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AGRI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire


NUMÉRO 047 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 3 février 2011

[Enregistrement électronique]

(1100)

[Traduction]

    Je crois que nous avons le quorum, et puisque nous entendrons cinq témoins aujourd'hui, j'aimerais commencer.
    Je remercie nos témoins d'être présents aujourd'hui. Nous en sommes ravis. Comme nous serons sur la route la semaine prochaine, nous voulions que le temps que nous passons à Ottawa avant notre départ nous soit utile.
    Nous allons entendre notre premier témoin, M. Schmitz, qui représente l'Université de la Floride. Vous disposez d'un maximum de 10 minutes. Allez-y, s'il vous plaît.
    Devons-nous parler au microphone, ou c'est comme nous le voulons?
    Monsieur, de toute façon, le microphone est contrôlé à partir d'en arrière ici. Lorsque ce sera au tour de nos membres francophones de poser des questions — M. Bellavance et Mme Bonsant —, vous voudrez probablement être prêt à entendre l'interprétation en anglais.
    Merci de m'avoir invité à comparaître.
    Je suis un universitaire depuis plus de 40 ans, et j'ai passé ma carrière à l'Université de la Californie à Berkeley. J'enseigne présentement à l'Université de la Floride et aussi à l'Université de la Saskatchewan. Je me suis longuement penché sur les changements technologiques dans le domaine de l'agriculture, y compris le maïs hybride et la mécanisation, surtout la mécanisation en Californie. De plus, je me suis longuement penché sur certains secteurs de la biotechnologie.
    Je tiens à dire que personne ne me paie pour vous faire voir un seul côté de la médaille. Je trouve que de nos jours, beaucoup d'experts-conseils vont vous dire seulement ce qui est bon pour eux parce que leur portefeuille penche de ce côté. Je ne suis donc payé par aucun groupe comme Monsanto ou la Commission canadienne du blé dans le cadre de mon témoignage.
    Mes observations seront très claires. En fait, mes propos sont tirés d'un livre que nous venons de publier à l'Université de Toronto. Il a pour titre Agricultural Policy, Agribusiness, and Rent-Seeking Behaviour. Il traite de la politique agricole, des changements technologiques, et il contient un chapitre sur les organismes génétiquement modifiés.
    Les écrits sur la biotechnologie ont connu une croissance rapide, et beaucoup d'études portent maintenant sur les OGM et d'autres produits biotechnologiques. L'une des raisons pour laquelle les résultats ne sont pas nécessairement compatibles, c'est que nous envisageons parfois l'économie à partir d'un point de vue différent. J'ai toujours envisagé l'économie à partir du point de vue de ce que nous appelons « l'économie de bien-être », qui est une façon déguisée de dire « analyse coûts-avantages ». Il s'agit d'une approche standard qu'adoptent la plupart des théoriciens de l'économie. Je ne sais pas si c'est le cas dans les autres domaines, mais je sais que c'est accepté en économie, le domaine dans lequel j'ai obtenu un doctorat.
    Cela dit, je vais seulement faire deux ou trois observations tirées de notre livre et une autre, des articles que nous avons écrits. En fait, je vais vous remettre un article destiné aux non-spécialistes qui donne un aperçu de l'industrie de la biotechnologie.
    Tout d'abord, le premier point que nous faisons valoir, c'est celui de l'acceptation par le consommateur, et c'est ici qu'une partie du débat sur les répercussions de la biotechnologie entre en jeu. Il y a mes collègues de l'Université de la Saskatchewan — Peter Phillips a déjà témoigné, et je le connais très bien, et il semble qu'il fasse partie de ce groupe. Son point de vue est peut-être quelque peu différent de celui de l'un de ses collègues en économie, Richard Gray, et il en va de même pour sa façon de mener l'analyse coût-avantages sur les OGM.
    De plus, à titre d'exemple, Colin Carter était mon étudiant à l'Université de la Californie de Davis. Il semblait être fortement en faveur du blé génétiquement modifié, par exemple, et les conclusions qu'il a tirées au sujet des avantages et des coûts du blé génétiquement modifié étaient complètement différentes de celles de Richard Gray et de Hartley Furtan, de l'Université de la Saskatchewan, pour ce qui est des gains. Colin voit le blé génétiquement modifié de façon très positive. Hartley Furtan, Richard Gray et d'autres personnes le voient de façon plutôt négative.
    La grande question, c'est celle de l'acceptation des OGM par le consommateur. Je dois convenir que tout ne peut pas être fondé sur des données scientifiques, notamment si les OGM seront rentables pour nous ou non. Les données scientifiques ne jouent qu'un rôle, et il faut également amener le consommateur à accepter les OGM.
    Par exemple, dans le secteur du blé, à l'heure actuelle, des comités évaluent différentes variétés de blé. Les huit différentes variétés de blé commun sont fondées sur des données scientifiques, mais c'est également le cas pour les critères d'acceptation par le consommateur. Par conséquent, ils ont une façon officielle de déterminer ce que le consommateur accepte en plus des aspects scientifiques. Le blé est donc également un bon exemple en ce qui concerne l'acceptation par le consommateur.
(1105)
    Il paraît que Monsanto a mené une étude, et je crois que Colin et d'autres y ont participé. Ils en sont venus à cette conclusion, bien connue je crois, que le blé génétiquement modifié de Monsanto présente de très nombreux avantages. Nous en avons fait la partie sur l'acceptation par les consommateurs. Le seul élément qui me tracasse, c'est que si quelqu'un d'autre faisait la même étude, je peux vous garantir que je pourrais vous faire la preuve d'un rapport coûts-bénéfices variant de 1,0 à 6,0, selon mes hypothèses de base sur l'acceptation par les consommateurs.
    Pour vous le prouver, nous pourrions prendre l'un des modèles d'échanges internationaux que nous utilisons pour le blé et d'autres céréales. Ensuite, il faut se demander qui a mené l'étude, d'où proviennent les données, et qui a été interrogé. C'est la même question que... Actuellement, nous examinons le dossier du déversement de pétrole dans le golfe; nous en évaluons les coûts. Toutefois, la même argumentation pourrait être utilisée dans des situations similaires, comme l'évaluation de la mesure de la volonté de payer et l'acceptation par les consommateurs des OGM.
    Il s'agit du dernier point que je soulève dans ce premier document sur l'acceptation par les consommateurs. J'ai participé à plusieurs procès en lien ou non avec la biotechnologie. Cependant, cette question est aussi pertinente dans le cas des effets, entre autres, de la présence de lignes électriques sur une propriété privée ou du transport d'équipements nucléaires au Canada.
    Les juges disent toujours que ce n'est pas à la science de déterminer si les lignes électriques sont réellement dangereuses pour les propriétaires; c'est la perception des consommateurs qui dicte leur dangerosité. En gros, la première partie de ce document traite de l'acceptabilité par les consommateurs.
    Plus loin, nous examinons le concept de la rentabilité des producteurs. On dit toujours que les évolutions technologiques, par exemple, pour créer du maïs hybride ou de nouvelles variétés de canola, sont un gage d'importants profits pour les producteurs. Or, ce n'est pas vrai. Je peux utiliser des modèles pour vous prouver que cela peut avoir, au contraire, des effets négatifs pour les producteurs. Je ne suis pas pessimiste, et je ne suis ni pour, ni contre les OGM. Cela fait également partie du marché et de la dynamique des économies. Il est donc difficile de généraliser.
    J'ai bien aimé l'excellente présentation de Peter Phillips sur le canola, mais je n'aime pas le fait d'essayer d'appliquer la situation du canola aux autres produits de base. Par exemple, le cas du canola est unique, parce qu'il produit d'énormes avantages pour l'être humain. Selon moi, ses prévisions ou les vôtres sont peut-être même un peu pessimistes au sujet des avantages des OGM. Richard Gray et d'autres ont mené des études sur les effets sur la santé des nouvelles variétés de canola. Ce dossier est donc très fourni.
    Vous vous demandez probablement pourquoi l'Europe accepte les huiles faites à partir d'OGM, mais pas les autres OGM. Comme nous l'apprend la biotechnologie, c'est de la manière que vous consommez le blé et les autres produits qui fait toute la différence, parce que vous consommez directement l'OGM. Toutefois, dans le cas des huiles, ce n'est pas le cas; il s'agit d'une protéine résiduelle. Il faut comprendre pourquoi un produit de base est accepté alors qu'un autre ne l'est pas. Nous passons donc le plus clair de notre temps à débattre de la question de l'acceptation des producteurs.
    Nous discutons ensuite de l'affaire StarLink. J'ai participé au procès aux États-Unis à titre de témoin-expert de la poursuite. Dans ce dossier, j'imagine que Greenpeace ou d'autres ont découvert le gène StarLink dans un Taco Bell. Les producteurs de maïs ont poursuivi Aventis, parce que l'entreprise avait mis sur le marché un maïs génétiquement modifié qui n'était pas vraiment acceptable ou approuvé. Cette affaire nous a permis d'apprendre, et vous devez bien le comprendre, que les coûts d'opérations, ou les coûts de ségrégation, sont parfois énormes lorsque des variétés génétiquement modifiées sont introduites dans un milieu et mélangées aux variétés non modifiées. C'est particulièrement vrai dans le cas des pays ayant une politique de tolérance zéro à l'égard des OGM.
    À l'heure actuelle, le Japon est le plus grand acheteur de blé canadien. Je peux vous garantir que le Japon n'achètera jamais de blé canadien génétiquement modifié. Le Japon le dit haut et fort, et cette attitude se reflète dans le livre par certaines études sur l'acceptation par les consommateurs au Japon, en Inde et ailleurs. D'autres pays accepteraient probablement du blé génétiquement modifié ou d'autres OGM, mais ce n'est pas le cas du Japon.
    Lorsque le maïs StarLink a été mélangé à d'autres produits de base, les Japonais s'en sont mêlés. Ils ont exigé que des tests soient effectués sur le maïs StarLink non seulement aux États-Unis, mais également au Japon, où les représentants ont en fait refusé de laisser entrer sur le marché une énorme quantité de maïs. Les Japonais ont une politique de tolérance zéro. Lorsqu'un pays a ce genre de politique sur un produit de base, il est très coûteux de garder les deux cultures séparées pour que le maïs génétiquement modifié ne se mélange pas au maïs qui ne l'est pas. C'est valable également pour les autres OGM, comme le blé génétiquement modifié.
(1110)
    Je pourrais faire de nombreux autres commentaires. Selon moi, chaque OGM doit faire l'objet d'une étude distincte. Je crois également qu'il faut suivre un processus dans lequel il est important d'être pratiquement certain que le produit final sera accepté par les consommateurs.
    Pour y arriver, vous devez savoir exactement la caractéristique qui sera introduite dans le produit de base pour pouvoir vérifier si les consommateurs l'acceptent. Vous ne pouvez pas simplement demander à un acheteur japonais s'il accepte les OMG. Vous devez exprimer beaucoup plus précisément la nature du produit et votre objectif.
    J'ai parlé plus de 10 minutes. Désolé.
    Merci beaucoup, monsieur Schmitz. Ce n'est pas grave.
    Passons maintenant à MM. Nault et Darier. M. Darier est le représentant de Greenpeace au Québec, et M. Nault est seulement un représentant — pas seulement dans le sens péjoratif, monsieur Nault.
    Vous vous partagerez les 10 minutes, s'il vous plaît.
    Merci.

[Français]

    Je suis représentant du Réseau québécois contre les OGM. Greenpeace et les AmiEs de la Terre de l'Estrie forment un regroupement. Cela vous sera expliqué plus tard.
    Premièrement, je voudrais remercier le comité de nous avoir invités aujourd'hui.
    Avant de commencer, je voudrais vous présenter notre délégation du Réseau québécois contre les OGM. Il y a M. Nault, bien entendu, des AmiEs de la Terre de l'Estrie. Je voudrais vous rappeler que nous avons soumis un mémoire, dont vous avez une copie écrite. Mes propos aujourd'hui seront un peu différents afin que je respecte les 10 minutes allouées.
    Notre réseau vise à regrouper tous les opposants aux organismes génétiquement modifiés afin de créer un solide réseau entre les différents groupes et ainsi travailler de concert sur certaines campagnes. Ce réseau facilite particulièrement l’échange d’information et d’idées d’action pour un avenir sans OGM.
    Nous représentons une vingtaine d’organisations oeuvrant notamment en environnement, en défense des consommateurs, en agriculture et en santé; vous avez la liste sur notre site Internet. Nous travaillons très étroitement également avec le Réseau canadien d’action sur les biotechnologies.
    Par notre présence ici aujourd'hui, notre réseau voudrait contribuer à votre réflexion sur les technologies agricoles. Par cette présentation orale, nous voudrions nous concentrer au moins sur un aspect, qui est, en fait, celui du rapport de la Société royale du Canada de 2001. Nous espérons que les visites que vous ferez la semaine prochaine sur les campus seront très fructueuses. Nous espérons également pouvoir, comme public, avoir le compte rendu de ces rencontres pour voir ce que vous allez examiner et ce que les gens ont à dire.
    Si je veux me concentrer sur le rapport de la Société royale du Canada, c'est parce qu'aujourd'hui, ou dans quelques jours, nous soulignerons une date historique, soit le 10e anniversaire du rapport de la Société royale du Canada de 2001, qui s'intitule « Éléments de précaution: recommandations pour la réglementation de la biotechnologie alimentaire au Canada ». J'en ai ici une copie que vous pouvez regarder. La version française compte quelque 280 pages. Je vous donne le contexte. C'est un rapport qui avait été commandé par le gouvernement fédéral à l'époque, et préparé par 14 experts indépendants. Il ne s'agissait pas de membres de notre réseau, mais d'experts scientifiques de tous horizons du milieu universitaire. Ce rapport comprend 58 recommandations. Comme le titre l'indique, ce rapport met vraiment l'accent sur la précaution.
    Il est hors de question de lire toutes les 58 recommandations, mais je voudrais prendre le temps d'en lire quelques-unes, pour alimenter un peu les propos qui ont été tenus par la personne avant moi:
    7.1 Le Comité d’experts recommande que l’approbation pour la culture de nouveaux organismes transgéniques ou leur utilisation comme aliments ou comme aliments pour animaux soit assujettie à une évaluation scientifique rigoureuse des incidences potentielles de ces organismes sur l’environnement ou la santé humaine. Les tests effectués dans le cadre d’une telle évaluation scientifique devraient remplacer la pratique courante de l’utilisation du concept d’équivalence substantielle comme seuil de décision en matière de réglementation.

    7.2 Le Comité d’experts recommande que la conception et la mise en oeuvre des tests d’évaluation de risques des nouveaux organismes transgéniques s’effectuent en consultation ouverte avec la communauté d’experts scientifiques.

    7.3 Le Comité d’experts recommande que l’analyse des résultats de tous les tests effectués sur les nouveaux organismes transgéniques soit revue par un comité d’experts approprié[s] et indépendants provenant de toutes les disciplines; ce comité serait tenu de rendre et de justifier [ses] décisions dans un cadre public.

    8.1 Le Comité d’experts recommande l’application du principe de précaution en matière de réglementation qui propose qu’aucune nouvelle technologie ne doit être présumée sécuritaire en l’absence de fondements scientifiques fiables permettant de conclure à son innocuité. Le Comité d’experts rejette le recours au concept d’équivalence substantielle comme seuil de décision pour exempter les nouveaux produits GM d’évaluations d’innocuité rigoureuses sur la seule base de similarités superficielles; une telle procédure réglementaire ne constitue pas une approche prudente qui requiert l’établissement d’une preuve d’innocuité.

    8.2 Le Comité d’experts recommande que le fardeau principal de la preuve incombe à ceux qui proposent d’offrir des produits alimentaires issus de la biotechnologie et que ceux-ci soient tenus d’effectuer l’éventail complet des tests nécessaires pour faire la démonstration fiable que ces produits ne présentent pas de risques inacceptables.

    8.3 Le Comité d’experts recommande qu’en présence de bases scientifiques raisonnables, soit théoriques soit empiriques, établissant prima facie la possibilité qu’un produit peut présenter des effets délétères pour la santé humaine, la santé des animaux ou l’environnement, le fait que les résultats des tests disponibles ne permettent pas d’identifier, avec un degré de certitude élevé, le risque, ou le niveau de risque, posé par le produit ne doit pas empêcher l’imposition de contraintes réglementaires.

    8.4 Comme mesure de précaution, le Comité d’experts recommande que la possibilité de risques graves pour la santé humaine, de perturbations importantes et irréversibles des écosystèmes naturels ou d’une importante réduction de la biodiversité, entraîne le recours aux meilleures méthodes scientifiques pour réduire l’incertitude associée à ces risques. L’approbation de produits présentan[t] de tels risques devrait être reportée jusqu’à ce que l’incertitude scientifique soit ramenée à un niveau minimal.
(1115)
    Je vais m'arrêter là; il y a 58 recommandations. Je ne vais pas vous bombarder de recommandations de la Société royale du Canada, laquelle constitue, je vous le rappelle, la plus haute instance scientifique au Canada. Elle a quand même une certaine crédibilité en la matière.
    Malheureusement, les recommandations énoncées dans le rapport de la Société royale du Canada ont été très largement ignorées par le gouvernement. Voici ce que le gouvernement a fait du rapport: il l'a simplement jeté.
    En 2004, soit trois ans après le dépôt de ce rapport, le commissaire à l'environnement et au développement durable confirmait et illustrait avec plus de détails, dans un audit de l'Agence canadienne d'inspection des aliments, ce que dénonçait trois ans plus tôt le rapport de la Société royale du Canada.
    Pratiquement rien n'a changé depuis 2001. Pire encore, les plantes GM avec multiples insertions de gènes, par exemple le maïs StarLink, ont été autorisées sans évaluation spécifique. Les animaux GM, particulièrement le cochon GM, se rapprochent très rapidement de l'autorisation. Le saumon GM pourrait être commercialisé bientôt.
    Le Canada n'a toujours pas ratifié le protocole de biosécurité des Nations Unies, alors que 160 pays l'ont fait. Les consommateurs attendent toujours l'étiquetage obligatoire des OGM qu'une quarantaine de pays ont obtenu.
    L'autorisation de la luzerne GM va engendrer une crise, et j'espère que vous êtes conscients de cette crise à venir.
    Alors, que peut faire votre comité? En fait, nous avons émis cinq recommandations de base.
    Premièrement, votre comité devrait encourager tous les députés à voter en faveur du projet de loi C-474. Il ne va pas tout résoudre, mais il permettrait au moins de protéger les agriculteurs des impacts économiques d'une mauvaise politique en matière de gestion de la biotechnologie.
    Deuxièmement...
(1120)

[Traduction]

    Monsieur Darier, l'étude porte sur la biotechnologie. Le projet de loi C-474 est...

[Français]

    Absolument. En fait, le projet de loi C-474 porte sur une étude économique avant l'autorisation des OGM.
    Deuxièmement, il faut demander au gouvernement de faire un rapport similaire à celui de 2001 de la Société royale du Canada pour voir où on en est 10 ans après. Ce serait une étude intéressante à faire, puisqu'on parle de science.
    Troisièmement, on doit mettre immédiatement un moratoire pour la luzerne GM, afin d'éviter effectivement que les marchés ne soient perturbés et qu'il n'y ait des dommages irréversibles.
    Quatrièmement, nous recommandons que les députés adoptent l'étiquetage obligatoire des OGM, lequel reçoit l'appui de pratiquement 90 p. 100 des consommateurs, de quelque parti qu'ils soient. C'est la réalité.
    Enfin, le Canada doit enfin ratifier le protocole de biosécurité pour rejoindre la communauté internationale.
    En conclusion, je voudrais remettre deux documents à votre comité. Le premier est un article universitaire de Peter Andrée sur la réglementation de l'alimentation OGM. Cet article confirme effectivement que, dans l'ensemble, le rapport de la Société royale du Canada a été ignoré. J'en mets une copie à la disposition des membres du comité. Je vous remets également une copie de la vidéo Le monde selon Monsanto, qui explique un peu le contexte législatif dans lequel sont autorisés les OGM à la fois dans le monde et ici. Les membres du comité pourront le consulter.
    Je vous remercie.
    J'aimerais profiter de la dernière minute qu'il nous reste pour souligner une chose. L'interlocuteur précédent a parlé de la science. Quand la science...

[Traduction]

    Veuillez être bref; votre temps est écoulé.

[Français]

    D'accord.
    Quand la science devient un élément important de justification des OGM, cette science ne doit pas être basée sur un principe de marketing d'équivalence substantielle. On a largement accepté les OGM partout en Amérique en vertu du principe de l'équivalence substantielle, mais ce n'est pas un principe de science.

[Traduction]

    Merci.
    Tout document qui est déposé au comité doit être dans les deux langues officielles. Si c'est le cas, vous pouvez les remettre.
    Ensuite, c'est au tour de M. Agblor, directeur de la recherche pour la Saskatchewan Pulse Growers.
    Vous pouvez prendre jusqu'à 10 minutes, s'il vous plaît.
    J'aimerais m'excuser, monsieur le président, si j'ai à partir avant la fin de la séance. Je n'ai jamais fait cela et j'ai un vol à prendre pour revenir à temps à Saskatoon.
    D'accord. C'est noté.
    Auparavant, le Canada ne produisait pas de légumineuses à grains autres que les haricots, mais, en l'espace d'une génération, le Canada en est devenu le plus important producteur et exportateur. Cette année, nous en avons produit environ 4,5 millions de tonnes métriques uniquement en Saskatchewan. La production se compose principalement de pois et de lentilles. L'année dernière, nos exportations se sont élevées à 2,2 milliards de dollars, dont 1,8 milliard de dollars provenaient de la Saskatchewan.
    Ce succès est en grande partie attribuable aux trois intervenants: l'Université de la Saskatchewan, le ministère de l'Agriculture de la Saskatchewan et la Saskatchewan Pulse Growers, qui finance les recherches universitaires. Les producteurs détiennent le droit d'exploiter toutes les variétés créées à l'université. Nous décidons donc des variétés qui seront mises à leur disposition. Nous avons ce privilège. Étant donné que l'université est une institution publique, les responsables ont été en mesure de négocier ces droits exclusifs avec nous. En contrepartie, nous investissons dans le programme au moyen d'une contribution de 1 p. 100 versée par nos producteurs. En comparaison, je suis certain que les autres producteurs déboursent davantage en recherche et développement.
    Selon nous, la recherche et le développement sont nos meilleurs atouts. Ce domaine rapporte 20 $ par dollar investi par les producteurs. En comparaison, la génétique en génère 28.
    Actuellement, nous n'avons pas de légumineuses à grains génétiquement modifiées, parce que nous ne croyons pas que nos consommateurs en veulent. Le message que nous recevons du marché, c'est que les gens ne sont pas intéressés à des légumineuses à grains génétiquement modifiées. Comme nous l'avons toujours dit, si l'Inde produit des pois chiches génétiquement modifiés, nous emboîterons le pas avec des pois génétiquement modifiés.
    La biotechnologie est un outil, auquel nous devrions recourir seulement si c'est l'outil le plus approprié pour atteindre notre objectif. Ce n'est pas quelque chose qu'on peut mettre en pratique... C'est un peu comme faire de la plomberie; vous n'en faites pas à la grandeur de la maison, n'est-ce pas? La biotechnologie est un outil.
    Dans notre cas, les OGM ne peuvent pas remédier à la majorité des problèmes auxquels nous devons faire face. La résistance aux maladies n'est pas une caractéristique très payante. Une usine de produits chimiques ne créera pas des souches résistantes aux maladies, parce qu'elle ne vendra plus son fongicide. Voilà pourquoi nous nous inquiétons de la réduction des investissements publics en recherche et développement. De plus, lorsque cet argent sera disponible, nous craignons qu'il soit investi dans des domaines précis, comme les recherches appliquées et précommerciales.
    Selon nous, dans l'avenir, il faudra définir le problème, effectuer l'évaluation des besoins, déterminer les lacunes et investir en recherche et développement de technologies pour les combler. Peu importe les travaux de recherches — des recherches fondamentales, des recherches de base, des recherches appliquées —, si c'est pertinent pour atteindre l'objectif, il faut les faire.
    Nous avons également toujours dit que la réglementation des plantes qui présentent une nouvelle caractéristique au Canada n'avantage pas les petites cultures. Il pourrait en coûter jusqu'à 200 000 $ pour faire approuver une caractéristique d'un OGM qui servira uniquement pour l'alimentation du bétail. Si c'est un produit destiné à la consommation humaine, les coûts montent en flèche. Si vous examinez les variétés de récolte au Canada et que vous regardez les 10 plus importantes dans le monde selon la quantité, le tonnage, le blé est probablement la seule culture canadienne qui s'y retrouverait. Cela vous apprend que l'industrie investit toujours en fonction de la quantité vendue. Prenez le nombre de semences, multipliez-le par le nombre d'acres, et voilà vos recettes. Vendez un produit chimique, multiplez-en la quantité par le nombre d'acres, et vous obtiendrez vos recettes.
    Les producteurs canadiens ont toujours évalué leur productivité selon la qualité des récoltes. Dans l'Ouest canadien, le climat nous accorde encore 120 jours sans gel par année, et nous devons modifier la génétique des cultures en fonction de cette réalité.
(1125)
    Nous pensons que les végétaux aux caractéristiques nouvelles et leur état actuel ne s'y prêtent pas beaucoup et qu'il faudrait réexaminer la question. Le secteur public contribue à apporter de nouvelles caractéristiques sur le marché.
    Nous pensons que dans l'avenir, les stress biotiques vont être la clé. Au gré des changements climatiques et étant donné l'imprévisibilité des conditions météorologiques à laquelle il faut s'attendre, l'impact sur la productivité sera assez prononcé, et nous aurons besoin de toute la génétique.
    La génomique est l'avenir. Nous pensons que la compréhension du génome d'une plante et la connaissance de ses gènes donneront à nos phytogénéticiens les outils dont ils ont besoin pour apporter de nouvelles caractéristiques sur le marché. Certaines de ces caractéristiques pourraient découler d'organismes transgéniques, mais la plupart de mes phytogénéticiens m'ont dit que, grâce à la génomique, ils pensent pouvoir obtenir ce qu'ils veulent dans les légumineuses sans avoir recours aux OGM. Nous pensons par ailleurs que le secteur public n'a pas été aussi réceptif que dans d'autres pays au financement de la génomique. Prenons l'exemple des États-Unis qui ont estimé les cultures comme un secteur stratégique et ont procédé au séquençage au niveau fédéral.
    Le séquençage n'est qu'une partie de l'équation. Mais il est aujourd'hui très bon marché. Les technologies propres au séquençage du génome coûtent moins de 50 000 $. Ce qu'il faut actuellement, c'est ramener les millions de résultats possibles à un niveau utilisable par les phytogénéticiens. Nous investissons dans l'Institut de biotechnologie des plantes du Conseil national de recherches pour créer un poste en bioinformatique qui permettra de traduire tous ces résultats pour le compte de nos phytogénéticiens. Nous pensons que cela aurait dû avoir été fait par le secteur public.
    En conclusion, nous voyons dans les OGM un outil qui ne sera utile que lorsque le marché sera mûr. Voilà pourquoi nous suivons de façon continue les signaux que donne le marché. C'est le marché qui déterminera la voie à suivre. Prendre les devants par une approche réglementaire ne sert à rien. Je pense que toutes les industries au Canada, qu'il s'agisse de celles du blé, du canola ou des légumineuses, ont des experts qui surveillent le marché. Et si le signal est donné, nous procéderons et développerons une technologie.
    Nous sommes cependant convaincus que la génomique est la voie à suivre au Canada. Nous avons des cultures relativement modestes, mises à part celles du blé et du canola, et le secteur privé n'y investit pas beaucoup. Le secteur public devrait donc intervenir, investir dans la génomique et donner à nos phytogénéticiens les outils dont ils ont besoin pour mettre au point des caractéristiques génétiques adaptées aux climats que nous aurons.
    Je vous remercie.
(1130)
    Merci beaucoup, M. Agblor.
    Je donne maintenant la parole à M. Richard Gold, professeur à l'Université McGill. Prière de limiter votre intervention à 10 minutes maximum.

[Français]

    Monsieur le président, membres du comité, je vous remercie.

[Traduction]

    Je vais faire mon exposé en anglais.

[Français]

    Toutefois, n'hésitez pas à me poser des questions en français.

[Traduction]

     Je vous remercie de m'avoir invité. Mon sujet diffère un peu de ceux de mes collègues, bien qu'il les recoupe à plusieurs égards.
    J'enseigne le droit à l'Université McGill et me spécialise dans la propriété intellectuelle, surtout les brevets, l'innovation et la biotechnologie.
    Je tiens à signaler que l'ensemble du financement dont je dispose provient de sources publiques, principalement des subventions d'institutions gouvernementales. J'ai conseillé Santé Canada, Industrie Canada, le Comité consultatif canadien de la biotechnologie, l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle, l'Organisation mondiale de la Santé, UNITAID et l'OCDE.
    J'ai également été expert auprès du Conseil des académies canadiennes pour la publication de son rapport sur les nanotechnologies, rapport qui porte sur certaines questions de précaution. En fait, le président de la commission royale, Conrad Brunk, faisait partie du comité.
    Mon but est simple: aider le comité. Je vais faire quelques remarques, mais je suis disposé à répondre aux questions touchant en particulier les brevets et l'innovation. J'ai fait circuler un document d'information qui devrait avoir été traduit. Je ne m'y reporterai pas directement, mais il donne quelques idées de fond.
    Je me pencherai d'abord sur le droit des brevets. Je doit signaler tout d'abord que la loi canadienne sur les brevets dans le domaine de la biotechnologie agricole est, à toutes fins pratiques, équivalente à celle de nos voisins du sud et des pays d'Europe. Il y a des différences d'ordre technique, mais dans son champ d'application, le droit des brevets protège les plantes et les animaux. Même s'il ne s'y applique pas au plan technique, il fournit la même couverture.
    La question que je veux aborder est celle de l'incertitude. Je citerai à ce sujet la décision du juge Binnie qui, dans l'affaire Free World Trust contre Électro Santé dont avait été saisie la Cour suprême du Canada en 2000, avait déclaré: « L'incertitude se double d'un grave préjudice économique, et il convient que le droit des brevets s'efforce de réduire le plus possible ce préjudice ». C'est donc de ces questions dont je voudrais parler.
    Je n'ai pas l'intention de plaider pour ou contre certaines biotechnologies. Nous sommes presque unanimes à convenir de la très grande utilité de certaines d'entre elles, y compris les organismes génétiquement modifiés. Je pense aux vaccins d'origine végétale, dont le coût de production est beaucoup moins élevé, qui sont beaucoup plus stables et plus aptes à résister aux hautes températures. D'autres technologies — la plupart d'entre nous en convenons — ne devraient pas être poursuivies. Ainsi, le Canada a décidé de ne pas poursuivre celles de la STb et du blé génétiquement modifié.
    Je tiens pour acquis que certaines biotechnologies sont recherchées et d'autres pas. Ce qu'il nous faut, c'est un cadre réglementaire, s'appliquant également aux brevets, qui offre une certitude, celle d'obtenir les investissements qui nous donnent les produits recherchés. Nous avons aussi des lois qui protègent ceux qui pourraient être lésés par les utilisations non désirées de ces cultures. Si nous ne prenons pas ces mesures, l'industrie investira moins dans les cultures que nous voulons et les personnes qui en sont lésées seront moins indemnisées.
    Le droit des brevets présente diverses incertitudes, mais — il faut le dire — elles sont négligeables par rapport à celles de la réglementation: son coût élevé, l'absence de règles touchant les animaux génétiquement modifiés, et ainsi de suite. Mais à propos du droit des brevets, l'un des risques et des incertitudes dont je veux vous parler, c'est la qualité des brevets.
    Selon des études menées aux États-Unis, près de la moitié des brevets contestés devant un tribunal ont été jugés invalides. Et je ne pense pas que la situation soit bien meilleure au Canada. En fait, il se pourrait même que les brevets y soient de qualité inférieure, en particulier dans les domaines de haute technologie comme la biotechnologie. On s'inquiète donc de savoir si un brevet est valide ou non. C'est un risque à la fois pour les détenteurs du brevet et ceux qui voudraient faire de la recherche dans le domaine couvert par le brevet.
    Il s'agit d'un problème inhérent au système des brevets. L'une des solutions proposées a été d'investir davantage dans le Bureau des brevets, ce que le Canada a fait. Une autre solution est d'adopter une procédure d'opposition au sein du Bureau des brevets afin que ceux qui souhaitent contester un brevet puisse le faire. L'Europe a un tel régime. Les États-Unis en ont au moins débattu au cours des dernières années. Quant au Canada, il est très en retard en la matière.
    Un autre problème réside dans la liberté d'action. Jusqu'à tout récemment, seules quelques entreprises ont pu introduire des produits sur le marché. L'un des problèmes liés à la biotechnologie est que chaque génération de produits repose sur une plateforme de toutes les innovations précédentes, ce qui signifie qu'il faut avoir accès aux brevets que d'autres entreprises ont. Pendant longtemps, cela a été un problème, puisque seules quelques sociétés ont la capacité financière suffisante, soit pour breveter leur technologie soit pour assumer le risque de poursuites. Ces facteurs limiteraient l'accès au marché et à l'innovation.
(1135)
    Plus récemment, nous avons constaté une augmentation du nombre de licences réciproques accordées, ce qui permet à plus de gens de mettre des produits sur le marché. Nous aimerions que cette pratique se répande pour éviter que les gens ne courent des risques injustes. À cette fin, le gouvernement peut adopter des politiques qui favorisent les licences réciproques et appliquer plus fermement la Loi sur la concurrence dans ce genre de secteurs.
    Le calcul des dommages constitue un autre sujet de préoccupations. C'est particulièrement vrai dans le secteur de l'agrobiotechnologie. Au Canada, le calcul des dommages est très incertain dans le cas du titulaire d'un brevet pour une plante cultivée. La Cour suprême du Canada et les cours fédérales nous ont exposé des règles contradictoires pour calculer ces dommages. Il pourrait s'ensuivre une surcompensation, c'est-à-dire qu'un titulaire de brevet reçoit trop d'argent, ou une sous-compensation; dans ce cas, il vaut la peine de violer le brevet puisque le titulaire ne recevra pas suffisamment d'argent. Des règles claires aideraient les agriculteurs à connaître les risques qu'ils courent, et les entreprises à déterminer la somme à investir.
    De plus, dans toutes les sphères de l'agrobiotechnologie, ainsi que dans des domaines comme les nanotechnologies et la biotechnologie en santé, on dénonce le fait que les tribunaux ont le dernier mot à propos de la validité d'un brevet. La plupart des juges feront de leur mieux pour comprendre la science à la base de la biotechnologie, mais ils ne sont pas qualifiés. La plupart d'entre eux ont choisi le droit parce qu'ils n'aimaient pas la science. Même s'ils font de leur mieux, on constate des malentendus et des principes scientifiques mal utilisés dans certaines affaires.
    C'est le problème de tout système de brevet. Mais je vous rappelle qu'il pourrait être avantageux de mettre en place une procédure d'opposition. Ainsi, davantage de cas litigieux seraient soumis au Bureau des brevets, qui est bien plus compétent.
    Je vais m'arrêter ici, mais je serai heureux de répondre à vos questions sur le droit des brevets.
    Merci.
(1140)
    Merci beaucoup, monsieur Gold.
    Nous allons maintenant passer aux questions.
    J'aimerais rappeler aux membres du comité que nous avons certaines choses à régler avant le voyage. Nous aurons besoin des 10 ou 15 dernières minutes de la séance. Nous devrons discuter d'une question à huis clos.
    Quoi qu'il en soit, la parole est à M. Valeriote pour sept minutes.
    Tout d'abord, j'aimerais remercier tous les témoins d'être présents.
    Il n'a pas été facile d'organiser la discussion d'aujourd'hui. L'objectif est de lever le voile sur la question et sur l'industrie pour que le public comprenne mieux le problème. Je suis heureux que vous y preniez part.
    En décembre, avant le congé des Fêtes, un groupe qui témoignait à ce sujet nous a parlé des deux solitudes: un groupe est pour les OGM tandis que l'autre s'y oppose. Je me sentais bien après cette rencontre, car des gens de chaque position avaient fini par comprendre qu'on pourrait créer une tribune dans laquelle les deux groupes se réuniraient pour nous aider à examiner les problèmes, et peut-être à élaborer une réglementation qui protégerait à la fois la biodiversité et les intérêts de chaque groupe. Je crois qu'une telle tribune existait à la fin des années 1990, mais elle a ralenti ses activités au début des années 2000. Aujourd'hui, il n'y a plus de rencontres.
    Éric, j'aimerais que vous m'en parliez, et peut-être vous aussi, Andrew, ou bien quiconque aimerait commenter l'utilité de rétablir cette tribune. De toute évidence, le comité est incapable de mettre au point la réglementation qui est vraiment nécessaire ni de trouver des solutions.
    Éric, vous pouvez commencer, puis vous pourrez laisser la parole à quelqu'un d'autre.

[Français]

    Je vous remercie de la question, qui est effectivement très intéressante et très pertinente.
    Comme nous l'avons indiqué dans notre présentation, bon nombre des 58 recommandations du rapport de la Société royale du Canada sont très précises sur le plan de la réglementation en matière d'OGM et d'autorisation d'OGM. Il serait très intéressant de retourner à ces 58 recommandations pour en dégager vraiment les éléments les plus pertinents.
    À l'époque, en 2001, notre groupe avait accueilli très favorablement le rapport de la Société royale du Canada. On se disait qu'un dialogue s'ouvrait enfin. Le gouvernement canadien dit toujours de recourir à l'approche science-based, si je peux me permettre d'utiliser l'expression anglaise qui est plus forte. J'assiste très fréquemment aux négociations des Nations Unies sur la biodiversité et sur le protocole de biosécurité. La délégation canadienne parle constamment de l'approche science-based. En réalité, l'approche science-based est incluse dans le rapport de la Société royale du Canada. Il faut y retourner pour vraiment avoir une base scientifique solide.

[Traduction]

    Je vous demanderais d'être bref, car j'aimerais que d'autres aient l'occasion de...

[Français]

    Absolument. Je m'arrête là.
    J'aimerais ajouter un petit mot. On a souligné que la science est importante, et on juge aussi que la science est importante. Du moment où l'on va se baser sur la science et non pas sur le marketing, on va embarquer.

[Traduction]

    D'accord. Très bien.
    Andrew.
    Je crois qu'il serait extrêmement avantageux de rétablir les organismes des années 1990. Par exemple, si mes collègues et moi formions un comité — qui rassemblerait des gens des États-Unis, de la Floride, etc. —, je crois que nous pourrions présenter un compte rendu intéressant, ou bien parvenir à un consensus, ce qui permettrait de progresser à pas de géant. Mais aussi longtemps que nous travaillerons séparément et à différents endroits, nos résultats seront diffus, et nous n'arriverons jamais à rassembler une coalition pour aller plus loin. Mais je crois que ce serait très avantageux.
    À titre d'exemple, nous avons organisé une réunion du consortium sur le commerce international il y a des années, et nous avons récemment créé une société d'analystes avantages-coûts. C'est extrêmement utile de pouvoir se rassembler deux fois par année pour discuter de questions commerciales et de la manière d'effectuer ces analyses avantages-coûts.
(1145)
    Quelqu'un d'autre aimerait-il répondre?
    Kofi, j'aimerais en savoir plus sur un des termes que vous avez employés: la génomique. Je n'en connais pas beaucoup à ce sujet. Est-ce que cela pourrait remplacer...? Non, manifestement pas, mais pourriez-vous nous en parler?
    Il a fallu environ deux milliards de dollars pour arriver à séquencer le génome humain, un travail qui a débuté dans les années 1980. Il s'agissait d'un projet international dirigé principalement par les États-Unis et l'Union européenne, auquel, je crois, nous avons pris part.
    Essentiellement, la génomique est la science qui examine de très près la composition de l'ADN d'un organisme, soit une bactérie, une plante ou un animal.
    En premier lieu, il faut séquencer l'ADN de l'organisme. C'est un peu comme entrer par effraction à l'intérieur de ses éléments constitutifs. Mais nous croyons qu'en connaissant l'emplacement des gènes, nous pourrons comprendre si, par exemple, l'un d'entre eux permet à l'organisme de résister à une maladie grave. Un tel gène peut se trouver chez des espèces apparentées ou dans la nature. Dans ce cas, on peut alors essayer de l'introduire dans l'espèce. On est en train de développer des outils qui nous éviteraient de croiser le porteur du gène avec un cultivar, puis de croiser ce dernier avec l'espèce dans laquelle on veut introduire le gène. Il faut une éternité pour tout nettoyer. Il est possible de le faire bien plus efficacement.
    Nous croyons qu'il est ainsi possible d'augmenter la vitesse d'adoption des caractéristiques génétiques. De plus, les phytogénéticiens affirment qu'il n'est peut-être pas très bon que les caractéristiques génétiques comme celles des OGM proviennent d'un seul gène, surtout en raison des maladies qui, pour la plupart, ont une incidence sur plus d'un gène.
    La génomique contribuera aussi à la biodiversité. Aujourd'hui, nos laboratoires et nos banques de gènes contiennent des espèces dont nous ne pouvons nous servir, étant donné que nous ignorons comment en utiliser efficacement la caractéristique génétique. La génomique nous permettra de le faire.
    Avant tout, Éric, j'aimerais vous poser une autre question sur... Vous avez parlé de l'étiquetage des OGM. Je n'en suis pas un chaud partisan, mais je ne m'y oppose pas non plus. Par curiosité, à quoi ressemblerait ce genre d'étiquetage?
    Ma prochaine question s'adresse à Richard, à Andrew ou à n'importe quel témoin... Sera-t-il simplement indiqué sur l'étiquette qu'un produit donné contient des OGM, peu importe de quoi il s'agit?
    Quelqu'un a-t-il pensé à un système d'étiquetage?
    Très brièvement, la loi européenne en matière d'étiquetage des OGM est en vigueur depuis plusieurs années, je crois. Elle est la norme internationale sur la question. Étant donné que le Canada est aussi développé que l'Europe, nous pourrions aussi adopter ce genre d'étiquetage. Si c'est possible là-bas, nous pouvons le faire ici aussi.
    Pour répondre très brièvement à la question sur la génomique — il est très difficile de répondre en trois minutes à la question que vous avez posée à mon collègue —, j'aimerais dire que les groupes environnementalistes sont en faveur de la génomique et qu'ils veulent en comprendre le fonctionnement chez les plantes. Le problème, c'est que les définitions de la loi canadienne sont plus larges que les définitions de portée internationale, ce qui embrouille bien des gens. Le Protocole sur la biosécurité ne porte que sur les gènes transférés d'un organisme à l'autre. La description canadienne est un véritable « fourre-tout » qui jette la confusion et cause du tort à tout le monde. Certains producteurs d'ici en subissent les conséquences. Le public est plongé dans la perplexité. Tout y passe, même la biotechnologie.
    Par exemple, chez Greenpeace, nous ne sommes pas nécessairement contre la sélection effectuée à l'aide de marqueurs moléculaires. Ce sont des caractéristiques importantes en raison de leur différence. Je ne dis pas que l'outil ne pose aucun problème ou qu'il ne devrait pas être étudié, mais je crois que nous devrions en tenir compte aussi.
    Si vous me demandez comment améliorer la situation, je dirais que la réglementation canadienne devrait être rectifiée en fonction de la définition internationale d'un OGM. Cela réglerait vraiment certains problèmes — pas tous, mais ce serait un début.
(1150)
    J'aimerais ajouter quelque chose.
    Je vais vous faire parvenir des documents sur d'autres travaux en génomique. Certains de mes collègues de la Floride ont fait des découvertes capitales dans cette discipline à propos des tomates, du céleri et d'autres cultures. C'est incroyable ce qu'on arrive maintenant à faire. Un exemple porte sur des cultures différentes de celles dont vous parlez. On découvre des choses de la plus haute importance. Je vous enverrai ces documents.
    De plus, certains de mes collègues ont étudié la question de l'étiquetage. Un vrai chaos. C'est semblable à l'affaire entourant l'importation du boeuf canadien aux États-Unis. Les États-Unis importent du boeuf et le produit doit maintenant porter une étiquette indiquant son pays d'origine, pour satisfaire à la Loi agricole. Vous avez entendu parler de l'arrangement conclu devant l'Organisation mondiale du commerce. Je pense que l'industrie peut faire comme elle l'entend pour l'étiquetage du boeuf américain ou canadien, mais les consommateurs à qui j'en ai parlé m'ont confié ne pas lire ces étiquettes, qu'ils ne comprennent pas. Ils finissent plutôt par croire que la qualité du boeuf canadien est supérieure. C'est semblable à l'étiquetage des produits biologiques et à d'autres types d'étiquetage. C'est un dossier chaud, mais pour l'instant, personne ne sait vraiment à quoi s'en tenir.
    Merci.
    Je vais maintenant laisser la parole sept minutes à M. Bellavance.

[Français]

    Merci de vos témoignages, messieurs Nault et Darier.
    Dans votre mémoire, vous abordez un point qui nous est cher à nous aussi, du Bloc québécois: le Protocole de Carthagène sur la biosécurité. Je m'explique mal que le Canada ne fasse pas partie des 160 pays qui adhèrent à ce protocole.
    À l'intention des gens qui vont lire les témoignages et de mes collègues du comité, j'aimerais que vous expliquiez en quoi il est important d'adhérer à ce protocole, ce que cela implique et comment il se fait qu'une grande majorité de pays aux quatre coins du monde en fassent partie, mais pas le Canada. D'autres pays comme les États-Unis, ou encore les pays d'Europe, en font-ils partie? Pourquoi, selon vous, le Canada refuse-t-il toujours, à ce jour, d'adhérer au Protocole de Carthagène sur la biosécurité?
    J'aimerais que vous résumiez cet enjeu.
    Je vous remercie de cette question posée vraiment très rapidement, et j'espère que la réponse sera tout aussi concise.
    Fait intéressant, l'accord sur le protocole de biosécurité a eu lieu à Montréal en 2000, et le Secrétariat de la Convention sur la diversité biologique est basé à Montréal. Il est un peu ironique que le pays hôte du secrétariat n'ait pas ratifié le protocole. En fait, le protocole de biosécurité fait partie de la Convention sur la diversité biologique, dont il tire son origine.
    Il y avait une préoccupation environnementale, et la grande préoccupation était la contamination transfrontalière des OGM. L'objectif premier du protocole international est que tout transfert d'un pays à l'autre se fasse dans la transparence, c'est-à-dire que le pays qui reçoit ces produits soit informé. Le protocole vise aussi une transparence pour ce qui est des études réalisées et prévoit un mécanisme de compensation en cas de catastrophe, qui indique qui doit payer.
    À ce jour, 160 pays ont adhéré à ce protocole, mais pas le Canada. Je suis un peu la délégation canadienne lors des négociations, et je trouve un peu surprenant que le Canada se vante toujours d'avoir, en matière de biosécurité, un standard similaire ou même supérieur à ce que présente le Protocole de Carthagène sur la biosécurité. Si c'est le cas, aucun obstacle ne devrait empêcher le Canada de le ratifier, de toute manière. Telle est la question: je me demande pourquoi il ne le fait pas.
    Les États-Unis ne peuvent pas ratifier le Protocole de Carthagène sur la biosécurité, parce qu'ils n'ont pas ratifié la Convention sur la diversité biologique. Voilà la réalité que vivent nos collègues au sud de la frontière. Depuis la signature de l'Accord de libre-échange nord-américain, nous faisons partie d'un espace de libre-échange avec le Mexique, lequel a ratifié le Protocole de Carthagène sur la biosécurité.
    Je vous arrête ici, monsieur Darier. Justement, le fait que le Canada et les États-Unis n'en fassent pas partie, contrairement au Mexique, crée-t-il des dissensions?
    Oui. Par exemple, il est absolument essentiel de prévenir la contamination du maïs au Mexique, centre d'origine de cette plante. Il y a eu de la contamination dans ce centre provenant de l'exportation de maïs américain largement subventionnée par les contribuables américains. En effet, on a fait du dumping de maïs au Mexique au début des années 2000. C'est très bien documenté par la Commission mixte internationale, au sujet de l'ALENA et de l'environnement. C'est donc un enjeu.
    Toutefois, d'autres enjeux vont surgir, et on pourra en parler plus tard si vous le voulez. Pensons au saumon GM, qui risque d'être produit au Canada et exporté au Panamá, lequel est à ratifier le Protocole de Carthagène sur la biosécurité, pour potentiellement être exporté ensuite aux États-Unis. À nouveau, cela a des conséquences.
    Dans ce cas, le Canada devrait ratifier le Protocole de Carthagène sur la biosécurité, être plus transparent envers la communauté internationale et assumer ses responsabilités internationales.
(1155)
    En raison, entre autres, de la proximité entre l'industrie des biotechnologies et les agences gouvernementales et de réglementation, on peut soupçonner que le Canada ne signera pas le protocole.
    Que voulez-vous dire?
    On remarque une connivence dans la présentation de dossiers où il y a, pour parler en les mêmes termes que Richard tout à l'heure, misapplication of science principles. Nous, les environnementalistes, éprouvons des inquiétudes quant à l'interprétation des principes scientifiques. Je pense que les compagnies ont un accès au gouvernement que le peuple n'a pas.
    Monsieur Schmitz, j'ai une question pour vous. Vous êtes venu des États-Unis pour témoigner, alors vous êtes mieux placé pour y répondre.
    Vous parlez d'acceptabilité, de même que des réactions, attitudes et opinions des consommateurs face aux OGM. Par curiosité, j'aimerais savoir si on retrouve ces mêmes préoccupations aux États-Unis. Vous avez brièvement parlé de l'étiquetage. Ici, nous prônons l'étiquetage obligatoire des OGM — c'est du moins le cas de notre parti. Les consommateurs doivent savoir ce qu'ils achètent, ils doivent avoir le droit de choisir. Il faut que ce soit inscrit, comme cela se fait déjà en Europe, même s'il y a une certaine marge de manoeuvre tout à fait compréhensible.
    Retrouve-t-on ces mêmes préoccupations aux États-Unis?

[Traduction]

    C'est une question plutôt intéressante.

[Français]

    Si on parle de tous les Américains, je comprends ça.

[Traduction]

    Une petite section de notre livre porte là-dessus. À vrai dire, je ne le sais vraiment pas, parce que les consommateurs ne semblent plus du tout s'y retrouver, pour l'instant.
    On pense généralement que les consommateurs lisent les étiquettes. Aux États-Unis, la plupart d'entre eux ne le font jamais, et c'est le problème. Lorsqu'on demande aux gens s'ils lisent l'étiquette du pays d'origine du boeuf avant d'acheter, ils répondent qu'ils n'en ont aucune idée, car ils ne lisent aucune étiquette.
    Par contre, ils connaissent les produits biologiques, car le marché est vaste et en pleine croissance aux États-Unis, comme ici. Ce type de produit est de plus en plus prisé. Mais bien entendu, les magasins ne vendent pas les produits biologiques avec les produits courants; tous les aliments bio sont réunis dans une section distincte.
    Lorsqu'on a posé des questions sur la biotechnologie aux consommateurs, ils n'avaient aucune idée de ce dont il s'agissait, ils ne comprenaient pas la question et ils voulaient savoir pourquoi on leur demandait cela.
    À l'heure actuelle, on ne sait pas vraiment quelle direction prendront les États-Unis en matière de biotechnologie et d'étiquetage de ces produits. Je dirais que bien des entreprises s'opposeront à ce genre d'étiquetage.

[Français]

    Merci.

[Traduction]

    Il vous reste 30 secondes, si vous voulez. Avez-vous terminé? Très bien.
    Je vais maintenant laisser la parole à Alex, du NPD.
    Merci à tous d'être présents.
    M. Ian Mauro, de l'Université de Saskatchewan, est venu témoigner devant le comité dernièrement. Il nous a parlé du projet qu'il a réalisé, pour lequel il a fait appel à 2 500 agriculteurs des trois provinces des Prairies. Il leur a demandé quelles étaient leurs préoccupations à l'égard de la technologie. Je vais vous présenter certains points de son exposé, et j'aimerais ensuite entendre vos commentaires. Voici:
    Les risques sont moins bien compris, et c'est de ce côté que ma recherche apporte de nouvelles informations. Pour le canola et le blé transgénique, les risques principaux, que les agriculteurs ont eux-mêmes classés en ordre d'importance, comprennent les marchés, qui représentent leur plus grand risque. Ils s'inquiètent de la perte de revenus. Ils étaient inquiets à l'idée que la biologie finisse par soulever des questions reliées à la ségrégation, ce qui poserait des problèmes dans le système de ségrégation et finirait par affecter le marché.
    Un représentant de la Commission canadienne du blé nous a dit la même chose lors de sa comparution, c'est-à-dire qu'il est très difficile de séparer les organismes génétiquement modifiés et ceux qui ne le sont pas, surtout lors de la manutention en vrac.
    De plus, les agriculteurs étaient inquiets du contrôle de l'agriculture par les entreprises, de la privatisation des grains et de la possibilité de poursuites judiciaires. Il a ensuite parlé des plants « spontanés » — autrement dit, les cultures qui passent d'un terrain à l'autre —, ce qui, bien entendu, est lié à la contamination.
    Nous avons appris dernièrement que la vente de luzerne génétiquement modifiée a été approuvée aux États-Unis. Trois organismes de produits biologiques ont indiqué qu'ils auraient appuyé la décision s'il y avait eu des mesures de confinement, ce qui est difficile à comprendre.
    J'aimerais aussi savoir s'il est vraiment possible d'éviter toute contamination croisée des cultures génétiquement modifiées. Dans le cas de la luzerne, les preuves semblent abonder dans le sens inverse. Ce qui m'inquiète, c'est que bien des gens de l'industrie nous disent que nous devons nous appuyer sur les données scientifiques, mais il s'agit souvent de leurs propres données scientifiques.
    Monsieur Schmitz, vous avez parlé de l'acceptabilité pour le consommateur et de la rentabilité pour le producteur. Monsieur Agblor, vous avez indiqué que votre organisme surveille de très près l'acceptation du produit par le marché. Le gouvernement pourrait-il mettre en place des lignes directrices en collaboration avec l'industrie? Ce serait précisément l'objectif de mon projet de loi.
    Je vais m'arrêter ici pour que les témoins aient le temps de répondre.
    Monsieur Schmitz.
(1200)
    Je suis moi-même agriculteur. En Saskatchewan, nous cultivons à plutôt grande échelle. Ma ferme se trouve près de Regina. Celle de notre fille est située au nord de Saskatoon et remporte un franc succès avec la culture du canola. Même si certains croient que ce grain pose problème, la culture commerciale du canola s'est révélée une excellente idée et a même sauvé la ferme de notre fille.
    Notre ferme est située trop au sud pour ce grain, mais heureusement, nous avons commencé à cultiver des légumineuses pour diversifier nos activités. À une époque, nous étions de grands producteurs d'orge et de blé, en plus de notre production bovine, mais nous sommes passés à la culture des pois et des lentilles. C'est ce qui nous a sauvés, si nous comparons notre situation à ceux qui ont continué à cultiver le blé de façon traditionnelle ces deux ou trois dernières années, et qui voient leur situation fragilisée régulièrement.
    Pour ce qui est des problèmes de ségrégation, etc., les agriculteurs de la région ne discutent vraiment pas d'OGM. Dans notre secteur, ceux qui cultivent le blé et l'orge ne pensent même jamais à ces questions. Ce n'est probablement pas le cas de tous les agriculteurs, mais je crois que le thème de la biotechnologie... C'est tellement compliqué qu'ils ne savent probablement pas ce que le mot signifie. Il y a beaucoup d'agriculteurs qui n'en ont jamais entendu parler et qui ne pourraient pas vous dire ce qu'est la biotechnologie ou un OGM.
    Dans notre région, je pense que le plus gros problème, c'est plutôt le changement structurel et la croissance incroyable de la taille des fermes. Voici ce qui inquiète les gens: l'évolution rapide de la technologie au cours des 10 dernières années, de même que de la machinerie, en raison de la taille des fermes, que ce soit lié aux OGM ou non. C'est mon avis.
    Quelqu'un d'autre?
    J'aimerais simplement ajouter que nous le faisons actuellement pour les lentilles. Je crois qu'au moins 10 variétés de lentilles sont cultivées. Il y a les lentilles roses, vertes, brunes espagnoles et vertes françaises. Ensuite, les lentilles roses et vertes comprennent des variétés à gros grains, à grains moyens et à petits grains. Cette spécification les accompagne à l'exportation; des lentilles à gros grains demeureront des lentilles à gros grains. Et habituellement... je connais un agriculteur de lentilles roses et vertes qui, l'année dernière, a pu les expédier à un transformateur.
    C'est ce que nous avons fait aussi.
    Exactement.
    Alors, si nous pouvons y trouver notre compte, nous le faisons; tout dépend de la valeur. Et comme les lentilles sont très rentables, il devient facile de le faire. Si vous vous adressez à n'importe lequel de nos négociants ou exportateurs, vous pourrez obtenir toutes les fèves séparées. C'est donc une infrastructure qui peut être mise en place.
    Il s'agit de déterminer la frontière entre rationalité et irrationalité si l'on ne veut pas aboutir dans un cul-de-sac. Est-ce que les efforts de séparation vont permettre de donner satisfaction aux gens, ou bien allons-nous nous retrouver à nouveau dans une situation de tolérance zéro? Si on retrace une semence parmi un millier, alors la séparation ne serait pas suffisante.
    Il faut donc faire bien attention si l'on opte pour la séparation en misant uniquement sur l'aspect technologique, plutôt que sur la qualité et la salubrité du produit. Pour notre part, nous le faisons avec les lentilles parce que nous y trouvons notre compte, et c'est ainsi qu'il faut fonctionner. On ne peut pas vendre ces produits en vrac.
    Nous avons participé récemment à un projet sur les biocarburants en Inde. J'en ai profité pour essayer d'en apprendre davantage sur la perception des Indiens à l'égard des lentilles. Comme vous le savez, ce sont les principaux acheteurs de lentilles de la Saskatchewan. Si vous mangez une soupe au restaurant ou ailleurs, vous pouvez être assurés qu'elle contient des lentilles. J'ai eu l'impression, ou c'est du moins ce que j'ai cru percevoir là-bas, que ce n'est pas de si tôt que les Indiens vont accepter que des lentilles génétiquement modifiées leur soient acheminées. J'ai trouvé cela intéressant.
(1205)

[Français]

    Si les bonnes études avaient été faites dès le départ, on ne serait peut-être pas en train de se demander s'il faut les étiqueter ou non.
    La première étude scientifique indépendante a été faite par Arpad Pusztai en 1998, et ce dernier s'est fait ostraciser par l'industrie et expulser de son institution pour avoir traité, dans son rapport, de l'insécurité des OGM. Si la science avait été respectée, on n'en serait peut-être pas rendus à discuter, comme on le fait aujourd'hui, de l'étiquetage ou de la ségrégation des semences.
    Très brièvement, j'ajouterais...

[Traduction]

    Désolé, monsieur Darier, il ne reste plus de temps.
    Monsieur Lemieux, vous avez sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci d'avoir pris le temps de venir comparaître devant nous aujourd'hui pour discuter de la biotechnologie et de ses impacts sur le secteur agricole.
    J'aimerais préciser que si les produits génétiquement modifiés constituent un aspect de la biotechnologie, celle-ci ne se limite bien sûr pas à cette seule facette. C'est une distinction que notre comité ne doit pas perdre de vue, car nous parlons beaucoup bien sûr des produits génétiquement modifiés. Nous ne devons toutefois pas nous intéresser uniquement à ces produits, car le secteur de la biotechnologie a bien plus à nous offrir.
    Il y a les deux extrêmes. À une extrémité du spectre, certains prétendent que la biotechnologie devrait décider de tout, alors qu'à l'autre extrémité, on soutient qu'on devrait l'éviter à tout prix. Entre ces deux extrêmes, et c'est là que se situe notre comité, il faut se demander en quoi la biotechnologie peut aider l'agriculture et de quelle façon elle peut lui nuire.
    À la lumière de certains commentaires entendus aujourd'hui... monsieur Schmitz, vous avez par exemple fait valoir que le consommateur a un rôle important à jouer. Nous avons déjà traité de cet aspect. La science doit être au coeur de tout le débat, car il faut d'abord et avant tout s'assurer que le produit final ne présente aucun danger pour la consommation humaine. À cet égard, le rôle que peuvent jouer les scientifiques au moyen de leurs évaluations et de leurs procédures est extrêmement important.
    Mais il faut également considérer par ailleurs l'acceptation par le consommateur.
    Monsieur Schmitz, vous avez dit qu'il fallait essayer de sonder l'opinion des consommateurs à ce sujet. Avez-vous à l'esprit des mécanismes qui nous permettraient de le faire de manière cohérente et convaincante?
    Pas nécessairement, mais je me suis intéressé avec certains collègues au déversement de pétrole dans le golfe. Nous avons donc une méthodologie qui nous permet de déterminer les dommages causés par un tel déversement, ce que nous appelons des mesures de compensation et de variation équivalente. C'est le même mécanisme qui a été utilisé à l'époque dans le cas du Exxon Valdez.
    Il y a différentes manières d'obtenir l'acceptation des consommateurs, mais on ne peut pas poser n'importe quelle question pour ce faire. On ne peut pas simplement demander aux consommateurs s'ils achèteraient des produits génétiquement modifiés. Avant même de s'adresser aux consommateurs, il faudrait par exemple savoir avec précision quel produit une entreprise de semences compte mettre sur le marché et quelles seraient ses caractéristiques.
    J'ai des collègues qui ont fait des études comparatives entre le Canada et le Japon et certains autres pays, pour ce qui est des OGM. Ils ont bien sûr constaté que le Japon était le pays le plus exigeant en la matière. C'est sans doute encore le cas aujourd'hui. Tout dépend bien sûr de leur budget, mais j'estime qu'ils auraient pu accomplir un travail beaucoup plus efficace en déterminant exactement la nature des réactions, plutôt que de se contenter du sondage qu'ils ont effectué. Ces sondages sont souvent intéressants, mais je me fie rarement à leurs résultats pour déterminer le taux d'acceptation d'un produit.
    Lorsqu'on prend le pouls de la population, on risque notamment de tomber sur des groupes qui prétendent représenter l'opinion publique en prenant très clairement position, sans que nous puissions être sûrs que leurs propos sont vraiment le reflet de ce que pensent les gens. Je crois pour ma part que le consommateur joue un rôle fondamental lorsqu'il prend la décision d'acheter ou non le produit final.
    Au Canada, nous avons une bonne diversité de consommateurs. Certains sont bios à 100 p. 100. Ils vont acheter des produits biologiques et c'est très bien. Ils sont tout à fait libres de le faire. Nous en avons d'autres qui consomment de l'huile de canola. Très bien également; qu'ils en achètent. En Europe, on observe davantage un bloc continental en ce sens que, si nous consommons au Canada de l'huile de canola, les Européens ne voudront pas nécessairement d'un produit génétiquement modifié ou amélioré aux hormones. On peut donc parfois tracer des frontières par région ou par pays pour schématiser les comportements d'achat, mais j'estime que c'est le consommateur qui décide en bout de ligne.
    Les groupes agricoles, les agriculteurs et l'ensemble du secteur doivent déterminer si cette formule représente un avantage net pour l'industrie.
    Monsieur Agblor, je crois que c'est là où vous vouliez en venir en disant que vous ne cultiviez pas de légumineuses génétiquement modifiées, car il n'y a pas de clientèle pour ces produits. Si une telle clientèle existait, si vous aviez l'impression que des produits semblables pourraient vraiment intéresser le consommateur, vous examineriez certes la situation de très près.
    J'aimerais que vous nous parliez davantage de cet équilibre que vous devez trouver en tenant compte du degré d'acceptation par le consommateur dans votre utilisation de la biotechnologie.
(1210)
    La biotechnologie sera essentielle pour l'alimentation de la planète au cours des années à venir. Cela ne fait aucun doute. Je ne saurais toutefois vous dire quelle proportion des caractères possibles seront effectivement implantés par manipulation génétique ou transfert de gènes.
    Si l'on considère l'efficience de l'utilisation de l'azote, nous pouvons avoir un impact très favorable sur les changements climatiques et les problèmes de sécheresse si nous parvenons à utiliser moins d'azote en obtenant le même rendement. J'ai vu des photos de plantes ayant souffert de la sécheresse qui ont produit un rendement normal. Il y a une foule de caractères semblables que l'on peut implanter. Il nous faudra le faire de plus en plus. On explique la situation à la population. En Australie, lors d'un sondage sur l'implantation d'un gène d'efficacité de l'utilisation de l'eau dans le blé — pour éviter le stress de la sécheresse — 70 p. 100 des répondants se sont dit favorables. Consommateurs et citoyens ont donc considéré que ce caractère était bénéfique, car il permet d'optimiser l'utilisation d'une ressource rare. C'est la façon dont nous devons procéder.
    Au départ, c'est l'industrie qui a pris l'initiative. Nous avions un produit chimique à vendre. Nous avons introduit un caractère sans informer les gens des avantages de cette intervention unique — vous n'aviez plus à faire cinq pulvérisations pour vous débarrasser des mauvaises herbes — et des bienfaits pour l'environnement. Le produit s'est retrouvé sur le marché sans que le public ne sache ce qui se passait. À l'avenir, il faudra se montrer proactif et engager la population dans le processus d'implantation des nouveaux caractères en lui faisant valoir, par exemple, que l'on pourrait optimiser le rendement en utilisant la moitié moins d'azote. C'est comme s'il y avait un demi-milliard de voitures en moins sur nos routes. Je vous laisse faire le calcul. Je peux vous dire que seulement avec les pois verts et les lentilles, vous pouvez économiser suffisamment de gaz naturel pour chauffer 132 000 maisons des Prairies pendant une année, et vous savez à quel point il peut faire froid dans les Prairies. C'est le genre d'argument qui ne manque pas de toucher les gens.
    J'estime donc que ce serait une approche valable, mais le fait demeure que nous avons besoin de la biotechnologie et que nous devons nous assurer que les gens comprennent bien de quoi il en retourne. Il ne s'agit pas seulement des OGM. Ceux-ci ne représentent sans doute que seulement 10 ou 20 p. 100 des caractères que nous retrouvons aujourd'hui dans les récoltes. Pour le reste, nous parlons simplement d'outils biotechnologiques.
    Merci beaucoup.

[Français]

    Puisque votre comité visitera différents campus la semaine prochaine, je voudrais simplement vous signaler qu'Agriculture Canada a d'excellents instituts de recherche, par exemple sur le blé, qui ont été subventionnés par les contribuables du Canada. On y mène tout plein de recherches, notamment à l'Université Laval à Québec. Malheureusement, au cours des années, cette recherche a diminué en faveur d'entreprises comme Monsanto, une entreprise américaine, qui ont un intérêt commercial à commercialiser un OGM plutôt qu'un autre produit. Pourtant, il existe déjà beaucoup d'autres méthodes très intéressantes qui ne nécessitent pas un transfert de gènes dans une autre plante. Je vous invite fortement à rencontrer les gens des laboratoires de recherche d'Agriculture Canada qui travaillent sur le blé conventionnel et qui ont des résultats très intéressants à cet égard.
    Il faut aussi examiner la génomique, qui s'y trouve liée indirectement, mais qui est présente. Il ne faut pas mettre tous ses oeufs dans le même panier, le panier du transfert de gènes qui, à vrai dire, est controversé du point de vue des consommateurs et qui ne représente qu'une infime partie des avantages de la génomique.
(1215)

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur Eyking, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à nos témoins pour leur présence aujourd'hui. Nous pouvons compter sur un large éventail de points de vue.
    Un article publié récemment dans The Economist au sujet de la crise alimentaire à venir indiquait à peu de choses près que la planète venait de traverser une crise économique, mais que la crise alimentaire qui allait suivre s'annonçait tout aussi difficile — voire davantage.
    Nous faisons partie des 20 p. 100 de privilégiés qui ont de la nourriture en abondance, ce qui nous permet de faire des choix en matière d'alimentation. Les 80 p. 100 qui restent ne sont jamais certains d'avoir suffisamment à manger le lendemain.
    Si cette crise alimentaire se concrétise — et c'est ce que nous observons actuellement — et si nous voulons prendre une longueur d'avance, comme nous aurions dû le faire pour la crise économique, afin de réussir à nourrir 10 milliards d'êtres humains, je considère que la biotechnologie est sans doute l'un des rares outils, si ce n'est le meilleur, à notre disposition pour éviter certains problèmes, notamment pour ce qui est des changements climatiques et de la distribution.
    Certains ont fait valoir que plus on pourra produire d'aliments au niveau local, mieux on va pouvoir s'adapter. Pour ce faire, il faudra créer de nouvelles variétés ou prendre des mesures semblables.
    Nous examinons souvent la situation à partir de notre optique à nous, en fonction des goûts et préoccupations de nos consommateurs, Ne faudrait-il pas commencer à se demander comment nous allons pouvoir entreprendre certaines cultures dans la région subsaharienne ou d'autres secteurs de l'Afrique ou de l'Inde, par exemple? Ne devrions-nous pas chercher à voir comment nous pouvons nous y prendre? Comment pouvons-nous aborder la question et dans quelle mesure la biotechnologie peut-elle nous être utile? Et quel rôle de leadership pouvons-nous exercer à ce chapitre?
    Je lance la question à la cantonade en espérant que chacun aura quelques minutes pour y répondre.
    Voici quelques observations. D'abord et avant tout — et peut-être que cela répondra également à la question de votre collègue — il faut se rappeler que certains OGM ne soulèvent aucune controverse et doivent donc être acceptés d'emblée. Le coton BT, par exemple, a permis une avancée extraordinaire. Comme on ne consomme pas le coton, il n'y a pas de controverse. On ne peut pas se permettre de généraliser en disant que les OGM sont problématiques. Il y a eu d'autres cas de réussite comme celui-là.
    Mais du point de vue alimentaire, je crois qu'il y a encore beaucoup de progrès à faire pour ce qui est de la création de nouvelles variétés de riz sans modifications génétiques. C'est un vaste chantier, mais l'IIRR travaille notamment à la sélection de différents types de riz en essayant entre autres d'accroître le contenu en fer. Je pense que c'est une initiative qui sera fort bénéfique.
    Par ailleurs, je penche plutôt vers la doctrine économique de Chicago. Je ne préconise pas nécessairement l'intervention des gouvernements. Les marchés sont généralement capables de s'autoréguler. Il y a toujours eu des gens pauvres qui ne mangeaient pas à leur faim. La situation est différente aujourd'hui alors que nous essayons de nourrir la planète dans un contexte marqué notamment par la croissance de la population, car il nous faut tenir compte de la demande sur le marché et de la capacité de payer ces aliments.
    Lors d'une conférence tenue il y a deux ans, tout le monde s'interrogeait sur l'avenir du marché alimentaire. Lorsque le prix d'un boisseau de blé a dépassé les 12 $, l'avenir semblait très rose pour les agriculteurs. Mais tous les marchés se sont soudainement effondrés, jusqu'à la reprise du printemps dernier. Nous voilà de nouveau dans cette spirale de prix. Comme vous pouvez le constater, tout n'est pas lié à la technologie; les politiques gouvernementales ont aussi leur rôle à jouer comme lorsqu'on décide de constituer des réserves alimentaires pour éviter l'instabilité.
    En vertu de la Loi agricole américaine, on n'est plus obligé de maintenir de tels stocks de blé aux États-Unis lorsque les prix sont inférieurs à un certain niveau qu'on appelle le taux de prêt. C'est un autre élément à considérer dans le contexte de la crise alimentaire. Il ne suffit pas d'intensifier la production pour accroître les approvisionnements; c'est également une question de gestion et de mesures à prendre compte tenu de l'instabilité météorologique avec laquelle nous devons maintenant composer.
    Mais si vous me permettez un conseil, n'achetez pas de terres agricoles en Saskatchewan en vous fiant sur les prix actuels.
    Monsieur Darier, vous vouliez répondre également. Il vous reste une minute.
    La crise alimentaire pose effectivement un problème très grave. Il ne faudrait pas oublier qu'il n'y a actuellement aucun OGM conçu expressément, via le transfert de gènes, pour accroître le rendement. La plupart des modifications visent la résistance aux herbicides ou la production de pesticides. C'est donc une réalité à ne pas perdre de vue.
    Par ailleurs, toutes les ONG internationales qui sont allées travailler sur le terrain dans le Sud vous diront que ce sont parfois les solutions très simples qui ont les impacts les plus bénéfiques. Il ne s'agit pas toujours de mettre sur le marché de nouvelles technologies. Il y a plusieurs années, une organisation internationale des Nations Unies a produit un rapport approfondi où l'on examinait les solutions adaptées à chaque continent. Dans la plupart des cas, les OGM n'étaient pas les outils à privilégier pour régler la crise alimentaire.
(1220)
    Merci.
    Monsieur Gold, vous aviez un commentaire.
    Oui.
    Mon groupe de recherche travaille beaucoup en Afrique avec quelques-uns des centres et des chercheurs les plus importants de ce continent. Je peux vous dire qu'il y a énormément d'intérêt pour la biotechnologie. Ils y voient un outil pour répondre à leurs besoins en matière de santé et d'alimentation, et ils y investissent beaucoup. Ils souhaiteraient pouvoir établir davantage de partenariats. C'est une possibilité qui s'offre pour le Canada, pour nos entreprises de biotechnologie, parce que les Africains veulent avoir accès à du financement, à nos connaissances au sujet des systèmes réglementaires. Ils veulent collaborer avec nos universités. Toute l'aide que nous pourrons apporter nous sera profitable du point de vue économique, mais aidera également les Africains à régler leurs problèmes alimentaires.
    Nous n'avons plus de temps, monsieur Nault, mais je vais vous laisser intervenir, si vous pouvez être très bref.

[Français]

    Je le serai.
    La révolution verte qui allait nourrir le monde n'a pas réussi à le faire, et je ne pense pas que les biotechnologies y parviennent non plus.
     Par contre, l'autonomie alimentaire locale est la chose la plus importante. Il faut arrêter de faire voyager les aliments aux quatre coins du monde. Nous devons atteindre l'autosuffisance alimentaire chez nous.

[Traduction]

    Monsieur Hoback, cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    D'abord et avant tout, je tiens à présenter nos excuses à MM. Agblor et Schmitz. Vous cultivez des légumineuses et nous n'en avions même pas dans le repas servi à l'arrière, ce qui est tout simplement abominable. On aurait dû en avoir. On est toujours en quête de protéines.
    Quoi qu'il en soit, je vous remercie pour votre comparution. Je vous suis vraiment reconnaissant d'avoir pris le temps de venir nous rencontrer malgré vos horaires très chargés. Je suppose que ça doit être un petit choc de quitter la Floride pour venir jusqu'ici, mais je peux vous assurer que nous adorons tous la Saskatchewan en été, alors je peux comprendre que vous passiez les vôtres là-bas, monsieur Schmitz. Je vais commencer avec vous.
    Vous avez piqué ma curiosité en parlant du maïs StarLink. Quels auraient été les impacts si nous avions eu à l'époque des politiques sur la présence à faible niveau?
    Je ne suis pas certain de comprendre. Les impacts... Vous me demandez quel impact le maïs StarLink a eu...?
    Oui. Il a notamment été suggéré que l'on permette une présence à faible niveau — 1 p. 100 ou 0,5 p. 100, je ne suis pas certain du chiffre; je laisse ça aux experts. Mais il s'agit de prévoir un seuil de tolérance dans le système pour autoriser une certaine teneur en éléments étrangers.
    C'est à ce propos que la question a été soulevée dans la cause du maïs StarLink où les agriculteurs ont poursuivi Aventis. Le marché du maïs a encaissé un dur coup dès que l'on a découvert du StarLink dans le système d'approvisionnement, notamment pour les échanges avec le Japon. Colin Carter, Al Lyons et quelques autres ont d'ailleurs fait de l'excellent travail en procédant à une analyse très rigoureuse des impacts de la cause StarLink.
    La cause a été d'autant plus troublante qu'elle a fait ressortir la problématique du coût de la séparation. Dans un contexte de tolérance zéro, tout cela devient très dispendieux lorsqu'il est question de mélange de produits. C'est ce qui est arrivé sur ces marchés...
    Et il n'est pas réaliste de s'attendre à ce que...
    Bon, mais, actuellement, il faut faire avec. Donc, certains préconisent ou adoptent des produits pour lesquels il n'y a pas de tolérance zéro, dans lesquels on peut accepter jusqu'à 2 ou 3 p. 100 d'organismes génétiquement modifiés. Mais les coûts de la séparation sont vraiment devenus un enjeu dans ce cas-là, et l'affaire StarLink les met bien en évidence, de nouveau. Les Japonais ne faisaient plus confiance aux Américains. Ils ont donc commencé à analyser eux-mêmes, à la frontière, les chargements de maïs qui leur étaient destinés. Ils ont effectivement retourné des chargements considérables, contaminés par le maïs StarLink.
    Je m'adresse à vous, monsieur Gold pour parler de technologies nouvelles et de brevets. Les biotechnologies ne se limitent pas aux organismes génétiquement modifiés, et je tiens à ce que les gens retiennent bien que les OGM ne constituent qu'un outil parmi tous ceux dont on dispose. Monsieur Agblor, vous parlez du secteur des légumineuses. Par la génomique, je crois, ce qui est probablement la meilleure façon de s'y prendre, vous avez réussi à mettre en évidence de nouveaux caractères.
    Donc, comment faire pour permettre à l'industrie d'effectuer sa recherche en toute sécurité et de commercialiser les produits qu'elle crée, d'une manière que pas encore elle...? J'essaie de dire qu'elle pourra être assurée de rentabiliser ses investissements, tout en ne donnant pas à l'agriculteur l'impression de le rouler quand il paie le prix fort, le prix grand public, pour ses semences
    Merci pour votre question.
    En fait, je pense que, au début de ses observations, M. Agblor y a répondu en partie. Il a fait allusion à un consortium formé par les producteurs, les chercheurs et l'industrie pour mettre au point la technologie. Cela semble vraiment la voie de l'avenir. Pour se doter des bonnes biotechnologies — et vous avez tout à fait raison, elles englobent les outils qui permettent d'identifier les espèces végétales ou animales, le pays d'origine, le caractère génétiquement modifié — et de toute la gamme des technologies qui sont actuellement faites pour les agriculteurs et, en fin de compte, les consommateurs, ces consortiums sont indispensables.
    Tout ce que nous pouvons faire pour aider à leur financement procure la sécurité à tous. Actuellement, quand une université met au point une technique, elle doit souvent s'en départir très tôt. Personne ne peut estimer sa valeur. Personne ne sait si elle convient. On a parfois de la difficulté à déterminer à qui on la concédera par licence ou même... Comme j'ai dit, seules les sociétés importantes sont capables, parfois, de se charger de ces techniques.
    Donc, tout ce que nous pourrons faire pour aider à créer des consortiums, avec des liens entre les universités, les producteurs et l'industrie, pour la mise au point de produits, créera de la stabilité. Au bout du compte, cela améliorera le respect de la technologie, parce que nous créons ainsi une collectivité qui croit en elle. La seule façon de savoir si quelqu'un viole votre brevet d'invention, c'est de l'apprendre par un tiers. Si tout le monde se tient et appuie la technologie, vos brevets seront probablement plus respectés.
(1225)
    Je sais que dans le secteur manufacturier — j'ai travaillé chez Flexicoil, puis Case New Holland — nous disions facétieusement qu'un brevet n'était respecté que dans la mesure où son propriétaire avait les reins solides.
    Est-ce semblable dans le secteur des grains ou dans celui des semences... ou, plutôt, dans celui des biotechnologies? Les semences ne constituent qu'une partie du secteur des biotechnologies.
    Il s'agit d'après moi d'une vision cynique. Dans la plupart des cas, on ne fait pas respecter les brevets et ce n'est pas dans ce but qu'on les prend. Les brevets servent essentiellement à affirmer à la face du monde: « Voilà ce que j'ai créé. Venez travailler avec moi ». C'est la meilleure façon d'utiliser un brevet. Ce n'est pas d'essayer de le faire respecter. Un procès portant sur une question de brevet coûte environ un à deux millions de dollars à chaque partie.
    En général, les gens respectent les brevets. Ils ne les violent pas ou, plutôt, ils ne les violent pas davantage que les autres types de droits. Ce sont des outils commerciaux pratiques pour entamer des négociations, nouer des relations. Les sociétés qui adoptent ce type de stratégie se tirent mieux d'affaire que celles qui essaient de faire respecter leurs droits bon gré mal gré.
    Donc, les petites sociétés ont effectivement plus de difficultés à faire respecter leurs brevets, uniquement en raison des coûts, mais, si l'affaire est limpide, les tribunaux canadiens leur donneront raison.
    Bien.
    Passons maintenant à la séparation des cultures et des produits ainsi qu'aux cultures nouvelles.
    Très rapidement.
    J'irai aussi vite que possible.
    L'un des sujets de préoccupation soulevés par certains obtenteurs ou le public concerne un caractère conféré à une espèce végétale qui empêche désormais de la cultiver à des fins alimentaires — par exemple le canola — mais ne la rend utilisable que dans l'industrie, comme celle des plastiques: quel processus devrait-on mettre en place pour l'empêcher de se retrouver dans la chaîne alimentaire? En théorie, cela n'arrivera jamais, mais, soyons réalistes, c'est possible.
    La réponse exigera peut-être plus d'une minute. La question n'est peut-être pas raisonnable. Restons en donc là, pour le moment. Je vous ferai peut-être y penser un peu.
    Quelqu'un veut-il y répondre?
    Monsieur Darier.
    Cette question, celle de la moléculture, représente un enjeu et un défi de taille. En effet, si à partir d'une culture vivrière on peut obtenir des produits industriels ou pharmaceutiques, une séparation convenable sera presque impossible à réaliser, à moins de fonctionner dans des systèmes totalement étanches, ce qui, pour des raisons économiques, est impossible; on ne peut pas mettre ces cultures sous cloche.
    C'est donc un problème très important. Jusqu'ici, nous pouvons nous vanter d'au moins une chose: d'avoir pris notre temps, et avec raison, parce qu'une chaîne alimentaire contaminée, c'est catastrophique.
    Je reviens au rapport de la Société royale. Je pense qu'on y trouve des recommandations très intéressantes, que le comité devrait voir sous un jour nouveau. Aujourd'hui, le problème se pose malheureusement avec autant d'acuité qu'à l'époque. Je vous remercie d'en avoir parlé, parce que je pense en effet que c'est une menace grave et que les Américains ne sont pas aussi prudents que nous.

[Français]

    Puis-je me permettre un petit commentaire?

[Traduction]

    Je suis désolé, il faut poursuivre. Vous aurez l'occasion de vous reprendre.
    Madame Bonsant.

[Français]

    Monsieur Nault, je vous laisse l'occasion de répondre.
    Si on est pour avoir une crise alimentaire, doit-on se servir des aliments pour produire du plastique ou du combustible? En tant que société, il faudrait décider de la direction à prendre. Si on est pour avoir cette crise alimentaire, on gardera les aliments pour la consommation, et non pas pour la fabrication de combustible ou de plastique.
    Je vous remercie, messieurs. C'est différent d'avoir un groupe de témoins aussi diversifié et intéressant.
    On parle beaucoup des OGM dans le secteur des oléagineux, des lentilles et du blé. L'année dernière, en septembre 2010, on a beaucoup parlé du saumon transgénique. Je sais que les Américains ont commandé une étude indépendante au sujet des effets possibles du saumon transgénique sur l'être humain. Croyez-vous que les études qui ont été faites soient suffisantes pour empêcher la production de saumon transgénique? J'ai vu un reportage à ce sujet: à un an, le saumon transgénique et le saumon naturel, sauvage, n'ont pas la même grandeur. Il doit y avoir des conséquences sur l'être humain.
    J'aimerais connaître votre opinion à ce sujet, monsieur Darier.
(1230)
    Je vous remercie de la question. En fait, ce dossier dure depuis une bonne quinzaine d'années, mais je pense que ce sera de plus en plus d'actualité, étant donné qu'une petite compagnie de biotechnologie américaine basée à l'Île-du-Prince-Édouard tente de faire approuver le saumon GM.
    Je reviens sur le rapport de la Société royale du Canada, qui était très clair à ce sujet: s'il y a une chose que l'on ne doit pas faire, c'est courir le risque de lâcher dans l'environnement des poissons GM, que ce soit le saumon ou autres.
    Le dossier continue. La FDA, aux États-Unis, examine cette autorisation pour la consommation humaine. En fait, ce qui est très intéressant, c'est que le système américain est un peu plus transparent que le nôtre. Effectivement, certaines de ces études démontrent qu'il pourrait y avoir des préoccupations quant à la santé humaine. C'est pour cette raison qu'on a demandé d'autres études. La FDA continue de mener des études à ce sujet.
    Je crains fortement que, sous toutes sortes de pressions, on finisse par autoriser le saumon GM pour la consommation aux États-Unis. Si c'est le cas, cela va entraîner une crise très rapide au Canada, étant donné la position du gouvernement canadien.
    Je vous rappelle qu'à la suite de la publication du rapport de la Société royale du Canada, le gouvernement canadien avait très clairement affirmé qu'il voulait mettre en place une réglementation spécifique sur le poisson GM, en raison des risques spécifiques. Or, 10 ans plus tard, on attend toujours cette réglementation.
    Si les États-Unis autorisent cela, ça va créer une crise au Canada. Premièrement, il faudra déterminer si le Canada doit produire des oeufs de saumon GM. Deuxièmement, le cas échéant, il faudra les exporter dans le contexte du Protocole de Carthagène sur la biosécurité. Troisièmement, il faudra déterminer les conséquences de la consommation de ce produit. Pourra-t-on empêcher sa dissémination accidentelle dans les eaux? Cela risque de menacer un secteur très important, soit l'élevage et l'industrie du saumon.
    Dans mon comté se trouve un producteur de truite saumonée. Tout est naturel, il n'y a rien de transgénique. Si les Américains appuient la consommation du saumon transgénique, qui est 10 fois plus gros que le saumon ordinaire, le Canada en ressentira d'importantes répercussions économiques. Tous les éleveurs de petits saumons naturels feront faillite.
    Je ne sais pas si votre comité a consulté les producteurs de saumon ou les gens qui travaillent en aquaculture, mais, à ma connaissance, ils sont tous très réticents à l'idée du saumon ou du poisson GM, et ce, pour toutes sortes de raisons.
    Je voudrais vous rappeler que le saumon GM dont on parle n'est pas plus gros, mais grandit plus vite. Il devient adulte en 18 mois au lieu de 3 ans. C'est la réalité.
    Les risques biologiques liés à la contamination du saumon sauvage, notamment, qui représente une menace à la biodiversité, sont tellement grands que la Société royale du Canada a été très claire: elle voulait un moratoire sur l'aquaculture dans les océans pour empêcher cette contamination. C'est le sujet sur lequel vous devriez vous pencher, en plus de la luzerne et de tous les autres sujets. Il faut absolument mettre en place les recommandations de la Société royale du Canada.
    C'est aussi une question de transparence. On parle beaucoup de la confiance du public et des marchés, or la confiance se joue également sur la transparence. Il faut rassurer les marchés extérieurs que l'on prend les meilleures décisions scientifiques basées sur les meilleures expertises indépendantes.
    D'accord.
    Avez-vous quelque chose à ajouter, monsieur Nault?
    Toutes les études indépendantes qu'on a eues à ce jour, notamment celles d'Arpad Pusztai, de Gilles-Éric Séralini et de l'Institute of Science in Society, ont démontré que les transgènes avaient des conséquences. Je précise qu'il existe une énorme différence entre un transgène et le fait de travailler la génomique. En ce qui a trait aux transgènes, à tout coup on a vu un impact sur le système immunitaire des rongeurs. Je suis à peu près certain que si c'était un médicament, ça ne passerait même pas la première étape préalable à sa distribution aux humains. Pourtant, on en mange.

[Traduction]

    Comme suite, simplement, monsieur Darier, à la question de Mme Bonsant sur les poissons transgéniques et, pour m'assurer que je tiens les bons chiffres, je crois que vous avez dit qu'ils atteignaient leur taille d'adulte à 18 mois, comparativement à trois à quatre ans?
(1235)
    Oui, plutôt qu'en trois ans.
    Ma question est donc la suivante: à supposer que tous ces poissons sont en captivité et que, pour arriver à ce résultat, leurs rations sont augmentées, s'ils se trouvaient dans la nature — et je pose simplement une hypothèse — quel serait l'impact sur leurs ressources alimentaires?
    Avez-vous des observations supplémentaires à ce sujet?
    Beaucoup d'études et de modèles informatiques ont porté sur les répercussions d'une évasion accidentelle de poissons génétiquement modifiés dans l'environnement. Un comité pourrait tenir une audience complète sur ce seul sujet, et je vous invite à le faire, pour plus tard peut-être.
    Cependant, des spécialistes prévoient que même une poignée de poissons génétiquement modifiés mais non stériles qui se retrouveraient dans des populations très peu nombreuses ou spécifiques de saumons sauvages pourrait mener à leur extinction. C'est pourquoi la Société royale a été très précise. Pourquoi? D'abord parce que ces poissons exercent une concurrence pour la nourriture. Ensuite, ce sont des prédateurs sexuels, également. Ils concurrencent leurs congénères pour la reproduction, même si la génération qui suivra sera moins viable. Au fond, le saumon sauvage en sort plus affaibli que son congénère issu du génie génétique.
    Je vous invite, vous et les membres du comité, parce que le temps presse, à prendre connaissance d'une partie de la documentation relative à l'accord européen de libre-échange et de l'avis de certains spécialistes qui l'ont examiné. Faites vite, parce que cette question ressurgira plus vite que vous ne le pensez.
    Merci.
    Nous passons maintenant à M. Shipley, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à nos témoins.
    Je suis de l'Ontario, où j'ai tenu un certain nombre de réunions très agréables avec des organisations de produits. Ma circonscription n'est pas un gros producteur de lentilles ou de pois, mais on y cultive beaucoup de maïs, de soja, de blé ainsi que de fèves et de haricots comestibles.
    Monsieur Schmitz, j'ai besoin de votre aide. Un conseil ne fait jamais de tort en matière de communication, nous avons tous besoin d'en recevoir. Je pense qu'il existe deux problèmes. Quelqu'un a mentionné aujourd'hui que la peur nous fait imaginer le pire, pour nous secouer. Loin de moi cette vision des choses. Je pense que nous devons rechercher l'équilibre, nous appuyer sur la science. Pour la commercialisation, concédez un peu de bon sens aux agriculteurs: bien honnêtement, ils ne produiront rien qui ne se vende pas. Rien non plus s'ils ne peuvent pas s'appuyer sur la recherche-développement. C'est ce qui explique, à les entendre, la naissance du partenariat dont ils ont parlé. Avec messieurs Gold, Schmitz et Agblor, nous avons parlé de constituer de tels partenariats entre les universités, les producteurs et l'industrie.
    Nous prétendons que les produits que nous créons ne devraient pas se trouver dans le commerce ni servir à la production d'énergie ni de rien d'autre. Ce qui est intéressant, c'est que, en s'appuyant sur les résultats de la recherche, l'un des producteurs de ma circonscription me montre — et je suis moi-même agriculteur — que, au bout du compte, nous produirons de l'énergie. Nos produits se retrouveront dans le commerce. D'autres pourraient même être destinés à des usages pharmaceutiques. Au bout du compte, nous continuerons à produire de la nourriture, parce que la recherche est désormais capable de séparer, dans l'exemple du maïs, l'usage alimentaire et la production d'éthanol énergétique.
    Depuis un certain nombre d'années, nous entendons tous — et il y a toujours quelqu'un pour propager la rumeur — que les organismes génétiquement modifiés sont mauvais. Personne ne semble comprendre la génomique. C'est plus doux à l'oreille. Alors comment faire savoir, très franchement, que tout n'est pas entièrement bon ni entièrement mauvais? Dans l'industrie laitière canadienne, dont je faisais partie, nous n'acceptions pas la somatotrophine bovine, ou STb, l'hormone de croissance bovine. Nous avons le droit souverain de le faire, heureusement.
    Comment dire ces choses aux gens?
    Dans un certain nombre de jeunes familles... Je ne lis jamais les étiquettes, mais ma fille, oui. Faire comprendre ce qu'elles disent, c'est une autre histoire.
    Comment dire les choses clairement? L'un de vous trois peut-il me souffler des idées? La question est en effet importante.
(1240)
    Prenons l'exemple hypothétique d'un rapport qui ne vient pas de Monsanto, qui explique pourquoi le blé génétiquement modifié c'est l'avenir ou qui porte sur la mise de ce blé dans le commerce. Si c'est vrai, et cela se peut, il faut aussi que le public sache. L'information sur l'acceptabilité d'une chose ne peut pas toujours rester confidentielle, n'est-ce pas? Donc, pour la propager, il faut presque amener un organisme d'un autre camp, mais capable d'objectivité, qui n'est pas une société semencière, etc., qui privilégie d'abord ses intérêts, à désigner les gagnants et les perdants de cette situation.
    Aux États-Unis, l'éthanol est un gâchis. Toute la filière éthanol, à mon avis, repose sur la participation des groupes de pression des agriculteurs. À mon avis, la plupart des universitaires, du moins, n'appuient absolument pas le programme éthanol américain. Voilà ce qu'ils disent: pourquoi utiliser de l'énergie pour produire du maïs qui servira à son tour à produire de l'énergie? Selon le spécialiste à qui on s'adresse, partout on se questionne sur les avantages de l'éthanol. Comment faire savoir tout cela à la personne moyenne? Je n'en ai aucune idée. La personne moyenne pourrait dire que si le prix du maïs augmente de 50 ¢ ou de 60 ¢ le boisseau à cause de l'éthanol, c'est peut-être de mauvais augure pour l'approvisionnement alimentaire. En outre, certains prétendent que ce produit n'a aucun impact sur le marché des carburants. Pourquoi alors en produire? Obama s'est lui-même placé dans une situation vraiment problématique à cause des prix de l'énergie et de la conduite à tenir avec les crédits d'impôt accordés aux producteurs pétroliers.
    Je suis d'accord avec vous qu'il faut communiquer, mais c'est difficile. Si les associations professionnelles agricoles pensent qu'il y a de l'argent à gagner, elles n'ont pas vraiment besoin de temps pour communiquer avec quiconque. Il s'agit pour eux de convaincre les politiciens d'agir.
    Il ne vous reste que quelques secondes.
    M. Gold voulait prendre la parole.
    Permettez à M. Gold de répondre.
    Je suis désolé de m'imposer de la sorte.
    De fait, de bons efforts ont été déployés. Il existe maintenant à Ottawa un Centre des médias scientifiques. Preston Manning dirige son organisation dans l'Ouest. Nous, les chercheurs, nous avons consacré à la communication un effort supplémentaire. J'ai participé à un café scientifique sur les biotechnologies.
    Il s'agit d'encourager les gens à intervenir. La lecture d'une étiquette est très peu instructive. Si le lecteur ne comprend pas vraiment la technologie, l'étiquette n'a aucune signification pour lui. Il pourrait être excessivement désireux de se procurer le produit ou ne pas l'être du tout, sans vraiment être plus instruit à son sujet.
    Les biotechnologies n'ont rien de terrifiant. Elles ne sont absolument pas si compliquées. Il suffit de les expliquer. Les chercheurs sont probablement votre meilleure ressource.
    D'accord, merci.
    Nous devrions de fait faire une pause, mais je vais autoriser messieurs Easter et Hoback à poser chacun une question. Soyez brefs, cependant.
    Oui. Eh bien, monsieur le président, j'avais vraiment trois questions à poser.
    De toute manière, l'une des justifications pour nourrir un monde affamé est la nécessité d'augmenter la production. Andrew, quel est le rôle réel de la production? Il y a les problèmes des pertes subies dans les champs, dans les entrepôts, les avaries du transport vers les marchés, d'autres pertes dans les entrepôts, et bien d'autres encore. C'est énorme.
    En ce qui concerne la question dont nous sommes saisis, l'une des grandes causes de confusion réside dans la différence entre les OGM et les biotechnologies. Ma question s'adresse à qui peut y répondre. Les biotechnologies ne sont pas exclusivement les OMG. Comment les distinguer?
    Eh bien je pense que, dans la profession qu'exerce l'homme qui vient tout juste de nous quitter, on y voit très clair. Je pense que, dans ce milieu, on sait très bien ce qu'on fait quand on achète une biotechnologie et non un OGM. Les Japonais qui achètent notre blé, savent exactement ce qu'ils font, et c'est pourquoi ils achètent notre blé. Quand on mélange toute la production, etc., les acheteurs ne savent plus d'où les produits viennent. Ils ne seront probablement même pas intéressés à acheter un organisme qui n'est pas modifié génétiquement. Il faut pouvoir acheter des OGM et des organismes qui ne sont pas des OGM. Il faut segmenter les marchés, et ainsi de suite.
    Les sociétés de grains commercent toutes avec des cahiers de charges déjà établis, et les acheteurs sont généralement au courant. Pour moi, c'est très clair.
    Monsieur Hoback, vous pouvez poser une petite question.
    Monsieur Schmitz, vous avez parlé de la manière dont votre exploitation agricole s'est adaptée, en passant du blé et de l'orge aux légumineuses. Nous avons été les témoins d'une croissance vertigineuse des légumineuses. En fait, vous avez parlé de l'exploitation de votre fille et de sa conversion au canola, et les problèmes qui ont suivi.
(1245)
    En effet. La région ne s'y prête pas.
    Oui.
    Dans le blé, particulièrement, les surfaces cultivées ont diminué. J'ai ma petite idée là-dessus, mais comment voyez-vous la situation de cette céréale?
    Dans notre région, le blé a déjà été la culture par excellence, et même cette année, alors que les prix explosent... Mais il faut reconnaître que le canola a fait de même et que d'autres cultures ont connu une croissance peut-être encore plus rapide. Alors tout le monde, n'est-ce pas, attend la grande augmentation des surfaces en blé. Elle n'arrivera probablement pas.
    M. Randy Hoback: Elle ne s'est pas matérialisée?
    M. Andrew Schmitz: Nous venons en outre de découvrir tout récemment que la culture du blé n'est pas rentable par rapport aux autres cultures, parce que les rendements n'ont jamais été élevés. Il y avait la sécheresse, etc. C'était tout simplement donc les facteurs économiques de cette région, avec l'effet des légumineuses...
    Alors qu'arrive-t-il aux rotations? En effet, il faut maintenir la rotation, pour maintenir la santé des cultures.
    Eh bien, d'après moi, beaucoup d'agriculteurs parmi les meilleurs, qui exercent encore ne font même plus attention à certaines discussions sur le mélange des cultures en fonction des prix. Je continue de constater qu'ils sont nombreux à pratiquer actuellement une rotation, et, bien sûr, c'est dans cette rotation que s'insèrent parfaitement les lentilles et les pois, à cause de la baisse de la teneur en azote dans les champs. Donc beaucoup de producteurs appliquent une rotation dans notre région et ils ne la modifieront pas beaucoup en fonction du prix relatif du produit des cultures.
    Je pense que je m'inquiète à cause des tricheurs animés par l'appât du gain. Quand leurs marges diminuent, on constate qu'ils font succéder le canola au canola et qu'ils ont probablement des pratiques peu recommandables.
    En effet, c'est arrivé cette année.
    Merci beaucoup, messieurs. Nous pourrions parler toute la journée, j'en suis convaincu, et je souhaiterais que ce soit possible.
    Je n'essayais pas de retrancher du temps à personne. Parfois nos propres membres oublient que les cinq ou sept minutes de leur intervention comprennent la question et la réponse. Je suis généreux de mon temps, mais plus j'en accorde, plus on m'en demande.
    Bon, merci beaucoup d'être venus et je suis persuadé de vous revoir lors de nos déplacements. Merci encore.
    Je dois demander à tous ceux qui n'ont pas de lien avec les membres du comité ou le personnel de bien vouloir quitter les lieux. Nous devons poursuivre la séance à huis clos, pour traiter de certaines affaires.
    Merci.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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