:
Merci, monsieur le président, de me donner l'occasion de me présenter devant le comité.
Je suis ici aujourd'hui pour vous faire part des préoccupations des producteurs de bétail de ma province de l'Île-du-Prince-Édouard, concernant le remboursement proposé des prêts consentis dans le cadre du Programme de paiements anticipés.
Tout d'abord, j'aimerais dire que le Programme de paiements anticipés a été généralement très profitable pour le secteur de l'agriculture, et qu'il a versé aux producteurs des capitaux dont ils avaient grand besoin. Des avances de fonds d'une valeur supérieure à 50 millions de dollars ont été consenties aux producteurs de tous les secteurs de l'agriculture seulement à l'Île-du-Prince-Édouard.
En 2008, 156 prêts relatifs à l'achat de bétail, d'une valeur totale de plus de 17 millions de dollars, ont été consentis à des producteurs de l'Île-du-Prince-Édouard qui faisaient face à des difficultés économiques graves. Ce montant est environ quatre fois plus élevé que le montant total versé à l'ensemble des autres provinces des Maritimes. J'imagine que, si nous avons été plus capables de recourir au programme que les producteurs des autres provinces de la région, c'est parce que notre industrie de l'élevage de bovins et de porcins est plus importante que celle de ces provinces.
L'environnement commercial qui est à l'origine du besoin des producteurs de recourir à des prêts pour difficultés économiques graves a très peu changé depuis 2008 — je dirais même qu'il s'est probablement détérioré au cours des récentes et brèves périodes où le prix du porc a augmenté, les coûts de production régionaux ont eu pour effet que nos producteurs ont été incapables de rembourser leurs dettes croissantes. Le secteur de la production bovine ne s'est pas remis de la crise de l'ESB de 2003, et en 2008, durant la période où ont été consentis des prêts pour difficultés économiques graves, la perte de valeur marchande et l'accroissement des coûts de l'alimentation des animaux ont réduit à néant la valeur par tête de bétail des montants versés dans le cadre du Programme de paiements anticipés. La demande en éthanol et le fait que les producteurs de l'Île-du-Prince-Édouard aient perdu l'accès aux déchets de pommes de terre se sont traduits par une augmentation d'au moins 100 $ par tête de bétail du coût de l'alimentation des bovins au sein de notre industrie.
Depuis 2007, l'Île-du-Prince-Édouard a perdu environ 80 p. 100 de ses producteurs de porc et 50 p. 100 de ses producteurs de boeuf. Si les producteurs de l'Île-du-Prince-Édouard sont contraints de rembourser les prêts qui leur ont été consentis durant la période de grâce maximale ayant été prescrite, la province perdra assurément d'autres producteurs.
Les institutions financières ne veulent plus s'exposer aux risques que pose le consentement de prêts à l'industrie du bétail. Par conséquent, les organismes prêteurs ne sont pas disposés à bénéficier de priorités de deuxième rang quant au nantissement. Bon nombre des producteurs seront incapables de conclure des conventions de créancier privilégié, même s'ils disposent toujours des stocks nécessaires pour intégrer les anciens prêts aux nouvelles avances de fonds. Les producteurs qui ne peuvent intégrer qu'une partie de leurs anciens prêts aux nouvelles avances de fonds ne disposeront pas des sommes nécessaires pour rembourser le solde durant la période de production prescrite, et, par conséquent, ils seront en position de défaut de paiement dans le cadre de l'intégralité du Programme de paiements anticipés. Cela s'applique surtout aux prêts relatifs à l'achat de porcs qui ont été consentis en 2008, lesquels étaient fondés sur les ventes annuelles au titre des avances pour difficultés économiques graves, comparativement aux nouveaux prêts, qui ne seront fondés que sur les stocks. Ce changement aura pour effet que les producteurs recevront des prêts de 60 p. 100 inférieurs environ à ceux qu'ils pourront recevoir dans le cadre du Programme de paiements anticipés.
Une certaine proportion des éleveurs de bétail de l'Île-du-Prince-Édouard produisent plus d'un produit agricole, mais ils dépendent des prêts consentis dans le cadre du Programme de paiements anticipés pour d'autres stocks comme leurs stocks de pommes de terre et de céréales. Si ces producteurs se retrouvent en position de défaut de paiement parce qu'ils sont incapables de rembourser le prêt relatif à l'achat de bétail qui leur a été consenti précédemment, ils seront d'autant moins capables d'obtenir des prêts relatifs à leurs autres produits. Un certain nombre de producteurs qui engraissent des bovins et du porc à l'Île-du-Prince-Édouard produisent également d'autres denrées, principalement des pommes de terre. Si le programme de prêt auquel ils ont accès est effectivement modifié de cette façon et qu'ils se retrouvent en position de défaut de paiement, ils n'auront pas le droit d'obtenir le moindre sou pour leurs autres produits dans le cadre du Programme de paiements anticipés.
Les producteurs de l'Île-du-Prince-Édouard nous ont dit qu'ils sont disposés à rembourser les prêts. Lorsque nous avons reçu des prêts dans le cadre du Programme de paiements anticipés, nous avons pris conscience du fait qu'il s'agissait de prêts, et que nous aurions à les rembourser. Toutefois, il n'est pas réaliste de nous demander de le faire dans les délais proposés.
Je ne sais pas si vous êtes conscient des délais en question. Nous devons commencer à rembourser les prêts relatifs à l'achat de bétail consentis pour difficultés économiques graves le 1er juin 2011, et en mars 2012 dans le cas des prêts relatifs à l'achat de porcs. Ces prêts doivent être remboursés dans les 10 mois.
Nous avons demandé au gouvernement d'envisager d'étaler le remboursement de ces prêts sur une période plus longue ou de lier le remboursement à la rentabilité, de manière à ce que les producteurs ne se retrouvent pas en position de défaut de paiement.
Cela met fin à ma déclaration préliminaire. J'espère que j'aurai l'occasion de répondre à quelques-unes de vos questions.
Bonjour. Merci de me donner l'occasion de me présenter devant le comité permanent pour discuter des programmes d'aide aux agriculteurs en cas de catastrophe.
Je m'appelle Brian Gilroy. Je suis pomiculteur. Mon verger est situé tout juste au sud de Meaford, en Ontario, dans la circonscription du président. Je suis également président de l'Ontario Apple Growers et de l'Association des fruiticulteurs et des maraîchers de l'Ontario.
Le 20 août 2009, les fruiticulteurs et les maraîchers de l'Ontario ont terminé une réunion d'été de deux jours, laquelle comprenait une visite approfondie de la région qui a mis en relief le climat extraordinaire dont nous profitons dans la baie. La présence d'une tornade avait été signalée dans la région, et vers 20 heures, un ami m'a téléphoné pour me dire que l'exploitation agricole du fils d'un autre ami venait tout juste d'être frappée par une tornade. Je suis rapidement allé chercher de la nourriture, des boissons et des lampes de poche, et j'ai pris mon véhicule pour me rendre sur les lieux.
La tornade avait traversé la région vers 17 heures, et, sur son passage, elle avait occasionné des dommages incroyables aux immeubles, aux arbres, aux lignes de transport d'électricité, etc. L'exploitation agricole où je me suis rendu pour tenter de donner un coup de main... mon ami avait acheté cette exploitation agricole le printemps précédent. Lorsque la tornade est passée par là, c'était une tornade de force 2, mais j'ai fait quelques lectures à ce sujet, et en fait, la tornade avait gagné en puissance, et lorsqu'elle a frappé l'exploitation agricole de mon ami, elle était devenue une tornade de force 3.
La tornade a soulevé une porcherie de 100 pieds sur 200 pieds et l'a emportée 100 pieds plus loin. Sur son passage, elle a balayé deux autobus scolaires; l'un s'est retrouvé là où la porcherie était auparavant, et l'autre a atterri dans le verger. La tornade a traversé un corridor d'une largeur d'environ un kilomètre, et ce secteur ressemblait à une zone dévastée par la guerre. Des débris flottaient au vent. Des morceaux de caisse de pommes qui venaient d'être cueillies avaient été projetés dans chaque fenêtre d'une toute nouvelle maison de pierre, dont des parties du toit avaient été arrachées. On n'en croyait tout simplement pas nos yeux. Je ne sais pas si vous vous êtes déjà rendu sur les lieux d'une tornade, mais les dégâts que cela cause sont assez inconcevables. Une cellule à grain d'une exploitation agricole a été emportée par la tornade et s'est retrouvée deux kilomètres plus loin, au milieu d'un verger.
Il va sans dire que les dommages étaient importants. Un verger d'un peu plus de 100 acres traversant les propriétés d'un certain nombre de fruiticulteurs a été détruit. Environ 15 pomiculteurs de la région ont été touchés par la tornade; 12 d'entre eux ont subi de graves dommages, et six d'entre eux, des dommages catastrophiques.
Sur-le-champ, le 25 août, nous avons tenu une réunion à laquelle ont assisté tous les agriculteurs touchés et quelques dirigeants politiques de la région. Jim Wilson, notre député provincial, un représentant de la circonscription d'Helena Guergis et les représentants provinciaux d'Agricorp étaient présents, et ils ont parlé du type d'aide et d'assistance qui pourraient être offertes aux agriculteurs.
Il est devenu évident qu'un certain nombre de mesures devaient être prises avant qu'un recours au programme Agri-relance soit possible. Les municipalités touchées ont immédiatement présenté une demande au programme d'aide en cas de catastrophe de l'Ontario — il s'agissait d'une demande conjointe. Cela nous a permis de faire une collecte de fonds mettant à contribution le gouvernement provincial, qui a fourni 2 $ pour chaque dollar amassé dans le cadre de la collecte de fonds locale. Il s'agissait de l'une des mesures que nous devions prendre pour pouvoir accéder à Agri-relance.
Les représentants du programme d'assurance-récolte ont été très utiles — ils ont fait tout leur possible. En Ontario, il existe un programme d'aide aux pomiculteurs qui perdent des arbres. Ce programme est offert gratuitement, mais il existe un seuil minimal de 7,5 p. 100 — pour pouvoir présenter une quelconque demande à ce programme, un agriculteur doit avoir perdu plus de 7,5 p. 100 de ses arbres; il s'agit d'une sorte de franchise. En outre, un agriculteur qui possède plus d'un site, mais donc un seul site a été touché pourrait se voir refuser le moindre sou lié aux pertes très graves.
L'une des choses que j'ai recommandées, c'est que nous communiquions avec les représentants du programme d'aide en cas de catastrophe des Mennonites, lesquels se sont présentés sur les lieux dès le lendemain. Ils étaient près d'une cinquantaine de personnes, qui nous ont aidés à ramasser tous les débris et les objets qui avaient été dispersés aux quatre vents. L'aide fournie par ces personnes était extraordinaire, et elle a permis aux personnes touchées d'entrevoir la lumière au bout du tunnel.
Il est passablement difficile de ne pas sombrer dans le désespoir lorsque des débris, des branches d'arbre et toutes sortes d'objets traînent un peu partout. Les gens étaient en état de choc, et l'un de nos pomiculteurs de longue date — nous l'appelons « le penseur » parce qu'il s'agit d'un homme qui aborde les choses de manière très méthodique — était aussi troublé que les autres, voire davantage. Je ne l'avais jamais vu aussi démoralisé — j'entends par là qu'il n'avait pas simplement la mine basse, il était tout simplement abattu.
J'ai mené des recherches sur ce qui s'était produit dans le passé lorsque des vergers avaient été frappés par une tornade, et j'ai découvert que, pour l'essentiel, les pomiculteurs avaient déclaré faillite. Je suis heureux de vous signaler que, grâce à l'assurance-récolte du programme ontarien d'aide en cas de catastrophe et au programme Agri-relance, aucun des agriculteurs touchés par la tornade ne déclarera faillite.
Des gens m'ont dit qu'ils avaient reçu l'aide d'Agri-relance à la fin d'octobre, soit environ 15 mois après la tornade. Beaucoup de gens étaient d'avis que ce délai était long, mais j'ai tenté de les convaincre du fait que ce délai était passablement acceptable, vu qu'il faut traiter avec trois ordres de gouvernement.
Mes 10 minutes seront-elles bientôt écoulées?
Les phénomènes météorologiques violents ne sont pas choses rares. Vu l'ampleur des dommages subis par notre région, les pertes de récolte se sont élevées à environ 1,5 million de dollars cette année-là. Les dommages occasionnés aux infrastructures et à tout le reste se sont élevés quant à eux à 1 million de dollars. En majeure partie, cela était couvert par le programme, car Agri-relance a été conçu pour couvrir ce qu'aucun autre programme ne couvre. Pour l'essentiel, le programme a été raisonnablement efficace.
Dans la région de Leamington, en juillet dernier, une série de tornades ont gravement touché un certain nombre de pomiculteurs. Le problème, c'est que le premier ministre de la province s'est rendu dans cette région et a offert immédiatement une aide aux municipalités, ce qui a eu pour effet que la région touchée n'a pas été déclarée zone sinistrée, et que cela a restreint la capacité des agriculteurs d'accéder aux autres programmes. Je ne pense pas que cela était l'effet recherché, mais dans les faits, cela a nui aux agriculteurs de la région de Leamington puisqu'ils n'ont pas pu présenter de demande à Agri-relance ou au programme ontarien d'aide en cas de catastrophe. Pour pouvoir accéder à Agri-relance, un agriculteur doit faire partie d'une région où une catastrophe a eu des répercussions importantes sur l'ensemble de l'industrie — il s'agit là d'un critère essentiel d'admissibilité au programme. Dans notre région, la tornade a touché plus de 10 p. 100 de la superficie de production de pommes.
Même si beaucoup d'arbres ont été touchés, il faut du temps avant que les dommages deviennent visibles. L'un des agriculteurs a avancé que les dommages se faisaient sentir non pas dans l'immédiat, mais un peu plus tard. Il a estimé qu'il avait perdu environ 20 acres de production de pommes en raison de la tornade, mais cela n'était pas du tout visible avant le mois d'août de cette année-là.
Ainsi, les choses vont assez bien, mais il y a beaucoup de place pour l'amélioration. Si des mises au point doivent être effectuées, veuillez consulter les producteurs — nous connaissons le programme et nous savons comment il a aidé les gens.
Merci.
:
Je vous remercie beaucoup de me donner l’occasion de prendre la parole devant vous aujourd’hui. Je m’appelle Linda Oliver et je viens de Mozart, en Saskatchewan, l’une des régions qui reçoit le plus de pluie au Canada. Mon époux, Brian, et moi exploitons un troupeau de 250 vaches. Je vous parle non pas en tant que polycultrice-éleveuse, mais seulement à titre d’éleveuse-naisseuse.
Je souhaite vous entretenir aujourd’hui de trois questions. J’aimerais d’abord vous parler du programme Agri-stabilité. Chacun — je dis bien chacun — sait que ce programme ne répond pas aux besoins des éleveurs-naisseurs. À l’issue de la journée de l’ESB — le 20 mai 2003 —, pas un seul dirigeant politique n’a imaginé que cette maladie déprimerait les prix du bétail pendant de si nombreuses années. Cela a été le principal problème. Après cette journée de l’ESB, deux facteurs ont eu une incidence sur le prix du bétail.
Premièrement, dans le passé, les éleveurs-naisseurs se sont en grande partie tirés d’affaire seuls lorsqu’ils ont fait face à des difficultés. Après avoir maintes fois appelé à la rescousse les fonctionnaires et les dirigeants politiques, les éleveurs-naisseurs ont abandonné et ont effectivement dû compter sur leurs propres moyens. Nous n’avons cependant jamais connu une année comme 2010, qui a été pire que les années de la crise de l’ESB. En outre, le programme Agri-stabilité ne nous a pas offert le moindre sou pour nous permettre d’acheter du foin ou des céréales.
Deuxièmement, les ministres de l’Agriculture ont refusé d’admettre que le programme Agri-stabilité ne fonctionnait pas. Ils n’avaient malheureusement pas tenu compte de la possibilité que les revenus des éleveurs-naisseurs périclitent de la sorte pendant autant d’années de suite — le programme ne verse une indemnisation seulement si une catastrophe touche une région durant une année ou deux. M. Vanclief a mis sur pied un nouveau programme d’« assurance », alors appelé le PCSRA. Trois personnes ont successivement, et pendant peu de temps, occupé le poste de ministre de l’Agriculture après lui — M. Speller, M. Mitchell et M. Strahl. Aucun d’eux n’a su corriger le problème, malgré le fait que nous leur ayons demandé à maintes occasions de le faire. Puis ce fut le tour de M. Ritz en 2007. Le gouvernement avait alors renoncé à chercher à régler le problème, vu l’investissement que cela aurait exigé. J’ai parlé — à plusieurs reprises — à Jim Scott, du bureau d’Ottawa de M. Ritz. Je n’oublierai jamais ses paroles. Il ma dit ceci: « C’est vrai, madame Oliver, Agri-stabilité n’est malheureusement d’aucune utilité dans ce genre de situation ». Il a ajouté qu’il serait très difficile et coûteux de corriger le problème. M. Scott ne répond plus à mes appels depuis plus d’un an maintenant.
Un programme de protection du revenu agricole comme Agri-relance —visant à aider les agriculteurs faisant face à des situations indépendantes de leur volonté — aurait dû être mis en place dès ce moment. Les gouvernements devraient se sentir moralement responsables. Nous ne devrions pas avoir à leur rappeler leurs obligations.
J’ai deux exemples à fournir en ce qui a trait à l’ESB.
Voici le premier exemple. À un moment donné en 2004, nous avons vendu à l’enchère trois vaches prêtes pour l’abattage. Cela signifie qu’elles sont prêtes à être transformées en viande à hamburger. Prix net moyen de ces vaches: 25,52 $. Pour donner un exemple, au prix auquel la viande a été achetée, le hamburger d’un quart de livre chez Wendy’s, McDonald’s ou Burger King aurait dû coûter 2,05 $. Ces restaurants auraient vraiment pu offrir des hamburger à leurs clients pour presque rien.
Deuxième exemple. Lors de la journée de l’ESB, en 2003, nous avons vendu un bouvillon de 700 livres 1,56 $ la livre. À ce moment-là, les prix atteignaient des sommets, et je ne m’attends pas à obtenir de tels prix en tout temps. À l’automne 2009, des bouvillons de 700 livres se vendaient 0,85 $ la livre. Transposons ces chiffres en salaire. Au début 2003, je gagnais 1 560 $ par semaine. À la fin 2009, je ne gagnais plus que 850 $. Une énorme différence. Si vous et moi gagnons ce salaire, nous devons tous deux subvenir à nos besoins à partir de cette somme, mais je dois aussi payer mes dépenses de fonctionnement. Cela fait aussi une énorme différence. En fait, pendant la première partie de l’année, les prix du bétail étaient comparables à ce qu’ils étaient en 1988 — à quelque 2, 3 ou 4 ¢ la livre près. Un problème considérable est survenu.
Si Agri-stabilité est un échec, Agri-investissement devient une blague puisque les deux programmes vont de pair. Agri-investissement non plus n’a rien offert aux éleveurs-naisseurs. Comment peut-on se surprendre que ceux-ci n’aient plus d’économies, plus de coussin pour leur permettre de faire face au deuxième problème dont je vais maintenant vous parler, à savoir Agri-relance.
M. Ritz a lancé le programme Agri-relance le 8 juillet. Les producteurs de l’ensemble de la province ont touché 30 $ l’acre en dédommagement pour les terres ayant été inondées. Ce paiement suffisait peut-être dans certains cas, mais pas dans le cas des producteurs des municipalités régionales déclarées zones sinistrées. M. Ritz et M. Bjornerud auraient dû savoir que la situation était plus grave dans certaines régions que dans d’autres. Certains agriculteurs de notre région ont carrément ensemencé dans la boue. Ils ont fait venir des pulvérisateurs spécialement conçus qui ont creusé des ornières, puis sont repartis parce qu’ils étaient incapables de terminer le travail.
Pour empirer les choses, l’annonce du 8 juillet ne faisait pas mention du bétail. Jill Clark et Tim Highmore, du bureau de M. Bjornerud, m’ont assuré pendant tout l’été qu’ils suivaient la situation de près. Je les ai crus. L’incidence des dommages causés par le niveau d’humidité très élevé que nous devons à Mère Nature est très difficile à évaluer dans le cas des animaux.
Premièrement, des superficies consacrées à la culture du foin ont été inondées — aucune indemnisation n’a été versée.
Deuxièmement, des pâturages de graminées ont été inondés — les vaches mangeaient de l’herbe saturée d’eau pauvre en éléments nutritifs. Cela nuit au développement des vaches et des veaux. Les veaux sont moins lourds — une autre perte.
Troisièmement, des pâturages indigènes ont été inondés, et ce type de pâturage est assez particulier. Il s’agit d’écosystèmes vierges qui mettront de sept à dix ans à se reconstituer. Comment serons-nous indemnisés pour cette perte? Il est impossible de réensemencer ces pâturages.
Quatrièmement, les moustiques ont été terribles cet été. C’était incroyable. Nous avons perdu un cycle de reproduction pour 65 vaches environ, à la ferme. Par conséquent, les veaux naîtront un mois plus tard l’année prochaine, et cela représente donc un problème à long terme. Les vaches et les taureaux avaient tout simplement autre chose en tête que le sexe. Un nouveau cercle d’herbe se transformait ainsi chaque jour en cercle de boue.
Cinquièmement, nous avons dû nourrir certaines de nos vaches à la ferme jusqu’au 23 juin.
Sixièmement, les veaux ne vont pas téter un pis qui est couvert de boue.
Septièmement, nous avons perdu des bêtes.
Il existe également des endroits en Saskatchewan et au Manitoba où les conditions sont absolument et incroyablement pires qu’elles ne l’étaient. Nous avons reçu beaucoup de pluie et de neige. Nous ne pouvions pas aller dans les champs pour ramener nos balles de foin parce qu’il était tombé beaucoup de pluie et qu’environ 12 pouces de neige avaient fondu, et l’eau stagnait là. Deux semaines plus tard, nous avons reçu 15 pouces de neige. Cette neige demeure là comme un revêtement isolant, et nous ne pouvons pas aller récupérer nos balles de foin. Je me demande s’il existe un certain type d’aide qui pourrait nous être offerte sous forme de services d’hélicoptères.
Je parle ici des zones d’une région sinistrée qui ont été les plus touchées par l’humidité. D’autres régions ont subi des dommages tout aussi graves — la région des lacs, au Manitoba, près de la baie d'Hudson, en Saskatchewan, et une bande dans notre région. C’est proprement inconcevable.
En raison des lacunes des deux programmes susmentionnés, il est impossible pour les éleveurs-naisseurs de prendre des décisions d’affaires appropriées. Ces deux événements — l’ESB et la météo en 2010 — étaient indépendants de notre volonté.
Merci d’avoir pris le temps de m’écouter.
:
Merci, monsieur le président.
Merci, Ernie, Brian et Linda de vous être présentés ici et de nous avoir fait part de vos préoccupations, lesquelles touchent, en fait, un certain nombre de domaines.
Je vous demanderais, monsieur le président, d'envisager la possibilité que les membres du comité trouvent assez rapidement à peu près une demi-heure pour déterminer s'ils peuvent discuter de quelques recommandations qu'ils pourraient formuler au ministre afin de régler quelques-uns des problèmes dont il a été question au cours des trois dernières réunions. Nous pourrions rédiger une motion, mais je crois qu'il serait préférable que les membres se réunissent pour voir s'ils peuvent s'entendre sur quelques recommandations. Pourriez-vous réfléchir à cela?
Ernie, en ce qui a trait aux avances de fonds ciblées, je suis préoccupé notamment par le fait que le ministère a essentiellement confirmé devant le comité jeudi dernier que, dans le cadre du programme, vu sa structure actuelle et l'annonce du ministre, si un agriculteur n'est pas en mesure de rembourser une avance de fonds, il se trouvera assurément en position de défaut de paiement. Par la suite, des intérêts s'appliqueront à l'intégralité du prêt consenti, y compris la tranche exempte d'intérêts pouvant aller jusqu'à 100 000 $. Le taux d'intérêt est peu élevé — un quart de 1 p. 100 —, mais il s'agit tout de même d'un intérêt qui s'applique à l'intégralité du prêt, y compris le capital initialement consenti. Comme vous l'avez mentionné durant votre déclaration, il y a beaucoup de polyculteurs à l'Île-du-Prince-Édouard, et en réponse à une question, Mme Jody Aylard a indiqué qu'un producteur perdrait le droit de recevoir des avances de fonds relatives à l'un de ses produits s'il est déclaré en défaut en ce qui a trait à un autre de ses produits, et cela est extrêmement grave.
Ainsi, ma première question est la suivante: si nous ne parvenons pas à trouver un moyen de modifier cet aspect du programme, quelles seront les conséquences? Le fait pour un producteur d'être déclaré en défaut est une chose, et une chose grave, mais par ailleurs, s'il perd le droit d'obtenir des avances de fonds pour ses autres produits, quelles seront les conséquences?
C'est étrange. Nous nous trouvons dans la situation suivante, à tout le moins à l'Île-du-Prince-Édouard: l'usine d'Atlantic Beef vient tout juste de se voir décerner une distinction pour la qualité du bœuf qu'elle produit — l'un des meilleurs au pays —, et pourtant, les producteurs de bœufs ne sont plus en mesure de produire du bœuf parce qu'ils sont incapables de respecter leurs engagements.
Linda, vous avez dit qu'aucune annonce n'avait été faite pour ce qui est du bétail dans l'Ouest du Canada. Vous nous avez assurément transmis beaucoup de courriels à ce sujet, et je vous en sais gré, car ces messages exposent les préoccupations des producteurs sur le terrain.
Est-ce que quoi que ce soit a été annoncé pour l'industrie du bétail, et le cas échéant, dans quelle mesure ce qui a été annoncé est-il en deçà des attentes? De toute évidence, vous avez mentionné que des annonces avaient été faites pour l'industrie du grain — des paiements à l'acre —, mais à quel point les mesures annoncées pour ce qui est de l'industrie du bétail sont-elles en deçà des attentes?
:
Bonjour. Je vous souhaite la bienvenue. Je vous remercie de vos témoignages.
Monsieur Gilroy, ce n'est pas la première fois que l'on se rencontre. Il me semble que la dernière fois qu'on s'était vu, vous nous aviez apporté des pommes de l'Ontario. Aujourd'hui, je n'en vois malheureusement pas. Je blague.
Vos témoignages nous sont très importants quand nous faisons la révision des programmes. Vous êtes des gens de terrain, des gens directement touchés par tous les programmes de gestion des risques.
Monsieur Mutch, si vous me le permettez, je vous poserai une question concernant le Programme de paiements anticipés. Je veux simplement que vous me disiez si à l'Île-du-Prince-Édouard vous avez vécu la même situation que nous au Québec. Le 6 août dernier, le ministre a annoncé qu'il y aurait un sursis concernant le Programme de paiements anticipés. Au départ, lors des discussions avec le ministère de l'Agriculture, les producteurs québécois ont compris qu'il n'y aurait pas de pénalités rétroactives facturées aux producteurs. Avant l'annonce du 6 août, et même au moment de l'annonce, les producteurs avaient cette impression. Par la suite, on a appris qu'une pénalité rétroactive serait imposée aux producteurs qui signent une entente de remboursement.
Le 18 novembre dernier, le ministre a comparu devant le comité. Je lui ai posé une question à cet égard et il nous a dit qu'il y avait une pénalité, mais qu'elle n'était pas énorme. C'était un quart de 1 p. cent. Je conviens que ce n'est pas énorme. Toutefois, je me demandais si les producteurs ailleurs au Canada avaient eu la même impression, soit qu'il n'y aurait pas de pénalité. Finalement, au cours de l'annonce du programme, il s'est tout à coup avéré qu'il y aurait une pénalité.
J'aimerais que vous me donniez votre opinion à ce sujet.
:
Monsieur Gilroy, tout à l'heure, vous nous disiez que le programme Agri-relance avait été utile à vos producteurs à la suite de certaines catastrophes, comme une tornade.
Vous avez accès à Agri-relance parce que Agri-stabilité fonctionne pour vous actuellement. La moyenne olympique du programme Agri-stabilité fait en sorte qu'en ce moment, dans le domaine des maraîchers, des producteurs horticoles, vous pouvez bénéficier de ce programme. Cependant, vous pourriez tout aussi bien être exclus d'un tel programme, comme les producteurs de cultures commerciales qui sont restés pendant une dizaine d'années avec une moyenne basse. Il n'en demeure pas moins que c'est le type de programme qui fait en sorte que vous auriez pu ne pas bénéficier de l'aide que vous avez reçue à la suite de la tornade advenant le cas où vous auriez eu plusieurs années mauvaises ou moyennes.
J'aimerais entendre vos commentaires sur ce sujet.
Dans le cas d'Agri-stabilité, beaucoup de témoignages ont reflété ce que vous aviez dit quand on a discuté du programme de stabilisation agricole. Ils ont dit qu'il fallait, à tout le moins, tenir compte des coûts de production afin d'éviter ces effets, c'est-à-dire que certaines catégories de producteurs ne puissent pas en bénéficier pendant plusieurs années.
Avez-vous la même opinion qu'à cette époque sur le PCSRA?
:
Madame Oliver, je vais passer à vous.
Vous avez livré un témoignage qui, essentiellement, reprend beaucoup des commentaires qu'on a reçus, non seulement au cours de cette étude — parce qu'on n'a quand même pas tenu énormément de séances de comité à ce sujet —, mais aussi auparavant. On a fait des tournées, notamment la tournée sur la relève agricole, durant laquelle on a rencontré beaucoup de gens.
Je disais que votre témoignage est très intéressant, parce qu'il recoupe beaucoup ceux qu'on a obtenus au cours d'une tournée qu'on a faite récemment au sujet de la relève agricole et, également, depuis qu'on a commencé à étudier ici la révision des programmes.
Du côté des producteurs de bétail, ce qui est un peu tragique, c'est que leur situation est la plus difficile actuellement, dans le milieu agricole, au Québec et au Canada, particulièrement chez vous.
Je me sers beaucoup d'une étude de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante qui a été menée partout au Canada auprès de plus de 1 000 producteurs agricoles. Il y a des statistiques fort intéressantes.
On apprend que, pour ce qui est d'Agri-stabilité, ce sont les producteurs de bétail qui ont le moins profité du programme. Donc, il y a un problème, parce que 70 p. 100 des producteurs de bétail ont participé au programme Agri-stabilité. Cela ne veut pas dire qu'ils ont obtenu des compensations. C'est quand même à eux que ça s'applique. Les gens considèrent que ça en vaut moins la peine d'essayer d'obtenir de l'aide par l'entremise d'Agri-stabilité.
Qu'est-ce qui devrait être modifié, selon vous, pour que le programme réponde réellement aux besoins des producteurs de bétail?
:
Qui dit que le programme Agri-stabilité ne fonctionne pas? Après que je vous ai transmis ma déclaration préliminaire par courriel, j'ai reçu un chèque du programme Agri-stabilité de 146 $ visant l'année 2003, et un autre de 778 $. Le programme avait commis une erreur en 2003... et j'ai reçu un chèque vendredi.
Nous sommes en situation de catastrophe depuis tant d'années en raison de l'ESB, et les prix étaient... Les marges négatives persistent à ce moment-ci. Si, une année, j'enregistre une marge négative de 2 000 $, et que, à une autre année, j'enregistre une marge négative de 3 000 $, ces deux marges négatives s'annulent, et cela se traduit par une marge positive, laquelle signifie que je n'ai pas besoin de recevoir le moindre sou.
L'une des conséquences problématiques de l'ESB, ce sont ces marges négatives, et le producteur qui enregistre trois marges négatives n'est tout simplement pas admissible au programme. Un producteur doit enregistrer deux marges positives aux fins de son admissibilité au programme. Je peux comprendre pourquoi le programme fonctionne de cette façon, car un agriculteur qui n'est pas efficient et qui n'arrive jamais à enregistrer les moindres gains devrait être exclu du programme. Cependant, si nous avons enregistré des marges négatives année après année, c'est parce que les prix étaient extrêmement bas, phénomène absolument indépendant de notre volonté. Nous n'avions aucune prise là-dessus. Nous sommes simplement restés là à attendre et à végéter. Nous ne pouvions pas prendre de décision d'affaires appropriée. Nous ne pouvions pas faire les choses comme nous voulions les faire. Par exemple, plutôt que de nettoyer les enclos à bétail, nous devions tout empiler dans les enclos et laisser ça là. Cela n'est pas une bonne chose, parce que l'eau s'accumule là, et que des nouvelles maladies apparaissent.
Lorsque vous vous occupez d'animaux vivants et que vous ne prenez pas de bonnes décisions d'affaires, cela se retourne toujours contre vous. C'est le problème qu'ont eu les éleveurs-naisseurs.
:
Non, et c'est la raison pour laquelle je suis loin d'être dans une situation confortable.
Après une année comme celle que nous avons connue, et comme le programme Agri-stabilité n'a pas fonctionné, j'ai commencé à regarder ce qui se passait autour de moi, et je n'arrivais pas à concevoir que les éleveurs-naisseurs soient laissés en plan.
Tout d'abord, les organisations qui défendent nos intérêts devraient s'occuper de l'ensemble du secteur du bétail. Je ne comprends pas pourquoi elles ne se sont pas penchées sur le cas des éleveurs-naisseurs, qui sont au fondement du secteur du bétail, et ne se sont pas aperçues qu'ils éprouvaient beaucoup d'ennuis et qu'il fallait faire quelque chose pour leur venir en aide. On m'a dit, et j'assume la responsabilité de tout ce que je dis, qu'elles ne pouvaient pas se présenter au bureau du ministre de l'Agriculture et formuler des critiques, ni formuler publiquement ou ouvertement des critiques, car sinon, elles n'auront plus accès au ministre. Elles respectent une entente tacite selon laquelle elles font l'éloge du bureau du ministre de l'Agriculture si celui-ci fait quelque chose de bien, et gardent le silence si celui-ci fait quelque chose de mal.
Pour chaque animal vendu aux enchères, 2 $ sont prélevés — 1 $ est versé à notre organisation locale, à savoir la Saskatchewan Cattlemen's Association, et 1 $ est versé à la Canadian Cattlemen's Association. Je ne peux pas demander que ces 2 $ ne soient pas prélevés. L'organisation n'a vraiment rien fait pour moi.
De façon assez générale, les éleveurs-naisseurs se plaignent du fait que cela ne rime à rien de verser à ces organisations 2 $ pour chaque animal qu'ils vendent puisque ces organisations ne font rien pour eux. Ces organisations ne veulent pas critiquer le ministère, et elles disent qu'elles ne peuvent pas le faire. Elles disent qu'elles ont les mains liées, et que, si elles formulent la moindre critique, elles se retrouveront dans la merde jusqu'au cou — elles n'auront plus accès au ministre de l'Agriculture.
:
Merci, monsieur le président.
Tout d'abord, je tiens à remercier les témoins de s'être présentés ici. Je sais qu'il est toujours difficile pour vous de quitter le confort de votre foyer en Saskatchewan, à l'Île-du-Prince-Édouard ou en Ontario pour venir ici et tenter de venir expliquer à d'étranges hommes portant veston et cravate ce qui est en train de se passer. Je vous suis donc réellement reconnaissant d'être venus ici. En outre, j'ai vraiment apprécié vos exposés. Il est toujours agréable d'entendre les organisations agricoles, mais je préfère écouter les agriculteurs que les organisations agricoles, car à bien des égards, ce sont eux qui sont sur le terrain, qui se salissent les mains et qui font le travail. D'une façon ou d'une autre, votre présence fait toujours l'effet d'une bouffée d'air frais.
Dans beaucoup de cas, il est vraiment difficile pour le comité de commencer à séparer le bon grain de l'ivraie. En outre, dans bien des cas, il faut établir un juste équilibre entre les besoins des agriculteurs et ceux des contribuables. C'est la raison pour laquelle des programmes provisoires sont élaborés — ces programmes sont censés être non pas des programmes de soutien à long terme ou des programmes sociaux à long terme, mais des programmes de transition. Ces programmes sont destinés à venir en aide aux agriculteurs lorsqu'un événement survient, de manière à ce qu'ils puissent finir par entrevoir la lumière au bout du tunnel, se tirer d'un mauvais pas et aller de l'avant.
Ce qui me préoccupe un peu, c'est lorsque les programmes de transition deviennent des programmes sociaux, car cela me porte à croire que quelque chose d'autre doit changer. Cela me donne à penser que l'industrie a changé ou que votre situation a changé de façon structurelle, de sorte que vous êtes contraint de prendre une décision qui vous déplaît peut-être. C'est difficile. La question véritablement épineuse pour les législateurs, c'est de déterminer la durée d'un programme — est-ce 5 ans, 7 ans, 10 ans? Lorsque l'industrie a changé, pendant combien de temps les contribuables devraient-ils vous soutenir, et à combien ce soutien devrait-il s'élever? Il s'agit de l'une de mes premières questions. On ne peut justifier le fait de demander aux contribuables de soutenir pour toujours telle ou telle industrie — les choses ne fonctionnent tout simplement pas de cette façon dans notre société. Si votre industrie est incapable de changer, ou si vous êtes incapable d'apporter des changements structurels, il est temps d'envisager d'autres solutions.
Brian, vous avez parlé de ce que vous observiez dans l'industrie de la fruiticulture, et il me semble que c'est exactement ce qui est en train de se passer. À bien des égards, cela est triste à voir, car il semble que la meilleure méthode soit toujours la méthode ancienne, mais la réalité, c'est que les choses changent, et nous devons aller de l'avant.
Je vais d'abord m'adresser à vous, Ernie. Dans votre cas — et dans celui des agriculteurs de l'Île-du-Prince-Édouard —, ce qui s'est passé, c'est que vous avez obtenu des avances de fonds, lesquelles étaient garanties. Vous avez obtenu une convention de créancier privilégié. Par la suite, vous avez eu besoin d'accroître vos flux de trésorerie. Qu'est-ce que le gouvernement a fait? Il a dit qu'il vous donnerait la capacité d'obtenir plus de fonds sans convention de créancier privilégié — sans garantie. Comment revenir en arrière, à présent que vous devez commencer à rembourser les avances qui vous ont été consenties? Quel serait le délai raisonnable?
:
Il y a deux ans, dans ma circonscription, nous avons été plongés dans une situation similaire. Nous avons été touchés non pas par une tornade, mais par un derecho, qui a causé d'énormes dommages. Il a arraché des peupliers dont le tronc était d'un diamètre de deux pieds. Les dommages que peuvent occasionner ces rafales de vent sont incroyables. Il y a certaines choses qui peuvent être réparées, mais il y en a toujours d'autres auxquelles nous sommes attachés par un lien sentimental que l'on ne peut réparer et que l'on ne peut ravoir.
Si je ne m'abuse, dans ce cas-là, les choses se sont passées de la même façon que chez vous — le gouvernement provincial est intervenu, et il a dit aux collectivités ce qu'il allait se passer. Pour l'essentiel, le gouvernement a demandé aux groupes locaux de commencer le nettoyage, car il y avait beaucoup de débris. Les mennonites sont vraiment excellents dans ce genre de chose.
Toutefois, vous dites que, dans votre cas, en raison du soutien du gouvernement, dans les faits, vous... pour un jeune agriculteur qui fait ses premières armes, cela doit être la chose la plus terrifiante qu'il ait jamais vécue. Il vient tout juste de recevoir un prêt, il s'apprête à cueillir ses pommes, puis tout d'un coup, tout ce qu'il avait a disparu. Par contre, il est tout de même prêt à se retrousser les manches et à rebondir, n'est-ce pas?
:
Au sein de l'Union européenne et aux États-Unis, les agriculteurs gagnent bien leur vie grâce aux chèques qu'on leur envoie — les chèques sont déposés dans leur boîte aux lettres, et ils gagnent bien leur vie. Les agriculteurs ne restent pas assis chez eux à attendre qu'on leur envoie un chèque pour qu'ils puissent gagner leur vie. Si la météo était clémente et que les coûts de production n'étaient pas si élevés... La part de l'argent dépensé par les consommateurs que touchent les producteurs diminue sans cesse. Ainsi, il s'agit là de diverses choses sur lesquelles les agriculteurs n'ont aucune emprise.
Depuis le printemps dernier, nous avons entendu beaucoup d'agriculteurs, et on nous dit que les programmes ne fonctionnent pas. C'est ce que vous nous avez tous dit fermement aujourd'hui. La question de savoir pourquoi ils ne fonctionnent pas soulève une foule de questions. À présent, les chiffres ont été publiés. Je crois que, dans l'ensemble du Canada, la valeur des programmes fédéraux et provinciaux en matière d'agriculture sont d'une valeur totale de huit milliards de dollars. Pour une raison ou une autre, une bonne portion de cette somme n'est pas versée aux agriculteurs. Vous avez mentionné les raisons qui expliquent cela.
Examinons donc de quelle façon nous pourrions modifier les programmes. Vous avez mentionné quelques-unes des mesures qui pourraient être prises. Par exemple, l'une des choses que nous avons entendues, c'est que le calcul fondé sur la moyenne olympique devait disparaître, car vous avez enregistré des marges négatives pendant plusieurs années de suite. Ainsi, j'aimerais que vous formuliez quelques recommandations à ce sujet.
L'autre chose qui dérange beaucoup d'agriculteurs, c'est que les programmes ne sont pas uniformisés dans l'ensemble du pays. Il arrive que des immigrants et de jeunes agriculteurs quittent leur région du pays pour aller s'installer dans une autre où les programmes offerts sont plus avantageux. Ainsi, que pouvons-nous faire pour modifier les programmes? Devraient-ils être plus uniformes? Devrait-on changer les années? Si le programme recommençait sur des bases entièrement nouvelles et que vous aviez huit milliards de dollars à distribuer dans l'ensemble du secteur de l'agriculture du Canada, comment distribueriez-vous ces sommes? Comment le programme doit-il être modifié?
:
Il s'agit d'une bonne question, à laquelle nous avons assez longuement réfléchi.
Avant le PCSRA, Agri-stabilité et toute la gamme de programmes, il y avait un programme qui s'appelait le Compte de stabilisation du revenu net, le CSRN. Ce programme posait des difficultés. Les cultivateurs et les agriculteurs avaient d'énormes soldes de compte, mais affirmaient tout de même ne pas pouvoir accéder à ces sommes, en dépit du fait qu'ils éprouvaient des difficultés. Au même moment, beaucoup de paiements ponctuels étaient versés. À mes yeux, la solution simple consistait à modifier les facteurs pouvant donner lieu à des versements de manière à ce que les agriculteurs puissent accéder à des fonds en cas de besoin. Le taux d'approbation au CSRN était extrêmement élevé chez les agriculteurs, et les coûts d'administration étaient extrêmement faibles. On a besoin d'une solution, et le CSRN semblait être très efficace.
Avant cela, il y avait le Programme national tripartite de stabilisation des prix, qui était extrêmement efficace. Les coûts étaient partagés à parts égales entre le producteur, le gouvernement provincial et le gouvernement fédéral. Les agriculteurs devaient attendre un bon moment avant de recevoir des sommes, car ils devaient rassembler tous leurs chiffres — il y avait deux ans de décalage, mais le programme permettait aux gens d'accéder à des fonds dont ils avaient besoin pour couvrir leurs coûts de production et enregistrer un profit raisonnable.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci aux témoins de s'être présentés ici.
En matière de programmes d'aide en cas de catastrophe, j'imagine qu'il est important de comprendre qu'il revient aux provinces de déterminer qu'une catastrophe a frappé une zone précise. Il serait inapproprié de la part du gouvernement fédéral de se présenter dans une province et d'affirmer: « Une catastrophe a eu lieu ici », et il serait inapproprié de la part du gouvernement provincial de répondre: « Non, il n'y a pas eu de catastrophe ici ». Ainsi, je crois comprendre que le fait de devoir d'abord collaborer avec le gouvernement provincial, et attendre que celui-ci s'adresse ensuite au gouvernement fédéral, engendre de la frustration.
J'ai beaucoup réfléchi sur cette question, et j'ai de la difficulté à trouver une autre façon dont pourraient fonctionner les choses, car il semble qu'il serait tout simplement inapproprié de la part du gouvernement fédéral de sillonner les provinces et de dire: « Une catastrophe a eu lieu ici. Pourquoi ne faites-vous rien à ce sujet? Une autre catastrophe a eu lieu là-bas. » Il revient véritablement aux gouvernements provinciaux d'intervenir en premier.
En outre, j'estime que le programme Agri-relance a été conçu pour prendre en main les situations exceptionnelles de ce genre. Ce programme a été conçu non pas comme une solution ou un processus de versement à long terme, mais comme une solution ponctuelle — un montant est versé lorsqu'un événement se produit.
Je pense que ce qui s'est passé dans l'Ouest est un bon exemple de cela. Après les inondations, les montants versés au titre d'Agri-relance ont été énormes, lorsqu'on y songe un instant —450 millions de dollars ont été versés dans trois provinces. Ainsi, trois gouvernements provinciaux et le gouvernement fédéral ont contribué à cela. Il s'agit de l'un des versements ou des paiements les plus importants de l'histoire du Canada, et ces sommes ont été versées plus rapidement que jamais.
Je crois donc qu'il existe quelques histoires de réussite, mais je ne soutiens pas que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. Je souligne simplement qu'il s'agit d'un système qui fonctionne, même si, à certains moments et dans certaines circonstances, il semble ne pas bien fonctionner.
Je voulais revenir sur la discussion touchant la comparaison entre le CSRN et Agri-investissement, lequel est à mes yeux un programme semblable au CSRN dans la mesure où les agriculteurs mettent eux-mêmes l'argent de côté. Le gouvernement double ces fonds, et, dans les faits, il a versé un montant initial de 600 millions de dollars pour lancer Agri-investissement. Les agriculteurs ont une énorme marge de manoeuvre en ce qui concerne les retraits qu'ils peuvent faire de leur compte Agri-investissement afin de compenser les premiers 15 p. 100 de pertes qu'ils enregistrent.
Ernie, vous pourriez peut-être formuler des commentaires à ce sujet: à votre avis, Agri-investissement est-il un programme valable? Est-ce que les agriculteurs s'en prévalent? Selon vous, qu'est-ce qui le distingue du CSRN?
Comme mon collègue, je vous suis vraiment reconnaissant d'avoir pris le temps de vous présenter ici et de participer à la présente réunion à titre de témoins.
J'ai écouté la discussion qui portait sur les anciens programmes — Brian, vous avez parlé du Programme national tripartite de stabilisation —, et je ne peux jamais être en désaccord avec mes collègues autour de la table qui ne cessent de critiquer le gouvernement d'avoir omis de corriger quelque chose qu'il avait créé.
Deux membres du comité portent le titre d'« honorable », ce qui signifie qu'ils étaient membres du cabinet et qu'ils ont permis que l'on substitue un programme axé sur les marges au CSRN.
Il faut bien comprendre que le CSRN n'avait pas à disparaître — il pourrait toujours être en place. Quelqu'un a pris la décision politique de supprimer le programme pour épargner de l'argent plutôt que de le corriger.
Je suis tout à fait d'accord pour dire que le programme Agri-stabilité n'est pas équitable. Les versements ne sont pas distribués de façon équitable dans l'ensemble du pays. Toutefois, dans le cadre de la politique qui l'accompagnait... le gouvernement fédéral ne peut plus prendre des décisions de manière unilatérale — les gouvernements provinciaux ont leur mot à dire.
Monsieur Mutch, vous avez mentionné que l'Île-du-Prince-Édouard est une province pauvre. En réalité, dans le passé, l'Ontario était la province la plus riche, et à présent, elle se trouve au bas de l'échelle. Les provinces dressent une liste de leurs priorités. Si vous discutez avec mes collègues du Québec, vous constaterez que le gouvernement de cette province accorde une importance prioritaire à l'agriculture puisque les transferts aux provinces ont été accrus de 25 p. 100. Les provinces font des choix quant à la manière de distribuer.
Monsieur Mutch, éloignons-nous un peu de cette question. Vous avez mentionné que le Programme de paiements anticipés était un très bon programme. Par la suite, vous vous êtes en quelque sorte écarté de ce point de vue, et vous avez indiqué qu'il n'allait pas fonctionner, puisque vous n'êtes pas en mesure de rembourser les avances de fonds. Je comprends ces préoccupations. Nous sommes à sept mois de la date butoir. D'après vous, est-ce que les organisations qui vous représentent prononceront à ce moment-là un autre plaidoyer bien éclairé dans l'éventualité où une prolongation du délai serait nécessaire?
En outre, les gens ont paraphé des conventions. À votre avis, prévoyait-on que quelques-uns des agriculteurs ne seraient jamais en mesure de rembourser les prêts? Vous avez mentionné que les éleveurs de bovins allaient probablement disparaître, et je me demande donc comment on s'attend à ce qu'ils remboursent leur prêt.
J'aimerais à présent m'adresser à Brian.
Merci encore, Brian. Plus tôt, lorsque nous avons visité votre région, nous avons discuté des tornades. Je peux vous dire que, durant mon enfance, j'ai appris ce que c'est que d'avoir de la paille collée dans le mur après que l'étable s'est partiellement envolée. Cela donne une idée de la puissance d'une tornade. Nous avons vécu cela chez moi. Il y avait une constante: chaque fois que nos voisins et tous les membres de la collectivité devaient se serrer les coudes, les mennonites se présentaient et nous aidaient à tout nettoyer.
Il y avait une exploitation agricole à environ un mille de là et que j'ai fini par acheter. Environ la moitié de cette exploitation agricole, y compris la maison et l'étable, a été emportée par une tornade et s'est retrouvée sur les terres de ma famille. Les tornades sont d'une puissance incroyable.
En ce qui a trait aux problèmes que pose Agri-stabilité quant au nombre d'années, quelle a été la réaction des provinces lorsque, durant vos discussions avec elles, il a été question d'apporter des modifications au mode de calcul fondé sur la moyenne olympique de manière à ce que la période de calcul soit prolongée si le fait de prendre en compte les trois meilleures années d'une période de cinq ans n'est pas suffisant? Comment se déroulent ces discussions?
J'aimerais que vous formuliez des commentaires à ce sujet, et que M. Mutch réponde ensuite aux deux autres...
:
L'une des choses qui me dérangent, c'est que l'on critique constamment les agriculteurs de l'Alberta. M. Easter a dit que les agriculteurs de l'Alberta étaient les agriculteurs les plus socialistes du pays, alors que, dans les faits, pour ce qui est des choses dont vous avez parlé, madame Oliver, les sommes versées par Agri-relance à la suite des sécheresses de l'an dernier, l'Alberta et la Saskatchewan étaient dans le même bateau.
L'une des critiques que j'ai entendues, c'est que le programme a mis trop de temps à verser l'argent. Les critiques formulées par les producteurs de ma province concernent non pas les montants versés dans le cadre du programme, ni même, de façon générale, la volonté du gouvernement, mais les éléments déclencheurs — dans quelles situations pourra-t-on accéder à ce programme, et sur quels critères la détermination du montant versé sera-t-elle fondée? Ce sont les deux critiques que j'entends des agriculteurs. Êtes-vous d'accord avec ces critiques? En réalité, même si je me suis plains un peu, la campagne agricole a pris fin, la récolte a eu lieu en octobre, et les agriculteurs ont été payés en janvier ou en février, soit assez rapidement. Et puis, cette année, il y a eu les inondations, et je peux dire que le gouvernement fédéral a probablement réagi à la catastrophe plus rapidement qu'aucun gouvernement fédéral ne l'a fait dans le passé.
Ainsi, je ne suis pas certain que le moment est nécessairement... Êtes-vous d'accord avec moi pour dire que les critiques relatives aux éléments déclencheurs ne sont pas nécessairement justes?