Merci à tous.
Les consommateurs d'aujourd'hui souhaitent regarder ce qu'ils veulent, quand bon leur semble, et à l’endroit qui leur convient. Ils veulent regarder leur émission préférée à 20 heures, mais s'ils l'ont manquée, ils veulent pouvoir la regarder plus tard. Ils veulent voir du contenu à la télévision ainsi que sur leurs dispositifs portables et à l'ordinateur. À notre avis, un plan d'affaires ou une initiative de politique publique qui ne tient pas compte de cet aspect du comportement du consommateur est voué à l'échec.
De nombreux experts prédisent que les téléspectateurs regarderont tous la télévision sur Internet. On voit déjà apparaître des services comme Hulu aux États-Unis. Ces grands fournisseurs de services risquent de ruiner les fournisseurs de télévision par câble et peut-être même les radiodiffuseurs canadiens. C'est ce qu'on appelle la désintermédiation, et c'est un processus qui a déjà remplacé bon nombre d'entreprises physiques par des entreprises en ligne.
Par contre, la vision du « n’importe où, en tout temps » ne signifie pas qu'il est inévitable que tout le visionnement de vidéos se fera sur Internet. Nous croyons que les réseaux de radiodiffusion en direct et les réseaux de télédistribution pourraient exister encore bien longtemps. Cependant, pour survivre, ces réseaux devront être efficaces et offrir aux consommateurs la fonctionnalité qu'ils réclament.
Donc, que peuvent faire les industries culturelles canadiennes pour tirer profit de l'évolution des médias numériques et émergents et pour se préparer aux développements futurs? Nous répondrons à cette question en parlant de la façon dont Rogers Cable travaille d'arrache-pied pour offrir aux clients de tout, n’importe où et en tout temps en améliorant l'expérience télévisuelle canadienne au moyen de technologies numériques modernes.
Les téléspectateurs qui regardent la télévision numérique peuvent suivre des émissions sur leurs canaux préférés dans différents fuseaux horaires, leur offrant ainsi l'option « diffusion différée » qui leur permet de regarder ces émissions plus tôt ou plus tard que l'heure de diffusion locale. Les enregistreurs vidéo personnels ou EVP sont utilisés par 20 p. 100 de nos abonnés. Ils permettent aux abonnés d'utiliser, pour leurs émissions de télévision, les fonctions d'enregistrement, d'avance rapide, de rembobinage et de pause. En outre, comme un grand nombre d'émissions sont disponibles en vidéo sur demande, les abonnés peuvent les regarder à leur guise.
Rogers Cable offre aussi le service Rogers sur demande en ligne. Ce service s'inspire d'une vision selon laquelle les consommateurs peuvent regarder les émissions des services de programmation auxquels ils sont abonnés aussi bien à la télévision que sur Internet, sur un ordinateur. Même si les émissions de télévision ne sont pas toutes offertes dans le cadre de ce service, le menu actuel est assez copieux: nous offrons plus de 37 contenus différents. Le service a été bien accueilli jusqu'à présent. Nous prévoyons un jour offrir ce service sur téléphone cellulaire également.
Les technologies numériques peuvent aussi en faire plus pour les radiodiffuseurs. Les câblodistributeurs aux États-Unis commencent à élaborer des plateformes de publicité ciblée de façon à ce que des annonces différentes puissent être envoyées à différentes personnes en fonction de leur quartier ou de leurs préférences. L'une d'entre elles est connue sous le nom de « Project Canoe ».
Cela permettrait aux télédiffuseurs d'augmenter le prix de la publicité, ce qui les aiderait dans leur analyse de rentabilisation. En réalité, cela permettra de cibler et de mesurer la publicité télévisée tout comme la publicité sur Internet aujourd'hui.
Ken.
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Si Rogers parvient à exploiter la technologie numérique pour moderniser notre service de télévision par câble, le CRTC pourra continuer à imposer la réglementation en matière de contenu canadien qu'il impose déjà aujourd'hui. Ces règlements ont bien servi les industries culturelles canadiennes. À titre d'exemple, 55 p. 100 du contenu diffusé par un réseau de télévision doit être canadien. Cependant, si on fait migrer tout le contenu télévisuel à l’Internet, la télévision canadienne perdra l'avantage que lui procurent les quotas de contenu canadien.
II faut que le CRTC adopte des politiques souples pour nous aider à réussir cette transition. Et il l'a déjà fait, sauf dans un cas digne de mention. Il nous a permis d'offrir des émissions télévisées en vidéo sur demande et d'insérer de nouvelles annonces pour motiver les radiodiffuseurs à nous fournir de la programmation. Il n'a imposé ni taxes ni frais pour notre service Internet. Il a indiqué sa volonté de nous laisser vendre des annonces dans le cadre de notre programmation de canal communautaire provenant des États-Unis pour payer le prix d'un régime de publicité ciblée, comme le font les câblodistributeurs américains.
Notre seule cause de préoccupation est la décision du CRTC annoncée récemment en ce qui concerne la compensation pour la valeur des signaux. Cela nous obligera à dépenser beaucoup pour la télévision au moment même où les abonnés sont de plus en plus nombreux à abandonner la télévision linéaire en faveur du visionnement sur demande et du visionnement en ligne.
Il y a aussi des politiques que le gouvernement fédéral pourrait adopter. Par exemple, conformément à l'article 19 de la Loi de l'impôt sur le revenu, les entreprises canadiennes ne peuvent pas déduire de leur revenu imposable les dépenses engagées pour placer de la publicité dans des magazines américains ou sur les ondes de stations de télévision frontalières.
Le même règlement devrait s'appliquer aux sites Web américains. Il sera ainsi plus coûteux de placer de la publicité sur Hulu, par exemple, si jamais ce service est offert au Canada. L'objectif devrait être de s'assurer que les annonceurs préfèrent les services qui appartiennent à des entreprises canadiennes et qui sont exploités par elles.
On devrait aussi offrir des crédits d'impôt fédéraux pour le contenu en ligne. Les règlements actuels offrent seulement des crédits pour la production de divertissement filmé. Certaines provinces, comme la Colombie-Britannique, l'Ontario et le Québec, se sont déjà engagées dans cette voie.
Les tarifs des droits d'auteur au Canada sont exorbitants. Nous payons plus en droits d'auteur pour le contenu en ligne et le contenu de médias traditionnels que les entreprises médiatiques américaines. Par conséquent, il nous est difficile de nous adapter et d'être concurrentiels. Par exemple, il est plus cher de télécharger les copies numériques d'oeuvres musicales en ligne que de les acheter sur disque compact à cause des tarifs et des redevances de droits d'auteur. Le fait d'accumuler les redevances pour les médias numériques continuera à inciter les consommateurs à obtenir les oeuvres musicales et les autres produits protégés par le droit d'auteur au moyen du partage illicite de fichiers sur Internet et auprès des grands fournisseurs de services américains non réglementés comme YouTube.
C'est aussi une erreur de laisser les droits d'auteur dissuader les radiodiffuseurs de moderniser leurs activités. Par exemple, si une station de radio fait jouer de la musique sur disque compact, elle peut avoir à payer deux types de redevances de droits d'auteur. Si elle charge ces DC sur un serveur, elle pourrait avoir à en payer quatre de plus. Les stations de radio canadiennes paient deux fois plus en redevances de droits d'auteur que les stations de radio américaines. Cela est d'autant plus inquiétant que plus de la moitié des redevances de droits d'auteur sont versées à l'extérieur du Canada.
Il faut contrôler les tarifs de droits d'auteur au Canada sans quoi l'industrie canadienne de la radiodiffusion n'arrivera pas à rivaliser avec l’Internet ou les autres nouvelles technologies. Cela explique en partie pourquoi nous n'avons pas de stations de radio sur Internet et pourquoi nous avons été envahis par des services étrangers provenant de territoires plus rentables.
Aux États-Unis, les EVP deviennent de plus en plus rentables grâce à l'EVP en réseau. Un EVP n'est qu'un terminal numérique doté d'un disque dur. L'EVP en réseau centralise le disque dur au siège social de l'entreprise de câblodistribution. Ainsi, tous les terminaux numériques peuvent servir d'EVP, ce qui permet à tous les clients de profiter de la souplesse d'un EVP à un coût considérablement réduit.
La plus récente version modifiée de la Loi sur le droit d'auteur du Canada, le projet de loi , interdit expressément aux câblodistributeurs de recourir à I'EVP en réseau. Nous estimons qu'il s'agit là d'une erreur qui devrait être corrigée dans le prochain projet de loi sur le droit d'auteur.
Rogers recommande, en matière de réforme du droit d'auteur et d'application des traités de l'OMPI, une approche équilibrée qui continuera de récompenser l'innovation et la créativité.
Si nous parvenons à réaliser notre vision d'offrir à nos clients la télévision sur toutes les plateformes, cela profitera certainement à notre entreprise. Comme nous l'avons dit plus tôt, cela permettra aussi de maintenir le régime de réglementation du contenu canadien. Les créateurs de contenu artistique et culturel pourront aussi être payés pour leurs oeuvres. Un environnement où le contenu est disponible gratuitement sur Internet ne permet pas aux créateurs d'être rémunérés pour leurs oeuvres. Notre modèle conservera la chaîne de valeur actuelle tout en permettant à tous les fournisseurs d'être rémunérés.
Nous ne croyons pas que la modification des règles régissant la propriété étrangère aura un impact sur la culture et le contenu canadiens. On peut changer les règles canadiennes qui régissent la propriété étrangère en ce qui concerne les sociétés de télécommunications et les entreprises de câblodistribution. Ces entreprises sont principalement des distributeurs de contenu. Et on peut maintenir les règles qui régissent la propriété étrangère en ce qui a trait aux fournisseurs de contenu. Les stations de radio et de télévision et les chaînes spécialisées peuvent demeurer sous contrôle canadien. Cela permettrait aux distributeurs à forte intensité de capital d'accéder au capital étranger à moindre coût, tout en s'assurant que les producteurs de contenu sont canadiens.
Merci.
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Bonjour, monsieur le président et bonjour, mesdames et messieurs les membres du comité. Je vous remercie tous de me fournir l'occasion d'être ici aujourd'hui et de participer à cette discussion sur l'étude des médias numériques et émergents.
Mon nom est Mark Bishop. Je suis originaire de Saint John, au New Brunswick, et j'habite maintenant à Toronto. Je suis heureux d'être ici aujourd'hui pour vous parler de ce sujet. Je suis membre du conseil d'administration de l'ACPFT, l'Association canadienne de production de films et de télévision. Je sais que deux membres de notre personnel ont comparu devant vous la semaine dernière, et j'appuie leurs propos.
Je suis président du conseil d'administration de Interactive Ontario. Notre président, Ian Kelso, a comparu il y a deux semaines, et j'appuie ses propos.
Aujourd'hui, je suis ici à titre de cofondateur et chef de production de marblemedia, une entreprise de production de médias numériques intégrés. Nous occupons une position unique sur le marché en ce sens que nous créons du contenu et que nous distribuons notre propre contenu intégré sur plateformes multiples.
À ses débuts, il y a neuf ans, l'entreprise était exploitée dans ma salle à dîner et nous étions deux. Aujourd'hui, nous avons 30 employés à temps plein dans nos studios de Toronto. Chaque année, nous générons entre 15 et 20 millions de dollars de revenus de production.
Dès le premier jour, l'entreprise s'est axée sur le contenu, sur la narration d'histoires qui amènent l'auditeur sur des plateformes multiples. Nous avons repoussé les limites de l'expérimentation avec les nouvelles plateformes depuis la création de l'entreprise: haute définition, télévision sur le Web, téléphone cellulaire, technologie convergente, transmédias et j'en passe. Nous avons tout fait.
Tout cela a été réalisé grâce à l'appui financier d'un certain nombre d'organismes de financement du Canada qui nous ont permis de faire grandir notre entreprise. Le Fonds de nouveaux médias du Canada de Téléfilm Canada, le Fonds de la radiodiffusion et des nouveaux médias de Bell et, maintenant, le Fonds des médias du Canada et de nombreux autres nous ont fourni un tremplin pour notre croissance et ont permis à marblemedia d'être reconnu comme un chef de file à l'échelle internationale.
En 2008, nous avons remporté le prix « Entreprise de l'année » au gala des Prix des nouveaux médias canadiens. L'automne dernier, le Hollywood Reporter a dit que nous étions « producteur de contenu de prochaine génération de calibre international ».
Nous avons connu du succès dans le domaine de la programmation — sur toutes les plateformes — destinée aux heures de grande écoute et aux jeunes. Taste Buds, deafplanet.com, This is Emily Yeung, et This is Daniel Cook sont quelques-uns de nos titres.
Je voulais parler de This is Daniel Cook. Je sais que la semaine dernière, mes collègues de l'ACPFT l'ont cité en exemple. Encore une fois, il s'agit d'une série sur plateformes multiples destinée aux enfants d'âge préscolaire, et nous produisons les émissions pour le Web et pour la télévision au Canada. À l'échelle internationale, nous avons vendu la série télévisée à 90 pays, et elle a été traduite en 11 langues. Nous avons créé une série DVD en six volumes, une bande sonore et des livres, et nous avons même été vus au Oprah Winfrey Show.
Nous avons également vendu le contenu Web. Les jeux en ligne interactifs et le contenu mobile ont été cédés sous licence à des diffuseurs et des portails de jeu en ligne. À son apogée, le site interactif pour les enfants d'âge préscolaire tiré de l'émission de télévision, « thisisdanielcook.com », a été visité 1,7 million de fois par mois. En moyenne, chaque visite de nos enfants d'âge préscolaire avait une durée de 14 minutes. C'est assez impressionnant quand on pense que nous parlons d'une émission de télévision de six minutes.
Je vous fais part de tout ceci pour vous dire que les investissements du gouvernement dans l'industrie de la production de contenu apportent des résultats. Cela permet de créer du contenu que les Canadiens peuvent regarder avec plaisir, cela crée des emplois au Canada, cela permet de bâtir des entreprises capables d'exporter, par la vente à l'échelle internationale de contenu culturel canadien sur toutes les plateformes. L'investissement fournit un tremplin qui permet à marblemedia d'être un chef de file à l'échelle mondiale dans le domaine des récits convergents. Nos projets primés attirent maintenant des producteurs étrangers, qui veulent travailler davantage avec marblemedia et investir dans nos récits canadiens.
Ces nouveaux partenariats voient le jour avec de nombreux joueurs différents, des groupeurs de contenu. À titre d'exemple, il y a le nouveau projet Web numérique de marblemedia réalisé en collaboration avec une entreprise nommée Vurugu. Cette entreprise, fondée par Michael Eisner, l'ancien PDG de Disney, est un studio numérique de Los Angeles. Nous venons tout juste de nous engager dans un nouveau projet avec eux. Notre rôle consistera à produire et distribuer le projet en partenariat avec Rogers.
Un des autres projets de marblemedia est de créer, pour la télévision et le Web, une nouvelle série pour enfants sur plateformes multiples. Nous avons prévendu la série télévisée et la série interactive à la BBC et à ABC Australia, qui ont été les premiers à se joindre à nous, puis qui ont incité notre diffuseur partenaire canadien à faire de même.
Donc, il y a beaucoup d'activité, mais il y a place à amélioration, et c'est ce dont je vais parler aujourd'hui.
Pour revenir à certaines des choses qui fonctionnent pour les créateurs de contenu indépendants, le a annoncé la création officielle du Fonds des médias du Canada le 26 mars. Pour nous, il s'agissait d'un lien important entre les fonds consacrés à la télévision et les fonds destinés aux médias interactifs. Cela a suscité un grand débat au sein de l'industrie, un débat qui se poursuit depuis 12 mois. Cela a incité les diffuseurs du Canada à voir le contenu sous un autre angle. Cela favorise l'innovation en matière de modèle d'entreprise et de récit.
En raison des changements dans les tendances sociales et technologiques, le contenu est en voie de devenir indifférent au support. Qu'il soit diffusé à la télévision ou en continu en ligne, ou qu'il soit disponible pour téléchargement sur le... [Note de la rédaction: difficultés techniques] ... le récit peut maintenant être une expérience interactive et à écrans multiples.
La création du FMC reflète cette nouvelle réalité. Elle aura une incidence positive et à long terme sur les producteurs indépendants de contenu.
Ce que nous recommandons, c'est de chercher le moyen de stabiliser le fonds au-delà d'un ou deux ans. Si le gouvernement prenait un engagement sur cinq ans, tous les intervenants pourraient dresser des plans d'entreprise à plus long terme.
Nous voudrions aussi recommander l'examen d'autres critères que la télédiffusion, qui reste le seul critère de déblocage des fonds, dans le cadre de cette nouvelle initiative.
Il convient aussi de parler d'une autre initiative financière, les crédits d'impôt. Le gouvernement fédéral accorde des crédits d'impôt pour production télévisuelle et cinématographique, comme la plupart des provinces. Pour les médias interactifs, les crédits d'impôt sont encore à part et n'existent que dans certaines provinces, comme l'Ontario. Le crédit d'impôt visait à permettre la capitalisation des compagnies et devait être le tremplin de leur croissance. Cette capitalisation est la clé, bien que la plupart des compagnies doivent réinvestir dans des projets leurs crédits d'impôt pour production télévisuelle, ce qui n'en était pas l'objet à l'origine. La pénurie de capitalisation en découlant paralyse de nombreuses compagnies.
Le crédit d’impôt de l’Ontario pour les produits multimédias interactifs numériques — pour donner l'exemple de l'Ontario — nous a vraiment permis, à marblemedia, d'investir dans la recherche-développement, la nouvelle technologie et l'innovation. Nous recommandons une révision de ces politiques, l'élargissement de la portée des crédits d'impôt fédéraux pour production télévisuelle et cinématographique afin d'englober les nouveaux médias, et une révision des critères, comme je disais tout à l'heure, pour que ce ne soit pas seulement la télédiffusion.
Pour ce qui est de la stratégie nationale sur le numérique, c'est avec grand plaisir que j'ai modifié mes observations à la suite des excellentes nouvelles reçues hier. Depuis qu'il en a été question dans le discours du Trône, et avec, maintenant, la mise en oeuvre du plan de consultation de l'industrie et des intervenants, la stratégie est des plus intéressante. Je suis très heureux de constater qu'elle est axée sur le contenu et la collaboration avec l'industrie.
Les médias numériques revêtent une importance primordiale pour l'avenir culturel et économique du Canada. Comme le disait hier le ministre Moore, « nous reconnaissons le rôle de premier plan du secteur des médias et du contenu numériques dans l'économie numérique et nous avons l'intention d'établir un plan à long terme qui résistera à l'épreuve du temps ».
Tout cela nous permettra de nous mesurer aux concurrents qui nous ont devancés, comme l'Australie, la Nouvelle-Zélande et la Grande-Bretagne. Nous avons besoin d'une infrastructure haut de gamme qui soit contrôlée par des compagnies canadiennes et qui transmette notre contenu canadien, produit par des professionnels. Les Canadiens regarderont notre contenu et s'y identifieront si nous diffusons un contenu intéressant sur les tribunes appropriées.
Nous sommes ravis de voir le gouvernement prendre l'initiative du dialogue. Marble restera un participant actif à ce dialogue, de concert avec nos partenaires de l'ACPFT, Interactive Ontario, l'Office national du film du Canada, etc.
Nous estimons qu'il faut préciser les modalités des échanges pour rendre les règles plus équitables pour tous. Les producteurs doivent maintenant recourir à de multiples télédiffuseurs et à de multiples plateformes, et sont souvent confrontés à la tâche difficile de devoir renoncer à leurs droits sans aucune rémunération supplémentaire en échange. La négociation est difficile, parce que, dans le bras de fer qui oppose diffuseurs et producteurs, ce sont les diffuseurs qui contrôlent tout et possèdent la clé qui ouvrira les coffres du FMC, du fonds de Bell, des crédits d'impôt et des autres incitatifs financiers.
Il faut des modalités des échanges pour que ce modèle d'exportation de contenu et de génération de revenu soit efficace pour tout le système. Nous devons maintenir en son centre les producteurs indépendants, qui fournissent des points de vue indépendants. Nous avons été heureux de constater que le CRTC s'attend à ce que ce soit inclus dans les renouvellements des droits de licence en 2011.
En ce qui concerne l'investissement étranger, nous constatons que les traités de coproduction ne portent que sur les productions cinématographiques et télévisuelles. Ils sont dépassés et ont besoin d'être révisés. Nos traités de coproduction doivent englober le contenu interactif et les plateformes interactives. Puisque les droits de licence que perçoivent les diffuseurs au Canada diminuent — une tendance qui s'accentue —, nous avons besoin de partenariats et d'investissements étrangers dans notre contenu.
Pour terminer, à marblemedia, nous nous réjouissons de l'avenir de la production du contenu qui se profile à l'horizon. Le Canada peut et doit être un chef de file mondial à l'ère du contenu numérique. Le gouvernement doit être notre partenaire et appuyer nos activités en privilégiant un climat favorable à l'innovation, la narration et l'exportation. Votre collaboration est indispensable.
La stratégie nationale pour les médias numériques est l'objet d'un dialogue continu: elle est indissociable de notre succès futur. Elle est centrée sur le contenu professionnel, et il est essentiel que l'accès à ce contenu se fasse au moyen de services appartenant à des Canadiens. La création et la distribution du contenu — je le répète, du contenu canadien produit professionnellement, dont la majorité, on peut l'espérer, émanerait de producteurs indépendants — doit être accessible aux publics canadiens, quelque soit la plateforme visuelle canadienne qu'ils choisissent.
Les modalités des échanges doivent assurer l'équité dans le réseau des producteurs et diffuseurs indépendants. Ils font en sorte que tous les partenaires mènent leurs activités de manière équitable et favorisent la création de nouvelles sources de revenu.
Le temps est venu de mettre à jour les programmes existants, comme les crédits d'impôt pour production télévisuelle et cinématographique, les traités de coproduction et même le FMC. Il nous faut envisager un contenu multiplateformes intégral. Les télédiffuseurs ne devraient pas être les seuls à pouvoir délier les cordons de la bourse.
En tant que producteurs indépendants canadiens, nous allons continuer d'innover, d'adapter, d'apprendre, de prendre des risques et de repousser les limites du nouvel univers numérique pour vendre nos histoires à nos publics.
Je termine ici mes observations. Je vous remercie de m'avoir offert cette occasion de participer au débat et d'avoir pris le temps de le mener. Je répondrai volontiers à vos questions.
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Vous êtes tous en train d'utiliser le temps qui m'est accordé.
Tant mieux si j'ai plus de temps parce que je vais en avoir besoin car j'ai plusieurs questions. Je vais faire des commentaires et terminer par une question.
Je suis un peu mal à l'aise de vous le dire, monsieur Engelhart, mais vous n'offrez pas beaucoup de services au Québec à part les services de sans fil. Mais je vais quand même vous faire part des commentaires, pas très le fun à transmettre ni à recevoir, que j'entends au sujet de Rogers.
On entend dire que Rogers ne serait pas un bon citoyen corporatif et qu'il est dans le business de la télévision comme d'autres seraient dans le business de vendre des sacs à main, alors que faire de la télévision est un privilège. C'est un privilège que d'avoir à informer et à divertir ses concitoyens.
Faire de la télévision est un privilège. Par contre, Rogers a plutôt une approche bottom line, c'est à dire qu'il est intéressé de savoir combien ça rapporte à la fin. Pour cette raison, vous avez des prises de position pas très avantageuses pour les artistes. Je vais vous expliquer ce que je veux dire. Par exemple, au sujet des redevances pour le Fonds d'amélioration de la programmation locale, vous avez produit une campagne publicitaire dont la logique défiait la rigueur intellectuelle. Vous avez dit des choses dans les annonces publicitaires — excusez-moi de le dire — qui n'étaient même pas vraies.
Ensuite, en ce qui concerne les droits d'auteur, vous voulez enlever de l'argent aux artistes, dont le salaire moyen au Canada et au Québec est de 23 500 dollars. C'est sûr qu'ils en ont besoin.
Pensez à autre chose. Attaquez-vous aux entreprises qui produisent la fibre optique, mais pas aux artistes qui gagnent 23 500 dollars par année. Vous dites que vous payez plus cher qu'aux États-Unis. C'est bien entendu, il y a une foule de produits pour lesquels on paye plus cher au Canada qu'aux États-Unis. Le Canada est un grand pays qu'il faut desservir dans ses moindres recoins, et il y a seulement 30 millions de personnes, alors qu'aux États-Unis, ils sont 300 millions. Seulement l'étendue de la population fait en sorte qu'on paye plus cher la plupart des choses.
En ce qui concerne les entreprises de télécommunications, vous dites que Rogers fait seulement des télécommunications et pas de radiodiffusion. Celui qui contrôle l'accès contrôle le contenu. Vous devez certainement en avoir la preuve dans votre immense monde de convergence. Au Québec, aussi, avec Vidéotron et Quebecor, c'est un monde convergent. Les compagnies de sans fil, assujetties uniquement à la Loi sur les télécommunications, font dorénavant de la radiodiffusion. Je n'ai même pas besoin de vous donner d'exemples, vous les connaissez mieux que moi.
Toutes ces raisons nous portent à croire que, quand vous entreprenez une démarche face au numérique, quand vous faites des suggestions pour développer le numérique, ce sont davantage les profits qui vous intéressent que le bien-être des artistes qui devraient en profiter, de la population canadienne qui veut du contenu canadien et de la population québécoise qui veut du contenu québécois.
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Merci beaucoup de m'avoir invité à comparaître aujourd'hui.
Je vais tout d'abord commencer par m'excuser. Comme je viens de briser mes lunettes il y a environ cinq minutes, je vais devoir me coller le nez sur mon texte pour pouvoir le lire.
Mon exposé porte sur deux éléments qui font partie de votre cadre de référence...
Non, ces lunettes ne m'aident pas. Si quelqu'un d'autre à des lunettes...
Des voix: Oh, oh!
M. Stephen High: J'avais ces lunettes depuis dix ans, de toute façon.
J'aimerais aborder deux éléments qui font partie de votre cadre de référence, à savoir le développement des compétences et l'accès. J'aimerais en particulier vous faire part de mon point de vue sur l'incidence qu'a la révolution numérique sur notre façon de comprendre, de concevoir et d'interpréter le passé.
Les nouveaux médias nous offrent de nouvelles façons d'explorer des lieux. Les technologies numériques transforment, à mon avis, la façon qu'ont les gens de se rappeler et d'échanger leurs souvenirs. Sans souvenirs, il est impossible de créer une identité collective ou un sentiment d'appartenance, qu'il soit canadien, régional ou autre.
Je vais vous parler de l'incidence de la révolution numérique sur la pratique de l'histoire orale au Centre d'histoire orale et de récits numérisés de l'Université Concordia, un centre de recherche ultra-moderne unique au monde. Depuis sa création en 2006, le Centre d'histoire orale est à l'origine d'un grand nombre d'innovations, notamment la création de nouveaux outils logiciels comme « Stories Matter », un logiciel base de données libre qui constitue la première solution de rechange viable à la transcription des entrevues d'histoire orale.
J'aimerais également vous parler de notre expérience de l'utilisation des nouveaux médias dans le cadre d'une initiative appelée « Histoires de Vie Montréal », une initiative de recherche quinquennale financée par le Conseil de recherches en sciences humaines.
Le programme Alliances de recherche universités-communautés présente un caractère particulier en ce sens que les communautés doivent devenir des partenaires de recherche et non plus simplement être des sujets d'étude. La participation de la communauté à la recherche doit donc être réelle et continue.
Dans le cadre de ce projet, nous recueillons les récits de vie de 500 Montréalais qui ont fui la guerre, le génocide ou d'autres violations des droits de la personne, notamment au Rwanda, au Cambodge, à Haïti, dans l'Europe d'Hitler et, malheureusement, ailleurs aussi. Comme vous pouvez l'imaginer, ces récits sont très difficiles à raconter, et tout aussi difficiles à entendre.
Quand on habite au Canada, il est facile de s'imaginer que ce qui s'est passé au Rwanda en 1994 n'a rien à voir avec nous. C'était une autre époque, un autre lieu. Et pourtant, des milliers de survivants habitent ici aujourd'hui. Leur passé fait maintenant partie de notre histoire collective.
L'histoire orale a le pouvoir d'éliminer les distances, de donner un visage à l'histoire et, ce faisant, de sensibiliser les gens. Elle a également le pouvoir de nous forcer à remettre en question des notions que nous tenons pour acquises comme « nous » ou « eux », « ici » ou « là-bas ». C'est sans doute pour cette raison que la commission Bouchard-Taylor sur les accommodements raisonnables au Québec a mentionné, dans ses recommandations, que les récits de vie pouvaient servir à combler la fracture sociale non seulement au Québec, mais partout au Canada.
Vous êtes sans doute en train de vous dire « et alors? » Qu'est-ce que tout cela a à voir avec nos délibérations sur les médias numériques et émergents?
Je vous répondrai donc que nous avons à l'heure actuelle une occasion incroyable d'utiliser les nouvelles technologies numériques et les nouvelles pratiques médias pour amener les Canadiens à renouer avec leur passé. L'histoire orale et publique, ou l'histoire appliquée, comme on l'appelle au Québec, est née dans les années 1970 d'un intérêt croissant de la population à l'égard de son patrimoine et de son passé. Il s'agit d'un changement au chapitre non seulement de l'auditoire cible, mais également de la méthode de recherche comme telle. Nous travaillons souvent en collaboration avec les communautés. Nous diffusons les résultats de nos recherches de différentes manières, à la fois textuelles et non textuelles.
À l'heure actuelle, des dizaines de milliers d'entrevues qui parlent de notre histoire orale dorment dans des centres d'archives un peu partout au Canada. Des milliers d'autres viennent s'y ajouter dans le cadre de projets d'envergure qui visent à enregistrer les récits d'anciens combattants de la Deuxième Guerre mondiale, de survivants de l'Holocauste, de communautés d'immigrants et, bien sûr, de survivants des pensionnats indiens. La Commission de vérité et de réconciliation envisage de recenser 60 000 déclarations de victimes.
Le dernier ancien combattant canadien de la Première Guerre mondiale étant décédé, il est maintenant impossible pour les jeunes Canadiens d'entendre directement les récits de courage et de sacrifice de ceux qui ont vécu cette guerre. Et très bientôt, il en sera de même également pour la Crise de 1929 et la Deuxième Guerre mondiale.
Depuis des décennies, les anciens combattants canadiens se rendent dans les écoles, en particulier à la veille du Jour du souvenir, pour raconter leurs récits à de jeunes auditoires. Les survivants de l'Holocauste font de même au Canada depuis au moins 30 ans. Semaine après semaine, ils se rendent dans les écoles pour raconter aux jeunes les horreurs qu'ils ont vécues et pour les sensibiliser afin de bâtir un monde meilleur.
L'histoire orale est un excellent moyen pour établir ce lien émotionnel. L'histoire, ce n'est pas que des dates et des statistiques. C'est du vrai monde, des gens ordinaires qui ont vécu des vies extraordinaires.
Mais qu'arrivera-t-il lorsque le dernier ancien combattant ou survivant ne sera plus de ce monde pour faire cet important travail? Qui gardera ces liens bien vivants? Les entrevues enregistrées répondent en partie à ce besoin, mais la compilation n'est pas suffisante. Comme je l'ai déjà mentionné, nous avons des dizaines de milliers d'entrevues enregistrées qui dorment dans des centres d'archives, des disques durs, ou dans les bibliothèques, qui n'ont jamais été écoutées. Leur pouvoir émotionnel est encore inexploité en grande partie. Pire encore, la plupart de ces récits ont été enregistrés à l'aide d'outils technologiques qui sont maintenant désuets.
La première chose à faire serait de numériser les entrevues existantes pour s'assurer que les générations futures pourront écouter les récits de ceux qui ont connu le Canada du XXe siècle. C'est une tâche énorme, mais qui ne peut attendre si nous ne voulons pas voir disparaître une page d'histoire à tout jamais. Quelques-unes de ces entrevues ont été transcrites, mais je le répète encore une fois, la transcription ne permet pas de rendre la force émotionnelle de ces témoignages. C'est ici que les technologies numériques et émergentes nous ouvrent de nouvelles possibilités pour avoir accès à notre histoire et la communiquer aux jeunes dans les écoles et ailleurs.
Pour vous expliquer ce que j'entends par le potentiel de l'histoire orale et des nouveaux médias, je vais revenir au projet Histoires de vie Montréal. Nous consacrons beaucoup de temps aux enregistrements d'entrevue des survivants de violence généralisée. Les témoignages des survivants sont intégrés à des émissions de radio, des films documentaires, des pièces de théâtre, des installations artistiques, des expositions et des plates-formes en ligne. Nous analysons le programme d'enseignement secondaire au Québec et concevons des modules d'enseignement pour diffuser ces récits dans les écoles. Nous sommes convaincus que l'histoire orale peut servir de catalyseur au dialogue public.
Les nouveaux médias jouent, bien sûr, un rôle central dans notre travail. J'aimerais vous donner trois exemples. Pour avoir accès directement et facilement à des milliers d'heures d'enregistrements audio et vidéo, nous avons mis au point le logiciel Stories Matter. Ce logiciel libre, financé par les fonds publics, nous permet de faire des recherches dans les entrevues, de les trier, de les parcourir, d'y avoir accès, et de recenser leurs significations dans de grands ensembles ou individuellement. Nous pouvons maintenant suivre des fils conducteurs entre les entrevues et établir des liens. La prochaine étape permettra aux chercheurs et à la population d'établir des liens dans l'espace entre les récits à l'aide d'une technologie de cartographie semblable à Google.
Notre deuxième stratégie est la narration numérique. La narration numérique a récemment été décrite comme l'outil pédagogique par excellence pour les sciences humaines. Un récit numérique est une présentation multimédias d'une durée de trois à cinq minutes diffusée en ligne qui combine audio, vidéo et images fixes. Ces récits sont souvent à haute charge émotive.
Dès le départ, l'initiative Histoires de Vie Montréal a profité d'une relation officielle avec les sites participatifs en ligne de l'Office national du film appelés « Parole citoyenne ». Le processus de création du récit numérique a, ici, une importance cruciale.
On parle beaucoup aujourd'hui de contenu, et j'ai écouté quelques fichiers balados à ce sujet. À mon avis, le processus est réellement crucial pour savoir à qui appartient le contenu. Nous pourrions, par exemple, préparer seuls les récits à partir des entrevues et produire des récits numériques qui nous parlent. Je crois toutefois qu'il est beaucoup plus intéressant de choisir les séquences avec les personnes interviewées. Après l'interview — nous avons des interviews qui durent 5, 10, 15, 20 heures —, nous leur demandons « Qu'est-ce que vous aimeriez raconter au monde? Vous avez cinq ou dix minutes. Qu'est-ce que vous allez dire? » Cette question sert de point de départ au processus de narration numérique.
Encore une fois, je vous invite à tenir compte de la manière dont ce contenu est généré. Je reviens toujours aux questions suivantes: de qui, par qui et pour qui? Il faut déterminer qui est le moteur du processus; c’est d'une importance vitale. Le public joue-t-il uniquement un rôle de consommateur, ou pouvons-nous envisager de lui accorder un rôle plus important en faisant participer davantage les collectivités aux orientations futures des médias numériques et émergents?
Je crois fermement qu’il faudrait avoir des programmes ciblés pour des projets numériques dans le cadre desquels la collectivité est appelée à participer. Les programmes visant à renforcer la capacité des collectivités d’entreprendre des projets numériques — dans les milieux défavorisés, par exemple — aideraient grandement à faire avancer la culture numérique. D’ailleurs, dans le journal d’aujourd’hui, j’ai lu un article traitant d’une étude sur le fossé numérique.
Notre troisième stratégie a trait aux « portraits mémoriels » et aux visites audioguidées. Auparavant confinées aux musées, les visites audioguidées ont quitté le bâtiment et peuvent être utilisées dans la rue depuis l'apparition des lecteurs MP3, des iPod et des téléphones intelligents. Ces technologies mobiles représentent, pour les chercheurs et les collectivités, de nouvelles possibilités de raconter leurs histoires. Les endroits ne sont pas que des points sur une carte; ils existent également dans le temps.
Le Centre d'histoire de Montréal, le musée de la ville de Montréal, est un projet qui illustre l'énorme potentiel des technologies mobiles et des nouveaux médias. Pour 2011, la direction du musée prévoit une exposition intitulée « Quartiers disparus », qui présentera quatre districts de la classe ouvrière qui ont été démolis dans les années 1960 pour faire place aux autoroutes Ville-Marie et Bonaventure, ainsi qu’au complexe de Radio-Canada et au projet d’habitation sociale connu sous le nom des Habitations Jeanne-Mance. La méthodologie novatrice du Centre d'histoire de Montréal, un « atelier de souvenirs », consiste en des entrevues collectives avec les anciens résidents, où l’on cherche à susciter des souvenirs au moyen d’anciennes cartes d'assurance-emploi et de photos des expropriations. Par la suite, le temps d’une promenade au coeur de ce que sont devenus ces anciens quartiers, il y aura des entretiens au cours desquels les gens raconteront les histoires qui leur viennent à l’esprit en voyant ce qui s’y trouve maintenant, dont l'autoroute.
En plus de l'exposition comme telle, on a prévu une série de visites audioguidées. Nous utilisons le logiciel Mscape et la technologie GPS pour que les visiteurs se replongent dans ces quartiers disparus. Ainsi, si vous êtes en train de vous promener quelque part, des fichiers audio ainsi que des fichiers à codes temporels sont déclenchés lorsque vous marchez près d’un endroit particulier. Encore une fois, sur le plan politique, cette tension entre le passé et le présent est très intéressante.
On pourrait, par exemple, penser à relier des interviews numériques à des monuments commémoratifs de guerre. Ainsi, une classe pourrait visiter un monument de guerre et entendre, au moyen de baladeurs, les histoires des anciens combattants de la Première Guerre mondiale ou de la Seconde Guerre mondiale. De nouveau, il s’agit du pouvoir de se souvenir.
En conclusion, je vous invite à laisser de côté la conception universelle de ce qu’est le public et à réfléchir au rôle que pourraient jouer les collectivités dans le développement des médias numériques et émergents. Auparavant, les chercheurs en sciences humaines avaient le monopole quant au processus de recherche. On traitait les collectivités ni plus ni moins comme de nouvelles données. Cependant, on a de plus en plus mis l’accent sur les partenariats entre les universités et les collectivités, ce qui a considérablement ouvert des horizons pour enrichir la conversation et créer un savoir que j’estime être plus novateur et humain. Les nouveaux médias ont énormément contribué à ce changement, car ils stimulent la collaboration et la mobilisation des citoyens.
Pour terminer, je veux vous raconter une histoire provenant de la 16e commémoration du génocide rwandais. Chaque année en avril, la communauté rwandaise de Montréal tient sa marche annuelle jusqu’au fleuve Saint-Laurent, dans lequel les enfants de la communauté lancent des fleurs. Cette coutume provient de la culture rwandaise et de l'importance des rivières et fleuves. La communauté organise également une journée de réflexion. Pendant neuf heures, près d’une centaine de Montréalais d’origine rwandaise visionnent des histoires produites sur support numérique de, par et pour leur propre communauté. Après chaque segment, il y a un panel composé d’aînés ou de jeunes, c’est selon, après quoi tout le monde dans le public inscrit un souvenir et l’épingle sur une ligne de temps. On peut facilement imaginer une ligne de temps sur un mur où sont épinglés des dizaines et des dizaines de témoignages.
Voilà donc un exemple d’un nouveau média qui sert de catalyseur pour le dialogue communautaire, en mettant les grandes questions en présence des gens, comme le rôle de l'Église dans le génocide, par exemple, et en rompant le silence au sein des collectivités. Les industries culturelles sont très éloignées de tels projets locaux liés à la mémoire. Ainsi, j’estime qu’il importe que vous vous penchiez sur ce qui se passe à l’échelle locale ou communautaire.
Je crois que la révolution numérique nous permet de repenser les pratiques antérieures, et ce, de manière importante. Cependant, je répète que les questions du pouvoir — de qui, par qui et pour qui — sont fondamentales pour toutes les discussions sur les médias numériques et émergents.
Je vous remercie.
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Je vous remercie beaucoup.
À mon tour de vous remercier de nous accorder le privilège de pouvoir vous exposer notre point de vue sur les médias numériques et émergents, les possibilités et les défis.
Tout d'abord, l'Alliance numérique est le réseau d'affaires des entreprises qui développent des contenus numériques interactifs au Québec. Nous avons quatre secteurs, quatre alliances si vous préférez, répartis dans les secteurs suivants: le jeu vidéo, les services application Internet, la mobilité et le e-learning. On représente donc beaucoup de gens de tous les secteurs d'activité du monde numérique. On est peut-être plus connus pour le jeu vidéo du fait que Montréal est la plaque tournante du jeu vidéo au Canada. Elle compte 7 000 emplois uniquement dans ce domaine sur les 14 000 qui existent au Canada. On est donc sans contredit la plaque tournante du jeu vidéo au plan canadien. On a d'ailleurs instauré, depuis maintenant six ans, le Sommet international du jeu de Montréal qui a accueilli, en moyenne, ces dernières années, 1 500 personnes dont 40 p. 100 provenant de partout sur la planète pour ces deux jours de rencontre.
On s'occupe évidemment beaucoup de commercialisation, donc on invite les entreprises à participer avec nous à différentes missions commerciales, que ce soit aux États-Unis, en Europe ou au Japon. On fait vraiment le tour de la planète pour aider nos entreprises à se développer.
J'irai droit au but avec des recommandations concernant directement les trois aspects qui nous paraissent primordiaux, soit la formation, le financement et la commercialisation. Vous comprendrez que dans un contexte de convergence numérique, il n'y a plus de frontières et que le marché est désormais hautement concurrentiel et très mondial. Il nous faut toujours davantage de ressources humaines hautement qualifiées et, au cours des dernières années, on s'est aperçus qu'elles étaient également hautement mobiles.
Il y a donc selon nous trois éléments primordiaux à considérer dans le cadre d'une politique canadienne du numérique: il s'agit de viser l'excellence de la main-d'oeuvre, d'instaurer un financement pour la création de contenu original et de soutenir l'excellence des entreprises déjà établies ici au Canada, ainsi que de tenter de pousser nos leaders encore plus loin.
En ce qui a trait à la main-d'oeuvre particulièrement, il faut évidemment soutenir les instances provinciales et investir dans les programmes déjà en place. Il faut surtout favoriser l'adéquation entre les besoins de l'industrie et les programmes de formation. Je vous avoue qu'on a un certain retard dans ce domaine, ce qui est un peu normal. Je vais vous donner un exemple: il y a 10 ans on ne faisait pas de flash, il n'existait même pas, aujourd'hui vous avez du flash dans le contenu numérique, donc il faut que les programmes d'éducation puissent s'adapter à cela. Souvent, dans le monde de l'éducation, il faut beaucoup de temps avant qu'un programme puisse naître. Il faut donc tenter de s'intéresser davantage aux enjeux technologiques et pouvoir y répondre plus rapidement.
Également, il faut évidemment doter les institutions d'enseignement supérieur d'infrastructures à la fine pointe de la technologie, encore une fois afin d'offrir une meilleure formation aux gens de l'industrie.
Il y a un obstacle dont j'aimerais vous parler. Il faudrait accélérer le processus lorsqu'on veut accueillir des experts étrangers dans nos entreprises canadiennes. Cela a été un peu plus difficile ces dernières années et, dans quelques cas, cela peut même conduire à l'abandon de projets parce que les délais pour faire venir ces gens sont trop longs.
On vous invite également à considérer l'instauration d'un financement spécifique pour la création de contenu original. Ce fonds servirait principalement à soutenir le développement de prototypes et de productions originales. C'est un élément très important pour les entreprises canadiennes. Nous suggérons aussi la création d'un fonds d'investissement destiné à des projets de ce genre.
Concernant l'excellence des entreprises, on vous l'a dit, il faut continuer à les soutenir, il faut également encourager la diversité et favoriser leur rayonnement à l'étranger. Au cours des dernières années, certains éléments ont été retirés de la commercialisation, ce qui pose problème. Cela nous empêche d'être plus fréquemment sur la scène internationale. On vous l'a dit, dans notre domaine, c'est le monde entier qui est le marché, donc il faut vraiment viser les sphères internationales. Un élément important pour nous est une concertation de tous les intervenants, que ce soit au palier national, provincial ou encore des clusters, des pôles qui existent au Canada. il faut que tout le monde soit mis à contribution si on veut vraiment que l'industrie puisse profiter d'un cadre numérique nouveau pour elle.
Je vous remercie.
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Merci, monsieur le président.
Pour résumer, je demande que nous tenions des audiences pendant quelques jours afin d’examiner le projet d’acquisition de Lions Gate Film par l’actionnaire et investisseur américains Carl Icahn. Je crois que cette question s’inscrit dans le cadre du mandat de notre comité, parce que Lions Gate joue un rôle clé dans le secteur.
D’emblée, je tiens à préciser que ces audiences ne visent pas à mettre un terme à toute offre d’acquisition; il s’agit de nous assurer que toutes les précautions nécessaires sont prises compte tenu de l’importance que Lions Gate revêt auprès de l’industrie canadienne du film et de la télévision.
Je vais vous décrire les deux acteurs et vous expliquez pourquoi j’estime que nous devons nous occuper de cette question.
Lions Gate est la principale société cinématographique au Canada. Elle connaît beaucoup de succès à l’échelle internationale. Elle contribue grandement à la production et à la distribution de films au Canada anglais, au Québec et aux États-Unis. Elle a consacré plus de 800 millions de dollars à des productions canadiennes. En 2007, Lions Gate a formé un important partenariat avec la Société générale de financement du Québec dans le cadre duquel elle a investi plus de 400 millions de dollars américains. Le partenariat vise à accroître le nombre de films et de productions réalisés au Québec.
Grâce à Maple Pictures, elle distribue la deuxième cinémathèque en importance au Canada, la deuxième cinémathèque de films à caractère canadien en importance et la plus grande cinémathèque de films francophones à caractère canadien. Elle distribue de nombreuses productions canadiennes.
La société joue également un rôle important dans diverses organisations liées à l’industrie cinématographique, telles que l’ACDEF, la Women in Film and Television, le Centre canadien du film et l’Institut national des arts de l’écran.
Toute vaste restructuration de Lions Gate aurait d’énormes répercussions sur toute l’industrie du film et de la télévision.
Carl Icahn a entrepris une prise de contrôle hostile. Son avoir net s’élève à 10,5 milliards de dollars. L’opinion des membres de l’industrie varie à ce sujet mais, parfois, M. Icahn a la réputation d’acheter des entreprises, de vendre certaines de leurs divisions séparément. Il dit qu’il ne le fera peut-être pas dans le cas de Lions Gate, mais nous n’en sommes pas certains.
D’après Wikipédia, Gordon Gekko, le protagoniste du film Wall Street, est basé sur deux personnages. L’un d’eux est Ivan Boesky, un criminel notoire. Carl Icahn n’en est pas un, mais Gekko est aussi basé sur lui, car il a la réputation de s’emparer d’entreprises, d’accroître au maximum la valeur de leurs actions, puis de se retirer.
Peu importe qui de M. Icahn ou du conseil d’administration de Lions Gate est responsable, cela pourrait avoir de graves répercussions sur l’industrie canadienne du film et de la télévision.
Selon les règlements, c’est au ministre du Patrimoine canadien de veiller à ce que le projet ait un avantage net pour le Canada. En mars 2010, M. Icahn a déclaré qu’il négocierait l’acquisition de cette entreprise avec le ministre du Patrimoine canadien. Pendant ce temps, Lions Gate envisage la possibilité de quitter le Canada pour de bon. Ces dirigeants craignent que les dispositions de nos lois ne leur permettent pas de mettre en oeuvre la pilule empoisonnée dont ils ont besoin pour stopper la prise de contrôle hostile. D’une manière ou d’une autre, il est possible que nous soyons confrontés à une importante restructuration de l’industrie.
J’aimerais proposer que nous tenions deux ou trois jours d’audiences. À mon avis, nous devons entendre les deux parties. Ainsi, leurs paroles figureront au compte rendu; elles seront du domaine public. J’aimerais entendre le ministre du Patrimoine canadien et ses hauts fonctionnaires afin d’apprendre comment ils procéderont, comment ils appliqueront les principes de la diligence raisonnable. Il se peut que d’autres acteurs de l’industrie veuillent parler de la question mais, en ce moment, j’ai le sentiment que nous devons entendre le ministre, M. Icahn et le conseil d’administration de Lions Gate.