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ENVI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de l'environnement et du développement durable


NUMÉRO 012 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 27 avril 2010

[Enregistrement électronique]

(1535)

[Traduction]

    La séance est ouverte. Nous avons le quorum.
    Je vous prie de nous excuser pour ce retard. Je crois que tout le monde était à la Chambre pour entendre la décision rendue par le Président, qui n'a d'ailleurs toujours pas terminé. Nous devrons nous en remettre aux actualités pour la suite après notre séance d'aujourd'hui.
    Nous souhaitons à tous la plus cordiale des bienvenues à cette 12e séance de notre comité. Nous allons poursuivre notre examen de la Loi sur les espèces en péril, en vertu de l'article 129 de ladite loi et conformément au paragraphe 108 du Règlement.
    Les représentants de plusieurs ONG sont venus nous prêter main-forte aujourd'hui. De la Société pour la nature et les parcs du Canada, nous accueillons Éric Hébert-Daly, directeur général national.
    Merci d'être des nôtres.
    Du Fonds mondial pour la nature (Canada), nous avons Peter Ewins, agent principal pour la conservation des espèces.
    Bienvenue à vous.
    Et pour une présentation conjointe, nous recevons, de la Fondation David Suzuki, une personne bien connue du comité, Rachel Plotkin, analyste des politiques en matière de biodiversité; et de l'organisme Écojustice Canada, Keith Ferguson, avocat-conseil à l'interne, qui témoignera par vidéoconférence à partir de Vancouver.
    Je crois qu'il y a quelqu'un qui vous accompagne là-bas, monsieur Ferguson.
     Effectivement, monsieur le président. Mme Susan Pinkus, scientifique salariée, est avec moi.
    Parfait. Elle est inscrite à notre ordre du jour.
    Nous allons maintenant pouvoir débuter la séance avec les déclarations préliminaires.
    Monsieur Hébert-Daly, vous allez ouvrir le bal.
    Vous disposez d'un maximum de 10 minutes. Je vous remercie.

[Français]

    D'abord, je veux vous remercier de nous avoir donné l'occasion de vous parler des points de vue de la Société pour la nature et les parcs du Canada au sujet de votre examen sur la Loi sur les espèces en péril.
    Je m'appelle Éric Hébert-Daly. Je suis le directeur national de la Société pour la nature et les parcs du Canada. Je suis accompagné par Aran O’Carroll, qui est responsable des affaires nationales, législatives et réglementaires pour la Société pour la nature et les parcs du Canada et qui est aussi directeur national de notre campagne pour la forêt boréale.
    Notre présentation se concentrera sur les défis et les occasions qui existent pour mettre en oeuvre la Loi sur les espèces en péril et, en même temps, pour vous donner un angle particulier concernant la question de la conservation de la forêt boréale. Je pense plus particulièrement à notre travail pour la protection du caribou forestier de la forêt boréale, qui est quand même une espèce un peu emblématique pour la société canadienne. Vous le trouvez d'ailleurs sur vos pièces de 25 ¢. C'est aussi un baromètre de la santé de la forêt boréale.
(1540)

[Traduction]

    La SNAP est la plus importante organisation communautaire de protection de la nature au Canada. Depuis 1963, nous avons joué un rôle capital dans l'établissement de plus des deux tiers des aires protégées du Canada. Cela comprend, bien évidemment, la campagne emblématique menée pour la réserve Nahanni, l'une de nos grandes réussites dans le cadre de la présente législature.
    Grâce à nos 13 sections et au soutien actif de plus de 40 000 Canadiens, la SNAP est devenue l'une des plus importantes organisations communautaires au pays. Voilà un bon moment déjà que nous mettons de l'avant notre vision qui est de veiller à ce qu'au moins la moitié des étendues sauvages du Canada restent intactes, et ce, pour toujours. Cette vision est aussi celle de notre partenaire pour la campagne « Horizons sauvages », Mountain Equipment Co-op, et celle de nos collègues du Conseil principal de la forêt boréale, soit les premières nations, des sociétés gazières, pétrolières et forestières ainsi que des organismes voués à la conservation.
    La SNAP a joué un rôle de soutien dans la mise en oeuvre de la LEP. C'est un rôle que nous avons vraiment pris à coeur. Nous sommes membres du Comité consultatif sur les espèces en péril créé par le ministre, et mon collègue, Aran, copréside le groupe consultatif national pour la stratégie de rétablissement du caribou forestier.
    Partout au pays, les équipes de la SNAP jouent un rôle déterminant dans l'élaboration des plans de rétablissement et dans l'obtention de gains pour la protection de l'habitat du caribou forestier dans leurs régions respectives.

[Français]

    Nous sommes entièrement d'accord avec certains propos de nos collègues du Comité consultatif sur les espèces en péril, tenus lors de leur présentation devant le comité. L'architecture fondamentale de la loi n'est pas le problème. La loi est bien conçue. C'est la mise en oeuvre de la loi qui représente le plus grand défi pour nous et, en particulier, quand vient le temps de regarder tout cela plus en détails. On a remis un document au greffier qui explique cela de façon plus détaillée que ce que je peux faire dans les dix minutes qui me sont allouées.

[Traduction]

    Nous aimerions vous présenter trois recommandations aujourd'hui. Premièrement, assurez-vous que la LEP est mise en oeuvre correctement, surtout dans le dossier du caribou forestier de la forêt boréale; deuxièmement, adoptez un nouveau rôle assuré de chef de file au niveau fédéral pour la conservation de la nature en vous concentrant tout particulièrement sur les questions liées à la collaboration; et troisièmement, agissez immédiatement dans une situation très urgente qui se déroule au moment où l'on se parle, c'est-à-dire relativement aux mesures prises pour la création d'un nouveau parc et la façon d'y intégrer la LEP.

[Français]

    L’habitat essentiel est défini dans la loi comme étant l’habitat nécessaire à la survie ou au rétablissement d’une espèce en péril. Le ministre est responsable, en vertu de la loi, de l’approbation des stratégies de rétablissement pour les espèces dont l’habitat est identifié comme essentiel, dans la mesure où il est possible de le faire selon les meilleurs renseignements disponibles et les mesures descriptives pour conserver cet habitat.

[Traduction]

    Le caribou forestier est un excellent exemple pour démontrer les raisons pour lesquelles nous devons adopter une approche plus coordonnée de la conservation au Canada. Compte tenu de sa grande aire de répartition, le caribou forestier de la forêt boréale est inscrit dans la LEP pour toutes les régions du pays, à l'exception des populations de l'île de Terre-Neuve, bien que ces populations soient elles aussi en déclin.
    Espèce parapluie témoignant de la santé de nos forêts boréales et de nos milieux humides, le caribou forestier a besoin de grands espaces sauvages intacts pour survivre. Si son habitat est morcelé par des routes, des fermes, l'exploitation forestière et minière ou le développement énergétique, la dynamique prédateur-proie se transforme en permettant aux prédateurs d'avoir plus facilement accès aux caribous. Cela change la donne pour le caribou qui, comme nous avons pu le constater, pourrait disparaître en quelques décennies.
    Voilà maintenant sept ans que nous nous attaquons à ce problème particulier. Les difficultés éprouvées dans la mise en oeuvre de la LEP ne nous ont pas facilité la tâche. La bonne nouvelle, c'est que nos efforts ont mené en une évaluation scientifique de pointe des besoins de cette espèce pour ce qui est de son habitat essentiel. Par contre, nous attendons toujours la stratégie de rétablissement prévue dans la loi. Elle devait au départ être appliquée en 2007; nous avons maintenant été informés qu'elle était attendue pour l'automne 2011. Pendant ce temps, les populations de caribous continuent de diminuer.

[Français]

    De cette expérience, nous avons quand même appris que la Loi sur les espèces en péril a beaucoup de potentiel comme outil fédéral pour conserver l’habitat des espèces en péril. Toutefois, cette loi à elle seule est insuffisante. La conservation de la nature à grande échelle exigée par les espèces à distribution étendue, comme le caribou forestier, nécessite vraiment une action concertée par de nombreuses parties touchées de près par la question.
(1545)

[Traduction]

    En tant que pays, nous devons vraiment mettre à profit nos compétences collectives pour devenir un chef de file mondial de la conservation. Concrètement, il s'agit de réunir les compétences législatives des gouvernements pour protéger les espèces et les aires protégées établies, la capacité de l'industrie d'adopter des pratiques plus durables, les connaissances traditionnelles des Autochtones à l'égard de nos écosystèmes, la compréhension grandissante de la biologie de conservation par les scientifiques, et la conscience citoyenne d'organisations vouées à la conservation comme la nôtre.
    Nous recommandons que le gouvernement fédéral donne le coup d'envoi d'une nouvelle ère d'intégration de projets nationaux pour la conservation dans tous ses champs de compétence et qu'il collabore avec les décideurs des provinces et des territoires, les leaders autochtones, les grandes entreprises industrielles et les groupes voués à la conservation afin d'établir pour le Canada une vision sans précédent dans le monde de la conservation qui protégera notre patrimoine naturel.

[Français]

    Pour faire tout cela, il faut donner une place importante à l’élaboration et à la mise en oeuvre d’une stratégie commune, impliquant toutes les parties — pas seulement les gens qui travaillent en silo — pour conserver les habitats essentiels du caribou forestier et la forêt boréale. Un tel plan pourrait vraiment assurer que les écosystèmes sont résilients et sains et qu'ils offriront aussi un avenir pour des générations de Canadiens.

[Traduction]

    Comme je l'ai mentionné précédemment, le Parlement a approuvé unanimement l'an dernier, avec le soutien des premières nations Dehcho, du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest et de la SNAP, un agrandissement majeur de la réserve de parc national Nahanni, dans la partie sud du bassin versant de la rivière Nahanni Sud.
    Parcs Canada planifie maintenant la création d'un autre parc, la réserve nationale Nááts'ihch'oh, dans les eaux d'amont du bassin versant de la rivière Nahanni Sud. Cette région englobe des lieux de mise bas et de reproduction essentiels du caribou forestier qui passe l'hiver tout près dans la réserve de parc national Nahanni. Avec des limites adéquates pour le parc Nááts'ihch'oh, presque tout le territoire d'une harde de caribous forestiers serait protégé dans ces parcs nationaux voisins. Toutefois, les limites actuellement proposées pour le parc laissent toutes des parties du bassin versant de la Nahanni Sud, qui sont essentielles pour l'avenir du caribou forestier de la région, privées de protection.
    En s'assurant que les limites de ce plus récent parc national protègent l'habitat essentiel du caribou forestier, le gouvernement fédéral démontrerait de façon très concrète comment une approche coordonnée de la conservation peut donner de véritables résultats pour la faune sur le terrain grâce à l'action concertée de Parcs Canada et de cette loi.

[Français]

    En résumé, nous demandons à votre comité de faire les choses suivantes: démontrer que la loi peut être efficace et bien fonctionner avec une stratégie nationale de rétablissement pour le caribou forestier de la forêt boréale; adopter un nouveau rôle de chef de file au niveau fédéral en ce qui a trait à la conservation de la nature — en collaboration avec les provinces, évidemment—; agir immédiatement, tandis qu'un nouveau parc national est établi dans les Territoires du Nord-Ouest, pour s'assurer que les outils fédéraux en conservation sont complémentaires. Dans ce cas-ci, on parle de la loi et de la création de nouveaux parcs.

[Traduction]

    Merci.
    Merci beaucoup.
    Nous poursuivons avec M. Ewins, qui va nous présenter ses observations préliminaires au nom du Fonds mondial pour la nature.
    Bonjour à tous et merci de nous donner l'occasion de partager avec votre comité les expériences et les points de vue du WWF.
    Nous vous avons soumis un mémoire écrit de 12 pages dont je vais vous présenter uniquement les grandes lignes. Nous avons également fourni aux interprètes qui travaillent aujourd'hui une copie de mon résumé.
    Je m'appelle Peter Ewins et je suis agent principal pour la conservation des espèces. Je suis accompagné de Jarmila Becka Lee, notre conseillère scientifique en matière de conservation.
    La LEP et les programmes en découlant peuvent grandement aider à rétablir les espèces en voie de disparition au Canada et empêcher que de nouvelles espèces soient ajoutées à la liste. Toutefois, la liste du COSEPAC, qui ne cesse de s'allonger, montre très clairement que, prise globalement, la contribution des conventions internationales, des lois canadiennes, des accords et des ententes, des politiques, des programmes, des travaux d'intendance et des partenariats n'a pas encore les effets désirés. Une mise en oeuvre efficace et efficiente de la LEP reste encore à réaliser. Nous aimerions vous parler aujourd'hui de nos quatre recommandations principales.
    Premièrement, l'habitat essentiel doit être désigné dans les programmes de rétablissement en fonction de la meilleure information existante, de manière à ce qu'il soit reconnu que, du moins pour les aires de répartition de l'espèce actuellement occupées, l'habitat essentiel doit être entièrement protégé. La répugnance du gouvernement fédéral à le faire est contraire à l'objet de la LEP et à certains des principes et exigences qui la sous-tendent.
    Deuxièmement, le traitement simultané de plusieurs espèces, à l'aide d'outils de gestion écosystémique adaptés à la variation régionale, doit se faire systématiquement pour rattraper rapidement les arriérés dans les programmes de rétablissement et les plans d'action, ainsi que pour réaliser efficacement les objectifs de la LEP.
    Troisièmement, le gouvernement doit avoir régulièrement recours aux accords de conservation que prévoient les articles 11 et 12 de la LEP ainsi qu'à des mécanismes qui ont fait leurs preuves en matière de bonne intendance et à des mesures incitatives équitables pour assurer le rétablissement de plusieurs espèces, notamment par la conception d'une approche qui harmonise les dispositions relatives aux permis de l'article 73 avec les besoins en gestion de la conservation.
    Et quatrièmement, le gouvernement fédéral doit rapidement étudier les mécanismes innovateurs et efficaces qui existent pour le financement de la conservation, pour ensuite mettre au point et maintenir de nouvelles formules de financement important afin d'améliorer radicalement la mise en oeuvre de la LEP à l'aide de partenariats efficaces et de leviers financiers.
    Au fil de 40 années de travail de conservation des espèces en péril du Canada sur le terrain, y compris la fondation en collaboration du COSEPAC, la participation à diverses équipes de rétablissement des espèces et le financement de centaines de projets sur des espèces en péril, dans le cadre, en particulier, du Fonds de rétablissement des espèces canadiennes en péril, qui comprend de nombreux partenaires et que nous avons administré, nous avons appris certaines choses. Cette expérience et nos interventions à l'échelle mondiale dans des dossiers semblables sont à la base de notre présentation d'aujourd'hui.
    Pendant plus de 20 ans, soit depuis 1988, le FRECP a fourni un soutien à des projets de priorité élevée qui ont aidé à rétablir et à protéger la faune canadienne en péril et ses habitats naturels. Au cours de cette période, pas moins de 10 millions de dollars ont été accordés à plus de 770 projets de recherche dirigés par des scientifiques et des adeptes locaux de la conservation. En outre, avec une participation au moins égale des bénéficiaires, plus de 25 millions de dollars ont ainsi été investis au bout du compte dans les efforts de rétablissement de différentes espèces au pays.
    Malheureusement, deux années — 2007 et 2008 — de fonds fédéraux reportés pour le FRECP ont obligé les équipes de projet sur le terrain à payer en premier les coûts des projets approuvés et, faute d'avoir obtenu l'assurance d'un changement d'importance à cette situation intenable, le WWF a dû abandonner le modèle de financement de partenariat que représentait le FRECP. Le principal instrument de financement du gouvernement fédéral pour la LEP, le Programme de gérance de l'habitat (PGH) a de la même manière été neutralisé par des retards réguliers dans l'approbation des projets et la prestation des fonds.
    Parlons maintenant d'habitats essentiels. Depuis 2003, relativement à diverses espèces pour lesquelles il existe de bonnes données d'enquête écologique, les faits montrent clairement que, contrairement à ce que voulait le législateur en promulguant la LEP, les ministères gouvernementaux ont grandement négligé leur responsabilité de désigner et protéger les habitats essentiels. Manifestement, les objectifs de la LEP ne pourront être atteints tant que cette situation n'aura pas été corrigée.
    Votre comité a sûrement pris connaissance de cette réalité dans l'évaluation formative de Stratos de 2006 et dans le rapport de 2008 du Bureau du vérificateur général, de même que dans la présentation du 2 juin 2009 du comité consultatif du ministre, le CCEP, dont je fais partie.
(1550)
    On nous a laissé entendre que les aires protégées fédérales, de même que les programmes de protection et d'intendance de l'habitat, répondaient aux besoins d'habitat des espèces visées par la LEP — au lieu d'insister sur la nécessité de désigner et de protéger leur habitat essentiel. Toutefois, un article de synthèse de l'Université d'Ottawa publié récemment dans la revue Conservation Biology réfutait ces allégations en faisant valoir que les régions où se trouvent les espèces les plus menacées étaient essentiellement dépourvues d'aires protégées.
    Passons maintenant au traitement simultané de plusieurs espèces. À l'heure actuelle, pour les 359 espèces en voie de disparition, menacées ou disparues qui sont visées par la LEP, seulement 76 programmes de rétablissement sanctionnés ont été inscrits dans le registre public de la LEP. De ce nombre, 65 programmes (soit 86 p. 100) se rapportent à des espèces uniques et seulement 11 visent plusieurs espèces, à raison de deux à neuf par programme de rétablissement.
    En somme, on constate des arriérés énormes dans l'ensemble des programmes de rétablissement et le traitement d'espèces multiples a été sous-utilisé comme méthode de rattrapage.
    Différentes études fédérales ont reconnu la lenteur et l'inefficacité globales des approches visant une espèce unique mais, quatre ans plus tard, très peu de progrès concrets ont été réalisés. Parmi les meilleurs exemples de projets de rétablissement de plusieurs espèces qui sont en cours, on peut noter celui visant 34 espèces de moules d'eau douce endémiques dans le sud-ouest de l'Ontario de même qu'un projet réalisé dans le sud de la Colombie-Britannique qui porte sur une centaine d'espèces menacées dans les écosystèmes à chênes de Garry.
    On devrait avoir recours de façon beaucoup plus systématique au Canada au traitement écosystémique de plusieurs espèces. Les objectifs de la LEP ne peuvent être réalisés que par une intégration vigoureuse et efficace de tels programmes et objectifs de rétablissement d'espèces à long terme dans la planification de l'utilisation des terres et des ressources régionales, les évaluations environnementales stratégiques régionales qui sont maintenant exigées, ainsi que leur mise en séquence et leur coordination bien structurées avec les autres programmes, politiques et mécanismes de financement et d'aide des ministères gouvernementaux. Tout cela aidera grandement à rattraper les arriérés dans les programmes de rétablissement et à réduire le besoin d'ajouter de nouvelles espèces à l'annexe 1.
    Les articles 11 à 13 de la LEP décrivent les accords d'intendance et de conservation comme étant des outils très importants pour le rétablissement des espèces et pour empêcher que des espèces ne deviennent en péril. En date d'avril 2010, aucun accord de conservation semblable n'avait toutefois été conclu en application de la LEP. Il s'agit là d'un constat très inquiétant à la lumière des expériences vécues au Canada et ailleurs dans le monde.
    Je me contenterai de vous citer trois exemples qui illustrent bien l'efficacité de tels accords de conservation visant plusieurs espèces et leurs besoins en habitat.
    Premièrement, au milieu des années 1980, dans le cadre du Plan d'action pour la conservation de la prairie, le WWF-Canada a lancé l'Opération Chouettes des terriers, qui a mobilisé 2 500 agriculteurs et propriétaires fonciers en Saskatchewan, au Manitoba et en Alberta.
    Deuxièmement, Canards Illimités Canada a préservé et aménagé des millions d'acres d'habitat sur des terres humides grâce à de tels accords de conservation conclus avec des propriétaires fonciers, assurant ainsi une mise en oeuvre efficace du Plan nord-américain de gestion de la sauvagine.
    Et troisièmement, au cours des 30 dernières années au Royaume-Uni — et j'ai participé à ces programmes — on a pu obtenir de bons résultats en matière de conservation des habitats grâce à des accords conclus avec plusieurs propriétaires fonciers en vertu d'une loi comparable à la LEP.
    En conséquence, le WWF recommande que le gouvernement du Canada entreprenne rapidement un examen de priorité absolue des accords qui ont cours pour la conservation de la biodiversité, pour ensuite élaborer et mettre en oeuvre des plans afin de conclure des accords de conservation avec les détenteurs de tenure forestière dans tout le Canada, de manière à régler les problèmes associés à l'octroi de permis en vertu de l'article 73.
    Enfin, pour ce qui est du financement de la conservation, les examens de la LEP ont tous reconnu que la mise en oeuvre et l'obtention de résultats avaient été entravées par la faible priorité, sur le plan financier, qui a été accordée aux programmes de rétablissement des espèces. Le WWF a joué un rôle de premier plan pour de grandes initiatives réalisées dans le monde en s'attachant à établir de nouvelles approches créatives pour le financement. Ces initiatives illustrent très bien les avantages de l'adoption de mécanismes de financement novateurs pour la biodiversité et les besoins des populations locales.
    Un bon exemple à ce titre est le fonds de conservation du monarque, qui a permis la création d'une réserve forestière pour protéger les aires d'hivernage de ce papillon au Mexique tout en répondant aux besoins socioéconomiques des collectivités locales. Doté d'une subvention de 5 millions de dollars de la Packard Foundation, d'un million de dollars du gouvernement du Mexique et de 250 000 $ des États locaux, et administré par WWF-Mexique, le fonds a obtenu l'adhésion de la plupart des collectivités vivant à l'intérieur de la réserve qui se sont engagées à protéger la forêt et, par le fait même, les monarques.
    En outre, un récent rapport conjoint du Programme des Nations Unies pour le développement, du Fonds pour l'environnement mondial, du Service des forêts des États-Unis et de la Commission de coopération environnementale souligne la façon dont les approches fondées sur le marché permettent de préserver les espèces menacées d'extinction en intégrant le coût de la destruction des habitats dans celui du développement.
(1555)
    Nous exhortons le gouvernement du Canada à examiner de beaucoup plus près la gamme des mécanismes de financement qui existent pour le rétablissement des espèces au Canada, et à créer et maintenir de nouveaux moyens d'importance pour le financement de la conservation, de façon à améliorer radicalement la mise en oeuvre de la LEP.
    En conclusion, monsieur le président, toutes les recommandations émanant des examens précédents de la mise en oeuvre de la LEP doivent être abordées rapidement et intégralement par le gouvernement fédéral. De toute évidence, les Canadiens ne veulent pas que la liste des espèces en péril continue de s'allonger. Nous prions instamment votre comité de faire des recommandations vigoureuses au gouvernement du Canada pour qu'il élève le niveau de priorité et rende plus efficace la mise en oeuvre de la LEP.
    Je vous remercie. Nous nous ferons un plaisir de répondre à vos questions.
    Merci.
    Nous allons maintenant passer à Mme Plotkin et à M. Ferguson.
    Je crois que vous allez alterner dans la présentation de votre exposé. Nous allons voir comment fonctionne cette technologie.
    Madame Plotkin, à vous la parole.
    Merci à vous, monsieur le président, ainsi qu'aux membres du comité pour cette occasion de vous présenter notre point de vue.
    Je m'appelle Rachel Plotkin et je représente la Fondation David Suzuki.
    Vous pouvez apercevoir à l'écran Keith Ferguson, avocat conseil à l'interne pour Écojustice et Susan Pinkus, scientifique pour Écojustice.
    Comme vous l'avez mentionné, monsieur le président, Keith et moi allons alterner pour vous présenter notre exposé.
    Nos quatre organisations — la Fondation David Suzuki, Écojustice, Environmental Defence et Nature Canada — vous ont soumis conjointement un mémoire détaillé en juillet 2009. La semaine dernière, nous vous avons fait parvenir une mise à jour de ce mémoire. J'espère que vous avez également en main le document qui vous permettra de suivre notre présentation d'aujourd'hui.
    Trois de nos organisations sont aussi membres du CCEP et ont donc contribué à la production des documents que vous avez reçus de ce comité consultatif, qui constitue la première étape de la collaboration industrie/ONG pour appuyer votre étude.
    Nous osons espérer que la poursuite de cette collaboration nous permettra de vous soumettre un autre mémoire conjoint.
    Veuillez noter que lorsque nous parlons de « science » dans notre exposé, nous incluons non seulement les données scientifiques, mais aussi les connaissances traditionnelles autochtones et la connaissance de la biologie des espèces acquises par la collectivité locale.
    Si vous vous référez à notre présentation, la deuxième diapositive est intitulée « Consensus général: la LEP comporte des lacunes ». Comme vous avez pu l'entendre, la mise en oeuvre de la LEP est jusqu'à maintenant plutôt décevante. Nous estimons toutefois qu'il faut se réjouir du fait que les choses semblent vouloir s'améliorer sur certains fronts.
    Je vais maintenant laisser la parole à Keith qui va vous présenter quelques-unes de nos recommandations.
(1600)
    Monsieur le président, est-ce que vous pouvez m'entendre? Nous éprouvons quelques difficultés techniques de ce côté-ci. Si la communication est interrompue, peut-être que Rachel pourra prendre la relève.
    Nous vous entendons très bien, alors tout devrait fonctionner.
    D'accord, merci. J'y vais.
    D'après nous, certaines des améliorations apportées dans la mise en oeuvre sont le résultat de contestations judiciaires en vertu de la LEP. Ces contestations élevées par des groupes environnementaux ont été peu nombreuses et constituaient des solutions de dernier recours à l'égard d'ébauches de politiques et de décisions semblant de toute évidence aller à l'encontre de la LEP. Par exemple, deux de ces contestations portaient sur la désignation de l'habitat essentiel. Dans ces deux causes, le tribunal a conclu que le processus décisionnel était allé à l'encontre de la loi en faisant ressortir les incohérences entre les ébauches de politiques et la LEP.
    Comme ces causes l'indiquent, le manquement à l'obligation de désigner des habitats essentiels a bien souvent été attribuable à des politiques ne respectant pas la LEP, plutôt qu'à un manque de données scientifiques. Vous trouverez tous les détails pertinents sur ces causes à l'annexe 23 de notre mémoire original et de sa mise à jour.
    Si vous voulez suivre dans le document, j'en suis maintenant à la page intitulée « Recommandations » où on en énumère une dizaine. Nous ne recommandons pas une restructuration en profondeur de la LEP, mais vous trouvez ici les 10 mesures que nous préconisons en priorité. Il s'agit d'après nous des interventions les plus importantes et les plus facilement réalisables à ce moment-ci. Je vais décrire brièvement chacune d'elles.
    Notre première recommandation concerne l'inscription. Il faut bien évidemment prendre toutes les précautions nécessaires avant de refuser d'inscrire sur la liste une espèce considérée comme menacée par le COSEPAC, étant donné que cette décision pourrait mener à l'éventuelle disparition de cette espèce au Canada. Cependant, comme nous l'indiquions en détail dans notre mémoire de l'été dernier, nous avons constaté des incohérences considérables quant aux décisions à cet égard pour différents types d'espèces, pour les mêmes espèces dans différentes provinces ou selon les agences responsables. Ces incohérences semblent notamment attribuables à une considération biaisée des coûts et des avantages. On tient compte des coûts économiques potentiels à court terme de l'inscription, mais les avantages culturels et écologiques à plus long terme sont souvent négligés. Nous recommandons donc un examen détaillé de tous ces coûts et avantages avant tout refus d'inscrire une espèce.
    À la page suivante, notre deuxième recommandation porte sur « l'habitat essentiel ». Comme vous avez pu l'entendre, la perte ou la dégradation de l'habitat est la principale raison pour laquelle 84 p. 100 des espèces canadiennes se retrouvent en voie de disparition. Il est donc essentiel de procéder dès le départ à la désignation des habitats essentiels et des programmes de rétablissement requis. Une fois un habitat ainsi désigné, on peut le protéger ou tout au moins le considérer dans la prise de décisions.
    Certains témoins vous ont soumis que les considérations socioéconomiques devraient être explicitement prises en compte à l'étape de la désignation. Nous ne sommes pas d'accord pour deux raisons. Premièrement, on ne semble pas très bien comprendre ce qui se produit une fois qu'un habitat essentiel est désigné. La désignation ne se traduit pas automatiquement par des mesures de protection dans tous les cas. La protection de l'habitat essentiel n'est obligatoire que pour les espèces aquatiques ou les terres fédérales. Deuxièmement, les facteurs socioéconomiques sont déjà pris en compte à trois autres étapes prévues par la loi: d'abord au moment de l'inscription; ensuite, si une ordonnance de protection de l'habitat essentiel est adoptée, ce qui exige une étude d'impact de la réglementation; et enfin, à l'étape du plan d'action. Nous soutenons donc qu'il y a tout au moins une étape du processus qui devrait demeurer strictement scientifique et c'est celle de la désignation de l'habitat essentiel.
    Au numéro trois, nous avons quelques améliorations à suggérer concernant les « programmes de rétablissement ». Nous recommandons d'abord que ces programmes, lorsque cela est possible, fixent des seuils de tolérance pour l'atteinte à l'habitat essentiel. On pourrait ainsi mieux savoir ce qui peut être fait ou non au sein d'un habitat essentiel pour favoriser la survie et le rétablissement des espèces. Cela aiderait également à interpréter d'autres articles de la loi pour savoir ce qu'on entend par endommager ou détruire l'habitat ou encore par protection efficace. Afin d'optimiser l'apport scientifique, nous recommandons que toutes les stratégies de rétablissement soient élaborées par des équipes composées d'experts indépendants de l'extérieur du gouvernement.
(1605)
    Passons à notre quatrième recommandation qui concerne les définitions. Comme vous le savez, un certain nombre de termes clés ne sont pas définis dans la LEP. Je vous prie de consulter le document du CCEP sur les définitions pour voir nos recommandations conjointes pour un certain nombre de ces termes. Les termes « survie » et « rétablissement » sont deux des plus importants que l'on retrouve dans ce texte. Nous recommandons que la survie soit définie comme étant une forte probabilité de persistance à long terme, et que l'on entende par « rétablissement » une saine répartition de la population correspondant aux valeurs des espèces telles qu'établies dans le préambule de la LEP, notamment pour qu'elles atteignent un fonctionnement écologique naturel.
    Pour ce qui est de notre cinquième recommandation, on vous a déjà indiqué que l'on n'a pas été très actif jusqu'à maintenant dans l'établissement de plans d'action. Un seul plan d'action est terminé jusqu'ici. Nous recommandons donc simplement qu'un délai obligatoire pour l'achèvement du plan d'action soit ajouté à la LEP et que celle-ci exige la mise à jour des plans d'action et des programmes de rétablissement lorsque de nouvelles données importantes sont accessibles.
    Notre recommandation numéro 6 concerne le filet de sécurité. Comme je l'ai déjà indiqué, la vaste majorité des espèces inscrites au Canada ne bénéficient pas automatiquement des protections prévues par la LEP. En pareil cas, on compte sur les provinces pour offrir les protections de base même si, bien évidemment, la LEP permet au gouvernement fédéral d'intervenir et d'émettre un décret dit de filet de sécurité lorsqu'une province n'offre pas une protection adéquate. On pourrait considérer qu'il s'agit en quelque sorte d'une disposition d'équivalence.
    Malheureusement, ce filet de sécurité n'a jamais été utilisé depuis l'entrée en vigueur de la LEP il y a six ou sept ans, et ce, même si la communauté environnementale en a fait la demande, par exemple, dans le cas de la chouette tachetée. À l'époque, il ne restait qu'une vingtaine de chouettes à l'état sauvage, mais aucun décret de filet de sécurité n'a été émis. On ne recense plus aujourd'hui que sept individus et cette espèce devrait disparaître totalement de son habitat sauvage dans un avenir rapproché. Pour que le processus de filet de sécurité fonctionne mieux, nous recommandons que l'on commence par préciser ce qu'on entend par protection efficace. Encore là, je vous invite à consulter le texte conjoint sur les définitions du CCEP où l'on recommande différents éléments à inclure dans une telle définition.
    Pour ce qui concerne l'octroi des permis, nos recommandations visent différentes lacunes manifestes à combler, notamment en exigeant clairement que les conditions préalables prévues au paragraphe 73(3) soient remplies avant l'octroi de tous les types de permis. Comme vous le savez, ces conditions préalables exigent que les impacts soient minimisés et que la survie ou le rétablissement des espèces ne soit pas mis en péril.
    Certains témoins qui nous ont précédés ont suggéré l'émission de permis à long terme. Nous comprenons certes les gens de l'industrie de vouloir bénéficier d'une plus grande certitude lorsqu'ils prennent des décisions d'investissement qui s'appliquent sur plusieurs décennies, comparativement au niveau d'assurance que peut seulement leur offrir un permis valide pour trois ou cinq ans. Nous insistons toutefois sur la nécessité, en cas d'allongement de la durée des permis, que la loi offre des garanties suffisantes et nous formulons à ce titre trois recommandations. La loi doit exiger, premièrement, un mécanisme permanent de suivi et de production de rapports; deuxièmement, des examens réguliers avec approbation par le ministre responsable concernant le respect des conditions préalables; et troisièmement, en cas de non-respect de ces conditions, l'obligation pour le ministre de modifier ou d'annuler le permis.
    Je vais maintenant laisser la parole à Rachel pour la suite de nos recommandations.
(1610)
    Merci, Keith.
    Nous en sommes à la page intitulée « Accords de conservation — incitatifs ».
    Nous convenons avec les autres témoins que l'absence de tout accord de conservation conclu en application de l'article 11 est une énorme occasion manquée. Nous estimons toutefois que les accords de conservation ne devraient pas suffire, à eux seuls, pour justifier des exemptions dans le cas de la LEP. Dans le cadre de cette loi, on a bien pris soin d'établir des conditions préalables à l'octroi de permis, comme l'obligation de ne pas mettre en péril la survie ou le rétablissement d'une espèce, pour offrir les garanties de base dans les cas d'exemption. Toutes les activités exemptées sont assujetties à ces conditions préalables. Nous sommes favorables à une étude plus approfondie du recours aux accords de conservation dans le contexte de l'octroi de permis.
    Examinons maintenant la question de l'indemnisation. Nous sommes d'avis que les espèces en péril et les écosystèmes dont elles font partie offrent d'importants avantages à l'ensemble des Canadiens et qu'aucun citoyen ne devrait avoir à assumer seul les frais de leur protection. Nous recommandons donc que le gouvernement adopte un règlement assurant une indemnisation équitable et efficace en pareil cas.
    Enfin, nous recommandons que la LEP fasse l'objet d'un nouvel examen dans cinq ans, ce qui n'est pas actuellement prévu dans la loi.
    Merci beaucoup pour le temps que vous nous avez consacré. Nous serons maintenant heureux de répondre à toutes vos questions.
    Merci beaucoup, monsieur Ferguson et madame Plotkin, pour cet exposé très intéressant.
    Nous passons maintenant aux périodes de sept minutes pour les questions et réponses. Je vous rappelle de répondre avec un maximum de concision pour vous assurer de faire figurer au compte rendu les renseignements que vous jugez essentiels.
    J'invite donc M. McGuinty à débuter ce premier tour de questions.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à vous tous d'être ici aujourd'hui.
    Et merci pour votre comparution par webcamera; vous êtes très télégénique.
    J'aimerais traiter de quelques thèmes qui semblent ressortir de vos trois exposés d'aujourd'hui. D'après bon nombre des observations que nous avons pu entendre jusqu'à maintenant, la LEP ne produit pas les résultats prévus. Elle ne fonctionne tout simplement pas. Je crois que c'est la principale conclusion.
    Deuxièmement, je crois comprendre, après avoir écouté vos trois exposés — vous l'avez tous affirmé explicitement ou implicitement — qu'il existe une véritable possibilité pour le gouvernement fédéral d'exercer son leadership au moyen d'une approche nationale pour la conservation des espèces en péril.
    Je note également une certaine frustration dans vos propos quant aux différents processus entrepris au cours des dernières années sans qu'il n'y ait d'impact véritable, notamment à la suite des recommandations formulées ou des examens antérieurs de la LEP par Stratos, la table ronde du ministre en 2006, la table ronde non annoncée du ministre en 2008 ou le rapport du commissaire en 2008 également.
    J'aimerais que vous me disiez dans quelle mesure vous jugez important que le gouvernement fédéral convoque une rencontre au sommet des premiers ministres pour discuter des espèces en péril. Nous avons déjà sollicité le gouvernement de la même manière en laissant, par exemple, 90 jours au premier ministre pour convoquer une rencontre avec ses homologues provinciaux afin de discuter des changements climatiques et de la crise de l'énergie à la suite d'une motion adoptée récemment par la Chambre. Nous attendons toujours des nouvelles du gouvernement, mais dans ce dossier-ci, compte tenu des divergences fédérales-provinciales, quelques-uns des mécanismes très créatifs conçus aux États-Unis pour réformer le régime fiscal en le mettant au service de l'écologie peuvent nous aider à assurer une protection efficace des habitats et à atteindre nos autres objectifs en la matière.
    Nous avons le CCEP, le CANEP, les tables rondes du ministre, le COSEPAC, et le sous-comité du COSEPAC sur les connaissances traditionnelles autochtones. Voilà cinq autorités que je peux dénombrer. Ne serait-il pas profitable que notre gouvernement national admette que les choses ne fonctionnent pas comme prévu et que nous devons procéder à un nouvel examen pour voir comment nous composons avec les espèces en péril et la conservation dans notre pays? Je vous demande à tous les trois si vous croyez que cela serait utile.
    Éric, qu'en pensez-vous?
(1615)
    Comme je l'ai mentionné dans mon exposé, je crois qu'il importe d'abord et avant tout de réunir les gens pour s'assurer d'éviter les dédoublements et de simplifier les différents processus.
    Il va de soi qu'il y a un coût associé au travail de conservation et je ne voudrais surtout pas négliger l'aspect financier. Par ailleurs, il y a sans doute d'importantes économies à réaliser en réunissant les intervenants pour qu'ils cherchent ensemble des solutions, de telle sorte que les deux ordres de gouvernement... Cela serait intéressant du point de vue économique, mais aussi en matière de résultats concrets. Compte tenu des connexions qu'il faut établir pour le travail de conservation de bien des espèces, et dans le contexte de la mosaïque des compétences fédérales et provinciales, il nous faut trouver un moyen de détecter ces corridors et ces connexions de manière à rendre possible la conservation à grande échelle. Il s'agit donc de rassembler les provinces, les premières nations et les autres intervenants pour discuter ensemble des solutions possibles, sans toutefois que personne n'empiète sur le territoire de l'autre.
    Je dirais qu'une rencontre des premiers ministres est une option intéressante. J'irais même jusqu'à vous soumettre qu'il faut faire intervenir également les partenaires de l'industrie et les premières nations. L'approche doit être plus stimulante et davantage axée sur la collaboration que ce que nous avons connu jusqu'à maintenant.
    Monsieur Ewins.
    Je crois certes qu'il s'agit d'une excellente tribune pour obtenir une forme différente de mobilisation et de motivation. Ce mécanisme serait particulièrement utile dans ce dossier, car la plus grande partie des besoins des espèces en péril, notamment quant à leur habitat, relève de la compétence des provinces et des territoires. Un leadership fédéral bien senti pour mettre en oeuvre cette loi peut assurément avoir un effet déclencheur pour le recours efficace et prioritaire à ces instruments provinciaux et territoriaux ainsi qu'à tous les programmes connexes.
    Au-delà de tout cela, il y a selon moi la question des valeurs. J'aimerais que le comité en prenne conscience... Je pense aux commentaires formulés par Robert Bateman sur la scène internationale. Lorsqu'on lui a demandé pour quelle raison le Canada n'avait toujours pas réglé ces questions — après tout, nous sommes un pays bien nanti disposant d'excellentes possibilités de conservation pour la biodiversité —, il y est allé d'une déclaration fracassante, mais tout à fait honnête: nous sommes trop près de nos sous.
    Nous n'attribuons donc pas une valeur aux espèces à la hauteur de nos responsabilités morales, voire économiques. Je crois que vous avez tout à fait raison: la réforme fiscale fondée sur le capital naturel découlant des services offerts par l'écosystème et attribuant une valeur concrète aux services fournis par la planète et aux indications que nous offrent les espèces en tant que baromètres, constitue un élément essentiel du débat à l'aube de cette ère nouvelle du XXIe siècle. J'aimerais croire que non seulement les premiers ministres, mais aussi les ministres des Finances sauront s'intéresser davantage à ces questions.
    M. David McGuinty: Rachel.
    Merci pour votre question.
    Je crois qu'il y a presque consensus quant à la piètre mise en oeuvre de la loi jusqu'à maintenant. J'ose espérer toutefois qu'il est ressorti de notre exposé que nous estimons que des progrès commencent à être réalisés quant à l'élément que nous jugeons le plus important, soit la désignation des habitats essentiels. Nous avons livré cette bataille qui était loin d'être gagnée à l'avance et voilà que nous commençons à voir la lumière au bout du tunnel. Nous nous retrouvons toutefois confrontés à toute une série de nouveaux enjeux dans l'application de la loi, comme les mesures de protection à prendre une fois qu'un habitat essentiel est désigné.
    Je pense qu'il y a là une excellente occasion pour le gouvernement fédéral de collaborer avec les provinces pour l'établissement des plans d'action. Je ne voudrais surtout pas assister à six autres années d'occasions manquées avant que le gouvernement ne trouve l'orientation appropriée pour la prochaine phase de mise en oeuvre de la loi.
(1620)
    Monsieur Ferguson, vous pouvez répondre brièvement, mais le temps alloué à M. McGuinty est terminé.
    Je ne crois pas avoir quoi que ce soit à ajouter.
    Merci.
    Merci.
    Monsieur Ouellet, sept minutes, s'il vous plaît.

[Français]

    Je commencerai par m'adresser à M. Hébert-Daly. Je reprendrai la remarque faite un peu plus tôt par M. McGuinty quand il a dit que le fédéral avait la chance d'adopter une seule loi qui s'appliquerait d'un bout à l'autre du pays. J'ai aussi noté que M. Ewins a dit que le fédéral avait ce pouvoir.
    Au Québec, nous refusons de reconnaître le pouvoir du fédéral dans plusieurs champs de compétence. Je ne crois donc pas que ce soit une question de pouvoir. C'est peut-être une question de vue d'ensemble, comme M. McGuinty le mentionnait. Je crois que cela devrait bien fonctionner pour les caribous qui sont totalement au Nord.
    Pourquoi voudrait-on faire un ensemble pancanadien pour des espèces qui se trouvent aussi aux États-Unis? On n'a pourtant pas entendu parler d'un ensemble panaméricain. Il me semble que ce serait plus compréhensible puisque les animaux vont d'un côté et de l'autre de la frontière.
    Justement, les animaux n'ont pas tendance à remarquer les frontières. C'est un problème. En ce qui a trait aux pouvoirs, qu'on parle d'une province, d'une municipalité, du Canada ou de l'Amérique du Nord, jusqu'à un certain point, il faut qu'on soit capables de trouver des solutions particulières pour des espèces en particulier. La loi fédérale actuelle reconnaît quand même le fait qu'une espèce est en péril. Bien sûr, cette espèce a besoin d'un plan et ce plan devrait impliquer tous les intervenants touchés par cette question. Il ne s'agit pas seulement des gouvernements, il s'agit aussi des Autochtones et des industries. Cela dépendra un peu de l'habitat de l'espèce touchée. Pour moi, la question est plutôt de voir comment on fait pour travailler à des solutions sensées. Il faut voir au cas par cas, car cela ne devient pas une question de frontières.
    Je poserai la même question à Mme Plotkin. Sur le plan juridique, que pensez-vous du fait qu'on veuille protéger des animaux, mais qu'on arrête à la frontière des États-Unis? Ne trouvez-vous pas que cette loi est quand même très limitée étant donné qu'on ne considère qu'une seule partie du territoire?

[Traduction]

    Merci pour votre question.
    D'après ma compréhension de la loi, les interdictions s'appliquent principalement à la compétence fédérale, et le gouvernement fédéral ne pourrait empiéter sur les responsabilités d'une province que dans le cas où celle-ci n'aurait pas pris les mesures adéquates pour protéger l'habitat des espèces visées ou ces espèces elles-mêmes à l'égard de tout préjudice.
    Pour autant qu'une province adopte ses propres lois pour protéger efficacement une espèce et son habitat, et pour autant qu'elle applique effectivement ces lois, le gouvernement fédéral ne devrait en aucun cas pouvoir étendre sa compétence à l'intérieur de cette province.

[Français]

    Merci.
     Monsieur Ferguson, pensez-vous que le gouvernement protège l'habitat essentiel du caribou ou qu'il protège plutôt le développement des sables bitumineux, qui causent une détérioration de la situation de cette espèce? Que pensez-vous de la relation entre les sables bitumineux et le caribou?

[Traduction]

    Peut-être que Susan Pinkus, notre scientifique salariée, pourrait vous répondre à ce sujet.
    Je dois dire, d'abord et avant tout, que le gouvernement fédéral n'a pas respecté le délai prévu dans la loi pour la désignation de l'habitat essentiel du caribou, ce qui fait que nous assistons à une diminution accélérée de cette espèce dans certains secteurs.
    Il va de soi que le développement industriel, y compris le développement potentiel des sables bitumineux, est nocif pour différentes espèces. Nous avons besoin d'une désignation claire des habitats essentiels pour pouvoir déterminer quels types de perturbations ces habitats peuvent tolérer et prendre les mesures qui s'imposent pour gérer la survie des espèces, plutôt que de simplement présider à leur déclin incessant, comme nous risquons actuellement de devoir le faire.
(1625)

[Français]

    D'après vous, la loi est-elle suffisamment claire? Son application pose-t-elle problème?

[Traduction]

    À mon avis, c’est son application qui est problématique dans le cas présent. La loi nous permet de désigner l’habitat essentiel du caribou. Elle exige que le gouvernement fédéral intervienne — ou du moins, elle l’autorise à le faire — si les gouvernements provinciaux dont relève l’habitat essentiel du caribou sont incapables de le protéger efficacement sur le plan juridique afin d’empêcher sa destruction.
     Nous devons appliquer la loi et déterminer si elle fonctionne. Elle serait probablement efficace si nous serrions les dents et contrôlions son application.

[Français]

    Selon vous, le programme de réhabilitation des caribous a-t-il apporté des améliorations? Depuis que cette loi existe, avez-vous vu des progrès sur le plan de la protection des caribous?

[Traduction]

     Je pense qu’il y a eu des améliorations. Nous disposons d’un excellent rapport scientifique qui désigne l’habitat essentiel de la population boréale du caribou des bois. Malheureusement, le rapport n’a pas abouti à un programme de rétablissement définitif et à la désignation juridique de l’habitat essentiel. La science progresse tout le temps. Donc, la situation s’est assurément améliorée. Toutefois, je ne sais pas à quel point ont progressé la conservation de l’habitat du caribou, le rétablissement des populations décimées et la protection des populations actuellement stables contre d’autres atteintes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup.
     Nous passons maintenant à Mme Duncan.
     Merci, monsieur le président.
     Je remercie tous les gens ici présents et ceux qui nous parlent de la magnifique Colombie-Britannique — espèce de veinards; il neige ici.
(1630)
    Il pleut ici.
     Vos mémoires et vos exposés étaient excellents et très approfondis. Nous vous en sommes très reconnaissants.
     J’ai particulièrement apprécié le mal que vous vous êtes donné pour formuler des recommandations en matière de modifications juridiques. Je pense qu’elles seront très utiles aux membres du comité. Elles le seront certainement pour moi.
     Il y a tellement d’enjeux et tellement de choses dont nous devons discuter. Je vais probablement être en mesure de vous poser seulement quelques-unes de mes questions, mais j’apprécie vraiment les efforts que vous avez déployés pour nous renseigner.
     J’aimerais commencer par aborder la question du filet de sécurité. C’est un refrain qu’en toute honnêteté, les gens nous chantent depuis pas mal longtemps, et pas seulement sous le gouvernement actuel. Cela tient à ce qu’on accorde plus d’importance à la cordialité des relations fédérales-provinciales qu’à quoi que ce soit ayant trait à la protection environnementale.
     Je pense que, dans vos témoignages, vous avez déjà signalé que le ministre fédéral de l’Environnement n’a jamais vraiment exercé ses pouvoirs. En tant qu’Albertaine, je dois dire que je suis contente d’entendre tous ces témoignages à propos du caribou des bois. Je ne peux même pas compter le nombre de fois où on a communiqué avec moi, même avant que je sois élue députée, pour me dire à quel point les gens souhaitaient que le gouvernement fédéral intervienne à cet égard étant donné que le gouvernement de l’Alberta ne le faisait pas. Comme mon collègue l’a signalé, le célèbre comité de la CEMA a, en fait, recommandé des mesures à prendre dans la région des sables bitumineux, et le gouvernement provincial a refusé de les mettre en oeuvre. Je suppose que cela soulève la question suivante: quand le ministre fédéral a-t-il l’intention d’intervenir?
     Keith, j’ai remarqué que vous aviez immédiatement évoqué le spectre de l’équivalence, ce qui a été ma première réaction. Bien entendu, c’est le terme utilisé dans la LCPE. Je me demande si l’un d’entre vous aimerait indiquer si, selon lui, il est possible que les dispositions de la loi soient inadéquates. Devrions-nous peut-être adopter l’approche prévue par la LCPE, selon laquelle le gouvernement fédéral intervient sauf si la province ou le territoire possède une loi et une stratégie d’application de la réglementation jugées équivalentes?
     Par ailleurs, d’après ce que j’ai lu, le gouvernement fédéral n’a pas encore établi une stratégie d’application de la réglementation dans le cadre de cette loi, ce dont il devrait avoir honte, si c’est la vérité. J’aurais aimé avoir pu soulever cette question auprès du gouvernement.
     Qu’en pensez-vous, Keith, Rachel, ou qui que ce soit d’autre qui pourrait avoir envie de répondre à cette question? J’aimerais que vous nous en disiez un peu plus sur la façon dont nous pourrions régler le problème lié à cette disposition. Nous inscrivons une espèce sur la liste, mais rien ne se produit par la suite.
    Keith, je vais te laisser tenter de répondre.
     Merci, Rachel.
     C’est avec plaisir que je répondrai à votre question.
     Nous croyons effectivement qu’il est essentiel que le gouvernement fédéral joue un rôle de chef de file dans le domaine des espèces en péril, mais nous convenons également qu’il est sensé de coopérer avec les provinces tant qu’elles font ce qu’elles se sont engagées à faire dans le cadre de l’accord national. C’est l’idée derrière le filet de sécurité: commençons par laisser agir les provinces.
     Vers la fin des années 1990, les provinces se sont engagées à mettre en oeuvre de nouvelles lois visant à protéger efficacement les espèces. Certaines d’entre elles l’ont fait, tandis que d’autres non. Ici dans l’Ouest, en particulier, certaines de nos lois provinciales sur les espèces en péril comportent d’énormes lacunes alors, oui, nous croyons qu’il est nécessaire de donner plus de mordant au filet de sécurité. Le processus en vertu de la Loi sur les espèces en péril doit être crédible. Ainsi, les provinces sauront que le gouvernement fédéral interviendra si elles ne respectent pas les engagements qu’elles ont pris auparavant.
     Dans notre mémoire de l’été dernier — celui de juillet 2009 —, nous avons exposé de façon très détaillée comment un « filet de sécurité avec plus de mordant » pourrait fonctionner. Essentiellement, il consisterait en un certain nombre de critères que le gouvernement fédéral utiliserait pour évaluer les lois provinciales. On analyserait les écarts qui existent dans les lois provinciales, puis on aurait recours à la coopération. Le gouvernement fédéral n’aurait à user du filet de sécurité que si la province refusait toujours de mettre en place des protections suffisantes.
     Croyez-vous que ce processus devrait être assujetti à un échéancier?
     Oui, nous le pensons, et nous avons recommandé des délais dans notre mémoire: 180 jours pour l’analyse initiale des écarts et 180 jours supplémentaires pour permettre à la province de combler toute lacune. Au bout d’une année, on aura recours au filet de sécurité si la province ne protège toujours pas les espèces efficacement.
    Merci, monsieur Ferguson.
     J’apprécie le fait que vous avez mentionné l’accord national, auquel j’ai jeté un coup d’œil. Et… bien, cela devrait accélérer les mesures.
     La deuxième question centrale que bon nombre de témoins ont soulevée a trait aux accords de conservation. Nous avons entendu M. Ewins en parler avec enthousiasme. D’autres témoins ont dit que l’idée leur plaisait, mais qu’ils nourrissaient certaines réserves à son égard. J’ai remarqué que vous aviez formulé un certain nombre de recommandations à ce sujet.
     Certains des témoins qui ont manifesté de l’inquiétude ont dit qu’il ne faudrait pas que ces accords remplacent les conditions d’un permis imposé par la loi.
    Je me demande si quelqu’un aimerait nous donner de plus amples renseignements sur les accords de conservation, parce que nous avons certainement entendu l’industrie faire preuve d’enthousiasme à cet égard. Je sais que vous vous efforcez en ce moment de négocier un accord, mais il semble improbable que vous l’ayez conclu avant que nous ayons terminé d’entendre les témoignages. Donc, je me demande également si, selon vous, il serait bon d’accélérer l’utilisation de ces mécanismes au cas où nous aurions besoin de recommandations d’une sorte ou d’une autre pour convaincre le ministère d’appuyer la négociation d’un accord.
     Merci. C’est une question très « appliquée » qui tourne autour de l’enjeu le plus important que le Fonds mondial pour la nature a soulevé ici.
     Je pense que cette idée a beaucoup de potentiel, mais nous ne sommes pas encore au stade où l’industrie, les groupes voués à la conservation et les autres intervenants sont prêts à présenter au gouvernement un plan de match très arrêté. C’est pourquoi nous recommandons que l’idée fasse promptement l’objet d’un examen global. Cette approche est utilisée depuis plusieurs décennies dans d’autres situations très semblables à celle-ci. Plusieurs d’entre nous, y compris des membres de l’industrie qui siègent au CCEP, s’étonnent que cet outil de mise en oeuvre n’ait pas été adopté rapidement et que ces accords n’aient pas été mis en valeur au Canada.
     Ce n’est pas sorcier. Il n’y a rien de nouveau à inventer dans le cas présent. Il suffit de mettre l’idée en oeuvre d’une manière normative qui est équitable et efficace et qui favorise la coopération, l’intendance et la participation, sans qu’il soit nécessaire de recourir aux bâtons et aux matraques, auxquels s’ajoutent tous les filets de sécurité requis. L’industrie recherche la sécurité, et il en est de même de la biodiversité et des groupes environnementaux. Ce n’est pas difficile à accomplir. Il suffit de présenter l’idée et de l’adapter au Canada.
    Merci, madame Duncan. Votre temps est écoulé.
(1635)
    Oh, non!
     Je vais utiliser le temps de M. Bigras.
    Des voix: Oh, oh!
    Je crois que M. Ouellet l’a déjà fait.
     Monsieur Calkins, vous allez conclure la série de questions de sept minutes.
     Eh bien, merci, monsieur le président.
     Merci, mes amis, d’être venus et d’avoir présenté au comité des renseignements très importants.
     Je tiens seulement à attirer l’attention des membres qui sont ici aujourd’hui sur le fait que j’ai découvert sur le site Web des Espèces en péril d’Environnement Canada le Sommaire de l’examen scientifique aux fins de la désignation de l’habitat essentiel de la population boréale du caribou des bois et le document intitulé Travailler ensemble au rétablissement du caribou boréal. Donc, il semble qu’Environnement Canada s’engage dans cette voie, et je suis certain que vos organisations seront appelées à donner leur avis sur cette question d’une grande importance.
     Je me souviens de l’époque où j’étais gardien au parc national Jasper. J’étais garde de parc d’arrière-pays à limite septentrionale du district de Willow Creek. Je me souviens de m’être promené un jour dans le Willmore Wilderness Park et, au moment où j’atteignais le sommet de la colline, j’ai aperçu trois caribous des bois dans la vallée. Je me suis assis, et je les ai observés pendant une heure. C’est l’une des meilleures journées que j’ai passées à titre de garde de parc national. Je me souviens d’avoir été plutôt frustré en constatant que leur population… Elle diminue. Ce n’est un secret pour personne.
     Cette question s’adresse à vous, Éric. En tant qu’employé de Parcs Canada, il m’était très difficile à l’époque de soulever cette question. Mais si nous examinons en particulier l’aire de répartition du caribou boréal, nous constatons qu’au col Howse, la population a essentiellement disparu, et que c’est aussi le cas à Banff. Nous avons devant nous des recommandations  — nous procédons en ce moment à la révision de la Loi sur les espèces en péril — et pourtant, à ma connaissance, Parcs Canada n’a aucune politique en matière de lutte contre les prédateurs; du moins, l’agence n’en avait pas à l’époque où je travaillais pour elle.
     Si vous jetez un coup d’oeil à certains des facteurs clés qui touchent le caribou boréal, il me semble que certains des problèmes qui existent au sein même d’Environnement Canada doivent être réglés. Je sais que la lutte contre les prédateurs est un sujet délicat parce que, manifestement, il suscite… certaines émotions profondes. Mais lorsque les aires de répartition sont aussi serrées et les régions aussi petites à l’intérieur de nos parcs nationaux, et que l’habitat essentiel est aussi restreint, sans une gestion efficace de ces facteurs…
     Je comprends, croyez-moi, la philosophie derrière ces décisions et l’idéalisme qui nous pousse à laisser la nature suivre son cours. Je suis surpris que nous ne recevions aucune recommandation en ce sens, surtout de la part de la Société pour la nature et les parcs du Canada.
     Aimeriez-vous formuler des observations à ce sujet?
     Bien sûr.
     Il ne fait aucun doute que les rapports entre les proies et les prédateurs jouent un rôle, mais, comme je l’ai mentionné plus tôt, je crois que, dans certains cas, nous créons, en particulier près des aires protégées déjà… Comme vous l’avez souligné à juste titre, l’aire de répartition des caribous des bois est très étendue. Donc, dans bien des cas, même un parc national ne suffit pas à contenir celle d’une variété de caribous des bois ou d’un troupeau donné.
     Nous devons donc réfléchir aux genres de répercussions que nous avons sur l’habitat de ces caribous et qui altèrent les rapports qu’entretiennent les proies et les prédateurs. C’est pourquoi la construction de routes et de voies d’accès est devenue l’une des pièces les plus importantes du casse-tête.
     La lutte contre les prédateurs a sa place dans certaines circonstances, mais ce qui compte surtout, lorsque nous étudions l’habitat, c’est la mesure dans laquelle il est fragmenté et la façon dont il avantage les prédateurs plutôt que de protéger les proies.
    Eh bien, vous parlez de l'effet de bordure et de toutes les choses de ce genre qui se produisent, qu'il s'agisse d'une politique interdisant les feux, ce qui crée certains des problèmes, ou d'une succession secondaire, ou de la culture fourragère — toutes ces choses.
    Quoi qu'il en soit, je comprends que c'est un sujet délicat. En toute justice — même si Aldo Leopold ne serait pas d'accord avec moi —, je pense que la lutte contre les prédateurs est en fait une question cruciale, et je crois que Parcs Canada est vraiment de cet avis. J'aimerais que quelqu'un ait le courage de dire qu'il nous faut peut-être en arriver là.
    La réalité, c'est qu'on peut contrôler toutes ces choses qui ne sont pas du ressort de Parcs Canada, mais jusqu'à ce qu'on les examine de l'intérieur des parcs nationaux... Je sais que c'est délicat, et je sais qu'il s'agit d'une question difficile, mais je crois que c'est vraiment l'élément déterminant. Très peu de routes et d'autoroutes traversent les parcs nationaux. Nous avons tenté, dans la mesure de nos capacités, de construire des trajets de passage de la faune et des ponts pour faire en sorte qu'elle ne soit pas touchée. Même si des clôtures longent l'autoroute 1 sur toute sa longueur dans le Parc national du Canada Banff, cela n'a pas empêché la population de caribous des bois de disparaître. Donc, en ce sens, c'est frustrant.
    Je veux parler un peu plus de la notion de parcs nationaux, car cela me tient particulièrement à coeur. À l'université, nous avons examiné essentiellement un plan de l'époque qui indiquait qu'il fallait protéger ou préserver environ 12 p. 100 de chaque biozone du Canada, chacune des régions écologiquement fragiles. On en comptait neuf quand j'étais là-bas. Je ne sais pas ce qui leur est arrivé; bien entendu, ces choses changent avec le temps. Les 12 ou 13 p. 100 de chacune de ces zones subiront sans doute des changements irréversibles, que ce soit à cause de la construction de villes ou de routes, ou je ne sais quoi, et il en est resté 75 p. 100 pour le développement durable et la gestion durable.
    À l'examen de la Loi sur les espèces en péril et de sa mise en oeuvre en ce qui concerne les parcs nationaux, j'aime la recommandation selon laquelle nous devons construire plus de parcs dans des aires où nous avons moins de 12 p. 100 de représentation. L'agrandissement de la réserve de parc national Nahanni est une très bonne chose, mais il faut y intégrer plus d'aires protégées.
    Ce plan sur les espèces en péril ne traite pas directement de l'habitat aussi bien qu'il le devrait. Je crois que le problème que pose la mise en oeuvre de la loi, c'est qu'elle est trop vaste; en fait, je plains les bureaucrates ou toute personne qui doit mettre en oeuvre la LEP. Il importe peu que le gouvernement au pouvoir soit conservateur, libéral ou qu'il s'agisse d'un gouvernement de coalition. Je ne cherche pas à blâmer qui que ce soit; je pense qu'il est très difficile de mettre en oeuvre cette loi, car elle est tellement vaste qu'elle perd de son efficacité.
    En fait, j'aimerais qu'on s'efforce davantage de préserver l'intégrité écologique d'un certain pourcentage des aires et qu'on laisse les systèmes naturels agir et fonctionner selon ces types de paramètres.
    Avez-vous des remarques à ce sujet?
(1640)
    J'aimerais intervenir, merci.
    Je crois qu'il est très important de se rappeler — j'ai également appris le modèle du 12 p. 100 à l'université — que cela fait partie du grand nombre de choses qui ont changé dans notre compréhension scientifique. Ce que les scientifiques nous disent maintenant devant des éléments comme le changement climatique, c'est que les 12 p. 100 seront nettement insuffisants. Donc, à mon avis, si nous faisons tout en notre pouvoir pour aménager nos parcs nationaux intelligemment, pour en avoir plus, c'est un outil merveilleux. Mais, il nous faut vraiment nous concentrer là-dessus plutôt que sur la bonne gestion de ces espèces, en utilisant la LEP pour cette aire qui est censée être développée de manière viable. Donc, le développement durable signifie maintenir les espèces ailleurs que dans des parcs nationaux.
    Il est important de prendre conscience du fait que bien que certains de nos parcs nationaux semblent grands pour un humain, les parcs nationaux où des caribous sont disparus, par exemple, n'étaient pas grands d'un point de vue écologique pour les caribous. Ils étaient trop petits. Et les dommages qui ont été occasionnés à l'extérieur de ces parcs ont eu des répercussions sur les animaux, que nous pensions protégés par les parcs.
    Merci.
    Votre temps est écoulé.
    Nous allons commencer une série de questions de cinq minutes.
    Monsieur Trudeau.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais commencer par une question qui complète ce que M. Calkins a dit au sujet de la lutte contre les prédateurs.
    Je me souviens de la première fois où j'ai visité le Parc national Banff quand j'étais petit. J'ai vu les grands tunnels qu'on avait construits sous l'autoroute pour les caribous, les animaux des bois. Quelqu'un a dit: ah oui, ils sont merveilleux; les loups s'installent à côté des tunnels et savent que leur proie passera par là.
    On est donc inquiet du fait que nos avancées facilitent les choses pour les prédateurs, mais je sais aussi que la solution ne peut simplement consister à éliminer tous les prédateurs, car rien ne garantit que la proie reviendrait, si bien sûr, comme Mme Pinkus le dit, pour le caribou, l'aire protégée ne semble pas grande.
    À mon avis, cela met en évidence l'une des grandes questions que j'ai soulevées à plusieurs reprises, la question implicite. Le gouvernement actuel a fait beaucoup de choses, et à juste titre, pour l'expansion de la réserve Nahanni. Pour moi, la question de fonder une stratégie écologique ou environnementale sur la création d'un plus grand nombre de parcs nous amène toujours à poser la question suivante: si l'on protège un certain pourcentage du territoire canadien, que dit-on implicitement de toutes les aires qu'on ne protège pas? Je crois que c'est la question à laquelle la LEP doit répondre.
    Je dois dire que je suis vraiment inquiet. Les témoignages que nous avons entendus de l'industrie, des ONGE et même du gouvernement ont mis en évidence que la LEP est un coup d'épée dans l'eau et qu'elle n'atteint pas son objectif. Il y a une défaillance quelque part. Le COSEPAC semble faire du bon travail. Les travaux scientifiques visant à signaler les espèces en péril sont biens. C'est la question de l'habitat qui présente une faiblesse, en particulier la protection de l'habitat, en fait, sur le plan de la mise en oeuvre des recommandations découlant de ces travaux scientifiques.
    Je comprends qu'on ne veuille pas montrer ses couleurs politiques dans tout cela, mais je me demande si ce que M. Calkins dit est vrai, qu'aucun gouvernement, étant donné les difficultés économiques et sociales actuelles, ne serait capable de mettre en oeuvre la LEP comme il se doit pour protéger nos espèces en péril, et que nous devrions peut-être tous abandonner et tenter simplement de protéger certaines aires et espérer qu'un petit nombre d'espèces survivront — ce qui ne représente pas exactement les propos de M. Calkins, mais c'est certainement l'une des projections qu'on pourrait établir.
    J'aimerais vous entendre tous à ce sujet, selon le temps que nous avons.
    Rachel.
(1645)
    Il reste environ deux minutes pour l'ensemble des témoins.
    Je crois que cela met en évidence un aspect de la loi qui est acceptable. Concernant la protection de la plupart des espèces en péril, il ne s'agit pas de créer de petites aires protégées en particulier, ni de tuer des prédateurs. Il s'agit de faire en sorte que l'habitat soit suffisant pour permettre aux espèces de survivre et de se rétablir.
    Je crois qu'on a mentionné à maintes reprises que, d'après un article sur les espèces en péril au Canada, pour 84 p. 100 des espèces canadiennes en péril, la disparition ou la dégradation de l'habitat est la principale cause de leur déclin.
    Vous vous rappellerez peut-être que, dans notre exposé, nous avons parlé de la nécessité d'inclure dans les programmes de rétablissement des seuils de tolérance pour les perturbations naturelles. Je crois qu'il est possible pour les gouvernements de protéger des espèces comme le caribou. Je crois que la plupart des aménagistes forestiers veulent aussi protéger le caribou. La plupart des exploitants pétroliers et gaziers veulent protéger le caribou. Personne ne veut être responsable de la disparition des espèces ou de leur extinction.
    Donc, plus les programmes de rétablissement contiendront de détails sur les perturbations que peuvent endurer divers caribous, plus nous aurons d'outils qui nous permettront de nous asseoir avec nos collègues de l'industrie, les premières nations et les gouvernements provinciaux et fédéral et de dire, d'accord, voici où vivent les caribous. Il peut y avoir tant de perturbations avant que leur population commence à décliner. Où pouvons-nous causer de la perturbation? Comment faire en sorte qu'il y ait le moins de répercussions possibles pour l'industrie? Comment faire en sorte qu'une première nation qui aurait des aspirations soit capable de faire du développement industriel dans tout cela, mais que nous ayons les outils fondés sur la science pour assurer une gestion adéquate qui permettra aux espèces en péril de survivre au Canada?
    En fait le Conseil principal de la forêt boréale en est un exemple. Il met beaucoup d'efforts à rassembler des représentants de l'industrie et des organismes de conservation et leur demande comment protéger cette aire à l'aide d'un plan d'occupation du sol vraiment représentatif et qui assure une bonne surveillance du point de vue de la conservation.
    C'est possible. Il est certain que si l'industrie peut s'asseoir à la table, un gouvernement n'a aucune raison de ne pas le faire également pour nous aider à trouver ces solutions. Je ne suis pas pessimiste. Je crois que les éléments de la Loi sur les espèces en péril sont à la bonne place. Il nous faut seulement trouver des façons d'en supprimer les chevauchements et de faire en sorte qu'elle fonctionne dans notre intérêt à tous.
    Monsieur Trudeau, votre temps est écoulé. Pour être juste à l'endroit des autres membres du comité, je dois poursuivre.
    Monsieur Warawa, la parole est à vous.
    Merci aux témoins de leur présence. Je vous remercie de votre dévouement et de votre passion pour l'environnement.
    J'aimerais me concentrer sur des facteurs socio-économiques liés à la désignation d'habitats essentiels, et aussi sur la façon dont cela entre en jeu dans la question du développement durable. C'est un aspect très important du développement durable, en réponse aux besoins du présent, de la génération actuelle, sans que soit compromise la réponse aux besoins des générations futures.
    Donc, c'est l'environnement. C'est l'économie. C'est la société. Tous les facteurs doivent entrer en ligne de compte.
    En tant que comité, nous avons entendu qu'on ne tient pas compte des considérations socio-économiques lorsqu'on détermine que des espèces sont en péril. On le fait lorsque c'est le ministre et le gouverneur en conseil, mais encore une fois, on n'en tient pas compte lorsque l'habitat est désigné. C'est ce que le ministère nous a dit; ce n'est peut-être pas ce que je crois avoir entendu de la part de certains d'entre vous aujourd'hui.
    J'ai également rencontré certains d'entre vous à mon bureau, de même que des représentants de l'industrie, et j'ai entendu dire que des négociations étaient en cours avec l'industrie et des ONGE pour voir si les deux groupes peuvent arriver à s'entendre et trouver une solution pratique.
    Je vous pose la question, Rachel, car vous êtes l'une des personnes que j'ai rencontrées et vous avez indiqué que vous allez rencontrer l'industrie bientôt; est-ce que les ONGE et l'industrie ont pu trouver un compromis ou une position qui non seulement permet de protéger l'environnement, mais aussi qui aide à répondre aux besoins?
(1650)
    Les ONG et les industries collaborent encore pour en arriver à des recommandations conjointes. Selon moi, nous souhaitons tous être capables d'y arriver d'ici la fin de l'examen pour pouvoir venir vous les présenter.
    D'accord, merci. Si cela survenait bientôt, nous vous saurions gré de bien vouloir nous les présenter.
    Je vais commencer avec M. Hébert-Daly. Selon vous, pourquoi les accords de conservation ne se concrétisent-ils pas? D'après ce que j'ai entendu des représentants de l'industrie, s'ils aident une espèce en péril — l'aider à son rétablissement au moyen de bonnes pratiques environnementales —, cela risquerait de mettre la survie même de leur industrie en péril. Si des accords de conservation ne sont pas envisagés, puis... et cette industrie serait alors exemptée de la LEP.
    Que pensez-vous de cela?
    Je devrais probablement laisser Peter répondre, étant donné que c'est plutôt un de ses domaines de compétence qu'un des miens.
    M. Mark Warawa: Je vous en prie.
    Certainement. Merci.
    Selon moi, c'est vraiment très simple; tout dépend de l'échelle dont il est question. Comme dans le cadre d'un programme de rétablissement d'une espèce qui parcourt de vastes étendues — une migration provinciale ou territoriale, voire internationale —, ils ont tendance à avoir besoin de beaucoup d'espace et de temps chaque année. Par définition, cela concerne beaucoup de personnes qui possèdent des terrains et qui ont des intérêts, économiques ou autre, dans les terres. Le véritable objectif d'un programme de rétablissement et d'un plan d'action, c'est de présenter la liste des besoins normatifs essentiels à la survie de l'espèce. C'est là le véritable but de la LEP.
    Par conséquent, tout ce qui reste à décider, c'est le mécanisme à adopter pour l'ensemble, de sorte que cette proposition s'appliquera équitablement à tous ceux qui ont des intérêts dans cet habitat. Si on présume que les besoins d'une espèce et que les besoins de son habitat naturel sont très valorisés par les humains, alors nous aurons une proposition fonctionnelle. En ce moment, il n'y a pas de plan formel de grande envergure, mais, dans la plupart des cas, il y a un plan d'action. Nous aboutissons donc à une sorte d'approche fragmentaire.
    Selon moi, il est très intéressant que le FEM, le PNUD et le Service des forêts américain s'apprêtent à publier des rapports sur l'évaluation des écosystèmes, sur les coûts du développement associés à l'intégration des propositions et sur les coûts engendrés par la nature et par l'humain à cette échelle. Selon moi, cela nous donne une très bonne idée de la manière dont nous planifierons la conservation des espèces en péril — et que nous empêcherons que d'autres le deviennent — au cours des prochaines décennies.
    Ai-je le temps de faire un bref commentaire?
    À peine.
    D'accord.
    Je suis impressionné par ce que nous avons pu accomplir au cours de nos quatre courtes années au pouvoir: nous avons augmenté de 30 p. 100 les aires protégées. Nous sommes donc dans la bonne voie. J'espère que nous nous en tiendrons à un examen non partisan de la LEP et que nous protégerons notre précieux environnement.
    Merci.
    Merci, monsieur Warawa.
    Poursuivons. Permettez-moi de vous dire bonjour, monsieur Gaudet.

[Français]

    Bonjour, monsieur le président.
    J'ai une ou deux questions à poser. Lorsque la Loi sur les espèces en péril a été déposée, est-ce que vous avez été consulté?
    Lorsque le projet de loi a été déposé pour la première fois?
    Oui.
    Oui, on a pris part à ce travail. Je pense que tout le monde autour de moi a travaillé sur ce dossier.
    C'est qu'il y a deux ou trois ans, on a fait une tournée dans l'Ouest canadien. Le président du comité, M. Bezan, était avec nous. Les gens nous avaient alors parlé des fonctionnaires du ministère de l'Agriculture. Il disait que nos fonctionnaires, à Ottawa, ne connaissaient pas la différence entre une vache et une carotte.
    C'est pour cela que je vous pose la question. Je pense que M. Watson faisait aussi partie du voyage. Je veux savoir si les fonctionnaires fédéraux savent ce qu'est un caribou. Je vous pose la question, tout simplement. Si les fonctionnaires ne savent pas ce qu'est un caribou, un chevreuil ou un orignal, il sera difficile d'élaborer une bonne loi. C'est seulement cela, ma question.
(1655)
    Évidemment, il y a au moins 200 ans qu'un caribou ne s'est pas promené dans les environs, mais peu importe.
    Toutefois, on peut se déplacer pour aller voir les caribous.
    Oui, on peut justement se déplacer.
    Toutefois, je crois honnêtement qu'il y a des scientifiques qui sont tout de même capables d'identifier un caribou et de déterminer ce qui est nécessaire à sa survie. Je n'attaquerai pas les fonctionnaires en généralisant et en disant qu'ils ne font pas la différence entre une carotte et une vache.
    Ce n'est pas un reproche. C'est qu'il y a 25 ou 30 ans, le père ou le grand-père de tous ceux qui sont ici autour de la table était cultivateur ou agriculteur. Alors, tout le monde connaissait les animaux et ce qu'ils étaient. Aujourd'hui...
    C'est vrai que l'urbanisation du Canada a fait en sorte qu'on est tous de plus en plus détachés de la nature. Ça devient un problème, non seulement pour les gouvernements et les fonctionnaires, mais aussi pour l'humanité et l'individu. Je suis bien d'accord avec vous à ce sujet.
    Merci. C'était mes questions.
    M. Ouellet va continuer.
    Monsieur Ouellet, vous avez trois minutes.
    L'autre jour, à dix pieds de ma galerie, il y avait un magnifique ours. Je connais ça, les animaux.
    Je vais m'adresser à tout le monde. Dans vos présentations, vous demandez qu'il y ait plus d'accords de conservation. Jusqu'à ce jour, le gouvernement n'en a pas mis en place. D'une part, pourquoi le gouvernement est-il si lent à mettre en place de tels accords? D'autre part, quels sont les obstacles lors de la mise en place de ceux-ci?

[Traduction]

    Pour la première question, je n'en ai aucune idée.
    Est-ce que quelqu'un le saurait?
    Pour la deuxième question, il faut être conscient des restrictions budgétaires et des nombreuses exigences de la LEP.
    Dans les faits, seulement une faible somme a été obtenue pour la mise en oeuvre de la LEP. Il s'est fait beaucoup de travail de conception et les processus ont été nombreux. Il est aussi probablement normal qu'après cinq à sept ans, l'effet « lune de miel » ne fait que commencer à se dissiper. La LEP a atteint sa maturité et est logiquement fin prête à être appliquée.
    Selon moi, c'est la raison pour laquelle vos travaux tombent vraiment à point nommé — pour proposer les priorités à appliquer. Choisissons très soigneusement quelques exemples, appliquons-les et voyons la façon dont tout cela aura fonctionné dans cinq ans.

[Français]

    Je trouve que c'est une belle image quand on dit que c'est une loi qui arrive à son adolescence. On ne sait pas trop sur quoi elle va s'aligner.
    Cependant, tout comme Rachel, je crois qu'on vient d'atteindre un sommet, c'est-à-dire qu'on a assez travaillé sur les plans et sur les structures pour être en mesure de faire le travail comme il le faut. Il ne faudrait pas maintenant trop changer la structure, car on gaspillerait une bonne partie du temps qu'on a investi dans la préparation. Il faut donc faire attention de ne pas tout abandonner alors qu'on tente d'obtenir des résultats.
    Encore une fois, c'est plutôt une question de mise en oeuvre. On y arrive, mais à peine. Il faudra donc trouver des moyens plus créatifs de le faire.
    Comme il me reste encore une minute, je veux mentionner qu'il y a une explication que je demandais au groupe de David Suzuki et à Ecojustice Canada. Vous dites dans vos notes d'information: « Les accords de conservation ne devraient pas écarter les interdictions ni les conditions associées aux permis de la LEP. Art. 11 et art. 73 doivent être appliqués de concert ». Que voulez-vous dire par là ?

[Traduction]

    Je vais y répondre avec plaisir.
    Nous entendons des gens suggérer qu'un accord de conservation devrait aussi autoriser des exemptions aux interdictions de la LEP et, selon nous, cela ne devrait pas être le cas, parce que l'article 73 de la loi, l'article sur le permis, comporte des clauses de garantie très détaillées. Précisément, le paragraphe 73(3) contient trois clauses de garantie soigneusement écrites pour garantir que toutes les mesures possibles seront prises afin de minimiser les conséquences négatives de l’activité permise, pour garantir que toutes les solutions de rechange susceptibles ont été envisagées et pour garantir que l’activité ne mettra pas en péril la survie ou le rétablissement de l’espèce. Si ces trois conditions sont remplies, alors le permis peut être délivré en vertu de l'article 73.
    Nous ne croyons pas qu'un accord de conservation à lui seul, qui ne prévoirait pas nécessairement l'application de toutes ces garanties, devrait aussi avoir l'effet d'une exemption, mais nous croyons qu'il serait bon que les ministères fédéraux procèdent à des études pour définir si ces deux entités peuvent coexister. Par exemple, est-ce qu'un accord pourrait servir à la fois d'accord de conservation et d'accord en vertu de l'article 73 qui satisferait aux conditions préalables? Je ne sais pas. Selon moi, c'est une question que les ministères devraient étudier davantage.
(1700)
    Merci Beaucoup.
    Monsieur Woodworth, vous avez la parole.
    Merci à tous d'être présents aujourd'hui.
    Selon moi, peu importe de quelle manière nous l'abordons, c'est un sujet qui pose de multiples problèmes. Comme quelqu'un l'a dit à la blague, nous n'avons pas vu de caribous dans les environs depuis 200 ans, et c'est manifestement causé par l'interaction graduelle entre l'humain et son environnement naturel. Nous voulons donc agir de manière intelligente et sincère pour que, comme l'aurait dit Rodney King, nous puissions vivre tous ensemble.
    J'ai jugé intéressant ce commentaire, que je vais vous lire, extrait du mémoire de la Fédération mondiale de la faune:
La plupart des intervenants dans les dossiers de la LEP reconnaissent depuis bien longtemps que le traitement d’espèces uniques pour le rétablissement est une méthode qui, globalement, est lente et inefficace. La Table ronde du ministre de décembre 2006 sur les espèces en péril, qui a été très courue, a rappelé le besoin urgent d’une action gouvernementale beaucoup plus vigoureuse à l’égard du traitement de plusieurs espèces ou de tout un écosystème pour le rétablissement des espèces. L’évaluation de STRATOS en 2006 présentait aussi cette recommandation (no 16) et le gouvernement a donné son accord.
    Bon, je ne sais pas tout ce qu'il y a à savoir sur le sujet, mais je suis tombé sur certains renseignements relativement au programme de conservation des aires naturelles qui, en date de septembre 2009, avait protégé plus de 136 000 hectares de territoires qui servent d'habitat à des espèces en péril. Cela représentait plus de 60 p. 100 de l'objectif total du programme, et le tout a été accompli en moins de trois ans. Durant les prochaines années, on projette que le programme englobera plus de 200 000 hectares de terres écosensibles dans le sud du Canada. Un autre montant de 79,4 millions de dollars doit être versé. On estime qu'il faudra encore deux, peut-être trois ans pour investir complètement les 225 millions de dollars, presque un quart d'un milliard de dollars, alloués à ce programme.
    Ai-je raison de dire que ce programme s'occupe de nombreuses espèces et est axé sur la protection des écosystèmes?
    Je m'adresse à M. Ewins, parce qu'il s'agit du mémoire de la Fédération mondiale de la faune, mais tout d'abord, connaissez-vous bien ce programme?
    Oui, merci. Il était dans une version antérieure. C'est une façon très créative de tirer parti d'un programme. Il s'agit d'un excellent programme qui touche de nombreuses espèces, qui est axé sur l'habitat et qui garantit des régimes de gestion pour les besoins à long terme des espèces.
    Donc, si je traduis bien vos commentaires, vous approuvez le travail que le gouvernement a accompli au cours des trois dernières années et vous croyez que cela a eu des effets positifs et que cela satisfait aux recommandations de 2006 concernant la protection des écosystèmes.
    Toujours dans le même domaine, l'autre programme que j'ai trouvé concerne des investissements de 22 millions de dollars, au cours des cinq dernières années, par Parcs Canada dans de nouvelles initiatives pour garantir la conservation et la protection des écosystèmes canadiens, y compris la faune et la flore diversifiées des écosystèmes de Garry Oak dans le sud de la Colombie-Britannique, le parc national du Canada des Prairies en Saskatchewan, l'écosystème des Mille-Îles en Ontario, le parc national du Canada de Kejimkujik en Nouvelle-Écosse et le site historique national de la voie navigable Trent-Severn. On m'a appris qu'ils ont tous des approches écosystémiques qui intègrent de la recherche, des activités de rétablissement, des interventions et de l'éducation pour créer une approche intégrée au rétablissement des espèces.
    Connaissez-vous bien ces programmes?
(1705)
    Oh, oui, tout à fait. C'est-à-dire que c'est un bon début, mais c'est à des années-lumière de ce que la LEP exige.
    Certainement. Et je ne vous renvoie pas à cela isolément. Je l'ai aussi inclus dans le quart de milliard de dollars — ou presque — dépensés en conservation de la nature.
    Tout cela est donc positif. Je voulais seulement m'assurer — parce que votre rapport indiquait que vous aviez le sentiment qu'il n'y avait pas eu assez de progrès — que j'avais bien compris, qu'au moins nous avons fait des...
    Puis-je les qualifier de progrès « importants »? Serait-ce exact?
    Eh bien, j'ai une formation de scientifique. Non, ce n'est pas négligeable — c'est un bon début —, mais je pense qu'en ce qui concerne nos progrès, l'épreuve décisive est liée à la nature de la liste du COSEPAC et aux mises à jour régulières sur le statut des espèces canadiennes, des habitats naturels et de la fonction de l'écosystème. Et tout comme un examen médical, ces points démontrent que vous avez un problème, et que vous n'avez pas commencé à renverser la situation.
    Voilà donc comment en mesurer l'importance.
    Merci.
    Votre temps est écoulé. Merci, monsieur Woodworth.
    Monsieur Scarpaleggia.
    Merci, monsieur le président.
    L'autorité dont nous avons parlé, l'autorité fédérale qui permet de vraiment prendre les devants sur cette question et d'intervenir auprès des provinces pour protéger les espèces, d'où vient-elle?
    Par exemple, dans le cas de la LCPE, l'autorité que détient le gouvernement fédéral de réglementer ou de légiférer en matière d'émission de produits chimiques dans l'environnement provient d'une décision rendue par la Cour suprême, qu'on appelle, je crois, l'arrêt Hydro-Québec.
    D'où dérive l'autorité fédérale qui permet au gouvernement fédéral d'assumer avec audace le rôle de chef de file dans ses interventions auprès des provinces pour protéger les espèces?
    Je pourrais peut-être répondre à cette question.
    On a longuement discuté de l'autorité constitutionnelle en ce qui concerne la LEP quand elle a été présentée au Parlement. Des personnes aussi en vue que M. La Forest, l'ancien juge de la Cour suprême, ont donné leur avis.
    En vertu de la Constitution, la compétence législative sur le droit criminel justifie la compétence du gouvernement fédéral en ce qui concerne les espèces en péril à la grandeur du pays. Le volet « préoccupation nationale » de la disposition concernant la paix et l'ordre ainsi que le bon gouvernement en est une autre justification.
    Je devrais dire que je ne suis pas un spécialiste en droit constitutionnel, mais je vous renverrais aux débats de la dernière fois, où on a longuement discuté de cette question.
    Si le gouvernement fédéral devait exercer ce pouvoir en ce qui concerne le caribou, par exemple, voici un cas précis qui me vient en tête. Le comportement du caribou est influencé, semble-t-il, par des choses qui surviennent à des centaines de milles terrestres.
    Par exemple, selon le Dr David Schindler, le caribou est dérangé par les activités de drainage par gravité au moyen de vapeur dans les sables bitumineux situés sur des terres louées par la province. De quelle façon le gouvernement fédéral s'occupe-t-il de cette question? Les caribous pourraient se trouver sur des terres de la Couronne fédérale, mais ils sont toutefois dérangés par des activités industrielles qui ont lieu sur des terres publiques provinciales situées à 300 milles terrestres.
    Si vous deviez invoquer le pouvoir fédéral qui, comme vous l'avez dit, provient d'un certain nombre de sources, de quelle façon l'utiliseriez-vous pour résoudre ce problème?
    Je pense que la meilleure chose que je pourrais faire dans ce cas serait d'utiliser le programme de rétablissement relevant de la LEP. Dans le cadre d'un programme de rétablissement, nous pourrions rassembler une équipe de scientifiques pour déterminer en quoi consistent les menaces comme celle dont vous parlez. Ils pourraient présenter, d'un point de vue scientifique, des solutions à ces problèmes. Ils pourraient déterminer scientifiquement l'habitat essentiel nécessaire. Puis nous pourrions passer à l'étape suivante, l'étape de la conservation pendant laquelle, nous l'espérons, des mesures de conservation seraient adoptées pour protéger cet habitat.
(1710)
    Pour revenir à ce que nous avons entendu au cours d'une séance précédente, nous parlons beaucoup de science et du fait que nous avons besoin de la science pour créer des programmes de rétablissement et ainsi de suite. Tout cela est très théorique, et tout cela a un sens. Mais, quand vous parlez à des fonctionnaires fédéraux, ils disent, « Eh bien, vous savez, il faut un an pour embaucher un biologiste. »
    Existe-t-il des contraintes matérielles qui empêchent la mise en oeuvre de la LEP? C'est bien de dire qu'il faut évaluer ceci, qu'il faut étudier cela, que nous avons besoin d'un avis scientifique sur ceci et pourtant, nous n'avons pas la capacité de tout faire.
    Je pourrais peut-être répondre à cela.
    Cela concerne une de nos plus importantes recommandations, celle de la composition des équipes de rétablissement. Actuellement, nous sommes dans une situation où les équipes de rétablissement existent de manière inégale. Ce que cela signifie, c'est qu'il y a des équipes de spécialistes qui aident le gouvernement dans sa planification pour certaines espèces, mais pas pour d'autres.
    Ce que nous avons ici, c'est une occasion ratée pour les espèces pour lesquelles il n'y a pas assez de spécialistes au sein des équipes de rétablissement. Cela peut prendre beaucoup de temps pour engager un spécialiste scientifique, mais les spécialistes membres de ces équipes de rétablissement sont des chefs de file dans le domaine de la protection de ces espèces. Ils travaillent bénévolement. Ils participent aux équipes de rétablissement parce qu'ils veulent contribuer à préserver l'espèce et, pourtant, nous assistons à l'utilisation inégale de ces personnes irremplaçables.
    Je pense qu'un des problèmes en cause, c'est évidemment la politique de mise en oeuvre et non un manque de scientifiques prêts à aider le gouvernement à savoir ce dont les espèces ont besoin pour survivre ou pour se rétablir.
    Merci.
    Le temps est écoulé. C'est mon travail, je ne fais que diriger la circulation, ici.
    Monsieur Armstrong, la parole est à vous.
    Merci à vous tous d'être venus aujourd'hui. J'ai entendu de nombreux faits très intéressants.
    Une des choses dont nous avons longuement discuté aujourd'hui, c'est le fait que 84 p. 100 des espèces qui se retrouvent sur la liste des espèces en péril le sont parce que leur habitat essentiel est menacé. Nous avons aussi discuté du fait que seulement pour la conservation du caribou, nous aurons besoin d'une superficie beaucoup plus grande que celle de nos plus grands parcs nationaux.
    Pour pouvoir mettre en oeuvre la LEP de façon efficace, est-il juste de dire qu'il faudrait, pour la protection de l'habitat essentiel, un territoire absolument gigantesque?
    Si oui, les propriétaires fonciers privés seront-ils indemnisés à la juste valeur de marché? Où le gouvernement prendra-t-il l'argent pour le faire? Il semble que c'est une question à laquelle nous devrons faire face. Ou est-il recommandé que nous options tout simplement pour l'expropriation des terres sans verser d'indemnité à la juste valeur de marché, ou peut-être seulement une indemnité partielle?
    Qu'allons-nous faire de cela?
    En réalité, le territoire du Canada est principalement public. Je veux dire que nous avons des terres publiques. Donc, en fait, non seulement nous avons une occasion à l'échelle internationale en raison de la superficie de nos terres, mais nous avons aussi, en matière de conservation, une occasion politique et une occasion facile à saisir, étant donné la superficie des terres publiques que nous avons au Canada.
    Donc, bien que je sois d'accord pour dire que, dans certains cas, l'achat de terres privées et ce genre de choses pourrait être essentiel pour un habitat précis, la réalité, c'est qu'une grande partie de ce travail peut être fait sur les terres publiques. Nous n'avons donc pas besoin d'investissements semblables à ce que vous verriez dans le cas de l'acquisition de terres privées.
    Merci.
    Monsieur Hébert-Daly, dans votre déclaration préliminaire, vous avez affirmé que nous devons agir de toute urgence pour établir de nouveaux parcs nationaux élargis, particulièrement dans les Territoires du Nord-Ouest. Pourriez-vous nous parler davantage des raisons qui expliquent cela et nous dire pourquoi c'est si urgent? Vous avez dit que cela devrait être fait immédiatement. De quelle superficie parle-t-on?
    Il y a actuellement une proposition pour la création d'une réserve de parc national à un endroit nommé Nááts'ihch'oh, qui est situé tout juste au nord du parc national Nahanni, lequel a été agrandi l'an dernier. C'est urgent, parce qu'on est sur le point d'en déterminer les limites.
    En ce moment, trois différentes limites sont proposées, et chacune d'entre elles — même celle qui protège le plus grand bassin hydrologique — exclut une portion assez importante de l'habitat du caribou. C'est pourquoi je dis que c'est une question urgente et que c'est quelque chose dont nous devons nous occuper immédiatement et que cela souligne l'importance de la coopération, parce que même si nous avons une loi sur les espèces en péril et que nous préconisons la création de réserves, nous n'avons pas appliqué le principe de la protection des espèces à cette proposition de réserve en particulier, comme nous aurions dû le faire.
    Donc, une des choses au sujet de laquelle nous avons certainement fait campagne et informé le public, c'est l'idée globale que nous sommes en mesure de protéger l'ensemble du bassin hydraulique de la Nahanni, non seulement dans le but de protéger le parc situé au sud, qui est le parc de la Nahanni en soi, ou pour protéger l'habitat du caribou, ce qui, en fait, peut être fait dans ce cas précis. Vous avez donc raison de dire que cet habitat du caribou requiert une superficie qui surpasserait normalement celle d'un parc national, mais dans ce cas en particulier, nous avons l'occasion de le faire et nous ne le faisons pas. De ce point de vue, nous avons vraiment l'occasion — et c'est urgent — de protéger, dans ce cas, un troupeau entier.
(1715)
    Merci.
    Monsieur Ewins, vous avez dit que vous aviez des recommandations à faire concernant les priorités pour la mise en oeuvre de la LEP. Une de vos préoccupations était que la LEP était si générale — et les budgets sont limités, bien sûr, pour réaliser ces choses — que nous devrons choisir nos priorités prochainement.
    Je me demande tout simplement quelles sont vos suggestions, de votre point de vue, en ce qui concerne les priorités par lesquelles vous commenceriez.
    En fonction de mon expérience dans différents pays, dont 20 ans au Canada, je dirais que nous devrions commencer par la recommandation numéro quatre. Suivez l'argent: s'il n'y a pas d'argent là, vous ne pourrez pas accomplir grand-chose.
    Donc, mettez en place ce modèle de financement novateur, pour que chaque dollar fédéral dépensé puisse générer cinq ou six dollars dans le milieu. Cela a été fait ailleurs. C'est facile et, vous savez, nous n'avons pas de surplus qui traînent; je ne comprends donc pas pourquoi cela n'a pas encore été fait, mais allez faire vos devoirs et mettez cela en oeuvre.
    Je travaillerais à contresens. J'irais voir les accords de protection — notre troisième recommandation — et je trouverais le modèle novateur qui inclurait de façon convenable des mesures de surveillance, un engagement ministériel, une étude et l'industrie qui permet de faire des choses, de façon à mettre en place un système équitable et efficace.
    Comme je l'ai dit, je ne sais pas du tout pourquoi le Canada n'a pas utilisé ces moyens. Ils fonctionnent très bien dans d'autres domaines, même au Canada.
    À mon avis, ce sont les deux priorités pour la mise en oeuvre, au-delà de celle, évidente, que nous partageons tous, et qui est le thème commun aujourd'hui: prendre une longueur d'avance et s'y prendre tôt pour protéger les habitats, tandis que l'occasion se présente d'agir pour la protection.
    Merci.
    Monsieur Armstrong, votre temps est écoulé.
    Monsieur Watson, vous avez la dernière question de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à nos témoins d'être ici aujourd'hui.
    J'ai bien du plaisir à assister à ceci, non seulement à titre de législateur, mais aussi un peu à titre de spectateur, parce qu'une partie de la discussion touche un large éventail de sujets. Nous avons parlé des parcs nationaux et pourtant, dans ma région — Essex, qui est le point le plus au sud où vous pouvez aller au Canada —, nous mesurons nos victoires en matière de restauration de l'habitat à une toute autre échelle. Nous mesurons cela en hectares à un chiffre, à deux chiffres ou à trois chiffres. Nous avons plus d'espèces végétales et animales en péril que partout ailleurs au Canada, et les problèmes auxquels nous faisons face sont assez graves. Donc, le résultat de tout ceci revêt réellement une grande importance.
    Les approches novatrices potentielles pour le gouvernement sont aussi dignes d'intérêt. Je me penche sur le pendant canadien du refuge faunique international de la rivière Détroit situé au sud-ouest du Michigan, pour savoir s'il s'agit d'une nouvelle approche qui peut être mise au point pour fournir de nouveaux outils à une région où la majeure partie du territoire est déjà utilisée pour l'agriculture, les municipalités et d'autres usages de ce genre. La restauration de l'habitat présente des défis importants étant donné la concurrence pour l'usage des terres.
    Je voudrais ramener la discussion sur ce dont le comité doit vraiment s'occuper. Et ceci est un examen de la loi. Ce n'est pas un examen des politiques et il ne s'agit pas de diverses autres choses. Nous nous penchons sur une loi précise et sur les recommandations de modifications qui doivent y être apportées, s'il y a lieu.
    J'étais préoccupé par une partie de l'entrée en matière de deux ou trois de nos collègues libéraux, qui ont presque sous-entendu que la LEP devrait être lancée par la fenêtre et qu'on devrait tout reprendre avec une nouvelle approche.
    Je veux simplement commencer par demander à nos témoins de dire, pour que cela figure au compte rendu, qu'ils sont d'accord pour dire que la structure fondamentale de la LEP est bonne et constitue un bon point de départ, puis nous poursuivrons avec les questions ultérieures.
    Je ne sais trop qui voudrait répondre en premier à cette question.
    Je vais commencer.
    Je pense que la structure fondamentale est bonne.
    M. Jeff Watson: D'accord.
    Même chose ici?
(1720)
    Oui. Je dirais que jusqu'à maintenant, les problèmes principaux ont été le manque de mise en oeuvre et le manque de politiques de soutien.
    Ici, à Vancouver, nous sommes d'accord.
    Merci.
    Donc, pendant que nous nous occupons de la fragmentation d'habitat, nous avons aussi affaire — je crois qu'il est juste de le supposer — à une fragmentation du processus. Je trouve qu'une des plus importantes sources de conflits, c'est de savoir de quelle façon nous pouvons avoir plus d'action et moins de processus, non? Certains dirigeants autochtones sont venus ici pour nous dire que nous avons besoin de plus de consultation et plus d'étapes en cours de route en ce qui concerne la participation des Autochtones. J'entends dire qu'à certains égards, les organisations non gouvernementales de l'environnement songent plutôt à réduire le processus.
    Pouvez-vous me donner un aperçu de la façon dont nous pourrions concilier les deux? Nous avons l'obligation, bien entendu, de consulter nos premières nations. Ils demandent qu'il y ait plus d'étapes en cours de route. De quelle façon allons-nous concilier cela avec le besoin de raccourcir le processus dans le but d'agir plus rapidement, par exemple? Pouvez-vous aider le comité à s'y retrouver un peu à ce sujet?
    Je pense que je vais seulement donner le premier coup, puis Keith et Susan pourront se joindre à moi.
    Deux ou trois fois, nous avons parlé des calendriers et aussi des consultations relatives aux calendriers. Je pense qu'on vous a fait part d'un certain nombre de recommandations selon lesquelles il faut fermer les portes de sortie de la LEP concernant le processus d'inscription. Cependant, nous reconnaissons que fixer un calendrier définitif pour les consultations avec les premières nations n'est pas dans notre champ de compétence.
    Je pense que ce que nous aimerions que la loi ou les politiques de soutien à la loi aient pour effet que le gouvernement fixe un calendrier de consultations clair et empreint de transparence. Pour certaines espèces, les consultations ont traîné en longueur. La question d'une espèce telle que le caribou de Peary, qui est reconnue comme une espèce en péril par le COSEPAC, est tout simplement prise dans un labyrinthe de consultations pour lequel nous ne voyons pas de calendrier précis.
     Keith ou Susan, je ne sais pas si vous avez quelque chose à ajouter.
    En tant que biologiste, j'ajouterais seulement que, dans une perspective biologique, le problème vient de ce que plus vous attendez pour consulter — c'est sûr qu'il est important de consulter, en particulier les premières nations —, plus vous manquez d'occasions, plus vous mettez nos espèces en péril et plus il sera coûteux et difficile au bout du compte de les rétablir. Quelles que soient les décisions prises quant au mode de consultation des premières nations ou de tout autre intervenant, le fait reste que de nombreuses espèces sont susceptibles de s'éteindre ou de dépasser le point où on peut efficacement les rétablir tandis qu'on attend interminablement les résultats de consultations pour les inscrire à la liste, qu'on attend pour identifier l'habitat essentiel, pour prendre des mesures de protection de cet habitat.
    D'accord.
    Je ne sais pas si vous avez eu la chance d'en parler?
    Je pense, très franchement, que Rachel a été on ne peut plus claire. Alors non, je ne crois pas qu'il y ait quoi que ce soit à ajouter.
    Monsieur le président, où en suis-je?
    Le président: Il vous reste le temps d'une très courte question.
    M. Jeff Watson: Savez-vous, je ne suis pas sûr d'avoir une courte question à poser. Il faudrait que je la formule, alors je m'en tiendrai là pour l'instant.
    Merci.
    J'ai deux ou trois questions à poser.
    Tout d'abord, je suis heureux de vous voir si résolus à protéger les espèces en péril et à vous assurer que nous identifiions l'habitant essentiel. Je vous remercie des connaissances que vous nous apportez à cet égard et de vos recommandations exhaustives.
    J'aimerais revenir sur ce que disait M. McGuinty au sujet de la rationalisation du processus, du fait que nous avons ce système consultatif à multiples niveaux. J'essaie seulement de me faire une idée, disons, de la manière dont nous pourrions rationaliser le système. Puisque nous devons commencer à penser à des recommandations sur la manière d'aborder tout le processus et de répondre à chacun des besoins exprimés tout en tenant compte de l'avis de tous ces conseils et sous-comités consultatifs, je voudrais seulement savoir s'il y a moyen de renforcer certaines organisations, comme le COSEPAC, ou s'il existe un modèle différent auquel nous devrions nous intéresser. Et, compte tenu de ce que vous savez de ce qui se passe à l'échelle internationale, peut-être y aurait-il un angle différent sous lequel étudier la question.
    Alors, je suis tout ouvert aux idées.
    Je vais répondre.
    Quand on regarde le COSEPAC a priori, je pense que vous avez tout à fait raison: il est bien doté en ressources, beaucoup de gens fantastiques s'y investissent et il fait son travail. Les lacunes apparaissent progressivement quand on creuse un peu plus loin — par exemple si on essaye de mettre en oeuvre quelque chose sans que rien ne soit même en vigueur.
    Je pense que la mise au point du processus qui s'impose commence une fois que les espèces... à coup sûr quand les espèces sont en fait inscrites à la liste et des mesures sont mises en oeuvre.
    Je pense que vous avez entendu aujourd'hui, du moins de plusieurs d'entre nous, ce que sont nos recommandations prioritaires pour y parvenir. Ce n'est rien de tranchant — du genre « voici ce qu'il faut faire aujourd'hui même » —, mais cela implique que le gouvernement fédéral entreprenne de tabler sur l'expérience à l'échelle mondiale et intègre le tout à un plan à mettre en oeuvre. C'est une question de finances. C'est tout simplement ainsi.
    Quand j'étais au Royaume-Uni, le gouvernement a investi une somme très importante sous forme d'ententes de gestion et d'indemnisation des détenteurs de tenure, pour tenir compte des valeurs sociales assez élevées en matière de biodiversité. Le fait que nous n'ayons encore rien de concret est signe pour moi que le Canada ne s'est pas encore vraiment attelé à cette tâche.
(1725)
    Je voudrais seulement ajouter que le rôle du gouvernement pourrait être notamment de faciliter le plus possible le rassemblement de tous ces intervenants.
    Dans une certaine mesure, fixer une échéance pourrait peut-être apaiser quelque peu l'inquiétude que vous cause le temps que cela prend, la longueur du processus, mais le plus important, c'est que, si les intervenants se rassemblent pour dialoguer, ce n'est alors pas seulement au gouvernement qu'il incombe de déterminer ce qu'il faut faire; on fait front commun pour tenter de trouver une solution.
    Je pense que c'est souvent ainsi que nous sommes le mieux parvenus à assurer la conservation. Il ne faudrait pas limiter cette démarche en disant que ce n'est pas du domaine du gouvernement.
    Quand le chef national de l'Assemblée des Premières Nations, Shawn Atleo, a comparu, il a préconisé l'exclusion de toutes les premières nations de la LEP, en disant qu'elles adopteraient leurs propres lois et règlements sur l'habitat essentiel et les espèces en péril.
    J'aimerais savoir ce que d'autres en pensent. Est-ce que quelqu'un veut tenter une réponse?
    Il y a évidemment des engagements que le Canada a pris à cet égard à l'échelle internationale, des conventions. Donc, quelqu'un doit en porter la responsabilité. Dans le Nord, que je connais le mieux, le Nord du 60e parallèle surtout, de bons processus très complexes sont en place pour prendre des décisions sages et intelligentes relativement aux espèces, mais d'après les évaluations qui figurent dans le registre du COSEPAC, il est très clair que quelque chose cloche. Alors, quelqu'un doit en prendre la responsabilité.
    Je ne peux pas dire ce que je pense être le mieux pour votre comité, mais il faut bien que quelqu'un assume la responsabilité à un moment donné. Il faut bien que quelqu'un corrige et redresse la situation que nous révèle la surveillance de la biodiversité.
    Est-ce que quelqu'un d'autre veut répondre à la question?
    Je pense qu'il ne faut pas oublier qu'une part disproportionnée du fardeau pèse sur certaines terres des premières nations à cause du manque de protection de ces mêmes espèces sur les terres provinciales qui sont en dehors des terres des premières nations. Je sais bien que les terres provinciales sont aussi, à bien des égards, les terres des premières nations, mais je pense qu'une mise en oeuvre appropriée du filet de sûreté au besoin et idéalement de mesures adéquates de protection par les provinces où se trouvent ces espèces allégerait dans une certaine mesure le fardeau disproportionné qui pèse sur les terres des premières nations et pourrait faciliter l'application de LEP.
    Je vous remercie.
    Je pense que c'est à peu près tout le temps que nous avions. De plus, mon rhume commence à prendre de la vigueur.
    Monsieur Gaudet.

[Français]

    J'aimerais poser une brève question, monsieur le président.
    Un peu plus tôt, M. Woodworth a parlé d'une somme de 225 millions de dollars. Combien reste-t-il d'argent dans ce programme qui a été établi en 2006? Je ne suis pas obligé d'avoir une réponse cet après-midi, mais elle pourrait être envoyée à la greffière afin que l'on puisse en prendre connaissance.
    Merci.

[Traduction]

    Monsieur McGuinty.
    À ce propos, monsieur le président, j'aimerais bien avoir un résumé de ce programme et de sa prolongation. Il me semble que ce programme a été lancé il y a une dizaine d'années. Je crois que M. Woodworth a négligé de préciser que c'était sous le régime du premier ministre Paul Martin. Il serait important d'examiner l'investissement dans son intégralité, pas seulement l'investissement sur 52 mois. Il serait utile de retourner jusqu'au début du programme.
    Nous obtiendrons ces renseignements.
    Là-dessus, je remercie de nouveau les témoins pour leur apport et pour l'excellent débat que nous avons eu aujourd'hui. Nous poursuivrons nos discussions.
    Je tiens à rappeler à Mme Plotin et à toutes les ONG que, si vous voulez vous réunir avec l'industrie et soumettre ensemble une série de recommandations, celles-ci devront nous parvenir d'ici le 6 mai.
    Je suis prêt à accepter une motion d'ajournement, et ensuite vous pourrez discuter à votre guise.
    Je la propose.
    Nous avons terminé.
    La séance est levée.
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