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CIIT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent du commerce international


NUMÉRO 054 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 6 novembre 2012

[Enregistrement électronique]

(1535)

[Traduction]

    Je déclare la séance ouverte. Nous allons poursuivre notre étude d'un projet d'accord de partenariat économique global et de haut niveau avec le Japon.
    Le témoin que nous allons entendre maintenant est M. Donald Campbell, conseiller principal en stratégie, qui a été ambassadeur du Canada au Japon, mais je ne sais plus quand précisément.
    C'était il y a cinq ans, de 1993 à la fin de 1997.
    Je vous remercie de cette précision. C'est un plaisir de vous compter parmi nous.
    Nous revenons à peine d'un voyage d’une semaine au Japon, au cours de laquelle nous avons été fort occupés. Certains d'entre nous souffrent encore du décalage horaire, mais cela ne va pas nous empêcher d'être fonctionnels. Nous allons d'abord vous demander de nous faire part des commentaires que vous inspire ce projet d'accord de partenariat économique, et nous passerons ensuite à une période de questions et de réponses.
    Je vous remercie encore d'être venu nous rencontrer. Nous vous écoutons.
    Merci beaucoup, monsieur le président. C'est un plaisir pour moi de participer aux travaux de ce comité.
    J'aimerais tout d'abord féliciter le comité de s'adonner à l'étude de cet accord de partenariat économique, ou APE, entre le Canada et le Japon. Pour l'expérience que j'en ai, il est assez inhabituel de se pencher sur un accord qui n'est pas encore en vigueur, mais je trouve que c'est une excellente chose.
    Je devrais probablement vous donner un peu plus de détails sur mes antécédents pour vous permettre d'avoir une meilleure idée de mon expérience. Comme monsieur le président vous l’a dit, je suis actuellement conseiller principal en stratégie chez Davis S.E.N.R.L, un cabinet canadien d'avocats de dimension nationale. Nous sommes même les seuls à avoir une filiale à Tokyo, au Japon. Cela vous explique l'intérêt que je porte à la question à l'étude.
    Quant à mes activités dans le domaine du commerce, sachez que j'ai été sous-ministre adjoint principal aux Affaires américaines pendant la négociation et la mise en oeuvre de l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis. J'ai également été sous-ministre du Commerce international et, à ce titre, j'ai supervisé les négociations de l'ALÉNA. Cela fait passablement de temps que je suis impliqué dans les questions commerciales.
    Comme vous l'avez rappelé, j'ai été ambassadeur du Canada au Japon pendant cinq ans, avant de devenir sous-ministre des Affaires étrangères de 1997 à 2000. J'ai ensuite quitté le gouvernement pour passer au secteur privé en devenant président du groupe CAE, à Montréal. C'est un des plus beaux fleurons de l'industrie canadienne. Cela fait en effet une quarantaine d'années que cette société réalise plus de 90 p. 100 de ses affaires sur la scène internationale, y compris au Japon où elle joue un rôle important. J'ai occupé ce poste pendant sept ans.
    J'ai également présidé la délégation canadienne du Forum Canada-Japon 2000 de 2003 à 2006. À ce poste, je relevais du premier ministre Harper et du premier ministre japonais de l'époque, M. Koizumi. Nous avions alors, comme les forums consultatifs précédents, recommandé que le Canada et le Japon concluent un accord de libre-échange.
    Je dois également vous dire que je suis actuellement le coprésident international du Conseil de coopération économique du Pacifique. Nous constituions un groupe qui conseille 25 gouvernements, la plupart membres de l'APEC, sur les questions de nature économique et commerciale.
    Enfin, pour ne rien vous cacher, je dois vous dire que, même si je ne prétends en rien représenter leurs intérêts, je siège aux conseils d'administration de Toyota Canada Inc. et de Canfor Pulp Products Inc. Cette dernière société est fortement implantée sur le marché japonais.
    Voilà les confessions que j’avais à vous faire. Vous ne serez donc pas surpris que je sois un ardent défenseur de la négociation d'un accord de partenariat économique avec le Japon. Cela fait longtemps que nous l'attendons, comme je crois que Wendy Dobson vous l'a déjà dit. Elle travaillait déjà sur ces questions en 1986. Certains d'entre nous ont proposé la négociation d'un tel accord dans les années 1990. Et puis il y a eu le cadre économique de 2005, les rapports de 2007 et de 2011, et enfin celui de mars 2012 portant sur ce qu'on a appelé l'étude de complémentarité.
    Pour toutes sortes de raisons, il a fallu beaucoup de travail et d'angoisses avant d'en arriver là, mais voilà, nous sommes maintenant au moins rendus à cette étape. Si je ne suis pas votre dernier témoin, je fais tout au moins partie des derniers, et cela m'a permis de lire les témoignages que votre comité a entendus. Rassurez-vous donc, je ne vais pas vous rabâcher à nouveau les oreilles avec les informations de base que vous connaissez déjà. Je sais également que certaines questions vous intéressent tout particulièrement, voire vous préoccupent.
    Je vais me contenter d'aborder trois points et je serai ensuite prêt à entamer le dialogue avec vous.
    Comme vous le savez tous, le Japon est un important partenaire commercial depuis longtemps. Nous avions déjà, en 1904, ce que nous appellerions aujourd'hui un délégué commercial à Yokohama. Lorsque William Lyon Mackenzie a entamé des relations diplomatiques avec le Japon, en 1929, les questions commerciales étaient déjà très importantes pour lui. Le volet économique de notre relation avec ce pays a d'ailleurs toujours été dominant depuis.
    On peut toutefois dire que les deux pays se satisfont maintenant un peu trop des résultats de leurs relations. Lors de son passage à Tokyo, Perrin Beatty a dit que le comportement des deux pays lui fait penser à deux personnes âgées qui se connaissent bien et devisent sur le banc d'un parc. C'est vrai dans une certaine mesure. Je trouve que cette relation doit être revitalisée. Il faut lui donner un nouvel élan et il n'y a pas de meilleur outil pour cela que les relations commerciales. Je ne parle pas ici uniquement des relations intergouvernementales, mais aussi de celles du secteur privé dans lesquelles, il me semble, il faut aussi insuffler un plus grand dynamisme.
    Lorsque j'étais en poste au Japon, au milieu des années 1990, les échanges commerciaux bilatéraux étaient presque exactement au même niveau qu'aujourd'hui. Nous n'avons pas progressé depuis. Si vous examinez les exportations australiennes vers le Japon entre 2000 et 2010, vous allez constater que, au cours de cette décennie, elles ont atteint environ le double du total de nos échanges bilatéraux. L'Australie est l'un de nos concurrents pour la majorité de nos exportations vers le Japon. C'est un pays qui a accordé une priorité élevée à l'Asie, et au Japon, et qui en a récolté des dividendes. Je crois que c'est là un exemple que nous devrions suivre.
    Il faut que nous abordions cette question dans le contexte asiatique. Je suis également un ferme partisan de notre participation au Partenariat transpacifique, mais je ne crois pas qu’une telle participation puisse constituer une solution de remplacement à un accord de libre-échange entre le Canada et le Japon. Pendant de nombreuses années, les Japonais ont été opposés aux accords commerciaux de portée régionale ou bilatérale. Ils ont plutôt joué la carte de l'Organisation mondiale du commerce et des divers cycles de négociations qui se sont succédé. Je crois que nous pouvons tous convenir que l'idéal serait que le cycle de négociations de Doha aboutisse, mais nous en sommes loin. Dans ces négociations, les participants s'efforcent tous énergiquement d'obtenir des avantages concurrentiels ou discriminatoires, et nous n'avons d'autre choix que de participer à ce jeu. Le gouvernement actuel est d'ailleurs engagé sur cette voie. Toutefois, lorsque vous examinez les ententes qui ont été conclues, vous constatez que le Japon occupe une place qui lui est propre, tant par le volume de ses échanges commerciaux que par la valeur des débouchés qu'il offre.
    Nous devons voir les choses en grand et conclure une entente aussi complète que possible. Elle devrait s'appliquer à toute la gamme des échanges commerciaux, c'est-à-dire toucher les biens et les services, la propriété intellectuelle, les marchés publics et les mécanismes de règlement des différends. Je sais fort bien que ce sont là des questions délicates dans tout accord commercial. Le paragraphe du rapport du mois de mars qui est consacré aux questions délicates a été rédigé avec énormément de soins et en faisant preuve de beaucoup de diplomatie, mais je ne crois pas que cela signifie que les négociateurs devraient laisser ces questions de côté. Nous devons parvenir à un accord aussi vaste que possible.
    Comme nous l'avons constaté, aussi bien avec l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis qu'avec l'ALÉNA, ces accords ont pour effet d'accroître la prise de conscience et le respect dans les pays concernés, comme dans leurs milieux respectifs des affaires. Les dispositions précises de ces accords, comme les réductions tarifaires, n'ont pas toujours d’effets très marqués, mais nous constatons l'apparition de ce que les économistes appellent « l'effet de pesanteur », qui se manifeste par une évolution psychologique de la relation entre les deux pays. C'est là le résultat de ce type d'accords, lorsqu'ils ont été négociés et rédigés comme il convient.
(1540)
    Il faut enfin savoir, comme le rapport la rappelle, que les relations commerciales entre les deux pays sont complémentaires dans une large mesure. C'est là une dimension que, à mon avis, les deux pays auraient avantage à approfondir au lieu de s'en tenir aux solutions traditionnelles déjà appliquées depuis longtemps. Nous pouvons en discuter également.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie de cet exposé. Pour répondre à une question que vous avez posé, et afin que le comité le sache, vous êtes effectivement notre dernier témoin. Votre témoignage est une excellente façon de conclure l'étude que nous avons faite, en particulier à la suite des réunions que nous avons eues à Tokyo et à Osaka, au cours desquelles nous avons couvert une très large gamme de sujets. C'est une excellente chose que l'audition de nos témoins prenne fin avec vous.
    Nous allons maintenant passer à la période de questions et de réponses.
    Monsieur Davies, la parole est à vous.
(1545)
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Pour commencer, je tiens à dire à M. Campbell combien j'apprécie qu'il ait pris le temps de venir nous rencontrer. Je sais combien vous êtes occupé et le témoignage d'une personne de votre compétence est vraiment très utile à ce comité. J'en profite également pour remercier le président d'avoir réussi à vous faire venir. Je sais que cela n'a pas été facile à organiser et je suis ravi que nous puissions profiter de votre sagesse et de votre expérience.
    Nous revenons tout juste du Japon. Comme je vous le disais, je ne crois pas qu'on puisse prétendre connaître un endroit si on ne s’y est pas rendu. Cette visite fut vraiment très enrichissante.
    Je vais commencer par une découverte que j'ai faite lors de cette visite, soit que les ententes commerciales portent essentiellement et avant tout sur les réductions tarifaires, et traitent ensuite des barrières non tarifaires qui sont identifiables, mais que tout cela semble être sous-tendu par des attitudes culturelles qui, comme l’a dit une personne, sont difficiles à traduire dans le texte d'une entente commerciale. J'ai remarqué que c'est un phénomène présent dans une certaine mesure au Japon.
    Je peux vous en donner comme exemple le cèdre Sugi. On m'a expliqué que plus d'une centaine d'institutions financières accordent une réduction du taux hypothécaire de 0,3 à 0,5 p. 100 lorsqu'une maison est construite en utilisant un minimum de bois d’origine locale. Il y a d'autres types de traitements préférentiels qui sont de nature encore moins tangible.
    Je suis curieux de savoir ce que vous pouvez nous dire de l'importance et de l'ampleur de la préférence nationale dont bénéficient les biens et les services d'origine japonaise, et de la façon dont elle peut être abordée dans des négociations commerciales.
    Je crois que c'est un problème que, en un sens, j'aborderais sous deux angles.
    Tout d'abord, même s'il s'agissait là de votre première visite dans ce pays, vous avez dû constater que la culture et les traditions ont une grande importance au Japon. Cela s'applique à tous les sujets de réflexion des Japonais, et à tout ce qu'ils font. C'est également un pays dans lequel, comme vous l'avez probablement constaté également, la perfection est un dogme. Les Japonais sont des esthètes. Quand ils produisent quelque chose, ils visent un niveau de perfection supérieur à celui de toute autre société dans le monde. La qualité des produits que nous pourrions expédier dans ce pays constitue donc un défi.
    Je crois en même temps que l'idée voulant que le Japon soit une société fermée, dans laquelle il serait difficile de faire entrer des produits étrangers, est tout à fait inexacte. Il se peut que, dans une certaine mesure, cela ait été vrai à une époque, mais vous pouvez y trouver aujourd'hui pratiquement n'importe quel produit fabriqué ailleurs dans le monde, parfois adapté aux goûts ou aux usages des Japonais, mais c'est une société très ouverte dans laquelle… Cela remonte à l'ère Meiji, quand la société a décidé de s'ouvrir. Nous n'en avons probablement pas le temps maintenant, mais je pourrais vous raconter certaines histoires intéressantes sur la façon dont le Japon s'est ouvert sur le monde extérieur.
    Il y a donc parfois ce genre de tendances contradictoires et divergentes. Il est rare que les Japonais se demandent si un produit a été fabriqué chez eux ou à l'étranger. Le cas du bois Sugi revêt une importance toute particulière pour eux. Je ne pourrais pas vous énumérer maintenant la petite dizaine d'autres choses qui ont la même importance pour eux. Il y a bien sûr le riz. C'est beaucoup plus qu'un aliment pour les Japonais. Il touche au coeur même de leur culture.
    Je ne crois pas que nous devrions nous leurrer. Les Japonais feront toujours preuve d'une préférence, naturelle chez eux, pour certains produits. Il y aura toujours des façons d'aborder ces problèmes, y compris celui de l'exemple que vous avez donné, mais je ne crois pas que cela concernera la vaste majorité de nos échanges commerciaux de biens et de services.
    On nous a également dit que les Japonais ont du mal à obtenir un visa et un permis de travail pour le Canada, et que la procédure est lente et coûteuse. Nous savons également que la signature d'un accord commercial n'est que le début, qu'il reste beaucoup de travail à faire par la suite pour vraiment retirer les fruits d'un tel accord.
    Nous avons rencontré des membres du milieu canadien des affaires expatriés à Osaka qui nous ont dit que la fermeture du consulat canadien dans cette ville envoie un message qui ne cadre pas avec le désir d'accroître les activités commerciales et d'affaires, en particulier dans la région d'Osaka qui compte 30 millions d'habitants. Il faut aussi savoir que nous n’offrons plus de services consulaires à Tokyo. C'est dorénavant Manille qui s'en occupe.
    L'ancien diplomate que vous êtes estime-t-il que nous devrions consolider le service des délégués commerciaux et améliorer notre service des visas pour retirer tous les fruits de l'accord commercial?
(1550)
    Eh bien, j'ai eu par le passé à faire face aux difficultés que posent les contraintes budgétaires et je connais le genre de problématique auquel on est alors confronté. Cela dit, la fermeture du conseil général du Canada à Osaka a été une erreur et nous devrions revenir sur cette décision.
    Je ne crois pas qu'on ait alors bien mesuré combien le milieu des affaires d'Osaka est différent de celui de Tokyo, et même en concurrence très forte avec lui. Le PIB de la région de Kansai est à lui seul beaucoup plus élevé que celui du Canada, et je ne crois pas que nous ayons envoyé là le bon message.
    Sur la question des visas, je ne suis pas en mesure de vous faire des commentaires bien étayés. J'aurais préféré que le service des visas reste à Tokyo. Je crois savoir que cela s'intègre à un processus qui va finir par accélérer le traitement au lieu de le ralentir, mais il m'a toujours paru important de se montrer réceptif dès le premier contact avec les gens, et cela en fait partie.
    Très bien, je vous remercie.
    Monsieur Keddy, la parole est à vous.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Monsieur Campbell, je vous souhaite la bienvenue à ce comité.
    Permettez-moi tout d'abord, avant de commencer à vous poser mes questions, de prendre un instant pour vous remercier de la longue et brillante carrière que vous avez faite dans la fonction publique, et bien évidemment comme ambassadeur au Japon. Sur la question qui nous intéresse aujourd'hui, vous disposez d'une perspective et de connaissances que peu de nos témoins avaient.
    Je tiens à revenir sur la fermeture de la Section des visas et de l'immigration à Osaka. Je vous remercie de vos commentaires sans ambages à ce sujet; c'est le genre de choses que nous voulons entendre à ce comité. Bien évidemment, la difficulté qui se pose pour tout gouvernement soumis à des contraintes budgétaires est de parvenir à équilibrer ses comptes, et de réussir à sortir du cycle économique dans lequel nous nous trouvons, comme vous l'avez rappelé fort à propos.
    Le traitement des demandes de visa à l'ambassade de Tokyo devrait être plus rapide, mais c'est à l'usage que nous pourrons juger du résultat, et il faudra voir s'il s'accélère ou non. Pour moi, je suis convaincu que ce sera le cas. Il est certain que nous sommes maintenant passés à une génération qui présente ses demandes en ligne.
    La question que je tiens vraiment à vous poser porte sur les échanges commerciaux. Nous savons fort bien qu'il y a toutes ces pratiques complémentaires ou parallèles, et vous en avez mentionné quelques-unes. Cela fait longtemps que nous entretenons des relations avec le Japon, puisqu'elles remontent à 1929, et je suis convaincu que les membres du comité qui se sont rendus au Japon l'ont constaté.
    Jusqu'à maintenant, j'ai eu l'occasion de me rendre au Japon quatre ou cinq fois. Nous y avons une excellente réputation, mais, en toute franchise, je ne crois pas que nous en tirions suffisamment parti. Nous avons dans ce pays, parfois sans nous en douter, de bons soutiens dans un certain nombre de domaines.
    L'un d'entre eux, et je suis sûr que cela intéressera M. Lister, est la Commission internationale pour la conservation des thonidés de l'Atlantique, la CICTA. Le Japon y est notre allié depuis sa création.
    Le Canada exporte au moins 90 p. 100 de ses prises de thon, alors que d'autres pays, comme les États-Unis, consomment eux-mêmes la majorité de leurs prises. Le Japon est probablement notre plus important acheteur de thon. Je crois qu'il nous arrive de négliger certains aspects de nos échanges commerciaux que nous jugeons d'importance mineure alors qu'ils sont en vérité très importants pour le Canada. Si ce n'était de l'appui du Japon lors de la dernière réunion de la CICTA, nous aurions dû mettre fin à nos exportations de thon partout dans le monde, et a fortiori au Japon.
    Qu'en pensez-vous? Ce sont parfois des ententes annexes, et non pas l'accord lui-même, qui vous permettent de mettre le pied dans la porte.
(1555)
    Je suis tout à fait d'accord. Un point qui me paraît important et que j'ai oublié de vous mentionner est que je suis ce qu'on appelle un « membre émérite » de la Fondation Asie-Pacifique. C'est à ce titre qu’on m'a demandé de présider un groupe de travail, qui vient de publier son rapport, dont nous remettrons une copie au comité. Je relisais ce que nous y disons de l'architecture régionale. Il faut reconnaître que seuls des diplomates peuvent trouver une telle formulation, et un architecte m'a d'ailleurs téléphoné pour me demander s'il lui était possible de s'impliquer. En vérité, quand nous parlons d'étudier l'architecture régionale, nous voulons dire étudier les institutions et les accords commerciaux en vigueur en Asie. La portée de cette étude allait bien au-delà du Japon. Ce rapport, qui a donc été publié, a pour titre Assurer la place du Canada en Asie.
    L'un des arguments qui me paraissent aller dans votre sens est qu'une simple relation commerciale ne suffit pas. En Asie, les relations sont importantes. Dans chaque pays, il vous faut entretenir des relations complètes dans un certain nombre de secteurs ou de domaines. Je parle ici de la politique, de la sécurité et, dans certains cas, de la défense, même si nos moyens dans ce dernier domaine ne sont pas si importants dans ce type de contexte. Il ne s'agit pas que de commercer. Il faut aussi déterminer dans quels cas nous pouvons nous allier à ces pays dans le cadre d'ententes et d'institutions internationales.
    L'une des choses qui m'a toujours frappé, et je pense être passablement objectif en le disant, est le grand nombre de domaines dans lesquels le Canada et le Japon ont des intérêts communs. À l'époque où j'étais sous-ministre des Affaires étrangères, j'ai été sherpa, ou représentant personnel du premier ministre, lors des réunions du G-7 et du G-8. J'ai constaté à de nombreuses occasions que le Canada et le Japon, les deux membres de ce groupe à ne pas être des puissances nucléaires, et ce n'était pas la seule raison, avaient beaucoup plus en commun dans leurs attitudes et dans leurs approches qu'avec les pays avec lesquels nous avions l'habitude d'entretenir des relations. Je crois que c'est également un facteur important dans les relations entre le Canada et le Japon.
    C'est une remarque intéressante pour nous qui étions au Japon cet été. Une partie de notre délégation a visité les régions touchées par le tsunami, y compris celle de Fukushima. Les Japonais étaient très reconnaissants que le Canada leur ait fait parvenir des choses tout à fait banales, mais très importantes au moment, comme les couvertures isolantes et des compteurs Geiger. Le gouvernement canadien a expédié des milliers de compteurs Geiger au Japon. Les Japonais étaient également très reconnaissants que le Canada ait été le premier pays à reconnaître que les aliments qu'ils exportaient étaient sécuritaires. Ce fut un désastre abominable pour eux.
    La région de Fukushima a été fortement irradiée, mais, en toute franchise, cela a suscité de la bonne volonté à notre endroit, et pour les bonnes raisons. La nourriture japonaise est préparée de façon méticuleuse. Les gens de ce secteur font un travail fantastique. Vous avez parlé plus tôt de perfection. Il n'y avait absolument aucun risque que les aliments soient irradiés.
    Si vous le souhaitez, vous pouvez faire rapidement un commentaire. Si ce n'est pas le cas, c'est très bien également.
    Je m'apprêtais simplement à dire quelque chose d'autre qui pourrait vous intéresser. Après le tremblement de terre, qui a bien sûr eu des répercussions importantes à Tokyo, les gaijin, l'appellation qu'on donne aux étrangers, sont pratiquement tous partis. Ce fut le cas de tous les Européens, à l'exception de quelques Britanniques. L'ambassade d'Allemagne a déménagé immédiatement à Osaka. Les Canadiens, eux, sont restés. On me l'a répété de nombreuses fois. Il se peut que les Japonais y aient vu un trait de caractère des Canadiens. C'est quelque chose qu'ils ont remarqué.
(1600)
    Je vous remercie.
    Je donne maintenant la parole au monsieur à la maison aux pignons verts. Je ne le verrai plus jamais de la même façon. Je croyais que M. Easter avait quelques connaissances en agriculture, mais il s'y connaît beaucoup mieux en tourisme.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous prie tout d'abord de m'excuser, M. Campbell, parce que s'il y a bien un témoin que je voulais entendre, c'était vous. Malheureusement, Ed Holder a parlé si longtemps en Chambre de l'accord entre le Canada et le Panama que j'ai dû attendre la période des questions pour venir ici. C'est la raison de mon retard. Je n'ai donc pas entendu ce que vous avez dit et cela me met, dans une certaine mesure, en situation désavantageuse.
    Vous avez dit que, en Asie, les relations sont importantes. Comme le président l'a rappelé au sujet de notre implication avec les Japonais, mon comté est celui dans lequel se trouve Anne of Green Gables, la maison aux pignons verts, un lieu touristique de l'Île-du-Prince-Édouard qui attire les Japonais. Cela dit, lorsque nous vendons des produits au Japon, nous sommes nous aussi des îliens. Nous y vendons du canola qui ne contient pas d'OGM, que Rob appelle du colza, mais je crois que cela nous confère un avantage sur le marché japonais.
    Au sujet du consulat d'Osaka, j'ai eu le sentiment, lorsque nous y sommes allés que, au moins dans cette région, les Japonais s'étaient sentis blessés par cette décision. Si nous devions recommander que ce consulat soit rouvert, ce que nous devrions faire à mon avis, et je ne vous demande pas quelles seraient les répercussions sur le gouvernement, comment les Japonais le percevraient-ils à votre avis? Si nous faisons cette recommandation, la décision reviendra au gouvernement, mais les Japonais se sentiraient-ils encore offensés que nous l'ayons fermé? Sa réouverture ferait-elle une différence?
    Je crois que, si nous devions le rouvrir, ils y seraient sensibles. C'est un problème aussi important que n'importe quel autre dans la région de Kansai. Il se peut que sa réouverture ne retienne pas particulièrement l'attention ailleurs au Japon, mais il ne fait aucun doute qu'elle serait remarquée dans la région de Kansai. Cela dit, je ne crois pas que la fermeture de ce consulat ait causé beaucoup de peine ou d'animosité, parce que tous les gouvernements, y compris celui du Japon, doivent prendre des décisions difficiles. L'une des difficultés bien réelles auxquelles nous sommes ici confrontées est que le coût de fonctionnement d'un tel service est sensiblement plus élevé au Japon que dans beaucoup d'autres pays. Cela tient aux prix de l'immobilier et à la rémunération des employés recrutés sur place. Je conviens tout à fait que c'est une décision difficile. Je me suis déjà trouvé dans l’obligation de faire des recommandations à des ministres dans de telles circonstances. C'est une décision difficile.
    En bref donc, la réouverture du consulat serait remarquée, et elle serait appréciée dans la région de Kansai.
    Je vous remercie.
    Lorsque nous parlons d'échanges commerciaux, nous pensons souvent à des marchandises. S'il y a une chose qui compte vraiment, et je le pensais déjà avant d'aller au Japon la semaine dernière et j’en suis encore plus convaincu maintenant, c'est bien la qualité. Peu importe ce que nous vendons sur ce marché, sa qualité doit être la plus haute possible, et nous devons nous assurer qu'elle soit maintenue. Je parle ici des marchandises. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.
    Il y a également une chose dont je n'avais pas pris conscience avant d'aller au Japon, et c'est le montant des investissements de ce pays au Canada. Je sais fort bien qu'ils sont plus élevés que ceux des Coréens. Ils ont leurs usines de voitures ici. Les fabricants de voitures créent des emplois au Canada. C'est grâce à leurs investissements qu'ils vendent ici, entre autres, des voitures Honda.
    En ce qui concerne les investissements, y a-t-il quelque chose que nous devrions faire dans le cadre d'un accord de libre-échange qui améliorerait leur capacité à investir au Canada? Ils investissent beaucoup dans les secteurs des mines, du pétrole et du gaz naturel, et des gaz de schiste. J'ignorais par contre qu'ils avaient investi dans celui des terres rares.
(1605)
    Pour répondre rapidement à votre question sur la qualité, vous avez tout à fait raison: au Japon, la qualité passe avant tout. Comme je vous l'ai dit tout à l'heure, les Japonais recherchent la perfection en tout, qu'il s'agisse de la fraîcheur des poissons pour faire des sushis ou de la fameuse qualité « J », ou qualité japonaise. Les Japonais exigent en effet un niveau de qualité supérieure à celui exigé sur les autres marchés, y compris sur notre marché intérieur. Pour les Japonais, la qualité et l'apparence priment sur tout. C'est le message qu'il faut transmettre à toute personne voulant vendre au Japon, quel que soit le produit, et qu'il soit fini ou non. C'est le premier point à retenir.
    Quant aux investissements, il est intéressant de rappeler ce qui s'est produit au cours des années. Par le passé, c'était les Japonais qui venaient au Canada. Les relations commerciales étaient dominées par les énormes sociétés japonaises de commerce, comme Mitsubishi, Mitsui et Tomen. Il y en avait quantité d'autres. Elles investissaient de petits montants dans un grand nombre d'entreprises, dont beaucoup se trouvaient dans le secteur des ressources naturelles, mais pas uniquement. Pour être tout à fait franc, on peut dire que nous étions une nation commerçante, mais pas vraiment une nation de commerçants. Il y avait des gens qui faisaient du commerce, parce qu'ils achetaient des produits au Canada et les expédiaient ensuite au Japon. Cela s'intégrait au système japonais de distribution qui était alors abominablement complexe et contrôlé dans une très large mesure par ces sociétés de commerce.
    Ce système japonais de distribution a été simplifié, et c'est une excellente chose. Le nombre de niveaux qu'il comporte a été passablement réduit et cela a fait baisser sensiblement les prix. Je retourne au Japon trois ou quatre fois par année et je constate que les prix en vigueur n'ont plus rien à voir avec ce qu'ils étaient quand j'y résidais, il y a plusieurs années, et cela tient à la simplification de leur système de distribution.
    Le contrôle exercé par les sociétés de commerce a changé de forme. Ces sociétés sont en effet devenues essentiellement des sociétés d'investissement. C'est ce qu’on constate dans le secteur de l'énergie et dans certains domaines de celui des ressources naturelles, dans lesquels ces sociétés ne se contentent plus de petits investissements minoritaires. Elles font maintenant des investissements importants, souvent majoritaires.
    Dans le cadre de la négociation d'un accord, mais aussi dans une perspective plus large, nous allons devoir instaurer un contexte qui leur paraîtra prévisible et accueillant pour les investissements. Je pense que le texte de l'accord devrait comporter un chapitre reprenant cette idée, sous une forme ou sous une autre.
    Cela ne veut pas dire que les investissements posent actuellement un problème. Les Japonais investissent beaucoup au Canada, et le nombre de leurs investissements va augmenter. Cela s'inscrit dans la vague d'investissements asiatiques dont tout le monde parle.
    Je vous remercie de cette réponse.
    La parole est à M. Cannan.
    Merci, monsieur le président, et merci également à M. Campbell. Comme mes collègues, je vous remercie de nous permettre de profiter de votre expérience et de votre point de vue.
    Je suppose que, depuis votre départ, plusieurs ambassadeurs se sont succédé à Tokyo. Quant à nous, l'ambassadeur Fried nous a réservé un accueil incroyable. Nous avons échangé sur le calendrier, en convenant avec humour que celui-ci n'aurait pu être mieux choisi. J'ai effectivement fait d'autres voyages pendant que des négociations étaient en cours alors que, dans ce cas-ci, notre déplacement les précédait. Cela nous a réjouis. L’ambassadeur a fait disparaître toutes les difficultés, comme par enchantement. Avec l'aide du personnel du MAEIC, il est parvenu à nous organiser des réunions de haut niveau des plus intéressantes. Comme le président l'a mentionné, ce fut un voyage très riche d'enseignements, l'un des meilleurs que j'ai faits pour établir des relations. Comme vous l'avez dit, les questions de relations et de culture ont été abordées avec enthousiasme.
    Au Japon, la stabilité politique à court terme n'est pas encore garantie. Une autre élection générale sera probablement déclenchée à la fin de cette année ou au début de la suivante. Le pays a eu cinq ou six premiers ministres au cours des six dernières années. J'ai le sentiment que, aux yeux des dirigeants japonais, la proposition canadienne est digne d'intérêt. Pour nous, le Japon me paraît être une excellente porte d'entrée sur le marché asiatique. Son économie est en effet la troisième en importance dans le monde et la seconde sur le marché asiatique, juste après la Chine.
    Les gens avec qui nous nous sommes entretenus nous ont dit très clairement que l'hypothèse de la conclusion d'un accord de partenariat économique est fort bien accueillie par tous. Pour être franc, nous ne nous attendions d'ailleurs pas à ce que le secteur des coopératives agricoles en soit autant partisan. Il est bien évident, comme vous l'avez dit, que nous serions malvenus de menacer de quelque façon que ce soit leurs élevages emblématiques.
    Dans vos commentaires, vous avez évoqué, monsieur Campbell, les négociations sur le Partenariat transpacifique. Nos interlocuteurs nous ont dit que la négociation de l'Accord de partenariat économique ne devrait pas poser de difficultés majeures, mais que celle du Partenariat transpacifique serait beaucoup plus problématique. Pensez-vous que nous devrions en même temps poursuivre la négociation de cet accord bilatéral, l'Accord de partenariat économique, et celle du Partenariat transpacifique?
(1610)
    Je suis tout à fait d'accord. Ce sont avant tout nos amis américains qui tiennent à négocier ce partenariat transpacifique car ils tiennent à obtenir un accord leur assurant des conditions plus avantageuses que celles offertes par l'accord de l'OMC. Actuellement, neuf pays participent à ces négociations. Il y en aura 11 avec l'addition du Canada et du Mexique. En termes de développement économique, ces pays vont de géants comme les États-Unis à d'autres n'ayant une économie émergente que depuis très peu de temps, comme le Vietnam. C'est une négociation qui s'avère déjà très difficile et qui va être longue. Le Japon n'a pas encore décidé d’y participer. Son premier ministre a annoncé en 2011 que son pays allait le faire, mais il s'est heurté… Vous avez peut-être eu l'occasion de remarquer que, à la différence du Canada, les Japonais ne font pas nécessairement grand cas du leadership politique. Pendant la durée de mon séjour dans ce pays, j'ai vu cinq premiers ministres se succéder. J'ai souvent eu l'impression, en rencontrant certains d'entre eux, qu'il était plus important à leurs yeux d'avoir été premier ministre que de l’être. Les anciens premiers ministres continuent tous à siéger à la Diète, leur parlement.
    Tout cela m'incite à penser que nous devrions, dans toute la mesure du possible, nous efforcer avant tout de conclure un accord bilatéral entre le Canada et le Japon. Nous devrions aussi participer aux négociations du Partenariat transpacifique, mais en étant bien conscients que celles-ci pourraient durer beaucoup plus longtemps et suivre un cheminement différent, et en sachant que leur probabilité de réussite n'est pas la même.
    Je trouve que c'est là une très bonne formulation.
    Avant ce voyage, j'avais déjà eu l'occasion de me rendre à Kasugai à titre d'adjoint au maire de Kelowna, et comme conseiller municipal en 2000. Les deux villes sont jumelées. Nous étions aussi allés à Tokyo. Nous avons toutefois eu la possibilité, cette fois-ci, de rencontrer des économistes et des représentants du milieu des affaires.
    Dans les deux pays, la sécurité alimentaire est une question prise très au sérieux, mais les Japonais semblent l'aborder plus d'un point de vue de gestionnaires que dans la perspective des actionnaires, comme nous le faisons dans le monde occidental. Ils consacrent environ 80 p. 100 de leurs profits à la recherche et au développement, ce qui n'est pas le cas chez nous où ce type de R et D relève essentiellement du gouvernement. Nous aurions probablement avantage à nous inspirer d’eux dans ce domaine.
    Le dernier point que je veux aborder est celui de la sécurité énergétique. Mes collègues ont parlé des secteurs du gaz de schiste et du pétrole et du gaz. Pourriez-vous nous dire comment vous percevez l'importance de nos relations dans le domaine énergétique, et ce que le Canada pourrait apporter au Japon dans celui-ci?
    Comme vous l'avez dit, il est tout à fait vrai que la question de la sécurité alimentaire est beaucoup plus abordée d'un point de vue de gestionnaires que d'un point de vue d'actionnaires. Les Japonais ne gèrent par leurs entreprises de trimestre en trimestre. Ils ont un horizon à beaucoup plus long terme.
    Vous avez aussi tout à fait raison au sujet de la R et D. Leurs dépenses dans ce domaine, exprimées en pourcentage du PNB, sont trois à quatre fois plus élevées que celles du Canada. Il faut savoir que plus de 25 p. 100 de tous les brevets déposés dans le monde sont japonais. Il y a des années où ils en ont déposé plus que les Américains. Pour eux, la R et D est extrêmement importante.
    À mon avis, le Canada dispose d'atouts majeurs dans deux domaines, celui de l'alimentation et celui de l'énergie. Dans les deux, le Japon ne dispose que de peu de ressources naturelles. Ceux d'entre vous qui y sont allés ont pu constater que c'est un pays très montagneux. La superficie totale des terres arables est inférieure à celle de l'État du Maryland, ce qui fait que le Japon ne sera jamais un géant de l'agriculture. Vous y avez probablement vu des rizières. Au lieu d'entretenir des pelouses devant leur maison, les gens y cultivent du riz. Vous en voyez partout.
    Le Japon est le seul pays au monde dans lequel, sur la rue, vous pouvez demander aux gens l'indice de sécurité alimentaire. Pour eux, c'est un indicateur de leur autosuffisance alimentaire, et tout le monde le connaît. Cela fait des années qu'il n'a cessé de baisser, et il est maintenant nettement inférieur à 50 p. 100. J'ignore quel est le chiffre actuel, mais l'homme de la rue pourrait probablement voulu le donner parce que, au Japon, il est publié presque aussi fréquemment que les bulletins météorologiques.
    Pour le Japon, le Canada est un fournisseur de produits alimentaires, de produits de base, mais aussi de produits finis. Une entreprise voulant vendre des steaks au Japon ne pourra guère leur faire subir de transformations avant leur expédition, à moins de les cuire.
    Vous avez peut-être relevé une bonne nouvelle, à savoir que le Comité consultatif sur l'importation du bétail a recommandé de porter l'âge des animaux dont l’importation est autorisée de 20 à 30 mois. C'est un pas dans la bonne direction.
    En ce qui concerne la sécurité énergétique, le Japon a fait d'énormes progrès en réduisant sa dépendance au pétrole. Il y est parvenu dans une large mesure en se dotant de centrales nucléaires, avec les conséquences que nous avons vues. Il se trouve maintenant dans une situation difficile avec l'essentiel du pétrole et du gaz naturel qu'il importe qui doit passer par le détroit d'Hormuz, au Moyen-Orient. C'est le plus gros importateur de gaz naturel au monde. Il s'approvisionne au Moyen-Orient, en Australie et en Indonésie, un marché sur le déclin. Cela lui donne un sentiment de vulnérabilité. Les possibilités qu'il offre au Canada dans ce domaine de l'énergie sont énormes.
    J'y étais il y a quatre mois pour donner, à l'ambassade du Canada, un séminaire intitulé « Le Canada: une superpuissance émergente en matière d'énergie? » Vous qui avez vu les locaux de l'ambassade savez que l'amphithéâtre peut accueillir 237 personnes. Nous en avons eu plus de 400, ce qui montre bien l'intérêt de cette question.
    Ce sont là deux domaines dans lesquels nous pouvons jouer un rôle. Il ne s'agit pas de phénomènes à court terme. La population japonaise va continuer à avoir besoin d'aliments, et si nous ne les lui fournissons pas, quelqu'un d'autre le fera. Il en va de même dans le domaine de l'énergie. La décision nous revient.
(1615)
    Très bien.
    Et d'ici peu, il y aura le gaz naturel liquéfié du Canada.
    Monsieur Sandhu, la parole est à vous.
    Monsieur Campbell, je vous remercie des services que vous avez rendus au Canada.
    Nos missions à l'étranger jouent un rôle essentiel, non seulement pour entretenir de bonnes relations avec d'autres pays, mais également pour favoriser les activités commerciales et économiques au pays.
    Je ne peux qu'être d'accord avec mon ami Gerald Keddy: notre marque de commerce est fantastique. On nous a dit qu'il serait mieux que nous la vendions au Japon. Je ne crois pas que nous y fassions un bon travail maintenant.
    À Kansai, nous avons entendu ce que les membres de la Chambre canadienne de commerce de Kansai et de la Chambre japonaise de commerce et d'industrie avaient à nous dire. Ils s'inquiétaient que nous ne vendions pas mieux nos produits, en particulier avec la fermeture de nos services consulaires à Osaka.
    Cela dit, Osaka est la seconde ville en importance du Japon, et il y a des jalousies entre elle et Tokyo. C'est un des grands centres industriels du pays dont le PIB, comme vous l'avez rappelé, est supérieur à celui de notre pays.
    Permettez-moi de citer mon collègue. Lorsque nous négocions des accords commerciaux, il s'agit davantage de… Il y a bien évidemment les accords commerciaux, et la réduction des barrières tarifaires et non tarifaires pour favoriser les activités économiques.
    J'ai eu l'occasion de vous parler plus tôt aujourd'hui. J'ai appris que l'instauration de relations avec les Japonais nous permettrait de développer les échanges commerciaux entre nos deux nations.
    Quel type de message envoyons-nous aux Japonais de la région d'Osaka avec la fermeture de nos services consulaires? J'ai également entendu dire par des Canadiens du milieu des affaires de Tokyo qu’ils n'étaient pas très heureux de la fermeture du service des visas dans cette ville, en particulier pour les étudiants qui veulent venir ici.
    Que pouvez-vous nous dire sur ces questions?
(1620)
    En ce qui concerne notre marque de commerce, notre image de marque, c'est toujours un sujet intéressant et un défi.
    On peut dire sans se tromper que si vous vous entretenez avec des Japonais moyens, dont certains sont venus au Canada et d'autres non, vous allez constater qu'ils ont une vision très favorable du Canada. Une façon de le formuler serait de dire qu'ils en ont une vision idéaliste. Pour eux, le Canada est un pays à la nature splendide, parsemé de lacs, dans lequel il fait plus froid que ce n'est réellement le cas dans le sud, où il fait bon vivre, qui ne connaît pas les problèmes de violence et d'armes à feu de nos voisins du sud, ce qui compte pour les étudiants venant poursuivre des études au Canada.
    Toutefois, ils ne sont pas assez nombreux à connaître l’Est de notre pays, mis à part l'Île-du-Prince-Édouard. Beaucoup d'entre eux ont une certaine connaissance de nos industries de haute technologie et des villes dynamiques réparties dans tout notre pays. Comme je viens de vous le dire, ils ont une vision favorable, mais un peu naïve de notre pays. Il faut que nous leur en donnions une idée plus nette. C'est ce que l'un de mes successeurs s'est efforcé de faire. À l'occasion du 75e anniversaire de l'établissement de nos relations — nous venons tout juste de fêter le 80anniversaire de nos relations officielles —, il a lancé au Japon toute une série d'activités durant toute l'année baptisée Pensez Canada, qui a connu un vif succès. Malheureusement, ces activités avaient un coût et cinq ou six ans plus tard, c'est-à-dire maintenant, il faut que nous en fassions davantage pour donner une image de marque à la fois plus étendue et plus précise de notre pays.
    Il faut savoir que le mot « Canada » apposé sur les morceaux de boeuf ou de porc a une signification pour les Japonais: c'est une marque de commerce très précise pour eux.
    Est-ce que la réouverture de nos services consulaires à Osaka contribuerait à rehausser notre image de marque?
    Comme je vous l'ai déjà dit, j’ai trouvé malheureux que nous ayons fermé le consulat d'Osaka. J'aimerais que nous le rouvrions. Les choses sont toujours plus faciles lorsqu'on est présent sur place.
    Cela dit, une grande partie du travail à faire doit être assumée par les exportateurs et par les industriels eux-mêmes. Ils doivent organiser des campagnes de promotion.
    Les Japonais sont sensibles à des campagnes ayant une cible précise, qu'il s'agisse du boeuf, du porc, du sirop d'érable ou de quelque produit que ce soit.
    De quels industriels parlez-vous?
    Je dois vous couper la parole parce que le temps dont vous disposiez est écoulé.
    Monsieur Holder, la parole est à vous.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    D'habitude, lors de ces réunions, j'aime intervenir à la suite du député de Malpeque parce qu'il me fournit d’excellents sujets de réflexion. Il n’en va pas de même cet après-midi parce que je ne crois pas avoir à répondre aux commentaires qu'il a formulés à mon endroit en Chambre aujourd'hui. M. Campbell et moi allons donc pouvoir converser à notre convenance.
    Je ne suis pas allé au Japon. Je crois d'ailleurs être le premier intervenant de cet après-midi à n'y être pas allé, à part vous, à moins que vous y soyez allé la semaine dernière. Est-ce le cas?
    Non, je n'y suis pas allé.
    Nous en sommes donc dans la même situation.
    M. Donald Campbell: Oui.
    M. Ed Holder: Je vous remercie tout d'abord d'être parmi nous aujourd'hui. Sur la base de ce que m'ont raconté mes collègues, qui nous ont si bien représentés lors de ce voyage, j'aimerais que vous me donniez un certain nombre d'éclaircissements.
    Je me permets d'adopter, avec votre permission, un point de vue historique. Après la Seconde Guerre mondiale, la réputation du Japon dans le domaine de la fabrication n'était pas très bonne, pour être franc. Je me souviens que, lorsque j'étais gamin, pas dans les années 1940, mais bien dans les années 1950, un produit fabriqué au Japon n'était pas à nos yeux un produit de grande qualité. Il se cassait facilement, pouvait être remplacé, voire même copié, qui sait. Peu importe, les produits japonais n’étaient pas considérés comme étant de grande qualité. Les Japonais ont réussi à faire un travail phénoménal pour redorer leur image de marque. Ils sont parvenus à un niveau auquel nous parlons de la qualité de leur production autour de cette table.
    J'aimerais comprendre un peu mieux comment, à votre avis, le Japon s'y est pris. Que pouvez-vous nous dire à ce sujet? Qu'est-ce qui a permis aux Japonais de passer de l'image qu'ils avaient à cette époque, à juste titre il me semble, à l'excellente réputation parfaitement justifiée qu'ils ont maintenant? Quelles réflexions cela vous inspire-t-il?
(1625)
    Si vous me permettez de réagir à votre premier commentaire sur…
    À propos de M. Easter? Non, ne vous donnez pas cette peine.
    Si je reviens sur votre premier commentaire, c'est que je crois que l'Ouest, et je ne me cantonne pas ici au Canada, a toujours eu une opinion erronée du Japon, ou si vous préférez n'a pas eu une vision exacte du Japon contemporain. Vous avez raison de dire que, après la guerre, le Japon inspirait la méfiance pour des raisons bien évidemment liées à cette guerre, mais, pour être franc, il suscitait aussi le mépris, et cela s'appliquait également à sa production. Avec le temps, la machine de l'économie japonaise se remettant en marche et le miracle devenant manifeste, le mépris s'est transformé en admiration pour la qualité de ce qui se faisait dans ce pays. On est ensuite passé de l'admiration à l'envie, puis à la crainte pendant la période spéculative.
    Si vous prenez les livres publiés pendant les années 1980 et 1990, vous allez constater que leurs titres traduisaient une crainte du Japon. Je vous cite de mémoire Head to Head et Japan as Number One: Lessons for America. Lorsque la bulle spéculative a explosé au Japon, la crainte a laissé place au rejet. Toutes ces opinions ou ces visions de la situation étaient erronées à l'époque, comme elles le sont toujours de façon rétrospective. Les Canadiens que nous sommes, mais cela s'applique en vérité à tous les occidentaux, doivent se méfier de leurs premières impressions sur le Japon.
    Pour en revenir à la question de la qualité, elle n'avait rien de nouveau pour les Japonais. Il y a dans ce pays une longue tradition d'artisanat et de travail soigné. Cette tradition a refait surface. Si, par exemple, vous vous intéressez à la porcelaine et aux céramiques du Japon, vous allez découvrir que cela fait 200 ans que ce sont les plus réputés dans le monde, mais les exportations…
    Je vous prie de m'excuser de vous interrompre, mais je m'efforce de bien saisir l'importance de l'histoire. Si vous comprenez bien celle-ci, cela vous aide à mieux comprendre le présent et l'avenir. Pensez-vous que, après la guerre, les Japonais étaient en quelque sorte en mode de survie?
    Je pense effectivement qu'ils étaient en mode de survie et que c'était le début d'une volonté très marquée de se doter d'une économie axée sur les exportations. Le pays a souffert pendant cette période. Il n'a pas fallu attendre longtemps pour que la qualité revienne à l'avant-scène.
    Cela se dégage clairement des commentaires des personnes qui ont participé à ce voyage, et je ne regrette pas de ne pas y être allé.
    Je peux vous dire que tous ceux qui sont assis autour de cette table ne cessent de répéter que les entrepreneurs qui veulent faire des affaires au Japon doivent accorder la priorité à la qualité.
    En mai dernier, Mme Janice Hilchie, de l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes, a tenu à nous faire part des craintes que lui inspirent des entreprises de services financiers régies par l'État, comme Japan Post.
    Je m'attends à ce que cela devienne une question très difficile pour les institutions financières canadiennes. Êtes-vous au courant de ce problème? Qu'en pensez-vous? Quelles solutions proposeriez-vous?
    J’en ai entendu parler dans les grandes lignes, mais je ne suis pas un spécialiste du secteur de l'assurance. Je peux vous signaler qu'une société comme ManuLife a obtenu de très bons résultats au Japon.
    Quant à la poste japonaise, il faut savoir que c'était une société d'État, appartenant en totalité au gouvernement, et que ce n'est plus le cas. Toutefois, elle est toujours contrôlée par le gouvernement. Je dois vous préciser que cette société japonaise des postes est devenue l'institution de dépôt au détail privilégiée par la quasi-totalité des Japonais. Elle s'est ainsi retrouvée dépositaire de fonds énormes, qu'elle a prêtés au gouvernement sous forme d'obligations à faible taux. Le gouvernement japonais a ainsi disposé d'un énorme mécanisme de financement. Le gouvernement canadien, lui, n'a pas eu accès à un tel mécanisme. La société japonaise des postes va effectivement poser un problème, mais il faudra tout simplement que nous nous y attaquions.
    Je vous remercie de ces précisions.
    Monsieur Campbell, nous arrivons à la fin de notre séance et je tiens à vous remercier du temps que vous avez bien voulu nous consacrer. Nous vous sommes reconnaissants de nous avoir fait partager vos connaissances et votre expérience du Japon. Cela nous a permis de mieux appréhender certains sujets dont nous avons entendu parler la semaine dernière et de mieux comprendre quelles peuvent être la nature et la portée d'un accord de partenariat économique.
    Le premier cycle de négociations de cet accord va débuter le 26 novembre. Dans ce cas-ci, nous avons été des précurseurs. Nous avons pu cogner à toutes les portes que nous avons trouvées et nous en avons appris un peu plus sur le travail des ambassadeurs. Nous devrions leur rendre visite quand ils quittent leurs postes parce que, à ce moment-là, ils n'hésitent plus à abattre toutes leurs cartes politiques. Nous avons eu la chance d’avoir les réunions les plus intéressantes que nous pouvions imaginer avec des personnes de tout premier plan.
    Je vous remercie encore d'être venu nous rencontrer.
    Nous allons maintenant interrompre la séance et passer au prochain…
(1630)
    Monsieur le président, pendant l’une de nos réunions, j'ai déposé une motion sur l'Accord sur la promotion et la protection des investissements étrangers conclu entre le Canada et la Chine. J'ai alors posé toute une série de questions. Cela fait maintenant deux semaines que celles-ci ont été transmises par écrit au ministère.
    Vous obtiendrez les réponses ultérieurement.
    Non, monsieur le président. Ce n'est pas acceptable. Si le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international n'est pas en mesure de répondre à une série de questions techniques sur un accord entré en vigueur le 31 octobre, il y a un problème. Peut-être lui faut-il obtenir des autorisations pour nous communiquer les réponses, mais nous devions les recevoir le 31 octobre. Il s'agissait d'une série de questions à laquelle ils auraient dû pouvoir répondre en deux jours. Nous n'avons pas été autorisés à débattre de cette question.
    Oui. J'en suis bien conscient. Je vais leur demander où ils en sont et quand…
    Je veux avoir une réponse. Nous allons nous absenter et nous n'avons pas de réunion jeudi. Je veux donc obtenir cette réponse. Nous méritons pour le moins qu'on nous réponde. Je vous rappelle que ce n'est pas moi qui pose les questions, mais le comité.
    J'ai très bien saisi ce que vous voulez.
    La séance est levée. Nous allons pouvoir libérer la salle.
    [La réunion se poursuit à huis clos]
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