Passer au contenu

CC11 Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité législatif chargé du projet de loi C-11


NUMÉRO 005 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 29 février 2012

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Bonjour à tous. Je vous souhaite la bienvenue à la 5e séance du Comité législatif chargé du projet de loi C-11.
    J'aimerais souhaiter la bienvenue à nos témoins, à nos invités et aux députés, et je veux rapidement saluer tous les députés et les gens ici qui portent du rose pour la Journée contre l'intimidation. M. Regan et d'autres... M. Braid, il y en a sur votre cravate. Je ne passe pas inaperçu avec ma chemise et ma cravate rose. J'aimerais saluer chacun d'entre vous.
    Je peux voir qu'ils font la lessive.
    Merci, monsieur Angus, de nous donner un peu trop de renseignements. Nous allons commencer.
    Je vous présente tout d'abord nos témoins. Nous accueillons M. Stuart Johnston et M. Robert D'Eith, de la Canadian Independent Music Association; Mme Janice Seline et M. Adrian Göllner, de la Société des droits d'auteurs du Front des artistes canadiens inc., et M. John Lawford et Mme Janet Lo, de l'Initiative canadienne des consommateurs.
    Je souhaite la bienvenue à nos invités. Chaque organisme dispose de 10 minutes pour présenter un exposé. Je suis pointilleux sur le temps, et après 10 minutes, je vais vous interrompre si vous n'avez pas terminé.
    Nous allons tout d'abord entendre les représentants de la Canadian Independent Music Association, pour 10 minutes.
    Bonjour. Je vous remercie beaucoup de la possibilité qui m'est offerte de vous parler de ce que mon industrie estime comme le projet de loi le plus important dont a été saisi le gouvernement.
    Comme vous le savez déjà, je m'appelle Stuart Johnston, et je suis le président de la Canadian Independent Music Association. Je suis accompagné de l'un de mes bénévoles et de mes membres du conseil d'administration, M. Bob D'Eith. Il est le secrétaire de mon conseil, et le président de mon comité des affaires gouvernementales. Comme emploi principal, il est directeur exécutif de Music B.C., une association provinciale de l'industrie de la musique. De plus, Bob est avocat en droit du divertissement, a son étiquette de disque et a reçu deux nominations aux prix Juno en tant qu'artiste exécutant.
    Vous devriez déjà avoir notre mémoire sur le projet de loi C-11, qui contient 12 recommandations visant à améliorer le projet de loi. Nous allons donc tenter d'être brefs.
    Je vais tout d'abord vous donner des informations générales. La CIMA représente plus de 180 sociétés et professionnels canadiens engagés dans la production et la commercialisation, dans le monde entier, d'une musique canadienne indépendante, qui représente des milliers d'artistes et de groupes canadiens. Il s'agit exclusivement de petites entreprises qui englobent des réalisateurs de disques, des étiquettes de disque, des éditeurs, des studios d'enregistrement, des impresarios, des agents, des donneurs de licence, des producteurs et des directeurs de vidéoclips, des propriétaires du contenu créatif, des artistes et d'autres professionnels des industries de l'enregistrement audio et du vidéoclip.
    Pour vous donner un aperçu de l'envergure de l'industrie, dans l'ensemble, le secteur de la musique indépendante du Canada est l'un des plus importants au pays sur le plan des ventes; à ce titre, il est au second rang derrière Universal Music Canada. Selon les chiffres des ventes de Nielsen SoundScan, le secteur indépendant représente environ 24 p. 100 de toutes les ventes de musique au Canada, devant EMI et Warner Music réunis, et Sony Music. Bref, nos membres sont propriétaires et exploitants de petites entreprises qui investissent dans la création d'une propriété intellectuelle qui apporte des avantages économiques: emplois, hausse du PIB et apport à la balance commerciale du pays. Ils font partie intégrante de la culture canadienne musicale.
    Comme les secteurs économiques du Canada continuent d'évoluer, la CIMA croit que la création et la protection de la propriété intellectuelle constituent l'un des rares secteurs promis à la croissance, grâce, particulièrement, aux exportations. Nous voulons vous remercier d'entreprendre cette démarche et de vous assurer que tous les points de vue sont exprimés et pris en compte avant l'approbation finale du projet de loi. Nous sommes ravis que le projet de loi soit déposé au Parlement ce printemps, car nous attendons l'adoption d'une nouvelle loi sur le droit d'auteur depuis beaucoup trop longtemps.
    Comme je l'ai dit, les membres de la CIMA et l'ensemble du secteur de la musique indépendante au Canada sont des petites entreprises qui luttent pour survivre dans un marché très féroce, un milieu difficile dans lequel il faut être créatif, innover, faire des investissements, maintenir des emplois et gagner sa vie. Nous croyons donc que la modernisation du régime de droits d'auteur au Canada est essentielle, non seulement pour notre secteur, mais aussi pour l'économie dans son ensemble.
    Nous appuyons le projet de loi C-11, mais il a le potentiel soit d'être d'une importance capitale, soit à certains égards, de créer un climat encore plus difficile pour le secteur de la musique indépendant, qui peine déjà à survivre, et même à croître et à prospérer. Nous vous expliquerons ce que nous voulons dire dans peu de temps.
    Même s'ils appuient le projet de loi en général, la CIMA et ses membres croient qu'il faut lui apporter quelques amendements de forme et d'autres types d'amendement, afin qu'il reflète vraiment l'intention déclarée du gouvernement de favoriser la création d'emploi, de promouvoir l'innovation et d'attirer de nouveaux investissements. Surtout, à notre avis, il doit aussi procurer aux créateurs et aux titulaires d'un droit d'auteur les outils qui leur permettront de protéger leurs oeuvres et d'être rémunérés pour leur travail. Ce que je viens de dire est extrêmement important. Si nous retirons la rhétorique, la démagogie, la désinformation et l'incompréhension de ce qui constitue vraiment la protection des droits d'auteur, les vraies raisons d'appuyer la mise en place de mesures législatives solides et de l'importance du projet de loi C-11 devraient nous apparaître évidentes.
    Au bout du compte, la musique, c'est un produit commercial. Elle peut être qualifiée d'art dans sa forme finale et servir à définir notre culture et y contribuer, mais c'est avant tout un produit. La musique est régie par les règles commerciales et dépend des chaînes d'approvisionnement, du commerce national et international. Elle peut être achetée, vendue, soumise à une autorisation pour divers usages. On parle d'un secteur d'activités qui emploie plusieurs milliers de gens, de façon directe ou indirecte.
    À un moment donné, lorsque la musique a été convertie en une suite de uns et de zéros, il est devenu en quelque sorte acceptable, dans certains milieux, de la voler, de la partager ou de la faire circuler sans se demander quel tort cela causait aux gens qui ont investi leur temps, leur argent et leur énergie créative dans ce produit, sans compter toutes les personnes qui font partie de la chaîne d’approvisionnement qui ont contribué au produit mis sur le marché. Ce sont les artistes, les étiquettes, leur impresario, les producteurs, les ingénieurs du son, les fabricants, les distributeurs, les détaillants, et la liste ne s’arrête pas là. Une compensation équitable pour un produit dont profitent les consommateurs est nécessaire pour payer toutes ces bonnes personnes qui font partie de la chaîne d’approvisionnement. Cela ne diffère vraiment pas d’autres secteurs, comme les services professionnels, l’industrie des TI, le secteur de l’automobile et l’exploitation minière.
(1535)
    Par exemple, nous avons des règles et des lois selon lesquelles voler une voiture pour usage personnel ou pour la revente est inacceptable. Les personnes qui téléchargent et partagent illégalement une piste ou un album ne sont pas, selon toute vraisemblance, des gens qui sortiraient d’un HMV avec quelques CD non payés. Cela ne se produit tout simplement pas. Toutefois, c’est ce qui se passe virtuellement à grande échelle dans le monde et au Canada en particulier. Ce type de vol d'oeuvre musicale est favorisé par des intérêts privés comme isoHunt, basé au Canada, The Pirate Bay, basé en Suède et Megaupload, basé en Nouvelle-Zélande, qui privent mon industrie de la compensation qu’elle mérite tout en retirant des avantages financiers de cette pratique illégale.
    Au début de l’année, quatre des cinq sites les plus importants de BitTorrent étaient reliés en tout ou en partie avec le Canada. Hier, IsoHunt a affirmé devant un tribunal canadien que ses opérations étaient tout à fait légales en vertu des lois canadiennes. Cela va à l’encontre de l’intention du projet de loi C-11. Malheureusement, le Canada est vu comme un refuge pour ce type de parasites numériques. Selon les documents présentés aux tribunaux, même Megaupload, que j’ai mentionné tout à l’heure, a envisagé de déplacer ses serveurs au Canada à un moment donné afin d’échapper aux poursuites.
    Ce n’est pas du piratage. C’est un mot trop fantaisiste qui apporte une connotation de romantisme hollywoodien. Nous parlons ici de vol. Nous avons besoin de règles sévères pour empêcher ces destructeurs de richesse de voler et d'encourager le vol. Il nous faut un nouveau projet de loi sur le droit d’auteur.
    Mon collègue, Robert D’Eith terminera notre exposé.
    Quelques articles posent problème. Il y a tout d’abord le contenu non commercial généré par l’utilisateur, ce qui correspond à l’article 22. Nous croyons comprendre que le gouvernement tente de permettre à des consommateurs innocents d’utiliser Internet sans restrictions indues. Cet article ouvre une porte et n’a aucun précédent dans le reste du monde. Le concept de contenu non commercial généré par l’utilisateur est vague et pourrait mener à la dévalorisation des droits d'auteur dans le domaine musical. En dépit des articles qui tentent d’équilibrer les choses, nous pensons que le fait de ne pas avoir de mécanisme d’application clair pour régler le problème donnera lieu à la dévalorisation des droits d’auteur et au non-respect des droits moraux des créateurs.
    Les dispositions sur le régime d’avis, à l’article 41, sont aussi très inquiétantes. Le secteur de la musique indépendante s’appuie sur des entrepreneurs et des petites entreprises. L’article actuel impose le fardeau déraisonnable aux détenteurs de droit d’auteur de faire respecter leurs droits. Il est irréaliste de s’attendre à ce que les détenteurs de droit d’auteur s’adressent aux tribunaux chaque fois qu’il y a un avis de violation. Le contrefacteur continuera à porter atteinte à leurs droits en toute impunité en sachant qu’il y a très peu de chance que le détenteur de droit d’auteur ait les ressources pour le poursuivre. Nous encourageons fortement le gouvernement à réexaminer cet article et à créer une nouvelle disposition juste, solide et équitable qui protège les FAI tout en prévoyant un régime d’avis et de retrait concernant l'affichage illégal de propriété intellectuelle.
    Pour ce qui est des dommages-intérêts, les plafonner à 5 000 $ fera en sorte que les dommages constitueront le coût de faire des affaires sur Internet. Les particuliers et les petites entreprises détenteurs de droit d’auteur compareront le coût des procédures judiciaires et les dommages, et détermineront qu’il n’est pas possible d’intenter des procédures judiciaires. De plus, même s’il y a jugement, il n’est pas assez important pour avoir vraiment de l’influence sur les contrefacteurs. Encore une fois, les contrefacteurs porteront atteinte aux droits en toute impunité. En fait, les dispositions de cet article favoriseront la violation du droit d’auteur.
    Un autre article qui est très important pour nous, c’est celui qui porte sur les droits éphémères. Au cours de la dernière décennie, les revenus de l’industrie de la musique ont diminué continuellement, provoquant ainsi une crise dans l’industrie. À une époque où l’industrie de la musique a besoin de soutien, le projet de loi risque de réduire davantage les revenus. Retirer l’exigence de payer un tarif de reproduction mécanique se traduira par une réduction de près de 21,2 millions de revenus.
    L’exception actuelle sur les redevances, à l’article 68 de la Loi sur le droit d’auteur, est une exception de 1,2 million de dollars accordée aux radios commerciales sur la première partie de leurs recettes publicitaires annuelles pour des droits connexes. Nous pensons que cette disposition a été ajoutée à une époque où une transition vers les droits connexes devait avoir lieu. À notre avis, elle devrait être retirée, ce qui donnerait 8 millions de revenus supplémentaires à l’industrie de la musique.
    Nous demandons également que dans tous les secteurs, la durée des droits d’auteur passe de 50 à 70 ans afin de maintenir la parité avec tous les autres pays.
    Je suppose que mon temps est écoulé.
(1540)
    Oui, votre temps est écoulé. J'allais vous demander de conclure si possible, car vous n'avez plus de temps.
    Oui. Il me reste un paragraphe. Est-ce que cela va?
    Si vous n'avez pas besoin de plus de 30 secondes, oui.
    Oui.
    Le mémoire de la CIMA présente également un certain nombre d’autres amendements à apporter au projet de loi, et nous voulons nous assurer que le gouvernement du Canada connaît les besoins du secteur de la musique indépendante. Nous éprouvons des difficultés à une époque marquée par l'incertitude et nous avons besoin d’une loi sur le droit d’auteur applicable afin de continuer à offrir au Canada et au reste du monde la meilleure musique, les meilleures chansons et les meilleurs musiciens. Pour prospérer, les propriétaires ont besoin d’une juste compensation pour leurs produits et leurs services. Nous exhortons le gouvernement du Canada à continuer d'agir en chef de file en créant une loi qui donne une longueur d’avance au Canada et qui permet aux créateurs de prospérer.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur D'Eith et monsieur Johnston.
    Nous passons maintenant à Mme Seline.
    Je vous remercie de m'avoir invitée à témoigner devant vous en tant que membre du secteur des arts visuels. Je suis accompagnée de M. Adrian Göllner, qui a été président de mon organisme et qui est lui-même un artiste en arts visuels. Nous convenons qu'une réforme du droit d'auteur au Canada s'impose depuis longtemps.
    Je travaille pour une société de gestion collective, la Société des droits d'auteurs du Front des artistes canadiens Inc., ou CARCC. Nous représentons environ 850 artistes en arts visuels pour les questions de droit d'auteur. En 2010-2011, nous avons distribué plus de 200 000 $ en redevances à nos affiliés, et certaines années, nous en avons distribué pour plus de 500 000 $. Nos affiliés sont très reconnaissants des redevances qu'ils reçoivent. La CARCC gère ses activités à partir de ce que lui rapporte l'octroi de licences.
    Je crois qu'en réformant notre Loi sur le droit d'auteur, nous devons nous rappeler de nos principes. Le droit d'auteur est très ancien, certainement plus ancien que le dramaturge grec qui se sentait lésé lorsque ses pièces de théâtre étaient présentées sans qu'on le rémunère. Affirmer que le droit d'auteur est ancien veut dire simplement qu'il fait partie intégrante de la création. Les artistes doivent avoir des droits d'auteurs, et ces droits doivent les servir.
    Selon l'avocat Normand Tamaro, la raison d'être des lois sur le droit d'auteur est de fournir un milieu juste et civilisé pour l'exploitation des oeuvres des créateurs, et les artistes doivent pouvoir négocier une compensation à des conditions favorables pour l'utilisation de leurs oeuvres. Les lois sur le droit d'auteur comprennent des protections morales pour la réputation des créateurs. Récemment, le jeune artiste K'naan a invoqué ses droits moraux lorsqu'il a dit à Mitt Romney de cesser d'utiliser sa chanson Wavin' Flag dans le cadre de sa campagne. Il ne voulait pas être associé de quelque façon que ce soit à cette campagne et y a mis un frein publiquement. Son indignation s'explique par ce droit ancien qu'est le droit d'auteur.
    La CARCC est membre de la CISAC, la Confédération internationale des sociétés d'auteurs et compositeurs, l'association multidisciplinaire des sociétés de gestion collective des droits d'auteur, et de son sous-groupe, le CIAGP, le Conseil international des créateurs des arts graphiques, plastiques et photographiques. Ces deux organismes ont exprimé leur consternation dans des lettres adressées à des responsables canadiens quant aux menaces que posent le projet de loi C-32 et, par extension, le projet de loi C-11, pour les revenus des artistes. Ils craignent que le Canada perde du terrain quant à ses obligations internationales d'harmoniser ses lois avec celles des autres pays.
    Un rapport publié récemment par la CISAC présente les revenus globaux de 2010 pour l'octroi de licences collectives, et ils s'élèvent à plus de 7,5 milliards d'euros — à l'échelle internationale. C'est beaucoup. Les artistes canadiens doivent avoir quelque chose de cette économie vitale.
    Voici les principales préoccupations que nous voulons soulever au sujet du projet de loi C-11. Je vais d'abord en faire un résumé, au cas où je manquerais de temps. Premièrement, même si nous sommes ravis que le projet de loi C-11 vise à améliorer les droits des photographes, nous croyons qu'ils seront encore désavantagés à cause de l'exception qui permet aux clients de commander des photographies pour les utiliser à des fins privées ou non commerciales. Deuxièmement, nous aimerions que le droit d'exposition couvre la durée du droit d'auteur, en abandonnant la limite de juin 1988. Troisièmement, nous aimerions vraiment qu'un droit de revente soit intégré au projet de loi. Je pense que tout le monde est très enthousiaste à ce sujet. Nous appuyons l'idée que les redevances sur le matériel de traitement numérique couvrent la copie pour usage privé, et nous n'appuyons pas les exceptions pour l'utilisation équitable d'une oeuvre aux fins d'éducation, de satire, de parodie ou de collage. On devrait encourager l'octroi de licence dans le domaine de l'éducation.
    Je vais maintenant vous expliquer plus en détail nos préoccupations. Premièrement, la photographie est une forme d'art visuel, et nous sommes heureux que le projet de loi C-11 étende les droits des photographes. Cependant, une exception portant précisément sur la photographie, à l'article 38, a été ajoutée. Elle permet à la personne qui commande une photographie de la copier à des fins privées ou non commerciales. Le photographe retirerait un revenu de telles copies, et l'exception le priverait d'un revenu et du contrôle de la qualité d'une image copiée. Nous recommandons que les photographes soient traités de la même façon que les autres artistes en arts visuels.
    Deuxièmement, la Loi sur le droit d'auteur du Canada comprend un droit d'exposition qui permet aux artistes d'exiger qu'on les paie pour l'exposition de leurs oeuvres si l'exposition n'a pas pour objectif de vendre ou de louer les oeuvres exposées. Le droit d'exposition date de 1988 et s'applique aux oeuvres qui ont été créées après la date de son adoption. Nous aimerions que la date soit supprimée et que le droit d'exposition s'applique à toutes les oeuvres protégées par le droit d'auteur — c'est-à-dire, toute une vie plus 50 années. Il n'y aurait plus de discrimination contre les artistes chevronnés et la succession des artistes décédés, qui sont souvent exclus actuellement. Cela pourrait facilement être adopté dans le cadre du projet de loi C-11, et nous le recommandons fortement.
(1545)
    Troisièmement, le projet de loi C-11 pourrait être grandement amélioré par l'ajout du droit de revente, ou du droit de suite, à la Loi sur le droit d'auteur, qui est attendu depuis longtemps. Les redevances tirées de la revente sont des pourcentages de vente d'oeuvres qui sont revendues sur le marché secondaire, comme dans les encans. Elles sont habituellement gérées collectivement. Les droits de revente sont avantageux pour les artistes qui ont vendu leurs oeuvres, souvent à faible prix, qui rapportent ensuite beaucoup plus sur les marchés étrangers. Les artistes autochtones et les artistes chevronnés sont les plus touchés. Environ 59 pays ont intégré ce droit à leurs mesures législatives. Si le droit de revente n'est pas intégré à la loi canadienne, la réciprocité avec d'autres pays comme la France et la Grande-Bretagne est impossible, et les artistes canadiens ne peuvent pas profiter des ventes secondaires à l'étranger.
    Le droit de revente mérite d'être examiné dans le cadre du projet de loi C-11. Les sociétés de gestion collectives comme la CARCC sont prêtes à gérer le droit de revente des artistes, et des exemples partout dans le monde nous montrent que le droit de revente n'a pas ou a peu de répercussions sur les marchés de l'art.
    Quatrièmement, l'exception pour l'utilisation équitable aux fins d'éducation — et toutes les exceptions sur l'éducation, surtout celles qui se rapportent à Internet — qui est présentée dans le projet de loi C-11 affaiblit la capacité des créateurs de bénéficier de la reproduction de leurs oeuvres. Les créateurs, y compris les éditeurs, bénéficient de l'utilisation dont cet énorme secteur fait de ses oeuvres à bien des égards. Les créateurs fournissent le contenu de la culture canadienne. Les détenteurs des droits sont payés au moment de la publication et par l'octroi de licences collectives de reprographie, l'utilisation par photocopie.
    Nous croyons que la gestion collective a un grand rôle à jouer lorsque des copies d'oeuvres sont utilisées. Les utilisateurs peuvent en faire usage comme ils le veulent s'ils paient pour une licence et si les créateurs sont payés. On doit étendre la reprographie à l'utilisation du numérique et à Internet. On doit permettre l'octroi de licence dans le secteur de l'éducation, qui devrait compter payer les fournisseurs de contenu, tout comme il paie ses enseignants et ses autres employés. S'il ne le fait pas, le contenu disparaîtra. Le droit d'auteur contribue à la culture et à l'identité nationale.
    Ajouter l'éducation aux dispositions sur l'utilisation équitable donne lieu à des litiges et force les créateurs à se défendre eux-mêmes contre des utilisateurs qui revendiquent l'équité. Bien des activités peuvent être qualifiées d'éducatives. S'attendre à ce que les créateurs et les sociétés de gestion collective contestent chaque revendication sur l'utilisation équitable d'un musée ou d'une entreprise, sans compter les écoles et les universités, équivaut à imposer un très lourd fardeau aux gens qui seraient protégés par le droit d'auteur. Il faut des années de litiges inutiles et coûteux pour clarifier une exception sur l'utilisation équitable, et il se peut que les juges déterminent que ne pas payer des droits est effectivement injuste pour les créateurs. L'éducation devrait vraiment être retirée des dispositions sur l'utilisation équitable.
    Sixièmement, Internet ne représente pas l'avenir, mais bien le présent. C'est une forme de publication qui prend de plus en plus d'importance et qui remplace les anciennes façons de faire des copies et de les distribuer. Internet offre d'énormes possibilités. Les créateurs doivent pouvoir en profiter, lorsque leurs oeuvres sont utilisées à des fins privées, lorsqu'elles sont copiées d'un appareil à un autre.
    Une redevance sur le matériel de traitement numérique semblable à celle qui existe déjà pour les supports d'enregistrement constituerait une solution juste au problème de paiement pour l'usage à des fins privées. La redevance est un paiement équitable pour quelque chose que les gens utilisent — le contenu —, sans quoi leurs beaux appareils ne sont pas du tout divertissants.
    Il y a non seulement des avantages économiques pour les créateurs, mais également pour les utilisateurs. Une redevance permet aux gens d'utiliser une oeuvre librement, dans une certaine mesure, et sans que leur vie privée soit menacée. Elle ne remplace pas les enquêtes sur les activités criminelles que constitue le piratage. Il appartient aux policiers de s'en occuper, et non aux fournisseurs de services.
    Le projet de loi C-11 propose des exceptions d'utilisation équitable de la parodie, de la satire et du collage — c'est-à-dire du contenu non commercial généré par l'utilisateur. Ces exceptions, d'une part, affaiblissent les droits moraux des créateurs qui protègent leur réputation, et d'autre part, favorisent une culture du « tout m'est dû ». Les satiristes canadiens prospèrent sans qu'il n'y ait d'exception sur le droit d'auteur. Ils ont encore bien des normes à respecter, même si on inclut une exception.
    Les artistes en arts visuels qui pratiquent aussi l'appropriation, qui est souvent la parodie et la satire, se sont bien tirés d'affaire sans l'existence d'exceptions. Dire à ces artistes qu'ils sont libres de le faire aux termes de la Loi sur le droit d'auteur ne les protège aucunement d'autres formes de poursuites, comme pour la protection des marques ou le libelle. Dans d'autres pays, les exceptions sur la parodie et la satire ont provoqué des litiges qui n'en finissent plus, en plus d'être coûteux et non décisifs. Nous pensons qu'elles devraient être retirées du projet de loi C-11.
(1550)
    Madame Seline, vous n'avez plus de temps. Pourriez-vous conclure, s'il vous plaît?
    D'accord.
    Je terminerais en disant qu'il ne faut pas encourager les enfants à violer le droit d'auteur, mais plutôt à respecter les oeuvres des artistes tout comme ils voudraient qu'on respecte les leurs.
    Je vous remercie de m'avoir invitée.
    Merci. Vous aurez l'occasion de répondre à des questions et de continuer à exprimer votre point de vue.
    Je cède maintenant la parole aux représentants d'Initiative canadienne des consommateurs.
    Monsieur le président, membres du comité et madame la greffière, je m’appelle John Lawford, et je suis accompagné de Mme Janet Lo. Nous sommes des avocats du Centre pour la défense de l'intérêt public, l’un des quatre principaux groupes de consommateurs canadiens qui forment l’Initiative canadienne des consommateurs, l’ICC. Les autres membres de cette coalition sont le Conseil des consommateurs du Canada, Option consommateurs et l’Union des consommateurs.
    L’ICC souhaite donner au comité son point de vue sur l’intérêt des consommateurs quant aux dispositions législatives sur le droit d’auteur. Les consommateurs constituent l’un des trois groupes d’intervenants qui participent à cette discussion, avec les artistes et les détenteurs de droits. Toutefois, malgré la grande importance des consommateurs, nous n’avons pas bien entendu leurs voix, ou elle n’a pas été clairement exprimée au cours du débat.
    Les consommateurs achètent du contenu protégé par le droit d’auteur. Ils aiment ce contenu. Ils rémunèrent directement ou indirectement les artistes et les détenteurs de droits. Ils constituent un élément essentiel dans la création d'une loi sur le droit d’auteur équitable qui favorise le contenu créatif et permet aux consommateurs d’apprécier ce contenu. On ne peut pas le faire sans tenir compte des consommateurs.
    Le projet de loi contribue à la reconnaissance de ce rôle fondamental qu'ont les consommateurs. Nous aimons la reconnaissance explicite des droits des consommateurs: les droits des consommateurs pour tout le contenu protégé par le droit d’auteur, les droits clairs sur la sauvegarde du contenu, le changement de support et l'enregistrement pour écoute en différé. Nous saluons également l'effort de reconnaître le contenu généré par les utilisateurs qui est non commercial, créatif et répandu. Dans sa forme actuelle, cette disposition assure la créativité non commerciale, légitime et non destructive du consommateur.
    Cependant, nous avons dû limiter notre enthousiasme sur les droits des consommateurs contenus dans le projet de loi, car les serrures numériques ou les mesures techniques de protection risquent de primer sur ces droits. Nous croyons toujours que dans le projet de loi, l’équilibre des forces entre les détenteurs de droits et les consommateurs favorise trop les premiers. Les consommateurs peuvent être privés de tous leurs droits qui y sont énoncés à cause des mesures techniques de protection, et ce, de deux façons.
    Premièrement, la protection générale des mesures techniques de protection dans l’article 41 proposé interdit aux consommateurs la sauvegarde du contenu, l’enregistrement pour écoute en différé ou le changement de support si le contenu est protégé par une serrure numérique. Deuxièmement, chacun des droits du consommateur présentés dans les nouveaux articles, de 29.22 à 29.24, contient des paragraphes et des alinéas qui rendent ce droit applicable seulement si la personne « ne contourne pas […] une mesure technique de protection, au sens de ces termes à l’article 41, pour faire la reproduction […] ou enregistrer l’émission ».
    En effet, selon ces passages, lorsqu’il y a une mesure technique de protection, le droit de changer de support, d’enregistrer le contenu pour écoute en différé ou de sauvegarder n’existe même pas. C’est important, car les consommateurs ne pourront même jamais faire valoir qu’ils exercent leurs droits en tant que consommateurs s’ils contournent la mesure technique de protection. Si le projet de loi est adopté dans sa forme actuelle, un consommateur qui contourne une serrure numérique, mais pas à des fins de contrefaçon, violera la Loi sur le droit d’auteur. Même si un consommateur n'avait pas à verser des dommages-intérêts pour avoir contourné une mesure à des fins privées, nous sommes préoccupés par l’effet néfaste de déclarer illégaux tous les outils qui permettent le contournement des MTP, même lorsqu’ils ne sont conçus et utilisés que pour permettre aux consommateurs de jouir de leurs droits.
    Bref, aucune entreprise ou personne ne distribuera un tel logiciel par peur ou par responsabilité, et la très grande majorité des consommateurs ne pourront pas le faire eux-mêmes. Par conséquent, les détenteurs de droits dicteront les droits des consommateurs et ils se serviront de ce pouvoir pour nier ces droits ou pour exiger des paiements supplémentaires pour le contenu qui peut être sauvegardé, enregistré pour écouter en différé, ou pour le changement de support.
    Les consommateurs se heurteront à toute une panoplie de restrictions de MTP sur les dispositifs, les médias et les modes de prestation qui rendront fort probablement une partie du contenu qu’ils ont acheté injouable et presque assurément beaucoup moins sécuritaire et utilisable. Le marché ne réglera pas le problème. Les intérêts commerciaux des artistes et des détenteurs de droits vont dans le sens inverse.
    Le comité chargé du projet de loi C-32 a entendu le témoignage de Mme Milman, qui a expliqué qu’elle aimerait être rémunérée deux fois, lorsque le consommateur achète son CD et lorsqu’il le transfère sur son iPod. Le même comité a entendu le témoignage de Mme Parr, de l’Association canadienne du logiciel de divertissement, qui a dit que les MTP sont importantes pour les nouveaux modèles d’entreprise, car ils créent plus de choix pour les consommateurs, de plus faibles prix et plus de souplesse.
    Les consommateurs ne sont pas de cet avis. Ils agissent comme toute personne normale qui change de support, enregistre le contenu pour l'écouter en différé et fait des copies de sauvegarde. Ils croient avoir bien agi en achetant du contenu, en le payant une fois et en l’utilisant normalement. Ils ont le droit de s’attendre à cela. Il revient à l’industrie de se structurer pour être rentable dans ce contexte et de rémunérer ses artistes de façon équitable, et non au Parlement de créer une loi pour les détenteurs de droits et les artistes qui protège les modèles d’entreprise hiérarchisés et non équitables et qui va à l’encontre de l’intérêt public.
(1555)
    Il faut au moins amender le projet de loi de façon à ce que les attentes du consommateur et l'utilisation du contenu protégé par le droit d'auteur soient reconnues. Nous recommandons donc au comité d'envisager de rayer le passage que j'ai cité dans chacun des nouveaux articles proposés, de 29.22 à 29.24, soit les alinéas 29.22(1)c), 29.23(1)b) et 29.24(1)c). Ces restrictions de MTP contenues dans le texte de ces prétendus droits des consommateurs sont à tout le moins redondantes, et tout au plus, contraires aux droits des consommateurs qui sont soi-disant conférés dans ces articles.
    Pour ce qui est des mesures techniques de protection proposées à l'article 41 et de ce que cela signifie pour les consommateurs et d'autres usages publics de contenu protégé par le droit d'auteur, l'ICC croit savoir que l'Association canadienne des bibliothèques a rédigé un amendement qu'elle a proposé au comité au sujet de la définition de « contournement », qui garantit aux Canadiens de pouvoir invoquer leurs pleins droits en tant qu'utilisateurs de renseignements en les autorisant à contourner des serrures numériques à des fins licites. Nous soutenons cet amendement.
    Par ailleurs, nous accueillons favorablement les changements sur le droit à l'utilisation équitable, notamment aux fins d'éducation, de parodie et de satire. Cependant, encore une fois, l'ICC est déçue que la reconnaissance de droits comme celui-là qui défendent l'intérêt public puisse être limitée à cause des serrures numériques.
    Enfin, l'ICC a un amendement précis à suggérer au comité. Je l'ai donné à la greffière et il est rédigé dans les deux langues. J'espère que vous en avez une copie.
    Nous sommes très contents que le projet de loi crée une catégorie pour les violations commises à des fins non commerciales pour les dommages-intérêts qui sont limités à 5 000 $ pour toutes les violations. Cela rassure un peu les consommateurs, qui n'auront pas à répondre aux exigences déraisonnables et irréalistes d'entreprises dont le modèle d'affaires se fonde sur le droit d'auteur et qui poursuivent les consommateurs, qui ne tirent pas parti des violations.
    Toutefois, le nouvel article 38.1 permet toujours aux détenteurs de droits de poursuivre les consommateurs de la même manière. Cet article donne aux détenteurs de droits le choix d'intenter des poursuites pour les dommages de fait ou les dommages-intérêts. Bien que le montant à verser pour les dommages-intérêts dans le cas de violations commises à des fins non commerciales ne peut dépasser 5 000 $, le détenteur de droits peut se servir d'autres dommages en espérant qu'un consommateur qui reçoit une lettre de règlement payera. Le montant exigé pourrait dépasser largement les 5 000 $ pour une violation commise à des fins non commerciales, même s'il est pratiquement improbable que le détenteur de droits prouve de tels dommages.
    Le passage clé est le suivant: « peut, avant le jugement ou l'ordonnance qui met fin au litige, choisir ». Cela permet au détenteur de droits ou à l'agent de menacer de procéder selon les dommages de fait et d'envoyer cette lettre jusqu'au jugement définitif. Ce pouvoir qu'ont les détenteurs de droits doit être retiré. Il a été utilisé de façon abusive aux États-Unis dans le cadre de la Digital Millennium Copyright Act.
    Au Canada, nous avons plusieurs cas de poursuites contre des consommateurs, comme celle qui concerne le film The Hurt Locker, où l'on attend l'adoption du projet de loi. La solution, c'est d'exiger des détenteurs de droits qu'ils choisissent au début de la procédure de démontrer les dommages de fait ou d'utiliser les dommages-intérêts lorsqu'ils invoquent une violation commise à des fins non commerciales.
    Notre amendement contribuera à garantir ce qui était, selon nous, l'intention initiale du projet de loi: guider les détenteurs de droits au sujet des dommages-intérêts plafonnés pour la plupart des violations commises à des fins non commerciales par le consommateur.
    Nous remercions les membres du comité de leur attention, et nous sommes prêts à répondre à vos questions.
    Merci.
(1600)
    Merci, monsieur Lawford.
    Nous passons maintenant à notre premier tour, à des interventions de cinq minutes. C'est M. Moore qui commence.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins. J'ai écouté tous les témoignages pendant ce tour de table; je pense que cela illustre l'exercice d'équilibre qui est nécessaire tandis que nous essayons de rédiger pour le pays une mesure législative qui établit un équilibre entre les droits des créateurs et ceux des consommateurs.
    J'ai deux ou trois questions. Un des points qui ont été soulevés par la Société des droits d'auteurs du Front des artistes canadiens était la question des droits moraux. Nous en entendons parler de temps à autre. Habituellement, j'en entends parler pendant les campagnes politiques. Je pense que le sujet revient de temps à autre.
    Vous en avez parlé dans le contexte d'une campagne politique. Pourriez-vous nous en parler davantage? Comme vous le savez, ces droits sont inscrits dans cette mesure législative. En quoi est-ce important, et pourriez-vous nous donner des exemples qui illustreraient leur importance?
    C'est étrange, parce qu'en droit de tradition anglaise, on a appelé le droit d'auteur copyright, le droit de copier. Les Français appellent cela le « droit d'auteur », qui a un sens plus profond; c'est le droit de l'artiste. En quelque sorte, l'inclusion de droits moraux revient à cela. Il s'agit de votre droit d'être reconnu comme l'auteur de l'oeuvre ou de demeurer anonyme, de votre droit à l'intégrité de l'oeuvre. Elle ne peut être endommagée; faire l'objet de surimpression; être rognée. On ne peut en faire une impression de mauvaise qualité ni la détruire sans votre consentement. Il y a le droit que j'ai mentionné — qui a été invoqué par K'naan —, selon lequel vous pouvez refuser de voir votre oeuvre être associée à des causes avec lesquelles vous n'êtes pas d'accord, qui pourraient ternir votre réputation. Ce sont des mesures de protection de la réputation d'un artiste.
    Pour ce qui est de l'exemple de la photographie dont j'ai parlé, j'ai dit que si vous permettez à quelqu'un de faire des copies de votre oeuvre sans que vous ayez votre mot à dire, cela nous ramène aux droits moraux si vous ne pouvez contrôler la qualité de l'oeuvre. S'il y a une copie de mauvaise qualité qui circule — et il y en a beaucoup —, vous faites mauvaise figure. De même, pour ce qui est du contenu généré par l'utilisateur, la question du contenu non commercial... J'ai vu des artistes dont les oeuvres ont été modifiées par quelqu'un et qui ont été diffusées sur Internet, et le nom de l'artiste y figure toujours. Oui, on fait mention de l'artiste, mais on le ridiculise. Les artistes n'aiment pas cela.
    Ce sont des exemples de violation des droits moraux. Certains cas sont très graves et d'autres sont très mineurs, mais cela concerne la protection de la réputation de l'artiste.
    Merci, madame Seline.
    Monsieur Johnston, nous avons déjà entendu le parallèle que l'on fait avec la personne qui n'irait pas dans un magasin de disques pour y voler un CD, mais nous entendons parler de piratage, d'artistes et de créateurs qui perdent le contrôle des oeuvres qu'ils ont produites, et des répercussions que cela entraîne. Quelle en est la cause, d'après vous? Je sais qu'on en a beaucoup discuté, mais pourquoi certains Canadiens seraient prêts à commettre certains actes qui nuiraient aux artistes, mais certainement pas d'autres, alors qu'en fin de compte, le résultat est le même?
(1605)
    Honnêtement, il s'agit d'une question à laquelle il est difficile de répondre. Il m'est difficile de me mettre à la place de n'importe quel Canadien. Cependant, ce qu'on observe, c'est qu'il y a des outils habilitants qui permettent aux gens de télécharger de la musique illégalement. Je parle des isoHunt, des Megaupload et des sites de cet acabit.
    En réalité, ce dont nous parlons lorsqu'il est question de vol d'oeuvres protégées par un droit d'auteur, ce sont ces prétendues entités commerciales dont le modèle d'affaires est fondé sur le vol d'oeuvres protégées par un droit d'auteur. En toute honnêteté, nous ne nous intéressons pas au jeune homme qui s'adonne au téléchargement dans son sous-sol. Nous voulons nous attaquer à la source. Nous ne sommes aucunement préoccupés par le jeune homme en question.
    Pourriez-vous nous parler brièvement des répercussions du piratage sur vos membres, les artistes-interprètes?
    Certainement. J’aimerais céder la parole à Bob, puisque c’est lui qui est sur le terrain et qu’il peut y répondre directement.
    Tout à fait. Nous en ressentons les effets tous les jours. À l’échelle mondiale, l’industrie est passée de 30 milliards de dollars à 14 milliards par année, et encore moins pour ce qui est de l’enregistrement sonore. Tout cela est lié au téléchargement gratuit. Le fait est qu’il existe des services formidables, comme iTunes. Personnellement, en ma qualité d’artiste-interprète, je vends toujours sur iTunes, mais cela représente probablement un dixième de ce qu’étaient les ventes lorsque les CD étaient toujours rentables. Ce que nous avons observé...
    Je suis désolé; nous avons dépassé le temps alloué de beaucoup. Vous aurez peut-être l’occasion d’y revenir en réponse à une autre question. Je suis désolé.
    Monsieur Moore, monsieur D’Eith, je vous remercie.
    Nous passons maintenant à M. Angus, pour cinq minutes.
    Merci.
    C’est une discussion très intéressante.
     Monsieur Johnston, à combien voudriez-vous augmenter les dommages-intérêts légaux?
    En toute honnêteté, nous préférerions qu’il n’y ait aucune limite pour les dommages-intérêts légaux. Cependant, dans l’esprit de la loi, à titre d’association, nous n’avons pas parlé d’un plafond. Nous espérons avoir de plus amples discussions avec les intervenants de notre côté pour savoir quel serait un niveau approprié, si nous jugeons qu’il devrait vraiment y avoir une limite.
    Je crois que ce qui me préoccupe, c’est... Vous savez, je viens du milieu de la musique, mais j’ai vu ce qui s’est passé aux États-Unis, où il y a eu des poursuites de plusieurs millions de dollars contre certaines personnes. Vous nous dites que vous ne vous opposez pas à un jeune dans le sous-sol, mais Jammie Thomas-Rasset a reçu une amende de 1,5 million de dollars pour avoir téléchargé 24 morceaux. À 17 ans, Joel Tenenbaum a reçu une amende d’un peu moins d'un million pour une foule de morceaux.
    Cela laisse un goût amer aux Canadiens. Nous voulons nous assurer que les gens ne s’adonnent pas au piratage, mais comment faire pour savoir qu’on ne s’attaquera pas aux jeunes si on n’impose aucune limite sur les dommages-intérêts? Parce que c'est ce que les entreprises ont fait dans le passé, et cela préoccupe les Canadiens.
    Dans la loi, une partie du libellé est si vague qu'on ne connaît pas vraiment ce qu'est la définition de « personne physique » par rapport à « commercial » ou « non-commercial ». C'est en partie pourquoi nous avons adopté cette approche: nous considérons que les définitions contenues dans la loi ne sont pas assez précises, de sorte que nous ne pouvons pas vraiment définir le jeune dans son sous-sol. Ensuite, nous pourrons contourner cela et cibler les facilitateurs.
    Eh bien, ne pensez-vous pas qu'il serait mieux de venir nous voir et dire qu'il faut préciser la loi afin d'éviter de cibler les jeunes plutôt que de dire qu'il faut avoir des dommages-intérêts illimités? Nous voulons nous assurer que les facilitateurs ne s'en tirent pas aisément, mais si vous parlez de dommages-intérêts illimités, ce que je comprends, c'est que cela pourrait inclure les jeunes. Donc, si vous n'êtes pas certains de votre cible, je vous dirais que si vous pouviez trouver des termes plus précis, ce serait vraiment utile.
    L'idée de rendre la parodie et la satire illégales me préoccupe. Je suis membre de la SOCAN depuis 30 ans et j'ai vu l'industrie se transformer radicalement. La plupart des groupes — et je me tiens toujours avec des groupes, même si je dois admettre que je suis de plus en plus vieux et que les groupes sont de plus en plus jeunes — parlent de facteurs. Ils parlent de soutien pour les tournées, ils parlent de droits de reproduction mécanique — vous avez soulevé un excellent point — et ils parlent de la perte des droits de reproduction mécanique. Mais je n'ai jamais entendu un groupe parler d'interdire la parodie et la satire, parce qu'ils en font. J'en ai fait. Dites-vous que ce devrait être illégal?
(1610)
    Eh bien, ce que nous disons, c'est que s'il y a là un article qui permet la parodie et la satire, on n'en donne aucune définition. Quelles sont les limites? Qu'entend-on par parodie et satire? Et je pense que...
    Mais peut-on le faire avec l'art? Nous dites-vous, aux musiciens et aux artistes, que nous allons définir dans la loi ce que sont la parodie et la satire en tant que forme d'art? Je pense que c'est assez absurde.
    C'est ce que nous faisons valoir, en fait; donc, nous...
    Mais je n'ai jamais entendu un groupe dire une telle chose. Je n'ai jamais entendu un musicien me dire qu'on voulait interdire la parodie et la satire. Ce pauvre Weird Al Yankovic n'aurait jamais eu de carrière s'il en avait été ainsi.
    Nous ne disons pas que ce devrait être illégal. Mon ami parlait des droits moraux.
    M. Charlie Angus: Eh bien, vous dites...
    M. Stuart Johnston: Si cette mesure législative prévoit une meilleure garantie des droits moraux et qu’en même temps on dit que la parodie et la satire sont permises, c’est une atteinte aux droits moraux.
    Je vais vous expliquer précisément comment...
    Mais dites-vous que le droit moral d’un artiste l’emporte sur le droit moral d’un autre artiste de faire de la satire? Toute la culture musicale est fondée sur la satire et la parodie.
    Ce qui me préoccupe, c’est que... Il y a les droits de reproduction mécanique, et c’est quelque chose de concret, d’essentiel. Mais nous dire qu’un artiste n’aime pas le fait que quelqu’un a repris sa chanson et en a probablement fait une version plus drôle, que les gens l’écoutent et que nous devrions en quelque sorte avoir une loi contre cela... Comment voulez-vous vendre cette idée à vos propres membres?
    Eh bien, je prendrais un peu de recul pour examiner le principe sous-jacent. Qui est propriétaire de l’oeuvre? Le titulaire du droit d’auteur a le droit de dire « Oui, vous pouvez utiliser ma chanson » ou « Non, vous ne pouvez pas ».
    Je vais vous donner un exemple de la façon dont cela fonctionne parfaitement. Dimanche soir, lors de la cérémonie des Oscars, Billy Crystal a ouvert la cérémonie avec un pot-pourri de chansons en hommage aux neuf films en lice pour le titre du meilleur film. C’était génial et drôle. On a changé les paroles, on a utilisé la musique et c’était formidable. Mais il voulait utiliser plusieurs chansons différentes et les titulaires de droits d’auteur des chansons ont dit: « Non, nous ne voulons pas que vous les utilisiez à cette fin. » Billy Crystal a dit qu'il n'y avait pas de problème, et il est passé à la chanson suivante. Il n’y a eu aucun problème et le montage a été brillant.
    Mais ce qu’il faut retenir, c’est que ce système respecte le titulaire de droit d’auteur et c’est ainsi que cela devrait fonctionner. Cependant, dans le cas du projet de loi C-11, si vous ajoutez une exception pour la parodie et la satire, le respect du droit moral ou du droit de mise à la disposition du public est perdu.
    De plus, on constate qu’on envisage d’éliminer le contenu produit par l’utilisateur. Je suppose que je suis cuit, parce que j’en ai produit, et à mes collègues du Parti conservateur, je dirais que j’en ai produit contre eux. Donc, je suppose que vous pourriez avoir un... Si nous ajoutons cette disposition, mon bon ami M. Del Mastro aurait ce qu'il faut pour me poursuivre.
    Il y a une différence entre le contenu produit par l’utilisateur et ce qui nuit au marché, mais les jeunes affichent des choses constamment...
    Monsieur Angus, vous dépassez largement le temps imparti.
    ... et sommes-nous en train de dire que nous allons rendre YouTube illégal?
    Merci.
    Merci, monsieur Angus.
    Nous passons maintenant à M. McColeman, pour les cinq prochaines minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous d’être ici.
    Premièrement — cela s’adresse à la CARCC et à Mme Seline —, vos commentaires semblent indiquer que vous êtes fermement opposés à des exceptions aux fins de l’éducation. Or, d’après les témoignages que nous avons entendus au comité de la part de professeurs d’université, de représentants des enseignants et de commissions scolaires, on semble indiquer qu’on verse des millions et des millions de dollars aux créateurs de certaines oeuvres qui sont utilisées. Ce qu’on utilise sans payer, ce sont des photocopies d’un ou deux paragraphes, peut-être, ou d’une ou deux pages, sur un... mais ils sont très sensibilisés. On nous a aussi fait remarquer que ceux qui oeuvrent dans ce domaine sont très sensibilisés à la question et veulent s’assurer de payer leur juste part.
    Le projet de loi vise à indiquer que l’utilisation équitable serait le modèle qui permettrait de le déterminer. Je me demande pourquoi votre organisme a adopté une position sans nuance à ce sujet.
    Eh bien, ce n’est pas aussi tranché que cela. Je pense que dans sa forme actuelle, la loi a un important article portant sur l’éducation et ce que l’éducation peut et ne peut pas faire. C’est très clair. Le projet de loi C-11 vise à ajouter à cela et à clarifier certaines choses. Je ne suis pas d'accord sur certains points, mais je le suis pour d'autres.
    L’exception sur l’utilisation équitable brouille tout simplement les eaux. Il en découle une série de questions. Il y a des institutions comme les musées qui, en vertu de la loi actuelle, ne sont pas catégorisés comme agents d’éducation. Dans la loi, il y a une bonne définition de ce qu’est un établissement d’enseignement. Les musées n’en font pas partie. D’un autre côté, ils s’occupent d’éducation du public.
    Dans le cadre des délibérations sur le projet de loi C-32, nous les avons entendus dire qu’ils étaient impatients de se déclarer éducateurs en vertu de l’utilisation équitable, ce qui entraînera beaucoup de litiges, à notre avis. Si nous devons nous battre avec eux chaque fois qu’ils invoquent l’utilisation équitable, cela pourrait nous coûter une fortune. Il faudra des années. Il est préférable de laisser cela en dehors de l’utilisation équitable et de ne pas modifier la loi actuelle et de continuer à régler les choses comme vous le faites.
    Bien sûr, des millions de dollars sont versés à des sociétés de gestion de droits de reprographie pour l’autorisation de reproduction. Notre organisme en bénéficie. Nos membres aussi. Toutefois, dans le projet de loi C-11, la partie qui nous pose problème est celle où l’on dit qu’Internet ne doit pas être assujetti à l’octroi de licences. Nous croyons qu’il y aurait des façons créatives de le faire, et le fait de simplement dire « Internet » est beaucoup trop vague. C’est tout.
(1615)
    Merci.
    Pour le groupe de défense des consommateurs, comment pensez-vous que les consommateurs utiliseront l’exemption proposée pour le contenu produit par l’utilisateur à des fins non commerciales? Quel usage en feront les consommateurs, à votre avis?
    L’exemple qui est souvent utilisé est une vidéo de votre enfant sur YouTube où on entend de la musique en arrière-plan, ou un diaporama que vous créez avec la musique en arrière-plan. Si c’est à usage non commercial et que vous n’en tirez pas profit... et cela se fait en ce moment. Tous ceux qui ont un ordinateur peuvent le faire. Cela se fait. Les consommateurs sont habitués, ils font preuve de créativité et ils ne sont pas destructeurs.
    Dès que cela devient un succès commercial, si vous voulez, on l'en retire et vous devez verser une redevance.
    Voilà deux exemples assez simples que je peux vous donner.
    Merci.
    Pour la Canadian Independent Music Association, dans le contexte d’un nouveau projet de loi sur le droit d’auteur... et je pense que cela fait l’unanimité; tous ceux qui ont témoigné au comité ont dit que c’est absolument nécessaire. Je pense que vous l’avez dit. C’est absolument nécessaire. En fait, la plupart des groupes semblent indiquer que nous en avons besoin le plus tôt possible parce que la loi actuelle est vraiment désuète.
    Mais intégrer le point de vue de tous ceux qui sont ici aujourd’hui et la façon actuelle de faire les choses apparaît évident à ceux qui étudient la question. Lorsqu'on examine la façon dont le gouvernement atteindrait cet équilibre, il me semble que tout le monde demande la plus grande protection...
    Vous avez dépassé le temps alloué, monsieur McColeman. Par conséquent, pourriez-vous conclure et demander...
    Pourriez-vous simplement réagir à mes commentaires?
    ... à la personne de répondre le plus rapidement possible?
    Mes commentaires semblent indiquer... Je vais laisser à un autre intervenant le soin d'avoir une réponse à la question...
    Formidable.
    ... mais, essentiellement, il est question de cette interdépendance et du bon équilibre qu'il faut trouver dans le changement.
    Nous sommes presque à six minutes, malheureusement. Je vais donc devoir vous demander d’essayer d’obtenir ces commentaires à un autre moment. Si vous ne pouvez répondre en 10  secondes, je peux vous les donner.
    Non, c'est bien.
    Soit. Merci.
    Nous passons maintenant à M. Regan, pour cinq minutes — et seulement cinq.
    Oh, c’est bien peu de temps, monsieur le président. Il y a trop de questions pour cinq minutes.
    Monsieur Lawford, une des préoccupations que j’ai entendues au sujet des mesures de protection techniques — les serrures numériques — est celle-ci: si une mère qui conduit ses enfants chez leur grand-mère, disons, modifie le format d’un DVD pour le mettre dans son iPod pour que les enfants puissent le regarder dans l’auto, elle est dans une position fâcheuse et pourrait être poursuivie.
    Croyez-vous que ce genre de choses, ces règles contre le contournement, pourraient entraîner une hausse des poursuites?
    Il pourrait y avoir plus de poursuites, mais le plus important, je pense que vous ne serez jamais capable, comme cette mère, de prendre votre DVD et d'en changer le format pour la voiture, peu importe, parce que personne ne pourrait créer un logiciel qui vous permettrait de le faire. À moins d'être ingénieure en informatique, elle serait probablement incapable de le faire elle-même. C’est davantage à nous de nous en occuper, bien que des poursuites judiciaires soient possibles si vous l’avez vous-même fait et que cela se sait.
    Ces deux ou trois derniers jours, au comité, mes amis conservateurs ont essayé de sous-entendre qu’il y a un lien entre les serrures numériques et les redevances, de telle sorte que si vous autorisez le contournement des serrures numériques, il y aura des redevances. Comment réagissez-vous à cette tentative d’établir un lien entre ces deux choses?
    Je comprends le lien logique, si on veut. Cependant, nous ne croyons tout simplement pas que l’utilisation privée augmentera au point de nuire aux ventes et ainsi rendre les redevances nécessaires. Ce dont il est question, c’est que les gens puissent faire une copie de sauvegarde afin de pouvoir utiliser un DVD sans être obligé d'en acheter un nouveau si leur enfant marche dessus.
(1620)
    Donc, vous ne croyez pas qu’il y aura inévitablement des redevances si on permet le contournement...?
    Non, nous ne croyons pas que ce soit le cas.
    Merci.
    Que pensez-vous des déclarations de députés conservateurs qui disent à leurs commettants qu'ils n'ont pas à craindre de poursuites s'ils crochètent des serrures numériques? Quelle impression cela vous laisse?
    Comme je l'indiquais, je crois que ce projet de loi comporte bon nombre de dispositions faisant en sorte que la plus grande partie des cas de contrefaçon à des fins non commerciales peuvent être traités en application du montant maximum établi. Cela devrait généralement dissuader les gens d'intenter des poursuites pour des montants déraisonnables lorsque l'utilisation ne vise pas des objectifs commerciaux. Comme nous l'avons fait valoir, notamment via l'amendement que nous vous avons soumis, on peut toujours s'inquiéter du risque que certains se sentent menacés au point de payer tout de même la note.
    Mais c'est ce que cherche à faire le projet de loi d'une façon générale. Il y a seulement certaines parties qui nous causent des préoccupations concernant la possibilité qu'une mise en demeure soit envoyée à la première étape des poursuites, et c'est ce que notre amendement cherche à corriger.
    Dois-je comprendre qu'en matière de serrures numériques, vous ne faites pas la distinction entre un CD, un DVD, un logiciel ou une console de jeu, et que vous considéreriez tous ces éléments sur le même pied?
    Oui, nous ne tenons pas compte du support.
    D'accord.
    Vous avez dit que les poursuites judiciaires ne devaient pas devenir le mode de fonctionnement habituel. J'aimerais vous faire part de ce que nous avons entendu d'un autre témoin concernant les mesures d'avis répétés, ou d'avis et de suppression, conformément à ce qui été proposé. Cela me pose au moins une difficulté. Si vous indiquez que vous allez attendre que des poursuites soient intentées contre la personne qui a mis en ligne le contenu protégé, plutôt que d'obliger le fournisseur de services Internet à le retirer — ce qui me semble problématique de toute manière —, n'êtes-vous pas en train d'encourager le recours aux poursuites judiciaires?
    N'incite-t-on pas les gens à intenter de telles poursuites contre l'individu qui a placé le contenu en ligne si l'on soutient que c'est la façon de procéder pour déterminer s'il y a eu infraction ou non, plutôt que d'utiliser un autre mécanisme? CIMA a parlé d'une solution canadienne à ce sujet, et j'y vois un problème. Si l'on dit simplement que le fournisseur de services Internet doit retirer le contenu alors qu'il peut en même temps agir comme arbitre chargé de déterminer s'il y a eu infraction, il y aurait peut-être lieu de faire appel à une tierce partie.
    Mais existe-t-il une solution de rechange qui pourrait convenir à tout le monde?
    Je crois que le projet de loi réussit à trouver un juste équilibre. Il mise sur les avis. Après un premier avis, la plupart des parents vont entrer à la maison et demander à leurs enfants qu'est-ce qu'ils ont téléchargé, ce qui réglera les choses une fois pour toutes... Le deuxième avis est encore plus efficace et rendu au troisième avis, on a peut-être affaire à une clientèle plus coriace et le moment pourrait être venu de faire intervenir votre poursuite judiciaire. Mais encore là, si l'opération n'est pas commerciale et que personne n'en tire de profit, nous estimons que la limite de 5 000 $ est suffisante pour ramener la plupart des gens à l'ordre.
    Monsieur Johnston, il y a bien sûr une distinction à faire entre une allégation et une infraction avérée, et c'est le problème que je constate ici. Avez-vous une solution à nous proposer?
    Je dirais que le système des avis successifs va probablement fonctionner dans la plupart des cas. Les gens ne cessent de ramener YouTube sur le tapis, mais c'est une entreprise qui s'est toujours conformée aux avis qui lui sont signifiés. Ce sont de bons partenaires commerciaux. Nous ne parlons donc pas ici des YouTube de ce monde.
    Les avis successifs peut donc donner de bons résultats dans bien des cas. Le problème — et j'y reviens encore — vient des serveurs de type BitTorrent exploités par des entreprises comme la canadienne isoHunt...Ces gens-là ne se conforment pas à un régime d'avis successifs. Nous avons besoin d'un mécanisme plus vigoureux pour mettre hors d'état de nuire ces entreprises qui permettent les téléchargements. Elles ne vont pas se soumettre à une disposition se limitant à des avis. En fait, elles vont compter sur le fait que mon ami Bob a plus ou moins les mains liées, car il représente une petite organisation...
    Merci, monsieur Johnston. Nous n'avons plus de temps.
    Merci.
    Merci, messieurs Regan et Johnston.
    Ces périodes de cinq minutes passent très vite, mais je dois m'en tenir au temps prévu dans toute la mesure du possible.
    C'est au tour de M. Braid qui dispose également de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous nos témoins pour leur présence aujourd'hui.
    Monsieur Johnston, j'aimerais reprendre exactement là où vous avez terminé concernant les effets néfastes du piratage sur l'industrie de la musique au Canada. Vous avez brossé un portrait assez sombre de l'état des choses en déplorant que le Canada soit devenu un véritable paradis pour les sites de type BitTorrent. Pourriez-vous nous expliquer comment on en est arrivé là?
    La structure législative actuelle permet à ces sites de type BitTorrent — c'est du moins ce qu'ils soutiennent — de rendre accessible du contenu protégé par le droit d'auteur sans crainte de poursuites importantes ou de fortes amendes. Le fait qu'isoHunt a récemment fait valoir dans son plaidoyer de défense en réponse à une poursuite intentée au Canada que ses agissements sont légaux, car les lois canadiennes lui permettent de faire ceci et cela montre bien à quel point notre législation comporte des lacunes.
    Si le projet de loi sur le droit d'auteur dont vous êtes saisi ne prévoit pas un régime d'avis et retrait ou un mécanisme rigoureux leur indiquant qu'ils sont tenus de retirer le matériel offensant ou contrevenant aux droits d'autrui, ils vont toujours continuer à procéder de la même manière.
    Il faut s'inquiéter du fait que Megaupload et d'autres entreprises semblables envisagent d'intensifier les activités de piratage au Canada en raison de nos lois trop clémentes, ce qui va tout à fait à l'encontre de l'intention visée avec le projet de loi C-11.
    Monsieur D'Eith.
(1625)
    Je suis tout à fait d'accord. Le plus gros problème c'est que les petites entreprises n'auront tout simplement pas les moyens d'intenter des poursuites à toutes les fois qu'il y a infraction. Ce n'est pas un modèle viable pour nous. Nous ne pouvons pas nous permettre de dépenser 5 000 $ en frais juridiques pour réclamer des dommages et intérêts de 5 000 $. C'est tout à fait illogique. Il en va de même pour le régime d'avis et retrait. Il nous faudrait désormais intenter des poursuites dans tous les cas d'infraction? Vous avez tout à fait raison d'affirmer que le problème ne vient pas de nos partenaires habituels comme YouTube et Facebook. Nous travaillons avec ces gens-là et nous avons de bonnes relations avec eux.
    N'y a-t-il pas dans le projet de loi C-11 des outils et des mécanismes pour contrer le piratage?
    Il y a un effort en ce sens, mais nous croyons que les outils prévus vont permettre aux entreprises comme isoHunt de s'en tirer en toute impunité, tout en obligeant M. D'Eith à les traîner devant les tribunaux. Et ils savent fort bien qu'il ne pourra pas le faire. Son organisation est bien trop petite. Il n'a pas les moyens de poursuivre à chaque occasion. Je pense donc que ces gens-là pourront continuer à agir de la sorte si le projet de loi C-11 ne vise pas précisément ces fournisseurs illégaux. Comme le disait M. D'Eith, ce n'est pas le fait des YouTube et des Facebook de ce monde. Ce sont d'excellents partenaires commerciaux.
    L'intention du projet de loi C-11 est de cibler ces fournisseurs.
    C'est effectivement l'intention.
    Je vais maintenant m'adresser aux représentants des consommateurs. J'aimerais parler de ces verrous numériques, de ces mesures techniques de protection.
    Combien de consommateurs représentez-vous approximativement?
    Si l'on compte toutes nos associations, il y en aurait plusieurs milliers. Au Québec, l'Union des consommateurs regroupe, si je ne m'abuse, 19 associations. Le Conseil des consommateurs du Canada compte plusieurs milliers de membres. Le Centre pour la défense de l'intérêt public est de taille beaucoup plus restreinte.
    Pouvez-vous nous dire dans quelle mesure les consommateurs sont préoccupés par les serrures numériques? Quelle proportion des consommateurs sont concernés? J'ai l'impression que bon nombre de Canadiens n'ont aucune idée de ce qu'est une serrure numérique, qu'ils n'y ont jamais été confrontés et qu'ils n'ont jamais eu à composer avec une mesure de protection semblable dans leur consommation courante de produits culturels.
    Pouvez-vous m'aider à mieux comprendre?
    Je dirais que c'est tout à fait le contraire et que les consommateurs sont confrontés au quotidien à ces mesures de protection. Ils utilisent iTunes et se rendent compte qu'ils peuvent seulement télécharger le contenu sur cinq supports différents parce que c'est la limite imposée par iTunes. Ils sont très conscients du fait qu'il est impossible de copier un DVD sans crocheter un verrou numérique, une opération difficile qui exige un logiciel que l'on doit se procurer. Alors, je crois qu'ils sont familiers avec ces mesures de protection.
    Comment pouvons-nous savoir que c'est bel et bien le point de vue des consommateurs? Eh bien, nous travaillons dans ce secteur jour après jour. Nous avons vu les mémoires qui ont été présentés lors des consultations concernant le projet de loi C-61 et le projet de loi C-32. D'après nous, les consommateurs y expriment directement des points de vue qui sont tout à fait conformes à la position que nous prenons aujourd'hui. Comme nous sommes de petites organisations disposant de budgets restreints, il nous a été impossible d'effectuer un sondage auprès des consommateurs à ce sujet.
    Y a-t-il un sous-ensemble de consommateurs que ces questions préoccupent davantage?
    Je dirais que ce sont surtout les jeunes, plus familiers avec Internet, qui se sentent lésés, comparativement aux utilisateurs plus âgés.
    D'accord.
    Le président: Il vous reste à peine 30 secondes.
    M. Peter Braid: Y a-t-il dans le projet de loi C-11 des dispositions pouvant faire en sorte qu'un consommateur doive payer plus d'une fois pour la même chose?
    Oui, je crois que cela peut être le cas avec les systèmes actuels d'enregistrement éphémère et de changement de support. Pour certains des nouveaux services faisant leur apparition, on vous demande de payer pour une version que vous pouvez conserver pendant une certaine période, ou vous pouvez opter pour la diffusion en mode continu. Pour ce qui est des DVD, c'est une seule copie, point à la ligne. Si vous voulez une copie de sauvegarde, vous devez acheter deux exemplaires.
(1630)
    Merci, monsieur Lawford et monsieur Braid.
    Nous passons au prochain intervenant.
    Monsieur Benskin, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à vous tous pour vos exposés. Nous recevons aujourd'hui un groupe de témoins très diversifié, ce qui permet un débat intéressant sur l'ensemble de la question.
    Je m'adresse aux gens du CARCC. Vous avez soulevé la question des droits de revente des oeuvres. C'est une nouvelle proposition et j'aimerais que vous nous indiquiez dans quelle mesure l'absence d'un droit ou d'une protection à ce titre dans le projet de loi C-11 peut être préjudiciable pour vos membres.
    Les droits de revente existent en fait depuis fort longtemps. Ils ont été instaurés en France dans les années 1920. Ils sont très répandus dans le monde.
    Supposons qu'une des oeuvres d'un artiste que je représente est revendue au Royaume-Uni, j'ai un accord réciproque avec une société de gestion britannique qui perçoit les droits de revente, mais comme notre loi ne prévoit aucune mesure de réciprocité, il m'est impossible de récupérer ces droits auprès de la société britannique. C'est l'un des problèmes.
    Le marché de la revente au Canada est assez important. En novembre dernier, il y a eu trois ventes aux enchères d'oeuvres d'artistes vivants. Les ventes ont totalisé près de 2 millions de dollars. Si un droit de revente avait été fixé à 5 p. 100, les artistes se seraient partagé quelque 100 000 $. Ils n'étaient pas très nombreux; il y en avait probablement une vingtaine.
    Le marché de la vente et de la revente d'art contemporain prend beaucoup d'expansion au Canada. Comme les artistes vivent aussi plus longtemps, ils ont besoin de bénéficier de la revente de leurs oeuvres.
    Si je comprends bien, nous nous distinguons de ce qui se fait à l'échelle internationale, ce qui est préjudiciable pour les artistes des pays où ces droits de revente existent étant donné qu'il nous est impossible de les percevoir en leur nom. Est-ce que...?
    C'est exact. Nous ne sommes pas au diapason du reste du monde.
    Merci.
    Je vais revenir à la question des mesures techniques de protection et des points de vue divergents à cet égard. On s'est demandé si les gens allaient devoir payer deux fois pour le même produit.
    Dans bien des cas, comme celui des logiciels, vous devez acheter une licence d'utilisation. Si vous souhaitez transférer votre suite Microsoft Office sur un autre ordinateur, il arrive souvent qu'on vous demande de payer une nouvelle licence pour ce deuxième ordinateur. Nous n'entendons pas de plaintes à ce sujet. Il semble être convenu que l'on peut ainsi installer le produit sur un nouvel ordinateur.
    En quoi cela diffère-t-il du fait de devoir verser de nouveaux droits pour transférer une oeuvre sur un autre support?
    Je vois où vous voulez en venir, mais dans le cas particulier des logiciels, la Loi sur le droit d'auteur permet actuellement de faire une copie de sauvegarde. C'est le compromis qui a été trouvé à l'époque: vous avez droit à au moins une copie de sauvegarde. Il est possible que vous deviez payer une licence pour trois ou cinq utilisateurs, mais vous avez au moins droit à cette copie de sauvegarde.
    Nous essayons ici d'intégrer ces droits de copie aux droits des consommateurs, tout en ajoutant quelques autres dispositions pour l'enregistrement éphémère et le changement de support qui concernent surtout la musique et les films.
    Je comprends ce que vous voulez dire, mais je ne pense pas que cela pose vraiment problème. En effet, les consommateurs seront simplement exposés à la même situation.
    Si vous me demandez si ce projet de loi fait totalement fausse route, je vous répondrai que non. Je pense que l'on donne aux gens la possibilité, s'ils parviennent à contourner une mesure technique de protection d'une manière ou d'une autre, de faire ce qui se fait actuellement avec la musique et les films.
    Allez-y, monsieur D'Eith.
    Nous voulons simplement être payés une fois: la première fois. C'est le principal problème. Nous ne recevons rien du tout.
    Je comprends votre question au sujet du risque d'avoir à payer deux fois, mais le fait est que 90 p. 100 du contenu se retrouvant sur les dispositifs mobiles n'a pas été payé... Même Steve Jobs l'a dit. Il n'a pas hésité à affirmer par écrit que 90 p. 100 des iPods renfermaient du contenu impayé.
    Nous voulons seulement être rémunérés.
(1635)
    Merci, monsieur D'Eith et monsieur Benskin.
    Nous passons à M. Armstrong pour une période de cinq minutes.
    Merci à tous pour vos exposés. Je vais débuter mes questions avec M. Lawford.
    Comme vous représentez de très nombreux consommateurs — vous avez parlé de milliers —, j'aimerais savoir ce que ces gens-là penseraient, et ce que votre organisation dirait, de l'imposition d'une redevance ou d'un tarif sur les dispositifs permettant d'enregistrer à partir d'Internet, les enregistreurs numériques, dans le but de rémunérer les créateurs de contenu.
    Nous ne croyons pas nécessaire d'imposer des redevances pour ces dispositifs. Cela irait à l'encontre du processus d'innovation: le marché va prendre de l'expansion si on laisse les gens utiliser le contenu. Ils vont en acheter davantage. S'ils y voient un inconvénient en raison de cette forme de taxe supplémentaire à payer pour l'utilisation de leurs dispositifs, cela freinera l'évolution du marché. C'est notre point de vue.
    Nous avons eu lundi dernier une discussion sur les mesures techniques de protection et les outils comme iTunes. Lorsque vous téléchargez un film, vous avez le choix entre le louer ou l'acheter tout simplement. Si vous optez pour l'achat, il vous en coûtera habituellement entre 20 et 25 $. Si vous le louez pour 5 ou 7 $, il s'effacera au bout de trois jours. C'est une forme de mesure de protection.
    Cela me semble tout à fait raisonnable. On permet aux gens de télécharger le contenu qui les intéresse, de le visionner une fois — et c'est tout ce qu'ils veulent en faire — en ayant beaucoup moins à débourser. C'est donc une façon de protéger le contenu.
    Quel est le point de vue de votre organisation concernant ce type de mesures techniques de protection?
    Je pense que les mesures techniques de protection vont s'appliquer sur le marché, que les droits des consommateurs soient reconnus comme nous le demandons ou non. Ces mesures sont déjà mises en oeuvre. C'est surtout les entreprises canadiennes qui doivent établir si c'est un modèle qui leur convient. Nous ne croyons pas que les droits des consommateurs vont complètement détruire ce modèle d'entreprise.
    Comme vous le dites, la plupart des consommateurs n'essaient pas de changer le support et de conserver une copie. Ils paient simplement une location de trois jours pour regarder le film. Une petite partie des consommateurs veulent peut-être garder le film ou prolonger le temps alloué, mais je crois qu'ils sont peu nombreux. À mon avis, ils ne menacent pas ce modèle d'entreprise.
    Dans quelle mesure ces exceptions liées aux changements de support et à la prolongation des délais sont-elles le reflet de l'évolution des habitudes de consommation?
    Je pense que l'exemple le plus simple, c'est de vouloir transférer le contenu de son CD sur son iPod.
    Comme nos amis l'ont souligné, le contenu est de plus en plus téléchargé et produit sur support numérique. C'est si facile de transférer le contenu d'un appareil à un autre de nos jours. Le renforcement des mesures techniques de protection empêchera les gens de profiter des merveilleux progrès technologiques qui permettent d'écouter du contenu sans tracas, partout et en tout temps. Nous voulons simplement que les gens sachent à quoi s'attendre pour ce qu'ils achètent et qu'ils puissent en profiter partout et en tout temps, avec n'importe quel appareil.
    Très bien. Merci.
    Ma question s'adresse à Mme Seline. J'ai travaillé comme enseignant. Selon vous, doit-il n'y avoir aucune exception à des fins didactiques, ou devons-nous limiter la portée d'une telle exception? Sommes-nous trop permissifs? Quel est le fond de votre pensée?
    Je n'aime pas du tout l'exception liée à l'enseignement, qui crée d'après moi beaucoup de confusion pour tout le monde. Les établissements qui ne dispensent pas de cours pourraient invoquer cette exception.
    Je répète que la loi définit déjà extrêmement bien l'enseignement. Je pense que les dispositions là-dessus sont très bien ainsi. Si l'enseignement est concerné par l'utilisation équitable, tout le monde peut prétendre donner des cours. Pour être bien honnête, je dirais que nous n'avons pas les moyens nécessaires pour lancer des poursuites.
    Hier, la représentante de l'Association canadienne des commissions et des conseils scolaires nous a dit que la loi n'était pas claire, que bien des enseignants ne savaient pas à quoi s'en tenir et que ce projet de loi répondait à bien des questions. Comment pouvons-nous concilier ces deux points de vue? Vous avez dit que la loi était très claire, mais d'autres ont affirmé qu'il y avait bien des ambiguïtés.
    Je pense que les enseignants doivent tout d'abord se renseigner. Il faut tenir des discussions sur les droits d'auteur dans les écoles pour mieux comprendre la loi. Ce n'est pas si difficile. Pour être bien honnête, je ne pense pas du tout que permettre l'utilisation équitable en enseignement va aider à clarifier la loi. L'utilisation équitable comporte six facteurs qui peuvent amener le juge à trancher autant en faveur d'une partie que de l'autre. Elle entraîne des décisions très étranges, et je ne comprends toujours pas l'affaire CCH.
    Les affaires concernant l'utilisation équitable durent des années et compliquent beaucoup la vie du simple créateur.
(1640)
    Merci.
    Merci, monsieur Armstrong.
    Monsieur Cash, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je serai très bref, et veuillez en faire autant, car j'ai quelques questions à poser.
    L'opposition comprend que, dans certains cas, il faut imposer des mesures techniques de protection pour gérer les droits d'utilisation électronique et assurer un accès légal. Mais ce qui nous consterne en ce qui a trait au gouvernement, c'est qu'il ne semble pas vouloir considérer la simple imposition de sanctions à ceux qui ne respectent pas la loi. Monsieur Lawford, c'est selon nous un compromis raisonnable, qui protège les créations et qui tient compte de toutes les façons dont les Canadiens utilisent les contenus au XXIe siècle. Êtes-vous d'accord pour dire que ce genre de compromis constitue une amélioration par rapport au projet de loi actuel? Pouvez-vous prendre deux minutes pour donner des précisions, s'il vous plaît?
    Oui, c'est en partie pourquoi nous soutenons l'amendement de l'Association canadienne des bibliothèques. Mais je vais laisser Janet répondre.
    Nous sommes tout à fait d'accord sur le fait que les MTP doivent être liées à des sanctions. La raison d'être de la Loi sur le droit d'auteur, c'est d'imposer des sanctions à ceux qui contournent les MTP en vertu du contrat de licence d'utilisation, par exemple. La loi doit prévoir des sanctions contre ceux qui contournent ces mesures.
    Merci.
    Je vais maintenant m'adresser un moment à M. Johnston. L'opposition soutient les petites entreprises, dont les musiciens et les artistes sont les représentants par excellence. Je veux obtenir vos commentaires sur les conséquences que l'annulation du tarif relatif à la reproduction mécanique aura pour les petites entreprises du secteur artistique et culturel?
    Pour répondre simplement, ces droits représentent pour l'industrie près de 22 millions de dollars, alors que ses revenus sont en chute libre comme Bob l'a dit. Nos membres sont très habiles pour tirer le maximum des fonds disponibles, mais il y a des limites. Ils luttent pour leur survie au quotidien. Je suis étonné que notre industrie tienne le coup et qu'elle produise encore des oeuvres épatantes, mais il reste que nos revenus sont en chute libre. La perte ne serait-ce que d'une partie de nos droits de reproduction mécanique entraînerait de graves conséquences pour l'industrie.
    Avez-vous une idée de ce qui justifie le retrait de la disposition dans le projet de loi?
    Je ne veux pas émettre d'hypothèse là-dessus.
    D'accord.
    Je m'adresse de nouveau à M. Lawford pour un instant. Quelles conséquences immédiates les consommateurs subiront-ils en raison de la serrure numérique et des dispositions anti-contournement du projet de loi C-11?
    Si le projet de loi était adopté, toutes les nouvelles oeuvres pourraient présenter un verrou numérique permettant aux titulaires des droits de facturer ce qu'ils veulent pour diverses utilisations. Je répète que, de nos jours, les gens s'attendent à pouvoir transférer leurs CD sur leurs iPods. Si le CD contient des mesures techniques de protection et qu'il est protégé par la loi, ceux qui vont transférer son contenu vont violer les droits d'auteur et vont s'exposer à des sanctions. Les gens seront moins portés à acheter des oeuvres. Ils devront payer plus cher pour avoir le droit de transférer les oeuvres, sinon ils pourraient être poursuivis. C'est deux de nos grandes préoccupations.
    Merci.
    C'est un peu déconcertant d'entendre des députés du gouvernement dire que les consommateurs ne sont pas concernés au quotidien par les mesures techniques de protection. Tous les jours, les gens utilisent des DVD et iTunes, qui comportent de telles mesures. Ces commentaires sont donc un peu étranges.
    Je veux revenir à ce que M. D'Eith a dit. Bon nombre de vos membres profitent du partage de fichiers musicaux. Sauf votre respect, je mets en doute vos propos selon lesquels l'industrie musicale au Canada doit seulement se préoccuper du piratage. Ce n'est tout simplement pas vrai.
    Nous croyons qu'en effet, il peut y avoir d'autres préoccupations...
    Mais ce n'est pas ce que vous avez dit.
    ... mais la grande préoccupation, c'est que les gens téléchargent la musique sans frais, ce qui a causé la fermeture... On n'a qu'à penser aux distributeurs...
(1645)
    Non, je comprends...
     et aux magasins qui ont fait faillite, comme Sam the Record Man.
    Monsieur, je comprends, mais je voulais seulement obtenir des précisions.
    On ne peut pas nier que le téléchargement gratuit a mis des entreprises en faillite.
    Monsieur, j'ai travaillé 25 ans dans l'industrie musicale. De graves questions se posent, et je tiens à souligner mon respect concernant les difficultés de l'industrie...
    Merci, monsieur Cash. Votre temps est écoulé.
    ... mais je veux simplement être clair pour ce qui est du problème...
    Merci, monsieur Cash.
    Merci, monsieur D'Eith.
    Passons maintenant à M. Calandra.
    Madame Seline, êtes-vous pour ou contre les mesures techniques de protection, les MTP?
    D'après ce que j'ai entendu, ces mesures sont extrêmement inefficaces. Il y a toutes sortes de mesures. Pour être bien honnête, je pense qu'il est inutile d'en discuter. Il faut selon moi prélever des redevances, car c'est une mesure concrète.
    D'accord, donc vous voulez que des redevances s'appliquent à tous nos appareils électroniques, comme les BlackBerrys. Bien des gens utilisent des appareils électroniques.
    Oui.
    D'après vous, quelles conséquences le retrait des MTP et des redevances entraînerait-il pour les créateurs?
    En fait, les MTP ne s'appliquent pas à tous les créateurs...
    Je ne parle pas que des MTP. Quel serait l'impact de l'absence de disposition sur les MTP et les redevances pour les créateurs?
    Aucun contrôle ne serait effectué, et les créateurs ne recevraient pas d'argent.
    C'est sans doute négatif.
    Que pensez-vous du fait que des députés libéraux — et heureusement, ils ne sont pas nombreux — disent aux électeurs que le retrait des MTP et des redevances n'empêcherait pas les créateurs de produire des oeuvres, qu'il ne leur nuirait pas et que ça ne serait pas un problème pour les créateurs ou les artistes? Qu'en penseraient les gens que vous représentez?
    Nous ne partageons pas cette opinion.
    D'accord, passons simplement à une autre question.
    Monsieur Lawford, vous semblez indiquer que tout le monde va installer des serrures numériques dès que le projet de loi sera adopté. Vous savez sans doute que ce projet de loi permet bien sûr au gouverneur en conseil de retirer les MTP, si nécessaire. Mais comment les créateurs seraient-ils protégés, et pourquoi ne peuvent-ils pas choisir de protéger leurs oeuvres ou non?
    Présentement, les créateurs peuvent installer une serrure numérique s'ils le souhaitent. Mais si je fais une copie ou je change le format des données pour les conserver dans mes archives, c'est du domaine privé. J'ai payé une fois pour profiter du contenu à la maison ou à des fins personnelles. Nous pensons que l'artiste a été payé et qu'on n'a pas à le faire encore. Les MTP vont faire augmenter les demandes de redevances et le prix des biens et des contenus numériques pour les consommateurs.
    Donc, vous laissez entendre que l'artiste ou le créateur n'a pas le droit de décider de quelle façon qu'il est rémunéré, parce que vous ne voulez pas que des redevances soient imposées. Vous insinuez que seul le consommateur doit avoir le droit de choisir la forme de rémunération des artistes et que le marché ne changera pas.
    Peut-être que je me trompe, mais je ne connais pas de CD de musique contenant une serrure. Il doit y en avoir un ou deux, mais sans plus. Alors, pourquoi faut-il présumer que, dès que le projet de loi sera adopté, toutes les oeuvres viendront avec des MTP et que le gouverneur en conseil ou le gouvernement va simplement berner les consommateurs de la manière que vous semblez indiquer?
    Parce que les mesures économiques incitatives entraînent toujours plus de niveaux de rémunération pour lesquels les consommateurs doivent dépenser. Donc, je m'imagine très bien que les serrures numériques sur les CD ne permettront pas de copier le contenu sur son iPod sans verser un supplément.
    Certains modèles d'entreprise verront le jour, et les consommateurs seront heureux de payer pour utiliser leurs services, mais...
(1650)
    Désolé, je dois vous arrêter, car il ne me reste que 30 secondes.
    Bien sûr.
    Ma question porte surtout sur un commentaire de mes amis qui travaillent dans l'industrie de la musique. Dites-vous que la perte de 22 millions de dollars va causer la chute de l'industrie canadienne de la musique et qu'il n'y aura plus d'artistes pour créer de la musique? C'est ce que vous semblez sous-entendre.
    Non, je ne dis pas que le projet de loi va provoquer la chute notre industrie, mais je pense que 22 millions est une somme considérable pour nous. Pour une de nos maisons de disques, 20 000 $ de moins, c'est beaucoup d'argent et ça peut l'empêcher de signer un contrat avec un artiste canadien. Si nos membres perdent 22 millions de dollars en revenu, ils vont s'en ressentir.
    Par exemple, FACTOR fournit...
    Merci, monsieur Johnston. Pardonnez-moi de vous interrompre, mais le temps file. Merci.
    Monsieur Dionne Labelle.

[Français]

    Bonjour à tous. Je vous remercie d'être ici aujourd'hui.
    J'aimerais poser une brève question à M. Johnston.
    J'aimerais que vous me parliez des membres que vous représentez. Quelle est leur situation économique? Quelle est leur réalité? Quelles conséquences cette perte de 20 millions de dollars aura-t-elle sur vos membres? J'aimerais que vous en disiez plus sur ce sujet.

[Traduction]

    Je peux vous répondre en termes généraux, puis Bob pourra compléter.
    La majorité des membres de mon association tirent le diable par la queue et entrent assurément dans la catégorie des « petites entreprises ». Leurs revenus annuels se chiffrent à 200 000 $, et parfois à 100 000 $. Bien sûr, certains gagnent 500 000 $, mais très peu touchent plus d'un million de dollars.
    J'allais dire que l'an dernier, la fondation FACTOR a versé 16 millions de dollars à l'industrie sous forme de partenariats public-privé. Cet investissement considérable était absolument nécessaire. Perdre 22 millions de dollars à une époque où les revenus diminuent de façon spectaculaire, c'est considérable. Notre flux de rentrées, qui a déjà été de 28 millions de dollars, est aujourd'hui de 8 millions de dollars, et il n'en restera plus rien d'ici quelques années. Cette diminution change le visage de l'industrie.
    Dans le monde numérique, nos partenaires de iTunes et des services de diffusion en mode continu paient désormais des cents pour ce qui coûtait auparavant des dollars. Souvent, nos petites entreprises sont réduites à gratter leurs fonds de poches pour accumuler des dollars. Elles y arrivent, mais elles ne tiendront pas le coup éternellement. L'industrie peine à joindre les deux bouts, mais elle s'en sort relativement bien compte tenu des obstacles qu'elle doit surmonter.
    Je pense qu'il faut d'abord comprendre que l'industrie de la musique compte différentes sources de revenus — elle ne dépend pas d'une seule. Elle tire ses revenus de la SOCAN, de l'AVLA, puis de toute une variété de sources. C'est donc une série de revenus cumulés qui nous permet de gagner notre vie.
    Nous sommes déjà en train de perdre les droits sur les bandes vierges. Les gens parlent encore des CD, mais soyons réalistes; ils connaîtront le même sort que les dinosaures. Ils appartiennent au passé. Les gens ne prennent tout simplement plus la peine d'enregistrer autant de CD qu'auparavant.
    En fait, puisque l'industrie de la musique ne se porte pas bien, le moindre sous noir compte.

[Français]

    Hier, on a reçu le propriétaire d'une petite station de radio. Selon lui, s'il achetait la licence pour une pièce une fois, il pouvait se permettre de la garder indéfiniment. Cette situation a-t-elle des répercussions sur vous?
    On a aussi parlé d'une pratique qui a cours dans les stations de radio: avant l'expiration de la licence, on recopie les chansons pour éviter de payer la licence une deuxième fois. Êtes-vous au courant de cette pratique? Ce genre de pratique nuit-il à vos membres?

[Traduction]

    Nous sommes conscients de cette pratique, et c'est pourquoi nous vous proposons ces amendements. Nous reconnaissons que les radiodiffuseurs ont besoin d'un certain temps pour transposer la musique sur un support en vue de la radiodiffuser, et une période de 30 jours est tout à fait correcte. Cela fait partie de l'industrie. Ce qui nous inquiète, c'est que cette période de 30 jours s'étende à l'infini, et que l'exemption s'applique aux copies subséquentes. Une telle pratique contourne le principe de redevances au titulaire du droit d'auteur à l'origine de la disposition.
    La période de 30 jours ne nous pose aucun problème pour autant qu'elle ne soit pas prolongée. C'est pour cette raison que nous avons proposé l'amendement.
(1655)

[Français]

    Merci.
     Madame Seline, pouvez-vous m'expliquer ce que vous aimeriez que le projet de loi contienne en matière de droits de revente? Comment cela avantagerait-il vos membres?
    Permettez-moi de répondre en anglais.

[Traduction]

    Les droits de revente sont avantageux pour les artistes qui détiennent un marché secondaire. Par exemple, les artistes d'un certain renom dont les oeuvres se vendent plus cher ont leur propre marché. Aussi, certains artistes autochtones vendent leurs oeuvres à très bas prix dans le nord, mais le fruit de leur travail est envoyé sur le marché allemand, où les gens paient des sommes astronomiques pour se procurer certaines choses. Or, les artistes canadiens n'en profitent pas.
    Prenons l'exemple des ventes aux enchères. Les oeuvres vendues en novembre ont été réalisées pour la plupart par des artistes confirmés, comme Daphnee Odjig, Joe Fafard et Michael Snow. Le marché de ces artistes atteint une ampleur spectaculaire. Leurs oeuvres valent très cher sur le marché aux enchères, mais les artistes doivent aussi en profiter.
    Madame Seline et monsieur Dionne Labelle, je vous remercie.
    Je vais maintenant laisser la parole cinq minutes à M. Lake.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie nos témoins.
    Si vous me le permettez, j'aimerais adresser mes remarques et questions aux représentants de la CIMA et de la Société des droits d'auteurs du Front des artistes canadiens inc. D'après vos exposés et l'ensemble de vos témoignages, vous semblez tous vouloir éviter les recours judiciaires à tout prix. À vrai dire, la seule façon de créer un tel monde est d'adopter des lois complètement unilatérales. J'imagine que ce serait bien, pour autant que vous êtes du même côté que la loi.
    Madame Seline, prenons l'exemple de l'utilisation équitable en éducation. Des groupes d'étudiants, des écoles publiques, des universités, des collèges, des commissions scolaires et bien d'autres intervenants sont venus comparaître pour exprimer leurs besoins et nous présenter les éléments essentiels à l'équilibre de la loi. Pourquoi devrions-nous simplement ignorer leurs droits et faire fi de l'utilisation équitable en éducation? Pourquoi ne devriez-vous vous soustraire à la justice au détriment de toutes les propositions de ces organisations qui visent à équilibrer la loi?
    Il y a déjà bien assez de recours judiciaires, et si c'est possible, j'aimerais éviter les poursuites ayant trait à l'utilisation équitable.
    Je vois. Bien des gens n'aiment pas les recours judiciaires, mais ils existent parce que...
    Nous suivons la procédure, mais...
    ... nous avons des règles équitables, n'est-ce pas?
    ... tous ces recours nous rendent la vie bien plus difficile.
    Je vois, c'est difficile. Or, vous avez dit que vous alliez devoir contester toutes les demandes d'utilisation équitable. Je vous dirais que vous n'aurez pas à le faire puisque la plupart de ces utilisations seront bel et bien équitables. Il ne vous restera qu'à contester les demandes qui ne le sont pas, et vous gagnerez sans doute votre cause.
    Vous avez aussi dit à quel point c'est déroutant. Vous avez mentionné qu'il faudrait des années de recours judiciaires inutiles et coûteux pour clarifier l'exception s'appliquant à l'utilisation équitable en éducation. Or, la loi est assez explicite au sujet de l'utilisation équitable. Les catégories sont bien ciblées, et la Cour suprême du Canada a plutôt bien défini l'utilisation équitable. Vous dites l'inverse, et j'en suis dérouté. Le libellé me semble bien clair. Qu'est-ce qui vous échappe?
    Il faut appliquer les six facteurs d'analyse et...
    Il y a six facteurs. Lequel n'est pas clair?
    Le problème, ce n'est pas le manque de clarté des facteurs, mais plutôt le fait qu'il faille en témoigner. Les affaires judiciaires sont complexes.
    C'est vrai, mais il ne faut pas pour autant rejeter le processus. Au Canada, l'application régulière de la loi est importante.
    Mais pourquoi avez-vous même décidé d'aller dans cette direction? La loi encadre déjà bien l'éducation.
    Certains croient l'inverse, et c'est pourquoi nous essayons d'équilibrer la loi. Je pense que c'est la raison.
    Je ne veux pas avoir affaire à des musées qui refusent de nous payer sous prétexte qu'ils sont soi-disant des agents d'éducation. Ils n'ont jamais été catégorisés ainsi.
(1700)
    Mais je vous répète que les six facteurs d'analyse sont plutôt clairs. L'un d'eux ne prête vraiment pas à équivoque: la reproduction aura-t-elle une influence sur le marché de l'oeuvre originale? Je ne vois pas ce qu'il y a d'obscur là-dedans.
    Il faut en faire la preuve.
    Je vois, mais c'est la réalité d'aujourd'hui. Pour affirmer qu'une chose est illégale, il faut le prouver.
    À cet égard, j'aimerais rapidement parler de ce que la CIMA a dit au sujet de l'affichage illégal sur le Web; vous avez dit qu'il fallait adopter un régime d'avis et de retrait pour mettre fin aux publications illégales sur le Web. Nous voulons tous remédier à ce problème, mais qu'en est-il des publications légales? En fait, même l'affichage légal devra être retiré en vertu du régime d'avis et de retrait.
    Je ne suis pas certain de comprendre votre question, monsieur.
    Avec un système d'avis et de retrait, quiconque peut affirmer qu'une publication en ligne est illégale. La publication est alors automatiquement retirée sans aucune procédure établie.
    Ne vous méprenez pas. Nous croyons à l'application régulière de la loi. Or, nous pensons qu'il n'est pas réaliste de s'y fier.
    Chaque jour, des millions d'infractions sont commises sur le Web, littéralement — des millions. Allons-nous devoir intenter des millions de poursuites en vertu de la disposition sur le régime d'avis? Ou bien allons-nous plutôt appliquer une procédure équitable, dans l'intervalle, qui n'oblige pas le fournisseur d'accès Internet à trancher? Tous ces grands esprits réunis ne peuvent-ils pas concevoir une solution canadienne qui assure l'équilibre entre ces enjeux? Pour l'instant, la situation est tout à fait débalancée, et le pays deviendra bientôt le paradis des pirates.
    Je vous dirais que l'ensemble du projet de loi a justement été conçu pour s'attaquer à ce problème. Mais dans ce cas particulier, bien des gens croient qu'il est complètement injuste que quiconque puisse obliger une famille ayant mis en ligne une vidéo de son enfant en train de...
    Monsieur Lake, veuillez conclure, car le temps file.
    C'est totalement injuste qu'un individu puisse forcer une telle famille à retirer la vidéo de son enfant sans devoir prouver que son contenu est illégal. En vertu de votre proposition, cette famille devrait retirer sa publication même si le contenu est tout à fait légal.
    Très rapidement, monsieur D'Eith.
    Ce n'est absolument pas ce que nous disons. Avec tout le respect que je vous dois, nous n'affirmons rien de tel.
    Mais vous le dites bel et bien. C'est exactement ce que vous proposez puisque vous préconisez le régime d'avis et de retrait.
    C'est vous qui le dites, pas nous.
    Bien. Merci beaucoup.
    Il est maintenant 17 heures.
    Je tiens à remercier tous les témoins d'être venus comparaître aujourd'hui et de nous avoir présenté leur point de vue et leurs idées. Nous vous en sommes sincèrement reconnaissants.
    Cela dit, je demanderais aux membres du comité d'être de retour d'ici 17 h 5, car nous reprendrons la séance. Nous allons prendre une pause de trois minutes, car le prochain groupe est prêt, et nous savons que l'appel de la sonnerie se fera bientôt entendre.
    La séance est suspendue trois minutes.

(1705)
    Veuillez s'il vous plaît retourner à votre place, car nous reprendrons dans un instant.
    Bonjour, tout le monde. Je vous remercie d'être venus à la deuxième partie de la 5e séance du Comité législatif chargé du projet de loi C-11.
    Compte tenu des votes qui auront lieu tout à l'heure, la deuxième partie sera très courte. La séance suivra son cours jusqu'à 17 h 30 puis, à l'appel de la sonnerie, je demanderai le consentement unanime de tous les partis pour que nous puissions poursuivre environ 15 minutes de plus.
    Nous avons demandé aux témoins et aux invités de limiter leur exposé à cinq minutes. Ainsi, nous aurons au moins le temps de terminer le premier tour et d'entendre une bonne partie des renseignements que vous désirez nous communiquer.
    Nous avons une copie papier de vos exposés en main, et je vous en remercie. J'encourage tous les membres du comité à lire les documents en entier.
    Nous accueillons aujourd'hui deux représentants d'Audio Ciné Films inc., Jean-François Cormier et Bertrand-Olivier Desmarteau. Nous recevons également John Fisher et Suzanne Hitchon, des films Criterion. Enfin, Yves Légaré et Sylvie Lussier sont avec nous au nom de la Société des auteurs de radio, télévision et cinéma.
    Nous allons commencer par écouter l'exposé des représentants d'Audio Ciné Films inc., qui disposent de cinq minutes.
    Bonjour, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité chargé du projet de loi C-11. Je vous remercie de nous donner l'occasion de comparaître aujourd'hui au nom de l'industrie pour vous parler des conséquences non voulues, nous le souhaitons sincèrement, que pourrait entraîner le projet de loi C-11.
    Je m'appelle Jean-François Cormier, et je suis le directeur général d'Audio Ciné Films, une entreprise établie à Montréal. Je suis accompagné de M. Desmarteau, notre directeur des communications.
    Audio Ciné Films est le représentant exclusif et le distributeur de milliers de films dont se servent les établissements d'enseignement d'un bout à l'autre du Canada. Notre bureau d'attache est situé à Montréal, mais nous faisons affaire avec des organismes et des établissements francophones et anglophones de partout au Canada. Nous sommes l'une des centaines d'entreprises canadiennes qui participent à la production et à la distribution de matériel dans le secteur de l'éducation. Ainsi, nous fournissons à des milliers d'écoles, collèges et universités d'un bout à l'autre du pays du matériel, des droits et des services à juste prix.
    Un bon exemple de notre travail est le film Monsieur Lazhar, qui représentait le Canada dimanche dernier dans la catégorie du Meilleur film en langue étrangère aux Oscars. Grâce à la licence d'Audio Ciné Films, les établissements d'enseignement peuvent facilement présenter ce film, tout comme des milliers d'autres, y compris Le Petit Monde de Charlotte et 12 hommes en colère.
    Audio Ciné Films n'est qu'une des plus de 500 entreprises que représente cette industrie, qui compte plus de 8 000 employés et qui génère entre 30 et 50 millions de dollars de revenus annuels.
    Plus particulièrement, Audio Ciné Films investit habituellement des centaines de milliers de dollars par année pour faire connaître et pour vendre ses produits, et pour gérer un site Web contenant de l'information sur toutes les oeuvres cinématographiques qu'elle représente. Le site Web permet aussi aux établissements d'enseignement de rechercher des films sur un sujet précis, comme l'histoire canadienne, la littérature ou les enjeux sociaux. Les écoles y trouveront également des centaines de guides d'animation gratuits.
    Puisque notre industrie s'oriente vers la diffusion en continu et les formats numériques, nous prévoyons qu'il faudra investir beaucoup plus pour suivre le rythme de la technologie et de la demande dans le secteur de l'éducation. Audio Ciné Films et le Visual Education Centre des films Criterion, dont les représentants témoigneront tout à l'heure, sont des entreprises privées qui n'ont jamais reçu d'aide ou de subvention du gouvernement. Les prix de nos produits et services sont concurrentiels.
    Nous faisons partie des rares secteurs de l'industrie cinématographique qui ne bénéficient pas de fonds publics. Pourtant, nous sommes très vulnérables aux modifications que propose le projet de loi C-11. Même si nous convenons que la réglementation sur le droit d'auteur doit être mise à jour, plusieurs dispositions du projet de loi entraîneront des conséquences non voulues, croyons-nous, qui causeront un sérieux préjudice financier à notre secteur et à l'ensemble de l'industrie.
    Plus particulièrement, la modification proposée de l'article 29.5 de la Loi sur le droit d'auteur, qui porte sur les représentations, fera en sorte que les établissements d'enseignement ne seront plus tenus d'acheter les licences actuellement obligatoires pour présenter des oeuvres cinématographiques à des fins pédagogiques. Cette modification renverserait le fardeau de la preuve, rejetterait sur l'industrie la responsabilité de surveiller les infractions, réduirait ou abolirait les pénalités actuellement en vigueur et éliminerait les exigences de production de rapports.
    L'amendement que nous proposons se trouve dans notre mémoire. À notre avis, vous pourriez facilement l'intégrer à l'article 29.5 de la Loi sur le droit d'auteur.
    Le secteur de l'éducation est le gagne-pain presque exclusif de l'ensemble de notre industrie. En effet, la production d'oeuvres cinématographiques, les droits afférents, leur représentation et leur distribution dans les écoles, les collèges et les universités, ainsi que les revenus tirés de la vente des licences sont autant d'éléments essentiels à la santé de notre industrie. Si vous n'apportez pas quelques amendements de forme mineurs au projet de loi C-11, celui-ci entraînera une perte globale d'emplois et d'investissements qui se traduira par une baisse de l'offre de matériel éducatif dans les écoles.
    Nous exhortons aujourd'hui les membres du comité à prendre conscience du tort qu'ils causeront à notre industrie et des emplois qui seront perdus si les modifications proposées de l'article 29.5 sont adoptées telles quelles.
    Les petites entreprises comme la nôtre sont au coeur de la réussite économique de notre pays. Notre industrie en est la meilleure preuve, puisqu'elle se compose principalement de petites entreprises privées non subventionnées et pourvues d'un personnel travailleur et novateur.
    Je vous remercie.
(1710)
    Je vous remercie de votre exposé.
    J'accorde maintenant la parole cinq minutes aux représentants des films Criterion.
    Bonjour, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité. Je vous remercie de nous donner l'occasion de comparaître aujourd'hui au nom de nos entreprises respectives et de notre industrie.
    Je m'appelle Suzanne Hitchon, et je suis accompagnée de John Fisher. Nous représentons les films Criterion, une division de Visual Education Centre, qui est l'un des plus importants distributeurs de documents audiovisuels au Canada. Notre entreprise cible la distribution de documents liés aux programmes scolaires utilisés en classe. Nous sommes en activité depuis les années 1960.
    Notre industrie offre, dans les deux langues officielles du Canada, un large éventail de documents audiovisuels pour tous les niveaux et toutes les matières. Nous sommes ici aujourd'hui au nom de toute une industrie qui pourrait bien disparaître advenant l'adoption du projet de loi C-11.
    Notre industrie, qui ne reçoit aucune subvention gouvernementale, emploie au total plus de 8 000 Canadiens.
    Depuis plus de 50 ans, notre industrie offre des services hautement valorisés et à juste prix aux établissements d'enseignement, et elle contribue à l'économie canadienne en générant entre 30 et 50 millions de dollars de revenus annuels. À l'image de bien des industries du secteur privé et petites entreprises canadiennes, nous ne pouvons nier que nous faisons face à notre juste part de difficultés. Nous avons dû nous adapter au changement, prendre des risques financiers, faire l'apprentissage de nouvelles technologies et subir les compressions budgétaires tout en répondant aux besoins de nos clients, qui demandent plus de services à moindre coût. C'est la réalité du secteur privé.
    Afin de répondre aux besoins de nos clients, notre entreprise a investi à elle seule des millions de dollars ces dernières années à la conception d'un environnement de livraison numérique qui comporte plus de 25 000 documents audiovisuels liés aux programmes scolaires du primaire et du secondaire. Pendant cette période de changements, notre entreprise a survécu et a connu une croissance sans recevoir d'aide ni de subvention du gouvernement. Or, depuis les débuts de notre secteur, rien n'a jamais autant menacé notre survie, notre gagne-pain et l'investissement de notre vie que l'adoption du projet de loi C-11 sous sa forme actuelle. S'il était adopté sans amendement, le projet de loi entraînerait des conséquences catastrophiques pour nos deux entreprises et notre industrie.
    Si le libellé actuel du projet de loi C-11 était adopté, les établissements d'enseignement ne seraient plus tenus de payer pour la reproduction du matériel dont ils nous achètent actuellement la licence, ce qui entraînerait une perte directe de millions de dollars de revenus et nous obligerait même à fermer nos portes. Le projet de loi actuel renverserait le fardeau de la preuve et obligerait l'industrie à surveiller les infractions dans plus de 15 000 écoles d'un bout à l'autre du pays — une tâche impossible. De plus, il réduirait les pénalités liées aux infractions et éliminerait toute exigence de production de rapports.
    Les nouvelles modalités du projet de loi C-11 se traduiront par une perte globale d'emplois et d'investissement et par une baisse de l'offre de matériel au Canada, puisque la plupart des incitatifs financiers favorisant les investissements du secteur privé seront abolis. Par conséquent, les étudiants et les professeurs dépendront davantage des oeuvres cinématographiques américaines, et les produits canadiens deviendront une denrée rare.
    Le gouvernement, s'il accorde une valeur aux programmes canadiens, devra au bout du compte combler le vide en finançant, à partir des deniers publics, des organismes comme l'Office national du film du Canada ou CBC/Radio-Canada.
    L'adoption du projet de loi C-11 sous sa forme actuelle n'est avantageuse ni pour l'industrie des films non destinés aux salles de cinéma, dont nous faisons partie, ni pour la communauté éducative du Canada. Personne n'y gagne. Les agents d'éducation ne demandent pas à être exemptés des dispositions actuelles sur le droit d'auteur. Or, c'est ce qui est prescrit dans le projet de loi. Lors du témoignage du Conseil des ministres de l'Éducation, au cours des audiences sur le projet de loi C-32, la présidente du conseil et ministre de l'Éducation pour la Nouvelle-Écosse a été très claire à ce sujet:
Nous ne cherchons pas à obtenir quoi que ce soit gratuitement. Le secteur de l'éducation paie pour obtenir des licences et remet des redevances de droit d'auteur, et il continuera à le faire. Les amendements que nous proposons visent à préciser la situation.
    Mme Rosalind Penfound, sous-ministre du Conseil des ministres de l'Éducation, a également affirmé ceci:
Nous évaluons que chaque année à travers le Canada, il y a probablement plus d'un milliard de dollars qui est dépensé par le secteur de l'éducation pour rémunérer les créateurs pour leurs livres, leurs films, leurs oeuvres d'art, etc.

Nous ne prévoyons pas que ce projet de loi réduira le montant payé par le secteur de l'éducation dans ce domaine.
    Enfin, voici ce que Mme Cynthia Andrew, de l'Association canadienne des commissions/conseils scolaires, a indiqué hier dans son témoignage:
... on a laissé entendre que le milieu de l’éducation ne voulait pas payer pour le matériel didactique. C’est inexact. À l’heure actuelle, les établissements d’enseignement paient pour utiliser son contenu et pour le copier.

L’ACCS ne soutient pas que les conseils scolaires ne devraient pas payer pour la propriété intellectuelle et n’a jamais proposé une telle chose.
(1715)
    C'est la fin de la citation.
    Merci, madame Hitchon.
    Malheureusement, les cinq minutes sont écoulées. Je suis vraiment désolé, mais nous devons poursuivre. Vous pourrez présenter vos arguments en réponse aux questions.
    Nous allons maintenant écouter les représentants de la Société des auteurs de radio, télévision et cinéma.

[Français]

    Bonjour et merci, monsieur le président et messieurs les députés.
    La Société des auteurs de radio, télévision et cinéma est un syndicat professionnel regroupant près de 1 400 auteurs dans le domaine de l'audiovisuel.
    D'entrée de jeu, je dois vous dire que nous ne sommes pas favorables à l'adoption du projet de loi dans sa version actuelle. Si le projet de loi comporte quelques éléments intéressants, les mesures propres à renforcer le droit d'auteur sont beaucoup moins nombreuses que celles qui le limitent ou le restreignent.
    Chaque révision de la Loi sur le droit d'auteur apporte son lot de nouvelles exceptions qui influent sur le revenu des créateurs, soulèvent des problèmes d'interprétation et, parfois, entraînent une judiciarisation des rapports entre ayants droit et utilisateurs. Le projet de loi C-11 n'y fait malheureusement pas exception.
    Le régime de la copie privée ne s'applique actuellement qu'au domaine sonore. L'avènement du numérique favorisant l'accès et la reproduction des oeuvres, il nous apparaissait souhaitable que ce régime s'étende aux livres, aux films, et ainsi de suite, et qu'il protège la valeur économique des oeuvres de toute nature. Or, le projet de loi C-11 condamne à terme la copie privée en limitant le régime de compensation aux supports audio vierges...
    Excusez-moi. Vous parlez trop vite pour l'interprète.
    C'est parce que je n'ai que cinq minutes.
    Oui.
    Merci.
    Excusez-moi.
    Je disais donc que le projet de loi C-11 condamne à terme la copie privée en limitant le régime de compensation aux supports audio vierges plutôt que de l'étendre aux autres supports ou lecteurs maintenant utilisés. En créant également de nouvelles exceptions, par exemple la reproduction à des fins privées, le législateur sonne le glas de toute extension éventuelle du régime de la copie privée à l'audiovisuel et aux autres secteurs.
    Copier à des fins privées est une pratique répandue, qu'il est illusoire de vouloir enrayer ou de penser criminaliser. Le régime de copie privée permettait justement de rendre légale cette pratique en compensant les auteurs. À l'heure où les oeuvres circulent de plus en plus sur diverses plateformes, son extension s'avérait pourtant une solution potentielle aux problèmes de contrôle des utilisations.
    Le projet de loi permet l'utilisation d'oeuvres obtenues de manière légitime à des fins non commerciales de création de contenu par l'utilisateur. Cette mesure ne doit cependant s'appliquer qu'aux créations qui n'influent pas sur le marché de l'oeuvre originale, comme la création d'un vidéoclip maison ou d'un mixage de vidéoclips. Cette exception serait justifiée parce que, de plus en plus, les Canadiens utilisent le contenu de façon à contribuer au tissu culturel de notre société et qu'il est important qu'ils soient pleinement en mesure de participer à l'économie numérique.
    Il est difficile de participer pleinement à l'économie numérique en évitant toute visée commerciale. Certaines utilisations sont plutôt anodines, mais l'application de cette exception risque d'être beaucoup plus large et difficile à interpréter. Utiliser une oeuvre pour en faire une autre, c'est aussi faire abstraction du droit moral de l'auteur et de l'intégrité de son oeuvre. Comment le législateur peut-il autoriser n'importe qui à s'approprier le fruit du talent de l'auteur? Cette nouvelle exception ouvre la porte à des utilisations diverses dont le contrôle sera impossible.
    Nous n'avons rien contre la parodie et la satire; nos auteurs en écrivent. Mais autant nous défendons leur droit à les écrire, autant nous refusons que l'on s'approprie les oeuvres uniquement pour s'accrocher à leur succès et à leur notoriété.
    Bien des auteurs ont actuellement recours à la parodie et à la satire sans être poursuivis. Pourquoi le législateur croit-il utile de modifier la loi en incluant la parodie et la satire dans l'utilisation équitable? Ne risque-t-on pas d'en étendre inutilement la portée, d'ouvrir la porte à une interprétation plus permissive et de donner lieu à de nouveaux procès?
    Généralement, les exceptions sont supposément motivées par la recherche d'équilibre entre les ayants droit et les utilisateurs. Les exceptions du projet de loi C-11 touchent l'audiovisuel, mais plus encore les autres secteurs. Nulle part n'est-il démontré que l'accès gratuit aux oeuvres contribue à un rééquilibrage du rapport de force.
    Ces dernières années, la numérisation a rendu de plus en plus faciles la reproduction d'oeuvres et l'accès aux oeuvres, mais en a compliqué la rémunération. Le déséquilibre existe, mais il joue nettement à l'encontre des ayants droit.
    La loi actuelle renfermait toutes les balises nécessaires pour favoriser l'équilibre entre les ayants droit et les utilisateurs. D'une part, l'existence de sociétés de gestion collective facilite l'accès aux oeuvres. D'autre part, la Commission du droit d'auteur est en mesure d'intervenir pour fixer les tarifs si les parties en présence n'arrivent pas à une solution négociée.
    Avant d'ajouter de nouvelles exceptions au droit d'auteur, le législateur aurait pu aussi se rappeler que ce droit est enchâssé dans la Déclaration universelle des droits de l'homme, et que des traités internationaux comme la Convention de Berne spécifient que les exceptions doivent normalement relever de cas spéciaux qui ne portent pas atteinte à l'exploitation normale de l'oeuvre ni ne causent un préjudice injustifié aux intérêts légitimes du détenteur de droit.
(1720)
    Madame Lussier, vos cinq minutes sont écoulées.
    D'accord, mais j'aimerais simplement vous dire que nous déposons aujourd'hui une pétition signée par Culture équitable, un regroupement de 27 organismes. En date du 23 février, elle avait été appuyée par 14 118 citoyens. Cette pétition a été expédiée au comité en novembre dernier et nous vous la soumettons de nouveau aujourd'hui.
    Merci.

[Traduction]

    Puisque tous les témoins avaient préparé un exposé de 10 minutes, mais qu'ils n'ont eu la parole que 5 minutes, pourrions-nous veiller à ce que chacun nous remette sa déclaration préliminaire complète pour nos dossiers?
    Nous avons toutes les déclarations en main. Il ne nous reste qu'à en vérifier la traduction, monsieur Lake. Tout le monde aura accès aux documents.
    Je vous prie de m'excuser encore d'avoir dû vous interrompre après cinq minutes, mais nous voulons tirer le meilleur de votre témoignage. Ainsi, les membres du comité ont maintenant la chance de vous poser des questions.
    Nous allons commencer le premier tour de cinq minutes. Chers membres du comité, vous devrez vous y limiter.
    Monsieur Armstrong, vous pouvez commencer.
(1725)
    Je vais essayer d'être très bref.
    Monsieur Cormier, je vais commencer par vous. Pourriez-vous nous décrire brièvement ce que vous faites exactement et les services que vous offrez aux écoles? Puisque j'ai déjà été directeur d'école, je m'y connais. Pouvez-vous répondre très rapidement et avec concision?
    Essentiellement, nous sommes le représentant exclusif de milliers de films, documentaires, et ainsi de suite. En vertu de la loi actuelle sur le droit d'auteur, les établissements d'enseignement doivent nous acheter une licence pour présenter nos produits en toute légalité. C'est la nature de notre travail auprès de la plupart des commissions scolaires, écoles et établissements postsecondaires d'un bout à l'autre du Canada. Nous délivrons des licences. Nous offrons aussi du matériel d'appoint et un service après-vente, disons, à presque tous les établissements d'enseignement canadiens. Nous vendons également des licences générales, qui visent surtout les commissions scolaires, les écoles, et ainsi de suite. Habituellement, les droits que nous percevons représentent un millième de pour cent du budget global des établissements.
    Je veux être certain que vous ne vous contentez pas de vendre des licences et d'envoyer des films aux écoles. Vous leur fournissez aussi les ressources didactiques que vous créez. Les professeurs demandent ce genre de ressources, car elles sont très utiles. Elles sont axées sur les programmes scolaires. Je voulais simplement m'en assurer.
    Oui. Nous fournissons, entre autres, des guides sur les films.
    Quel est le son de cloche de la part du secteur de l'éducation? Vous demande-t-on d'abolir les licences? Est-ce bien ce qu'on vous dit? Que veulent vos clients?
    Selon presque tous les témoignages provenant des différentes branches du secteur de l'éducation, il semble que personne ne demande à être exempté de payer. Les établissements achètent des licences depuis des décennies, et ils n'ont aucun problème à continuer ainsi. Rien ne les oblige à acheter nos licences s'ils n'utilisent pas nos produits. Le marché doit accepter nos prix, et il a laissé entendre qu'il est plus que prêt à continuer de payer.
    Je vais maintenant m'adresser à M. Fisher.
    Monsieur Fisher, vos services se ressemblent. Vous créez du matériel axé sur les programmes d'enseignement, qui est en demande auprès des enseignants. Vous les vendez ensuite aux écoles et délivrez une licence. Qu'arriverait-il au secteur de l'éducation si votre industrie n'était pas là pour appuyer les professeurs? À votre avis, quelles seraient les répercussions pour les agents d'enseignement et les enseignants?
    Je vais devoir avancer des hypothèses pour vous dire ce qu'il arriverait. Il y a quelques années, le Congrès américain a recommandé d'éliminer les représentations publiques dans les écoles du pays, ce qui, au bout du compte, s'est traduit par des modifications aux dispositions législatives américaines sur le droit d'auteur. Conséquemment, la plupart des principaux fournisseurs et créateurs de documentation audiovisuelle conçue pour les salles de classe ont dû cesser leurs activités — il s'agissait d'organisations dont le chiffre d'affaires annuel s'élevait à 50 ou à 60 millions de dollars, comme l'Encyclopedia Britannica, la American Education Corporation, McGraw-Hill Films et la Learning Corporation of America. Ces entreprises n'existent plus. Ainsi, les entreprises canadiennes connaîtraient probablement le même sort, et tous les emplois de l'industrie disparaîtraient. Naturellement, très peu d'entreprises produisent encore du matériel expressément pour les salles de classe.
    Excellent. Je vous remercie.
    J'aimerais maintenant m'adresser à Mme Hitchon. Vous avez brièvement mentionné les changements que vous avez opérés pour vous adapter aux nouvelles technologies. Les commissions scolaires et les provinces ont investi dans une abondance de technologies et les ont intégrées à bien des écoles de partout au Canada, et ce, afin d'essayer de répondre aux besoins des élèves et des étudiants d'aujourd'hui et de demain. Quels types de changements avez-vous apportés à l'industrie pour mettre les ressources à la disposition des enseignants au moyen des nouvelles technologies?
    Afin de répondre à ces besoins, nous avons récemment dépensé des millions de dollars pour créer un environnement de livraison numérique dans les écoles primaires et secondaires. Les écoles ne veulent plus de copies papier. Nous avons établi une corrélation entre tous nos programmes et les programmes scolaires de l'ensemble des provinces, puis nous les avons associés. Nous avons également intégré des logiciels à l'environnement qui permettent aux professeurs d'en extraire le contenu pour créer des plans de cours et des examens, et qui permettent aussi aux élèves et étudiants de consulter l'information en ligne à partir de la maison. Si un étudiant a besoin d'un programme pour faire son devoir, on peut aussi lui donner un nom d'utilisateur et un mot de passe. Tout se fait en ligne.
    Dernièrement, nous avons fait de même avec des longs métrages. Nous avons associé des adaptations littéraires aux programmes d'études au niveau provincial, et avons conçu des guides d'apprentissage et des ressources didactiques sur le sujet.
    Tous ces changements ont été apportés pour répondre aux besoins que la communauté éducative, que les écoles devaient combler afin de marquer le siècle.
    Il vous reste 30 secondes.
    J'imagine que la conception de toutes ces ressources numériques permet aux commissions scolaires de réaliser des économies, n'est-ce pas?
    Tout à fait.
    De quelle façon?
    À l'époque, un film en 16 mm coûtait 1 500 $. Aujourd'hui, chaque école a un accès illimité à 25 000 documents audiovisuels pour 795 $ par année.
    Merci.
    Nous leur fournissons tout ce matériel.
(1730)
    Merci.
    Merci beaucoup, monsieur Armstrong.
    Je vais maintenant laisser la parole cinq minutes à M. Benskin.
    Merci.
    Ma question s'adresse probablement aux représentants des deux entreprises. Vous avez dit sans détour que le projet de loi, sous sa forme actuelle, menace vos affaires et la survie même de vos entreprises. Quels amendements pourrions-nous adopter pour éviter le pire?
    Nous croyons qu'il existe une solution simple.
    Veuillez m'excuser, monsieur Fisher, mais je dois maintenant demander le consentement unanime. À l'instar de la théorie pavlovienne, l'appel de la sonnerie signifie que nous devons nous rendre à la Chambre des communes pour voter.
    Tous les membres du comité acceptent-ils que nous poursuivions 15 minutes malgré l'appel de la sonnerie? Êtes-vous d'accord?
    Des voix: D'accord.
    Le président: Monsieur Fisher, je m'excuse encore de vous avoir interrompu. Vous pouvez maintenant répondre à la question.
    Pourriez-vous répéter la question rapidement?
    Quel genre d'amendement aimeriez-vous apporter?
    Nous pensons qu'un simple amendement pourrait sauver notre industrie. Ce n'est pas que tout le reste du projet de loi sur le droit d'auteur est parfait, mais nous voudrions simplement qu'il soit indiqué que l'exemption de l'article 29.5 ne s'applique pas lorsqu'il s'agit d'oeuvres accessibles sur le marché.
    D'accord.
    C'est simple. Nous avons soumis notre proposition à Patrimoine canadien et à Industrie Canada. Vous trouverez notre proposition en français et en anglais dans notre mémoire. Je pense que c'est une solution assez simple.
    Merci.
    J'aimerais ajouter que les éducateurs veulent simplement pouvoir accéder à la richesse des ressources qui se trouvent sur Internet sans craindre d'acquérir des exemplaires contrefaits. Ils n'essaient pas d'éviter de payer des redevances aux auteurs.
    L'amendement que nous proposons pour l'article 29.5 leur confère l'accès qu'ils réclament au matériel pour lequel il n'y a pas de société de gestion qui perçoit des redevances. L'amendement vise aussi à protéger nos entreprises, en nous permettant de percevoir des frais sur la propriété intellectuelle que nous représentons. Cela permettrait d'atteindre le juste équilibre que les éducateurs et les intervenants de notre industrie recherchent.
    Merci.
    Combien de temps me reste-t-il?
    Vous avez tout le temps qu'il faut. Il vous reste environ trois minutes.
    Vous plaisantez... vraiment?
    Vous êtes en train de le perdre, par contre.
    Je sais.
    Je m'adresse maintenant à la SARTEC. Vous avez exprimé une idée qu'on a entendue quelques fois, c'est-à-dire d'étendre le régime de compensation pour la copie privée aux supports numériques. Si j'ai bien compris, on propose essentiellement d'appliquer ce régime aux appareils vendus spécifiquement pour lire de la musique ou des fichiers audiovisuels, et non pas aux ordinateurs, aux disques durs externes et autres appareils de ce genre.
    On pourrait perdre cette compensation, parce qu'en ce moment on ne fait mention que de cassettes et de CD. Quelles répercussions cela aura-t-il sur les personnes que vous représentez?
    Comme cela n'existe pas, l'application de...

[Français]

    Vous pouvez parler en français si vous le voulez.
    D'accord, merci.
    Comme la copie privée en matière d'audiovisuel n'existe pas pour le moment, n'est pas encore présente, il n'y a pas eu de perte de revenu. Toutefois, puisque c'est maintenant possible techniquement, on espérait que la copie privée s'étende aussi à ces supports qui ne servent qu'à diffuser du contenu. On n'achète pas un lecteur MP3 pour sa beauté, mais pour le contenu qu'il va diffuser. C'est ce qui fait la valeur de ces objets. On voulait donc une contribution au même titre que les câblodistributeurs, par exemple.
    Quel est votre avis là-dessus, monsieur Légaré?
    Le fait que les oeuvres circulent de plus en plus, notamment les oeuvres audiovisuelles, nous inquiète aussi. La copie privée était une façon de contrôler, du moins en partie et sans doute de façon imparfaite, les utilisations, sinon de les compenser. Avec l'affaiblissement de la copie privée sonore, il n'y aura pas de copie privée audiovisuelle. Il va y avoir une multiplication des utilisations, mais il va devenir de plus en plus difficile d'obtenir compensation.
    Il vous reste 30 secondes.
    Selon vous, quelle source de financement permettrait d'obtenir une redevance collective pour la copie privée des oeuvres audiovisuelles?
    À ce jour, la source était l'acheteur, donc l'utilisateur, et la Commission du droit d'auteur était à même de fixer une redevance adéquate.
    Si on parle d'équilibre dans la loi, c'est qu'il existe des sociétés de gestion et une Commission du droit d'auteur. Ici, effectivement, il y a un rapport de force inégal. C'est étonnant, étant donné que peu de gens ont pu démontrer qu'il y avait un rapport de force inégal en faveur des créateurs. Quoi qu'il en soit, s'il y a un rapport de force inégal, la Commission du droit d'auteur est apte à trancher la question et à déterminer la teneur de la redevance.
(1735)
    Merci. Votre temps est écoulé.

[Traduction]

    La parole est à M. Braid.
    Merci, monsieur le président.
    Je m'adresserai d'abord à Mme Hitchon. J'aimerais comprendre ce qui vous pousse à croire que le projet de loi C-11 pose une menace pour votre modèle d'affaires. Pourriez-vous nous donner quelques exemples?
    Prenons une émission que nous distribuons sur les Prairies canadiennes. Nous facturons des frais de prestation devant public, qui reviennent en grande partie au producteur. Supposons qu'environ 50 p. 100 des frais reviennent au producteur.
    De quel support s'agit-il? De quel type de produit parlez-vous?
    Le support n'a pas d'importance. Nous l'offrons sur DVD et en diffusion en mode continu, et nous concédons des droits de reproduction aux commissions scolaires. Nous l'offrons aussi sur une plateforme numérique qui peut être affichée sur Internet. Nous offrons donc tous les supports possibles.
    Nous ne pourrons plus facturer ces frais aux commissions scolaires, parce qu'elles en seront exemptées.
    Vous parlez des droits de licence.
    Oui. Notre argument est que si nous ne pouvons facturer que 9,99 $, qui va vouloir produire du contenu canadien? Comment les producteurs pourront-ils créer quoi que ce soit sur les Prairies ou les Maritimes? Qui va faire cela dans les deux langues officielles?
    Alors, quand une école achète quelque chose aujourd'hui, est-ce qu'elle paie pour le produit et pour les droits de licence?
    Oui. Et les tarifs ne sont pas toujours les mêmes. Si l'école veut seulement acquérir les droits de présentation devant public, parce que le produit est disponible sur le marché, le tarif ne sera pas le même que si elle avait voulu en avoir une copie physique.
    Donc, même après l'adoption du projet de loi C-11, les écoles continueront d'acheter vos produits.
    Non, elles seraient exemptées de l'assujettissement au droit d'auteur sur nos produits.
    En quoi ce serait différent d'aujourd'hui, dans ce cas? Vous nous dites qu'elles achètent vos produits et qu'elles paient des droits de licence.
    Oui.
    D'accord. Selon le projet de loi C-11, elles achèteraient encore vos produits, mais n'auraient plus à payer de droits de licence.
    Je vais demander à John de répondre à votre question, car je ne suis pas certaine de bien la comprendre.
    Les dispositions sur la prestation devant public sont très importantes pour nous, car elles contribuent à stabiliser les prix et nous distinguent du marché de la vidéo domestique. Le marché de la vidéo domestique consiste à vendre des vidéocassettes ou des DVD. Les consommateurs peuvent en acheter à moindre coût, selon les stocks du producteur. Les émissions de Disney, par exemple, vont être produites à 20 millions d'exemplaires.
    Sur le marché canadien des émissions éducatives, c'est déjà beau si on peut en vendre 150 exemplaires, alors les droits de prestation devant public sont plus élevés que les droits de visionnement privé pour une émission de Disney. C'est ce qui permet de stabiliser les prix des copies physiques. Bon nombre de nos produits sont aussi offerts sur le marché de la vidéo domestique, et par l'octroi de licences, nous avons permis aux écoles et aux enseignants d'accéder aux millions d'exemplaires disponibles dans la collectivité locale, et de les présenter devant public.
    Pouvez-vous quantifier les répercussions financières ou économiques potentielles? Donnez-moi quelques chiffres pour m'aider à comprendre.
    Essentiellement, je pense que nous serions précipités vers la faillite, même si nous pouvions adapter un nouveau modèle d'affaires sur deux ou trois ans. Je ne pense pas que nous pourrions tenir aussi longtemps.
    Quel pourcentage de vos revenus serait touché?
    Dans notre cas, les droits de prestation devant public cédés au secteur de l'éducation représentent 60 p. 100 de nos recettes.
    J'ajouterais à ce que John a dit que le projet de loi C-11 leur permet également d'en faire des reproductions. À l'heure actuelle, les commissions scolaires doivent débourser 5 000 $ pour faire 1 000 copies d'un titre. Elles pourront maintenant payer les frais ponctuels de 49 $, ou peu importe le montant, et en faire autant de copies qu'elles le veulent. Elles pourraient transposer un titre sur un support numérique et le rendre accessible à tous leurs enseignants, sans payer un sou de plus.
(1740)
    D'accord. Est-ce que la numérisation de vos produits offre un modèle d'affaires sans risque pour vous? Est-ce que vous tirez profit de tout ce que peuvent offrir les plateformes numériques aujourd'hui?
    Oui. C'est une proposition qui coûte cher, comme vous pouvez l'imaginer, et nous avons investi des millions de dollars pour la concrétiser. Même pour la numérisation des longs métrages, tout doit satisfaire aux normes provinciales. C'est très, très onéreux.
    Merci beaucoup. Vos cinq minutes sont écoulées.
    Nous cédons donc la parole à M. Regan pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à vous tous d'être ici aujourd'hui. C'est dommage que nous n'ayons pas plus de temps.
    Des témoins nous ont dit aujourd'hui que les consommateurs allaient devoir payer plus cher avec ce projet de loi. On nous a dit que l'industrie de la musique allait subir des pertes de quelque 22 millions de dollars à cause de cela. Et maintenant, vous nous dites que le projet de loi C-11, à votre avis, va entraîner des pertes d'emplois.

[Français]

    Monsieur Cormier, pourriez-vous nous dire à combien se chiffre la perte d'emplois que vous prévoyez et de quelle façon on devrait amender le projet de loi pour éviter cette situation?

[Traduction]

    Un peu comme Criterion, environ 70 p. 100 de nos revenus proviennent du secteur de l'éducation et des droits d'exécution devant public. Très peu d'entreprises pourraient survivre bien longtemps à une réduction de 70 p. 100 de ses revenus.
    Notre entreprise devrait fermer ses portes presque immédiatement. Nous sommes en affaires depuis 1966. Nous avons 10 employés. Mais c'est l'ensemble de l'industrie qui sera touchée: les entreprises de notre industrie ne peuvent pas toutes venir témoigner devant le comité. Nous faisons partie des plus grandes entreprises, et nous représentons de façon non officielle l'ensemble de l'industrie. Des milliers d'emplois sont liés à notre secteur d'activités. Notre régime de licences génère des millions de dollars pour les économies locales.
    C'est donc une mesure très draconienne pour nous. Si nous ne pouvons pas facturer des droits d'exécution devant public, notre principale source de revenus, il ne nous reste plus grand-chose à faire.
    D'accord. Je vais vous poser une question, et j'aimerais ensuite que M. Fisher y réponde aussi. M. Fisher ou Mme Hitchon — j'oublie lequel des deux — nous a proposé un amendement indiquant que si le produit est offert sur le marché, l'exemption ne s'applique pas...
    M. Jean-François Cormier: Eh bien...
    L'hon. Geoff Regan: D'autres témoins nous ont proposé, en prévoyant peut-être des sections différentes selon les secteurs, d'adopter un amendement visant à inclure dans le projet de loi le critère à six volets appliqué par la Cour suprême du Canada dans l'affaire CCH. Que pensez-vous de ces deux possibilités?
    L'article 29.5 proposé fait précisément mention des oeuvres « cinématographiques ». Notre industrie est visée spécifiquement par cet article.
     Nous voulons que l'amendement précise que l'exemption accordée aux écoles et aux conseils scolaires n'est applicable que lorsqu'aucune société de gestion, comme la nôtre, ne perçoit des droits sur les films présentés. Si le produit existe déjà et que le service est déjà offert sur le marché, comme c'est le cas depuis 20 ans, les commissions scolaires ont affirmé être prêtes à continuer de payer les droits requis. Nous pensons que l'intention derrière cet article est surtout de couvrir les produits qui ne sont pas offerts sur le marché, que les écoles ne peuvent trouver et que nous ne distribuons pas — généralement des produits trouvés sur Internet.
    Monsieur Fisher ou madame Hitchon, avez-vous des commentaires à formuler là-dessus?
    Je dois d'abord préciser que nous avons été étonnés de voir cet article, car nous sommes en contact quotidiennement avec les intervenants du secteur de l'éducation dans le cadre de nos activités, et d'après leur témoignage devant le comité et à propos du projet de loi C-32, ils ne cherchent pas à éviter de payer les droits.
    Lorsque nous avons rencontré les représentants du ministère de l'Industrie et de Patrimoine canadien, personne n'a pu nous expliquer pourquoi cette disposition avait été introduite dans le projet de loi. Aussi, aucune étude économique n'a été effectuée pour déterminer quelles seraient les conséquences et les retombées de l'adoption de cette disposition.
     Nous ignorons donc totalement pourquoi elle est là. Selon nous, elle ne rend service à personne.
    Pouvez-vous m'aider à comprendre cette idée que « si le produit est offert sur le marché, l'exemption ne s'applique pas »? J'essaie de voir quels vidéoclips, ou peu importe le produit, qui sont sur Internet ne seraient pas aussi offerts sur le marché quelque part.
    Je pense que ce qu'il voulait dire par là tout à l'heure, c'est « offert par une société de gestion ».
    Il vous reste moins d'une minute.
    D'accord. C'est ce que vous voulez dire.
    Est-ce exact, monsieur Fisher?
    Oui, c'est exact.
    Alors, vous ne voulez pas dire en général...?
    Par exemple, des entraîneurs affichent des programmes de leur cru sur YouTube, et les enseignants veulent utiliser ces ressources, mais craignent de violer des droits d'auteur en le faisant.
    Je pense que le but est de faire en sorte que les enseignants puissent accéder à cette mine d'or, sans nous pénaliser pour autant, et sans pénaliser non plus l'ensemble de la communauté éducative, parce que ces ressources ne seront plus disponibles dans dix ans. Il s'agit de trouver le juste équilibre entre ce que réclament les enseignants et ce que nous faisons.
(1745)
    Merci.
    Merci, monsieur Regan.
    Sur les 15 minutes que le comité a convenu de prendre, vous en aurez environ trois, monsieur Lake.
    Cela me convient.
    Mes questions vont s'adresser à la SARTEC, si vous me le permettez, et ce sera assez simple. Dans votre mémoire, vous proposez d'étendre le régime de copie privée aux autres supports ou lecteurs maintenant utilisés, et de ne pas le restreindre aux supports audio vierges. À quels supports et lecteurs faites-vous référence?

[Français]

    Je parle des lecteurs MP3 et de tout type de lecteur numérique, notamment.

[Traduction]

    Donc les iPod et les iPad en feraient partie. Qu'en est-il des ordinateurs et des portables?

[Français]

    S'ils servent aux mêmes fins qu'un iPad ou un iPod, la réponse est oui.

[Traduction]

    De nos jours, les gens vont bien sûr se servir de leur Mac, par exemple, pour entreposer de la musique et d'autres fichiers. Alors vous dites qu'il devrait effectivement y avoir une compensation à cet égard. À combien se chiffrerait cette compensation?
    Nous ne savons pas à combien cela se chiffrerait. Le montant devrait être déterminé par la Commission du droit d'auteur du Canada, qui établirait un prix raisonnable.
    Et à quoi pourrait ressembler ce prix raisonnable? Qu'est-ce qui serait raisonnable selon vous?
    Je ne sais pas. Je n'en ai aucune idée.
    Quand la Commission du droit d'auteur s'est penchée sur la question précédemment, je ne me souviens plus... Je pense que c'est la Société canadienne de perception de la copie privée qui a proposé un montant de 75 $ pour les appareils de plus de 30 gigaoctets, comme les iPod...
    Non, nous n'avons jamais avancé...
    J'invoque le Règlement. C'est de la désinformation.
    Non, c'est un débat, malheureusement.
    Je vous prie de terminer votre question.
    Je pense que c'est le montant qui avait été proposé lors des discussions à ce moment-là. Vous pouvez le vérifier dans la Gazette du Canada, je crois.

[Français]

    Ce n'est pas du tout le montant que nous avions en tête, et je vous dirais que notre position est plus générale. Les oeuvres sont des propriétés. Si elles sont utilisées, elles doivent être rémunérées, et cette rémunération doit, bien sûr, être raisonnable. Il existe un organisme qui peut effectivement en vérifier le caractère raisonnable. Or selon la proposition qui est sur la table, ces oeuvres ne seront désormais plus rémunérées puisqu'on passe des supports actuels que sont les CD aux supports numériques. C'est là que les plus nombreuses transactions vont se faire.
     Si les auteurs ne sont pas rémunérés alors que ces oeuvres seront reproduites constamment, quand le seront-ils?

[Traduction]

    Pour clarifier les choses, vous dites que si j'achète un morceau de musique, sur CD ou un album quelconque, ou même sur iTunes, et que je veux l'avoir sur mon iPad, mon iPod et mon ordinateur, je devrais le payer quatre fois — une fois pour l'original et trois fois pour les autres utilisations.
    Je vais vous permettre de répondre à la question avant de lever la séance.

[Français]

    Les gens du domaine de la musique pourront peut-être vous en parler avec plus de précision, mais je peux vous dire qu'à l'heure actuelle, lorsque vous achetez de la musique selon une offre légale, vous avez le droit de l'enregistrer sur divers supports, par exemple sur votre iPad. On vous permet parfois jusqu'à trois, quatre ou cinq utilisations. Cependant, c'est une autre histoire si vous vous la procurez, la prêtez à quelqu'un d'autre ou la faites copier par une autre personne.
    Présentement, l'offre légale permet effectivement de la reproduire sur plus d'un appareil. Ce n'est pas ce que nous souhaitons. Nous voulons justement qu'il y ait une redevance sur les lecteurs pour compenser les actes de reproduction, par exemple lorsque les gens copient des pièces qu'ils n'ont pas nécessairement achetées et qu'ils reproduisent leurs CD sur leur iPod.

[Traduction]

    Merci.
    Je tiens encore une fois à présenter des excuses à nos témoins. Je me montre plutôt inflexible à l'égard du temps alloué, mais nous devons vraiment nous présenter aux votes.
    J'invoque le Règlement, monsieur le président. Je dois préciser une chose, parce qu'ils pourraient...
    C'est le débat qui se poursuit, mais nous devons conclure là-dessus.
    D'accord, mais le montant vient bel et bien de la Commission du droit d'auteur.
    Merci, monsieur Lake.
    Je prie encore une fois les témoins de nous excuser. Merci de vous être joints à nous. Le comité accorde beaucoup d'importance à vos témoignages.
    Nous nous réunissons demain à 9 heures, dans la pièce 253-D.
    La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU