trouver un emploi, travaillent à la maison plutôt que sur le marché du travail, doivent s'occuper des enfants et, plus tard, doivent souvent prendre soin de parents âgés.
    Des mesures permettent d'évaluer les taux de pauvreté chez les nouveaux arrivants qui sont au pays depuis 20 ans ou moins. Pour les personnes seules, le taux de pauvreté peut atteindre 67 p. 100. Pour les familles, il est de 17,4 p. 100.
    Les tendances sont semblables pour les personnes âgées de moins de 65 ans. Les personnes seules sont beaucoup plus susceptibles de vivre dans la pauvreté que celles qui vivent en couple, et l'écart est parfois très grand.
    Pour les membres des minorités visibles, les écarts sont encore là très marqués. Chez les membres des minorités visibles, 44 p. 100 sont susceptibles de vivre dans la pauvreté, tandis que chez les personnes qui ne font partie des minorités visibles, 31 p. 100 sont susceptibles de vivre dans la pauvreté.
    Quel rôle le gouvernement fédéral doit-il jouer dans la réduction de la pauvreté chez les personnes âgées? J'aimerais me concentrer exclusivement sur notre régime national de revenu de retraite. Le rôle premier du gouvernement fédéral est de s'assurer que l'ensemble de la population dispose d'un revenu de retraite adéquat. Reconnus comme les deux premiers piliers du régime de retraite canadien, la Sécurité de la vieillesse et le Régime de pensions du Canada, combinés au Supplément de revenu garanti, ont permis de réduire de façon notable les taux de pauvreté chez les personnes âgées au cours des 20 dernières années. Une réduction largement attribuable à l'arrivée à maturité du RPC et à la disponibilité du SRG. Ce sont là les deux premiers piliers du régime de retraite, que l'on nomme généralement prestations de pension de l'État.
    Le maximum combiné est d'environ 19 000 $ à l'âge de 65 ans, mais comme les bénéficiaires du RPC/RRQ reçoivent en moyenne la moitié du montant maximal, le retraité moyen pourrait recevoir 16 000 $ annuellement, s'il compte uniquement sur les prestations de pension de l'État. Quelques 35 p. 100 des Canadiens âgés de 65 ans ou plus profitent actuellement du SRG, qui garantit un revenu annuel minimum d'environ 15 000 $. Telle était la situation en mars 2009. Je n'ai pas les données de 2008 pour les comparer au seuil de faible revenu après impôt, le niveau de pauvreté défini par le gouvernement, qui était établi à 12 000 $ en 2008 pour une personne seule vivant dans une communauté rurale, et à 18 000 $ pour une personne vivant dans une ville de 500 000 habitants ou plus. Aucun seuil de faible revenu n'a été établi pour d'autres grands centres urbains, comme Montréal, Vancouver et Toronto; on pourrait soutenir qu'un seuil de faible revenu plus élevé serait justifié pour ces grandes villes, puisque la majorité des personnes âgées à faible revenu vivent dans des centres urbains.
    Même si de tels programmes sont en place, la pauvreté sévit encore chez les personnes âgées canadiennes. Le niveau de pauvreté est encore inacceptable, non seulement à l'égard des chiffres en tant que tels, mais aussi en raison des grandes répercussions que cette situation a sur la vie des aînés, surtout parce que très peu d'options s'offrent à eux pour qu'ils puissent améliorer leur condition. Comme l'indique le rapport du Conseil national des aînés sur les faibles revenus chez les personnes âgées, beaucoup d'entre elles vivent avec des revenus fixes et limités, légèrement au-dessus du seuil de faible revenu. Alors même si elles ne vivent pas officiellement dans la pauvreté, il suffirait d'une seule dépense majeure ou de l'augmentation des coûts de la vie pour qu'elles glissent sous le seuil.
    Honnêtement, dans la conjoncture économique actuelle, les gens se préoccupent beaucoup plus de leur avenir, si on peut encore parler d'avenir pour certains, et sont plus conscients qu'ils se retrouveront peut-être un jour dans une situation financière très précaire. Le problème de la pauvreté a ainsi été ramené à l'avant-plan. Alors que le débat était autrefois réservé aux défenseurs de la cause et aux personnes en marge de la société, aujourd'hui, le problème de la pauvreté est devenu l'affaire de tout le monde.
    Donc, pour ce qui est des soutiens au revenu du gouvernement et des prestations de pension de l'État, nous recommanderions que le gouvernement fédéral augmente considérablement les niveaux de la Sécurité de la vieillesse et du Supplément de revenu garanti, de façon à ce que le revenu garanti atteigne à tout le moins un niveau approprié pour les centres urbains, en fonction du seuil de faible revenu, ou les endroits où vivent les personnes âgées.
(1130)
    Il existe plusieurs règles de récupération. Celles-ci ont peu d'impact sur le Trésor public, mais elles font un monde de différence pour les personnes concernées.
    J'ai indiqué que les gens se préoccupaient davantage de leur propre retraite. Et surtout, en ce qui concerne le troisième pilier de notre régime de retraite, c'est-à-dire les régimes privés d'épargne-retraite, on reconnaît aujourd'hui qu'un travailleur canadien sur trois ne disposera que de minces économies quand il arrêtera de travailler. C'est pour remédier à ce problème que la CARP a recommandé la création d'un régime de pension accessible à tous.
    Du point de vue des aînés à faible revenu, cette mesure n'est malheureusement pas aussi pertinente. Toutefois, peu importe si le régime de retraite est là pour prévenir la pauvreté chez les personnes âgées, à moins que la Sécurité de la vieillesse et le Supplément de revenu garanti connaissent une forte augmentation, il faudra prendre des moyens palliatifs dans le cadre de la réforme du troisième pilier.
    Je sais que mon temps est écoulé. Lors de la ronde de questions, quand j'en aurai la chance, je tâcherai de parler du quatrième pilier et du genre de changements sociaux nécessaires, notamment en ce qui a trait aux responsabilités des soignants.
    Merci.
(1135)
    Oui, il est important d'en parler, madame Eng. Je m'intéresse beaucoup à ce dossier.

[Français]

    Je passe maintenant la parole au groupe Citizens for Public Justice, représenté par Mme Karri Munn-Venn.
    Madame Munn-Venn, la parole est à vous.

[Traduction]

    Bonjour.
     Citizens for Public Justice est une organisation nationale dont les membres s'inspirent de leur foi pour favoriser la justice au sein des politiques publiques du Canada. Nous sommes heureux d'avoir l'occasion de venir vous parler du rôle du gouvernement fédéral dans la lutte contre la pauvreté.
    Au nom de Citizens for Public Justice, je tiens d'abord à féliciter le Comité des ressources humaines pour son bon travail. Nous vous offrons nos prières et nos meilleurs vœux dans l'espoir que vos efforts porteront fruit.
    Malgré l'affluence et l'abondance de ressources au Canada, la pauvreté continue à être un problème de taille. Au moins un Canadien sur dix vit actuellement dans la pauvreté, et ce taux n'a à peu près pas changé au cours des 25 dernières années.
    En ce temps de récession, les Canadiens les plus vulnérables sont encore plus à risque. Déjà, selon la mesure du seuil de faible revenu, les personnes qui travaillent à temps plein au salaire minimum vivent dans la pauvreté. Les gens pauvres sont les premiers à perdre leur travail et ils ont plus de difficulté à se trouver un autre emploi. L'aide sociale et l'assurance-emploi ne suffisent pas pour combattre la pauvreté. Tandis que l'économie canadienne continue de s'effondrer, il est évident que les difficultés auxquelles font face les Canadiens les plus démunis vont s'accroître, et davantage de Canadiens sombreront dans la pauvreté.
    Vous lisez un peu vite. Je sais que les traducteurs vont nous faire signe d'une minute à l'autre. Je vous prie de ralentir.
    Merci. Je suis désolée.
    Le 22 mai, nous avons annoncé, en compagnie du cofondateur de la campagne, Canada sans pauvreté, le lancement officiel de la campagne  Dignity for All: The Campaign for a Poverty-free Canada. La campagne Dignity for All s'appuie sur différentes croyances communes. Nous croyons que vivre à l'abri de la pauvreté fait partie des droits de la personne. Nous croyons en l'égalité entre tous. Nous croyons que tout le monde a droit à une sécurité sociale et économique. Nous croyons en une dignité pour tous. Nous croyons également qu'il est temps de mettre un terme à la pauvreté au Canada.

[Français]

    Nous demandons une action concrète et à long terme de la part du gouvernement fédéral pour combattre les causes structurelles de la pauvreté au Canada. Dignité pour toutes et tous a trois objectifs. Nous voulons un plan fédéral pour l'élimination de la pauvreté complémentaire aux plans provinciaux et territoriaux. Nous voulons une loi fédérale contre la pauvreté qui assure un engagement durable du gouvernement fédéral qui garantit son implication et son imputabilité. Nous voulons également un investissement fédéral suffisant dans la sécurité sociale pour tous les Canadiens.

[Traduction]

    La campagne Dignité pour toutes et tous est une initiative collective. Jusque ici, c'est-à-dire depuis deux semaines, nous avons reçu l'appui de plus de 55 organisations et de presque 500 particuliers canadiens. Notre base de soutien s'agrandit. Nous savons qu'en tant que représentants élus, vous avez besoin de l'appui du public pour avancer. L'initiative Dignité pour toutes et tous offre la vague de soutien nécessaire pour faire progresser le dossier politique de l'élimination de la pauvreté.
    Avant de continuer, je tiens à souligner que les députés Tony Martin et Mike Savage, de même que le sénateur Hugh Segal, appuient notre campagne. Nous encourageons tous les membres du Comité des droits de la personne et leurs collègues parlementaires à s'inscrire aujourd'hui au www.dignityforall.ca pour témoigner leur appui à notre campagne. J'ai également des cartes postales que je me ferai un plaisir de vous distribuer plus tard.
    J'aimerais parler brièvement de quelques notions qui sous-tendent cette importante initiative.
    Parlons d'abord de la dignité. La dignité est ce qui caractérise fondamentalement l'être humain. Pour les jeunes membres de notre société, vivre dans la dignité signifie avoir la liberté de profiter de l'enfance. C'est de ne pas avoir à subir les disputes des adultes concernant l'argent, ni à se soucier de savoir si on aura des bottes chaudes et confortables pour l'hiver. Pour un adulte, vivre dans la dignité, c'est d'être capable de subvenir à ses besoins et à ceux de sa famille. C'est d'avoir l'aplomb nécessaire pour affronter les difficultés de la vie. C'est de savoir qu'on ne refusera pas de vous servir. La dignité, c'est de pouvoir dormir au chaud et confortablement la nuit, sans s'inquiéter de sa survie. Pour l'ensemble de la société, jeunes et vieux, vivre dans la dignité signifie de faire partie de la collectivité, d'être fier de ses réalisations et de recevoir le respect que l'on mérite.
    La pauvreté prive les gens de leur dignité. Elle les force à faire des choix inadmissibles, comme choisir d'acheter de la nourriture ou de payer le loyer. Elle se manifeste par l'embarras, le doute et la peur. Et c'est une réalité quotidienne pour beaucoup trop de Canadiens.
    Que pouvons-nous faire? Quand on croit à l'importance d'aimer son prochain et de respecter la dignité d'autrui, on ne peut faire autrement que de vouloir éliminer la pauvreté. Ce faisant, nous sommes fidèles à la vision de Dieu et aux lois du jubilé, tel que le proclame le livre du Deutéronome dans l'Ancien Testament. Les principes du jubilé, qui invitent à la redistribution périodique des moyens de production et qui offrent à tous l'occasion de prendre part à l'économie sur un pied d'égalité, ont toujours leur raison d'être aujourd'hui. Ils sous-entendent qu'il ne suffit pas d'offrir la charité aux pauvres. Il faut plutôt adopter des pratiques et des politiques publiques qui font en sorte que les gens ont les moyens d'occuper un gagne-pain qui leur rapporte un salaire décent. Nous devons veiller à ce que tout le monde ait accès à un revenu et aux ressources nécessaires pour assurer son bien-être, même si un travail rémunéré ne peut pas toujours nous offrir tout ce dont on a besoin.
    La justice publique est le penchant politique des principes d'aimer son prochain, de respecter la création et de contribuer au bien commun, et le gouvernement et les citoyens en sont les premiers responsables. La justice publique veut qu'un des rôles du gouvernement soit de créer des politiques, des programmes et des structures qui permettent de réduire la pauvreté et de redistribuer équitablement les ressources dans la société, de sorte que toutes les couches de la société puissent s'épanouir et suivre leur vocation en contribuant au bien commun.
    Les droits de la personne reposent sur les principes de la dignité. La pauvreté est une condition qui viole ces droits, comme l'énonce la Déclaration universelle des droits de l'homme, contenue dans les conventions internationales sur les droits de la personne. La pauvreté empêche les gens d'accéder aux ressources fondamentales nécessaires au bien-être, notamment des aliments et des vêtements adéquats et suffisants, de même qu'un logement sécuritaire et approprié. La pauvreté est également un important déterminant social de la santé.
    En 2006, le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies a reçu le mandat « de procéder à un examen périodique universel... de la manière dont chaque État s’acquitte de ses obligations et engagements en matière de droits de l’homme ». Comme plusieurs d'entre vous le savent sans doute, le Canada a fait l'objet d'un examen cette année, et le gouvernement canadien présente en fait sa réponse aujourd'hui au Conseil des droits de l'homme, à Genève.
    Parmi les 68 recommandations que le gouvernement du Canada devait étudier, il était question de mettre en oeuvre une stratégie nationale d'élimination de la pauvreté intégrant un cadre axé sur les droits de la personne. Malheureusement, cette recommandation, de même que plusieurs autres traitant précisément des droits économiques et sociaux, a été rejetée. Par cette réponse regrettable, on trahit non seulement les citoyens canadiens, mais on sabote également le travail de ce comité et des autres intervenants, vous qui tentez de déterminer le rôle que devrait jouer le gouvernement fédéral dans la lutte contre la pauvreté au Canada.
    Six provinces canadiennes ont soit mis en oeuvre ou entrepris d'élaborer une stratégie de réduction de la pauvreté. Ces importantes avancées réalisées au niveau provincial ont été accompagnées d'un appel urgent à l'action lancé dans au moins trois provinces. Shawn Skinner, ancien ministre des Ressources humaines, du Travail et de l'Emploi à Terre-Neuve-et-Labrador, de même que Dalton McGuinty, le premier ministre de l'Ontario, ont tous deux affirmé que les stratégies provinciales ne pouvaient être efficaces que si le gouvernement fédéral les appuyait. Plus récemment, la stratégie du Manitoba, lancée le 21 mai, prévoyait clairement que le gouvernement fédéral devait être prêt à être un partenaire à part entière.
(1140)
     Ce qui est peut-être encore plus éloquent que l'appel à l'engagement lancé au gouvernement fédéral, c'est le fait que les stratégies provinciales en place font déjà une différence. Les gouvernements provinciaux veillent à la coordination des programmes gouvernementaux et à l'élimination des pratiques contre-productives, rendent compte publiquement des progrès réalisés, et acceptent d'être tenus responsables de leurs actes.
    Dès 2007, les personnes bénéficiant de l'aide sociale au Québec et à Terre-Neuve-et-Labrador avaient pu constater une certaine amélioration. Selon le Conseil national du bien-être social, dans le cas d'une famille monoparentale vivant au Québec avec un enfant d'âge préscolaire, les revenus de bien-être social pour 2007 avaient atteints 100 p. 100 de la mesure de la pauvreté fondée sur le panier de consommation. De la même manière, à Terre-Neuve-et-Labrador, les revenus de bien-être social avaient légèrement surpassé la mesure du panier de consommation, atteignant 103 p. 100. Ces données sont particulièrement remarquables si on les compare à celles recueillies dans les provinces qui ne disposent pas de stratégies de réduction de la pauvreté, où le même groupe démographique affiche des revenus de bien-être social de 65 p. 100 à 90 p. 100 de la mesure du panier de consommation.
    Comme vous l'avez entendu des autres témoins au cours des dernières semaines et des derniers mois, les Canadiens sont d'avis que le gouvernement fédéral a un rôle clé à jouer dans la lutte contre la pauvreté et qu'il est maintenant temps d'agir. S'appuyant sur ses 45 années d'expérience à promouvoir la justice publique au Canada, Citizens for Public Justice souhaiterait formuler cinq recommandations.
    Recommandation 1: Le gouvernement du Canada devrait adopter la cible d'éliminer la pauvreté au Canada d'ici 2020, ainsi qu'adhérer à la vision de créer une nation qui garantit la dignité, le bien-être et l'inclusion sociale de tous.
     Recommandation 2: Le gouvernement du Canada devrait revoir la réponse qu'il a présentée au Conseil des droits de l'homme des Nations Unies à Genève, et plutôt adopter et mettre en oeuvre un plan fédéral global et intégré d'élimination de la pauvreté qui intègre un cadre axé sur les droits de la personne.
    Un plan fédéral d'élimination de la pauvreté offrira une ligne directrice pancanadienne pour réduire et plus tard éliminer la pauvreté. Il s'appuiera sur les quatre pierres angulaires d'une stratégie efficace de réduction de la pauvreté, telles qu'énoncées par le Conseil national du bien-être social, à savoir une vision intégrant des objectifs mesurables et des échéanciers, un plan d'action et un budget, des structures de responsabilisation, ainsi qu'une série d'indicateurs convenus de la pauvreté.
    Le plan comprendra des mesures concernant toute une gamme d'enjeux, entre autres l'assurance que tous les travailleurs canadiens reçoivent un salaire suffisant. Comme première étape, le gouvernement fédéral devrait faire preuve de leadership en veillant à ce que tous ses employés, de même que les employés des services, organismes ou entreprises qu'il engage à contrat, profitent des mêmes normes. En outre, il devrait établir par voie législative un salaire-subsistance national dans son territoire de compétence.
    Le plan devrait aussi intégrer des mesures visant à garantir la sécurité sociale de l'ensemble des Canadiens (même si un travail rémunéré ne permet pas nécessairement d'obtenir tout ce dont on a besoin), de même que des mesures visant à apporter des améliorations immédiates au régime d'assurance-emploi, dont: établir des règles standards d'accès au régime à l'échelle du pays, fixées à 360 heures d'emploi assurable; doubler la période maximale de prestations, passant de 50 semaines à 100 semaines; éliminer la période d'attente de deux semaines; augmenter le taux de couverture de 55 p. 100 à 60 p. 100 des gains assurables; et permettre aux travailleurs autonomes d'accéder au régime.
    Il faudrait aussi penser à inclure un plan national sérieux de garde d'enfants et d'éducation préscolaire qui est abordable et accessible à tous les Canadiens, et assurer du soutien ciblé à l'intention des Canadiens autochtones, des nouveaux arrivants et des réfugiés, ainsi qu'à d'autres populations vulnérables.
    Merci.
(1145)

[Français]

    Veuillez m'excuser, madame Munn-Venn, mais je n'ai pas le choix.
    Je remercie toutes — je dis bien « toutes », car ce sont toutes des femmes — les témoins. Nous passerons maintenant à la période de questions. Les premières périodes de questions et réponses seront de sept minutes.
    Mr. Savage.

[Traduction]

    Merci, madame la présidente.
    Merci à vous tous. Vous nous avez présenté des exposés très intéressants, qui nous aideront sans aucun doute à faire notre travail.
    Pour commencer, j'aimerais revenir à la recommandation 17 du Conseil des droits de l'homme des Nations Unies, en ce qui a trait à l'examen périodique dont vous avez parlé, madame Munn-Venn. Je vais vous lire un extrait de la réponse du gouvernement à l'égard de la recommandation selon laquelle nous devrions mettre en place une stratégie anti-pauvreté. Voici ce qu'a entre autres répondu le gouvernement:
Le Canada n'accepte pas la recommandation 17 ni la recommandation connexe du Ghana visant l'élaboration d'une stratégie nationale pour éradiquer la pauvreté. Ce domaine de la politique sociale relève des provinces et des territoires, qui ont élaboré leurs propres programmes pour lutter contre la pauvreté; par exemple, quatre provinces ont mis en oeuvre des stratégies de réduction de la pauvreté.
    Nous avons entendu parler de ces quatre provinces. Vous avez indiqué qu'il y en avait maintenant six. Je sais que le Manitoba est la cinquième province à avoir adopté une telle stratégie. Quelle est la sixième?
    C'est Terre-Neuve-et-Labrador, l'Ontario, la Nouvelle-Écosse et le Manitoba. On travaille aussi sur le Nouveau-Brunswick.
    Le Nouveau-Brunswick? D'accord. De fait, je me rappelle avoir entendu que le Manitoba adoptait une stratégie de lutte contre la pauvreté au forum social tenu à Calgary, quand nous y étions.
    Mais ce que nous ont dit les représentants des provinces que nous avons entendus, c'est que ces dernières jugent un leadership fédéral absolument nécessaire dans une stratégie de lutte contre la pauvreté. Alors ce que j'aimerais vous demander, c'est s'il paraît censé, du point de vue du partage des compétence, ce qui semble être l'optique du gouvernement ici, que nous n'ayons pas de stratégie nationale de lutte contre la pauvreté? Je vous pose la question ou à quiconque veut y répondre.
    C'est intéressant. Les questions de compétences ne cessent d'être soulevées, dans ce contexte, mais la réalité, c'est qu'il nous faut promouvoir la dignité et le bien-être de tous les Canadiens, et pas seulement de ceux qui vivent dans les provinces où le gouvernement a décidé d'agir. Nous devons nous efforcer de répondre aux besoins de tous les Canadiens. La réalité, c'est qu'il y a de grandes disparités, non seulement entre les provinces, mais entre bassins démographiques particuliers, et le gouvernement fédéral a réellement un important rôle de leadership à jouer.
    Brièvement, j'aimerais aussi dire que l'une des autres recommandations que nous avons concerne l'imposition suffisante et équitable, pour que le gouvernement fédéral ait des ressources à investir dans la sécurité sociale de tous les Canadiens. Le gouvernement fédéral dispose de ressources, ici, que n'ont pas nécessairement d'autres compétences. Je pense qu'il est très important que le gouvernement du Canada s'acquitte d'engagements qu'il a pris antérieurement à l'échelle internationale de collaborer avec les provinces pour régler cet important problème.
    Est-ce que quelqu'un d'autre a un avis à émettre sur le sujet?
    Comme je l'ai dit avant, nous nous concentrons sur les Canadiens plus âgés, mais le rôle important de n'importe quel gouvernement n'est pas seulement d'assurer la coordination, le financement, la direction, etc. qui sont nécessaires au succès d'une démarche; leur discours, aussi, suffit à établir un nouveau code de valeurs relativement à ce qui est important dans notre société, aux choix politiques qu'ils font et à ce que les Canadiens puissent être en mesure de juger du type de valeurs que défend le pays. Quand on dit dans une déclaration écrite que nous refusons de nous intéresser à la pauvreté, quelles que soient les excuses données, je pense qu'il y a lieu de s'en inquiéter.
(1150)
    J'aimerais ajouter deux ou trois choses, notamment que je suis tout à fait d'accord avec nos collègues à la table, que je pense qu'il y a certainement des aspects sur lesquels le gouvernement fédéral pourrait se montrer plus actif. Il y en a dont on a déjà parlé, qui concernent l'impôt. Il y en a qui concernent l'apprentissage, etc., auxquels le gouvernement fédéral attachait auparavant une grande importance et qui ne semblent plus en avoir autant maintenant.
    Je pense que nous savons que bien des facteurs contribuent à la pauvreté, et à la complexité du problème. L'un des éléments qui est fondamental et que nous exploitons beaucoup, et qu'il me semble que nos collègues à cette table ont beaucoup exploité, c'est la communication réelle de renseignements et de données. Les meilleures données que nous puissions recevoir nous viennent de Statistique Canada et du gouvernement fédéral. Je dirais que ceci, outre d'autres facteurs, pourrait et devrait porter le gouvernement à parler plus franchement de la pauvreté.
    Merci beaucoup. Je pense que nos invités s'entendent unanimement pour dire que le refus de la recommandation 17 marque un triste moment de notre histoire. Je sais que les membres conservateurs de ce comité travaillent très fort pour dresser un plan de lutte contre la pauvreté, et il est vraiment très décevant de se faire dire par son propre gouvernement qu'on perd son temps. Ce n'est pas que nos sentiments personnels importent tellement; c'est qu'il y a des gens qui essaient de faire une différence, dont beaucoup sont venus devant notre comité parler de l'importance et de la pertinence du rôle que doit jouer le gouvernement fédéral dans la formulation d'une stratégie de lutte contre la pauvreté.
    Je tiens à féliciter Karri et CPJ. Je ne sais pas exactement si les autres organisations étaient au forum social, à Calgary. Vous y étiez? Je pense que ce fut un moment marquant où a été galvanisé le soutien public d'une campagne de lutte contre la pauvreté au Canada. Vous avez parlé de la campagne Dignity for All le vendredi matin, je pense, et cela a été très important.
    J'aimerais aussi féliciter notre président, Dean Allison, qui est venu et a participé à ce forum public, où j'ai trouvé qu'il a fait très bonne impression.
    Je voudrais demander à chacun d'entre vous ce que vous pensez, précisément, du concept de revenu de base dont a parlé Hugh Segal à ce forum et sur bien d'autres tribunes? Est-ce que vous êtes favorables à ce concept? Avons-nous besoin de plus de renseignements sur le sujet? Est-ce un concept qui évolue? Quelle serait votre position à l'égard d'un revenu de base pour les Canadiens?
    Vous parlez du revenu de base garanti?
    Un revenu de base annuel garanti.
    Je pense qu'à la base, c'est une bonne idée pour bon nombre des raisons qu'a expliquées Karri, relativement à l'impact de la pauvreté sur les jeunes, sur les personnes âgées. Quand on vit dans la pauvreté, celle-ci a tellement de répercussions, pas seulement au plan financier, mais de notre capacité d'intégration à la société, etc. Je ne pense pas que ce serait exagéré du tout de dire que nous devrions tous, dans ce pays, pouvoir avoir un revenu de base garanti.
    Citizens for Public Justice appuie aussi le concept de revenu de base. L'une de mes collègues, Chandra Pasma, a été...
    Pardonnez-moi, madame Munn-Venn, mais j'apprécierais une très brève réponse, parce que nous manquons de temps.
    Oui, nous l'appuyons. Nous pensons que tout Canadien devrait pouvoir vivre à l'abri de la pauvreté et dans la dignité, que ce soit ou non grâce à un emploi.
    Vous aurez probablement la possibilité de revenir sur cette question.

[Français]

    Je cède la parole à Mme Beaudin.
    Bonjour. Je vous remercie de toutes vos informations très précieuses.
    Ma question s'adresse à Mme Lyons. Lors de votre présentation, vous avez parlé de plusieurs choses intéressantes. Vous avez parlé d'initiatives locales, de développement et de bâtir des collectivités dynamiques. Vous avez également parlé de tendances et de solutions à long terme, puisqu'on se penche sur des problématiques qui datent de quelques années.
    J'aurais aimé que vous en disiez plus sur les tendances. Quelles sont-elles?
(1155)
    Parlez-vous des tendances statistiques ou...?
    Je parle aussi de l'état de la pauvreté. J'imagine que vous avez étudié ce phénomène dans le cadre de vos recherches.
    On n'a pas encore eu la chance de parler du rapport qui s'intitule « Signes vitaux ». Il s'agit d'un rapport qui contient les statistiques locales ou nationales, non seulement sur la pauvreté mais aussi sur une dizaine de sujets comprenant, notamment, l'environnement, le transport et la santé. Parmi ces 10 ou 12 sujets, il y a la pauvreté et en particulier la pauvreté parmi certaines portions de la population. Ce rapport touche 16 communautés au pays; ce sont surtout les grandes villes, mais il y a de plus en plus de petites villes et de villages.
    On voit que la pauvreté est assez stable. On associe ce fait à quelque chose de négatif. Je crois que Karri l'a mentionné: la pauvreté n'a pas changé. Le niveau de pauvreté n'a quasiment pas changé au cours des 20 ou 25 dernières années, y compris la pauvreté chez les enfants.
    Je pense que Susan a mentionné que la pauvreté chez les aînés augmente.
    Pourquoi est-ce ainsi? Vous m'amenez à ma seconde question, et le temps file. En fait, j'ai l'impression que « Signes vitaux » pourrait constituer un type d'observatoire.
    Un peu plus tôt, Monica a dit qu'un des rôles du gouvernement fédéral pourrait être de compiler des statistiques récentes et de constituer un type d'observatoire sur l'état de la pauvreté, afin de regarder aller les choses au fur et à mesure.
    Pourquoi avons-nous échoué? On s'était pourtant donné l'objectif d'éradiquer la pauvreté infantile. Comment cela se fait-il? Avez-vous étudié cette question, afin d'éviter de refaire les mêmes erreurs et d'adopter de meilleures mesures? Quelles pourraient être les mesures préventives?
    Nous n'avons pas vraiment fait d'analyse sur la raison de cet échec ni fait de recommandations spécifiques sur ce qui pourrait changer. « Signes vitaux » n'a pas fait ce travail non plus. En fait, « Signes vitaux » se veut non politique. Ce rapport vise à montrer les faits, à les mettre en perspective et à rassembler pour la première fois toutes les statistiques disponibles sur les plans national, provincial et local. Il vise à publier les faits pour que les gouvernements et la population en discutent.
    J'aimerais ajouter qu'on publie le rapport à chaque année en octobre. On le fait exprès parce qu'octobre est le mois où il y a le plus d'élections. Cela ne signifie pas que sa publication est partisane, elle n'est pas politique. On veut promouvoir les discussions sur ces questions. On espère que les partis politiques, les autres organisations de la communauté et les médias vont le lire et se demander ce qui se passe.
    Vous faites beaucoup d'activités de financement auprès des organismes communautaires. Chez nous aussi, au Québec, nous nous employons à bâtir des collectivités, entre autres avec Centraide, à réunir les acteurs et les décideurs et à mettre en commun notre énergie pour tenter de régler les problèmes à l'échelle locale.
    Un autre problème qui touche le financement des organismes communautaires est le fait que le lien entre certains services est déficient, ce qui crée un genre de vide. De plus, le financement n'est jamais global; il est toujours très ciblé ou sectorisé. Par conséquent, on ne peut pas intervenir dans le cas de problèmes qui touchent globalement les personnes.
    Avez-vous réfléchi à cette question et, le cas échéant, avez-vous proposé des solutions?
    Comme je l'ai dit, on a observé, dans le cadre de la table ronde à Hamilton et non au Québec, que dans bien des milieux, on offrait beaucoup de services de bonne qualité, mais qu'il manquait de liens, de transitions entre ces services. C'est le problème que vous venez de mentionner. Le gouvernement fédéral a peut-être un rôle à jouer à cet égard. Il pourrait discrètement prendre connaissance de chaque service et déterminer comment une personne qui passe d'un état de pauvreté à celui de non-pauvreté peut se retrouver parmi tous ces services. En définitive, on ne parle pas exactement d'un manque de services. Le problème réside plutôt dans la façon de procéder.
(1200)
    Vous n'avez pas l'impression qu'il manque de ressources, même de ressources humaines?
    Ce n'est peut-être pas vraiment un manque de ressources. Les ressources personnelles peuvent être en cause. Par exemple, même si une très bonne formation linguistique est offerte pour faciliter l'accessibilité à l'emploi, il se peut qu'on n'ait pas d'argent pour acheter un billet d'autobus pour se rendre à l'autre bout de la ville afin d'y assister. Parfois, on est trop occupé à se demander comment on va réussir à manger le lendemain ou à payer son loyer à la fin du mois. Il faut, personnellement ou à l'intérieur d'une famille, jouir d'une sécurité de base pour être en mesure de penser à des façons de s'améliorer et d'améliorer la situation de sa famille.
    Avant de passer la parole à M. Martin, je veux vous avertir que d'ici quelques minutes, soit entre midi et midi et demi, nous allons probablement entendre la sonnerie. Celle-ci sert à avertir les députés qu'il est temps d'aller voter. Si ça se produit — et je crois que ce sera le cas —, j'invite les témoins à nous attendre et à prendre un café, s'ils le désirent. Nous serons de retour après le vote, qui ne devrait pas durer longtemps.
    Mr. Martin, please.

[Traduction]

    Merci beaucoup, merci d'être venus aujourd'hui.
    Je suis certainement d'accord avec CPJ et avec Canada Without Poverty quand ils prônent une stratégie nationale de lutte contre la pauvreté. J'ai été déçu, comme M. Savage et, je pense, d'autres membres du comité, d'entendre la réponse du gouvernement à la recommandation des Nations Unies que nous formulions une stratégie nationale de lutte contre la pauvreté. Je pensais que c'était ce que nous faisions ici. Je suis ouvert à la créativité quant à la manière de nous y prendre. Je le suis vraiment. Les fondations et collectivités peuvent y jouer un rôle. Nous avons rencontré toutes sortes d'organisations vraiment fantastiques, résolues et vaillantes, de tout le pays, qui font d'excellentes choses, mais toutes expriment la nécessité d'un certain leadership national pour que nous puissions établir l'équité, en quelque sorte, dans tout le pays en matière d'accès aux programmes et aux mesures de soutien pour les enfants et les aînés, et ce genre de choses. Nous essayons de voir comment on peut ficeler tout cela.
    J'ai seulement deux ou trois questions, dont l'une que j'adresse aux fondations. Je sais, d'après des entretiens que j'ai eus avec des gens de Toronto, la Recession Relief Fund Coalition — je ne sais pas si vous en avez entendu parler — John Andras, qu'ils rassemblent des gens de la région de Toronto. Susan en a sûrement entendu parler. Ce qui m'inquiète, c'est que bien des organismes qui font un excellent travail dépendent de fondations pour leur financement, et la situation est difficile pour eux maintenant, parce que les fondations manquent d'argent; elles ne reçoivent plus autant de dons, elles n'ont plus le même rendement sur leurs investissements, etc. Ils ont laissé entendre à un moment donné qu'il nous reste environ six mois avant que plusieurs organismes dont ils parlent doivent commencer à réduire sérieusement leurs activités, ou s'écroulent complètement. Pouvez-vous...?
    J'aimerais bien pouvoir répondre, si vous le permettez.
    Je pense que vous avez raison. Je ne sais pas ce qui en est de ce délai de six mois, mais il est absolument clair que les ressources dont disposent pour verser les subventions fondations, qu'elles soient privées ou publiques comme la nôtre, ont subi une baisse considérable. Cela étant dit, j'aimerais dire deux choses qui pourraient contribuer à apaiser la situation, tant à court terme qu'à long terme.
    Tout d'abord, il n'existe pas encore de preuves concrètes — il peut y avoir des présomptions, mais pas de données en tant que telles, pour l'instant — indiquant que les donateurs renoncent à faire des dons. Nous pensons que c'est encourageant. Nous savons, dans notre propre monde, que les donateurs connaissent la situation de leur collectivité. Ils continuent, comme nous l'avons dit, à répondre aux attentes et à faire des contributions, particulièrement en faisant des dons pour les enjeux entourant la pauvreté, l'environnement, etc. C'est une réalité, nous l'espérons, que nous essayons évidemment d'encourager.
    Les fondations elles-mêmes travaillent très dur pour susciter les collaborations dans la communauté, de manière à ce que l'oeuvre de l'organisation puisse en encourager deux ou trois autres à en faire autant, en quelque sorte à ressembler leurs ressources, si on veut, et à voir comment elles peuvent agir en partenariat.
    La troisième chose que j'aimerais dire, et c'est en rapport avec votre question, j'espère, et aussi avec les questions antérieures, est très importante pour le gouvernement fédéral dans ce cas-ci. Le modèle de financement public des organisation jusqu'ici — les projets à court terme, d'un an, qui n'appuient pas l'infrastructure, si on peut dire, qui n'appuient pas les opérations — a sapé la capacité de ces organisations, à mon avis, tout autant que d'autres facteurs. C'est ce que nous disons au sujet du monde des fondations. Il nous faut repenser non seulement l'orientation que nous donnons à nos ressources, ou ce pour quoi une organisation peut les utiliser, mais aussi les modalités et les échéances.
    J'espère que cette crise, en soi, si elle a fait une chose, nous a enseigné cette leçon, qu'on ne peut revenir en arrière.
(1205)
    Je vous remercie.
    J'aimerais m'adresser un moment à Mme Eng.
    Certains d'entre nous revenons souvent sur le Régime de pension du Canada, et la manière dont le gouvernement s'était attaqué avec vigueur à la pauvreté des aînés à un moment donné de son histoire et avait décidé de faire quelque chose de radical qui englobait vraiment tout le monde. On constate maintenant que tout cela commence à s'effriter, particulièrement avec les changements démographiques, et avec la demande qui augmente tellement.
    Vous aviez parlé de la nécessité d'autres mesures. En ce qui concerne un cadre, et c'est ce qui nous intéresse, avez-vous des suggestions, ou des idées à nous proposer, dans notre quête d'une solution d'action?
    J'ai beaucoup d'idées.
    Le RPC est un bon exemple de quelque chose qui était une grande idée, qui s'est concrétisée. Il a contribué à extraire toute une génération de la pauvreté. Il a nécessité un important investissement du gouvernement. Nous nous retrouvons maintenant dans une situation où le montant que verse le RPC, par exemple, ne suffit tout simplement plus. On ne peut s'attendre qu'à un maximum de 10 000 $ par année, et les travailleurs qui ont des emplois mal payés, ceux qui risquent le plus d'être confrontés à la pauvreté dans leurs vieux jours, n'auront pas le montant maximum du RPC.
    Alors il est vrai qu'il aide beaucoup, mais il ne suffit pas à lui seul. C'est pourquoi nous recommandons un instrument distinct qui pourrait englober un appoint vertical du RPC pour tirer plus de gens de la pauvreté par ce type de moyens.
    Bien entendu, il faut pour cela l'apport du gouvernement, de fonds publics, mais le plus important, c'est l'autonomie. Le modèle de régime de pensions que nous recommandons, pour les gens qui n'ont pas accès à des régimes parrainés par un employeur, est fondé sur le fait qu'à la fois l'employeur et l'employé contribuent à l'épargne de celui-ci en vue de la retraite. C'est ce thème de l'autonomie qui est vraiment un facteur qui définit cette génération.
    Alors en ce qui concerne les gens qui vivent déjà dans la pauvreté et qui dépendent de la sécurité de la vieillesse ou du SRG, nous disons qu'il vous faut leur donner plus d'argent. Comme l'a dit quelqu'un avant moi, la cause fondamentale de la pauvreté, c'est le manque d'argent. Ces gens-là, il nous faut nous assurer de les sortir de la pauvreté avec un financement direct maintenant, mais pour l'avenir... Il y a moyen pour les gens de contribuer à leur propre retraite, y compris au moyen d'un RPC verticalement intégré.
    La nature obligatoire du RPC est importante, parce qu'elle contribue à faire qu'il soit universel. Certains disent que si l'on rend le régime de retraite suffisamment attrayant, il trouvera des adeptes. Ce peut être vrai, mais pour ce faire, particulièrement dans les secteurs de faible revenu salarial, il faudra plus que seulement une possibilité. Il faut une sorte d'incitatif.
    Dans un ordre d'idée légèrement différent, ce qui est important aussi, relativement à l'autonomie, et dont j'aimerais parler, c'est en rapport avec la dispense de soins, qui est l'un de ces changements qui aideraient réellement les personnes qui sont confrontées à la pauvreté, qui ne peuvent pas joindre les deux bouts, qui sont tributaires de la bienveillance de leurs proches et de leurs amis pour survivre. On estime qu'il y a de nos jours cinq millions de Canadiens qui dispensent des soins de manière informelle à des amis et des proches. Ces gens ont besoin d'une forme de soutien, ou d'un incitatif pour les aider à continuer, qu'on veille à ce que leurs emplois les attendent, et qu'on fasse en sorte que le système de santé formel facilite, en fait, leur oeuvre.
(1210)
    Je regrette. Je pense, monsieur Martin que nous aurons encore du temps à la fin.
    Monsieur Komarnicki.
    Merci, madame la présidente.
    Je vous remercie pour ces diverses suggestions. Nous allons certainement en tenir compte. J'ai remarqué que Community Foundations of Canada a laissé entendre — je ne sais plus si c'est Monica ou Sara — que l'argent, à lui seul, ne réglerait pas la situation. Il y contribue certainement, et nous voulons nous assurer qu'il soit utilisé efficacement, si on a des fonds pour commencer.
    J'ai une question à poser, très rapidement. Vous avez dit entretenir une culture d'espoir. J'aimerais bien que vous m'expliquiez cela.
    Deuxièmement, pour ce qui est de veiller à ce que les donateurs agissent, y a-t-il moyen pour nous de faire des choses qui y contribueraient spécifiquement?
    De plus, j'ai remarqué que vous avez parlé d'une certaine collaboration entre les fournisseurs de services. Nous avons entendu à maintes reprises qu'il y a concurrence pour l'obtention de certains fonds et que le financement n'est pas toujours maintenu à long terme. On perd beaucoup de temps à se faire concurrence, et peut-être à préparer des demandes qu'il faut présenter chaque année. Avez-vous des suggestions particulières d'amélioration sur ce plan?
    J'aurais ensuite une question ou deux à poser à Karri.
    Je vous laisse la parole.
    J'essaierai de commencer par répondre à votre première question au sujet de la culture d'espoir. Je ne sais pas exactement qui en a parlé. Une chose que je pourrais dire, à ce sujet, c'est que je pense qu'un élément fondamental — et il y est fait allusion dans la campagne dont a parlé Karri — ce sont les attitudes publiques à l'égard de la pauvreté. Il y a une chose que je n'ai pas dite dans mes observations, c'est que je pense qu'il est vrai que l'une des raisons qui fait que nous n'avons pas constaté de changements réels dans les taux de pauvreté depuis plusieurs années, c'est que la pauvreté n'a pas été une priorité du gouvernement, elle n'a pas été une priorité politique, une priorité du public. Quand on parle de culture d'espoir, je pense que l'un des enjeux fondamentaux, et dans lequel le gouvernement peut avoir un rôle à jouer, c'est qu'il faut commencer à modifier les attitudes négatives à l'égard de la pauvreté. Pour dire les choses sans détour, il faut changer les attitudes à l'égard des pauvres. Il y a une culture de reproche, de différence, etc.
    Alors pour revenir à cette question sur qui devrait faire quoi et quelle compétence, le leadership fédéral pourrait y jour un rôle. Nous affichons, très franchement, des attitudes inégales partout au pays à l'égard de la responsabilité du gouvernement de s'occuper des citoyens. Le gouvernement pourrait jouer un rôle dans la modification des attitudes publiques.
    Et la deuxième partie de la question?
    Voulez-vous que j'en parle maintenant?
    Bien sûr.
    Je vous remercie.
    Bien évidemment, il nous faudrait être prudents dans toute réponse que nous donnons en réfléchissant à la manière dont le gouvernement peut encourager les donateurs à agir. Je commencerai avec ceci. Il faut trouver le juste équilibre pour qu'on ne pense pas que le gouvernement abdique ce que les citoyens considèrent être ses responsabilités — autrement dit, en comptant trop sur la communauté. Cela étant dit, je pense que l'une des choses que le gouvernement du Canada pourrait faire, et il y a dans le monde entier des exemples de succès de cette démarche, c'est coopérer avec les organisations communautaires comme United Way/Centraide, les fondations communautaires. Ce sont en fait des organismes subventionnaires beaucoup plus efficaces, qui réussissent bien mieux que les gouvernements à distribuer l'argent, parce que nous connaissons vraiment les communautés, nous connaissons les intervenants, nous connaissons les enjeux.
    Ce genre de partenariat avec une entité subventionnaire locale, comme une fondation communautaire, est très efficace pour la distribution des ressources que le gouvernement peut avoir pour une communauté. Les fondations communautaires, comme la Hamilton Community Foundation dans l'exemple de Hamilton, applique des processus que nous connaissons qui consistent à réunir, à rassembler des groupes, à les amener à la même table, à tenir un dialogue sur la distribution de ces ressources, et vraiment à essayer d'apaiser le climat de compétition que vous avez décrit.
    Cela ne vous étonnera pas, mais à propos de la compétition, j'ai suggéré que lorsque les ressources s'épuisent — et celles qu'ont fournies les gouvernements aux organismes communautaires se sont faites rares — nous constatons que cela échauffe le climat de compétition.
    À certains égards, il s'agit seulement de rendre plus de ressources accessibles, par de meilleurs moyens. J'en ai déjà décrits. Je vous suggérerais aussi d'envisager de conclure des partenariats avec des organismes subventionnaires locaux qui connaissent vraiment leur communauté et la méthode la plus appropriée pour répartir les ressources.
(1215)
    Je vous remercie.
    Karri, vous avez dit, en parlant précisément de l'assurance-emploi, qu'une période d'admissibilité de 360 heures, ce qui, si on compte les jours, reviendrait en fait à 2,25 mois, pour être admissible à une période de prestations de 50 à 100 semaines, sans période de carence de deux semaines, à 65 p. 100 des gains assurables... si je ne me trompe. Que diriez-vous des régions du pays qui ont un taux de chômage élevé?
    Je cite M. Savage, de notre propre comité, qui a dit: « Comme vous pouvez le voir, quand on réduit à un taux uniforme de 360 heures, le coût est assez considérable » . Autrement dit, il faut maintenir les taux régionaux, plus ou moins. C'est pour protéger les gens qui vivent dans des régions où le taux de chômage est très élevé. M. Savage a poursuivi en disant que « l'ennui, c'est que si vous vous débarrassez des taux de chômage régionaux, et que des compressions doivent être faites, ce seront ces régions qui seront les plus touchées, et cela devrait grandement nous préoccuper ».
    Est-ce que vous ne vous inquiétez pas des régions où le taux de chômage est élevé, quand vous dites que le taux devrait être le même partout au pays? Est-ce que vous pensez vraiment qu'après avoir travaillé deux mois et quart, on devrait pouvoir toucher toutes ces prestations?
    Adressez-vous cette question à quelqu'un en particulier, monsieur Komarnicki?
    À Karri.
    Tout d'abord, oui, ce que je dis, c'est qu'on devrait pouvoir y avoir droit avec moins d'heures de travail, parce que...
    D'accord. Vous dites qu'avec 360 heures de travail, on devrait avoir droit à tous ces avantages. La question que je pose, alors, c'est que faites-vous des régions où le taux de chômage est élevé, comparativement à celles où il est plus faible?
    Nous avons maintenant une situation où les gens qui peuvent devoir voyager pour aller au travail, pour une raison ou une autre, sont avantagés par rapport à ceux qui n'ont pas à le faire, parce qu'ils peuvent rentrer chez eux et toucher des prestations.
    Nous ne parlons pas d'une situation où moins de chômeurs seraient admissibles et la situation s'aggraverait pour plus de gens. Ce que nous voulons, c'est que les règles du jeu soient uniformes, pour que ce soit plus équitable partout au pays.
    J'aimerais parler de...
    Entendez-vous par là que nous ne devrions pas tenir compte des régions où le taux de chômage est plus élevé?
    Monsieur Komarnicki, je vais devoir vous arrêter ici.
    Nous allons suspendre la séance, puis nous la reprendrons après le vote.
(1245)

[Français]

    Nous allons maintenant reprendre les débats. Étant donné qu'il s'agit du deuxième tour, les questions et réponses seront d'une durée de cinq minutes.
    Madame Minna.

[Traduction]

    Merci, madame la présidente.
    Merci à vous tous. Je regrette d'avoir manqué l'exposé, mais j'avais une autre réunion.
    J'aimerais m'adresser à Mme Eng. Vous avez parlé tout à l'heure des soignants, et de la nécessité que nous les remboursions et trouvions un moyen... Je suis d'accord avec vous. Il faut faire en sorte que ces gens ne perdent pas leur emploi et tout le reste, et généralement, ces gens sont des femmes.
    Pourriez-vous nous dire — très rapidement, parce que je partage mon temps avec ma collègue — si des études ont été faites sur les genres de programmes, précisément, qui fonctionneraient et les sommes envisagées, ou ce genre de choses?
(1250)
    Je vous remercie pour cette question.
    Ce qui est important, en ce qui concerne les soignants, comme je l'ai dit tout à l'heure, c'est que cinq millions de Canadiens, dispensent déjà des soins à des proches de manière informelle. C'est ce qui permet, bien souvent, à un aîné d'éviter d'entrer en institution, d'éviter des troubles de santé, etc. C'est une contribution extrêmement importante au bien public.
    Si nous devions assigner un prix à leur travail non rémunéré, ce serait de l'ordre de 12 milliards de dollars et plus. Les États-Unis sont sur le point de publier un sondage selon lequel, dans leur contexte, ce labeur se chiffre à quelque 370 milliards de dollars. Si on n'en prend que 10 p. 100, ce qui est la règle générale, ce serait 37 milliards de dollars. C'est le genre de valeur qui est attribuée au travail non rémunéré des aidants naturels.
    Pour qu'il soit possible pour les familles de continuer à assumer cette importante responsabilité, nous devons faire en sorte de créer quelque chose qui permettra à ces aidants de prendre un congé de leur emploi. Il faut leur offrir soit un crédit d'impôt remboursable, par exemple une allocation directe, comme cela se fait dans certains pays de l'Europe, ou... Il y a diverses solutions, et tout dépend vraiment du gouvernement en place.
    Mais bien entendu, ce sera très coûteux. Certains ont cité des chiffres de l'ordre de 5 milliards de dollars, selon le montant qu'on voudrait verser à chaque personne. Mais si l'on envisage ce genre de contribution et on pense à la valeur qu'elle représente dans la société et le tissu social qu'elle peut créer, ce genre d'analyse des avantages par rapport aux coûts s'impose.
    Je vous remercie.
    La question des aidants naturels me tient beaucoup à coeur, comme à Mme Minna, de même qu'à notre présidente du jour. Comme j'ai moi-même vu mes parents mourir du cancer très peu de temps l'un après l'autre, et mourir chez eux parce que nous avons une grande famille — pas riche, mais suffisamment à l'aise pour pouvoir permettre à nos parents de mourir chez eux — il me semble que l'une des clés du système de santé est de pouvoir transférer certaines ressources des établissements pour permettre d'offrir des soins à domicile, que ce soit à des parents âgés, des enfants qui ont de troubles particuliers, des adultes autistes, ou d'autres.
    Dans le rapport Romanow de 2003 et les accords en matière de santé, on faisait ressortir que le prochain grand défi de notre système de santé viendra de la nécessité de fournir des soins à domicile, pour remplacer les soins en institution, simplement à cause du coût prohibitif des soins en institution. La seule solution, vraiment, est de créer le processus et le secteur des soins à domicile. Il faut pour cela, à la fois, de meilleurs services de soins à domicile rémunérés, et aussi, d'une façon ou d'une autre, créer un incitatif et des moyens de faciliter les choses pour les proches qui fournissent des soins additionnels.
    Outre cet aspect financier, le système de santé formel doit pouvoir faciliter la situation pour les aidants naturels; c'est-à-dire qu'il doit reconnaître leur existence et les orienter vers les ressources, et il doit fournir et créer des systèmes de dialyse à domicile, par exemple — ils existent maintenant, mais il faut d'autres choses encore. Il faut aussi exploiter la technologie de façon plus créative, faire un suivi de la famille à domicile, des médicaments et ce genre de choses.
    Tout cela s'inscrit dans les mesures globales qui permettent aux citoyens de vieillir en toute sécurité chez eux et de les garder hors du système de santé, particulièrement hors des institutions.
    Il y a une chose dont nous n'avons pas parlé beaucoup aujourd'hui, et je sais que vous avez tous un avis sur cette question, c'est que les personnes handicapées sont souvent marginalisées par la pauvreté. Il y a une idée dont nous a parlé, je pense, l'Institut Caledon, c'est que nous devrions créer un système par lequel nous verserions l'équivalent de la sécurité de la vieillesse et du supplément de revenu garanti aux personnes handicapées, pour ouvrir leurs horizons. J'aimerais bien que l'un de veuille bien en parler.
    Je sais qu'il ne me reste plus beaucoup de temps, madame la présidente.
    Je dois vous arrêter tout de suite parce que la réponse sera longue, mais peut-être pourriez-vous intégrer votre réponse à celle que vous donnerez à quelqu'un d'autre.
    Monsieur Vellacott.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je suis content que l'on ait abordé aujourd'hui la question de la pauvreté chez les aînés. J'imagine que la plupart des députés autour de la table comptent des personnes âgées parmi leurs électeurs. Il y en a peut-être beaucoup qui sont regroupées dans certains secteurs de leurs circonscriptions, comme c'est le cas dans la mienne, au centre-ville de Saskatoon.
    Il m'arrive de rencontrer certaines de ces personnes si aimables quand je fais du porte-à-porte lors d'une campagne électorale, par exemple. La question des logements constitue pour eux un enjeu majeur et, probablement, une de leurs plus grandes inquiétudes.
    Je sais que des investissements sont en train d'être annoncés, ces jours-ci, et vous pouvez peut-être me dire ce que vous en pensez, dans ce domaine — en fait, presque 400 millions de dollars vont être consacrés, sur deux ans, à la construction de logements sociaux pour les aînés à faible revenu. J'ai eu droit à une bonne nouvelle, récemment, dans ma circonscription. J'ai rencontré les responsables d'une résidence, à Saskatoon, qui avaient reçu près de 1 million de dollars pour créer environ 34 unités. Ce n'est là qu'un projet parmi d'autres qui voit le jour au pays. Nous allons, dans quelques mois, célébrer l'inauguration de ces logements et nous en sommes bien heureux.
    J'aimerais avoir votre opinion là-dessus. Je ne sais pas si la situation du logement représente, pour vous, une source de grande préoccupation. En tout cas, elle l'est, à tout le moins, au moment où je parle.
(1255)
    Le logement est un enjeu de taille pour plusieurs raisons, l'abordabilité, bien sûr, figurant au nombre de celles-ci. Le budget fédéral récemment adopté prévoit 400 millions de dollars sur deux ans pour les logements sociaux, et nous nous en réjouissons. Toutefois, il faut la collaboration des provinces pour distribuer cet argent et veiller à ce qu'il soit investi directement dans la brique et le mortier. Mais ce facteur, quoique important, n'est pas le seul qui compte quand nous parlons de logements pour aînés.
    Il faut mentionner aussi la disponibilité de services assistés, c'est-à-dire des soins médicaux d'urgence, de l'aide pour l'entretien ménager léger, un système de transport local qui permet aux personnes vivant dans des groupes d'immeubles d'habitation, lesquels comprennent des logements abordables, de se prévaloir de ces services.
    Il s'agit, pour nous, d'une question vraiment prioritaire. Pour pouvoir subvenir à ses besoins essentiels, il faut compter sur un revenu, réduire ses dépenses. Il n'y a pas de troisième débouché.
    Merci beaucoup.
    Oui, cette question est effectivement importante. Il faut avoir accès à tous ces autres services supplémentaires ou complémentaires, et à un toit décent. Je suis très fier de l'aide qu'apporte le gouvernement et je le félicite. Il est vrai qu'on peut toujours faire plus, mais en tout cas, il intervient dans ce domaine.
    Ce projet prévoyait en fait la construction de 46 unités. J'ai trouvé cela formidable. Mais, bien sûr, on peut en faire plus.
    Il y a d'autres mesures qui ont été prises, et j'aimerais bien savoir ce que vous en pensez, même si nous sommes pressés par le temps. Je songe, par exemple, à l'économie d'impôt supplémentaire de 150 $ par année qui est prévue les personnes âgées à revenu faible ou moyen en augmentant le crédit en raison de l'âge de 1 000 $ — cette hausse est une bonne chose —, et à la réduction de 25 p. 100 du montant minimum qui doit être retiré, en 2008, du fonds enregistré de revenu de retraite, ou du FERR, et ce, sans pénalité aucune. Cette initiative a été bien accueillie.
    Le budget de 2008 prévoit également des investissements d'environ 13 millions de dollars, sur trois ans, pour lutter contre la violence faite aux aînés. Ce sujet me préoccupe de plus en plus. J'ai travaillé comme préposé dans une maison de soins infirmiers. C'est un problème qui inquiète tous ceux qui ont des parents âgés ou qui connaissent des personnes âgées. Cet investissement est une bonne chose. Cependant, il faut faire plus pour sensibiliser le public à cette question.
    Le fait de permettre aux aînés qui touchent le supplément de revenu garanti de garder plus d'argent dans leurs poches en portant à 3 500 $ l'exemption pour le SRG, alors qu'elle était de 500 $, constitue un pas énorme qui recueille également des commentaires positifs.
    Il y a tout un train de mesures qui sont proposées. Mentionnons aussi le compte d'épargne libre d'impôt grâce auquel les ainés peuvent faire fructifier leurs économies sans que leur prestation de SRG ne soit touchée. Il s'agit, là aussi, d'un avantage.
    J'ai parlé du crédit pour revenu de pension. Le fractionnement du revenu suscite également de l'intérêt, maintenant que les gens ont rempli leur déclaration d'impôt.
    Je voudrais poser, brièvement, une question au sujet, entre autres, des aînés. Est-ce que les divers groupes qui comparaissent devant nous aujourd'hui ont analysé les causes profondes de la pauvreté? Nous voulons réagir à ce phénomène, nous attaquer aux symptômes à l'origine de ce problème. Quelles sont, en quelques mots, certaines des causes profondes de la pauvreté chez les divers groupes d'âge?
    Vous voulez une réponse brève? Vous avez posé une très longue question, monsieur Vellacott. Malheureusement, je vais être obligée de passer à quelqu'un d'autre.
    Monsieur Lessard, s'il vous plaît.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Je veux remercier M. Vellacott, car je voulais justement aborder la question sous cet angle.
    D'abord, je veux vous remercier d'être ici aujourd'hui. Aussi, votre présence féminine représente bien les personnes qui interviennent sur le terrain pour aider les gens qui sont aux prises avec la pauvreté. Je vous remercie d'être ici.
    Je vais reprendre cette notion soulevée par M. Vellacott. Les gens des Fondations communautaires du Canada incitent les organismes communautaires à s'attaquer aux causes profondes de la pauvreté. Y a-t-il une cause particulière qui engendre la pauvreté?
(1300)
    Merci de la question.
    Comme l'ont souligné Mme Eng et Mme Munn-Venn, le coût du logement est certainement une des grandes causes. On considère que les dépenses liées au logement sont souvent les plus importantes, surtout pour les gens qui vivent dans la pauvreté.
    Une autre chose que je soulignerais, c'est l'accès à l'emploi, principalement en ce qui concerne les immigrants. On constate que dans les grandes villes, l'accès au marché de l'emploi est très difficile pour les immigrants, et surtout pour les nouveaux immigrants, par rapport à la population en général, et ce, malgré leurs qualifications, leur éducation, leurs habiletés linguistiques en anglais ou en français. Je pense donc que le problème ne concerne pas que l'éducation ou la disponibilité des emplois, mais aussi l'accès à l'emploi.
    D'accord. On partage la même opinion.
    Avez-vous une opinion différente, madame Munn-Venn?
    Oui. Merci encore de la question.
    Je voudrais dire que les causes de la pauvreté sont nombreuses. Elles peuvent être liées à l'endroit d'où on vient, à l'histoire familiale, etc. Toutefois, au bout du compte, les causes ne peuvent pas être dénombrées et définies simplement. Les gens qui sont pauvres au Canada peuvent l'être parce qu'ils sont malades et qu'ils ne peuvent plus travailler et...
    D'accord. Je m'excuse de vous interrompre, mais je veux poser une deuxième question.
    Je crois qu'on s'entend sur le fait qu'il existe une multitude de causes. Ma question est à savoir s'il y a une cause qui se distingue parmi les autres.
    Mme Lyons nous dit que le logement est une des causes principales et que la possibilité d'avoir un revenu, donc un accès à l'emploi, en est une autre. Il me semble qu'il y a là un cercle vicieux — je m'excuse si je vous interromps, mais vous aurez l'occasion d'y revenir. Lorsqu'on a étudié la question de l'employabilité, on a découvert que certains étaient trop pauvres pour se rendre au travail. Je pense que vous en avez fait mention aussi, à savoir que le lieu de travail est parfois trop loin, etc.
    Vous avez tous répondu oui à une de mes collègues lorsqu'elle vous a demandé si le revenu minimum assuré était un des moyens possibles. De quelle façon envisagez-vous ce revenu minimum assuré? Prendrait-il la forme d'un seul revenu qui viendrait remplacer le filet de sécurité social qu'on connaît maintenant, ou maintiendriez-vous un ensemble de mesures déjà existantes pour n'attribuer le revenu minimum assuré qu'aux gens n'ayant aucun revenu?
    Pour répondre à la question, je crois qu'un revenu de base devrait être disponible à tout le monde, mais qu'il ne devrait pas remplacer tous les autres services et programmes qui soutiennent les personnes dans différentes situations. Il faudrait voir quelle base on doit maintenir. De plus, on doit assurer un revenu minimal à tout le monde pour avoir une base d'égalité, mais cela n'exclurait certainement pas la prestation de services pour les aînés et pour les personnes handicapées ainsi que d'autres services qui sont nécessaires pour compléter, au bout du compte, le revenu de base.
    Avez-vous eu l'occasion d'étudier l'expérience qui se vit présentement en Namibie? Un débat y a cours, un peu comme celui qu'on a eu, par exemple, au début des années 1980 au Québec sur le revenu minimal assuré. En Namibie, étant donné que cette question n'a pas fait l'objet d'une entente nationale, un village a été ciblé et les habitants ont reçu un revenu minimal assuré de 100 $, ce qui équivaut à 14 $ pour nous.
    Monsieur Lessard, je m'excuse, mais on a dépassé une heure. Voici ce que je vous propose.
(1305)

[Traduction]

    Habituellement, la réunion prend fin à cette heure-ci. Il y a beaucoup de gens, et je suis du nombre, qui ont d'autres engagements à 13 heures. Toutefois, s'il y a des personnes qui souhaitent poursuivre la discussion, il va falloir tenir un vote.
    J'aimerais savoir ce qu'en pensent les membres du comité.
    Madame Minna.
    Madame la présidente, si nous prolongeons la réunion, ce sera uniquement pour continuer d'entendre les témoignages, et rien d'autre. Je veux m'assurer qu'on ne...

[Français]

    Mme Minna propose que la réunion se poursuivre, mais uniquement pour continuer à entendre les témoins.
    Monsieur Lessard.
    C'est une bonne idée, madame la présidente. Il faut compléter le présent tour de questions. On pourra ajourner ensuite.
    Monsieur Martin?

[Traduction]

    Je suis d'accord.
    Et que disent les députés de ce côté-ci?
    Il faudrait terminer cette série de questions.
    Je suis d'accord.

[Français]

[Traduction]

    Donc, tout le monde accepte de poursuivre la discussion, mais uniquement sur les sujets abordés par les témoins.
    Cela dit, je tiens à remercier M. Lobb de m'avoir donné l'occasion de dire quelques mots, car je vais être obligée de quitter le fauteuil immédiatement après avoir posé ma question.
    Monsieur Lessard,

[Français]

qui est le deuxième vice-président, à venir prendre ma place à la fin de ma question.

[Traduction]

    Pour ce qui est de ma question, j'ai deux commentaires à faire.

[Français]

    Mon premier commentaire concerne les aidants naturels. Je suis en train de préparer, avec la collaboration de tous les partis présents à la Chambre, un projet de loi émanant des députés qui touche justement la situation des aidants naturels et le rôle que le gouvernement fédéral devrait jouer pour les aider à continuer à faire leur travail de façon raisonnable sur le plan financier.
    Je veux aussi parler du rôle du gouvernement du Canada. Toutes les personnes qui ont fait une présentation aujourd'hui ont parlé du rôle important du gouvernement fédéral. Plusieurs d'entre vous avez aussi parlé du rôle important qu'ont joué plusieurs gouvernements provinciaux. Venant du Québec, je me questionne au sujet de la relation entre les deux paliers de gouvernement.
    Compte tenu des obstacles qu'il pourrait y avoir entre les provinces et le gouvernement fédéral à une politique s'appliquant à l'ensemble du Canada, des accords bilatéraux seraient-ils souhaitables? Je pense, par exemple, aux accords bilatéraux entre le Québec et le gouvernement fédéral et d'autres provinces en matière d'immigration. Et il y en a eu d'autres. Si oui, quelles seraient les principales composantes de ces accords et quelles mesures permettraient d'apporter non pas une certaine imputabilité, mais une imputabilité certaine?

[Traduction]

    Merci.
    Concernant l'adoption d'une politique nationale, il n'est pas dans notre intérêt de voir les provinces et le gouvernement fédéral se livrer à une guerre de compétences. Nous avons besoin de règles, de normes uniformes, de mesures pour permettre la transférabilité des différents services, selon leur valeur pécuniaire. Il nous faut également une initiative nationale de portée suffisamment vaste qui attirera l'attention du public et qui figurera au premier rang des préoccupations politiques.
    Il n'est pas nécessaire d'établir une politique qui s'inscrit dans une perspective essentiellement nationale. Il faut plutôt prévoir des règles uniformes et universelles qui seront appliquées dans chacune des provinces, et pas seulement dans certaines. Les normes devraient elles aussi être les mêmes. C'est sous cet angle que nous prônons l'adoption d'une stratégie nationale sur les aidants naturels.
    La question n'a pas fait l'objet d'un grand débat public, puisque tout le monde était occupé à se demander si on devait ou non aborder le sujet. Nous devons pousser la discussion plus loin. Nous devons commencer à examiner les options qui ont été envisagées par d'autres pays. Il existe aussi quelques programmes dans les provinces qui ont pour objet d'appuyer les aidants. Toutefois, un changement de mentalités s'impose. Je m'explique: les régimes de soins de santé — qui relèvent, bien sûr, de la compétence des provinces — doivent tenir compte du rôle des aidants, offrir des services assistés, ainsi de suite.
    Enfin, il y a une autre raison qui justifie l'adoption d'une stratégie nationale d'envergure: il faut faire en sorte que les milieux de travail tiennent compte du rôle des aidants pour que ceux-ci puissent conserver leurs emplois. Nous devrions nous inspirer du modèle des congés de maternité et parentaux, autrement dit adopter une approche globale à l'égard d'un bien public important, dans le but de faire intervenir tous les systèmes qui appuient ce rôle.
(1310)

[Français]

    Mes commentaires ne portaient pas seulement sur le programme des aidants naturels, mais sur la lutte contre la pauvreté en général.
    D'autres membres du panel voudraient-ils faire des commentaires?
    Madame Munn-Venn.

[Traduction]

    Nous avons constaté dans le passé, non seulement dans le dossier de la pauvreté, mais également dans le cas d'autres enjeux sociaux, que les questions de compétence constituent souvent un obstacle. Par exemple, on ne s'entend pas sur qui est responsable de quoi. Si le gouvernement fédéral n'arrive pas à se mettre d'accord avec les provinces, ensemble ou séparément, il y a toujours cette idée que c'est l'autre qui est responsable du problème, ou que les provinces vont s'en occuper si nous ne faisons rien.
    Il est essentiel que le gouvernement fédéral et les provinces discutent ensemble, cernent les défis, définissent les mesures à prendre pour les relever, travaillent dans un esprit de collaboration, déterminent quel ordre de gouvernement va s'occuper de telle et telle chose, au lieu de se lancer la balle. De cette façon, toutes les facettes du problème seront explorées et personne ne sera laissé de côté.
    Excellent. Merci beaucoup.

[Français]

    Monsieur Lobb, vous avez la parole.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Je tiens à remercier nos témoins d'être venues nous rencontrer.
    Ma première question s'adresse aux représentantes de CARP. J'ai grandi dans le milieu des ventes aux enchères et des affaires immobilières, dans le sud-ouest de l'Ontario. Vous pouvez vous imaginer le nombre de personnes âgées qui doivent planifier leur succession, déménager dans des logements plus petits.
    Je me suis rendu compte, quand je faisais du porte-à-porte lors de campagnes électorales et que je rencontrais des personnes âgées — et je suis certain que vous avez vécu la même chose —, qu'il y avait de nombreux aînés qui avaient très peu d'économies, mais pour qui la maison représentait un véritable bas de laine.
    Je me demande si votre groupe a des idées novatrices sur la façon de les aider. Nous voulons que les aînés restent dans leur maison, et ils tiennent à rester chez eux. C'est là qu'ils ont placé tout leur argent. Ce qu'ils reçoivent du RPC, comme SRG, ainsi de suite, ne représente pas grand-chose.
    Avez-vous des suggestions à formuler?
    Absolument, oui.
    Il y a deux façons d'aborder la question. D'abord, le milieu des affaires encourage souvent les aînés qui possèdent beaucoup d'actifs, mais pas beaucoup de revenus, à souscrire à un prêt hypothécaire inversé. Nous n'approuvons pas vraiment cette approche, parce qu'elle les laisse sans actifs et sans solution de rechange, ce qui crée pour eux un véritable problème. Cette formule peut constituer une solution, dans certains cas, si les personnes ont immédiatement besoin d'argent. Toutefois, ce n'est pas l'une des options que nous privilégions.
    Ensuite, il y a des gens qui vivent dans des maisons qu'ils occupent depuis très longtemps et qui ne peuvent plus se permettre d'y rester parce que les impôts fonciers, les primes d'assurance-habitation, les tarifs des services publics sont trop élevés. C'est à ce niveau que les divers ordres de gouvernement peuvent intervenir.
    Par exemple, en Ontario, le processus d'harmonisation va avoir pour effet de créer une nouvelle taxe provinciale sur l'huile à chauffage. Nous sommes contre cette harmonisation, ou plutôt en faveur d'un remboursement des frais de l'huile à chauffage. Encore une fois, dans le contexte provincial, nous recommandons que ce processus soit délaissé au profit d'un allègement quelconque pour contrer les hausses importantes de l'impôt foncier, par exemple.
    Il existe une multitude d'options qui permettent aux gens de rester chez eux, sans qu'ils aient à convertir leurs avoirs propres en argent comptant qu'ils vont toucher immédiatement.
    D'accord.
    Cette question pourrait manifestement faire l'objet d'une discussion ou d'un débat très long, car je sais qu'il y a de nombreux aînés qui se trouvent dans cette situation aujourd'hui.
    J'aimerais vous poser une autre question au sujet des personnes qui sont dans leur cinquantaine et qui n'ont pratiquement aucune économie, peu importe leurs circonstances. Nous savons que plus nous vieillissons, plus le temps passe vite. Ces gens vont bientôt franchir le cap des 65 ans et se retrouver sans économies. Ils vont vivre la même situation que les aînés que nous venons de décrire, et dont la maison est payée.
    Quelles mesures recommandez-vous, ou que peut faire le gouvernement pour aider les personnes qui n'ont pas encore pris leur retraite à améliorer leurs finances?
(1315)
    Il y a plusieurs choses que nous pouvons faire. Par exemple, nous pouvons, au cours des années à venir — et elles vont arriver très vite, compte tenu notamment du climat économique actuel —, mettre sur pied un régime de pension universel étant donné qu'il y a un Canadien sur trois qui prend sa retraite sans posséder d'économies importantes. Il faudra toutefois une génération de travailleurs avant que l'on puisse voir les fruits de cette initiative et que les gens aient accès à un mécanisme de pension fiable. Nous devons, dans l'immédiat, explorer les pistes de solution qui permettent aux travailleurs âgés de conserver leur emploi et, s'ils le perdent, d'en trouver un autre. Le recyclage est une bonne chose. Le gouvernement a mis sur pied plusieurs programmes, mais le jumelage d'emplois demeure sans doute l'option privilégiée.
    Il y a un élément qu'il convient de mentionner: la discrimination fondée sur l'âge que l'on observe dans la société. En raison de cette discrimination, il est plus difficile pour les aînés de trouver un nouvel emploi. Ce sont souvent eux qui doivent s'occuper d'un être cher plus âgé. Encore une fois, les milieux de travail n'ont pas prévu d'horaires flexibles pour composer avec cette situation. Par ailleurs, la retraite obligatoire n'existe plus à l'échelle provinciale, mais les entreprises sous réglementation fédérale appliquent toujours cette règle. Donc, pour ceux qui doivent continuer de travailler pour pouvoir vivre adéquatement avant de prendre leur retraite, nous voulons nous assurer qu'ils sont en mesure de le faire même après 65 ans. En outre, les régimes de soins de santé, lorsque les employeurs les fournissent, permettent à un grand nombre de ces personnes de cesser de souscrire à l'âge de 65 ans, ou même plus tôt.

[Français]

    Merci, monsieur Lobb. C'est tout. Vous avez dépassé un peu le temps qui vous était alloué. Peut-être que M. Martin va pouvoir prendre le relais à présent et poser ses questions. Par la suite, on va clore la séance.

[Traduction]

    Je voudrais tout simplement poser une question à Mme Munn-Venn. Elle a parlé de la nécessité de considérer la question de la pauvreté du point de vue des droits de la personne. Pouvez-vous nous donner plus de précisions, nous dire pourquoi une telle approche serait importante?
    Bien sûr. Nous avons noté dans le passé, et il s'agit là d'un fait intéressant, que la pauvreté a tendance à être perçue comme un désavantage, un besoin humain. Dans certains cas, c'est vrai. Toutefois, il est important de reconnaître que, d'après la Déclaration universelle des droits de l'homme et d'autres conventions internationales sur les droits de la personne, le droit de vivre à l'abri de la pauvreté est assimilé à un droit de la personne. Il est question ici d'accès à la nourriture, à un logement, à des vêtements, à de nombreux services vraiment essentiels. Le fait de ne pas répondre à ces besoins constitue une violation des droits des Canadiens.
    Il est vrai que, dans le contexte canadien, cette façon d'aborder le problème est nouvelle, mais cela fait partie de l'évaluation périodique universelle que nous avons mentionnée plus tôt. Je pense que nous devons reconnaître que le fait de vivre à l'abri de la pauvreté est un droit de la personne. Il faut, essentiellement, examiner la question sous un angle totalement différent, et prendre des mesures pour assurer le respect de ces droits.
    Merci.

[Français]

    Merci, monsieur Martin.
    Le moment est venu de vous remercier, mesdames, de cette contribution, de ces témoignages qui constituent une précieuse contribution à la conduite de nos travaux. Je suis convaincu que lorsque nous allons faire notre rapport, vous y retrouverez probablement les préoccupations que vous avez manifestées ce matin, de même qu'un certain nombre de suggestions que vous nous avez faites.
    La séance est levée.
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