Passer au contenu

SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document







CANADA

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 062 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 24 mars 2011

[Enregistrement électronique]

(0850)

[Traduction]

    Bonjour tout le monde, et bienvenue.
    La 62e séance du Comité permanent de la sécurité publique et nationale, du jeudi 24 mars 2011, est ouverte.
    La première heure sera consacrée à l'examen du budget supplémentaire des dépenses du ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile.
    L'honorable Vic Toews, ministre de la Sécurité publique, comparaît devant le comité pour répondre à nos questions sur ce budget. Il est accompagné des cadres supérieurs des organismes de son portefeuille, qui sont William Baker, sous-ministre de la Sécurité publique, Rod Knecht, sous-commissaire supérieur de la Gendarmerie royale, Cathy Monroe, vice-présidente de la Direction générale des programmes de l'Agence des services frontaliers du Canada, et Don Head, commissaire du Service correctionnel du Canada. Nous avons aussi Laura Danagher, sous-directrice, Administration, du Service canadien du renseignement de sécurité, et Harvey Cenaiko, président de la Commission nationale des libérations conditionnelles.
    Le ministre fera sa déclaration liminaire et répondra ensuite aux questions des députés, avec ses collaborateurs.
    Monsieur le ministre Toews, bienvenue à nouveau devant le comité. Vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président, membres du comité. Je suis content d'avoir l'occasion de vous rencontrer encore une fois, pour discuter du budget des dépenses du portefeuille de la Sécurité publique.
    Il me fait plaisir d'être accompagné aujourd'hui du sous-ministre de la Sécurité publique Canada, William Baker, ainsi que de membres de la haute direction de cet organisme du portefeuille de la Sécurité publique, soit l'Agence services frontaliers du Canada, le Service canadien du renseignement de sécurité, le Service correctionnel du Canada, la Commission des libérations conditionnelles et la Gendarmerie royale du Canada.
    Vous avez devant vous le Budget principal des dépenses pour l'exercice 2011-2012, qui prévoit une augmentation de 797,4 millions de dollars dans le cas des dépenses du portefeuille pour l'exercice 2010-2011. Vous avez également devant vous le Budget supplémentaire « C », qui demande l'approbation des fonds de 48,5 millions de dollars dans le cas des dépenses du portefeuille pour l'exercice 2010-2011. Ces budgets ne tiennent pas compte des initiatives annoncées dans le budget de 2011.
    La prochaine phase du Plan d'action économique du Canada tient compte de l'importance de maintenir la sécurité de nos collectivités en investissant dans la prévention de la criminalité et le système de justice, notamment grâce aux nouvelles mesures budgétaires suivantes : un investissement de 20 millions de dollars sur deux ans dans des programmes de prévention de la criminalité chez les jeunes; un investissement de 30 millions de dollars additionnels sur deux ans dans le Programme des services de police des Premières nations, qui vient appuyer les corps policiers en place; la confirmation de l'engagement du gouvernement envers la Politique sur le refus de refuge au Canada, dans le cas des personnes responsables de crimes de guerre, de crimes contre l'humanité ou d'actes de génocide, grâce à un financement de 8,4 millions par année par la suite; l'octroi de 26 millions de dollars sur deux ans à l'appui de l'ombudsman fédéral des victimes d'actes criminels, afin de favoriser l'accès et la participation des victimes au système de justice; un financement de 20,9 millions de dollars pour continuer la suspension des droits de renouvellement des permis d'armes à feu, pour toutes les catégories d'armes à feu, de mai 2011 à mai 2012; et une contribution annuelle de 1,6 million de dollars afin d'appuyer l'amélioration de la sécurité dans les collectivités aux prises avec des crimes motivés par la haine.
    Ce ne sont là que quelques-uns des points saillants du budget de cette semaine, qui témoignent de l'engagement continu de notre gouvernement à protéger la sécurité de tous les Canadiens.
    Le Budget principal des dépenses de 2011-2012 prévoit des ressources pour les opérations quotidiennes du portefeuille tout au long de l'exercice financier, conformément à l'engagement continu de notre gouvernement pour ce qui est de continuer à assurer la sécurité des collectivités pour tous les Canadiens.
    Par ailleurs, ces fonds seraient investis de façon prudente pour offrir à Service correctionnel Canada et à la Commission nationale des libérations conditionnelles les ressources nécessaires pour appliquer la Loi sur l'adéquation de la peine et du crime et la Loi sur la lutte contre les crimes violents.
    Pour permettre à la GRC de répondre à la demande accrue en matière de services de police dans les provinces, territoires, municipalités et collectivités des Premières nations tout en réalisant ou en renouvelant un certain nombre d'initiatives pour lutter contre les activités de groupes du crime organisé, ainsi que d'autres groupes qui menacent la sécurité des Canadiens.
    Pour renforcer la capacité de l'ASFC de protéger nos frontières tout en accélérant les mouvements transfrontaliers des personnes et des marchandises et pour permettre à l'Agence d'appuyer l'intégrité des programmes d'immigration et de protection des réfugiés du Canada en adoptant la Loi sur des mesures de réforme équitables concernant les réfugiés.
    Pour respecter l'engagement que nous partageons tous, selon moi, et qui consiste à protéger l'infrastructure numérique du Canada contre les menaces actuelles et naissantes en matière de cybercriminalité en offrant des ressources nécessaires pour la mise en oeuvre de la Stratégie de cybersécurité du Canada, annoncée par notre gouvernement en septembre.
    Les efforts déployés pour lutter contre le crime nécessiteront plus d'argent. Nous comprenons que l'emprisonnement des criminels dangereux engendre des coûts. Et les Canadiens et les Canadiennes sont d'accord avec notre gouvernement. Il s'agit là du prix à payer pour veiller à ce que les criminels dangereux ne fassent pas de nouvelles victimes ou terrorisent d'anciennes victimes. Nous voulons faire en sorte que Service correctionnel Canada dispose des ressources nécessaires pour garder les criminels dangereux derrière les barreaux et faire en sorte que nos méthodes et notre infrastructure soient à la hauteur pour lutter contre les nouvelles formes de criminalité et même qu'elles prennent le pas sur celles-ci.
    La protection des Canadiens doit avoir la priorité. Les victimes nous l'ont dit à maintes reprises, la libération hâtive des criminels engendre des coûts beaucoup plus élevés que le fait de les garder derrière les barreaux. Comme vous le savez peut-être, dans un récent rapport, le ministère de la Justice évaluait à 99,6 milliards de dollars le coût total de la criminalité pour la population canadienne en 2008. Je suis très heureux que les membres Conservateurs de ce comité aient récemment écrit au directeur parlementaire du budget pour lui demander de faire une étude du coût socio-économique de la criminalité pour les victimes, les gouvernements et nos collectivités. Je conviens avec mes collègues du comité qui s'agit là de questions n'ayant pas fait l'objet d'une attention et d'une analyse adéquates.
    Notre gouvernement est conscient de la réalité et il est prêt à prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que Service correctionnel du Canada dispose des outils dont il a besoin. Le Budget principal des dépenses pour l'exercice 2011-2012 prévoit une augmentation du budget de Service correctionnel du Canada de l'ordre de 521,6 millions de dollars, dont 458 millions de dollars pour la mise en oeuvre de la Loi sur l'adéquation de la peine et du crime et un montant supplémentaire de 19,6 millions de dollars pour la mise en oeuvre de la Loi sur la lutte contre les crimes violents.
    Par ailleurs, le Budget principal des dépenses de 2011-2012 prévoit une augmentation du budget de la Commission nationale des libérations conditionnelles de l'ordre de 2,8 millions de dollars, dont 1,6 million de dollars, qui représente le tiers des six augmentations annuelles associées à la Loi sur l'adéquation de la peine du crime du gouvernement fédéral. Les Canadiens nous ont dit qu'ils veulent se sentir en sécurité dans leurs rues et dans leurs collectivités. Ils nous ont dit qu'ils aimeraient que les services de police disposent des ressources nécessaires pour accomplir leur travail. Ils nous ont dit qu'ils veulent des conséquences et des peines plus sévères pour les crimes graves, surtout les crimes violents commis avec une arme. Ils nous ont dit qu'ils aimeraient que les contrevenants soient tenus pleinement responsables de leurs gestes. Et ils nous ont dit qu'ils voulaient que les intérêts des victimes passent avant ceux des contrevenants. Et c'est ce que notre gouvernement fait.
    Nous collaborons avec les Canadiens pour rétablir la confiance dans notre système de justice. Nous avons tous été très occupés au cours de la présente session parlementaire. Ainsi, nous avons déposé le projet de loi S-13, c'est-à-dire la Loi visant à assurer la sécurité des Canadiens (protection des frontières), mieux connu sous le nom « Shiprider ». Cette loi est importante puisqu'elle permettrait à des membres désignés des organismes d'application de la loi du Canada et des États-Unis d'exercer leurs fonctions ensemble, à bord de navires, dans les eaux frontalières, et de poursuivre les criminels qui essayent d'exploiter les lacunes en matière d'application de la loi dans les eaux frontalières.
    Nous avons travaillé fort pour faire adopter le projet de loi C-42, la Loi modifiant la loi sur l'aéronautique, une loi importante et vraiment nécessaire dans le cas des voyageurs canadiens étant donné qu'elle permettra aux compagnies d'aviation canadiennes de continuer d'accéder à des destinations du Sud de façon aussi rentable et opportune que possible. Et cette loi nous permettra de continuer à établir un équilibre approprié entre le respect des lois internationales et la protection des droits des Canadiens.
    Nous avons procédé à des réformes en ce qui a trait au système de libération conditionnelle, pour veiller à ce que la Commission nationale des libérations conditionnelles jouisse des pouvoirs nécessaires pour déterminer si le fait d'accorder une libération conditionnelle risque de réduire la confiance dans l'administration de la justice.
    Nos enfants ont le droit d'être protégés contre les délinquants sexuels et c'est pourquoi je suis très fier que nous ayons travaillé en vue de l'adoption d'une loi pour améliorer le Registre national des délinquants sexuels et la Banque nationale des données génétiques, de façon à ce que tous les délinquants sexuels soient enregistrés auprès de la police.
    La lutte contre la criminalité reste l'une des principales priorités de notre gouvernement, et c'est pourquoi nous avons également adopté récemment une loi pour combattre le crime abject que constitue l'introduction de clandestins. En fait, il s'agit là d'une préoccupation majeure de notre gouvernement. Nous avons besoin de l'aide de tous les députés pour adopter des mesures fermes mais raisonnables pour empêcher l'introduction de clandestins et l'abus de notre système d'immigration, juste et accueillant.
    Nous avons récemment adopté des mesures raisonnables pour éviter que les escrocs, les fraudeurs et les trafiquants de drogue soient libérés automatiquement après avoir purgé seulement un sixième de leur peine d'emprisonnement.
    Enfin, notre Loi sur la justice pour les victimes d'actes de terrorisme a été adoptée au Sénat, et nous avons annoncé une nouvelle technologie de la GRC qui contribuera à réduire les délais d'attente concernant la vérification policière des intervenants auprès des plus vulnérables de notre société, comme les entraîneurs de hockey et les professeurs.
    La protection de nos collectivités est une priorité de notre gouvernement et je sais que c'est une priorité du Comité. Nous avons pris diverses mesures pour respecter notre engagement. Nous continuerons de le faire et j'envisage avec plaisir la possibilité de collaborer avec le Comité au cours des prochains mois en vue de l'adoption d'une série de mesures visant à protéger les Canadiens.
(0855)
    Je suis maintenant prêt à répondre aux questions, monsieur le président.
    Merci beaucoup, monsieur le ministre.
    Nous passons au premier tour de questions.
    Je rappelle aux membres du comité qu'il y a actuellement beaucoup de spéculations dans la presse au sujet de cette législature. Certains esprits peuvent s'échauffer. Assurons-nous cependant que toutes les questions et réponses sont adressées au président du comité afin d'assurer la bonne tenue de ces délibérations. C'est généralement comme cela que se déroulent nos travaux et je souhaite que cela continue.
    C'est le Parti libéral qui va entamer la période des questions, pour sept minutes.
(0900)
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur le ministre.
    J'aimerais faire un bref rappel historique, monsieur le ministre, au sujet de questions financières, ce qui est l'élément central du budget dont nous sommes saisis. Il y a à peu près deux ans, j'avais demandé au directeur parlementaire du budget d'examiner le coût de tous les projets de loi ayant une incidence sur l'incarcération, et il avait accepté d'entreprendre cette étude. Depuis lors, la seule réponse que j'ai obtenue de son bureau est qu'il ne recevait absolument aucune coopération de la part de vos services ou de Service correctionnel Canada. De fait, la situation était tellement mauvaise qu'il devait consacrer un tiers de son personnel et toutes sortes de ressources à l'élaboration de modèles statistiques pour recréer les données qu'on refusait de lui fournir. La justification était qu'il s'agissait d'informations confidentielles du Cabinet.
    Étant donné que le directeur parlementaire du budget a été empêché de faire son travail et que le Parlement n'a pu obtenir le coût des projets de loi, nous avons dû prendre d'autres mesures.
    Mon souci, monsieur le président, est qu'il a fallu que le président de la Chambre affirme que cette attitude était complètement inacceptable, c'est-à-dire que vous ne pouvez empêcher le Parlement ou les Canadiens d'avoir accès à cette information. Malgré cela, nous n'avons pas encore obtenu les documents voulus. Un comité parlementaire a adopté une motion d'outrage au Parlement et, aujourd'hui encore, près de deux ans après la demande… Avec 18 projets de loi en cours d'examen, le directeur parlementaire du budget nous dit que plus de 55 p. 100 des données sont encore manquantes.
    Ma question est simple : comment pouvez-vous demander aux législateurs de voter sur des projets de loi dont ils ne connaissent absolument pas le coût? Comment pouvez-vous vous attendre à ce que les Canadiens évaluent les priorités relatives du gouvernement quand on leur dissimule l'information et qu'on ne leur permet pas de connaître la vérité? Pourquoi, monsieur le ministre, refusez-vous de fournir les documents demandés, refusez-vous de coopérer avec le directeur parlementaire du budget, et refusez-vous de dire la vérité sur ces coûts?
    Merci, monsieur Holland.
    Je vous rappelle de vous adresser au président du comité quand vous posez vos questions.
    Monsieur le ministre.
    Merci, monsieur le président.
    Il a évidemment été très clairement indiqué aux membres du comité et à tous les parlementaires que je ne partage pas cette analyse et que je conteste cet historique.
    Ce qui a aussi été très clairement indiqué par le conseiller juridique de la Chambre, c'est que, si les députés ne sont pas satisfaits de l'information qui leur est fournie, leur recours ultime est de voter contre les projets de loi. Or, les députés ont voté en faveur de la plupart de ces projets de loi, ce qui signifie qu'ils ont à l'évidence considéré qu'ils avaient suffisamment d'informations pour prendre leurs décisions.
    En ce qui concerne les détails, j'invite le président de la Commission à vous parler de la coopération de son bureau avec le directeur parlementaire du budget.
    Monsieur Head.
    J'apprécie l'offre, monsieur le président, mais c'est au ministre que je pose la question car, en réalité, ce n'est pas moi ni le Parlement qui avons un problème avec les chiffres, c'est...
    La question a été posée et nous sommes prêts à y répondre.
    Non, monsieur le président, il…
    Je vous ai donné deux minutes pour votre question et le ministre a pris 40 secondes pour répondre. Il a demandé à M. Head... Je vais m'efforcer d'accorder autant de temps aux réponses qu'aux questions.
    Très rapidement, monsieur Head.
    Merci, monsieur le président.
    En ce qui concerne l'information que nous avons fournie au directeur parlementaire du budget, c'était toute l'information publiquement disponible à ce moment-là.
    J'ai ensuite rencontré le directeur parlementaire du budget et nous avons eu certaines discussions sur ses méthodologies et sur les nôtres. Nous avons prévu des réunions dans un avenir très proche pour parler de la manière dont nous allons formuler les hypothèses et élaborer les modèles de coûts qui y sont associés.
(0905)
    Merci, monsieur Head.
    Monsieur Holland.
    Pour que tout soit bien clair, monsieur le ministre, le problème ne concerne pas les coûts qui ont été fournis. Le problème est qu'aucun coût n'a été fourni.
    Prenons l'examen expéditif de la libération conditionnelle. Nous avons demandé, très simplement, à savoir combien cela coûterait. Devant ce comité, on nous a dit qu'on ne peut pas nous le dire parce que c'est une information confidentielle du Cabinet. Toutefois, chose étonnante, nous avons reçu un chiffre le lendemain de l'adoption. Cependant, on nous a dit à ce moment-là qu'on n'était pas vraiment sûr qu'il était exact et qu'on étudiait encore la question.
    Et je parle ici d'un projet de loi adopté.
    Quand vous parlez de coopération, je dois dire très respectueusement que les informations très simples sur le nombre de têtes de pipe, les projections d'effectifs, devraient être évidentes et facilement disponibles. Ma question est très simple. Au sujet d'un seul projet de loi, nous avons plus de 150 pages du directeur parlementaire du budget. Je n'ai jamais rien vu qui réfute de manière sérieuse ou valide ce qu'il y a dans ce document. Je me demande pourquoi le ministre refuse de remettre les plus de 55 p. 100 de documents dont le DPB dit avoir besoin pour faire son travail. Ne comprend-il pas que le législateur ne peut porter de jugement sur les projets de loi s'il refuse de lui donner les chiffres, puisqu'on ne nous les donne pas du tout, et si le directeur parlementaire du budget dit ne pouvoir accorder absolument aucune confiance à l'information parce qu'il lui en manque plus de 55 p. 100, plus de deux ans après le lancement de ce processus?
    Je vais essayer de répondre et je laisserai M. Head compléter ma réponse. Vous avez posé plusieurs questions, quatre ou cinq si j'ai bien compris.
    La première concerne le fait qu'il est difficile de calculer le coût de n'importe quel texte de loi sur la criminalité. Nous en avons déjà beaucoup parlé lors d'une autre séance de comité, la semaine dernière. Ce n'était pas devant ce comité-ci mais devant celui de la procédure. Si mon savant collègue veut vraiment connaître les réponses aux questions qu'il a posées, les mêmes ont été posées à ses collègues la semaine dernière.
    Prenons un exemple simple. Mon personnel du Service correctionnel, le président de la Commission, a estimé que, par suite de la Loi sur l'adéquation de la peine et du crime, environ 1 300 nouveaux prisonniers entreront dans le système cette année. En fait, le nombre est de 500. Le Service correctionnel a tenté avec diligence de cerner exactement quelle serait l'incidence du projet de loi. Il y a toutes sortes de modèles de calcul des coûts. Le problème n'est pas qu'on n'a pas fourni d'informations, le problème est qu'il est souvent difficile, voire impossible, de faire ce genre de calcul.
    De même, tenter d'établir le coût de la législation… Par exemple, lorsque mon collègue le ministre de la Justice a aboli la clause de la dernière chance, c'est-à-dire le droit de demander la libération conditionnelle après avoir purgé 15 ans d'une peine d'incarcération à vie pour meurtre, il a été très difficile de calculer ce que serait le coût dans 15 ou 25 ans.
    Merci, monsieur le ministre.
    Nous passons maintenant au Bloc Québécois. Madame, vous avez sept minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
     Bonjour, monsieur le ministre, bonjour messieurs.
     Monsieur le ministre, je voudrais vous faire part d'une préoccupation au sujet de laquelle j'ai été informée. Le comité a tenu une réunion à ce sujet le 15 février 2011, donc très récemment. Nous avons demandé aux Services des sciences judiciaires et de l'identité de la GRC de nous rendre des comptes. J'ai posé une question à M. Henschel — et M. Knecht, de la GRC, pourra probablement répondre également — sur le fait qu'on estimait que 10 à 40 p. 100 des infractions criminelles ne seraient jamais enregistrées dans la banque d'antécédents judiciaires, donc que des casiers judiciaires ne seraient pas enregistrés. Il m'a répondu qu'il ne le savait pas. Je me suis donc demandé s'il existait des outils de contrôle...
(0910)

[Traduction]

    Il y a un rappel au règlement, madame Mourani.
    J'invoque le règlement parce que le ministre et ses collaborateurs sont ici pour parler du budget principal des dépenses et que cette question n'a rien à voir avec cela. C'est une question dont nous avons déjà débattu il y a un certain temps.
    Le président : Merci, monsieur Mackenzie... [Inaudible]
    Madame Mourani, je vous invite à ne pas vous écarter du sujet.

[Français]

    Merci.
    Monsieur le ministre, je continue donc.

[Traduction]

    Veuillez m'excuser, monsieur le président, j'invoque le règlement pour une précision.
    Si je ne me trompe, lorsque le ministre comparaît au sujet de son budget des dépenses, nous pouvons l'interroger sur tout ce qui concerne son portefeuille, la sécurité publique. Dans sa déclaration liminaire, le ministre a évoqué maintes choses qui n'ont rien à voir avec le budget des dépenses, comme le projet de loi sur le pardon. Toutes sortes de choses. Il me semble donc important de préciser clairement que nos questions n'ont pas être limitées au budget des dépenses. C'est une tradition absolument établie au sein de ce Parlement, c'est-à-dire que nous pouvons poser des questions sur tout le portefeuille.
    Monsieur Davies, je pense que ma réponse était assez claire et que j'accorderai beaucoup de latitude pour les questions, et peut-être même pour les réponses. Vous avez raison de dire que le thème de la séance est très large. Cependant, je répète que nous somme ici pour étudier le budget des dépenses.
    Veuillez poursuivre, madame Mourani, je vous donnerai du temps supplémentaire.

[Français]

    Monsieur le président, j'espère que le temps consacré à ces débats n'est pas soustrait de mon temps. D'accord. Merci.
    Comme je vous le disais, M. Henschel m'a répondu qu'il n'y avait pas d'outils de contrôle pour mesurer les taux de casiers judiciaires non inscrits dans la banque d'antécédents judiciaires et qu'il n'y avait aucun rapport sur le rendement. Compte tenu que, depuis cinq ans, votre gouvernement nous répète sans cesse être pour la loi et l'ordre, je vous avoue, monsieur le ministre, avoir été extrêmement inquiète quand la GRC nous a dit que 1,1 million de demandes n'étaient pas informatisées. J'ai aussi été extrêmement inquiète d'entendre dire qu'il n'y avait pas d'outils de contrôle.
    J'ai donc fait une demande d'accès à l'information auprès de la GRC parce que j'avais beaucoup de difficulté à croire cela. J'ai reçu de la GRC une réponse que je voudrais vous soumettre. On m'a dit clairement que je devrais débourser 40 375 $, ce qui représente 4 042 heures et 30 minutes — même les 30 minutes ont été calculées —, pour qu'on puisse me dire combien de dossiers étaient en retard et quelle était la durée des retards. Cela veut dire, monsieur le ministre, que la GRC ne sait pas combien de dossiers sont actuellement en retard et quel est l'impact de ces retards sur la sécurité publique.
     Est-ce que votre ministère a fait une enquête et des demandes à ce sujet? Prévoyez-vous consacrer des ressources financières à cet égard si cela s'avère nécessaire?

[Traduction]

    Ce n'est pas mon ministère, c'est le ministère du ministre, mais les questions peuvent être adressées au président.
    À vous la parole, monsieur le ministre.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je demande à la GRC de répondre à la question mais je tiens à faire une remarque. S'il s'agit du temps nécessaire pour rassembler l'information, vous pouvez comprendre que c'est très complexe et que ça prend beaucoup de temps.
    Je laisse cependant la GRC vous répondre.
    Il y a un arriéré dans les dossiers judiciaires. Quiconque est condamné pour un acte criminel ou est accusé en vertu d'une procédure double ou pour un acte criminel doit produire ses empreintes digitales. Dans la plupart des cas, elles sont prises manuellement. Nous travaillons actuellement sur une technologie qui nous permettrait de le faire électroniquement afin d'accélérer le processus. Elle n'est pas encore au point. Nous avons un arriéré et, dans certains cas, nous devons faire des recherches manuellement dans les dossiers.

[Français]

     Je voudrais savoir le nombre de retards. J'ai posé cette question et on m'a dit ne pas être en mesure d'y répondre. Peut-être pouvez-vous le faire, monsieur Knecht.

[Traduction]

    Je peux vous dire qu'il y a un nombre élevé de dossiers qui n'ont pas été traités électroniquement, ce qui contribue à l'arriéré. Je n'ai pas le chiffre exact. Je dirais que c'est dans les milliers.

[Français]

    Est-ce à dire qu'à l'heure actuelle, environ un million de casiers judiciaires ne sont pas enregistrés dans le CPIC?
(0915)

[Traduction]

    Je le répète, je ne connais pas le chiffre exact mais il est très élevé. Nous déployons beaucoup d'efforts pour permettre le traitement électronique, comme dans le cas des processus d'identification en temps réel. À l'avenir, nous pourrons faire ça en quelques minutes, pas en quelques jours.

[Français]

    Ce qui veut dire qu'actuellement, un policier, où qu'il soit au Canada, pourrait ne pas voir certains casiers judiciaires lorsqu'il cherche dans le système.

[Traduction]

    Ce potentiel existe. Dans certains cas, les dossiers ne sont pas dans le système et ne seront donc pas disponibles quand un agent de police interrogera le système.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur.
    Ma prochaine question est pour le ministre de la Sécurité publique.
    Monsieur le ministre, vous avez pris la décision de fermer des postes frontaliers. Les postes de Franklin Centre, Jamieson's Line, Big Beaver, Morses Line et East Pinnacle seront réduits. On parle d'économies pour Franklin Centre de 500 000 $, pendant que le vis-à-vis américain investit des millions de dollars pour remettre à neuf Churubusco, qui est le poste frontalier américain d'en face.
    Vous avez dit dans votre allocution que vous vouliez renforcer la capacité de l'ASFC pour protéger nos frontières. Or, lorsque vous fermez des postes frontaliers ou diminuez des heures aux postes frontaliers, vous ne participez pas à protéger nos frontières.
    Qu'en pensez-vous? Allez-vous suspendre votre décision, monsieur le ministre?

[Traduction]

    Merci, madame Mourani.
    Votre temps de parole est écoulé mais nous pouvons entendre la réponse.
    Nos pratiques de recrutement, et le recrutement de quelque chose comme 10 à 20 p. 100 de gardes supplémentaires aux frontières, témoignent de notre engagement envers la sécurité.
    Toutes les décisions concernant les heures d'ouverture des bureaux frontaliers sont analysées par les agents locaux de l'Agence. Ce sont eux qui déterminent non seulement si cela répond assure la sécurité publique mais également si c'est rentable pour le contribuable. Certains de ces bureaux voient passer moins d'une douzaine de quidams par jour.
    L'ASFC gère les services frontaliers et, généralement, c'est la GRC qui patrouille la frontière. Nous n'avons pas seulement renforcé nos services frontaliers, nous avons aussi augmenté le nombre d'agents de la GRC. Nous prenons la frontière très au sérieux.
    Merci beaucoup, monsieur le ministre.
    Monsieur Davies, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur le ministre, j'apprécie ce que vous dites sur la difficulté du calcul du coût de certains de vos projets de loi, mais je voudrais vous soumettre un scénario qui...
    Je suppose que vous vous adressez au président.
    Par votre intermédiaire, monsieur le président, je voudrais soumettre au ministre un scénario qui s'est en réalité produit ici même il y a à peu près trois semaines. Nous étions ici un mardi pour étudier le projet de loi qui mettrait fin à la libération conditionnelle accélérée. Nous avions votre sous-ministre à qui nous avons demandé combien coûterait ce projet de loi. Elle nous a dit qu'elle ne pouvait pas nous le dire parce que c'était une information confidentielle du Cabinet. C'était le mardi.
    Le mercredi, le projet de loi est passé en troisième lecture. Nous avons voté et il a été adopté sans qu'on en connaisse le coût. Le jeudi, vous-même et M. Head étiez à nouveau ici, dans cette salle, et vous nous avez dit que le coût était de 40 millions de dollars.
    C'était moi et M. Head, pas le président et M. Head.
    Continuez à vous adresser au président, monsieur Davies.
    Monsieur le président, le ministre était dans cette salle avec M. Head, le jeudi, et il a dit que le projet de loi coûterait 40 millions de dollars.
    S'il connaissait cette information le jeudi, pourquoi ne l'a-t-il pas communiquée au comité et aux parlementaires le mardi, avant que nous soyons appelés à voter le mercredi soir et à dépenser les deniers publics sans savoir quel serait le coût? Pouvez-vous m'expliquer ça?
    Je ne saisis pas très bien la suite d'événements dont parle M. Davies, monsieur le président, mais je lui enverrai la réponse par écrit.
    Merci.
    Monsieur le président, 80 p. 100 des détenus de nos prisons fédérales ont une assuétude. Nous savons que la maladie mentale est un problème important et croissant dans nos prisons. Le gouvernement Conservateur a dit qu'il y a dans nos prisons des gens qui ne devraient pas s'y trouver parce qu'ils ont en fait des problèmes de santé. Pourtant, il n'y a rien dans ce budget sur l'accroissement des crédits pour le traitement de la santé mentale ou le traitement de l'assuétude.
    Étant donné que ces facteurs sont des causes primordiales de criminalité et que s'y attaquer est une manière absolument identifiée de réduire la récidive et de rendre nos collectivités plus sûres, pouvez-vous m'expliquer pourquoi?
(0920)
    Je peux vous parler de certaines des mesures prises par notre gouvernement, en matière de financement par exemple, que n'avait pas prises le gouvernement précédent pour s'attaquer aux problèmes de santé mentale. Nous avons consacré beaucoup de millions de dollars au problème de la santé mentale dans les prisons.
    C'est un problème qui existe dans les établissements provinciaux autant que fédéraux, monsieur le président, par suite du changement de politique dans les provinces il y a quelques années. J'étais avocat pour un gouvernement provincial lors de ces événements qui se sont essentiellement traduits par la fermeture d'établissements de santé mentale ou d'asiles, et par la mise à la rue des personnes concernées. Dans bien des cas, non seulement ces personnes se sont-elles retrouvées à la rue avec des problèmes de santé mentale, mais beaucoup sont devenues la proie de trafiquants de drogue, et l'on a alors eu un double problème de santé mentale et d'assuétude.
    Essentiellement…
    Quoi qu'il en soit, monsieur le président…
    Laissez-le finir.
    Essentiellement, ces individus se retrouvent alors dans le système carcéral provincial et dans les établissements fédéraux. Nous avons pris des mesures pour faire face à cette situation mais je pense que nous avons besoin d'une discussion plus vigoureuse avec les services provinciaux de santé mentale sur ce que serait une manière plus appropriée de traiter ces personnes. Les politiques de fermeture de ces établissements dans les années 1970 et 1980 n'ont pas porté fruit, très franchement, et ce que nous faisons…
    Je me dois d'intervenir, monsieur le président, car le ministre épuise mon temps de parole.
    Des voix : Oh!
    M. Don Davies : Je n'ai pas demandé un historique de la situation
    L'hon. Vic Toews : Non, mais…
    M. Don Davies : J'ai demandé…
    L'hon. Vic Toews : ... c'est très…
    M. Don Davies : ...pourquoi il n'y a pas le moindre sou dans ce budget…
    Monsieur Davies, veuillez laisser le ministre…
    Non. Le ministre épuise mon temps de parole avec ses longs soliloques sur ce qui s'est passé autrefois dans sa province.
    Un instant, s'il vous plaît, monsieur Davies.
    M. Don Davies : Je veux savoir…
    Le président : Monsieur Davies.
    Je veux savoir pourquoi il n'y a dans ce budget pas un dollar de plus pour la santé mentale ou l'assuétude. Voilà ma question. Je ne demande pas comment nous en sommes arrivés là.
    Merci, monsieur Davies.
    Très bien, la question est posée. Ce sera tout pour vous.
    Monsieur Toews, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup.
    Comme je le disais, on a vu apparaître un système parallèle de santé mentale à l'intérieur des prisons provinciales et à l'intérieur du système carcéral fédéral.
    En ce qui concerne les ressources que nous fournissons, M. Head peut en discuter, mais je peux vous assurer que c'est une somme d'argent importante sur plusieurs années.
    Merci, monsieur le président.
    Autrement dit, il n'y a pas de nouveaux crédits pour ça dans ce budget et je suppose que la réponse est que le ministre ne veut rien dire.
    J'aimerais maintenant parler aussi…
    Ce n'est pas vrai, monsieur le président.
    … du budget.
    Dans ce budget, monsieur le président, il n'y a strictement rien pour un seul nouvel agent de police dans aucune des municipalités du Canada.
    Je veux demander au ministre s'il pense qu'il y a suffisamment d'agents de police dans les grandes villes de ce pays?
    Le président : Merci, monsieur Davies.
    Voyons les mesures que nous avons prises au sujet de la police. En ce qui concerne la GRC, par exemple, nous venons d'avoir le taux le plus élevé de recrutement depuis plusieurs décennies, et nous avons aujourd'hui plus d'agents de police que jamais dans nos rues. Je n'ai pas les chiffres sous les yeux mais je les ai déjà mentionnés à d'autres occasions.
    De toute façon, monsieur le président, il ne s'agit pas seulement du nombre d'agents de police dans les rues. Il s'agit aussi de veiller à ce que les lois soient adaptées aux efforts que déploient ces agents de police. Avoir un certain nombre d'agents de police dans les rues ne sert strictement à rien si les individus arrêtés sont simplement remis en liberté le lendemain à cause des lois.
    Eh bien, monsieur le président, c'est là que nos avis divergent. Je pense que le nombre d'agents de police que nous mettons dans nos rues a de l'importance.
    Je constate aussi que le budget de la protection civile sera amputé de 26,1 millions de dollars, soit 5,9 p. 100. Étant donné les événements du Japon, avec les effets catastrophiques d'un tremblement de terre, et considérant que dans ma province, la Colombie-Britannique, où nous sommes situés sur une zone sismique… Et, en fait, le ministre avait dit qu'il y avait une alerte au tsunami mais elle a ensuite été annulée.
    Le ministre peut-il nous dire pourquoi il réduit de 26,1 millions de dollars le budget de la protection civile au moment où nous devrions plutôt l'accroître?
    Merci, monsieur Davies.
    Monsieur le ministre.
    Je veux apporter une correction, monsieur le président. Je n'ai jamais dit que le nombre d'agents de police dans les rues n'a pas d'importance. C'est très important. Ce qui est tout aussi important, et peut-être plus, c'est d'avoir des lois applicables qui permettent de garder vraiment les prisonniers derrière les barreaux.
(0925)
    Voulez-vous répondre à la question? Je vous en donnerai le temps.
    En ce qui concerne la question, je laisse M. Baker y répondre.
    Il est vrai, monsieur le président, qu'il y a dans le budget principal des dépenses une réduction des crédits de gestion des crises. Une partie de la réduction, 2 millions de dollars, représente en fait un ajustement technique. L'argent est transféré à Travaux publics et Services gouvernementaux mais il servira encore à la gestion des crises.
    Il y a également des dispositions d'expiration de certains projets qui n'ont pas à être prorogés. Le financement de base reste essentiellement le même. Il y a certaines mesures d'efficience résultant d'un examen stratégique que nous estimons pouvoir accepter sans compromettre aucunement notre fonctionnalité sur la gestion des crises.
    Merci beaucoup, monsieur Baker.
    C'est maintenant au tour de monsieur Lobb.
    Merci, monsieur le président.
    Merci au ministre et à tous ses collaborateurs.
    Ma première question, qui a été soulevée par M. Davies, concerne les dispositions d'aide financière en cas de catastrophe. C'est un volet important du budget principal et je me demande s'il y a quelque chose que le ministre ou M. Baker aimeraient ajouter à leur réponse précédente.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Sécurité publique Canada gère les dispositions d'assistance financière en cas de catastrophe au nom du gouvernement. Les provinces et les municipalités sont les premiers intervenants, si je puis employer cette expression, en ce qui concerne le coût des interventions et du rétablissement après une catastrophe naturelle. Les sommes peuvent ensuite être recouvrées au titre des AAFCC.
    Plusieurs amendements apportés aux AAFCC seront certainement bénéfiques à des régions comme ma propre province qui a connu une inondation. De fait, bon nombre de gens de ma circonscription de Winnipeg sont très préoccupés par les conséquences de cette inondation. Au moment où le Parlement devrait se concentrer sur des questions d'ordre très pratique, comme l'inondation au Manitoba, les partis d'opposition semblent malheureusement obnubilés par la tenue d'une élection. Donc, dans ma province du Manitoba, nous aurons une élection à cause de l'opposition, à un moment où, en qualité de ministre régional, je devrais concentrer toute mon énergie à la coordination des interventions avec la province pour faire face à une catastrophe.
    Pour ce qui est des détails, M. Baker peut s'en charger.
    Brièvement, monsieur le président, je crois qu'il est important de souligner que, quand on parle du budget affecté aux accords d'aide financière en cas de catastrophe, c'est essentiellement un montant théorique. Il est fixé à environ 100 millions de dollars chaque année mais tout dépend de la demande. Si nous recevons plus de demande pendant une année à cause d'inondations, d'ouragans ou de je ne sais quoi, nous demanderons des crédits supplémentaires au moyen d'un budget supplémentaire des dépenses.
    Je suppose que beaucoup de Canadiens, voire la majorité ou la totalité, conviendront que les criminels doivent être punis et doivent purger la peine qui leur est infligée. Toutefois, le corollaire de ce principe est qu'il faut d'abord essayer d'empêcher que ces gens empruntent la voie du crime.
    Je me demande si le ministre pourrait répondre sur le niveau de financement qui a été prévu pour le fonds de prévention de la criminalité des bandes de jeunes cette année, 2011-2012. Je pense qu'il est important d'essayer d'agir auprès de ces jeunes avant qu'ils commettent des actes criminels.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Pour répondre au député, c'est avec grand plaisir que j'ai entendu le premier ministre annoncer très récemment à Vancouver la prolongation de l'initiative contre la criminalité des bandes de jeunes, avec l'octroi des crédits nécessaires. Pour ma part, j'ai pu annoncer en Saskatchewan un certain nombre de projets communautaires importants concernant des personnes travaillant avec les jeunes pour éviter qu'ils se joignent à des gangs.
    Il est très intéressant que nous ayons pris un nombre record d'engagements en matière de financement de notre programme national de prévention de la criminalité. Les dépenses consacrées à ces programmes destinés à empêcher que des jeunes se joignent à des gangs et adoptent un mode de vie criminel représentent un engagement total de 40 millions de dollars pour le dernier exercice budgétaire. Comme je l'ai dit, c'est une somme record pour ce type d'initiative.
    Je suis très heureux de voir que ce genre d'initiative continue, et c'est avec plaisir que j'ai entendu le premier ministre annoncer la prolongation du programme à Vancouver. Je suis certain que tous les députés appuieront le budget qui permettra d'assurer ce type de financement pour aider les jeunes à rejeter un mode de vie criminel.
(0930)
    Merci, monsieur le ministre
    Monsieur Lobb, il vous reste deux minutes.
    Merci encore.
    J'ai une autre question concernant le programme des services de police des Premières nations. Je me demande si le ministre pourrait en dire un peu plus aux Canadiens sur ce programme, et dire combien d'argent y sera consacré durant le prochain exercice.
    Le programme des services de police des Premières nations est très important pour rehausser la sécurité publique dans les collectivités autochtones et inuites. Il existe depuis une vingtaine d'années. En fait, le budget de près de 17 millions de dollars du programme des services de police des Premières nations arrive à expiration le 31 mars 2011. Donc, le budget des dépenses de la sécurité publique représentera un retour au financement de base.
    Les crédits à court terme étaient destinés à assurer la pérennité des accords de police dans le cadre du programme des services de police des Premières nations et à analyser le programme en profondeur. Il y a 30 millions de dollars supplémentaires dans le budget de 2011 pour assurer le maintien des agents de police dans les rues, ce qui nous ramène peut-être à la question de M. Davies. C'est très important. Hélas, il semble que l'opposition soit décidée à rejeter le budget, ce qui veut dire que cette somme ne sera pas en place lorsque le financement arrivera à expiration le 31 mars.
    Vous avez 30 secondes pour conclure, monsieur Lobb.
    J'ai peut-être assez de temps pour une petite question sur le SCRS.
    Pouvez-vous nous dire comment son budget a évolué au cours des années, et nous parler aussi de l'efficacité de ces dépenses?
    Mme Danagher peut peut-être vous répondre très rapidement.
    L'augmentation de notre budget par rapport à 2010-2011 est très marginale. Elle est de 2,5 millions de dollars environ. Une bonne partie de cette somme concerne le financement d'intégrité de programme que nous avons obtenu dans le budget de 2010 pour certains projets spécifiques que le service mettra sur pied. Je ne peux pas vraiment vous donner de détails à cause des questions de sécurité en jeu, malheureusement. Nous avons également obtenu des fonds en 2007, par le truchement du budget, encore une fois pour résoudre certaines questions d'intégrité des ressources auxquelles le service était confronté.
    Depuis 2000, notre budget a augmenté de 134 p. 100 environ, en grande mesure à cause des événements du 11 septembre 2001. Nous avons aussi obtenu certaines sommes pour une tour de phase III sur notre campus de la rue Ogilvie, qui sera sur le point d'être achevée en avril.
    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant au deuxième tour.
    Madame Mendes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais vous demander, si possible, monsieur le président, de confirmer avec le ministre de la Sécurité publique qu'il a bien déclaré à la Chambre qu'il connaissait les chiffres et qu'il avait en main tous les coûts prévus au sujet des programmes et des projets de loi qu'il nous soumettait. Je vous demande cela parce qu'aujourd'hui, c'est seulement après le dépôt des projets de loi et leur approbation qu'on a su qu'on n'avait pas tous les détails ni qu'on était en mesure de les avoir.
    J'aimerais que le ministre nous explique cette incohérence de propos. Il affirme d'une part, qu'il a tous les chiffres en main, mais qu'il ne peut pas les partager avec nous, et d'autre part, il déclare, une fois que la loi est approuvée, qu'il n'est finalement pas tout à fait sûr de ses chiffres.

[Traduction]

    Merci beaucoup, madame Mendes.
    Monsieur le ministre.
    Dans la mesure où les chiffres sont disponibles, j'en ai une bonne idée. S'il y a des chiffres précis que la députée n'a pas, elle peut vous communiquer la question, monsieur le président, et les gens du ministère fourniront l'information.
(0935)

[Français]

    Monsieur le président, je rappelle au ministre que c'était une demande pour le projet de loi C-59. D'ailleurs, on ne le sait toujours pas encore aujourd'hui. Pour 55 p. 100 des projets de loi qui ont été déposés, nous ne disposons pas des chiffres afin de les étudier correctement.
    Par ailleurs, j'aimerais avoir quelques explications sur les compressions faites au Comité externe d'examen de la Gendarmerie royale du Canada.

[Traduction]

    Cela concerne-t-il la GRC et les plaintes du public?

[Français]

    Il s'agit d'une compression de près de 19 p. 100. J'aimerais qu'on m'explique pourquoi on réduit le budget de quelque chose qui semble d'une importance capitale pour plusieurs des acteurs concernés par la sécurité publique.

[Traduction]

    Allez-y.
    Je voulais parler du budget.
    Je ne suis pas au courant de ces coupures budgétaires et je demanderai à la GRC…
    S'agit-il d'un crédit particulier, madame Mendes, ou du budget global?
    Non, je vais vous le dire en anglais. Le crédit du comité d'examen externe de la Gendarmerie royale du Canada est amputé de 18,9 p. 100. C'est un crédit particulier.
    Cela concerne peut-être le processus de griefs, qui est un processus interne de…
    Le ministre devrait être au courant.
    Monsieur Baker.
    Il y a une diminution de 342 000 $, monsieur le président. C'est la fin d'un financement à court terme du comité d'examen interne qui avait toujours été considéré comme étant temporaire. Cette réduction est parallèle à une réduction de la taille de cette organisation du fait de l'entrée en vigueur du projet de loi C-43 en vertu duquel un nouveau régime de relations de travail sera établi à la GRC et le comité d'examen cessera d'exister. C'est une mesure transitoire qui s'explique par des changements organisationnels.
    Madame Mendes.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Je reviens sur la question de l'Agence des services frontaliers du Canada. On a entendu des témoignages qui nous donnaient des exemples concrets au sujet des effets économiques néfastes qu'aurait une telle compression pour les trois ou quatre postes frontaliers au Québec. On dit qu'il y a très peu de circulation dans ces postes frontaliers, mais elle est souvent de nature économique, que ce soit des camions ou du transport de marchandises.
    J'aimerais que le ministre, monsieur le président, puisse nous expliquer pourquoi il insiste sur l'importance de supprimer ces postes tandis que tous les témoins que nous avons entendus s'entendent pour dire qu'une bonne partie du commerce qui se fait entre l'est des États-Unis et l'est du Québec se fait via ces postes frontaliers.

[Traduction]

    Merci, madame Mendes.
    Monsieur le ministre.
    Selon mes informations… Je dois préciser, monsieur le président, qu'il s'agit là de décisions prises par les dirigeants locaux de l'ASFC en fonction du nombre d'usagers. Par exemple, Jamieson's Line, au Québec, qui est l'un des ports d'entrée qui seront fermés, voit passer en moyenne 12 personnes par jour et aucun véhicule commercial. Il y a 10 kilomètres plus loin un port d'entrée ouvert 24 heures par jour, sept jours sur 7. En ce qui concerne Franklin Centre, qui voit passer en moyenne 56 voyageurs par jour et trois véhicules commerciaux, il y a un poste frontalier ouvert en permanence 16 kilomètres plus loin, à Herdman. Finalement, il y a un poste frontalier à Big Beaver, en Saskatchewan, qui voit passer en moyenne cinq voyageurs par jour et aucun véhicule commercial. Il y a un poste 28 kilomètres plus loin qui est ouvert aux mêmes heures et qui peut répondre au besoin.
    Nous devons tenir compte de la manière dont ces postes frontaliers sont utilisés, et je crois que les contribuables conviendraient avec nous que ces décisions sont justifiées étant donné qu'il n'y a quasiment aucun trafic commercial et très peu de voyageurs qui passent par ces postes frontaliers et qu'il y a une autre solution pas beaucoup plus loin.
(0940)
    Votre temps de parole est écoulé.
    Merci beaucoup, madame Mendes.
    C'est maintenant au tour de M. Mackenzie, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci au ministre et à ses collaborateurs.
    Comme vous le savez, monsieur le président, le comité a consacré beaucoup de temps, à diverses occasions, à l'examen du coût et de la différence entre ce que le directeur parlementaire du budget a prévu et ce que nous ont dit des gens comme M. Head, lequel semble avoir une très bonne connaissance du coût de gestion des prisons.
    Si je me souviens bien, le directeur parlementaire du budget a mentionné un coût de plus de 300 000 $ par détenu, chiffre fondé sur les hypothèses de son modèle. J'aimerais demander à M. Head quel est le coût réel par détenu, selon le Service correctionnel du Canada. Je pense que la différence est notable. J'ai lu cette semaine dans un journal un article d'un universitaire indépendant qui pense que les hypothèses du directeur parlementaire du budget sont totalement erronées, ce qui signifie que les chiffres qui en découlent en matière de coûts le sont également. Monsieur Head pourrait-il nous dire quels sont les chiffres réels, par rapport à ce que nous avons ici?
    Merci, monsieur Mackenzie.
    Monsieur Head.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais donner au comité la ventilation des coûts par niveau de sécurité, par détenu en établissement carcéral, et par détenu supervisé dans la communauté.
    Sur une base annuelle, un détenu nous coûte 150 808 $ en sécurité maximum, 98 219 $ en sécurité moyenne, et 95 038 $ en sécurité minimum. Pour ce qui est de l'établissement des femmes, c'est 211 093 $. En ce qui concerne les ententes d'échange de services avec les provinces, le coût moyen est de 89 800 $. Donc, le coût moyen d'un détenu s'élève à 113 974 $.
    En centre correctionnel communautaire, un détenu coûte 66 993 $. En ce qui concerne un détenu en libération conditionnelle supervisée dans la communauté, le coût est de 27 455 $. Le coût moyen total d'un détenu dans la communauté est de 29 537 $. Le coût moyen total pour les détenus en établissement carcéral et les détenus dans la communauté s'élève à 93 916 $.
    Merci.
    Cela montre bien qu'il y a une grande différence avec les calculs du directeur parlementaire du budget, ainsi qu'avec les gros chiffres que l'opposition mentionne souvent en Chambre. Les chiffres qu'on vient de donner montrent bien que ces allégations ne sont pas justifiées.
    Passons maintenant à l'autre membre de l'équation. Certains de ces textes de loi sont en vigueur depuis une année, et certains le sont même depuis plus d'une année. M. Head nous a dit il y a quelques semaines que l'augmentation à laquelle on s'attendait ne s'est pas produite.
    J'aimerais lui demander s'il a des chiffres sur l'expérience acquise au bout d'une année d'application de la législation. Les chiffres sont-ils plus élevés, moins élevés ou les mêmes que ce qui était prévu? À mon avis, cela montre bien qu'il est difficile d'essayer de faire des prévisions sur l'incidence de la législation.
    Quoi qu'il en soit, M. Head peut-il nous donner des informations à cet égard?
    Merci, monsieur Mackenzie.
    Monsieur Head.
    Merci, monsieur le président.
    Comme l'a dit le ministre, nous avions prévu qu'il y aurait approximativement 1 300 détenus de plus la première année. Fin février, nous avons constaté qu'il y avait 520 détenus de plus qu'au même moment l'an dernier. Donc, la hausse réelle est inférieure à ce qui était prévu. Comme le ministre et moi-même l'avons déjà dit dans le passé, nous surveillons de très près l'évolution de cette situation, quotidiennement, hebdomadairement et mensuellement.
    Nos prévisions d'origine sur l'incidence du projet de loi C-25 ne se sont pas confirmées au niveau que nous avions prévu, comme le montrent les chiffres. Il se peut qu'il y ait une plus forte augmentation dans les mois à venir, mais ce ne sera peut-être pas le cas. Nous continuons de surveiller la situation de très près.
(0945)
    Je pense qu'il y a une autre chose importante que les Canadiens devraient savoir, et je suis sûr que M. Head pourra nous le confirmer. Quel est l'âge des établissements existants, qu'il faudra très certainement rénover ou remplacer à l'avenir?
    Très rapidement, monsieur Head, car nous sommes arrivés à la fin de cette session.
    En moyenne, nos établissements sont vieux de 40 ans. Le plus vieux date d'avant la Confédération. C'est le pénitencier de Kingston, qui date de 1835.
    Merci beaucoup.
    Je remercie le ministre et tous ses collaborateurs. Chaque fois que notre comité se penche sur le budget principal des dépenses ou les budgets supplémentaires, nous sommes très heureux de pouvoir interroger non seulement le ministre lui-même mais aussi les cadres supérieurs de son portefeuille.
    Merci encore.
    La séance est suspendue quelques instants avant d'entamer la deuxième session.
(0945)

(0950)
    Nous reprenons nos travaux. Veuillez reprendre place.
    Pendant la deuxième heure, nous allons continuer nos audiences sur le projet de loi C-23B, Loi modifiant la loi sur le casier judiciaire.
    Nous accueillons à ce sujet messieurs Randall Fletcher, spécialiste de la déviance sexuelle, et William Marshall, directeur de Rockwood Psychological Services.
    Nous avons aussi avec nous le chef de police adjoint de la police de Vancouver, Warren Lemcke.
    Je connais un autre Warren Lemcke et je pensais que c'était lui qui allait comparaître aujourd'hui. Je vois qu'il a un homonyme.
    Nous sommes très heureux de vous souhaiter la bienvenue, monsieur Lemcke.
    Je crois comprendre que vous avez tous une déclaration liminaire, après quoi nous passerons aux questions. Notre objectif est de mettre fin à cette session 10 à 15 minutes avant la fin de la séance car nous avons certaines questions d'ordre interne à régler.
    Monsieur Lemcke, comme c'est vous qui avez fait le plus long voyage pour venir nous rencontrer, c'est vous qui allez commencer. Vous avez la parole.
    C'est un plaisir d'être ici. C'est la première fois que je viens à Ottawa, une bien jolie ville.
    Bonjour, monsieur le président. C'est un honneur pour moi de m'adresser au comité au sujet d'un projet de loi susceptible d'avoir une incidence profonde sur la sécurité du public et sur la confiance de ce dernier, notamment les victimes, envers l'appareil judiciaire.
    La question de la réhabilitation des contrevenants suscite beaucoup d'intérêt dans la population depuis plusieurs années, et c'est évidemment l'origine de ce projet de loi.
     Il y a dans ce texte beaucoup d'éléments qu'approuvent les services de police du pays car ils nous aideront à protéger le public.
    Tout d'abord, remplacer « réhabilitation » par « suspension du casier » est important du point de vue des victimes. Les victimes peuvent subir les effets des actes criminels longtemps après que le coupable ait obtenu la réhabilitation ou une suspension de casier. Dans bien des cas, elles n'accorderaient jamais la réhabilitation au criminel.
    C'est une mesure très positive car la Commission nationale des libérations conditionnelles aura désormais beaucoup plus de pouvoir en matière d'octroi, de déni ou de révocation de la suspension de casier.
    En ce qui concerne l'allongement de la période d'inadmissibilité et les préoccupations soulevées à ce sujet, il convient de rappeler que, même si l'on recommande dans le projet de loi une période de carence de cinq ans pour les infractions punissables par procédure sommaire et de 10 ans pour les infractions punissables par mise en accusation, il y a deux autres périodes du fait de l'utilisation d'absolutions inconditionnelles ou conditionnelles : une année pour l'absolution inconditionnelle, et trois années pour l'absolution conditionnelle, où les casiers sont automatiquement expurgés, soit immédiatement, soit après une période de probation terminée avec succès. Bon nombre de ces sentences sont infligées spécialement aux primodélinquants afin qu'ils n'aient pas à attendre la période plus longue imposée par ce projet de loi.
    Je précise que, sur les 400 000 décisions de réhabilitation prises depuis 1970, 96 p. 100 sont encore en vigueur. C'est un chiffre important, mais qu'en est-il de ceux à qui l'on a accordé la réhabilitation et qui n'ont tout simplement pas été attrapés?
    Je trouve intéressant qu'un très grand nombre de réhabilitations ont apparemment été accordées ces dernières années. Je constate aussi, selon les chiffres donnés, que des centaines de délinquants sexuels ont obtenu une décision de réhabilitation depuis deux ans, ce qui est très troublant.
    Certains délinquants sexuels, surtout les criminels prédateurs et les pédophiles qui s'attaquent aux enfants, ne peuvent jamais guérir, selon certains spécialistes. Les inclure dans ce groupe pourrait avoir des conséquences tragiques. Je répète qu'un certain nombre de ces individus ont obtenu la réhabilitation ces dernières années. En outre, selon Statistique Canada, les crimes sexuels font partie de ceux qui sont le moins susceptibles d'être dénoncés au Canada.
    Il y aura probablement des préoccupations sur l'inadmissibilité de ceux qui sont condamnés pour certains crimes sexuels contre les enfants ou qui auront reçu trois condamnations pour infraction punissable par mise en accusation. Quiconque commet un crime sexuel contre un enfant est un prédateur. Comme je l'ai déjà dit, il est bien établi que bon nombre de ces prédateurs ne peuvent jamais guérir et, par conséquent, ne devraient jamais bénéficier d'une suspension de casier.
    En revanche, il est cohérent de prévoir les exceptions mentionnées, qui concernent certaines infractions à caractère sexuel contre des mineurs commises par des personnes d'âge comparable, et je crois que le grand public les comprendrait.
    À mon avis, l'inadmissibilité d'une personne condamnée pour plus de trois infractions punissables par mise en accusation mérite qu'on s'y arrête. Prenons le cas d'un adolescent ou d'un jeune dans la vingtaine qui est condamné pour trois vols par effraction. S'il se réforme, devrait-il toujours être inadmissible à 30 ans ou à 40 ans? Globalement, je crois que les services de police et le grand public sont favorables à ce projet de loi et à son objectif de passer l'éponge pour ceux qui se sont réformés, afin de leur permettre de repartir d'un bon pied dans la vie. Par contre, ceux qui continuent de récidiver ou qui commettent des crimes sexuels contre les enfants ne devraient pas bénéficier de ce privilège.
    Donner à la Commission nationale des libérations conditionnelles le pouvoir de prendre des décisions éclairées dans tous ces cas ne peut être que positif. Ce projet de loi permettra de renverser l'opinion largement répandue qu'il suffit de demander la réhabilitation pour l'obtenir.
(0955)
    Merci beaucoup, monsieur Lemcke.
    Nous allons peut-être simplement continuer le long de la table.
    C'est à vous, monsieur Fletcher.
    Permettez-moi de vous parler un peu de mes antécédents car je sais que j'ai un titre professionnel assez inusité : spécialiste en déviance sexuelle. Ça m'a déjà causé toutes sortes d'embarras, dans certains cas.
    Je travaille pour le procureur général de l'Île-du-Prince-Édouard, mon rôle consistant à dispenser des services d'évaluation et de traitement à quiconque a été condamné pour un crime sexuel dans la province ou à quiconque présente des impulsions, des fantasmes ou des comportements de déviance sexuelle, avec ou sans condamnation pénale. J'exerce cette fonction depuis 16 ans à temps plein.
    Avant cela, je travaillais pour les services de santé mentale, où je faisais la même chose à mi-temps.
    J'ai été qualifié comme témoin expert dans ce domaine par la Cour suprême de l'Île-du-Prince-Édouard et, dans un poste précédent où je travaillais pour les services de santé mentale, j'ai également traité des victimes d'agression sexuelle.
    En 1994, j'ai obtenu le prix du lieutenant-gouverneur pour la prévention de la criminalité, du fait de ma contribution à l'instauration d'un programme exhaustif d'évaluation et de traitement des personnes ayant commis un crime à caractère sexuel.
    La raison pour laquelle j'oeuvre dans ce domaine est que je suis très préoccupé par la prévention de la criminalité, en particulier contre les enfants, et c'est de ce point de vue que je m'adresse à vous aujourd'hui.
    Au Canada, on considère que les gens qui commettent des crimes à caractère sexuel peuvent être réhabilités et contribuer de manière positive à la société. Les programmes de traitement et de réhabilitation des personnes ayant commis toutes sortes d'actes criminels ont démontré qu'ils permettent de réduire la récidive, alors que la punition à elle seule s'est avérée soit inefficace, soit, dans le cas des peines les plus lourdes, susceptible d'avoir l'effet négatif d'accroître la récidive.
    Si l'on veut interdire la suspension de casier pour telle ou telle catégorie d'actes criminels, on doit avoir une raison impérieuse, par exemple avoir la preuve scientifique d'un taux de récidive élevé dans cette catégorie, la preuve que ce type de comportement a toujours sur les victimes une incidence plus profonde que d'autres types de comportement, la preuve que la réhabilitation des personnes commettant ce genre d'infraction n'est pas efficace et, finalement, la preuve qu'il n'y a pas de différence marquée entre toutes les personnes qui commettent ce type d'infraction. Si ces choses-là sont démontrées scientifiquement, on peut arguer qu'il faut priver de suspension de casier les personnes qui commettent des agressions sexuelles contre les enfants.
    Quand on adopte une loi ayant une incidence sur une population criminelle quelconque, il est également important d'en envisager les conséquences imprévues. Une loi ayant pour objectif de renforcer la sécurité des collectivités pourrait en réalité avoir comme conséquence imprévue d'accroître les taux de récidive en entravant la réinsertion sociale du coupable.
    Si l'on veut priver de suspension de casier quiconque a été condamné pour avoir commis un crime à caractère sexuel contre un enfant, il importe de tenir compte des quatre éléments qui suivent. Premièrement, les gens qui commettent un crime à caractère sexuel contre un enfant ne constituent pas un groupe homogène. Ils diffèrent considérablement du point de vue de la motivation, de la dangerosité, du degré de dysfonctionnement et du risque de récidive.
    Deuxièmement, leur taux de récidive n'est pas élevé. La plupart ne récidivent pas. Par rapport à de nombreuses autres catégories d'actes criminels, le taux de récidive est relativement bas.
    Troisièmement, le traitement et la réadaptation des personnes ayant commis un crime à caractère sexuel contre un enfant ont fait la preuve de leur efficacité. Je pourrai vous parler par exemple d'une étude de 2006 concernant les gens ayant suivi un traitement à l'île du Prince-Édouard, étude qui montre que le taux de récidive sur une période de 5 à 10 ans se situait entre 3 et 4 p. 100. Je pense que M. Marshall peut vous donner des statistiques similaires pour son programme.
    Finalement, les effets de la victimisation sexuelle des enfants peuvent être profonds et durer toute la vie, et il convient de les prendre au sérieux. Il existe cependant une échelle de traumatisme et, s'il est clair qu'aucun niveau de traumatisme n'est acceptable pour un enfant, toutes les infractions ne produisent pas nécessairement de traumatisme sévère ou durable. Des recherches ont montré que les dommages les plus graves causés aux enfants le sont par l'exposition à la violence familiale, étant donné que les enfants ayant été agressés physiquement, verbalement ou émotivement témoignent de séquelles similaires, en nature et en gravité, à ceux ayant été agressés sexuellement.
    Pour replacer les choses dans leur contexte, il importe de comprendre que l'agression verbale ou émotive d'un enfant, qui peut avoir de très profondes séquelles, n'est pas considérée comme un acte criminel.
(1000)
    En résumé, les gens qui commettent un crime sexuel contre un enfant ne sont pas tous les mêmes. La plupart ne récidivent pas. Les traitements destinés à réduire le risque de récidive ont fait la preuve de leur efficacité. Les séquelles de l'agression sexuelle contre les enfants peuvent être graves et durer toute la vie mais il y a d'autres types d'agressions et d'actes criminels qui ont des séquelles similaires ou plus traumatisantes. Les solutions toutes faites ne sont pas adéquates. Notre système contient déjà des dispositions privant de réhabilitation les agresseurs sexuels dangereux et continuant de poser un risque élevé de récidive sexuelle.
    Permettez-moi maintenant d'aborder brièvement le risque des conséquences imprévues. Selon la théorie de l'étiquetage, formulée par le sociologue Howard Baker, la déviance n'est pas inhérente à l'acte mais est plutôt reliée à la tendance des majorités à voir d'un mauvais oeil quiconque est perçu comme déviant par rapport à ce qui est jugé normal ou acceptable. La théorie porte sur l'actualisation de soi et le comportement de l'individu, et sur la manière dont ces éléments peuvent être influencés ou déterminés par les termes employés pour les décrire. Cela peut devenir une prévision autoréalisatrice dans laquelle la personne décide que c'est ce qu'elle est, qu'elle ne peut pas changer et qu'elle peut aussi bien l'accepter.
    L'adoption d'une loi empêchant de manière universelle de suspendre le casier de quiconque a été condamné pour agression sexuelle contre un enfant pourrait donner le message suivant : vous êtes considéré comme l'un des membres les plus dangereux et les plus nuisibles de notre société, et vous ne pourrez jamais rien faire pour nous convaincre que vous pourriez guérir ou mériter la réhabilitation.
    Il est important d'envisager l'effet que cela pourrait avoir sur la motivation à suivre un programme de traitement et à changer le comportement.
    Finalement, un élément important de la réadaptation de quiconque a commis un acte criminel et a été mis en liberté dans la communauté après une période d'incarcération est l'obtention d'un emploi légitime. Il est bien établi qu'avoir un casier judiciaire peut entraver l'obtention d'un emploi, et c'est particulièrement vrai pour quelqu'un qui a un casier d'agresseur sexuel. Priver cette personne de la suspension de casier pourrait aggraver cette difficulté.
    Merci beaucoup, monsieur Fletcher.
    Monsieur Marshall, c'est à vous.
    Merci de votre invitation. Je suis très heureux de m'adresser au comité.
    Je m'occupe de traitement d'agresseurs sexuels et de recherche dans ce domaine depuis 42 ans. J'ai enseigné à Queen's pendant 28 ans où l'on m'a donné la possibilité de faire ce genre de travail. J'ai été consulté par environ 25 pays sur l'élaboration de programmes de traitement d'agresseurs sexuels incarcérés, et j'ai mis sur pied des programmes de cette nature dans six pays différents, si je me souviens bien.
    J'ai 380 publications à mon actif, dont 19 livres, la plupart concernant le traitement des agresseurs sexuels. J'ai des contrats avec le Service correctionnel du Canada, entre autres, et nous dispensons des programmes de traitement dans des établissements correctionnels de l'Ontario depuis une trentaine d'années. J'ai lancé mon tout premier programme de traitement en 1973 à Kingston. C'était le premier du pays.
    Nous suivons nos délinquants de très près. Nous avons par exemple un groupe de 535 que nous suivons en moyenne depuis une dizaine d'années. Sur ces 535 délinquants traités, 5,2 p. 100 ont récidivé durant cette période. La récidive des agresseurs sexuels, qu'ils aient été traités ou non, se produit dans la plupart des cas dans les trois à quatre premières années. Donc, je pense qu'on peut dire sans crainte de se tromper que ce programme est très efficace.
    Le Service correctionnel du Canada a été à l'avant-garde mondiale dans la prestation de services de réadaptation pour toutes sortes de contrevenants, notamment sexuels. Au fait, je partage l'opinion de M. Fletcher quand il dit que le taux de récidive moyen des auteurs non traités d'agressions sexuelles contre des enfants est de 18 p. 100 sur une période de 10 ans. Ce n'est pas un taux de récidive remarquablement élevé par rapport à d'autres types d'actes criminels.
    L'un des problèmes que pose l'intégration d'agresseurs sexuels à un programme de traitement est qu'ils ont besoin de se considérer comme des personnes de valeur. L'accès à la libération conditionnelle est un facteur de motivation important pour les amener à suivre un programme de traitement durant leur incarcération, tout comme la possibilité d'être incarcéré dans une prison offrant des programmes plutôt que dans une prison n'en offrant pas, ainsi que, finalement, la possibilité d'obtenir une certaine rédemption par l'obtention d'une réhabilitation.
    Évidemment, aucune société sensée n'accorderait la réhabilitation à tous les agresseurs sexuels. Ce que ceux-ci doivent faire, à mon avis, c'est démontrer avant tout qu'ils posent moins de danger et de risque pour les enfants innocents, et la meilleure manière de ce faire est de suivre un traitement efficace en prison. Le Service correctionnel du Canada a également le bon sens d'exiger de la plupart des agresseurs sexuels, notamment les agresseurs d'enfants, qu'ils participent à un traitement de suivi dans la collectivité pour obtenir la libération conditionnelle.
    Je crois que la possibilité d'obtenir la réhabilitation est un incitatif mais, bien sûr, il y a certaines personnes à qui je ne recommanderais jamais d'accorder la réhabilitation, et je pourrais vous donner toute une série de noms que vous connaissez fort bien, j'en suis sûr. Il importe de sérier les cas. Il faut faire une différence selon le degré de risque et selon les efforts déployés par l'individu pour se réadapter, pas seulement en participant à des programmes de traitement mais aussi en témoignant d'un comportement satisfaisant dans la collectivité.
    On peut parler des crimes non identifiés mais, comme le disait l'un de mes collègues, c'est un peu comme vouloir mettre un nuage dans une boîte. C'est très incertain. Nous ne pouvons pas savoir combien tel ou tel individu a pu commettre de crimes non déclarés. Tout ce que nous pouvons faire, c'est agir en fonction du dossier officiel, du comportement, c'est-à-dire de l'information dont la commission des libérations conditionnelles peut tenir compte pour décider d'octroyer ou non la réhabilitation.
    Je m'oppose donc vivement à l'inadmissibilité absolue à la réhabilitation. Je pense que l'incitatif de la réhabilitation est très important, mais il nous incombe de prendre des décisions réfléchies à ce sujet et, je pense, d'être très prudents à cet égard.
(1005)
    Merci beaucoup, monsieur Marshall.
    Nous passons au premier tour de questions.
    Monsieur Holland, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Le problème que pose ce projet de loi, je crois, est qu'il met beaucoup de gens dans le même sac.
    Je rappelle que ce projet de loi fait suite au projet de loi C-23A qui été adopté à la fin de juin dernier après un compromis. Je pense que tous les partis convenaient qu'une réforme s'imposait et même, à mon avis, depuis très longtemps.
    Le problème que nous avons maintenant quand nous interrogeons le ministre, et même quand les questions sont posées par des députés Conservateurs, est qu'on admet que le projet de loi piégera beaucoup de gens pour lesquels il n'est pas prévu.
    Qu'en pensez-vous, monsieur Lemcke?
    Veuillez adresser vos questions au président.
    C'est le premier jour que nous faisons cela, monsieur le président, et je suppose que je vais devoir m'adapter à votre nouveau système, après toutes ces années.
    En m'adressant donc à vous, monsieur le président, je prends l'exemple d'une personne venue témoigner devant ce comité qui avait été victime du programme des pensionnats, qui avait commis certaines erreurs à l'âge de 18 ans. Il ne s'agissait pas d'agressions sexuelles. Cette personne, qui n'a commis aucun crime depuis de nombreuses années, est aujourd'hui un leader dans sa collectivité et aide les membres des collectivités autochtones à sortir de leur situation. C'est quelqu'un qui a fait face à des choses terribles dans sa vie. Ce projet de loi l'empêcherait d'obtenir sa réhabilitation. Cela veut dire qu'il ne pourrait pas trouver de bon emploi. Cela veut dire qu'il ne pourrait pas faire de voyages.
    Nous avons entendu quelqu'un, une mère de 18 ans, par exemple, qui avait pris une mauvaise décision et avait rédigé quatre ou cinq chèques sans provision, ce qui représente quatre ou cinq infractions. Elle aussi serait touchée par ce projet de loi et n'obtiendrait pas de deuxième chance.
    Ce qui m'embête, c'est que les membres Conservateurs de ce comité expriment leur sympathie à l'égard des témoins qui ont exprimé ce point de vue, tout comme le ministre, qui a déclaré en comité que des changements s'imposent. Ensuite, il s'en va en Chambre dire que je prends parti pour les agresseurs sexuels parce que je pose ces questions. C'est foncièrement malhonnête.
    Je vous demande donc si vous convenez avec moi que ces parties du projet de loi qui s'appliqueront en particulier aux personnes que je viens de décrire devraient être modifiées avant que nous adoptions le texte.
(1010)
    Merci, monsieur Holland.
    Vous avez la parole, monsieur Lemcke.
    Je pense que c'est un aspect du projet de loi qu'on pourrait revoir, monsieur le président, mais je voudrais ajouter qu'on ne peut pas se pencher uniquement sur un cas particulier. Il y a beaucoup de facteurs à prendre en considération, notamment le fait que la personne a peut-être obtenu une absolution inconditionnelle ou conditionnelle avant une condamnation pour une infraction punissable par mise en accusation. Il faut également tenir compte de la réalité voulant que beaucoup de délinquants chroniques commettent 10 infractions avant d'être condamnés. Ils en commettent 10 et ils sont condamnées pour une seule.
    Cela dit, il y a beaucoup de choses à prendre en compte. Il faut prendre en compte l'individu lui-même et tous ses contacts avec l'appareil de justice pénale et la police. Cela dit, dans mes 26 années de service dans la police, j'ai rencontré des gens qui ont réussi à s'en sortir.
    Nous savons, monsieur le président, que le taux de récidive violente au Canada est inférieur à 1 p. 100. Mon argument est que nous devons faire preuve de prudence quand nous voulons adopter une loi de cette nature car nous parlons de personnes réelles. Nous nous devons pas oublier que certaines de ces personnes auront passé des années sans avoir jamais récidivé.
    Vous avez quelqu'un comme ce monsieur que nous avons entendu, pas simplement celui qui est passé par de l'agression dans le programme des pensionnats, mais quelqu'un dont tous les membres du comité sont convenus qu'il fait un travail fantastique comme entrepreneur, comme contribuable, et qui a dit qu'il ne peut assurer l'expansion de son entreprise parce qu'il ne peut pas aller aux États-Unis s'il n'obtient pas sa réhabilitation. C'est quelqu'un qui vendait des stéroïdes, ce qui était manifestement une erreur, mais aussi quelqu'un qui s'est clairement réformé et qui agit maintenant pour aider les autres. Pourquoi devrions-nous imposer un obstacle infranchissable à des gens, et cela vaut peut-être aussi pour d'autres témoins, qui ont manifestement tourné la page? Pourquoi devrions-nous les empêcher de devenir de bons citoyens payant leurs taxes? Pourquoi devrions-nous les empêcher de développer leur entreprise ou d'aider d'autres jeunes autochtones à ne pas commettre les mêmes erreurs? Je pose ces questions parce que c'est précisément ce que fera ce projet de loi, à certains égards. Absolument.
    Très franchement, il y a des éléments qu'on aurait pu resserrer il y a bien longtemps. Mon argument au sujet de la réhabilitation est que nous devrions veiller à ne pas mettre d'obstacle infranchissable devant ces personnes qui méritent une deuxième chance, qui ont commis une erreur à 18 ou 19 ans mais qui méritent une chance de rédemption. C'est fondamentalement de cela qu'il s'agit quand on parle de réhabilitation dans notre système d'incarcération, n'est-ce pas?
    C'est exact, à condition de tenir compte de la situation au complet et de demander combien il y a eu d'absolutions inconditionnelles ou conditionnelles. De quels crimes s'agissait-il? C'étaient peut-être des crimes avec violence. C'étaient peut-être des crimes contre les biens. C'était peut-être une quarantaine de vols par effraction.
    Certes, mais mon argument est que…
    Si je peux terminer ma réponse, monsieur le président, tant qu'on tient compte de la situation globale, on ne peut pas dire simplement plus que trois.
    C'est exactement mon argument, monsieur le président.
    Quand vous dites qu'il faut tenir compte des circonstances, il faut tenir compte des cas individuels, mais ce projet de loi l'empêchera. Ce projet de loi éliminera cette possibilité. Il appliquera la même règle à tout le monde. Il n'y aura aucune possibilité de faire ce que vous dites. Tout le monde sera mis dans le même sac.
    Les gens que nous avons entendus devant ce comité, et que chaque membre du comité… Si certains députés Conservateurs ont changé d'avis au sujet des témoins à l'égard desquels ils ont fait preuve de sympathie parce qu'ils font un bon travail et se sont réformés, qu'ils le disent. Le problème et que tout le monde sera traité de la même manière. Il n'y aura plus de latitude. Cela ne vous inquiète-t-il pas?
    Si, monsieur le président, parce que j'ai vu des gens qui se sont réformés.
    Merci.
    Permettez-moi d'ajouter, monsieur le président, que je parle uniquement du sujet qui a été soulevé. Je ne parle pas de ceux qui commettent des crimes sexuels contre les enfants.
    C'est une remarque importante, monsieur le président, parce qu'on m'attaque chaque jour à la Chambre des communes en prétendant que je défends les auteurs de crimes sexuels contre les enfants. J'ai très clairement déclaré devant ce comité que j'appuie les parties du projet de loi qui portent sur les agressions sexuelles graves et violentes. Permettez-moi de dire tout aussi clairement qu'éliminer absolument toute latitude et mettre des obstacles sur le chemin des gens qui veulent changer de vie serait une erreur et serait une chose que je ne saurais appuyer, malgré toutes les campagnes de peur.
(1015)
    Merci, monsieur Holland.
    Madame Mourani.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je remercie nos témoins d'être ici aujourd'hui et je leur souhaite la bienvenue.
    Ce projet de loi comporte deux particularités qui m'interpellent. On parle ici d'inadmissibilité. En effet, il deviendrait impossible de faire une demande de pardon à partir de trois infractions commises. Quant à moi, je suis contre cette partie puisque quelqu'un pourrait commettre trois vols et être parfaitement réhabilitable.
    À l'heure actuelle, la partie qui m'intéresse particulièrement est celle où on enlève la possibilité d'accorder le pardon — on va continuer à le nommer ainsi étant donné que l'appellation n'a pas encore changé — aux agresseurs sexuels qui s'attaquent à des enfants. Je vous avoue que je suis plutôt en faveur de cela. Je pars du principe que la pédophilie est une maladie qui n'est pas guérissable.
    Je vais justement poser la question à M. Marshall, qui est un expert dans le domaine. Selon vous, la pédophilie est-elle une maladie? Si oui, est-elle guérissable?

[Traduction]

    Merci, madame Mourani.
    Monsieur Marshall.
    Je ne pense pas que le concept de maladie soit particulièrement pertinent dans ce domaine, monsieur le président. Laissons-le de côté pour le moment.
    La question est de savoir si ces délinquants peuvent être réformés de manière à réduire leur récidive. La réponse à cette question est absolument claire, sans aucune ambiguïté. Il y a eu par exemple deux méta-analyses à grande échelle. Une méta-analyse est une procédure statistique dans laquelle on regroupe un grand nombre d'études en une seule. L'une de ces études, de Friederich Lösel et son collègue, qui a été publiée en 2005, portait sur un échantillon de 22 000 délinquants sexuels du monde entier ayant fait l'objet de diverses études et représentant le taux de récidive moyen auquel on pourrait s'attendre du groupe n'ayant pas eu de traitement, environ la moitié des 22 000. L'autre moitié, le groupe ayant eu un traitement, avait un taux de récidive sensiblement et statistiquement inférieur à celui du groupe sans traitement. C'était moins de la moitié. Et cela concernait toute une gamme de programmes de traitement dont certains, je suppose, n'étaient pas particulièrement bons.
    Il est donc clair, d'après cette étude et beaucoup d'autres qu'on pourrait…

[Français]

    Je comprends votre idée. Vous me dites qu'un délinquant sexuel qui subit un traitement présente un risque de récidive moins grand. Cela dépend aussi de son implication.
    Toutefois, là n'est pas ma question. La pédophilie est une perversion — je vais enlever le mot « maladie » — qui peut être contrôlée selon les individus, mais qui n'est pas guérissable. Vous le savez très bien, monsieur Marshall.

[Traduction]

    Tout d'abord, non, je ne le sais pas très bien.
    La pédophilie est une étiquette de diagnostic. La question qui se pose toujours au sujet des étiquettes de diagnostic est de savoir si elles sont fiables. Autrement dit, deux psychiatres voyant le même client et examinant les mêmes dossiers tireront-ils la même conclusion? La réponse, au sujet de la pédophilie, est non. Le désaccord est énorme.
    Vous ne pouvez pas dire si c'est une maladie ou non quand les experts ne peuvent pas s'entendre sur le fait qu'elle existe ou non chez une personne. C'est une question qui n'est pas pertinente.

[Français]

    Alors, pourquoi trouve-t-on la pédophilie dans le DSM-IV s'il ne s'agit pas d'une maladie?

[Traduction]

    Je n'en ai pas la moindre idée. J'ai protesté à ce sujet. Je ne suis pas contre le fait qu'on inscrive quelque chose dans le manuel de diagnostic si l'on peut démontrer qu'on peut en établir le diagnostic avec fiabilité. Dans le cas présent, ce n'est pas possible. Le comité de DSM s'est penché sur la question et a conclu que les taux de fiabilité sont beaucoup trop bas pour être acceptables.

[Français]

    Vous parlez du taux de récidive. Est-il exact que l'évaluation du mot « récidive » ne veuille pas forcément dire que la personne n'a pas commis d'acte répréhensible? Par exemple, on peut dire, à propos d'un pédophile qui au début tuait des enfants et qui arrive maintenant à ne plus les tuer mais uniquement à les violer, que cela constitue un succès sur le plan de la récidive. Est-ce exact?
    À partir du moment où il y a une diminution de la dangerosité — par exemple un pédophile qui tuait un enfant après l'avoir violé et qui maintenant suit un traitement qui le conduit à continuer de violer des enfants sans les tuer —, on dit que cela représente un succès sur le plan de la récidive.
(1020)

[Traduction]

    Cela ne serait pas du tout un succès à mes yeux. S'il récidive, c'est de la récidive. Ce serait très intéressant si le mal causé était réduit. Je considérerais que c'est relativement positif. Je n'ai aucune objection à interdire…

[Français]

    Quand vous évaluez les taux de récidive, est-ce en fonction de la diminution de la dangerosité? Cela ne veut pas dire que la personne n'a pas posé d'autres gestes répréhensibles. Quand on lit plusieurs études sur les taux de récidive, je m'aperçois que, passez-moi l'expression, c'est bidon.
    Cela ne veut pas dire que la personne n'a rien fait. Cela veut tout simplement dire que son niveau de dangerosité a diminué. On dit d'un pédophile qui a violé une jeune fille et qui, maintenant, fait des attouchements sans aller jusqu'à la pénétration, qu'il représente un succès.

[Traduction]

    Merci, madame Mourani.
    Monsieur Marshall.
    Eh bien, cela ne me satisferait pas. Vous devez avoir accès à des études différentes des miennes. Je n'ai jamais vu d'ne étude dans laquelle on considérait qu'une réduction du mal causé était un indice de succès. Toutes les études que je connais, et je suppose que…

[Français]

    J'ai lu plusieurs de ces études et je pourrais vous les transmettre. Dans celles-ci, le taux de récidive est évalué en fonction...

[Traduction]

    Je vous serais reconnaissant de me les envoyer.
    Je le répète, madame Mourani, il est préférable d'adresser les questions au président afin d'éviter ce genre d'échanges bilatéraux.
    Je vais donner à M. Marshall le temps de terminer sa réponse. Allez-y, monsieur Marshall.
    Dans toutes les études acceptables, on mesure le taux de récidive en fonction de plusieurs critères, l'un d'entre eux étant la condamnation pour une autre infraction. Le coupable a-t-il été accusé d'avoir commis une autre infraction, l'accusation ayant ensuite été retirée? A-t-il enfreint les conditions de sa libération conditionnelle? Tout cela constitue une récidive. Ça surestime la récidive mais, dans cette étude à grande échelle, nous avons un taux de récidive de 5,2 p. 100 pour le groupe avec traitement et de 18 p. 100 pour le groupe sans traitement.
    Merci beaucoup, monsieur Marshall.
    Monsieur Davies.
    Merci, monsieur le président.
    Comme nous le savons, il y a deux grandes parties dans ce projet de loi. Il y a une proposition destinée à interdire l'octroi d'une réhabilitation aux personnes commettant plus de trois infractions passibles de mise en accusation. Je pense que nous avons entendu chaque témoin, même le ministre, dire que c'est un chiffre arbitraire qui'il convient de revoir.
    L'autre aspect de ce projet de loi est qu'il interdirait également à tout Canadien condamné pour une longue liste d'infractions à caractère sexuel contre les enfants d'être jamais admissible à la réhabilitation. Je crois qu'il faut dire dès le départ que parler d'infractions sexuelles contre les enfants implique un certain degré de protection et même, oserais-je dire, de répugnance et de dégoût de la part de tout le monde. Cela suscite chez chacun d'entre nous le désir impérieux de protéger nos enfants, et je crois que c'est compréhensible.
    Notre rôle de législateurs est d'essayer d'adopter des politiques réfléchies afin de contribuer à cet objectif, et j'adresse ces remarques à nos deux témoins qui ont consacré toute leur vie, si j'ai bien compris, à se pencher sur ce problème.
    D'après vous, est-ce que la perspective d'obtenir une réhabilitation contribue à la réforme de la personne condamnée pour agression sexuelle contre un enfant, au point de l'amener à ne jamais récidiver? Cela fait-il partie du processus de réforme? Cela joue-t-il un rôle ou non?
    Je pense que si cela joue un rôle, c'est plus celui d'entraver le processus de réforme. Comme je l'ai dit, le simple fait de pouvoir obtenir un emploi légitime… Les gens que je vois ont énormément de mal à obtenir un emploi, n'importe lequel, à la fin de leur incarcération. Au bout d'un certain temps, s'il y a des gens qui les connaissent bien, des gens capables de voir les personnes elles-mêmes plutôt que simplement leurs infractions, et de voir comment elles ont pu changer, elles peuvent peut-être trouver un emploi. Dans d'autres cas, c'est un processus qui durera toute leur vie, ou au moins jusqu'à ce qu'elles obtiennent une réhabilitation leur permettant de répondre non à la question d'un formulaire d'emploi leur demandant si elles ont un casier judiciaire.
    Donc, je pense que l'effet consiste plus à entraver ce processus.
    L'autre facteur est la motivation. Comme je l'ai dit, on enverra le message très puissant que le détenu ne pourra jamais rien faire pour convaincre qui que ce soit qu'il a changé. C'est un message très, très décourageant. Tout cette affaire de théorie de l'étiquetage nous dit que, si vous dites assez souvent que telle ou telle personne est comme ceci ou cela, si vous la définissez d'une certaine manière, elle commencera à le croire elle-même. Si cette personne en arrive à croire qu'elle ne peut pas changer, elle cessera d'essayer.
(1025)
    Voulez-vous répondre à la question, monsieur Marshall?
    Je pense seulement que cela participe de la motivation qui pousse ces hommes à s'engager pleinement dans leur processus de réforme. Je pense que c'est très important mais je crois aussi, comme l'a dit M. Fletcher, qu'un des facteurs très importants de réforme est la possibilité de trouver au sein de la société une place permettant à l'individu de bien fonctionner et de viser le même genre d'objectifs que vous et moi.
    Voici la question que se posent sans doute la plupart des membres de ce comité, à mon avis. Si nous adoptons une loi qui empêche les gens ayant commis l'une des infractions faisant partie de cette longue liste d'infractions à caractère sexuel contre les enfants d'obtenir la réhabilitation, aurons-nous adopté une bonne politique parce que la société saura pour toujours que ces gens ont commis cette infraction ou aurons-nous adopté une mauvaise politique?
    Je vous ai entendu dire, monsieur Marshall, qu'« aucune société sensée n'accorderait la réhabilitation à tous les agresseurs sexuels ». Je pense que nous sommes tous d'accord là-dessus. Ma question est donc de savoir si une société sensée priverait tous les agresseurs sexuels de réhabilitation. C'est le corollaire de votre affirmation.
    Je pense que ce serait tout aussi erroné d'accorder la réhabilitation à tous. Ces gens varient considérablement du point de vue des choses qu'ils font aux enfants, des crimes qu'ils commettent, mais aussi de la fréquence et de leur potentiel de réadaptation. En réalité, nous devrions les encourager à s'engager dans un processus efficace de réadaptation.
    Je sais mieux que quiconque ici, à l'exception peut-être de M. Fletcher, ce que les délinquants sexuels, les auteurs d'agressions sexuelles, font aux enfants. D'accord? J'étudie ça depuis 42 ans. Je trouve ça totalement répugnant et je n'ai aucune velléité de laxisme à leur égard, mais il nous faut instaurer un système les motivant à s'engager dans un processus de réforme, et leur donner une chance de succès dans ce processus.
    Exact. Nous savons que personne ne voudrait accorder la réhabilitation à Paul Bernardo ou à Karla Homolka. Je me demande s'il y a une personne qui a commis une infraction à caractère sexuel… disons par exemple l'outrage à la pudeur, puisque ces l'un des crimes de la liste, l'outrage à la pudeur devant un enfant. Cela recouvre toute la gamme, en allant jusqu'au viol. Voici la question : pensez-vous que quelqu'un condamné pour cela peut être guéri? C'est une question que nous nous posons tous. J'ai entendu des gens dire qu'on ne peut jamais guérir de cela et je me demande si c'est vrai ou non, d'après vous.
    Je pense que guérir n'est pas le bon mot. Si vous me permettez de revenir sur toute cette affaire de maladie, il est certain que la pédophilie n'est pas une maladie au sens où l'est la schizophrénie, c'est-à-dire un processus organique. Des gens commettent des agressions sexuelles contre des enfants parce qu'ils le décident. C'est un comportement choisi. On peut leur apprendre à faire de meilleurs choix. On peut leur apprendre qu'il y a de meilleures manières d'agir, et c'est ce qui peut les inciter à faire de meilleurs choix.
    Donc, si vous me demandez si l'on peut amener les gens à choisir d'autres comportements, ma réponse est oui, absolument, et j'ajoute que ces changements dureront toute la vie une fois qu'ils auront été intériorisés.
    Toutefois, ne devrions-nous pas assurer notre sécurité? Ne devrions-nous pas dire simplement qu'on ne peut prendre le moindre risque lorsqu'il s'agit de nos enfants, c'est-à-dire que quiconque est condamné pour avoir commis ces infractions ne devrait tout simplement jamais être gracié, et que c'est ça la politique la plus prudente et la plus sûre?
    Qu'en pensez-vous?
    J'ai peine à voir comment le fait de ne pas accorder de pardon protégerait les enfants.
    C'est maintenant au tour de M. Norlock.
    Monsieur Norlock, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président, et merci aux témoins dont les déclarations sont non seulement très intéressantes mais aussi très utiles.
    Quand on se plaint que ce que nous disons et faisons en comité est rapporté en Chambre et cause du tort, j'ai constaté que la personne même qui s'était plainte de cela a verbalement éviscéré d'autres personnes. Certes, je sais que, dans le monde de la politique et des joutes oratoires, nous participons tous plus ou moins à ces échanges. Toutefois, certains d'entre nous avons dû présenter des excuses en Chambre, publiquement et en privé, et certains d'entre nous avons dû subir certaines foudres juridiques.
    Je conviens avec lui que cela nous humilie tous, pas seulement l'un d'entre nous. Je dois partager cela. Si les gens ont une si mauvaise opinions des politiciens, je pense que c'est à cause de ce que nous faisons, parce que nous attachons beaucoup de prix à nos positions, et que nos positions ont un certain effet. Quoi qu'il en soit, nous sommes ici pour parler du projet de loi C-23B.
    Monsieur le chef de police adjoint Lemcke, j'ai partagé la même profession que vous avant celle-ci. J'ai écouté les deux autres témoins et, même si je ne rejette pas ce qu'ils disent, je songe toujours que les gens qui exercent dans le domaine du droit ou de la santé exercent un métier. Je ne me souviens pas d'avoir jamais engagé un menuisier qui ne faisait qu'exercer la menuiserie. J'ai toujours voulu engager un expert qui savait ce qu'il faisait. Je ne veux insulter personne ici, je dis simplement que, quand on s'occupe d'êtres humains, il n'y a pas de choses exactes qui marchent pour tout le monde.
    C'est une façon détournée de m'adresser à vous, monsieur le chef de police. Lorsque j'étais agent de police, nous nous occupions des méchants…
(1030)
    Veuillez m'excuser, monsieur le président. J'invoque le règlement. Il est plus de 10 h 30.
    Nous allons terminer le premier tour avant de lever la séance.
    Allez-y, monsieur.
    Nous nous occupons de la personne qui a commis l'infraction, très peu après ou aussi peu après que c'est raisonnablement possible dans le cadre de l'enquête. Mais la personne dont nous nous occupons immédiatement après, c'est généralement la victime. Comme nous vivons dans de petites collectivités, nous avons tendance à savoir quel a été l'effet non seulement sur la victime mais aussi sur sa famille. Des mères et des pères divorcent parce qu'ils ne peuvent résister aux pressions qu'ils ont subies quand leur enfant a été assassiné ou a été agressé sexuellement. Je vais vous demander un commentaire à ce sujet.
    L'une des choses que je connais très bien est l'agression sexuelle des garçons. Nous ne connaissons que le tiers environ de ces cas. La plupart ne sont pas signalés parce que les garçons n'aiment pas que les gens les regardent en sachant que quelqu'un a abusé d'eux. Les filles non plus, mais surtout les garçons.
    Je me demande pourquoi vous avez fait certaines des réponses que vous avez faites, quelles sont les raisons de votre présence devant ce comité, et quelle est votre opinion à ce sujet, dans le contexte de votre travail.
    Merci. Je vais vous parler de victimisation dans le contexte du projet de loi.
    Je sais que le projet de loi porte sur le pardon ou la suspension de casier judiciaire mais, quand j'entends le chiffre de 535 personnes traitées et seulement 5 p. 100 qui ont récidivé, et 18 p. 100 des personnes non traitées, ce qui me trouble — et je ne pense pas que ce soit délibéré de la part de qui que ce soit —, c'est qu'on parle très peu des victimes. Cela me préoccupe.
    Est-ce que le pardon aide la victime du crime? Je ne le pense pas. J'ai lu certains témoignages antérieurs, notamment lorsque Sheldon Kennedy s'est exprimé ici, et cela ne… Je suis sûr que la victime vit avec cette...
    Les gens réagissent différemment au crime. Certains vivront à jamais avec cette horreur. En quoi ce pardon les aidera-t-il?
    C'est bien beau de dire que cela aide le coupable, mais en quoi cela aide-t-il la victime? Lorsqu'il s'agit de crimes contre les enfants, nous devrions faire tout notre possible, du début jusqu'à la fin, pour éviter qu'ils soient commis. Nous devrions dire aux gens : « Les Canadiens n'acceptent pas cela. Nous ne le tolérons pas. Nous sanctionnerons cela très sévèrement. Si vous faites cela, les tribunaux vous traiteront très sévèrement dès le premier jour. Vous ne pourrez jamais vous débarrasser de votre casier judiciaire. Voici toutes les mauvaises choses qui nous arriveront si vous faites cela, parce que nous voulons protéger nos enfants. » Je pense que c'est là-dessus que nous devrions nous concentrer avec ce projet de loi.
    Je conviens que certaines personnes peuvent se réformer. Il y a peut-être certains pédophiles qui peuvent se réformer, mais je pense aussi que c'est plus de la gestion de problème qu'ils font. La chose qui m'effraye considérablement est que leur casier pourrait être suspendu. Je sais qu'ils seront enregistrés dans le CIPC mais il y aura peut-être des manières pour eux de trouver un poste où ils seront à nouveau en contact avec des enfants. Or, aucune agression d'enfant ne saurait être tolérée.
(1035)
    Merci beaucoup.
    Nous vous remercions tous les trois d'être venus devant notre comité et de nous avoir fait bénéficier de votre expertise et de vos lumières. J'espère que vous resterez en contact avec nous. J'ajoute que, si vous avez des précisions quelconques à apporter en réponse à l'une ou l'autre des questions qui vous ont été posées, n'hésitez pas à nous les communiquer par écrit.
    Merci.
    Nous suspendons la séance une minute avant de reprendre nos travaux à huis clos. J'invite toutes les autres personnes à sortir rapidement de la salle. Nous avons quelques questions d'ordre interne à régler pendant une douzaine de minutes.
    [La séance continue à huis clos.]
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU