:
La séance est ouverte. Merci beaucoup d'assister à la 66
e séance du Comité permanent de la justice et des droits de la personne.
Conformément à l'ordre de renvoi du mercredi 20 juin 2012, nous examinons le projet de loi
Mesdames et messieurs, nous accorderons une heure aux questions et aux exposés des divers groupes, représentés par trois témoins. Nous suspendrons ensuite la séance quelques instants pour effectuer la transition, après quoi nous procéderons à l'examen article par article. Il y a huit amendements, dont nous parlerons en temps opportun.
Tout d'abord, nous accueillons monsieur Andrew Swan, ministre de la Justice et procureur général du gouvernement du Manitoba.
Merci beaucoup de comparaître.
Nous entendrons également George VanMackelbergh, de la Winnipeg Police Association.
Merci beaucoup.
Il y a également Rachel Gouin et Marlene Deboisbriand, des Clubs garçons et filles du Canada.
Nous procéderons dans l'ordre dans lequel je vous ai présentés.
Monsieur le ministre Swan, vous êtes le premier à prendre la parole, pour 10 minutes, je vous prie.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Au nom de la population du Manitoba, je vous remercie de me donner l'occasion de traiter du projet de loi .
Je ne lirai pas mon mémoire mot à mot. Permettez-moi de vous dire pour commencer que nous appuyons le projet de loi . Je félicite le député Parm Gill de l'avoir déposé et le remercie d'avoir rendu visite à l'Assemblée législative du Manitoba pour en discuter il y a quelques temps.
J'indiquerais également d'entrée de jeu que vous êtes tous les bienvenus si vous souhaitez venir au Manitoba pour discuter de la manière dont on pourrait collaborer pour faire de nos communautés des lieux plus sécuritaires.
Nous considérons qu'on peut améliorer le projet de loi et le rendre plus efficace, et c'est le bon moment pour agir.
Ma province d'origine, le Manitoba, est un endroit merveilleux où on louange la diversité. Sachez en outre que Statistique Canada nous a déjà indiqué que notre population est la plus généreuse au Canada. Évidemment, nous nous réjouissons d'avoir de nouveau une équipe de la Ligne nationale de hockey.
Je dois toutefois vous avouer que je ne peux nier les défis que pose la criminalité. Nos taux de criminalité et d'incarcération, comme ceux des autres provinces de l'Ouest canadien, sont plus élevés que la moyenne nationale. À l'instar de la Saskatchewan, le Manitoba affiche les taux de criminalité les plus élevés parmi les provinces, et ce, depuis des décennies.
Notre gouvernement relève ces défis en adoptant une approche équilibrée afin de rendre les communautés plus sécuritaires. Pour cela, il faut notamment adopter des lois adéquates, que ce soit ici ou à Winnipeg, dans notre champ de compétences provinciale. Nous y parvenons en appuyant l'exécution de la loi et agissant avant même que les crimes ne soient perpétrés. Comme vous le verrez dans le mémoire, notre gouvernement a été très actif sur ces trois fronts en adoptant une approche équilibrée afin de s'attaquer aux questions de sécurité publique.
Nous considérons chaque budget que notre gouvernement dépose comme une occasion d'investir dans nos jeunes et de rendre nos communautés plus sécuritaires. Pour cela, il faut assurer une éducation plus poussée et une meilleure formation, offrir davantage de possibilités récréatives et appuyer des groupes comme les Clubs garçons et filles du Canada, qui accomplissent des merveilles. Bien entendu, il faut également travailler main dans la main avec les services de police et d'exécution de la loi de la province du Manitoba.
Pour ce qui est des lois, je ne veux pas me vanter, mais depuis bien des années, le Manitoba fait plus que sa part en soumettant des propositions solides, en collaborant avec le gouvernement fédéral, sans égard aux allégeances politiques, et en travaillant avec les provinces et territoires, toujours sans la moindre partisanerie politique, pour tenter d'améliorer les lois afin de rendre nos communautés plus sûres.
Des défis se posent toutefois dans bien des communautés. Je représente l'Ouest de Winnipeg, un endroit où les gens viennent depuis toujours pour commencer une nouvelle vie. C'est là que mon grand-père s'est installé quand il est arrivé d'Écosse il y a près d'un siècle. S'y sont succédé des vagues d'immigrants d'Islande, d'Italie, du Portugal, du Vietnam, des Philippines et des pays africains. C'est toujours un endroit propice où les immigrants peuvent faire leur nid grâce à notre programme provincial de candidats, qu'il s'agisse de réfugiés ou d'habitants des communautés du Nord à la recherche d'une vie meilleure au Canada.
Je préfère employer le temps qui m'est accordé pour traiter de la promesse et du potentiel que recèlent les jeunes de régions comme la mienne. Je passe du temps dans les écoles secondaires de ma région, comme celles de Daniel McIntyre et de Tec Voc, et j'y vois des jeunes qui réalisent leur potentiel dans leurs études, dans les métiers spécialisés, dans les sports et dans les arts. Malheureusement, je dois vous dire que dans des régions comme la mienne, il y a des jeunes qui ne bénéficient pas de l'encadrement positif qui les aiderait à vivre dans le respect de la loi.
Certains jeunes ne s'investissent pas à l'école, ne s'adonnent peut-être pas aux sports, n'ont peut-être pas foi en la communauté ou ne bénéficient pas d'influences positives afin de les aider à respecter la loi. Ce sont des jeunes qui, disons-le très clairement, sont susceptibles d'être recrutés par les gangs et les organisations criminelles. Ils risquent d'être exploités. Je ne saurais certainement pas dire ce qui est le pire: un jeune aux prises avec un retard de développement comme l'ensemble des troubles causés par l'alcoolisation foetale ou un autre qui est plein de potentiel, mais qui tombe sous l'influence des gangs.
Ne vous y trompez pas: les gangs connaissent la loi. Ils recrutent les jeunes de moins de 18 ans, car ils savent que la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents impose à ces derniers des conséquences très différentes s'ils sont appréhendés par la police. Tragiquement, ils recrutent également des jeunes de moins de 12 ans, car ils savent qu'ils ne s'exposent à aucune conséquence si la police les arrête.
Les jeunes mènent une vie dangereuse au sein des gangs. Ils doivent tourner le dos à leur famille, à leurs amis, à l'école et à la communauté. Bien des jeunes qui sont recrutés, de gré ou de force, par les gangs réalisent qu'il n'y a pas d'avantage financier. Ayant coupé les liens avec tout ce qui constituait leur existence, ils ont de la difficulté à s'en sortir.
Les membres de gangs s'exposent à un plus grand risque de violence ou même de mort. Les organisations criminelles et les gangs pensent évidemment à leurs propres objectifs financiers avant tout, et leur cupidité les pousse vers le trafic de stupéfiants ou d'armes et vers la prostitution. Ces activités sont sources de violence et d'intimidation, et font des ravages dans les communautés comme celle que je représente à Winnipeg.
Les modifications au Code criminel que prévoit le projet de loi sont justifiées. Elles permettraient de mieux définir en quoi consiste le recrutement.
Le présent projet de loi prévoit des conséquences garanties, que nous jugeons nécessaires pour contrer ceux qui voudraient recruter les jeunes dans leurs gangs. Il augmente également l'éventail de sanctions qu'un tribunal pourrait imposer si quelqu'un est déclaré coupable de cette infraction.
Selon ce que m'ont dit les procureurs de la Couronne, avis que je m'attends à entendre également de la police, certaines dispositions actuelles du Code criminel manquent de clarté, comprennent des éléments difficiles à prouver et ne tiennent pas bien compte de la gravité de l'infraction, c'est-à-dire le recrutement de jeunes par un gang ou une organisation criminelle.
Cela dit, nous considérons que le projet de loi pourrait être amélioré. Nous avons deux idées pour y parvenir.
Tout d'abord, le projet de loi ne devrait pas s'appliquer seulement au recrutement criminel de jeune par des gangs, mais également aux menaces et aux mesures coercitives utilisées pour garder les jeunes dans ces organisations criminelles. J'ai parlé à un grand nombre de jeunes et de personnes qui s'occupent d'eux à Winnipeg et ailleurs au Manitoba, et ils m'ont affirmé qu'une fois que les jeunes ont été recrutés, ils découvrent une vie sans avenir, faite de violence et de menaces, et se rendent même compte que leur appartenance au gang restreint le nombre d'endroits où ils peuvent se rendre en sécurité et peut les empêcher de fréquenter l'école. Ces jeunes affirment que s'ils tentent de quitter le gang et d'abandonner cette vie néfaste, ils craignent d'en payer le prix avec leur famille et leurs amis. C'est ainsi que les gangs et les organisations criminelles fonctionnent: en intimidant et en menaçant les jeunes et leurs familles pour tenter de les garder dans leurs rangs.
Voilà pourquoi nous considérons que le projet de loi C-394 pourrait être élargi pour criminaliser non seulement le recrutement, mais aussi les menaces et l'intimidation auquel on a recours pour garder les jeunes au sein des gangs.
En outre, nous croyons que le projet de loi C-394 pourrait être amélioré en l'appliquant à toute personne qui ferait du recrutement là où les jeunes sont susceptibles de se réunir, les lieux mêmes dont nous voulons tous assurer la sécurité, comme les établissements scolaires, les cours d'école, les centres communautaires, les centres d'amitié et les parcs, où nous voulons que nos jeunes puissent aller en toute sécurité.
Je vous donnerai à cet égard l'exemple de notre programme Lighthouses. Le ministère de la Justice et le ministère des Enfants et des Perspectives pour la jeunesse fournissent des fonds afin de garder environ 70 centres communautaires et endroits semblables ouverts le soir et les week-ends afin d'offrir aux jeunes un lieu sûr à fréquenter. Si quelqu'un s'y rend dans l'intention de faire du recrutement pour un gang ou une organisation criminelle, cet acte devrait être considéré comme une infraction, que l'intéressé soit âgé de moins de 18 ans ou non.
Notre objectif consiste évidemment à faire du Canada un territoire inhospitalier pour les gangs et les organisations criminelles. Selon nous, grâce aux efforts conjugués des gouvernements, nous pouvons faire davantage de prévention dans le cadre de l'éducation, des loisirs et de diverses occasions. Nous pouvons continuer de travailler ensemble afin d'appuyer la police, mais nous devons certainement disposer de lois adéquates. Le projet de loi C-394 est, selon le Manitoba, une mesure appropriée.
Je demanderais aux membres du comité d'envisager d'amender le projet de loi, comme je l'ai proposé, car nous avons là l'occasion de faire ce qu'il faut et de protéger la ressource la plus précieuse de notre pays: nos jeunes.
Je répondrai volontiers aux questions que vous pourriez avoir.
:
Merci, monsieur le président, de me donner l'occasion de comparaître.
Permettez-moi de commencer par me présenter. Je m'appelle George VanMackelbergh, vice-président de la Winnipeg Police Association. Je représente les 1 943 femmes et hommes de notre association. Fort de 24 ans d'expérience à titre d'agent de police au centre-ville et dans le Nord de Winnipeg, j'ai travaillé six ans et demi comme enquêteur sur le crime organisé, me chargeant de toute la gamme d'enquêtes techniques faisant intervenir plusieurs autorités, et j'ai formé des informateurs afin d'en faire des agents. J'en connais donc un peu sur les activités des gangs.
Je travaille dans une des régions du pays où l'activité des gangs est la plus problématique. Depuis une trentaine d'années, l'appartenance aux gangs se transmet d'une génération à l'autre à Winnipeg, et on considère que c'est sur ce modèle que se constituent les gangs de rue depuis 30 ans.
À première vue, la WPA appuie le présent projet de loi, comme nous le ferions pour n'importe quelle mesure législative que le gouvernement au pouvoir proposerait pour juguler les activités des gangs ou des organisations criminelles. Le projet de loi C-394 traite du contexte du recrutement, sans s'attaquer expressément à ce dernier. Comme le ministre Swan, je considère qu'il s'agit d'une mesure clé.
Les gangs recrutent des membres de plus en plus jeunes. Au Manitoba, à Winnipeg, des jeunes de 10 ans sont recrutés par les gangs parce qu'ils ne s'exposent qu'à des peines de six mois d'emprisonnement ou pour qu'ils gardent de la drogue pour des membres plus aguerris du gang. Des accusations de meurtre pèsent contre des jeunes de 15 ans, qui ont agit sur les ordres de membres aînés du gang qui savaient qu'ils recevraient des peines plus légères.
Ici encore, il est très important de s'attaquer au recrutement et de le rendre illégal, car bien souvent, ceux qui sont recrutés à un jeune âge ne comprennent pas dans quoi ils s'embarquent. Ils s'imaginent qu'ils auront un statut de vedette rock dans les médias. La culture populaire ne rend cette vie que plus attrayante. Ce n'est qu'à 15 ans, deux, trois ou quatre ans après avoir été recrutés, qu'ils réalisent dans quelle voie ils se sont engagés. Ils ne connaissent ni la richesse, ni la gloire, ni la fortune, et ne peuvent quitter le gang.
Ils se font passer à tabac par les membres plus âgés et expérimentés du gang, qui veulent ainsi s'assurer de leur loyauté. Des menaces planent sur leurs familles et leurs communauté.
Dans certains quartiers et communautés du Manitoba et de Winnipeg même, il est entendu que si on n'est pas un membre ou un associé d'un gang, on doit appuyer ce dernier s'il frappe à la porte, simplement parce qu'on habite dans le coin.
La situation me rappelle celle qui prévalait à Belfast dans les années 70. Bien des habitants de cette ville, qu'ils soient loyalistes ou catholiques, considéraient qu'il fallait trouver une solution politique aux problèmes. Mais ne vous y trompez pas: quand on frappait à leur porte au milieu de la nuit, on s'attendait à ce qu'ils donnent leur appui.
Selon moi, les projets de loi comme celui-ci permettront de définir en quoi consiste le recrutement par les gangs; c'est s'écarter du droit chemin par nécessité, et je crois que c'est important.
Nous prévoyons toutefois qu'il sera difficile de satisfaire aux exigences du fardeau de la preuve à certains égards. Je vous demanderais donc, au nom de l'association, de faire en sorte que le projet de loi ne prévoit pas un fardeau de la preuve trop lourd. Comme c'est le cas pour le crime organisé, il est probable que quand les affaires passeront devant les tribunaux, il faudra déterminer si le gang fait partie du crime organisé. Il faudra le prouver dans le cadre du fardeau de la preuve avant même d'aborder la question du recrutement. Nous avons constaté dans certaines régions du Canada que c'est une tâche extrêmement difficile, qui dépasse même parfois la capacité des corps policiers. Nous voudrions donc que le projet de loi soit soigneusement rédigé et applicable.
Il faudra pour cela fournir du soutien à la mesure législative. Pour réussir à engager des poursuites, les procureurs de la Couronne des diverses régions du pays devront probablement s'appuyer en grande partie sur la documentation qui a été colligée.
Les nombreux intervenants qui forment le système de justice pénale disposent de sources d'information distinctes. À heure actuelle, aucun mécanisme ne leur permet d'échanger ces renseignements, alors qu'il sera essentiel de le faire dans le cadre de procès. Il serait bon que le gouvernement fédéral propose une norme ou un mécanisme pour recueillir l'information et la diffuser de manière uniforme au pays. Voilà qui appuierait fortement la mesure législative.
Les gangs continuent d'exister au Canada. Nous avons commencé à déceler une tendance selon laquelle les grandes organisations recrutent des membres parmi les gangs et organisations de moindre importance qui veulent s'associer aux grosses pointures. Cette situation crée un problème au chapitre de l'exécution de la loi au pays et permet aux caïds d'échapper à l'application de la loi et de commencer à regarder qui pourrait devenir membre de leur organisation dans 10 ans. Ils peuvent détecter les informateurs et les agents potentiels, ce qui rend le travail d'infiltration presque impossible. Ici encore, nous considérons que le projet de loi aiderait les organismes d'exécution de la loi en tentant de changer la donne.
Je dirai en terminant que je conviens avec le ministre Swan que les jeunes constituent la ressource la plus précieuse de notre pays. Je ne prétendrais pas que l'adoption de nouvelles loi constitue la solution au problème, mais cela en fait certainement partie.
Merci de votre attention.
Permettez-moi de commencer par dire que nous accueillons favorablement les efforts que le député Parm Gill déploie pour protéger les enfants et les adolescents des gangs et que nous sommes heureux que les Clubs Garçons et Filles aient été invités à prendre part aux consultations concernant le projet de loi.
Nous ne nous élevons pas contre le projet de loi . Nos préoccupations sont surtout liées à la nécessité de déployer des efforts de prévention accrus — et nous croyons comprendre que le comité et M. Gill appuient également cette idée — et de prévoir des programmes de réadaptation pour les jeunes qui souhaitent rebâtir leur vie hors des gangs.
La plupart des jeunes ne font pas partie de gangs, mais le petit nombre qui en font partie ont des répercussions disproportionnées sur leurs collectivités. Certains de nos clubs sont établis dans des quartiers qui sont touchés par la présence de gangs et qui connaissent bien la violence qui l’accompagne.
Pour donner un exemple des tactiques de recrutement auquel le projet de loi s’attaque, on cite la situation des Clubs Garçons et Filles de Winnipeg. L’un de leurs clubs est établi dans une collectivité qui compte un grand nombre de nouveaux venus. Des membres de gangs recrutent des jeunes dans un parc de stationnement qui se trouve à seulement 100 pieds du club. Cela menace la sécurité des jeunes qui participent aux activités du club. Ce dernier collabore avec la police afin de régler le problème, mais il réapparaît constamment, et nous croyons comprendre que la mesure législative prévue par le projet de loi aiderait dans des cas comme celui-là, car il donnerait aux agents de police des outils pour lutter contre un tel recrutement.
Nous avons également consulté les Clubs Garçons et Filles des régions de Toronto, Regina et Vancouver, qui nous ont parlé de tactiques de recrutement plus subtiles. Ces clubs nous ont appris que l’itinérance est un facteur qui contribue grandement à la participation des jeunes dans des gangs. Les jeunes sont plus susceptibles d’être recrutés et exploités sexuellement s’ils logent à des endroits où l’on s’attend à ce qu’ils fassent leur part.
Ces clubs nous parlent également de jeunes qui naissent dans des familles qui font partie intégrante de gangs. Ces jeunes n’ont pas vraiment le choix; on présume qu’ils intégreront le gang et, s’ils ne le font pas, ils s’exposent à des représailles très sévères.
Enfin, nous avons entendu parler de jeunes mus par un esprit d’entreprise qui gaspillent leurs talents en menant une vie sans avenir.
Le recrutement n’est pas toujours aussi facile à repérer que dans le cas de Winnipeg mais, comme nous l’avons déjà entendu, la déloyauté est toujours punie très sévèrement.
Comment pouvons-nous empêcher nos jeunes d’être recrutés dans des gangs? Le système juridique a certainement un rôle à jouer dans la lutte contre les tactiques coercitives, intimidantes et violentes. De plus, si le projet de loi est adopté, il punira également les gens qui incitent des jeunes à participer à des gangs et qui ciblent des mineurs.
Les jeunes n’intègrent pas des gangs à l’improviste. Les facteurs de risque sont bien documentés. Plus vite nous éliminons ces facteurs, plus nos chances de protéger les jeunes seront bonnes.
Les gangs peuvent s’enraciner dans des collectivités appauvries dont les ressources ne sont pas suffisantes pour s’occuper des jeunes. Ceux qui sont le plus démunis sur le plan économique et social sont les premiers ciblés par les recruteurs qui les attirent en leur promettant argent, protection et sentiment d’appartenance, que ces promesses soient remplies ou non. Ces mêmes jeunes sont aussi les plus susceptibles d’être utilisés par les plus hauts gradés du gang pour participer, comme nous l’avons déjà appris, à des activités criminelles, y compris le recrutement d’autres jeunes.
Une fois membre ou présumé membre à cause de sa famille ou de ses amis, la personne n’a plus tellement le choix. Elle doit choisir entre le risque de se faire prendre et de faire l’objet d’accusations criminelles ou celui de subir des représailles du gang, un risque qui n’est que trop réel. Je trouve intéressant que le ministre Swan propose de criminaliser les menaces qui sont proférées pour maintenir les gens dans les gangs parce que, d’après ce que nous ont dit nos clubs, cet aspect est également problématique. Il n’est pas facile de quitter un gang.
Mais nous pouvons offrir aux jeunes plus d’options avant qu’ils parviennent à ce stade. Les Clubs Garçons et Filles croient fermement que, si nous fournissons aux jeunes vulnérables un logement vraiment sûr, l’accès à des programmes qui appuient leur bien-être, leurs études, leur travail et leurs aspirations dans la vie, nous pouvons les détourner des gangs. Le fait de disposer de mesures juridiques et de services de police aidera, mais il faut également que nous offrions des programmes au sein des collectivités et que nous planifions des interventions ciblées et soutenues à l’intention des personnes qui affrontent des facteurs de risque connus et qui sont plus susceptibles d’être recrutées. Nous devons également offrir des services de soutien de la santé mentale et de l’emploi à ceux ont participé à des gangs et qui souhaitent les quitter afin de changer leur vie.
Nous sommes heureux d’apprendre que, d’après les comptes rendus de vos séances antérieures, les jeunes délinquants seront assujettis à la Loi sur le système de justice pénale. En offrant aux mineurs ayant été accusés de recrutement pour les gangs l’option de réparer les dommages subis, on les amènera à réaliser l’incidence du recrutement sur les autres jeunes et sur leur collectivité, tout en leur donnant un moyen de s’en sortir. L’accessibilité à des services de santé mentale jouerait aussi un rôle important dans de tels cas — pour aider les jeunes à se remettre du traumatisme vécu dans le gang ou dans la famille.
En 2012, le Programme de financement des services de justice pour les jeunes, qui aide les provinces à offrir ces programmes de réadaptation, a subi des compressions budgétaires. Nous espérons que des fonds seront investis dans des programmes de prévention de la criminalité, afin de garantir que moins de jeunes s’engagent dans cette voie en premier lieu.
Comme nous l’avons mentionné dans notre mémoire, nous nous réjouissons de l’annonce par le gouvernement de la prochaine phase du Fonds de lutte contre les activités des gangs de jeunes, mais nous croyons fermement que, compte tenu de la gravité de la situation que nous affrontons, d’autres mesures pourraient être prises.
Étant donné que le comité étudie en ce moment la façon dont le projet de loi pourrait empêcher les gangs de cibler les enfants et les adolescents, nous vous encourageons également à recommander des mesures complémentaires qui aideraient les jeunes canadiens à être plus résilients. Nous estimons que le gouvernement pourrait commencer par accroître le financement accordé au Fonds du système de justice pour les jeunes et au Fonds de lutte contre les activités des gangs de jeunes.
Merci.
:
Merci, monsieur le président.
Je remercie nos témoins de leur présence parmi nous. Monsieur le ministre, je vous souhaite la bienvenue au comité.
Je suis heureuse de voir que les Clubs Garçons et Filles du Canada appuient le projet de loi . Je pense qu'il est important de bien démontrer qu'il faut une position équilibrée. Je suis contente d'entendre que le ministre de la Justice du Manitoba prône lui aussi une stratégie à plusieurs volets, qui ne serait donc pas axée seulement sur la répression. Malheureusement, ce projet de loi semble être axé strictement sur la répression. Pourtant l'un n'empêche pas l'autre. Je pense qu'il est important de bien cerner cela, parce qu'il ne faudrait pas penser que le projet de loi C-394 va régler complètement le problème des gangs de rue. Nous, les députés et nos communautés, sommes tous touchés par cela. Quand on parle d'une stratégie équilibrée, on parle évidemment de prévention, d'intervention et de répression.
J'ai été agréablement surprise, monsieur le ministre, de voir le nombre d'organismes que vous avez consultés dans le cadre de votre démarche très complète au Manitoba. Vous avez aussi certaines recommandations. Ainsi, selon vous, le projet de loi ne va pas nécessairement assez loin. Vous avez aussi parlé des zones interdites aux gangs. Il pourrait s'agir, par exemple, d'une école ou d'un centre communautaire. Je voulais vous entendre là-dessus.
Ne croyez-vous pas que dans le projet de loi, le plus gros comprend le plus petit? En d'autres mots, étant donné que cela s'applique partout, cela s'applique aussi dans les milieux scolaires. Cela veut dire que cela pourrait être une situation aggravante, comme c'est déjà perçu si on se fie à la jurisprudence. Croyez-vous qu'on doit adopter des peines de plus de cinq ans? Je n'ai pas saisi tout ce que votre document contenait et je n'ai pas tout à fait compris ce que vous entendiez par le fait de cibler les écoles ou les endroits où le recrutement se fait.
:
Je vais répondre en anglais parce que nous n'avons pas assez de temps.
[Traduction]
Certes, la province du Manitoba croit que, pour bâtir des collectivités plus sûres, on doit adopter une approche équilibrée.
Aujourd’hui, nous parlons d’un projet de loi fondé sur la suppression des gangs et sur des changements à apporter au Code criminel. Toutefois, nous ne perdons pas de vue ce que nous devons faire pour appuyer les services de police et d’autres organisations — comme mettre en oeuvre la Loi visant à accroître la sécurité des collectivités et des quartiers —, pour lutter contre les causes profondes de la criminalité et pour tenter de trouver des endroits constructifs où les jeunes peuvent aller.
Les Clubs Garçons et Filles de Winnipeg ont mentionné, par exemple, les réalisations bénéfiques de leurs clubs et le fait que les jeunes se rendent dans leurs clubs pour participer à des activités constructives. Il s’ensuit que ces clubs deviennent un phare, si vous voulez, où les gangs tentent de repérer des jeunes à risque et de les embrigader.
Si nous modifions le projet de loi afin qu’il mentionne l’endroit où l’infraction est commise, les personnes qui se présentent à de tels endroits pourront être reconnues coupables d’une infraction, qu’elles recrutent des jeunes ou des adultes; le fait d’exercer ces activités sur les lieux ou près de ceux-ci devrait constituer un acte criminel par lui-même.
Nous voulons que ces endroits soient sécuritaires, qu’il s’agisse des Clubs Garçons et Filles, de l’association communautaire Spence ou du centre communautaire Magnus Eliason dans ma partie de Winnipeg. Nous estimons que ces endroits devraient être exempts de gangs et que les jeunes devraient pouvoir s’y amuser, sans que nous ayons à craindre qu’ils soient recrutés par des gangs qui exercent des activités illégales.
Nous ne pensons pas qu’il soit nécessaire d’augmenter la peine maximale qui est indiquée dans le projet de loi. Par contre, nous estimons que la mesure législative devrait être révisée afin d’ajouter les endroits où, selon nous, les jeunes devraient pouvoir se rendre en toute sécurité.
:
Je peux vous dire que la sécurité publique a bel et bien un prix. Au Manitoba, comme dans toutes les provinces où les taux de criminalité sont plus élevés que la moyenne, nous savons que ce prix est élevé.
Vous savez, pour nous, le fait d'imposer des peines obligatoires à quelqu'un qui décide de menacer la sécurité de notre collectivité, et qui met nos jeunes en danger, le fait d'avoir des mesures appropriées — des peines obligatoires, comme je le disais — cela vaut son pesant d'or.
Monsieur Casey, les gangs connaissent la loi. Ils savent que s'ils ciblent les jeunes, que s'ils demandent à un jeune de 11 ans de passer de la drogue pour eux, il ne sera pas puni.
Je ne veux absolument pas dire par là qu'on devrait sanctionner un jeune de 11 ans, mais les recruteurs au sein des gangs savent qu'en recrutant des mineurs, les jeunes seront assujettis à un régime différent si on les attrape.
Je ne dis pas, encore une fois, qu'il faut changer cela, mais les gangs connaissent la loi. Nous voulons donc qu'ils soient au fait de cette disposition, qu'ils sachent que le recrutement des jeunes sera sanctionné. Je pense que cette disposition sera très utile pour protéger les jeunes et donner aux policiers les outils dont ils ont besoin pour lutter contre les gangs.
Ce matin, Devon Clunis, le nouveau chef du Service de police de Winnipeg, disait sur une station de radio de la ville qu'il avait l'intention d'aller rencontrer les chefs de gang pour discuter avec eux et leur expliquer la loi, si on veut.
J'aimerais bien que le projet de loi soit en vigueur et que le chef Clunis puisse dire aux membres des gangs que s'ils tentent de recruter des jeunes dans nos collectivités, la police aura les outils nécessaires pour leur mettre la main au collet.
:
Combien d'heures avons-nous?
Des voix: Oh, oh!
L'hon. Andrew Swan: Je vous remercie de poser la question, car cela met en lumière le fait que même si nous parlons aujourd'hui d'apporter des modifications au Code criminel, tous les échelons de gouvernement doivent en faire davantage. Nous sommes assurément d'avis qu'il est possible de mettre en place plus de partenariats pour éliminer à la source les problèmes qui sévissent sans doute dans votre collectivité, comme c'est le cas dans la mienne.
Nous savons que l'un des meilleurs antidotes pour éviter que les jeunes se joignent à un gang c'est d'avoir de solides relations. Si le jeune continue d'aller à l'école, et qu'il voit qu'il a un avenir devant lui, qu'il peut s'inscrire à une école de métiers, ou aller à l'université ou au collège, ou entrer directement sur le marché du travail, il a beaucoup plus de chances de se tenir loin des activités criminelles. Les jeunes qui ont l'occasion de faire du sport ou de faire partie d'une organisation culturelle ou artistique ont beaucoup plus de chances de ne pas sombrer dans la criminalité. Les jeunes qui ont des influences positives dans leur vie sont beaucoup moins susceptibles de se laisser embarquer.
Le gouvernement du Manitoba collabore avec les administrations municipales, celle de Winnipeg et d'autres aussi, pour garder les centres de récréation ouverts plus longtemps, pour mettre en place des programmes comme Lighthouses qui offrent aux jeunes un endroit sûr où se rassembler. Nous collaborons aussi à un nouveau programme offert après les heures de classe, appelé After School Matters, pour garder les jeunes occupés après les heures de classe, soit de 15 ou 16 heures jusqu'en début de soirée, en établissant des partenariats avec les entreprises locales pour leur offrir du mentorat et de bonnes valeurs qui les aideront toute leur vie. Pour nous, les gouvernements qui investissent dans ces activités se dotent d'une stratégie de prévention de la criminalité.
En ce qui a trait à l'ajout d'agents de police et de procureurs de la Couronne, nous nous en sommes occupés en bonne partie.
Le fonds pour le recrutement des policiers a été très utile à cet égard, mais je dois souligner qu'il est presque à sec maintenant. Les municipalités partout au Canada vont perdre des policiers si les administrations provinciales et municipales ne prennent pas le relais.
Nous avons aussi commencé à recruter des procureurs de la Couronne. Je sais que d'autres provinces ont pris des décisions différentes.
Encore une fois, la sécurité publique a un prix. Nous sommes prêts à continuer d'investir dans les agents de police, les procureurs de la Couronne, les greffiers, ainsi que dans le système d'aide juridique pour bâtir des collectivités en santé.
:
Merci, monsieur le président. Je remercie aussi les témoins de leur présence aujourd'hui.
Vous avez souvent mentionné aujourd'hui, monsieur le ministre, que les gangs, et particulièrement les chefs de gangs, connaissent la loi. De toute évidence, nous avons aujourd'hui des lois plutôt punitives pour ceux qui s'adonnent aux genres de crimes que l'on attend des gangs.
Je sais qu'à la deuxième lecture de ce projet de loi, le parrain, le député Parm Gill, a indiqué que son but était de se concentrer en particulier sur le problème des jeunes qui sont ciblés et recrutés par les gangs, des gangs criminels, bien entendu. Quand vous parlez de gangs dans ce contexte, ce sont des gangs criminels. Il a signalé que des jeunes sont recrutés par les organisations criminelles les plus notoires et les plus violentes au Canada en raison de leur âge et de leur vulnérabilité.
Compte tenu de ce que nous avons entendu aujourd'hui, et de certaines des questions et des réponses qui ont suivi vos exposés, nous parlons en réalité d'un outil supplémentaire, dans la boîte à outils d'application de la loi.
Pensez-vous que les peines proposées pour le recrutement de jeunes, particulièrement l'imposition d'une peine minimale obligatoire, auraient nettement pour effet de dénoncer une telle conduite? J'aimerais savoir si vous trouvez que cela refléterait l'intention du Parlement de protéger les personnes vulnérables, comme les enfants, des menaces du crime organisé.
:
Merci, monsieur le président, et merci d'avoir prolongé la séance. Je l'apprécie énormément.
Monsieur le ministre Swan, nous vous remercions d'avoir parcouru une si longue distance pour venir nous parler.
Je veux simplement dire très clairement que tous les membres du comité, ainsi que le Parlement, reconnaissent que les gangs de jeunes sont un fléau. Ce n'est pas une question partisane, d'après ce que je constate. Mes commentaires vont cependant paraître partisans, et c'est pourquoi j'aborde la question ainsi. Honnêtement, comme d'autres, j'ai été très surpris de constater qu'un seul député entreprenait quelque chose de cette nature. Vu le sérieux de la situation, nous pensions qu'une approche plus globale serait préférable.
Je vais vous poser une petite question.
Connaissez-vous l'initiative Vibrant Communities? Il y a une telle initiative à Calgary. Cela nous vient des États-Unis. Hamilton a une table ronde sur la pauvreté qui se penche sur les aspects négatifs de la pauvreté. J'étais conseiller scolaire à Hamilton, et j'ai vu de mes propres yeux que nos secteurs les plus pauvres étaient ceux où les gangs remportaient le plus de succès. C'est donc le principe de la démarche globale.
Si vous répondiez à cela, j'en serais ravi, mais veuillez en parler aux ministres, quand vous les rencontrerez, car vous avez initialement abordé 14 points, et celui-ci serait un ajout utile.
:
Je sais que bien des collectivités ont des démarches différentes pour s'attaquer au crime et aux problèmes de justice. À Winnipeg, le conseil municipal a créé un programme appelé LiveSAFE, qui serait très semblable à cela.
Nous savons que Prince Albert, en Saskatchewan, est à l'origine de ce que nous considérons comme une approche d'avant-garde à la violence. Elle se fonde en fait sur l'initiative de réduction de la violence de Glasgow, qui a remporté des prix à l'échelle mondiale. Il est réellement question d'aider la police. À Winnipeg, à trois heures du matin, le samedi, les policiers ne sont pas que des policiers. Ils sont aussi des travailleurs en santé mentale. Ils sont des conseillers et, dans bien des cas, ils prodiguent les premiers soins. Les policiers sont à la toute première ligne. À Prince Albert, les policiers ont réellement été intégrés dans une initiative communautaire plus vaste dont le but est de réduire la violence, mais ce projet a également amené des améliorations sur divers autres plans: par exemple, moins de personnes sont aiguillées vers les services à l'enfance et à la famille, la fréquentation scolaire s'est améliorée, et les visites aux services de soins de santé sont moins nombreuses.
Je pense qu'il est clair que nous devons mieux soutenir nos policiers, et nous le faisons en allant chercher tous les autres membres de nos collectivités qui comprennent les besoins. Le modèle de Prince Albert est très excitant. Un type du nom de Dale McFee, l'ancien chef de la police de Prince Albert, en est le champion. Le gouvernement de la Saskatchewan a eu l'intelligence d'aller le chercher. Il est maintenant, je pense, le sous-ministre du ministre Tell, responsable des services correctionnels de la Saskatchewan. Le chef McFee, ou maintenant, le sous-ministre McFee, est tout à fait disposé à parler de l'expérience de Prince Albert, et je pense que tous les Canadiens devraient envisager cela.
Comme vous le savez, le projet de loi apporte des modifications au Code criminel. Ainsi, le recrutement d'une personne pour faire partie d'une organisation criminelle deviendrait une infraction punissable en vertu du Code criminel. La peine maximale d'incarcération serait de cinq ans. De plus, si la personne recrutée est mineure, il y aurait une peine minimale obligatoire de six mois d'emprisonnement.
Il faudra démontrer que le recrutement de membres vise à accroître la capacité de l'organisation de faciliter ou de commettre un acte criminel. Le projet de loi envoie un message clair: de tels comportements ne seront pas tolérés. Il contribuera aux efforts du gouvernement pour protéger les jeunes des menaces posées par le crime organisé.
Bien que le gouvernement soit favorable à l'adoption de ce projet de loi et à la création d'une nouvelle infraction criminelle, il reconnaît que certaines modifications de forme s'imposent. Ces modifications n'auraient aucun impact sur les questions de fond touchant la nouvelle infraction criminelle proposée, mais permettraient d'obtenir le niveau de précision et de cohérence requis dans les versions anglaise et française du projet de loi, tout en assurant l'harmonisation avec le libellé employé par ailleurs dans le Code criminel.
Les amendements que je vais vous soumettre aujourd'hui, monsieur le président, visent exactement cet objectif. Celui proposé par M. Seeback fait exception, car il concerne davantage le fond du projet de loi.
Pour revenir à ce premier amendement, il porte sur l'article 13 ainsi que sur l'article 2. La première proposition vise à modifier le titre intégral dans la version française, à la page 1 du projet de loi. Cet amendement doit être considéré conjointement avec ceux qui modifient les versions française et anglaise de l'article 2 et les versions française et anglaise de l'article 13.
:
Merci, monsieur le président.
Il s'agit bien sûr ici de supprimer la peine minimale obligatoire prévue dans le projet de loi , car le Parti libéral s'oppose à des peines semblables. Nous faisons confiance à nos juges; nous savons qu'ils peuvent utiliser leur pouvoir discrétionnaire à bon escient.
J'écoutais tout à l'heure avec le plus grand intérêt M. Albas dans le préambule à l'une de ces questions. Je me suis pris à espérer un peu qu'il en vienne à convenir qu'il y a lieu de faire confiance aux juges de temps à autre. Je vis d'espoir en me disant que nous avons peut-être converti quelqu'un à notre façon de voir les choses en la matière.
Nous estimons les juges tout à fait aptes à imposer des peines adaptées aux circonstances et à la gravité de l'infraction commise. Les peines minimales obligatoires peuvent, dans certains cas, mener à des violations de la Charte des droits, et des tribunaux de l'Ontario et de la Colombie-Britannique n'ont pas hésité récemment à invalider de telles dispositions.
Je souligne en terminant que toutes les données disponibles, y compris celles provenant de notre ministère de la Justice, démontrent que les peines minimales obligatoires n'ont pas d'effet dissuasif. Vous vous souviendrez que j'ai posé directement la question à M. Gill qui n'a pas été en mesure de nous fournir la moindre preuve du contraire. Les peines minimales sont à l'origine de nouveaux crimes, tant en prison qu'à l'extérieur, favorisent la surpopulation des pénitenciers, un autre phénomène pouvant causer des violations de la Charte, tout en ne contribuant d'aucune façon à la réhabilitation des contrevenants ou à leur réintégration dans la société, une réalité que l'on occulte complètement en misant uniquement sur l'incarcération.
Merci, monsieur le président.
:
En matière de sentences minimales obligatoires, on a entendu, lors de l'étude de plusieurs projets de loi, différents témoins nous dire que ce n'était pas toujours ce qu'il y avait de plus efficace. On nous a aussi mentionné que cela pouvait faire en sorte que certains dossiers soient contestés en cour.
Je suis certaine que les membres du comité vont se rappeler du témoignage de l'ancien juge de la Cour suprême John Major, qui nous a dit qu'une sentence minimale obligatoire n'était pas nécessairement contraire à la Charte. Si ce n'est pas déraisonnable, elle peut être analysée et vue en fonction de son objectif. On va donc toujours l'analyser sur ce plan. Il existe déjà, dans le Code criminel, différentes dispositions qui comprennent des sentences minimales.
En principe, le NPD est généralement opposé à l'idée de déterminer les sentences que doivent imposer les tribunaux. On pense encore et toujours qu'ils sont les mieux placés pour le faire. Parfois, les sentences minimales constituent les durées les plus basses qu'on peut imposer. Cela étant dit, c'est la position que l'on adopte au sujet du projet de loi C-394. Entre deux maux, il faut parfois choisir le moindre. On est tous conscients de ce qu'on a entendu ici. Ainsi, les Clubs Garçons et Filles du Canada et tous les témoins entendus s'entendent pour dire que le projet de loi C-394 est un élément essentiel, mais qu'il est nécessaire de s'assurer d'avoir une politique bien équilibrée. Cet élément peut être utile dans les circonstances.
Je pense qu'il faut faire attention et ne pas refuser les sentences minimales obligatoires seulement par principe. Nous considérons chaque projet de loi un par un de façon à voir si l'essentiel de ce qu'on vise est nécessaire dans les circonstances. J'ose espérer que si les juges lisent ce que les politiciens et le législateur ont dit dans le contexte de l'étude d'un projet de loi, ils vont savoir que, pour les membres de ce comité, le message essentiel qu'on veut envoyer est que le recrutement dans des gangs criminels est une chose qu'on ne peut pas tolérer.
Dans ce contexte, une durée de six mois me semble très basse, mais je n'encouragerai pas les conservateurs à l'augmenter. On laissera la cour le faire. Toutefois, entre six mois et cinq ans, il y a amplement de place pour que la cour établisse une sentence raisonnable dans les circonstances.
Il faut aussi noter qu'il est bien clair que, dans le cas des jeunes contrevenants qui ont moins de 18 ans — je pense que notre analyste de la Bibliothèque du Parlement l'a bien précisé —, ce ne serait pas le même système qui s'appliquerait. De toute façon, compte tenu de tout ce que j'ai entendu de la part des témoins aujourd'hui, je ne suis pas certaine que je voudrais envoyer des jeunes en prison pour six mois, car c'est un contexte d'endurcissement ou d'école du crime. Je pense que c'est donc vraiment la limite.
Toutefois, comme le député libéral, on est un peu allergiques à l'idée de dire à la cour quoi faire, mais, en même temps, je pense qu'il y a une bonne marge qui permet à la cour d'avoir une certaine discrétion au cas par cas.
:
Merci, monsieur le président.
Tout d'abord, comme je l'ai dit au secrétaire parlementaire tout à l'heure, je n'ai pas l'habitude de présenter des amendements à la dernière seconde et je m'en excuse. Par contre, il faut bien comprendre dans quel contexte nous étudions certains projets de loi ici, en comité. Compte tenu de cela, il ne faut pas s'en surprendre non plus. Bien souvent, on nous demande de faire parvenir nos amendements, si nous en avons, avant telle date et telle heure, alors qu'il nous reste encore à entendre des témoins. Chaque fois, cela m'indispose un peu.
Je pense qu'il est important de faire valoir ce point ici, au comité. Cela complique la situation. Sérieusement, parfois je peux avoir des idées d'amendement, mais ce n'est pas suffisant pour que je mobilise plusieurs personnes afin de préparer ces amendements tout de suite. En effet, ce ne sont que des idées, et je pourrais avoir d'autres interrogations après avoir entendu les autres témoins.
Il faut parfois souffrir d'avoir un amendement comme cela, un peu à la volée, me direz-vous. Vous avez tous devant vous le texte de l'amendement. L'amendement avait été conçu initialement, mais je l'avais retenu, pour la simple et bonne raison que nous en étions arrivés à la conclusion que le sous-alinéa 718.2a)(ii.1) du Code criminel prévoit déjà une peine additionnelle ou un élément aggravant lorsqu'un acte criminel est commis à l'endroit d'un mineur ou d'une mineure. Donc, à la rigueur, on pourrait prétendre que cela implique le genre de dossier que nous avons devant nous, en l'occurrence le projet de loi .
Cela étant dit, je pense que le témoignage du ministre Swan était très clair. Le mémoire qu'il a présenté contient beaucoup d'autres choses qu'il aimerait voir. Nous étudierons tous cela attentivement. Nous verrons ensuite si le gouvernement décidera de déposer d'autres projets de loi ou si d'autres collègues décideront de présenter des projets de loi émanant des députés pour répondre à certaines des recommandations qu'il a faites. L'avenir nous le dira.
Il y a un amendement qu'on peut certainement apporter, au moment où l'on se parle. Il faut qu'on envoie ici un message fort à propos du milieu où le recrutement se fait. D'ailleurs, il l'a très bien dit. C'était une de ses recommandations que de considérer comme un élément aggravant le fait que le recrutement se fait près d'une école ou d'un centre communautaire. Il ne s'agit pas d'en faire une infraction additionnelle, mais plutôt un élément aggravant qui sera perçu par le tribunal qui aura à déterminer la peine.
Je pense que cela s'inscrit très bien dans l'objectif visé par le collègue Parm Gill qui a présenté le projet de loi . C'est un message additionnel qu'on envoie à la cour qui devra analyser la situation et fixer la durée de la peine quelque part entre six mois et cinq ans.
Si la preuve qui est faite lors du procès réussit à démontrer qu'effectivement on a attrapé cette personne en train de recruter près d'une école ou d'un centre communautaire, on envoie un message clair disant que c'est catégoriquement inacceptable et que c'est le pire des pires cas. À mon avis, le recrutement en soi est dégueulasse, mais c'est encore pire quand on le fait dans ces milieux vulnérables que sont les écoles et les centres communautaires, là où les jeunes se tiennent.
Alors, voilà l'essentiel de l'amendement qui est proposé. De mon point de vue, il s'inscrit extrêmement bien dans le contexte du projet de loi .
:
Merci, monsieur le président.
Après avoir entendu les commentaires de M. Taylor, j'ai encore plus de doute à ce propos. Un juge pourrait se dire que le Parlement a tranché et que les circonstances doivent être telles que précisées. Un avocat de la défense pourrait facilement invoquer comme argument que parce que le Parlement n'a pas mentionné les Clubs Garçons et Filles, parce qu'il n'en serait pas question ici... On ne trouve pas le terme « club », d'après ce que je vois... près d'une école ou d'un centre communautaire. M. Gill et les représentants des Clubs Garçons et Filles nous ont dit que c'était un outil dont ils pourraient peut-être se servir, mais on restreint probablement les choses pour rien.
C'est une discussion intéressante, mais comme nous devons déposer notre rapport d'ici la mi-avril, monsieur le président, je m'oppose à cet ajout qui créerait des incohérences dans le Code criminel. Avant celui-ci, un projet de loi d'initiative parlementaire entraînait aussi des incohérences, et le NPD avait convenu avec nous que cela posait problème. Je ne voudrais pas qu'on inclue ce genre de choses.
Cela dit, monsieur le président, je préférais grandement que nos amendements soient renvoyés à la Chambre dans leur forme actuelle, plutôt que de retarder l'adoption du projet de loi et de voir que tout le travail que nous avons fait aujourd'hui n'aura servi à rien. Si nous ne respectons pas ce délai, nous n'aurons d'autre choix que de les soumettre indépendamment.
Alors, monsieur le président, je n'appuierai pas cet amendement.
:
Merci, monsieur le président.
Monsieur Taylor, si on disait « [...] est tenu de considérer, entre autres, comme circonstance aggravante tout élément de preuve établissant que cette infraction a été commise à l'égard d'une personne âgée de moins de dix-huit ans, près d'une école ou d'un centre communautaire. », cela deviendrait non limitatif, mais ce serait tout de même une indication.
J'espère que les gens de l'autre côté sont d'accord pour dire que faire du recrutement pour des gangs criminels près d'une école ou d'un centre communautaire constitue une circonstance aggravante. J'ai l'impression qu'on ne veut pas faire en sorte que ce soit limitatif et que la cour pense que cela se fait par exemple à l'intérieur d'un Club Garçons et Filles. Je crois qu'il faut tenter d'éviter de rejeter l'amendement parce que cela vient de notre côté. À mon avis, la personne qui présente le projet de loi le fait pour préciser une infraction de recrutement. On ajoute une peine minimale pour envoyer un signal tout de même important concernant les cas où des mineurs sont ciblés.
Par contre, je pense qu'il faut aussi envoyer un signal — et l'un n'empêche pas l'autre — comme quoi ce genre de recrutement constitue un facteur aggravant. C'est strictement pour répondre à ce qu'on nous a dit. Le ministre de la Justice du Manitoba, par exemple, appuie le projet de loi présenté par un député du parti gouvernemental et nous respectons son opinion. Selon lui, le recrutement est un des problèmes. Le policier l'a dit aussi.
Est-ce que l'emploi des mots « entre autres » ferait en sorte que ce ne soit pas limitatif? J'ai bien compris, selon votre témoignage ou vos propos, que ce n'est pas incohérent par rapport à ce qui existe déjà dans le Code criminel et que pour les collègues d'en face, c'est la seule chose qui est considérée. On a tout de même le temps, étant donné que c'est probablement le seul amendement qui reste dans le cadre de ce projet de loi qui, autrement, passe comme un train à grande vitesse.
Dans ces conditions, je pense qu'on ne peut pas être contre la vertu. Cela répondrait à leurs préoccupations en ce sens.
D'autres commentaires sur cet amendement?
(L'amendement est adopté.)
(L'article 14, tel que modifié, est adopté.)
(Les articles 15 à 17 inclusivement sont adoptés.)
Le président: Le titre, modifié par l'amendement G-7, est-il adopté?
Des voix: Oui.
Le président: Le projet de loi, tel que modifié, est-il adopté?
Des voix: Oui.
Le président: Le comité ordonne-t-il au président de faire rapport à la Chambre du projet de loi modifié?
Des voix: Oui.
Le président: Le comité ordonne-t-il la réimpression du projet de loi modifié pour l'usage de la Chambre à l'étape du rapport?
Des voix: Oui.
Le président: Merci beaucoup. C'est tout pour l'étude du projet de loi aujourd'hui.
J'ai un commentaire à faire avant de lever la séance. Mercredi, nous allons étudier un autre projet de loi d'initiative parlementaire. Nous allons entendre des témoins. Il s'agit du projet de loi S-209, et le sénateur qui le parraine ne peut être ici qu'une demi heure. Le motionnaire ou le député de la Chambre appuyant le projet de loi sera ici pour la première demi heure. Je vous demande donc d'en tenir compte dans vos préparations. Nous aurons ensuite une heure maximum à consacrer au témoin — il n'y en a qu'un. Il n'y a qu'un seul article à débattre. Il est long, mais il n'y en a qu'un, alors j'ai réservé une demi heure pour examiner la question.
Nous allons ensuite faire relâche pendant deux semaines pour retourner dans nos circonscriptions, et je sais que ce sera agréable. Joyeuses Pâques à tous ceux qui célèbre cette fête.
Voici ce qui nous attend à notre retour. Pendant la première semaine, nous allons étudier le projet de loi , le projet de loi d'initiative parlementaire sur la fausse représentation à titre d'agent de la paix. Nous allons entendre le motionnaire et les témoins, puis nous passerons à l'étude article par article, si possible, au courant de la semaine.
Pour la deuxième semaine, j'espère que nous pourrons faire l'examen triennal de l'article 533.1 du Code criminel, qui porte sur la possibilité d'être jugé dans les deux langues officielles. Le comité a la responsabilité d'examiner comment les choses se sont passées au cours des trois dernières années. C'est un examen triennal. Évidemment, nous allons inviter les représentants du ministre à venir en discuter avec nous. Si vous avez des témoins à proposer, n'hésitez pas à le faire.
Si vous avez aussi des témoins à convoquer pour l'étude de la semaine prochaine, sur le projet de loi concernant la fausse représentation à titre d'agent de la paix, je vous prie de l'indiquer au greffier le plus rapidement possible, parce que ce sera difficile de vous joindre dans vos circonscriptions. C'est beaucoup plus simple quand vous êtes ici.
Puis, pour les deux dernières semaines de la période en cours, j'espère que le projet de loi sera renvoyé au comité par la Chambre. Je présume que nous allons passer au moins deux semaines sur ce projet de loi. La liste de témoins pour cette étude est déjà bien remplie, alors nous allons voir ce que le comité décidera à cet égard.
Pour le moment, c'est à cela que ressembleront les deux semaines suivant notre retour, et vous savez déjà ce qui est prévu pour mercredi.
Sur ce, je vous dis merci.
La séance est levée.