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Bonjour. Je déclare la séance ouverte.
Aujourd'hui, nous allons faire quelque chose d'un peu différent; c'est en quelque sorte une première. Nous avons avec nous le Dr Frank Molnar, de la Société canadienne de gériatrie, qui va faire une présentation-diaporama. Je sais que le Dr Molnar est au courant qu'il doit respecter la limite de temps que j'ai établie. C'est très important.
Nous avons pensé que l'installation pouvait être faite avant la séance, mais on tente encore de régler quelques détails techniques. Nous devrons simplement patienter un peu.
Nous nous pencherons aujourd'hui avec intérêt sur la question des maladies chroniques liées au vieillissement, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement. Le comité reconnaît que notre population est vieillissante.
Nous sommes ravis de tous vous accueillir ici aujourd'hui pour que vous nous donniez des informations et des éclaircissements très importants.
Nous accueillons le Dr Haggie, président de l'Association médicale canadienne. Je vous souhaite la bienvenue, docteur Haggie. Bienvenue également, docteure Ricketts.
Nous accueillons également Mme Eleanor White et M. Tucker, docteurs en chiropratique, de l'Association chiropratique canadienne. Soyez les bienvenus.
Nous avons ensuite deux représentants de l'Association des infirmières et infirmiers du Canada, Mme Barb Mildon, présidente désignée, et M. Don Wildfong, infirmier conseiller, Politique et leadership.
Et nous accueillons bien sûr le Dr Frank Molnar également.
Nous sommes très heureux de votre présence.
Docteur Molnar, nous allons vous entendre en dernier afin que tout soit installé.
Nous allons commencer par Mme Eleanor White et M. John Tucker, de l'Association chiropratique canadienne.
Vous disposez de 10 minutes pour nous présenter votre exposé. Lorsque la lumière s'allumera, vous saurez qu'il vous reste environ une minute pour conclure. La parole est à vous.
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Madame la présidente, mesdames et messieurs les membres du Comité permanent de la santé, madame la greffière, chers collègues, je vous remercie de nous donner l'occasion de nous joindre encore une fois à vous aujourd'hui.
Le problème des maladies chroniques liées au vieillissement est à la fois grave et grandissant. Plus de 90 p. 100 des adultes de plus de 65 ans disent souffrir d'au moins une maladie chronique. Or, la plupart des facteurs de risque de maladie chronique, et surtout ceux qui sont liés au vieillissement, sont souvent évitables. L'Association chiropratique canadienne estime que les soins de santé préventifs à tout âge est le meilleur moyen de freiner ou de diminuer la progression des maladies chroniques et de favoriser la bonne santé de tous les Canadiens.
Voici nos deux principales recommandations. La première, c'est de mettre en place progressivement des programmes de sensibilisation ciblant les groupes les plus vulnérables de la population, y compris en faisant la promotion de l'autogestion active en matière de santé personnelle pour encourager tous les Canadiens et toutes les collectivités à prendre la responsabilité de leur propre santé. La deuxième vise à favoriser des approches coopératives entre les organisations du domaine de la santé publique, les prestataires de soins de santé, les gouvernements et les entités des secteurs à but lucratif et à but non lucratif. Ensemble, ces mesures auraient des effets positifs durables sur les soins de santé et contribueraient à remédier aux problèmes liés aux maladies chroniques et au financement du secteur canadien de la santé.
L'incidence d'un mode de vie malsain est particulièrement évidente chez les adultes les plus âgés. Cependant, il ne faut pas oublier que les maladies chroniques se développent bien plus tôt, souvent durant la jeunesse. La prévention des maladies et la promotion de la santé prennent donc tout leur sens, et les démarches de sensibilisation doivent viser toute la population, peu importe l'âge, l'ethnie ou le groupe socioéconomique. Il n'est jamais trop tard ni trop tôt pour investir dans la santé ou favoriser l'adoption d'un mode de vie sain.
La recherche est fondamentale dans la lutte contre les maladies chroniques liées au vieillissement. Elle permet non seulement de mieux diriger les efforts de traitement et de prévention, mais aussi d'orienter les initiatives de sensibilisation publique. La Fondation canadienne pour la recherche en chiropratique est le principal organisme de financement national pour la recherche dans le domaine chiropratique. La FCRC accorde également des subventions et crée des possibilités. En partenariat avec les IRSC, la FCRC a participé à la création de chaires de recherche chiropratique en milieu universitaire partout au pays. Bon nombre de ces chaires consacrent beaucoup de temps et d'efforts à l'étude des maladies chroniques liées au vieillissement et au traitement d'affections liées au vieillissement. Les résultats de ces recherches permettent de guider les praticiens dans le choix des meilleures pratiques disponibles et des recommandations de pratique clinique et, par le fait même, de promouvoir l'amélioration des soins aux patients.
Les employés du secteur de la santé publique produisent chaque année un grand nombre de ressources précieuses pour aider les Canadiens à vivre mieux et en meilleure santé. Cependant, bien des programmes sont limités dans le temps, offrent des ressources restreintes et n'arrivent pas à atteindre leurs objectifs après quelques années d'existence. Le recours aux professionnels de la santé comme agents de sensibilisation pourrait constituer une solution au problème de durabilité des programmes de santé publique. Par exemple, l'ACC a élaboré un certain nombre de ressources éducatives à l'intention des chiropraticiens canadiens et de la population en général qui préconisent l'activité physique et la prévention des blessures. Nous en avons répertorié trois. L'une d'elles concerne la prévention des traumatismes crâniens. L'ACC s'est associée à la fondation Pensez d'abord Canada pour faire la promotion de la Journée du cerveau auprès des enfants du primaire au Nunavut. La Journée du cerveau permet de sensibiliser les enfants à l'importance de prévenir les traumatismes crâniens dans l'espoir que cet apprentissage sera transmis aux autres membres de la collectivité.
Notre programme Faites le 15, élaboré en consultation avec l'Agence de la santé publique du Canada, encourage l'introduction progressive de l'activité physique dans la routine quotidienne des Canadiens. Le programme est fondé sur le principe qu'au moins 15 minutes d'activité physique par jour peuvent mener à la création d'une saine habitude et favoriser la motivation nécessaire pour augmenter progressivement le temps consacré chaque jour à l'activité physique. Il a été démontré que les adultes actifs physiquement sont nettement moins susceptibles de développer des troubles comme le diabète, les maladies cardiovasculaires et certains types de cancer.
Les personnes âgées courent un plus grand risque de blessure en cas de chute. Les chutes constituent en effet l'une des principales causes d'incapacité et de morbidité chez les aînés. De plus, les blessures découlant de chutes chez les personnes âgées entraînent des coûts estimés à plus de 2,8 millions de dollars au Canada chaque année. C'est d'ailleurs en réaction à cette situation que l'ACC a lancé la campagne « Bon pied, bon oeil », qui cible précisément les personnes âgées canadiennes. Cette campagne offre des stratégies pratiques aux aînés pour prévenir les chutes à la maison, renforcer leur équilibre et augmenter leur force musculaire au quotidien. Ce programme a connu une grande diffusion auprès du public, a été grandement utilisé et a fait l'objet d'une belle collaboration de nos partenaires. Tous les documents d'information à ce sujet sont disponibles gratuitement sur le site Web de l'ACC.
Notre organisme estime que des approches ciblées précises sont essentielles pour les sous-groupes de la population, y compris les anciens combattants, les collectivités des Premières nations et les collectivités autochtones, la Gendarmerie royale du Canada et les Forces canadiennes. Ces groupes devraient recevoir le continuum de soins complets, y compris la prestation de services intégrés, en vue de prévenir davantage les conditions chroniques et les maladies chroniques liées au travail.
Les partenariats et la collaboration sont essentiels à une stratégie de prévention et de réduction des risques. Les fournisseurs de soins de santé de premier contact, les travailleurs de soutien, les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux, ainsi que les secteurs à but non lucratif et privé doivent s'engager à la réalisation de cette priorité, afin que la promotion d'un message commun relatif aux habitudes de vie saines ait une incidence plus significative et importante si le message est appuyé par tous les secteurs.
Les chiropraticiens du Canada peuvent contribuer à atténuer le fardeau de la maladie chronique touchant les aînés en offrant des soins et de la cogestion aux patients. On a constaté que la détection précoce d'un dysfonctionnement musculo-squelettique et le traitement immédiat des douleurs musculo-squelettiques communes diminuaient les risques de douleur chronique. Des études ont démontré que les soins chiropratiques chez les patients présentant une lombalgie permettent de diminuer le recours aux tests diagnostiques, les taux d'hospitalisation et de chirurgie du dos, et de réduire les coûts globaux et les ordonnances, y compris pour les AINS et les opioïdes. Les avantages qualitatifs comprennent une meilleure qualité de soins et une meilleure qualité de vie pour les patients traités dans le cadre d'un modèle d'intégration.
Beaucoup de collectivités, en particulier dans les régions éloignées du Canada, réclament un meilleur accès aux soins, le libre choix du patient dans la prestation des services et la mise en oeuvre de mesures de santé préventives. Les chiropraticiens du Canada font partie de la réponse à ces demandes.
La transition progressive d'un modèle de soins actifs de santé à un modèle de soins préventifs pourrait aider les aînés à maintenir une bonne santé, ce qui contribuerait à leur autonomie et à une meilleure qualité de vie. L'ACC estime que les chiropraticiens canadiens doivent jouer un rôle important dans la promotion d'un vieillissement en santé et la prévention de la maladie chronique, y compris les maladies musculo-squelettiques. L'inclusion de tous les fournisseurs de soins de santé et de tous les patients dans la discussion amènera des solutions plus innovantes et durables. Le maintien de l'autonomie et de la qualité de vie des aînés au Canada représente un objectif important qui a une incidence tant sur la viabilité du système de soins de santé que sur la structure de notre société.
L'Association chiropratique canadienne recommande que la gestion du défi grandissant actuel des maladies chroniques liées au vieillissement repose sur un modèle de santé publique, de prévention et de mieux-être comprenant des incitatifs visant tant les intervenants que toute autre personne, de manière à ce que tous assument un niveau de responsabilité plus important à l'égard des résultats en matière de soins de santé. Nous croyons que la sensibilisation du public ainsi qu'un soutien solide des partenariats multisectoriels et une collaboration interdisciplinaire produiront les meilleurs résultats.
Nous remercions le comité de nous avoir donné l'occasion de participer aux discussions sur les maladies chroniques liées au vieillissement.
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Je vous remercie beaucoup de votre invitation, mesdames et messieurs.
L'Association médicale canadienne félicite le Comité permanent de la santé de la Chambre des communes d'avoir entrepris cette étude sur l'enjeu des maladies chroniques liées au vieillissement. La question est opportune, puisque les premiers membres de la génération du baby-boom ont eu 65 ans en 2011 et que l'on prévoit qu'en 2031, le quart de la population du Canada aura 65 ans ou plus.
Les maladies chroniques ne frappent pas exclusivement les personnes âgées, mais leur prévalence augmente avec l'âge: selon Statistique Canada, environ 74 p. 100 des Canadiens de plus de 65 ans ont au moins un problème chronique comme le diabète, l'hypertension artérielle, l'arthrite ou la dépression, et presque 25 p. 100 en ont trois ou plus. Le pourcentage est plus élevé chez les 85 ans et plus.
Quelles sont les causes des maladies chroniques? Elles sont nombreuses. Certaines d'entre elles découlent de comportements malsains: tabagisme, mauvaise alimentation et, surtout, inactivité physique. La montée des taux d'obésité au Canada, par exemple, préoccupe les médecins parce que l'obésité accroît le risque d'apparition de maladies chroniques plus tard au cours de la vie.
Il n'y a toutefois pas que les comportements malsains qui sont liés aux maladies chroniques. La constitution biologique et génétique d'une personne entre aussi en ligne de compte, tout comme son environnement social. Les niveaux de revenu et d'instruction inférieurs, le logement médiocre et l'isolement social, problème plus grave pour les personnes âgées que pour d'autres groupes, sont tous des facteurs liés à un état de santé médiocre.
Maintenant, la bonne nouvelle: les maladies chroniques ne sont pas une conséquence inévitable du vieillissement. Nous pouvons retarder l'apparition des maladies chroniques et peut-être même réduire le risque de les voir apparaître. Quant aux patients qui sont déjà atteints d'une maladie chronique, il est souvent possible de contrôler leur problème par des soins de santé appropriés et une bonne prise en charge de la maladie, ce qui leur permet de continuer de mener une vie active et autonome. L'AMC appuie donc les initiatives de promotion du vieillissement en santé, que l'Agence de la santé publique du Canada définit comme l'optimisation des possibilités de santé physique, mentale et sociale.
Il faut encourager les habitudes de vie saines à tout âge. Les directives canadiennes en matière d'activité physique, par exemple, qu'appuie l'AMC, recommandent que les 65 ans et plus accumulent au moins deux heures et demie par semaine d'activité physique aérobie comme la marche, la natation ou la bicyclette. Les experts croient que le vieillissement en santé réduira la durée de la maladie et de l'incapacité d'une personne à une brève période avant la mort, ce qui lui permettra de mener plus longtemps une vie saine, autonome et satisfaisante.
Pour les personnes déjà atteintes de maladie chronique, le traitement et la gestion des soins sont de longue durée et peuvent être très complexes. Les personnes qui souffrent de diabète, par exemple, ont besoin d'un programme permanent continu de contrôle de leur glycémie pour la maintenir à un niveau approprié. Les personnes qui souffrent d'arthrite ou d'autres problèmes de mobilité peuvent avoir besoin de physiothérapie régulière. Pour le patient, une maladie chronique signifie un traitement continu beaucoup plus compliqué que le simple fait de prendre des antibiotiques contre une infection. Les personnes qui ont deux maladies chroniques ou plus peuvent avoir à consulter un spécialiste différent dans chaque cas et à demander l'aide d'infirmières conseillères, de diététistes, de pharmaciens, d'ergothérapeutes, de travailleurs sociaux ou d'autres professionnels de la santé.
Souvent, ces personnes doivent prendre des médicaments. La majorité des Canadiens de plus de 65 ans prennent au moins un médicament d'ordonnance et presque 15 p. 100 en prennent cinq ou plus, ce qui accroît notamment le risque, par exemple, d'une interaction négative entre deux médicaments pouvant produire des effets secondaires désagréables et même graves.
Les soins à long terme des maladies chroniques complexes constituent en fait le nouveau paradigme de notre système de santé. Environ 80 p. 100 des soins maintenant fournis aux États-Unis visent à traiter des maladies chroniques, et il n'y a pas lieu de croire que le Canada soit très différent. C'est pourquoi il vaut la peine de réfléchir à la forme idéale que devrait prendre un programme intégré de prise en charge des maladies chroniques pour les patients de tous âges. L'AMC croit qu'un tel programme devrait inclure les quatre éléments suivants.
Tout d'abord, l'accès à un fournisseur de soins primaires qui est chargé du soin global du patient. Pour plus de 30 millions de Canadiens, ce fournisseur de soins primaires est un médecin de famille. Les médecins de famille qui ont établi avec leurs patients des relations professionnelles de longue date peuvent mieux comprendre leurs besoins et leurs préférences. Ils peuvent créer une relation de confiance qui rend les patients à l'aise de discuter franchement de la façon dont ils veulent traiter leurs problèmes; par exemple, faut-il prendre des antidépresseurs ou consulter un thérapeute? Le médecin de famille peut aussi coordonner les soins fournis par d'autres professionnels.
Cela nous amène au deuxième volet des recommandations, celui des soins concertés et coordonnés. L'AMC croit qu'étant donné le nombre de fournisseurs qui peuvent intervenir dans le soin des maladies chroniques, le système de santé devrait encourager la création d'équipes interdisciplinaires ou, au moins, favoriser une communication et une coordination soutenues entre chaque fournisseur. Nous croyons que tous les gouvernements devraient appuyer les pratiques interdisciplinaires de soins primaires, comme les Réseaux Santé famille en Ontario, ou les réseaux de soins primaires en Alberta, qui réunissent sous un même toit divers professionnels de la santé et leur savoir-faire.
L'usage généralisé du dossier de santé électronique peut faciliter l'échange d'informations et la communication entre fournisseurs. Il devrait par ailleurs y avoir un processus d'aiguillage transparent, par exemple, du médecin de famille au spécialiste, ou du médecin de famille au physiothérapeute. L'AMC collabore avec d'autres intervenants du milieu de la médecine afin de créer une trousse d'aiguillage que les gouvernements, les organisations de soins de santé et les praticiens pourront utiliser pour appuyer la création de systèmes d'aiguillage plus efficaces et efficients.
Il se peut que le patient ait aussi besoin de services de soutien non médicaux pour vivre avec une déficience liée à une maladie chronique. Par exemple, une personne qui a de l'arthrite et veut continuer de vivre chez elle peut avoir besoin de barres d'appui, de rampes ou d'un monte-escalier. Idéalement, un système coordonné de prise en charge des maladies chroniques inclurait aussi l'aiguillage vers ceux qui peuvent fournir ces services.
L'appui des aidants naturels constitue le troisième élément indispensable. Les aidants naturels sont les héros obscurs des soins aux personnes âgées. On estime que quatre millions de Canadiens fournissent des soins informels et non rémunérés à un membre de leur famille ou à un ami. Environ le quart d'entre eux ont eux-mêmes 65 ans ou plus. Leur fardeau peut être lourd en termes à la fois de temps et de dépenses, et ils souffrent souvent de stress et d'isolement.
Le gouvernement fédéral a pris des mesures pour offrir aux aidants naturels un appui dont ils ont grand besoin. Ainsi, le dernier budget fédéral a augmenté le montant du crédit d'impôt en leur faveur. Nous recommandons que le gouvernement aille plus loin en leur offrant un réseau solide d'appui, financier et autre.
L'amélioration de l'accès aux services nécessaires constitue le quatrième et dernier élément. La Loi canadienne sur la santé ne couvre que les services médicaux et hospitaliers. Toutes les provinces ont des programmes d'assurance-médicaments pour les plus de 65 ans, mais la couverture varie énormément selon la province et beaucoup de gens, en particulier ceux qui ont de faibles revenus, ont du mal à payer les médicaments dont ils ont besoin. Les personnes âgées qui n'ont pas de régime d'avantages sociaux après la retraite — elles constituent la majorité — doivent aussi payer elles-mêmes les soins dentaires, les services de physiothérapie, de soins de santé mentale et autres dont elles ont besoin.
Nous recommandons que tous les ordres de gouvernement étudient la possibilité d'adapter le panier de services fournis dans le secteur public afin d'assurer qu'il reflète les besoins des Canadiens de plus en plus nombreux vivant avec une maladie chronique. Nous recommandons plus particulièrement que le gouvernement fédéral négocie avec les gouvernements provinciaux et territoriaux un programme à frais partagés complet d'assurance-médicaments.
En conclusion, l'AMC croit que le comité est sage de se pencher sur des façons possibles de diminuer la portée — sur les patients en particulier, et sur le système de santé et la société en général — des maladies chroniques liées au vieillissement. La prise en charge des maladies chroniques pose des problèmes complexes qui justifient une attention étroite, car il s'agit de la principale forme de soins de santé au Canada. Nous attendons donc avec impatience les résultats des délibérations du comité.
Merci de l'occasion que vous nous avez offerte de témoigner.
Au nom des 250 000 infirmières et infirmiers enregistrés du Canada, je vous remercie de cette occasion que vous nous offrez de parler de l'important dossier des maladies chroniques liées au vieillissement. L'association vous enverra à ce sujet un exposé contenant les principales recommandations et la documentation connexe, mais aujourd'hui, je me concentrerai sur quelques grands thèmes.
Par rapport au vieillissement en santé, le Canada a besoin d'une stratégie nationale portant sur la prévention et la gestion des maladies chroniques, une stratégie fondée sur des soins d'équipe et un meilleur accès aux soins primaires et aux soutiens communautaires, en particulier pour les Canadiens âgés, plus vulnérables aux maladies chroniques et à leurs complications.
Les maladies chroniques sont la principale cause de décès au Canada. Leur traitement coûte chaque année 90 milliards de dollars, soit 67 p. 100 de tous les coûts directement liés aux soins de santé. Étant donné que nombre de ces maladies peuvent faire l'objet de prévention ou d'atténuation, les investissements dans ce secteur permettront d'économiser de l'argent, d'améliorer la qualité de vie et même de sauver des vies. L'association exhorte donc le gouvernement fédéral à suivre, par rapport au vieillissement en santé, une stratégie qui mette l'accent sur la prévention et la gestion des maladies chroniques.
Une stratégie pancanadienne du vieillissement en santé devrait être à multiples volets et comporter diverses mesures destinées à promouvoir la santé, à détecter les maladies de façon précoce, à garder les gens chez eux plus longtemps, à appuyer les aidants naturels, à établir les déterminants de la santé et à faciliter l'accès aux services de santé, y compris des soins de fin de vie adéquats.
Ce sont les maladies chroniques multiples, et non pas l'âge, qui sont la cause principale du recours au système de santé par les aînés. Ces maladies, qui nécessitent des traitements coûteux et une gestion complexe des soins, sont un lourd fardeau pour les particuliers et les familles. Par exemple, les professionnels de la santé doivent régulièrement traiter les effets conjugués de l'obésité, du diabète de type 2 et de l'hypertension. Fait particulièrement inquiétant, cet ensemble de maladies se constate de plus en plus fréquemment dans une population de plus en plus jeune. C'est maintenant qu'il faut donc agir pour renverser cette tendance inquiétante.
La clinique des maladies chroniques complexes de Calgary, en Alberta, est un exemple de réussite en la matière. L'équipe interdisciplinaire qui y travaille a réduit les admissions dans les hôpitaux grâce à une approche intégrée des soins. Les infirmières autorisées et praticiennes, les médecins et les pharmaciens se penchent ensemble sur les facteurs médicaux et sociaux, le mode de vie et d'autres facteurs qui ont une incidence sur les résultats liés à la santé. Ce modèle de gestion globale des maladies chroniques a permis de réduire le nombre total d'hospitalisations de 24 p. 100 et la durée des séjours à l'hôpital, de 51 p. 100.
Évidemment, le but ultime est de sensibiliser les patients et les familles, et de leur donner l'appui et les outils nécessaires avant que ne surviennent des maladies chroniques multiples. Le dépistage, la détection précoce et l'accès rapide à des interventions opportunes peuvent aider les patients à mieux gérer les facteurs de risques initiaux, en accroissant ainsi les possibilités de prévention et de réduction de la gravité des maladies.
Les risques de maladies chroniques augmentent avec l'âge. Et pour beaucoup d'aînés, les interventions surviennent malheureusement trop tard. Ainsi, l'hypertension non détectée ou mal gérée augmente les risques d'accident vasculaire cérébral ou d'autres maladies cardiaques avancées. L'accident déclenche alors la série habituelle d'événements que sont le transfert par ambulance à la salle d'urgence, l'admission, le séjour prolongé et la réadaptation. Cette situation illustre les graves conséquences qui découlent de l'insuffisance des soins communautaires et à domicile. Bien trop souvent, les soins à domicile sont de courte durée et se limitent à la guérison après un séjour à l'hôpital par rapport à la gestion permanente des maladies chroniques. Cette lacune dans les services ne vous est sans doute que trop familière.
L'association recommande donc en deuxième lieu que le gouvernement fédéral appuie une réforme des soins primaires en mettant l'accent sur les services à domicile et communautaires, et sur une action menée par des équipes interdisciplinaires. Le besoin est criant de stimuler les services de santé communautaire, tels que les soins primaires, ambulatoires et à domicile afin d'améliorer la santé de la nation.
Bien trop de Canadiens se rendent à l'urgence ou sont hospitalisés pour des états de santé qui pourraient et devraient être gérés dans la collectivité. Il y a ainsi d'excellents modèles de soins primaires qui pourraient être mis en oeuvre à grande échelle. Ce sont les centres de santé communautaire, les équipes de santé familiale et les cliniques interdisciplinaires dirigées par des infirmières praticiennes. Ces modèles exploitent pleinement l'expertise des professionnels de la santé en faisant en sorte que le public ait accès aux bons soins, au bon moment et au bon endroit, réduisant ainsi les obstacles à l'accès.
Les initiatives de soins primaires qui offrent un accès plus rapide et plus systématique aux soins aboutissent à des interventions simples, à faible coût et plus faciles à gérer. À titre d'infirmières autorisées, nous connaissons bien le dossier. Un exemple simple en est la clinique communautaire ou mobile de podologie où l'on donne en temps opportun des conseils sur les habitudes de vie et les comportements. Ce faisant, on peut détecter de façon précoce les maladies de pied graves qui pourraient à terme nécessiter l'amputation chez les diabétiques. Une clinique de podologie, ça ne fait peut-être pas très chic, mais cela représente un service concret et communautaire qui illustre bien l'avantage de s'occuper sans tarder de petits problèmes avant qu'ils ne dégénèrent en catastrophes.
Nous savons que la prévention évite les coûts beaucoup plus élevés que nécessiteraient plus tard de graves interventions. L'optimisation de la santé et du bien-être des Canadiens suppose de rapprocher les soins du public, au coeur même des collectivités.
Nous devons penser et agir différemment pour généraliser la mise en oeuvre de nouvelles approches telles que les cliniques de santé mobiles, les services offerts après les heures de travail, les visites à domicile et les programmes communautaires de sensibilisation financés par les contribuables et à but non lucratif.
Selon l'une de ces approches, des équipes d'infirmières qui s'occupent normalement d'urgences ont répondu à des appels non urgents provenant de maisons de soins de longue durée. Une étude récemment menée à Toronto a montré que ces équipes étaient efficaces et capables d'offrir les soins nécessaires à 78 p. 100 des résidents auxquels elles ont rendu visite et qui auraient en d'autres circonstances été envoyés aux urgences. Ces visites à domicile ont coûté 21 p. 100 de moins que les traitements offerts en salle d'urgence.
Permettez-moi de souligner à nouveau que le temps est venu d'adopter une stratégie nationale de vieillissement en santé. Pour notre association, cette stratégie aurait pour mission de faciliter l'accès opportun aux soins primaires, de miser sur l'efficacité d'équipes interdisciplinaires, de rapprocher les soins du public et des collectivités, et de fournir toute la gamme des appuis communautaires nécessaires pour prévenir et gérer adéquatement les maladies chroniques.
Les maladies chroniques sont vraiment un souci inquiétant et croissant dans toutes les régions du pays et dans le monde entier. En prévision des discussions que tiendront le gouvernement fédéral, les provinces et les territoires à propos du prochain accord sur la santé, nous devons nous atteler à lutter de façon plus stratégique contre cette épidémie pancanadienne. En fait, les infirmières autorisées et les autres fournisseurs de soins de santé font partie intégrante de la prévention et de la gestion des maladies chroniques dans tout le spectre des soins. De plus grands avantages pour la santé des particuliers et la viabilité du système peuvent être produits par une stratégie de vieillissement en santé qui met l'accent sur la prévention et la gestion des maladies chroniques et se concrétise par une réforme des soins primaires.
Je vous remercie à nouveau de cette occasion que vous m'avez donnée de témoigner.
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Merci de m'avoir invité à parler au nom de la Société canadienne de gériatrie.
En préparant l'exposé, j'ai longtemps réfléchi à son idée maîtresse. La chose la plus importante pour la société est, je crois, de bien connaître les maladies critiques sur lesquelles doit porter toute étude sur le vieillissement et toute étude sur les maladies chroniques.
La plus importante des maladies, d'un point de vue gériatrique, n'est souvent pas considérée comme une maladie chronique. Je veux parler de la démence. Sous ses nombreuses formes, la démence est considérée comme la « matriarche » ou la marraine des maladies chroniques. C'est elle qui est la plus lourde de conséquences sur les soins de santé et sur les autres niveaux de soins; or, elle est souvent marginalisée et on ne la prend pas en considération dans la planification des services de santé. Je sais d'ailleurs que presque aucune des autorités sanitaires régionales de l'Ontario ne la fait figurer dans ses plans. Même si son influence est énorme, on dirait qu'elle est très souvent maintenue en périphérie.
Quelle est la prévalence de la maladie d'Alzheimer et des démences apparentées? Je vous invite à ce sujet à consulter le document intitulé: Raz-de-marée: impact de la maladie d'Alzheimer et des affections connexes au Canada diffusé sur le site Web de la Société Alzheimer du Canada. Selon ce document, environ un demi-million de personnes souffrent de démence au Canada. Ce chiffre ne reflète pas vraiment les conséquences de la maladie sur la société, parce que chacune des personnes atteintes est soignée par un, peut-être deux, voire trois aidants naturels qui courent tous le risque de souffrir eux-mêmes de troubles anxieux, de dépression ou d'épuisement. Si l'on pense en fait au nombre de gens concernés par la démence, on atteint probablement le chiffre de un à deux millions de Canadiens. Ces chiffres sont énormes et il y a environ 100 000 nouveaux diagnostics par an, soit un toutes les cinq minutes.
C'est donc une maladie très courante, mais aussi très chère, puisqu'elle nous coûte aujourd'hui environ 15 milliards de dollars et que la facture augmente rapidement. Je vous renvoie à nouveau au document Raz-de-marée où figure la méthodologie de cette analyse économique. Le barème qui y est utilisé est probablement très exact.
C'est donc une maladie courante et une maladie coûteuse. Mais en quoi est-elle différente de l'insuffisance cardiaque, de la maladie pulmonaire obstructive chronique ou du diabète? La démence est différente à deux égards; premièrement, par ce que nous appelons son effet domino. Beaucoup de gens gèrent très bien leur insuffisance cardiaque, leur maladie pulmonaire chronique ou leur diabète tant qu'ils ne souffrent pas de problèmes cognitifs. Mais lorsque la démence intervient, on constate alors une perte de contrôle de l'insuffisance cardiaque, de la maladie pulmonaire obstructive chronique ou du diabète. La perte de contrôle est très rapide. Les malades se retrouvent à l'hôpital où leur état est stabilisé, puis ils sont renvoyés chez eux, mais ils finissent par être hospitalisés à nouveau. Dans ce cycle, les professionnels de la santé ne reconnaissent pas réellement le problème fondamental sous-jacent qui a causé la déstabilisation. Beaucoup de gens souffrent de deux ou trois maladies chroniques en même temps. Les hôpitaux savent certainement s'en occuper. Mais une fois que la démence entre dans l'équation, les hôpitaux sont pris de court et ont beaucoup de difficulté à gérer la démence. J'en ai l'expérience clinique depuis plus de 20 ans, et des dizaines d'autres gériatres l'ont aussi.
Est-ce que les données dont nous disposons confirment le phénomène? L'Institut canadien d'information sur la santé a publié un rapport à ce sujet, rapport dont j'ai tiré deux pages clés. Si vous désirez le rapport complet, j'en ai des exemplaires en anglais et en français.
Selon l'Institut, le principal diagnostic motivant des niveaux de soins alternatifs au Canada est la démence. Le diagnostic de cette dernière est lié à un tiers, ou 33 p. 100, des cas de ces niveaux de soins. Je pense que ce chiffre est largement sous-estimé car, d'après mon expérience des hôpitaux, beaucoup — voire la plupart — des cas de démence ne sont pas reconnus. Si l'on faisait une étude plus approfondie et que l'on arrivait à déterminer combien de personnes faisant l'objet de niveaux de soins alternatifs sont vraiment atteints de démence, je ne serais pas surpris de voir le pourcentage atteindre 50 ou 60 p. 100. Voilà le vrai diagnostic qui explique la déstabilisation liée aux maladies chroniques multiples et à la crise des niveaux de soins alternatifs.
Ainsi, toute étude sérieuse des maladies chroniques et du vieillissement doit, à notre avis, faire état de la démence comme composante centrale.
Quelles possibilités s'offrent donc à nous? J'en vois quelques-unes. J'en ai parlé à quelques collègues et nous en avons discuté à la Société canadienne de gériatrie. Pour l'avenir, nous devrions envisager les modèles de pays qui ont établi des réseaux sur la démence. Les réseaux que nous avons au Canada sont composés de bénévoles, de gens comme vous et moi qui payent pour en faire partie et qui les financent. Nous devrions envisager de les rendre officiels et imputables au public. Ils pourraient ainsi organiser les soins de façon à les combiner à ceux que l'on offre pour d'autres maladies chroniques. Comme je l'ai dit, il y a des interactions entre les diverses maladies.
J'ai exposé la situation à notre département d'endocrinologie et j'ai été surpris de constater qu'aucun des spécialistes ne savait que le diabète était un facteur de risque de la démence et que l'un des premiers signes de la démence était l'incapacité d'utiliser l'insuline. Ils ne s'étaient pas rendu compte de cette interaction. Ce n'est pas la première fois qu'on en parle d'ailleurs, les spécialistes ne communiquent pas entre eux et n'intègrent pas leur savoir à celui de leurs collègues. Ainsi, toute étude des maladies chroniques doit se pencher sur l'intégration des différentes maladies.
Quant aux autres choses qu'on peut étudier, d'autres pays ont mis en oeuvre des stratégies nationales sur la démence, et j'étudierais certainement ces modèles. La démence devrait être incluse dans toute étude qui est entreprise. C'est le premier message.
J'ai un deuxième message, et il a déjà été soulevé. Il faut vraiment se pencher attentivement sur les soins de santé communautaire. Quand on examine la cause de la crise dans les hôpitaux — le manque de lits, la crise dans les autres niveaux de soins —, on constate que la cause principale n'est pas ce qui se passe à l'hôpital. Les hôpitaux et les établissements de soins de longue durée ont une certaine part de responsabilité, mais nous avons un système de soins de santé communautaires qui n'est pas intégré dans lequel il y a un manque de communication. Le système n'a pas la capacité nécessaire pour empêcher les gens de se rendre à l'hôpital. Donc, il y a un débordement vers les établissements de soins de courte durée, qui sont les plus coûteux. Les établissements de soins de courte durée deviennent donc l'endroit où on se rend par défaut pour tous ces problèmes de santé. Or, il n'est pas conçu pour le traitement des troubles chroniques multiples ou la démence. Très peu de spécialistes de la démence travaillent dans le réseau des soins de courte durée. Si nous voulons régler les problèmes du réseau et étudier les soins des maladies chroniques, il faut se pencher sur la façon dont le réseau s'occupe des maladies chroniques.
Un autre problème est celui des soins de longue durée. Il y a des problèmes dans ce secteur, mais, encore une fois, ils sont liés aux soins de santé communautaires. Des études indiquent que 20 à 30 p. 100 des patients n'ont pas besoin d'être dans les établissements de soins de longue durée. J'ai des réserves par rapport à la méthodologie utilisée dans le cadre de ces études. J'ai une formation en recherche, et la méthodologie peut être partiellement remise en question. Cependant, lorsque je parle à des directeurs d'établissements de soins de longue durée, ils disent que 20 à 25 p. 100 des gens n'ont plus besoin d'y être. Ces gens avaient une maladie qui nécessitait une période de récupération prolongée; ils se sont rétablis et ont pris du mieux. Puisqu'ils avaient déjà vendu leur maison et qu'ils n'avaient aucun endroit où aller, le centre d'hébergement et de soins de longue durée est devenu leur nouveau domicile.
D'autres personnes vont dans les centres d'hébergement et de soins de longue durée parce qu'elles n'ont pas les moyens d'aller en résidence. Essentiellement, on punit les aînés à faible revenu en les obligeant prématurément à aller dans les établissements de soins de longue durée plutôt que de leur trouver un autre endroit où vivre. En somme, pour les personnes qui ont une maladie chronique et qui ont besoin de soins, ce dont nous avons besoin, ce sont des résidences subventionnées plutôt que des centres d'hébergement et de soins de longue durée.
Ce n'est pas seulement les aînés à faible revenu qui sont pénalisés; nous en faisons tous les frais. Ils occupent des lits des établissements de soins de longue durée ou de centres d'hébergement dont les hôpitaux de soins actifs ont si désespérément besoin. C'est une des raisons qui explique pourquoi il y a un surplus de patients dans les soins de longue durée, des crises dans les autres niveaux de soins, un manque de lits dans les hôpitaux et des services d'urgence bondés. Les établissements de soins de longue durée sont remplis de gens qui ne devraient pas y être. Si la société leur fournissait des soins appropriés, ces gens seraient dans des résidences subventionnées et nous n'aurions pas à construire autant de centres d'hébergement et de soins de longue durée que ce que les gens disent qu'il est nécessaire. Nous devons en construire plus, mais pas autant.
Que pouvons-nous faire dans la collectivité? Cela relève de votre compétence et non de la mienne. Je ne suis qu'un médecin — c'est encore pire, j'enseigne la médecine —, mais c'est à prendre ou à laisser.
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Il y a une armée de personnes âgées bénévoles dans le milieu. Avons-nous des crédits d'impôt pour les bénévoles? Je ne le sais pas. Voilà certainement une solution. Pouvez-vous trouver une façon d'inciter cette armée de bénévoles à venir donner un coup de main dans le système de santé? Vous donnez déjà des crédits d'impôt aux personnes qui fournissent des soins, mais il faut étudier dans quelle mesure on peut leur offrir du soutien. Ont-ils toujours le droit de cotiser au RPC pendant qu'ils assument le rôle de soignant?
Si une personne souffre de maladies chroniques multiples et qu'aucun membre de sa famille ne prend du temps pour s'en occuper, elle aboutira à l'hôpital. C'est presque garanti. Donc, comme d'autres l'ont dit, il faut vraiment étudier la question du soutien aux soignants. Nous avons parlé des mesures incitatives fiscales, mais cela n'aide pas vraiment les aînés à faible revenu. Pensez à d'autres mesures incitatives qui pourraient inciter les aînés à faible revenu à faire du bénévolat.
Nous avons parlé de la mobilité et des chutes, qui sont d'autres problèmes importants. Nous devons vraiment penser à créer des programmes d'exercice qui visent à prévenir la perte de forme physique. Il y a beaucoup d'études à ce sujet. Ensuite, il faut trouver des façons d'inciter les aînés à s'inscrire dans ces programmes. Nous ne devons pas nous contenter de les créer; il faut inciter les gens à participer.
En fin de compte, ce qu'il faut savoir, c'est que le maillon faible du système de santé se situe au niveau des soins de santé communautaires. Je suis entièrement favorable à ce qu'on examine les questions liées à la promotion de la santé et aux mesures préventives. Cependant, il faut reconnaître qu'un jour, les gens seront malades; à ce moment-là, nous devrons avoir un système de soins de santé communautaire assez bien structuré et assez intégrer pour pouvoir éviter de les hospitaliser. Actuellement, ce n'est pas le cas. Nous avons une foule de silos de santé communautaire qui sont en concurrence pour le financement. Ils ne collaborent pas et ne sont pas tenus de rendre des comptes. En réalité, il n'y a aucun lien entre les soins communautaires et les soins de courte durée. Donc, il faut revoir le système en soi. Si vous faites une étude, il faudra examiner, dans son intégralité, la structure même du système.
Merci.
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J'aimerais commencer par vous remercier de la question. Elle se termine sur les soins qu'il faut prodiguer de façon à prévenir les maladies chroniques. J'aimerais d'abord préciser que puisqu'il s'agit d'une des pratiques liées aux soins primaires, cela se fait toujours selon une approche de collaboration.
Essentiellement, nous avons tous parlé des mêmes sujets. Les points communs ont été la collaboration; le fait de regrouper les services de soins de santé sous un même toit; l'intégration des services et de la recherche; la réforme des soins primaires. Donc, tout pris en compte et pour répondre à votre question, je dirais que nous n'avons peut-être pas besoin de plus de chiropraticiens pour nous aider à faire le travail. Ce dont nous avons besoin, c'est d'un meilleur accès aux patients, et inversement.
Nous devons aussi faire preuve de beaucoup plus d'imagination dans la diffusion de l'information. Pour tous les praticiens qui ont du succès avec leur cabinet, en médecine, en psychiatrie, en chiropratique... Pour les infirmières et infirmiers praticiens, le problème, c'est la gestion du temps. Renseigner les patients sur ce dont ils pourraient avoir besoin de savoir n'est plus toujours possible. Souvent, on peut le faire; on se réserve plus de temps. Mais nous devons être beaucoup plus créatifs à cet égard.
Premièrement, je crois que la documentation doit être uniformisée, non seulement au sein d'une discipline, mais aussi sur le plan interdisciplinaire. Deuxièmement, utiliser les médias sociaux et afficher des informations sur nos sites Web et sur Facebook est tout à fait approprié.
J'aimerais proposer un autre petit programme qui pourrait être utile, particulièrement pour des intervenants à l'échelon fédéral. Tous nos patients arrivent maintenant avec ce qu'ils ont lu sur Internet: « j'ai telle ou telle maladie »; « j'ai lu telle chose »; « est-ce utile? »; « je vieillis »; « mon mari — ou ma mère — a ceci ou cela »; « que dois-je faire par rapport à cela? » Donc, les gens font des recherches.
Le ministre fédéral de la Santé et les premiers ministres des provinces nous ont rappelé l'importance des recommandations pour la pratique clinique. Actuellement, parmi les nombreux aspects, ces recommandations demandent aux praticiens de trouver des traitements pour les maladies chroniques. Ce que le gouvernement fédéral devrait peut-être faire, ce serait de prendre ces recommandations pour la pratique clinique, de les étudier de façon transversale et de se prononcer sur un mécanisme officiel pour réunir les méthodes éprouvées pour le traitement d'une maladie. Ensuite, on les publierait pour favoriser l'autonomie du public en matière de santé.
Si vous avez le diabète et que vous faites des recherches en ligne pour savoir ce que vous pouvez faire, plutôt que de trouver un genre d'approche dont vous doutez de la validité, de l'utilité ou de la sécurité, on aurait un rapport officiel. Ainsi, quand on ferait une recherche sur le diabète, on verrait: « voici ce que font tous les praticiens suivants; des études ont démontré que ces traitements sont efficaces jusqu'à un certain point, particulièrement lorsqu'on les utilise en combinaison avec l'approche de tel ou tel praticien. »
Nous savons que tous nos patients ont beaucoup recours aux soins autoadministrés. Je pense que nous avons un rôle à jouer. Si nos recommandations pour la pratique clinique sont toutes bien conçues, que nous les comparons et que nous leur trouvons des points communs — transversalement plutôt qu'en silos —, nous pourrons aussi être utiles à ce chapitre en plus des traitements et de l'information que nous donnons aux patients dans les cliniques.
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Si vous le permettez, je citerai brièvement un exemple tiré de mon cabinet privé. Je vais vous donner l'exemple d'une femme de 65 ans qui, il y a environ deux ans, est arrivée à mon cabinet et qui souffrait de douleurs osseuses généralisées. Elle avait aussi le diabète. Elle n'avait pas passé de test de mesure de la densité osseuse depuis près de 10 ans. Nous avons téléphoné au médecin. La patiente avait négligé ses soins de santé. Nous l'avons admise et, évidemment, nous avons découvert qu'elle souffrait d'ostéoporose à un stade très avancé.
Manifestement, cela a une incidence sur le traitement qu'on donne à une personne. Nous l'avons référée à un bon physiothérapeute, pour l'aider à préparer un programme sécuritaire, et à une nutritionniste, pour l'aider à mettre au point un programme favorisant la santé osseuse.
Plus tard, cependant, elle a parlé de sa petite-fille, qui avait environ 15 ans à l'époque et qui souffrait de maux de tête vers 11 heures, presque tous les matins. La dame a amené sa petite-fille, qui était atteinte d'obésité modérée et qui était l'enfant unique d'un parent seul. Elle avait tendance à ne pas manger son déjeuner. Bien sûr, à 11 heures, elle était en hypoglycémie, elle sortait et allait prendre une boisson gazeuse. Elle en buvait beaucoup, peut-être cinq ou six canettes par jour, comme un nombre effarant de jeunes le font. Les boissons gazeuses contiennent de l'acide phosphorique, qui élimine le calcium des os. On parle d'une enfant qui a des antécédents de diabète et d'ostéoporose dans sa famille. On a une alimentation pauvre en produits laitiers et riche en acide phosphorique; à cela s'ajoute le manque d'activité physique de la jeune fille. Elle a le prédiabète et elle sera probablement susceptible de développer l'ostéoporose plus tard au cours de sa vie, si ce n'est d'autres maladies.
C'est un bon exemple des facteurs que les praticiens en soins primaires examinent; ensuite, ils se demandent dans quelle mesure ils peuvent collaborer avec les praticiens des autres spécialités pour faire en sorte que la personne reçoive des soins appropriés. Cela s'applique particulièrement aux chiropraticiens, pour tout ce qui a trait aux aspects musculosquelettiques.
Pour tous les praticiens en soins primaires, avoir facilement accès à des laboratoires et à de l'équipement d'imagerie médicale est essentiel. C'est un des obstacles. Cela varie d'une province à l'autre. Cet équipement permet d'informer les patients et joue un rôle dans l'intervention précoce et la prévention. Il nous permet d'accroître nos activités et facilite la consultation avec les autres praticiens. Encore une fois, le message doit être omniprésent et universel. Tous les praticiens doivent tenir le même discours.
Vous avez parlé d'obstacles. Pour nous, ce sont souvent les différences qui existent entre les provinces. Maintenant que j'ai travaillé à l'échelon fédéral, je vois à quel point la situation diffère d'une province à l'autre, non seulement pour ce qui est de la protection médicale, mais aussi du point de vue de l'accès aux laboratoires et à l'équipement d'imagerie médicale. Dans la collectivité, avec les médecins, il y a eu une nette amélioration au chapitre de la communication et de l'aiguillage, mais il y a encore des obstacles. Nous avons fait énormément de recherche ces 10 dernières années, et c'est très utile. Cependant, nous devons en faire davantage, et il faut plus de recherche interdisciplinaire. Voilà quelques-uns des faits saillants.
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Nous avons beaucoup de patients arthritiques. J'ai demandé à mon mari, qui était chiropraticien avant d'être atteint de démence précoce, s'il avait remarqué que nos patients vieillissent, et il m'a demandé si j'avais remarqué que nous vieillissons aussi. Nous nous occupons de gens qui ont notre âge et de quelques membres de la famille.
Ce que nous voyons le plus, ce sont des problèmes d'arthrite, de mobilité et de détérioration des capacités, et je pense que c'est la meilleure chose que nous offrons.
La structure et les fonctions sont toujours interreliées. Si les gens ne sont pas capables de bien bouger, ils ne dorment pas bien. Ils ne mangent pas bien. Ils deviennent isolés socialement et peuvent se sentir déprimés. On ne saurait trop souligner le lien entre le corps et l'esprit. Tôt ou tard, on finit par être atteint d'une maladie chronique.
Je travaille comme membre du personnel médical pour le RPC. Je fais des audiences une fois par mois. J'en ferai au cours des trois prochains jours. Nous voyons tellement de gens souffrant de fibromyalgie qui sont incapables de trouver des solutions sur le plan psychologique ou rhumatologique. La seule chose que nous pouvons offrir à ce jour, c'est un peu d'encadrement. La prévention précoce comprend ce que nous pouvons offrir d'un point de vue physique et l'orientation d'un patient vers tous ces spécialistes pour prévenir certains des premiers effets psychologiques de la fibromyalgie.
Vous avez également donné des exemples de bons centres qui collaborent. Le plus connu, c'est le service de soins de santé de la famille de St. Mike, qui compte un centre de chiropratique et de physiothérapie et qui fonctionne très bien. Il y a des exemples à Calgary. Il y en a d'excellents en Europe du Nord, où les étudiants en chiropratique et en médecine suivent les mêmes cours à l'université jusqu'à leur quatrième année. Les chiropraticiens sont dans les hôpitaux, dans les centres de santé gérés par l'État. Il n'y a aucune barrière. Nous avons beaucoup à apprendre des pays de l'autre côté de l'océan.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Je veux tous vous féliciter pour les exposés très détaillés que vous avez faits.
Je crois que ce qui m'importe, c'est que vous n'avez pas parlé uniquement de santé physique. Vous avez parlé de santé mentale, et aussi bien sûr des aspects sociaux des maladies chroniques et du vieillissement, et c'est vraiment important.
Vous parlez tous du besoin d'établir une stratégie et de ne pas simplement examiner une maladie, mais bien le problème dans son ensemble.
Docteur Molnar, vous m'avez vraiment touchée lorsque avez dit que nous avons un surplus de lits, non seulement parce que nous avons besoin de soins à domicile, mais aussi parce que les gens sont pauvres. Ils vivent dans des établissements de soins pour bénéficiaires internes parce qu'ils n'ont pas les moyens de vivre ailleurs.
J'aimerais savoir si vous voyez une stratégie, car ce sera la plus grande difficulté à laquelle nous ferons face pour ce qui est de fournir des soins à l'avenir. C'est déjà commencé. À votre avis, mis à part le recours au modèle de soins primaires intégré, comme Mme Milton l'a dit, selon lequel différentes personnes collaborent dans le cadre de leur pratique pour fournir des soins, comment peut-on associer cela avec les soins à domicile, les soins communautaires et les services sociaux, par exemple, de sorte que l'on peut avoir la stratégie globale dont vous parlez? Quelle forme prendrait la stratégie, selon vous? La considérez-vous comme quelque chose que nous devrions examiner dans un accord de 2014?
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Ce sont de très grandes questions; c'est le genre de questions auxquelles le président de l'AMC devrait répondre, puisqu'il a beaucoup plus d'expérience que moi. Je peux seulement répondre à une partie de vos questions, et vous pourriez ensuite vouloir laisser la parole à John si cela vous va.
Plusieurs liens ne se font pas. Pour ce qui est des spécialistes, ils sont indifférents aux besoins des médecins de famille. Ainsi, si des médecins de famille ou des infirmières d'un CASC, c'est-à-dire un centre d'accès aux soins communautaires, ont un problème qui nécessite l'intervention rapide d'un spécialiste, ils ne peuvent pas obtenir d'aide. Le mot que je n'ai cessé de noter pendant que j'écoutais les différentes interventions, c'est « responsabilisation »: pour bien des sous-spécialités, il n'y a pas de responsabilisation.
Nous gardons des listes d'attente, nous nous assurons que les patients reçoivent les services, mais nous n'avons pas de responsabilité pour ce qui est de voir tel patient à un moment précis. Il n'y a vraiment pas de lien entre les cliniques externes et les établissements hospitaliers. Il faut trouver le moyen de relier les spécialistes qui travaillent dans les hôpitaux et ceux qui travaillent ailleurs, et faire en sorte qu'ils acceptent volontiers d'être responsables devant les médecins de famille, les CASC, et qu'ils peuvent accéder rapidement à ces domaines d'expertise.
C'est ma petite contribution, mais pour le reste de vos questions, je dois m'en remettre à des gens qui en savent plus que moi sur le système en général.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Je vous remercie tous de votre présence.
Mes questions s’adresseront au Dr Molnar.
J’ai déjà fait partie d’un conseil de santé — dans la plus grande région sociosanitaire de la Saskatchewan. Cela fait environ trois ans que je n’y suis pas allée, mais je sais que d’une manière générale, la part du lion d’un budget provincial va à la santé et que celle du budget de la santé va aux soins actifs.
Je me souviens qu’à l’époque, nous avions ce qu’on appelait une « soupape unidirectionnelle ». Nous sommes passés au modèle du district de santé et ensuite à celui de la région sociosanitaire. Nous pouvions prendre de l’argent consacré aux soins actifs et l’investir dans les services communautaires, mais nous ne pouvions pas faire l’inverse, et il y a probablement des raisons évidentes à cela.
Je veux poser une question au sujet de votre diapositive qui a pour titre « soins communautaires: la vraie cause de la crise dans les ANS et du manque de lits dans les hôpitaux ». Nous avons parlé des modèles de soins primaires, d’encourager la collaboration des fournisseurs de soins de santé. À la fin de la diapositive, vous dites que l’hôpital est le site le plus dispendieux pour les soins, qu’il devient le système de soins par défaut et que cela doit changer. Que feriez-vos pour changer les choses? Qu’est-ce qui devra être fait?
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Nous devons tout d’abord renforcer les soins communautaires.
Mon domaine, c’est celui de la démence. Bon nombre de gens atteints de démence deviennent malades à cause d’une infection bénigne — comme une infection de la vessie — qui évolue jusqu’à se transformer en épisode septique, et qui les amène à devoir aller à l’hôpital et à y rester pendant des mois.
Ce dont on a vraiment besoin, c’est un système de soins communautaires qui permet aux gens — les infirmières d’un CASC, les prestataires de soins à domicile — de déceler les symptômes rapidement, de permettre au patient de voir un médecin de famille rapidement, ou d’avoir des visites à domicile.
À Toronto, on fait des visites à domicile. Bon nombre d’aînés ne peuvent pas se rendre dans une clinique externe; ils peuvent seulement se rendre à l’urgence en ambulance. Il nous faut un système qui leur permet d’aller consulter un médecin de famille, ou qui amène des médecins de famille ou des infirmières praticiennes vers eux très vite; un système qui règle les problèmes graves rapidement et qui a un accès immédiat à des spécialistes dans des domaines dont ils ne pensent pas pouvoir s’occuper eux-mêmes. Ces spécialistes devraient avoir des liens avec l’hôpital et pouvoir avoir des admissions non urgentes — un vocabulaire que nous n’aimons pas utiliser dans les soins actifs —, peut-être des admissions pour une semaine, afin d’éviter des admissions pour trois mois.
Il nous faut vraiment examiner les systèmes d’autres pays pour voir comment nous pouvons rejoindre les patients plus vite et leur fournir de l’aide plus vite, avoir accès aux spécialistes et favoriser des admissions de courte durée contrôlées plutôt que de longue durée. À mon avis, c’est ce qu’il manque au système à l’heure actuelle.
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Je vais tenter d'y répondre.
Ma province est Terre-Neuve-et-Labrador. Télésanté, qui a été mentionnée par Bob, est mise à l'essai par une équipe du Labrador, une région où il est difficile de prodiguer les soins de santé dans les collectivités rurales. Le projet a grandement amélioré la situation. Encore une fois, il s'agit de trouver plusieurs façons de résoudre le problème.
En ce qui concerne les modèles de financement, en Alberta, par exemple, il existe un système qui permet d'attirer du financement pour les réseaux de soins primaires. Les fonds servent à fournir des services non médicaux aux groupes qui acceptent de prodiguer des soins de santé intégrés, ce qui leur permet de mettre sur pied des cliniques sans rendez-vous, des cliniques de podologie, des services de consultation sur le diabète et sur la nutrition, etc. Ce réseau de soins primaires permet de rassembler des groupes de médecins.
Au sujet de ce qui pourrait être fait à l'échelon fédéral, j'aimerais revenir à la question des pratiques exemplaires et à celle de l'innovation. En effet, il n'existe aucun système intégré pour recenser les pratiques exemplaires. On déploie de grands efforts au Labrador, on fait de même en Saskatchewan, et il ne faut pas oublier le centre d'urologie de Saskatoon. L'Alberta, et peut-être l'Ontario, accomplit aussi de très bonnes choses. Toutefois, on ne diffuse pas l'information à ce sujet, et il n'existe pas de centre de pratiques exemplaires. Le conseil de la santé considérait peut-être que cela faisait partie de son mandat, mais rien ne s'est jamais concrétisé.
Il faut aussi parler d'innovation; comment encourager et financer des modèles qui essaient de nouvelles approches? Si vous ne laissez pas les nouvelles idées se former et livrer leurs bons ou leurs mauvais résultats sans leur mettre de bâtons dans les roues, vous n'irez pas loin. C'est pourquoi l'Association médicale canadienne voudrait bien que le gouvernement fédéral envisage la création d'un centre d'innovation. On parle de débloquer des fonds pour ce projet; c'est un bon début et nous pensons qu'il ne faut pas s'arrêter là.
En résumé, si vous voulez solidifier les assises déjà en place, il vous faut des mécanismes qui vous permettent de recenser et de favoriser les pratiques exemplaires, comme financer les équipes qui mettent sur pied des approches innovatrices, etc. En fait, c'est l'une des premières choses que l'on a laissé tomber lorsqu'on a signé l'accord de 2004. On a réservé certaines sommes pour la réforme des soins primaires, et cela a donné le coup d'envoi aux équipes de notre province. Cela pourrait donc être une solution.
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Je ne pense pas que je devrais servir de référence pour les problèmes concernant un mode de vie sain, car il s'agit d'un problème qui dure toute la vie.
Les gens ont tendance à rechercher le plaisir et à éviter la douleur; il s'agit d'un comportement assez universel. Il s'ensuit que les gens, à moins qu'on commence à les entraîner lorsqu'ils sont très jeunes, ne réagissent pas aussi bien au message tant qu'ils ne l'ont pas assimilé ou qu'ils n'ont pas vécu d'évènement traumatisant.
Nous pourrions examiner deux modèles. Le premier est le programme de lutte contre le tabagisme, qui produit enfin de bons résultats chez les jeunes, puisque le taux de tabagisme est à la baisse. L'autre modèle est celui de la prévention dentaire, qui est, lui aussi, axé sur le plaisir. En effet, les gens veulent bien paraître. Dans le milieu de la chiropractie, on dit souvent que si la colonne vertébrale des gens se trouvait en avant, ils y feraient plus attention. Toutefois, les choses ne sont pas ainsi, et leur colonne doit être douloureuse pour qu'ils s'en occupent.
Une autre approche pourrait consister à examiner les modèles qui ont donné de bons résultats. En effet, notre pratique est toujours axée sur la capacité et sur la façon dont une personne fonctionne, mais il faut que les gens éprouvent de la douleur avant d'être prêts à nous écouter.
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Dans ma province, 35 p. 100 des praticiens qui pratiquent la médecine en ce moment seront retraités d'ici cinq ans, si l'on considère qu'ils prendront leur retraite à 65 ans. Toutefois, un nombre considérable de ces praticiens ne prennent pas leur retraite de la même façon que la génération précédente. Ils modifient simplement la façon dont ils travaillent. Ils ont toujours énormément à offrir. Ils ont des compétences qu'ils souhaitent transmettre. Par conséquent, ils se retirent des domaines les plus aigus et les plus exigeants physiquement de leur spécialité pour exercer des activités un peu moins excitantes sur le plan physique. Voilà un des facteurs.
Notre pays devrait viser à être autosuffisant en matière de médecins. Cela nous amène à nous questionner sur la signification de cet énoncé.
Au Canada, le nombre de personnes qui étudient la médecine s'est accru énormément. Cependant, il y a encore plus de Canadiens qui étudient la médecine à l'étranger qu'il y en a ici. Cela soulève toutes sortes de questions à propos de leur rapatriement.
Les gens ont avancé divers arguments, tant de nature juridique que d'autre nature, qui soutiennent que les personnes qui ont été formées à l'étranger et qui ont passé l'examen canadien devraient être admises dans le programme d'internat, par exemple, au même rythme que les diplômés canadiens. À l'heure actuelle, cette question s'est résolue d'elle-même.
Le problème en ce qui concerne les postes d'interne, c'est que leur nombre est insuffisant. Il faudrait probablement que nous créions 1,2 poste d'interne par diplômé canadien. Toutefois, si 3 500 Canadiens ont obtenu leur diplôme ailleurs, les chiffres ne coïncident pas.
De plus, nous ignorons quels postes d'interne seraient appropriés. De quel nombre de médecins de famille, exprimé en pourcentage du nombre total de médecins qui sortent des écoles de médecine et des programmes d'internat, avons-nous, ou aurons-nous, besoin? Si les maladies chroniques devaient constituer le nouveau paradigme, et c'est le cas, devrions-nous axer davantage nos efforts sur les spécialités, les disciplines et les programmes d'internat qui produisent effectivement ce genre de diplômés, plutôt que sur des programmes extrêmement spécialisés, comme la chirurgie générale?
Pour ma part, par exemple, je ne possède pas de données à cet égard. Dernièrement, j'en ai pris conscience parce que les internes formés ont eu du mal à trouver ensuite des emplois.
Voilà le contexte. Ensuite, il faut déterminer comment nous allons nous occuper des médecins qui ont été formés à l'étranger, qui ne sont peut-être pas Canadiens, mais qui souhaitent émigrer au Canada. Je sais pertinemment que la Fédération des ordres des médecins du Canada envisage actuellement d'adopter un processus simplifié pour délivrer des permis aux médecins, qu'ils aient été formés ici ou à l'étranger.
Cela pourrait résoudre certains de ces problèmes. Ensuite, nous avons des problèmes de capacité à régler selon qu'ils viennent faire leur internat ici parce que, une fois de plus, la question se posera. Encore une fois, je ne peux malheureusement pas vous offrir une réponse simple. Celle-ci illustre la subtilité de ce qui constitue un système complexe adaptif.
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Je pense que cette question s'adresse à moi.
L'Association médicale canadienne s'est déplacée au cours de la dernière année pour interroger les Canadiens sur ce qu'ils attendent du système de santé. Nous avons interrogé environ 2 400 personnes face à face, et nous avons reçu, de plus, quelque 4 000 courriels. Nous avons produit divers documents à partir des renseignements recueillis, dont le dernier en date, La parole en action, qui relate en quelque sorte les propos que nous avons entendus.
Les Canadiens nous ont très clairement dit que ce qu'ils veulent, c'est un système sans failles et sans cloisons. Ils ne veulent plus du fouillis actuel qui découle du système mis en place dans les années 1940 et 1950 et qui était axé sur le traitement des maladies aiguës. À cette époque, on traitait les maladies aiguës, et les soins étaient offerts par les médecins essentiellement dans les hôpitaux. C'est ce sur quoi reposent le régime d'assurance-maladie, ainsi que son financement. C'est ce sur quoi repose la Loi canadienne sur la santé.
Ils ont proposé d'examiner la situation sous divers points de vue. Avec l'aide de l'Association des infirmières et infirmiers du Canada et de divers autres groupes d'intervenants — au nombre de 60, si je me souviens bien, qui ont cosigné l'étude avec nous —, nous avons extrait les grands principes.
Ils ont examiné la situation essentiellement du point de vue de l'amélioration du rapport qualité-prix, des soins et de l'expérience vécue par le patient. On s'est donc posé la question suivante: si j'étais atteint d'une maladie chronique, quels soins pourrais-je obtenir dans le système de santé? On trouve beaucoup de bons exemples à ce sujet au Canada, en Amérique du Nord et partout sur la planète, mais le problème, c'est de recueillir les données et de mesurer les résultats.
Car au bout du compte ce qui importe, ce sont les résultats. Et nous avons un écart énorme dans ce domaine. Au sein des pays de l'OCDE, nous nous classons cinquième au chapitre des investissements, en pourcentage du PIB, mais 27e ou 28e seulement en ce qui concerne les résultats, tels que définis par l'organisation. L'écart est donc très grand. Le problème n'est pas tant le montant des investissements, que la façon de les faire.
Pour répondre à votre question, je dirais encore une fois qu'il n'y a pas de solution simple. Toutefois, si on examine le système du point de vue d'une personne atteinte d'une maladie chronique, on trouve rapidement les failles dans un système où 30 p. 100 des personnes âgées ne peuvent pas voir un médecin parce qu'elles ne sont pas en mesure de se déplacer — parce qu'elles n'ont pas de voiture ou n'ont personne pour les conduire. Elles attendent donc et lorsqu'elles font une chute, c'est l'ambulance qu'on appelle.
On peut donc décrire un système par ses failles. Ce qu'on peut se demander ici, eh bien, c'est comment ferait-on pour voir les failles s'il n'y en avait pas? C'est très difficile de les voir assis à cette table, mais si vous rendez visite à une personne de 85 ans qui prend ses pilules pour le diabète un jour sur deux parce qu'elle n'a pas les moyens de faire autrement, on commence à voir où elles se trouvent, et elles portent parfois un nom.
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Merci, madame la présidente.
Je vais poursuivre sur la lancée, car j'entends toutes sortes d'idées intéressantes aujourd'hui. J'en retiens surtout qu'il n'y a pas de système parfait. Les témoins ont tous des réponses différentes. Ils ont tous des problèmes ou des défis différents.
Ce que je tente de dégager, ce sont les avenues que le comité devrait examiner dans ce dossier. Vous avez tous soulevé des points différents qui concernent votre champ d'expertise, puis vous avez parlé d'éducation, d'un programme de déjeuner, d'un programme des arts pour les personnes âgées, etc.
Au bout du compte, où est le problème à votre avis? Nous avons 13 provinces et territoires qui assurent la prestation des soins de santé à l'échelle du pays, et qui sont tous confrontés à des problèmes différents de ceux du gouvernement fédéral. En ce qui concerne notamment les commentaires voulant que l'on ait raté quelques cibles du dernier accord, quelle est, à votre avis, notre responsabilité dans l'établissement de priorités qui imposent un carcan aux provinces qu'elles ne souhaitent peut-être pas?
Étant donné qu'il n'existe pas de solution parfaite, notre approche visant à encourager les provinces à régler certains problèmes et à leur fournir un financement stable pour qu'elle adopte la technologie et s'inspire des solutions mises en place au Canada, en Amérique du Nord et partout dans le monde, est-elle adéquate?
Ma question s'adresse probablement à l'AMC, mais je serais curieux d'avoir l'opinion des autres également. Je vais vous demander d'être brefs, car nous n'avons que cinq minutes.
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Je crois que le rôle du gouvernement fédéral, si j'ai bien compris votre question, est multiple. Il est le porte-parole du Canada en matière de santé sur la scène internationale. Il a la responsabilité, à mon avis, du point de vue de nos membres, de s'assurer que les règles sont équitables partout. Que l'on habite à Iqaluit ou à Goose Bay ou dans le centre-ville de Toronto, il n'est pas déraisonnable de s'attendre à avoir, partout, un accès à peu près similaire à une gamme de soins à peu près similaire et d'une qualité à peu près similaire.
Les défis à relever sont certainement beaucoup plus importants dans les régions rurales, mais je crois que d'un point de vue pratique, si je comprends bien les relations entre le gouvernement fédéral et les provinces, on ne peut demander à un gouvernement de rendre des comptes à un autre. On aboutit alors à une situation de « premier entre égaux ».
Il faut, à mon avis, regarder la situation du point de vue du patient. Si le système est responsable devant le patient, au bout du compte, c'est le patient qui doit avoir un recours. Nous avons déjà parlé d'une charte du patient, et c'est en fait l'une des idées lancées par l'un de mes prédécesseurs. Je crois que nous avons là le fondement d'un mécanisme qui permettrait au système de servir l'intérêt du patient, celui qui, en fait, le subventionne et l'utilise, au besoin.
Pour en revenir à la façon de le faire, il y a maintes façons de procéder. Mais l'important, au bout du compte, c'est de le faire en mettant l'accent sur le patient — qu'est-ce qui est équitable pour lui? Les Canadiens nous ont dit très clairement d'un bout à l'autre du Canada qu'ils voulaient un système équitable; ils veulent avoir ces possibilités. Comment procéder? La charte du patient pourrait être la solution.
C'est la version courte, à mon humble avis.
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Merci, madame la présidente.
J'aimerais également remercier chacun des témoins qui sont ici aujourd'hui. J'ai bien écouté tous vos exposés. J'aimerais remercier en particulier le Dr Haggie d'avoir mentionné le soutien que le gouvernement offre aux aidants grâce aux crédits d'impôt. Je vous en remercie donc.
J'aimerais maintenant parler du sujet abordé par mon collègue, M. Williamson, et par M. Morin, qui est assis de l'autre côté. Le fil conducteur de leurs propos respectifs semble être les mesures préventives. Mme Mildon a parlé — et je l'ai en fait noté — de la possibilité de bien diagnostiquer l'hypertension. Si ce problème n'est pas diagnostiqué, il peut mener à un ACV ou à une maladie du coeur. J'ai entendu dire qu'on peut retarder l'apparition d'une maladie chronique si on peut amener les jeunes patients à changer leurs habitudes de vie. Je tiens donc à vous remercier tous les deux d'avoir abordé ce sujet.
Comme les jeunes — nous l'avons tous été et certains d'entre nous le sont encore — ont tendance à se voir différemment, à se croire invincibles, et à penser qu'ils ne souffriront jamais d'une maladie chronique ou d'un autre type de maladie, je me demande... J'ai déjà entendu dire qu'il faudrait sensibiliser les élèves dans les écoles, etc., et je me demande quel groupe d'âge, à votre avis, devrait être ciblé afin que plus tard dans la vie — lorsqu'ils seront âgés de 60 ans ou de 70 ans — ils ne souffrent pas d'une maladie chronique, tout en étant réalistes à propos de ce qu'ont tendance à faire les jeunes? Je suis juste curieux de savoir ce que vous en pensez, et je ne sais pas trop à qui la question est destinée.
Un peu plus tôt, lorsque nous parlions de tous les éléments qui influent sur une maladie chronique ou le vieillissement, nous avons parlé des maladies physiques et des troubles neurologiques et de certains problèmes biologiques. Nous avons également parlé un peu des troubles mentaux, mais sans vraiment nous étendre sur le sujet.
Certaines études publiées récemment révèlent, si je me souviens bien, qu'un grand nombre de personnes âgées souffrent de dépression, notamment parce qu'elles sont isolées. Les données montrent, en fait, que le taux de suicide chez les personnes âgées est extrêmement élevé et qu'elles réussissent habituellement leur tentative. Que pensez-vous de cette situation?
Lorsque nous avons parlé des lacunes dans les services, vous avez mentionné que les Canadiens ne veulent pas qu'il y en ait. Ils veulent que ce soit un fil continu. On ne peut pas dire: « Je suis malade; examinez-moi et ne vous occupez plus de moi ensuite, ou encore, soignez cela sans vous occuper du reste. » Nous savons que le corps est une machine très complexe dont toutes les parties sont interreliées.
Il n'y a pas de services en santé mentale. Si vous vous fracturez le bras, vous vous rendez à l'urgence et on vous met un plâtre. Si vous souffrez d'une maladie mentale, vous avez de la difficulté à obtenir de l'aide. Que pouvons-nous faire, donc, pour aider ce groupe très à risque de manière concrète? Que pouvons-nous faire, à votre avis, pour ce groupe dans le réseau? Il n'y a pas beaucoup d'infirmières psychiatriques dans une collectivité. Il n'y en a pas beaucoup tout court. Il n'y a pas beaucoup de médecins de famille qui savent comment traiter les cas de dépression et les problèmes de vieillissement. Il y a là une lacune énorme. Que pouvons-nous faire pour la combler?