AGRI Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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CANADA
Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire
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TÉMOIGNAGES
Le lundi 7 février 2011
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
La séance est ouverte.
Je tiens à remercier tous nos témoins d'être ici ce matin.
Je sais que M. Cross doit partir tôt, alors nous allons modifier un peu l'ordre du jour pour qu'il puisse présenter son exposé en premier. Il pourra ensuite nous quitter quand bon lui semblera.
Merci de nous accueillir ici, en Saskatchewan, dans le cadre de la première partie de notre tournée nationale, que nous avons entreprise pour étudier l'industrie de la biotechnologie.
Sans plus de cérémonie, je donne la parole à M. Cross.
Je vous demanderais de ne pas parler plus de 10 minutes, monsieur. Merci.
Je vous souhaite la bienvenue, à vous et aux membres du comité. Je suis certain que vos notes d'information contiennent une bonne description de la grande capacité que nous avons dans notre merveilleuse ville en matière de sciences biologiques, et je suis persuadé que vous allez en apprendre davantage pendant votre séjour ici.
Je dois admettre que, la dernière fois où j'ai été appelé à témoigner, la situation était assez différente, et je préfère ne pas y penser...
Des voix: Oh, oh!
M. John Cross: ... mais permettez-moi de vous parler un peu de moi.
Je crois depuis de nombreuses années que l'agriculture est la profession la plus noble exercée par l'homme depuis que le monde est monde. J'ai eu la chance de faire carrière dans l'industrie de l'alimentation et de l'agriculture. Ma passion, c'est de chercher à aider les agriculteurs à être plus productifs et plus rentables. Je suis vraiment satisfait des résultats obtenus jusqu'à présent, mais je n'ai pas dit mon dernier mot.
Je vais vous raconter une petite histoire. En 1980, deux collègues et moi-même avons fondé l'entreprise Philom Bios, dont la mission était d'utiliser des microbes naturels provenant du sol pour améliorer la productivité des cultures. Nous avons homologué le premier herbicide biologique au Canada. Nous avons commercialisé le premier inoculant de phosphate au monde, qui permet d'accroître l'absorption des phosphates par les végétaux et d'améliorer le rendement et la qualité des cultures. Nous avons aussi créé et commercialisé le premier inoculant composé de phosphate et de nitrogène au monde pour les légumineuses. Il y a trois ans, l'entreprise a été achetée par Novozymes, qui poursuit maintenant la commercialisation — surtout à l'échelle mondiale — de ces produits et l'amélioration des produits dérivés.
Tout cela pour dire que l'élément fondamental de notre succès était fort simple. Nous avions des ententes de collaboration en R-D très efficaces avec les laboratoires du Conseil national de recherche à Ottawa, à Saskatoon et dans l'Île-du-Prince-Édouard, et plus particulièrement avec la Direction générale de la recherche d'Agriculture Canada. L'herbicide biologique a été créé en collaboration avec M. Mortensen et la station de recherche de Regina, qui a été fermée il y a quelques années, malheureusement. L'inoculant de phosphate a été mis au point en collaboration avec M. Gusse et la station de recherche d'Agriculture Canada à Lethbridge. Pour l'inoculant composé de phosphate et de nitrogène, nous avons collaboré avec M. Wendell Rice et ses collègues, à la station de recherche de Beaverlodge.
Je peux vous dire, messieurs, que c'était une époque dynamique, une époque à laquelle la Direction générale de la recherche constituait un lien majeur entre la science et l'agriculteur. Des gens que je connais à la direction générale m'ont dit que la situation avait beaucoup changé dans les dernières années. Les chercheurs ressentent beaucoup de frustrations à l'égard des nouveaux modèles de gestion et de la réduction constante du financement. Le lien entre la Direction générale de la recherche et l'agriculteur s'est lui aussi à ce point effrité qu'il n'existe pratiquement plus.
Certains d'entre vous se souviendront du plaisir qu'apportaient les journées champêtres organisées chaque année par les stations de recherche et des échanges qui avaient lieu à cette occasion entre les agriculteurs et les chercheurs. Cette époque est révolue. Dans le cadre de vos délibérations, monsieur le président, je vous inviterais, vos collègues et vous-même, à penser sérieusement à redonner à la Direction générale de la recherche sa vocation première. Cette année marque le 125e anniversaire de la fondation de la Direction générale de la recherche; ce serait l'occasion parfaite de dynamiser cette formidable organisation canadienne.
C'est le seul point négatif que j'ai à soulever, monsieur le président. J'ai quelques commentaires positifs à vous faire.
Je pense que nous faisons de grandes choses. Je pense notamment à Génome Canada et à ses organisations provinciales constitutives, dont les travaux de recherche de pointe dans le domaine de la génomique sont reconnus mondialement. C'est très impressionnant.
L'une des organisations que vous connaissez peut-être, NAFGEN, qui signifie Natural Fibres for the Green Economy Network, est un réseau de collaborateurs de l'ensemble du pays. Il regroupe 54 chercheurs de 22 organisations qui créent, à partir de matières premières constituées de fibres de lin et de chanvre — des fibres naturelles canadiennes — des matériaux pour la bioéconomie: énergie, produits chimiques et produits biologiques. C'est du solide. C'est un excellent modèle qui regroupe en un tout plusieurs chercheurs et qui crée une synergie entre eux.
La présentation de clôture pour NAFGEN aura lieu lundi prochain, ici, à Saskatoon. Malheureusement, le financement arrive à échéance à la fin du mois de mars, mais une mine de connaissances que la recherche a permis d'acquérir pourra maintenant servir à l'étape suivante du développement et permettra de se rapprocher de plus en plus du monde commercial. Vous devriez peut-être vous pencher sur la question du financement et sur la façon dont nous finançons ces organisations de recherche regroupant plusieurs participants.
Au chapitre de la valeur ajoutée, nous faisons très bonne figure. Certains d'entre vous se souviendront de leur ancien collègue de la Chambre des communes, l'honorable Otto Lang. Au début des années 1970, il a été le fer de lance derrière l'évaluation selon laquelle nous étions des bûcherons et des porteurs d'eau. Quand allions-nous commencer à transformer nos produits agricoles en produits alimentaires et en aliments pour animaux à valeur ajoutée? Il a été à l'origine de la POS Pilot Plant Corporation, maintenant la POS Bio-Sciences, qui est devenue un chef de file dans la prestation de services élargis à des entreprises qui veulent procéder à la transformation à valeur ajoutée de leurs produits, de l'étape du laboratoire à celle de l'usine pilote et jusqu'à la commercialisation. C'est un bel exemple de prévoyance du gouvernement fédéral de l'époque. En 30 ans, ce projet a porté ses fruits et continue de donner des résultats de plus en plus positifs.
Aujourd'hui, notre ville compte deux entreprises commerciales dont les travaux reposent sur la recherche universitaire. Ces entreprises font l'extraction des protéines de la farine de canola. L'une se concentre sur le marché de l'alimentation humaine, tandis que l'autre vise le marché de l'alimentation animale. C'est quelque chose.
Je participe aux activités d'une petite entreprise qui a mis au point le premier pesticide biologique tout à fait naturel au monde pour les pathogènes du sol. En fait, monsieur le président, la raison pour laquelle je dois partir, c'est que nous sommes en pleine période de financement — nous cherchons à obtenir de trois à cinq millions de dollars — et que je dois faire un autre exposé. D'ailleurs, si vous voulez avoir des ententes de souscriptions, je peux vous en fournir.
Je dois vous dire une chose, monsieur le président. Nous avons présenté des exposés à propos de cette entreprise partout au pays. La plupart des investisseurs comprennent le monde du pétrole et du gaz; ils sont très peu à comprendre le monde agricole, mais les choses sont en train de changer. On est conscient des avantages sociaux et économiques que le monde agricole peut maintenant apporter. C'est de bon augure pour ce que nous faisons ici, de façon générale, dans l'industrie des sciences biologiques, et pour la perspective d'obtenir des capitaux pour la commercialisation. C'est une situation que je n'ai jamais vue au Canada au cours de ma carrière. C'est très encourageant.
Au Canada, nous avons la chance de bénéficier d'un excellent soutien à la recherche. Le programme d'aide technologique au développement durable est excellent. Il y a le Programme d'aide à la recherche industrielle, que nous connaissons tous, le Programme canadien d'adaptation agricole et aussi, bien sûr, Ag-West Bio, un investisseur commercial très puissant d'ici.
Pour ce qui est des possibilités d'améliorer l'innovation dans l'industrie agricole et agroalimentaire, je vous propose de réfléchir sérieusement à la Direction générale de la recherche. Je vous y encourage vivement.
Le processus réglementaire s'améliore. Cela me mettait en furie de voir que les agriculteurs du Dakota du Nord pouvaient se procurer nos nouveaux produits trois ans avant que mes clients agriculteurs de la Saskatchewan puissent y avoir accès. Les choses s'améliorent, mais cette folie de demander des données d'efficacité doit cesser. Tout le monde est perdant, même la société.
Je vous encourage à continuer de financer de façon dynamique les consortiums de recherche stratégique comme NAFGEN. Et je vous en prie, pensez au crédit d'impôt à l'investissement et au crédit d'impôt pour la R-D, qui sont maintenant de 35 p. 100. C'est génial. Les entreprises deviennent exportatrices, alors pourquoi ces crédits ne s'appliquent-ils pas aux essais en champ effectués à l'extérieur des frontières canadiennes? C'est fou.
Par ailleurs, si nous voulons accroître notre capacité universitaire, augmentons le taux des crédits d'impôt, de 35 p. 100 à, disons, 55 p. 100, pour les entreprises qui investissent en collaboration avec des chercheurs universitaires, parce que c'est relié à ce dont personne ne veut parler, c'est-à-dire la grave pénurie de chercheurs qui est imminente au pays. Nous savons que notre culture n'est pas très axée sur la science, et cela ne date pas d'hier. Si vous aviez une demi-heure, je vous expliquerais pourquoi, mais c'est un fait.
D'où viennent nos agronomes? Je vous demande de réfléchir à cela aussi. Les plus grands propriétaires fonciers de la province sont les bandes autochtones. Que faisons-nous pour former des agronomes autochtones? Monsieur le président, j'insiste pour que le comité se penche sur ce que nous pourrions faire pour nous attaquer à cette pénurie de personnel scientifique dans le monde agricole.
C'est ce que j'avais à dire. Je vous remercie pour le temps que vous m'avez accordé, et j'espère que mes commentaires vous seront utiles.
Merci.
Merci beaucoup, M. Cross.
Nous allons maintenant passer à Mme Mary Buhr, doyenne du Collège de l'agriculture et des ressources biologiques.
Allez-y, M. Lemieux.
J'ai une question à poser en rapport au témoignage que nous venons d'entendre. Est-ce que je devrais la poser maintenant ou attendre?
Je suis très impressionné par votre compréhension du financement ainsi que du domaine de la recherche et du développement; vous avez manifestement beaucoup d'expérience liée à la recherche et au développement et vous savez très bien ce qu'ils peuvent apporter à l'agriculture.
Une discussion sur le projet de loi C-474 aura lieu demain à la Chambre des communes; c'est un projet de loi d'initiative parlementaire présenté par Alex Atamanenko et qui porte principalement sur les OGM, et non pas sur la biotechnologie. Ce projet de loi propose de s'éloigner des principes scientifiques éprouvés pour déterminer si des OGM sont acceptables, et de se doter d'un moyen fiscal pour évaluer l'incidence d'un produit génétiquement modifié avant qu'il ne puisse être approuvé.
À Ottawa, nous avons entendu de nombreux témoignages selon lesquels ce projet de loi sème l'incertitude dans le domaine de la recherche et du développement et les investisseurs, en fait, se retirent, ou du moins suspendent leurs engagements financiers cet égard.
Je suis persuadé que vous avez présenté plusieurs exposés au cours des neuf derniers mois, et je voulais savoir ce que vous en pensiez. En parlant à des investisseurs éventuels et en cherchant à obtenir du financement, avez-vous remarqué que le projet de loi C-474 avait eu une incidence? Est-ce une incidence positive, négative ou neutre? Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet?
C'est une bonne question.
N'oublions pas qu'il s'agit de personnes dont la vie est assez différente de la nôtre, en ce sens qu'elles ont de l'argent. Certaines d'entre elles ont beaucoup d'argent, contrairement à nous.
Cet argent ne leur est pas tombé du ciel, mais... Votre question nous amène aussi au fait que l'incertitude est l'une des choses que les investisseurs détestent le plus. Ce projet de loi recouvre l'avenir d'un voile d'incertitude; l'incertitude qu'engendre la réglementation est très pénible. Je ferai respectueusement remarquer que ce projet de loi d'initiative parlementaire a fait l'objet de peu de soutien analytique réel. Il pourrait avoir un effet désastreux.
N'oubliez pas, messieurs, qu'il est question ici de la scène mondiale. Cela ne touche pas seulement la Saskatchewan ou le Canada. Il s'agit du monde entier. Si nous voulons conserver et améliorer notre capacité à l'échelle mondiale et la reconnaissance dont nous faisons l'objet... La situation est semblable à celle que nous avons connue vers 1981, relativement à l'Agence d'examen de l'investissement étranger. Qu'est-il arrivé à la perception que l'on avait de nous à l'extérieur de nos frontières? Ne touchez pas au Canada. J'étais là et je m'en souviens. Nous avons été paralysés économiquement pendant quatre, cinq ou six ans.
Ce projet de loi d'initiative parlementaire risque de produire le même effet dans le monde scientifique. C'est mon opinion, monsieur.
Merci beaucoup.
Nous passons maintenant à Mme Mary Buhr, doyenne du Collège de l'agriculture et des ressources biologiques. Je vous prierais de ne pas dépasser 10 minutes.
La biotechnologie est l'un des outils que nous utilisons dans le domaine de l'agriculture et des ressources biologiques pour aborder les questions vraiment cruciales qui nous occupent actuellement. Il faut compter 10 années pour développer une nouvelle variété de plantes, 10 ans à compter du moment où on conçoit l'idée à partir des besoins exprimés, jusqu'à ce que cette variété soit accessible.
Quand on regarde le monde, nous constatons que la population mondiale aura augmenté de 50 p. 100 d'ici l'année 2050. Elle comptera plus de neuf milliards de personnes d'ici 2050, et nous ne savons pas du tout ce qu'il adviendra du climat. Cependant, tous les climats que nous connaissons actuellement et qui nous permettent de cultiver des produits de l'agriculture existent quelque part dans le monde, alors il n'est presque pas important de savoir quel temps il fera.
La Saskatchewan compte plus de 43 p. 100 de la terre arable au pays. Cette province revêt une importance cruciale pour l'avenir de l'agriculture et des ressources biologiques. Nous nous servons de la biotechnologie et nous comprenons clairement que c'est loin de concerner uniquement les OGM.
Ce que les politiciens et les décideurs doivent vraiment faire, c'est évaluer l'équilibre entre les avantages et les risques pour ce qui est de l'ensemble des technologies qui sont utilisées et l'ensemble des produits qui sont mis sur le marché, de façon à répondre aux besoins essentiels de notre population dans notre pays ainsi qu'à ceux de la population mondiale, et ce, non seulement pour ce qui est des aliments, mais également en ce qui a trait aux bioproduits pour les fibres, le carburant, la qualité de l'air et la capture du carbone. Tous ces éléments font partie de la biotechnologie et sont influencés par elle.
Quel est le rôle des universités dans le secteur de la biotechnologie agricole? Tout d'abord, nous sommes présumées être des courtières honnêtes de renseignements sûrs pouvant informer le public. Nous effectuons également des recherches dans l'intérêt de la population. Il ne s'agit pas de recherches commerciales, mais plutôt de recherches dans l'intérêt de la population, ce qui signifie que lorsque nous rendons une variété de plantes accessibles au public, après avoir déployé tous les efforts appropriés, les agriculteurs peuvent utiliser cette semence, faire pousser la variété, la récolter, puis prendre la semence provenant de cette récolte, en mettant une partie de côté et l'utiliser l'année d'après. Les sociétés font de l'argent en vendant des semences; c'est pourquoi elles vendent des semences qui, essentiellement, ne peuvent ni être récoltées ni renouvelées, sans quoi elles perdraient leurs profits.
Le canola est une culture hybride. Les sociétés ont les deux variétés parentes. Elles produisent une semence hybride. C'est la semence qui est accessible aux producteurs. Les producteurs la planteront et en récolteront le fruit. La récolte présentera toutes les excellentes caractéristiques recherchées, mais les agriculteurs ne pourront conserver aucune semence parce qu'elle ne se reproduira pas vraiment l'année suivante. Des activités commerciales peuvent améliorer intentionnellement d'autres cultures qui seront stériles si elles sont replantées. Lorsqu'une université améliore des végétaux et les rend accessibles au public, il s'agit de recherches dans l'intérêt de la population. Voilà la définition de recherches dans l'intérêt de la population. Tous les investissements sont transparents et nous ne facturons rien à la toute fin, alors, je le répète, c'est le choix qu'il convient de faire.
Nous pouvons entreprendre des recherches à long terme risquées et hypothétiques comme le genre de recherches qui ont mené au développement du canola et de légumineuses. Les sociétés doivent générer un revenu pour leurs actionnaires; elles ne peuvent donc pas entreprendre le genre de recherches risquées que nous faisons, et pourtant, sans la recherche qui a mené au développement du canola, le canola ne serait pas une culture de nos jours.
Nous innovons et nous acquérons de nouvelles connaissances, y compris les idées « eurêka », celles qu'on découvre par hasard. Voilà les choses pour lesquelles nous sommes surtout connues.
La chose essentielle que nous faisons et que personne d'autre ne fait, c'est de former les esprits de l'avenir. Nous formons les biotechnologistes. Nous fournissons les habiletés d'apprentissage — nous enseignons comment apprendre — et nous assurons le lien entre les disciplines et entre l'éthique, la science et la culture. Les collèges communautaires donnent aux gens des habiletés distinctes; nous leur permettons d'apprendre et de développer leur capacité de déterminer comment apprendre. Nous stimulons l'apprentissage et nous le faisons de la meilleure façon possible.
Du côté de l'innovation médicale au sein de notre université, le Collège de l'agriculture et de ressources biologiques travaille de concert avec le Département de nutrition et de pharmacie ainsi qu'avec l'industrie. Ensemble, nous sommes littéralement en train de mettre sur pied une chaire de recherche visant à étudier le bien pour l'humanité qui découlera des cultures de légumineuses biofortifiées afin de fournir des métaux illimités dans l'intérêt de la population. Encore une fois, voilà le genre de choses que nous seuls pouvons accomplir.
Lorsque nous examinons la biotechnologie, nous constatons que dans cette province, nous travaillons au sein d'un groupe de recherche incroyablement efficace. C'est extraordinaire. Je viens de Guelph, où j'y ai passé quelque 20 années, et l'efficacité du groupe ici est tout à fait renversante.
J'ai mis des mois à trouver qui travaillait pour qui, parce que nous allions si aisément d'une personne à l'autre et que c'était vraiment déroutant. L'une des caractéristiques de ce groupe unique, c'est que nous travaillons à merveille ensemble, y compris avec Agriculture Canada, le CNRC, la VIDO-InterVac, le Saskatchewan Reserach Council, l'Alberta Gentech et l'industrie laitière de la Colombie-Britannique. Tous ces éléments apportent leur contribution, et nous faisons tout cela ensemble.
Nous procédons à l'amélioration des plantes et à leur sélection et oui, nous avons touché aux OGM, mais nous faisons beaucoup plus encore. Nous décortiquons le génome et la composante génétique, nous comprenons ce que les gènes peuvent faire, puis nous sélectionnons les plantes chez lesquelles ces gènes sont présents naturellement et nous améliorons l'exploitation de ces plantes.
Nous touchons à la santé animale et humaine, y compris au développement de médicaments et de vaccins, d'enzymes, de probiotiques, d'oeuf oméga-3 et de lait enrichi en oméga-3. Nous sommes en mesure d'établir un lien entre le produit et les aliments que les animaux mangent ainsi que les avantages pour la santé chez les gens qui consomment le produit. Voilà le genre de choses que nous pouvons fournir lorsque nous exportons à l'étranger également.
En outre, nous sommes partie prenante dans le développement technologique. Nous prenons les plantes qui présentent les caractéristiques génétiques recherchées et nous les donnons à manger aux animaux qui possèdent les caractéristiques génétiques leur permettant d'en tirer le maximum de bienfaits. Puis, nous procédons à l'extraction des huiles et des protéines que renferment ces produits et ce, de toutes sortes de manières différentes afin de nous permettre de produire le produit, que nous pouvons ensuite vendre à l'étranger. Nous pouvons aussi vendre la technologie de même que l'utiliser pour développer nos propres produits ici à des fins canadiennes ou au profit des Canadiens.
Ces cultures améliorées ou originales et la protéine animale de grande valeur sont les éléments dont le reste du monde a besoin et qu'il veut. Nos partenaires émergents, comme la Chine, l'Inde et le Kazakhstan — vous nommez ces pays — s'adressent à nous en raison de ce que nous pouvons faire dans le domaine de la biotechnologie et à cause de nos liens avec la technologie sur la façon de faire.
Comment entretenons-nous nos sols? Quels sont les microbes qui prendront le sol provenant des sables bitumineux et lui permettra de faire pousser des plantes? Dans les sols pauvres du Nord, ou les non-sols du Nord, quelles valeurs revêtent les roches qui s'y trouvent et qui pourraient nous permettre de produire une culture ou d'élever des animaux ou...? Je dis toujours à mes phytogénéticiens que nous devons nous pencher sur la façon de cultiver le riz sauvage en Saskatchewan ces jours-ci, mais que nous devons également collaborer avec nos peuples autochtones afin qu'ils puissent utiliser leurs terres d'une manière qu'ils comprennent et qu'ils connaissent.
Nous apprenons d'eux, puis nous travaillons ensemble pour les aider à développer différents produits issus des animaux, dont le caribou, le bison et les animaux terrestres, et des plantes comme la canneberge. Que deviennent leurs terres? Voilà les choses que notre biotechnologie peut contribuer à développer. Nous pouvons utiliser la culture de tissus pour les récoltes horticoles et, encore une fois, nous pouvons aussi utiliser cela.
Nous rencontrons des difficultés propres au niveau universitaire. Tout d'abord, le public ne comprend pas très bien en quoi consiste les biotechnologies et ce que nous faisons. Il y a également tout le problème des barrières non tarifaires; le lin en fait certainement partie. Selon mes calculs, 0,00 donne zéro, mais les discussions ne concernent pas la science sur le plan international; les discussions concernent les barrières.
En outre, il nous faut des infrastructures coûteuses pour garder nos animaux dans le respect des normes du Conseil canadien de protection des animaux. Elles sont extrêmement coûteuses. Il nous les faut pour pouvoir former nos vétérinaires, développer nos vaccins, former nos étudiants et nous permettre d'adopter une approche holistique envers l'agriculture, du sol jusqu'au produit final. Nous allons faire tout ce que nous pouvons pour vous aider à faire passer le message. Nous apprécions ce que vous faites pour nous aider à inciter les étudiants à s'inscrire et à devenir aussi emballés que nous le sommes à propos de l'agriculture et des biotechnologies.
Je vous remercie de votre temps.
Merci beaucoup, madame Buhr.
Nous passons maintenant à Mme Jill Hobbs, professeure en politique, commerce et économie des ressources biologiques.
Je vous prierais de ne pas dépasser 10 minutes, Jill. Je suis heureux de vous revoir.
Je vous remercie de m'avoir invitée à m'adresser au comité ce matin au sujet de l'industrie des biotechnologies.
Avant de commencer ma déclaration, permettez-moi de vous parler brièvement de mes antécédents professionnels et de mon domaine d'expertise. Je suis économiste agricole au Département de la politique, du commerce et de l'économie des ressources biologiques de l'Université de la Saskatchewan. Mon enseignement et mes recherches universitaires portent sur les marchés alimentaires, les préférences des consommateurs pour certaines caractéristiques alimentaires et la structure des chaînes d'approvisionnement agroalimentaires. J'ai déjà effectué des recherches sur les différents aspects du secteur des biotechnologies du point de vue des sciences sociales, y compris, par exemple, sur l'étiquetage des produits alimentaires, la réponse des consommateurs à l'égard de la biotechnologie et les règlements du commerce international concernant les produits de biotechnologie. J'apprécie l'occasion qui m'est donnée de vous faire part de quelques-unes de mes réflexions sur l'industrie des biotechnologies et ses répercussions sur les politiques publiques au Canada.
J'aimerais aborder trois principaux sujets aujourd'hui. Tout d'abord, d'un point de vue global, je commenterai les tendances qui se dégagent sur les marchés alimentaires mondiaux et le rôle de la biotechnologie à ce chapitre. Ensuite, je vous ferai part de certaines observations concernant les impacts économiques des investissements provenant du secteur public sur les recherches agricoles. Pour terminer, je parlerai des défis créés par différentes règles en ce qui concerne l'étiquetage et la ségrégation de produits agricoles qui sont produits grâce à la biotechnologie.
Je commencerai par les tendances globales sur les marchés alimentaires mondiaux. Récemment, nous avons pu constater les conséquences d'un déséquilibre entre l'offre et la demande sur les marchés alimentaires mondiaux, c'est-à-dire l'importante volatilité des prix et les augmentations considérables du prix des produits essentiels, comme le blé, le canola, le soja, le maïs, etc. À mon avis, l'instabilité des prix sur les marchés mondiaux des produits agricoles semble vouloir se poursuivre. L'an dernier, le prix des aliments dans le monde était sur le point d'atteindre un sommet sans précédent.
Pour les consommateurs, l'instabilité des marchés alimentaires mondiaux se traduit par des difficultés économiques et est souvent la source d'agitation politique dans les pays à faible revenu, comme nous avons pu le constater récemment. Pour les producteurs agricoles, l'instabilité des prix des produits agricoles crée de l'incertitude et les exposent à des niveaux plus élevés de risques liés aux coûts pour la production et souvent pour les moyens de production également.
Du côté de la demande, le moteur principal de la demande alimentaire mondiale découlera de la croissance de la population et de l'augmentation des revenus dans les pays en développement. Par exemple, on estime que la demande alimentaire mondiale pourrait doubler dans la première moitié du XXIe siècle à mesure que les consommateurs à faibles revenus vivant dans les pays en développement échappent à la pauvreté. À mesure que les régions où vivent ces populations s'urbanisent de plus en plus, d'où proviendra toute cette nourriture?
Si nous nous tournons vers le côté de l'approvisionnement, les moteurs principaux de l'approvisionnement alimentaire mondial sont les contraintes terrestres et climatiques ainsi que le changement technologique. On estime qu'il existe encore 12 p. 100 de terres arables à l'échelle mondiale, tout au plus, qui ne sont pas actuellement boisées ou touchées par la dégradation et l'érosion du sol. Dans nombre de régions du monde, les contraintes climatiques nous empêchent de transformer la terre en production agricole viable, et on s'attend à ce que les changements climatiques augmentent la fréquence des événements météorologiques extrêmes. Par conséquent, la production alimentaire accrue doit provenir des améliorations apportées à la productivité agricole sous la forme d'un rendement plus élevé et de l'augmentation du potentiel génétique des cultures et des animaux.
Le changement technologique, donc, est le troisième moteur principal de l'approvisionnement alimentaire mondial. Le changement technologique est la raison pour laquelle Malthus a eu tort d'écrire, il y a 200 ans, que la croissance de la population dépasserait la production alimentaire. Le changement technologique est au centre de la croissance de la productivité agricole depuis les 150 dernières années.
Le potentiel d'amélioration de la productivité de l'ère pré-biotechnologique, le soi-disant virage vert, a déjà été réalisé en grande partie. Je dirais qu'il est généralement admis que la biotechnologie offre un grand potentiel aux augmentations du rendement, une tolérance accrue à la sécheresse et à la chaleur, des grains au contenu nutritionnel amélioré et une meilleure résistance aux maladies et aux ravageurs.
Quelles sont donc les implications de cette vue d'ensemble globale pour le secteur agroalimentaire canadien? Bien sûr, le Canada est un exportateur net de nombreux produits agricoles. Pour que le Canada demeure concurrentiel, il sera nécessaire d'améliorer continuellement la productivité agricole et de développer des cultures et du bétail comportant de nouvelles caractéristiques novatrices, comme des qualités nutritionnelles améliorées, des caractéristiques fonctionnelles, etc.
Cela nécessite des investissements continus de la part des secteurs public et privé en R-D agricole. Les données économiques sur les taux de rendement élevés chez les sociétés qui investissent dans la recherche agricole sont très convaincantes. Il est difficile de mesurer avec précision le ratio coûts-avantages de la recherche agricole, car beaucoup de temps s'écoule entre la création des connaissances et la commercialisation et l'adoption éventuelles de la technologie, jumelées à des réactions en chaîne substantielles. Autrement dit, les investissements engagés dans une province ou dans un pays entraînent souvent des réactions en chaîne qui profitent à d'autres régions.
Néanmoins, les retombées sociales produites par les dépenses en recherche agricole sont réputées être considérables. Par exemple, les estimations récentes des retombées produites par les dépenses du secteur public en recherche agricole aux États-Unis se situent en moyenne autour de 19 à 23 p. 100 par année, sur une assez longue période.
Malgré ces importantes retombées attestées dans de nombreux documents, les dépenses du secteur public en matière de recherche agricole ont diminué au Canada et ailleurs. Ce déclin des investissements publics dans le domaine de la recherche agricole est accompagné d'un ralentissement général des taux de croissance de la productivité agricole depuis les années 1990.
À ce propos, la décision récente du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie, le CRSNG, de rayer l'alimentation et l'agriculture de sa liste des secteurs visés par le financement en recherche m'apparaît particulièrement troublante. Compte tenu des déséquilibres dont j'ai parlé plus tôt pour décrire l'offre et la demande dans les marchés agricoles mondiaux, les secteurs privé et public devront continuer d'investir dans les technologies si elles veulent augmenter la productivité et suivre la cadence. En outre, comme nous avons pu l'entendre tout à l'heure, nous avons de plus en plus besoin de partenariats et de réseaux d'expertise publics-privés dans le secteur de la recherche, et ce pour pouvoir faire progresser les connaissances représentatives d'un secteur agricole concurrentiel au Canada; ces connaissances englobent notamment les nouvelles variétés de cultures, les vaccins pour animaux, les produits alimentaires fonctionnels avec bienfaits pour la santé, etc.
C'est donc un moment fort opportun pour examiner l'état du financement que consacre le secteur public à la recherche agricole au Canada, y compris aux biotechnologies agricoles, et l'interaction entre la recherche financée par l'industrie, celle financée par les groupes de producteurs et celle financée par l'État. C'est d'ailleurs un des sujets auxquels s'intéressent les chercheurs de la Canadian Agricultural Innovation and Regulation Network, la CAIRN. Les membres du comité voudront peut-être consulter les travaux de ce réseau de chercheurs dans le cadre de la présente étude.
La deuxième question liée aux politiques publiques dont j'aimerais parler brièvement porte sur la réglementation applicable à l'étiquetage et à la ségrégation des produits dérivés des biotechnologies et, par conséquent, sur l'accès aux marchés internationaux. Les pays ne réservent pas tous le même traitement aux produits agricoles dérivés des biotechnologies, et cette situation peut considérablement accroître les coûts pour les exportateurs. Ces pratiques peuvent également limiter ou restreindre l'accès à certains marchés internationaux. J'estime que cette situation a compliqué la tâche pour les exportateurs canadiens de certains produits agricoles qui tentent d'accéder au marché européen, en raison des contraintes associées à l'étiquetage obligatoire des aliments renfermant des OGM et à la politique de tolérance zéro appliquée à l'égard des produits expédiés en Europe.
Les divergences dans les règlements internationaux qui régissent l'accès aux marchés créent de l'incertitude et imposent à l'industrie le fardeau des coûts de ségrégation de la chaîne d'approvisionnement. L'incertitude et les coûts plus élevés font obstacle aux investissements; je suis d'avis qu'il conviendrait, comme priorité stratégique, de faire pression en faveur d'un accord international sur l'harmonisation des règlements sur l'étiquetage et l'accès aux marchés. Cet accord pourrait être conclu multilatéralement par l'entremise de l'OMC, ou encore bilatéralement par l'entremise de l'accord de libre-échange Canada-UE proposé.
En terminant, je répéterai les trois points principaux: j'estime que les biotechnologies ont un rôle clé à jouer, en ce sens qu'elles doivent contribuer à l'augmentation de la productivité agricole pour répondre à la demande mondiale dans le secteur alimentaire; le renouvellement des investissements du secteur public en recherche agricole est un élément important du casse-tête que représente la concurrence canadienne; enfin, la protection proactive de l'accès des produits dérivés des biotechnologies aux marchés internationaux est un autre élément important de ce casse-tête.
Je vous remercie de votre attention. Vous trouverez dans les copies de ma déclaration des renvois à certains documents pertinents, si vous souhaitez approfondir ces questions.
Merci beaucoup, madame Hobbs.
Nous passons maintenant à M. Kerr, professeur au Département de la politique, du commerce et de l'économie des ressources biologiques.
Monsieur Kerr, la parole est à vous. Je vous prierais de ne pas dépasser 10 minutes.
Merci de m'avoir invité à présenter mes observations au comité au sujet de l'industrie des biotechnologies.
Avant de commencer ma déclaration, je vais vous parler brièvement de mes antécédents professionnels et de mon domaine d'expertise. Je suis économiste agricole au Département de la politique, du commerce et de l'économie des ressources biologiques de la Faculté de l'agriculture et des ressources biologiques de l'Université de la Saskatchewan.
Mes travaux de recherche s'intéressent aux politiques commerciales internationales, et les biotechnologies sont peut-être le sujet le plus controversé de l'heure dans le domaine du commerce international. J'étudie ces questions depuis plus de vingt ans. J'ai publié mon premier article sur les biotechnologies en 1989. Je suis coauteur de quelques ouvrages sur les biotechnologies, dont The Economics of Biotechnology, International Environmental Liability and Barriers to Trade et Regulating the Liabilities of Agricultural Biotechnology. J'ai rédigé plus de 300 textes pour des publications spécialisées, dont beaucoup traitent des biotechnologies.
Je siège au comité de rédaction de quelques revues spécialisées, dont le Journal of Environmental Management, AgBioForum et le Journal of International Food and Agribusiness Marketing. Je suis un des éditeurs fondateurs d'une revue spécialisée dans le domaine des politiques commerciales internationales. Je suis membre de la Société canadienne d'agroéconomie.
Les questions commerciales internationales liées aux biotechnologies se rapportent principalement à la compatibilité ou à l'incompatibilité des régimes de réglementation adoptés dans les différents pays. Par conséquent, bien que je m'intéresse à l'aspect international, j'en ai beaucoup appris sur les régimes de réglementation nationaux qui s'appliquent aux biotechnologies.
Deux enjeux frappants caractérisent l'avenir de l'industrie agroalimentaire mondiale, et les biotechnologies peuvent jouer un rôle important à cet égard.
Tout d'abord, nous serons appelés à produire beaucoup plus d'aliments à l'échelle mondiale. Les prévisions indiquent que la population mondiale passera d'environ 7 à 9,5 milliards de personnes entre 2010 et 2050. Il y aura 2,5 milliards de bouches de plus à nourrir, ce qui correspond à une augmentation de 38 p. 100. Pour pouvoir nourrir tout ce monde, nous devons compter sur une amélioration rapide des technologies, et les biotechnologies agricoles représentent notre meilleur espoir d'y arriver.
Deuxièmement, le climat change. Les espèces que nous avons cultivées jusqu'ici n'auront pas le même rendement dans ce nouveau régime climatique. Nous devrons cultiver de nouvelles espèces, et le faire rapidement. La solution repose du côté des biotechnologies.
Le commerce international des produits agricoles s'intensifiera lui aussi dramatiquement pour faire face à ces enjeux. L'objectif de l'autosuffisance agricole est illusoire. Les régions du monde qui verront leur population et leurs revenus s'accroître le plus rapidement subissent déjà les contrecoups des écosystèmes perturbés et du manque d'eau, problèmes qui ne seront qu'exacerbés par le changement climatique. Si tel est le cas, d'où viendra le surcroît d'aliments?
Ces aliments ne pourront que provenir des régions du monde où les terres agricoles peuvent accroître leur rendement et où la population est relativement stable. Le Canada, tout particulièrement la région des Prairies, est l'un des seuls endroits du monde à offrir ce potentiel. Toutefois, il ne pourra faire face à ces enjeux et voir ses agriculteurs profiter des avantages qui découlent d'une hausse de prix et de rendement que si ces derniers sont dotés des technologies adéquates. Ici encore, la solution repose du côté des biotechnologies.
Les opposants aux biotechnologies invoquent souvent les risques que comportent ces technologies. Quels sont ces risques? Les risques dont il est souvent question sont largement hypothétiques. En d'autres mots, ils sont difficiles à éprouver. Que tendent réellement à indiquer les éléments probants? On oublie souvent qu'au Canada, aux États-Unis et dans quelques autres pays, on mène depuis environ 20 ans des essais à grande échelle dans l'ensemble de la population. Nous consommons tous des aliments génétiquement modifiés. En outre, des cultures génétiquement modifiées sont utilisées dans un vaste éventail d'écosystèmes. Après toutes ces années, rien n'indique qu'ils posent un risque pour la santé humaine ni un risque mesurable pour l'environnement.
Les opposants aux biotechnologies s'empresseront de faire remarquer que l'absence de preuves comme quoi ces éléments comportent des risques ne signifie pas pour autant qu'ils en sont parfaitement dénués. Bien entendu, il faut faire preuve de vigilance et d'assiduité au moment d'homologuer de nouveaux produits génétiquement modifiés et de surveiller la santé humaine et l'environnement après la mise en marché de ces produits. L'information scientifique laisse toutefois entrevoir que le système de réglementation actuel fonctionne et qu'il n'est pas justifié de faire obstacle au progrès biotechnologique.
Les opposants aux biotechnologies voudraient un régime de réglementation basé sur le principe de prudence absolue, qui ne tolère aucun risque. Je me demande ce qui se serait passé si ce principe avait été appliqué aux technologies passées qui ont transformé nos façons de faire. Si nous étions en 1910 et que la nouvelle technologie était l'automobile, je présume qu'on l'aurait bannie. Après tout, en 1910, nous savions que les automobiles causaient des accidents mortels. Il y a fort à parier qu'en 1910, personne n'était à même de prévoir toutes les transformations sociales qui allaient s'opérer grâce à l'automobile, tant les transformations positives, comme la capacité de parcourir de longues distances, que négatives, dont la pollution et les bouchons de circulation. Toutefois, je ne pense pas que bien des gens aujourd'hui diraient qu'ils auraient voulu que l'automobile soit bannie en 1910.
Les nouvelles technologies auront un effet négatif sur le bien-être de certains membres de la société. Les automobiles ont ruiné les industries des chevaux, des carrioles, des harnais et du fourrage. Il en va de la nature du progrès. L'économiste Joseph Schumpeter a qualifié la chose de « destruction créative ». Renier une technologie simplement parce qu'elle aura des répercussions économiques négatives pour certains équivaut à renoncer au progrès et à l'amélioration du bien-être sociétal. C'est très différent que de renoncer à une technologie parce qu'elle comporte des risques pour la santé humaine ou pour l'environnement.
La situation soulève certaines questions liées à la concentration industrielle et au partage de la propriété intellectuelle dans le secteur des biotechnologies, et je laisserai à des personnes probablement plus compétentes que moi le soin d'en parler. Toutefois, je me permets une observation. Un jour, il a été décidé que l'essentiel de la recherche dans le domaine des biotechnologies se ferait dans le secteur privé. Selon moi, la meilleure façon de réduire les influences anticoncurrentielles que peut exercer le secteur privé sur l'agriculture consiste à rééquilibrer la recherche de manière à confier un rôle plus important au secteur public, plus particulièrement aux universités et, comme je l'ai déjà dit, à Agriculture et Agroalimentaire Canada.
Les études démontrent invariablement que la recherche agricole dans le secteur public souffre de sous-financement chronique. Par exemple, les scientifiques du Collège de l'agriculture et des bioressources de l'Université de la Saskatchewan ont immensément contribué au bien-être des agriculteurs des Prairies et de la société canadienne. Ils continuent d'y contribuer, mais ils pourraient le faire bien davantage.
La création de nouveaux produits biotechnologiques dans le secteur public aurait pour effet de diminuer l'influence susceptible d'être exercée par le secteur privé. L'apport des secteurs public et privé aux recherches sur les biotechnologies doit être repensé pour faire face aux enjeux actuels appelant à l'augmentation de la production alimentaire et à l'adaptation au changement climatique. Si le Canada néglige d'emboîter le pas, ce seront d'autres pays qui en récolteront les avantages. Par exemple, la Chine investit des sommes considérables dans la création de biotechnologies, et c'est le gouvernement qui voit à tout.
Enfin, l'accès des produits génétiquement modifiés aux marchés internationaux demeure problématique. L'Union européenne est l'une des principales entraves à l'accès aux marchés. Toutefois, elle semble être en voie de fléchir, tout particulièrement en ce qui concerne les aliments pour animaux et les cultures destinées aux biocarburants. Elle a dû assouplir les règles applicables à l'importation de produits génétiquement modifiés. L'UE a enfin commencé à approuver de nouvelles variétés, même si certains pays membres sont encore loin de voir la chose d'un oeil favorable. Le Canada doit continuer de militer vigoureusement en faveur d'une réglementation fondée sur la science pour ce qui est du commerce des produits biotechnologiques.
Les enjeux que suscitent la croissance de la population mondiale et le changement climatique sont réels. La capacité de réagir à ces défis dépend en partie des biotechnologies. Pour profiter des efforts qu'il faudra déployer pour y arriver, les agriculteurs canadiens doivent améliorer leur efficacité technologique.
Merci.
Merci, monsieur Kerr.
J'entends une sonnerie. Si vous le permettez, avant de passer à M. Potter, il conviendrait peut-être d'attendre le retour au silence. Nous allons nous arrêter quelques minutes.
La sonnerie s'est arrêtée.
Monsieur Kerr, aviez-vous terminé?
M. William Kerr: Oui.
Le président: D'accord. Merci.
André, je vous remercie d'avoir pris brièvement les commandes.
Nous passons maintenant à M. Potter, directeur de la Vaccine and Infectious Disease Organization, rattachée au Centre international de recherche sur les vaccins. Je vous prierais de ne pas dépasser les 10 minutes allouées.
Je vous remercie de m'avoir invité à présenter mes observations ici aujourd'hui.
Je suis désolé de ne pas avoir préparé de documentation pour vous. Je descends tout juste d'un avion en provenance d'Inde et je ne sais plus trop dans quel fuseau horaire je me trouve; essentiellement, je souhaite simplement vous faire part de quelques idées.
Tout d'abord, je vais vous parler un peu de l'organisation. Je sais que vous passerez dans nos locaux cet après-midi pour voir comment les choses se passent. L'organisation a vu le jour en 1975 à titre d'institut de recherche. Elle n'est pas une entité commerciale, mais bien le fruit d'un partenariat conclu entre les quatre provinces de l'Ouest. L'Alberta a fourni les immeubles à proprement parler, la Saskatchewan a fourni les terres et toutes les provinces ont versé un peu de financement destiné au fonctionnement. Aujourd'hui, c'est l'inverse: il est pratiquement impossible d'amener deux provinces à s'entendre sur quoi que ce soit. Vous parlez d'innovation; si vous remontez en 1975, je pense que vous y verrez des façons réellement novatrices de faire les choses.
Bref, l'organisation se consacre essentiellement au secteur de l'élevage, plus particulièrement aux maladies infectieuses, et mon exposé traitera de ces questions. Mes propos s'en tiendront strictement à ces domaines.
Nous avons assez bien réussi à développer des produits et à créer de nombreux vaccins qui se retrouvent aujourd'hui sur le marché canadien, pratiquement tous inédits. Il s'agit de produits novateurs, qui n'existent pas ailleurs. Voilà le genre de tâches à haut risque dont peut s'acquitter l'industrie canadienne. Nous avons permis la création de quatre entreprises différentes; la plus récente est d'ailleurs un des nouveaux centres d'excellence en matière de commercialisation et de recherche axées sur les vaccins.
Enfin, comme quelqu'un l'a dit tout à l'heure, il va sans dire que notre produit le plus important en tant qu'institution du secteur public demeure l'information. Il y a aussi le travail de vulgarisation agricole et les groupes techniques qui appuient l'industrie de l'élevage, plus particulièrement les secteurs de la production porcine et bovine. Nous en sommes d'ailleurs à élargir cette sphère d'activités. L'organisation a connu beaucoup de succès au cours des 35 dernières années.
Je passe brièvement à la question des maladies infectieuses. Celles-ci demeurent importantes, et je pense que nous avons tendance à l'oublier. Les maladies infectieuses sont en réalité la principale menace qui plane sur l'industrie de l'élevage au Canada. Rappelez-vous l'unique cas d'ESB en 2003. Nous savons tous ce qui s'est passé après. Nous commençons à peine, huit ans plus tard, à retrouver les niveaux de 2002. Voilà le temps qu'il a fallu pour s'en remettre. Bien que les données publiées indiquent que cette situation a coûté 6,5 milliards de dollars, ce chiffre se situe probablement autour de 50 milliards de dollars. Ce fut un risque incroyable pour l'industrie.
Nous voyons le même genre de situation dans l'industrie de la volaille. Je ne saurais compter le nombre de fois que la grippe aviaire a entraîné l'abattage massif d'oiseaux dans la vallée du Fraser et ailleurs au pays.
Nous l'avons vu avec la grippe porcine il y a un an et demi. Nous savons tous ce qui s'est passé dans le secteur humain; toutefois, les répercussions sur l'industrie porcine et sur les entreprises de transformation comme les Aliments Maple Leaf ne sont pas connues du public. Les marchés d'exportation ont disparu.
Nous sommes actuellement aux prises avec un problème commercial. Ce ne sont pas nécessairement les pertes quotidiennes attribuables à la maladie qui sont problématiques, même si elles demeurent importantes; ce sont les marchés commerciaux qui sont en cause. Que pouvons-nous faire pour contourner ce problème du point de vue de la recherche? C'est difficile.
Nous devons adopter des approches proactives. En tant que pays, nous tendons à réagir. Nous attendons qu'il se passe quelque chose et nous voyons ensuite ce que nous pouvons faire pour y remédier. Si nous voulons une industrie concurrentielle, ce n'est pas assez.
J'entends beaucoup de choses au sujet de l'innovation. Je suis à peu près convaincu que personne ne comprend ce que signifie le mot innovation — ou peut-être, au contraire, que tout le monde y voit clair sauf moi.
L'innovation n'est pas synonyme d'excellence. Tous les programmes que nous avons créés traitent d'excellence, comme ils le devraient; cependant, si nous souhaitons encourager l'innovation, nous devons prendre conscience que celle-ci suppose la transformation. Cela signifie de nouveaux marchés et de nouvelles façons de faire. Nous devons nous éloigner du connu. L'excellence mérite d'être récompensée; toutefois, si nous voulons encourager l'innovation au sens pur au Canada, nous devons faire les choses un peu différemment, comme Bill Gates l'a fait lorsqu'il a créé son programme de financement destiné aux vaccins il y a six ans. Il a financé des choses qui n'avaient pas d'allure, mais c'est ce qu'il faut faire. Il faut sortir des sentiers battus.
Que nous faut-il de plus? Notre pays a besoin d'une infrastructure. Je pense que nous y arrivons, sans plus. Je sais que d'ici 10 jours s'achèvera la construction d'une installation de recherche de 140 millions de dollars consacrée aux maladies infectieuses sur le campus de l'Université de la Saskatchewan. Le problème est le suivant: nous avons cette merveilleuse infrastructure — la meilleure au monde — mais comment l'exploiterons-nous? Nous nous butons contre un mur lorsque vient le temps d'exploiter ces installations. Nous devons le faire par l'entremise de partenariats. C'est la seule solution possible.
Nous avons plusieurs programmes de financement que je qualifierais de très bons. Le problème auquel nous nous butons en tant que chercheurs et organisations de recherche, c'est la façon dont ils sont administrés. Parlant d'innovation, prenons par exemple le programme Agri-flexibilité. C'est un programme formidable, en ce sens que le public y participe tout comme le secteur privé. Toutefois, personne ne peut se permettre d'attendre plus d'un an pour obtenir une décision quelconque. Ce n'est pas possible. La bureaucratie pose problème. Je pourrais vous énumérer plusieurs de ces programmes, pas uniquement à Agriculture Canada, mais aussi à Industrie Canada, Affaires étrangères et ailleurs. Nous devons avoir l'esprit vif pour innover, sans quoi l'industrie en souffrira.
Nous devons réellement favoriser les partenariats. M. Cross a parlé de la valeur des organisations de recherche fédérales, et je suis entièrement d'accord avec ses propos. Le Conseil national de recherches est un véritable fleuron dans le domaine des vaccins. C'est une organisation dotée d'une culture de recherche, qui comprend le domaine. Le problème naît lorsque les organisations du secteur privé tentent d'interagir avec un organisme fédéral, ce qui m'amène à vous parler d'une de nos entreprises, PREVENT. Lorsque cette entreprise tente d'interagir avec un organisme fédéral, nous sommes encore dans cet état d'esprit des années 1970 où tout appartient à l'État. Les choses ne fonctionnent pas ainsi. Nous devons créer de véritables partenariats pour pouvoir progresser.
Enfin, j'aimerais dire ceci: au cours des cinq dernières années environ, nous avons vu une consolidation incroyable dans le domaine des maladies infectieuses, tout particulièrement dans le secteur biotechnologique, et aucune entreprise canadienne n'est véritablement active dans le secteur. Ce sont toutes des multinationales. Beaucoup de gens voient cette situation comme une menace ou un problème. Je la vois plutôt comme une occasion. Nous devons remettre la biotechnologie sur les rails dans le secteur des maladies animales infectieuses. J'estime qu'il existe de réelles possibilités qui ont besoin de financement. Je ne parle pas ici de subventions, mais bien d'investissements.
Une étude réalisée pour le compte du gouvernement de la Saskatchewan il y a environ dix ans suggère qu'un investissement dans le domaine des maladies infectieuses pour le secteur de l'élevage crée des retombées de quelque vingt fois la valeur des investissements. Il s'agissait dans ce cas-ci d'un investissement de 60 millions de dollars, qui a généré des retombées de quelque 1,2 milliard de dollars en dix ans pour la province de la Saskatchewan. Si mon fonds de pension avait eu le même rendement, je ne serais pas ici pour vous parler aujourd'hui. C'est un rendement incroyable. Le type ou la cible ont peu d'importance; le vaccin antivariolique pour humains a généré des retombées de 27 $ pour chaque patient immunisé.
Ce sont des technologies incroyablement puissantes, mais nous devons apprendre à les maîtriser et recommencer à fabriquer ces produits au Canada. Si nous continuons de développer la propriété intellectuelle... Nous sommes passés maîtres dans cet art au Canada: dans le domaine des vaccins, nous surpassons tous les autres pays par habitant, mais nous exportons tous les produits aux États-Unis ou bien en Europe, avant de les racheter. Cette situation doit changer.
Je terminerai là-dessus.
Merci beaucoup, monsieur Potter.
Nous passons maintenant à M. Bert Vandenberg, professeur à l'université. Monsieur, je vous prierais de ne pas dépasser les 10 minutes allouées.
Merci de votre invitation.
Je vais d'abord vous parler un peu de moi. Mon travail porte sur les légumineuses. J'ai grandi en Ontario et les plantes ont toujours fait partie de ma vie. Mon père était un immigrant néerlandais qui cultivait dans des serres. J'ai commencé à travailler à deux ans; c'est comme ça dans les familles néerlandaises.
Quand je suis arrivé à Saskatoon, il fallait partir de zéro. Je n'ai pas eu de contact avec le système de recherche fédéral, alors je ne peux pas trop en parler. J'ai collaboré avec le gouvernement provincial, les agriculteurs et mes collègues de l'université, surtout. Nos débuts ont été très modestes. Nous avions peut-être 30 000 acres, comparativement à environ 7 millions aujourd'hui. Albert Einstein a dit un jour que si on sait ce qu'on fait, ce n'est pas de la recherche. Ça s'appliquait bien à nous. Au début, nous ne savions rien; c'était de la vraie recherche.
J'aimerais passer en revue ma liste de dix commentaires. En anglais, ils commencent tous par « b ».
Le premier point, c'est la biologie. Un des facteurs clés de notre réussite, c'est que dès le départ, nous avons compris que si nous ne connaissions pas la biologie de nos végétaux, nous ne pouvions pas comprendre l'économie. Dans notre cas, avec les légumineuses, une chose essentielle, c'était que le coût des semences était très élevé pour une culture assez risquée. Nous avons changé le modèle économique. Au lieu d'essayer de créer des entreprises de semences qui percevraient des redevances en imposant ce fardeau aux agriculteurs, nous avons dit: « Prévoyons plutôt un prélèvement à la fin, pour que les agriculteurs financent la recherche. » Il y a seulement quatre mois d'attente, pour le même prix, et l'agriculteur n'a pas à risquer que les semences ne lèvent pas. C'est devenu fondamental pour nous — gagner la confiance des agriculteurs.
Ce qu'il y a d'intéressant avec les légumineuses, c'est que le Canada a été l'un des derniers pays à découvrir qu'il en faut dans un système agricole. Nous ne l'avions pas compris. Le fait que nous étions sous un couvert de glace il y a 10 000 ans a peut-être quelque chose à y voir. C'est une pratique répandue presque partout ailleurs dans le monde.
Il est fondamental de comprendre la biologie. C'est tout un défi. J'estime que seulement 20 p. 100 des élèves du secondaire suivent un cours de biologie. Et peu de gens lisent les étiquettes des aliments, ou les comprennent. Je crois que 20 p. 100 des gens comprennent les étiquettes. Il y a peut-être un lien avec ce que je disais sur l'école secondaire.
Le deuxième point, c'est la biotechnologie, un mot employé souvent galvaudé d'après ce que j'ai entendu au fil de ma carrière. Je sais que vous vous concentrez peut-être sur une définition étroite du terme — transgenèse —, mais pour le secteur de la phytologie, c'est une boîte à outils toujours grandissante, et même ce que nous appelons la transgenèse pourrait être supplanté par la génomique. C'est ce que nous espérons dans le milieu des petites cultures, parce que nous ne pouvons pas nous permettre la transgenèse. Nous n'en avons jamais fait de cas vu que c'était au-dessus de nos moyens. Peut-être qu'avec de l'information génomique, nous pourrons faire mieux, à moindre coût, et avec plus de précision. Nous comptons là-dessus.
Cette boîte à outils est remplie de choses nouvelles et anciennes. Nous utilisons encore de vieilles technologies que j'appelle « biologiques », de vieux procédés comme des greffes. Pourquoi pas? C'est efficace, et il ne faut pas restreindre ce que nous voulons accomplir. Même l'approche transgénique pourrait disparaître un jour. Il n'y a rien de sûr.
Le troisième point, c'est la biodiversité. Dans une optique biologique, il s'agit de conserver le plus possible de ce qui reste de notre écosystème. Il faut protéger sa diversité. C'est le système le plus productif qui soit, en fait. Plus la biodiversité du système sera grande, mieux ce sera pour nous. En économie, nous parlerions de diversification de notre portefeuille.
J'essaie de tisser des liens entre la biologie et l'économie pour que vous puissiez en discuter. La particule « bio » est placée partout de nos jours. Il y a bien des yogourts, et même des chaussures « bio ». C'est un mot qui a perdu de son sens en quelque sorte.
Mais dans un endroit comme la Saskatchewan, on assiste à la biodiversification. C'est une harmonisation de la biodiversité et de l'économie. Nous essayons de produire plus de variétés de lentilles, et non de réduire leur nombre. Nous faisons une comparaison avec les voitures. Il y a bien plus de marques de voitures aujourd'hui qu'il y en avait quand j'étais enfant.
Aujourd'hui, il y a quatre millions d'acres de jachères d'été. En 1970, il y en avait 24 millions, et il y a seulement 44 millions d'acres de terres cultivables, alors c'est incroyable. Ça représente 20 millions d'acres cultivées de plus. En 1970, les 20 millions d'acres étaient surtout des cultures céréalières.
Nous avions alors presque trois millions d'acres de canola. Depuis, il y en a environ quatre acres et demi de plus. Les légumineuses, qui n'était pas cultivées avant, couvrent maintenant sept millions d'acres. Et tout ça sans la technologie transgénique. Nous avons adapté les paramètres économiques à la diversité et aux besoins des agriculteurs.
On voit ce phénomène dans l'ensemble du pays. En 1970, on comptait 300 000 acres de cultures de soja; il n'y avait pas de lentilles ni de pois. Il y a maintenant environ sept millions et demi d'acres de chaque culture. C'est une belle réussite pour le Canada.
C'est que j'appelle la tendance à la hausse, qui correspond au cinquième point.
Le sixième point, c'est le grenier. J'ai grandi avec l'idée que le Canada était le grenier du monde — c'est ce qu'on lisait dans les revues —, mais en fait, nous produisons de 3 à 5 p. 100 des cultures mondiales de blé et d'orge et moins de 2 p. 100 du maïs et du soja. Globalement, nous produisons une moins grande part des cultures mondiales qu'en 1970.
Est-ce que nous prenons du retard? Que se passe-t-il? C'est difficile à dire, mais nous produisons 30 p. 100 des pois et 45 p. 100 des lentilles à l'échelle mondiale. Il ne s'agit pas de cultures énormes à cette échelle, mais leur consommation s'accroît à un rythme plus rapide que la population. Ce que les consommateurs nous disent, c'est qu'ils aiment ce que nous produisons et qu'il ne faut pas avoir peur du changement dans nos cultures. Nous sommes de toute évidence le plus grand producteur et exportateur dans ce secteur.
Le septième point est l'accroissement des gains génétiques. C'est le but véritable de l'amélioration génétique des céréales. Il faut augmenter le rendement et accumuler les gènes qui donnent des combinaisons augmentant la productivité. Si le taux de gain génétique n'est pas supérieur au taux de croissance de la population, le coût des aliments va augmenter. Nous le voyons à l'échelle mondiale. Je dirais que dans le cas de l'éthanol, les politiques sur les biocarburants pourraient même jeter de l'essence sur le feu. Le jeu de mots était trop facile!
Nos clients sont des pays où la population est nombreuse et continue à croître. Dans la plupart des cas, 60 p. 100 de la population a moins de 30 ans, donc l'impact va se poursuivre. Ces personnes vont vivre et manger plus longtemps, et le taux s'accroît de plus en plus vite.
Le huitième point est la biofortication et ce qui s'ensuit. On parle ici d'une amélioration génétique qui vise à améliorer la qualité nutritionnelle des aliments de base. Nous travaillons là-dessus à l'échelle internationale. Le concept est simple, mais il nécessite un changement important dans nos méthodes d'amélioration des végétaux. Il faudra de nouvelles technologies biologiques, et je ne crois pas que la simple transgenèse suffira. On ne peut pas se contenter de modifications comme l'ajout d'un gène. C'est plus complexe, mais c'est probablement juste à notre portée. Nous croyons que ce sera vraiment utile pour les petites cultures et que ça nous permettra d'exploiter la biodiversité, donc c'est un domaine clé où il pourrait y avoir des investissements. On améliorera la nutrition, le rendement, la fixation de l'azote, et tout ce qui nous ramène au principe qu'il faut comprendre le lien entre la biologie et l'économie. Il faut se concentrer là-dessus à long terme.
Le neuvième point est un méli-mélo d'idées sur la nutrition.
De toute évidence, la santé humaine est liée à l'état nutritionnel. C'est un aspect de notre discussion sur la biofortification. Deux milliards de personnes ne consomment pas assez de fer et n'ont pas assez d'aliments de base nutritifs. Et là où nous avons assez de nourriture, il y a aussi de la malnutrition parce que nous ne savons plus comment nous nourrir.
Ceux qui jouent un rôle dans l'agriculture doivent bien comprendre qu'il faut éduquer la population. Nous devons éduquer les enfants, parce qu'aujourd'hui les parents d'enfants d'âge scolaire ne savent rien sur la nutrition, ni sur l'agriculture, ni sur la nourriture. La nourriture, c'est ce qu'on achète à l'épicerie ou dans un restaurant.
Nous commençons à voir d'importants changements dans le coût de nos soins de santé. Ces changements vont s'accélérer à cause d'une alimentation inadéquate. Le ministère de l'Agriculture pourrait peut-être prendre les devants en informant les gens sur ce qu'ils mangent. Vous verriez peut-être qu'on revient aux liens entre la biologie et l'économie. Si les gens ne comprennent pas ce dont ils tirent leur subsistance, ils ne comprendront pas les éléments économiques connexes. Les soins de santé sont définitivement liés à ce qui se passera à l'avenir.
Mon dernier point concerne les obstacles à l'innovation. Sur ce plan, il est très utile de comprendre ce que j'ai dit sur la biologie. Bien des mécanismes de réglementation constituent des entraves aux gains génétiques. Les positions prises dans le système de réglementation ont un impact. Nous avons des règles vieilles de 20 ans en ce qui concerne les obstacles à l'innovation, et nous devons les revoir.
Je parle notamment des végétaux à caractères nouveaux. Au Canada, nous réglementons toutes les innovations comme s'il s'agissait d'OGM. C'est ridicule. C'est comme attacher ses souliers ensemble avant d'aller courir. Ça n'a pas de bon sens.
Le secteur des aliments non-OGM utilise encore de nos jours nombre de techniques très anciennes, qui étaient utilisées par les agriculteurs il y a 6 000 ans. Nous pouvons utiliser l'information disponible, les connaissances que nous avons, et nous pouvons former des gens pour que les mêmes gains soient obtenus grâce à la simple analyse de l'ADN. Pourquoi ne mettons-nous pas l'accent là-dessus? Cela nous permettrait d'éluder tout ce problème.
Comme je l'ai dit, les OGM ne seront peut-être, selon moi, qu'une technologie passagère dans le domaine des cultures végétales. Dans le cas des légumineuses, nous avons délibérément rejeté les modifications génétiques, parce qu'elles causaient déjà beaucoup de remous sur les marchés, ce qui se répercutait particulièrement sur notre clientèle. Nous exportons du blé dans 25 pays seulement, mais nous exportons des légumineuses dans 140 pays. Comment résoudrons-nous l'équation? C'est un problème très complexe, alors nous avons décidé de ne pas suivre cette voie.
Voilà ce que j'avais à dire.
Merci beaucoup, monsieur Vandenberg.
La parole est maintenant à M. Wartman, pour 10 minutes.
C'est un plaisir de vous revoir, monsieur Wartman.
Merci. C'est un plaisir d'être ici aujourd'hui.
C'est vraiment un privilège de pouvoir comparaître devant le Comité de l'agriculture, en particulier pour discuter de cette question au nom du Collège de l'agriculture et des ressources biologiques. Je suis, dans une certaine mesure, associé au collège depuis plus de sept ans. J'ai été en mesure d'apprécier non seulement le travail qui se fait au collège, mais également tout le travail accompli par le groupe d'agrobiotechnologie, qu'il est, à mon sens, important de garder à l'esprit quand nous examinons ce qui se passe dans ce secteur.
Un des plus importants défis dont on discute au sein du conseil concerne l'obtention des fonds qui permettront de développer ces technologies, qui sont essentielles à notre avenir. Les fonctions que j'exerce au collège sont liées au financement, et je peux vous dire que, dans la conjoncture actuelle, le financement présente des défis uniques. Nous avons assurément besoin du soutien de nos gouvernements provinciaux et fédéral pour pouvoir mettre en place l'infrastructure essentielle au développement de ces technologies.
Le régime fiscal de notre pays a énormément changé depuis un certain nombre d'années. Les impôts sur les bénéfices et sur le capital sont de moins en moins considérables, et ce changement est certainement avantageux pour les entreprises. Nous pouvons constater cela en examinant les bilans des banques et des entreprises. Toutefois, il n'y a pas eu de changement correspondant pour ce qui est des montants investis dans ces activités de développement essentielles. Par ailleurs, tandis que les fonds publics diminuent, par suite des modifications apportées au régime fiscal, il devient de plus en plus difficile d'obtenir de l'aide des entreprises, et nous nous tournons donc vers les gouvernements fédéral et provinciaux, puisque nous nous trouvons dans une situation où votre soutien est nécessaire à l'avancement de ces technologies qui sont d'une importance extrême.
Quand je parle des biotechnologies en agriculture, je parle d'un ensemble d'outils, comme Bert l'a si bien dit, qui sont à notre disposition et que nous avons développés, des outils qui ne sont pas seulement essentiels à l'avenir de notre économie, ici, mais qui sont également essentiels, selon moi, à l'avenir du monde entier.
Lorsque nous pensons aux défis les plus importants, à l'échelle globale, nous pensons aux problèmes environnementaux, aux problèmes liés aux climats extrêmes et à l'accroissement de la population. Quand j'examine les travaux que font les membres du groupe d'agrobiotechnologie, je me dis qu'il est essentiel que nous travaillions dans chacun de ces domaines.
Dans le domaine de l'environnement, nous travaillons à élaborer des produits végétaux et des produits pour les sols qui nous permettront d'atténuer les problèmes environnementaux ou de résoudre ces problèmes. Pour les zones des sables bitumineux et certaines de nos zones minières, nous élaborons des mesures de restauration efficaces en ce qui concerne la végétation. Si nous souhaitons faire avancer les choses dans cette optique, nous devons être en mesure d'atténuer les impacts.
L'adaptation est un autre secteur clé auquel nous consacrons des efforts, dans le domaine de la biotechnologie en agriculture. Nous savons que les climats extrêmes que nous avons connus au cours de la dernière décennie et que les changements environnementaux survenus au cours de la même période ont fait en sorte que beaucoup d'organismes nuisibles que nous n'avions jamais rencontrés ici se sont installés plus avant dans notre hémisphère. Nous devons être en mesure d'adapter le travail que nous faisons, mais nous devons également rendre possible l'adaptation de nos végétaux. C'est ce que nous faisons au moyen de nos programmes de sélection des végétaux. Et nous faisons la même chose avec les animaux. Comment pouvons-nous rendre les animaux plus résistants aux maladies? Comment pouvons-nous rendre nos plantes plus résistantes, comme d'autres l'ont dit, à la sécheresse, au gel et — de nos jours, Brad — à des conditions excessivement humides? Nous travaillons sur toutes ces questions au collège.
Finalement, il y a la production. Compte tenu des projections de population actuelles, il nous faudra accroître considérablement notre production alimentaire. Les travaux de recherche et développement que nous réalisons au collège portent sur l'accroissement de la production et visent à assurer la production en rendant nos végétaux et nos animaux plus résistants.
Ces activités sont essentielles, mais pour faire ce travail, nous devons absolument avoir l'infrastructure nécessaire, et cette infrastructure coûte cher.
Au cours de la dernière décennie, nous avons établi des partenariats très rentables avec le gouvernement provincial et le gouvernement fédéral. Nous avons pris le fonds de transition du Cadre stratégique pour l'agriculture, et nous l'avons entièrement affecté — c'est-à-dire 54 millions de dollars — à la recherche dans ce domaine. Cet investissement a bénéficié à nombre des organisations dont vous avez entendu parler aujourd'hui. Il a aidé à mettre en place certaines de nos infrastructures les plus rentables, que vous visiterez plus tard, comme le centre de développement des cultures et le nouveau laboratoire d'innovation en cultures céréalières.
Un grand nombre de ces organisations ont bénéficié de ces fonds, mais il faut que le financement soit maintenu. On ne peut pas se contenter d'une intervention unique, puis se dire qu'on a fait ce qu'il fallait et que le dossier est maintenant réglé. Nous devons continuer de moderniser notre équipement et notre infrastructure afin qu'ils soient à la fine pointe de la technologie si nous voulons vraiment progresser de la manière dont nous devons clairement progresser.
De nos jours, l'un des plus importants besoins dont me parlent les représentants d'entreprises que je rencontre, ou d'autres gens du secteur des biotechnologies agricoles et de l'alimentation, concerne nos étudiants des cycles supérieurs. Ils ont besoin des connaissances de ces étudiants. Dans le domaine des biotechnologies, nos étudiants sont probablement le meilleur bioproduit que nous puissions offrir. Ces étudiants sont des chercheurs, ils ont fait des études approfondies et ils ont eu l'occasion de travailler avec des gens comme Bert, Jill, Bill et Mary. Ils comprennent vraiment ce dont nous avons besoin pour aller de l'avant dans le secteur des biotechnologies agricoles.
Nous avons également besoin d'installations. Il nous faut à la fois des établissements d'enseignement — qui, je le sais, ne relèvent pas du fédéral — et des établissements de recherche, qui attireront les étudiants. Nous devons être en mesure d'offrir des programmes d'études de qualité. C'est un aspect fondamental. Donc, lorsque nous nous interrogeons aujourd'hui sur ce qui est fondamental, au Collège de l'agriculture et des ressources biologiques, nous gardons à l'esprit que l'éducation et le développement de nouveaux chercheurs sont des enjeux primordiaux.
Le nombre de chercheurs qui travaillent à la sélection des végétaux est actuellement insuffisant. Je crois que j'ai entendu un certain nombre de personnes parler de ce problème. Le seul moyen de combler cette lacune est de se doter de très bons systèmes d'éducation et d'une infrastructure à l'avenant, qui attireront les étudiants et leur permettront d'acquérir les connaissances dont ils ont besoin.
Aujourd'hui, trois projets majeurs sont en cours au collège. Il y a le renouvellement du phytotron, c'est-à-dire une modernisation du phytotron, que vous n'aurez peut-être pas l'occasion de voir aujourd'hui. Je sais que certains d'entre vous l'ont déjà vu. Il s'agit de notre installation de culture végétale en environnement contrôlé. Il produit trois cycles complets par année. Il est absolument essentiel, en tant qu'outil biotechnologique qui rend possible la sélection des végétaux. Si nous ne l'avions pas, ou qu'il ne fonctionnait pas à pleine capacité, les répercussions sur l'économie seraient immenses. Les répercussions économiques sont énormes si l'on attend ne serait-ce que quelques années pour procéder à certains de ces nouveaux développements dans le domaine des cultures végétales.
Nous avons besoin d'une nouvelle installation de production laitière et nous travaillons à sa mise au point. Actuellement, les gens diront que l'industrie laitière n'est pas très importante en Saskatchewan, et ils auront raison, mais cette installation et la recherche qui s'y fait ont, à tout le moins, une incidence sur tout l'Ouest du Canada. Elle est utilisée par le collège de médecine vétérinaire, qui forme des vétérinaires pour tout l'Ouest du Canada, et pour l'ensemble du Canada, en réalité. Il y a aussi d'immenses troupeaux laitiers en Colombie-Britannique, d'où nous viennent beaucoup d'étudiants. Ces étudiants recevront la formation, donc, même si ça ne semble pas essentiel de prime abord, les répercussions à grande échelle sont capitales pour l'ensemble du groupe d'agrobiotechnologie. Les recherches en cours à VIDO-InterVac se font également à partir des animaux que nous avons là-bas.
Notre troisième projet, une nouvelle installation pour les bovins de boucherie — et qui est également, à mon avis, un projet clé — a un certain nombre de points en commun avec l'installation de production laitière. Nous savons quelles répercussions a eu la maladie de la vache folle et à quel point elle a fait mal à notre secteur de l'élevage bovin, qui connaissait à l'époque, il faut le dire, une croissance intéressante. Dans notre province, nous avons reconnu que nous ne pouvons pas nous contenter de produire les bovins d'engraissement, puis de les expédier en Alberta, où ils seront engraissés. John a abordé cette question: nous devons être en mesure de réaliser le cycle en entier ici, et cela comprend la recherche sur l'engraissement des bovins. Nous avons besoin d'un établissement où s'effectuera la recherche et où l'on s'occupera également de sensibiliser le public. Nous avons besoin d'établissements d'enseignement public pour les engraisseurs de bovins de boucherie et les éleveurs qui travaillent dans ce domaine.
Nous devons être en mesure de produire du boeuf de première qualité en tenant compte à la fois des gènes de ce dont nous nourrissons les bovins et du patrimoine génétique des bovins eux-mêmes, de manière à obtenir les meilleurs produits qui soient. Le boeuf Sterling Silver est le boeuf le plus haut de gamme de Cargill. Si les gens de Cargill savent que le patrimoine génétique est bon, et que les aliments qui ont servi à engraisser ces animaux, tout au long du processus, sont également de qualité, ils sauront alors que les bovins produits satisferont aux normes de la catégorie Sterling Silver.
Nous avons besoin de soutien pour les éléments fondamentaux, et ce soutien ne provient pas, en général, du secteur privé. Si nous souhaitons avancer dans le domaine des biotechnologies, et si nous voulons répondre aux besoins qui se manifestent à l'échelle mondiale, nous avons besoin d'une assise, et cette assise est une infrastructure solide, de qualité et continuellement mise à niveau, qui incitera nos étudiants à s'orienter vers ce domaine. Cela nous permettra de former des étudiants, de premier cycle et des cycles supérieurs, qui seront capables d'accomplir un travail incroyable, en contribuant à faire avancer tout le secteur des biotechnologies.
Quand on entend parler du rendement sur les investissements dans ce secteur, on comprend que ça ne peut être que bénéfique pour notre économie. Quand nous aurons passé en revue certains éléments de notre régime réglementaire, afin qu'il ne soit plus nécessaire de s'enregistrer à l'étranger et que nous puissions satisfaire aux exigences dans un délai de deux ou trois ans, au lieu d'attendre cinq ans ou davantage, je crois que nous aurons accompli un progrès considérable.
Votre comité peut contribuer à faire avancer les choses, en exerçant des pressions sur les décideurs pour s'assurer que les fonds soient attribués adéquatement. Nous avons été très préoccupés par l'abolition des subventions du CRSNG relatives à l'alimentation.
Merci, monsieur Wartman.
Nous allons maintenant entendre M. Hanmer. Il a lui aussi déjà comparu devant le comité. C'est un plaisir de vous revoir, Brad.
Monsieur le président, membres du comité, je vous remercie pour cette occasion de témoigner devant vous.
Mon nom est Brad Hanmer. Je suis président-directeur général de Hanmer Ag Ventures. Nous exploitons une ferme de 24 000 acres situé à deux heures de route à l'ouest de Saskatoon. Nous y produisons des céréales, des graines oléagineuses et des légumineuses. Je suis diplômé de l'Université de la Saskatchewan en agroéconomie et depuis, une acre à la fois, j'étudie au doctorat en affaires agricoles.
J'ai siégé pendant six ans au conseil d'administration de la Saskatchewan Canola Growers Association, dont trois ans à titre de président. Par la suite, j'ai siégé pendant trois ans au conseil d'administration de Financement agricole Canada. Je présente les observations qui suivent à titre personnel uniquement.
Je commencerai en faisant preuve d'un peu d'audace. Depuis ma première récolte en 1996, après avoir reçu mon diplôme de l'Université de la Saskatchewan, nous avons connu trois avancées technologiques d'une grande importance: la première est sans aucun doute Internet. Cette avancée a contribué à rétrécir les écarts et nous a donné accès à toute l'information nécessaire, même au coeur de la Saskatchewan rurale. Voilà la première étape.
Au deuxième rang, j'opterais pour le GPS et les technologies connexes. Ces technologies nous ont permis d'améliorer notre efficacité à l'égard de l'agriculture de précision, grâce à la localisation géographique, à l'imagerie satellite combinée aux cartes de fertilité et à d'autres technologies. Elles ont été essentielles à notre profitabilité.
Néanmoins, je dirais que la plus grande avancée que nous avons connue concerne la génétique du canola. Malgré tout le respect que je dois à M. Vandenberg et à ses propos, je vais me concentrer plus étroitement sur le canola pour donner un exemple des bienfaits de la génétique pour un agriculteur comme moi.
J'imagine qu'on me considère encore, à la fin de la trentaine, comme un jeune agriculteur. Sur notre ferme, avant l'arrivée du canola résistant aux herbicides, comme Bert l'a dit, nous étions surtout une province de céréales et de jachères. Mon père était quelqu'un de novateur et au milieu des années 1980, nous avons ajouté des légumineuses dans notre rotation. Notre problème avec les légumineuses, c'est qu'elles étaient notre seul moteur économique. Le blé, dont je parlerai plus tard au cours de mon exposé, n'a jamais réussi à générer un revenu suffisant et un rendement stable. Les lentilles, les pois et les pois chiches ont donné des résultats fantastiques grâce aux travaux de MM. Al Slinkard et Bert Vandenberg — ils ont changé la donne dans notre province —, mais dans notre coin du monde, le canola est roi. On l'appelle la culture cendrillon, et je pense que le canola est le moteur économique le plus important que j'aie connu. Je pousserais l'audace jusqu'à dire que sans le canola, je ne serais pas là aujourd'hui. Le canola nous a permis d'obtenir un rendement économique stable année après année.
Voici quelques éléments dont je voulais vous parler. Pour la Saskatchewan et le Canada, 1997 a été la première année où on a permis la culture à des fins commerciales du canola à composante nouvelle résistante aux herbicides. Avant cette date, la production du canola était surtout limitée à la partie nord de la région céréalière parce qu'on avait du mal à contrôler la mauvaise herbe. Par ailleurs, à l'époque, on faisait rarement appel aux technologies d'ensemencement direct, alors quand nous avons eu accès à cette technologie, nous avons pu ajouter une récolte, celle du canola, qui était un moteur économique. On peut le cultiver en grandes quantités, sur une grande superficie qui aurait auparavant été en jachère ou offert un faible rendement. Sans cette avancée, mes parents, mes frères et moi n'aurions autant pu faire croître cette entreprise.
Parmi les résultats que nous avons observés, il y a tout d'abord la réduction des coûts des produits chimiques. Nous n'utilisons plus la même quantité de produits chimiques depuis que nous cultivons le canola résistant aux herbicides. En deuxième lieu, nous avons réduit notre consommation de carburant. Nos factures ont grandement diminué puisque nous n'avons qu'à passer une seule fois pour l'ensemencement. Nous utilisons beaucoup moins de carburant grâce à cette culture. Troisièmement, la santé du sol s'en est trouvée améliorée. Je suis agronome de formation, je sais que nous avons amélioré notre pH, notre capacité de rétention d'eau et notre capacité d'échange cationique, en parallèle avec la culture de légumineuses. Nous obtenons des rendements que nous n'aurions jamais osé imaginer et en même temps, nous respectons l'environnement et favorisons une meilleure santé des sols.
L'hybridité du canola, qui est apparue au milieu des années 2000, a été le deuxième facteur déterminant pour nous. Nous obtenons un rendement pour le canola qui égale et surpasse parfois le rendement céréalier de notre région de la Saskatchewan.
Grâce à ces rendements stables, nous avons assisté à une augmentation du nombre de jeunes agriculteurs. On ne peut élaborer un plan d'affaires stable et obtenir du financement si on n'a pas un modèle de stabilité. Des discussions ont cours en ce qui a trait à la stabilité des investissements dans le domaine des biosciences; la même chose s'applique à la base chez les agriculteurs. Nous avons besoin de stabilité et c'est ce que les biotechnologies ont fait pour plusieurs parties de cette province. Elles ont favorisé la stabilité.
Sans ces innovations, je ne crois pas que je prendrais part aussi active à l'explosion des denrées que nous connaissons aujourd'hui. Au fond, la production de canola semble être un moyen de traverser des moments très difficiles. Certains témoins en ont parlé. C'est le résultat direct des composantes nouvelles et de l'hybridation.
Certaines des innovations actuelles touchent à peu près tous les problèmes, que ce soit les insectes, les maladies ou les pathogènes. Elles vont continuer à améliorer la rentabilité de notre ferme.
Les agriculteurs qui vivent dans la région productrice de maïs savent ce que les avancées biotechnologiques ont permis de faire dans le cadre de la lutte contre les chrysomèles des racines du maïs, qui sont des cousines des chrysomèles des racines du maïs américaines; je crois qu'il s'agit de la même espèce. Il y a également le charançon du maïs. Ces deux avancées permettent de ne pas contrôler une espèce non invasive avec des insecticides parce que ceux-ci visent ces insectes dans les champs avec précision. Ces mêmes innovations seront bientôt disponibles pour le canola.
J'aimerais ouvrir une petite parenthèse. J'ai eu l'honneur de participer à une conférence au Costa Rica il y a deux semaines, où le président de la division de la génétique Pioneer Hi-Bred de DuPont, Paul Schickler, a dit qu'en ce moment, l'Ouest du Canada constituait la priorité mondiale en matière de R-D en ce qui a trait aux variétés de fèves de soja et de maïs, ainsi qu'à de nouvelles composantes du canola, entre autres parce que le système réglementaire du Canada était très stable. Ces gens peuvent avoir confiance en ce système. Il a ensuite dit que les agriculteurs étaient des innovateurs et qu'ils s'adaptaient rapidement aux changements.
Je crois que le taux d'adoption du canola génétiquement modifié a dépassé celui du tracteur et de la moissonneuse-batteuse par rapport à la batteuse stationnaire. On a pris plus de temps pour adopter complètement ces innovations que le canola génétiquement modifié. Selon M. Schickler, ces deux éléments sont les raisons pour lesquelles une entreprise de l'envergure de DuPont mise sur le secteur agricole de l'Ouest du Canada en y faisant l'un de ses investissements stratégiques les plus importants. En passant, DuPont a vendu une société pétrolière en 1998, ce qui a réduit la valeur de ses actions de moitié, pour acheter une entreprise spécialisée en génétique du nom de Pioneer Hi-Bred. Aujourd'hui, l'action est remontée à son niveau d'avant la transaction grâce à cet investissement stratégique dans la bioéconomie.
En 1997, on discutait beaucoup de la marche à suivre en ce qui concernait le canola. On disait que cette culture allait détruire les marchés et que les Européens ne l'accepteraient pas. Rappelons-nous ce qui s'est passé. On a beaucoup parlé des inconvénients. En fait, sur le plan stratégique, ce qui s'est produit s'inscrivait dans le meilleur intérêt de l'industrie. Un des témoins a mieux résumé cette situation que moi: le marché européen ne nous a jamais été ouvert, de toute façon. C'était surtout une mesure protectionniste visant à protéger l'industrie du colza. Nous devons donc nous concentrer sur les bases de cet investissement.
Si nous avions eu la discussion sur le projet de loi C-474, que nous appelons « le fossoyeur des biotechnologies », lorsque le canola est arrivé, je doute fort que notre agriculture serait autant à l'avant-garde aujourd'hui. J'aimerais donc que les membres du comité respectent les leçons que nous avons apprises dans le domaine du canola ainsi que l'importance des milliards de dollars que le canola a rapportés à l'économie rurale.
Pour terminer, j'aimerais soulever quelques points tout en évitant les répétitions, mais de nombreux témoins ont présenté leurs listes de souhaits.
Tout d'abord, la tolérance zéro de la part des marchés internationaux est tout à fait inacceptable. C'est l'élément le plus important. Comme vous le savez, notre pays est un exportateur de premier plan et mes activités sont totalement axées sur l'exportation. Nous avons absolument besoin de nous assurer d'enrayer la tolérance zéro. Je pense que certaines industries, par exemple le lin, auraient beaucoup de difficultés dans un contexte de tolérance zéro. Nous ne pouvons plus nous le permettre.
De plus, j'aimerais servir un avertissement. Nous sommes sur le point de perdre notre avantage sur le plan céréalier. Les légumineuses et les oléagineux de l'Ouest du Canada sont sur une lancée et leur avenir est rempli d'espoir, comme l'a mentionné M. Vandenberg et comme je l'ai dit pour les oléagineux. Néanmoins, nous avons absolument besoin de l'autre composante d'une bonne rotation, et il s'agit des céréales. Nous perdons notre avantage année après année. Sur le plan économique, il est très peu probable qu'une récolte de céréales soit profitable pour moi.
Nous devons régler ce problème. Nous devons attirer les investissements pour faire en sorte que les gens comprennent que l’économie de la Saskatchewan ne dépend plus que du blé. C’est un mal nécessaire pour nous dans un contexte de rotation, mais il est très peu probable que nous trouvions une combinaison prix-rendement qui nous soit profitable. C'est le défi que je pose à cette table. Nous devons nous en occuper.
Enfin, les biotechnologies sont un domaine très stimulant relativement à notre secteur d'activité. Il est essentiel que les jeunes joignent notre industrie. Mon père, qui a été un grand innovateur toute sa vie, aura 65 ans cette année. C’est une année difficile pour lui parce qu’il n’est plus capable de conduire notre machinerie. La technologie a tellement évolué qu’on ne parle plus de conducteurs, on parle plutôt d’opérateurs. Nous appliquons constamment de nouvelles connaissances à la ferme pour mieux l’exploiter. Notre travail devient de plus en plus complexe.
Le manque de stabilité du marché est également en train de devenir une de nos principales difficultés, et ce, non seulement dans les cultures, mais également dans l’achat des fertilisants. C’est une grosse industrie qui change rapidement. Les variations peuvent passer de centaines à des millions de dollars en un mois. Nous devons obtenir des rendements stables et les biotechnologies constituent une des clés qui nous permettront d’atteindre la stabilité et de maintenir un filet de sûreté.
Nos récoltes ont un rendement que nous n'avions même pas les moyens de rêver il y a dix ans. En achetant les innovations les plus récentes et efficaces dans le domaine de la culture du canola, nous avons pu contrôler le resserrement de nos marges de profit ainsi que l’inflation. Nous favorisons ainsi l'entrée des grandes entreprises ainsi que l’innovation dans notre pays. Vous devez garder ces marchés ouverts. Voilà la priorité. Il faut permettre l’innovation dans le domaine des biotechnologies pour que nous demeurions concurrentiels et que le Canada atteigne le premier rang mondial. Comme l'a mentionné Bert, nous ne sommes pas sur la plus haute marche du podium.
Un des souvenirs les plus frappants que j'ai date de 1997. La première grande vague brésilienne venait de commencer; en gros, c’était comme s’ils exploitaient le Sahara. Ils sont passés d'une entité inexistante sur le marché mondial au premier rang des exportateurs de fèves de soja. Depuis, le monde a avalé l’Amérique du Sud. Ne l’oublions pas.
Avant 2004, nos fermes n'étaient pas aussi profitables. La consommation et la production ont connu un taux de croissance de 1 p. 100 jusqu’en 2004, lorsque tout s’est enclenché. Nous connaissons maintenant une croissance de la consommation de 2 à 2,5 p. 100 dans les pays qui en ont le plus besoin.
Voilà le défi que nous devons relever. Pour ce faire, le Canada doit profiter de ses avantages comparatifs et adopter les lois appropriées.
Merci, Brad.
Vous avez formulé un commentaire à propos des jeunes agriculteurs. Je suis moi-même agriculteur et je vous dirais que de nos jours, tout agriculteur de moins de 55 ans est un jeune agriculteur; l’agriculture a certainement besoin de sang neuf.
Nous passerons maintenant aux questions.
Monsieur Valeriote, vous avez sept minutes.
J’aimerais dire merci à tout le monde pour avoir trouvé un peu de temps dans leurs horaires chargés et pour leur présence aujourd'hui.
J'utiliserai une approche quelque peu différente. Je ne cherche pas la controverse. Je sais tout simplement qu’il existe une autre vision en ce qui a trait à cette histoire, et il nous faut la connaître pour pouvoir discuter pleinement de tous les enjeux. Nous sommes dans notre petite bulle et nous n'acceptons pas toujours le revers de la médaille comme je pense que nous devrions le faire.
Je conviens que les biotechnologies ont leur place dans ce monde. Je reconnais que trois milliards de personnes devront compter sur une augmentation de 70 p. 100 de la production de nourriture au cours des 30 prochaines années. La réduction de l’accès à l’eau et tous les incidents associés au réchauffement planétaire sont d'autres enjeux que nous devons régler. Nous avons déjà eu cette discussion. Ce que je vois, toutefois, c’est le fossé grandissant entre ceux qui défendent les biotechnologies et ceux qui s'en inquiètent, que ce soit au sujet de l’Enviropig de l’Université de Guelph ou des produits transgéniques. Notre comité est en tournée et nous entendons des idées, mais il est difficile de transformer ces idées en politiques.
Avant 2004, il existait un forum au sein duquel tous les participants au domaine des biotechnologies pouvaient se réunir et discuter de la réglementation qui pourrait être adoptée ainsi que des besoins du milieu. Si j'ai bien compris, le forum s'est dissous au début des années 2000 et n'existe plus aujourd'hui.
Ma première question est très hypothétique: seriez-vous favorables à un forum qui permettrait aux deux solitudes de se réunir et de mener des discussions raisonnables qui se conclueraient en des recommandations au gouvernement en ce qui a trait à la réglementation nécessaire?
Ma deuxième question est plus terre-à-terre et concerne la luzerne. Vous avez parlé du canola génétiquement modifié. J’apprécie et je reconnais la valeur du canola génétiquement modifié, mais je sais également, comme me l’ont dit des témoins devant le comité, que ce type de canola a contaminé le canola non génétiquement modifié — c'est certainement le cas en Saskatchewan — à un point tel que l'existence même de ce type de canola est impossible.
Vous êtes au fait des préoccupations concernant la luzerne. On nous dit qu’on produit de la luzerne sur 4,5 millions d'hectares, et 75 p. 100 se trouve dans les provinces des Prairies. Le Canada est le deuxième producteur de luzerne non transgénique. Nous avons entendu ceci: « La contamination de la luzerne biologique aurait de nombreux effets négatifs sur les producteurs de ce type de luzerne. C’est une légumineuse parfaite pour la fixation de l’azote et s’il n’était plus possible d’inclure la luzerne dans la rotation des fermes biologiques, il serait très difficile de maintenir la fertilité des sols et de prévenir leur érosion, ce qui pourrait mettre en danger la santé future de nos sols. »
On dit que le cheval et la charrette ont dû laisser la place à l’automobile. Je vois les choses un peu différemment. Il est encore possible d'utiliser le cheval et la charrette si on le désire, mais la contamination élimine la capacité de cultiver des produits biologiques. Je conçois que nous avons besoin d’autoriser une faible teneur en OGM dans nos accords commerciaux internationaux, mais la présence de produits transgéniques, même à faible teneur, élimine la valeur des cultures biologiques parce qu'elles risquent la contamination.
Premièrement, quelqu’un peut-il m’éclaircir quant à la pertinence de remettre ce forum sur pied? Ensuite, acceptez-vous l’idée selon laquelle on doit également veiller à ce la culture biologique soit profitable? Les personnes ne devraient-elles pas avoir le choix d’acheter des produits biologiques?
Je peux répondre à la question concernant le forum et à celle concernant la nécessité d’avoir un choix.
Nous enseignons la biologie. Nous faisons de la recherche en agriculture biologique, tout comme l’école d’agriculture de l’Université de Guelph. C’est répandu. On doit reconnaître qu'il existe plus d'une option et permettre aux gens de choisir. Tout d’abord, on doit définir le terme « biologique » et examiner quels sont les coûts et les avantages.
Un forum aurait-il des avantages? Sûrement, mais je dirais que nous en avons déjà un. Nous l’avons incorporé dans nos programmes d’enseignement. Nous tenons compte d'une grande variété d’opinions de la part des agriculteurs biologiques dans nos décisions
La partie génétique est plus difficile à traiter et je vais laisser quelqu’un d’autre y répondre.
Monsieur Kerr, vous avez vous-même utilisé l'analogie de la voiture et de la charrette. Comprenez-vous…? Bert ou quelqu'un d'autre, je vous invite à répondre à cette question.
Je ne suis pas un spécialiste de la génétique ou du brouillard de pulvérisation, mais je crains qu'on n'ait mis en place un système dans lequel ceux qui veulent utiliser des produits biotechnologiques… Selon la réglementation actuelle, le droit est du côté de ceux qui cultivent des produits biologiques. Autrement dit, on part du principe que l'autre va me polluer. Il est vrai que les cultivateurs biologiques représentent une petite industrie.
Je ne sais pas comment le dire, mais j'ai grandi en Colombie-Britannique, à une époque où on élevait le bétail en pleine nature, dans la région de Cariboo. Il y a deux façons d'élever le bétail en pleine nature: soit vous l'enfermez dans un enclos, soit vous lui interdisez l'accès à des enclos. C'était le mode de production le plus courant pour élever du bétail en pleine nature. Autrement dit, on interdisait surtout l'accès du bétail à des enclos, afin d'éviter que les potagers, par exemple, ne soient pollués ou dévastés par les animaux.
En fait, c'est ça le fond du problème. S'il faut enclore un terrain pour empêcher sa contamination par le brouillard de pulvérisation, il vaut mieux, à mon avis, mettre une barrière pour empêcher ces organismes d'y entrer plutôt que d'enclore les organismes génétiquement modifiés. Voilà ce que je voulais vous dire. En tout cas, c'est à mon avis le fond du problème.
Bert, si vous intervenez, pouvez-vous aborder cet aspect-là également? Je voulais poser une troisième question au sujet des barrières, car je sais que, dans l'industrie des semences, on a défini des distances pour préserver l'identité des produits. C'est donc faisable.
Des études se poursuivent sur la façon dont les gènes se propagent, pour toutes sortes de cultures, étant bien entendu que mère nature réserve toujours des surprises. Rien n'est impossible en biologie, mais je pense qu'on peut déterminer scientifiquement le genre de barrières qui seraient nécessaires. Il est bien évident, si l'on se place à l'échelle du continent, qu'à partir du moment où les États-Unis approuvent ces produits, on les retrouve inévitablement chez nous, car ils se propagent.
Il est certainement possible, sur le plan scientifique, de mettre en place un système qui garantirait une certaine protection et qui rassurerait les gens, car, comme vous l'avez dit tout à l'heure, c'est un sujet qui peut déchaîner les passions. Et ce n'est que par l'éducation qu'on peut les apaiser.
J'aimerais faire un bref commentaire. Le problème est qu'il y a des règles de tolérance. C'est nous qui les définissons. J'ai l'impression que vous vous trompez de cible. Il faut trouver le moyen d'adapter ces règles de tolérance zéro à un contexte commercial, de façon à avoir des marchés distincts pour le biologique et le non-biologique, car, au fond, c'est ce que veulent les consommateurs. Certains veulent des produits biologiques, d'autres pas. Je vous conseille donc de régler cette question des règles de tolérance zéro.
Je pense qu'un forum serait une bonne chose, mais le plus important, c'est la façon dont les décisions y seront prises. En politique, on a tendance à les prendre en fonction de ce qui est populaire ou de ce qui rapportera des voix, mais moi je vous invite à les fonder sur nos meilleures données scientifiques.
Quand on a affaire à des gens qui ne connaissent pratiquement rien à l'agriculture et à la biotechnologie agricole, je pense, et on en a déjà fait l'expérience, qu'il vaut mieux éviter les pièges d'un forum strictement public. Les décideurs politiques seront ainsi mieux en mesure d'accorder toute l'importance nécessaire à la science et à ses applications.
Au niveau provincial, nous sommes tributaires des échanges commerciaux, et une grande partie de nos ventes de céréales et d'oléagineux, notamment le canola, sont clairement associées à des OGM. C'est donc un sujet potentiellement explosif, et c'est la raison pour laquelle je vous recommande vivement de fonder vos décisions sur les meilleures données scientifiques.
Autrement dit, monsieur Wartman, nous autres politiciens devrions prendre nos décisions en fonction de données scientifiques, et non de considérations politiques. Vous ai-je bien compris?
Merci.
Monsieur Bellavance, vous avez sept minutes.
Pour ceux qui veulent écouter l'interprétation, l'anglais est sur le canal 2, je crois.
[Français]
Bonjour. Merci beaucoup de vos témoignages.
Vous êtes sans doute plus compétents que je ne le suis dans le domaine des biotechnologies. Ce n'est pas à vous que je vais apprendre que la biotechnologie ne se penche pas seulement sur la question des organismes génétiquement modifiés, mais que son champ d'application est beaucoup plus vaste. La biotechnologie rend d'énormes services à l'humanité, notamment en santé humaine et en santé animale. Par exemple, dans ma circonscription, la compagnie Domtar construit actuellement une usine-pilote de fabrication de nanocellulose cristalline à partir de fibre de bois. Il y aura des applications dans tous les domaines, notamment dans le domaine de la santé. C'est une voie d'avenir pour l'industrie forestière du Québec et de partout au Canada, qui vit actuellement des difficultés certaines, quoique de façon cyclique. Pour l'instant, on cherche de nouvelles avenues pour le domaine forestier, et il s'agit là, à mon avis, d'une voie d'avenir.
Par contre, quand on parle des organismes génétiquement modifiés, il est aussi normal d'établir des balises avant de commercialiser tout produit. Tout à l'heure, avant que M. Cross ne parte, M. Lemieux lui a posé une question sur le projet de loi C-474 actuellement à l'étude à la Chambre des communes. Il ne faudrait pas tout de suite évoquer un scénario catastrophe. Il faut dire qu'on mène des analyses de l'impact commercial d'un organisme génétiquement modifié avant de le commercialiser. Par exemple, on a fait cela en Argentine, l'un des plus grands producteurs d'organismes génétiquement modifiés. Vous l'avez bien dit. Avant de prendre des positions purement partisanes ou de faire de la simple politique, j'ai tout de même cherché à savoir quels étaient les impacts découverts en Argentine à la suite de ces analyses. En plus d'une analyse en matière de santé et d'environnement, on y a aussi fait une analyse des effets sur le commerce international. Jusqu'à maintenant, l'Argentine ne s'est pas fait poursuivre par les autres pays ni par l'Organisation mondiale du commerce. Ce cas nous donne finalement une confirmation supplémentaire de ce qu'il faut faire avant qu'un produit soit commercialisé.
M. Kerr a parlé du principe de précaution. Je crois qu'il est en effet très difficile d'avoir un risque zéro, et je ne crois pas non plus que ce soit l'interprétation qu'en font les 160 pays signataires du Protocole de Carthagène sur la biosécurité qui, je le rappelle, vise à mettre en place des balises de contrôle axées sur le principe de précaution. Le Canada ne l'a pas ratifié. Or, il est faux d'affirmer que tous ces pays n'ont jamais commercialisé d'organismes génétiquement modifiés. Certains de ces pays sont également des producteurs d'organismes génétiquement modifiés et font de la biotechnologie. On peut donc faire l'un et l'autre, et faire de la recherche sur la biotechnologie. Avant de commercialiser un produit, on peut faire des analyses poussées pour s'assurer que la santé de la population n'est pas en jeu. À mon avis, l'un n'exclut pas nécessairement l'autre.
Madame Hobbs, vous avez fait des observations fort intéressantes à propos de l'investissement, et je vais vous poser une question sur la situation aux États-Unis. Vous dites que le rendement sur l'investissement est de plus ou moins 20 p. 100 aux États-Unis. Avez-vous des informations sur la façon dont on procède aux États-Unis? Le gouvernement est-il le plus grand investisseur dans le domaine des biotechnologies ou les investissements viennent-ils davantage de l'entreprise privée?
[Traduction]
En effet, des études y ont été faites sur le rendement de la recherche agricole du secteur public. Aux États-Unis comme au Canada, l'investissement dans la recherche agricole provient à la fois du secteur public et du secteur privé. Ces études ont notamment démontré qu'au Canada, comme aux États-Unis et ailleurs, la part du secteur public dans le financement de la recherche diminue, et que le taux de croissance de la productivité agricole diminue au même rythme. Ce problème n'est donc pas propre au Canada; il existe ailleurs aussi.
[Français]
[Traduction]
Oui. Je crois que l'investissement public dans la recherche agricole est en recul dans la plupart des pays industrialisés, et c'est d'autant plus inquiétant que cela ralentit la croissance de la productivité agricole.
[Français]
Est-ce que je me trompe en disant qu'au Canada, c'est vers le milieu des années 1990 que le gouvernement a décidé de moins investir dans la recherche? Je sais qu'au Québec, les producteurs de culture commerciale et les producteurs de grain se sont associés aux producteurs de l'Ontario et ils demandent au gouvernement canadien de rétablir les investissements sur la recherche qui existaient en 1994. Vous imaginez, cela fait déjà des années que l'on n'investit plus en ce domaine comme on le faisait en 1994. Qu'est-ce que cela changerait d'accroître les investissements, notamment pour une université comme la vôtre?
[Traduction]
Je vous rappelle que, lorsque vous enlevez vos écouteurs, il ne faut pas les poser trop près du micro, car cela cause une réaction acoustique.
Madame Hobbs, vous avez la parole.
Je ne dis pas qu'il faut nécessairement en revenir aux niveaux de 1994, mais de façon générale — et mes confrères pourront en parler —, nous savons tous combien il est important d'avoir des investissements permanents, pour garantir l'existence des infrastructures nécessaires et le maintien des gens en poste.
Nous avons étudié le rendement, pour les producteurs et les consommateurs, des investissements consacrés à la recherche agricole — je veux parler des études économiques effectuées par les chercheurs de notre université et d'ailleurs. Le taux de rendement varie en fonction de la nature de la recherche, mais je peux vous dire que chaque dollar investi rapporte entre 9 et 18 ou 20 $. D'autres groupes indépendants ont eux aussi étudié la question.
Il est quasiment incontestable que, même dans le cas de la recherche à haut risque, le taux de rendement des investissements est énorme et que cela profite aux producteurs, aux consommateurs et au Canada dans son ensemble.
[Français]
Les plus récentes statistiques sur les dépenses en recherche proviennent de Statistique Canada. En 2005, 2 milliards de dollars ont été dépensés dans le domaine de la recherche en biotechnologie au Canada. Quelqu'un a-t-il une idée de ce que représentaient la part du gouvernement et la part du privé dans ces investissements?
[Traduction]
J'ai des chiffres qui vont sans doute vous intéresser. En 2007, l'investissement du secteur privé dans la recherche et le développement phytotechniques au Canada totalisait environ 40 p. 100; le budget des services votés d'Agriculture Canada représentait environ 21 p. 100, l'investissement des provinces, environ 6 p. 100, et la contribution des producteurs, 4 p. 100. Quelqu'un a dit tout à l'heure que l'investissement du CRSNG était important; il était de 18 p. 100. Ajoutons à cela d'autres sources de financement fédéral, qui représentent 11 p. 100, ce qui donne un total de 165 millions de dollars consentis en 2007 dans la recherche et le développement phytotechniques.
[Français]
[Traduction]
André, vous avez largement dépassé votre temps.
Je donne maintenant la parole à M. Hoback, pour sept minutes.
Les micros sont contrôlés par des techniciens, vous n’avez donc pas besoin de les approcher de vous. Ils captent très bien le son. Si nous avons des difficultés pour nous entendre, nous verrons à ce moment-là.
Merci, monsieur le président.
Je tiens à remercier tous ceux qui comparaissent devant nous ce matin. Je suis ravi d'entendre tous ces Canadiens de Saskatoon et de la région, y compris Brad Hanmer, nous parler de ce sujet important.
Lorsque j'ai commencé à m'intéresser à la question, je me suis rendu à l'Université de la Saskatchewan et à Innovation Place. Mark Wartman m'a fait visiter l'université et m'a montré ce que vous y faites. Je suis vraiment très heureux de pouvoir en parler avec mes collègues ici, car c'est absolument fantastique.
L'étude que nous avons entreprise est extrêmement importante, et je pense que nous allons avoir besoin d'aide pour élaborer de nouveaux règlements, afin que l'industrie puisse se développer de façon responsable.
Je pense que personne ici ne veut voir l'industrie aller à vau-l'eau et disparaître. Ça pourrait ruiner Brad et tous les autres agriculteurs du Canada, et avoir des conséquences désastreuses pour notre population, compte tenu de la croissance démographique mondiale que l'on connaît. Nous devons donc nous développer de façon responsable, tout en nous assurant que nous avons les règlements, les subventions et les investissements adéquats pour que cette croissance se fasse de façon responsable.
Voilà donc à quoi je vais surtout m'intéresser ce matin. Tout d'abord, j'aimerais qu'on s'entende sur la définition de la biotechnologie. Quand on parle de biotechnologie, les gens pensent tout de suite aux OGM —, en tout cas, c'est ce qui arrive la plupart du temps.
Faudrait-il remplacer le mot biotechnologie par quelque chose de différent?
Pouvez-vous me donner une brève réponse? Je m'adresse à vous tous.
Je ne pense pas que cela soit nécessaire. Le terme de biotechnologie me semble approprié, mais il faut continuer à le définir clairement devant la population. Il est vrai que la plupart des gens semblent le réduire aux OGM.
Les autres témoins sont-ils tous d'accord avec cette réponse? Bien.
Maintenant, en ce qui concerne la présence d'OGM en faible quantité, je pense que vous serez tous d'accord pour dire qu'il faut fixer un seuil. Ça me paraît raisonnable. Par contre, je ne sais pas où se situe ce seuil. Il y en a qui s'y connaissent mieux que moi sur les règlements qu'il faudrait adopter en la matière au Canada et dans le monde entier, mais je pense que ce sont deux recommandations que nous pourrions faire.
Monsieur Wartman, vous avez parlé de la nécessité d'attirer les jeunes dans le secteur. Madame Buhr, vous avez vous aussi certainement quelque chose à dire là-dessus. Que devons-nous faire pour attirer des jeunes dans le secteur? En faisons-nous assez? Que pourrions-nous faire de plus?
Il y a deux choses, et l'une consiste à faire venir des jeunes dans l'industrie. Nous savons qu'il n'y a plus assez de jeunes qui quittent la ferme pour s'orienter vers l'industrie, et nous devons donc particulièrement mettre l'accent sur nos programmes de sensibilisation dans les zones urbaines et nos programmes d'information quant au rôle de l'agriculture et de la biotechnologie agricole. Nous sommes en train d'élaborer de nouveaux programmes dans ce domaine, et il faudra leur donner l'appui et la promotion nécessaires.
La deuxième chose — et Mary voudra certainement en parler — est le soutien à accorder au développement de l'agriculture autochtone. Nous sommes déjà des chefs de file en Amérique du Nord avec les programmes de notre Indigenous Land Management Institute et notre nouveau programme d'études supérieures. Comme quelqu'un l'a dit tout à l'heure, les Autochtones possèdent une grande partie du territoire de la province et du pays, et leur participation est cruciale; c'est pour cela que nous les avons inclus dans nos programmes de sensibilisation. Ils représentent aussi le plus grand nombre de jeunes…
Mark, je ne pense pas avoir assez de temps pour que vous puissiez me donner une réponse aujourd'hui, mais j'aimerais bien que vous fassiez parvenir à notre comité des informations sur les obstacles qui nuisent à la participation de ces gens-là.
Pour ce qui est d'encourager les jeunes à s'inscrire dans un collège agricole, les gens vous diront que ça n'intéresse personne. Pourtant, qu'y a-t-il de plus essentiel que la nourriture? Tout le monde en a besoin au moins trois fois par jour au Canada. On oublie toujours ça.
Pour en revenir à ce que je disais à ce sujet, si vous commenciez à introduire systématiquement des notions de nutrition en 3e année, les gens comprendraient d'où vient leur nourriture. Il faut que les gens comprennent que tout le monde a besoin de manger. La question de savoir si on doit autoriser les aliments transgéniques ou pas se résume à celle-ci: veut-on trouver une solution au problème de l'alimentation de la population? On ne peut pas priver les gens de nourriture.
Il y a beaucoup de réponses à la question. Il existe toute une panoplie de technologies. Mais à mon avis il faut commencer par éduquer les gens, avec sérieux et efficacité, et s'adresser d'abord aux enfants.
Je vous prie de m'excuser, mais mon temps est limité, et je dois passer à autre chose.
Ce qui m'intéresse maintenant, c'est ce qu'il faut faire pour attirer des investissements. Monsieur Potter, vous avez parlé de créer des partenariats. Nous savons que les investissements publics ont considérablement diminué depuis 1994, mais nous savons aussi que les investissements privés augmentent. Nous ne savons pas exactement si les uns compensent les autres, et si au total les investissements ont augmenté ou pas, mais il n'en reste pas moins que nous avons besoin des deux, de l'investissement public et de l'investissement privé. Je suis sûr que tout le monde est d'accord avec ça.
De quelle façon vous attaquez-vous à ce problème, dans votre centre de Saskatoon?
Pour nous, il s'agit de plus en plus de faire preuve de créativité, tout simplement. Nous faisons beaucoup plus appel à des sources de financement internationales, ce qui n'est pas une mauvaise chose. Les capitaux privés se font plus rares par les temps qui courent, surtout depuis deux ou trois ans, comme chacun sait.
Par ailleurs, le domaine dans lequel je travaille, le financement à risque au Canada, est toujours problématique, même lorsque la conjoncture est favorable, et depuis quelques années, il n'y en a pratiquement plus. En conséquence, la plupart des technologies s'en vont vers le Sud, où la biotechnologie n'est pas aussi controversée.
Peut-être est-ce vous, monsieur Kerr, qui avez dit que des technologies sont mises au point au Canada mais qu'elles sont ensuite fabriquées dans des usines à l'étranger.
Je suis désolé.
Pourquoi cela se produit-il? Pourquoi ne les fabriquons-nous pas au Canada? Pour quelle raison fuient-elles notre pays?
Il y a plusieurs raisons à cela. Il y a d'abord notre dispositif de réglementation, qui est plutôt… « lourd », ce qui est une façon polie de le dire. Le marché canadien représente un dixième du marché américain, où le dispositif de réglementation est beaucoup plus souple que le nôtre. Il n'est donc pas étonnant que notre industrie soit attirée vers le sud, ça ne prend pas la tête à Papineau pour le comprendre.
C'est une raison, mais ce n'est pas la seule. Le capital-risque a son importance aussi. Nous avons réussi à créer des entreprises très prospères, mais elles ont ensuite été rachetées avant d'être délocalisées au sud.
Par conséquent, il y a à la fois le problème de la réglementation et celui de la fabrication. La recherche se fait chez nous, par conséquent nous réussissons à franchir une première étape, mais quand arrive le moment de commercialiser la technologie, vous dites que c'est beaucoup plus facile de le faire aux États-Unis.
La technologie est commercialisée là où c'est le plus rentable.
Je dirais que, surtout en Saskatchewan… Dans notre secteur, celui de la fabrication des vaccins, le Saskatchewan Research Council de Saskatoon est le dernier centre de fermentation à recevoir des fonds publics. C'est une ressource extraordinaire. Ça montre bien qu'avec de la créativité et de la volonté, il y a toujours moyen de faire ces choses-là au Canada. Il suffit de le vouloir.
Merci, monsieur Hoback.
Je vais maintenant donner la parole à M. Easter, et si tout le monde d'accord, je vais continuer de donner sept minutes à chacun.
André, pouvez-vous me remplacer pendant un moment, s'il vous plaît?
Allez-y, Wayne.
Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins de comparaître devant notre comité. S'il y a une chose qui caractérise la Saskatchewan, c'est bien Innovation Place, où les entreprises se font concurrence tout en collaborant pour mieux se développer. Ce que nous avons vu ici est absolument incroyable.
Randy a déjà posé ma question, dans un certain sens. L'un des problèmes… Je crois que c'est Mary qui a dit que la biotechnologie ne se limite pas, loin s'en faut, aux OGM, mais qu'on n'arrive pas à le faire comprendre à la population.
Comme on l'a déjà dit plusieurs fois autour de cette table, le projet de loi C-474 va être mis aux voix cette semaine. Je peux vous dire ce matin, puisque que je l'ai annoncé hier, que nous allons recommander que mes collègues, au moins eux, votent contre le projet de loi. Je reçois beaucoup de courriels pas très gentils, mais j'estime que le projet de loi ne fait pas ce qu'il est censé faire.
Il va falloir que nous trouvions le moyen de faire comprendre aux gens que la biotechnologie ne se limite pas aux OGM et qu'elle apporte toutes sortes de bienfaits. Personnellement, j'estime qu'il y a de bons OGM et de mauvais OGM. Il faut les examiner au cas par cas, et prendre en compte leurs propriétés. Mais comment devons-nous nous y prendre? N'ai-je pas raison de dire que la biotechnologie ne se limite pas aux OGM? Comment devons-nous nous y prendre?
Bert, si je me souviens bien, vous avez dit tout à l'heure qu'il fallait trouver une solution biologique pour améliorer la qualité et la nutrition, etc. Il y a toutes sortes de choses que nous pouvons faire. Il y a des recherches à faire dans le domaine des produits biologiques, dans celui des solutions naturelles, dans celui de la biotechnologie et même dans celui des OGM, mais comment faire pour que les gens soient conscients des bienfaits qu'ils peuvent nous apporter? D'après ce que je constate, c'est une véritable guerre que se livrent les deux camps, et je crains que cela nuise à notre pays, à notre capacité de croissance et même, comme l'a dit Brad tout à l'heure, aux agriculteurs eux-mêmes.
Comment pouvons-nous nous en sortir?
Puis-je répondre?
À mon avis, c'est une question de message. Avec une bonne vingtaine d'excellents clips de 10 secondes, vous avez ce qu'il faut pour bien informer le public. De nos jours, c'est la seule façon de communiquer avec la population. Vous pouvez le faire par les réseaux sociaux ou autrement.
Réduire la biotechnologie aux aliments transgéniques, c'est comme réduire la nourriture au hot-dog. C'est idiot. Les gens ne vous écouteront pas. Par contre, en parlant de la biologie des aliments consommés à chaque repas, vous pouvez élaborer un programme de sensibilisation intéressant. Et si vous y ajoutez de l'humour, c'est encore mieux. À mon avis, c'est la seule façon d'amener les gens à changer d'attitude.
J'ai souvent dit aux agriculteurs biologiques qu'avec leur système, ils allaient affamer la planète. Nous ne pouvons pas nous permettre une chute de la productivité de 10 ou 20 p. 100. Les produits biologiques, c'est essentiellement un marché pour ceux qui ont beaucoup d'argent.
On ne réglera pas le problème de la faim dans le monde uniquement en augmentant la production. Il y aussi le transport, l'entreposage, le gaspillage, la pauvreté. C'est tout ça aussi. Mais je suis d'accord avec vous, nous devons améliorer nos rendements.
Nous avons entendu beaucoup de choses ce matin, et si je peux en résumer certains points essentiels, je dirais que tout le monde ou presque recommande le développement de la biotechnologie et de toutes ses composantes. Il faut absolument augmenter la R-D publique. Il faut absolument investir dans les infrastructures, et ces investissements vont devoir provenir, comme vous l'avez dit, Mark, essentiellement du secteur public. Par ailleurs, il va falloir que nous nous éloignions du principe de tolérance zéro, si nous voulons protéger notre commerce international bilatéral.
Ai-je bien résumé les principaux messages que nous avons entendus ce matin?
Je voudrais faire une petite nuance quand vous dites que c'est uniquement le secteur public qui doit agir. Le gouvernement a la possibilité de faire quelque chose pour les grandes entreprises qui oeuvrent dans le secteur de la biotechnologie agricole. Je ne pense pas simplement à des abattements fiscaux, qui font bien sûr gagner des voix aux élections, mais aussi à une restructuration du régime fiscal de façon à encourager les entreprises à investir dans ce domaine.
À l'heure actuelle, ces grandes entreprises n'investissent pas assez. Notre système d'éducation publique ne reçoit pas non plus autant d'investissement qu'aux États-Unis. Plutôt que de leur rendre de l'argent qui ira à leurs actionnaires ou à leurs dirigeants, nous avons intérêt à restructurer notre régime fiscal de façon à encourager la poursuite des objectifs nationaux que nous nous sommes fixés, et je sais que c'est votre intention, de façon à obtenir les impacts que nous recherchons.
Je suis entièrement d'accord avec vous, Mark.
J'aimerais que vous me disiez, chacun d'entre vous, dans quelle mesure notre situation est comparable à celle des autres pays, notamment les États-Unis, pour ce qui est de la recherche fondamentale et appliquée dans le secteur public et dans le secteur privé.
Deuxièmement, l'accroissement du pouvoir des grandes entreprises est l'un des gros problèmes qui se posent actuellement dans le système de production alimentaire. Ces grandes entreprises ne sont qu'une poignée, mais la situation est telle que les gens sont obligés de s'adresser à elles pour acheter des semences plutôt que de les produire eux-mêmes. Quelqu'un a dit — et je crois que c'est vous, Mary —, qu'elles sont favorables à la propriété publique des semences et au droit de chacun de reproduire ses propres semences, mais qu'en fait elles restent propriétaires des OGM et que les gens deviennent captifs. Leurs profits augmentent, et les salaires de leurs dirigeants atteignent des niveaux faramineux.
Comment notre situation se compare-t-elle à celle des autres pays, et comment devons-nous nous y prendre pour limiter les pouvoirs des entreprises qui imposent de telles contraintes aux producteurs?
Nous avons changé le système pour que le financement de la recherche en biotechnologie provienne principalement du secteur privé, vu qu'il revient extrêmement cher de commercialiser ce genre de produit. Mais avec le nouveau système, seules les grandes multinationales peuvent se permettre d'investir dans ce domaine. C'est vraiment un gros problème. À mon avis, la seule façon de réduire une telle concentration est de revenir à l'époque antérieure à la biotechnologie, où le secteur public était en mesure de financer directement la commercialisation d'un plus grand nombre de produits. C'est la seule façon de réduire le pouvoir de ces entreprises. Nous pourrions ainsi produire des variétés capables de s'auto-régénérer, et les agriculteurs pourraient réutiliser les semences. Une entreprise privée de biotechnologie n'a aucun intérêt à le faire, mais les universités et Agriculture Canada peuvent le faire. À mon avis, ce serait une bonne façon de réduire le niveau de concentration. Nous avons voulu créer un système selon lequel les entreprises privées assureraient la majeure partie du financement nécessaire, mais cela a abouti à une forte concentration de multinationales. À l'époque, je suppose que personne ne l'avait prévu.
Merci, monsieur le président.
Je tiens tout d'abord à vous remercier d'être venus nous rencontrer.
Nous avons entendu ce matin des témoignages extraordinaires sur le sujet qui nous intéresse et qui revêt une importance considérable pour l'agriculture et les consommateurs. Au final, ce sont les consommateurs qui profitent de ce genre de discussions et des produits qui en résultent.
Comme je le disais tout à l'heure, la biotechnologie est un terme qui n'est pas toujours bien compris. Les gens ont beaucoup d'idées préconçues. Si nous avons entrepris cette étude, c'est en partie pour lever le voile et avoir un débat public sur la question, afin que les gens comprennent que la biotechnologie ne se réduit pas aux OGM, et que même si elle prévoit l'utilisation d'OGM, les gens ne doivent pas se sentir menacés par ces produits, car nous avons mis en place des procédures et des politiques.
C'est une tournée très importante que le comité de l'agriculture a entreprise, et il est regrettable que le NPD n'y participe pas. Nous avons ici un député du Bloc, deux libéraux et quelques conservateurs, mais le NPD s'est désisté. Si je dis cela, c'est parce qu'il a été question tout à l'heure du projet de loi C-474, qui porte quasi exclusivement sur les OGM, et qu'Alex Atamanenko, qui est député NPD, est un ardent défenseur de son projet de loi. À mon avis, c'est lui qui devrait être ici à écouter vos témoignages, ou au moins un de ses collègues, qui pourrait ainsi lui rapporter la discussion fort intéressante que nous avons ce matin. C'est vraiment dommage qu'ils ne soient pas là.
Monsieur Wartman, vous avez dit que, s'agissant de biotechnologie, les données scientifiques devaient l'emporter sur les motifs politiques. Il est primordial de s'appuyer sur des données scientifiques fiables dans ce domaine. Pourriez-vous être plus précis? Avez-vous un exemple particulier en tête?
En fait, il y a beaucoup d'ignorance. Nous avons parlé tout à l'heure d'éducation, et il va falloir expliquer ce qu'est la biotechnologie. Un certain nombre de personnalités connues, qui ont du poids et de l'influence auprès de l'opinion publique, devraient à mon avis se renseigner un peu mieux avant de clouer au pilori tout ce qui est biotechnologie, même si elles dénoncent principalement les OGM. David Suzuki en est un exemple, car il exerce énormément d'influence sur l'opinion publique. Il faut que les consommateurs entendent un autre son de cloche et soient mieux renseignés sur la question, car vous savez comme moi que la pression de l'opinion publique peut être considérable, même si cette opinion n'est pas toujours fondée sur des données scientifiques. Dans ces conditions, il vous est difficile, voire coûteux, de prendre des décisions fondées sur des données scientifiques, ça prend beaucoup de courage pour le faire...
... mais d'un autre côté, si nous voulons vraiment répondre aux besoins des générations futures, il incombe aux dirigeants de fonder leurs décisions sur des données scientifiques fiables.
Je ne voudrais pas trop m'attarder sur le projet de loi C-474. Je vais simplement vous poser encore une question là-dessus, car ensuite j'en ai toute une série en réserve. Si je n'ai pas le temps de les poser maintenant, je les garderai pour plus tard.
Pensez-vous que le projet de loi C-474 représente à cet égard une menace pour la biotechnologie et le secteur agricole?
Alex et moi avons eu des discussions à ce sujet au cours des dernières années, mais nous avons une opinion différente de l'industrie de l'agro-biotechnologie. La mise au point de cultures comme le canola a des retombées très positives, comme nous le constatons déjà depuis longtemps, mais les gens ont tendance à l'oublier. Cela m'inquiète beaucoup. Il faut que les décisions qui sont prises soient fondées sur des données scientifiques solides. À mon avis, il faudrait commencer par expliquer aux gens que l'agro-biotechnologie ne se limite pas aux produits transgéniques.
Je vais maintenant donner la parole à M. Hoback.
Je dois vous présenter mes excuses, Randy, car j'ai oublié de vous remercier de nous accueillir ici, en Saskatchewan. Randy et moi avons quelque chose en commun. C'est dans ma circonscription que John Diefenbaker est né, qu'il a grandi et qu'il a fait ses études. Ensuite, nous l'avons envoyé à Prince Albert pour qu'il puisse accomplir de belles choses. Mais c'est un sujet dont nous débattons depuis longtemps, lui et moi.
Quoi qu'il en soit, monsieur Hoback, vous avez sept minutes.
C'est bien vrai.
En fait, il y a un portrait dans le bureau de M. Miller qui irait très bien dans mon bureau. C'est celui du chef à son heure de gloire.
Revenons à nos moutons. J'aimerais parler de la procédure en vigueur pour la commercialisation de nouvelles cultures. Quels changements devrait-on y apporter?
Bert, je vous pose la question, ainsi qu'à Mary et à tous ceux qui sont disposés à enrichir le débat.
Nous avons une procédure en vigueur pour les nouvelles variétés et semences qui sont mises au point pour l'alimentation ou pour d'autres secteurs. Cette procédure répond-elle aux besoins de ceux qui doivent commercialiser ces produits, que ces derniers soient destinés à la fabrication de plastiques, d'une nouvelle huile végétale ou quoi que ce soit d'autre? Comment pourrait-on l'améliorer?
En 1986, lorsqu'on a adopté les définitions, on a vraiment essayé de réglementer l'industrie des OGM parce que la population s'en méfiait beaucoup à l'époque, surtout en Europe. Au Canada, on a réussi à élargir la définition afin que toute modification génétique, y compris par la méthode traditionnelle de la phytogénétique, puisse être considérée comme une plante ayant de nouvelles caractéristiques. À mon avis, c'était une grave erreur, car on a ainsi établi des règles uniformes pour tous les produits, ce qui est insoutenable pour les cultures en surfaces restreintes. C'est un très gros problème, et j'en sais quelque chose. Il m'est arrivé de vouloir commercialiser une variété de haricots, mais cette variété n'a pas été approuvée et j'ai fini par y renoncer complètement. La raison invoquée était qu'elle n'était pas cultivée au Canada et qu'elle pouvait être nocive pour les Canadiens. Or, ils en mangent tous quand ils prennent leurs vacances au Mexique.
Certains de ces règlements sont fondés sur des données scientifiques qui ne tiennent pas la route et qu'il faudrait sans doute réexaminer. Cela permettrait aussi éventuellement de désamorcer la situation: étant donné que les gens réclament des produits biologiques parce qu'ils sont plus naturels que les autres, pourquoi ne pas créer deux procédures différentes pour les aliments? Je pense que la population l'accepterait.
Donc, quand nous avons un nouveau produit… Prenons l'exemple du canola.
Brad, c'est un bon produit pour vous. Nous avons déjà eu un exemple de ce genre de situation. Le canola est un produit assez polyvalent, car on peut l'utiliser pour plusieurs choses différentes, y compris les plastiques. Supposons qu'on mette au point un nouveau type de plastique à partir du canola, le nouveau produit devrait-il être assujetti à la même procédure que s'il s'agissait d'un aliment, à cause de la contamination croisée?
Prenons l'exemple du système américain et du soja. Le soja sert à la fabrication d'un grand nombre de plastiques. Le même soja est utilisé dans le lait de soja, et l'huile sert à la fabrication de biodiésel et de toutes sortes de choses. Je dirai que, en l'absence de tolérances appropriées pour des utilisations non alimentaires, qui n'ont pas la caractéristique qui en fait un produit salubre pour l'homme, nous devons commencer par définir un niveau de tolérance. Deuxièmement, il faut se doter des infrastructures nécessaires pour permettre la ségrégation des produits, et, troisièmement, il faut que le marché soit suffisamment important pour que l'inventeur de la technologie soit intéressé à la commercialiser.
Mais vous avez tout à fait raison, Randy, nous empêchons les producteurs d'avoir accès à un tas de produits car nous mettons les aliments, la nourriture pour le bétail, le carburant, les fibres et la santé dans le même panier. Il y a sans doute des gens qui sont mieux en mesure que moi de vous répondre, mais vous avez tout à fait raison.
Puis-je ajouter quelque chose? Le Canada représente un marché limité, et comme la procédure d'approbation est longue, certaines entreprises vont s'installer aux États-Unis. C'est un gros problème. Le Canada compte beaucoup moins d'habitants que les États-Unis, et son marché est beaucoup plus restreint, si bien qu'il est plus difficile de commercialiser un produit. Quand le fardeau réglementaire est trop lourd chez nous, les investisseurs se dirigent vers les États-Unis, et c'est exactement ce qui se passe.
Mon objectif est d'identifier les obstacles auxquels se heurte le secteur de la biotechnologie, ainsi que les opportunités qui s'offrent à lui. Comment pourrions-nous supprimer certains de ces obstacles? Y en a-t-il un que vous recommanderiez tout particulièrement à notre comité de supprimer?
Je ne suis pas spécialiste en la matière, et je suis prête à laisser la place à ceux de mes collègues qui s'y connaissent mieux que moi. Je peux vous dire par contre que nous aidons relativement bien les entreprises ou les jeunes pousses pendant les premières étapes de la mise au point d'un nouveau produit, mais que lorsque ces entreprises veulent se lancer dans la production à plein temps et à long terme, elles traversent alors la vallée de la mort, et beaucoup abandonnent. À mon avis, c'est le plus gros problème. Nous encourageons les jeunes pousses au début, mais comment les aider à passer à l'étape suivante?
À mon avis, il faudrait commencer par régler le problème de la tolérance zéro, afin d'avoir des chaînes d'approvisionnement et des procédures distinctes, qui n'augmentent pas les coûts.
C'est le problème le plus important. Il faut certes être prudent, mais il faut également reconnaître que la tolérance zéro, c'est impossible. Il faut donc trouver une autre façon de commercialiser ces produits, une façon qui soit raisonnable.
Le plus important, c'est la communication et l'éducation. Les gens ne sont pas anti OGM. Je n'ai jamais vu une personne souffrant du diabète refuser de l'insuline recombinée, ou un malade cardiaque refuser du TPA recombiné. Ils savent très bien qu'ils en ont besoin.
Il faut donc commencer par mieux éduquer la population sur les bienfaits de ces produits.
J'aime bien ce qu'il vient de dire. L'essentiel est de bien formuler le message que la population a besoin d'entendre au sujet de la biologie. La biologie a du bon et du mauvais. Les dinosaures faisaient peur.
À mon avis, le plus gros problème vient de la réglementation, qui empêche beaucoup d'entreprises de commercialiser leurs produits. Le délai est considérable, beaucoup plus long qu'aux États-Unis, et notre système de financement n'est pas très dynamique.
À part cette question de la tolérance, qui est de loin la plus importante, il faudrait peut-être que le gouvernement adopte une stratégie un peu moins timide aux yeux du secteur privé. Culture génétiquement modifiée n'est pas synonyme de catastrophe environnementale. C'est ça le message qu'il faut communiquer. Quand on pense que les gens appellent ça la malbouffe. C'est une bataille que nous avons perdue il y a bien longtemps. Il est temps maintenant de reprendre les choses en main et de défendre fièrement les bienfaits que les cultures génétiquement modifiées peuvent apporter à la planète et à notre pays. Ça ne doit pas être un sujet de honte pour notre pays et notre gouvernement. Il est temps de remettre les pendules à l'heure auprès des électeurs car, malheureusement, ils sont très mal informés sur la question.
Monsieur Potter, vous avez dit dans votre déclaration liminaire que la part du Canada dans la production biothechnologique avait diminué, en pourcentage, par rapport aux années 1970, même si nous avons aujourd'hui de meilleurs produits génétiquement modifiés et que notre production a augmenté en volume. Pourquoi alors avons-nous reculé?
Oui, je crois que c'est moi.
On peut l'expliquer par les changements technologiques qui sont survenus dans le monde entier. Les gens essaient de maximiser…
Quand on passe de 3 à 2,5 p. 100, on est toujours dans la course, mais c'est quand même très peu. On n'a aucune influence. Désormais, la technologie va provenir essentiellement des grands pays producteurs, notamment les États-Unis, la Chine et l'Inde. Aujourd'hui, ce sont ces pays-là qui mènent le bal dans ce domaine.
Parfait.
Monsieur Wartman, vous avez mentionné l'ESB, et comme j'élève des bovins, j'en sais quelque chose. Vous avez parlé de la recherche et de la nécessité de rester à la fine pointe de la technologie, et je suis entièrement d'accord avec vous. Il y a plusieurs autres facteurs qui sont intervenus un peu après la crise de l'ESB, notamment la question des coûts. C'est quelque chose qu'on n'arrive jamais à contrôler, car on n'est jamais sûr de faire la bonne chose quand on fait de la recherche ou quoi que ce soit. Bref, le fait est que la crise est survenue au moment où nous étions en train d'augmenter la taille de nos troupeaux, comme l'ont fait les éleveurs de porcs pendant des années.
Ce n'était pas vraiment une question, mais je voulais simplement faire remarquer que d'autres facteurs y ont contribué. C'est tout ce que je voulais dire, mais à part ça, je suis absolument convaincu, qu'il s'agisse de phytogénétique ou de nourriture pour les animaux, que nous avons besoin de la recherche fondamentale et appliquée, et je suis totalement en faveur.
J'aimerais maintenant vous poser une question que me posent beaucoup de gens, surtout les agriculteurs biologiques de ma circonscription. Je suis moi-même agriculteur, et je comprends tout à fait pourquoi nous avons besoin de maïs, de soja et de blé Roundup Ready, par exemple. Mais je vous avouerai par contre que, à l'instar des adversaires de l'industrie biotechnologique et des OGM, je suis contre la luzerne Roundup Ready. Quelqu'un peut-il m'expliquer pourquoi ce produit est nécessaire, voire indispensable, et quel en est l'avantage?
Quelqu'un peut prendre la parole à ce sujet? Je crois que nous pouvons tous en parler. En tout cas je sais que moi, je le peux.
Je vais répondre. Je sais juste que c'est un produit dangereux, et qu'il faudrait qu'on fasse la lumière là-dessus. M. Vandenberg peut peut-être m'aider.
Je crois savoir que c'est à cause de l'un des principaux marqueurs génétiques qui permettent d'ajouter d'autres caractéristiques à la luzerne. Au départ, l'objectif était de faire en sorte que la plante puisse résister au Roundup grâce à un marqueur qui lui ajoute d'autres caractéristiques. C'est une théorie, mais c'est une possibilité.
L'autre possibilité, d'après ce que je sais, c'est qu'il s'agit d'une nouvelle espèce envahissante qui commence à affecter une grande partie de la production de luzerne en Amérique du Nord. C'est une espèce qui n'existait pas avant, et il va donc falloir détruire cette mauvaise herbe dans les champs de luzerne. C'est comme ça depuis des milliers d'années: quand on cultive la terre, les espèces finissent toujours par s'adapter.
Bien.
Je crois que c'est vous, monsieur Potter, qui avez dit que la recherche diminuait aux États-Unis. Chez nous, en faisons-nous toujours autant ou moins, par rapport aux États-Unis?
Excusez-moi. Je crois que celui qui l'a dit était au milieu du groupe; c'était peut-être vous, monsieur Vandenberg?
Je crois que ça a diminué. La recherche agricole dans le secteur public a diminué dans un certain nombre de pays. Je ne pourrais pas vous dire exactement ce qu'il en est par rapport aux États-Unis, si nous avons pris plus de retard ou pas, mais c'est peut-être une question qu'il faudrait étudier. Les sources d'information que j'ai indiquées dans ma déclaration liminaire pourraient à cet égard vous être utiles.
Je vais vous poser une dernière question. Lorsque notre comité de l'agriculture a fait une tournée en avril et mai derniers au sujet de l'avenir de l'agriculture et des jeunes agriculteurs, nous nous sommes rendus dans un centre de recherche que je ne nommerai pas. J'ai posé à l'un des chercheurs une question sur les produits dérivés de l'agriculture, notamment les déchets de maïs, qui servent à la fabrication de plastiques et d'autres équipements dans les voitures. Je lui ai demandé quelles recherches ils avaient faites dans ce domaine. À la ferme, traditionnellement, on enfouit ce type de déchets dans la terre pour la bonifier, mais si aujourd'hui ils servent à fabriquer des plastiques, il faut bien trouver autre chose pour bonifier la terre. Je lui ai donc demandé s'ils avaient fait des recherches là-dessus, et quels en avaient été les résultats. Il m'a répondu qu'ils avaient fait des recherches et que les premières conclusions n'étaient pas très positives.
L'un d'entre vous en sait-il davantage à cet égard? Doit-on continuer d'utiliser ces déchets pour la fabrication de plastiques, car on est tous d'accord avec le principe en soi, mais d'un autre côté, je ne suis pas sûr que ce soit bon pour la terre, à long terme, si ça se généralise?
C'est le prix des engrais dérivés du pétrole qui le détermine. C'est tout à fait vrai. Il y en a qui disent que la valeur commerciale de ces déchets est nulle, mais c'est totalement faux. C'est un produit qui a beaucoup de valeur.
Vous avez raison, Larry… Ils se trompent sur la valeur du produit. Pour les biocarburants, ils s'imaginent qu'il suffit de ramasser les déchets agricoles de la Saskatchewan pour fabriquer de l'éthanol. En ce qui me concerne, celui qui veut mes déchets doit en payer le prix.
Je serai brève. Le plus important c'est de poser la question, et de la poser tout entière, avec tous les tenants et les aboutissants. Autrement dit, quels sont les coûts et les avantages des deux options?
Encore une fois, la recherche pour le bien public est plus susceptible de le faire que la recherche commerciale, laquelle consiste simplement à prendre le produit pour fabriquer un autre produit qui sera vendu. Il faut encourager la recherche intégrale et exhaustive afin de permettre l'évaluation économique, l'évaluation biologique et l'évaluation à long terme du produit pour la terre.
C'est un élément important du message que nous devons communiquer: nous ne volons rien et nous ne faisons rien de répréhensible. Au contraire, nous consacrons un temps et une énergie considérables aux recherches nécessaires pour répondre à votre question.
Encore une fois merci.
J'ai deux questions à poser, et la première s'adresse à Bert. Pourriez-vous, pour que ça soit bien clair dans le procès-verbal et pour ceux qui le lisent, nous expliquer clairement la différence qui existe entre la transgénèse et la génomique? Vous avez dit tout à l'heure que la génomique offrait de nouveaux débouchés.
La transgénèse consiste essentiellement à transférer un gène, un fragment d'ADN, d'un organisme à un autre, et à s'assurer que ce gène est fonctionnel.
Par exemple, le gène de la tolérance à un herbicide peut provenir d'une bactérie. Cette bactérie est alors greffée à une plante, et elle fonctionne parce qu'elle est associée à une série de gènes qui lui permettent de fonctionner.
La génomique consiste à étudier les gènes présents dans les organismes que l'on cultive déjà. Prenons l'exemple des lentilles. Il en existe peut-être six ou sept variétés. Nos recherches indiquent que les variétés sauvages, voire la lentille elle-même, comportent un grand nombre de gènes dont nous ignorons tout.
La génomique nous permet de partir d'un organisme bien caractérisé — prenons l'exemple de l'une des variétés de luzerne — et, si nous en connaissons les gènes, de commencer à rechercher les mêmes gènes, à partir de la séquence d'ADN, dans les autres plantes que nous cultivons.
En fait, c'est de la biologie informatisée. Ça coûte beaucoup moins cher et ça se fait en six mois. Cela permet d'analyser ce que nous avons, plutôt que d'aller chercher des gènes à l'extérieur de l'organisme. En fait, il suffit d'avoir une trousse de tests d'ADN pour identifier les gènes, et pour parfois se rendre compte qu'ils existent déjà dans les plantes actuellement cultivées.
À mon avis, si nous décidons de faire la promotion de la génomique en disant aux gens qui sont réfractaires à la transgénèse que nous avons une autre solution, cela ajoutera de la valeur au concept de la protection de la biodiversité. Le Canada a ratifié ce traité.
Nous ne vivons pas dans un monde parfait, et l'industrie du pétrole en est sans doute un bon exemple. Personne ne va interdire le pétrole demain matin. Les gens demandent simplement qu'on l'améliore un peu pour qu'il ait moins d'effets négatifs. On pourrait adopter la même approche ici. Dans certains cas, les produits transgéniques sont utiles parce qu'il n'y en a pas d'autres, mais dans d'autres cas, il y a d'autres solutions, des solutions de compromis.
Tout à l'heure, William, vous avez dit qu'il fallait avoir suffisamment de zones tampons entre les différentes cultures. Je me demande dans quelle mesure c'est réaliste et faisable.
Brad, Bert ou William, qu'en pensez-vous? Est-ce que c'est un sujet sur lequel les deux solitudes, comme je les appelle, pourraient essayer de discuter franchement et faire éventuellement des recommandations aux gouvernements fédéral ou provincial sur la façon dont elles peuvent apprendre à coexister? Qu'en pensez-vous?
Je ne suis pas un spécialiste des types de brouillards de pulvérisation ou de la taille des barrières à ériger, mais encore une fois, on en revient à la question du niveau de tolérance. Si vous décidez de faire du biologique et d'avoir une tolérance zéro, ça coûte très cher, et par conséquent il faut s'entendre sur une tolérance raisonnable. Quel niveau de risque pour la santé peut-on raisonnablement tolérer en raison de l'infime présence d'organismes provenant du brouillard de pulvérisation? C'est une question qu'on est en droit de se poser.
Les études dont vous parlez ont déjà été faites. J'en reviens donc à la case départ: comprendre ce qu'est la biologie. Si les plantes s'autofécondent, il ne faut pas la même zone tampon que si les plantes se reproduisent par pollinisation croisée, avec les abeilles. Autrement dit, la zone tampon pour la luzerne ne sera pas la même que pour le lin.
Nous avons récemment rencontré des gens qui ont beaucoup étudié la question dans l'industrie du lin, notamment en raison de tout le débat sur les produits transgéniques. Apparemment, une barrière de 40 mètres serait adéquate pour le lin. Pour la luzerne, c'est sans doute un peu plus car il faut connaître la biologie des abeilles et la distance de pollinisation. Ça peut varier selon que vous utilisez des abeilles domestiques ou des mégachiles. Ça relève donc essentiellement de la connaissance scientifique, et une fois que ces données sont bien comprises, on peut établir des directives raisonnables pour créer des barrières ou des zones tampons qui sont un bon compromis pour tout le monde.
Excellente réponse. On en revient donc encore une fois à la question de la tolérance.
Je vais vous donner un autre exemple. Je suis en train de faire pousser du canola Genuity Roundup Ready. Mon voisin cultive une nouvelle variété, cette variété se retrouve dans une plante sur mon terrain, et elle résiste aux herbicides. Je pourrais vous en nommer plusieurs qui sont des cultures en surfaces restreintes. Faudrait-il lui interdire de cultiver l'aneth ou la nouvelle variété de camomille dans ma région parce qu'il risque de me contaminer autant que lui-même? On en revient toujours à la question de la tolérance, et la tolérance zéro n'est pas une option.
[Français]
Merci, monsieur le président.
Je veux simplement poursuivre la discussion amorcée tout à l'heure au sujet des investissements. On disait qu'en 2007, le secteur privé investissait deux fois plus dans la recherche que le gouvernement canadien. Rien ne laisse entendre que ce soit différent aujourd'hui. Même réunis, les montants accordés par les différents paliers de gouvernement n'arrivent pas à la hauteur des investissements du milieu privé.
Puisque vous êtes des chercheurs universitaires, vous êtes les mieux placés pour nous expliquer clairement comment cela fonctionne. Je suppose que l'approche vis-à-vis de la recherche est différente quand l'investissement vient du secteur privé que lorsqu'il vient du secteur public. Je ne parle pas ici, évidemment, de proscrire l'argent qui vient du secteur privé. Je ne dis pas non plus nécessairement que, de façon insidieuse, le secteur privé et les compagnies vont tenter de diriger une recherche vers tel ou tel résultat pour que cela fasse leur affaire. Cependant, dans la perception du public, c'est le genre de question, peut-être, qui se pose.
J'aimerais savoir de votre part, puisque vous oeuvrez à l'université, comment cela fonctionne exactement à partir du début. On fait une recherche sur tel ou tel sujet. L'investissement vient en partie ou en grande partie du privé. Quel est le processus que vous devez suivre?
[Traduction]
Je vais le faire.
Pour faire de la recherche dans le secteur public, il faut commencer par avoir une idée lumineuse. On rédige alors une proposition pour la présenter. La proposition est ensuite évaluée par un organisme public et, généralement, par d'autres scientifiques, afin d'en vérifier le bien-fondé. Ensuite, on reçoit la subvention, ou on ne reçoit rien du tout.
Il se peut qu'une entreprise privée connaisse votre champ d'expertise et vous demande de répondre à une question, ou bien qu'elle vous demande de travailler avec elle pour trouver une réponse au problème auquel elle fait face. Dans ces cas-là, vous déterminez avec elle le budget qui y sera consacré et le type de travail que vous ferez. Vous expliquez ce que vous voulez faire et combien il en coûtera, et elle vous dit si elle est capable de financer la recherche.
Je vais vous donner un exemple personnel. Je travaille avec une entreprise sur un projet d'insémination artificielle. J'ai commencé à examiner les molécules de la membrane du sperme pour voir comment elles influent sur la reconnaissance des oeufs par le sperme. Cela fait partie de la recherche de base, de l'observation et de la découverte. Il y a des entreprises qui vendent du sperme pour des taureaux de race laitière, pour des porcs ou pour des poulets. Elles voulaient savoir s'il était possible de mieux protéger leur stock de sperme afin de pouvoir le congeler et l'inséminer plus tard sur des femelles. J'ai donc travaillé avec ces entreprises pour voir comment je pouvais adapter les données que j'avais recueillies au cours de ma recherche de base, afin de mettre au point des méthodes de congélation et de décongélation garantissant une meilleure protection du sperme.
C'est ça la différence. Si je n'avais pas fait la recherche de base, je n'aurais pas pu mettre au point une application, et les entreprises n'auraient pas été intéressées, même s'il arrive que, de toute façon, elles ne soient pas intéressées. Parfois, elles ne vous paient que pour répondre à une question particulière, par exemple si une machine fonctionne ou pas.
Donc, on peut travailler avec des entreprises, mais la meilleure solution, au Canada, ce sont les partenariats entre une entreprise privée et un organisme fédéral, car cela permet d'offrir à cette entreprise une aide financière qui l'aidera à mettre au point de nouveaux produits, qui améliorera sa trésorerie et qui profitera à l'ensemble de l'industrie canadienne. Les partenariats public-privé fonctionnent extrêmement bien au Canada, bien mieux qu'aux États-Unis, au dire de mes homologues américains.
Dans mon cas, nous n'avons jamais réussi à attirer beaucoup d'investissements privés. Étant donné que nous nous intéressions à des cultures en surfaces restreintes — je veux parler des pois et des lentilles — , personne n'était prêt à investir là-dedans. En revanche, nous avons réussi à travailler avec des agriculteurs clairvoyants qui ont créé une organisation et qui, avec leur propre argent, ont investi dans la génétique. Jusqu'à présent, ils ont consacré à peu près 50 p. 100 de leur budget de recherche à la génétique. En échange, nous leur avons donné les droits de commercialisation sur tous les produits qui en ont résulté. C'est sans doute une situation assez unique. Elle existe peut-être pour l'asperge, mais dans l'industrie des céréales, c'est assez unique à l'échelle mondiale.
Lorsque la question de la tolérance aux herbicides est survenue, la transgénèse est devenue difficile sur le plan commercial. Nous en avons fait pendant environ trois ans, mais nous avons ensuite opté pour quelque chose qui reposait essentiellement sur la mutation. Nous savions qu'en ce qui concerne la tolérance aux herbicides, il existait une variation dans la population naturelle, et c'est comme ça que nous avons réussi à mettre au point des lentilles résistantes aux herbicides. Nous nous sommes alors entendus avec l'entreprise, de sorte que nous avons aujourd'hui un partenariat avec les agriculteurs et avec l'entreprise. En fait, nous touchons des redevances, non pas sur les semences, mais sur l'utilisation d'herbicides.
Il y a toutes sortes de façons de procéder, à condition de connaître la biologie et de trouver des partenaires.
Comme vous le savez, cette réunion est publique. Les Canadiens peuvent suivre notre discussion. À l'intention des téléspectateurs, j'aimerais que nous parlions un peu de la différence qui existe entre les OGM et les autres produits, et de ce qui relève du secteur de la biotechnologie.
Monsieur Vandenberg, vous avez dit que, lorsqu'on introduit dans une plante un gène ou une caractéristique extérieurs à la plante, on obtient un OGM, étant donné qu'on injecte à la plante un élément étranger, afin d'améliorer ses caractéristiques. Par contre, quand on étudie les gènes d'une plante et qu'on décide d'en améliorer, d'en développer ou d'en isoler certaines caractéristiques, ce n'est pas un OGM. Autrement dit, il s'agit alors d'améliorer les caractéristiques d'une plante pour en optimiser le résultat. Ai-je bien résumé la chose? Qu'en pensez-vous?
Oui. Quand on sait où se trouve le gène, on peut utiliser la technique naturelle de l'hybridation. Si cette technique n'existait pas, nous ne serions pas ici. Elle nous permet de suivre la trace des gènes de façon génomique. Pour un coût très modeste, on peut sélectionner une descendance particulière de souches génétiques et voir lesquelles contiennent les gènes qui nous intéressent.
Bien.
J'aimerais poser une autre question à l'intention de ceux qui suivent nos délibérations et qui ne sont pas dans la salle. Je ne m'adresse pas à l'un d'entre vous en particulier, pour ne pas empêcher celui qui a un meilleur exemple à donner de le faire.
Pouvez-vous me donner un exemple ou deux d'OGM que les consommateurs utilisent aujourd'hui? Ils ignorent peut-être même que c'est un produit OGM, et par conséquent, on sait que le risque est très faible étant donné qu'ils le consomment déjà et qu'il est déjà bien établi sur le marché, dans l'intérêt de tout le monde. Pouvez-vous également nous donner un exemple ou deux de produits qui ne sont pas des OGM, qui sont bien établis sur le marché et dont les consommateurs profitent?
Vous avez la parole.
Je dirais que le meilleur exemple est le canola, si vous me permettez d'en revenir une fois de plus à l'industrie du canola.
Il existe trois différents types de tolérance aux herbicides, si vous voulez, à l'intérieur des systèmes. Comme l'a dit M. Vandenberg, le premier consiste à recourir à une forme de mutagénèse, tandis que les deux autres ont recours à l'insertion traditionnelle du gène dans la plante. Les deux gènes qui sont insérés dans la plante sont fondés sur la capacité d'une cellule de métaboliser l'ammoniac. Voilà comment s'est effectuée la découverte: au moment de rincer les cuves servant à la fabrication du vin, des viticulteurs ont constaté que la moisissure résistait; ils ont fourni des échantillons au laboratoire pour en arriver à déterminer pourquoi l'ammoniac n'en venait pas à bout, puis ils l'ont inséré dans la plante.
L'autre découverte a été effectuée grâce à un purificateur d'eau. Des gens se sont rendu compte que l'appareil ne purifiait pas bien l'eau, et qu'il tuait en fait tous les organismes photosynthétiques. Je cultive ces trois types de canola à ma ferme. Si vous les pressez pour en extraire l'huile, que vous placez cette huile dans un récipient d'huile de canola, vendu par exemple chez Loblaws, et que vous apportez ensuite cette huile au laboratoire pour fins d'analyse, il est impossible d'établir ne serait-ce qu'une distinction quant à l'origine du produit. Les deux sont à l'origine d'un nouvel événement, mais à l'intérieur de la plante. Vous ne feriez aucune...
D'accord. L'huile de canola est un parfait exemple de produit génétiquement modifié grandement accepté. Les consommateurs l'achètent au magasin et ne se posent pas de questions.
De même, si vous aviez une huile biologique ou encore une huile européenne totalement conventionnelle dans cette même bouteille et que vous la faisiez analyser au laboratoire, vous ne seriez pas à même de distinguer laquelle est laquelle. Elles sont toutes de l'huile de canola.
D'accord, c'est un exemple percutant.
Pouvez-vous nous présenter des exemples de biotechnologies qui ne sont pas de nature génétiquement modifiée, dont bénéficient les consommateurs? Avez-vous des exemples à nous donner?
La plupart des composés pharmaceutiques d'aujourd'hui sont des exemples de produits génétiquement conçus qui sont aussi bien ingérés qu'injectés.
Tous les vaccins administrés aujourd'hui aux animaux comme aux humains sont des produits de la biotechnologie.
D'accord. Nous allons aborder cette question dans le cadre de notre visite de la VIDO-InterVac cet après-midi.
Je n'ai peut-être pas le bon chiffre, mais je crois qu'on trouve du soja génétiquement modifié dans environ 40 p. 100 des aliments transformés vendus en magasin, du moins en Amérique du Nord. Le soja est omniprésent dans les aliments transformés vendus en magasin, et cela ne pose aucune problème.
Je viens de l'Est de l'Ontario, tout près d'Ottawa, où on ne cultivait pas jadis le soja, simplement parce que la plante n'était pas adaptée au climat dans cette région. Aujourd'hui, il s'agit d'un produit extrêmement important cultivé par des agriculteurs partout dans ma circonscription, parce que la plante a été modifiée pour mieux s'adapter à l'environnement de l'Est de l'Ontario.
Il est rassurant de savoir que ce produit est maintenant intégré en toute sécurité aux aliments transformés, et que les gens sont heureux de le consommer.
À quelques exceptions près, tous les végétaux que vous achetez pour planter dans votre jardin au printemps sont un autre exemple très simple d'une biotechnologie non génétiquement modifiée. Ils ont été créés par l'intermédiaire de la culture de tissus, qui consiste à faire pousser des plantes identiques à partir des cellules d'une seule plante. Ces végétaux sont le produit de la biotechnologie, sans être des OGM. Je vous parierais que les pensées, les coléus ou les tas d'autres plantes que vous achetez au centre jardin sont produits par le truchement de la culture de tissus. Ce sont des produits de la biotechnologie; ce ne sont pas des OGM.
Je peux vous donner un autre exemple d’aliments. C’est très courant pour les légumes. Les cultures légumières avec lesquelles je travaille ne se prêtaient pas vraiment à l’utilisation des technologies transgéniques à cause de difficultés techniques. C'est pourquoi nous avons décidé de transférer des gènes de cultures apparentées, donc des gènes de résistance aux maladies de cultures apparentées à la fève. Résultat? Nous passons au peigne fin le système de culture de tissu pour sauver les embryons. Nous avons ainsi pu produire de nouvelles variétés de fève qui nécessitent moins de pesticides.
Merci.
Je ne voulais pas vous interrompre; je croyais que vous aviez terminé.
Monsieur Easter, vous avez cinq minutes.
Merci, monsieur le président.
Pourrions-nous proposer à nos collègues de la Bibliothèque du Parlement de se renseigner pour nous sur les fonds publics accordés à la recherche? Il faudrait revenir en arrière de 25 ans, car je crois que nous sommes passés au financement symétrique en 1996 ou dans ces années-là. Il faudrait comparer la recherche financée par le secteur public à celle financée par le secteur privé et combiner les deux pour avoir un tableau complet de la situation au Canada au cours des 25 dernières années, puis établir une comparaison avec les États-Unis et peut-être d’autres pays. Ces données nous donneraient un point de départ.
On cultive maintenant du canola à l’Île-du-Prince-Édouard aussi, et c’est une culture sans OGM. Le marché inversé sur lequel nous écoulons nos produits se trouve au Japon, et le canola avec et sans OGM y est accepté. L’entreprise qui importe ce produit a beaucoup d’exigences. Elle vient sur l’île et procède à une inspection pour déterminer s’il y a des risques de contamination dus au canola modifié génétiquement, entre autres.
Cette histoire m’amène à la question de l’étiquetage. Quelqu’un — je ne me rappelle plus qui — y a fait allusion plus tôt. Chose certaine, si les produits contenant des OGM n’étaient pas étiquetés au Japon, nous ne serions pas sur ce marché.
Quelle est votre position sur l’étiquetage? C’est une question qui porte à controverse.
Je peux répondre. La controverse vient du fait que l’étiquetage peut être obligatoire ou volontaire.
À mon sens, le consommateur moyen n’existe pas. Les marchés sont différents. Je suis donc pour l’étiquetage volontaire. Si des entreprises souhaitent vendre des produits sans OGM et qu’il y a un marché inversé pour ces produits, elles choisiront de les étiqueter pour que les consommateurs puissent choisir ces produits.
Le fait que le Canada se soit doté de normes claires sur les produits biologiques a permis, je crois, de mieux définir ce qu’on entend par « biologique ». Parfois, une part importante de l’étiquetage consiste à avoir des normes qui définissent les produits.
Actuellement, le grand défi en Europe consiste à passer à l’étiquetage obligatoire; en gros, il s’agit d’imposer des coûts à quiconque veut prouver que son produit ne contient pas d’OGM. Je trouve que l’étiquetage volontaire permet aux consommateurs qui souhaitent payer pour ce type de produits de se les procurer.
Quelqu’un veut-il ajouter un commentaire à ce sujet? Je crois qu’on a dit plus tôt que les gens ne lisent pas les étiquettes, de toute façon.
Allez-y, Andrew.
C’est un simple commentaire. Je ne crois pas qu’on puisse parler de communication si cette information n’est pas donnée aux consommateurs. Le choix leur appartient, en fin de compte.
Récemment, j’ai entendu dire que si c’est si bon, pourquoi ne pas écrire en grosses lettres « produit contenant des OGM certifié »? Un commentaire intéressant, je trouve.
L’autre point important — et certains d’entre vous l’ont mentionné — est la lenteur et la lourdeur de notre système de réglementation par rapport à celui des autres pays. Choisissez un sujet — l’immigration, AgriFlex, peu importe — et parlez-en à votre député: vous verrez sans nul doute des frustrations dues à la réglementation. On vous dira à quel point la situation est grave.
Mais pourquoi donc? Qu’il s’agisse de l’ACIA ou d’un autre importe peu. Andrew a parlé d’AgriFlex. Pour moi, une demande présentée à AgriFlex devrait se régler en six semaines, sans plus. Qu’avez-vous vécu de votre côté? Nous devons nous attaquer à cette question en tant que pays, car nous sommes perdants sur tous les plans à cause de la lenteur extrême de notre système. Je peux comprendre pourquoi les entreprises se tournent vers le Midwest américain pour la recherche. C’est un gros marché. Si nous voulons le faire, il faut nous concentrer sur des microclimats comme l’Île-du-Prince-Édouard et la vallée de l’Annapolis, ou des climats comme ceux du Sud et du Nord de la Saskatchewan.
Qui veut répondre?
Je ne sais pas quoi dire sur AgriFlex. Nous attendons une réponse à notre demande depuis près d’un an. Nous n’avons aucune nouvelle.
Il existe d’autres organismes. On a parlé de Génome Canada, qui ne laisse pas les choses traîner. Ça montre que c’est possible. Je ne sais pas pourquoi dans ce cas-là c’est si…
Quand on parle de réglementation, l’ACIA est devenue si allergique aux risques qu’il ne s’agit même plus de déterminer le niveau de risque; il faut prouver qu’il n’y a aucun risque. C’est impossible.
Je peux vous assurer que l’usine de Larsen, en Nouvelle-Écosse, a fermé en grande partie parce qu’un des inspecteurs de l’ACIA a fait du zèle. C’était impossible.
Restons sur le sujet de l’ACIA. Je ne comprends absolument pas pourquoi elle opterait pour une longue liste de matières à risque spécifiées dans le secteur de l’élevage bovin alors que nous avons une industrie nord-américaine depuis des dizaines d’années et que nous sommes censés faire concurrence aux États-Unis qui, eux, ont une courte liste de MRS. Pourquoi ne pas faire un effort supplémentaire et évaluer l’impact sur notre industrie? Mais impossible de la faire changer d’avis; c’était sa décision, irrévocable et non négociable.
Le secteur de l’élevage bovin a insisté pour que ça se fasse, car il essayait de se qualifier pour entrer sur des marchés étrangers. Est-ce que ça a fonctionné? Je n’en suis pas convaincu, mais je crois que c’est ce qui a motivé cette décision.
Monsieur Hoback, vous avez les cinq dernières minutes.
Merci, monsieur le président.
Ce fut une réunion très instructive. Je crois que nous sommes nombreux à en avoir appris beaucoup sur le sujet. J’ai bien hâte aux visites cet après-midi. Je crois qu’elles nous ouvriront les yeux. Quand on touche de ses mains, on comprend mieux.
Je veux parler de l’éducation, et de ceux à qui revient la responsabilité d’éduquer. Je ne parle pas uniquement de l’éducation des consommateurs, mais aussi des étudiants, de leur sensibilisation.
Mary, je commencerais par vous. Comment partage-t-on ce rôle? Qui doit s’occuper de l’éducation des consommateurs et des étudiants?
Légalement, le rôle d’éduquer les étudiants revient évidemment à la province. Les universités — monde dont je fais partie — prennent cette responsabilité très à coeur. Nous comprenons que nous sommes un moyen éprouvé d’assurer le transfert des connaissances. Toutes nos facultés doivent s’acquitter de trois tâches: enseigner, faire de la recherche et fournir ce que nous appelons des « services ». Ces services consistent en grande partie à collaborer avec des personnes qui travaillent dans ces différents secteurs. Notre collège est très fort là-dessus; nous sommes sur le terrain.
Mais éduquons-nous les consommateurs comme vous l’entendez? Je dois dire que nous n’avons pas ce talent. Nous avons besoin d’aide. Dans ce genre de conversation, mal comprendre le terme « biotechnologie » revient à mal comprendre le terme « agriculture ». Quand on dit « agriculture », plus de 90 p. 100 de la population canadienne s’imaginent un fermier en salopette debout dans un champ avec sa fourche. Ils ne voient ni GPS, ni banques, ni instituts de recherche à la fine pointe de la technologie.
Le message à faire passer, c’est la nécessité d’informer la population sur les sujets qui revêtent le plus d’importance pour elle. Les émeutes de la faim qui éclatent partout dans le monde feront vraiment… Nous avons une occasion à saisir, mais nous devons faire front commun sur la question de la communication publique.
J’ai appris un fait très intéressant lors d’une réunion à laquelle j’ai assisté il y a deux ou trois ans à l’Université du Wisconsin. Là-bas, on tentait déjà dans les années 1930 d’enseigner au grand public les bienfaits des vitamines et d’une alimentation saine. On avait engagé un artiste et un écrivain au niveau collégial pour faire passer le message au public. Les peintures sont exposées à l’Université. Elles sont très intéressantes. C’était un exercice de communication, le genre d'exercice qu’on ne prend pas suffisamment au sérieux.
Brad, vous avez parlé de diminuer la superficie emblavée de vos terres. Des préoccupations sont ressorties de mes discussions avec des chercheurs, du fait qu’aucune recherche n’est menée sur les céréales, par exemple le blé et l’orge.
Comment peut-on éviter les situations néfastes pour l’environnement? Je pense notamment à la prolifération des cultures de canola ou aux rotations excessives dues à la non-rentabilité des céréales. Que suggérez-vous?
Il faudrait aller faire un tour de camion avec une caisse de bière pour tout décortiquer, mais je vais vous expliquer du mieux que je peux.
Le génome est prêt. Allons-nous utiliser le génie génétique sur l’ensemble de la production de blé, oui ou non? Si la réponse est non, le secteur privé ne s’en mêlera pas, pour les raisons invoquées plus tôt; il n’utilisera pas les traits exclusifs pour engranger des profits. Si c’est le scénario qui nous attend, l’amélioration génétique sous la gouverne du secteur public devra s’implanter dans le secteur des céréales.
Certains joueurs importants ont annoncé publiquement qu’ils doubleraient le rendement du maïs; ça fait partie de leur programme. Je ne sais pas s’ils peuvent y arriver ou non, surtout si on songe aux aquifères qui s’assèchent dans le Midwest et à tous les autres problèmes. Mais supposons que oui. Qu’arrivera-t-il aux agriculteurs canadiens sur le marché mondial s’ils ne sont plus concurrentiels une fois doublé le rendement du maïs?
En Saskatchewan, nous concentrerons notre production dans le secteur des légumineuses à graines et des oléagineux pour être rentables. Nous aurons aussi des variétés de maïs tolérantes au froid; ça devrait se faire sous peu. À une heure au nord de Regina, 640 acres seront consacrés à du maïs Roundup Ready de 2 050 degrés-jours. Nous nous sommes procuré un bec cueilleur et un semoir à maïs. Le processus est enclenché.
Sur le plan agronomique, les cultures les mieux adaptées sont les céréales, comme vous le savez. Je crois fermement que le financement doit provenir du secteur public, car le blé ne permet pas une telle chose. Je ne sais pas si Bert est du même avis.
Je tiens à souligner que des recherches exceptionnelles sur l’orge ont été réalisées au cours des dernières années, et que c’est loin d’être terminé.
Des recherches sur les céréales ont cours dans notre collège, et des recherches sur la tolérance du blé à la cécidomyie du blé. C’est du concret. Mais j’abonde dans le même sens que mes collègues: ce n’est pas encore appliqué de manière à permettre d’optimiser la production de céréales ici et de les rendre beaucoup plus concurrentielles.
J’aimerais à mon tour ajouter quelques mots sur le blé.
Il ne fait aucun doute que les grandes multinationales misent sur le blé génétiquement modifié. Elles vont s’imposer et devenir propriétaires de bon nombre de ces cultures. À l’université, nous avons mis sur le marché une nouvelle variété de blé dur; depuis un an, c’est trois nouvelles variétés de blé qui sortent de nos murs. Nous faisons ce genre de recherche, mais ça ne donne pas une culture rentable aux producteurs.
L’une des choses à faire est de mettre l’accent sur la rentabilité, de manière à produire des cultures dont l’utilisation est efficace. Autrement, si on cesse l’amélioration génétique dans le secteur public et qu'on n'aide pas les producteurs à avoir une culture rentable, nos consommateurs devront payer le prix fixé par les multinationales pour du blé génétiquement modifié. Elles misent là-dessus.
Si nos recherches ne portent ni sur la résistance aux maladies, ni sur la tolérance à la sécheresse ou aux milieux riches en eau, ni sur la production de blé destiné à une fin précise — le blé dur pour les pâtes, par exemple —, nous laissons le champ libre aux multinationales. Il faut prendre une décision mûrement réfléchie dans un sens ou dans l’autre et non se laisser porter par les événements.
Merci à tous d’avoir participé à la réunion.
Je crois que la séance de ce matin est un bon exemple de ce qu’on peut accomplir lorsqu’on met de côté les aspects sentimental, rhétorique et politique pour se concentrer sur les faits. Pour ma part, c’était très instructif. J'en sais maintenant beaucoup plus sur la biotechnologie et les OGM qu’à mon arrivée ce matin.
Je vous remercie tous grandement. J’ai hâte de visiter les sites cet après-midi. Je suis sûr que nous reverrons certains d’entre vous, sinon vous tous. Je ne sais pas avec exactitude qui y sera.
Merci encore. C’est très apprécié.
Chers collègues, nous allons dîner ici, si je ne m’abuse. Je vous rappelle que l’autobus part à 13 heures précises. Nous n’embarquons pas à 13 heures, nous partons à 13 heures.
La séance est levée.
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