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ENVI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'environnement et du développement durable


NUMÉRO 038 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 29 mai 2012

[Enregistrement électronique]

(0900)

[Traduction]

    Bonjour chers collègues. Commençons notre réunion.
    Bienvenue à la 38e réunion du Comité permanent de l'environnement et du développement durable, alors que nous poursuivons notre étude relative à l'élaboration d'un plan de conservation national.
    Encore bienvenue à nos témoins que je remercie de s'être déplacés.
    Nos témoins d'aujourd'hui comparaîtront individuellement pour les uns et en groupe pour les autres. Chaque témoin ou groupe de témoins disposera de 10 minutes pour ses déclarations. Nous commencerons par M. Hutchings, puis nous entendrons M. Willison de la Fédération du saumon Atlantique et du Centre des sciences de la mer Huntsman, enfin, nous passerons aux questions.
    Veuillez commencer monsieur Hutchings. Vous avez 10 minutes.
    Effectivement, je vous remercie de votre invitation à m'adresser au comité dans le cadre de ses délibérations concernant l'élaboration d'un plan de conservation national.
    Outre qu'ils se fondent sur mes 30 années de carrière universitaire consacrées à l'écologie et à l'évolution des poissons, mes commentaires s'appuient également sur les responsabilités dont je me suis acquitté en tant que président, de 2006 à 2010, du comité sur la situation des espèces en péril au Canada, le COSEPAC, organisme scientifique national indépendant chargé de conseiller le ministre de l'Environnement comme le prévoit la Loi sur les espèces en péril.
    J'ai également dirigé la préparation d'un récent rapport national sur la conservation des océans en réponse à une demande de la Société royale du Canada voulant qu'un groupe d'experts indépendants soit mis sur pied afin de se pencher sur une série de questions se rapportant au maintien de la biodiversité marine au Canada.
    Après avoir délibéré de juin 2010 à janvier 2012, le groupe d'experts a publié son rapport, intitulé Le maintien de la biodiversité marine au Canada : relever les défis posés par les changements climatiques, les pêches et l'aquaculture, le 2 février 2012. Parallèlement à l'étude actuelle de ce comité permanent, le rapport de la Société royale du Canada vise à décrire les tendances de la biodiversité dans les océans baignant le Canada, sur les plans de la conservation des océans et de l'utilisation durable; formuler des recommandations stratégiques de vaste portée pour faire du Canada un chef de file international en matière d'intendance et de conservation des océans.
    Une autre responsabilité qui incombait au groupe d'experts consistait à déterminer si le Canada respectait ses obligations nationales et internationales à l'égard de la préservation et du maintien de la biodiversité marine. Certains progrès ont été réalisés, certes, mais le groupe d'experts a conclu que les efforts déployés par le Canada étaient infimes en comparaison de ceux accomplis par beaucoup de pays développés pour maintenir et conserver la biodiversité des océans. Des pays comme l'Australie, la Norvège et les États-Unis ont fait des progrès beaucoup plus importants que le Canada à cet égard.
    Le groupe d'experts attribue le fait que le Canada ne progresse pas au chapitre de ses obligations à la lenteur excessive de la mise en œuvre des mesures par voie législative et politique. Le groupe d'experts a également conclu que certains éléments freinent les progrès du pays: d'une part, les conflits de responsabilités dans le mandat du ministère des Pêches et des Océans, qui doit promouvoir les activités commerciales et économiques, tout en protégeant la vie aquatique et la santé des océans et, d'autre part, le degré de pouvoir discrétionnaire dont bénéficie le ministre des Pêches et des Océans.
    II est donc à propos et approprié que le comité permanent entreprenne une étude venant appuyer l'élaboration d'un plan de conservation national, particulièrement pour ce qui est des ressources aquatiques ou océaniques.
    En marge de vos efforts, j'ai remarqué que le vérificateur général du Canada a effectué une vérification intitulée « Protéger la biodiversité », de même qu'une note d'audit sur les espèces en péril au printemps 2013.
    Quels doivent être les objectifs d'un plan de conservation national, ou PNC? Un PNC devrait: premièrement, viser à favoriser la conservation et, lorsque c'est pertinent ou approprié, l'utilisation durable, comme dans le cas de la pêche, de la biodiversité terrestre et marine du Canada; deuxièmement permettre d'établir un réseau de zones protégées dans les milieux marins, d'eau douce et terrestre; troisièmement, viser à sensibiliser les Canadiens aux merveilles naturelles qu'offre l'incroyable richesse biologique de la terre et de l'eau dont ils sont les principaux gardiens mondiaux, par le truchement des décisions prises par les parlementaires de tous les partis; et, quatrièmement, permettre de fournir des preuves tangibles, empiriques et convaincantes aux Canadiens et au reste du monde afin de démontrer que notre pays, par ailleurs de plus en plus réputé pour son mépris de ses obligations internationales en matière de conservation, est véritablement déterminé à assurer le maintien des espèces, des écosystèmes, de même que de la qualité de vie humaine qui en dépend.
    Quels doivent être les buts d'un PNC? Quelles priorités de conservation doivent faire partie d'un PNC? Je vais répondre à ces deux questions dans le même souffle. À mon avis, les buts premiers et les priorités en matière de conservation d'un PNC devraient être les suivants: protéger et restaurer les habitats et les écosystèmes dégradés; préserver les écosystèmes revêtant une importance nationale et internationale sur le plan de la biodiversité; rétablir les populations et les espèces affaiblies, dont beaucoup courent un risque élevé d'extinction — 650 espèces sauvages canadiennes, pour être exact; rétablir la résilience naturelle des écosystèmes terrestres, d'eau douce et marins pour leur permettre de s'adapter aux défis actuels et futurs découlant des activités humaines et naturelles, comme celles entraînées par les changements climatiques.
    Quels principes directeurs devraient orienter un PNC? Un PNC crédible doit être soutenu et orienté par un examen complet et adéquat des données scientifiques disponibles les plus précises. Cette recommandation est en parfaite harmonie avec les politiques gouvernementales.
    Par exemple, dans le Cadre applicable aux avis en matière de sciences et de technologie du gouvernement du Canada, on indique ceci:
« Les avis scientifiques ont un rôle important à jouer dans les décisions du gouvernement qui servent les intérêts et les préoccupations stratégiques du Canada dans des domaines tels que la santé et la sécurité publiques, l'innocuité des aliments, la protection de l'environnement, le développement durable, l'innovation et la sécurité nationale. »
    Le MPO affirme sur son site Web que la science:
« est à la base d'une prise de décisions éclairée [...] sur les conséquences des différentes options de politique et de gestion ainsi que sur la probabilité que l'on puisse atteindre les objectifs de ces politiques par l'intermédiaire de stratégies et tactiques de gestion différentes »
(0905)
    Le ministre de l'Environnement s'en remet aux données scientifiques disponibles les plus précises lorsque vient le temps d'examiner les avis fournis par le COSEPAC au sujet des espèces en péril. Toutefois, bien qu'on reconnaisse expressément l'utilité, voire la nécessité, de la science pour ce qui est de la planification et de la prise de décisions au sein du gouvernement, les Canadiens ont récemment constaté une réduction, un dépérissement, et même un abandon dans certains domaines, des fonctions qu'assure depuis longtemps la science en ce qui concerne les prises de décisions au sein du gouvernement.
    Par exemple, les modifications que le projet de loi C-38 doit apporter à la Loi sur les pêches élimineront les dispositions relatives à la protection de l'habitat pour la plupart des espèces de poissons d'eau douce au Canada, dont environ 80 p. 100 sont en péril; l'élimination des dispositions sur la protection de l'habitat des poissons — qui est censée n'avoir aucune incidence notable sur les pêches — entraînerait également la disparition de la protection de l'habitat dont bénéficient indirectement les autres organismes aquatiques qui partagent les eaux canadiennes avec les poissons, comme les amphibiens, les reptiles, les moules, de même que les nombreux insectes et nombreuses plantes aquatiques.
    La fermeture annoncée des installations de la Région des lacs expérimentaux (RLE), reconnues mondialement, est aussi un sujet qui me préoccupe parce que, depuis 1968, la recherche entreprise dans cette région, située au nord-ouest de l'Ontario, a alimenté une grande partie des politiques nationales et internationales traitant des facteurs qui touchent à la santé humaine et environnementale, comme les pluies acides, la pollution par le mercure, les substances chimiques perturbatrices du système endocrinien, ainsi que d'autres polluants et toxines aquatiques.
    La recherche scientifique menée dans la RLE a permis que les Canadiens aient accès à de l'eau saine, potable et propre et des poisons et d'autres organismes aquatiques sans danger pour la consommation humaine.
    La fermeture de la RLE privera le Canada d'un de ses plus précieux joyaux scientifiques. Cette fermeture compromettra la capacité de la science à contribuer à la santé et à la protection de l'eau douce et au bien-être des Canadiens. De plus, sa fermeture entravera les efforts visant à établir un PNC scientifiquement crédible, au lieu d'y contribuer.
    J'aimerais conclure mes observations en proposant les recommandations suivantes qu'il faudrait retenir en priorité dans la mise en œuvre d'un PNC:
    1) renforcer, plutôt qu'affaiblir, les lois nationales sur l'environnement, c'est-à-dire, la Loi sur les espèces en péril, la Loi sur les pêches et la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, faute de quoi la planification de la conservation sera compromise;
    2) renforcer, plutôt que réduire ou éliminer le rôle de la science qui constitue un fondement sur lequel s'appuie la capacité du Canada à fournir des avis scientifiques fiables, reconnus à l'échelle mondiale et examinés par les pairs, afin de soutenir la santé de l'environnement, la conservation de la biodiversité, de même que la surveillance à long terme de l'Arctique canadien et des écosystèmes terrestres et aquatiques ayant un climat tempéré;
    3) tenter de conclure une entente fédérale-provinciale-territoriale concernant le PNC, comparable à l'Accord national pour la protection des espèces en péril;
    4) refondre des lois pour respecter les engagements nationaux et internationaux à l'égard du maintien de la biodiversité terrestre et aquatique, et ainsi établir une base scientifique, transparente, responsable et efficace sur le plan législatif pour la mise en œuvre du plan de conservation national.
    Je remercie le comité de m'avoir permis de faire cette présentation.
    Merci, monsieur Hutchings.
    C'est maintenant à M. Willison, pour 10 minutes.
    Je remercie le comité de m'avoir invité.
    Je m'appelle Martin Willison. J'ai 68 ans, à la retraite, et j'ai été professeur de biologie et d'études environnementales à l'Université Dalhousie. Je suis actuellement professeur auxiliaire dans le programme d'affaires maritimes et d'études en ressources naturelles et en environnement de la même université.
    J'ai enseigné la conservation de la nature aux étudiants de premier cycle pendant environ 20 ans. Mes étudiants de deuxième et de troisième cycles ont mené des recherches sur les aspects pratiques de la conservation de la biodiversité marine et terrestre à l'aide de boîtes à outils en sciences naturelles et en sciences sociales. Dans ce contexte, j'ai formé de nombreux étudiants qui, plus tard, ont trouvé un emploi dans un organisme public. J'ai aussi contribué à bâtir le cadre du réseau d'organisations non gouvernementales de protection de l'environnement de la Nouvelle-Écosse.
    Dans le même ordre d'idées, je m'intéresse depuis cinq ans à une région de l'ouest de la Chine où je travaille comme éducateur et comme expert-conseil en biodiversité et reconstitution du milieu naturel, ce qui englobe la planification stratégique et opérationnelle. Je dois ajouter que j'ai collaboré à la rédaction d'une stratégie et d'un plan d'action en biodiversité pour une municipalité chinoise d'environ 30 millions d'habitants.
    La biodiversité est le fondement de la vie même et elle comporte trois niveaux principaux: la génétique, la taxonomique et l'écosystémique. L'activité humaine compromet l'intégrité de la biodiversité de multiples manières, et la menace prend maintenant une dimension mondiale. Nous tâchons d'y répondre à plusieurs niveaux et de diverses manières, notamment par la création de banques de gènes, par l'établissement de listes d'espèces en péril, par la délimitation de zones protégées et par la gestion des ressources.
    En dépit de nombreux efforts déployés au Canada pour protéger la biodiversité, celle-ci continue de diminuer. Cette diminution est un indicateur éloquent de l'absence de viabilité fondamentale de notre société, qui touche notamment notre économie, notre santé et notre culture. Si l'on veut que la vie humaine perdure, il va falloir ralentir et, un jour, stopper le déclin de la biodiversité.
    Pour atteindre cet objectif au Canada, nous avons besoin d'une chose qui nous manque actuellement: un plan global qui englobera la conservation de la biodiversité. Certes, de nombreux éléments d'un tel plan existent déjà, mais ils sont disparates; les liens entre les parties font défaut et, quand ils existent, c'est uniquement parce que des praticiens comme moi savent ce dont nous avons besoin.
    Les progrès sont souvent lents à cause, justement, de l'absence d'un cadre global. Certains praticiens de la conservation sont des professionnels, mais beaucoup sont des gens ordinaires, conscients des enjeux, mais qui ont du mal à obtenir des progrès réels dans le sens d'objectifs qui ne sont que trop évidents.
    Tout plan de conservation national devra avoir des fondements solides dans les sciences naturelles et les sciences sociales, notamment la biologie, la science de l'environnement, la sociologie, le droit et l'économie. Il devra intégrer les interventions des autorités fédérales, provinciales et territoriales des organisations non gouvernementales. Il faudra que ce plan puisse être activé par les organismes publics, les organisations non gouvernementales, l'entreprise et la population en général. Il devra être aussi souple que possible en ceci qu'il devra ouvrir la voie au progrès et permettre de faire de la conservation de la biodiversité une priorité nationale au lieu qu'elle demeure secondaire.
    La conception de plan devra faire intervenir toutes les parties qui souhaitent y participer, car par une inclusion, on garantit l'efficacité future des mesures de conservation du patrimoine. L'objectif ne sera pas facile à atteindre, mais si nous échouons, nous continuerons à perdre du terrain.
    Un plan de conservation national doit tenir compte de toutes les classes terrestres et aquatiques et pour cela reposer sur une démarche fondée sur les écosystèmes. Il devra appréhender toutes les méthodes de conservation possibles, y compris certaines qui n'ont pas encore été utilisées. Il devra donc devenir opérationnel avant même qu'il soit complet. Ainsi, certains de ses éléments devront être fonctionnels dès qu'on en appréhendera la place au sein de l'ensemble. Le plan devra fonctionner alors même qu'il continuera d'évoluer. Après tout, c'est comme cela que la nature fonctionne, et si nous nous donnons une démarche fondée sur les écosystèmes, nous devrions être attentifs aux sages enseignements de Dame nature. Les humains appartiennent à la nature et aux écosystèmes.
    Le défi consistera à s'acquitter de cette énorme entreprise en temps opportun. De toutes les contraintes, c'est le temps qui nous manque le plus. Après avoir longuement réfléchi, j'ai conclu que ce projet est réalisable et que deux éléments essentiels en permettront la concrétisation. Le premier est un processus inclusif indépendant du gouvernement, mais se déroulant avec sa participation. Le second est le recours aux technologies modernes qui permettra une planification efficiente. Je suis persuadé que l'on pourra établir un ensemble de plans évolutifs complets en trois ans qui coûteront moins de 500 000 $ au gouvernement.
(0910)
    La méthode serait la suivante.
    Tout plan repose sur l'intégration ordonnée des connaissances en vue de déterminer les actions à prendre pour atteindre des objectifs donnés. Or, le plus bel exemple d'intégration des connaissances est une compilation moderne appelée Wikipédia. Cette énorme encyclopédie multilingue est un document vivant créé par des millions d'auteurs dont la plupart collaborent gratuitement dans leurs temps libres. Elle est utilisée constamment comme document de référence par des centaines de millions de personnes. Le logiciel « Wiki » existe déjà et peut être adapté à la réalisation d'un plan.
    Internet est omniprésent au Canada et le Canada pourrait être à la pointe de la planification adaptative en adoptant une démarche de planification en ligne inclusive. Le gouvernement, l'entreprise et les groupes sans but lucratif possèdent tous la capacité de bâtir le cadre nécessaire. Il y a fort à parier qu'un consortium de groupes de conservation sans but lucratif prendrait rapidement l'initiative d'offrir ce service d'intérêt public.
    La stratégie pourrait comporter les 10 étapes suivantes:
    En mai, la stratégie est annoncée et comporte le concept « wiki », une démarche intégrée et un budget cible. En juin, le mois prochain, il y aurait un appel d'offres mettant l'accent sur l'efficience et le respect des délais. En septembre, on établirait la liste courte des propositions retenues. En octobre, participation du public au choix en ligne de la proposition gagnante. En janvier, annonce et financement initial de la proposition gagnante. En juin 2013, installation du logiciel et du matériel nécessaires à la plate-forme wiki, soit l'établissement de l'assise du système. En octobre, établissement du « squelette » d'un plan ou plus avec la participation de spécialistes. En décembre 2013, la plate-forme wiki est ouverte au public. En juin 2014, les premiers éléments utiles du plan sont appliqués. En juin 2015, mise en place du plan évolutif opérationnel.
    Il existe de nombreuses possibilités, mais le plan comporterait sans doute les éléments suivants. Il s'agit d'être créatif, et moi, je le suis.
    Parmi toutes les possibilités, il y en a plusieurs que nous devons inclure. Je ne crois pas avoir à relire la liste parce qu'elle ressemble beaucoup à celle que Jeff Hutchings a déjà présentée aux membres du comité. J'insiste sur le fait qu'il faut prendre en considération les écosystèmes terrestres et marins, les espèces en péril et les zones protégées, tout comme Jeff l'a mentionné. Il faut propager l'information au grand public en utilisant une approche pédagogique et nous devons surveiller la situation en plus de gagner l'intérêt de divers groupes tels les musées, les universités, les ministères gouvernementaux et la société civile.
    La société civile signifie, tout simplement, que chaque citoyen s'engage. Nous pouvons avoir un plan qui en comprendrait un autre pour chaque lac dans ce pays, parce que les municipalités environnantes pourraient dire: « Nous y mettons un petit effort par amour pour notre lac, notre rivière, nos collines, nos montagnes, pour tout. »
    Si la société participe, le plan réussira. La seule manière de le faire de façon économique, c'est en se servant de Wikipédia.
    Merci.
(0915)
    Merci, monsieur Willison. C'était très intéressant.
    Nous allons maintenant entendre un exposé de la Fédération du saumon atlantique. Vous avez 10 minutes.
    Merci. Je remercie le comité de m'avoir invité aujourd'hui.
    Je m'appelle Todd Dupuis. Je suis directeur exécutif des programmes régionaux au Canada pour la Fédération du saumon atlantique. Mon estimé collègue, ici présent, est Lewis Hinks; il est directeur des programmes de la Fédération du saumon atlantique pour la Nouvelle-Écosse.
    La Fédération du saumon atlantique est une organisation scientifique à but non lucratif œuvrant pour la préservation, la protection et la restauration du saumon sauvage de l'Atlantique et de ses écosystèmes. Les travaux de la FSA reposent sur des études scientifiques, ce qui permet à l'organisation grâce auxquelles elle peut jouer un rôle de premier plan dans la recherche de réponses aux mystères de la migration du saumon atlantique et de ses stocks dans les rivières et océans.
    Que ce soit en suivant les éperlans dans les cours d'eau, durant leur migration vers le Groenland, en surveillant les interactions entre le saumon sauvage de l'Atlantique et le saumon d'élevage ou en prodiguant des conseils experts sur toute question liée au saumon de l'Atlantique, la FSA porte un regard scientifique sur tous les aspects liés au saumon atlantique. La FSA dispose d'un réseau de sept conseils régionaux, un dans chacune des provinces atlantiques du Canada, un au Québec, un au Maine et un en Nouvelle-Angleterre, et elle est en outre affiliée à 140 organisations.
    Le soutien généreux de particuliers, d'entreprises et de fondations qui partagent les objectifs de la Fédération, nous permet actuellement d'employer 28 personnes à plein temps qui s'attachent à protéger le saumon des conséquences néfastes de la surpêche, de la pollution et de la destruction de son habitat. La FSA fait ce travail depuis 1948. Nous ne sommes pas financés par le gouvernement.
    On nous a posé cinq ou six questions, mais comme nous sommes limités par le temps, nous allons nous restreindre à trois questions, la première étant de savoir quels principes directeurs devraient guider un plan national de préservation de l'environnement.
    La FSA recommande l'application de trois principes directeurs. Tout d'abord, le Plan national de conservation doit être bâti autour des bassins versants. Les limites territoriales pour l'aménagement et la gestion du territoire doivent être établies en fonction de repères biophysiques, et ce, de façon écologique. Toute démarche écosystémique en matière d'aménagement et de gestion du territoire doit partir du bassin hydrologique. Une telle démarche appliquée à l'aménagement du territoire et à la gestion de l'eau permet de comprendre en quoi l'aménagement peut influer sur la quantité d'eau et sur sa qualité. Elle fait également ressortir le rapport très clair que nous avons avec les terres où nous vivons et permet de s'assurer que les activités pratiquées en amont respectent les habitants en aval.
    Nous recommandons ensuite que le plan national de conservation soit basé sur des données scientifiques solides. La préservation et la remise en état des bassins hydrologiques exigent une compréhension des processus et des conditions biophysiques qui sont favorables à la création d'un habitat faunique. Un plan national de conservation doit s'appuyer sur les meilleures données scientifiques disponibles pour assurer que ces fonctions biophysiques sont préservées et restaurées.
    Enfin, le plan national de conservation devrait inclure un programme de sensibilisation des Canadiens au milieu naturel. À cause de l'urbanisation récente de nos populations, nous avons affaire à la première génération de Canadiens qui a perdu contact avec la nature. Un programme de sensibilisation à l'écologie devrait permettre une plus grande participation aux questions de préservation de l'environnement.
    La seconde question est de savoir quelles devraient être les priorités d'un plan national de conservation. Elles sont au nombre de cinq. Bien sûr, nous nous intéressons plutôt aux poissons, c'est notre domaine.
    Notre première priorité est de veiller à ce que nous puissions disposer d'une eau de qualité et en quantité suffisante. Dans certaines régions de l'est du Canada, l'utilisation de l'eau dans les centres urbains ou en agriculture a une incidence sur le niveau des rivières. L'envasement et les produits chimiques, tels les engrais et les pesticides, affectent la qualité de l'eau au détriment non seulement des poissons, mais aussi des humains.
    Nous devons restaurer les habitats et nous assurer qu'ils sont reliés les uns aux autres. Il faut restaurer et protéger les cours d'eau dégradés. Toutes les espèces de poisson autochtone doivent pouvoir accéder à toutes les aires naturelles. Les ponceaux et les barrages réduisent les interactions possibles pour les poissons. D'après une récente étude du ministère des Pêches et Océans, effectuée dans la partie intérieure de la baie de Fundy et portant sur 33 cours d'eau, on a découvert que plus de la moitié des ponceaux du réseau routier ne permettent pas le passage des poissons. Autrement dit, si l'on voulait remplacer tous ces ponceaux rien qu'en Nouvelle-Écosse, il en coûterait environ un milliard de dollars.
    Favorisons les espèces indigènes par rapport aux autres espèces. Les espèces indigènes devraient toujours avoir la priorité. Il faut enrayer la pénétration d'espèces non-indigènes dans le milieu aquatique. Malgré de récentes études de l'Université Laval et de l'Université de l'Île-du-Prince-Édouard, certains gouvernements de l'est du Canada autorisent toujours l'empoissonnement à la truite arc-en-ciel qui n'est pas un poisson autochtone. À la suite de ces recherches, nous savons que de telles espèces affectent nos espèces indigènes, tout particulièrement le saumon atlantique. Malgré cela, certains gouvernements, y compris le gouvernement de la Nouvelle-Écosse, autorisent toujours l'empoissonnement à la truite arc-en-ciel, poisson qui n'est pas d'ici.
    Il faut fixer les priorités à l'échelon régional afin de bien traduire les différences nationales. Nous ne pouvons pas appliquer de solution universelle, étant donné les différences de paysages et de problématiques au Canada.
(0920)
    Les parcs fédéraux jouent un rôle important dans la protection des écosystèmes et des habitats fondamentaux. Mais il est aussi important de délimiter, de cartographier et de protéger les habitats essentiels situés dans les bassins hydrologiques. Il n'est peut-être pas réaliste de protéger les bassins dans leur intégralité, mais on se doit de protéger du mieux possible les habitats les plus importants dans les bassins versants.
    Les groupes communautaires de bassins versants et les ONG connaissent assez bien les bassins pour être en mesure de recenser les habitats les plus importants. Par exemple, je vis dans un petit bassin hydrologique de la West River, sur l'Île-du-Prince-Édouard, où l'on a recensé environ 200 saumons atlantiques. Si l'on met bout à bout tous les cours d'eau de ce petit bassin, on obtient près de 200 km de cours d'eau. Cependant, ces 200 saumons sont concentrés sur une superficie de trois kilomètres seulement.
    Selon moi, c'est un habitat vraiment important, mais personne ne s'en rend compte. Pêches et Océans Canada l'ignore tout comme le gouvernement provincial, mais les groupes communautaires, eux, le savent. Malgré cela, on effectue des coupes claires dans les forêts le long de ces trois kilomètres où vivent ces saumons atlantiques.
    Il nous faut regrouper toutes les données sur les habitats importants des bassins versants. Des groupes communautaires disparaissent tandis que d'autres voient le jour, et il ne faudrait pas que leur savoir collectif soit perdu par manque de coordination. Les informations concernant les habitats essentiels doivent être centralisées pour que les générations à venir puissent les consulter et continuer à assurer la protection.
    De plus, nous nous devons d'avoir un mécanisme ou un système permettant de protéger les habitats importants de ces bassins versants qui auront été recensés.
    Quelles devraient être les priorités à appliquer pour la mise en place d'un plan national de conservation? Nous pouvons vous faire quelques suggestions. Tout d'abord, il faut soutenir les groupes communautaires dans leurs efforts de conservation, inciter davantage les collectivités à agir en faveur de la conservation et aider les uns et les autres à trouver des solutions et faire une planification fondée sur des données scientifiques.
    Les gouvernements disposant de moins de ressources, ils se sont déchargés d'une grande partie du travail à faire et de leurs responsabilités sur les organisations communautaires des bassins versants et les ONG locales. Ce sont maintenant ces organismes non gouvernementaux qui sont chargés de la préservation et restauration de l'environnement au fur et à mesure des compressions gouvernementales.
    Ainsi, pour vous donner quelques chiffres, Pêches et Océans Canada dépense environ 12 millions de dollars par an pour le saumon atlantique sauvage, contre 15 millions par les ONG de la côte Est qui investissent en plus 10 millions de dollars sous la forme de services consentis en nature. Les ONG dépensent donc quasiment deux fois plus que le gouvernement fédéral au titre de la restauration et la protection du saumon atlantique sauvage.
    Parmi les priorités auxquelles nous pourrions penser pour soutenir les groupes communautaires, nous pourrions faire bénéficier les organisations œuvrant dans la collectivité d'une expertise technique. Les gouvernements ont de moins en moins de spécialistes, parce que ce sont les premiers dont ils se séparent quand vient le temps de réduire les budgets; ils se départissent de leur capacité d'assistance technique. Les ONG comme Trout Unlimited Canada et la Fédération du saumon atlantique sont devenus les mécanismes d'assistance technique à l'occasion du retrait des gouvernements, mais la demande est bien supérieure à notre capacité et nous n'arrivons pas à suivre.
    Les groupes communautaires veulent agir en fonction de leurs ressources limitées, mais ils ont besoin de formation et de conseil. Les gouvernements doivent…
    [Note de la rédaction: difficultés techniques]
    Voilà, j'ai presque terminé.
    Les organisations communautaires s'avèrent être un bon mécanisme, efficace en termes de coûts, pour mettre en place les programmes de conservation étant donné que celles-ci savent faire le meilleur usage de chaque dollar. Ces organisations vivent dans le court terme avec des financements incertains; cela ne permet pas de faire une planification à long terme et interdit donc tout véritable progrès. Ce sont les groupes communautaires qui supportent les conséquences lorsque les programmes gouvernementaux ou l'assistance technique gouvernementale disparaissent. Nous devons soutenir ces groupes et ne pas les vouer à une disparition certaine faute de ressources.
    Le gouvernement fédéral fournit, par exemple, des fonds annuels par le truchement de différents programmes, mais, apparemment, les programmes fédéraux ne seront pas annoncés avant le 15 juillet de cette année. Il est impossible de planifier ou d'entreprendre quoi que ce soit une fois que la saison est entamée et qu'on ne prend connaissance qu'au milieu de l'été les ressources sur lesquelles on pourra compter.
    Enfin, il y a la question des biens et des services écologiques. Les régions rurales du Canada doivent toujours être un maillon important de l'économie, tout en œuvrant pour l'environnement. Un programme de biens et services écologiques encouragerait les propriétaires terriens à apporter des services écologiques qui contribueraient à l'épuration de l'air et de l'eau et qui favoriseraient la création d'un habitat faunique.
    Pour vous donner un exemple, l'Île-du-Prince-Édouard a intégré dans une de ses politiques un programme de biens et services écologiques, l'ALUS ou Alternative Land Use Service. C'est un programme où la participation est volontaire. Le but est de réduire l'érosion des sols ainsi que de favoriser la filtration des cours d'eau afin d'améliorer la qualité de l'eau et des habitats fauniques, en vue d'atténuer les effets du changement climatique. On offre des incitations fiscales ou monétaires aux propriétaires particuliers pour qu'ils fassent le bon choix.
(0925)
    En conclusion, nous souhaitons remercier le comité permanent de nous avoir donné la possibilité d'exposer nos idées. Nous pensons qu'un plan national de conservation pour le Canada est une bonne initiative, nous vous souhaitons donc bonne chance dans votre tâche.
    Merci, monsieur Dupuis.
    Nous allons maintenant écouter l'exposé du Centre de sciences océaniques Huntsman, par M. Whoriskey.
    L'un des dangers auquel on fait face quand on vient en dernier après un panel d'éminents spécialistes, c'est qu'on risque fortement de répéter ce qui a déjà été dit. Je ferai donc de mon mieux.
    Je m'appelle Fred Whoriskey. Je suis scientifique et chercheur de formation et j'occupe actuellement le poste de directeur exécutif du Ocean Tracking Network à l'Université Dalhousie. Nous dirigeons un projet visant à connecter les océans du monde entier grâce à une technologie canadienne de pointe. Cela nous permet de connaître les déplacements des animaux marins, non seulement les directions qu'ils prennent, mais également quels habitats ils utilisent, tout en faisant le lien avec les conditions environnementales. C'est cette perspective que je peux vous apporter.
    Je suis ici pour représenter le Centre de sciences océaniques Huntsman. Le conseil m'a demandé de faire un exposé concernant le plan national de conservation et aussi de préciser de quelle manière le centre Huntsman pouvait contribuer à son développement.
    J'ai personnellement passé ma vie dans des collectivités situées en bordure de l'océan, et je sais à quel point les vies et le tissu social de ces collectivités dépendent de l'eau. Les gens se tournent naturellement vers la mer pour subsister. Ils développent des compétences qui leurs permettent de travailler en mer et sont très fiers de tout ce qu'ils y font.
    Traditionnellement, les moyens de subsistance ne sont pas légion. On pouvait s'orienter vers le transport, pour emmener des biens d'un endroit à un autre. Ce domaine est incroyablement florissant, même aujourd'hui. Il a ses propres problèmes liés à sa taille, mais on transporte toujours des volumes de marchandises qu'on n'aurait jamais imaginés dans le passé.
    Par contraste, l'autre pilier économique des océans, la pêche, fait face à un déclin rapide. C'est en grande partie dû à notre technologie et aux capacités de plus en plus sophistiquées permettant de surexploiter quasiment tous les coins des océans où nous trouvons actuellement des stocks de poissons. La pérennité n'existe plus dans le secteur des pêches. Non seulement au Canada, mais à l'échelle mondiale.
    À ce problème nous avons appliqué nos solutions traditionnelles, à savoir arrêter la pêche et laisser les poissons revenir, mais ils ne sont pas revenus. Ceci démontre que nous avons mal appréhendé le problème. Nous ne comprenons pas comment fonctionnent ces populations. C'est une question de connaissances: nous n'appliquons pas les bons principes, car nous ne comprenons pas les mécanismes. C'est une incompréhension totale.
    Après avoir vu ces perspectives disparaître, les gens des Maritimes, par ailleurs ingénieux, se sont aussi tournés vers l'océan pour trouver d'autres solutions de développement économique. Les innovations technologiques ont ouvert la voie. Pour ne prendre que quelques exemples de ce qui se fait aujourd'hui là-bas, nous pourrions mentionner les pharmaceutiques marins, le tourisme en mer, l'énergie marémotrice et l'aquaculture, tout particulièrement avec les élevages de saumons atlantiques. L'exploitation minière en haute mer commence à se développer et l'extraction de pétrole et de gaz représente un secteur important sur la côte Est. Le Conseil national de recherches n'est pas le seul à faire des recherches sur les algues en vue de créer un biocarburant. Nous disposons d'ingénierie marine et d'un secteur de technologie de pointe permettant toutes ces innovations.
    Toutes ces nouvelles activités sont synonymes de création d'emplois, de richesses et elles apportent d'autres avantages aux nations côtières, mais elles exercent aussi une pression accrue sur les océans. Il y a aussi le risque d'une course effrénée à l'accès à l'océan. C'est la raison pour laquelle il nous faut un plan de conservation.
    Nous avons besoin de nouveaux modèles de gestion qui élimineront ou du moins atténueront les conflits et les conséquences néfastes pouvant découler d'activités non durables. Une prise de décisions éclairée à l'avenir dépendra de recherches de pointe qui seront respectées. Nous acquerrons ainsi les nouvelles connaissances indispensables pour ensuite les transmettre à tous les niveaux de la société pour que l'on comprenne nos activités ainsi que les décisions que nous prenons. Cela exige un cadre durable d'acquisition et de transmission du savoir.
    Le Centre de sciences océaniques Huntsman travaille tout à fait dans ce domaine-là. Cela fait 40 ans que nous sommes un fer de lance de la recherche océanique fondamentale et appliquée. C'est ainsi que nous pouvons contribuer à un plan national de conservation. Nos chercheurs, en collaboration avec les scientifiques d'organisations universitaires membres, du secteur privé, et des institutions gouvernementales, ont obtenu dans leurs recherches des résultats de première qualité, indépendants et respectés. Ce type de connaissances entre dans le processus de prise de décisions.
    Ces recherches nous ont permis de mieux appréhender l'environnement marin, sa réaction aux facteurs de stress actuels et elles nous ont aidés à résoudre les problèmes qui se sont présentés à nous en cours de route, et ce, dans des domaines aussi variés que l'énergie marémotrice ou l'aquaculture de notre région.
    Nous disposons en outre d'un important programme éducatif qui touche des milliers d'étudiants. Chaque année nous construisons un nouvel aquarium à St. Andrews, sur la baie de Fundy. C'est un moyen de faire participer les gens.
(0930)
    Nous formons des futurs spécialistes de la science océanique et transmettons des connaissances aux citoyens canadiens par leur intermédiaire. À l'avenir, ces experts de l'océan et les citoyens seront suffisamment informés et pourront prendre part au débat en ayant pleinement conscience de la valeur du milieu naturel tel que nous le connaissons.
    Nous voudrions que vous reteniez ceci: notre contribution à un plan de conservation, c'est la connaissance. On part des données et on produit un savoir.
    Huntsman nous aide en cela. C'est un organisme indépendant qui agit toujours librement, et les gens peuvent lui faire confiance. Huntsman n'est pas seul, il y a, au Canada, beaucoup d’organismes sur lesquels on peut s'appuyer. Cela constitue une ressource précieuse pour notre pays.
    Par conséquent nous vous sommes très reconnaissants pour cette occasion de nous exprimer devant ce comité. Je vous remercie beaucoup. J'ai essayé de ne pas répéter les mêmes conclusions que les autres intervenants.
    Merci.
    Merci, monsieur Whoriskey.
    Je voudrais présenter le groupe d'experts. M. Woodworth et M. Lunney, du gouvernement, je m'appelle Mark Warawa; sont également présents M. Choquette et Mme Liu de l'opposition officielle, du NPD; et M. Eyking, du Parti libéral.
    Nous allons commencer la première série de questions. Certaines questions seront en français. Nous avons des interprètes.
    Dans vos questions et dans vos réponses, je vous invite à ne pas perdre de vue la portée de notre étude. Elle se résume à six questions: quelle doit être la raison d'être d'un plan national de conservation; quels doivent en être les objectifs; quels principes doivent guider le plan; quelles priorités de conservation doivent être incluses dans le plan; quelles doivent être les priorités de mise en oeuvre; quel processus de consultation le ministre devrait-il utiliser? Merci de garder ce cadre à l'esprit.
    Nous allons commencer les questions avec M. Lunney. Vous avez sept minutes.
(0935)
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je m'adresse à tous les témoins, merci pour... J'ai constaté que deux d'entre vous ont estimé qu'ils disaient la même chose, mais il y a beaucoup de recoupements entre les deux sujets auxquels nous nous intéressons, quant à l’importance qu’ils revêtent. Merci pour vos contributions sur ces questions fondamentales.
    Je voudrais commencer par M. Whoriskey. Vous avez dit que certaines espèces ont décliné et que, malgré un arrêt de la pêche après une période de surpêche, elles ne se sont pas rétablies. Vous avez ensuite dit que nous ne comprenions pas bien le fonctionnement des écosystèmes, car les poissons ne sont tout simplement pas revenus.
    L'une de vos remarques concernait l'approche du Centre de sciences océaniques Huntsman qui englobe la collaboration de scientifiques provenant de différents horizons de la communauté universitaire. Dans mon coin de pays, sur l'île de Vancouver, le Bamfield Marine Sciences Centre est le résultat de la collaboration de cinq institutions et son travail est tout à fait remarquable.
    Nous avons déjà beaucoup appris au sujet des problèmes auxquels font face les écosystèmes océaniques, mais nous ne savons pas grand-chose de ce qui arrive aux espèces. Je suis sûr que d'autres voudront commenter ce propos.
    Comment pouvons-nous améliorer notre compréhension? Une grande partie de notre milieu naturel est aquatique, et surtout océanique. De nombreux aspects de nos écosystèmes terrestres échappent à notre connaissance. Comme l'a dit M. Dupuis, dans le cas des bassins versants nous avons adopté un mode de gestion approprié, mais nous ignorons tant de choses sur les océans.
    Que pouvons-nous faire? Quelles sont les collaborations nécessaires pour mieux comprendre ce qui arrive aux océans?
    C'est un vaste sujet. Je voudrais commencer par l'harmonisation et l'optimisation des efforts existants. En Australie par exemple, il existe un système d'observation du milieu océanique et des animaux marins qui permet de regrouper dans une seule et même banque toutes les données recueillies, données auxquelles tout le monde a accès.
    Nous sommes loin d'une telle intégration au Canada, toutes nos données sont dispersées à droite et à gauche, ce qui signifie que nous n’avons pas à disposition la somme de notre savoir. Nous pourrions donc commencer à réfléchir aux secteurs qui devront être l'objet de nos activités ciblées.
    Partant de là, le Canada est un chef de file dans beaucoup de ces technologies: systèmes d'observation océanique, technologies marines utilisées pour le suivi acoustique des animaux. Nous pouvons nous appuyer dessus même si cela exige que notre pays investisse constamment. Mon distingué confrère M. Hutchings aura beaucoup à dire sur ce sujet.
    Avant de poursuivre, je voudrais dire que, sur la côte Ouest, il y a le projet Neptune, qui est un programme d'innovation de l'Université de Victoria comportant plus de 200 km de câble, des noeuds d'observation, etc., installé sur le fond océanique. Vous connaissez sans doute ce programme, et d'autres programmes de marquage qui nous aident à surveiller les déplacements des poissons.
     Il me semble que cela existe sur les deux côtes, si je ne m'abuse, on suit à la fois les saumons du Pacifique et ceux de l'Atlantique.
    C'est exact.
    Nous espérons que ces données seront utiles pour comprendre les migrations des mammifères, les séismes, etc.
    Je vous remercie.
    Quelqu'un souhaite-t-il intervenir sur ce sujet?
    Je dirais simplement que votre question fait ressortir l'importance de la surveillance. En l'absence de programmes de surveillance, nous n'avons pas de données sur lesquelles nous appuyer pour évaluer l'efficacité ou l'utilité d'un plan national de conservation, que cela soit en milieu terrestre ou aquatique.
    Toutes sortes d'indices permettent de mesurer la qualité de vie économique dans ce pays — le PIB, les taux d’intérêt établis par la Banque du Canada, le taux de chômage, les données de création d’emploi, et tous les mois, ou tous les trimestres, nous regardons ces chiffres pour savoir où nous en sommes. Nous n’avons pas de tels indicateurs pour la biodiversité terrestre et aquatique. Nous ne savons pas vraiment où nous en sommes par rapport au passé, ni où nous voudrions en être — en d’autres mots, quels buts, quels indicateurs et quels objectifs opérationnels devrions-nous avoir?
    Je souhaite que le plan national de conservation permette de dégager les objectifs nationaux de conservation et les indicateurs de biodiversité afin que nous puissions faire leur suivi grâce à des programmes de surveillance appropriés.
    Je ne saurais insister suffisamment sur l’importance que peut avoir un élément de surveillance aussi élémentaire pour la réussite de cette entreprise.
(0940)
    Bien, merci.
    Monsieur Willison, j’apprécie vos remarques. Vous avez parlé d’une approche fondée sur l’écosystème: la nature dans sa sagesse a beaucoup à nous enseigner; les humains font partie de la nature, les écosystèmes incluent les gens. Ce sentiment existe clairement sur la côte Ouest. L’une de nos Premières nations a un proverbe: hishuk-ish ts'awalk dans sa langue, ce qui se traduit littéralement par: « tout ne fait qu’un », c’est-à-dire que nous faisons partie de la nature et que la nature fait partie de nous. C’est un concept simple et difficilement réfutable.
    Nous n’avons pas suffisamment de temps pour explorer davantage cet aspect. J’apprécie votre approche wiki. Je sais que WikiLeaks, je veux dire Wikipédia, est controversée. Il y a tant de wikis, vikis et maintenant vatis. Wikipédia est évidemment un produit en évolution constante auquel on apporte en permanence des connaissances et parfois des erreurs. En tant que professeur, auriez-vous accepté que Wikipédia soit une source pour vos étudiants?
    Absolument. J’accepterais que cela soit une source. Est-ce que j’accepterais que ça soit la seule source? Certainement pas.
    L’un des avantages de ce type d’approche est de permettre l’utilisation de liens vers les sources d’origine. Par conséquent, on peut vérifier si une information est valable ou pas. C’est aux fruits que l’on juge l’arbre. Le fait est que les pages de premier ordre de Wikipédia, qui font l’objet d’un suivi de qualité et qui sont bien gérées, sont extrêmement précises. Elles sont plus précises que l’Encyclopaedia Britannica. Par contre des pages secondaires peuvent être truffées d’erreurs et de contre-vérités. Cela ne fait pas de doute.
    C’est comme ça dans la vie vous savez, et c’est le cas aussi en sciences. Je suis un scientifique expérimenté et je sais que près de la moitié des articles de la littérature scientifique contient des erreurs — des erreurs fondamentales. Ce n’est pas différent. L’avantage d’un wiki, c’est que tout le monde y a accès. De plus, les informations de première importance peuvent faire l’objet d’un suivi et d’une gestion de qualité. Il faut juger sur pièces à mon sens, et il se trouve que dans les faits, cela fonctionne.
    C’est un concept intéressant.
    M. Martin Willison: Merci.
    Votre temps de parole est écoulé, monsieur Lunney.
    Madame Liu, vous avez sept minutes.
    Merci à tous les témoins d’être parmi nous aujourd’hui.
    Encore une fois, nous avons entendu parler de façon répétée des priorités concernant les espèces menacées, alors n’ayez pas peur de la redondance, c’est utile en fait.
    Je vais commencer par interroger M. Hutchings.
    L’importance de la science a été un thème récurrent. Vous avez évoqué des exemples comme la Région des lacs expérimentaux, qui seraient utiles pour les initiatives de conservation et les programmes de suivi que nous devons mettre en place. Quels sont les autres outils scientifiques et technologiques dont nous avons besoin pour mettre en place une stratégie nationale de conservation?
    En matière d’outils, d’un point de vue scientifique, je vais répéter la réponse que j’ai donnée à la question de M. Lunney. Autrement dit qu’il y aurait lieu d’assujettir tout plan national de conservation à un ensemble d’objectifs opérationnels dont la réalisation ferait l’objet d’un suivi grâce à des moyens appropriés.
    À cette fin, je pense qu’à terme — et nous le faisons déjà dans une certaine mesure — nous utiliserons des technologies de télédétection, par exemple. Nous utilisons régulièrement la surveillance par satellite pour toutes sortes de choses, y compris pour surveiller les animaux et parfois au quotidien, en passant par les activités liées à la météorologie. Je pense que la télédétection occupera une part croissante dans tout cela. L’établissement de cartes de l’habitat océanique est une chose très difficile à faire et nous n’en sommes qu’aux débuts. Nous ne disposons, en réalité, que de très peu de cartes de l’habitat océanique valables. Nous avons le plus long littoral du monde, mais une très faible capacité à contrôler ce qui s’y passe.
    Il me semble que nous pouvons au minimum répéter l’importance des programmes de suivi, seul le gouvernement peut les mettre en oeuvre — les universités n’ont pas la capacité financière, ni les infrastructures nécessaires ni les données à long terme — je crois que cela peut néanmoins être fait de manière efficace, concrète et sans attendre. Sans ces données, nous aurons du mal à savoir si nous atteignons ou non les objectifs du plan.
(0945)
    Quand vous parlez de surveillance par satellite, faites-vous référence à quelque chose qui ressemblerait à Radarsat ou pensez-vous à quelque chose qui serait hors du programme satellite Radarsat?
    Il ne s’agit pas de se concentrer sur quelque chose de précis, mais de penser aux différentes formes de technologies de télédétection dont nous disposons — par exemple, des stations en Arctique qui surveillent les évolutions de concentration de l’ozone et les évolutions des glaces marines, pour lesquelles nous utilisons bien sûr les satellites.
    La surveillance des éléments de base de l’environnement dans les milieux terrestre et aquatique est de plus en plus, voire exclusivement effectuée par télédétection. Une fois que ces systèmes sont en place, cela ne coûte pas extrêmement cher de les faire fonctionner, mais il faut des investissements au départ.
    Bien entendu ce type de surveillance de l’environnement ne servirait pas uniquement dans le cadre d’un plan national de conservation mais serait utile à bien d’autres secteurs de la société.
    Bien. Votre première recommandation était de renforcer les lois environnementales nationales. Pourriez-vous développer votre pensée?
    Je pense que le renforcement des lois environnementales nationales existantes revêt une importance fondamentale dans la réussite de tout plan national de conservation, plan qui est évidemment souhaitable. On doit également réfléchir à la nécessité d’adopter de nouvelles lois. En 1999, l’Australie a mis en place le Environment Protection and Biodiversity Conservation Act. C’est une loi extrêmement sophistiquée qui recense des objectifs à atteindre. Elle est assortie d’un programme qui pourrait servir de référence pour l’établissement d’un plan national de conservation. En 2009, la Norvège a adopté une loi sur la diversité de la nature qui encadre la gestion de la diversité biologique, géologique et paysagère. Je crois que la Canada est prêt pour une loi nationale qui exprimerait la vision des Canadiens par la mise en place de quelque chose s’apparentant à un plan national de conservation.
    Monsieur Dupuis, vous avez dit qu’il vaudrait mieux s’intéresser aux espèces indigènes, plutôt qu’aux espèces non indigènes ou aux espèces invasives. Hier, pendant notre visite, nous avons fait la connaissance de Peter Darnell, un mytiliculteur des fermes marines d’Indian Point. Il nous a expliqué de quelle façon la propagation d’espèces invasives avait été favorisée par le changement climatique et le réchauffement.
    Pensez-vous qu’une stratégie nationale de conservation doive prendre en compte les stratégies d’atténuation et d’adaptation au changement climatique?
    Oui. D’après ce que je sais, il y a eu des déplacements d’espèces sur la planète à cause des changements climatiques. Je crois qu’un plan national de conservation devrait viser à réduire ou à ralentir le changement climatique actuel. Je sais aussi que beaucoup d’espèces sont déplacées involontairement. Mais nous déplaçons néanmoins des espèces non indigènes exprès, au détriment de certaines espèces autochtones en danger, y compris le saumon Atlantique, par exemple, qui est répertorié comme espèce en voie de disparition dans certaines régions du Canada et comme espèce menacée dans d’autres. Néanmoins nous continuons d’introduire en toute connaissance de cause des espèces qui ont un impact sur ces espèces indigènes.
    Quelles sont les principales menaces qui pèsent sur les écosystèmes des saumons sauvages?
    Le saumon sauvage de l’Atlantique passe une partie de sa vie en eau salée et c’est un vrai poisson migrateur. Il passe le début de sa vie dans l’eau douce. Tout ce qui a un impact sur les bassins hydrologiques, la partie eau douce de sa vie, ou sur les océans, a un impact sur le saumon atlantique. La liste est longue. En ce qui concerne l’eau douce, les enjeux résident principalement dans l’utilisation du sol, les intrants sédimentaires et chimiques provenant de l’agriculture et les problèmes de franchissement par les poissons d’ouvrages hydroélectriques. Pour ce qui est de l’océan, nous ne savons pas vraiment ce qui se passe. Nous savons que le taux de survie du saumon atlantique durant la phase océanique de son cycle de vie a diminué au cours des deux dernières décennies.
(0950)
    Je vous interromps, car nous n’avons plus beaucoup de temps et je voudrais poser une dernière question à M. Hutchings.
    Pensez-vous qu’une stratégie nationale de conservation devrait mettre l’accent sur la conservation de l’habitat ou sur certaines espèces de poissons en particulier?
    Vous avez très peu de temps. J’apprécierais une réponse courte s’il vous plaît.
    Merci monsieur le président.
    Je dirais que la priorité devrait être l’habitat. Les espèces sont secondaires. Si l’on protège l’habitat d’une espèce, on va très certainement protéger l’habitat de multiples espèces.
    Merci.
    Nous allons maintenant écouter M. Woodworth. Vous avez sept minutes.
    Merci beaucoup monsieur le président.
    Je remercie les témoins. Il est vraiment regrettable que nous ayons si peu de temps pour ces débats, mais je vais prendre une partie de mon temps de parole pour faire quelque chose d’un peu dangereux, car je suis très impressionné.
    Monsieur Willison, je vais commencer par vous faire des éloges. C’est dangereux pour vous et pour moi. Pour moi, parce que je ne vous connais pas assez pour savoir si je comprends réellement ce que vous dites. Si je me trompe, j’aurai l’air ridicule. C’est dangereux pour vous, car je ne suis absolument pas expert, donc tous les éloges que je pourrais vous faire ne valent pas grand-chose.
    Je voulais dire à quel point votre exposé m’a impressionné, pas seulement sur la forme, mais sur le fond. Vous pourriez peut-être avoir des raisons d’adopter une approche partisane, mais je n’y ai rien vu de partisan. Je n’y ai pas décelé d’attaque passivement agressive en règle contre le gouvernement, comme nous en voyons souvent. J’y ai plutôt vu une analyse de qualité et une solution concrète. C’est de cela que je veux parler, car j’adhère à presque tout ce que vous avez dit, à une ou deux petites exceptions près. Si je le pouvais, voilà le genre de recommandation que je ferais auprès du ministre.
    Avant de poursuivre, je voudrais dire à tout le monde, ici présent, que nous voulons nous assurer que vous comprenez bien la portée de notre mission d’aujourd’hui. Il ne s’agit en fait, au bout du compte, que de faire des recommandations au ministre sur la manière dont on pourrait procéder pour développer un plan national de conservation. Nous ne sommes pas ici pour élaborer nous-mêmes un plan national de conservation, mais nous voulons, pour ainsi dire, apporter de l’eau au moulin du ministre et lui donner des grandes lignes.
    J’ai deux questions à vous poser, monsieur Willison. La première concerne le wiki. J’ai tout de suite su que vous étiez un homme selon mon cœur quand vous avez souligné que même la science ordinaire est sujette à l’erreur. Je suis d’accord à 100 p. 100. Je crois que l’idée du wiki pourrait être très utile, mais quel système de secrétariat ou d’encadrement pourrions-nous avoir, pour nous assurer que les contributions sont aussi précises que possible?
    Oui, il faudrait certainement, comme vous l’avez dit, un secrétariat. Pas forcément un gros, il nous faudrait des experts techniques pour en gérer la composante logicielle. Il nous faudrait aussi ce que j’appellerais un gendarme qui aurait le pouvoir d’exclure les fauteurs de troubles, et c’est tout à fait faisable.
    Wikipédia a des comités de correcteurs qui travaillent ensemble pour faire le ménage. Il y a aussi un système d’alertes qui apparaissent sur les pages clairement trompeuses.
    Vous avez en effet raison et c’est pourquoi je l’ai déjà estimé dans le budget à 500 000 $. C’est surtout pour les gens qui surveillent ce qui se passe et s’assurent que les contributions proviennent des bonnes personnes et que les contributions fautives sont supprimées.
    À vrai dire, si je puis me permettre de vous interrompre, c’est l’un des légers désaccords que j’ai avec vous. Je crois que vous êtes optimiste en ce qui concerne le coût. Mais même si cela coûtait deux ou trois fois plus cher, ça ne m’empêcherait pas de dormir.
    Ma femme me dit toujours que je dois tout multiplier par deux lorsque je fais des estimations de coût.
    J’ai apporté ces livres dans un but précis. J’en ai trois exemplaires, malheureusement je n’en ai pas assez pour tout le monde.
    La production de ces deux livres n’a rien coûté. Nous avons organisé une conférence, nous avons invité des gens, ils ont payé une inscription qui a en partie servi à financer un livre contenant les actes de la conférence et qui leur a été remis à la fin. Nous avons donc deux conférences, deux livres, pour un coût nul.
    Lorsque les gens se sentent concernés, on peut faire des choses à très faible coût.
(0955)
    Je suis d’accord.
    La conservation est une chose pour laquelle les gens se sentent concernés, c’est pourquoi ils feront l’effort.
    C’est parfaitement vrai.
    Ce qui me frappe dans le concept que vous proposez — d’autres témoins l’ont dit également, notamment M. Hutchings — c’est qu’il nous manque une banque de connaissances. En effet, il me semble que nous avons déjà un plan national de conservation. Vous y avez en quelque sorte fait allusion, monsieur Willison. Mais il est fragmenté et dispersé dans tout le pays; un emplacement centralisé nous serait très utile.
    Je voulais vous demander votre avis, monsieur Hutchings, sur le projet d’utilisation de la technologie moderne pour tenter d’intégrer ce qui se passe dans tout le pays, comme l’a proposé M. Willison.
    Cela me semble très prometteur. La clé d’un tel effort réside dans la structure formative. Quels sont les objectifs centraux? Comment, précisément, seraient utilisées les contributions des gens?
    [Note de la rédaction: difficultés techniques]
    Ce serait une très bonne façon de mobiliser le citoyen moyen, celui qui souhaite apporter sa contribution. Cela permettrait également de faire participer le monde de l’industrie et des affaires.
    Monsieur Hutchings, nous sommes face à un déficit de connaissances, je crois que tout le monde l’a compris. Si nous ne comblons pas ce déficit de connaissances, je ne vois pas comment nous pourrions sérieusement fixer autre chose que des objectifs à très court terme. J’ai, par exemple, entendu des gens dire que nous devrions protéger 50 p. 100 de la masse terrestre du Canada. Toutefois, il n’existe apparemment aucun socle de connaissances qui nous permettrait de déterminer ce qu’il faut protéger.
    Approuvez-vous l’idée qu’il nous faut les connaissances avant de pouvoir correctement fixer des objectifs intelligents, des priorités?
    Je suis tout à fait d’accord. Je pense que des objectifs de ce genre sont importants parce qu’ils portent une ambition. Cela donne un but à atteindre. Mais dans la même logique, ces objectifs doivent également être empiriques. Il faut un solide socle de connaissances pour cerner des objectifs précis. S’ils sont considérés comme étant arbitraires, alors il faut les traiter comme tels.
    Exactement.
    Me reste-t-il du temps?
    Vous avez 20 secondes.
    Eh bien, je viens de perdre 10 de mes 20 secondes. Je vais m’arrêter là et j’aurais peut-être une occasion plus tard.
    Désolé messieurs.
    Merci, monsieur Woodworth.
    Monsieur Eyking, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins de s’être déplacés aujourd’hui.
    Pour commencer, je crois que si quelqu’un nie l’existence du changement climatique, la visite d’hier aurait pu le faire changer d’avis. Nous avons vu, ainsi que l’a mentionné le NPD, comment les espèces invasives pénètrent dans les mytilicultures. Il y a des canards toute l’année là-dedans, ils mangent les moules. Nous voyons ce qui se passe dans les cours d’eau acides, avec le saumon.
    Je viens de Cap-Breton et aujourd’hui il était annoncé que l’accès à Aspy River et Margaree va encore être fermé pendant un moment, alors il n’y a pas de doute. Je poserai une question plus tard à propos du changement climatique.
    À Ottawa, le Parlement étudie actuellement de nombreuses lois. L’une d’elles concerne la déréglementation des petites pêches que met en place le MPO pour l’habitat des petits poissons. Une autre concerne des changements à Parcs Canada, j’appellerai ça un plan vert.
    Qu’il s’agisse de compressions à Parcs Canada ou de ces pêches, ne parlons pas seulement des changements qui vont être faits, mais de ce qui devrait évoluer pour soutenir ces changements. À mesure que vous avancez, y a-t-il un nouveau plan vert ou une façon de prendre en compte l’environnement?
    Concernant le changement climatique, que devrions-nous faire de plus sur le plan international que ce que nous faisons déjà? Hier on nous a suggéré que nous devrions localement chauler certaines rivières, et d’autres choses encore.
    Cela pose deux questions. La première concerne les lois qui sont étudiées actuellement au Parlement, quelles sont vos inquiétudes à leur sujet et quelle législation devrions-nous mettre en place à l’avenir pour la conservation. La seconde est relative à notre action internationale sur le front du changement climatique.
    Je n’ai que sept minutes. Je n’ai qu’un tour de questions alors si vous pouviez répondre en une minute chacun, cela serait parfait.
(1000)
     Je vais commencer. Merci pour les questions. Vous avez posé une question en deux parties sur les changements législatifs actuels.
    J’entrevois un affaiblissement de la législation sur l’environnement. Par conséquent, la question est de savoir à quel point cela pourrait réduire notre capacité à associer au plan national de conservation des éléments de comptabilité et de mise en oeuvre.
    Si l’on considère le changement climatique du point de vue des océans, le Canada a le plus long littoral au monde. Nous avons probablement les plus grands espaces maritimes au monde — environ 7,1 millions de kilomètres carrés — nous sommes donc face à un enjeu international en matière de gestion du territoire. Il me semble très important, sur le plan à la fois national et international, que le Canada devienne un chef de file dans les enjeux liés au changement climatique.
    L’une des clés pour intégrer cela dans un plan national de conservation réside dans l’une des priorités que j’ai évoquées, à savoir qu’il faut s’engager à reconstituer les populations, les espèces et les écosystèmes dégradés. En tant que peuple et en tant que pays, c’est probablement la seule chose que nous puissions faire pour permettre aux écosystèmes de répondre et de s’adapter au changement climatique, pour avoir des écosystèmes en bonne santé. C’est bénéfique du point de vue de la biodiversité, mais aussi du point de vue social et économique.
    Je peux poursuivre sur ce point.
    Tout d’abord, il est important de reconnaître que la variabilité de l’environnement est une chose normale et deuxièmement que les environnements s’adaptent. En d’autres termes, les espèces et la biodiversité s’adaptent au changement.
    Dès lors, comment pouvons-nous bâtir un système qui ait la capacité de s’adapter? Il nous faut des zones protégées, des ensembles de zones protégées, et des ensembles de zones protégées reliés les uns aux autres, pour qu’à mesure que l’environnement change, il soit possible pour les espèces, les organismes et les systèmes de se déplacer au sein de ces ensembles. C’est l’approche adaptative.
    Il faut s’attendre à des changements climatiques à l’avenir, quels qu’ils soient. Nous ne savons pas ce qui va se passer. Par conséquent nous avons besoin d’un cadre qui prenne en compte le changement et la possibilité du changement, et permette l’adaptation.
    Me voilà à nouveau face à ce problème de répétition.
    Je vais néanmoins revenir sur la question que Jeff a soulevée plus tôt, c’est-à-dire la nécessité d’avoir des mesures pour savoir où l’on en est et de pouvoir se rendre compte des dégradations.
    Pour répondre à votre question sur l’adoption de nouveaux instruments législatifs applicables aux océans, je dirais qu’il sera très important d’imposer une méthode de gestion intégrée des zones côtières ou des écosystèmes, peu importe la formulation retenue. Cela doit être mené comme la Loi sur les océans, mais il faut aller plus loin, prévoir les mesures et d’autres outils que nous pourrons utiliser pour évaluer ce qui se passera si nous réduisons, ou ne mobilisons pas les ressources nécessaires pour continuer.
    J’approuve tout ce qui a été dit ici aujourd’hui concernant le changement climatique, mais je sais que les choses changent très vite, en particulier dans des zones comme l’Arctique où nous travaillons en ce moment. Il nous faut débloquer des moyens pour aider les populations locales à faire face à ce qui va se produire à court terme, les aider à comprendre que leurs vies seront différentes dans cinq ans, dans dix ans, tout en réussissant à nous engager fermement à faire les efforts nécessaires pour contrôler nos impacts.
    Merci.
    Je ne suis pas vraiment compétent pour parler du changement climatique. Mais je tiens à parler de l’un des points que vous avez mentionnés: les réductions budgétaires en cours dans plusieurs ministères fédéraux.
    Moi qui ai passé une vingtaine d’années à arpenter les cours d’eau juché sur des échasses et à aider les collectivités, je constate qu’avec ces réductions budgétaires, les techniciens disparaissent des administrations fédérales et provinciales. Ces gens étaient sur le terrain et fournissaient des conseils techniques aux collectivités. Les ONG, qui font un travail inestimable sur le terrain en reconstituant l’habitat, subissent ces compressions budgétaires et sont en demande d’assistance technique.
    C’est ce que je retiendrai. Ils ont besoin de conseils. Ils veulent faire les choses correctement. Ils ont des ressources, beaucoup d’énergie, mais ils ont besoin soit d’être formés, soit que quelqu’un vienne et leur dise quoi faire. Cette capacité de conseil a presque disparu au cours des dernières décennies et plus encore avec les récentes réductions budgétaires.
(1005)
    Oui, c’est vrai, nous l’avons constaté.
    Merci.
    Votre temps de parole est écoulé. Merci.

[Français]

    Monsieur Choquette, vous disposez de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être là aujourd'hui.
    J'ai beaucoup de questions et de commentaires. Il est évident qu'il faut lutter contre les changements climatiques. On a voyagé partout au pays et on a rencontré des gens qui nous ont dit que la lutte contre les changements climatiques demeurait un élément clé. Je pense qu'elle devrait effectivement faire partie du plan de conservation national.
    On a parlé tout à l'heure des cibles qu'on devrait avoir. Ces cibles sont faciles à identifier: elles se trouvent dans les objectifs d'Aichi. On a signé une entente internationale et j'espère qu'on va les respecter.
    Ma question s'adresse à M. Hutchings. Présentement, seulement 1 p. 100 environ des espaces maritimes sont protégés. Or l'objectif d'Aichi est de 10 p. 100 pour 2020. Quelles sont vos recommandations pour qu'on améliore notre bilan de protection des espaces marins?

[Traduction]

    Monsieur Choquette, je vous remercie de votre question.
    Je me permets de signaler que l'estimation de 1 p. 100 que vous citez est excessive. En effet, nous protégeons officiellement, au Canada, 0,8 p. 100 des surfaces aquatiques, dont 0,3 seulement en eau douce. On peut donc estimer que nous protégeons 0,5 p. 100 d'eaux marines, contre près de 10 p. 100 des plans et cours d'eau terrestres.
    Au demeurant, l'un des objectifs d'Aichi pour la biodiversité consiste à édifier un réseau protégeant 10 p. 100 des aires marines du Canada. À ce propos, l'une des conclusions tirées, au mois de février de cette année, par le groupe d'experts de la Société royale qui s'est penché de façon précise sur cet objectif, est justement que le Canada n'a que peu de chances de l'atteindre. En effet, il ne semble pas que nous ayons imprimé la cadence ni investi l'énergie nécessaires pour protéger la superficie stipulée par l'objectif, si bien que nous en sommes bien loin.

[Français]

    Quelles seraient vos recommandations pour protéger le plus possible les zones marines? Présentement, comme vous le dites, on est très en retard. Quelles seraient donc vos recommandations au comité pour améliorer notre plan, rapidement?

[Traduction]

    Je pense que le moment est venu d'amorcer un débat public sur cette question, car les ressources qui se trouvent dans les océans appartiennent à tous les Canadiens. La Cour suprême a statué de façon très claire là-dessus: ce n'est ni la propriété du secteur privé, ni la propriété de particuliers, mais celle de tous les Canadiens. Et c'est à eux qu'incombe la responsabilité de veiller sur les océans, à l'échelon national comme à l'échelle mondiale.
    L'une des raisons maîtresses pour lesquelles nous désignons des zones océaniques protégées, c'est que nous voulons nous préserver contre les conséquences de facteurs inconnus, c'est-à-dire nous protéger contre notre propre ignorance. Je crois que nous n'avons que trop tendance à axer notre attention sur tel secteur ou tel autre secteur, avec, à l'esprit, la promotion des zones de pêche. Bien souvent, nous n'y réussissons guère.
    Je crois que nous disposons aujourd'hui d'un patrimoine suffisant de connaissances pour consulter les Canadiens et leur demander s'il convient de mettre de côté, à des fins de préservation, le même pourcentage de surfaces océaniques que de surfaces terrestres.
     [Note de la rédaction: difficultés techniques]
    En d'autres termes, est-ce que ce pourcentage est le fidèle reflet de la société que nous sommes? Puisque nous assurons la protection de 10 p. 100 de notre patrimoine terrestre, il se peut que les Canadiens pensent qu'il serait bon d'en faire autant dans le domaine maritime. Et pour cela, il faut les consulter.

[Français]

    Merci de votre réponse.
    Hier, nous avons voyagé. Nous sommes allés à l'île Miscou, à la rivière Sackville. Une personne nous a expliqué qu'il était important d'avoir accès aux scientifiques de Pêches et Océans Canada. Hier, on a appris qu'il y a encore des réductions de postes de scientifiques à Pêches et Océans Canada.
    Comment peut-on avoir un plan de conservation national crédible s'il y a toujours des compressions dans les sciences, par exemple, dans des postes à Pêches et Océans Canada? Ça ne peut pas aider, je crois. Qu'en pensez-vous?
(1010)

[Traduction]

    Par ailleurs, il me paraît indéniable qu'en réduisant les moyens mis à la disposition des activités scientifiques du secteur public, nous portons atteinte à l'élaboration d'un plan de conservation national. N'oublions pas que si nous voulons fixer des objectifs et des sous-objectifs à un plan, quel qu'il soit, qu'il s'agisse de zones marines à protéger ou de la préservation de la biodiversité terrestre, nous devons, en dernière analyse, nous appuyer sur les connaissances produites par ces organismes publics, je veux parler essentiellement des ministères gouvernementaux à vocation scientifique — qui sont les dépositaires de ce genre d'informations, et cela depuis plusieurs décennies, voire un demi-siècle ou plus encore. Comme je l'ai déjà dit, les organismes privés, les entreprises et les institutions universitaires n'ont tout simplement pas les capacités, les connaissances ni l'expérience voulues pour alimenter l'opinion canadienne et les instances gouvernementales en informations indispensables pour s'acquitter de cette tâche comme il se doit. L'affaiblissement de l'activité scientifique n'est pas de bon augure pour la mise sur pied d'un plan crédible et défendable.
    Merci, votre temps est écoulé.
    Je donne à présent la parole à M. Lunney, pour cinq minutes.
    Merci.
    Je pense que vous nous apportez tous une importante matière à réflexion et je vous en suis très reconnaissant.
    Monsieur Willison, je tiens à vous remercier pour ce que vous avez dit au sujet de l'adaptation, soit, pour vous paraphraser, que les écosystèmes et les espèces s'emploient à s'adapter, mais qu'il il nous incombe de créer un cadre leur permettant d'optimiser leur adaptation. Tout cela est consigné au procès-verbal et nous en reconnaissons la valeur.
    Je voudrais à présent poser une question à M. Hutchings, qui a assuré la présidence de COSEPAC de 2006 à 2010 et qui connaît bien la question.
    Sur la côte Ouest, dans le cadre de notre organisation, analogue à Huntsman, nous avions le Centre maritime scientifique de Bamfield, lequel s'occupait d'une espèce en péril: l'ormeau. Il y avait donc là un projet Huu-Ay-Aht d'aquaculture de l'ormeau, avec une aide financière provenant du MPO destinée à profiter aux Premières nations. Ils ont réussi, en faisant preuve d'inventivité, à élever des ormeaux dans un cadre aquacole et ils sont parvenus à colorer la coquille des ormeaux en les alimentant à l'aide d'algues de différentes couleurs, afin de les distinguer de l'ormeau sauvage. Malheureusement, si l'on veut financer le programme, il faut pouvoir vendre ces coquillages et en tirer un bon prix.
    En tant que député local, j'avais du mal à accepter que nous ne parvenions pas à obtenir, de la part de COSEPAC, l'autorisation de commercialiser ces espèces en péril, ou de mettre à contribution l'aquaculture, étant donné qu'une fois relâchés dans le milieu naturel, ces coquillages se mettent à manger le varech local et retrouvent une couleur de coquille normale, ce qui empêche de différencier les espèces aquacoles des espèces sauvages.
    Pourriez-vous m'expliquer le pourquoi d'une telle situation? En deuxième lieu, comment obtenir une décision qui permettrait de récupérer ces espèces en faisant preuve de créativité afin d'offrir ce tremplin économique aux Premières nations, mais aussi de dépasser ce label bureaucratique: « espèce en voie de disparition, commercialisation interdite »?
    Je vous remercie de votre question.
    Il faut avant tout faire une distinction entre les activités du COSEPAC et les conséquences de ses évaluations, qui ne relèvent pas de son processus décisionnel. Le COSEPAC a pour mission de procéder à des évaluations portant sur les espèces en s'appuyant sur les données scientifiques les plus fiables relatives à la situation de ces espèces.
    Cependant, la loi n'inscrit pas les répercussions des évaluations du COSEPAC d'un point de vue social, économique, politique ou financier, dans le cadre décisionnel de cet organisme. En conséquence, si le COSEPAC fait une évaluation de l'ormeau, cette dernière aura pour base le type d'informations et le cadre de référence employés pour n'importe quelle autre espèce, dans le respect des critères édictés par l'Union internationale pour la conservation de la nature, l'UICN.
    Bien entendu, l'évaluation attribuée par le COSEPAC à une espèce dépend de la situation telle qu'évaluée en fonction d'une série de critères. Si l'on applique une stratégie de rétablissement donnant les résultats escomptés, et qu'une espèce auparavant considérée comme en voie d'extinction ou menacée atteint les objectifs fixés par la stratégie de rétablissement, alors bien entendu le COSEPAC peut la retirer de la liste.
    Cela dit, et cela de façon quasi indépendante de ce qu'entreprend le COSEPAC, le gouvernement dispose de toute une série d'instruments, au palier provincial comme au palier fédéral. S'agissant de l'ormeau, je me souviens de discussions que nous avions avec certains représentants gouvernementaux à propos des permis et du processus de délivrance des permis, et la véritable pierre d'achoppement, c'était le processus de délivrance des permis, tant au niveau provincial qu'au niveau fédéral: cela mériterait peut-être votre attention.
    Je n'ai pas grand-chose d'autre à vous dire, car cela fait déjà deux ou trois ans que je ne suis plus directement impliqué dans ce domaine.
(1015)
    Je vous remercie de vos commentaires, et en effet, peut-être nous faudra-t-il entreprendre quelque chose afin de mettre au jour des façons créatives de stimuler l'économie et d'aider au rétablissement de ces espèces.
    Hier, nous avons pris connaissance d'exemples remarquables d'améliorations de l'habitat, à l'île Micou. L'Association des cours d'eau de Sackville a fait du très bon travail. Je rappelle l'existence de la Fondation du saumon du Pacifique sur la côte Ouest, qui, elle aussi, fait des merveilles. Notre comité s'y est rendu voici quelques semaines et a visité des dispositifs d'amélioration de l'espèce saumonée et de son habitat, notamment sur la côte orientale de l'île de Vancouver mais également quelques installations sur la côte occidentale.
    Alors, que pouvons-nous faire? Le budget de 2007 mettait à notre disposition 225 millions de dollars pour créer des partenariats avec certaines organisations de manière à protéger les terres vulnérables. Cela a permis d'obtenir un montant équivalent pour Conservation de la nature Canada et le Fonds mondial pour la nature Canada ainsi que bien d'autres organisations qui œuvrent dans le bon sens. C'est ainsi qu'ils ont pu s'associer avec des groupes comme Canards Illimités Canada et d'autres associations pour sauvegarder des terres vulnérables.
    Est-ce que votre association a des suggestions à formuler sur la façon d'aider à atteindre ces objectifs, en formant des partenariats pour sauvegarder ou renforcer davantage de zones vulnérables?
    Je répondrai volontiers en quelques mots à cette question.
    Vous avez mentionné la Fondation pour la nature en Nouvelle-Écosse, qui a été créée dans cette province précisément à cette fin. La difficulté tient au fait qu'agir à titre privé est extrêmement dispendieux; or, les avances obtenues ont été relativement modestes. Le grand avantage, c'est que cela implique les communautés, si bien que les gens s'engagent. En définitive, même si nous n'accomplissons que des progrès relativement minimes au plan environnemental, nous faisons de belles avancées du point de vue de la cohésion sociale.
    Je dirais, pour ma part, que c'est une démarche extrêmement fructueuse. D'un autre côté, si vous mettez tous vos œufs dans le même panier, vous allez à l'échec.
    Votre temps de parole est expiré, je vous remercie.
    Madame Liu, vous avez cinq minutes.
    Je vous remercie.
    Je reviens à vous, monsieur Hutchings. Vous dites, dans le rapport publié par la Société royale du Canada que le gouvernement devrait faire en sorte de limiter le « pouvoir discrétionnaire » du ministre des Pêches et Océans et de résoudre les « conflits d'intérêts » inhérents à ce ministère. J'aimerais savoir ce que vous avez exactement à l'esprit et si vous avez des solutions à proposer à ce problème.
    Je pense que, dans ce cas, la commission d'experts faisait allusion à l'absence de loi régissant le domaine, et prescrivant notamment au ministre la voie à suivre dans des circonstances données. Contrairement à la Loi sur les espèces en péril, qui, elle, est extrêmement prescriptive, la Loi sur les pêches laisse une large marge discrétionnaire. Chaque fois que le ministre est confronté à une décision — qu'il s'agisse d'établir un quota, de désigner une zone marine protégée, etc. — il lui revient de trancher. Bien souvent, d'ailleurs, les ministres se passeraient volontiers de cette charge quotidienne, mais c'est ainsi.
    Cependant, les lois existent dans ce domaine, par exemple aux États-Unis où la loi prescrit un certain nombre de plafonds, en matière de surpêche notamment, qui doit être observé par le gouvernement. Il en va de même pour la législation australienne en matière de biodiversité et de conservation qui sous-tend l'action entreprise, mais aussi pour la Norvège qui œuvre dans ce sens et pour la Nouvelle-Zélande, qui a elle aussi adopté des mesures analogues.
    Donc, pour souligner une fois de plus ce que je disais, on pourrait amender la législation en vigueur ou encore adopter une nouvelle loi qui aiderait le comité à s'acquitter de son mandat, mais aussi le ministre dans l'établissement d'un plan de conservation national; et je crois qu'il vaudrait la peine de se pencher également sur la marge discrétionnaire accordée à certains ministres.
    Parfait.
    Lorsque vous évoquez les programmes de suivi que vous considérez comme essentiels à l'appui de la stratégie de conservation nationale, qui, selon vous, devrait en être chargé? Faut-il que ce soit un organisme indépendant du gouvernement fédéral?
    Ce qui manque le plus cruellement, c'est l'argent et l'infrastructure. Je suis sûr qu'avec l'aide du gouvernement, on trouverait des intervenants pour faire le travail. Je vais vous en donner un excellent exemple: le projet concernant le plateau continental polaire de Ressources naturelles Canada, à Resolute, dans l'Arctique. Je peux en parler parce que j'en ai bénéficié moi-même en tant que chercheur dans la région. Sur la base, on trouvait tout ce dont on avait besoin, depuis les avions et les hélicoptères jusqu'aux embarcations et à l'essence, tout ce dont les chercheurs ont besoin pour travailler dans l'Arctique. Je crois que l'Arctique est un parfait exemple de contexte dans lequel, sans l'appui gouvernemental en matière d'infrastructures, les scientifiques et les chercheurs, mais aussi les ONG du Canada, ne pourront tout simplement pas accomplir leur travail.
    Je crois donc que les instances gouvernementales doivent, à tout le moins, fournir la base financière et l'infrastructure permettant aux scientifiques — du secteur public comme du secteur privé —, d'accomplir leur travail de surveillance.
(1020)
    Je vois.
    Toujours à propos de la science, avez-vous assisté à une évolution, s'agissant du financement, de la recherche pure à la recherche appliquée? Je m'adresse à vous mais aussi aux autres témoins.
    Monsieur Whoriskey, peut-être souhaitez-vous dire un mot là-dessus. Avez-vous constaté une évolution, et, dans l'affirmative, cela a-t-il influé sur votre travail et sur celui de vos collègues? Par ailleurs, lorsque vous parlez de plan de conservation et de biodiversité, devons-nous veiller à ce que le financement de la recherche fondamentale soit maintenu pour qu'elle puisse poursuivre ses activités?
    Effectivement, on a assisté à un virage de la recherche fondamentale vers la recherche appliquée. Les scientifiques soucieux d'innovation qui travaillent dans ce domaine essaient de faire face à la situation en intégrant autant de recherche fondamentale que possible dans leurs travaux.
    J'ai peut-être de la chance avec le projet sur lequel je travaille en ce moment: je veux parler du réseau de surveillance océanique, qui permet de mettre au point des technologies canadiennes que nous vendons à l'échelle mondiale, ce qui permet de décupler pratiquement les investissements que nous faisons pour chaque unité de recherche, tout en générant un volume considérable de connaissances fondamentales qui peuvent être ensuite appliquées de façon concrète. Nous nous sommes débrouillés pour en faire un tout intégré.
    Cela ne veut pas dire, pour autant, que je ne crois pas en la recherche fondamentale. Bien au contraire, c'est là que l'on voit pointer les grandes innovations, comme par exemple les modules d'interface de réseau, et même la technologie de base que nous utilisons dans le cadre du réseau d'approvisionnement, qu'il s'agisse du réseau de surveillance océanique, de l'équipement de télémétrie sonique, etc. Donc, il faut préserver cet aspect.
    Permettez-moi d'ajouter deux mots. Je pense que l'on peut obtenir un effet de levier formidable en associant les chercheurs du secteur public qui font de la recherche fondamentale et leurs homologues du secteur privé, et d'autres aussi. Comme l'a dit Fred, il est possible d'atteindre les objectifs des uns et des autres, mais la façon dont nous opérons aujourd'hui, qui exige un financement accru de la part des entreprises aux programmes, met le secteur privé à contribution de façon excessive, et cette pression s'exerce au détriment de la recherche fondamentale à vocation exploratoire. Je crois donc qu'il faut orienter la réflexion sur des modalités permettant une dualité d'objectifs. C'est ce que nous faisions à l'époque dans le cadre des subventions stratégiques du CRSNG, mais ce programme se présente aujourd'hui sous des modalités différentes. Encore une fois, nous pouvons, je crois, atteindre un double objectif à condition d'en avoir la détermination.
    Je vous remercie. Le temps alloué est expiré.
    C'est au tour de M. Woodworth pour cinq minutes.
    Merci beaucoup.
    À titre de préambule, j'ai omis de dire au professeur Willison que je ne suis pas aussi optimiste que lui à propos du calendrier qu'il a indiqué. Cela dit, je crois que si je devais élaborer le plan, je l'assortirais d'objectifs couvrant à la fois le court terme, le long terme et le moyen terme.
    Je voudrais à présent m'entretenir pendant quelques minutes avec M. Dupuis à propos de la question du financement, qu'il a évoquée.
    J'avoue que je ne connais pas aussi bien le ministère des Pêches et Océans que celui de l'Environnement, car notre comité traite plus souvent avec ce dernier. Toutefois, vous avez mentionné le chiffre de 12 millions de dollars par an et, si j'ai bien compris, il s'agit de la contribution du MPO aux pêches de saumon, mais je peux me tromper. Pourriez-vous me donner un complément d'explication?
    C'est le chiffre fourni par le MPO à Ottawa, qui représente le montant dépensé par le gouvernement fédéral au titre de la conservation et de la protection du saumon sauvage de l'Atlantique. Il ne s'agit nullement d'un don à quelque organisme que ce soit, mais du montant que le gouvernement fédéral consacre à son rôle de protection du saumon sauvage de l'Atlantique. Et ce montant traduit une diminution de quelque 75 p. 100 par rapport à 1985 environ.
    J'en venais justement à cette question. S'il y a eu diminution de 75 p. 100, cela veut dire que le montant était de 48 millions en 1985.
    Le montant était de 25 millions en 1985, mais compte tenu de l'inflation, ce montant de 12 millions reflète une réduction de 75 p. 100 en termes actuels.
    Savez-vous quel était le montant il y a cinq ans?
    Je n'ai pas le chiffre en mémoire, mais je dois pouvoir vous l'obtenir.
    Oui, cela m'intéresse parce qu'au moins en ce qui concerne le ministère de l'Environnement, le gouvernement n'a pas cessé, au cours des six dernières années, d'en augmenter le budget année après année; et même cette année, on ne constate pas de réduction dans le budget du ministère de l'Environnement. Cela dit, je ne connais pas les chiffres pour ce qui est du ministère des Pêches et Océans.
    J'aimerais savoir si vous avez étudié la question sous un angle systémique global, parce que lorsque vous parlez de la réduction de la capacité de soutien technique, je suis sûr que vous n'ignorez pas que le mandat du gouvernement englobe toute une série d'activités. Je pense notamment à la délimitation concrète des zones protégées, à la recherche, aux autres projets liés à la conservation, à l'évaluation des projets, à la surveillance des gaz à effet de serre et à leur réglementation, à la propreté de l'air et au nettoyage des polluants à particules, au nettoyage des sites contaminés, aux espèces envahissantes, à la surveillance du climat, aux relations avec les médias, à la surveillance des sables bitumineux, aux négociations internationales, aux mesures exécutoires ordonnées par les tribunaux, à la recherche concernant l'énergie propre et aux indemnisations d'autres pays liées au changement climatique.
    J'aimerais savoir comment vous vous y prendriez pour hiérarchiser les priorités parmi toutes ces activités, parce que pour moi cela ressemble fort à la quadrature du cercle ou, comme on dit: c'est un peu comme tenter d'assécher un marécage infesté d'alligators… Alors, d'après vous, qu'est-ce qui constitue le marécage, et qu'est-ce qui constitue les alligators?
(1025)
    Vous avez raison, il y a fort à faire.
    Malheureusement, c'est à cela que nous sommes confrontés.
    Je comprends.
    Lorsque vous parlez des priorités à établir dans le domaine technique, laissez-moi vous dire que j'ai moi-même passé 20 ans sur le terrain, ou plutôt les pieds dans l'eau, à patauger dans les fleuves, à aider les associations communautaires, qu'il s'agisse des ONG comme la FSA, la TU et jusqu'aux organisations qui s'occupent des bassins versants et qui s'emploient à les restaurer pour protéger leurs terrains, je veux parler des propriétaires riverains. Parce que ce sont eux qui paient les pots cassés lorsque les gouvernements — et pas seulement au niveau fédéral mais également au palier provincial — font des compressions budgétaires.
    D'après moi, ce sont ces associations qui, dans l'avenir, seront les vecteurs d'application des programmes de conservation. Ce qui est somme toute logique, étant donné que ce sont eux les propriétaires des terrains. Ils sont enracinés localement, et donc ils seront plus efficaces que l'agent du MPO qui débarque avec un 9 millimètres à la ceinture. Lorsqu'il s'agit de modifier l'emploi qui est fait des terrains, je crois qu'il est plus facile de recourir à une démarche basée sur les leaders communautaires.
    Mais il ne faut pas oublier que ces associations n'ont pas les compétences techniques voulues. Plus nous étudions ces écosystèmes, plus nous étudions les bassins versants et plus nous constatons à quel point ils sont complexes. Il faut donc avoir recours à des spécialistes, à des hydrologistes et à des géomorphologistes pour qu'ils fassent des évaluations et qu'ils établissent ce qu'il convient de faire au niveau des contreforts des bassins versants, en faisant profiter ces groupements communautaires de leurs compétences.
    J'ai tendance à penser comme vous, mais il faut que tout le monde comprenne bien que nous sommes confrontés à des restrictions très concrètes et que si nous intensifions l'appui technique aux prestations destinées à la conservation — et je précise que je n'ai rien contre —, il faudra rogner ailleurs.
    À l'heure actuelle, les pressions ne manquent pas pour nous inciter à investir dans l'énergie propre et dans la réduction des gaz à effet de serre, qui sont, nous le savons bien, sans aucune corrélation avec l'appui technique à la conservation. Je vois que le couperet va tomber dans quelques instants, pouvez-vous répondre très rapidement?
    Malheureusement, votre temps est expiré. Désolé.
    Je voudrais communiquer aux membres du comité que je me dispose à suspendre bientôt la séance. En effet, Radio-Canada et CTV, pardon, Global, vont entrer dans la salle pour nous prendre en photo. Il s'agit simplement d'une photo — pour celles et ceux que cela ne dérange pas — illustrant le fait que notre comité se réunit à Halifax pour traiter de la question du plan de conservation national.
    La séance est suspendue. Nous nous retrouverons à 10 h 45 pour la poursuite de vos témoignages.
(1025)

(1045)
    La séance reprend à présent.
    Il s'agit de la 38e réunion du Comité permanent de l'environnement et du développement durable, dans le cadre de l'étude de l'élaboration d'un plan de conservation national pour le Canada.
    Nous souhaitons la bienvenue à nos témoins et les remercions de comparaître devant nous aujourd'hui, Il s'agit là de la deuxième série de témoignages.
    Nous allons commencer par l'exposé du Conseil de la conservation du Nouveau-Brunswick. Vous avez 10 minutes pour votre exposé.
    Bonjour à toutes et à tous et merci d'être venus nous rendre visite dans les provinces Maritimes.
    Hier, j'ai dit à ma fille Laura, qui a 13 ans, que je me rendais à Halifax. Elle se plaint toujours que je l'avertis à la dernière minute quand je dois m'en aller. Elle m'a demandé: « Qu'est-ce que tu vas y faire? », et je lui ai répondu: « Je m'en vais parler à des députés du Parlement. » Et là elle m'a dit: « Ça, c'est formidable », pas parce que je devais m'entretenir avec des députés, ça, je l'ai fait bien des fois tout au long de ma carrière, mais voilà ce qu'elle m'a dit: « Tu veux dire qu'ils viennent depuis le Parlement jusqu'aux provinces Maritimes? Ça, c'est formidable. » Donc, je vous remercie d'avoir quitté la Colline parlementaire, d'avoir entrepris de faire le tour du pays et de venir dans notre région aussi pour parler de ce sujet important.
    Je crois que c'est une bonne chose que vous commenciez vos audiences dans la région atlantique du Canada, parce que nul n'ignore que c'est ici que le Canada a connu son plus grave échec dans ses efforts de conservation: je veux parler de l'effondrement généralisé d'une bonne partie de nos stocks de poisson, y compris de la plupart des espèces de poissons démersaux, du saumon de la baie de Fundy, des huîtres sauvages et de notre hareng côtier. Cette catastrophe nous a enseigné que l'environnement, ce n'est pas un luxe: en effet, la protection de l'environnement n'est ni un luxe, ni une question secondaire, ni une exigence rivalisant avec d'autres exigences; non, l'environnement, c'est la source même de notre survie et de notre économie.
    Je voudrais esquisser, en suivant votre schéma, quelques réflexions sur ce qui pourrait constituer un plan de conservation national. Tout d'abord, nous devons nous demander quel est l'objet d'un tel plan. Pour nous, il doit viser, à n'en pas douter, à traiter les problèmes qui ont été identifiés, à savoir aussi bien les dégâts causés jusqu'ici aux écosystèmes du Canada et qu'il convient donc de restaurer, que les menaces pesant sur les écosystèmes encore intacts. Lorsque je parle d'écosystèmes, j'ai à l'esprit nos forêts, nos lacs, nos cours d'eau, nos marécages, nos eaux côtières, nos régions océaniques et nos estuaires.
    J'ajoute que vous êtes chanceux, car une partie de votre travail a déjà été accomplie pour vous. Vous avez en effet un bilan détaillé de la situation grâce au travail considérable accompli par Environnement Canada et par le MPO pour faire la synthèse des résultats les plus fructueux des recherches effectuées par les scientifiques canadiens sur les écosystèmes terrestres, mais sur nos écosystèmes d'eau douce et océaniques, et cela d'un bout à l'autre du pays et sur toutes nos franges côtières. S'agissant d'Environnement Canada, on doit ce travail à Mme Risa Smith et à ses collègues qui travaillent à l'établissement de priorités en matière d'écosystèmes et de biodiversité.
    Mme Smith et ses collègues se sont consacrés à l'élaboration de ce bilan et de l'évaluation, d'importance vitale, de l'état de nos écosystèmes. En 2010, ils ont publié un document récapitulatif de ce bilan, que j'ai adressé il y a quelque temps à votre comité par lecteur flash — j'espère que vous l'avez reçu —, intitulé « Biodiversité canadienne : état et tendances des écosystèmes en 2010 ». Depuis, toute une série de rapports techniques ont été publiés et affichés sur le site Web biodivcanada.ca. Bientôt, nous y afficherons également les rapports régionaux couvrant chacune de nos régions et qui représentent un montant considérable de travail.
    Parallèlement, les scientifiques du palier fédéral et notamment du MPO ont travaillé dans le même sens en publiant des rapports qui dressent un bilan et tracent des perspectives de ce qui se passe dans nos régions océaniques, et en établissant également des fiches de synthèse. Tout cela a fait l'objet d'un rapport sommaire publié sous le titre « Rapport sur l'état et les tendances des écosystèmes canadiens en 2010 ».
    Lorsqu'on réunit ces fiches de synthèse et que l'on met bout à bout leurs principales conclusions, on voit qu'elles tracent le contour des problèmes qui, selon nous, doivent être pris en compte dans un plan de conservation national. Laissez-moi vous donner quelques exemples, qui ne relèvent d'ailleurs pas tous du palier fédéral mais, pour certains, du niveau provincial également. Ainsi, la capacité de drainage des flux hydriques de nos forêts méridionales accuse un recul très marqué. Or, cela a de quoi préoccuper lorsqu'on pense aux inondations que peuvent entraîner les précipitations de forte intensité que nous avons reçues récemment dans cette portion du pays. J'ajoute que les marécages ne cessent de rétrécir comme peau de chagrin dans tout le pays, si bien que leurs fonctions essentielles de régulation des inondations et de séquestration du carbone s'en trouvent amputées.
    Au sein du Conseil de conservation, nous avons, quant à nous, beaucoup travaillé sur les écosystèmes côtiers. Je rappelle que nous avons d'énormes problèmes liés à la simplification, à la nutrification et aux zones mortes de nos baies par suite de la surcharge en nutriments, ce qui vient saper la productivité et entraîne un effondrement partiel de l'ostréiculture.
    Aujourd'hui, les écosystèmes marins sont sur toutes les bouches, avec la teneur en carbone qui entraîne l'acidification, le réchauffement océanique, la modification des courants et les remontées d'eau, tous phénomènes qui affectent de façon fondamentale la disponibilité de nutriments pour l'ensemble de la chaîne alimentaire. Les différentes composantes de la chaîne alimentaire s'en trouvent bouleversées, notamment en raison de la surpêche et des techniques utilisées pour cette dernière.
    C'est pourquoi un plan de conservation national doit avoir comme objectif de traiter les catégories de problèmes qui ont déjà été identifiés dans les principales conclusions des fiches de synthèse.
(1050)
    Et à propos des objectifs d'un tel plan, je pense qu'ils sont relativement sains. Il y a une vingtaine d'années, au lendemain du Sommet de la Terre qui s'est tenu à Rio de Janeiro, les scientifiques réunis à cette occasion ont lancé ce qu'ils ont appelé un avertissement à l'humanité. C'était là un appel à la fois dramatique et grandiose: vous aviez 1 600 scientifiques, 70 pays, 102 Prix Nobel qui, pour l'essentiel, déclaraient que l'humanité était engagée sur la voie d'un choc frontal avec le monde naturel; ils disaient que si l'on ne mettait pas un frein à nos pratiques actuelles, celles-ci risqueraient fort de mettre en péril l'avenir des sociétés humaines et pourraient même altérer les mécanismes de notre monde au point de l'empêcher d'y maintenir la vie telle que nous la connaissons. C'est ce vers quoi nous nous acheminons, et c'est ce que mettent en relief les principales conclusions de ces rapports.
    J'ajoute que c'est précisément en 1992 que l'on a pris acte du phénomène de l'effondrement de la population de morue du nord. Je rappelle une chose que nous avons tendance à oublier au niveau national, c'est que cet effondrement a entraîné la perte de leur mode de subsistance pour 40 000 foyers dans notre région, tout en sonnant l'alarme d'un dysfonctionnement écologique au niveau de nos eaux océaniques dont nous subissons encore les conséquences.
    Je sais que ce n'est pas à la mode de parler de crise écologique alors que nous traversons une crise économique beaucoup plus palpable et beaucoup plus d'actualité. Cependant, la crise écologique existe et, loin de s'atténuer, elle ne cesse de s'aggraver.
    C'est pourquoi, sans jouer les Cassandre, je crois que nous devons réfléchir à la façon d'adopter un cap différent. Nous devons prendre conscience du fait que la société canadienne, comme toutes les autres sociétés du monde entier, s'inscrit dans l'environnement. En effet, nous ne vivons pas à l'extérieur de l'environnement, nous n'en sommes pas isolés, c'est pourquoi nous devons changer la façon dont nous menons nos activités.
    C'est aussi pourquoi il convient qu'un plan de conservation national vienne constituer le cadre dans lequel le gouvernement prendra ses décisions, conformément aux autres priorités d'ensemble. Puisque nous nous inscrivons dans l'environnement, il va de soi que cela doit nous guider dans la prise de nos décisions en vue de la création de ce contexte. D'ores et déjà, nous savons que la destruction des habitats, la teneur excessive en nutriments et les émissions de gaz à effet de serre ont dépassé le point d'équilibre à l'échelle mondiale et que nous devons faire machine arrière.
    C'est enfin pourquoi, s'agissant des objectifs, le plan de conservation national devra nous faire emprunter une autre voie, modifier la relation que nous entretenons avec la nature et avoir comme objectif fondamental de maintenir l'intégrité écologique et la résilience de notre écosystème, tout en rétablissant l'intégrité écologique et la résilience des systèmes qui ont déjà été détériorés.
    Voilà, selon moi, quels doivent être les deux objectifs centraux d'un plan de conservation national, et les décisions que sera amené à prendre le gouvernement devront aller dans ce sens.
    S'agissant à présent des principes, je crois que ce que l'on a fait de mieux en la matière se trouve consacré dans la Charte de la Terre, rédigée en 1992. Cette charte a été entérinée par des milliers d'organisations représentant des dizaines de millions de personnes, y compris la Ville de Vancouver Nord et les Sœurs de la charité, ici même à Halifax. Voilà qui donne une idée de la diversité du soutien que reçoivent ces principes fondamentaux. À vous d'en prendre connaissance, et je suis sûr que vous le ferez: il s'agit de principes tels que le respect, la responsabilité, l'amour — c'est une notion qui aurait sa place dans votre rapport et à laquelle j'accorde beaucoup d'importance —, donner sa chance à l'avenir, etc. Je suis sûr que vous allez le lire.
    Pour ce qui est des priorités en matière de conservation, je crois que le moment est particulièrement bien choisi pour ce comité, étant donné que notre pays a souscrit à ces objectifs en 2010 au Sommet de Nagoya sur la biodiversité, dans le cadre de la Convention sur la diversité biologique.
    Je vous ai distribué la brochure qui traite des objectifs. À l'échelle nationale, nous allons très bientôt distribuer notre cadre de cheminement vers les objectifs de biodiversité. D'ici une quinzaine de jours, nous les enverrons pour consultation aux parties prenantes au niveau national, avec quelque cinq objectifs et une quinzaine de sous-objectifs qui s'appliquent de façon spécifique à la réalité canadienne. Je vous encourage à en prendre connaissance et peut-être même à inviter un représentant d'Environnement Canada à faire une intervention à ce sujet.
    Enfin, s'agissant des priorités en matière de mise en œuvre, je crois qu'il y en a une double, qu'il convient de privilégier, à savoir le fait qu'un plan de conservation national doit être assorti d'un programme législatif, afin de bénéficier d'un socle statutaire en vue de protéger et de restaurer nos écosystèmes. Ainsi, nous disposerons d'un cadre détaillé et à valeur juridique pour le long terme en vue de la conservation et de l'utilisation durable de nos écosystèmes.
    Comme l'a déjà mentionné Jeff Hutchings, l'Australie et la Norvège ont adopté des lois analogues à ce dont je vous parle, dans le but de maintenir et de reconstruire leurs écosystèmes. Je pense en particulier à la Loi sur la diversité de la nature adoptée en Norvège et qui est très intéressante car elle fixe, pour la gestion des écosystèmes, des objectifs d'ensemble dans le cadre desquels le gouvernement prend ses décisions. Cela permet de prendre du champ par rapport à la situation spécifique des espèces ou des habitats qui sont gravement en péril mais qui restent essentiels à notre santé, à notre bien-être et à notre prospérité.
(1055)
    Il convient d'établir un programme législatif et de l'inscrire dans un cadre institutionnel qui englobe l'ensemble des ministères fédéraux afin de mettre en oeuvre le plan d'une manière qui échappe au cloisonnement qui caractérise souvent les ministères; un nouvel accord institutionnel, en quelque sorte.
    Pour conclure, j'ajouterai simplement qu'en tant que comité parlementaire, vous êtes merveilleusement placés pour jouer le rôle de catalyseur du débat dans le pays sur le thème de la nécessaire adoption d'un plan de conservation national pour faire face à la crise écologique. Nous avons, au Canada, les moyens d'affronter le problème, et ce que nous faisons ici peut avoir son importance. Au cours de la 32e législature parlementaire, vos prédécesseurs au Sous-comité sur les pluies acides ont publié un rapport intitulé Still Waters qui a impulsé la prise de mesures pour combattre les pluies acides dans l'Est du Canada, depuis le Manitoba jusqu'aux provinces de l'Atlantique. Ce rapport a été un véritable best-seller, on se l'arrachait dans les librairies: vous imaginez, un rapport de sous-comité parlementaire, je dis bien sous-comité, vendu en librairie et qui a vraiment frappé l'imagination des Canadiens? Vous pourriez peut-être vous fixer cela comme objectif. Quant à moi, j'attends avec intérêt de trouver votre rapport chez mon libraire du coin et de le lire.
    Je vous souhaite bonne chance, et je vous remercie une fois de plus de votre visite dans les provinces Maritimes.
    Merci beaucoup.
    Nous allons à présent entendre deux témoins du ministère des Pêches et des Océans, M. King et M. Burgess.
    Je vais donc faire un petit exposé au nom du ministère, mais il va de soi que Marty et moi-même sommes à votre disposition pour répondre à vos questions dès que j'en aurai terminé.
    Merci, donc, de nous avoir invités à venir décrire devant votre comité le rôle joué par le ministère des Pêches et des Océans en matière de conservation des ressources marines.
    Si vous le voulez bien, je commencerai par vous donner une brève description de l'approche adoptée par le ministère en matière de conservation des ressources aquatiques au Canada, de même que de notre perspective à l'égard d'un plan de conservation national. Afin d'illustrer brièvement le rôle et le point de vue du ministère en matière de conservation des ressources marines, je développerai trois thèmes qui sous-tendent l'ensemble des activités déployées par notre ministère.
    On peut dire, je crois, que le ministère des Pêches et des Océans est le chef de file des ministères fédéraux en ce qui a trait à la protection et à la gestion des pêches ainsi qu'à la conservation des écosystèmes aquatiques à l'échelle nationale, et ce, tant pour les ressources marines que pour les ressources en eau douce. En deuxième lieu, le MPO considère que la conservation et la prospérité économique doivent aller de pair: en effet, qui dit environnement sain dit économie saine. En troisième lieu, les programmes de conservation des ressources aquatiques et de gestion des pêches du MPO sont axés sur ce que nous appelons une approche écosystémique. Permettez-moi, à présent, de développer chacun de ces thèmes.
    Le rôle assigné au ministère dans l'application de la Loi sur les océans, la Loi sur les espèces en péril et la Loi sur les pêches place ce dernier dans un rôle de chef de file au niveau fédéral pour la conservation des ressources aquatiques et celle des écosystèmes aquatiques. Dans le cadre de notre mandat de principal intendant fédéral, nous promouvons, conservons et protégeons les écosystèmes aquatiques durables. Nous nous acquittons de cette fonction par le biais de programmes multidisciplinaires tels que la gestion des pêches, celle de l'aquaculture, la science des écosystèmes et des pêches, les programmes touchant les espèces en péril et les océans, de même que, à titre d'exemple, le travail que nous accomplissons auprès des groupes autochtones.
    Le MPO est conscient du fait que la conservation de nos précieuses ressources aquatiques est une responsabilité qui incombe à tous les Canadiens, et que nous n'en sommes pas les seuls détenteurs. Si nous voulons que les activités de conservation soient efficaces, nous devons faire en sorte que s'impliquent toutes les autorités responsables de même que les parties affectées et les parties prenantes. Il faut en outre que cette implication se fasse à toutes les étapes de l'élaboration des politiques et des programmes, de même que de leur mise en oeuvre et de leur coordination, et ce à tous les niveaux: local, régional, national et international.
    Afin d'obtenir le soutien et l'adhésion aux activités de conservation propres à influer sur l'activité économique, nous devons veiller à ce que tous les intéressés participent aux processus décisionnels, à ce que leurs besoins soient bien compris et à ce que soient évaluées de façon appropriée les solutions permettant d'atteindre les objectifs de conservation tout en laissant les activités économiques libres de se déployer.
    Le savoir-faire en matière de ressources en eau douce comme de ressources marines et de pêche n'est pas l'apanage du ministère des Pêches et des Océans. Au contraire, ce savoir-faire, on le trouve au sein des associations de conservation, des agences provinciales, et de bien d'autres. De plus en plus, nous nous prévalons du soutien et de la participation des milieux universitaires, des organisations non gouvernementales à vocation écologique, des organisations de conservation et des autres paliers de gouvernement, afin d'échanger des connaissances, d'élaborer des solutions et de mettre en oeuvre des activités de conservation.
    Ce qui précède a conduit notre ministère à adopter une approche axée sur l'intendance dans ses relations avec les autres paliers de gouvernement, les utilisateurs de ressources océaniques, les pêcheurs, les groupes autochtones, les opérateurs de l'aquaculture ainsi que l'ensemble du public canadien. Il convient, selon nous, d'oeuvrer tous ensemble à la conservation et à la protection des écosystèmes aquatiques, de même qu'à la gestion de l'impact qu'ont les activités sur nos précieuses ressources aquatiques. En bref, c'est un effort collectif qu'exigent la portée, l'ampleur et l'importance de la conservation.
    Je pense que les efforts nécessaires pour promouvoir la conservation sont parfaitement illustrés par la création, à titre d'exemple, des zones marines protégées. Le ministère, au nom du gouvernement du Canada, a délimité huit zones marines protégées, et ce par le biais d'un processus basé sur la participation et la collaboration; en outre, sept autres zones marines protégées ont été identifiées et seront désignées dans l'avenir par des processus analogues.
(1100)
    Je crois qu'il importe de souligner que la création de zones marines protégées n'est pas simplement une initiative ministérielle, mais qu'elle constitue un effort collectif auquel participent des segments du secteur privé, des organisations de conservation, des organismes provinciaux ainsi que d'autres entités. Tel est, dans une certaine mesure, le défi auquel nous sommes confrontés dans la définition des besoins correspondant aux zones marines protégées. Le MPO est également chef de file pour la mise sur pied du réseau canadien de zones marines protégées s'intégrant à un cadre national élaboré grâce à une coopération entre les paliers fédéral, provincial et territorial. Ce réseau, qui sera composé de 13 biorégions, incorporera les zones marines protégées déjà existantes aux niveaux fédéral, provincial et territorial, de même que des programmes de conservation à implantation territoriale, tels que la fermeture de certaines pêches pouvant contribuer aux objectifs du réseau.
    Le réseau a pour objectif général d'offrir une protection à long terme de la biodiversité marine, de la fonction écosystémique et de caractéristiques spécifiques du milieu naturel; d'appuyer la conservation et la gestion des ressources vivantes du Canada au sein de leur habitat ainsi que la valeur socio-économique et les services d'écosystème qu'elles fournissent; et, enfin, de sensibiliser davantage le public et de lui faire mieux apprécier les environnements marins du Canada de même que le riche patrimoine historique et culturel de notre pays dans le domaine maritime.
    J'ai déposé à l'intention des membres du comité un exemplaire d'un rapport intitulé Spotlight on Marine Protected Areas in Canada » (Spotlight on Marine Protected Areas in Canada, qui illustre en partie les activités se déroulant dans ce domaine. Bien entendu, nous sommes à la disposition du comité pour tout complément d'information.
    La biodiversité est un élément fondamental de la conservation, et la contribution du MPO à la conservation de la biodiversité aquatique est appuyée, entre autres, par la Loi sur les espèces en péril. Je crois que nos collègues d'Environnement Canada et de Parcs Canada vous ont déjà parlé de la Loi sur les espèces en péril. Tout comme Environnement Canada et Parcs Canada, le MPO est invité à proposer des décisions en matière d'inscription sur les listes, pour produire ensuite des stratégies de rétablissement et des plans d'action applicables aux espèces aquatiques en péril ou menacées, ainsi que des plans de gestion pour les espèces préoccupantes.
    Quelque 103 espèces aquatiques ont été désignées pour inscription sur les listes établies aux termes de la Loi sur les espèces en péril. Pour la région des provinces Maritimes, il convient de souligner en particulier certaines espèces telles que le rorqual bleu de l'Atlantique, la baleine noire de l'Atlantique Nord, le dauphin à gros nez du Nord, le saumon de la baie de Fundy, et enfin la tortue luth. Toutes ces espèces sont protégées aux termes de la Loi sur les espèces en péril.
    Des stratégies de restauration ont été mises au point pour 68 des espèces aquatiques désignées; parallèlement, certains plans d'action ont été achevés ou sont en voie de l'être, et des plans de gestion ont été établis pour 35 espèces considérées comme préoccupantes. Grâce à l'établissement de ces documents, le MPO engage le dialogue avec les particuliers et avec les groupements affectés ou intéressés, il promeut la compréhension des problèmes liés à ces espèces en péril et il s'efforce d'obtenir un soutien pour les initiatives de restauration.
    Afin d'intensifier l'engagement des Canadiens pour la protection et la restauration des espèces en péril, le MPO et Environnement Canada renforcent les activités d'intendance grâce au programme d'intendance de l'habitat et grâce à l'emploi des fonds attribués aux Autochtones pour la défense des espèces en péril. Je crois qu'il s'agit là de volets importants du programme, étant donné que l'emploi combiné de ces deux fonds permettra d'investir 7,3 millions de dollars autour du présent exercice financier, tout en obtenant, grâce à l'effet de levier, 15,5 millions de dollars supplémentaires engagés dans plus de 150 projets de conservation à travers le pays.
    Je citerai d'autres exemples de la manière dont le MPO effectue chaque année des investissements importants afin d'engager les groupes autochtones dans des activités de surveillance, de présentation de rapports et d'exécution des mesures visant à protéger les écosystèmes: il s'agit de la stratégie concernant les pêches autochtones et des programmes orientés vers les Autochtones en matière de ressources aquatiques et de gestion des océans. Les groupements autochtones, qui sont des partenaires précieux, jouent un rôle important et même parfois crucial dans la promotion, par le MPO, de conditions propres à des pêches durables et de protection des océans.
    Grâce au travail important qu'il accomplit en matière de conservation et d'utilisation durable des pêches, le ministère maintient son rôle de chef de file de la conservation des ressources aquatiques. En collaboration avec le secteur de la pêche, il a élaboré un cadre durable pour les pêches. Il s'agit d'un cadre général qui intègre les mesures actuelles de gestion des pêches aux nouvelles politiques et aux nouveaux instruments. Ce cadre comprend également des instruments permettant de suivre et d'évaluer les initiatives tendant à garantir un cadre environnemental durable pour les pêches et à identifier les secteurs pouvant nécessiter une amélioration.
(1105)
    Je passe à présent au plan de conservation.
    Votre temps de parole est expiré. Souhaitez-vous traiter de ces aspects durant la période de questions?
    Certainement, je vous en remercie.
    Merci.
    Nous allons à présent entendre la Newfoundland and Labrador Wildlife Federation. Vous disposez de 10 minutes.
    Je m'appelle Ward Samson, président sortant de la Newfoundland and Labrador Wildlife Federation, constituée en 1962. Nous sommes membres de la Fédération canadienne de la faune.
    Depuis de nombreuses années, nous demandons à bénéficier d'un accès égal et sans entraves à nos espaces extérieurs, à Terre-Neuve-et-Labrador. Nous sommes fermement convaincus que les chasseurs et les pêcheurs, hommes et femmes, doivent avoir accès à nos espaces extérieurs et en profiter.
    Nous pensons tout aussi fermement qu'il nous faut gérer notre faune de manière à ce que les générations futures puissent en profiter. Malheureusement, depuis les nombreuses années où nous nous inscrivons dans la réalité canadienne, ces ressources et ces libertés ont fait l'objet d'empiètements du fait des mandats imposés par les entreprises et par les groupes d'intérêts particuliers, qui n'ont cessé de dicter la politique gouvernementale, tant au niveau fédéral qu'au niveau provincial.
    En 1949, nous nous sommes joints au Canada, constituant ainsi sa 10e province. Auparavant, à trois occasions, nous nous étions prononcés contre. Le Canada souhaitait notre adhésion, mais nous y étions contraires. Cependant, en 1949, nous y avons adhéré par plébiscite. Permettez-moi de rappeler aux personnes ici présentes et au Canada tout entier que pendant plus de cinq siècles, la pêche a été la principale ressource alimentaire non seulement de Terre-Neuve mais du reste de l'Europe, de l'Amérique du Sud, de l'Amérique du Nord et des Caraïbes. Il a fallu attendre 1953 pour que soient véritablement constituées les pêches fédérales. De microscopiques qu'elles étaient, elles ont acquis une taille modeste au moment de la conclusion de l'accord entre le Canada et Terre-Neuve; mais il a fallu attendre les années 1970 pour que nous ayons une présence notable de ces pêches à Terre-Neuve.
    Comme vous le savez tous, en 1992 nous avons été confrontés à un moratoire sur la morue, c'est-à-dire qu'il n'y avait plus de poisson à pêcher. Le Canada a assuré la gestion de nos pêches en mer pendant 39 ans, tandis que nous, nous l'avions assurée pendant cinq siècles. Et après 39 ans de gestion, il ne restait plus rien: fini, balayé, plus de poisson à pêcher. Il arrive, de temps à autre, que nous attrapions quelques morues, cinq par jour, ni plus, ni moins.
    Comment le Canada s'y est-il pris pour détruire cette pêche qui appartenait aux Terre-Neuviens? Certains d'entre eux portent leur part de responsabilité, je le reconnais. Mais en 39 ans — pas 500 ans, pas 100 ans, rien que 39 ans — fini, plus de poisson. Bien sûr, il y a des montagnes de rapports qui sont là pour expliquer le pourquoi du comment, mais en définitive, tout cela se ramène à la mauvaise gestion d'une ressource par le gouvernement central du Canada et par les politiques du gouvernement de Terre-Neuve. Aujourd'hui, nous avons vraiment l'impression qu'avant de pouvoir attraper un poisson pour le manger, il nous faut passer par bien des fourches caudines du gouvernement fédéral.
    Il y a cinq ans environ, j'ai participé à une protestation qui s'est déroulée à l'échelle de la province. J'en ai réchappé, et toujours est-il que la licence n'est plus nécessaire. Nous pouvons attraper cinq poissons, mais nous ne sommes plus obligés de marquer les morues. En Nouvelle-Écosse, ils ont 11 mois. Alors que dites-vous de cinq semaines pour nous? Pourquoi cette disparité entre les provinces? Je ne comprends pas.
    En matière de développement durable, il nous faut prendre en compte les migrations des animaux et éviter que les gouvernements et les bureaucraties ne mettent en place des frontières artificielles.
(1110)
    Je ne crois pas que la morue soit consciente qu'elle est terre-neuvienne lorsqu'elle s'approche de la Nouvelle-Écosse. Est-ce qu'elle se dit: « Non, je ne peux pas franchir la frontière, je suis une morue de Terre-Neuve et je ne peux pas sortir de mon territoire »? Bien sûr que non.
    La gestion des ressources ne doit pas viser exclusivement le bien des poissons. Si l'on opte pour le développement durable, la gestion doit avoir pour objectif le bien de la population. La population veut être traitée de manière équitable et juste.
    Est-ce que nous vendons des tracteurs agricoles à d'autres pays en échange de quotas de pêche de la morue sur les Grands Bancs? Ils l'ont fait, peut-être pas votre gouvernement, mais ils l'ont fait.
    Est-ce que nous veillons à ce que les pays européens enclavés aient accès aux quotas de Terre-Neuve-et-Labrador? C'est ce qu'ils ont fait.
    Est-ce que nous insistons pour que les flottilles de pêche côtière à Terre-Neuve récoltent la morue dans les frayères en hiver? C'est ce qu'ils ont fait. Cinq de mes amis se sont noyés au large de la côte sud de Terre-Neuve en récoltant la morue en hiver. Ils se trouvaient dans les frayères parce qu'on leur avait dit: « Allez-y, les gars, c'est autant que les flottilles étrangères n'auront pas. »
    En fait, ils se sont retrouvés à patauger jusqu'aux genoux dans les oeufs et les larves de morue sur le pont du chalutier, parce que c'étaient des poissons trop petits, alors on pelletait pour les rejeter à la mer, morts entretemps, car ainsi le veut le marché, pas de conservation.
    Est-ce que ce que je vous raconte là, ça s'appelle du développement durable d'une ressource? Bien sûr que non. Et pourtant c'est ce qui se passe, et c'est ce qui s'est passé à Terre-Neuve. Et à cause de la politique qu'avait appliquée le gouvernement, ils ont quitté leurs petites baies et leurs petites criques et ils sont partis vers l'Alberta, vers Fort McMurray. Et ils ne sont pas prêts de revenir. Ils sont partis pour de bon.
    Certes, nous avons géré le développement des pêches, mais pas le développement durable.
    Voilà ce que j'avais à dire pour la pêche à la morue.
    Je voudrais dire quelques mots à propos de Muskrat Falls. Vous avez peut-être entendu parler de Muskrat Falls et de Danny Williams.
    Donc, on a fait une proposition de développement pour Muskrat Falls. Il s'agit d'un câble électrique reliant Muskrat Falls à St. John's, qui devra traverser 586 rivières à saumon. Ce ne sont pas de grandes rivières, mais il y en a 586. Je ne sais pas où vont être placés les points de passage. J'ai essayé de me renseigner, mais ils ne savent pas. Ces petits cours d'eau et ces rivières sont des zones de frai pour le saumon. Alors, qui peut nous dire où le câble doit traverser ces cours d'eau? Personne ne le sait, apparemment.
    Le gouvernement provincial a obtenu la garantie d'un prêt du gouvernement fédéral de M. Stephen Harper pour Muskrat Falls, afin que le projet puisse aller de l'avant.
    Pour ma part, je n'ai connaissance d'aucune étude d'impact environnemental décrivant la façon dont ce couloir de passage de l'énergie affectera l'environnement. Mais nous savons que, outre les saumons qui viennent frayer dans ces 586 cours d'eau, il y a également les terrains de mise bas pour le caribou des bois.
    Permettez-moi de vous lire une citation du chef Seattle, qui a dit: « La terre, nous ne l'héritons pas de nos parents, nous l'empruntons à nos enfants. » Or, il semble que nous cherchons à exploiter la terre pour nous enrichir rapidement, quitte à la léguer complètement dévastée.
    Ce que j'essaie de dire, c'est que lorsque nous allons manger du poulet chez Poulet Frit Kentucky ou un hamburger au McDonald's, nous tendons à oublier que nous consommons la viande de ce qui était, auparavant, un animal vivant.
    Et lorsque nous partons à la chasse au phoque, il convient de préciser que nous ne tuons plus les blanchons, les bébés phoques. Cela fait des années que nous ne les tuons plus. J'aimerais tout de même que cela se sache, parce que les gens ne nous croient pas quand nous le leur disons, et je ne sais pas pourquoi.
(1115)
    Enfin, je voudrais dire quelques mots à propos d'un projet lié à l'énergie dont on nous parle en Colombie-Britannique. Pour ma part, j'ai plusieurs diplômes universitaires. Je pourrais aller dire aux gens de la Colombie-Britannique ce qu'ils devraient faire, mais il se trouve que je suis Terre-Neuvien. Alors, comment pourrais-je prétendre dicter à quelqu'un du nord de la Colombie-Britannique ce qu'il doit faire? Ce n'est pas à moi de le lui dire, puisque je n'en sais rien.
    Nous devons gérer nos ressources renouvelables avec, à l'esprit, les générations futures afin qu'elles aient les mêmes avantages que nous. Nous devons essayer d'atténuer les dégâts causés à notre environnement afin de laisser, pour l'avenir, une empreinte aussi légère que possible. C'est vrai que ce sont les ressources non renouvelables qui nous enrichissent, mais ce sont les ressources renouvelables qui nous donnent la vie. Essayons de nous servir de ce critère pour nous guider et pour guider notre vie. C'est aussi simple que cela.
    Je vous remercie.
(1120)
    Merci, monsieur Samson.
    Et pour terminer, nous allons écouter la déclaration de M. Bondrup-Nielsen, de la Science and Management of Protected Areas Association.
    Je dois vous avouer que lorsque j'ai reçu l'invitation, je n'étais pas du tout enclin à y répondre. Et puis je me suis entretenu avec Martin Willison, membre comme moi de la Société pour la nature et les parcs du Canada (SNAP) qui a comparu voici quelques jours et il m'a convaincu de me présenter devant vous.
    Je suis universitaire, biologiste et écologiste dans le domaine de la population. J'enseigne la biologie de la conservation à l'Université Acadia, et cela depuis 23 ans. Étant donné que je fais de la recherche en matière de conservation, je dirai que c'est mon domaine de spécialisation.
    Je n'ai pas préparé d'exposé écrit. Si vous le souhaitez, je le ferai un peu plus tard, mais étant donné mes responsabilités comme chef du département de biologie, je dois avouer que j'ai été assez occupé.
    À titre de préambule, je dirai que lorsque j'inaugure mon cours de biologie de la conservation, je commence par citer des chiffres. Je suis né en 1951. En 1951, on comptait environ 2,5 milliards d'habitants sur la planète. En 1978, nous étions 5 milliards d'êtres humains, et nous avons récemment atteint la barre de 7 milliards. Si je vis jusqu'à l'âge de 85 ans environ, d'après les projections actuelles, la planète comptera 10 milliards d'habitants.
    Nous vivons une époque de croissance démographique sans précédent de la population humaine. Aucune autre génération n'assistera jamais à une telle progression de la population humaine dans le cadre d'une seule vie: deux doublements en une vie, la population passant de 2,55 milliards à 10 milliards d'habitants. Nous mettons notre planète à contribution de façon phénoménale. Je crois qu'il faut que nous examinions de près notre approche sur ce que nous sommes et la façon dont nous interagissons avec ce monde.
    Lorsque je parle de biologie de la conservation, j'évoque un autre sujet, que l'on appelait à l'époque la gestion de la faune, mais depuis Aldo Leopold, on a compris que la gestion de la faune, c'est en fait la gestion de l'humanité. En effet, la faune n'a pas besoin d'être gérée; à l'exception des êtres humains, aucune espèce n'a besoin d'être gérée; seuls les humains ont besoin d'être gérés.
    L'autre thème que j'aborde devant mes étudiants lorsque j'inaugure mon cours, c'est le paradigme actuel de la prévisibilité linéaire de la nature, qui a commencé à la fin du XVIIe siècle, lorsque l'espèce humaine s'est dissociée de la nature. Nous nous sommes aperçu que la technologie pouvait nous séparer de la nature et que, ce faisant, nous pouvions mettre à profit la technologie pour contrecarrer les différentes réactions de la nature à notre égard lorsque nous faisons des choses qui contreviennent à sa durabilité. Et nous continuons de croire à ce paradigme.
    C'est justement ce paradigme qui nous a amenés où nous en sommes aujourd'hui: la population de la planète, les richesses que certains d'entre nous — je veux dire un petit nombre d'entre nous — ont accumulées. En fait, 20 p. 100 de la population mondiale laissent une empreinte aussi large que profonde, tandis que les autres restent, pour ainsi dire, sur la pointe des pieds.
    Je crois que le moment est largement venu de comprendre ce que les physiciens nous disent aujourd'hui, eux qui nous parlent de mécanique quantique, d'imprévisibilité, de non-linéarité, de corrélations. Car tel est le paradigme du monde actuel, et il nous incombe d'aller dans ce sens.
    Notre système économique a évolué parallèlement à l'évolution de la science; en effet, c'est la science qui, en tant que source primordiale de technologie, nous permet d'utiliser nos ressources au-delà de ce qui est durable, jusqu'au moment où, du jour au lendemain, nous nous trouverons au fond du précipice… Le moment est venu, je crois, de comprendre que c'est notre système économique qui doit se soumettre au système de l'économie naturelle.
    Voilà pour mes considérations préliminaires, qui décrivent les hypothèses auxquelles nous obéissons.
(1125)
    Quel rôle devons-nous assigner à la conservation? Je crois que la conservation, cela ne se limite pas à la délimitation de quelques zones protégées parce que nous en avons les moyens, ou que nous pouvons nous permettre de nous préoccuper de quelques espèces rares et menacées d'extinction.
    Beaucoup de gens se demandent pourquoi nous devrions préserver des espèces rares et menacées d'extinction. Ils se disent: « Ces espèces sont rares, elles n'auront jamais un impact écologique important, justement à cause de leur rareté, alors pourquoi s'inquiéter de leur disparition? » La réponse, bien évidemment, c'est que la nature est en mutation constante, qu'elle s'adapte de façon dynamique et que les espèces rares d'aujourd'hui pourraient, dans l'avenir, devenir des espèces dominantes par suite de l'évolution des conditions.
    Se préoccuper de la biodiversité, ce n'est pas tout simplement réserver un certain nombre de zones protégées et se dire: « Bon, c'est réglé, maintenant que nous avons délimité les zones protégées qui vont préserver la biodiversité, nous pouvons aller exploiter à fond les secteurs dont nous tirons nos ressources. » À quoi je réponds que les zones protégées ne sont qu'une mesure de court terme de protection de la biodiversité.
    Ce qu'il nous faut, bien entendu, c'est adopter une éthique de la conservation qui s'applique à toutes nos activités. C'est cela que je veux dire lorsque je déclare que nous faisons partie intégrante de la nature.
    En fait, j'irais jusqu'à soutenir qu'une fois que nous ferons les choses comme il se doit, les zones protégées deviendront une chose caduque, car nous n'en aurons plus besoin; si nous veillons, partout, sur la totalité des espèces, les zones protégées destinées à préserver la biodiversité perdent leur raison d'être. Certes, il y a certaines zones protégées comme les parcs nationaux du Canada qui sont des endroits exceptionnels et où le spectacle de la nature est grandiose, mais ces parcs ne serviront jamais à conserver la biodiversité. Ils auront la fonction importante qui consiste à véritablement faire comprendre aux gens à quel point le Canada est un pays exceptionnel.
    Pour conclure — ou plutôt juste avant de conclure — je voudrais dire que nous, Nord-Américains, avons une attitude paradoxale. Je veux parler de nous, les Blancs d'Amérique du Nord, qui sommes venus comme visiteurs il y a longtemps et qui, souvent, oublions les Autochtones et leur vision des choses. Dans le reste du monde, en Europe, ce sont les Blancs qui sont les Autochtones. En Europe, ils se perçoivent comme intégrés à la nature. En Europe et ailleurs, les artefacts humains font partie de la nature alors que nous, Nord-Américains, nous tendons à établir une dichotomie entre l'homme et la nature. Nous pensons que la nature doit être libre de toute présence humaine, si bien que lorsque nous parlons de la nature sauvage de l'Amérique du Nord, c'est une notion qui tend à exclure les êtres humains. Je pense que c'est là une approche complètement erronée. Nous faisons partie intégrante de la nature, et même si nous nous considérons comme des visiteurs, c'est cela qui la rend encore plus précieuse, peut-être. Voilà pour le premier point.
    Pour conclure, donc, je voudrais dire quelques mots de Robert Costanza, qui est économiste de l'écologie. Constanza a élaboré quatre scénarios, mais je n'en ai gardé que trois en mémoire. Il y a, tout d'abord, l'approche Mad Max, qui correspond à ce que nous faisons en ce moment, c'est-à-dire extraire et exploiter les ressources à la cadence maximale et croiser les doigts. Et puis il y a le scénario Star Trek, selon lequel c'est la science qui viendra en fin de compte à notre secours, c'est-à-dire que nous serons toujours capables de trouver de nouvelles ressources, de nouvelles sources d'énergie, de nouveaux traitements pour les maladies, etc. Et puis, il y a l'approche basée sur le principe de précaution, à savoir que nous devons avancer pas à pas et nous montrer prudents, par exemple ne pas se contenter de fixer des quotas maximums de pêche et penser que tout ira bien; au contraire, nous devons prélever beaucoup moins et analyser la façon dont cela perturbe le système, et alors nous pourrons peut-être en prendre un peu plus; mais il faut toujours se montrer minimaliste, et non pas maximaliste, dans l'utilisation de nos ressources.
    Je vous remercie.
(1130)
    Merci beaucoup.
    Nous allons à présent passer aux questions-réponses.
    Je rappelle les questions qui correspondent au champ de l'étude à laquelle nous nous livrons aujourd'hui: quel doit être l'objet d'un plan de conservation national, quels doivent en être les objectifs et les principes directeurs, quelles priorités de conservation convient-il d'incorporer à un plan de conservation national, quelles priorités convient-il de retenir pour sa mise en oeuvre, et quelles doivent être les modalités du processus de consultation. Telle doit être la portée de notre étude. Notre mandat consiste, en tant que comité, à présenter au gouvernement un rapport sur l'établissement d'un plan de conservation national. Il vous est loisible, dans vos observations, de déborder ce cadre, mais alors vos commentaires ne seront pas vraiment utiles pour l'élaboration de notre rapport au gouvernement. Je vous demande de bien vouloir garder cela à l'esprit, et je m'adresse autant aux membres du comité qu'aux témoins.
    Permettez-moi de vous présenter notre comité, qui se compose de 12 membres du Comité permanent de l'environnement et du développement durable, dont six sont aujourd'hui présents devant vous. M. Woodworth et M. Lunney sont, tout comme moi, membres de la majorité gouvernementale. Et nous avons également M. Choquette et Mme Liu, membres du NDP, à savoir l'opposition officielle, et M. Eyking, du Parti libéral.
    Nous allons donc commencer la tournée de questions, en accordant sept minutes à chaque député.
    Monsieur Woodworth, vous avez la parole pour sept minutes.
    Merci beaucoup.
    Tout d'abord je tiens à remercier les témoins, et notamment ceux qui ont dû voyager pour arriver ici aujourd'hui. Nous vous saurons gré du temps et de l'effort que vous consacrez à cette audience et nous essaierons d'en tirer le maximum de profit.
    À ce propos, monsieur Coon, je me félicite que vous ayez rappelé les documents que vous nous présentez. C'est sans doute une omission de ma part, mais je ne me souviens pas d'avoir reçu les fiches synthétiques ni le rapport que vous avez évoqués émanant du groupe qui s'occupe des écosystèmes et de la diversité. Je vais donc demander à notre greffier si nous avons reçu, de M. Coon, les documents en question. Pourriez-vous, s'il vous plaît, nous en répéter le titre, monsieur Coon?
    Un instant, s'il vous plaît.
    On m'informe que nous disposons d'un document, mais que ce n'est pas celui auquel s'est référé M. Coon.
    Très bien.
    Monsieur le président, si vous permettez, j'aimerais donner une précision.
    Nous avons reçu un document.
    Ce document, intitulé La biodiversité canadienne: état et tendances des écosystèmes en 2010, était lié à des audiences de comité, et je devais moi-même comparaître devant le comité qui tenait une audience sur les espèces envahissantes mais ma comparution a été annulée. J'ai néanmoins adressé le document dans les deux langues officielles au greffier. Peut-être se trouve-t-il dans l'une des boîtes correspondant à cette série d'audiences, et on pourrait sans doute l'en extraire et le distribuer.
    Je suis désolé de vous créer ce surcroît de travail, mais je n’en ai plus moi-même, et je ne crois pas qu’Environnement Canada en ait conservé.
    En tout cas le titre semble effectivement indiquer que le document porte sur la question que nous traitons aujourd’hui. Quoi qu’il en soit, cela a attiré mon attention et je vous remercie de l’avoir souligné. J’espère qu’il y aura coordination entre vous et le greffier. J’aimerais, tout au moins, pouvoir le parcourir et chercher à en extraire des éléments.
    Monsieur Burgess, pourriez-vous me préciser à nouveau vos fonctions?
    Je suis directeur général intérimaire, Politiques des programmes pour les écosystèmes pour le ministère des Pêches et des Océans, à Ottawa.
(1135)
    La politique des programmes d’écosystèmes, dites-vous. Vous me permettrez d’entrer un peu plus dans le détail, car je voudrais mieux comprendre votre ministère. Combien d’agents avez-vous sous votre responsabilité au sein du service de la politique des programmes d’écosystèmes?
    Je n’ai pas un chiffre précis, mais je dirais environ 35 personnes.
    Puis-je savoir à quelle date vous avez été engagé dans ce service?
    En novembre 2011.
    Il n’y a pas si longtemps, donc. J’avais espéré que vous nous auriez retracé l’historique de ce service.
    Est-ce que le chiffre de 35 agents représente un effectif maximum, minimum ou moyen au cours des cinq à dix dernières années? Êtes-vous en mesure de le préciser?
    Au cours des deux ou trois dernières années, le ministère a subi un certain nombre de restructurations, si bien que la configuration de notre groupe a été modifiée. C’est pourquoi de simples chiffres risqueraient de vous donner une image faussée. Cependant, je peux vous dire que le programme dont j’ai la responsabilité concerne les espèces en péril, la gestion des océans et la gestion de l’habitat des poissons. Quand à l’effectif de ces unités, je dirais qu’il est à peu près le même qu’il y a environ trois ans.
    Est-ce que la mise en oeuvre des programmes relatifs à la conservation et à la protection du saumon de l’Atlantique relève de votre mandat?
    Non, je n’ai pas de responsabilité en la matière.
    Très bien.
    Vous avez dit tout à l’heure que le MPO consacre environ 12 millions de dollars par an à ce problème particulier. Est-ce que vous pourriez nous en dire davantage?
    Non, désolé, cela ne fait pas partie de mon domaine.
    D’accord.
    Votre responsabilité porte donc sur l’ensemble du Canada, et pas simplement une côte ou l’autre du pays.
    Ma responsabilité consiste à élaborer des instruments réglementaires, de politiques et opérationnels afin de faciliter la mise en oeuvre des programmes sur le terrain.
    Dans le cadre de ces activités, vous arrive-t-il de passer en revue le nombre d’agents du MPO que l’on pourrait considérer comme du personnel de soutien technique?
    À ma connaissance, nous n’avons pas effectué d’étude spécifique sur cet aspect. Cependant, le ministère dispose sans aucun doute d’informations concernant le nombre de biologistes, de scientifiques et d’agents d’autres catégories répartis à travers le pays.
    Vous avez parlé de restructuration. Pouvez-vous me dire depuis combien de temps existe votre service, celui de la politique des programmes d’écosystèmes?
    Depuis environ deux ans.
    Deux ans. Pouvez-vous me dire quelles sont les raisons qui ont présidé à la décision de constituer ce service, il y a deux ans?
    Mes propos se fondent sur l’information qu’on m’a communiquée. Je n’étais pas présent à la réunion. Le ministère visait essentiellement à fusionner ses fonctions opérationnelles et politiques pour développer une certaine synergie. Il y avait notamment quelques fonctions politiques secondaires réparties dans différentes sections opérationnelles du ministère. Je pense qu’on souhaitait favoriser une plus grande synergie et plus d’efficacité par le regroupement de ces fonctions opérationnelles et politiques.
    Comment évaluez-vous les résultats? Quelles ont été vos réalisations au cours des deux dernières années?
    Je ne peux parler que pour les six derniers mois, mais je peux dire que nous collaborons très étroitement avec les collègues chargés des politiques relatives à la gestion des pêches, aux affaires autochtones, à la gestion de l’aquaculture et ainsi de suite.
    Je pense que nous pouvons ainsi mieux comprendre les enjeux et les priorités des autres programmes, sans être cantonnés dans un seul domaine tel que l’habitat, les océans ou les espèces en péril.
(1140)
    Merci beaucoup.
    Monsieur Choquette.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci aux témoins.
    Ma première question s'adresse à M. Coon. J'ai beaucoup de questions, mais je vais y aller rapidement. Tout à l'heure, j'ai posé une question à M. Hutchings au sujet des objectifs.

[Traduction]

    Monsieur Choquette, nous éprouvons des difficultés techniques. Je vous demanderais de recommencer au début.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Ma question s'adresse à M. Coon et concerne les objectifs. J'ai parlé tout à l'heure avec M. Hutchings. Je lui ai demandé quels devraient être les objectifs du plan de conservation national. Ces objectifs devraient-ils être ceux d'Aichi? On a signé les ententes d'Aichi, qui sont quand même ambitieuses. Il a dit qu'il était difficile de savoir s'ils étaient réalisables ou pas.
    Vu qu'on a signé ces ententes, on devrait avoir des objectifs ambitieux. Reconnaissez-vous qu'on devrait s'inspirer des objectifs de l'entente d'Aichi?
    Merci, monsieur Choquette. C'est une longue question. Il vaut mieux que je réponde en anglais.

[Traduction]

    Si j’ai bien compris votre question, j’ai majoré les objectifs d’Aichi parce que j’estime qu’ils orientent les priorités que devrait comporter un plan national de conservation. Les gouvernements fédéral et provinciaux ont déjà commencé à les adapter à la réalité canadienne, pour chaque province. Il est regrettable que nous n’ayons pas eu de discussion au niveau régional à ce stade, et il ne semble pas qu’il y en aura une. Ici dans notre région, nous comptons cinq provinces bien sûr. Il y a des provinces maritimes, Terre-Neuve et le Québec. Nous partageons des écosystèmes, particulièrement avec la Gaspésie et la Baie-des-Chaleurs, entre le Nouveau-Brunswick et le Québec, de même qu’entre les Îles-de-la-Madeleine et le golfe du Saint-Laurent. Je pense que nous avons besoin de discuter.

[Français]

    Merci.
    En ce qui concerne votre idée d'avoir une législation plus rigoureuse, vous avez mentionné l'importance de certains pays qui ont déjà fait des efforts, comme l'Australie, la Norvège. Leurs lois sur la protection de l'environnement sont plus strictes que celles qu'on a ici.
    Donnez-moi des exemples de lois canadiennes existantes qu'on devrait renforcer. Ou devrait-on plutôt élaborer une toute nouvelle loi qui permettrait d'avoir une protection, qui permettrait la réalisation d'un plan de conservation national?
    Nous avons une nouvelle loi, bien sûr.

[Traduction]

    La législation actuelle ne prévoit pas d’approche globale pour la protection et la conservation des écosystèmes, ni pour des fins durables. C’est pourquoi il a été souvent question de l’Australie et de la Norvège; ce sont les seuls pays qui à notre connaissance se sont dotés d’une loi omnibus assurant un cadre déterminant, soit un cadre juridique dans lequel les décisions gouvernementales sont prises en matière d’aménagements et ainsi de suite.
    Il y a donc une lacune. Chaque fois que nous en avons parlé avec les députés au fil des ans, la réaction a généralement été: que devrions-nous faire? Je pense que les deux lois méritent d’être étudiées pour nous guider dans la recherche de solutions. Vous êtes législateurs, vous créez des lois. Voici donc de bons exemples de lois à prendre en considération.
    Certains pays ont adopté une autre approche en consacrant les droits de la nature dans leur constitution, comme la Bolivie et l’Équateur. Ces derniers ont présenté leurs idées en ce sens aux Nations Unies en 2010. La polémique se poursuit. C’est une autre approche controversée, quoique intéressante.
(1145)

[Français]

    Merci beaucoup.
    Comme on le sait, la législation a été un peu affaiblie au cours des derniers mois en matière d'évaluation environnementale, notamment la loi qui traite de l'habitat du poisson. Beaucoup de témoins ont dit qu'il faudrait adopter une approche holistique, globale, et bien préciser les effets cumulatifs.
     Croyez-vous que l'approche holistique et l'étude des effets cumulatifs devraient faire partie d'éventuelles dispositions législatives?

[Traduction]

    Si j’ai bien compris, c’est là le but de la législation, c’est-à-dire qu’elle comporte une approche globale consacrée dans la loi. Ce n’est pas normatif, mais elle renferme un cadre législatif au sein duquel le gouvernement peut mener ses affaires, compte tenu du fait que nous faisons partie de la nature, tout comme notre économie. Or, nous n’avons pas le cadre législatif pour ce faire et pour guider la prise de décisions du gouvernement dans le respect de ces éléments.

[Français]

    Merci.
    Ma question s'adresse à M. Burgess.
     Récemment, à Pêches et Océans Canada, 55 emplois ont été abolis dans le domaine de l'écotoxicologie. Je pense que c'est un domaine qu'il serait très important de conserver s'il est question d'établir un plan national de conservation digne de ce nom.
     Savez-vous quels postes ont été abolis dans le domaine de l'écotoxicologie? Ici, en Nouvelle-Écosse, il y a des pertes d'emplois à Pêches et Océans Canada. Or les gens nous ont dit qu'ils avaient besoin de ces services. Hier, à la rivière Sackville, des gens nous ont dit que le soutien des scientifiques de Pêches et Océans Canada leur était vraiment nécessaire. Est-ce que vous connaissez bien ce programme? Pouvez-vous nous en parler un peu?

[Traduction]

    Je regrette mais votre temps est écoulé; il y aura peut-être d’autres occasions de répondre à la question.
    Monsieur Lunney, vous avez sept minutes.
    Ne touchez pas aux microphones; laissez le technicien le faire. Personne ne devrait toucher aux micros.
    Je remercie tous les témoins pour leur apport à une discussion importante.
    Certains de vos propos étaient fort intéressants, mais permettez-moi de commencer par nos amis de Terre-Neuve, qui ont fait le plus long trajet pour venir ici.
    Monsieur Samson, merci de comparaître aujourd’hui.
    Vous avez fait quelques observations au sujet de la pêche à la morue. Nous avions un défi à relever — et je déroge un peu du sujet, mais je vais le mentionner — concernant les parties protubérantes des Grands Bancs qui s’étendent au-delà de la limite de 200 milles. Nous avons déployé des efforts auprès de l’OPANO pour les contrôler, et nous espérons que cela fait la différence.
    Vous avez fait un commentaire sur les blanchons et l’industrie de la chasse au phoque. Vous avez aussi mentionné la Colombie-Britannique. En tant que Canadien de l’Atlantique, vous ne voudriez sans doute pas que la Colombie-Britannique vous dise comment gérer vos affaires.
    À titre de député de la côte Ouest de l’île de Vancouver, j’ai eu l’occasion d’aller en Europe. Il y avait des parlementaires de l’Union européenne et des pays de l’Arctique Nord. J’ai soulevé la question de la chasse au phoque, au cas où ils voudraient en discuter — nous en saisirons l’OMC et ainsi de suite — ce qui a provoqué une discussion assez intéressante à la conférence.
    J’ai avancé l’argument que c’est une activité viable — appuyée par la Fédération mondiale de la faune entre autres — qui fait vivre la population des collectivités rurales et éloignées. Il n’est pas question de conservation, mais la question demeure complexe et elle provoque beaucoup d’émotion. Abattre n’importe quoi, comme vous le dites, n’est pas très joli.
    Je vais parler de cet exemple, et inviter votre voisin de table, M. Soren Bondrup-Nielsen, à prendre la parole.
    Vous avez mentionné que si nous nous exécutons comme il se doit, gérer la faune ne devrait pas être problématique. J’aimerais poser une question au sujet des loups, qui sont un danger public. C’est un problème dans certaines régions du Canada. C’est certainement le cas dans l’île de Vancouver. Bon sang que ces animaux sont imposants. J’en ai rencontré un récemment.
    Si des loups présentent un danger public, ou dans le cas soulevé par M. Samson ici — et vous voudrez peut-être commenter tous les deux — n’y a-t-il pas un endroit où la prédation d’une espèce en voie de rétablissement présente un problème, où la gestion de la faune dans ce contexte doit d’une façon ou une autre faire partie d’un plan national de conservation?
(1150)
    Tout à fait, et j’espère ne pas avoir laissé entendre que ce n’était pas le cas dans mes remarques générales.
    En fait, votre question est très pertinente. Je fais partie d’une étude en ce moment sur les coyotes dans le parc national des Hautes-Terres-du-Cap-Breton, où malheureusement une personne a péri aux prises avec un coyote. Les autorités du parc ont, je pense, agi de façon intelligente en s’efforçant d’être proactives et amorcé une étude. L’un de mes étudiants s’est rendu sur place pour se pencher sur la situation et l’approche est très globale. L’étude du comportement humain est un aspect très important de cette approche. Ainsi, selon les textes historiques de toute l’Amérique du Nord, il n’y a eu que deux cas où des coyotes ont tué une personne: une en Californie et l’autre, malheureusement, ici en Nouvelle-Écosse.
    Il ne fait pas de doute que c’est un problème grave. Je dois encore préciser toutefois que la gestion de la faune est synonyme de gestion de l’humain. Les parcs nationaux existent pour que les gens viennent observer la nature, et ces derniers veulent s’approcher des animaux sauvages. Il est dommage que bien des gens, selon ce que nous ont révélé des entrevues données par un chercheur de Terre-Neuve, nourrissent les coyotes. Si vous donnez à manger à n’importe quel animal… un écureuil roux vous attaquera si vous cessez de le nourrir. Il est donc très important de sensibiliser le public afin qu’il comprenne ce problème.
    Ce sont des prédateurs et les humains peuvent aussi être des proies, comme vous l’avez mentionné, pour les loups et couguars de la Colombie-Britannique. Effectivement, il y a cet aspect, mais ce n’est qu’un aspect infime de la gestion de la faune et de la conservation qu’il faudrait aborder.
    Non, je comprends, mais en outre s’il est question de prédation, parlons des loups qui attaquent les cerfs, dont certaines espèces sont en péril à cause des meutes de loups.
    Ou encore du rétablissement des stocks de morue; vu le nombre de phoques qui, comme le signalait M. Samson, mangent environ une tonne de poissons par an… C’est huit livres par jour, ce qui donne à peu près une tonne par an par phoque. S’ils amenaient le poisson sur la grève et le partageaient avec les autres, ce ne serait pas aussi problématique.
    Ne pensez-vous pas qu’il y a lieu de venir en aide à une espèce qui est la proie d’une autre espèce?
    Eh bien, vous devez savoir que l’espèce menacée est souvent en péril pour d’autres raisons. Le cas échéant, en plus de prédateurs affamés, alors oui, le nombre peut diminuer. Dans notre domaine, nous parlons de vortex d’extinction. Une fois qu’une espèce devient très rare, tous ces facteurs se conjuguent pour la pousser vers ce vortex. À ce stade, il faut absolument être très proactifs.
    Par contre, il ne faut jamais présumer que les interactions sont très linéaires dans la nature. Le réseau trophique de l’océan Atlantique est incroyablement complexe. Il y a effectivement de la morue et des phoques, et les phoques consomment de la morue et d’autres types de poisson. On ne peut donc pas affirmer simplement que la diminution du nombre de phoques fera augmenter le nombre de morues, en raison justement de ce réseau très complexe, interactif et interconnecté. Une vue globale de l’écosystème dans son ensemble est celle qu’il faut adopter je pense.
    Certainement, lorsqu’une vie humaine est en danger, il faudrait probablement prendre des mesures particulières. Les coyotes du Cap-Breton doivent apprendre que les humains ne sont pas leur nourriture, même s’ils apportent de la nourriture, et les humains doivent apprendre qu’ils ne devraient pas nourrir les coyotes.
(1155)
    Monsieur Lunney, votre temps est écoulé.
    Monsieur Eyking.
    Merci, monsieur le président.
    Merci d’être venus, messieurs.
    Durant notre tournée hier, et après avoir entendu nos témoins ce matin, nous avons bien noté que la réduction du soutien scientifique et technique fera du tort aux personnes sur le terrain, qu’ils soient pêcheurs, gestionnaires ou agents de protection de la faune marine.
    Le licenciement par le gouvernement fédéral de M. Ken Lee, expert en nettoyage et prévention de déversements de pétrole, fait la manchette des journaux aujourd’hui.
    On a bien remarqué que les compressions au MPO seront pas mal brutales dans les Maritimes.
    Ma question je suppose est la suivante: Quels problèmes allez-vous éprouver face à autant de réductions de personnel chargé de la surveillance et des analyses? Comment ces réductions vont-elles diminuer le travail des écologistes ou des personnes sur le terrain qui s’efforcent de faire leur travail?
    C’est ma première question et je l’adresse à vous tous. Je vous demanderais de répondre brièvement, car j’ai une autre question.
    Vous pourriez peut-être commencer, monsieur Burgess, par me dire quelle sera l’ampleur des compressions dans les Maritimes. Vous devriez le savoir je pense.
    Je vous demande pardon, mais je n’ai pas les chiffres précis concernant les réductions dans les Maritimes. Ce n’est pas de mon ressort.
    Merci.
    Monsieur Samson, voulez-vous répondre à la question?
    La question semble porter sur la manière dont nous gérons les choses, soit au bénéfice des humains. Nous oublions que nous devons gérer au bénéfice des espèces.
    Un humain est un humain. Ce monsieur a dit que la population augmente de façon exponentielle et nous n’avons toujours pas réussi à gérer au bénéfice des espèces. Il y a toutes sortes d’organisations qui nous disent que telle ou telle chose fonctionne, ou que telle chose va de pair avec autre chose.
    Nous devons gérer au bénéfice des espèces, et on ne le fait pas… Vous avez une frontière...
    On ne peut pas gérer une espèce à moins d’avoir les données scientifiques et techniques à l’appui.
    Oui, je suis d’accord, mais on ne peut pas non plus gérer une espèce. Nous sommes dans un système qui a des limites. Il faut gérer l’espèce entière. On ne peut gérer l’ours polaire en vase clos; il faut gérer les phoques annelés, pas les phoques du Groenland, parce qu’on ne mange pas ces derniers.
    Ce que je m’efforce d’expliquer, c’est que nous devons gérer en fonction de petits indices limités; nous sommes l’objet d’ingérences politiques où on nous dit que nous devons gérer pour ceci et pour cela. Certains groupes d’intérêts nous donnent des ordres et il y a toutes sortes de groupes d’intérêt dans notre système qui affirment que nous devons gérer pour ceci.
    Je peux vous donner un exemple, et peut-être que je m’en prends à quelqu’un, je ne sais pas. J’expose peut-être le pot aux roses, mais prenons l’exemple du saumon et du principe de pêche et relâche. Nous devons gérer cela. Nous ne pouvons pas en assurer la surveillance. C’est impossible. Ce régime existe néanmoins et les saumons ne mangent pas en amont. Ils ne reprennent pas leur énergie qui, une fois disparue, n’est pas récupérable. Pourtant, nous devons dire que nous gérons sous ce régime pour conserver le saumon, c’est-à-dire par pêche et remise à l’eau.
    Moi, si j’attrape un poisson, je le mange. C’est ce que font les gens que je représente. Si nous tuons quelque chose, nous le mangeons. Je ne vais rien tuer sans le manger. C’est aussi simple que cela.
(1200)
    Avez-vous une réponse à ma première question?
    C’est très inquiétant cette baisse de soutien aux sciences par le gouvernement fédéral. Les exemples se multiplient. En voici un. Je suppose que les fonds prévus dans le budget actuel pour les projets futurs — pas pour les projets déjà amorcés, car il reste encore quelques années de travail à faire, mais les futurs travaux d’évaluation et d’analyses de l’état de nos écosystèmes — n’ont pas été versés, bien qu’ils aient été demandés.
    C’est un problème, effectivement, à bien des égards. Il faudrait user de bon sens dans notre stratégie scientifique pour tous les ministères au Canada, et je suppose que c’est ce qu’il nous faut à ce stade. Il faut user de bon sens.
    Il vous reste une minute et demie.
    D’accord, j’aurai seulement besoin de 60 secondes à la fin pour M. Samson.
    Allez-y, monsieur.
    J’aimerais répondre à cette question, car j’ai parlé plus tôt de mon étude des coyotes au parc national des Hautes-Terres-du-Cap-Breton.
    Les chercheurs avec qui je travaillais là-bas sont ceux qui ont perdu leur emploi à cause de la réduction du budget de Parcs Canada. Je ne sais plus de qui je relève exactement au parc national des Hautes-Terres-du-Cap-Breton, mais je trouve qu’il est bien malheureux que la réduction générale du budget de Parcs Canada ait entraîné l’abolition des postes de scientifiques spécialisés en espèces rares.
    L’étude continue, mais je ne sais pas où elle aboutira.
    Ma dernière question s’adresse à vous, monsieur Samson.
    Les gars que je représente chez moi, les vieux pêcheurs, disent qu’autrefois ils partaient en doris pêcher la morue à la turlutte. Ils affirment qu’ils ont cessé à cause des chalutiers de grande pêche, des chalutiers congélateurs. Avec leur sonar, ces chalutiers savent où se dirigent les poissons; ils en ont pris tellement que les stocks sont presque épuisés.
    Je vous demanderais donc si nous devrions interdire ces chalutiers sur les Grands Bancs et retourner à la pêche aux lignes?
    Je regrette mais il ne reste plus de temps; vous pourriez peut-être répondre par un oui ou par un non.
    Eh bien, je ne peux pas répondre par un oui ou un non à cette question.
    Les chalutiers raclent les fonds marins. Oui, vraiment. Les chalutiers terrassent le fond. Ce qui se trouve dans le chalut est attrapé et c’est essentiellement le marché qui détermine ce qui en sort. C’est aussi le marché qui décide ce que vous rejetez à l’eau.
    Un chalutier capture tout. On peut dire qu’une certaine technologie en laisse passer… Il existe quelque chose pour la crevette; on peut parfois faire des exceptions. Mais dans la plupart des cas, vous prenez ou jetez ce qu’il y a dans le filet.
    Merci beaucoup. Le temps est écoulé.
    Passons maintenant à Mme Liu. Vous avez cinq minutes.
    Je remercie les témoins d’être venus aujourd’hui.
    J’aimerais poursuivre dans le même sens que M. Choquette.
    Ma question s’adresse à M. Burgess, du MPO, au sujet des compressions budgétaires. Les organismes de conservation nous ont dit qu’ils n’ont pas les experts dont ils ont besoin pour leurs activités à cause des compressions au MPO, parce qu’il n’y a plus de scientifiques ou de techniciens sur le terrain pour leur dire quoi faire et comment faire. Vous avez mentionné qu’il n’y a pas d’experts uniquement au MPO, ce qui est vrai, mais il semble que le ministère offre le savoir et le soutien essentiels à ces personnes sur place. Pourriez-vous nous parler des autres effets, ou avez-vous observé ce phénomène sur le terrain également?
(1205)
    En ce qui concerne l’utilisation des ressources ministérielles, nous nous attachons beaucoup à nos priorités. La priorité primordiale du ministère est de s’acquitter de ses obligations législatives et réglementaires, et de se doter des ressources scientifiques nécessaires. Nous reconnaissons toutefois qu’il y a beaucoup d’experts à l’extérieur du ministère, tant dans les administrations provinciales qu’au sein des groupes de conservation, si bien que nous y faisons appel. Je pense que nous pouvons tous collaborer pour réaliser nos objectifs.
    Certains amendements à la Loi sur les pêches ont été proposés, dont le but est notamment de faire en sorte que le ministère concentre ses activités sur son mandat primordial. En outre, nous reconnaissons qu’il faut avoir des partenaires pour réaliser nos objectifs de conservation. Certains amendements facilitent la conclusion d’accords, de partenariats et d’arrangements, financiers notamment, avec des tierces parties pour offrir certains éléments du programme. Je crois que le ministère commence à travailler de plus près avec les partenaires qui partagent son intérêt pour le poisson et son habitat.
    Monsieur Samson, le message que fait passer votre exposé est que nous devrions parler de personnes, que notre stratégie devrait être axée sur les gens, donc gérer les personnes au lieu des espèces. C’est une façon fort intéressante de voir les choses.
    Diriez-vous que le développement durable devrait être un principe directeur du PCN?
    Je dirais que oui.
    Monsieur Bondrup-Nielsen, vous avez aussi parlé du besoin de protéger les espèces rares et en péril, et M. Burgess a fait remarquer les modifications apportées à la Loi sur les pêches. Pensez-vous que l’élaboration d’un PCN devrait mettre l’accent sur l’habitat, ou devrions-nous nous intéresser davantage aux espèces en demande à des fins commerciales et autres, vu ce que vous avez dit au sujet de la protection des espèces en voie de disparition?
    On ne peut pas seulement protéger une petite partie et pas le reste. Il faut que ce soit l’habitat. Si nous protégeons une espèce, nous le faisons en protégeant l’habitat et les éléments qui ont un effet sur ce dernier. Alors, oui, il est question de l’habitat mais aussi des espèces.
    Ce que j’aimerais faire comprendre, c’est qu’on ne peut pas cibler seulement certaines parties précises du système. Il faut voir le système dans son ensemble, pas seulement certains éléments en pensant que tout le reste ira bien.
    J’aimerais poser une dernière question.
    Monsieur Coon, il y a dans notre boîte à outils aux fins de la conservation le Programme des dons écologiques d’Environnement Canada. C’est un moyen, mais que peut-on faire pour améliorer ce programme, s’il y a lieu?
    Je ne mettrais pas l’accent là-dessus vraiment, parce que lorsque nous pensons conservation au sens politique, nous sommes cantonnés dans deux choses: créer des terres protégées et s’efforcer de protéger les espèces en péril pour les empêcher de disparaître. Il nous faut repenser la politique publique sur la manière de maintenir la santé et l’intégrité des écosystèmes et rétablir ceux qui sont endommagés. C’est ici je pense qu’un cadre réglementaire serait utile. Je crois que nous devrions collaborer avec les provinces en ce sens.
    Je vous rappelle que nous avons résolu le problème des pluies acides. Je l’ai mentionné dans mon exposé. Nous avons réussi grâce au leadership du gouvernement fédéral quand deux différents partis ont été au pouvoir, ainsi qu’à la participation de six provinces et de la société civile. Nous avons réussi. Je ne vois pas comment on ne peut pas s’attaquer à ce problème, qui est énorme, de manière similaire. Il faut avoir la volonté politique. Il nous faut un peu de vision et de sagesse.
(1210)
    Merci beaucoup. Votre temps est écoulé.
    Puis-je faire un rappel au Règlement?
    Certainement.
    Étant donné qu’il y a eu des difficultés techniques durant la réunion de notre comité aujourd’hui, ce qui a réduit le temps accordé pour les questions durant cette ronde, je me demandais si le comité accepterait de prolonger la réunion de cinq minutes pour permettre à une autre personne de poser une question.
    Ce n’est pas vraiment un rappel au règlement. Nous sommes à l’heure et tout va bien.
    M. Woodworth est le prochain. Allez-y.
    Merci, monsieur le président.
    Messieurs, je sais que vous êtes tous conscients du fait que ce n’est pas une question qui peut être traitée de manière simpliste. Il y a beaucoup de facteurs interconnectés à prendre en considération. Durant la dernière ronde de questions, j’ai mentionné une vingtaine de choses que fait le ministère de l’Environnement. Quelqu’un a dit que c’est un gros morceau et j’ai répondu par l’affirmative, comme quoi ce sont les instructions qu’on nous a demandé d’exécuter.
    J’ai noté les éléments qui ont uniquement trait à la conservation. Je vais vous lire la liste et vous demander si j’ai omis quelque chose d’abord. Ensuite, quelles seraient vos trois principales priorités, vu que nous ne pouvons pas tout faire, du moins pas tout en même temps?
    Dans le domaine de la conservation, nous assurons le respect des lois contre la déprédation par les humains et des zones protégées ont été établies. Il y a la recherche fondamentale et la recherche appliquée. Nous avons fourni du personnel de soutien pour les efforts de conservation, l’évaluation de projets et les consultations publiques en matière de conservation. Il y a des efforts de sensibilisation, la protection de certaines espèces et les efforts fournis pour l’adaptation aux changements climatiques. On nous a parlé d’écotoxicologie ce matin. Il y a le financement des groupes de conservation, de même que les incitatifs et programmes d’intendance. Voilà ce que j’ai sur ma liste jusqu’à présent.
    Monsieur Coon, nous pourrions commencer par vous. Qu’est-ce que j’ai omis, et quelles seraient vos trois priorités dans cette liste?
    Comme je l’ai mentionné dans mon texte, mon optique serait tout à fait différente. Tout comme nous avons besoin d’être axés sur l’écosystème pour l’aménagement et les approbations au pays, il faut avoir la même approche pour l’organisation du gouvernement dans ce domaine. Si nous nous dotons d’un plan de conservation national, il faudra remanier le cadre structurel de l’administration fédérale. J’entrevois donc des réformes considérables dans les structures d’Environnement Canada, ainsi qu’un arrangement institutionnel qui permettrait une bonne collaboration interministérielle. C’est sans doute quelque chose qui serait greffé au siège du gouvernement.
    Je regarderais la situation d’un œil neuf et dirais que si notre but est vraiment — si c’est ce que décidait le comité — de protéger l’intégrité et la résistance des écosystèmes partout au pays, et rétablir ceux qui ont été préjudiciés, il nous faut une capacité institutionnelle pour ce faire. Ce n’est pas ainsi que le gouvernement fédéral ou les gouvernements provinciaux sont organisés en ce moment.
    Ce serait donc votre priorité numéro un, je suppose. Merci.
    Monsieur Burgess, avez-vous des commentaires sur ce que j’ai dit?
    Oui, merci. Je ferais état de trois domaines, qui ne sont pas nécessairement sur votre liste.
    D’abord, un plan de conservation efficace doit être multidisciplinaire. Il doit non seulement tenir compte des sciences, qu’elles soient fondamentales ou appliquées, mais également des facteurs socio-économiques. Je pense qu’il doit comprendre les connaissances écologiques, les connaissances traditionnelles des Autochtones et ainsi de suite. Je pense qu’il doit s’appuyer sur des fondements élargis.
    Je pense aussi qu’il faut adopter une approche axée sur les risques. Il est très difficile de tout faire, vu les ressources et les connaissances, etc. dont nous disposons. Je pense qu’il faut se concentrer sur les priorités et il faut décider ce qu’elles seront. Il nous faut être clairs et transparents dans ce processus.
    Enfin, notre approche doit être globale. Je pense que d’autres en ont déjà parlé, c’est-à-dire une approche axée sur les écosystèmes dont les buts et objectifs sont nettement définis. Ceci est particulièrement important afin que nous puissions savoir si nous avons fait des progrès plus tard, pour s’assurer que les Canadiens comprennent comment ces progrès se déroulent et si nous atteignons vraiment nos objectifs.
(1215)
    Merci.
    Est-ce que je peux passer à quelqu’un d’autre, monsieur King? Vous semblez partager l’avis de M. Burgess.
    Monsieur Samson.
    Vous m’avez demandé d’énumérer mes trois principales priorités.
    D’abord, ai-je oublié quelque chose? Et sur quoi devrions-nous nous concentrer? J’ai mentionné trois comme...
    En même temps, nous faisons face à...
    À l’ordre. Le temps est écoulé; veuillez donc donner une réponse courte.
    D’accord.
    Ce que j’essaie d’expliquer essentiellement, c’est qu’on ne peut pas compartimenter les choses. Nous devons gérer tout le système, et ce ne sera pas facile. Si vous commencez par fixer trois priorités, c’est ce qui sera géré et autre chose serait négligée. Il faut avoir une vue globale. Je pense qu’il faut œuvrer de concert avec les États-Unis. Nous devons envisager tout le système nord-américain. On ne peut seulement gérer les coyotes au Cap-Breton, ou le caribou et les ours polaires dans les territoires du Nord, etc. Il faut gérer le système intégralement. Si vous instituez une interdiction pour la chasse, vous la compartimentez. Vous la placez dans un petit compartiment et dites voilà un joli petit parc, mais vous ne gérez pas la faune, vous ne gérez que des personnes.
    Merci beaucoup.
    Je remercie tous les témoins d’avoir pris le temps de se joindre à nous aujourd’hui. Nous sommes vraiment reconnaissants que vous ayez partagé vos connaissances avec nous.
    Chers collègues, nous allons nous arrêter. Nous reprendrons à 13 h 30.
    La séance est levée.
(1215)

(1330)
    À l’ordre.
    Je souhaite la bienvenue aux témoins pour la 38e réunion du Comité permanent sur l’environnement et le développement durable en vue de l’élaboration d’un plan national de conservation. Ce sera le dernier groupe de témoins qu’entendra le comité avant de se réunir pour rédiger un rapport. Nous sommes privilégiés d’accueillir chacun d’entre vous pendant que nous nous apprêtons à conclure notre étude de ce sujet important.
    Nous allons commencer par l’Alliance des organismes de conservation du Canada. Madame Margo Sheppard, vous avez la parole.
    Bon après-midi. Je m'appelle Margo Sheppard et je suis la présidente bénévole du conseil d'administration de l'Alliance des organismes de conservation du Canada. Je suis une planificatrice environnementaliste ayant l'expérience du secteur public et depuis 14 ans, je suis la directrice administrative d'une fiducie foncière du Nouveau-Brunswick qui s'appelle la Fondation pour la protection des sites naturels du Nouveau-Brunswick.
    Je vous remercie infiniment de nous permettre de vous parler d'une chose fondamentale pour l'identité de notre pays, notre patrimoine naturel. L'Alliance des organismes de conservation du Canada, que je vais désigner comme l'ADOCC, représente plus de 55 fiducies foncières réparties aux quatre coins du pays.
    Pour ceux d'entre vous qui l'ignorent peut-être, une fiducie financière est un organisme caritatif sans but lucratif ayant notamment comme principaux objectifs la protection et la gestion à long terme des zones écologiquement vulnérables pour la préservation de la nature et dans l'intérêt public. Les fiducies foncières membres de l'ADOCC sont appuyées par un réseau de plus de 200 000 membres et donateurs et plus de 20 000 bénévoles. Elles ont collectivement protégé plus de 6,3 millions d’acres de terres, qui contribuent à la diversité des paysages naturels du Canada.
    Les fiducies foncières membres de l'ADOCC ont fait beaucoup d'efforts au fil des ans pour obtenir l'appui des citoyens et des propriétaires fonciers du Canada en formulant et en adoptant leurs Normes et pratiques des fiducies foncières canadiennes. Les fiducies foncières ont démontré leur engagement à appliquer des normes techniques et éthiques élevées dans l'exécution de leurs activités et à apporter des améliorations continues. Les donateurs de terres apprécient cet engagement.
    Au Canada, au cours du dernier siècle, les gouvernements ont créé un impressionnant système de parcs nationaux et provinciaux ainsi que de réserves fauniques. Malgré cela, ces terres publiques qui représentent moins de 10 p. 100 de l'ensemble des terres du Canada, ne suffisent pas à protéger notre eau, notre faune et notre flore et nos écosystèmes fragiles des effets de l'activité humaine et industrielle, surtout à l’intérieur ou près des régions peuplées du sud du pays, particulièrement en cette période de changements climatiques.
    Nous ne pouvons plus compter uniquement sur des terres publiques pour respecter les engagements internationaux de notre pays sur le plan de la conservation. Cela veut dire que les biens fonciers privés — conservés grâce au travail des fiducies foncières, mais qui sont gérés dans l'intérêt public — revêtent davantage d'importance. Les gens ont besoin d'aires naturelles et de grands espaces près de l'endroit où ils vivent. Au Canada, 150 000 acres de milieux humides, de terres boisées et de terres agricoles sont perdus chaque année au profit du développement économique. Plus la population augmente, particulièrement dans le sud du Canada, là où la diversité biologique est la plus importante, plus il importe d'assurer la conservation de nos bassins hydrographiques et de nos milieux naturels pour assurer la résilience de nos collectivités.
    Les mesures de protection devront être intensifiées de façon spectaculaire, sans quoi de nombreuses ressources terrestres et hydrographiques seront perdues ou dégradées en raison du développement ou de l'étalement urbain improvisé. Les propriétaires fonciers en manque d'argent sont de plus en plus nombreux à faire don de leurs terres à des organismes de conservation. Ce type de transfert offre aux organismes de conservation une excellente occasion d'achever le réseau de parcs et de réserves fauniques. Nous sommes prêts à le faire en collaboration avec le gouvernement.
    Nous félicitons le gouvernement fédéral de déployer des efforts en vue de l'élaboration d'un plan de conservation national tourné vers l'avenir et de participer davantage à la protection des paysages naturels du Canada. L'ADOCC aimerait présenter au comité les trois recommandations suivantes:
    Premièrement, nous préconisons l'établissement d'un fonds de dotation d'intendance à coûts partagés auquel les organismes de conservation auraient accès pour veiller à ce que les terres protégées soient gérées et entretenues à perpétuité. Ce fonds fonctionnerait dans le cadre d'un partenariat public-privé pour permettre aux intendants, c'est-à-dire aux fiducies foncières et à leurs partenaires, d'assurer une gestion efficace et à long terme des aires de conservation.
    Deuxièmement, nous recommandons que le plan de conservation national développe le travail accompli par les groupes de bénévoles communautaires et qu'il favorise leur travail en élaborant des plans de conservation communautaires qui tiennent compte des besoins de leur communauté locale.
(1335)
    L'ADOCC et ses partenaires ont reconnu qu'en incitant les fiducies foncières à faire une meilleure planification stratégique, ils les aideront à être mieux en mesure d'établir les priorités et de diriger les ressources vers la conservation des aires naturelles les plus sensibles, à relier les gens à la terre et à l'eau qui assurent leur subsistance et à faire comprendre le lien entre l'utilisation des terres et la qualité de l'eau ainsi que la quantité d'eau disponible.
    Nous avons travaillé dans ce but, avec nos partenaires des provinces, à une initiative pancanadienne de planification des bassins hydrographiques dirigée vers les fiducies foncières locales et régionales, pour atteindre quatre objectifs clés: assurer la conservation d'une plus grande partie des meilleures terres de la façon la plus efficace possible; établir le lien entre les gens et les milieux naturels et entre les terres faisant l'objet de mesures de conservation comme les corridors fauniques; soutenir le mouvement de conservation en améliorant sa stabilité financière, et en le rendant plus inclusif et mieux réseauté; et collaborer avec les propriétaires fonciers, les collectivités locales et les autres partenaires pour veiller à ce que les objectifs de conservation répondent aux besoins des personnes et des communautés.
    Si le comité décidait d'adopter un plan de conservation national ayant une composante pour la conservation de terres privées, l'ADOCC pourrait être un excellent intermédiaire, par exemple dans le cadre d'un programme visant à reconcéder des terres aux fiducies foncières pour atteindre les objectifs du gouvernement et de la collectivité.
    Troisièmement, nous invitons le gouvernement à reconnaître qu'en plus d'assurer la conservation et la protection des aires naturelles faisant partie des paysages utilisés, les organismes de conservation créent des emplois au Canada, principalement dans les régions rurales et les régions éloignées.
    Un rapport établi en 2010 pour le compte d'Environnement Canada compare les répercussions sur l'emploi des fonds de relance accordés pour l'infrastructure grise — par exemple, les canalisations, les patinoires et les routes — avec les effets de la restauration et de l'intendance écologiques, ce que nous appelons « l'infrastructure verte », qui sont les principales fonctions des fiducies foncières. Selon cette étude, pour chaque million de dollars consacré à l'infrastructure grise, trois emplois ont été créés. Par contre, chaque million dépensé pour la restauration et l'intendance écologiques a permis de créer 22 emplois.
    En résumé, la conservation est de plus en plus nécessaire, car les Canadiens ont de plus en plus d'inquiétudes au sujet de leurs ressources en eau et de leur territoire. Un plan de conservation national devrait viser à protéger les terres privées grâce à des partenariats stratégiques, une planification et l'acquisition de biens fonciers écologiquement sensibles. Il faudrait mettre l'accent sur les terres qui revêtent une importance cruciale pour la protection de la qualité de l'eau — les plaines inondables, les zones humides et le cours supérieur des rivières — de façon à accroître la résilience de nos écosystèmes. Le plan de conservation national devrait renforcer cette capacité, rétablir le lien entre les gens et la terre et aider à bâtir des collectivités durables.
    Les fiducies foncières membres de l'ADOCC ont beaucoup fait ces dernières années pour obtenir l'appui des citoyens et des propriétaires fonciers du Canada. Les réalisations collectives sont d'autant plus remarquables que la conservation de chaque acre résulte de mesures volontaires prises par des particuliers.
    L'ADOCC est heureuse de pouvoir présenter ces recommandations. Si elles sont mises en oeuvre, elles permettront aux fiducies foncières et aux propriétaires de terres naturelles importantes du Canada de placer un plus grand nombre de terres écologiquement sensibles sous une protection à long terme.
    Nous sommes résolus à oeuvrer avec le gouvernement du Canada et avec tous les parlementaires pour assurer la mise en oeuvre rapide et efficace des mesures proposées.
    Merci beaucoup.
    Merci, madame Sheppard.
    Nous allons maintenant entendre le Congrès des Peuples Autochtones. Nous avons le plaisir de recevoir aujourd'hui le chef national Lavallée et le vice-chef national Dorey.
    Merci de nous accueillir dans votre territoire traditionnel.
    Nous avons hâte d'entendre votre témoignage. Vous disposez de 10 minutes. Merci.
(1340)
    Bon après-midi, monsieur le président et membres du Comité permanent de l'environnement et du développement durable de la Chambre des communes.
    C'est pour moi un honneur d'être ici, dans le territoire du peuple Micmac, mon peuple, pour vous parler du plan de conservation national.
    Je suis une Micmac. Je suis également une Indienne inscrite en vertu de la Loi sur les Indiens, membre d'une bande indienne de la Nouvelle-Écosse. Je suis le chef national du Congrès des Peuples Autochtones ou CPA, qui est l'un des cinq organismes autochtones nationaux du Canada.
    Depuis 41 ans, nous défendons les droits et les intérêts des Indiens non inscrits et inscrits vivant hors des réserves et des Métis et Autochtones vivant dans les régions rurales, urbaines, éloignées et isolées de tout le Canada.
    Le congrès applaudit l'initiative courageuse qui a été prise en vue d'établir un plan de conservation national et souhaite que cela devienne une priorité nationale. Nous appuyons vivement ce plan important et nous désirons y participer à chaque étape.
    La préservation de notre biodiversité ne sera pas chose facile. L'engagement que le Canada a pris, à Aichi, de protéger 17 p. 100 de nos terres et 10 p. 100 de notre eau d'ici 2020, constitue un défi très important.
    J'ai l'intention, aujourd'hui, de proposer des réponses préliminaires aux six questions que le président a posées.
    Je vais commencer par l'objectif du plan de conservation national que j'appellerai le PCN. Le congrès appuie l'idée d'établir un PCN reposant sur les succès obtenus et reflétant une planification à long terme. Nous sommes pour l'élaboration et l'utilisation d'approches novatrices pour la conservation de nos écosystèmes terrestres, marins et d'eau douce. La promotion de la conservation et de la connaissance des espèces naturelles et des espèces dont dépendent notre environnement, notre santé et notre économie reflète la façon dont les Autochtones abordent l'environnement.
    Les peuples autochtones ont réussi à vivre en harmonie avec la Terre mère depuis l'origine des temps. La Terre mère et toutes les créatures qui y vivent représentent notre histoire, notre culture et notre identité en tant que peuples. Un lien sacré lie particulièrement les peuples autochtones et la Terre mère.
    Les peuples autochtones sont les peuples de la terre, comme vous. Un grand nombre d'entre nous vivent encore de la terre et de ses ressources et sont les intendants de la diversité biologique et culturelle. Nos droits, nos cultures, nos moyens de subsistance, nos connaissances traditionnelles et nos identités se fondent sur une relation profonde avec la terre, l'eau et les ressources.
    La grande promesse de l'ère industrielle était un progrès sans limite et sans fin. La relation de confiance des Autochtones avec l'environnement contraste vivement avec cette idéologie. Nous croyons que l'avenir des générations futures ne doit pas être compromis par les actes de la génération d'aujourd'hui. Nous croyons qu'il faut prévoir sept générations à l'avance et se demander si les décisions que nous prenons aujourd'hui seront bénéfiques pour nos descendants dans sept générations.
    De nombreux sages ont parlé de l'incapacité de l'être humain à réfléchir aux conséquences à long terme de ses actes. Certaines personnes croient que le changement échappe maintenant à tout contrôle et redoutent les risques que les nouvelles technologies industrielles représentent. Ce n'est pas mon cas. Nous conviendrons tous, je pense, qu'en ce qui concerne le PCN, c'est à notre génération qu'il revient de l'établir, de le partager et de l'entretenir.
    À notre avis, le PCN peut être un jalon important pour la conservation de la biodiversité du Canada et l'utilisation durable de nos ressources biologiques.
    Quels devraient être les objectifs de ce plan? Dans les grandes lignes, le congrès estime que le PCN doit s'accompagner d'objectifs audacieux et orientés vers l'action pour protéger, relier, restaurer et engager. Le congrès désire recommander ce qui suit: protéger et conserver la biodiversité et les écosystèmes du Canada; relier un réseau de vastes aires marines, d'eau douce et terrestres protégées; restaurer les écosystèmes endommagés et rétablir l'habitat des espèces en voie de disparition; faire comprendre aux Canadiens les avantages de la biodiversité et des services écosystémiques.
(1345)
    Les principes directeurs devraient préciser que les peuples autochtones souhaitent travailler en collaboration avec le gouvernement du Canada, les provinces et les territoires, à l'élaboration et à la mise en oeuvre du PCN. Le Congrès des Peuples Autochtones et les organismes qui y sont affiliés désirent travailler en collaboration avec le gouvernement fédéral, les provinces et les territoires pour atteindre les objectifs du PCN. En fait, le congrès a travaillé avec le ministère de l'Environnement au cours des 10 dernières années, ainsi qu'avec le ministère des Pêches et des Océans, pour former des conseils de gestion, pour établir la Loi sur les espèces en péril et en siégeant au CANEP.
    Le congrès voudrait recommander deux principes directeurs. Le premier est que les peuples autochtones ont un rôle essentiel à jouer dans la réalisation des buts et objectifs du plan. Le deuxième est que l'élaboration et la mise en oeuvre du PCN doivent tenir compte des connaissances traditionnelles des peuples autochtones.
    Quelles priorités de conservation faudrait-il inclure dans un PCN? En ce qui concerne les peuples autochtones, les changements climatiques menacent notre survie culturelle et sapent nos droits et nos intérêts ancestraux. Les changements climatiques et les effets des modifications de l'écosystème qui y sont associés doivent avoir une profonde influence sur l'élaboration et la mise en oeuvre du PCN. Une des pierres angulaires du plan doit être la prise en compte des espèces en péril. La race humaine a exterminé des espèces à un rythme alarmant et au Canada, le nombre d'espèces en voie de disparition augmente quotidiennement. Il y a actuellement 640 espèces en péril et la liste ne cesse de s'allonger.
    La perte de diversité est considérée comme un des plus graves problèmes environnementaux dans le monde. Le PCN doit en faire une priorité de conservation. Une deuxième priorité est l'inclusion des espèces exotiques envahissantes qui ont d'importantes conséquences environnementales, économiques, sociales et commerciales pour le Canada. Les espèces envahissantes représentent une menace pour un grand nombre des plantes médicinales qu'utilisent les peuples autochtones. La protection des systèmes aquatiques et terrestres du Canada contre les espèces exotiques envahissantes doit être assurée par l'entremise du PCN.
    Il y a d'importants défis à relever pour mettre en oeuvre le PCN et la plupart de ces défis évolueront au cours des années à venir. Parmi les priorités, il faudra arrêter la perte de la biodiversité et renforcer la résilience des écosystèmes; éduquer les Canadiens au sujet de la biodiversité; faire une surveillance et des rapports efficaces, y compris sur les progrès du PCN; atténuer les changements climatiques et établir et gérer un réseau complet d'aires protégées, terrestres et aquatiques.
    Le congrès désire l'établissement de cinq priorités de mise en oeuvre pour les peuples autochtones: la participation de tous les peuples autochtones à la conception, à la formulation et à la mise en oeuvre du PCN doit être pleine et entière; le PCN doit faire en sorte que les connaissances traditionnelles autochtones fassent partie intégrante des mesures de conservation; les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux doivent soutenir la participation des peuples autochtones à la mise en oeuvre du PCN; le PCN doit être en tous points conforme à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, la Convention sur la diversité biologique et tous les autres traités et accords de revendications territoriales actuellement en place et promouvoir leur mise en oeuvre; et le gouvernement fédéral doit soutenir la participation autochtone à la surveillance des changements dans l'habitat et des effets de la conservation.
    Quel processus de consultation le ministre devrait-il envisager pour la formulation du PCN? Ce que je vais dire n'a rien de nouveau. Le ministre a souvent entendu le même refrain. Chaque décision de la Couronne qui concerne les peuples autochtones ou qui aura des répercussions sur leurs intérêts lui confère l'obligation de nous consulter. L'obligation de consultation repose sur l'honneur de la Couronne et la protection des droits et des intérêts autochtones dans la Constitution. L'obligation de la Couronne de tenir des consultations et de tenir compte de nos intérêts est bien enracinée dans le droit national et international. Il est important que, pour la mise en oeuvre du PCN, le Congrès des Peuples Autochtones et Environnement Canada adoptent des approches novatrices qui tiennent compte de la situation particulière des Indiens inscrits et non inscrits vivant hors réserve et des Métis.
(1350)
    Les consultations exigeront un dialogue permanent et il faudra équilibrer les droits et les intérêts des Autochtones avec ceux du gouvernement et des non-Autochtones. L'obligation constitutionnelle de consulter les Autochtones vise à promouvoir la négociation et les bonnes relations au lieu de recourir aux tribunaux pour régler les différends. Nous sommes d'accord avec la juge en chef McLachlin pour dire qu'« il est préférable de recourir à la négociation pour concilier les intérêts de la Couronne et ceux des Autochtones ». Nous croyons qu'un terrain d'entente existe dans toutes les discussions et qu'on peut éviter des prises de position polarisées et inflexibles.
    Je vais conclure en énonçant quelques idées au sujet de la tâche que vous entreprenez. Qu'adviendra-t-il de la septième génération? Qu'allons-nous créer pour elle? Qu'aura-t-elle? Quand je parle de la septième génération, je ne parle pas seulement des enfants autochtones ou des sept générations d'Autochtones. Je parle de tous nos petits-enfants qui ne sont pas encore nés.
    [Le témoin s'exprime en micmac.]
    Merci.
    Merci, chef Lavallée.
    Nous allons maintenant passer au Centre d'action écologique. Madame Fuller, vous disposez de 10 minutes.
    Merci. Merci de m'avoir invitée et merci aux autres membres du panel.
    Je sais qu'un bon nombre d'entre vous avez beaucoup appris hier sur le Centre d'action écologique. Je regrette d'avoir raté cette excursion, mais je me réjouis que vous ayez pu prendre l'air.
    Vous avez déjà le texte de ma déclaration. Je vais simplement ajouter quelques idées qui me sont venues à l'esprit en réfléchissant à ce que j'allais dire aujourd'hui.
    Sur une note personnelle, j'ai passé les cinq derniers jours avec mon enfant de trois ans, et j'ai beaucoup réfléchi au plan de conservation national pendant que j'étais seule avec lui. J'ai vu certains parallèles entre le fait d'élever un jeune enfant et ce qu'un plan de conservation national devrait inclure. J'apporterai plus de précisions au sujet de ces quatre éléments plus tard.
    Premièrement, il faut un cadre réglementaire solide. Deuxièmement, si les règles ne sont pas respectées, cela doit entraîner des conséquences, surtout si vous êtes coincé à l'aéroport de Toronto pendant quatre heures. Troisièmement, il faut faire planer la menace de conséquences. C'est important. Quatrièmement, il faut des incitatifs à suivre les règles et il faut en parler et les relier au succès.
    Voilà, je pense, où s'arrête l'analogie. Ce sont des idées qui me sont venues à l'esprit quand je suis restée longtemps assise, hier soir, à l'aéroport.
    D'autre part, le Centre d'action écologique a souvent souligné que le mot « action » fait partie de son nom. Il serait souhaitable, je crois, que le mot « action » figure quelque part dans le plan de conservation national. Il faudrait peut-être l'appeler le plan d'action national pour la conservation. Je sais qu'au centre nous réfléchissons beaucoup à ce que nous faisons, à ce qui nous pousse à l'action et ce que cela veut dire.
    Je n'entrerai pas autant dans les détails que dans mon mémoire, mais je vais décrire brièvement notre centre, après quoi je passerai à nos recommandations.
    Le CAÉ est le plus ancien et le plus important organisme communautaire voué à la protection de l'environnement en Nouvelle-Écosse. Notre fondation remonte à 1971, dans le cadre d'un cours donné à l'Université Dalhousie. Nous disposons aujourd'hui d'un effectif de 35 employés. Nous avons aussi 600 bénévoles et 800 membres. Notre mandat est assez particulier pour un organisme environnemental. Il consiste à promouvoir un environnement durable et des moyens de subsistance viables, si bien que pratiquement tout ce que nous faisons tient compte de l'économie et de l'environnement.
    Nous nous occupons d'un vaste éventail de domaines. Nous travaillons en Nouvelle-Écosse, mais aussi en dehors de la province. Notre travail couvre la protection du milieu naturel, la foresterie durable, les aliments locaux, les jardins urbains et la sécurité alimentaire, l'énergie renouvelable, le transport durable et actif, la protection du littoral, la conservation des eaux, les changements climatiques, les pêches et les fruits de mer durables ainsi que les politiques sur les plans provincial, national et international. Nous considérons que tous ces éléments sont importants pour promouvoir un environnement durable.
    Madame Fuller, il faudrait que vous parliez un peu plus lentement pour nos interprètes.
    Merci.
    Pour vous donner un exemple d'un changement durable dont nous sommes assez fiers, en 1971, l'année de notre fondation, nous avons commencé le premier programme de recyclage de la Nouvelle-Écosse. La Nouvelle-Écosse reçoit maintenant la visite de délégués internationaux qui viennent voir notre programme de recyclage et de compostage. Nous avons obtenu une réduction d'au moins 50 p. 100 des déchets destinés à l'enfouissement. Par conséquent, ce genre d'initiatives peut influer, selon nous, sur le comportement des gens et modifier radicalement leur façon de faire.
    Je suis coordinatrice de la conservation marine. Du fait que la juridiction fédérale sur les milieux marins s'exerce aux termes de la Loi sur les pêches et de la Loi sur les océans, la plus grande partie de l'expérience que j'ai acquise tourne autour des lois et politiques nationales et, plus récemment, des lois internationales et des engagements relatifs à l'Accord des Nations Unies sur les stocks de poissons et à la Résolution de l'Assemblée générale des Nations Unies sur les pêches durables.
    Le travail du personnel de la conservation marine au sein du CAÉ va du très local, car nous avons cofondé Off the Hook, une pêcherie soutenue par la collectivité, à l'international avec notre travail au sein de l'Organisation des pêches de l'Atlantique Nord-Ouest. Nous avons été hôte conjoint du premier colloque international sur le corail de profondeur, qui s'est transformé en congrès international bisannuel. Je le mentionne, car nous avons constaté que la recherche et l'information sont essentielles pour amener le gouvernement à prendre des mesures de protection. Nous sommes fiers que la Nouvelle-Écosse abrite les premières aires de conservation du corail de profondeur au Canada.
    Un environnement sain, de l'air pur, une nourriture sécuritaire et produite localement, de l'énergie et un transport abordables et durables, des aires de nature sauvage et la biodiversité font partie de la bonne qualité de vie à laquelle les Canadiens s'attendent. Ces éléments sont cependant de plus en plus en péril.
    J'aimerais formuler des recommandations dans quatre domaines clés en ce qui concerne le programme de conservation national et je me servirai d'exemples tirés des travaux effectués par le CAÉ au fil des ans afin d'en illustrer l'importance.
    Il s'agit d'abord d'un cadre réglementaire assorti de cibles et d'échéanciers. Il faut élaborer le PCN à l'intérieur d'un cadre réglementaire solide qui protège les espèces ainsi que les habitats du Canada et qui préconise la conservation comme faisant partie de l'environnement des affaires dans ce pays. Sans engagements juridiquement contraignants, la responsabilisation du plan laisserait à désirer.
    Par exemple, j'ai assisté la semaine passée à la dernière réunion d'un projet visant l'intégration de la gestion du plateau continental de l'est de la Nouvelle-Écosse. Malgré les années d'efforts des intervenants, un plan collaboratif et une volonté modérée de le mettre en oeuvre, l'initiative ne s'est jamais concrétisée, en grande partie en raison de l'inexistence d'un cadre réglementaire imposant la responsabilisation et d'un échéancier clair pour l'exécution des activités.
    Un exemple plus positif est celui de la Nouvelle-Écosse qui doit s'acquitter d'ici 2015 de son engagement, inscrit dans une loi, à porter à 12 p. 100 les aires terrestres protégées. Pour que ce soit possible, cela exige des politiques, une loi, des recherches et la mobilisation du public. Il faut que le gouvernement fédéral collabore avec les provinces pour obtenir des résultats similaires pour nos rivières et les eaux pluviales.
    Outre son cadre législatif national solide, le Canada est signataire de plusieurs conventions et traités internationaux qui l'engagent à assurer la protection de la biodiversité des milieux terrestres et marins. Nous nous sommes engagés à atteindre les cibles d'Aichi pour 2011-2020, tout comme les cibles du Sommet mondial pour le développement durable de 2002, qui comprenaient un réseau d'aires marines protégées pour 2012 et des pêches durables d'ici 2015.
    Deuxièmement, il faut disposer d'un large choix d'outils. Le PCN doit d'abord s'assurer d'utiliser les processus en place qui fonctionnent, en plus de nouveaux processus d'élaboration et de mise en oeuvre d'un plan efficace. Outre un cadre réglementaire et la protection de la nature sauvage dans des aires terrestres et marines, le PCN devrait avoir recours à des approches fondées sur le marché afin d'atteindre ses objectifs. Il est important de disposer d'un large choix d'outils; l'organisation pour laquelle je travaille n'est pas limitée dans la manière dont elle apporte le changement sur le terrain et introduit le changement sur le plan local pour ensuite l'étendre sur le plan national. Nous avons la latitude de recourir à de nombreux outils différents.
    J'ai déjà mentionné des exemples d'approches fondées sur le marché, Off the Hook et SeaChoice, le programme pour les produits de pêches durables du Canada qui collabore avec les détaillants de tout le pays afin de modifier leurs pratiques d'achat et d'éliminer la vente de fruits de mer pêchés de manière non durable. Il faut intégrer les approches fondées sur le marché dans la réglementation relative aux changements climatiques.
    Notre programme alimentaire est un excellent exemple de la manière dont nous mobilisons les gens pour obtenir des résultats. Nous détenons les premières servitudes fermières fonctionnelles en Nouvelle-Écosse. Nous développons un marché pour les aliments locaux en collaborant avec les fermiers, les distributeurs et les restaurants. Ce genre de programmes permet de s'engager dans une cause valable et de perfectionner ses compétences. Ces programmes offrent de multiples avantages, notamment d'augmenter le taux d'infiltration de l'eau dans le sol, de diminuer l'écoulement des eaux de ruissellement et de créer des habitats pour la faune en ville. Pour citer un autre petit exemple, nous avons mis au point un modèle de serre occupant l'espace de deux places de stationnement afin d'utiliser les places publiques de manière différente. Des milliers d'écoliers et plus de 100 écoles participent à notre programme de trajet actif et sécuritaire vers l'école, qui fait sortir les enfants dehors et leur donne de l'exercice pour se rendre à l'école et en revenir. Ce sont autant d'exemples de promotion d'une appréciation de la nature, de la conservation de l'environnement et de la participation à la collectivité, qui restera pour toute la vie.
    Troisièmement, la collaboration est absolument nécessaire. Tout le monde fait face à des limites financières. Une polarisation croissante se dessine entre la communauté de la conservation et celle du développement économique alors que l'économie verte sera au centre de la conférence écologique mondiale du monde prochain, Rio+20. Il existe des solutions collaboratives.
(1355)
    J'ai siégé au cours des six dernières années à un comité national du MPO sur l'habitat des poissons. Grâce aux contributions de plus de 100 ONGE et ONGC et à un dialogue avec l'industrie, des solutions communes ont été dégagées. Je siège aussi au comité consultatif sur les espèces en péril, où des ONG et l'industrie donnent leur point de vue sur la manière de protéger efficacement les habitats et les espèces en péril du Canada. J'assure également la liaison avec le CANEP. Il est extrêmement important d'éviter la polarisation. Bien que le consensus ne soit pas toujours atteint, nous sommes à même de trouver des terrains d'entente. Comme je l'ai dit, le PCN devrait favoriser la collaboration et éviter la polarisation qui diminue inévitablement la participation de la société civile comme celle de l'industrie.
    On ne peut atteindre des objectifs écologiques sans avoir des cibles de développement économique qui tiennent compte du prix à payer pour l'environnement naturel. Notre expérience nous a appris, dans le cadre du Colin Stewart Forest Forum et de notre travail avec les fermiers et l'industrie de la pêche, que la collaboration en matière de conservation amène de vrais changements, sur terre comme sur l'eau. Vous avez constaté par vous-même, au cours de l'excursion d'hier, combien d'emplois dépendent d'une eau et d'un environnement propre et aussi que ceux dont le gagne-pain dépend de l'environnement sont désireux de contribuer à sa protection.
    Enfin, il faut effectuer un suivi continu et recueillir des données afin de protéger la faune du Canada, de mieux informer le public et d'éclairer la prise de décision gouvernementale. La surveillance et les recherches sur le terrain sont extrêmement importantes. J'ai une formation en sciences naturelles. Il y a énormément de choses que nous ignorons et nous ne faisons pas un grand usage des connaissances que nous possédons. Des exemples tels que celui du Discovery Corridor du golfe du Maine, qui a débuté dans le cadre d'un recensement du milieu biologique marin, nous montrent que nous avons encore beaucoup à apprendre sur les espèces vivant dans nos eaux. La recherche sur les conséquences des changements climatiques pour la faune et les habitats est cruciale afin de pouvoir mettre en place des mesures de gestion utiles et efficaces. Le suivi et la collecte des données sont aussi extrêmement importants pour informer les organismes de réglementation ainsi qu'atteindre les cibles et respecter les échéanciers qui devraient être intégrés dans le plan. Il nous faut aussi prévoir l'imprévisible, y compris des phénomènes météorologiques extrêmes, des changements dans la configuration des précipitations, les dommages à l'environnement naturel résultant de la synergie des effets et de leur accumulation. Comprendre et quantifier le rôle du capital naturel inhérent à nos écosystèmes devrait faire partie des correctifs à apporter au développement économique.
    Nous comprenons la nécessité de donner au PCN des objectifs et des résultats spécifiques. Nous croyons cependant fermement que les principes de base que j'ai évoqués doivent être des composantes essentielles de ce plan. En résumé, il nous faut un solide cadre réglementaire, choisir le bon outil pour le résultat voulu, favoriser la collaboration et promouvoir une recherche et un suivi qui couvrent les questions économiques et écologiques. Nous investissons dans notre avenir et nous ne pouvons pas sous-estimer le coût de la perte d'habitats et d'espèces. Il faut commencer à comptabiliser ce coût dans les bilans économiques.
    Le patrimoine naturel du Canada, qui comprend les habitats inestimables offerts par trois océans, des milliers de rivières, d'affluents et de kilomètres de littoral, doit pouvoir bénéficier d'un plan de conservation national. Il nous faut protéger les endroits et les cycles naturels. Nous ne pouvons pas tenir l'environnement pour acquis, et travailler à faire fructifier notre patrimoine national plutôt que de le dilapider contribuera à redonner au Canada son rôle de chef de file mondial en matière de conservation. Il nous faut protéger nos avoirs, y compris par une protection de longue durée de l'environnement au moyen de la législation déjà en vigueur.
    La rencontre Rio+20 de cette année portera sur l'économie verte. Je vais conclure sur la question suivante: comment le Canada désire-t-il figurer à cette réunion et que dirons-nous à propos de notre plan de conservation national?
(1400)
    Merci beaucoup.
    Pour terminer, nous allons entendre l'Organic Agriculture Centre of Canada. Vous disposez de 10 minutes.
    Merci beaucoup. Si je comprends bien, cela fait de moi le dernier témoin de la dernière audience.
    C'est certainement un privilège pour moi d'être ici, surtout avec des collègues que je ne pense pas avoir rencontrés avant, mais qui partagent le désir de protéger l'environnement. C'est certainement un honneur pour moi de parler avec vous aujourd'hui. Alors bienvenue à Halifax.
    Dans une vie antérieure, j'ai été le directeur de la Native Plant Society of Saskatchewan et la conservation me tient donc beaucoup à coeur. Néanmoins, je me présente devant vous aujourd'hui en tant que directeur de l'Organic Agriculture Centre of Canada, qui a été fondé en 2001. C'est le seul centre de ce genre qui existe au Canada pour soutenir la recherche et la formation professionnelle en agriculture organique ainsi que l'expansion de ce type d'agriculture. Nous avons relocalisé le centre au Nova Scotia Agricultural College qui fera bientôt partie de l'Université Dalhousie.
    Pour le moment, un de nos principaux projets est la gestion d'un programme de recherche national sur l'agriculture organique, de 8 millions de dollars, qui soutient une cinquantaine de chercheurs des quatre coins du pays dans 35 stations de recherche et sites de collaboration.
    L'agriculture organique est le secteur de l'agriculture qui connaît la croissance la plus rapide. C'est en Saskatchewan qu'elle occupe la plus grande superficie. Sur le plan de la politique et du nombre d'agriculteurs, le Québec a à peu près le même nombre d'agriculteurs organiques que la Saskatchewan. Le Québec est certainement un chef de file en ce qui concerne la politique à l'égard de l'agriculture organique.
    On m'a invité à formuler des recommandations au sujet de l'élaboration d'un plan de conservation national et je vais situer mes observations dans le contexte de l'agriculture et des terres agricoles. Je vais faire valoir aujourd'hui que l'agriculture organique est un modèle défini de système de production durable dont les principes directeurs reposent sur la conservation de la biodiversité et des ressources.
    L'ancien modèle de développement de l'agriculture était productif, mais présentait des défauts sur le plan écologique. Le modèle général visait à innover continuellement, à réduire les prix à la ferme et à externaliser les coûts. Ce modèle a favorisé une augmentation phénoménale de la productivité dans les pays industrialisés après la Seconde Guerre mondiale. Toutefois, la croissance de la productivité a été obtenue en grande partie grâce à une plus grande utilisation d'intrants, des modes de culture et d'élevage à intrants élevés, une réduction de la diversité des cultures, une augmentation de la taille des exploitations et de l'outillage agricoles et la concentration de l'industrie des productions animales.
    Ces pratiques ont causé de nombreux problèmes qui ont été en grande partie négligés jusqu'à ce qu'une crise éclate, par exemple sous la forme d'une forte concentration de nitrates dans la nappe phréatique, de l'accumulation d'algues et d'une eutrophisation de l'eau douce; d'une perte de diversité biologique y compris d'habitats; d'une diminution des populations de pollinisateurs; de la mort de poissons causée par l'érosion du sol entraînant la sédimentation des rivières et peut-être l'accumulation de pesticides et de nitrates, etc.
    L'agriculture axée sur l'économie a posé des problèmes, mais on reconnaît dans le monde agricole que la conservation de nos terres et de nos ressources en eau revêt une importance cruciale. Cela a conduit à un certain nombre de systèmes et de modes de production différents ou à des initiatives gouvernementales soutenant les principes de la conservation. L'agriculture organique est un exemple des approches visant à s'attaquer à ces problèmes.
    Qu'est-ce que l'agriculture de conservation? Dumanski et ses collègues la définissent comme:
… non pas les méthodes habituelles qui visent à obtenir le maximum de rendement en exploitant les ressources du sol et de l'agroécosystème. L'agriculture de conservation vise plutôt à obtenir des rendements et des profits optimums, à équilibrer les avantages agricoles, économiques et environnementaux.
C'est donc un équilibre de ces trois éléments.
Elle part du principe que les avantages socioéconomiques que l'on tire à produire en protégeant l'environnement… sont supérieurs aux avantages de la simple production.
Par conséquent, il est plus avantageux de combiner ces caractéristiques que de chercher seulement à produire.
En pratiquant l'agriculture de conservation, les communautés agricoles créent pour l'ensemble de la collectivité des milieux de vie plus sains grâce à une réduction de l'utilisation des combustibles fossiles, des pesticides et autres polluants et grâce à la conservation de l'intégrité de l'environnement et des services.
    Par conséquent, l'agriculture organique est une forme d'agriculture de conservation dont les principes directeurs soutiennent directement un environnement durable.
(1405)
    L'agriculture biologique est un système de production réglementé et inspecté qui répond à la demande des consommateurs, tant au Canada qu'au niveau international. Nous parlons ici du modèle de développement durable.
    Selon la description des normes canadiennes qui sont généralement conformes aux autres normes en vigueur dans le monde, l'agriculture biologique est régie par sept principes directeurs dont cinq sont directement reliés à l'environnement. On peut résumer ces cinq principes comme la protection de l'environnement grâce à la réduction de sa dégradation et de la pollution; la préservation de la fertilité à long terme du sol; la préservation de la diversité biologique; le recyclage des matières et des ressources; et l'utilisation de ressources renouvelables.
    Guidées par ces principes, les normes de l'agriculture biologique interdisent, au nom du principe de précaution, l'utilisation d'un certain nombre de substances et de pratiques au profit de pratiques qui se rapprochent davantage du fonctionnement d'un écosystème naturel. Ces pratiques ont cours dans le monde entier.
    Nous avons donc un système de production mondialement reconnu, qui est prescriptif et réglementé et qui repose sur la conservation et le développement durable. Ce système est peut être à l'opposé d'autres approches agricoles, mais il offre un modèle défini pour répondre aux enjeux agroenvironnementaux. Même s'il n'est pas parfait, ce système fonctionne bien. De nombreuses études scientifiques ont mis en lumière les avantages environnementaux importants qui sont associés à l'agriculture biologique.
    Mon collègue, Derek Lynch, qui travaille aussi au Nova Scotia Agricultural College et qui est le titulaire d'une chaire de recherche du Canada en agriculture biologique, a écrit récemment un article de synthèse avec des collègues. Dans cet article, il mentionne que selon l'ensemble des données disponibles, les caractéristiques distinctives des pratiques d'agriculture biologique présentent des avantages importants sur le plan environnemental et écologique. Il s'agit notamment de la préservation de la matière biologique du sol et d'un meilleur retour du carbone dans le sol pour améliorer sa qualité; de la réduction des rejets d'azote et de phosphore; de l'amélioration de la diversité biologique des végétaux et de la faune, qui s'étend parfois à d'autres taxons, selon la nature du paysage terrestre; de l'amélioration du milieu pour les pollinisateurs et la pollinisation; ainsi que d'une réduction de l'utilisation d'énergie et de l'amélioration de l'efficacité énergétique.
    Un certain nombre de pays européens ont adopté des politiques qui soutiennent directement l'agriculture biologique ou qui appuient les pratiques de production qui lui sont propres. Compte tenu de ces avantages, FiBL, le plus grand organisme de recherche au monde sur l'agriculture biologique, dont le siège se trouve en Suisse, emploie plus de 200 chercheurs qui travaillent sur des systèmes de production biologiques et à faibles intrants en Europe et dans le reste du monde.
    Des normes réglementées ont été formulées pour l'agriculture biologique de façon à réduire l'impact environnemental et à accroître l'efficacité de l'utilisation des ressources, ce qui permet de vendre au prix fort, sur le marché canadien et international, des produits certifiés biologiques. Nous pouvons voir qu'un système de production reposant sur des principes environnementaux répond à la demande du marché.
    Comment concevoir un programme de conservation national en ce qui concerne l'agriculture? Nous pourrions isoler les meilleures pratiques de gestion et les soutenir. Néanmoins, la stabilité d'un écosystème ne résulte pas du fonctionnement d'un seul de ses éléments; tous les éléments d'un système intégré qui fonctionnent ensemble y contribuent. L'adoption d'une approche réductionniste et le soutien de quelques pratiques individuelles n'est pas la solution. Nous avons plutôt besoin de systèmes d'agriculture complets guidés par un souci de conservation, de durabilité et d'amélioration de la biodiversité.
    Pour ce qui est de mesurer le succès, un écosystème agricole peut rendre un grand nombre de services, notamment en augmentant la sécurité alimentaire; en offrant un moyen de substance; en favorisant l'habitat de la flore, des animaux et des insectes; en protégeant notre approvisionnement en eau et en apportant une valeur esthétique et récréative au paysage. C'est ce que nous voyons beaucoup plus en Europe où le gouvernement offre aux agriculteurs des incitatifs pour cultiver la terre dans un souci de conservation afin d'offrir des possibilités de loisirs à la population.
(1410)
    Comme c'est le cas pour de nombreux programmes, il faut prévoir des mesures de succès pour s'assurer que les résultats souhaités sont atteints. Ces indicateurs doivent refléter notre désir de protéger les ressources naturelles tout en favorisant le développement et l'utilisation des ressources et en préservant ou en améliorant la qualité de vie de tous les Canadiens.
    Un programme de conservation national devrait inclure des objectifs clairement définis; des mécanismes permettant aux intervenants d'adopter une vision commune; des programmes éducatifs dans les écoles et les universités, de même qu'à l'intention des intervenants; la promotion de cette vision auprès de tous les Canadiens; un ensemble de programmes incitatifs allant de ceux qui auront des répercussions à grande échelle sur la structure et la fonction de l'écosystème à ceux qui remédient également aux problèmes critiques; ainsi que des programmes d'incitatifs s'adressant à tous les maillons de la chaîne de valeur, car si vous voulez influencer les producteurs et la façon dont ils cultivent la terre, vous devez aussi tenir compte des transformateurs et des détaillants et aborder les problèmes qui peuvent surgir le long de la chaîne de valeur.
    Nous devons soutenir des programmes qui appuient les initiatives de conservation déjà en cours et prévoir l'intégration des initiatives qui vont dans le sens de la conservation. Il faut également faire des recherches pour soutenir la formulation de pratiques qui favorisent la conservation et mesurent le succès d'un point de vue global.
    J'en arrive à ma conclusion.
    Le secteur de l'agriculture biologique tient beaucoup à participer au processus d'élaboration d'un plan de conservation national. Il est essentiel que le monde agricole assume la responsabilité de son impact sur l'environnement et adopte les pratiques durables, de préférence sans réglementation. Toutefois, nous devons reconnaître en même temps que les agriculteurs exploitent une entreprise, qu'ils fournissent des services à la société, notamment en assurant sa sécurité alimentaire et que la société devrait donc récompenser leurs efforts.
    En choisissant l'agriculture biologique, les agriculteurs choisissent d'assumer la responsabilité de cultiver la terre de façon à réduire au maximum les effets sur l'environnement. Ils sont récompensés par le prix plus élevé que le consommateur est prêt à payer pour les aliments.
    L'agriculture biologique est un système de production viable et bien établi qui repose sur la conservation et le développement durable. C'est un système de production régi par le marché dont les objectifs sont la conservation, le bien-être social et la considération pour les autres êtres vivants ainsi que la durabilité environnementale et économique. L'agriculture biologique est un exemple parfait de modèle unissant les intérêts des producteurs, des transformateurs, des détaillants, des consommateurs et du gouvernement pour atteindre les objectifs de conservation.
    Merci beaucoup.
(1415)
    Merci.
    Je voudrais vous présenter les membres du comité qui vont maintenant vous poser des questions.
    Le comité permanent est composé de 12 membres. Six d'entre eux voyagent aujourd'hui avec nous, ainsi que le personnel de soutien. M. Woodworth et M. Lunney sont, comme moi, du parti ministériel. M. Choquette et Mme Liu font partie de l'opposition officielle comme députés du NPD et M. Eyking est notre député libéral.
    Le premier tour de questions sera de sept minutes et cinq minutes seront accordées pour les questions du deuxième tour.
    M. Lunney va commencer le tour de sept minutes.
    Merci beaucoup.
    Je remercie tous nos témoins de s'être joints à nous pour cette dernière réunion importante.
    Je voudrais commencer par M. Hammermeister et l'agriculture biologique.
    Vous avez présenté votre mémoire, mais, malheureusement, nous n'en avions pas le texte. Je suppose qu'il n'a pas été distribué parce que nous ne l'avions pas en français et en anglais. Certains d'entre vous parlent très vite. Nous avons pris des notes.
    Vous avez parlé d'un projet de recherche de 8 millions de dollars qui est en cours et auquel participent une cinquantaine de chercheurs dans environ 35 sites. Pourriez-vous nous en parler un peu plus et nous dire en quoi consiste ce projet et ce que vous espérez accomplir?
    C'est dans le cadre de l'initiative de grappes agroscientifiques du cadre stratégique Cultivons l'avenir d'Agriculture et Agroalimentaire Canada. Nous gérons la grappe agroscientifique biologique, qui est une des 10 grappes consacrées à l'agriculture pour l'ensemble du pays. Nous avons 30 activités de recherche différentes auxquelles ces chercheurs travaillent dans les différentes régions.
    Pouvez-vous nous donner un exemple d'un aspect sur lequel vous travaillez ici, en Nouvelle-Écosse?
    Ici, en Nouvelle-Écosse, M. Lynch étudie l'impact environnemental des systèmes de culture. Il examine différents systèmes de gestion biologique pour voir quelle est l'importance du lessivage des nutriants d'une pratique de gestion à l'autre. Il essaie de protéger les eaux souterraines et d'assurer l'efficacité de la gestion des nutriants.
    Merci.
    Les détracteurs de l'agriculture biologique diront qu'elle ne peut pas donner un rendement suffisant pour répondre aux besoins actuels. Vous avez parlé de trois aspects différents. Vous êtes allé un peu trop vite pour que je puisse tout noter. J'aimerais que vous répétiez simplement quels sont les effets de l'agriculture biologique qui l'emportent, selon vous, sur les avantages de la simple production.
    Et pourriez-vous parler de certains succès du programme? Faites-vous des progrès sur le plan de la capacité de production? Est-il possible, par exemple, que les agriculteurs améliorent certaines des terres humides que nous avons perdues, utilisent des zones sensibles, dans lesquelles des marais ont été asséchés, pour la production agricole et augmentent leur production grâce à des pratiques écologiques tout en améliorant l'environnement? Est-il possible d'atteindre ces objectifs?
    Vous soulevez un grand nombre de questions.
    La question de savoir si l'agriculture biologique peut donner des bons rendements est très intéressante et d'une portée beaucoup plus vaste. Si vous parlez de nourrir la population mondiale, la question de l'approvisionnement alimentaire va bien au-delà de la question du rendement, car il y a aussi la distribution, la gestion, la qualité, l'entreposage, etc. Nous pourrions avoir une longue discussion à ce sujet.
    L'agriculture biologique et la recherche dans ce domaine sont relativement nouvelles. Oui, nous réalisons certainement des progrès. Nous mettons au point des nouveaux cultivars qui sont adaptés à une agriculture à faible intrants. Ils seront disponibles d'ici deux ans. Il faut environ 10 ans pour mettre au point un nouveau cultivar. Cela prend du temps.
    Pour ce qui est des autres avantages de l'agriculture biologique, il y a certainement une plus grande biodiversité dans les fermes biologiques. Il y a, sans aucun doute, moins de lessivage d'azote et moins d'émissions d'azote dans ces fermes. Les exploitations biologiques n'utilisent pas d'engrais azotés. Les engrais azotés représentent environ 40 p. 100 des coûts d'énergie et donc des émissions de dioxyde de carbone provenant de l'agriculture.
    C'est déjà, en soi, une énorme contribution à l'environnement. L'inconvénient est que si nous voulons avoir un bon sol, un sol sain et capter l'azote présent dans l'atmosphère en utilisant des plantes légumineuses, nous devons inclure ces plantes dans la rotation des cultures et cela suspend la production pendant un an. Néanmoins, si l'on tient compte de tous les coûts externes associés à l'agriculture traditionnelle et les répercussions que cela entraîne, si nous investissions tout cet argent dans le système, je pense que nous pourrions améliorer énormément les avantages qu'apporte la production biologique.
(1420)
    On dit souvent que ce qu'on mange doit être produit à moins d'une centaine de milles de chez soi. On en parle beaucoup en Colombie-Britannique. En raison de certaines de nos pratiques de gestion de la transformation des aliments et de la salubrité des aliments, il est souvent assez difficile pour les petits producteurs d'atteindre ces objectifs.
    Je voudrais simplement savoir ce que vous en pensez ou si cela pose un problème, à votre avis.
    Les cent milles…? S'efforcer de manger les produits locaux? Oui, il y a beaucoup d'aliments biologiques qui sont importés de Californie, du Mexique et même parfois de Chine. Environ 75 p. 100 des produits biologiques consommés au Canada sont importés. Ce secteur représente d'énormes débouchés économiques pour le Canada.
    Nous incitons les gens à acheter des produits locaux et biologiques au marché fermier local. Ainsi, vous bénéficiez des avantages de l'agriculture biologique et de son impact local sur l'environnement.
    Merci.
    Mark, combien de temps me reste-t-il?
    Il vous reste un peu plus d'une minute et demie.
    Merci.
    Je tiens à remercier le Centre d'action écologique et Susanna Fuller de nous avoir accueillis hier. Nous avons fait une merveilleuse excursion à Micou's Island avec Mark et Jennifer, qui nous ont accompagnés, ainsi qu'à la rivière Sackville, etc. C'était très intéressant et nous l'avons apprécié.
    Vous avez formulé une observation au sujet des enfants. Nous nous préoccupons notamment des répercussions sur les enfants, surtout ceux des villes, qui semblent de plus en plus éloignés de l'écologie. Un de nos objectifs est d'amener plus de gens à s'y intéresser, y compris les néo-Canadiens.
    Vous avez mentionné votre programme de trajets actifs et sécuritaires vers l'école qui s'adresse à un millier d'enfants dans une centaine d'écoles. Pourriez-vous nous expliquer brièvement comment vous faites participer les enfants à ce programme?
    Certainement. Le programme de trajets actifs et sécuritaires vers l'école existe en Nouvelle-Écosse depuis une dizaine d'années. C'est un programme pancanadien, qui couvre même l'Amérique du Nord. Il vise à inciter les enfants à se rendre à l'école à pied ou en bicyclette. Il est célébré par la Journée mondiale Marchons vers l'école, la Semaine mondiale Marchons vers l'école et la Journée pour un Hiver rempli d'activités. Il s'agit seulement d'inciter les enfants à avoir des activités de plein air afin de créer une culture beaucoup plus active qu'elle ne l'est maintenant.
    Je vais vous donner un exemple — cette initiative a été prise à Chester. Il y avait un sentier qui reliait une communauté à l'école, mais il n'était pas entretenu. On a simplement élargi le sentier, on y a mis des panneaux indicateurs, et je pense que l'utilisation de ce sentier a maintenant augmenté de 30 p. 100. Il y a 30 p. 100 d'enfants en plus qui empruntent ce sentier, qui marchent à travers les bois pour aller à l'école.
    Cela contribue à la sécurité.
    Précisément. Ils marchent dans le bois, ce qui est une bonne chose et ils font de l'exercice en allant à l'école.
    C'est ce que nous faisions nous-mêmes. Nous avions l'habitude de marcher jusqu'à l'école. Cela appartient au passé. Je crois qu'il est vraiment important que les enfants aient des activités de plein air. C'est une étape très importante. Dans les régions urbaines, c'est beaucoup plus facile que dans les régions rurales.
    Merci. Votre temps est écoulé.
    Monsieur Choquette, vous disposez de sept minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins.
    Pour revenir à la discussion qu'il y a eu entre M. Hammermeister et M. Lunney, l'achat à l'intérieur de 100 km est effectivement une très bonne idée. En Colombie-Britannique, c'est un très bon programme. Non seulement cela encourage l'agriculture locale, mais cela réduit en plus l'empreinte écologique et les émissions de gaz à effet de serre. Les changements climatiques, ce n'est pas une fausseté. On a constaté encore hier et pendant toute notre tournée que les changements climatiques avaient des impacts très graves et comment ils touchaient notre plan de conservation national; tous les témoins nous en ont parlé. Il est très important que la lutte contre les changements climatiques fasse partie de notre plan de conservation national, et pas seulement l'adaptation à ces changements.
    Pour commencer, je vais m'adresser à Mme Sheppard. On a rencontré un groupe dans l'Ouest canadien, si ma mémoire est bonne, qui s'appelle Conservation de la nature Canada. Il achète des servitudes ou des terrains. Il a une mission de conservation à long terme. Votre organisme fait-il la même chose? Quand vous avez une fiducie, est-ce dans le but d'acheter des terres qui seront conservées à perpétuité? Comment cela fonctionne-t-il?
(1425)

[Traduction]

    Notre organisme est un regroupement qui ne possède pas lui-même de terrains. Néanmoins, les groupes que nous chapeautons en possèdent.
    Une servitude de conservation est un instrument juridique. C'est un engagement grevant le titre de propriété. C'est une entente juridique entre un propriétaire foncier et un tiers qui est généralement une fiducie foncière. Il limite également le genre d'utilisation qui peut être faite d'un terrain ou sa disjonction.
    Comme la servitude est officiellement enregistrée sur le titre de propriété, elle survit au propriétaire du terrain; elle est transférée d'un propriétaire à l'autre. Elle ne peut être levée que par un tribunal.
    La fiducie foncière vérifie chaque année l'état de la servitude et collabore avec les nouveaux propriétaires pour s'assurer que les conditions de la servitude sont respectées.

[Français]

    Merci.
    Ce que vous faites est très bien, tout comme ce que fait Conservation de la nature Canada. Par contre, il y a eu certaines critiques ou préoccupations concernant la surenchère que cela pouvait entraîner sur le prix des terres. Je ne sais pas si vous faites de la surenchère entre vous et d'autres organismes comme Conservation de la nature Canada. Comment pourrait-on éviter ce problème avec d'autres propriétaires terriens? Je ne sais pas si vous comprenez ma question. Je suis d'avis qu'il faut aller dans ce sens, mais il y a cette petite difficulté. Comment pourrait-on régler cette critique?

[Traduction]

    C'est effectivement un problème. Néanmoins, dans les régions où il y a de nombreuses fiducies foncières, la valeur des terres augmente de toute façon.
    Je voudrais vous montrer quelque chose que j'ai apporté aujourd'hui pour pimenter un peu mon exposé. C'est une peinture d'une région côtière où environ huit terrains appartenant à différents propriétaires sont réunis avec les servitudes de conservation sans lesquelles cet endroit serait couvert de chalets.
    C'est Sam Orr's Pond, dans une région rurale du littoral du Nouveau-Brunswick et c'est un bel endroit. Il y a trois kilomètres et demi de sentiers et environ deux milles de côte. Ce tableau a été peint dans la réserve et c'est dans une région où il n'y a pas de parcs provinciaux. Il y a des chalets tout autour et c'est un beau sanctuaire pour la nature et les gens.

[Français]

    Merci.
    Ma question s'adresse à Mme la chef Lavallée.
    Le gouvernement s'est engagé envers Conservation de la nature Canada et j'espère qu'il pourra le faire également envers l'ADOCC. Il faut souhaiter que ce programme soit reconduit. Je livre ce message, en passant.
     Croyez-vous qu'un programme de coopération pourrait être intéressant? Dans le cas des terres ancestrales, une forme de servitude pourrait être établie dans un esprit de conservation. Vos droits ancestraux seraient maintenus, bien sûr, notamment en matière de pêche, et vous pourriez faire de la conservation.

[Traduction]

    Malheureusement, ce ne serait pas possible pour le moment, pour la simple raison que la plupart des terres gérées par les Autochtones sont visées par la Loi sur les Indiens. Par conséquent, tout ajout ou achat de terre devrait être approuvé par le ministre. Il faudrait se conformer à toutes sortes de règlements. La situation n'est donc pas la même. La situation n'est pas comparable. C'est une toute autre question.

[Français]

    Oui, je comprends.
     Croyez-vous que les engagements d'Aichi devraient être inclus dans notre plan national de conservation? Est-ce qu'ils devraient en être la base?
(1430)

[Traduction]

    Les objectifs d'Aichi doivent certainement faire partie du plan de conservation. Quant à savoir si nous pouvons nous fixer une année ou une date pour les atteindre, c'est une autre question. Malheureusement, il y a beaucoup de choses qui sont indépendantes de notre volonté et c'est ainsi que va la vie. Comme nous l'avons constaté au cours des cinq dernières années, certains pays ont vu leur économie s'écrouler complètement. Par conséquent, il revient à tout le monde d'essayer de retrouver un juste équilibre entre l'économie et le développement et la protection de la terre. Au lieu d'adopter des positions extrêmes, nous devons tous travailler ensemble.

[Français]

    Merci, chef Lavallée.

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur Woodworth, vous disposez maintenant de sept minutes.
    Merci beaucoup.
    Je remercie tous les témoins; c'est une conversation stimulante.
    Si vous le permettez, je voudrais d'abord m'adresser à Mme Fuller. Ce que vous avez dit confirme ce dont je suis de plus en plus convaincu. C'est au sujet des quatre recommandations que vous avez formulées.
    J'ai l'impression que, dans un certain sens, nous avons déjà un plan de conservation national, car nous faisons déjà certaines choses. Vos quatre recommandations, à commencer par le cadre réglementaire assorti de cibles et d'échéanciers, par exemple… Nous l'avons déjà. Ce n'est peut-être pas exactement sous la forme voulue, mais nous avons au moins un point de départ.
    Pour ce qui est de votre deuxième recommandation concernant les autres outils, notamment les aires protégées, l'éducation, la recherche, les approches fondées sur le marché, si vous prenez ce que les Canadiens font un peu partout — peu importe que ce soit ou non sur l'initiative du gouvernement — les Canadiens prennent toutes sortes de mesures novatrices.
    Troisièmement, la collaboration existe dans bien des cas, avec parfois une certaine polarisation, mais pas toujours.
    Quatrièmement, il y a un suivi et une collecte de données, mais j'ai l'impression que la tâche est tellement énorme qu'elle prendra beaucoup de temps.
    Nous avons donc déjà, je crois, un point de départ pour ces quatre éléments.
    Je voudrais vous demander ce que nous pourrions faire différemment ou plus efficacement à l'avenir? Autrement dit, que pourrions-nous faire de plus ou de moins? Que pourrions-nous faire différemment? Comment améliorer l'efficience? J'aimerais savoir ce que vous en pensez.
    Ensuite, j'ai joué un tour à Mme Sheppard, car je voulais lui poser la même question… J'aurais dû le dire au début afin qu'elle puisse prendre des notes, mais je suis sûr qu'elle a écouté.
    Madame Fuller, voulez-vous commencer, s'il vous plaît?
    Dans bien des cas, nous avons fait certaines bonnes choses. Nous devons veiller à ne pas nous fixer un objectif, l'atteindre et supposer ensuite que tout est réglé. Nous devons agir de façon beaucoup plus stratégique. Je pense que nous ratons des cibles et des échéances. Pour la pêche en particulier, nous n'avons pas fixé d'objectifs ou d'échéanciers pour reconstituer nos stocks de poissons. Même si nous avons des cibles pour les aires marines protégées, nous les ratons, nous ne les atteignons pas.
    C'est ce qui m'amène au cadre réglementaire. Si nous voulons établir ce plan, fixons-nous des objectifs. Inscrivons les objectifs d'Aichi dans la loi. Rendons des comptes au lieu de rester vagues à propos de ce que nous pourrions accomplir et de ce que font les provinces. Nous devons établir clairement ce que nous voulons réaliser et dans quels délais, et nous devons veiller à le faire.
    Il n'y a rien de pire — et je me suis occupée pendant 10 ans de la Gestion intégrée de l'est du plateau néo-écossais — que de réunir de multiples intervenants qui travaillent très fort, bénévolement, pour constater ensuite que le gouvernement fédéral ne fait pas sa part ou qu'il n'y a pas de reddition de comptes de la part de l'organisme de réglementation.
    Je pense que les Canadiens font beaucoup de bénévolat pour la conservation. De nombreuses initiatives sont prises en collaboration avec les ONG et l'industrie. Ces actions doivent être reconnues, quantifiées et placées dans le contexte des objectifs et des échéanciers. Je ne saurais trop insister sur ce point. Nous pouvons tenir toutes sortes de beaux discours, mais à moins d'avoir des objectifs mesurables, nous n'irons nulle part et nous n'arriverons à rien.
    Pour ce qui est de la surveillance, comme je l'ai dit, j'ai une formation scientifique. J'ai fait un doctorat en biologie marine. Les restrictions qui touchent actuellement la science de la mer sont scandaleuses et nous ne pourrons pas y suppléer. Nous avons besoin d'une surveillance de base.
    Nous avions une bonne réputation scientifique. L'Institut océanographique de Bedford faisait un travail extraordinaire, il y a une trentaine d'années. Nous devons intégrer cette science et comprendre sa contribution à l'innovation, à la compréhension et à l'éducation de Canadiens soucieux de l'environnement. Si nous ne sommes pas informés, il nous est difficile de nous en soucier. Je dirais que la surveillance n'a pas à être très coûteuse. Elle peut être faite de façon efficace. Elle peut être bien faite. Nous utilisons de nombreux modèles d'intendance communautaire pour recueillir des renseignements. Tout cela doit se faire dans un cadre et une structure qui doit rendre des comptes et être mesurable.
(1435)
    J'ai tendance à être d'accord avec vous. Il faut que ce soit mesurable et cela exige des données de départ qui, pour le moment, sont un peu fragmentées.
    Mme Sheppard pourrait-elle répondre à la même question?
    Pourriez-vous répéter rapidement la question?
    Oui, excusez-moi.
    J'ai dit qu'à mon avis nous avons déjà, grâce aux efforts de gens comme vous tous qui êtes ici aujourd'hui, un plan de conservation national au Canada, à bien des égards. Néanmoins, que pouvons-nous faire pour le rendre plus efficace? Que devrions-nous réduire? Que devrions-nous augmenter? Que devrions-nous faire différemment de ce que nous faisons actuellement?
    Dans mon exposé, je n'ai pas mentionné directement les objectifs d'Aichi, mais nous ne les atteignons pas actuellement au Canada. L'objectif est la protection de 17 p. 100 de nos terres ainsi que la restauration de 15 p. 100 des terres dégradées, d'ici 2020.
    Nous avons actuellement un bon réseau de parcs et de réserves d'espèces sauvages en ce sens qu'il représente les différentes écozones du pays. Ce qui inquiète nos membres, ce sont les terres qui se trouvent à cinq ou dix minutes de marche, dans une région rurale où un lotissement sera peut-être bientôt créé. Ces zones se trouvent près des villes. Elles ne sont pas perdues loin dans la nature où personne ne va.
    Je dirais que la communauté des fiducies foncières est une communauté relativement nouvelle qui a besoin du maximum de soutien. Nous essayons d'appuyer les initiatives que les citoyens prennent bénévolement pour protéger les terres de leurs communautés, pour que leurs communautés restent vivables, qu'on puisse y marcher et qu'on s'y sente chez soi et pour préserver le caractère d'une communauté où il y a peut-être des cours d'eau ou des secteurs riverains.
    Monsieur Eyking, vous disposez de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie nos invités d'être venus cet après-midi.
    Je vais participer à un tour de questions, cet après-midi. J'ai quelques questions à poser. Si vous pouvez me donner des réponses précises, cela m'aidera un peu.
    Ma première question s'adresse à vous, madame Sheppard, et concerne les fiducies foncières.
    Au Canada, les biens sont transmis d'une génération à l'autre. Bien entendu, une bonne partie de ces biens sont des terres naturelles. J'ai l'impression que la génération qui va hériter de ces biens voudra avoir une sorte de modèle pour les garder en excellent état.
    Cela dit, de quoi le gouvernement fédéral dispose-t-il ou que devrait-il avoir pour faciliter ce processus, au moyen d'incitatifs fiscaux ou de crédits fiscaux quelconques…? Nous voyons souvent des fiducies pour l'éducation et ce genre de choses, mais y a-t-il une mesure plus concrète que l'on devrait prendre pour aider les familles à apporter leur contribution?
    Il y a encore sept ou huit ans, je pouvais faire don de la peinture suspendue derrière moi à un musée et obtenir un reçu aux fins de l'impôt, mais si je donnais la terre qui est représentée dans la peinture, je devais payer l'impôt sur les gains en capital. Par conséquent, le programme fédéral des dons écologiques est un excellent programme qui facilite la donation de terres écologiquement sensibles en échange d'avantages fiscaux plus importants. Nous aimerions que ce programme soit maintenu.
    Le Programme d'intendance de l'habitat des espèces en péril est aussi un excellent programme qui a permis aux fiducies foncières de tout le pays d'acquérir et de protéger l'habitat d'espèces en voie de disparition. Il a été l'une des principales sources de financement pour l'acquisition de terres et il faut dire que ces sources de financement sont rares dans notre pays.
(1440)
    Vous avez surtout parlé des aires et des espèces sensibles, mais qu'en est-il des terres naturelles, à l'état brut? Entrent-elles dans cette catégorie?
    Je pense que…
    Ou toutes les terres sont-elles sensibles?
    … chaque fiducie foncière a ses propres critères et ces critères reflètent les valeurs des bénévoles qui gèrent la fiducie foncière en tant qu'organisme caritatif sans but lucratif.
    Merci.
    Ma question suivante s'adresse aux deux chefs.
    Je vis au Cap-Breton et notre communauté qui connaît la croissance la plus rapide est celle d'Eskasoni. Elle se classe au cinquième rang des communautés des Premières nations de la région de l'Atlantique. Chaque fois que j'y vais, son principal sujet de préoccupation est la terre: elle n'en possède pas assez. Bien entendu, tout le monde sait pourquoi. Il y a des années, quand les Européens ont accaparé la terre, ils n'ont laissé aux Premières nations qu'une petite superficie et ce n'était pas toujours la meilleure terre.
    Cela dit, nous connaissons bien, également, le cas de Donald Marshall, qui était du Cap-Breton. La décision du tribunal a permis aux Premières nations d'avoir un meilleur accès aux ressources.
    Mais il y a quand même un problème. Oui, vous occupez toujours la même terre et vous avez accès aux ressources, mais vous avez dit que votre peuple était le premier intendant de la terre et qu'il la connaissait bien. J'ai visité une classe de 8e année, à Eskasoni, la semaine dernière. Les élèves ont des ordinateurs et gardent leur première langue, ce qui est une bonne chose, mais je me demande si votre communauté les prépare suffisamment à être les futurs intendants de la terre. Par exemple, si les fiducies foncières ont besoin de gens pour les gérer, les comprendre ou même en être en partie propriétaires, sont-ils suffisamment bien préparés à devenir les nouveaux intendants de la terre?
    En fait, ils le sont, dans toute cette région et au Nouveau-Brunswick. J'ai été membre du conseil de conservation en tant que chef au Nouveau-Brunswick, avant d'aller à Ottawa. J'ai travaillé avec le comité constitué pour sauver la Musquash et mettre en place l'aire de gestion de la pêche dans la baie de Fundy. Je sais que mes collègues de Nouvelle-Écosse font la même chose.
    Oui, nous éduquons nos enfants qui vivent hors de la réserve. Tous les trois ans, grâce au financement que nous recevons d'Environnement Canada, nous invitons les jeunes à un colloque de trois jours. Le dernier a eu lieu à Cornwallis. Les participants passent ces trois jours à parler de l'environnement et de nos traditions. C'est par l'entremise d'Iqaluit, de notre programme MAARS et du MPO. Les trois organisations, les trois provinces des Maritimes soit le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse et l'Île-du-Prince-Édouard, les trois conseils hors réserve font venir les jeunes de chaque conseil. Cela leur donne droit à un crédit en sciences dans leur école. Nous avons pris des dispositions avec les écoles pour qu'ils obtiennent ce crédit en sciences.
    Excellent.
    Je vais vous poser des questions…
    Désolé.
    J'aimerais ajouter quelque chose, monsieur Eyking.
    Apparemment, les fiducies foncières qui gèrent les servitudes de conservation sont quelque chose d'assez nouveau. En pratique, si vous prenez le système de réserves que nous avons au Canada, c'était la première forme de fiducie foncière et cela n'a pas très bien fonctionné, comme vous l'avez mentionné.
    Betty Ann et moi-même avons récemment dialogué avec le gouvernement fédéral, directement avec le premier ministre, au sujet des problèmes concernant la Loi sur les Indiens et son abolition, sa modification et ce genre de questions. Il est assez évident que, pour diverses raisons, la Loi sur les Indiens ne sera pas abolie de sitôt, mais il est temps, je pense, d'y apporter des révisions dont certaines sont déjà en cours.
    Je crois qu'il est temps de réexaminer tout le concept des fiducies foncières. Compte tenu de certaines conversations que nous avons eues autour de cette table, et pas seulement au sujet de la conservation, qui est extrêmement importante, j'envisage déjà un nouveau concept de fiducies foncières pour les Premières nations, pour les Autochtones, les Métis, les personnes vivant hors réserve et cela également dans leur intérêt économique.
    Je crois qu'il faut faire participer les gens au dialogue. Comme vous l'avez dit, il est temps de commencer à diffuser de l'information, des suggestions et les recommandations d'un comité comme le vôtre, de s'adresser au Parlement, de chercher sérieusement des nouvelles façons de remplacer les anciens systèmes qui ne fonctionnent pas.
    J'aime donc beaucoup ce concept.
(1445)
    Il ne reste plus de temps.
     Madame Liu, cinq minutes.
    Je remercie tous les témoins d'être venus.
    Je voudrais poser ma première question au chef Lavallée.
    Vous avez parlé de la nécessité d'intégrer les connaissances traditionnelles dans un PCN. C'est une chose que Shawn Atleo nous a dite également lorsqu'il a rencontré le comité dans le cadre de cette étude. Sur un plan très concret ou très pratique, comment le ferait-on?
    Nous le faisons déjà. Comme je l'ai dit, nous avons trois personnes qui siègent au CANEP. L'une d'elles est une scientifique, Donna Hurlburt, et il y a deux membres de la communauté. Nous avons également des représentants au comité des espèces en péril. Nous consultons beaucoup nos aînés pour savoir quelles sont les diverses espèces qui sont en jeu. Comme je l'ai dit, nous dialoguons beaucoup. Voilà comment nous abordons ces questions par l'entremise de ces comités. Nous le faisons aux niveaux local, régional, national et international.
    Nous avons pu produire de belles affiches et certaines brochures grâce à la collaboration avec les aînés de nos communautés. J'avais l'intention d'en apporter quelques-unes, mais comme j'ai pensé que vous ne voudriez pas les trimballer avec vous, je vais les envoyer au comité pour que vous puissiez les voir. Cela témoigne du travail que nous avons accompli en collaborant avec les divers ministères.
    Merci.
    J'aime la façon dont vous parlez des générations futures, des sept générations.
    Nous savons aussi que le développement durable a été inscrit dans la législation canadienne, par exemple dans la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Il est défini comme le développement qui permet de répondre aux besoins du présent sans compromettre la possibilité pour les générations futures de satisfaire les leurs.
    Pensez-vous que le développement durable, tel qu'il est défini, devrait être un principe directeur du PCN?
    C'est inévitable. Je veux dire qu'il faut trouver un équilibre. Vous ne pouvez pas passer d'un extrême à l'autre. Il faut un juste équilibre. Nous ne pouvons pas nous attendre à ce qu'aujourd'hui les gens soient sans emploi ou vivent dans la pauvreté. Nous avons déjà suffisamment de pauvres. Nous devons trouver un moyen de travailler ensemble, de laisser les beaux discours de côté et de voir ce qui convient le mieux à la communauté. Il faut commencer par faire participer la communauté. Il faut examiner sa situation économique et sociale. Il faut prévoir ce qui se passera à l'avenir. Si les gens sont bien informés, n'ont pas peur et font preuve de bon sens, je crois que c'est réalisable.
(1450)
    Madame Fuller, quelles devraient être les priorités du gouvernement pour la conservation des espèces et des territoires? Devrions-nous centrer notre attention sur les régions éloignées ou industrialisées et devrions-nous diriger surtout nos efforts sur la restauration ou la protection? Bien entendu, les deux sont importants, mais quelle devrait être notre priorité?
    Je reverrais la question des objectifs et des échéanciers et je ferais un peu d'évaluation des risques. Je ne pense pas que vous puissiez faire l'un ou l'autre; il faut faire les deux. D'autre part, nous devons tenir compte de la façon dont nous travaillons actuellement, surtout du point de vue des aires marines. Nous avons une méthode pour établir quelles sont les principales zones à protéger. Nous avons pour cela un cadre de travail. Cela comprend les aires qui doivent être restaurées et celles qui doivent être protégées.
    J'établirais un plan quinquennal qui viserait sérieusement les cibles faciles afin de réaliser des progrès. Il faut commencer par les aires ou les espèces les plus à risque qui exigent notre attention et qui fournissent d'importants services écologiques, pour lesquelles nous avons de bonnes chances de succès. Je le ferais en fonction des espèces et aussi du territoire à protéger. Autrement, nous risquons d'échouer. Si nous faisons une évaluation des risques et si nous protégeons ce qui est le plus menacé pour passer ensuite aux choses qui posent plus de difficultés, ce sera une façon plus réaliste et pratique de procéder. Ce n'est peut-être pas l'idéal, mais j'essaie d'être pratique.
    Quelles mesures le gouvernement devrait-il prendre pour réduire l'impact de l'aquaculture sur les écosystèmes marins?
    Pratiquons l'aquaculture dans des parcs clos. Nous savons que c'est efficace.
    Nous savons que c'est difficile. Les marges bénéficiaires ne sont pas de 50 p. 100 mais probablement de 5 à 30 p. 100. En Nouvelle-Écosse, nous avons certaines des meilleures entreprises d'aquaculture en parc clos au monde. À Debert, la Première nation Millbrook a un excellent élevage d'ombles-chevaliers. Il est possible de le faire à plus grande échelle. Nous savons que cela intéresse les détaillants.
    L'aquaculture en parc clos nous donnera quelque chose à faire pendant que nous essaierons de trouver un moyen d'atténuer les effets de l'aquaculture dans des parcs en filet. Pour le moment, nous ne savons pas comment y arriver.
    Votre temps est écoulé, madame  Liu. Merci.
    Monsieur Lunney, vous allez conclure. Vous disposez de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Madame Sheppard, une des premières recommandations de l'Alliance des organismes de conservation du Canada est l'établissement d'un fonds de dotation d'intendance à coût partagé auquel les organismes de conservation auraient accès pour veiller à ce que les terres protégées soient gérées et entretenues à perpétuité.
    Si j'ai bien compris, vous avez dit que ce serait géré comme un PPP et que les groupes locaux auraient accès aux fonds. Pourriez-vous nous expliquer davantage ce concept? Qu'envisagez-vous exactement?
    Un propriétaire ou un bon intendant a besoin d'argent pour payer l'éclairage, la réparation des clôtures, l'entretien des lieux, y compris des sentiers, s'il y en a.
    Le principal obstacle auquel les fiducies foncières sont confrontées pour acquérir des terrains grâce à des donations ou au moyen d'une acquisition directe ou d'une servitude de conservation c'est qu'en plus des droits, elles ont besoin d'argent pour assurer la gestion de ces terrains à long terme. Pour s'acquitter de ses responsabilités, une fiducie foncière doit lever les fonds nécessaires qui sont calculés en fonction du coût de l'entretien du terrain sur une période de 20 ans et d'une contestation judiciaire tous les 20 ans, en comptant l'amortissement et elle doit mettre cet argent en banque lorsqu'elle obtient le titre de propriété.
    Je crois que la communauté artistique a établi, avec le gouvernement et les sociétés privées, une forme de fonds de dotation qui permet aux musées d'obtenir des fonds pour la gérance et la conservation à long terme des oeuvres d'art, qu'il s'agisse de peintures ou de sculptures. Nous suggérons d'en faire autant pour les terres qui sont conservées par l'entremise du secteur privé, c'est-à-dire les fiducies foncières et autres organismes afin qu'ils puissent obtenir des fonds pour leurs activités de gestion.
(1455)
    Merci.
    Vous avez également mentionné le programme de dons écologiques et le programme d'intendance de l'habitat. Le budget de 2007 y a affecté 225 millions de dollars. Cela a suscité des investissements supplémentaires de la part d'organismes, y compris certains de vos membres — comme Ducks Unlimited, Nature Trust, Conservation de la nature, etc. — dans l'achat et l'acquisition de terres écologiquement sensibles. Une partie de cet argent est encore utilisée, mais ce fonds touche à sa fin. Est-ce un concept que l'on pourrait élargir ou appliquer? Ce modèle a-t-il fonctionné pour vous ou pour vos membres?
    C'était un programme formidable. Quant à savoir s'il a fonctionné pour nos organismes, je dirais que les résultats ont été variables.
    Conservation de la nature — que nous apprécions énormément — a pu mettre ces fonds au service de ses priorités et de ses projets. Je me réjouis qu'elle soit présente dans les provinces de l'Atlantique. Certaines fiducies foncières ont pu avoir accès au financement, mais je dirais qu'un futur programme du même genre ou d'une plus grande portée serait beaucoup plus efficace s'il permettait aux organismes locaux, ceux dont les priorités ne correspondent pas forcément à celles de Conservation de la nature, d'obtenir des fonds en fonction de certaines de leurs priorités stratégiques locales.
    C'est pourquoi j'ai laissé entendre que notre regroupement, l'Alliance des organismes de conservation du Canada, pourrait offrir quelque chose grâce à la centaine de fiducies foncières qui existent dans l'ensemble du pays et aux organisations bénévoles des différentes communautés dont les priorités ne correspondent pas toujours à celles de Conservation de la nature.
    Très bien. Merci.
    Madame Fuller, vous avez mentionné le Colin Stewart Forest Forum, la collaboration et votre succès à cet égard. Pourriez-vous nous décrire brièvement ce que vous avez accompli grâce à ce programme?
    Le Colin Stewart Forest Forum a réuni des groupes de conservation et des entreprises forestières pour dresser l'inventaire des terres écologiquement fragiles qui ont été ensuite mises de côté ou achetées par la province dans le cadre de son objectif de 12 p. 100 pour la protection des terres.
    La province atteint cet objectif de 12 p. 100 de trois façons. Elle le fait en assurant la protection des terres domaniales. Elle le fait par l'entremise du Nova Scotia Nature Trust, qui protège les terres privées au moyen de servitudes de conservation. Elle le fait aussi en travaillant avec l'industrie pour mettre de côté des terres qui sont parfois achetées et parfois données. C'est ainsi que cela fonctionne.
    Merci.
    Merci.
    Je tiens à remercier encore une fois nos témoins de s'être joints à nous.
    Chefs Lavallée et Dorey, merci infiniment, car nous sommes en territoire micmac. Nous sommes allés à Micou's Island et nous avons beaucoup aimé notre visite et notre excursion d'hier. Merci beaucoup.
    Nous avons commencé notre tournée sur la côte Ouest et nous la terminons sur la côte Est. Votre contribution nous sera utile pour formuler nos recommandations au gouvernement au sujet d'un plan de conservation national.
    Chers collègues, nous allons maintenant lever la séance pour nous diriger vers l'aéroport.
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