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Madame la Présidente, c'est avec plaisir que j'interviens dans ce débat sur le projet de loi à l'étape de la troisième lecture. Ce projet de loi modifierait le Code criminel afin de s'attaquer à un problème croissant, celui du vol d'identité. Le Comité permanent de la justice et des droits de la personne a fait rapport du projet de loi sans propositions d'amendement.
Comme l'ont confirmé les personnes venues témoigner devant le comité, ce projet de loi est urgent. Les technologies nouvelles et en constante évolution qui nous facilitent considérablement la vie sont mises à profit par des criminels imaginatifs.
Le problème du vol d'identité prend de l'ampleur, tant sur le plan du nombre d'incidents que des pertes pour les consommateurs, les détaillants, les fournisseurs de services, les institutions financières et les gouvernements.
Cependant, comme l'ont clairement indiqué les témoins et les experts entendus par le comité, le vol d'identité n'est pas seulement une question d'argent. Les Canadiens craignent beaucoup que les criminels exploitent leur identité et l'utilisent à mauvais escient. Lorsque des renseignements personnels sont employés pour commettre une fraude, une infraction relative à un voyage ou une autre infraction, les répercussions pour la personne concernée peuvent être graves. Les victimes de vol d’identité souffrent de séquelles psychologiques et ont l'impression d'avoir été violées. Dans des cas extrêmes, elles peuvent perdre toutes leurs économies et même leur maison, et leur cote de solvabilité peut être compromise en raison des actes criminels de quelqu'un d'autre.
Bien après que ces victimes aient consacré du temps et de l'énergie à blanchir leur réputation, pendant de nombreuses années, elles continuent d'éprouver des sentiments de vulnérabilité, de perte de contrôle sur leur vie et d'angoisse en se demandant si le cauchemar est bel et bien terminé. Ces victimes sont constamment aux prises avec la crainte que, à tout moment, quelqu'un d'autre pourrait s'emparer de leur identité.
De plus en plus, les policiers établissent des liens entre le vol d'identité et le crime organisé, même le terrorisme. Les membres du crime organisé se servent de l'identité d'autres personnes pour camoufler la leur et commettre des crimes qui génèrent d'importants profits. Des renseignements identificateurs sont recueillis dans un endroit et instantanément communiqués par Internet à des gangs criminels dans d'autres pays pour être manipulés. Les criminels ont une longueur d'avance sur nous en ce qui concerne leur degré d'organisation et d'ingéniosité.
Les membres de la GRC qui ont comparu devant le Comité de la justice et des droits de la personne ont expliqué que les éléments clés du projet de loi sont les nouvelles infractions qui corrigeraient les lacunes législatives. À l'heure actuelle, les criminels peuvent recueillir et posséder des renseignements identificateurs et se livrer au trafic de ces derniers à des fins criminelles, mais ne sont peut-être coupables d'aucun crime. Bien que l'usage de l'identité d'autrui à des fins criminelles et frauduleuses soit clairement défini comme étant un crime dans le cadre de diverses infractions telles que la fraude et l'usurpation d'identité, le projet de loi ciblerait directement les premières phases du vol d'identité qui ne sont pas criminalisées à l'heure actuelle. Les nouvelles infractions prévues dans le projet de loi permettraient aux policiers d'agir et de porter des accusations avant que la fraude ou l'usurpation d'identité ne soit perpétrée ou avant que quelqu'un ne franchisse la frontière illégalement grâce à des documents falsifiés.
Comme les membres de la GRC l'ont dit devant le comité, le projet de loi nous rapprocherait un peu plus de notre objectif de protéger non seulement les Canadiens, mais aussi l'intégrité de l'économie canadienne.
D'autres dispositions du projet de loi préciseraient et étofferaient certaines infractions figurant déjà dans le Code criminel. Par exemple, en plus des infractions existantes visant à protéger le courrier et les opérations de Postes Canada, de nouvelles infractions viseraient la réexpédition et le vol du courrier qui se trouve dans une boîte aux lettres, deux techniques souvent utilisées par les usurpateurs d'identité pour recueillir des renseignements.
Comme je l'ai déjà mentionné, on a inclus dans le projet de loi des nouvelles infractions relatives à la collecte et à la possession de renseignements identificateurs ainsi que la nouvelle infraction de trafic de renseignements identificateurs. L'infraction d'usurpation d'identité interdit déjà l'utilisation frauduleuse de l'identité d'une autre personne. Cette infraction serait maintenant nommée « fraude à l'identité ».
L'objectif est que le droit pénal reflète clairement la séquence complète des crimes liés à l'identité. Le vol d'identité, à savoir la collecte et la possession de renseignements identificateurs, est suivi par le trafic de renseignements identificateurs, qui est, quant à lui, suivi par la fraude à l'identité, c'est-à-dire l'utilisation frauduleuse des renseignements identificateurs.
Le projet de loi étendrait également les dispositions de dédommagement dans le Code criminel afin d'aider les victimes de ces crimes à récupérer une partie des coûts qu'elles doivent défrayer pour obtenir de nouveaux documents et rétablir leur identité. Nous espérons que cette mesure contribuera à réparer les dommages causés aux Canadiens qui se sont fait voler leur identité.
D'autres éléments cruciaux du projet de loi sont les exemptions très précises concernant la fabrication et l'utilisation de faux documents par des agents d'infiltration. Une de ces exemptions permet de protéger les personnes qui fabriquent de faux documents si elles agissent de bonne foi et à la demande d'un service de police ou d'un ministère. L'autre exemption permet aux agents de la paix de fabriquer et d'utiliser des fausses pièces d'identité sans risquer de faire l'objet de poursuites pénales seulement lorsqu'ils le font pour préserver leur identité cachée.
À la Chambre, au comité et au Sénat, des préoccupations ont été soulevées en ce qui concerne les exemptions parce qu'elles ne comprennent pas de mécanisme de surveillance ou de responsabilité. Le gouvernement considère que ces exemptions sont complètement appropriées puisque la fabrication et l'utilisation de faux documents pour les enquêtes secrètes sont indispensables à l'application efficace de la loi. Ces exemptions ont une portée très restreinte. Elles ne permettent pas aux personnes de commettre des fraudes, des vols d'identité, des usurpations d'identité ou d'autres crimes, à l'exception de quelques infractions précises relatives aux faux documents.
Les agents de la paix n'ont le droit d'utiliser de faux documents que pour préserver leur identité cachée. S'ils utilisent de faux documents pour une autre raison, l'exemption ne s'applique plus. Pour le gouvernement, ce type d'exemption rappelle beaucoup l'exemption accordée aux policiers en ce qui concerne le port d'une arme à feu. Les policiers ne font pas l'objet d'une surveillance chaque fois qu'ils portent une arme. La loi stipule simplement que les agents de police sont autorisés à porter une arme quand ils travaillent.
De la même façon, surveiller un agent d'infiltration chaque fois qu'il fabrique ou utilise de faux documents d'identité pour préserver son identité cachée pourrait s'avérer très pesant du point de vue administratif, voire impossible à réaliser. Qui plus est, comme cette exemption limitée ne peut porter préjudice aux Canadiens en aucune façon, une surveillance n'aurait pas vraiment de raison d'être. Le gouvernement est convaincu que l'exemption proposée dans le projet de loi est nécessaire et appropriée.
Il convient de mentionner que le Comité sénatorial des affaires juridiques et constitutionnelles a modifié ce projet de loi afin qu'il puisse faire l'objet d'un examen dans cinq ans, ce qui satisfait le gouvernement. En effet, ainsi, les parlementaires pourront voir si la loi permet de réduire et de prévenir la fraude à l'identité. Cet examen nous donnera l'occasion de décider si d'autres modifications ou améliorations sont nécessaires afin de protéger encore mieux les Canadiens contre les crimes liés à l'identité.
Le projet de loi ne mettra pas fin tout de suite à ces crimes. Aucune mesure législative à elle seule ne le pourrait. Il n'en reste pas moins que le projet de loi représente un énorme pas en avant et qu'il contribuera à donner aux forces de police de ce pays un certain nombre d'outils qui manquent à leur panoplie. Les témoins ont dit clairement qu'on avait besoin du projet de loi de toute urgence.
La technologie évolue. Il faut donc que le droit pénal et le Code criminel évoluent aussi. J'encourage donc tous les députés à adopter ce projet de loi dans les plus brefs délais.
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Madame la présidente, je dirai d'entrée de jeu que le Bloc québécois est favorable à ce projet de loi qui nous vient du Sénat. Cela vient contredire une fois de plus les arguments répétés par le , à savoir que l'opposition fait du blocage systématique à ses projets relatifs au droit criminel.
Il s'agit d'un projet de loi bien conçu et qui vise à régler un problème urgent et nouveau dans la société moderne. Il apporte des solutions qui sont quand même incomplètes, parce que, effectivement, il faut une grande collaboration avec les provinces. Il n'en demeure pas moins qu'il apporte des solutions essentielles.
C'est un problème moderne. Je pense même que quand j'ai commencé à pratiquer le droit en 1966, on ne pouvait pas imaginer que voler l'identité de personnes pourrait donner tant d'avantages à ceux qui le feraient. On pensait plutôt à l'obtention d'un faux passeport ou des choses de ce type, mais c'est avec le développement des transactions modernes et particulièrement informatiques et l'utilisation des cartes de crédit qu'on s'aperçoit que le vol d'identité peut avoir des conséquences terribles.
Je pense qu'on est déjà un peu en retard par rapport à d'autres pays. Déjà, en 1998, le Congrès américain avait créé une nouvelle infraction criminelle liée spécifiquement au vol d'identité. Elle interdisait alors l'utilisation, le transfert ou la possession, en toute connaissance de cause et sans autorisation, de la preuve d'identité d'une autre personne avec l'intention d'exercer, de soutenir ou d'encourager une activité illégale.
Je trouve que le projet de loi nous arrive avec déjà plus de 11 ans de retard. Dans ce cas-ci, on ne peut pas dire que ce gouvernement, élu en 2006, a fait preuve d'une très grande diligence, d'autant plus que, apparemment, selon ce que j'ai entendu des autres orateurs, le projet de loi était déjà prêt dans les dossiers de l'ancien gouvernement.
Le projet de loi couvre l'obtention et la possession de renseignements relatifs à l'identité dans l'intention de les utiliser de façon trompeuse, malhonnête ou frauduleuse dans la perpétration d'un crime. La première infraction est, par conséquent, l'obtention de renseignements relatifs à l'identité. La deuxième infraction concerne le trafic de renseignements relatifs à l'identité et la troisième touche la possession ou le trafic illégal de documents d'identité émis par le gouvernement.
Il s'agit d'un projet de loi assez complet qui prévoit aussi des infractions pour la possession d'instruments permettant de créer de fausses identités. Finalement, le projet de loi ajoute un nouveau pouvoir, qui peut être discutable sur le plan constitutionnel, c'est-à-dire celui de permettre au tribunal d'ordonner au contrevenant, dans certains cas, de dédommager la victime de vol d'identité ou de fraude d'identité lorsque celle-ci a engagé des frais pour rétablir son identité.
Je reconnais qu'il y a quand même déjà des dispositions semblables dans le Code criminel quand la preuve faite de l'infraction révèle un dommage relativement simple à évaluer afin d'éviter des démarches juridiques et judiciaires supplémentaires à une victime pour aller devant un tribunal civil. Cela permet dans le cadre de la sentence que le juge ordonne à la personne de faire de pareils remboursements. Même si nous sommes en quelque sorte les gardiens des domaines de juridiction que nous exerçons en tant qu'État national, je reconnais cependant que cette mesure plus efficace facilitant le travail des victimes est justifiable dans les circonstances.
Il faut comprendre que le vol d'identité peut avoir des conséquences terribles. Il y a un journaliste à Montréal qui est rentré de vacances pour s'apercevoir qu'il y avait quelqu'un d'autre dans sa maison. Il y a avait quelqu'un qui avait acheté sa maison pendant qu'il était absent. Il était allé chez un notaire. Cette personne était évidemment de bonne foi. Il a fallu que le journaliste prenne des mesures légales très coûteuses pour lui et très compliquées.
On peut imaginer le choc psychologique que l'on subit quand on veut entrer chez soi et que quelqu'un d'autre y est installé. En fait, c'est tragi-comique. Heureusement, je crois que ce journaliste avait la force psychologique nécessaire pour traverser cette épreuve. Il l'a bien vécue et il l'a racontée. On voit effectivement que le notaire, qui était de bonne foi, a aussi été trompé par la présentation de l'identité que le vendeur, évidemment fraudeur, lui avait faite.
C'est donc loin d'être banal. On imagine toutes les autre choses aussi que sont les achats dans l'Internet et l'utilisation de cartes de crédit. Très souvent, à la suite d'un vol d'identité, la personne obtient des cartes de crédit à notre nom. Elle se met à dépenser, mais c'est nous qui recevons les factures beaucoup plus tard, et c'est nous qui avons tous les ennuis.
La majorité des compagnies et des banques assument elles-mêmes une large part des dommages causés par les vols d'identité. Il me semble qu'en 2002, plus de 2 milliards de dollars étaient associés au vol d'identité. Je donne ces chiffres de mémoire parce que je ne trouve pas mes notes. Mon Dieu, c'est plus que cela. En 2004, on estimait que les coûts associés au vol d'identité excédaient les 50 milliards de dollars américain. Le Conseil Canadien des Bureaux d'éthique commerciale estime qu'en 2002, les consommateurs, les banques, les sociétés de cartes de crédit, les magasins et autres entreprises ont perdu 2,5 milliards de dollars à cause du vol d'identité.
Évidemment, on est un peu rassuré lorsqu'on utilise une carte de crédit et que les compagnies de cartes de crédit assument les pertes subies. J'ai moi-même remarqué, lorsque je me suis déjà fait voler mes cartes de crédit, qu'elles avaient assumé les pertes subies. Toutefois, ce coût finit certainement par être transféré aux consommateurs.
Ce problème devenait de plus en plus urgent. Je crois qu'il était nécessaire de légiférer dans ce domaine. Je vois que le gouvernement légifère aussi au moyen d'une loi qui est, je crois, bien conçue pour s'attaquer au problème. Plutôt que d'avoir recours à sa marotte, comme il le fait ces temps-ci avec des sentences minimales, le gouvernement s'est rendu compte qu'il pouvait y avoir toutes sortes de motivations poussant quelqu'un à voler une identité. En effet, le jeune pirate informatique amateur cherchant les limites de ses talents acquis à l'ordinateur aussi bien que les organisations criminelles, bien organisées faisant ces vols de façon systématique peuvent voler des identités. Voilà un autre exemple, comme dans bien d'autres crimes, où un juge doit avoir la liberté d'adopter une sentence adaptée à chaque cas particulier qui lui est présenté. La peine peut aller jusqu'à cinq ans dans les cas les plus graves.
Nous appuierons donc cette législation qui arrive même un peu trop tard. Nous l'appuierons en espérant que le gouvernement continuera et développera une collaboration avec les provinces. La commissaire à la protection de la vie privée, Mme Stoddart, a fait des suggestions en ce sens et je crois qu'elle les a faites parce qu'elle a constaté que le gouvernement fédéral n'avait pas offert assez de collaboration.
J'aimerais utiliser un peu du temps qu'il me reste, sans aller jusqu'à la limite, pour signaler ce que je signalais dès le début. Le prétend que l'opposition s'objecte systématiquement à son programme législatif. Or il voit bien que nous avons encore collaboré avec lui en comité et que nous collaborons toujours pleinement avec lui pour essayer d'améliorer son programme. Nous ne nous y opposons que lorsqu'il emprunte des voies totalement différentes de celles que nous estimons efficaces dans la lutte à la criminalité.
Il dit de plus en plus qu'il faut être tough on crime. C'est une voie que les Américains ont prise. Ils ont été tellement tough on crime, ils ont établi tellement de minimums dans les lois, ils ont enlevé tellement de pouvoirs discrétionnaires aux juges pour rendre les sentences que, aujourd'hui, ce pays est devenu celui qui incarcère le plus sur la planète. Pourtant, le Canada avait des taux d'incarcération à peu près semblables il y a 25 ou 30 ans. Qu'ont-ils obtenu avec cela? Ils s'aperçoivent eux-mêmes que, actuellement, cela ne tient pas debout. Déjà en juillet, le Vera Institute of Justice a établi qu'au moins 22 États américains s'apprêtaient à mettre un frein à la démarche dite tough on crime parce que le système actuel est rendu à son point de rupture humain et financier. C'est cette voie que nous ne voudrions pas voir le Canada et le Québec suivre.
Bien sûr, à court terme, on peut penser qu'imposer des minimums, montrer qu'on est tough on crime, c'est plus populaire. Or quand on va dans les détails, les enquêtes ont démontré que si les gens sont assez favorables au début à l'imposition de sentences minimums, quand on leur présente des cas particuliers, alors là leur idée change tranquillement pour dire qu'il devrait certainement y avoir des exceptions, beaucoup d'exceptions et finalement tellement d'exceptions que cela ne vaut pas la peine d'imposer des minimums. C'est l'expérience qui a été faite dans tous les pays du Commonwealth ces dernières années. Le doit le savoir puisque c'est dans une de ses études que nous trouvons ces données. On a remarqué justement qu'il disait qu'aucune étude n'a pu observer une différence dans les taux de criminalité à la suite de l'imposition de sentences minimums, mais des variations dans le taux d'incarcération.
Comme je le disais, les États-Unis incarcèrent actuellement le plus au monde, soit 762 personnes par 100 000 habitants comparativement à 117 personnes par 100 000 habitants au Canada. Pour tous les pays d'Europe de l'Ouest avec lesquels nous nous comparons, c'est autour de 100 personnes par 100 000 habitants. Chose significative, dans des pays où les jurés participent à l'imposition des sentences en compagnie des juges, comme la France et la Belgique, le taux est plus bas, soit 93 en France et 88 en Belgique. Donc, on voit que si à première vue, l'imposition de sentences minimales rencontre l'approbation des gens, quand ils sont devant des cas particuliers, ils réalisent soudainement qu'elle ne devrait pas s'appliquer inconsidérément.
De plus, ce système est très coûteux au niveau financier. En effet, le coût annuel d'un détenu en institution fédérale — je l'ai demandé en comité à un commissaire du système correctionnel fédéral — est de 101 000 $ au Canada. On nous dit bien que la presque totalité de ces coûts est due aux mesures de sécurité qui sont prises dans les prisons parce que sur 101 000 $, seulement 2 p. 100, sur un peu plus de 2 milliards de dollars, vont aux programmes qui peuvent servir à la réhabilitation.
Franchement, je suis un de ceux qui prétendent que ce qui est important, c'est d'augmenter les chances d'être pris, et je pense avoir appliquer cela dans notre province. En modernisant les escouades policières, nous avons obtenu des résultats remarquables dans la lutte au crime organisé et 101 000 $, c'est à peu près ce que coûte un enquêteur par année; c'est à peu près ce que coûterait la modernisation nécessaire des escouades qui devraient lutter contre les fraudes importantes que nous connaissons présentement.
Je le dis encore, être seulement tough on crime, c'est être stupid on crime.
Les gens qui sont tough on crime pensent qu'être soft on crime c'est être stupid. C'est stupide dans les deux sens. L'important, c'est d'être smart on crime; c'est d'être intelligent dans le traitement de la délinquance; c'est d'agir dans la prévention; c'est d'agir en se donnant les chances d'attraper les gens; c'est ensuite de traiter les délinquants, qui ont tous des problèmes particuliers, de façon à ce qu'ils reçoivent des sentences parfaitement adaptées, non seulement au crime commis, mais à la personne qui l'a commis, ses motivations, son passé, etc. C'est comme cela qu'on peut obtenir des résultats en matière de délinquance.
Voici un exemple. J'ai été frappé d'apprendre — on étudie actuellement le système pénitentiaire canadien au Comité permanent de la sécurité publique et nationale — que 39 p. 100 des détenus en Ontario ont eu un diagnostic de maladie mentale. Je sais depuis longtemps que la principale caractéristique des délinquants dans nos prisons, c'est que ce sont des mésadaptés sociaux. Je le savais, mais je ne savais pas à quel point la maladie mentale avait comme conséquence de faire d'une personne un mésadapté social. Que peut savoir quelqu'un qui a un diagnostic de maladie mentale des sentences minimales que le législateur prévoira pour le dissuader d'aller commettre des crimes? On comprend bien que ses motivations sont totalement différentes.
C'est pour cela qu'il est tellement important, quand les sentences sont rendues, qu'il y ait des juges. Nous avons un système extraordinaire au Canada parce que nous avons des juges à la fois professionnels et indépendants. Dans toutes les provinces, nous avons fait des efforts pour que les gens nommés à la magistrature aient passé un certain nombre de tests. Nous avons des comités de sélection auxquels siègent des membres du public, du Barreau et de la magistrature. C'est sûr qu'il y a encore des nominations de nature politique. Je n'en ai jamais faites, mais je sais que cela peut se faire. Au moins, tous ceux qui sont nommés sont là. En outre, ils sont nommés à vie. Ils sont indépendants et n'ont plus d'attaches politiques. De plus — en tout cas, on le fait au Québec —, nous mettons souvent du soutien psychologique par des agents de probation à la disponibilité des juges. Ce soutien n'est pas là pour les juges eux-mêmes, ils peuvent aller chercher cela ailleurs s'ils en ont besoin. C'est très développé du côté des juges pour enfants.
À notre avis, voilà des ensembles de mesures qui nous permettent de lutter de façon intelligente contre la criminalité. Être seulement tough on crime, c'est stupide. Ce qui est plus stupide encore, c'est d'être tough on crime et de chercher à discréditer ceux qui demandent une approche plus intelligente, nécessairement plus douce. En effet, celui qui est tough on crime voudra toujours la punition la plus sévère et la plus aveugle, celle qui tiendra le moins compte du détenu qui doit être condamné.
Je crois que ce qui doit nous rassembler à la Chambre, c'est le désir de lutter efficacement contre la criminalité. Suivre la voie américaine, c'est atteindre les mêmes résultats qu'aux États-Unis, où la criminalité est plus élevée qu'au Canada. Dans certains domaines, elle est épouvantablement plus élevée. On a trois fois et demie plus de probabilités d'être victime d'un homicide aux États-Unis qu'au Canada. Pire encore, les conjointes ont cinq fois plus de probabilités d'être victimes d'un homicide aux États-Unis qu'au Canada. Pourquoi cela? C'est à cause d'autres facteurs.
Je répète que nos objections ne concernent pas le programme que veut nous présenter le gouvernement. Les mesures sont justifiées et visent une lutte efficace à la criminalité. Quand on nous présente quelque chose d'intelligent et de bien préparé, nous y sommes favorables, comme nous le sommes aujourd'hui à ce projet de loi.
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Madame la Présidente, j'appuie les principes généraux de ce projet de loi, mais j'aimerais commencer par le replacer dans son contexte historique. Nous avons grandement besoin de cette mesure législative au Canada, et ce, depuis près de 10 ans.
Une première ébauche avait été proposée par l'ancien gouvernement libéral, pendant la législature de 2004-2006, pour être ensuite ressuscitée par les gouvernements conservateurs des deux dernières législatures. Et aujourd'hui, nous examinons enfin un projet de loi concret.
Suite à certaines déclarations de mon collègue du Bloc qui m’a précédé, j'aimerais rappeler que le gouvernement conservateur a privilégié l'adoption de modifications à d'autres articles du Code criminel alors qu'il aurait dû accorder la priorité aux réformes prévues par ce projet de loi. Cette mesure aurait dû faire partie de notre dispositif législatif depuis plusieurs années déjà, comme c'est le cas dans un certain nombre d'autres pays comme les États-Unis, l'Angleterre et l'Australie, qui sont bien en avance sur nous. En fait, ces pays continuent de nous devancer parce que le texte dont nous sommes saisis aujourd’hui contient une ou deux graves lacunes relativement aux mesures proposées pour contrer le grave problème que constitue le vol d'identité.
Nous avons tous entendu des histoires d'horreur. Ainsi, nous savons que le vol d'identité, principalement celui qui concerne les cartes de crédit, les cartes de débit et les petits prêts personnels, se traduit par des pertes d'au moins 2,5 milliards de dollars par an. Or, le texte de loi proposé contient des lacunes à cet égard, et j'y reviendrai tout à l'heure.
Nous avons également appris que le vol d'identité était aussi un problème dans les transactions immobilières, pour les propriétés résidentielles comme pour les propriétés commerciales, et que les pertes à cet égard représentaient de 2 à 2,5 milliards de dollars par an. Or, le projet de loi n'aborde absolument pas ce problème. J’y reviendrai tout à l'heure, car il est évident que des mesures doivent être prises au niveau fédéral.
Le projet de loi est une première mesure importante dans la lutte contre ce type de crime. Il élargit notamment la définition des pièces d'identité officielles, et l'on sait que les policiers, les procureurs et les juges pouvaient difficilement invoquer les dispositions actuelles du Code criminel, car elles ne couvraient pas les nouvelles infractions commises relativement aux pièces d'identité officielles.
Nous avons considérablement élargi la portée de ces dispositions. Et à en juger par la longue liste qui figure dans ce projet de loi et qui figurera aussi, je l'espère, dans la loi qui sera adoptée, il sera possible de poursuivre les auteurs de ces infractions avec beaucoup plus d'efficacité qu'aujourd'hui.
L'autre problème que couvre le projet de loi, et c'est un problème de taille, concerne le moyen par lequel les petits gangs de rue aussi bien que le crime organisé se procurent des pièces d'identité. Tout simplement, ils les subtilisent des boîtes aux lettres personnelles des gens ou au bureau de poste. Le projet de loi fait de ce type de vol une infraction précise. Les catégories d'infractions sont très claires. Elles incluent la commission du vol ainsi que la possession des documents volés.
Le projet de loi prévoit par contre la protection des personnes qui sont autorisées à prendre des documents dans la boîte aux lettres d'une autre personne. Par exemple, la personne qui ramasse le courrier de son voisin pendant qu'il est en vacances ne sera pas poursuivie pour infraction. C'est un net progrès.
Je vous dis cela en connaissance de cause, car l'un de mes voisins a eu ce problème il y a quelques années, et j'avais eu l'occasion de discuter avec les policiers pendant qu'ils faisaient leur enquête. Ils m'ont dit que les criminels ciblaient systématiquement certaines résidences lorsqu'ils savaient que les gens n'étaient pas chez eux dans la journée, et souvent qu'il n'y avait qu'un adulte dans la famille. Ils étaient manifestement très bien organisés, et ils réussissaient ainsi à se procurer des renseignements personnels qu'ils utilisaient ensuite pour commettre des fraudes et des falsifications, entre autres.
Le troisième problème que couvre ce projet de loi concerne les renseignements identificateurs, et cela souligne bien la nécessité de moderniser le Code criminel. Ceux qui commettent des crimes plus sophistiqués, le crime organisé par exemple, se procurent des renseignements extrêmement pointus, comme des échantillons d'ADN, afin de créer une identité entièrement fausse, mais avec suffisamment de données pour prouver qu'ils sont bien une autre personne.
Nous avons dressé une très longue liste de ce qui constitue un renseignement identificateur. Cela comprend notamment les empreintes digitales, l'ADN et toutes les empreintes plus sophistiquées que nous pouvons faire aujourd'hui et que nous ne pouvions pas faire à l'époque où le code a été établi, il y a 100 ou 150 ans. Ce sont là des progrès importants.
Pour toutes ces raisons, mon parti est prêt à appuyer le projet de loi. En fait, nous allons voter en faveur de l'adoption de ce projet de loi.
Mais il reste quand même des problèmes, et j'aimerais revenir sur le fait que le projet de loi n'aborde pas le problème du vol d'identité lors des transactions immobilières. Au risque de répéter ce que j'ai dit tout à l'heure, les pertes que cela entraîne se situent entre 2 et 2,5 milliards de dollars par an, ce qui est aussi important qu'avec les autres types de vols couverts par le projet de loi.
Certes, les gouvernements provinciaux ont leur part de responsabilité et se doivent d'intervenir dans ce secteur. Par exemple, je sais, pour avoir exercé le droit, que les barreaux du Canada ont grandement accru la responsabilité des avocats et des notaires de s'assurer que les clients qu'ils ont en face d’eux sont bien les personnes qu'ils prétendent être. Nous assumons donc cette responsabilité professionnelle supplémentaire.
Les agents immobiliers se sont vu attribuer des responsabilités supplémentaires importantes relativement à l'identification des acheteurs et des vendeurs lors des transactions immobilières.
Mais le gouvernement fédéral a lui aussi un rôle à jouer. Certaines dispositions du Code criminel portent sur la fraude et la falsification dans les transactions immobilières, mais ces dispositions ont manifestement perdu toute actualité.
Nous avons entendu, au Comité de la justice, un témoin qui représentait l’Association des compagnies d’assurance titres de l'Ontario. Ces compagnies sont souvent les principales victimes de ces vols car, au bout du compte, ce sont elles qui, souvent, finissent par payer lorsqu'il y a eu vol d'identité lors d’une transaction. Le témoin nous a clairement expliqué les lacunes des dispositions actuelles du code, et il nous a même présenté un modèle inspiré des expériences des États-Unis, que le gouvernement a choisi de ne pas reproduire dans le projet de loi. Je ne sais plus de quel État américain il s'agit, mais la disposition législative est tout à fait avant-gardiste en ce sens qu'elle rend ce type de transactions illégale et qu'elle facilite les poursuites et les condamnations. Elle est très efficace dans cet État du Sud des États-Unis. C'est une mesure dont nous devrions nous inspirer.
J'ai d'autant plus l'intention de revenir là-dessus que le ministre de la Justice et le Parti conservateur m'ont laissé entendre qu'ils n'avaient pas l'intention de faire quoi que ce soit à ce sujet, et qu’ils en laissaient l'entière responsabilité aux provinces. À mon avis, ce n'est pas là le rôle des provinces, et nous avons fermement l'intention de saisir à nouveau la Chambre de la question, d'ici un mois environ, du moins nous l'espérons.
Notre objectif est d'actualiser le Code criminel afin qu'il soit adapté aux infractions d’aujourd’hui, et le code est manifestement impuissant dans ce domaine.
J'aimerais soulever un autre point concernant le libellé du projet de loi. Le projet d'article 402.2 du Code criminel, soit l’article 10 du projet de loi, porte sur la façon dont les renseignements identificateurs sont utilisés. On y emploie l'expression « ne se souciant pas de savoir » si ces renseignements seront utilisés pour commettre un acte criminel. Ainsi, le fait de ne pas se soucier devient quasiment une négligence criminelle et, partant, un crime.
La Cour suprême du Canada a déjà eu des problèmes avec cette terminologie, et je crains que cette disposition ne soit pas très efficace. J'ai proposé un amendement en comité, en m’inspirant des recommandations de l'Association du barreau canadien, mais je n'ai pas eu la majorité des votes. Je mets en garde le gouvernement contre le libellé de cette disposition. Je crains qu’il n'entrave le travail des policiers et des procureurs qui voudront obtenir des condamnations auprès d'un tribunal qui interprétera ce libellé de la même façon que la Cour suprême l'a fait dans une cause célèbre. C'est un problème.
Le libellé du projet de loi présente un autre problème, et je remercie l'Association du barreau canadien de l'avoir porté à notre attention. Les articles 7 et 9 prévoient que toutes sortes de fonctionnaires publics peuvent délivrer de faux documents. L'article 9 est moins problématique car sa portée est limitée aux agents de police, qui sont déjà définis ailleurs dans le code, à l'article 25.
L'article 25 met en place un système selon lequel on reconnaît que, de temps à autre, nos agents de police sont obligés d'enfreindre la loi. C'est un article relativement récent, qui n'a été adopté qu'il y a dix ou douze ans, je crois. Il définit les conditions dans lesquelles cela peut se faire, selon des contrôles bien définis et sous la surveillance de policiers hauts gradés. Les forces policières doivent présenter chaque année à la Chambre un rapport sur leur recours à des activités criminelles pour lutter contre le crime. Je pense que c'est un système qui marche bien, tout au moins si l'on en juge par les rapports qui nous ont été présentés. En fait, le Comité de la justice a fait un examen de l'article 25 il y a deux ou trois ans et en a dressé un bilan très satisfaisant.
L'article 9 exempte les agents de police des dispositions du projet de loi, mais il n'a pas la fonction de réglementation qu'a l'article 25. Il les exempte également de l'application de l'article 25. Les explications qu'on m'a données ne m'ont toujours pas convaincu. J'estime que les agents de police devraient être assujettis à l'article 25, étant donné que ça a bien marché jusqu'à présent. On pourrait peut-être envisager de modifier légèrement les modalités concernant les rapports à présenter, mais, encore une fois, c'est un mécanisme qui marche très bien. Il autorise les agents de police à se livrer à des activités criminelles dans le but d'attraper des criminels, mais il prévoit des garde-fous pour empêcher les abus.
L'article 7, lui, est encore plus problématique. Il offre en substance un moyen de défense à quiconque délivre une pièce d'identité, du moment que le document est fait « à la demande des forces policières ». Jusqu’ici, cela ne me pose pas de problème particulier. Mais ensuite, l'article ajoute « les Forces canadiennes ». N'importe quel soldat canadien pourrait ainsi demander un faux document. Ensuite, il est question « d'un ministère ou organisme public fédéral ou provincial ». Autrement dit, n'importe quel employé d'un gouvernement provincial ou fédéral pourrait demander à quelqu'un de faire un faux et ensuite demander à MasterCard ou à Visa de faire une carte falsifiée à ce nom, sans avoir à donner d’explications. La personne n’aurait qu'à dire qu'elle est fonctionnaire, enseignant, travailleur social ou employé de la LCBO, dans le cas de l'Ontario. Tous ces gens-là sont autorisés à demander de faux documents, et celui qui les leur donne n'a pas à craindre de commettre une infraction.
D’après le libellé du projet de loi, la personne qui demande ce genre de document ne commet pas d'infraction. Je crains donc qu'on ouvre la porte à toutes sortes d'abus, y compris de la part d'agents de police véreux. Je comprends que les forces policières aient besoin de cela, mais elles devraient continuer d'être assujetties à l'article 25.
L'article n'exige pas l'approbation d'un haut fonctionnaire du ministère, qu'il soit provincial ou fédéral. N'importe qui peut demander un faux document. On ne m'a donné aucune explication satisfaisante, et je reste convaincu que c'est un problème. Je reconnais avec le gouvernement que l'application de cet article doit être surveillée.
Comme je l'ai dit tout à l'heure, nous allons appuyer ce projet de loi, car toutes les autres dispositions sont attendues depuis déjà trop longtemps. Il n'en reste pas moins que l'article 7 ouvre la porte à toutes sortes d'abus et qu'il va falloir en surveiller l'application de près.
Cela fait pratiquement sept ans que nous attendons l'adoption de ce genre de mesure. Les policiers et les procureurs nous ont dit qu'ils en avaient un besoin urgent. Il est inadmissible que nous ayons accordé la priorité à d'autres modifications au Code criminel avant d'examiner ce projet de loi. J’estime que c'est un texte qui doit être adopté le plus vite possible, afin que les policiers et les procureurs aient les outils nécessaires pour poursuivre les auteurs de ces infractions.
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Madame la Présidente, je suis heureux d'indiquer à la Chambre que j'appuie le projet de loi , comme tous les députés l'ont fait aujourd'hui et précédemment, je pense. Je ne me souviens pas d'avoir entendu beaucoup d'opinions dissidentes, malgré le fait que certains nous recommandent de faire preuve de prudence en ce qui concerne un ou deux articles du projet de loi.
Le projet de loi s'imposait depuis longtemps. Il est très clair qu'il en est à l'étape de la troisième lecture. Plus tôt aujourd'hui, quelqu'un a proposé d'en accélérer l'adoption, mais il serait difficile de le faire progresser beaucoup plus rapidement que nous ne le faisons actuellement. J'ignore si je suis le dernier à intervenir, mais à un moment donné aujourd'hui, le débat prendra fin, la Chambre adoptera le projet de loi et ce sera terminé. Je félicite tous ceux qui voulaient en accélérer l'adoption parce que leur souhait sera exaucé.
Comme d'autres députés l'ont dit, on a mis environ dix ans à rédiger un texte à partir du concept qui sous-tend le projet de loi. Au cours des premières années, certaines complexités en ont retardé la rédaction. Il était un peu difficile de préciser ce qu'il faut entendre par renseignements personnels. Il s'agit d'un domaine législatif en constante évolution. Je pense que les premiers rédacteurs avaient l'intention de définir clairement ce qu'on entend par « renseignements identificateurs ». D'ailleurs, le projet en donne une bonne définition, et je vais m'étendre sur ce sujet un peu plus tard dans mon intervention.
Je me souviens d'avoir examiné très attentivement le projet de loi au Comité de la justice au cours de la dernière ou de l'avant-dernière législature. Toutefois, la progression du projet de loi a été interrompue par une dissolution du Parlement. Le problème n'était pas que personne ne voulait que le projet de loi soit adopté. C'était toujours le fait que le Parlement était dissous avant qu'il ne puisse franchir toutes les étapes.
Toutefois, il y a un article de ce projet de loi qui érige en infraction le fait de posséder une clef associée à une boîte aux lettres de la Société canadienne des postes. Ces clefs sont celles que les travailleurs des postes utilisent lorsqu'ils distribuent et recueillent le courrier dans les rues. Tous les Canadiens connaissent les grosses boîtes postales et les grosses clefs qu'utilisent les travailleurs des postes. L'idée initiale était probablement de dire que toute personne trouvée en possession d'une de ces clefs sans autorisation commettait une infraction.
C'est logique. Pourquoi a-t-il fallu 100 ans pour en arriver là? Je n'en suis pas certain. C'est peut-être parce que les bureaux de poste avaient toujours gardé un bon contrôle sur ces clefs. Toutefois, c'est maintenant devenu un problème et c'est pour cette raison qu'on a proposé la création d'une telle infraction. Je crois qu'on a même élargi la définition pour y inclure la possession de toute clef qui pourrait servir à ouvrir toute boîte contenant du courrier, ce qui inclut entre autres la clef de mon casier postal et celle de tous les députés ici présents. Il existe probablement des millions de clefs de ce genre au pays.
Je présume que quelqu'un a réfléchi à la question, mais le simple fait de posséder la clef du casier postal d'une autre personne n'est pas une infraction. Il faut également que cette personne ait l'intention de l'utiliser dans un but frauduleux, ou afin de commettre une des infractions décrites dans cet article. Toutefois, si j'en avais eu l'occasion en comité, j'aurais certainement examiné de manière approfondie les répercussions de la création d'une telle infraction, qui condamne le simple fait de posséder, avec une intention frauduleuse, une chose si commune. Je dirais même que si nous voulons ériger en infraction le fait de posséder la clef de la boîte aux lettres d'une autre personne, pourquoi n'en ferait-on pas autant pour une clef de sa maison? Une maison a certainement une valeur plus grande qu'un casier postal. Je crois que nous nous sommes involontairement engagés dans un dossier que nous ne possédions pas à fond.
Toutefois, cela fait partie du projet de loi et je ne m'y opposerai pas, mais quelque chose me dit qu'il finira bien par arriver un jour qu'un problème soit soulevé tout simplement parce qu'une personne sera en possession d'une simple clef de boîte aux lettres. Je ne parle pas ici des grosses clefs des boîtes postales, mais bien de la clef de la boîte aux lettres d'une résidence privée ou d'un appartement. Nous en avons tous une.
Je suis heureux de constater que, après longue réflexion, nous avons enfin réussi à cerner la définition de carte de crédit et de carte de débit, ce qui permettra aux agents de police et aux autorités de porter des accusations plus facilement. Jusqu'à présent, une carte de crédit n'était qu'un bout de plastique avec certains renseignements imprimés dessus, mais nous savons tous que c'est bien plus que cela. C'est notre accès au crédit, à notre argent. Jusqu'à ce que nous modifiions le Code criminel, ce petit bout de plastique n'était que ça, un bout de plastique. Essentiellement, la mesure accorderait une fois pour toutes une valeur juridique aux renseignements que contient la carte de crédit. Les cartes de crédit et de débit portent des bandes magnétiques qui contiennent des renseignements personnels, des renseignements sur le crédit et des renseignements numériques, et elles portent maintenant également des puces, qui contiennent Dieu sait combien d'autres renseignements, tout cela dans le but d'assurer une meilleure protection dans le domaine de crédit, si je puis m'exprimer ainsi.
Le projet de loi s'intéresse également à la définition du numéro d'identification personnel, le NIP, élément nécessaire à l'accès à certains types de services de crédit et de débit, soit d'une personne à une autre, soit d'une personne à une machine. Cela aidera les agents de police dans leurs enquêtes. Par exemple, si on trouvait, sur une personne mise en état d'arrestation pour fraude ou autre, une série de numéros qui ressemblent à des NIP, jusqu'à présent, ces numéros étaient de simples numéros; ce n'était pas un crime d'être en possession d'une série de numéros. Cependant, le projet de loi érigerait en infraction la possession de numéros si on réussit à déterminer que ceux-ci sont des numéros d'identification personnels qui peuvent être utilisés pour effectuer des transactions avec une carte de crédit ou de débit.
Jusqu'à maintenant, dans les cas de vols de courrier, les policiers, les autorités et les procureurs ont toujours eu de la difficulté à identifier le propriétaire du courrier au moment du vol. Évidemment, lorsque le bureau de poste est en possession du courrier au moment d'une infraction, la propriété est facile à déterminer. Mais qu'arrive-t-il si le bureau de poste n'a pas encore pris possession du courrier ou s'il l'a déjà livré? Lorsque le courrier est volé dans une boîte aux lettres, s'agit-il d'un vol de courrier ou d'un vol perpétré contre le propriétaire du domicile correspondant à la boîte aux lettres en question? Qu'arrive-t-il si le nom sur le courrier ne correspond pas à celui du propriétaire du domicile? Ces problèmes étaient fréquents.
On pourrait se demander pourquoi il nous a fallu 100 ans pour comprendre cela. Probablement que le vol de courrier n'était pas aussi populaire au début des années 1900. Ce n'était peut-être pas un gros problème à l'époque. Cependant, les policiers et les procureurs ont identifié le vol de courrier comme une faiblesse dans le système de sécurité publique. Nous avons réussi a corriger cette faiblesse de façon à ce que le courrier livré à un domicile ou dans une boîte aux lettres soit protégé au même titre que la clé pour entrer au domicile ou pour ouvrir ladite boîte aux lettres. Cela permettra aux policiers de mieux faire leur travail.
Comme l'a fait mon collègue de un peu plus tôt, j'aimerais soulever la question de l'exemption accordée aux fonctionnaires qui utilisent des techniques de fabrication de faux dans le cadre de leurs fonctions relatives à la sécurité publique.
L'exemption a une portée quelque peu restreinte. Il s'agit alors d'une infraction alléguée, étant donné que le fonctionnaire public a accompli cet acte dans le seul but d’établir ou de préserver une identité cachée pour son utilisation dans le cadre de ses fonctions ou de son emploi. Comme mon ami l'a signalé plus tôt, l'expression « fonctionnaire public » est très large. Il y a lieu de se demander pourquoi pas on n'a pas intégré cette exemption à l'article 25 ou au paragraphe 25(1) du Code criminel, qui prévoit les exemptions permettant de garder à l'abri des poursuites les policiers ou les fonctionnaires publics dans l'exercice de leurs fonctions.
On pense tout de suite aux agents d'infiltration qui utilisent une fausse identité afin de mener des enquêtes secrètes. Les citoyens acceptent cette façon de faire. Toutefois, aux termes de l'article 25 du Code criminel, un fonctionnaire public qui commet un acte qui constituerait par ailleurs une infraction doit y être autorisé par écrit et être justifié de commettre un tel acte. Il est fait état à la Chambre de l'exemption invoquée par le policier et de l'acte que le service de police autorise le policier à commettre. En effet, chaque année, on présente à la Chambre un rapport décrivant tous les cas où des policiers se sont prévalus de l'exemption leur permettant de ne pas être poursuivis lorsqu'ils commettent des actes qui constitueraient par ailleurs des infractions criminelles.
Il y a lieu de se demander pourquoi on n'exigerait pas que le type d'exemption prévu à l'article 368.2 de ce projet de loi fasse l'objet de rapports semblables. D'aucuns diront que les policiers et les fonctionnaires publics mènent tellement d'activités secrètes qu'on ne pourrait pas présenter à la Chambre des rapports de taille normale, qu'on présenterait plutôt des rapports de 12 à 24 pouces d'épaisseur. C'est possible, et c'est pour cela que je tenais à le dire officiellement, à l'instar de mon ami qui a soulevé cette préoccupation un peu plus tôt.
Le public devrait être beaucoup plus satisfait de voir que le projet de loi permet de protéger toute une gamme de renseignements identificateurs, que je tiens à mentionner clairement. Les renseignements identificateurs protégés sont, notamment: une empreinte digitale ou vocale, une image de la rétine ou de l’iris, un profil de l’ADN, un nom, une adresse, une date de naissance, une signature manuscrite, électronique ou numérique, un code d’usager, un numéro de carte de crédit ou de débit, un numéro de compte d’une institution financière, un numéro de passeport, un numéro d’assurance sociale, d’assurance-maladie ou de permis de conduire ou un mot de passe.
Je tenais à énumérer tous ces éléments d'information parce qu'un grand nombre de gens les utilisent régulièrement. Je tenais à préciser que la modification législative en tient effectivement compte et qu'elle offre une certaine protection à la population en vertu du Code criminel. Cela ne veut pas dire que les vols d'identité seront éliminés complètement, mais simplement que le Code criminel protège maintenant ces renseignements et que, dorénavant, lorsqu'ils seront volés, utilisés ou utilisés à mauvais escient, les poursuites seront plus faciles et mieux ciblées.
Cette mesure dissuadera-t-elle les délinquants? Nous l'ignorons. Il y aura toujours des personnes mal intentionnées à l'affût de la moindre chance de voler ou de piller, bien que nous espérions qu'il y en aura de moins en moins. Au moins, cette modification tente de tenir compte de tous ces renseignements identificateurs dont nous avons maintenant l'habitude.
Le projet de loi comporte un mécanisme de détermination de la peine. Je suis heureux qu'il n'ait pas fait l'objet de manoeuvres politiques visant à imposer des peines minimales obligatoires aux contrevenants condamnés. Le projet de loi propose différents niveaux de peines pour les personnes condamnées pour ces infractions. Ces peines vont parfois jusqu'à cinq ans ou encore dix ans. Elles peuvent également être déterminées par voie de mise en accusation ou par procédure sommaire, mais les peines semblent appropriées.
Comme nous l'avons toujours fait dans le cadre du système de justice canadien et comme cela se fait dans la plupart des systèmes de justice du monde, la détermination des peines est laissée aux juges compétents. Je tenais à le préciser, car un certain nombre de projets de loi portant modification du code pénal, dont nous avons été saisis dans cette législature comme dans la précédente, semblent tendre vers une refonte des régimes de détermination des peines. Animés par une certaine naïveté, les auteurs du projet de loi estiment qu'en modifiant les peines nous pourrons rendre le pays plus sûr. Je ne peux comprendre cela.
J'ai examiné de près le système de justice canadien. J'ai le privilège de siéger à la Chambre depuis de nombreuses années. J'ai siégé au Comité de la justice pendant 15 ans. J'ai même eu le privilège d'examiner de très près le système de justice pénale. Ce n'était pas toujours beau à voir. J'ai cependant pu constater qu'il fonctionnait plutôt bien, mais je n'irais pas jusqu'à dire qu'aucune erreur n'a été commise.
Selon moi, ce n'est pas en ajoutant une peine minimale obligatoire pour une infraction donnée que la fréquence de ce type d'infraction diminuera nécessairement. Les criminels, les criminels en puissance et les futurs criminels ne savent pas quelle est la peine prévue pour un crime particulier. En fait, je mets les députés au défi de prendre la parole pour nous dire quelle serait la peine imposée pour une infraction particulière, même selon ce projet de loi. On ne peut pas le savoir parce que nous avons laissé une certaine latitude au juge. Quand une personne est condamnée, elle ne sait pas quelle sera sa peine avant que le juge ait rendu sa décision.
Si nous ne savons pas quelle sera la peine imposée, comment les criminels en puissance pourraient-ils le savoir? Je me suis toujours représenté leur cerveau comme fonctionnant en mode binaire face au système de justice pénale. Soit ils se feront prendre, ce qui est dissuasif, soit ils ne se feront pas prendre. L'importance de la peine ne change rien. Ces gens ne sortent pas leur calculatrice pour déterminer la peine qui leur sera imposée avant de passer à l'action. La seule chose qu'ils se demandent, c'est s'ils se feront prendre. S'ils pensent qu'ils risquent de se faire prendre, ils ne passent pas à l'acte ce soir-là. S'ils croient qu'ils ne se feront pas prendre, il se peut qu'ils commettent leur forfait.
Je ne comprends pas comment la Chambre peut croire que si nous imposons beaucoup de peines minimales obligatoires, tous les méchants sauront à quelle peine ils s'exposent et mettront un terme à leurs activités criminelles, ce qui améliorerait notre sécurité. Il fallait que j'aborde la question des peines.
Je suis heureux d'avoir pu prendre la parole sur ce projet de loi. Il semble que nous aurons finalement une mesure législative sur le vol d'identité.
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Madame la Présidente, cela me fait plaisir de prendre la parole sur ce débat intéressant à propos du projet de loi . Tout d'abord, il faudrait qu'on établisse certaines choses et l'une d'elles est que le Code criminel a toujours été un peu à la remorque des problèmes sociaux que l'on vivait, que l'on vit et que l'on continue à vivre. Ayant été criminaliste pendant 30 ans, je vu cela évoluer. Le vol d'identité en est le plus bel exemple. Si quelqu'un, dans cette Chambre ou ailleurs, nous écoute et ne le sait pas, actuellement, vous pouvez être poursuivi pour une infraction criminelle si vous volez le télex ou le télégramme de quelqu'un. À ce que je sache, cela fait longtemps qu'on n'a plus de télex ou de télégramme au Canada. Or c'est encore dans le Code criminel. Il y a des choses assez anachroniques dans le Code criminel qu'il faut absolument modifier pour le rendre compatible aux besoins du XXI
e siècle et le vol d'identité en est une.
Pour ceux qui nous écoute, il faut préciser un peu ce qu'est le vol d'identité actuellement. Aujourd'hui, en ce 20 octobre 2009, un vol d'identité, c'est le fait de prendre délibérément l'identité de quelqu'un — jusque là ce n'est pas trop compliqué — ou d'une autre personne — et c'est là que cela devient compliqué — généralement dans le but de réaliser une action frauduleuse. Or actuellement, c'est ce qu'on doit démontrer. Par exemple, dans le Code criminel, plusieurs articles parlent de faux et usage de faux. Ce n'est pas parce que je vole vos chèques que je commets une infraction au criminel. Si je les prends et que je ne fais rien avec, je ne commets pas actuellement d'infraction criminelle. Ce sera criminel seulement si je les utilise. Bien sûr, on commet une infraction au criminel en volant les chèques de quelqu'un, mais si on ne les utilise pas, l'infraction est moins sérieuse. Donc, présentement, dans le Code criminel, on a ce qu'on appelle des faux et usage de faux, comme, par exemple, prendre un chèque et l'endosser. Cela se voyait régulièrement les premiers et les quinze de chaque mois. C'était assez flagrant. Un citoyen faisait le tour des boîtes aux lettres, ramassait les chèques, les endossait et les encaissait. C'est cela qu'on appelait un faux et usage de faux.
Aujourd'hui, ce n'est plus le cas. Que se passe-t-il? On a ce qu'on appelle les dépôts directs. Vous faites affaire soit avec le gouvernement fédéral, le gouvernement du Québec ou le gouvernement d'une autre province et que fait le gouvernement? Il verse directement dans votre compte de banque les sommes d'argent auxquelles vous avez droit. L'assurance-emploi est un très bel exemple. On versera les prestations d'assurance-emploi auxquelles vous avez droit directement dans votre compte. Par contre, il y avait et il y a encore un problème au niveau des vols d'argent. C'est un problème très grave et je vais y revenir dans quelques instants avec des chiffres. C'est un problème qui existe actuellement. Quelqu'un se rend derrière vous à la caisse populaire, à la Banque Royale, à la Banque Nationale ou à n'importe quelle banque. Il vous regarde composer votre NIP, parce que actuellement, tout le monde compose ce qu'on appelle un numéro d'identification personnel. Alors, que fait la personne? Elle vous regarde composer votre numéro et elle retient les chiffres, parce que aujourd'hui, on retient les chiffres. Elle peut ainsi, avec un duplicata de votre carte — qu'elle se procurera d'une façon illégale, bien évidemment —, vider votre compte de banque. Cela, c'est le problème du vol d'identité.
Cela n'est rien, ce n'est qu'une partie. On peut voler des cartes de crédit, on peut voler en réexpédiant le courrier, par exemple. On prend le courrier, il y a des faux-semblants ou l'intrusion dans des banques de données. Combien en a-t-on vu au cours des derniers mois? Il y a l'utilisation d'un dispositif de tri pour recueillir de l'information sur les cartes de crédit.
Qu'est-ce que cela? Certains commençaient à être des spécialistes. Il faut être prudent lorsqu'on remet notre carte de crédit dans un commerce et qu'on en prend l'empreinte. Quand on imprime, on prend l'empreinte de la carte de crédit. À certains endroits, il y a trois copies. On nous remet la copie originale, celle du dessus, mais il y a deux autres copies en dessous. Il faut faire attention à ces deux autres copies. Le commerçant honnête déchirera la deuxième partie et se servira de la troisième pour déposer. Les voleurs prennent l'empreinte de la deuxième partie à l'aide de complices dans l'établissement. Certains étaient devenus tellement spécialisés qu'ils réussissaient à avoir l'empreinte. Que font-ils une fois qu'ils ont l'empreinte et qu'ils savent le nom du propriétaire de la carte qui fréquente ce commerce? Ils le surveillent et prennent en note son numéro d'identification personnelle, le NIP. Lorsqu'ils ont le NIP, ils vident le compte de banque.
Ils ne font pas que vider le compte de banque. Le problème est qu'avec ce NIP, ils peuvent obtenir beaucoup de choses. C'est pour cette raison qu'on dit aux citoyens de ne pas donner leur numéro d'assurance sociale. Quelqu'un qui vole nos pièces d'identification aujourd'hui, par exemple notre carte d'assurance sociale, notre carte d'assurance-maladie, notre permis de conduire ou encore notre passeport, peut voler notre identité. Ces pièces valent une fortune.
Qu'est-ce que cela veut dire? On ne se rend pas compte de cela tant que quelqu'un ne nous dira pas qu'il y a deux personnes du même nom se promenant avec la même identification. Chacun devrait avoir une identification différente. C'est comme des empreintes digitales, elles devraient être différentes. Quelqu'un qui s'approprie l'identification d'une autre personne peut faire beaucoup de choses. Il peut voler, emprunter et frauder.
Mon ancien collègue d'Hochelaga qui est maintenant parti, Me Ménard, avait attiré l'attention du gouvernement en présentant des chiffres révélateurs. Cela devient intéressant. En 2004, les coûts associés au vol d'identité excédaient 50 milliards de dollars par année. Je répète: les coûts associés au vol d'identité par année excédaient 50 milliards de dollars.
Au Canada seulement, le Conseil Canadien des Bureaux d'éthique commerciale a estimé qu'en 2002, les consommateurs, les banques, les sociétés de cartes de crédit, les magasins ou autres entreprises ont perdu 2,5 milliards de dollars en raison du vol d'identité.
En 2006, c'est encore plus intéressant. Phone Busters, une entreprise qui a été créée en 1993 est un centre d'appel anti-fraude. Généralement, on nous donne le numéro de téléphone de ce centre avec notre carte de crédit. Il est souvent inscrit à l'endos de notre carte, mais il vaut mieux ne pas le laisser à cet endroit parce que si on se fait voler notre carte, cette information sera plutôt inutile. Il faut le mettre à un autre endroit. C'est un numéro de téléphone à utiliser pour dénoncer le vol de notre carte de crédit ou le fait que quelqu'un essaie de l'utiliser. Phone Busters a reçu, en Ontario et quelques autres endroits au Canada, 7 800 appels dénonçant des vols d'identité, et ce, uniquement en 2006.
Il devenait donc urgent que l'on se penche sur ce problème qui crée des pertes de plusieurs milliards de dollars par année non seulement au Canada, non seulement au Québec, mais partout dans le monde.
Quand on considère les lois, on constate que les États-Unis se sont attaqués à ce problème depuis 1988. Au Comité permanent de la justice et des droits de la personne, nous avons eu l'occasion de recevoir différents experts qui nous parlé du vol d'identité. C'était extrêmement intéressant et on a appris beaucoup de choses. Sur le plan des assurances, par exemple, il y a des fraudes incroyables. Il faut trouver les moyens de s'attaquer à ces fraudes. De quelle façon? On a trouvé une façon qui s'appelle le projet de loi , qui touche le vol d'identité et qui modifiera plusieurs articles du Code criminel. Je ne veux pas faire la nomenclature de tous ces articles, mais je pense que l'article 10 du projet de loi est très important. L'intertitre sera désormais « VOL D’IDENTITÉ ET FRAUDE À L’IDENTITÉ », et cela va affecter les articles 400, 402, 402.1, etc. Il va y avoir toute une nouvelle nomenclature.
En quoi cela consiste-t-il? Je vais essayer d'en dresser une liste rapide. Dans le nouvel article, on explique ce qu'est le vol d'identité. C'est simple, il s'agit de quelqu'un qui vole le nom, l'adresse, la date de naissance, et la signature manuscrite, électronique ou numérique de quelqu'un. Je vais traduire cela en français pour ceux qui nous écoutent. La signature manuscrite, ce n'est pas compliqué, c'est ce qu'on signe. Maintenant, de plus en plus — c'est pour cela que ce projet de loi rattrape des dizaines d'années de retard —, plusieurs personnes autorisent une signature électronique. Tous les députés de cette Chambre ont ce qu'on appelle le principe de la signature électronique, mais dans combien d'entreprises a-t-on également établi le principe de la signature électronique? Si quelqu'un se l'approprie, ce sera désormais illégal. Bien évidemment, il y a aussi les numéros d'assurance sociale, d'assurance-maladie, de permis de conduire, le numéro des cartes de crédit ou de débit. À l'intention de ceux qui nous écoutent actuellement, ce n'est pas simplement voler la carte de plastique qui est dangereux, c'est donner le numéro. Combien de fois fait-on des appels, va-t-on sur eBay ou fait-on du commerce avec quelqu'un dans un magasin? On ne donne par téléphone que son numéro de carte de crédit. Quelqu'un de cette Chambre n'a-t-il pas commandé du poulet des rôtisseries St-Hubert, de chez Checkers ou de la pizza? Que fait-on? On donne son numéro de carte de crédit par téléphone. Cela devient très dangereux. Il faut s'assurer, lors de la livraison, que le bon numéro apparaît bien sur les documents qu'on nous demande de signer.
On inclut également, dans le nouvel article 402.1, le numéro de passeport, le code d'usager, le mot de passe, les empreintes digitales ou vocales, l'image de la rétine ou de l'iris, et un profil d'ADN. C'est bien, je pense que le gouvernement a bien fait cela. On avance. On avance dans le temps et on prévoit des choses qui s'en viennent.
En 2007, mon collègue Réal Ménard du comté d'Hochelaga avait fait une demande en ce sens, et le gouvernement avait répondu que ce n'était pas nécessairement urgent. On se rend compte aujourd'hui que c'est extrêmement urgent parce qu'il y a eu et il y a encore des pertes considérables.
Il va y avoir un nouvel article. Évidemment, ce n'est parce qu'on a en sa possession un nom et une adresse qu'on commet un geste illégal, mais la définition de renseignements identificateurs prévue à l'article 402.1 s'appliquera également à une nouvelle infraction. On crée une nouvelle infraction mixte visant cette fois la transmission, la mise à la disposition, la distribution, la vente, l'offre de vente et la possession à ces fins de renseignements identificateurs concernant une autre personne.
En somme, si on a entre les mains le nom, l'adresse et le numéro de téléphone de quelqu'un, ce n'est pas trop mal parce qu'on a tous cela dans nos listes d'appels, peu importe notre parti politique.
Mais si vous avez le numéro d'assurance sociale, le numéro d'identification personnelle, le numéro de carte de crédit, on présumera alors que vous avez obtenu ces documents de façon illégale et on devra prouver que l'accusé a fait le trafic de renseignements identificateurs concernant une autre personne sachant qu'ils seront utilisés pour commettre un acte criminel dont l'un des éléments constitutifs est la fraude, la supercherie et le mensonge.
Je crois que cette Chambre a raison de voter en faveur de ce projet de loi et, par cet article, nous voulons faire en sorte que soit poursuivie la personne qui s'approprie sans droit, de façon illégitime et illégale, des informations d'un individu.
Pour l'information de la Chambre, de mes collègues et des personnes qui nous écoutent, pour quelqu'un qui se fait voler son portefeuille et son identité — par exemple une dame qui se fait voler son sac à main —, on a établi en moyenne à 500 $ le coût minimal pour que cette personne retrouve son identité. Ainsi, pour avoir un nouveau passeport, de nouvelles cartes d'identité, un nouveau permis de conduire et ainsi de suite, il en coûtera à cette personne environ 500 $.
Mais il y a pire. Sans dévoiler le secret de la confession, des entreprises font des enquêtes sur des individus. Je vais en nommer une. Prenons Equifax, par exemple. Que fait cette compagnie sur votre compte? Elle établit votre crédibilité, donc votre pouvoir financier.
Lorsqu'on demande une enquête de crédit, on s'adresse généralement à une compagnie comme Equifax ou Crédit Nord-Ouest. Ces compagnies enregistrent, emmagasinent et gardent des éléments d'information. Maintenant, quand quelqu'un se fait voler son identité, le travail incroyable qu'il faut faire pour aviser ces compagnies est tout à fait démesuré au regard du crime qui a été commis. Quelqu'un se fait voler ses biens, on lui vole son identité, on utilise cette nouvelle identité pour faire de la fraude et des vols. Malheureusement, c'est très long et extrêmement difficile pour cette personne honnête de faire enlever la mention de mauvais crédit dans leur dossier au sein de ces compagnies de crédit.
Il était temps qu'on arrive avec ce projet de loi qui est extrêmement important, parce qu'on arrive enfin au XXIe siècle. Le vol d'identité est un vol commis de façon sournoise et de façon à détruire l'identité de quelqu'un. Bien souvent, ces personnes qui en ont été victimes ont une difficulté extrême à démontrer qu'elles ne sont pas des voleurs ou des fraudeurs. On a utilisé leur identité. On n'avait pas le droit de le faire, mais on l'a tout de même fait. Cela est illégal et il était temps qu'on intervienne.
On a également posé la question tantôt et je vais y répondre. Des compagnies sont même venues témoigner devant nous et voulaient des peines minimales d'emprisonnement. Nous nous sommes objectés fortement et nous allons continuer à nous objecter fortement aux peines minimales d'emprisonnement. Pourquoi? Parce que nous allons commencer par mettre en vigueur ce projet de loi.
Je souhaite que cette Chambre vote rapidement en faveur de ce projet de loi et qu'il puisse être mis en vigueur très rapidement. Une fois qu'on l'aura analysé, on pourra peut-être pensé à réviser les sentences potentielles. Toutefois, laissons le tribunal intervenir et faire en sorte que la personne qui commet un tel délit ait une sanction juste et appropriée.
Monsieur le Président, je sais que vous venez de me faire signe il y a quelques instants, mais je dirais en terminant que nous trouvons important que ce projet de loi puisse enfin arriver en cette Chambre. Nous souhaitons qu'il soit adopté rapidement pour que nous puissions le mettre en vigueur.
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Monsieur le Président, ma tâche sera extrêmement ardue étant donné le brillant exposé que nous a fait notre collègue d'. Après avoir entendu son discours et celui de mon collègue , on pourrait croire qu'il y a très peu de choses supplémentaires à expliquer sur ce projet de loi. Pourtant, dans ma grande débrouillardise, j'ai trouvé encore quelque chose à apporter au débat.
Ce débat est extrêmement intéressant, compte tenu particulièrement de l'augmentation continuelle de l'utilisation des nouvelles technologies. Par exemple, l'achat dans l'Internet, il y a 15 ou 20 ans, représentait un très faible pourcentage des transactions et prend maintenant énormément d'expansion.
Comme le disait tout à l'heure mon collègue d' — je ferai souvent référence à ce qu'il a dit parce que, encore une fois, c'était un brillant exposé —, on peut même se commander une pizza avec ses cartes de crédit. On voit tous les moyens que nous possédons où il pourrait y avoir un vol d'identité et où on a besoin d'avoir des informations personnelles pour faire la transaction. Pour ce qui est de la carte de crédit, par exemple, on a besoin d'une signature. S'il y a usurpation, il y a moyen de faire des choses qui sont vraiment dégueulasses — on excusera le terme — sur le plan de la fraude et du vol.
Je parlais tout à l'heure des achats dans l'Internet, qui sont en expansion fulgurante. Je dois dire que moi-même, j'utilise énormément les nouvelles technologies. Je ne suis pas le seul. Les gens sont peut-être trop naïfs ou mal renseignés. Étant donné que c'est dans l'Internet et que des logos d'entreprises semblent assurer la sécurité d'utilisation des cartes de crédit, par exemple, ils font confiance à ces sites, sans même chercher un peu plus loin et essayer de savoir quelle compagnie donne cette assurance de sécurité ou s'il y a vraiment des barrières de sécurité tangibles pour empêcher le vol.
Trop souvent, malheureusement, on se rend compte qu'il n'y pas, dans l'Internet, de sécurité assez fiable pour pouvoir faire des achats sans crainte. Il est certain qu'il y a de bons systèmes pour faire ces barrières, mais malheureusement, ce n'est pas assez répandu, d'où l'utilité d'une loi comme celle-ci.
Malgré le fait que le Bloc québécois en ait parlé depuis des années — je pense au collègue d'Hochelaga et au travail qu'il a fait à cet égard au Comité permanent de la justice et des droits de la personne —, le gouvernement, comme à son habitude, a tardé à agir. Cela dit, il a enfin proposé un projet de loi qui, somme toute, était plein de bon sens. Il n'y avait pas grand-chose à y ajouter. Il était déjà presque parfait et n'avait besoin que d'un peu de peaufinage.
Je disais tout à l'heure que l'importance du vol d'identité va en augmentant rapidement. Mon collègue d' parlait d'un marché de près de 50 milliards de dollars par année. On s'entend pour dire que ce ne sont pas des pinottes.
Depuis tout à l'heure, je donne l'exemple de cartes de crédit, mais il y a beaucoup d'autres exemples. Il y a le vol de NIP pour une carte de débit et, plus loin dans le projet de loi, on parle même de la rétine. On voit que, pour une fois, le gouvernement essaie de prendre un peu d'avance sur les technologies, même s'il a eu énormément de mal à le faire.
On voit que le vol d'identité peut aller très loin et que ce n'est plus seulement le fait d'avoir le numéro d'assurance-sociale de quelqu'un, comme c'était le cas il y a une trentaine d'années. Aujourd'hui, tellement d'outils existent, tant du côté des modes de paiement que du côté des communications, entre autres, que cela a aussi multiplié le nombre d'informations personnelles que l'on peut se faire usurper.
Prenons, par exemple, le site de réseautage Facebook, une nouvelle technologie existant depuis quelques années déjà.
Ces sites sont extrêmement répandus. Que trouve-t-on sur ces sites Internet de réseautage? On a la possibilité de mettre notre nom, notre adresse, notre date de naissance, notre numéro de téléphone et j'en passe. C'est une mine d'or d'informations pour les usurpateurs, qui peuvent aller les collecter sur Internet pour ensuite les utiliser à mauvais escient.
Bien sûr, je ne condamne pas ces sites de réseautage, très loin de là. Ils ont leur importance, mais on voit comment parfois, naïvement, on peut mettre sur Internet des informations, pensant que cela servira à bon escient. On voit que le résultat final n'est pas toujours au rendez-vous. Les gens qui ont de mauvaises intentions vont en profiter et vont s'en servir contre l'usager. C'est extrêmement triste.
C'est intéressant de prendre le temps d'expliquer cela aux gens qui nous regardent. En effet, je ne dirai jamais assez à quel point l'éducation peut être un outil extrêmement important pour lutter contre le vol d'identité. Déjà, on a ici un excellent outil avec ce projet de loi, mais si on n'ajoute pas à ce projet de loi l'éducation et la sensibilisation de la population, on se retrouvera au même point.
Je parlais tout à l'heure de Facebook. Or, lorsqu'on se connecte sur d'autres outils, comme par exemple, MSN Messenger, ils ont pris la peine de nous rappeler de ne pas donner à quiconque nos NIP ou nos numéros de cartes de crédit sans se protéger et savoir à qui on les donne. Il faut faire extrêmement attention. Donc, il faut vraiment rappeler à la population d'être très vigilante sur ce dossier.
Je vais avouer que même si on est extrêmement vigilants, comme moi-même je peux l'être, parfois on a des ratés et c'est là l'utilité de la loi. Je vais me donner à titre d'exemple pour montrer à quel point n'importe qui peut se faire avoir dans ce type de situation. Moi-même, cet été, j'ai utilisé ma carte de débit et elle a été clonée. Donc, ce n'est pas l'apanage exclusif d'une classe de la société, cela concerne tout le monde. N'importe qui dans le monde actuel peut se faire usurper son identité sans même s'en rendre compte. Je ne dirai pas le nom de ma banque pour ne pas faire de jaloux, mais, Dieu merci, la banque avec laquelle je fais affaire a eu la rapidité de communiquer avec moi pour pouvoir bloquer cette fraude.
Donc, je voudrais peut-être juste faire un petit rappel de ce qu'est le vol d'identité. L'usurpation d'identité est le fait de prendre délibérément l'identité d'une autre personne, généralement dans le but de réaliser une action frauduleuse, comme accéder aux finances de la personne usurpée ou de commettre un délit ou un crime anonymement. Presque toutes ces définitions font référence à l'utilisation illégale des renseignements personnels d'une autre personne. Ces renseignements personnels sont obtenus, comme je le disais tout à l'heure, de diverses façons, allant de moyens directs et pas nécessairement illégaux, comme la fouille dans les poubelles, à des techniques d'hameçonnage très perfectionnées.
Les autres façons d'obtenir des renseignements personnels sont le vol de cartes d'identité ou de cartes de crédit, la réexpédition du courrier, les faux-semblants — soit prétendre être une personne autorisée à obtenir des renseignements sans l'être —, l'utilisation de dispositifs de tri pour recueillir l'information sur les cartes de crédit ou NIP. Je vais avouer que quand on combat le crime, il faut toujours se dire que nos adversaires, les criminels, sont extrêmement ingénieux et innovateurs.
Pour m'être intéressé énormément à ce sujet, j'ai regardé beaucoup de documentaires, surtout sur la manière dont cela fonctionne aux États-Unis. Canal D, justement, présente de très bons documentaires pour faire un peu d'enseignement, pour faire de la prévention et appeler à la vigilance. Dans ces documentaires, on nous montre comment les gens sont capables de mettre des boîtiers par dessus les boîtiers traditionnels où on inscrit notre NIP. Donc, ces gens réussissent à mettre par dessus le boîtier un autre petit boîtier qui a l'air de l'original, et pourtant celui-ci prend en note le code que vous entrez. Une fois qu'ils ont votre numéro de carte de débit, ils peuvent la cloner sans problème.
Donc, parmi les autres façons d'obtenir des renseignements personnels, il y a aussi la perte ou le vol d'un ordinateur personnel ou d'autres appareils de stockage de données, où on peut retrouver des informations confidentielles qui pourraient resservir ensuite à un acte frauduleux, et la complicité d'un employé peu scrupuleux dans les organisations.
Pour revenir au projet de loi, on peut deviner que le Bloc québécois est favorable à celui-ci, et nous avons la volonté, comme d'autres partis à la Chambre des communes, de l'étudier rapidement. Le plus vite ce projet de loi sera étudié, le plus vite on pourra l'adopter et le plus vite on pourra commencer à agir face à ce crime qui fait de plus en plus de victimes.
Je le disais et je ne le redirai jamais assez, ce n'est pas strictement réservé à une classe de la société ou à un groupe de personnes. L'entièreté de la population canadienne peut se faire voler frauduleusement leur identité à n'importe quel moment du jour ou de la nuit, peu importe le moment de l'année.
Cependant, la lutte au vol d'identité passe aussi par des actions concertées entre les différents niveaux de gouvernements. Le Bloc québécois reconnaît que la modification du Code criminel ne suffira pas à régler le problème de vol d'identité. D'autres mesures devront être mises en place par le gouvernement, comme je le disais tout à l'heure, par rapport à une éducation de la population pour la sensibiliser et la rendre vigilante à cet égard.
Il y a la question de la réglementation afin de mieux encadrer la gestion, comme par exemple le stockage, disposition et autre de l'information par les entreprises. Je disais tout à l'heure que lorsqu'on fait des achats sur Internet, par exemple, on accepte de donner notre numéro de carte de crédit à des entreprises. Il faut donc absolument, par le biais de l'éducation, sensibiliser la population à être curieuse face à l'entreprise à qui l'on donne notre numéro de carte de crédit. On doit fouiller un peu pour voir si elle a déjà des antécédents ou si elle a déjà eu des problématiques par rapport au stockage de données ou si elle a déjà été victime de vol. On a beau donner notre numéro de carte de crédit en faisant confiance à une compagnie, mais si cette compagnie se fait elle-même usurper ou voler, on se retrouve avec une problématique qui n'est pas nécessairement de notre faute ni de la faute de l'individu ou de l'entreprise. Il faut donc vraiment se renseigner, faire attention et être vigilant.
Il y a aussi des mesures visant une uniformité et une sécurité accrue des processus d'émission et de vérification des pièces d'identité. Malheureusement, le gouvernement fédéral a un bien triste bilan en matière de gestion des données personnelles, mais c'est un autre sujet. Le projet de loi vise donc à contrer le vol d'identité, la collecte et l'utilisation non autorisée de renseignements personnels habituellement à des fins criminelles. Le nom, date de naissance, adresse, numéro de carte de crédit, le NAS, soit le numéro d'assurance sociale, et tout autre numéro d'identification personnelle peuvent servir à ouvrir un compte bancaire, obtenir une carte de crédit, faire suivre du courrier, s'abonner à un service de téléphone cellulaire ou louer un véhicule. On voit toute l'étendue des actes qui peuvent être commis à partir de numéros d'identification personnelle ou de documents personnels.
Trois nouvelles infractions de base sont donc créées par le projet de loi, toutes assujetties à une peine maximale de cinq ans. On parle de l'obtention et la possession de renseignements relatifs à l'identité dans l'intention de les utiliser de façon frauduleuse, malhonnête et trompeuse dans la préparation d'un crime.
Il y a le trafic de renseignements relatifs à l'identification. Il y a aussi une autre forme de crime. Je donne l'exemple, je ne le ferais pas, monsieur le Président, vous vous en doutez bien, mais on peut cloner la carte de débit et prendre l'argent dans le compte de quelqu'un. On n'est pas nécessairement obligé de faire cela pour être un criminel. Je peux simplement prendre vos informations, les posséder et les transférer à un autre qui, lui, les utilisera de manière criminelle. On reconnaîtra donc que l'intermédiaire entre le criminel et la personne se trouvera aussi pénalisé. Je tiens à rassurer la Chambre encore une fois que je n'ai pas l'intention de voler de carte de débit.
Une autre infraction de base est créée par ce projet de loi, soit la possession ou le trafic illégal de documents d'identité émis par le gouvernement, qui renferme des renseignements — on le comprendra — d'une autre personne.
En plus, d'autres modifications seront apportées au Code criminel, soit la création de la nouvelle infraction du détournement direct ou indirect du courrier d'une personne, la création de la nouvelle infraction de possession d'une clé à courrier de Postes Canada contrefaite, la création d'infractions supplémentaires de contrefaçon comme le trafic de documents contrefaits et la possession de documents contrefaits en vue de les utiliser, la nouvelle désignation de l'infraction de supposition de personne par la qualification de fraude d'identité — on voit qu'on clarifie un peu plus les lois précédentes —, la précision du sens de l'expression « prétendre faussement être une autre personne », l'ajout de l'infraction de possession d'instruments de reproduction de renseignements de cartes de crédit, en plus de l'infraction actuelle de possession d'instruments de contrefaçon de cartes de crédit.
Par conséquent, on se doute que si quelqu'un a le matériel pour faire des cartes de contrefaçon, cela en fait déjà un criminel. Cependant, maintenant, le fait d'avoir les renseignements — simplement d'avoir les renseignements — deviendrait, en soi, un acte criminel.
De plus, le projet de loi ajoute un nouveau pouvoir qui permet au tribunal d'ordonner au contrevenant, dans le cadre de sa peine, de dédommager la victime du vol d'identité ou de fraude d'identité, quand cette dernière a engagé des frais pour rétablir son identité, comme le coût des cartes et des documents de remplacement ainsi que les coûts liés à la correction de son dossier.
Le vol d'identité, par rapport aux victimes, ce n'est pas simplement le fait d'avoir perdu de l'argent qui pose problème, c'est toute la problématique d'être capable de reprendre possession de son identité. Cela peut devenir extrêmement coûteux, long et pénible.
Je disais tout à l'heure que lorsque cela m'était arrivé, la banque avec laquelle je fais affaire avait fait preuve de rapidité et cela ne m'avait rien coûté. Cependant, la problématique vient du fait qu'il faut ensuite être capable d'aller rechercher toutes ces données. Cela peut devenir extrêmement long. Le citoyen ordinaire n'a simplement pas le temps d'aller rechercher toutes ces informations. Pensons-y, avec le NAS, les cartes de crédit qu'il doit faire annuler et réactiver, toute la complexité et la paperasserie que cela amène, cela peut devenir extrêmement pénible pour un citoyen.
Le projet de loi déposé prévoit deux exemptions qui mettraient à l'abri de poursuite pour falsification les personnes qui fabriquent de faux documents pour des opérations gouvernementales secrètes, et qui permettraient aux fonctionnaires publics, c'est-à-dire aux agents d'application de la loi, de créer et d'utiliser des identités secrètes dans l'exercice de leurs fonctions.
Comme je le disais, le vol d'identité est un problème extrêmement préoccupant. Selon le ministère de la Sécurité publique, le vol d'identité est devenu l'une des formes de crime qui connaît la croissance la plus rapide au Canada et aux États-Unis. En 2004, comme le disait mon collègue d', les coûts associés au vol d'identité frisaient les 50 milliards de dollars. Le vol d'identité coûte cher aux consommateurs. II ne faut pas oublier qu'il ne coûte pas simplement cher au citoyen qui s'est fait duper, mais aussi aux banques et aux entreprises qui, elles aussi, vont se retrouver avec un problème. Prenons le cas d'un fraudeur qui a acheté, par exemple, pour 2 000 $ dans une entreprise et dont on se rend compte que la carte a été falsifiée. Cela va créer un gros problème pour l'entreprise qui, elle, ne peut pas se permettre de subir cette perte pour s'être fait voler.
En 2002, le Conseil Canadien des Bureaux d'éthique commerciale a estimé que les consommateurs, les banques et les sociétés de cartes de crédit, les magasins et autres entreprises ont perdu 2,5 milliards de dollars à cause du vol d'identité.
Comme je le disais, le Bloc québécois favorise l'adoption de ce projet de loi le plus rapidement possible. Les victimes ne sont pas simplement les citoyens, mais aussi les entreprises.
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Monsieur le Président, j'ai le plaisir de poursuivre ce débat au sujet du projet de loi , et ce, à la suite du brillant exposé de mon collègue de .
Ce n'est pas pour rien que je demandais l'âge de mon collègue. Il a 22 ans et j'en ai 52. Il y a donc 30 ans qui nous séparent. Je vais raconter mon histoire. Je veux aussi dire que le Bloc québécois est un parti qui a un bel équilibre intergénérationnel. Évidemment, c'est tout à l'avantage des Québécoises et Québécois qui nous élisent. Il y a une bonne proportion homme/femme, que l'on devrait améliorer. Il faut toujours tendre à augmenter la participation féminine dans nos formations politiques. Il y a aussi un bel équilibre entre les différents groupes d'âge des représentants du Bloc québécois.
Pourquoi avais-je souligné cette demande? Dans sa réponse, mon collègue de nous a parlé de son expérience au sujet d'une carte de débit clonée. Très tôt dans ma vie, j'ai eu aussi à subir une usurpation d'identité, que j'ai découverte plusieurs années plus tard. L'erreur qu'ont commis ceux qui ont voulu usurper mon identité, c'était qu'au moment où ils l'ont fait, j'étais étudiant à temps complet. Je n'avais pas les revenus nécessaires. Évidemment, ils ont fait face à la dure réalité de quelqu'un qui n'avait pas de grands moyens.
Il y a 15 ans, lorsque j'ai fait une demande d'analyse de crédit — Equifax ou TransUnion le font gratuitement —, je voulais savoir quel était l'état de mon crédit et comment ces firmes me considéraient. Lorsque j'ai reçu les résultats, je me suis aperçu qu'un nom qui n'était pas le mien figurait dans mon dossier de crédit. J'ai fait les interventions nécessaires auprès de ces firmes pour demander pourquoi il y avait un nom qui n'était pas le mien. Ils m'ont dit qu'une demande de crédit avait été faite au nom de cette personne — qui n'était pas le mien — et qu'elle possédait mon numéro d'assurance sociale, ma date de naissance et tous les renseignements nécessaires. Ils ont été obligés d'ajouter à ma feuille de crédit le nom de cette personne tout au long de ma vie. Pourquoi? Parce qu'il y a eu une demande. À l'époque, compte tenu du fait que la demande était excessive par rapport au fait que je n'avais pas de revenu, je n'avais même pas été avisé ou contacté. Peut-être que c'est parce que j'avais quitté pour étudier à l'extérieur. C'est probablement ça. Je n'avais pas été conscient de cela, mais des gens, il y a déjà 30 ou 35 ans, avaient mis la main sur mes renseignements personnels, probablement lors de mes demandes aux universités. C'est ce que l'on a pu comprendre à l'époque. Ces gens ont mis la main sur ma feuille d'inscription et ils avaient, pour toutes sortes de raisons, pensé que j'étais fortuné. Dans les universités, il n'y a pas que des jeunes. La moyenne d'âge de ceux et celles qui fréquentent les universités se situe entre 35 et 40 ans, dépendant des universités. On avait essayé de commettre cette fraude à mon endroit.
Le vol d'identité, ce n'est pas nouveau. C'est ce qu'il faut comprendre. Il faut aussi que les jeunes comprennent cela. C'est la question que je posais à mon collègue de . Ce n'est pas parce que c'est sur Internet que les sites auxquels on donne nos numéros de cartes de crédit sont sécuritaires. Dès qu'ils ont un renseignement, les fraudeurs peuvent aller chercher de l'information à notre sujet. Inévitablement, le résultat est terrible: on a des dettes qui ne nous appartiennent pas, on a des vols de cartes de crédit. Mon collègue a été chanceux puisqu'il dit que sa banque s'en est aperçue très rapidement et qu'il a pu être dédommagé pour les sommes qui avaient été prises dans son compte. D'autres personnes sont moins chanceuses. C'est la dure réalité.
C'est la raison pour laquelle un projet de loi comme celui-ci, le projet de loi , est important. Le Bloc québécois sera en faveur de ce projet de loi. Aujourd'hui, on prend le temps nécessaire d'expliquer le pourquoi aux personnes qui nous écoutent. Souvent, les projets de loi sont adoptés très rapidement. Les gens l'apprennent par le biais d'un entrefilet dans les médias. Ce ne sont pas tous les projets de loi qui font la une des médias. Le projet de loi S-4 est drôlement important parce qu'il vise à contrer le vol d'identité, la collecte et l'utilisation non autorisée de renseignements personnels habituellement à des fins criminelles.
C'est important qu'on prenne le temps de comprendre ce qu'est le vol d'identité. C'est le fait de prendre délibérément l'identité d'une autre personne, généralement dans le but de réaliser une action frauduleuse, comme accéder aux finances de la personne usurpée ou de commettre un délit ou un crime anonyme. Presque toutes ces définitions font référence à l'utilisation illégale des renseignements personnels d'une autre personne.
Ces renseignements personnels sont obtenus de diverses façons allant de moyens directs mais pas nécessairement illégaux, comme la fouille des poubelles, à des techniques d'hameçonnage très perfectionnées. Les spécialistes nous ont fourni les définitions sur les autres façons d'obtenir des renseignements personnels tels que le vol de cartes d'identité ou de cartes de crédit, la réexpédition du courrier, le faux-semblant qui prétend être une personne autorisée à obtenir les renseignements, l'intrusion dans des bases de données informatiques, l'utilisation de dispositifs de tri pour recueillir de l'information sur les cartes de crédit ou de débit. Le piquage du NIP consiste à regarder au-dessus de l'épaule d'une personne lorsqu'elle entre son NIP ou d'autres renseignements à un guichet automatique.
Évidemment, il faut comprendre que c'est très important. Je sais que toutes les institutions bancaires font des campagnes de sensibilisation pour que les personnes ne distribuent pas leurs numéros d'identification personnelle, leur fameux NIP. Il faut être en mesure de décourager ces gens. Il y a des gens qui se présentent au guichet automatique qui n'ont pas la facilité qu'ont d'autres pour utiliser ces machines. La jeune génération est plus habituée. Personnellement, à 52 ans, j'utilise cela depuis six ou sept ans, mais il y a des personnes qui ont plus de difficulté à faire affaire avec ces boîtes électroniques pour aller chercher de l'argent.
Certaines personnes prennent plus de temps et, quand on prend plus de temps, cela permet à des gens de regarder. Donc, il faut être prudent. Il faut s'assurer que les gens qui sont derrière nous soient assez loin. Il ne faut pas hésiter à leur demander de reculer parce qu'on doit entrer notre numéro d'identification personnelle. Pour certaines personnes, si elles vont trop rapidement, elles peuvent se tromper et doivent recommencer. Alors, ce n'est pas mieux pour certaines personnes qui attendent. Donc, on peut facilement dire qu'on va prendre le temps qu'il faut pour entrer notre information et demander à la personne de reculer. Si on va trop rapidement, on devra recommencer et de toute façon ce ne sera pas plus facile pour l'autre personne.
Souvent, dans les files d'attente au guichet automatique, le problème c'est que les gens sont pressés et la personne derrière essaie de mettre de la pression. Alors, prenez le temps qu'il faut de dire: « Je vais trop vite, tu me mets de la pression. De toute façon, je vais probablement me tromper et d'une manière ou d'une autre, ça n'ira pas plus rapidement. » Vous allez vous rendre compte que si la personne insiste encore, cela veut peut-être dire que c'est quelqu'un qui veut tenter d'usurper votre NIP. Il y a des gens qui se spécialisent dans le piquage de NIP, des gens qui font de la pression pour tenter de vous influencer et possiblement même pour avancer plus près. C'est la façon dont ils récupèrent votre NIP.
Il y a d'autres façons comme l'élimination inadéquate des dossiers. Il y a des appareils qui se vendent, comme des broyeurs de papier. C'est important qu'on fasse cela. Les premières versions déchiquetaient en lanières, mais on s'est aperçu que des spécialistes pouvaient reconstituer les documents. Il y a maintenant des nouvelles versions qui broient différemment, faisant en sorte qu'il est impossible de reconstituer le document. Donc, c'est important, quand on a des dossiers à la maison, de ne pas les mettre tout simplement dans les poubelles parce que des gens pourraient les fouiller et aller chercher nos identifications. Il faut s'assurer de bien déchiqueter tous les documents qui contiennent nos informations personnelles, même si ces informations s'en vont directement à la poubelle.
On parle de perte ou de vol d'ordinateurs personnels. Les ordinateurs personnels sont très prisés. Il ne faut pas les laisser dans les automobiles. Il faut être très consciencieux par rapport à cela parce que c'est un moyen très facile d'usurper l'identité.
On a parlé tout à l'heure de la réexpédition du courrier. Il est évident que si on reçoit du courrier ou si on s'attend à recevoir de l'information concernant notre carte de crédit — on a fait une demande, on sait qu'il y aura un renouvellement ou certains perdent leur carte et en demandent une nouvelle —, il faut être très conscient lorsqu'on nous donne la date. Si on fait un renouvellement de carte de crédit ou si on demande une nouvelle carte de crédit parce que la nôtre a été altérée ou ne fonctionne plus, il faut être très vigilant. On nous donne la date à laquelle on devrait la recevoir. Dès que cette date est dépassée, il faut appeler pour nous assurer qu'elle a bien été envoyée. Sinon, il faut en demander une nouvelle, parce que des gens peuvent, par des moyens détournés, mettre la main sur le courrier et essayer d'avoir les informations sur la carte de crédit ou même la carte de crédit elle-même dans la poste.
De plus en plus de compagnies de cartes de crédit les envoient par courrier recommandé. On doit alors signer pour avoir la carte de crédit. Toutefois, ce ne sont pas toutes les compagnies qui fonctionnent ainsi. Il faut faire attention et toujours s'assurer que les cartes de crédit et les documents contenant nos informations personnelles nous sont bien adressés et que l'on en prend bien possession pour éviter que quelqu'un d'autre en prenne possession avant nous.
Au sujet de l'intrusion dans des bases de données informatiques, il y a les fameux hackers — je m'excuse de l'expression anglophone. Des gens sont des spécialistes d'intrusion dans les systèmes informatiques. Dès que l'on sent que notre ordinateur a un problème inhabituel, il faut faire attention. Il est certain que ce n'est pas facile, mais il y a de nombreux systèmes de détection en vente maintenant. Il faut donc s'assurer que notre équipement informatique a la dernière version du système de détection, parce que, encore une fois, c'est une façon pour les fraudeurs d'utiliser les renseignements personnels.
L'objet de ce projet de loi est de créer trois nouvelles infractions de base, toutes assujetties à une peine maximale de cinq ans. Pour essayer de décourager ces crimes, l'une des façons est d'adopter des projets de loi. Une autre façon est d'y ajouter des infractions avec des peines de prison.
Voici les trois nouvelles infractions. La première est l'obtention et la possession de renseignements relatifs à l'identité dans l'intention de les utiliser de façon trompeuse, malhonnête ou frauduleuse dans la perpétration d'un crime. Donc, si on obtient et possède des renseignements relatifs à l'identité qui ne sont pas les nôtres et qu'il y a une intention de fraude, c'est une infraction avec une peine maximale de cinq ans.
La deuxième infraction est le trafic de renseignements relatifs à l'identité. Certains ne veulent pas les utiliser, mais les usurper pour les vendre à quelqu'un d'autre. On le voit dans les médias. Des gens, des entreprises ou des systèmes frauduleux se sont appropriés des banques de données. Automatiquement, la personne qui les aurait vendues serait également passible d'une peine d'emprisonnement.
La troisième infraction est la possession ou le trafic illégal de documents d'identité émis par le gouvernement. Tout à l'heure, j'ai parlé des cartes de crédit qui peuvent nous arriver par la poste et pour lesquelles il faut s'assurer que les délais promis de réception soient respectés. Sinon, il faut faire les appels. Il faut aussi inclure les renseignements que les gouvernements nous envoient. On ne sait pas toujours quand le gouvernement nous adresse une correspondance. Quand il nous envoie un chèque, on est bien contents et, habituellement, on l'apprécie. Quand c'est une facture ou un avis de cotisation, on ne veut pas le savoir et, de plus, on ne sait pas quand il nous l'envoie. Ces documents pourraient devenir en possession de personnes. Notre numéro d'assurance sociale est souvent inscrit sur ces documents. C'est évidemment une information très importante pour usurper l'identité. Donc, si des citoyens, dans des buts illégaux ou illicites, voulaient prendre possession ou faire le trafic de documents d'identité émis par le gouvernement, il y aurait une autre peine passible d'un emprisonnement maximal de cinq ans.
En plus, d'autres modifications sont apportées au Code criminel. On ajoute la création de la nouvelle infraction de détournement direct ou indirect du courrier d'une personne. Je le disais tout à l'heure: l'une des façons d'usurper l'identité est de prendre possession soit de cartes de crédit, soit de documents émanant de différents paliers du gouvernement qui contiennent nos informations.
Le détournement de courrier par une personne constituera une nouvelle infraction, tout comme la possession d'une clé à courrier de Postes Canada contrefaite. On le voit, les boîtes à courrier n'ont pas des serrures infaillibles. D'abord, elles sont fournies par l'État et ce ne sont pas des serrures antivol dernier cri. Les voleurs ont des techniques pour insérer certains bidules ou contrefaire les clés. Si une personne était détentrice d'une clé qui n'est pas pour sa propre boîte de courrier, ce serait de la contrefaçon.
Il y a la création d'infractions supplémentaires de contrefaçon comme le trafic et la possession de documents contrefaits en vue de les utiliser. Les gens peuvent aller chercher les informations sur notre identité, mais ils doivent par la suite produire des documents. S'ils font des demandes d'emprunt, ils doivent remplir des formulaires. Inévitablement ils pourraient, en notre nom, fausser les revenus, faire de fausses déclarations sur des formulaires. Ils pourraient faire une demande d'emprunt avec nos numéros et notre nom, mais avec leur adresse qu'ils auraient changée. Ce pourrait aussi être des cartes de crédits contrefaites; on pourrait émettre de nouvelles cartes de crédit avec les numéros qu'ils auraient obtenu. Cela deviendrait alors une infraction criminelle.
Il y a aussi la nouvelle désignation de l'infraction de supposition de personne par la qualification de fraudes d'identité. Lorsqu'on parle d'infraction de supposition de personne, on la qualifie de « fraude d'identité ». De plus, on précise le sens de l'expression « prétendre faussement être une autre personne ».
Dans mon cas, comme je le disais, quelqu'un avait fait une demande il y a plusieurs années. Le nom de cette personne est toujours dans mon dossier de crédit. Quelqu'un pourrait donc prétendre faussement être une autre personne. Cette personne pourrait être accusée au criminel alors que moi, présentement, j'essaie de faire enlever le nom de cette personne de mon dossier, et c'est impossible. Depuis 25 ans, il n'y a eu aucune demande. Ce nom étant dans mon dossier, si jamais il y avait une demande avec mon numéro d'assurance sociale et ma date de naissance, il y aurait automatiquement rejet de la part des compagnies. Il reste quand même que je ne pouvais pas déposer d'accusations au criminel, alors que, en vertu de ce projet de loi, je le pourrais désormais. L'infraction a eu lieu il y a 25 ans, au moment où ce n'était pas illégal. Les personnes qui vivraient la même situation que la mienne à partir d'aujourd'hui pourraient déposer une plainte au criminel.
On ajoute l'infraction de possession d'instruments de reproduction de renseignements de carte de crédit. On rajoute tout, parce que pour faire des cartes de crédit, cela prend quand même tout un concept et l'équipement nécessaire pour pouvoir reproduire les cartes de crédit. Toute personne qui serait en possession de matériel ou d'équipement pour faire la reproduction de cartes de crédit pourrait être passible d'une infraction de vol d'identité au criminel.
De plus, le projet ajoute un nouveau pouvoir qui permettrait au tribunal d'ordonner au contrevenant, dans le cadre de sa peine, de dédommager la victime de vol ou de fraude d'identité lorsque la victime a engagé des frais pour rétablir son identité, comme le coût des cartes et des documents de remplacement ainsi que les coûts liés à la correction de son dossier de crédit. C'est important. Lorsqu'il y a un vol d'identité, qu'est-ce que cela nécessite pour la personne? Tantôt, mon collègue de Repentigny a dit que la banque l'avait prévenu. Il a pu ne pas subir de peine monétaire, mais il reste que, souvent, les personnes qui perdent leur identité doivent refaire toutes les cartes, donc refaire les demandes. Cela demande beaucoup de temps. Souvent, les délais que cela peut prendre et l'argent que cela peut coûter pour faire toutes ces demandes sont importants. Cela occasionne des problèmes. Ce pourrait être comptabilisé, et les criminels pourraient être obligés de rembourser.
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Monsieur le Président, j'ai le plaisir de prendre la parole à propos de ce projet de loi. À mon avis, il s'agit d'un bon projet de loi duquel le Bloc québécois est en faveur. Tous les députés de la Chambre s'entendent pour dire que c'est un projet de loi qui aurait dû être en vigueur depuis au moins 10 ans.
À l'intention des gens qui viennent de se joindre à nous par le truchement de la télévision, j'aimerais dresser la nomenclature liée aux trois nouvelles infractions apportées par ce projet de loi.
Premièrement, il s'agit de l'obtention et de la possession de renseignements relatifs à l'identité dans l'intention de les utiliser de façon trompeuse, malhonnête ou frauduleuse dans la perpétration d'un crime.
La deuxième chose qui est considérée comme une infraction, c'est le trafic de renseignements relatifs à l'identité, infraction ciblant ceux qui cèdent ou vendent des renseignements à un tiers en sachant que les renseignements pourraient être utilisés à des fins criminelles ou en ne s'en souciant pas du tout.
La troisième infraction consiste en la possession et le trafic illégal de documents d'identité émis par le gouvernement, et qui renferment les renseignements d'une autre personne. Ces trois infractions sont les trois plus répandues dans notre système.
De plus, le projet de loi ajoute un nouveau pouvoir permettant au tribunal d'ordonner au contrevenant, dans le cadre de sa peine — et c'est là le plus beau de la chose —, de dédommager la victime du vol d'identité. Non seulement le contrevenant peut-il écoper d'une peine d'emprisonnement, mais il doit en plus dédommager la victime de vol. Tous les frais engagés par la personne qui a été fraudée par ce genre de criminel peuvent être remboursés par le criminel lui-même. C'est important et, selon moi, on ne peut pas passer à côté.
Je vous ferai aussi remarquer que la commissaire à la protection de la vie privée dit la même chose. Je la citerai plus tard. C'est d'autant plus important qu'elle aurait réclamé à maintes reprises des modifications au Code criminel afin de lutter plus efficacement contre le vol d'identité. Elle reconnaît elle-même que cet outil est peu efficace.
Dans quel sens cela est-il peu efficace? Elle dit ceci:
À mon avis, la question ne relève pas uniquement du Code criminel. Comme vous le savez, nos législateurs hésitent à utiliser le Code criminel, parce que les normes de preuve y sont plus strictes et que la Charte peut s'appliquer. Très souvent, il faut que l'affaire soit particulièrement évidente pour qu'il soit possible de recourir au Code criminel.
Elle en ajoute encore un peu. Elle dit que:
La preuve est plus facile à établir et ces procédures sont plus facile à comprendre pour les citoyens. La cour des petites créances, par exemple, pourrait offrir des mesures faciles d'accès pour décourager une industrie du vol d'identité qui est en pleine expansion. Cela veut donc dire, bien sûr, que le gouvernement fédéral doit collaborer étroitement avec les provinces, car une grande partie de ce qui se passe dans le domaine du vol d'identité relève des compétences provinciales.
C'est là que ça devient important. Si les contrevenants sont obligés de rembourser les personnes à qui ils ont malheureusement volé l'identité, en rapport direct avec les tribunaux de chacune des provinces, c'est beaucoup plus facile pour nous, et c'est plus facile pour ces personnes fraudées de récupérer leur argent. En passant par un tribunal provincial, la cour des petites créances par exemple, qui peut entendre des réclamations pouvant aller jusqu'à 7 000 $, si ma mémoire est bonne, le contrevenant peut être condamné immédiatement à rembourser la personne.
Je peux bien comprendre que l'on fasse de la répression avec cette nomenclature des nouveaux avis, en ce qui a trait à la rédaction des nouvelles infractions, mais il n'en demeure pas moins que l'on n'a pas touché au volet de la prévention.
Pour le Bloc québécois, la prévention est importante. Pourquoi? Parce que la réglementation permet de mieux encadrer la gestion de stockage et de disposition de l'information des entreprises. Il est aussi important de dire que le gouvernement devrait prendre d'autres mesures quant aux modifications en matière de vol d'identité. Quelles sont ces mesures que l'on pourrait ajouter? Qu'est-ce qui fait qu'on se fait voler? Je comprends qu'on puisse se faire voler son identification personnelle à l'aide de son NIP, du copiage d'une carte de crédit, à la suite du vol d'une carte de crédit ou au guichet automatique.
Toutefois, il n'en demeure pas moins que beaucoup d'entreprises ne font pas attention à toute la documentation et aux informations personnelles qu'on leur donne. Par exemple, je pense que tout le monde a été en mesure de lire dans les journaux régulièrement qu'on a retrouvé dans les poubelles d'une ruelle des fiches d'identité parce que les gens d'un dépanneur avaient décidé de jeter toutes les copies de relevés de cartes de crédit. Des pharmacies ont aussi jeté une foule d'informations. Ces entreprises qui gèrent tous nos actifs au niveau personnel ne font pas attention autant que nous. Nous pouvons les protéger. Nous avons un NIP. Je suis persuadé que chacun d'entre nous fait attention lorsqu'il se sert de son NIP, de sa carte de crédit ou de tout autre document.
Lorsqu'on est à la merci d'entreprises qui, elles, ne font pas attention, on est mal pris parce qu'il en découle un processus vraiment long. On s'aperçoit, à un moment donné, que le montant d'argent dans notre compte de banque a baissé, que notre carte de crédit a été utilisée, sans savoir comment il se fait que l'on en arrive à cette situation. À un moment donné, on découvre que nos documents ont été retrouvés dans une poubelle quelconque, qu'ils ont servis à des criminels pour établir d'autres cartes de crédit et obtenir d'autres fonds. Lorsqu'on a la date de naissance et le numéro d'assurance sociale de quelqu'un, il est facile pour tout criminel d'aller à la banque et d'ouvrir un compte de banque à votre nom. C'est très facile. On peut même demander une marge de crédit par téléphone, quand on a toutes ces informations et s'en servir pour retirer de l'argent. Donc, il est important que les entreprises puissent faire autant attention aux informations sur notre identité que nous le faisons nous-mêmes.
Dans un projet de loi futur, on devrait penser à réellement y introduire une prévention au niveau des entreprises. Je ne parle pas seulement des petites entreprises. Combien d'autres perdent nos identités? Des banques en perdent, d'autres se font voler ou hacker. C'est facile pour eux de dire qu'ils se sont fait voler des millions de dollars, sauf que c'est tout un chacun qui les paie par la suite parce qu'elles ne sont pas hypothéquées de la perte de leur argent. Ils peuvent l'entrer dans des pertes de fonds et c'est fini. C'est nous qui payons encore pour des gens qui ne protègent pas notre identité.
Il faudra vraiment se pencher sur cette question et établir quelque chose au niveau de la législation pour protéger les gens contre d'autres qui ne font pas attention à nos renseignements personnels. Il n'est pas seulement question de l'établir au niveau du secteur privé. Si c'était le cas, cela serait une chose. Le gouvernement nous parle aussi de toutes les demandes qui ont été faites relatives à ce projet de loi, mais que fait-il le à travers tout cela? Comme le disait un de mes collègues, ce même gouvernement, en juin 2006 — ce qui n'est pas si loin que cela et on sait qui était au pouvoir à cette époque —, la vérificatrice générale estimait qu'il y avait 2,9 millions de numéros d'assurance sociale de trop en circulation. Ce n'est pas un petit chiffre. On ne parle pas de 10 000 ou 100 000, ce qui serait quand même trop.
Comment se fait-il que le gouvernement a 2,9 millions numéros d'assurance sociale en circulation de plus que le nombre estimé de Canadiens de 30 ans et plus? Voyez-vous le paradoxe? On est prêts à trouver et à punir, de quelque façon que ce soit, des gens qui volent l'identité d'autres personnes, mais, d'un autre côté, le gouvernement est à l'abri de tout cela.
Quand on parle de 2,9 millions, c'est quelque chose. Combien de personnes peuvent se faire voler dans une journée? Il serait effroyable d'avoir ces chiffres. On pourrait dénoncer ces chiffres, mais chaque entreprise ne dévoilera jamais ses chiffres et ne dira jamais qu'elle s'est fait voler 100 000 identités.
Personne ne le dira parce qu'on n'aura aucune confiance en ces entreprises par la suite. Donc, le fait que les entreprises aient un suivi est d'autant plus important que le gouvernement puisse en faire un. Qu'a fait le gouvernement depuis 2006 concernant le fait qu'il y a actuellement 2,9 millions de numéros d'assurance sociale de plus? Rien. On n'en a même pas entendu parler pendant une minute.
Pour les gens qui nous écoutent, il me semble que c'est effroyable. Comment peut-on faire confiance en invoquant des projets de loi pour protéger la société, quand notre propre gouvernement ne peut même pas le faire lui-même? Ce n'est pas tout. En 2004, lorsque les libéraux étaient au pouvoir, on a passé beaucoup de temps à poser des questions au ministre des Transports au sujet d'articles, de fournitures ou d'uniformes dont je peux faire l'énumération.
En 2004, les médias révélaient que l'Administration canadienne de la sûreté du transport aérien, celle qu'on essaie de protéger le plus, avait perdu le contrôle de ses uniformes. Ainsi, de janvier à septembre 2004, sur environ 75 000 articles d'uniformes à ses quelque 4 000 agents de contrôle, un total de 1 127 articles ont été déclarés perdus ou volés, dont 91 écussons, 78 chemises, 30 coupe-vent, 25 chandails, qui affichaient tous le logo de l'agence. Selon le réseau anglais de Radio-Canada, certaines pièces d'uniformes auraient même été offertes au plus offrant sur eBay, un site Internet de vente aux enchères.
On peut bien demander aux autres de faire quelque chose, mais se l'imposer à nous-mêmes, c'est une autre chose. C'est ce que la population demande à ses gouvernements: cesser d'imposer des choses qu'ils ne font pas eux-mêmes. C'est là qu'on devrait commencer. On ne fait pas de prévention et on tente toujours d'aller au plus facile, d'imposer une peine de prison. Encore là, on parle de cette même peine de prison pour des gens qui ont commis cette offense. On parle déjà du sixième de la peine et on entend que des partis politiques ne sont pas enchantés d'entendre parler du sixième de la peine, tel que dénoncé par le Bloc québécois. C'est bien beau de dire qu'on a imposé une peine minimale de cinq ans, mais s'il s'agit d'une première infraction et que cette personne doit faire deux mois de prison, cela représente un sixième seulement. Donc, après quelques jours d'emprisonnement, elle pourra sortir. Aussi, si elle a écopé d'une détention préventive, dès que le procès sera fini, elle aura purgé sa peine et pourra sortir.
Quel message veut-on lancer à la population? Premièrement, d'être prudent, c'est bien normal. Deuxièmement, la population s'attend à ce que le gouvernement puisse aussi être prudent relativement aux documents personnels qu'il a ou qu'il émet, parce que c'est facile de s'accaparer d'un autre nom, lorsqu'on a émis un numéro d'assurance sociale. Aussi, c'est encore plus facile de le falsifier.
Aujourd'hui, les ordinateurs rendent tout possible. Il y a l'hameçonnage relativement à l'Internet, comme de se servir de logos pour tenter d'obtenir des NIP. Il y a de nombreuses choses que l'on peut faire au départ. C'est surtout de l'information. Je pense que si le gouvernement est capable de mettre en place ou de diffuser des programmes et de dépenser 100 000 $, ce même gouvernement est capable de dépenser une certaine somme pour informer la population sur la façon de protéger nos informations personnelles. Cela, c'est une chose. Mais il y a aussi la façon de protéger l'information que nos compagnies reçoivent de nous.
Lors d'une transaction au dépanneur avec une carte de crédit, on garde une copie, mais à partir de ce moment-là, après deux ans, que fait-on? Il faut s'en débarrasser. Alors, la façon la plus facile, c'est la poubelle. C'est la raison pour laquelle l'exemple qui revient de plus en plus à la Chambre des communes, c'est la poubelle.
Certains n'ont que cela à faire, fouiller dans les poubelles et trouver ces documents. Ils se remplissent les poches parce que des gens ne se sont pas débarrassés de documents personnels ne leur appartenant pas de manière sécuritaire. Je suis persuadé que si ces documents leur appartenaient, ils agiraient autrement. Ils ne laisseraient pas traîner un papier avec des informations sur une carte de crédit utilisée. Cette personne le mettrait à la poubelle. Toutefois, la personne qui le fait n'a pas à vivre les répercussions. Si cela n'a pas de répercussions sur elle, il faut la sensibiliser et lui montrer que cela a des répercussions sur d'autres personnes qui se trouvent alors beaucoup plus mal prises qu'elle.
Prenons l'exemple d'un étudiant qui a perdu son portefeuille. On sait que les étudiants ne roulent pas sur l'or. Il y a toujours très peu d'argent dans leur compte de banque. Si l'étudiant fait confiance au dépanneur du coin et que quelqu'un du dépanneur réussit à vider son compte de banque dans lequel il y avait l'argent pour payer sa session, son réveil sera brutal. Il faut vraiment sensibiliser ces gens.
La solution adéquate serait une publicité pour sensibiliser les gens. Par ailleurs, la publicité est une chose, mais la formation en entreprise est importante aussi. Il faut montrer aux employés comment disposer de ces documents.
Je me rappelle avoir siégé au comité qui a étudié les documents de la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques (LPRPDE). Je voulais inclure au projet de loi une disposition qui ferait payer une amende aux entreprises qui seraient prises en flagrant délit d'avoir laissé à la portée de la main des documents appartenant à d'autres personnes, que ce soit dans les ruelles, les poubelles ou ailleurs. Non seulement est-il important de les sensibiliser, mais il faut également sanctionner l'inconscience d'avoir laissé des documents à la portée de tous.
Je me suis fait dire par des collègues que ce n'était pas une bonne solution et qu'il faudrait plutôt installer des déchiqueteuses. Un de mes collègues est allé encore plus loin en proposant une étude sur les déchiqueteuses. Je crois qu'il y a des choses plus importantes à faire au Parlement que de mener une enquête sur les déchiqueteuses ou sur comment disposer de documents personnels appartenant à d'autres personnes. Je crois qu'on a appuyé un peu fort sur la pédale.
Néanmoins, je suis d'avis qu'on peut pousser plus loin d'autres projets de lois. Celui-là est un bon projet de loi. C'est un début. Il fallait commencer par quelque chose. On est dans la bonne direction. Il faut continuer. Il ne faut pas s'asseoir sur ses lauriers et dire qu'on a introduit trois nouvelles infractions qui régleront le problème. Cela ne le réglera pas. Cela réglera un problème direct en ce qui a trait au porte-feuille des gens. On devrait aller plus loin avec un nouveau projet de loi en permettant d'avoir recours à la Cour des petites créances pour récupérer les mises perdues. On pourrait y amener les gens qui ont perpétré un vol d'identité et qui ont sorti de l'argent des comptes des gens fraudés. Je crois que ce serait une bonne chose. Cela devrait être dans un nouveau projet de loi.
En terminant, je dirai que je suis en faveur de ce projet de loi. Je ne vois pas pourquoi nous ne pourrions pas proposer de nouvelles initiatives dans un nouveau projet de loi, et vraiment sensibiliser la population et les entreprises.
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Monsieur le Président, je suis heureuse de me lever pour ajouter ma contribution à ce débat, qui est sans doute un des débats les plus importants que nous ayons eus cette année.
Mes collègues seront d'accord avec moi, le crime de vol d'identité est l'un des crimes les plus odieux que nous puissions connaître et dont nous puissions être victimes. Nous avons vu, par plusieurs exemples que nos collègues ont donnés ce matin, ce qui peut arriver à des personnes qui se feraient voler leur identité.
Nous sommes d'accord avec ce projet de loi, avec sa teneur et son propos. Plusieurs personnes nous ont indiqué que nous devons tout de même faire attention parce que le projet de loi n'est pas parfait dans son ensemble. Il y a quand même des clauses du projet de loi auxquelles nous devons être très attentifs parce que si nous ne faisons pas attention, nous risquons de nous retrouver avec une loi qui ne répondra pas véritablement aux besoins exprimés pour pouvoir le mettre de l'avant.
Ce projet de loi est cependant un bon projet de loi, et il est nécessaire parce que nous savons très bien que, depuis la fin des années 1990, nous sommes dans un tourbillon en ce qui concerne toutes les nouvelles données électroniques et tout ce que nous pouvons avoir comme papiers d'identification et façons de s'identifier. Il est très facile de se procurer par l'Internet différentes informations. Il peut être tentant pour les fraudeurs et les fraudeuses d'utiliser ces informations contre nous sans que nous en soyons conscients.
Nous faisons de plus en plus de commerce électronique. Je m'y adonne moi-même. Je m'assure de voir le cadenas lorsque je fais des transactions électroniques. Cependant, je sais que plusieurs entreprises frauduleuses utilisent le commerce électronique et différents moyens pour pouvoir s'approprier les données que nous faisons parvenir, soit les données de notre carte de crédit ou encore les données de nos papiers personnels. Ces données seront ensuite utilisées à mauvais escient.
Ce qui est plus inquiétant, et on l'a formulé à plusieurs reprises ce matin, c'est le fait que les personnes âgées soient probablement les victimes les plus recherchées par les fraudeurs de ce type de crime. On se doute bien que c'est parce que les personnes âgées sont des personnes beaucoup plus vulnérables et beaucoup plus isolées. Certaines d'entre elles sont malheureusement aussi analphabètes et ne comprennent pas tous les tenants et aboutissants de ce qui pourrait se produire si quelqu'un s'appropriait malencontreusement leurs papiers d'identité.
J'ai moi-même été victime du vol de mon NIP une fois. Cependant, j'en ai été consciente. J'étais arrêtée dans une station-service pour faire le plein d'essence et j'avais vu qu'il y avait plusieurs personnes à l'intérieur de la station-service. C'était une petite station-service sur une rue très occupée de Montréal. Je voyais plusieurs personnes qui me semblaient n'avoir aucune raison d'être là. Cela m'a mis la puce à l'oreille. Je me suis dit que j'allais être attentive et prudente. Je devais toutefois payer pour l'essence que j'avais mise dans ma voiture.
Je suis donc entrée dans la station-service et je me suis rendue compte que le jeune homme qui était au comptoir m'accueillait avec un beau sourire mais avec des yeux fuyants. Il y avait quelqu'un tout près de moi, et deux autres personnes s'étaient rapprochées au moment où j'ai donné ma carte avec NIP pour faire le paiement par Interac. En effet, je ne transporte plus d'argent avec moi. Depuis les années 1990, on ne transporte plus d'argent sur soi. C'est plus facile de payer par Interac.
Je me rendais compte de tout cela autour de moi, mais en même temps j'étais une femme seule et j'étais craintive. Je ne savais pas ce qui se passerait si je réagissais. Allait-on m'agresser si je ne voulais pas utiliser ma carte et si j'essayais de trouver un autre mode de paiement? Allait-on me faire un mauvais parti si je me tournais de côté et voulais sortir? Je me suis dit que je paierais et qu'aussitôt sortie, j'appellerais les Caisses Desjardins, qui sont mes fournisseurs de services. C'est ce que j'ai fait.
Dès que je suis sortie de là, je me suis dépêchée de m'engager dans une petite rue où je me suis stationnée et j'ai appelé les Caisses Desjardins pour leur dire que je soupçonnais fort que mon numéro d'Interac avait été relevé par les personnes présentes dans cette station-service. Les Caisses Desjardins ont immédiatement mis un terme aux privilèges liés à cette carte Interac. Elles ont ainsi pu empêcher la commission d'un crime. Les représentants des Caisses Desjardins m'ont rappelée par la suite pour m'informer que les personnes avaient effectivement tenté d'utiliser ma carte grâce à mon NIP. Il ne s'agissait pas de la carte elle-même, puisque que je l'avais récupérée, mais ils avaient fait une espèce d'empreinte. Ils avaient la capacité de faire une empreinte de la carte au moment où je la mettais dans la machine. Ils s'étaient approprié cette carte et mon NIP. Cela m'a énormément inquiétée, et je me suis rendu compte de la facilité avec laquelle on peut s'approprier des données nominatives, bien que nous soyons prudents, avertis, aguerris et des personnes quand même en bonne forme.
La teneur de mon propos cet après-midi se dirigera plutôt vers l'une des exceptions dans ce projet de loi. Il y a dans celui-ci une exception très marquante qui, à première vue, m'a étonnée. Je me suis posé la question de savoir pourquoi. Le projet de loi déposé prévoit deux exemptions qui mettraient à l'abri de poursuites pour falsification les personnes qui fabriquent de faux documents pour des opérations gouvernementales secrètes, et qui permettraient aux fonctionnaires publics, c'est-à-dire aux agents d'application de la loi, de créer et d'utiliser des identités secrètes dans l'exercice de leurs fonctions.
Compte tenu de ce que nous avons entendu ces derniers jours, je me suis simplement demandé si usurper la personnalité du gouvernement ne serait pas considéré comme une fraude. On a vu certains de nos collègues du Parti conservateur usurper la personnalité du gouvernement en mettant sur leurs chèques le logo du Parti conservateur, leur nom, leur signature. Je me suis alors demandé: si ces gens étaient condamnés pour fraude à cause d'usurpation d'identité — fausse —, seraient-ils considérés comme des agents secrets d'application de la loi? Y aurait-il lieu de considérer cela comme de travaux dont on ne parle pas, de choses cachées et qu'il faut taire? Ces personnes seraient-elles considérées ainsi ou comme ayant véritablement fraudé le gouvernement et coupables des infractions citées dans ce projet de loi?
Le cas échéant, je présume que les coupables seraient très contents aujourd'hui que les députés du Bloc québécois s'opposent constamment aux peines minimales.
Des voix: Ah, ah!
Mme Nicole Demers: En effet, vous n'êtes pas sans savoir que s'il y avait des peines minimales liées à ce projet de loi, nous nous retrouverions sûrement avec des personnes qui seraient obligées, parce qu'elles auraient enfreint la loi, de subir...
Mme Paule Brunelle: ...de longues années de prison.
Mme Nicole Demers: Oui, de longues années de prison, comme le dit ma collègue de Trois-Rivières.
Cela peut sembler drôle, mais il faut faire attention quand on rédige un projet de loi. Je demandais ce matin à mon collègue de s'il n'avait pas l'impression que le gouvernement était un peu trop pressé de faire adopter ses projets de loi et tout ce qui concerne son menu législatif par rapport à la loi et à l'ordre. En effet, nous avons l'impression qu'on veut faire cela rapidement, qu'on veut enfoncer cela dans la gorge des gens, des députés ici, pour que les gens croient que c'est un bon gouvernement qui défend la veuve et l'orphelin. Un tel gouvernement, qui défend la veuve et l'orphelin, ne fait pas nécessairement des publicités pour des poignées de porte, comme on l'a fait dernièrement: 100 000 $ pour annoncer que des poignées de porte devaient être changées, de toute façon. J'ai de grands doutes quant à la pertinence de certaines parties de ce projet de loi.
J'ai de grands doutes, mais en même temps, pour les personnes que nous devons protéger, nous devons nous assurer que les projets de loi que nous mettons de l'avant répondront véritablement aux besoins de la population et de la société.
Pour ce faire, nous aurons réellement besoin d'un gouvernement qui travaille en collaboration avec les provinces et les territoires pour nous assurer que nous avons l'ensemble des structures nécessaires pour appliquer le projet de loi. Si nous n'avons pas suffisamment de policiers ou suffisamment de structures en place pour appliquer ce projet de loi, nous ne pourrons pas, malheureusement, contrer les individus qui s'adonnent à la fraude depuis fort longtemps et qui continueront de s'y adonner.
Mon collègue faisait référence à une personne qui est allée en vacances et qui, à son retour chez elle, s'est aperçue que sa maison était habitée par quelqu'un d'autre. Cela peut arriver à n'importe qui. Il faut se rendre compte aussi que, dans la société, il n'y a pas que des fraudeurs qui sont des bandits que l'on peut dénombrer parce qu'on peut se rendre compte de ce qu'ils sont. Certaines personnes contribuent aussi à ces fraudes. Il y a aussi parfois des notaires véreux, des avocats véreux, des personnes dans les banques et dans les institutions financières qui sont aussi des personnes pas tout à fait honnêtes. En effet, il faut bien savoir que si un crime de fraude à l'encontre des personnes peut être commis, c'est parce que des personnes y ont contribué.
On a vu avec Vincent Lacroix et Norbourg que la banque avec laquelle il faisait affaire lui a donné des trucs pour pouvoir frauder. Ce n'est pas normal. Des gens à qui on ferait confiance habituellement ont trahi la confiance des personnes qui mettaient leur argent dans ces institutions. Alors, il faut s'assurer que le gouvernement travaillera en collaboration avec les provinces et là, j'ai un grand doute.
Comme en a fait état mon collègue de , ce gouvernement ne veut travailler avec aucune province de façon continue, là où c'est important. Il fait semblant d'avoir une ouverture d'esprit, de vouloir travailler avec les provinces, mais quand arrivent les vraies choses, les vraies situations, il tourne le dos complètement aux décisions pourtant unanimes de l'Assemblée nationale du Québec. On l'a vu, tant au niveau de Kyoto, qu'au niveau de la Commission des valeurs mobilières, comme on le voit présentement. Le gouvernement est même prêt à aller devant la Cour suprême pour s'assurer de pouvoir mettre sur pied quelque chose dont personne ne veut, excepté lui et l'Ontario évidemment, parce que cela ferait leur affaire.
Il faut faire attention à ce gouvernement. Si je dis cela, c'est parce que j'ai été consciente moi-même qu'on a tenté d'usurper ma personnalité dans mon comté, d'usurper mon poste en envoyant à mes concitoyens différents feuillets publicitaires. Ils n'émanaient pas du tout de moi et ils traitaient du soi-disant plan de relance des conservateurs et du soi-disant projet de loi . Ils accusaient les députés du Bloc, et moi particulièrement, d'être contre les enfants et pour les violeurs et les abuseurs. Cela aussi c'est de la fraude. Cela aussi, c'est profiter de la faiblesse des gens, profiter de l'isolement des personnes âgées. C'est profiter des peurs des gens. Ce n'est pas honnête, ce n'est pas correct.
Quand on voit que de telles publicités mensongères sont faites, on doute beaucoup de la véracité du gouvernement quand il dit qu'il veut s'assurer que son menu législatif sur la loi et l'ordre soit adopté pour venir en aide aux victimes de crimes et d'actes criminels. Si le gouvernement veut venir en aide à ces personnes, il peut venir en aide à 500 femmes des Premières nations qui ont été tuées, qui ont été violées et pour lesquelles on n'a rien fait afin de trouver des réponses, ni trouver les causes, ni trouver les coupables. Si le gouvernement veut vraiment venir en aide aux victimes d'actes criminels, qu'il agisse véritablement sur les faits que nous connaissons déjà, qu'il a le pouvoir de régler et qui sont de son ressort.
Qu'il ne tente pas d'agir sur des choses qui ne sont pas de son ressort.
Je terminerai en disant que nous allons voter pour ce projet de loi parce que nous croyons véritablement que les bandits à cravate doivent être fustigés et emprisonnés.
Je rappellerai à mes collègues qu'ils doivent être très contents que nous votions contre les peines minimales d'emprisonnement, sinon ils seraient sûrement aujourd'hui les victimes de ces peines d'emprisonnement.