RNNR Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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CANADA
Comité permanent des ressources naturelles
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 31 mars 2009
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Bonjour tout le monde.
Nous avons aujourd'hui quatre témoins représentant trois groupes.
Vers 16 h 45, nous mettrons fin à cette partie de la réunion pour discuter des affaires à venir, de ce que l'ébauche du rapport pourrait avoir l'air et de certaines autres questions. Je dis cela simplement en guise d'avertissement. Je sais que la sonnerie d'appel se fera entendre à 17 h 15 et nous voulons nous assurer d'avoir suffisamment de temps pour cela.
Pour poursuivre notre étude sur la contribution d'une approche intégrée des services énergétiques dans les collectivités canadiennes, nous accueillons aujourd'hui les personnes suivantes: à titre personnel, Martin Lee-Gosselin, professeur à l'Université Laval et à l'Imperial College London, et Atif Kubursi, professeur d'économie à l'Université McMaster; représentant M.K. Jaccard and Associates Inc, Christopher Bataille, directeur et gestionnaire des opérations, et Robert Joshi, consultant.
Bienvenue.
Nous allons entendre les exposés selon l'ordre dans lequel les témoins sont inscrits sur la liste, en commençant donc par Martin Lee-Gosselin, de l'Université Laval et de l'Imperial College.
Allez-y, je vous en prie.
[Français]
J'aimerais mentionner tout d'abord que je préfère prononcer mes remarques en anglais cet après-midi, dans le but d'accélérer les échanges avec les autres témoins. Cependant, cela me fera plaisir de répondre en français s'il y a des questions en français.
[Traduction]
Je m'appelle Martin Lee-Gosselin. J'ai récemment pris ma retraite de l'Université Laval, qui m'a donné une nomination honorifique. Pour la période allant de 2006 à 2010, je suis également professeur invité à l'Imperial College London.
Je me présente devant vous aujourd'hui en tant que membre d'un groupe de chercheurs et je crois que les messages que nous allons vous communiquer sont plutôt différents de certains de ceux que vous avez entendus auparavant. Mon domaine de travail est le comportement des usagers et des consommateurs, particulièrement dans le contexte de la planification, plus précisément la planification des transports. Durant la première partie de la présente décennie, j'ai également été responsable d'un vaste programme international de recherche, dans 16 universités, sur les comportements des usagers comme élément de simulations concernant l'occupation du sol, les transports, les télécommunications, l'équité et la durabilité.
Je cherche particulièrement à comprendre comment les gens sont susceptibles de répondre aux nouvelles technologies et aux nouvelles politiques, de même qu'à des situations nouvelles comme les pénuries d'énergie. Aujourd'hui, tous ces facteurs convergent dans les systèmes d'aide à la décision dans deux situations de vulnérabilité: le problème aigu des perturbations dans l'offre d'énergie, et le problème chronique du développement non durable et des changements climatiques. J'aimerais également mentionner que je participe à l'organisation des ateliers de QUEST.
L'efficience de l'énergie urbaine est difficile pour les décideurs, en partie parce que les résultats de recherche, tout comme les systèmes énergétiques des collectivités, sont en silos. En 2006, nous avons eu ici un atelier bilatéral RU-Canada sur les exigences scientifiques nécessaires à l'amélioration des systèmes énergétiques intégrés des villes. Même s'il me ferait plaisir de vous fournir certains des résultats de cet atelier, ils sont de nature plutôt technique, étant axés sur les données et la modélisation. Je voulais aussi mentionner que selon ce groupe, qui comprend certains des cerveaux les plus brillants dans le domaine de la modélisation de l'utilisation de l'énergie, les chercheurs ne font pas du très bon travail pour ce qui est d'expliquer aux décideurs les implications des résultats de recherche.
Un peu dans cette veine, j'aimerais partager avec vous six réflexions, que vous voudrez peut être approfondir, au lieu de répéter certaines des choses que vous avez entendues dans d'autres témoignages.
Premièrement, voici une réflexion sur l'intégration elle-même. Le milieu urbain semble homogène pour la majorité des gens qui y vivent. Lorsqu'ils sont préoccupés par l'accès aux garderies, aux magasins, aux soins de santé ou à l'emploi, le monde leur semble homogène, et ils ne voient pas le grand nombre d'intérêts professionnels qui, malheureusement, ne communiquent pas très bien entre eux. Et même si le monde leur semble assez homogène, ils ont eux-mêmes leurs propres silos. Ils ne voient pas nécessairement le lien, par exemple, entre prendre la voiture pour parcourir une petite distance afin d'aller acheter un pain et baisser le thermostat. Nous espérons que, de plus en plus, le consommateur verra ces choses de la même façon.
Le deuxième point, c'est que nous nous demandons souvent si les gens seront capables de voir leur collectivité sous l'angle de l'énergie et de la durabilité. Probablement pas dans l'abstrait pour la plupart des gens. Cependant, l'une des choses que la recherche nous a apprises est que, avec les multiples possibilités novatrices comme celles que nous offrent maintenant les produits et services efficaces sur le plan énergétique, on a des chances de plaire aux gens qui sont mûrs pour un changement dans leur façon de vivre.
Les données longitudinales nous ont appris que, une fois prêts, les gens changent souvent beaucoup de choses à la fois. On remarque effectivement une certaine lenteur à changer des choses qui, pour un observateur de l'extérieur, aurait dû être changées il y a un certain temps. Il y a donc peut-être de bonnes nouvelles ici en ce qui a trait à la création du genre d'environnement dont nous parlons avec les systèmes d'énergie urbains intégrés.
Mon troisième point concerne la sagesse du consommateur. Lorsqu'on en est venu à la conclusion générale que les voitures électriques étaient rejetées par le consommateur, ce qu'on disait, c'est que, de l'avis de la plupart des gens, les voitures électriques telles qu'elles existaient à ce moment-là, particulièrement dans les années 1990, n'étaient pas un très bon substitut des véhicules conventionnels à moteur thermique. Cela ressemblait beaucoup au cas des micro-ondes, qui ont été rejetés à l'origine parce que les gens croyaient qu'ils allaient prendre la place d'un produit conventionnel. Dans leur sagesse, les consommateurs ont imaginé des façons très créatives de faire une place dans leur vie à ces véhicules à piles électriques, aussi médiocres fussent-ils. Des recherches ont été faites à cet égard en Californie et en France.
Je crois que les Canadiens vont inventer de nouvelles façons de vivre dans le contexte des choix éconergétiques qui s'offrent à eux et nous devons comprendre leurs points de vue.
Quatrièmement, je crois qu'il est très important que les gens aient de la rétroaction. Nous devons savoir ce qu'il en est. Les technologies dont vous avez déjà entendu parler, qui permettent notamment les réseaux électriques intelligents et la tarification différentielle des heures de pointe — et, en passant, je ne parle pas seulement de la tarification de l'électricité, mais aussi de celle de la congestion des routes — pourraient un jour offrir aux consommateurs un bilan intégré de la performance énergétique récente et cumulée de leur ménage, pour leurs véhicules et leur logement — en particulier si les véhicules sont branchés à la maison, mais pas nécessairement. Ces technologies finiraient ainsi par faire disparaître la distinction artificielle que l'on fait actuellement entre la consommation énergétique des logements et celle des véhicules.
Il est possible que les informations fournies par un tel bilan soient plus attrayantes pour les consommateurs que les calculs de rentabilité financière. Un tel bilan pourrait les aider à mieux choisir entre divers usages de l'énergie. De la même façon, les communautés ont besoin de la synthèse contenue dans l'ensemble des bilans individuels pour faire le point sur leur situation.
Cinquièmement, avec tout le respect que je dois au député qui m'a averti de ne pas demander d'argent, je pense que le gouvernement fédéral devrait avoir les priorités suivantes dans une perspective d'aide à la décision.
À mon avis, trois priorités s'imposent. La première, c'est que le fédéral continue à jouer le rôle important qu'il joue depuis 1991 en maintenant un bureau central des données nationales sur la consommation finale de l'énergie à des fins de surveillance, de modélisation et d'évaluation. Il s'appuie, pour ce, sur l'expertise des universités, notamment aux trois centres de données et d'analyse en Colombie-Britannique, en Alberta et au Québec.
La deuxième, c'est qu'il faut augmenter les types d'essais dans le cadre des systèmes intégrés d'énergie pour la communauté en procédant à des projets à une échelle appropriée. Pour éviter d'être accaparé par des problèmes institutionnels, quand il s'agit de projets compliqués, il faut procéder à relativement petite échelle si on veut encourager l'entrepreneuriat et la créativité des Canadiens, les encourager à prendre des risques, à apprendre quelles erreurs éviter et à contribuer à façonner une compréhension commune de ce qui mérite d'être fait.
La troisième, c'est que le gouvernement fédéral doit, à mon avis, mettre en place les conditions permettant à des innovations structurantes d'émerger, comme les véhicules à faible émission de carbone ou la production décentralisée d'énergie, dont vous avez entendu parler. Je ne choisis pas ces innovations précisément; ce ne sont là que des exemples. Toutefois, cela ne devrait se faire que si on évalue l'application réelle dans le cadre d'une approche intégrée. Il n'existe pas de solution magique, mais ces innovations contribueront peut-être à surmonter les obstacles en ce qui concerne les systèmes d'énergie urbains intégrés.
En conclusion, mesdames et messieurs, je crois que nous devrions être dans un mode incubateur. Les communautés canadiennes le font depuis des années pour les PME. Pourquoi n'utilisons-nous pas le même modèle pour les systèmes d'énergie urbains intégrés? La variété impressionnante des intervenants qui ont participé à QUEST devrait permettre de développer, de comprendre et de publiciser différentes solutions de gestion intégrée de l'énergie qui répondent aux besoins des communautés de multiples tailles et des diverses régions du Canada.
Les chercheurs sont prêts à aider et sont une source d'innovation. Au Imperial College, par exemple, nous travaillons sur un projet de systèmes d'énergie urbains qui vise à élaborer des systèmes intégrés, notamment pour l'énergie et les déchets. Enfin, nous devons aux chercheurs les méthodes d'évaluation sans lesquelles nous ne pourrions savoir si les nouvelles initiatives seront utiles.
Merci.
Merci beaucoup, monsieur.
Maintenant, nous entendrons M. Atif Kubursi, professeur d'économie à l'Université McMaster.
Merci, monsieur le président.
Je m'adresse également à vous à titre de président d'Econometric Research Limited, organisme spécialisé dans les analyses d'impact. C'est d'ailleurs de ce genre de méthodologie dont je vais vous parler.
Nous savons tous que de nombreuses collectivités canadiennes dépendent d’une seule activité dominante, souvent dans le secteur des ressources comme les mines, les forêts et même le tourisme. En règle générale, ces collectivités éprouvent des difficultés lorsque leur activité dominante est réduite ou que le prix des produits de cette dernière baisse. On assiste aux phénomènes suivants: hausse du chômage, dépopulation du fait que des familles déménagent pour trouver de l’emploi ailleurs, dévalorisation des actifs, chute soudaine du prix des maisons et multiples perturbations socioéconomiques attribuables notamment à la criminalité et à la violence familiale.
Ces collectivités ont éprouvé de grandes difficultés, surtout dans les années 1970 et 1980. Elles ont été confrontées à d'importants problèmes qui avaient été provoqués par les changements structurels découlant de deux accords de libre-échange, de l'imposition de la TPS et des percées technologiques dans le domaine de l'information et des communications. Elles ont dû se restructurer dans des conditions très difficiles et en disposant de ressources et de capacités très limitées.
Aujourd'hui, ces collectivités sont frappées encore plus durement parce que la crise financière mondiale a maintenant migré vers l'économie réelle et elles doivent essentiellement absorber des coûts incroyables en raison de la chute du commerce mondial. En général, ces coûts sont liés à l'exportation, au manque d'accès au crédit, à la chute du prix des ressources et au manque de débouchés.
De façon générale, les collectivités rejettent toute mesure de diversification économique quand le prix des ressources est élevé et que la conjoncture est bonne. Lorsque surviennent les difficultés, les licenciements et la dépopulation, c'est alors que le gouvernement, à savoir les décideurs politiques, les fonctionnaires et les représentants municipaux, et les collectivités s'intéressent au renouveau économique et à la diversification. Mais, en général, au moment où cela arrive, il est extrêmement difficile de relancer l'économie. L'intérêt est accru, mais les capacités sont à leur plus bas niveau et il est extrêmement difficile de faire quoi que ce soit.
Voilà la raison pour laquelle je pense que des systèmes énergétiques intégrés, comme ceux dont il est question ici, pourraient être envisagés comme des pôles de croissance possibles en vue de créer de l’emploi, de diversifier l'économie, de profiter d’avantages comparatifs authentiques — certaines régions ont peut-être plus de soleil ou de vent —, de réduire sensiblement la facture des importations, puisque la plupart de l'énergie utilisée provient généralement de l'extérieur, et de solidifier la base des activités dérivées en amont et en aval.
Ici, le défi consiste à dresser la liste des options et de voir s'il existe des méthodologies, des techniques et des modèles qui vous permettraient de quantifier quelles sont ces options, où elles se situent, quelles impacts elles auront, combien et quels genres d'emploi elles créeront ainsi que leurs chances de réussir. Voilà précisément à quoi servent les analyses d'impact économique.
En général, les économistes envisagent ces questions de bien des façons et les analyses d'impact économique constituent l'une des nombreuses structures de comptabilité sociale utilisées pour déterminer ces choses. À bien des égards, elles ont leur propre créneau. Cet après-midi, je ferai valoir qu'il s'agit probablement du créneau qui s'aligne le mieux avec vos objectifs, à savoir regarder les collectivités et déterminer dans quelle mesure vous pourrez les renforcer, créer des activités économiques alternatives et exploiter certaines des ressources naturelles dont ces collectivités disposent.
Les analyses d’impact économique qui ont été effectuées jusqu'à présent ont toujours été macroéconomiques — c'est-à-dire qu'elles portaient sur des données générales —, mais, dans ce cas-ci, elles seraient probablement de nature trop générale et trop vaste. Ces analyses risquent de ne pas convenir aux collectivités.
En fait, toutes ces collectivités ont effectué des analyses microéconomiques très restreintes et très tronquées qui n'ont pas permis de déterminer la contribution du secteur de l'énergie à l'économie en général. Il est très dangereux — et j'ai vu cela arriver à maintes reprises — pour les gens d'étudier isolément un secteur, celui de l'énergie ou n'importe quel autre, indépendamment des interactions que ce secteur pourrait avoir dans l'économie en général. Une collectivité fait partie d'une constellation d'autres collectivités.
Nous devrions vraiment cibler un système interactif plus général dans lequel le secteur de l'énergie serait perçu comme un élément de la structure économique dans son ensemble, voire même des structures sociale et environnementale. Il ne s'agit pas d'une comptabilité séparée, mais d'une comptabilité qui puisse intégrer beaucoup d'autres facteurs. Le système serait également en mesure d'envisager les choses du point de vue des collectivités au lieu de s'en tenir seulement à regarder l'impact sur le PIB ou l'emploi en général. Il pourrait étudier le revenu d'une collectivité, le prix des maisons qui s'y trouvent, les dysfonctions sociales de ses habitants et les possibilités d'y trouver un emploi.
Les analyses d’impact économique reposent essentiellement sur une structure comptable qui fonctionne très bien au Canada, soit celle des intrants-extrants, dans laquelle les tableaux de données sont produits avec un certain retard. Espérons que nous pourrons faire valoir qu'il serait utile d'accélérer le processus et peut-être d'avoir recours aux ordres inférieurs, habituellement à l'ordre provincial. Ces analyses permettent de mettre en place, comme nous l'avons fait à quelques reprises, un système efficace visant à créer des activités régionales et locales qui tiennent compte des interactions entre les secteurs et les collectivités.
Essentiellement, le système repose sur trois principes. Premièrement, peu importe l'importance des activités — évidemment, la protection de l'environnement constitue un bon objectif en soi —, le fait de faire fi des analyses, surtout des analyses d'impact, ne permet pas d'évaluer les principaux effets de ces activités. En fait, chaque fois que l'on utilise des ressources économiques limitées, cela entraîne des répercussions qui peuvent être identifiées et quantifiées. En général, elles dépassent de beaucoup l'impact initial.
Si l'on tient seulement compte des effets directs et initiaux, on obtient un portrait infidèle, tronqué et limité de la situation. En général, si l'on tient compte des effets directs, indirects et induits — et je vais essayer d'expliquer cela rapidement —, cela donne une meilleure vue d'ensemble de la situation et on se rend alors compte que ces effets sont beaucoup plus importants que l'impact initial. En étudiant un secteur isolément, sans tenir compte des effets dérivés et secondaires, on limite la perception de la réalité et on ne produit pas de résultats complets. Les analyses d'impact permettent de voir tous les impacts, non seulement les impacts directs.
Imaginez que nous vous aidons à étudier les effets de la production d'énergie éolienne dans votre collectivité. Il vous faudrait de l'équipement, et pour de l'équipement, il faut de l'acier. Votre collectivité ne produit peut-être pas de l'acier; il lui faudra peut-être en obtenir de Hamilton et elle aura peut-être besoin de ressources énergétiques d'ailleurs. La collectivité pourrait avoir besoin du plastique de l'Alberta. L'analyse doit tenir compte de tous les impacts secondaires. Ensuite, chaque fois que vous générez, à tous les niveaux, des salaires et des revenus, les gens dépenseront ces derniers en achetant peut-être leur bière préférée, avec modération. Vous devez tenir compte de tous ces aspects. Au bout du compte, vous voudrez également savoir tous les impacts sur la collectivité et ils dépasseront de beaucoup les effets initiaux.
Deuxièmement, lorsque des économistes abordent les analyses d'impact, ils doivent malheureusement presque devenir des alchimistes, en essayant de créer quelque chose à partir de rien. Il existe ce qu'on appelle le coefficient multiplicateur et rien n'est plus dangereux entre les mains des économistes et des fonctionnaires, car il en résulte que tout est multiplié et amplifié.
Ce qui est important de retenir ici, c'est que ces coefficients multiplicateurs sont beaucoup moins nombreux qu'ils ne le sont d'habitude, cependant ils sont encore inexacts. Ce que je fais valoir, c'est que si vous utilisez l'énergie éolienne sans utiliser de combustibles fossiles, il y aura un impact positif à cause de l'énergie éolienne, mais il y aura aussi un impact négatif causé par le processus de réduction de l'utilisation des combustibles fossiles. Nous venons d'effectuer une étude à ce sujet pour le bureau des économies d'énergie de l'OEO, l'Office de l'électricité de l'Ontario, dans laquelle nous avons calculé l'impact net. L'impact net est ce qui compte vraiment.
Il est intéressant de constater que, quand on fait des d'économies d'énergie, les sommes économisées ne disparaissent pas. Nous les appelons les frais évités, mais ces sommes peuvent être réinvesties dans l'économie. Si ce sont les consommateurs qui les réalisent, elles pourront aller vers la consommation générale. Si ce sont des entreprises qui les réalisent, alors ces dernières pourront investir davantage.
Ce qui est d'une importance cruciale ici, c'est de ne pas regarder les impacts bruts, mais les impacts nets. Pour que le système soit efficace, il est également très important d'étudier tous ces aspects en même temps.
Supposons que vous voulez construire un nouveau système de production d'énergie. Cela entraîne des dépenses en capital. Vous auriez donc plus de capital qu'auparavant. Il faut envisager ce coût d'option en se demandant si l'argent serait mieux investi ailleurs dans la collectivité ou à l'extérieur de celle-ci. Il faut tenir compte des coûts opérationnels, des coûts d'entretien et des frais évités. Il faut aussi tenir compte de ce que nous appelons « les investissements induits ». Le fait que vous créez une source d'énergie peut, en soi, inciter d'autres à tirer parti en aval ou en amont de cette source.
Merci.
Merci beaucoup, monsieur.
Nous passons maintenant au dernier groupe, M.K. Jaccard and Associates. M. Christophe Bataille est parmi nous et je crois que c'est lui qui fera la présentation. Vous disposez d'au plus 10 minutes.
Je vous cède la parole.
Merci beaucoup de m'accorder la possibilité de parler ici aujourd'hui.
Par souci de clarté, vous devriez avoir reçu un mémoire de notre part, de même qu'une présentation PowerPoint avec des diapositives bordées d'une ligne verte. Je vais en parler. J'ai l'habitude d'utiliser PowerPoint, et c'est peut-être une béquille, mais qu'est-ce que je peux faire? Est-ce que tout le monde les a reçus? D'accord.
Je commence par me présenter. Je suis le directeur de M.K. Jaccard and Associates, une société d'experts-conseils qui est située à Vancouver. Il s'agit de la section conseil privé d'un groupe de recherche de l'Université Simon Fraser, qui est dirigée par M. Mark Jaccard. Nous analysons toutes sortes de politiques relatives à l'utilisation de l'énergie et aux répercussions de celle-ci. Nous étudions donc la qualité de l'air, l'utilisation de l'énergie et les sources d'énergie. Depuis cinq à dix ans, nous faisons surtout des analyses de politiques climatiques.
Est-ce que tout le monde a ces documents? Parfait, je ne m'inquiéterai plus à ce sujet.
Un de nos principaux outils dans ce dossier — et si vous êtes au courant du débat sur les politiques climatiques, vous en avez peut-être déjà entendu parler —, c'est le SCMI, un modèle de simulation de technologique hybride, qui a été utilisé par Ressources naturelles Canada, le Processus national sur le changement climatique, Environnement Canada ainsi que la Table ronde nationale dans la rédaction de son rapport récent intitulé D'ici 2050, dans lequel on recommande d'établir le prix du carbone au Canada.
En plus d'avoir travaillé pour le gouvernement fédéral, nous avons aussi travaillé pour les provinces de la Colombie-Britannique, de l'Alberta, de la Saskatchewan, de l'Ontario et de la Nouvelle-Écosse et nous offrons également nos services aux municipalités. Nous venons de terminer un contrat pour la ville de Vancouver et nous envisageons maintenant travailler pour d'autres municipalités. Nous nous sommes donc penchés sur tous les ordres de gouvernement au Canada et nous avons surtout étudié les questions relatives aux changements climatiques.
Voilà donc MKJA. Pour votre information, je préciserai que je porte deux chapeaux. J'occupe un poste à l'université, mais 80 p. 100 du temps, je travaille à titre de consultant privé.
Pour situer les choses dans un contexte plus général — et tout le monde autour de la table va savoir ceci — les objectifs nationaux de réduction des émissions de gaz à effet de serre ont été établis à 20 p. 100 en deça des niveaux de 2006 d’ici 2020 et à 60 à 70 p. 100, d’ici 2050. Le Protocole de Kyoto visait une réduction de 6 p. 100 en deça des niveaux de 1990. Dans les faits, nos émissions de gaz à effet de serre ont augmenté de 22 p. 100 par rapport à 1990. Nous avons donc été dans la mauvaise direction pendant toutes ces années, à l'exception des quelques dernières. Ce n'est que tout récemment que les émissions ont commencé à diminuer légèrement.
Le transport personnel, les édifices commerciaux et les résidences personnelles sont responsables d'environ 40 p. 100 des émissions de GES en milieu urbain, et cela comprend le traitement du gaz naturel en amont et la production d'électricité en amont. Si on inclut un peu d'industrie légère — l'industrie légère et le transport des marchandises en milieu urbain —, environ 60 p. 100 des émissions viennent des villes, d'une façon ou d'une autre.
De plus, on prévoit que la population du Canada va augmenter et la plupart de cette augmentation aura lieu dans nos villes. Notre problème de GES est essentiellement urbain et il s'ajoute à tous nos autres problèmes urbains. Cela m'amène à parler des systèmes énergétiques urbains intégrés.
La principale question sur laquelle se penchent les systèmes énergétiques urbains intégrés, c'est de voir comment densifier la population de nos villes, délaisser l'auto pour le transport en commun et marcher davantage. En d'autres mots, comment faire en sorte que toutes nos destinations quotidiennes soient rapprochées, notamment le travail, l'école, la garderie et les magasins. On rapprocherait les édifices pour pouvoir les relier afin que l'énergie puisse être utilisée à plusieurs reprises. On commencerait par consommer de l'énergie de très haute qualité et ensuite l'énergie serait consommée en cascade sous forme de chaleur dans plusieurs édifices au lieu d'avoir un générateur d'air chaud à gaz naturel dans chacun de ces édifices.
De plus, on verrait les édifices autant comme producteurs que consommateurs d'énergie utilisant de l'énergie solaire passive et active et convertissant les déchets en combustible. Ensuite, pour tirer le maximum de ce réseau de petits et grands utilisateurs et consommateurs, on utiliserait un réseau électrique intelligent qui agit davantage comme une toile que le distributeur à sens unique dont nous avons l'habitude. En général, une grande installation de production d'énergie est située dans un endroit et toute sa production doit être transportée aux consommateurs par pipeline. Au lieu de cela, un réseau chercherait en tout temps à utiliser l'énergie la plus propre, la moins chère et la plus fiable.
Voilà la vision d'ensemble, qui emballe beaucoup de gens. La question est de savoir dans quelle mesure le projet est réalisable sur les plans politique et technique.
Le groupe QUEST, Quality Urban Energy System of Tomorrow, a chargé MKJA de faire l'étude quantitative de la faisabilité de ce projet. Combien de mégatonnes d'émissions pourraient être éliminées en réalisant ce projet? Quelles stratégies devrions-nous mettre en oeuvre pour réduire efficacement ces émissions?
Nous avons effectué le travail en deux étapes comme nous le voyons à la diapositive ici. Premièrement, nous avons passé en revue la documentation de ce qui avait déjà été fait, sans essayer de réinventer la roue. Deuxièmement, nous avons fait une analyse quantitative en utilisant notre modèle de simulation.
En examinant la documentation, nous avons trouvé que, outre l'économie d'énergie et le remplacement des hydrocarbures —, en général, on s'accorde pour dire que l'établissement du prix du carbone est la manière la plus efficace de réduire les émissions en encourageant l'utilisation d'autres formes d'énergie —, une politique efficace de densification de nos villes et d'intégration du système d'énergie permettrait de réduire les émissions urbaines de plus de 40 p. 100 dans une période allant de 10 à 20 ans. Au maximum, on pourrait réduire les émissions de 90 p. 100 en intégrant totalement le système d'énergie du centre urbain.
Voilà ce que nous avons tiré de la documentation. Dans quelle mesure cela s'applique-t-il au Canada? Quelles réductions d'émissions pourrions-nous enregistrer?
En nous servant du modèle SCMI, qui ne fait pas ce genre d'intégration énergétique très bien parce qu'il ne tient pas compte des variabilités spatiales, nous avons établi le prix du carbone à un montant pouvant atteindre 200 $ la tonne — ce qui est le maximum auquel quiconque s'attendrait parce que, en général, on considère qu'il s'agit du prix limite qui permettrait d'assurer une production d'électricité verte et de tout convertir à l'énergie électrique — et avons ensuite regardé quelles émissions étaient encore produites dans les centres urbains.
Si on y applique la réduction de 40 p. 100 qui est ressortie de l'examen de la documentation, à combien de mégatonnes est-ce que cela correspondrait? En 2020, cela correspondrait à une réduction d'environ 65 mégatonnes. À l'heure actuelle, les émissions au Canada sont d'un peu plus de 700 mégatonnes alors cela représenterait un peu moins de 10 p. 100 de nos émissions nets.
Même si nous projetons le prix du carbone à 200 $ la tonne, nous n'atteignons pas nos objectifs, mais si nous y ajoutons cette politique de densification et d'intégration, nous ne serions plus obligés d'acheter des permis internationaux. À 100 $ la tonne, 65 mégatonnes équivalent à 6,5 milliards de dollars que nous ne sommes pas obligés de dépenser pour acheter des crédits de carbone d'un autre pays, si nous tentons d'atteindre notre objectif d'ici 2020. Ou alors, nous pourrions combiner l'utilisation de permis à bon prix et une politique de densification et d'intégration dans le but d'en arriver à ces solutions moins coûteuses. Toutefois, cela entraîne des dépenses. Nous n'aurons pas une réduction de 65 mégatonnes d'un simple coup de baguette magique. Une campagne de relations publiques élaborée ne poussera pas les gens à couper de moitié leur utilisation d'automobiles, à n'acheter que ce qui est éconergétique et à emménager dans un condo urbain. Il faudra une stratégie efficace pour y arriver.
Pour obtenir cette réduction de 40 p. 100, il faudrait mettre fin à l'étalement urbain de nos villes. Ensuite, il faudrait identifier les noyaux et les corridors de densification et offrir du transport en commun fiable, sûr, rapide et ponctuel à l'intérieur de ces corridors. Il faudrait modifier les plans de zonage et d'aménagement, l'impôt foncier et les permis pour aménager les espaces extérieurs afin de refléter le nouveau concept urbain que nous visons.
Notre système actuel d'impôt foncier fait l'opposé. Alors qu'on veut densifier nos villes, il fait exactement le contraire. Plus les gens sont éloignés des grands centres urbains, moins ils contribuent à défrayer l'augmentation du coût des égouts, des aqueducs et de l'infrastructure en matière d'électricité qui est encourue en raison de leur éloignement. Il faudrait leur faire payer chaque montant additionnel. Dans les corridors plus denses, il faudrait payer moins d'impôt par unité qu'on ne le fait dans les régions éloignées, mais nous payons tous le même taux. Si vous voulez que cette nouvelle structure urbaine fonctionne, appliquez tous les coûts de l'externalité à l'énergie, l'eau et la gestion des déchets, et mettez en oeuvre une forme quelconque de planification et de politique de la demande et de l'offre en ce qui a trait à l'eau, à la gestion des déchets et aux services énergétiques.
Voilà la première étape que nous avons réalisée pour QUEST. On ne peut appuyer une importante politique gouvernementale sur une étude de projection comme celle-ci. Étant donné que cette dernière semblait présenter des solutions intéressantes, QUEST nous a demandé d'élaborer un plan de travail plus quantitatif qui soit davantage fondé sur des données. Nous avons proposé d'intégrer les plus importantes des diverses disciplines qui entrent en ligne de compte — la politique, l'économie, l'utilisation des terres, les transports et la gestion des déchets — et d'effectuer une étude crédible à l'échelle nationale qui puisse être utilisée pour appuyer ce genre de politique.
Le problème, c'est que, pour ce faire, il fallait demander la collaboration d'universitaires et d'experts qui ne travaillent presque jamais ensemble. Croyez-le ou non, ceux qui conçoivent des modèles de transport parlent rarement avec ceux qui planifient l'aménagement des sols ou les économistes en matière de changements climatiques. Pour une raison que j'ignore, c'est ce qui se produit. L'objectif était donc de rassembler l'opinion des experts de tous ces domaines dans une seule étude.
La méthode que nous avons suggérée — et il ne s'agit ici que d'une proposition de plan de travail — était d'utiliser SCMI, le modèle de simulation de technologie hybride, comme modèle d'intégration. Au fur et à mesure que nous réduisons la consommation d'électricité et de gaz naturel dans nos villes, nous voulons savoir quelles réductions d'émissions sont effectuées dans les champs de gaz naturel et par les producteurs d'électricité.
Toutefois, au lieu d'utiliser les données fournies dans la documentation pour réussir à densifier les villes et à intégrer l'énergie, nous nous sommes servis de modèles spécialisés d'aménagement, de transport et d'énergie pour créer des villes types de petite, de moyenne et de grande taille, qui se trouvent dans trois scénarios différents. Premièrement, un scénario de référence, dans lequel on continue de construire la ville de la même manière que d'habitude, avec des banlieues qui s'étalent tout autour. Deuxièmement, un scénario où les normes technologiques seraient suffisamment élevées et où une forme quelconque de prix sur le carbone est imposée. Troisièmement, un scénario où sont aussi adoptées des politiques modérées et musclées visant la densification et l'intégration énergétique, pour voir ce qui arriverait. QUEST essaie d'obtenir suffisamment d'appui pour mener à bien ce projet.
D'abord et avant tout, la forme urbaine est un choix d'ordre politique. Elle ne tombe pas du ciel; nous la choisissons. Nous la choisissons en établissant le zonage municipal, en adoptant, à l'échelle provinciale, des lois qui dictent la manière dont nos municipalités sont administrées, en choisissant comment dépenser les fonds fédéraux pour l'infrastructure au moment d'envisager notamment la construction de nouvelles routes et la réalisation de nouveaux projets de transport en commun. Il s'agit d'un choix d'ordre politique. En d'autres mots, nous pouvons choisir d'avoir soit des villes éparses et axées sur l'utilisation d'automobiles, soit des villes denses et sûres où l'on marche. Cela repose entre les mains des décideurs.
Deuxièmement, la densification et l'utilisation intégrée et en multiples étapes de l'énergie par les bâtiments industriels, commerciaux et résidentiels peuvent réduire les émissions de GES, les polluants atmosphériques et la consommation d'énergie du même coup, et, si tout est bien fait, également améliorer la qualité de la vie en milieu urbain.
Comme je l'ai dit, la question relève de plusieurs gouvernements. Les municipalités jouent un rôle important à ce sujet, mais elles sont assujetties aux lois provinciales qui dictent les règles. Le gouvernement fédéral joue aussi un rôle en déterminant comment il répartit les fonds pour l'infrastructure.
Enfin, comme les autres experts l'ont dit à cette table, nous n'avons pas d'outils adéquats pour évaluer les approches intégrées. Toutefois, notre deuxième étape va dans ce sens.
En conclusion, au Canada, nous disposons de certaines des meilleures ressources au monde, notamment en matière de planification urbaine, de gestion de l'énergie et de traitement des eaux usées. Essentiellement, nous avons tous les outils nécessaires pour veiller à ce que la reconstruction des infrastructures qui s'en vient aille dans la bonne direction à long terme, soit pour les prochains 50 à 100 ans, non seulement pour nous permettre de sortir de la période de récession dans laquelle nous nous trouvons en ce moment.
C'est tout. Merci.
Merci beaucoup.
Je vous remercie tous pour vos présentations.
Nous passons maintenant aux questions, en commençant par M. Reagan, pour au plus sept minutes.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Permettez-moi de commencer par remercier tous les témoins de s'être déplacés pour partager leurs connaissances avec nous aujourd'hui. Nous l'apprécions tous, j'en suis certain. C'est bon d'avoir la possibilité de discuter avec vous.
Le budget du gouvernement consacre 1 milliard de dollars à l'établissement d'un fonds pour l'énergie propre. La sous-ministre des Ressources naturelles était ici il y a environ un mois et demi, je pense, et elle a semblé indiquer que les trois quarts, ou plus, de cet argent serviraient à mettre en oeuvre le captage et le stockage du carbone, et que le reste serait investi ailleurs.
Que pensez-vous de cette répartition des ressources?
Je ne considère pas que je sois qualifié pour répondre en détail à cette question. En ce qui concerne la distribution des ressources, j'espère qu'un grand pourcentage de ces dernières sera affecté aux municipalités plutôt qu'au captage et au stockage du carbone. C'est ce que je préférerais.
Merci.
La question ici est de savoir quelles sont les autres options. Comment faire pour comparer l'option A à l'option B? Les ressources sont limitées et si elles sont consacrées à une utilisation, alors il faut regarder les répercussions qu'elles auraient eues si elles avaient été affectées ailleurs. Cela est d'une importance critique, particulièrement en ce moment. Notre préoccupation prédominante, c'est d'éviter de faire ce qui a été fait dans le passé. Cette crise nous donne l'occasion de réévaluer et de préciser nos objectifs. Quel genre d'avenir voulons-nous créer? Notre préoccupation, c'est d'éviter de faire ce qui a déjà été fait, d'essayer de créer une économie durable et de voir à quel point nous pouvons tirer profit de la conversion de l'environnement et de l'économie.
Les gens pensent toujours que, sur certains points, l'économie et l'environnement s'opposent. En réalité, il y aurait très peu de compromis à faire et il s'agit vraiment d'une question de plaire aux deux ou de ne plaire à personne. Il faut se demander combien d'emplois seront créés au bout du compte, surtout quand le taux de chômage augmente très rapidement, et quelles seront les répercussions de ces emplois sur le plan de l'environnement, des changements climatiques et de la vie saine à laquelle nous aspirons tous.
Pour commencer, je dirais que nos objectifs sont si élevés qu'il nous importe de faire absolument tout ce que nous pouvons. Nous devrons faire le captage et le stockage du carbone. Nous devrons décarboniser notre système d'approvisionnement énergétique, mais nous devrons également aborder le facteur de la consommation dans l'économie.
Évidemment, si on dispose d'un montant de 1 milliard de dollars, il faudra le répartir d'une façon ou d'une autre. Toutefois, j'établirais deux priorités. Oui, il faudra en affecter au chapitre du captage et du stockage du carbone.
Dans une certaine mesure, nous savons déjà comment effectuer certains changements alors il s'agit davantage d'élaborer une stratégie pour assainir nos centres urbains, d'amorcer une initiative stratégique pour y arriver. Or, dans le cas du captage et du stockage du carbone, ce n'est pas encore une technologie tout à fait viable. Tous les éléments sont en place, mais il faudra que la technologie fasse ses preuves.
Des efforts sont déployés partout dans le monde à cette fin. Nous sommes l'un des nombreux pays à le faire. À certains égards, nous devrions presque travailler en partenariat sur certains de ces projets et collaborer notamment avec les Norvégiens et les Américains.
Je me demande, alors, si vous seriez tous d'accord pour dire que suffisamment de fonds ont déjà été affectés au développement de systèmes énergétiques intégrés. Personne d'autre ne nous a dit cela. Est-ce bien ce que vous êtes en train de dire? Le gouvernement affecte-t-il déjà assez de fonds au développement de systèmes énergétiques intégrés?
Je ne sais pas si c'est autant une question de financement qu'une question d'action stratégique. La technologie du captage et du stockage du carbone est définitivement devenue une priorité et nous prenons des mesures pour pouvoir l'utiliser, mais je n'ai pas vraiment vu le gouvernement adopter de mesures concrètes pour développer des systèmes énergétiques urbains intégrés.
Si vous me le permettez, j'aimerais ajouter que nous aimerions que le gouvernement accorde plus de priorité à cela. Comme Chris l'a souligné tout à l'heure, en général, la consommation d'énergie en milieu urbain génère environ 60 p. 100 de nos émissions. C'est un gros morceau. Pour régler ce problème — non en évaluant séparément l'efficacité énergétique d'un bâtiment ou d'une fournaise, mais en cherchant comment intégrer tous les éléments — il faudra déployer des efforts proportionnés aux solutions que de tels systèmes offriront.
En ce qui concerne la réduction des émissions et la transition vers des solutions plus éconergétiques, ces systèmes pourraient donc nous permettre de faire d'énormes progrès.
C'est sans compter les perspectives socioéconomiques qui ont été abordées. Toutefois, seulement en ce qui concerne la qualité de l'air, la réduction des émissions et l'utilisation de l'énergie, ils nous permettront de faire d'énormes progrès.
Récemment, comme vous le savez peut-être, l'Ontario a présenté un projet de loi sur l'énergie verte visant à promouvoir le développement de sources d'électricité, telles que le vent, le solaire et la biomasse. Nous avons aussi vu le gouvernement Obama investir beaucoup d'argent dans les sources d'énergie renouvelables. À votre avis, quel est le bilan du gouvernement fédéral dans ce domaine? Il semble investir beaucoup moins.
Il n'y a aucun doute que nous devons examiner et analyser toutes les sources d'énergie alternatives et non conventionnelles et voir quels en seraient les conséquences.
Les gouvernements visent de nombreux objectifs. Nous devons examiner chaque programme en fonction des buts que nous avons établis. Par exemple, si vous voulez réduire les émissions, mais créer des emplois en même temps, alors il faudrait vraiment étudier les résultats qu'un programme ou une dépense donnée produirait dans ces domaines. C'est seulement en tenant compte de l'ensemble de la situation qu'il est possible de déterminer quels sont les éléments communs et quels sont les avantages et inconvénients de chaque option afin de comprendre vraiment ce qu'il en est.
Toutefois, si nous étudions chaque élément séparément et décidons que nous voulons utiliser une énergie non conventionnelle, cela pourrait considérablement aggraver le problème du chômage ou réduire les possibilités d'emplois. Cela pourrait augmenter le coût que les entreprises ont à défrayer au chapitre de l'énergie, ce qui pourrait compromettre le secteur manufacturier encore davantage. Nous devons vraiment étudier chaque dépense en fonction des effets qu'elle aurait sur l'atteinte de ces buts. Nous aimerions vraiment que toutes ces dépenses soient analysées en fonction de leurs effets sur ces critères, que ce soit la création d'emplois, la protection de l'environnement, la réduction des émissions ou une approche intégrée pour réduire la consommation d'énergie dans les noyaux urbains.
On ne peut traiter ces questions séparément. Il faut vraiment les traiter ensemble pour voir dans quelle mesure chaque proposition permet d'atteindre ces divers buts et quels en sont les avantages et les inconvénients.
Merci. M. Regan.
Nous allons maintenant passer à Mme Brunelle, du Bloc québécois, qui dispose de sept minutes.
[Français]
Bonjour, messieurs, et merci de votre présence.
J'ai une question qui pourrait intéresser plusieurs d'entre vous.
Monsieur Lee-Gosselin, vous parlez du rôle du gouvernement fédéral en disant qu'il devrait mettre en place des conditions permettant à des innovations structurantes d'émerger.
J'aimerais partager avec vous ce que j'ai lu au sujet du centre intégré de recherche sur l'hydrogène, qui est un centre réputé de recherche dans la circonscription de Trois-Rivières. Le chercheur responsable était inquiet. Il disait que la diminution marquée du prix de l'essence et la crise économique viendront réduire les investissements dans la recherche. Le développement de l'hydrogène est arrivé à un moment critique. Ce chercheur a fait une analogie en disant que l'Europe continuera d'avoir une avance stratégique sur nous parce qu'elle fait de la recherche et pourra faire pour l'hydrogène ce qu'elle a fait pour l'éolien, de sorte que nous devrons acheter cette technologie.
Vous voyez où je veux en venir. Doit-on faire un virage important pour renverser la vapeur? C'est le cas de le dire. On a dû faire des efforts considérables pour qu'une petite ville de 130 000 habitants comme Trois-Rivières ait un centre intégré de recherche sur l'hydrogène et soit dotée d'une université. Cependant, il ne faudrait pas qu'au moment de la concrétisation, plus rien ne se passe.
Il n'est pas raisonnable de croire que le prix du pétrole demeurera à 40 $ ou 50 $ le baril encore longtemps. Le gouvernement fédéral doit assurer une certaine continuité par rapport aux options envisagées pour l'avenir. Je n'ai aucune difficulté à appuyer la poursuite d'un tel projet, qui est d'une grande importance pour une ville comme Trois-Rivières. J'en suis bien conscient, mais je ne connais pas les détails.
Il y a un centre de recherche sur l'hydrogène à Vancouver. Je l'ai visité, et vous le connaissez peut-être. Vous avez parlé du transport urbain, entre autres choses. À Vancouver, certains autobus fonctionnent à l'aide de piles à hydrogène. Je trouve que c'est une avancée intéressante.
Monsieur Bataille, vous avez dit que le problème des GES est un problème urbain, qu'on a besoin de transport intelligent et que l'étalement urbain est un choix politique. Je suis assez d'accord avec vous. Mais il ne faut pas nier la résistance au changement. L'étalement urbain est un mode de vie. Depuis les années 1960, on nous vend le petit bungalow en banlieue, la piscine et la petite famille heureuse. On a construit des écoles un peu partout. Comment peut-on renverser la situation?
À Montréal, on a fait beaucoup d'efforts pour inciter les gens à vivre en ville, mais les gens ne veulent pas y aller. Que fait-on? On a beau dire que ce sont des choix politiques, mais que fait-on, comme politiciens?
[Traduction]
C'est une question de planification et de politique. Les urbanistes sont généralement d’avis que cela fait 30 ou 40 ans que notre approche est erronée sur plusieurs points car nous construisons des infrastructures très coûteuses qu’il nous est impossible d’entretenir parce que l’assiette fiscale par unité de territoire est tout simplement insuffisante.
Il faudra d'une façon ou d'une autre effectuer un certain repli. C’est essentiellement une question de développement intelligent. On peut créer un ghetto ou un quartier très huppé, tous deux densément peuplés, ou encore en arriver à un juste milieu. Mais la chose est possible.
Je suis d’accord avec vous. Je le répète, il faut explorer toutes les possibilités afin de réduire nos émissions en fonction des cibles établies car la majorité de nos partenaires commerciaux chercheront à en arriver à des réductions de l’ordre de 80 p. 100 d'ici quelques dizaines d'années.
Nous devons donc envisager toutes les possibilités.
Mme Brunelle, je crois que vous avez raison, mais il existe deux dynamiques et elles semblent entrer en conflit. La première dynamique est la ressource naturelle la plus importante de toutes, le cerveau humain. Il s’agit de nos connaissances, de notre créativité, de notre innovation. Il ne fait aucun doute qu’à mesure que les ressources s’amenuiseront et que le prix de l’énergie augmentera, il sera intéressant de constater à quel point ces cerveaux seront en mesure de concrétiser les changements.
L’autre dynamique, qui est aussi assez dangereuse, est le fait que nous ne pouvons pas toujours nous fier à des solutions technologiques ou être persuadés que la technologie permettra d'obtenir le changement voulu dans la proportion voulue et au moment voulu.
Il y a donc ces deux dynamiques. Jusqu’à quel point un gouvernement est-il en mesure de créer le contexte, les incitatifs, les capacités et d'habiliter les universités, nos cerveaux et notre secteur privé à composer avec ces exigences tout en demeurant réaliste et en respectant les rigoureuses contraintes budgétaires qui nous permettraient de réaliser ces choses avec patience et comme il se doit?
Vous avez aussi indiqué que nos villes croissent depuis les années 1950 et 1960. Il nous faudra autant de temps, sinon davantage, pour faire marche arrière.
Nous avons donc besoin de politiques stables, uniformes et justes qui ne pénalisent pas trop un groupe en particulier. Il ne faut pas pénaliser les investissements non conformes à notre orientation. Il est juste que tous les investissements mineurs et à venir soient faits judicieusement.
[Français]
Tous ces problèmes sont très complexes. On n'a pas de plan directeur à long terme. On investira massivement dans des infrastructures afin de redresser l'économie, mais va-t-on investir dans des infrastructures qui permettront de réaliser des économies ou dans des moyens intégrés pour développer l'énergie? Ça me préoccupe un peu. On semble tirer dans tous les sens, sans savoir exactement où l'on va.
[Traduction]
[Français]
À peu près la moitié de l'environnement bâti qui existera dans 30 ans n'existe pas encore. Il y a donc des occasions à saisir. Notre recherche révèle qu'on peut réaliser des économies même quand on vit dans un bungalow et en banlieue. Par exemple, dans la ville de Québec, le vélo est bien présent.
[Traduction]
Merci, monsieur le président, et merci aux témoins.
Monsieur Bataille, tous les témoins en ont parlé, mais j’aimerais obtenir une réponse directe de votre part. Avec tous ces plans et ces mises en oeuvre, vous avez parlé d’établir efficacement les prix ou d’inclure les coûts actuellement payés par d’autres dans nos projets.
Quelle est l’importance de l’établissement du prix du carbone dans certains des rajustements dont vous parlez relativement à la conception et à la configuration de nos villes?
Donc, si le prix du carbone est essentiel et que le mécanisme d'établissement des prix que nous choisissons est important, le gouvernement devrait-il analyser sa façon de prioriser les dépenses?
J’ai noté que, sur les cinq points dont vous nous avez parlé, la plupart ne sont pas de compétence fédérale. Ce comité doit présenter des recommandations au gouvernement fédéral. Il y a le mécanisme des dépenses et celui de l'établissement du prix de la tonne de carbone.
Faudrait-il ajouter un processus de filtration ou d'analyse aux mesures gouvernementales en matière de dépenses afin d'être aussi efficaces que possible en ce qui concerne la réduction de chaque tonne de carbone?
Je vais vous donner un exemple. Il y a un an, un an et demi, j'ai fait partie d'un comité chargé d'examiner la mise en oeuvre d'importantes mesures gouvernementales sur les biocarburants, en particulier l'éthanol de maïs. Nous avons tenté de faire adopter un amendement prévoyant l'utilisation de biocarburants permettant la plus importante réduction de gaz à effet de serre possible par millier de dollars. Cet amendement a été rejeté et, vous savez, cela m'a dérouté.
Dans quelle mesure est-ce important pour l'avenir de disposer d'une évaluation supplémentaire sur les efforts déployés par le gouvernement au sujet du coût à la tonne?
C'est intéressant. Vous dites que vous avez besoin d'un filtre et d'une évaluation pour chaque action. Le filtre le plus efficace est toutefois un prix du carbone efficace et un marché privé fonctionnant dans les limites du prix du carbone. Les fonds et les investissements seront fonction de ce qui sera jugé rentable à long terme.
Non, non. Le plus important, c'est avant tout de viser l'ensemble des émissions. Il a beaucoup été question des grands émetteurs finaux, mais très peu de l'ensemble de notre économie, ce qui comprend la consommation urbaine dans nos systèmes urbains.
Il faut donc englober l'ensemble des émissions. Il n'en a pas été beaucoup question ici.
Quant à la façon d'y parvenir, cela peut se faire grâce à un système de plafonnement et d'échange d'amont de très haut niveau, auquel pourrait de greffer un système de plafonnement et d'échange d'aval. Il est possible de taxer directement le carbone. Il existe plusieurs façons. Mais il faut d'abord un système qui englobe et taxe tout. Cela réglera la majeure partie du problème de filtration.
J'aimerais poursuivre sur ce sujet.
Comme Chris l'a indiqué, l'espace urbain est un choix politique. La modélisation va devenir plus détaillée. Il ne faut pas oublier que le prix du carbone a des limites, car les véhicules et les bâtiments deviennent très éconergétiques. Cet aspect intégré est toutefois directement lié aux politiques municipales, provinciales et fédérales. Le marché ne peut y fonctionner pleinement. Le gouvernement doit faire des choix.
Je devrais peut-être m'adresser à vous sur ce sujet, monsieur Kubursi. Vous avez parlé du fonctionnement des modèles économiques et de l'ensemble des coûts, qu'il s'agisse de comprendre les répercussions réelles des dépenses gouvernementales ou l'effet multiplicateur, qu'on semble selon moi utiliser assez librement et de façon assez biaisée.
Le gouvernement utilise la déduction pour amortissement accéléré pour les sables bitumineux, ce qui permettrait de radier plus rapidement ce projet. Comment appliqueriez-vous votre modèle à un développement industriel de ce genre si nous tentions d'inclure le plein coût de cette façon de produire cette source d'énergie?
C'est assez équitable. Tout d'abord, il est très important d'établir un prix à partir du coût complet. Le marché n'est plus efficace lorsque les pollueurs imposent à des tiers des coûts pour lesquels ces derniers ne sont pas responsables. Il serait plus efficace d'inclure toutes les influences de tiers qui provoquent l'échec du marché dans une subvention fiscale s'appliquant à l'établissement d'un prix à partir du coût complet. Les transformations seront plus efficaces. Cela ne fait aucun doute. Les preuves à l'appui ne manquent pas.
Ce qui m'inquiète, c'est que lorsque le gouvernement cherche à atteindre des objectifs multiples, il se fonde sur un instrument ou un critère et suppose que tous les autres sont accessoires. Cela rejoint ce que je vous ai présenté plus tôt. Oui, il faut un système de classification en fonction des émissions ou des réductions de carbone, mais il faut aussi tenir compte de l'emploi, des aspects socio-économiques et de l'intégration de l'économie. Il faut aussi tenir compte de plusieurs autres objectifs. Chaque critère devrait être classé en ordre d'importance, peu importe la mesure prise.
Dans mon cas, par exemple, il s'agit des répercussions d'un investissement en particulier. Je parle d'emplois, de valeur ajoutée, de salaires, de types d'emplois, de répartition régionale et de l'aspect particulier de ces répercussions. Certaines activités pourraient être concentrées en milieu urbain ou amélioreraient la situation dans le Sud tout en dévorant totalement le Nord.
Le gouvernement fédéral a présenté un train de mesures de relance, préconise actuellement l'urgence et ne cesse de répéter que nous avons avant tout besoin de routes et de ponts. J'ai toutefois du mal à m'imaginer les frais réels engagés pour ces projets au-delà de la simple construction du pont ou de la route.
Vous avez parlé d'étalement urbain, des coûts totaux, des années de planification. Nous avons encouragé cet étalement. Nous avons fait en sorte que les terres soient abordables. Nous avons subventionné cet étalement.
Des mesures de relance économique majeures supposent que le gouvernement investit des sommes et qu'il évalue le nombre d'emplois créés. En ce qui concerne ces autres coûts dont vous avez parlé aujourd'hui, ni le ministre des Finances ni qui que ce soit d'autre ne nous ont parlé des coûts liés à un investissement de trois milliards de dollars pour la construction de ponts ou de routes d'un bout à l'autre du pays.
Je vais conclure par la question suivante. Un des témoins a déclaré que nous devrions financer des plans et non des projets, et que certaines collectivités canadiennes se penchent sur ce que vous avez dit aujourd'hui. Elles ont des plans énergétiques. Elles tentent de les intégrer, mais elles disposent d'un financement très restreint. Le gouvernement arrive et dit: Vous voulez construire un pont? Construisons-en un. Nous ne voulons pas seulement un plan, nous voulons aussi couper un ruban. Nous voulons pouvoir présenter quelque chose au bulletin télévisé.
Comment contourner ce problème? Comment le gouvernement peut-il mettre en place un filtre à un niveau suffisamment élevé pour que la totalité du financement fasse d'abord l'objet de cette évaluation?
C'est votre suggestion. Vous dites qu'il ne devrait pas y avoir un cadre unique, mais de nombreuses redditions de comptes afin de tenir compte de toutes les répercussions. Par exemple, vous dites avoir vraiment besoin d'un pont ou d'une route qui permettrait d'augmenter ou d'accélérer l'étalement urbain et l'exode vers les banlieues, mais votre objectif pourrait en fait être la densification sur le plan de l'efficacité énergétique.
Il faut aborder ces questions sous divers angles. Elles devraient passer par plus d'un filtre. C'est au bout du compte à vous qui, dans une démocratie, représentez le choix du peuple, d'établir des priorités. Vous devriez donc examiner tous ces filtres, les classer, puis leur accorder un poids relatif.
C'est au bout du compte à vous qu'il revient de prendre une décision au nom du peuple et vous devez en assumer les conséquences. Vous êtes responsables du poids que vous accordez à tel ou tel facteur. Les économistes, les urbanistes et les transporteurs peuvent vous exposer les conséquences des divers choix, mais quant à décider lequel devrait primer sur l'autre ou être plus important... Ce que nous disons ici, en fait, c'est qu'il ne faut pas utiliser qu'un seul cadre social, un seul cadre comptable. Utilisez-en plusieurs. Mais c'est quand même au décideur que revient la responsabilité d'attribuer un poids à tout cela.
Merci, professeur. Merci, M. Cullen.
Passons maintenant aux députés gouvernementaux. M. Hiebert, puis M. Anderson s'il reste du temps.
Merci, monsieur le président, et merci à vous tous d'être ici aujourd'hui.
Je vais d'abord m'adresser à M. Bataille. J'ai lu votre rapport et j'aimerais éclaircir quelques points. J'espère que vous pourrez m'aider à mieux comprendre vos propos.
Ma première question concerne le prix du carbone. Lorsque vous parlez de faire grimper le prix du carbone à 200 $ la tonne, s'agit-il d'un système de plafonnement et d'échange, ou d'une taxe sur le carbone?
Il existe quelques légères différences, mais sur le plan fonctionnel, sur un graphique, elles sont équivalentes. Cela dépend des permis relatifs au système de plafonnement et d'échange. S'agira-t-il de mises aux enchères complètes, de droits acquis, d'adjudication ou autre? En ce qui concerne l'envoi d'un signal de prix à l'économie toutefois, elles sont équivalentes sur le plan fonctionnel.
Avez-vous fait des recherches sur l'effet qu'aurait une taxe sur le carbone de 200 $ la tonne sur la famille moyenne?
Quelles seraient les répercussions financières sur une famille moyenne qui dépense 1 500 $ d'essence par année? Cela n'inclut pas les dépenses liées au chauffage et à l'électricité.
Si j'ai bien compris--et je devrais prendre quelques minutes pour faire le calcul exact--, l'écart entre le Royaume-Uni et le Canada au sujet du prix moyen de l'essence représente déjà une taxe sur le carbone d'environ 170 $ la tonne. L'écart entre les prix à la pompe au Royaume-Uni et au Canada représente déjà 170 $ la tonne. Mais, je le répète, cela reste sujet à vérification.
Vous dites que lorsqu'ils paient le litre d'essence environ 4,50 $ alors que nous ne payons que 1 $, cela équivaut à une taxe sur le carbone de 170 $ la tonne?
D'accord.
J'ai apprécié vos observations au sujet du travail cloisonné. Je me demandais si vous aviez mené des recherches en collaboration avec les sciences sociales au sujet de l'incidence de la densification des populations jusqu'au point que vous laissez entendre. Ma question est la suivante: à partir de quel point la densité cause-t-elle davantage de problèmes qu'elle n'en résout? Je pense bien entendu à des endroits comme ces maisons en rangée en Écosse où l'espérance de vie est de 63 ans. Nous avons tous en tête des exemples urbains que nous ne souhaitons pas répéter.
D'un point de vue social, qu'est-ce qui vous permet de croire qu'il serait bon de confiner autant de gens dans un espace aussi restreint? Plus précisément, vous avez dit que nous choisissons entre l'étalement et des villes densément peuplées, sécuritaires et que l'on peut parcourir à pied. Je crois que la densité n'est pas synonyme de sécurité.
Je ne suis pas spécialiste en sciences sociales... je suis un économiste de l'énergie. C'est mon métier. C'est ce pourquoi j'ai été formé. Mais j'examine les exemples. Selon la façon dont on construit une ville, on peut obtenir New York, Genève ou São Paulo. Cela dépend de la façon dont on gère la ville et la société.
Il pourrait donc être bénéfique de convoquer de tels spécialistes en sciences sociales.
Combien de temps nous reste-t-il, monsieur le président?
D'accord.
J'aurais une brève question à l'intention de M. Lee-Gosselin.
Selon le sixième point de votre exposé, « nous devrions être dans un mode incubateur. » Qui est ce « nous »?
Je crois que je me risquerai à dire qu'il y aurait un intérêt commun entre le gouvernement fédéral, à qui nous nous adressons aujourd'hui, et les autres parties intéressées, dont les ONG et les autres ordres de gouvernement. Je crois qu'il s'agit d'un très très vaste « nous ». Je crois simplement que la société serait bien servie si nous pouvions en apprendre davantage sur la façon de produire cette énergie intégrée, de façonner différents futurs énergétiques intégrés.
Messieurs, merci d'être ici aujourd'hui. Je ne pense pas avoir le temps d'aborder tous les sujets que je voulais couvrir.
Je m'intéresse aux collectivités rurales. Une bonne partie de la circonscription que je représente est composée de petites collectivités de 300 à 1 000 habitants, éloignées de 10 milles les unes des autres. Je me demande simplement si ce que vous suggérez est pertinent pour ces petites collectivités. Vous pourrez peut-être en parler après.
J'aimerais d'abord revenir sur la question des coûts. M. Bataille a dit qu'il serait important que le prix du carbone englobe tout. Je voudrais souligner les répercussions sur le logement, le cas échéant, car la situation de bien des citadins est précaire en ce qui a trait au logement abordable--des familles de jeunes travailleurs et autres. Des témoins nous ont dit que des coûts supplémentaires de l'ordre de 150 000 $ par unité sont associés à la réalisation de ces projets.
Selon moi, pour que tout cela soit efficace, il faut augmenter le coût des logements normaux actuels jusqu'à ce que ces projets soient économiques, ou alors tenter de faire baisser leur prix. Ce prix de 100 $ à 200 $ la tonne ne fait-il pas augmenter le coût de la vie et le coût du logement pour tout le monde? Je me demande si vous avez étudié les répercussions sociales sur ces centaines de milliers de personnes qui seraient chassées du marché de l'habitation par le coût de l'ensemble du projet.
Deux facteurs entrent ici aussi en ligne de compte. Dans certains de nos modèles, un prix de 200 $ la tonne est parfois le résultat d'une électrification complète ou d'une réduction marquée des émissions. Il se peut qu'il n'y ait aucune taxe sur le carbone à payer simplement parce que le bâtiment n'est alimenté par aucune source d'énergie qui brûle directement des combustibles fossiles. C'est un facteur.
D'après nos modélisations--des simulations, car qui sait ce que l'avenir nous réserve —, il se peut que ces collectivités intégrées ne produisent pratiquement aucune émission de GES et qu'il n'y ait donc aucune taxe sur le carbone à payer.
On nous a dit que les coûts supplémentaires des unités s'élevaient à environ 150 000 $. Le marché doit en tenir compte. Soit il n'y a pas de marché parce que les gens ne sont pas intéressés à acheter, soit il faut faire augmenter les prix d'autres logements ou abaisser les prix de ceux-ci afin d'intéresser les gens.
Je le répète, il s'agit de collectivités d'avant-garde, de prototypes. J'en conviens, il est assez courant d'obtenir de telles hausses de prix lorsque vous construisez quelque chose pour la première fois.
Pensez à ceci. Et si les nouvelles normes de construction correspondaient à ces critères? Si tous les constructeurs et entrepreneurs se mettaient à construire selon ces normes, les coûts à l'unité diminueraient grandement. Mais vous avez raison. De tels chiffres sont réalistes au début.
J'aimerais ajouter que d'après ce que j'ai lu, le coût serait de 3 p. 100 à 5 p. 100, ou de 2 p. 100 à 5 p. 100 par unité. Il est possible que certaines collectivités soient très avancées, avec par exemple des piles photovoltaïques partout. Cela peut coûter très cher, mais l'efficacité des bâtiments et le fait de relier l'ensemble de la collectivité permettent une importante réduction des coûts.
Si vous parlez d'une réduction de 40 p. 100 des GES, il faut que ce soit plus que 2 ou 3 p. 100. Si j'ai bien compris, il est possible de réaliser des économies de l'ordre de 2 ou 3 p. 100, mais pour obtenir le genre de réduction des GES dont vous parlez, il faut modifier en profondeur le style de vie des gens et leurs habitations. C'est irréalisable, n'est-ce pas?
Pas nécessairement, mais une partie du travail consiste à mieux explorer ce sujet. Selon moi, nos politiques ne sont pas encore au point et il faut les améliorer.
Chris a parlé de cascade énergétique. Énergie intégrée ne signifie pas que toutes les collectivités utilisent le même type d'énergie. En région rurale, il pourrait y avoir cascade énergétique avec les agriculteurs locaux. L'agriculture présente certaines possibilités. Une industrie légère pourrait par exemple fournir de la chaleur à ses voisins. Dans le cas de l'agriculture, on pourrait utiliser les déchets d'origine animale ou d'autres produits pour produire de l'énergie et créer des combustibles. Dans une grande ville, il pourrait y avoir des noeuds avec transports en commun de masse. Cela ne constituerait pas une solution dans une petite collectivité, mais certains aspects sont pertinents.
Merci, M. Joshi. Merci, MM. Anderson et Hiebert.
Nous passons maintenant à l'opposition officielle pendant cinq minutes. Monsieur Val...?
Je viens de la ville de Guelph. Nous avons adopté ce que nous appelons un plan énergétique communautaire, dont nous sommes très fiers. Certains d'entre vous hochent la tête, ce qui me laisse croire que vous en avez entendu parler. Nous recueillons le méthane provenant d'anciens dépotoirs. Nous prévoyons ainsi récupérer à l'usine Owens Corning une source de chaleur qui serait autrement perdue dans l'atmosphère et la pomper vers d'autres industries ou habitations. De meilleurs programmes en matière de transport... Toutes ces choses que je sais que vous savez être nécessaires à la réduction de nos émissions de gaz à effet de serre. Nous suivons l'exemple d'autres collectivités d'Europe, en Scandinavie notamment.
D'après ce que je comprends du sujet et le programme ontarien Place à la croissance, la densification —pour dissiper les craintes de M. Hiebert —abaisse la criminalité, augmente l'efficacité et le nombre d'emplois et réduit les gaz à effet de serre. C'est mon impression.
Tout d'abord, cette impression ou prémisse est-elle exacte? Et comment évaluez-vous la performance énergétique des collectivités canadiennes par rapport aux collectivités européennes? Devrions-nous craindre cette comparaison? Devrions-nous craindre de suivre ces modèles?
J'aimerais obtenir une réponse de vous trois, en commençant peut-être par M. Bataille.
En toute honnêteté, je crois qu'il faut un expert en urbanisme pour répondre à cette question.
Je suis un économiste de l'énergie. Je peux constater les avantages lorsqu'on applique des modèles —ce qui arrive aux distances personnelles parcourues grâce aux moyens de transport ou à l'énergie consommée dans les édifices. Mais en ce qui concerne la gestion efficace des villes, il faut de bons urbanistes et il en existe. Il y a eu une révolution dans ce domaine: usages multiples, davantage de gens et d'yeux, ce genre de choses. Mais je parle du point de vue d'un profane.
Il se trouve justement, monsieur Hiebert, que je vis dans une collectivité rurale de 1 100 habitants, et j'aimerais revenir sur ce que M. Joshi a dit au sujet de la possibilité d'instaurer des mesures éconergétiques très efficaces, même dans une petite collectivité. Cela ne signifie peut-être pas qu'un aussi grand nombre de systèmes vont fonctionner en tandem, et il n'y aura pas beaucoup d'autobus, mais ma famille élargie —j'ai peut-être bien fait de marier une Québécoise issue d'une famille nombreuse —offre d'incroyables possibilités sur le plan du covoiturage.
Mais revenons à votre question. Je crois qu'il est peut-être faux d'établir une comparaison directe entre des collectivités canadiennes et des collectivités européennes qui bénéficient de siècles de développement passablement organique dans des conditions très différentes.
Comme je l'ai dit plus tôt, je crois que nous pouvons grandement améliorer l'efficacité des bâtiments existants tout en tentant de bien positionner les nouveaux bâtiments.
Tout ce que je veux dire, c'est que le leadership de Guelph ne constitue pas une solution unique qui fonctionnera avec succès dans toutes les collectivités. Il s'agit d'un processus qui consiste à réaliser un projet en déterminant les priorités en fonction de la taille de la collectivité.
Les experts ont eux aussi leur rôle à jouer.
Un des principaux problèmes des petites collectivités et des collectivités rurales —Guelph n'est probablement pas trop petite —, c'est qu'elles importent une grande proportion de ce dont elles ont besoin, ce qui représente une fuite, une perte pour la collectivité.
Un système énergétique intégré permet des économies très avantageuses en ce qui a trait à l'importation de carburants fossiles ou d'autres formes d'énergie. En outre, les revenus restent dans l'économie locale, ce qui est très positif en soi.
Il y a aussi la disponibilité de l'énergie, à un prix probablement inférieur à ce qu'il serait en l'important, ce qui représente un avantage pour d'autres secteurs d'activités. Sur ce plan, ce dont il est question ici constitue un net avantage, même pour les collectivités de petite taille ou rurales.
Vous avez abordé un point au sujet duquel j'ai effectué certaines recherches. La violence, du moins neuf formes de violence répertoriées dans le Code criminel, semble être étroitement liée au chômage. Donc, la création d'emplois engendre des possibilités qui tendent à réduire la violence. Les économies réalisées par la proximité, les surplus et les occasions pourraient ainsi contrebalancer la densification du tissu urbain. Voilà ce qui compterait réellement, et qui serait même positif.
Merci beaucoup, et à vous aussi, monsieur Valeriote.
Merci beaucoup, messieurs, pour vos exposés et vos réponses à nos questions. Je crois que l'information obtenue ici aujourd'hui sera très utile à notre examen.
Nous allons maintenant suspendre la séance pendant quelques minutes avant de reprendre à huis clos. Nous discuterons alors des travaux du comité pendant environ 25 minutes.
[La séance se poursuit à huis clos.]
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