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Bonjour, tout le monde.
Je souhaite la bienvenue à nos témoins et à nos invités à la sixième séance du Comité législatif du projet de loi .
Avant de débuter, j’ai une brève note. Nous avons un petit problème technique. Notre agent des délibérations et de vérification, qui accomplit un travail remarquable, est très rapide à activer les microphones. Veuillez ne pas les toucher, particulièrement les microphones numéro 17 et 18 et celui de M. Lake, parce que cela cause des problèmes.
Cela étant dit, j’aimerais brièvement dire quelques mots aux témoins. Je sais que notre greffière vous en a déjà informé, mais chaque organisme aura 10 minutes pour faire son exposé. Après les exposés, nous poursuivrons avec les questions et les commentaires des députés, qui auront chacun cinq minutes.
Je vous présente Richard Gray et Tanya Woods, des représentants de CHUM Radio. Nous avons également Michael McCarty d’ole. Enfin, nous entendrons Nancy Marrelli, qui représente le Conseil canadien des archives.
Nous allons commencer les exposés de 10 minutes par celui de CHUM Radio.
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Bonjour, monsieur le président, messieurs les députés.
Je m’appelle Tanya Woods. Je suis conseillère juridique pour BCE, et je représente aujourd’hui Bell Média. Je suis accompagnée par Richard Gray, directeur général de Magic 100, Bob FM, CFRA et The Team 1200 à Ottawa.
Nous vous remercions de votre intention de procéder avec le train de mesures visant à réviser le droit d'auteur, ainsi que de l’occasion offerte à Bell Média de présenter son point de vue sur le projet de loi C-11. Nous applaudissons les mesures de modernisation du droit d'auteur entreprises par le gouvernement, car cela permettra aux entreprises canadiennes de continuer d’innover et de maintenir un avantage concurrentiel dans un marché international en constante croissance.
Au cours de la dernière année, Bell a grandi et évolué. Elle était déjà l’un des plus importants fournisseurs de services Internet et de services téléphoniques, et elle est devenue l’un des plus importants radiodiffuseurs et producteurs de contenus à la suite de l’acquisition de CTV.
Aujourd'hui, Bell Média est fière de posséder et d'exploiter 33 stations de radio ayant une licence, y compris les anciennes stations CHUM, qui existent dans 14 marchés partout au Canada. Bell Média est très bien placée pour offrir son point de vue sur le droit d'auteur, à titre de titulaire de droits d'auteur et de propriétaire et distributeur de contenu.
En tant que titulaire de droits d'auteur et distributeur de contenu, Bell Média appuie les objectifs du projet de loi C-11, mais nous aimerions orienter la discussion vers deux sujets de grande préoccupation qui, s'ils étaient réglés, garantiraient la faisabilité et l’équilibre du projet de loi.
Nous aborderons d'abord le système d'avis, puis nous aimerions discuter des copies techniques qui sont faites par les stations de radio à des fins de radiodiffusion.
Nous croyons que le gouvernement ne s'est pas trompé en ce qui a trait au système d'avis. Nous sommes satisfaits du régime proposé et nous espérons, avec quelques modifications techniques, qu'il constituera un outil utile pour lutter contre le piratage.
Ce que l'on n'aurait pas pu prévoir, mais qui doit être pris en compte, c’est que depuis l’introduction des projets de loi C-32 et C-11, la technologie et les façons de consommer le contenu ont changé. Ce changement est évident lorsque vous vous trouvez dans un café ou un aéroport et que vous lisez les nouvelles sur votre tablette ou votre téléphone intelligent, peut-être au moyen d'une connexion Wi-Fi.
Grâce aux témoignages entendus au sujet du projet de loi C-32, nous avons appris que certains des plus grands fournisseurs de services Internet utilisent un système d'avis depuis des années; toutefois, il ne s’agit pas de la majorité. En fait, la plupart des FSI ne recourent pas encore à un tel système, ni la plupart des autres fournisseurs de services réseau, comme les fournisseurs de services sans fil.
En tant que titulaire de droits d'auteur, Bell Média tient à s’assurer de la mise en place d'un système d'avis efficace qui lui permettra de mieux sensibiliser les personnes soupçonnées de piratage, tout en protégeant la neutralité des messagers, comme les FSI qui transmettent les messages.
Nous savons que tous les fournisseurs — nous y compris — auront besoin de temps pour mettre sur pied et rendre pleinement fonctionnel leur système d'avis. Nous tenons à affirmer que nous appuyons l’idée d'accorder du temps pour établir et mettre en oeuvre un système d'avis efficace, et nous aimerions que le projet de loi accorde un temps suffisant pour mettre en place un système qui se conforme aux nouveaux règlements avant l’entrée en vigueur des dispositions.
Nous tenons également à préciser que nous croyons que le système d'avis est un service important et que nous sommes prêts à payer des frais raisonnables pour aider les fournisseurs de services réseau à concevoir des systèmes efficaces qui évoluent avec la technologie.
Nous constatons que, tel qu'il est rédigé, le projet de loi envisage la possibilité que les fournisseurs de services réseau soient incapables d'exiger des frais pour les services associés au système d'avis. En étant à la fois titulaire de droits d'auteur et fournisseur de services réseau, Bell Média croit que les fournisseurs de services réseau doivent participer à l’application des règles et transmettre à leurs clients les avis de violation de droits d'auteur qu’ils reçoivent des propriétaires de contenu, mais elle croit aussi que les propriétaires de contenu doivent rembourser aux fournisseurs de services réseau les coûts de ce service. C'est une question d'équité.
Par exemple, lorsqu'on fait appel aux services d’un messager, des frais sont associés à l’expédition du message, et aucune exception n’est accordée aux entreprises à cet égard. Il n'y a aucune raison que ce soit différent dans le cas du système d'avis. Notre objectif est évidemment de seulement récupérer nos coûts.
Pour conclure nos commentaires sur le système d'avis, nous demandons que le projet de loi accorde le temps nécessaire à la conception d'un système d'avis efficace et qu'il fasse en sorte que les fournisseurs de services réseau puissent récupérer les coûts d'établissement de ce service, qui profite aux propriétaires de contenu.
Je vais maintenant laisser Richard vous parler de la radio.
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La radio a également été touchée par les changements technologiques, mais, comme nous le verrons, certains éléments n'ont pas changé. D’ailleurs, les radiodiffuseurs locaux continuent de faire partie intégrante de leurs collectivités: ils emploient des personnes qui y vivent, ils contribuent à la collectivité, ils créent du contenu local, ils investissent dans les artistes locaux et ils font leur promotion.
Pour mieux connaître le rôle de Bell Média, considérons ce qui suit. Nous employons 723 personnes travaillant dans notre secteur radio. Nous commanditons des milliers d'événements communautaires. Lors de l'un de ces événements les plus récents, la station CFRA d'Ottawa a recueilli plus de 2,4 millions de dollars pour le financement de programmes de soins à l'Hôpital Élisabeth-Bruyère.
Nous soutenons les artistes locaux et nous en faisons la promotion, notamment grâce à l’initiative d’artistes émergents de Bell Média, qui permet d’entendre tous les mois un nouvel artiste canadien sur nos stations de radio aux quatre coins du pays. Nous investissons dans le développement du talent canadien en apportant des contributions substantielles aux initiatives de développement de contenu canadien. En 2011, Bell Média a versé 7,3 millions de dollars à cette fin. Nous contribuons au succès des artistes canadiens de plusieurs façons, par exemple en faisant entendre leurs oeuvres sur les ondes et en commanditant des concerts. En 2011, la station de radio de Windsor — 93.9 The River — a beaucoup aidé des musiciens indépendants en faisant jouer leurs pièces plus de 10 000 fois.
En outre, nous continuons de soutenir l’industrie de la musique par l’intermédiaire des droits d'auteur que nous versons. L'an dernier, Bell Média a remis 8,1 millions de dollars des 64 millions de dollars versés par les radiodiffuseurs pour les chansons qu'ils ont diffusées. Nous ne remettons pas cela en question: nous continuerons de verser ces redevances. À titre de propriétaires de contenu, nous croyons fermement que les radiodiffuseurs doivent verser un montant pour la musique qu'ils diffusent.
Toutefois, à part les droits versés pour la diffusion de chansons, les radiodiffuseurs doivent également payer 21 millions de dollars aux mêmes personnes pour les copies techniques faites pour la diffusion de ces mêmes chansons. Non seulement les deux paiements pour une seule diffusion constituent un paiement en double, mais le paiement de 21 millions de dollars pour la reproduction constitue en fait une taxe numérique, ou encore une pénalité à cause de l'innovation. Nous ne la payions pas lorsque nous faisions tourner des disques de vinyle ni lorsque des D.J. faisaient jouer eux-mêmes des CD. Mais, parce que la technologie a évolué et que la personne qui venait porter les CD de sa maison de disques a été remplacée par un système de livraison numérique créé par les maisons de disques elles-mêmes, nous devons maintenant payer pour recevoir la musique ainsi que pour la mettre dans un format que nous pouvons utiliser.
Il y a quelque chose qui cloche ici. Les maisons de disques font d'immenses gains d'efficacité et, même si cela pourrait nous être utile, nous ne partageons pas du tout ces gains. Au contraire, nous les payons, et nous les payons cher, malgré les contributions que nous continuons de faire pour soutenir leurs activités. Non seulement ce système est contraire à l’intuition, mais il n’atteint pas les objectifs fondamentaux du projet de loi qui, d'après ce que nous comprenons, vise à soutenir également l’innovation et l’efficacité.
Le projet de loi C-11 tente de régler ce problème en disant que nous n’avons pas besoin de payer ces copies numériques si nous les détruisons dans les 30 jours. Même si l’intention est bonne, cette solution est déraisonnable et irréaliste, car chaque station de radio devrait mettre en place des processus qui demandent beaucoup de temps et faire d'autres copies. Le paragraphe 30.9(4), dans sa version actuelle, ne montre pas une intention claire et elle maintient le statu quo — ce qui ne favorise pas l’innovation et laisse entendre à l'industrie de la radio qu’elle devra payer plus cher pour des solutions novatrices qui correspondent à des technologies précises.
Certains ont dit qu’une exemption significative pour les radiodiffuseurs aurait de fortes répercussions sur les artistes canadiens. Nous savons, comme l’a affirmé mardi matin la Fédération canadienne des musiciens, que ce n’est pas le cas. La plupart des sommes versées vont aux maisons de disque et aux éditeurs, dont beaucoup ne sont même pas établis au Canada.
En somme, nous demandons au gouvernement de modifier l’exemption visant les radiodiffuseurs en créant une exemption claire pour les copies techniques, ce qui permettra de reconnaître et d’encourager l'innovation, de faciliter les gains d'efficacité et, ce qui est encore plus important, de mettre fin au paiement en double.
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Bonjour, monsieur le président, chers membres du comité, mesdames et messieurs.
Je m'appelle Michael McCarty et je suis le président d'ole, le plus grand éditeur de musique au Canada. Nous avons investi plus de 115 millions de dollars dans les droits d'auteur pour les oeuvres musicales. Compte tenu de l'ampleur de nos investissements dans cette industrie, nous portons un très vif intérêt au projet de loi . Notre répertoire de plus de 45 000 chansons génère des redevances partout dans le monde. Ces recettes finissent par retourner au Canada, contribuant ainsi au PIB national, à l'emploi et à l'assiette fiscale. Les chansons et les compositeurs d'ole ont reçu de nombreux prix canadiens, ainsi qu'un Grammy pour White Horse, une des nombreuses compositions de Taylor Swift que nous comptons à notre actif.
Bien que le projet de loi semble partir de bonnes intentions en essayant de moderniser la Loi sur le droit d'auteur du Canada, le fait est qu'il aura des effets destructeurs sur les créateurs de musique et les titulaires de droits, d'autant plus qu'il ne règle pas le plus grand problème en matière de piratage: le piratage de musique industriel. Cela dit, il est possible de remédier aux lacunes du projet de loi en y apportant des modifications relativement simples, mais cruciales. Nous exhortons donc le comité à renvoyer le projet de loi au Parlement pour y intégrer ces modifications.
Notre position est simple. Les créateurs doivent être rémunérés pour l'utilisation de leurs oeuvres d'un bout à l'autre de la chaîne de valeur numérique. C'est peut-être une évidence, mais on doit la souligner dans le contexte actuel, où prédominent des forces qui nuisent au droit d'auteur. Voici les faits: il s'est écoulé 18 ans depuis la création d'Internet et 13 ans depuis l'arrivée de Napster. La combinaison de ces deux puissants facteurs a donné lieu à une fastueuse fête qui dure depuis une décennie, à la grande joie d'entrepreneurs, de nouvelles entreprises de haute technologie, d'investisseurs en capital de risque, de sociétés de télécommunications, de moteurs de recherche Internet et de fabricants de matériel. Les créateurs et les titulaires de droits n'y ont pas été invités, mais ce sont eux qui ont fini par payer la note. La beuverie financière des fêtards ne connaît pas de bornes, et le projet de loi ne propose aucun remède à la situation.
Le droit d'auteur est une bonne chose. Grâce au droit d'auteur, on transforme l'art en dollars. Les transactions liées au droit d'auteur créent des marchés dynamiques qui permettent aux créateurs de monnayer leurs oeuvres, d'en multiplier la valeur, de propulser leur carrière et de protéger leur intégrité artistique. La chaîne de valeur repose sur le droit d'auteur: c'est ce qui permet aux artistes de rejoindre le public et d'obtenir une rémunération adéquate pour leurs oeuvres. À l'ère numérique, les idées ont parfois plus de valeur que les biens tangibles, et un pays qui ne parvient pas à protéger la propriété intellectuelle met forcément en péril son avenir économique. Autrement dit, il faut préserver la capacité des créateurs et des titulaires de droits de profiter de leurs créations, et non seulement leur droit au profit.
Pour transformer l'art numérique en argent, les lois sur le droit d'auteur doivent s'appliquer aux entreprises dont les produits et services facilitent l'accès à l'art numérique. Pour paraphraser Jerry Lee Lewis, le fameux pionnier du rock and roll, on peut dire que le monnayage, ça brasse en masse. Toutefois, comme la plupart des choix de vie faits par M. Lewis, cette activité se produit surtout en marge de la loi.
La monétisation du droit d'auteur génère des milliards de dollars chaque année au profit de tous les intervenants, à l'exception des créateurs et des titulaires de droits d'auteur. Le projet de loi ne fait rien pour changer la donne. Au contraire, il favorise largement les resquilleurs, c'est-à-dire ceux qui profitent avec joie des oeuvres musicales, sans pour autant en payer les frais, jugeant que cette responsabilité appartient aux autres. Le projet de loi privilégie les industries de distribution plutôt que les créateurs et permet la mise en place de systèmes de livraison aux dépens de ces derniers. Des sommes considérables sont refilées aux industries qui facilitent la violation du droit d'auteur et qui en profitent injustement. Les fournisseurs de services Internet, les moteurs de recherche Internet, les annonceurs, les sites Web et les fabricants d'appareils participent tous à la monétisation des oeuvres musicales, souvent sans payer un sou aux créateurs. Les resquilleurs ont su bâtir des entreprises très lucratives pour leur propre bien, tout en faisant diminuer considérablement la valeur de la musique enregistrée. Hélas, le système paie très rarement les créateurs parce que la loi ne l'exige pas. Aux termes du projet de loi , ces entreprises continueront de profiter de la situation.
Sous prétexte de protéger l'innovation, le projet de loi vise à sauvegarder le secteur de la technologie au détriment de ceux qui créent de la musique. En fait, les compositeurs et les musiciens offrent à la société un bien culturel innovateur qui est tout aussi important. Préconiser un type d'innovation plutôt qu'un autre n'est guère dans l'intérêt de la population canadienne.
Le projet de loi ne fournit aucun nouvel outil viable pour aider les créateurs à monnayer leur art; il mise à tort sur de mauvaises stratégies de lutte contre le piratage, notamment les serrures numériques et le système d'avis. Dans le contexte des oeuvres musicales, des techniques comme les serrures numériques et les procès intentés contre des amateurs de musique n'ont pas réussi à réduire le piratage ou à bâtir le marché. Le système d'avis, présenté comme un moyen d'amener les fournisseurs de services Internet à déclarer toute activité de piratage sur leurs réseaux, ne fait que mettre le blâme sur le consommateur. Résultat: les fournisseurs de services Internet obtiennent une plus grande protection, tout en profitant du piratage. Pour faire appliquer le droit d'auteur, nous n'avons pas besoin de solutions temporaires, mais bien d'un marché. Tant que les principaux agents qui encouragent le piratage seront protégés contre toute responsabilité, ils pourront s'approprier, vendre ou utiliser les oeuvres des créateurs sans rien leur payer.
Voici une des grandes ironies du projet de loi. Non seulement il ne prévoit aucun outil de protection moderne, mais il en retire deux: la disposition sur la reproduction mécanique et celle sur la copie privée. C'est un pas en arrière dans notre capacité de transformer l'art numérique en argent. Les redevances pour la reproduction mécanique constituent un des moyens les plus importants dont disposent les compositeurs pour se faire payer par les stations de radio qui diffusent leur musique. On accrédite ainsi le processus de reproduction numérique utilisé par la plupart des stations modernes pour faire jouer de la musique. La reproduction mécanique est un exemple qui illustre clairement le bon fonctionnement du régime de droit d'auteur.
Le gouvernement se sert de la loi pour établir un droit, ce qui crée un marché. Or, cette importante source de revenus, qui produit environ 20 millions de dollars par année, disparaîtra si on applique le projet de loi . J'espère qu'on prendra des mesures pour remédier à cette conséquence imprévue.
Vers la fin des années 1990, le Canada a apporté une réponse élégante et progressiste à un problème presque identique à celui auquel nous sommes confrontés aujourd'hui, c'est-à-dire la pratique fort répandue et irrépressible qui consiste à copier de la musique. Notre régime de la copie privée était un outil efficace qui permettait aux amateurs de musique de copier de la musique, tout en s'assurant que les créateurs recevaient une part de revenu de la vente de CD vierges. Toutefois, l'utilisation de CD pour copier de la musique est devenue une pratique désuète; les CD ont été remplacés par de nouveaux médias et services numériques.
Par conséquent, les revenus tirés du régime de la copie privée, qui a permis de payer jusqu'à présent plus de 180 millions de dollars à nos artistes, sont sur le point de disparaître. Le Canada a du rattrapage à faire. Il y a plus de 40 pays dont le régime de la copie privée s'applique à la plupart des appareils et médias numériques. Le projet de loi paralyserait de manière permanente nos efforts visant à moderniser le régime canadien de la copie privée. Nous devons avancer, et non reculer.
Il y a lieu d'apporter quelques modifications relativement simples pour améliorer le projet de loi . Elles sont présentées en détail dans notre mémoire.
Premièrement, il faut rappeler à l'ordre les profiteurs en élargissant la disposition habilitante. Bien que celle-ci vise à rendre en violation du droit d'auteur le fait de faciliter la commission de telles violations en ligne, elle est formulée de façon si étroite qu'elle ne s'appliquera qu'aux cas les plus aberrants de piratage. On devrait en élargir la portée pour inclure toutes les industries qui agissent comme des parasites et qui profitent du piratage.
Nous aurions ainsi une loi qui ressemble à la loi américaine sur la complicité de contrefaçon. Aux États-Unis, les entreprises qui contribuent à la violation du droit d'auteur peuvent être aussi responsables que les personnes qui commettent l'acte de violation proprement dit. C'est cette loi qui a inspiré la création de la boutique iTunes. Apple devait trouver un moyen d'immuniser le iPod contre toute allégation de complicité de contrefaçon; voilà pourquoi elle a créé la boutique iTunes. Forte de l'appui des maisons de disque, la boutique iTunes est devenue l'un des services numériques les plus innovateurs jamais conçus, tout en procurant une nouvelle source de revenus aux créateurs et aux titulaires de droits.
Grâce à une meilleure disposition habilitante, on créerait une solution, axée sur le marché, au problème des resquilleurs et éliminerait le besoin d'élargir la portée de la redevance sur la copie privée. Les entreprises qui facilitent la violation du droit d'auteur seraient tenues responsables de leurs actes. Par exemple, les fournisseurs de services Internet auraient une décision simple à prendre: enlever le matériel contrefait de leurs réseaux ou négocier un paiement avec les propriétaires et les fournisseurs du contenu. Une telle approche servirait de tremplin à un marché qui fonctionne bien et permettrait aux fournisseurs de services Internet de transformer leurs activités propices au piratage clandestin en des activités légitimes.
Deuxièmement, nous recommandons de mettre fin à l'expropriation des droits actuels. Si le projet de loi est adopté sans aucune révision, on perdra des revenus annuels de plusieurs millions de dollars provenant des licences de reproduction mécanique. À cause d'une échappatoire majeure dans le projet de loi, pour éviter de payer des redevances, les diffuseurs n'auraient qu'à rafraîchir leurs unités de disque dur tous les 30 jours en copiant le contenu d'une unité à une autre. Ole appuie la position présentée à ce sujet par l'Association canadienne des éditeurs de musique et CSI.
Enfin, bien que nous préconisions l'élargissement de la disposition habilitante pour créer un marché où il ne sera pas nécessaire d'élargir la portée de la redevance sur la copie privée, si cela ne se concrétise pas, Ole appuie les recommandations formulées par la Société canadienne de perception de la copie privée et l'Association canadienne des éditeurs de musique pour élargir la portée de la copie privée.
Pour conclure, si le projet de loi est adopté dans sa version actuelle, cela aura pour effet de réduire de plusieurs millions de dollars le revenu annuel collectif des compositeurs et des artistes, de fournir une protection juridique accrue aux entreprises qui facilitent le piratage et qui en tirent profit, et d'appuyer la philosophie qui consiste à voler le contenu pour bâtir une entreprise de distribution.
Pour qu'il y ait un marché équitable, il faut un vendeur et un acheteur consentants qui sont libres de négocier la vente d'un produit ou d'un service. Si l'acheteur peut s'emparer du produit sans le payer, on a affaire à un marché dysfonctionnel. Dans le cas des créateurs de musique, le marché numérique dysfonctionnel les a empêchés de transformer leur art numérique en argent.
Combien de temps nos artistes devront-ils attendre avant que la loi leur permette enfin de bien gagner leur vie? Le projet de loi constitue notre dernière chance de corriger la situation pendant au moins une décennie. Nous devons appuyer les créateurs canadiens dans tous les domaines. Ne décourageons pas nos enfants qui rêvent de devenir des artistes, sans avoir à se demander s'ils pourront payer leur loyer. C'est le moment ou jamais de faire ce qui s'impose.
Merci.
Je m'appelle Nancy Marrelli. Je suis archiviste et je viens du Conseil canadien des archives, un organisme national sans but lucratif ayant pour mission d'alimenter et d'appuyer les efforts à l'échelle nationale de plus de 800 services d'archives canadiens. Nous sommes heureux d'avoir la possibilité de faire connaître notre point de vue aujourd'hui.
Les dispositions relatives aux photographies ont constitué la principale préoccupation des archivistes concernant les projets de loi récents visant à réformer le droit d'auteur. Les autres questions qui suscitent une préoccupation particulière chez les archivistes dans le cas du projet de loi C-11 comprennent les modifications concernant les reproductions des oeuvres non publiées ainsi que les mesures techniques de protection. Un certain nombre de questions additionnelles influent de manière négative sur la recherche en archivistique, et bien que de nombreux archivistes soient préoccupés par ces questions, mes observations d'aujourd'hui seront centrées sur les questions qui préoccupent directement les établissements archivistiques.
En vertu de la loi actuelle, les établissements archivistiques ne peuvent mettre à la disposition des chercheurs une reproduction d'une photographie ou d'un autre type d'oeuvre non publiée à des fins d'étude privée ou de recherche, surtout dans le cas des oeuvres dont la durée de protection et la propriété ne peuvent être déterminées. Les archivistes sont enchantés du fait que le projet de loi C-11 réglera ce problème de longue date.
Une fois qu'elle sera adoptée, cette modification permettra aux établissements archivistiques de faire une seule copie des oeuvres non publiées dans leurs fonds d'archives, dans des conditions que l'on peut respecter dans la pratique. Nous sommes heureux de cette modification et nous l'appuyons de tout coeur.
Les modifications proposées concernant les photographies constituent une des questions les plus importantes dans le projet de loi C-11 pour les institutions archivistiques. Un grand nombre de photographies dans les fonds d'archives sont des oeuvres orphelines, c'est-à-dire des oeuvres pour lesquelles les titulaires du droit d'auteur sont inconnus ou sont introuvables. La loi actuelle sur le droit d'auteur concernant les photographies est difficile, voire même impossible dans certains cas, à appliquer par les archivistes lorsqu'ils ont affaire à des oeuvres orphelines. Cette situation déjà difficile sera compliquée davantage si les dispositions en question du projet de loi C-11 entrent en vigueur.
Modifier la loi de manière que le photographe soit uniformément le titulaire du droit d'auteur fait en sorte qu'il est encore plus difficile de déterminer qui est le titulaire du droit d'auteur dans le cas de certaines photographies dans nos collections. Les photographies prises par quiconque n'est pas un photographe professionnel n'ont que très rarement des créateurs identifiables au moment où elles arrivent dans un service d'archives, de nombreuses années après avoir été prises. Sans cette information, il est impossible de déterminer la durée de protection des photos et elles se retrouvent dans un vide juridique. Ce ne sont pas les oeuvres des photographes professionnels qui nous préoccupent ici. Habituellement, ces derniers identifient clairement leurs oeuvres, et nous pouvons déterminer la date de leur décès et la durée de la protection. Mais la loi s'applique également à toutes les photographies, qu'elles soient d'origine professionnelle ou non.
Ce ne sont pas toutes les photos qui sont créées à titre d'oeuvres commerciales. En fait, des millions d'oeuvres dans nos établissements n'ont pas été créées à des fins commerciales. Il s'agit d'archives qui documentent la vie des Canadiens ordinaires, comme les photographies du chalet familial prises par votre grand-mère ou votre oncle dans les années 1950, les photographies prises par des étrangers à qui vos parents ont confié leur caméra pour se faire photographier pendant leur lune de miel aux chutes Niagara, ou les photographies prises par un passant d'une famille d'immigrants d'Asie de l'Est devant la petite épicerie familiale. Il s'agit de notre patrimoine documentaire national.
Les fonds et les collections d'archives sont accessibles à des fins d'étude privée ou de recherche sur place aux archives, mais dans un environnement numérique, ce n'est pas de cette façon que la très grande majorité des Canadiens recherchent de l'information à leur sujet, au sujet de leur famille, de leurs institutions et de leur société. Nous cherchons de l'information sur Internet, dans des oeuvres multimédias et dans des publications spécialisées électroniques ou sur support papier. Ces modes essentiels de communication moderne ne sont pas disponibles pour la dissémination d'un grand nombre de nos fonds d'archives, surtout dans le cas des photographies, parce que nous ignorons qui a pris la photo.
Les service d'archives disposent des ressources très limitées pour acquérir, conserver et rendre accessibles leurs fonds d'archives, mais souvent, nous ne pouvons utiliser les moyens de communication électroniques modernes, comme les sites Web et Internet, pour rendre ces oeuvres accessibles au grand public canadien parce que les titulaires du droit d'auteur sont inconnus ou sont introuvables. Ce sont des oeuvres orphelines. Les oeuvres orphelines sont reléguées aux oubliettes dans l'autoroute de l'information du XXIe siècle. De grands pans de l'histoire canadienne se retrouvent dans un trou noir où l'accès est sérieusement limité. Les chercheurs doivent se rendre dans un établissement archivistique, souvent situé loin, dans une autre ville ou dans une autre province, pour utiliser le matériel sur place. De plus, sans information sur le créateur ou la créatrice de l'oeuvre, et sur la date de son décès, la durée de la protection conférée par le droit d'auteur est inconnue, et le trou noir s'étend vers l'avenir sans date d'extinction définie.
Permettez-moi de vous donner un exemple fictif pour illustrer le problème.
Un service d'archives possède beaucoup de matériel provenant d'une variété de sources sur les pensionnats au Canada et désire partager ces ressources précieuses avec les Canadiens qui sont de plus en plus préoccupés par cette question difficile. Les fonds et collections d'archives comprennent des photos prises au moyen d'une caméra Brownie dans les années 1950 par une ou plusieurs personnes inconnues. Les clichés d'amateurs fournissent une documentation explicite des conditions de vie dans un pensionnat de l'Ontario. Le fonds d'archives contient également un film 8 mm familial d'une durée de 10 minutes dans lequel on peut voir trois frères qui se préparent à quitter leur réserve du Québec en 1964 pour se rendre dans un pensionnat. Les trois enfants finissent par mourir au cours de leur séjour au pensionnat. En ce moment, les parents sont introuvables et personne ne sait qui a filmé cet événement. Le service d'archives arrive dans une impasse lorsqu'il essaie d'identifier et de retracer les titulaires du droit d'auteur. Il est impossible de créer un site Web contenant ce matériel, parce qu'il est impossible d'obtenir la permission des titulaires du droit d'auteur. La durée de la protection est inconnue, étant donné que la date de décès du créateur est inconnue.
L'accès à l'héritage documentaire canadien, vaste et riche, ouvre une fenêtre très intéressante sur l'expérience canadienne, passée et présente. Les archivistes canadiens conservent et rendent accessibles à tous les Canadiens les archives variées du gouvernement, de l'industrie et des particuliers. Les archives canadiennes s'efforcent de préserver et de promouvoir l'essence même de l'identité canadienne et ce que nous avons fait grâce à l'utilisation du riche héritage documentaire qui constitue la mémoire de la nation.
Les modifications proposées dans le projet de loi concernant la durée et la propriété du droit d'auteur dans le cas des photographies vient compliquer davantage une situation déjà difficile et souligne l'urgence de régler le problème des oeuvres orphelines, qui passe sous silence dans le projet de loi C-11.
Je vais maintenant parler des mesures techniques de protection.
Le projet de loi C-11 interdit le contournement des MTP à des fins légitimes, comme les activités de conservation auxquelles ont recours les archivistes pour protéger le patrimoine documentaire du Canada. Cela est tout à fait inacceptable et c'est une question qui préoccupe au plus haut point la communauté archivistique canadienne dans l'univers numérique où l'obsolescence est à la fois rapide et désastreuse en termes d'accès à long terme.
Le CCA recommande que le projet de loi C-11 soit modifié de manière à préciser que le contournement des MTP est interdit uniquement lorsque le contournement se fait à des fins qui portent atteinte au droit d'auteur, et que des outils et des services de contournement doivent être accessibles à des fins qui ne portent pas atteinte au droit d'auteur.
Permettez-moi de vous donner un exemple fictif de la façon dont le projet de loi C-11 pourrait affecter les services d'archives.
Un service d'archives possède une copie d'un CD portant sur l'histoire d'une petite entreprise ontarienne qui a construit des poêles à bois en fonte caractéristiques qu'elle a vendus partout au Canada pendant 150 ans. Le CD a été créé par un petit groupe de communications qui été réuni brièvement en 1985 alors que l'entreprise fermait ses portes. Le CD qui a été confié au service d'archives par la famille qui était propriétaire de l'usine comprend des photographies, des entrevues d'histoire orale avec les propriétaires et plusieurs générations de travailleurs et de clients, des catalogues de l'entreprise et certaines séquences filmées de l'usine. Il n'existe qu'une seule copie du CD. Le groupe de communications a été dissous lorsque le feu a détruit ses bureaux et tout le matériel original qu'il avait rassemblé pour le projet. Étant donné que la durée de vie de cet important CD se rapproche de l'obsolescence, le service d'archives désire s'assurer que le patrimoine documentaire important qu'il contient est préservé pour la postérité dans un format convenable. Mais le CD est protégé par une serrure numérique et le service d'archives n'a pas réussi à retracer les créateurs. Si le service d'archives ne peut contourner la serrure numérique pour préserver le matériel historique unique que contient le CD, une partie importante de notre histoire documentaire sera perdue parce que le CD est en train de devenir obsolète et que les fichiers qu'il contient deviennent illisibles.
Le CCA croit que le projet de loi C-11 est rédigé de manière trop étroite en ce qui a trait aux MTP. L'intention de cette loi devrait être étendue pour inclure des activités liées à la conservation, à la gestion et au maintien des fonds et collections d'archives, activités qui sont actuellement autorisées en vertu de la loi. Les services d'archives devraient être en mesure de profiter des avantages de la technologie numérique pour remplir leur mandat de conservation. Si cela exige le contournement des MTP qui contrôlent l'accès, alors, l'intérêt de la conservation archivistique pour le bien public devrait primer.
La législation sur le droit d'auteur a des répercussions très importantes sur l'accessibilité du patrimoine documentaire du Canada pour les Canadiens et les chercheurs partout dans le monde. La communauté archivistique est heureuse de l'occasion qui lui est donnée de présenter ses préoccupations et de discuter des approches positives pour trouver des solutions qui permettront de s'assurer que nous pouvons remplir notre mandat en tant que source durable du patrimoine documentaire du Canada.
Merci.
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Cela m'apparaît très sensé.
Monsieur McCarty, vous avez parlé du stockage numérique et je veux parler de cette question un instant. Vous avez dit que les serrures numériques ont été un échec. Mais tout ce qui sous-tend le nuage, ce sont les mesures techniques de protection. Nous pouvons reconnaître, par exemple, que Netflix est une nouvelle façon pour les gens de consommer des films et que YouTube est une nouvelle façon pour les gens de consommer de la musique.
Mes deux nièces ne stockent rien. Elles sont jeunes, mais si elles veulent voir Taylor Swift — et croyez-moi, elles regardent beaucoup de Taylor Swift —, elles vont sur YouTube. Elles jouent et rejouent sans cesse la vidéo. Mais elles ne stockent rien. Comment quoi que ce soit qui est de nature « mécanique » aura un effet sur cela, lorsque la prochaine génération…?
Même moi, je possède des centaines de CD, des centaines de DVD, mais je n'en achète plus maintenant. La raison pour laquelle je n'en achète plus, c'est que je peux y avoir accès très simplement sur Internet, légalement, et je consomme ce produit. Je vais payer comme, j'imagine, la plupart des gens dans la salle, dans un avenir qui n'est pas si lointain pour avoir accès à des bibliothèques numériques qui indemniseront les créateurs dans le cadre du contrat, mais je n'aurais plus besoin de stocker quoi que ce soit.
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Je vais commencer par vous présenter une perspective historique. Auparavant, les maisons de disques nous apportaient des disques et nous en conservions un certain nombre en bibliothèque. Nous gardions les copies de ces disques dans nos studios et nos cabines de mise en ondes. Les disques sont devenus des CD, qui étaient livrés de la même façon.
Mais maintenant, le système de livraison est très différent. Il s'agit d'un système de distribution numérique appelé SSGDD. Les maisons de disques nous ont donné accès à leur système de musique. Nous sélectionnons les morceaux qui conviennent à la formule de notre station de radio. Nous les téléchargeons. Nous faisons une copie de cette musique qui pourra être lue dans nos stations et qui sera compatible avec les différents systèmes qui sont en place pour faire fonctionner une station de radio.
Les stations de radio sont un peu plus évoluées qu'auparavant, en ce sens que l'on n'a plus uniquement un présentateur assis dans une cabine munie de deux tables tournantes, d'un microphone et d'une série de cartes publicitaires. C'est beaucoup plus complexe, informatisé, perfectionné.
J'espère que cela a répondu en partie à votre question.
Vous avez aussi parlé de l'exonération de 30 jours et demandé ce que ce processus impliquerait pour nous, les radiodiffuseurs. Remplacer toute notre musique tous les 30 jours serait énormément coûteux et demanderait un temps considérable. Même la plus petite bibliothèque musicale compte environ 3 000 chansons. Si l'on devait les télécharger à un rythme de 15 chansons à l'heure, et en supposant que tout se passe bien, il faudrait tout de même 200 heures par mois ou 20 longues journées de travail pour effectuer cette tâche dans chacune des stations de radio du pays.
Je crois que l'autre élément clé qui n'a peut-être pas été abordé dans les discussions et dans les exposés, c'est que l'industrie de la radio est très différente des autres industries. Étant donné que nous diffusons sans interruption à longueur d'année, il nous est impossible de fermer la station pour nous réorganiser. Le processus d'élimination et de réenregistrement qu'on nous demande d'effectuer tous les 30 jours pour obtenir cette exonération devrait se faire pendant nos heures de diffusion, ce qui compliquerait beaucoup les choses.
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Bonjour à vous, monsieur le président, et aux membres du comité législatif spécial.
Je m'appelle Gary Maavara. Je suis vice-président exécutif et avocat général chez Corus Entertainment. Je suis accompagné aujourd'hui de Sylvie Courtemanche, notre vice-présidente aux relations gouvernementales. Sylvie est aussi présidente de l'Association canadienne des radiodiffuseurs.
Nous tenons à remercier le comité de nous permettre de témoigner à l'égard du projet de loi C-11. Nous sommes certainement conscients que l'amendement de la Loi sur le droit d'auteur du Canada était attendu depuis longtemps.
Nous félicitons le gouvernement pour les efforts qu'il a consacrés à la réforme du droit d'auteur, et nous appuyons dans l'ensemble les dispositions du projet de loi C-11. Cependant, Corus aimerait proposer de légères modifications afin de corriger une erreur historique. Avant d'aborder le sujet, nous aimerions dresser le profil de compétence de notre entreprise en ce qui concerne les droits d'auteur.
Certains d'entre vous seront peut-être étonnés d'apprendre que Corus est l'un des plus importants éditeurs de livres pour enfants au Canada, par l'entremise de sa filiale Kids Can Press. Corus est aussi l'un des plus grands producteurs de contenu télévisuel. Son studio Nelvana produit quelques-unes des émissions pour enfants les plus populaires au monde. Nos personnages, tels que Franklin la tortue et Frisson l'écureuil, sont suivis par des téléspectateurs et des lecteurs de plus de 140 pays.
Corus dirige par ailleurs quelques-unes des chaînes télévisées les plus regardées au pays, dont des chaînes très appréciées par les familles, comme YTV, Treehouse et la chaîne ABC Spark, qui sera lancée sous peu. Nous collaborons également à des entreprises télévisuelles qui diffusent des émissions aux États-Unis, en Europe, en Afrique et en Asie.
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Nous exploitons par ailleurs 37 stations de radio qui desservent les collectivités locales de Cornwall à Vancouver. Corus Radio s'assure d'ajouter une touche personnelle à ses programmes et à interagir avec les auditeurs et les collectivités locales. Nos stations rejoignent environ 12 millions de Canadiens chaque semaine.
Nous faisons partie d'une industrie radiophonique qui crée de l'emploi et qui s'avère une composante fondamentale de la culture locale de pratiquement toutes les circonscriptions du Canada, y compris celles des membres de ce comité. À bien y penser, très peu d'industries peuvent se vanter d'en faire autant.
Les stations de radio se trouvent au coeur de chaque collectivité, leur offrant du divertissement, des nouvelles et des émissions d'affaires publiques, de même que d'importants renseignements, tels que les prévisions météorologiques et les conditions routières. Dans un monde où le multimédia est roi, la radio a gardé sa raison d'être et offre aux entreprises locales et au gouvernement un des seuls moyens pour transmettre rapidement leurs messages à la collectivité.
Plus précisément, les stations de radio de Corus appuient les collectivités qu'elles desservent et leur donnent voix. Les 13 jours de Noël de John Derringer à la station Q107, de Toronto, est un exemple de la façon dont nous soutenons des centaines d'organismes de bienfaisance locaux, provinciaux et nationaux à l'échelle du Canada. La campagne Santas Anonymous de la station CHED, à Edmonton, compte sur l'appui de 3 000 bénévoles pour recueillir, emballer et livrer des jouets à quelque 25 000 enfants à Noël chaque année. C'est une campagne qui a été lancée en 1955. La station Dave FM 107.5 dirige Dave Cares, un service qui fait la promotion d'activités de bienfaisance locales dans les collectivités de Kitchener, de Waterloo et de Cambridge, en Ontario.
Les stations de radio locales font aussi la promotion d'artistes et de musiciens locaux. Corus dirige des initiatives telles que la remise des prix Canadian Artists Selected By You, ainsi que le concours de musique indépendante Fox Vancouver Seeds. En septembre 2010, Corus a lancé la première plateforme musicale intégrée aux médias sociaux, en vue de soutenir la musique indépendante sur les ondes et en ligne. À Peterborough, notre station The Wolf présente des prestations musicales d'artistes locaux dans le cadre de festivals annuels de la musique, comme Wolfstock et The Gift of Christmas.
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Dans ce contexte, Corus crée énormément de contenu et se soucie donc de la protection des oeuvres dont il est propriétaire. Nous connaissons le droit d'auteur et nous déployons des efforts pour que les lois conviennent tant aux créateurs qu'aux utilisateurs. Nous considérons important que vous compreniez une réalité fondamentale concernant le droit d'auteur: il ne crée pas de marché pour le contenu. Une bonne loi sur le droit d'auteur peut contribuer à protéger la valeur du contenu, mais ne la crée pas. Ce sont d'autres facteurs qui interviennent, parmi lesquels figurent les activités qu'accomplit Corus Radio chaque jour. Dans le monde numérique moderne, nous sommes entourés d'un océan de musique qui est omniprésente: sur les iPad, dans les bars, les restaurants, les clubs, les salles de concert, les supermarchés, les élévateurs et même, de nos jours, les stations-service.
La radio locale utilise une petite partie de cette musique et l'entrecoupe d'informations et d'interventions de personnalités locales pour attirer des auditeurs et des annonceurs et ainsi générer des revenus. Comme la radio se dispute l'attention du public avec tous les autres médias, nous sommes sensibles aux défis afférents à l'économie numérique. Il importe de comprendre que dans le contexte du piratage massif dont l'industrie de la musique est victime en raison des technologies numériques, la radio constitue un roc de Gibraltar. Chaque année, nous versons à cette industrie des sommes plus élevées et offrons un soutien considérable pour le développement et la promotion de contenu musical local.
Au chapitre du développement de musique seulement, notre contribution financière a augmenté de 487 p. 100 au cours des 10 dernières années, et notre industrie a versé l'an dernier environ 65 millions de dollars aux sociétés de gestion collective pour pouvoir utiliser leur musique. À cet égard, nos paiements ont bondi de 63 p. 100 au cours de la dernière décennie seulement. Nous ne contestons pas ces paiements et continuerons de les effectuer.
Nous valorisons énormément la musique à l'intention des artistes qui la composent. Nous sommes fiers des efforts que nous déployons à cette fin, mais nous demandons à ce que l'on apporte de menus changements au projet de loi , dont le plus important concerne l'exception aux fins de copies occasionnelles effectuées pour faciliter la diffusion. L'exception proposée obligerait les stations de radio à effacer toute leur discothèque tous les 30 jours. Il est question ici de milliers de pièces et des données afférentes pour chaque station. Ce n'est tout simplement pas faisable. Imaginez si votre équipe devait dresser de nouveau la liste d'envoi de vos électeurs chaque mois. S'il faut cinq minutes pour inscrire chaque nom et chaque adresse, et qu'il y en a des milliers à entrer chaque mois, vous voyez le portrait. C'est un travail colossal et une perte de temps et d'argent que d'effacer et de reconstituer les bases de données. Cette exigence va à l'encontre de l'objectif que s'est donné le gouvernement de rendre le Canada plus efficace et plus concurrentiel.
Pour tirer parti de la nouvelle économie numérique du Canada, il faut que la Loi sur le droit d'auteur favorise l'innovation au sein de l'industrie de la radio au lieu de lui mettre des bâtons dans les roues. Sans les amendements de forme que nous proposons, les stations de radio devront fonctionner comme elles le faisaient en 1995 afin de limiter les conséquences de cette obligation superflue. Cette mesure illogique ne constitue pas un progrès. Les entreprises créatives comme la nôtre ont besoin d'outils qui leur permettent de demeurer concurrentielles dans la nouvelle économie numérique.
Le principal argument contre notre position, c'est que les artistes, qui profitent de l'argent que nous versons pour les droits de reproduction, perdront 21 millions de dollars. Il s'agit d'une exagération outrancière que contredisent les données économiques compilées sur la situation. La vaste majorité des paiements qu'effectue actuellement l'industrie vont garnir les poches de bénéficiaires étrangers; les artistes ne récoltent que des miettes, et c'est sans parler des artistes canadiens. C'est d'ailleurs ce que vous a confirmé mardi Bill Skolnik, de la Fédération canadienne des musiciens, qui a affirmé que les droits de reproduction mécanique sont destinés aux éditeurs et aux étiquettes, pas aux artistes.
Ces derniers recevront au mieux une parcelle des sommes versées. Si les radios locales peuvent continuer de faire croître la valeur à l'échelle locale, alors les artistes verront leurs revenus augmenter. Par contre, si elles sont obligées de continuer de payer ces droits de reproduction, leur capacité de générer du contenu local sera menacée, tout comme le seront les revenus des artistes locaux. L'instauration d'une disposition adéquate aura une incidence considérable sur l'avenir de la radio locale. Ce n'est pratiquement qu'à la radio que les députés peuvent parler de questions importantes à leurs électeurs. De plus, nous employons des gens qui vivent dans vos circonscriptions et nous aidons les détaillants locaux et leurs entreprises à communiquer leurs messages au sein de la collectivité d'une manière et à des heures que n'offre aucun autre média. Les stations de radio locales comblent un besoin bien mieux que les autres médias, et notre modèle d'affaires ne peut soutenir le régime tarifaire actuel.
En fait, les reproductions que font les radiodiffuseurs pour leurs systèmes de lecture ne font subir aucun tort ou perte financière aux titulaires de droit. Les radiodiffuseurs privés n'effectuent des copies que pour faciliter la diffusion de musique dont ils ont déjà payé les droits d'utilisation. Ce processus a également pour effet de réduire les coûts que paient les compagnies de musique pour nous transmettre leur contenu. Nous n'utilisons pas la musique à de nouvelles fins. Les stations de radio ne font pas plus d'argent, mais confèrent une valeur additionnelle considérable à la musique.
Pour toutes ces raisons, nous demandons que le soit amendé pour prévoir une véritable exemption qui aidera toujours les artistes à protéger leur musique tout en nous permettant d'y apporter de la valeur.
Nous avons joint nos amendements à nos notes d'allocution. Comme ils sont de nature très technique, nous n'en parlerons pas ici.
Monsieur le président et honorables membres de comité, nous vous remercions de votre attention et répondrons à vos questions avec plaisir.
Merci.
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Merci, monsieur Thibeault.
Bonjour. Je vous remercie d'avoir demandé à comparaître devant vous la Coalition des ayants droit musicaux sur Internet.
La CAMI regroupe cinq associations professionnelles d'auteurs, de compositeurs, d'artistes-interprètes, de producteurs, d'éditeurs et de musiciens, ainsi que quatre collectifs de droits d'auteur actifs dans le domaine de la musique. C'est donc toute l'industrie musicale du Québec, soit plus de 100 000 ayants droit, qui s'exprime par la voix de la CAMI.
La CAMI est représentée aujourd'hui devant vous par Solange Drouin, vice-présidente aux Affaires publiques et directrice générale de l'ADISQ, et par moi à titre de président de la Société professionnelle des auteurs et des compositeurs du Québec.
Nous nous partagerons la présentation des cinq principales recommandations de la CAMI qui se retrouvent dans le document que nous vous remettons aujourd'hui. Ce document comprend aussi les modifications précises et concises à apporter au projet de loi C-11, qui incorporent ces recommandations.
Ces cinq recommandations sont: engager la responsabilité des fournisseurs d'accès à Internet; renforcer le droit de reproduction; modifier l'exception visant le contenu généré par l'utilisateur; le régime de la copie privée; et baliser l'utilisation équitable aux fins d'éducation.
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Pour commencer, parlons de la responsabilité des FAI ou fournisseurs d'accès à Internet.
Pour les FAI, le projet de loi C-11, comme vous le savez, a pour seule conséquence de les obliger à aviser un contrevenant lorsqu'un ayant droit les informe d'une violation potentielle de ses droits. Ce régime fait donc reposer sur les seules épaules des ayants droit la responsabilité de dénoncer et de poursuivre les contrevenants. Les ayants droit, on vous l'a déjà dit ce matin, n'ont pas la capacité ni les ressources pour jouer à la police sur le Web.
De plus, ce régime ne dissuadera pas les récidivistes qui ne cesseront pas leurs activités illégales, sachant qu'ils n'encourront aucune sanction de la part de leur FAI. De leur côté, ces mêmes FAI pourront continuer à héberger et à permettre l'exploitation des oeuvres utilisées sans autorisation.
Pourtant, les FAI disposent de moyens très importants pour contrer le piratage, éduquer les consommateurs et compenser l'industrie musicale pour les pertes encourues. Or, rien dans le texte du projet de loi n'enjoint les FAI à mener de telles actions ni à rembourser quelque somme que ce soit aux ayants droit. L'équilibre entre les droits des créateurs et les intérêts des utilisateurs que recherche le gouvernement par le projet de loi C-11 n'est donc pas atteint, loin de là.
Pourquoi ne pas confier à ceux qui contrôlent et monétisent la bande passante le soin d'instaurer des pratiques qui protègent les droits de ceux qui produisent les contenus qui y circulent. Comment peut-on accepter que les FAI déresponsabilisés bradent l'attrait commercial du contenu pour favoriser la vente d'abonnements. Les FAI font partie de la solution et ne doivent en aucun cas être exclus du débat.
Nous recommandons donc, pour améliorer l'efficacité d'un régime avis et avis, d'obliger minimalement les FAI à divulguer les noms et adresses des contrevenants potentiels et de prévoir la publication obligatoire des avis dans un registre où ils seraient conservés au moins trois ans. Cette procédure nous permettrait de s'assurer de l'efficacité du système en place et éventuellement de le réviser s'il s'avère inefficace pour endiguer le piratage. La CAMI recommande aussi de ne pas déresponsabiliser les fournisseurs d'accès Internet qui ont largement profité jusqu'à présent de la circulation des contenus fournis par les ayants droit sans en assurer la rémunération ou la compensation.
Deuxièmement, il s'agit de modifier l'exception visant le contenu généré par les utilisateurs. Cette exception, dite « exception YouTube », permet à une personne physique de diffuser, par exemple, des vidéos d'activités en famille sur un arrière-plan d'airs populaires. Ces personnes peuvent également afficher n'importe quelle nouvelle oeuvre dérivée d'une oeuvre, entraînant ainsi une perte de contrôle quasi totale par les créateurs. Toute personne peut donc considérablement nuire au marché d'une oeuvre.
À l'heure actuelle, la loi oblige les sites dont le contenu est généré par les utilisateurs, comme YouTube, à négocier des modalités avec les titulaires des droits d'auteur individuellement ou avec les organismes les représentant collectivement. Avec le projet de loi C-11, le Canada deviendrait le premier pays au monde où des entreprises comme YouTube auraient le droit de se servir d'oeuvres protégées pour en tirer des revenus sans aucune obligation de rémunérer les créateurs de contenu.
Nous sommes d'avis que le spectre actuel de cette exception est trop large et porte un préjudice irréparable aux ayants droit, qui sont en droit de bénéficier de ce modèle économique en train de se définir. Nous recommandons donc au gouvernement de limiter la portée de l'exception aux actes accomplis à titre personnel et de limiter aussi l'utilisation à des oeuvres qui ont été publiées ou mises à la disposition du public avec l'accord du titulaire de droits.
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Parlons du droit de reproduction et de l'enregistrement éphémère.
Le gouvernement veut moderniser les règles liées à la radiodiffusion et faire en sorte que les diffuseurs radiophoniques ne soient plus obligés d'indemniser les titulaires de droits d'auteur pour la reproduction d'enregistrements temporairement nécessaires à la diffusion numérique. La reproduction éphémère permet aux radios de créer leurs propres catalogues musicaux en optimisant le fonctionnement des logiciels de gestion de programmes et en facilitant l'utilisation de la musique. L'exercice du droit de reproduction se traduit par des économies de personnel, d'espace et de productivité.
La Commission du droit d'auteur a étudié ces considérations et établi un tarif déterminant sa valeur. Les redevances afférentes nous sont versées par les stations de radios commerciales et n'ont provoqué aucun effondrement du marché. Pour mettre les choses en perspective, le taux de redevances des stations de radio pour l'ensemble du droit de reproduction des oeuvres représente 1,4 p. 100 de leurs revenus de 1,5 milliard de dollars pour l'utilisation de la musique qui, elle, constitue plus de 75 p. 100 de leur programmation. C'est une bonne affaire. Le fardeau financier qu'entraîne le paiement du droit de reproduction pour les radiodiffuseurs est donc peu astreignant. Par conséquent, l'abrogation du paragraphe 30.9(6) n'a pas lieu d'être. Néanmoins, notre mémoire propose, advenant l'introduction d'une exception de 30 jours, un amendement précisant que cette exception ne pourrait s'appliquer à répétition.
Parlons de la reproduction temporaire pour processus technologique.
Le gouvernement a pour objectif de favoriser l'innovation et de permettre certaines reproductions techniques qui ne constitueraient pas des violations du droit d'auteur. Or, en dépit des conditions fixées, le libellé de l'exception demeure si large qu'il menace de nombreuses reproductions dont la valeur est déjà établie. Nous redoutons notamment que plusieurs prétendent que la quasi-totalité de leurs activités de reproduction corresponde à de tels processus technologiques. Que restera-t-il alors de la reproduction et des redevances qui s'y rattachent?
Ainsi, afin de dissiper toute incertitude quant à la portée de l'exception, nous croyons nécessaire de définir la notion de durée du processus technologique et proposons d'introduire cette notion dans le texte de loi. Les précisions que nous recommandons au moyen d'amendements spécifiques permettraient de mieux cerner le champ d'application de cette exception en conformité avec les exemples soumis dans les fiches techniques. De plus, ces précisions au projet de loi auraient pour effet d'y soustraire les actes de reproduction déjà protégés qui procurent des avantages réels aux utilisateurs et ont une valeur économique importante dont doivent bénéficier les ayants droit.
Parlons maintenant du régime de la copie privée
Initialement perçue auprès des importateurs et fabricants de cassettes audio et de CD vierges, la copie privée n'est aujourd'hui assujettie qu'aux CD vierges. Or, les gens ne font presque plus de copies avec ces supports mais le font avec des enregistreurs audionumériques tels que les iPod. Sur plus de 1,3 milliard de chansons qui sont copiées chaque année au Canada, 70 p. 100 le sont par des enregistreurs de ce genre. Comme ceux-ci sont devenus le principal mode de copie de la musique et que la redevance ne s'y applique pas, les ayants droit ne reçoivent pas de dédommagement en contrepartie des copies faites sur ces appareils. Incidemment, les revenus provenant de la redevance actuelle fondent à un rythme alarmant. Seulement entre 2008 et 2011, c'est une chute de 70 p. 100. Il aurait fallu étendre la redevance aux nouveaux supports afin de refléter les façons dont les copies de musique sont faites aujourd'hui, ce que le projet de loi C-11 ne permet pas de réaliser. En légalisant de façon généralisée les reproductions faites à des fins personnelles sans compensation, le projet de loi C-11, dans sa forme actuelle, serait catastrophique pour les créateurs de musique. La CAMI, ou Coalition des ayants droit musicaux sur Internet, fait donc sienne deux des recommandations de la SCPCP, ou Société canadienne de perception de la copie privée. Premièrement, s'il s'avérait impossible de modifier la loi afin de permettre ce dédommagement, il faudrait s'assurer de la suppression des dispositions contenues dans l'article 29.22 de façon à ce qu'il ne soit pas permis d'effectuer des copies privées musicales sans dédommagement. Deuxièmement, il s'agit d'intégrer le test en trois étapes de la Convention de Berne dans la loi sur le droit d'auteur.
Passons à l'utilisation équitable aux fins d'éducation
Présenté comme une approche équilibrée du droit d'auteur, le projet de loi contient de nombreuses exceptions en faveur des établissements d'enseignement, des bibliothèques et des consommateurs sans prévoir de compensations monétaires pour les ayants droit. Je vous demande candidement quelle faveur ferions-nous aux maisons d'enseignement en amenuisant la valeur de la propriété intellectuelle? Est-ce là un service à leur rendre? Si des exceptions au droit d'auteur sont parfois consenties, les traités internationaux auxquels adhère le Canada rappellent qu'il doit s'agir de cas spéciaux qui ne portent pas atteinte à l'exploitation normale de l'oeuvre, ni ne causent un préjudice injustifié aux intérêts légitimes des ayants droit.
Comme ces exceptions constituent une forme d'expropriation du droit d'auteur, elles sont généralement assorties d'une rémunération équitable. C'est le cas partout, mais pas au Canada.
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Merci, monsieur le président.
Je m'appelle Jacob Glick, conseiller en matière de politiques au Canada, Google.
Je suis enchanté de vous parler aujourd'hui de la Loi sur le droit d'auteur, non seulement parce que c'est ma spécialité, mais aussi parce que cette question de politique a pris de plus en plus d'importance dans la vie quotidienne des Canadiens.
Dans les 9,721 minutes qu'il me reste, j'entends traiter des activités de Google au Canada et de l'importance cruciale que revêt le cadre établi dans le projet de loi C-11 au chapitre des emplois, de la croissance, de la culture et de la productivité.
Si vous me le permettez, je commencerai par vous parler des activités de Google au Canada. Nous disposons de bureaux à Kitchener—Waterloo, à Toronto, à Montréal et à Ottawa. En plus d'accroître l'effectif et la superficie de son bureau de Kitchener—-Waterloo, Google s'apprête à rouvrir son bureau de Montréal, qu'il a agrandi. Si le temps me le permet pendant la période de questions, je vous parlerai du mur d'escalade qui y relie le rez-de-chaussée et le premier étage.
Google figure régulièrement parmi les meilleurs employeurs du pays. Google Canada a augmenté son effectif de plus de 50 p. 100 l'an dernier et devrait continuer d'embaucher du personnel en 2012. Grâce au programme « Entreprises canadiennes, soyez en ligne », Google aide plus de 60 000 entreprises canadiennes à se lancer en ligne gratuitement. Nos ingénieurs en poste à Montréal et à Kitchener—Waterloo conçoivent des produits que des centaines de millions de personnes utilisent dans le monde. Ces services de génie prennent de l'expansion et continueront de fournir des emplois hautement spécialisés dans le domaine du savoir ici même, au Canada.
Je suis heureux d'annoncer que Google soutient le projet de loi C-11. Il n'est pas parfait, mais la perfection est rarement possible quand il est question de politiques publiques touchant un large éventail d'intervenants d'opinions divergentes. Évidemment, comme bien d'autres, nous proposons quelques amendements de forme pour nous assurer que le libellé rende bien les intentions du projet de loi. Nous avons soumis ces suggestions à la greffière au nom de Google et de Yahoo.
Nous appuyons également les amendements présentés par la Business Coalition for Balanced Copyright, une coalition de sociétés des secteurs d'Internet, des télécommunications, des communications mobiles et de la vente au détail, et d'associations commerciales qui ont déjà comparu devant le comité chargé d'examiner le projet de loi C-32.
Même si nous avons pris position relativement à un certain nombre d'aspects du projet de loi, je m'attarderai à deux d'entre eux: les dispositions relatives au contenu généré par l'utilisateur à des fins non commerciales et le rôle approprié des intermédiaires en ligne.
En ce qui concerne tout d'abord le contenu généré par l'utilisateur à des fins non commerciales, Internet et la technologie numérique ont démocratisé les aspects économiques du contenu, de la production, de la promotion et de la distribution. Jamais, de toute l'histoire des communications de masse, il n'a été aussi facile de créer du contenu et de le diffuser à un auditoire international. En 2011 seulement, il s'est téléchargé des centaines de milliers d'heures de nouveau contenu canadien sur YouTube, dont la vaste majorité était produit par l'utilisateur à des fins non commerciales.
Vous avez probablement entendu parler de Maria Aragon, la préadolescente de Winnipeg dont l'imitation de Lady Gaga lui a valu d'être reconnue internationalement par des personnalités aussi diverses que Lady Gaga elle-même et le premier ministre Harper. Les dispositions du projet de loi C-11 qui protègent le contenu généré par l'utilisateur à des fins non commerciales peuvent faciliter l'émergence de la prochaine génération d'artistes comme Maria, lesquels s'emploieront à raconter et à façonner l'histoire du Canada sans s'exposer à des poursuites. Tant qu'ils respectent les conditions raisonnables figurant dans le projet de loi, ils pourront utiliser le contenu comme bon leur semblera.
Grâce à Internet, il est aussi plus facile que jamais pour les artistes de passer des activités non commerciales au secteur commercial. Les Canadiens se sont révélés maîtres dans l'art de connaître le succès en ligne.
Haligonian Andrew Grantham est l'un de mes exemples préférés. Il produit des vidéos d'animaux qui parlent sur YouTube et serait, selon d'aucuns, l'artiste canadien le plus vu au monde l'an dernier. Sa vidéo intitulée « Ultimate Dog Tease » se classe au deuxième rang des vidéos les plus regardées au monde. Il s'agit là de contenu canadien, à la popularité bien méritée, qui influence un discours planétaire.
Les mesures de protection que le projet de loi C-11 comprend concernant le contenu généré par l'utilisateur à des fins non commerciales seront importantes pour les milieux créatifs du pays, permettant aux créateurs de continuer de diffuser leurs oeuvres en ligne dans le monde en toute confiance et pavant la voie de la réussite pour la prochaine génération d'artistes.
Je voudrais également traiter de la question du rôle que devraient tenir les intermédiaires sur Internet.
De façon générale, nous appuyons les disposition d'exonération que le projet de loi contient concernant les intermédiaires sur Internet. J'aimerais apporter quelques preuves pour vous montrer à quel point il importe que ces dispositions soient claires pour la croissance de l'économie en ligne.
L'une des questions fondamentales que le gouvernement aborde dans cette mesure législative, c'est l'importance de veiller à ce que la Loi sur le droit d'auteur ne nuise pas au développement de l'informatique dématérialisée du Canada. C'est un aspect crucial, car l'établissement d'un cadre législatif inadéquat pourrait avoir un effet néfaste sur l'investissement dans les services informatiques dématérialisés au pays.
Dans une étude récente, la Harvard Business School s'est penchée sur les répercussions d'une décision rendue par un tribunal américain sur les investissements dans l'informatique dématérialisée aux États-Unis et dans l'Union européenne. Cette affaire opposait Cablevision à un consortium de réseaux de télévision américains, qui affirmait que le service d'enregistrement vidéo personnel sur réseau de Cablevision violait le droit d'auteur. La cour a rejeté ces prétentions.
Cette décision a clarifié les règles qui s'appliquent aux États-Unis dans le domaine de l'informatique dématérialisée en général. En Europe, la loi n'est pas encore aussi claire à cet égard. Les chercheurs de Harvard ont alors comparé les investissements qui s'effectuent dans l'informatique dématérialisée aux États-Unis et en Europe. Après la décision rendue dans le dossier de Cablevision, ces investissements ont connu une hausse atteignant 1,3 milliard de dollars aux États-Unis, mais ont diminué en Europe.
L'étude de Harvard indique que la clarté des règles relatives au droit d'auteur pourrait constituer le facteur prépondérant quand il s'agit de décider dans quel pays on investit dans l'économie en ligne.
C'est également ce qui ressort d'une autre étude réalisée par Booz & Company sur les investisseurs providentiels et les investisseurs de capital de risque aux États-Unis afin d'évaluer leur attitude à l'égard du droit d'auteur. On y conclut que 80 p. 100 d'entre eux hésitent à investir dans des entreprises soumises à des règlements imprévisibles. De plus, 81 p. 100 des investisseurs ont indiqué qu'un affaiblissement des dispositions d'exonération dans une loi sur le droit d'auteur serait plus susceptible de refroidir leur enthousiasme qu'un ralentissement économique.
Je le répète, pour ces investisseurs, une loi sur le droit d'auteur inadéquate comprenant des dispositions d'exonération insuffisantes à l'intention des intermédiaires est encore pire qu'une récession. L'étude montre qu'ils souhaitent l'adoption d'une loi clairement définie qui protège les intermédiaires agissant de bonne foi. Les auteurs de l'étude concluent qu'une protection adéquate de ces intermédiaires pourrait avoir comme avantage net d'encourager les investisseurs, dont le nombre pourrait plus que doubler.
Ces deux études montrent à quel point il importe que le gouvernement constitue un régime législatif adéquat pour favoriser l'investissement, la croissance et la productivité. À cet égard, le projet de loi constitue, en large partie, une réussite. Google et Yahoo recommandent quelques amendements pour éclaircir certains points afin de permettre aux entreprises et aux investisseurs de faire du Canada un chef de file du domaine de l'informatique dématérialisée. Nous avons remis ces études à la greffière.
Vous avez en main des amendements proposés par la Business Coalition for Balanced Copyright, que nous appuyons également. Nous vous demandons instamment d'éviter de modifier la disposition habilitante de manière à mettre en péril les dispositions d'exonération que comprend le projet de loi et de décourager ainsi l'investissement dans l'informatique dématérialisée.
Je concluerai mon propos en disant que le contenu canadien fait un tabac en ligne. Les Canadiens ont adopté l'Internet ouvert et profitent du choix et de la concurrence accrus qu'il offre. Nous sommes de toute évidence au coeur d'une nouvelle ère de créativité individuelle, favorisée par Internet. Grâce à ce projet de loi, le gouvernement protège une importante plateforme de créativité, facilitant ainsi la création de nouveau contenu canadien et la croissance d'une économie en ligne d'une importance cruciale.
Je vous remercie de nous avoir donné l'occasion de témoigner aujourd'hui et, pour ceux qui sont de la partie, vous pouvez suivre mes commentaires à jacobglick.
C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions.
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Nous la faisons jouer pendant plus longtemps, bien sûr.
Il importe aussi d'envisager le téléchargement de cette musique dans un contexte semblable à celui d'iTunes. Quand nous téléchargeons la musique par l'intermédiaire du service offert par le studio — ce qui, soit dit en passant, évite à ce dernier de payer pour la livraison des CD par voie terrestre —, les deux parties économisent beaucoup d'argent.
Comme le représentant de Bell l'a brièvement expliqué, nous obtenons une pièce dans un certain format, mais aussi tout un éventail d'informations sur l'auteur, l'éditeur et l'origine de l'oeuvre, qu'elle soit canadienne ou non. Dans le cas d'iTunes, tous ces renseignements sont téléchargés directement dans l'ordinateur, mais le processus est différent pour nous.
Dans notre cas, le processus fonctionne un peu comme pour une base de données de contacts dans Outlook, où il faut inscrire le nom de la personne, son adresse, ses numéros de téléphone et son adresse de courriel. Tout ce processus prend du temps, disons cinq minutes. Il faut donc cinq minutes pour télécharger la pièce, puis cinq minutes pour entrer les données; tout semble bien aller. Mais imaginez le temps qu'il faut pour le faire pour 9 000 pièces par mois. C'est ainsi qu'on en arrive à ce petit radiodiffuseur local qui disait qu'il devrait engager quelqu'un. Il faut littéralement qu'un employé passe 9 000 fois cinq à dix minutes pour inscrire chaque chanson, chaque mois.
Voilà pourquoi, comme l'a fait remarquer un témoin précédent, ce n'est pas aussi simple que de transférer la musique d'un disque dur à un autre. Le système ne fonctionne pas ainsi.
Vous avoir tous ici est formidable.
Je pense que les gens à la maison qui ont regardé les audiences sur le droit d’auteur pourraient avoir l’impression que vous vous regardez tous comme des ennemis jurés, alors qu’en réalité, nous travaillons tous dans le même but: la création et la diffusion de la culture. Il s’agit de trouver l’équilibre: qu’est-ce qui est équitable, et qu’est-ce qui ne l’est pas? Quand je lis certains des témoignages de la Commission du droit d’auteur, vous êtes très durs, et c’est votre travail. Le nôtre consiste à prendre du recul et à demander où est l’équilibre.
Je n’ai que quelques minutes, et mes collègues feront le suivi sur la question de la reproduction mécanique, car c’est vraiment important. Mais par souci de clarté, monsieur Maavara, vous avez dit que l’argent s'en va à l’étranger, chez ces éditeurs, ces maisons de disques. La Fédération canadienne des musiciens a déclaré que les musiciens n’en bénéficient pas. Pour être précis, ce qu’il faut dire c’est que les musiciens de séance reçoivent un cachet; ils ne sont pas concernés par les droits de reproduction mécanique. C’est une précision importante. Si vous payez des musiciens pour jouer sur votre disque, ils sont payés, mais les droits de reproduction mécanique font toujours partie de l’équation. La personne qui vient jouer de la flûte pourrait ne pas obtenir un droit de reproduction mécanique, mais la part de l’éditeur est de 50 p. 100 de chaque dollar. Les redevances sont réparties. Sur chaque dollar, 50 ¢ vont à l’éditeur, et 50 ¢ vont au musicien.
Quand j’étais chez Stony/Warner, c’est elle qui a conservé la part de l’éditeur. On ne l’expédiait pas dans un compte bancaire à l’étranger; on en avait besoin pour continuer à exploiter la maison de disques. Voilà de qui nous venaient les avances. C’est ce qui rendait le tout possible. Si j’étais indépendant, je pourrais partager les 50 p. 100 qui reviennent à l’éditeur avec mes musiciens. C’est de l’argent qui revient dans la chaîne de création de la musique. Donc, je pense que nous devons être clairs: ce dont nous parlons, ce n’est pas que vous aurez à payer une taxe injuste qui sera envoyée dans un compte bancaire quelconque aux îles Caïmans. C’est de l’argent qui va directement dans l’industrie de la musique.
Monsieur Glick, je voulais vous poser quelques questions.
Nous assistons à l’émergence de nouvelles plateformes de développement. Quand j’étais à Washington à la Future of Music Coalition, OK Go était parmi les conférenciers. Or, OK Go n’arrivait pas à obtenir du temps d’antenne à la radio; personne ne voulait y toucher jusqu’à ce qu’ils mettent une vidéo sur YouTube, celle qui est devenue célèbre, où on les voit sur des tapis roulants. Puis, on apprenait qu’ils étaient aux Grammy Awards. Donc, vous créez une nouvelle plateforme qui fournit des occasions aux musiciens.
Par exemple, quelqu’un m’a envoyé un courriel récemment sur un groupe appelé Shovels & Rope. Je n’en avais jamais entendu parler auparavant. Je reçois un courriel et je vais voir sur YouTube. Je suppose que la vidéo a sans doute coûté une centaine de dollars, mais ils sont fantastiques. Avec la qualité numérique, on n’a plus à payer ce qu’on payait autrefois. À nos débuts, une vidéo coûtait entre 10 000 et 30 000 $ et il était possible qu’elle ne soit jamais diffusée. C’était un investissement énorme pour les musiciens. Cela nous ruinait, surtout si la station de télévision décidait de ne pas la diffuser.
Donc, YouTube et les nouveaux modes de distribution ouvrent des portes aux nouveaux artistes et permettent la diffusion d’oeuvres indépendantes. Tout le monde dit que Google récolte la manne. Nous avons accès à un formidable catalogue d’oeuvres auquel nous n’avions pas accès auparavant. Comment conciliez-vous cela avec l’autre argument selon lequel une partie du catalogue est distribué illégalement et quelqu’un perd ses redevances? Où se situe l’équilibre pour Google?
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Bien sûr. Nous appuyons le régime d'avis et d'avis au Canada. Nous pensons qu'il permet d'instaurer le meilleur équilibre possible entre les droits des titulaires de droits et des artistes qui cherchent à juguler la contrefaçon de leurs oeuvres en ligne, d'une part, et, d'autre part, le droit à la vie privée et à la liberté d'expression des individus qui publient du contenu.
Depuis la mise en vigueur de la loi américaine Digital Millenium Copyright Act, au milieu des années 1990, on a entendu toutes sortes d'anecdotes sur des avis abusifs de retrait. Au fond, l'avis de retrait est une lettre de mise en demeure. Il est prévu par la loi — il doit satisfaire à certaines conditions, mais c'est une mise en demeure. Il donne un pouvoir d'injonction, qui, dans les circonstances normales, sous le régime de la loi, constitue un remède juridique exceptionnel. Il procure un pouvoir d'injonction sur une allégation.
Le procédé s'est révélé causer des problèmes dans un certain nombre d'occasions, notamment pendant la campagne présidentielle de 2008. L'équipe du candidat McCain a dû retirer un certain nombre de vidéos de YouTube, à cause d'avis déposés sous le régime de la loi américaine que j'ai mentionnée. À la réception d'un tel avis, YouTube ne peut rien faire d'autre que d'obtempérer.
Dans une lettre à YouTube, l'équipe McCain s'est plainte en invoquant le principe de la liberté d'expression et la doctrine de l'utilisation équitable et en qualifiant le retrait de chose incroyable. Néanmoins, les vidéos ont été retirées, et très rapidement.
Pendant une campagne électorale, ce mécanisme est dévastateur et étouffe la libre expression.
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Oui, j'aimerais ajouter quelque chose relativement au droit de reproduction. Je ne sais pas si vous voulez que j'en parle, mais il y a quatre choses que j'aimerais dire au sujet du droit de reproduction mécanique. Il y a des demi-vérités et des choses qui se sont dites à moitié ici. On va essayer de vous dire l'entière vérité et, après quoi, vous vous ferez votre propre idée.
Premièrement, lorsque les radiodiffuseurs ont accès au contenu la première fois lorsqu'ils reçoivent un disque, ils ne le paient pas. De tous les producteurs de disques que je connaisse — ça fait 20 ans que je suis impliquée à l'ADISQ, alors j'en ai connu des producteurs de disques —, tous envoient gratuitement les disques aux stations de radio. Donc, en partant, il est faux d'affirmer que ces dernières paient pour le contenu. Ensuite, il est vrai que les stations radio paient pour la reproduction sur un support. Pourquoi le droit de reproduction a-t-il augmenté à ce point? Selon certains, c'était les auteurs-compositeurs qui, auparavant, étaient les ayants droit qui exerçaient ce droit prévu dans la loi. Donc, ils se sont présentés devant la Commission du droit d'auteur et ont demandé un tarif, ce qu'ils ont obtenu et cela a évidemment généré une redevance.
Les producteurs de disques qui ont un droit de reproduction en vertu de la Loi sur le droit d'auteur, ce que les artistes-interprètes n'ont pas pour l'instant, ont exercé ce droit pas plus tard qu'il y a quatre ou cinq ans et cela a finalement entraîné un paiement. Ce n'est pas un paiement qui va doubler encore dans trois ou huit ans. Maintenant, les droits des auteurs ont été exercés ainsi que les droits des producteurs et cela totalise un montant de 21 millions de dollars. Je pense que c'est très clair. Ce montant n'augmentera pas ou ne doublera pas encore dans huit ans. C'est pour ça qu'on a l'impression d'avoir augmenté.
J'aimerais dire une dernière chose. En ce qui a trait à la réciprocité, peut-être que si on regarde du côté des États-Unis, il est vrai qu'en langue anglaise, il n'y a pas beaucoup de balance commerciale de notre côté. Relativement à la langue française, les Français reconnaissent ces droits. Les auteurs, producteurs et artistes-interprètes reçoivent des redevances en vertu de la réciprocité. Si on envoie de l'argent ailleurs, c'est pour que nos artistes puissent en recevoir quand ils travaillent à l'extérieur du pays. Cela s'appelle de la réciprocité. On traite bien les autres pays pour que les autres pays nous traitent bien. Alors, il faudrait considérer cela lorsqu'il est question des 21 millions de dollars.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je veux féliciter Mme Drouin de la clarté de son exposé. Depuis le début, je trouve que ça remet les pendules à l'heure à propos de plusieurs questions.
Effectivement, j'ai été étonné de l'augmentation rapide des droits mécaniques au cours des dernières années. Vous avez dit que c'était une mise à niveau. En général, cette mise à niveau n'a pas empêché l'industrie de la radiophonie de faire des affaires d'or au Canada.
J'ai examiné à la fois l'évolution des revenus totaux et des bénéfices nets avant impôt. Plus tôt, le représentant de Corus Entertainment a mentionné qu'il y avait eu une augmentation de 63 p. 100 depuis cinq ans des coûts relatifs aux différentes licences. De façon parallèle, par contre, les bénéfices des radios ont augmenté de 64 p. 100. C'est une augmentation parallèle correspondante. Par ailleurs, si on évalue seulement le rendement des marges bénéficiaires avant impôt, l'an dernier, cela a augmenté de 3,2 p. 100, ce qui représente un rendement de 22,9 ¢ sur un dollar avant impôt. Mes REER n'offrent pas ce type de rendement. Vous faites partie d'une industrie qui est vraiment dynamique et efficace. Par ailleurs, on parle d'une ponction de 1,4 p. 100 de vos revenus qui servent en droits mécaniques. À quoi sert cet argent?
J'aimerais poser une question à M. Chenart. À mon avis, cet argent sert à produire du contenu canadien qui, par la suite, sera diffusé par les radiodiffuseurs. On est dans un ensemble qui se tient très bien. On a une industrie radiophonique qui est éminemment prospère et dont les taux de rendement sont élevés. Il y a un petit montant qui fait partie de l'enveloppe globale et qui aide à produire du contenu canadien. Est-ce que je me trompe?
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Merci, monsieur le président.
Pour donner à chacun son dû, je vous signale que la vidéo « Stuff Edmontonians Say » fait jaser. Elle joue depuis deux semaines — 321 000 personnes l'ont visionnée. Cette oeuvre de Colin Priestner met en vedette quelques joueurs des Oilers d'Edmonton et une personnalité du poste radiophonique CHED. La vidéo est extrêmement populaire. La plupart des personnes qui l'ont vue trouvent qu'elle décrit avec beaucoup de justesse les opinions des Edmontoniens.
De retour au coeur du sujet d'aujourd'hui, je tiens à parler un peu, encore une fois, de la question des droits éphémères, si c'est possible. Il semble que l'argument de l'autre côté, de M. Dionne Labelle, c'est qu'il est bon d'être payé et que, au fond, nous devrions l'être. L'argument ne repose sur aucune sorte de principe, pas même celui d'équité. Il se borne à affirmer qu'il faut garder l'argent qu'on obtient.
Ici, nous essayons de créer un système qui, effectivement, rétribue les créateurs. C'est ce dont il s'agit dans le projet de loi. S'assurer que les artistes, les créateurs, seront rémunérés pour leurs oeuvres.
On a parlé, M. Chenart, je crois, de « perspective ». J'aimerais relativiser les choses un peu. Les 64 millions de dollars qui, d'après vous, sont versés pour le droit d'exécution ou d'interprétation, représentent une augmentation de 63 p. 100 par rapport à 2001, environ. C'est bien cela?