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Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour expliquer les raisons pour lesquelles nous donnons avis d'une mesure législative visant à assurer le maintien et la reprise des services aériens. Nous présentons cette mesure législative pour trois raisons.
Premièrement, nous prenons les moyens nécessaires pour protéger l'économie canadienne. Un arrêt de travail au sein de la plus grande compagnie aérienne du Canada aurait des répercussions négatives sur la reprise économique au pays.
Deuxièmement, nous sommes déterminés à protéger l'intérêt du public. C'est pendant le congé scolaire de mars que les gens voyagent le plus, et si un arrêt de travail survenait maintenant, cela aurait une incidence sur des centaines de milliers de familles canadiennes qui ont prévu un voyage. En fait, on prévoit que plus d'un million de passagers voyageront sur les ailes d'Air Canada cette semaine.
Troisièmement, nous faisons ce qu'il faut pour protéger tous les autres employés qui pourraient être touchés par un arrêt de travail à Air Canada. Air Canada emploie directement 26 000 personnes, mais ses activités créent aussi 250 000 emplois indirects. Bon nombre de ces employés ont une famille et ont besoin de leur salaire pour assurer la subsistance des leurs.
Les députés se souviendront qu'en juin, l'an dernier, les agents de la billetterie et du service à la clientèle d'Air Canada ont fait la grève pendant trois jours. La situation a été réglée rapidement par les parties, ce qui a permis d'éviter que l'économie canadienne souffre inutilement de ce conflit.
Toujours en 2011, lorsque les négociations ont achoppé entre Postes Canada et le STTP, le syndicat qui représente les employés de Postes Canada, nous avons réagi en présentant et en adoptant la Loi sur le rétablissement de la livraison du courrier aux Canadiens. Encore une fois, les employés et les entreprises canadiennes, qui travaillent durement, n'ont pas eu à subir à long terme les contrecoups de cette situation.
Aujourd'hui, le Canada se heurte à un nouveau problème puisque les Canadiens pourraient devoir composer avec deux arrêts de travail. Les négociations sont rompues entre Air Canada et l'Association internationale des machinistes et des travailleurs et travailleuses de l'aérospatiale, et il en va de même des négociations entre Air Canada et l'Association des pilotes d'Air Canada. Tout comme l'an dernier, cette situation cause de l'incertitude et des doutes, alors que nous avons besoin de stabilité et de certitude, car ce sont ces deux facteurs qui assurent le bon fonctionnement des entreprises canadiennes.
J'invite les députés à demander à leurs électeurs ou à n'importe quel Canadien ce qu'ils pensent de la situation actuelle. Ces gens leur diront les mêmes choses qu'ils m'ont dites: nous ne pouvons pas nous permettre cet arrêt de travail. C'est aussi simple que ça. Les risques sont trop grands, et en tant que parlementaires, il nous incombe d'agir. C'est pour cette raison que je demande à la Chambre d'appuyer cette mesure législative, qui vise à assurer le maintien et la reprise des services aériens.
Il s'agit d'un projet de loi important. Nous avons tout fait pour éviter d'avoir à intervenir, mais cette mesure est essentielle, parce que la question en jeu est cruciale. En tant que parlementaires, nous devons prendre position sur la question. Nous devons intervenir parce que notre économie est encore fragile. Nous devons intervenir pour mettre fin à l'incertitude que cause la situation et exiger une meilleure solution au nom de l'ensemble des Canadiens.
Je vais prendre quelques minutes pour préciser chacun de ces points.
Comme toutes les économies industrialisées du monde, le Canada se remet à peine d'une pénible récession. Notre économie a résisté à la tempête, mais nous ne devons pas oublier que le vent peut tourner à tout moment, et nous ne pouvons pas nous permettre de tenir pour acquis que nous nous en tirerons toujours à si bon compte.
Le gouvernement conservateur est fier d'avoir réussi à protéger le Canada des pires effets du ralentissement économique et d'avoir préparé le terrain à la reprise. En février 2012, le taux de chômage national se chiffrait à 7,4 p. 100, en baisse par rapport à l'année dernière. Nous avons certes le vent en poupe, mais nous devons néanmoins continuer à veiller au grain.
Nous ne pouvons pas laisser les perturbations détourner l'attention et les ressources de la croissance économique, parce que le potentiel est immense. Nous ne pouvons pas laisser un conflit de travail au sein d'un secteur important compromettre la reprise, et un arrêt de travail qui paralyserait un joueur important du secteur des transports ne fait pas exception. Il est indéniable que les services aériens sont essentiels.
Ce n'est pas seulement l'industrie qui dépend des services aériens. Les citoyens aussi en dépendent. Ils en dépendent pour le travail et les loisirs. La simple superficie de notre territoire fait que les Canadiens dépendent des services aériens bien plus que les citoyens de la plupart des autres pays.
Un arrêt de travail aurait des répercussions financières importantes sur l'économie canadienne. Il ne fait aucun doute qu'il nuirait à nos efforts pour relancer l'économie et créer des emplois pour les citoyens. Selon un document de travail publié en 2009 par l'Organisation internationale du Travail, pour chaque emploi perdu dans le secteur aérien, jusqu'à 10 autres emplois pourraient être perdus dans d'autres secteurs. Les estimations des effets d'un arrêt de travail sur l'économie canadienne varient, mais certains les évaluent à 22,4 millions de dollars par semaine.
Pensez à ce que cela pourrait vouloir dire pour les entreprises. Un arrêt de travail à Air Canada pourrait se traduire par une baisse des ventes ici et à l'étranger. Est-ce que les entreprises pourraient combler ces pertes? Il est impossible de le savoir. Est-ce qu'une entreprise pourrait s'adapter rapidement et trouver des solutions de rechange? Là encore, nous ne pouvons pas nous prononcer parce qu'un conflit de travail a des répercussions en chaîne, l'incertitude engendrant plus d'incertitude.
Ce qui est certain, c'est qu'un arrêt de travail à Air Canada serait préjudiciable aux Canadiens. Ce serait mauvais pour les travailleurs et pour les affaires. Même une courte grève pourrait être très coûteuse. Par exemple, en 2005, en raison d'une grève sauvage d'un jour d'employés au sol d'Air Canada, à Toronto, 60 vols ont été retardés et 17, annulés. Nous devons empêcher qu'un climat incertain s'installe.
Parlons aussi des répercussions possibles d'un arrêt de travail sur l'entreprise. Dans le secteur du transport aérien, les coûts fixes sont élevés et les marges de profits sont faibles et ce, quand les affaires sont au mieux.
En avril 2003, les pressions financières que connaissait Air Canada ont pris une telle ampleur que la société s'est mise sous la protection de la Loi sur la faillite. En septembre 2004, Air Canada s'est retirée de cette protection en vertu d'un plan approuvé par les tribunaux, qui prévoyait qu'elle soit dépouillée de ses actifs et restructurée sous la dénomination Gestion ACE Aviation Inc.
Pensez à ce qui s'est produit après la crise financière mondiale de 2008, lorsque les marchés du crédit commercial ont pratiquement gelé. Des sociétés commerciales comme Air Canada, qui offrent des régimes de retraite à prestations déterminées, se sont soudainement retrouvées avec des obligations de financement beaucoup plus élevées. L'effet combiné de la récession, la diminution des vols, et les obligations contractuelles d'Air Canada ont occasionné d'autres problèmes à Air Canada.
En 2008, afin d'éloigner encore une fois la menace de la faillite, Air Canada a été obligée d'emprunter davantage pour poursuivre ses opérations. L'entreprise a alors aussi été en mesure de convaincre ses syndicats de coopérer en prolongeant les conventions collectives et en ne procédant à aucun arrêt de travail.
Le risque de grève des pilotes et du personnel d'entretien technique et de soutien opérationnel exacerbe l'incertitude et l'instabilité relativement à Air Canada.
Les dirigeants d'Air Canada ont avoué que l'entreprise subit déjà le contrecoup du climat d'incertitude qui règne par rapport à son personnel. Le transporteur doit annuler des vols chaque jour, et aussi la livraison de fret. Il pourrait s'agir du seuil critique pour une compagnie aérienne déjà à peine rentable.
Laissez-moi résumer l'évolution des deux conflits distincts dont il est question aujourd'hui.
L'AIMTA, le syndicat des machinistes, représente environ 8 200 employés appartenant au groupe Exploitation technique, entretien et soutien opérationnel, notamment les mécaniciens qui entretiennent les appareils d'Air Canada et les agents aux bagages et au fret, dont la convention collective est venue à échéance le 31 mars 2011.
Le 2 décembre 2011, la partie patronale a envoyé un avis de différend aux bureaux du Service fédéral de médiation et de conciliation. Le 21 décembre suivant, la commissaire-conciliatrice Louise Otis a reçu le mandat d'aider les parties dans leurs négociations hors du cadre du Programme du travail. Mme Otis est une ancienne juge fort respectée au Québec.
Le 10 février dernier, les parties ont conclu une entente de principe. Dans son rapport et ses recommandations, qu'elle m'a transmis, Mme Otis affirmait ceci:
Compte tenu de la situation de chaque partie, l'entente de principe est raisonnable et équitable. Les négociations ont été menées avec diligence et compétence, mais on est allé au bout du processus. Je ne recommande ni la reprise des négociations ni la nomination d'un médiateur. Dans la situation actuelle, j'estime que l'entente est satisfaisante.
Elle avait écrit ces lignes après que 65,6 p. 100 des syndiqués avaient, malheureusement, rejeté l'entente de principe, qui pourtant avait obtenu l'appui unanime du comité de négociation. Le syndicat m'a donc remis un avis de grève le 6 mars 2012.
J'insiste: les parties ont conclu une entente que les membres du syndicat ont refusé de ratifier. Il est très important de ne pas l'oublier, car il s'est passé la même chose avec l'Association des pilotes d'Air Canada. Leur convention collective, qui touche environ 3 000 pilotes, venait à échéance le 31 mars 2011. Le 17 mars 2011, les parties ont conclu une entente de principe en négociant directement, sans l'aide du Service fédéral de médiation et de conciliation. L'équipe de négociation avait recommandé l'entente parce qu'elle était sujette à un vote de ratification par les membres du syndicat. Le 19 mai, le syndicat a informé l'employeur que les membres avait rejeté l'entente de principe. En octobre 2011, nous avons reçu un avis de différend de la part de l'employeur. Le 10 novembre 2011, un conciliateur du ministère du Travail a été nommé.
La période de conciliation a été prolongée trois fois, dans l'espoir de voir les parties s'entendre. Un médiateur du Service fédéral de médiation et de conciliation a été nommé et a déjà rencontré les parties à quelques reprises. Les 6 et 13 février, j'ai moi-même rencontré les deux parties pour les presser de conclure une entente et leur rappeler combien elle est importante pour les Canadiens.
À la dernière rencontre, j'ai informé les parties que je nommerais deux nouveaux co-médiateurs pour aider les négociations et que je leur accordais six mois pour ce processus, parce qu'ils m'avaient indiqué qu'ils avaient besoin de plus de temps. Cependant, malgré toute l'aide fournie et malgré le fait que les deux parties avaient promis par écrit qu'ils coopéreraient avec les co-médiateurs et qu'ils adhéraient au processus de médiation d'une durée de six mois, le syndicat a demandé et obtenu un mandat de grève de la part de ses membres. Les pilotes ont voté à 97 p. 100 en faveur de la grève.
Le 17 février, les deux médiateurs, la juge Louise Otis, qui venait de connaître du succès auprès des machinistes, et Jacques Lessard, de mon ministère, ont rencontré les parties. Cependant, à la suite de cette réunion, Mme Otis a jugé qu'elle devait remettre sa démission, puisque des renseignements sur les travaux de médiation qui ont eu lieu lors de cette première réunion ont été divulgués par l'association des pilotes. En tant qu'ancienne juge réputée, Mme Otis croyait que cette violation de la confidentialité nuirait davantage aux efforts déployés par les médiateurs pour aider les parties à conclure une entente. C'est cette violation de la confidentialité par l'une des parties qui explique en grande partie la démission d'une ancienne juge réputée. Cela en dit long sur l'état des négociations dans cette affaire.
Cela nous amène finalement à parler de la raison pour laquelle le projet de loi est présenté. Le 8 mars, l'employeur a annoncé son intention d'imposer un lock-out aux pilotes, à compter du lundi 12 mars à minuit.
En ce qui concerne l'association des pilotes, je tiens à préciser aux députés que les parties avaient également conclu une entente. Dans le cadre des négociations collectives, les parties étaient parvenues à une entente qui, elle aussi, n'a pas pu être ratifiée.
Par intérêt, Air Canada avait conclu une entente avec chacune des six unités de négociation avec lesquelles elle avait négocié pendant l'exercice financier en cours. Air Canada a négocié à huit reprises avec ces six unités de négociation, et la société est parvenue à une entente avec chaque unité syndicale de négociation, pour finalement se rendre compte que quatre de ces ententes ont été rejetées par les syndiqués.
Cette affaire a assez duré. Cette incertitude dans le milieu du travail mine la confiance du public à l'égard de l'industrie du voyage. Le conflit a des répercussions sur les entreprises canadiennes et sur bien d'autres personnes au pays, notamment les voyageurs, les travailleurs, les étudiants, les parents, les aînés et les professionnels. Comment les entreprises parviendront-elles à gérer leurs déplacements essentiels? Comment les familles pourront-elles prendre leurs vacances? Qu'en est-il des 45 000 passagers qui prennent des vols outre-mer chaque jour? Que feront les Canadiens? Nous ne le savons tout simplement pas. Pour être juste, j'ajouterais que ce ne sont pas des questions que les Canadiens devraient avoir à se poser, surtout alors que le Canada se remet encore d'une crise économique.
Il faut garder à l'esprit que l'enjeu est plus vaste que les seules questions débattues à la table de négociation.
Les employés représentés par l'Association internationale des machinistes et des travailleurs de l'aérospatiale, l'AIMTA, veulent être traités équitablement, tout comme les pilotes représentés par l'Association des pilotes d'Air Canada. Je le comprends, et je conviens que c'est important. Mais je sais aussi que des millions de Canadiens comptent sur le transport aérien. Eux aussi veulent être traités équitablement. Comme je l'ai souligné plus tôt, plus d'un million de voyageurs prévoient prendre un vol d'Air Canada pendant la semaine de relâche de mars. La possibilité d'une grève arrive donc à un très mauvais moment pour les centaines de milliers de familles qui ont des projets de voyage. De plus, Air Canada n'a tout simplement pas les moyens de risquer une longue interruption de service. Et il ne faudrait pas oublier la vulnérabilité de notre économie.
Comme l'indique le préambule du Code canadien du travail, les libres négociations collectives sont les fondements de relations du travail fructueuses. En cas de différend, le Code autorise les grèves et les débrayages. Le gouvernement fédéral n'intervient que dans les situations qui nuisent à l'intérêt public. Cela se produit notamment quand la menace d'un arrêt de travail a des incidences sur l'économie nationale, comme c'est le cas ici.
Il ne fait aucun doute qu'un arrêt de travail à Air Canada aurait des retombées négatives sur les Canadiens et les entreprises canadiennes. Il ne fait aucun doute qu'un tel arrêt de travail pourrait nuire gravement au redressement de notre économie. C'est parce les intérêts des Canadiens et l'économie sont en jeu que nous avons besoin d'une mesure législative et qu'il faut adopter ce projet de loi. Ainsi, nous protégerons notre économie et nous veillerons à ce que les entreprises et les collectivités canadiennes ne souffrent plus de cette situation.
Certains diront qu'au lieu d'intervenir, nous devrions laisser le différend suivre son cours, quel qu'en soit le résultat. Ce serait certainement plus simple pour nous tous, mais je soutiens qu'il faut faire ce qui est juste au lieu d'opter pour la facilité. Les Canadiens s'attendent à ce que nous prenions les choses en main et à ce que nous agissions.
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Monsieur le Président, je dirais encore avec tristesse que c'est du déjà-vu. C'est triste d'avoir un projet de loi ou une motion de ce genre de la part du gouvernement. Je vais essayer d'expliquer cela pour que les citoyens puissent comprendre.
Oui, c'est vrai que c'est une semaine de relâche où les gens veulent profiter de leurs vacances. Je sympathise avec cela au plus haut point. Je suis également un être humain et je sais qu'il y a des familles qui ont planifié des vacances. Toutefois, en même temps, les travailleurs et travailleuses ont des droits, des droits fondamentaux selon la Charte des droits de la personne. Ils ont droit à une libre négociation. De voir le gouvernement intervenir continuellement dans les négociations, comme le fait le gouvernement conservateur, cela envoie d'après moi aux employeurs un message direct selon lequel ils n'ont pas besoin de négocier. Ils peuvent aller chercher le maximum des employés parce que le gouvernement ne tolérerait pas de lock-out, ni de grève, et qu'il légiférerait pour avoir les travailleurs de retour au travail. Entretemps, les employeurs auront tout ce qu'ils auront voulu. Ils pourront se fier au gouvernement dans leur bras de fer.
Je trouve que c'est inacceptable et que ce n'est pas correct. Ce n'est pas ce que la Charte des droits de la personne a donné aux syndicats. La Cour suprême a même dit que les travailleurs avaient droit à une négociation libre. Ce n'est pas au gouvernement d'interférer de cette manière. Le gouvernement peut certes venir en aide aux parties grâce à la conciliation et offrir de la médiation pour les aider à en venir à une entente, mais il n'a pas à interférer de la manière qu'il le fait.
De plus, il y a un manque de respect face à la démocratie à la Chambre des communes. Plus tôt, dans ma question à la ministre, je parlais de la limite de temps. Non seulement il enlève le droit de grève aux employés ou le droit de lock-out à la compagnie, mais en plus, le débat ne peut même pas se faire à la Chambre des communes. Le projet de loi pourra être lu deux ou trois fois durant la même séance. Une, deux et trois fois en une séance et c'est terminé, on se débarrasse de cela.
On dit ce qui suit: « au plus deux heures seront allouées aux délibérations à l'étape de la deuxième lecture, après l'adoption du présent ordre ». Ce sera deux heures de débat. De plus, « lorsque le projet de loi aura été lu une deuxième fois, il sera renvoyé à un comité plénier ». On dit par la suite qu'au plus « une heure sera accordée aux délibérations à l'étape du comité plénier ». Ce sera une heure, pas plus. Par la suite, la motion prévoit ceci: « au plus une demie heure sera accordée aux délibérations à l'étape de la troisième lecture, sous réserve qu'aucun député ne prenne la parole pendant plus de 10 minutes lors de cette étape et qu'aucune période de questions et de commentaires ne soit autorisée après l'intervention de chaque député ».
On s'en va-t-on, monsieur le Président? On s'en va-t-on avec la démocratie et le droit fondamental d'avoir un Parlement pour débattre de telles questions importantes?
La ministre elle-même a dit que c'était une question importante. À Toronto, la semaine dernière, le lui-même a soutenu — j'ai de la difficulté à le croire — qu'une partie de lui-même refusait d'intervenir dans le conflit. Ayoye! Mon oeil! J'aimerais voir où est le ? On n'a pas le droit de le nommer, mais je pense que tout le monde au Canada sait qui est le premier ministre du pays. C'est le même qui veut intervenir pour hausser à 67 ans l'âge où les travailleurs et les travailleuses auront droit à leur pension. C'est le même qui est intervenu dans la grève partielle des postiers, non seulement pour dire qu'il légifère pour les obliger à retourner au travail, mais aussi pour intervenir dans la convention collective. L'employeur, Postes Canada, avait donné des augmentations salariales de 2 p. 100 et le gouvernement est intervenu pour les baisser à 1,5 p. 100. Il a dit que les employés de Postes Canada n'avaient pas besoin d'avoir une plus importante hausse de salaires que les employés du secteur public. Il est intervenu directement dans les négociations.
Je vais dire ceci aux Canadiens et Canadiennes, aux travailleurs et aux travailleuses. L'année dernière, c'étaient les postiers. Aujourd'hui, ce sont les pilotes et les gens de l'entretien à Air Canada. Demain, ce sera peut-être eux. L'argument du gouvernement est qu'on ne peut pas laisser le reste des Canadiens être soumis au chantage par un groupe de personnes. Il faut défendre les intérêts de tout Canada, de tous les citoyens canadiens et de toutes les citoyennes canadiennes.
On pourrait utiliser le même argument pour chaque négociation de convention collective. On pourrait utiliser le même argument quand on parle de l'économie, du secteur minier. Par exemple, si les mineurs d'une grande mine à Sudbury allaient en grève, cela ferait mal à toute la ville, on ne peut dire le contraire. Cependant, la grève est un droit fondamental de la négociation. Ce n'est pas au gouvernement d'intervenir. Ça n'a rien à voir avec la santé et la sécurité, ce n'est pas un service essentiel. J'ai hâte de voir ce que les relations industrielles vont dire là-dessus.
Il y a autre chose. Air Canada vient dire qu'elle met ses pilotes en lockout au même moment où les personnes de l'entretien déclarent la grève. C'est quasiment dire que le gouvernement ne frappe pas seulement sur les syndicats, mais sur la compagnie aussi. Air Canada pourra dire qu'on lui enlève son droit de décréter un lockout. Encore une fois, je n'y crois pas. Il y a des pourparlers entre la compagnie et le gouvernement. La ministre elle-même a dit que la compagnie a eu des problèmes financiers.
Je vais en parler, des problèmes financiers d'Air Canada. Mon collègue de a dit tantôt que le président avait reçu 2 millions de dollars en bonus. Mon collègue m'indique avec sa main que c'est plutôt 5 millions de dollars, M. Milton, l'ex-président d'Air Canada, est parti en s'en lavant les mains, alors qu'Air Canada avait des problèmes. On lui a donné 80 millions de dollars à même la caisse de cette compagnie. Ce sont les travailleurs et les travailleuses d'Air Canada qui ont payé pour cela. Ce sont ces gens qui s'assurent que les citoyens, quand ils montent à bord d'un avion, reçoivent les services, que ce soit ceux des agents de bord ou de ceux qui mettent leurs bagages dans l'avion. Tous ces services sont rendus par ces travailleurs et travailleuses. Et Air Canada veut maintenant faire des compressions pour offrir des vols à rabais. Le grand public trouve ça bien, mais cela se fait sur le dos des travailleurs et travailleuses.
Le problème, c'est que ce ne seront pas juste eux qui seront touchés. Qui seront les prochains? C'est le message que le gouvernement envoie à l'industrie. Ça me fait de la peine, à moi aussi, que ça arrive pendant la semaine de relâche de mars, mais que ce soit là, en mai, en avril ou en juin, les avions sont toujours pleins. Ça va toujours toucher les voyageurs. Les travailleurs d'Air Canada n'auront jamais le droit de négocier librement, droit qui est garanti par la Charte canadienne des droits et libertés. Ils n'auront jamais le droit de faire la grève. Qu'arrive-t-il au rapport de force entre les travailleurs et les employeurs?
La ministre a dit dans sa présentation que les représentants syndicaux, les gens à la table de négociation avaient fait des recommandations aux travailleurs, et que ces derniers ne les avaient pas acceptées. C'est comme si on considérait que les travailleurs sont tenus de respecter les recommandations du comité de négociation. Par contre, quand le gouvernement veut parler en mal du syndicat — ce qu'il a fait à maintes reprises —, il dit que les employés n'ont jamais un mot à dire et que ce sont toujours les boss syndicaux qui décident. J'ai toujours dit qu'il n'y a pas de boss syndicaux. Les vrais boss, ce sont les membres. Les membres ont le droit démocratique de mettre une équipe en place qui va négocier pour eux. C'est aux membres à décider si les offres sont suffisantes ou pas, et non à l'équipe. L'équipe peut faire des recommandations.
J'ai été représentant syndical et j'ai déjà fait des recommandations que les membres avaient refusé. Je ne me suis pas fâché contre eux. C'est leur syndicat, c'est leur association. Ça n'appartient pas au comité de négociation, ni à la compagnie, ni au gouvernement.
Le syndicat, ce sont les membres. Les boss, ça a toujours été les membres et on doit le respect aux membres. Ce sont eux qui ont choisi d'adhérer à un syndicat. Ce sont eux qui paient leurs cotisations syndicales et le syndicat rend des comptes à ses membres.
Comment est-ce que cela fonctionne? Des négociations commencent. On fait une présentation et on va jusqu'au bout. À la fin du processus, le syndicat présente une convention collective aux membres et fait une recommandation. Le jour où le comité de négociation décidera pour les membres, il n'y aura plus de démocratie et le syndicat ne leur appartiendra plus. Alors, il faut faire attention à cela, faire attention au message qu'on envoie. C'est pour cela qu'il y a un vote, un vote sacré. C'est pour donner la chance aux membres de voter démocratiquement au sein de leur syndicat, pour que ce soit leur propre décision et non la décision de leurs représentants.
J'ai participé à plusieurs réunions de syndicats et je ne me gênais pas pour dire au monde que le syndicat, ce n'est pas ceux qui sont à la table, ni le président, ni le vice-président, ni le trésorier ou le secrétaire. Le syndicat, c'est eux. Ça leur appartient, c'est leur association. Il ne faut pas avoir honte d'avoir des syndicats dans notre pays.
Si on a un beau pays, considéré comme l'un des meilleurs pays au monde, si on a de bonnes conditions, avec des fonds de pension, avec un droit d'arrêt de travail dans le cas d'un travail dangereux, si on a toutes ces conditions dans les conventions collectives, c'est parce qu'il y a des syndicats. Qu'on aille dans d'autres pays ou dans le tiers monde pour voir comment les travailleurs sont traités. Est-ce qu'on doit reculer de la sorte?
J'accuse le gouvernement conservateur d'être anti-travailleurs et anti-syndicats. Lors de la négociation avec Postes Canada, le gouvernement conservateur aurait pu intervenir en disant qu'il envoyait les parties en arbitrage pour régler les problèmes par l'intermédiaire d'un arbitre. Ce n'est pas ce qu'il a fait. Il a même inclus dans le projet de loi des salaires plus bas que ce que l'employeur proposait. On ne peut pas intervenir davantage que ça. On ne peut pas être plus anti-travailleurs que ça, quand l'employeur promet un 2 p. 100 et que le gouvernement conservateur le réduit à 1,5 p. 100. Imaginez-vous! Où est le respect?
Vendredi, le a soutenu qu'une partie de lui-même refusait d'intervenir dans le conflit. Mon oeil! Il faut rappeler aux Canadiens et Canadiennes qui nous écoutent aujourd'hui que c'est le même gouvernement qui veut repousser l'âge de la retraite à 67 ans. C'est le même gouvernement qui n'a aucun respect pour les hommes et les femmes qui se lèvent le matin, qui travaillent et qui bâtissent ce pays. Le gouvernement conservateur veut mettre cela sur le compte de l'économie. Qu'il arrête de dépenser de l'argent pour des F-35, des gazebos et des lacs artificiels et qu'il mette l'argent à la bonne place au lieu de faire porter le fardeau aux travailleurs et aux travailleuses. Peut-être bien qu'on aurait moins de déficit dans notre pays.
Il y a une place où l'argent pourrait être dépensé. On reçoit dans nos bureaux des appels téléphoniques dénonçant les coupes qui sont en train d'être faites dans le secteur public relativement à l'assurance-emploi. Comment est-il possible que le gouvernement décide de fermer plus de 100 bureaux de Service Canada alors que des travailleurs perdent leur emploi et sont obligés d'attendre 40 jours pour toucher leurs prestations d'assurance-emploi? C'est insensé. Il ne restera que 22 bureaux. Tout cela a à voir avec les coupes faites envers les travailleurs et les travailleuses et dans les services offerts aux Canadiens et aux Canadiennes.
Aujourd'hui, la ministre a le culot de se lever et dit qu'elle travaille dans l'intérêt des Canadiens et des Canadiennes, alors qu'en même temps, on coupe dans les services offerts par Service Canada. Les Canadiens et Canadiennes, les Québécois et Québécoises vont perdre des services, comme cela ne s'est jamais vu, que ce soit dans les prestations de la Sécurité de la vieillesse, le Régime de pensions du Canada ou dans les prestations versées aux vétérans. On est le seul pays à faire cela.
Par exemple, dans leur prochain budget, les États-Unis ou l'Angleterre ne réduiront pas les prestations versées aux vétérans et ne couperont pas dans les services offerts aux vétérans, alors que c'est ce que le Canada fera dans le prochain budget. Les conservateurs ont voté contre la motion du NPD.
Pour toutes ces raisons, pour donner des droits aux travailleurs et travailleuses, il ne faut pas avoir honte de se lever, dire qu'il existe des droits fondamentaux dans notre pays et les défendre.
Il ne faut pas faire ce que le gouvernement conservateur fait ici, c'est-à-dire faire payer le gros prix à tous les Canadiens et Canadiennes. Si le gouvernement n'avait pas envoyé le message clair aux compagnies de venir le voir en cas de problèmes, Air Canada aurait déjà négocié sa convention collective. Elle n'avait aucune raison de ne pas le faire. Il n'y a plus de rapport de force et tout le pouvoir est du côté de l'employeur.
Cette motion établit des règles anti-démocratiques. Elle vise à nous enlever le droit de tenir des débats à la Chambre des communes. Le gouvernement a l'intention de proposer un autre projet de loi, cet après-midi ou demain, pour s'assurer que les travailleurs canadiens perdent leurs droits en matière de relations du travail.
Un jour, les Canadiens décideront quel Canada ils veulent. Voulons-nous bâtir des prisons, acheter des F-35, dépenser des tonnes d'argent puis nous en prendre aux fonds de pension des travailleurs? Les gens vont décider quelle sorte de gouvernement ils veulent. Pour ma part, je suis certain que ce n'est pas la sorte de gouvernement qu'ils veulent.
Si on demande à une personne qui prévoit prendre l'avion ce qu'elle pense d'une grève à Air Canada, il est normal qu'elle dise qu'elle ne veut pas perdre son voyage. Je sympathise avec ces gens, mais je veux que l'employeur et les employés retournent à la table de négociation pour négocier une convention collective. Il faut que le gouvernement envoie un message aux deux parties qu'il ne négociera pas à leur place et qu'il vaut mieux qu'elles le fassent elles-mêmes. À long terme, ce serait un meilleur investissement pour l'économie, la démocratie, les employeurs et les droits des travailleurs et des travailleuses.
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Monsieur le Président, nous assistons à un épisode du Jour de la marmotte. Nous sommes encore saisis d'une loi de retour au travail. Le gouvernement s'immisce dans un conflit de travail qui touche une entreprise privée.
J'aimerais revenir sur certains propos tenus par la ministre dans son discours. Elle a dit que, depuis 1950, le Parlement était intervenu plus de 35 fois dans des conflits de travail au pays. C'est peut-être le cas. Dans le cas des services essentiels — et ce qui est jugé être un service essentiel change avec le temps —, certaines interventions sont justifiées. Cela dit, il serait intéressant de remonter dans le temps et de voir combien de ces quelque 35 interventions ont été précédées d'une motion visant à limiter le débat sur un projet de loi qui n'avait même pas encore été présenté. Dans ce cas-ci, le gouvernement prépare le terrain en limitant la durée du débat avant même que nous ayons pris connaissance de la mesure législative proposée. Dans le passé, le gouvernement a présenté des projets de loi archaïques, notamment dans le cas de Postes Canada. Encore une fois, j'aimerais bien savoir combien d'interventions ont été précédées d'un avis visant à limiter le débat sur une motion avant même que celle-ci soit présentée.
La ministre a aussi dit que cette mesure est une étape importante qui fait partie intégrante du processus visant à éviter que l'économie du pays ne subisse un ralentissement et que cet arrêt de travail ne nuise aux progrès accomplis au niveau de la reprise économique au Canada.
J'aimerais prendre un moment pour parler de ces progrès. Nous savons que 1,4 million de Canadiens sont sans emploi. Ce nombre augmente constamment depuis le mois d'octobre dernier. Nous savons aussi qu'un plus grand nombre de jeunes Canadiens sont au chômage. À l'heure actuelle, le taux de chômage chez les jeunes est d'environ 14,7 p. 100 au pays. Ce qui est encore plus troublant c'est que le pourcentage de la population active représenté par les jeunes au Canada diminue depuis plusieurs mois. En fait, certains jeunes Canadiens ont cessé de se chercher un emploi, ce qui signifie qu'ils sont dissociés de notre économie.
Nous savons aussi que les gens restent sans emploi durant de plus longues périodes. En 2008, la période moyenne de chômage était de 14,8 semaines, comparativement à 21,2 semaines l'an dernier. Sous le gouvernement conservateur, le chômage chez les jeunes atteint des niveaux records. Or, la réponse des conservateurs face à cette situation consiste à fermer les centres d'emploi pour les jeunes et à fournir à ces derniers encore moins de possibilités de se trouver un emploi. Telle est l'approche du gouvernement. S'il agit ainsi pour relancer l'économie, je suis convaincu que les Canadiens vont lui dire de cesser de le faire et de laisser l'économie tranquille, parce que le mal est fait.
À mon avis, l'impact de cette grève sur l'économie serait mineur. Il serait relativement limité. Après tout, il y a d'autres transporteurs aériens au pays. WestJet, Porter et d'autres compagnies offrent des services de transport aérien partout au pays. Même s'ils voyagent et qu'ils ont encore recours aux services de transport aérien dans le cadre de leur activité, la majorité des entrepreneurs se servent de la technologie moderne, comme Skype et les appels par Internet.
Dans une petite localité comme Sydney, servie par Jazz Air, si nous ne pouvons pas aller à Halifax par un vol de correspondance, nous pouvons tout de même nous y rendre, car il y a d’autres moyens de sortir de Sydney. Pour savoir s’il s’agit d’un service essentiel ou non, considérons la grève des transports à Halifax. Un grand nombre d’habitants de la ville ont normalement accès à ce service public au quotidien pour faire la navette entre leur foyer et leur lieu de travail. Cette grève dure depuis maintenant huit semaines. Comparer une grève des transports en commun et ce lock-out-ci, avec le projet de loi que la ministre propose, c’est comparer des pommes et des oranges.
Nous estimons que le gouvernement adopte une approche trop rigoureuse en intervenant ici. Ce n’est certainement rien de neuf. C’est la quatrième fois que le gouvernement s’immisce dans un conflit de travail, et nous avons vu comment il agit dans ces dossiers. Les employés d’Air Canada, soit les équipes au sol, les bagagistes, les machinistes, les pilotes, les agents de bord et les préposés au service à la clientèle ont tous dû subir les conséquences des actes du gouvernement. Ces 48 000 employés ont perdu leur droit à une négociation collective libre et juste. Ajoutons les employés des postes, et ce sont environ 75 000 Canadiens qui ont perdu leurs droits. Tous ces droits perdus, c’est une faute colossale, et le gouvernement a tort de s’immiscer dans ce conflit.
Je dois des félicitations à la ministre, car j’estime qu’elle a fait ce qu’elle pouvait avant qu’on n’en arrive là, et je l’admets. Elle a remplacé le médiateur. Elle n’a pas imposé ses opinions personnelles, mais elle a constaté que les pourparlers s’enlisaient, et elle a nommé un autre médiateur. Si nous étions au pouvoir, nous aurions fait la même chose. Toutefois, à cause de ce que le gouvernement a fait par le passé, Air Canada savait que la ministre allait présenter un projet de loi, peu importe l’issue de la médiation. La direction croyait qu’elle pouvait compter sur le gouvernement pour imposer le retour au travail; c’est là ce qui a empoisonné l’affaire. Le contexte a été transformé à cause de ce que la ministre a déjà fait par le passé, puisque la direction d’Air Canada savait que ce projet de loi allait venir.
Ce qui se passe, c’est que la ministre est en fait en train de faire le travail de M. Rovinescu, le PDG d’Air Canada. Il aurait dû être contraint de trouver une solution dans ces négociations, de trouver un moyen de satisfaire ses effectifs pour que la compagnie aérienne puisse poursuivre son exploitation et continue de servir les Canadiens. Le travail est plus facile quand on sait que la ministre va présenter un projet de loi. Dans ce cas, il touchera une prime de 5 millions de dollars à la fin du mois. C’est incroyable. Sur dix ans, depuis qu’Air Canada s’est placée sous la protection des lois sur la faillite, les travailleurs ont consenti des concessions qui totalisent 2 milliards de dollars. Ils ont accepté des diminutions de salaire et d’avantages sociaux totalisant 2 milliards de dollars sur dix ans. Ils ont fait leur part pour que l’entreprise puisse se relever et survivre.
Lorsque M. Milton est parti, il a reçu un beau cadeau de 80 millions de dollars aux dépens des travailleurs. Voici maintenant que M. Rovinescu empoche 5 millions de dollars. Cinq millions de dollars, ce n’est pas beaucoup pour certains députés du parti ministériel, mais ce n’est pas si mal. Son travail a été grandement facilité parce qu’il pouvait compter sur le gouvernement conservateur pour proposer une loi forçant le retour au travail.
Cette intervention ébranle le moral de cette société, mine les relations déjà tendues entre les employés et la direction d'Air Canada et ne sert la cause de personne. Elle nuit davantage à une grande entreprise de transport aérien. Tous les Canadiens se plaignent du temps qu'il fait et d'Air Canada. Les passagers dont un bagage a été égaré ou dont le vol a été retardé ne pensent pas beaucoup de bien d'Air Canada. En fait, ceux-là maudissent Air Canada.
Trois semaines par année — et à quelques autres reprises —, je fais la navette entre ma circonscription et Ottawa. À mon avis, personne, dans aucune entreprise, n'exerce un métier plus difficile et ne fait un meilleur travail que les employés d'Air Canada. C'est une honte que le gouvernement méprise et bafoue les droits de ces travailleurs.
À en juger par certains commentaires qui ont été formulés, rien ne justifie les mesures prises par le gouvernement. J'aimerais citer quelques opinions, si la Chambre me le permet. Le président de l'Association des pilotes d'Air Canada, Paul Strachan, a parlé du fait que le gouvernement s'est mêlé de conflits de travail à plusieurs reprises et des préoccupations que cela suscite. Il a déclaré que « ces interventions ont certainement des répercussions sur le pouvoir de négociation » et que le pouvoir d'intervention du gouvernement est « une épée de Damoclès suspendue au-dessus de la tête » de tous les négociateurs syndicaux.
Voici maintenant ce qu'a déclaré Dave Ritchie, le vice-président général pour le Canada de l'Association internationale des machinistes et des travailleurs de l'aérospatiale:
J'ai demandé à [la ministre] de ne pas intervenir dans le processus, mais elle l'a quand même fait. Je suis déçu et pas très content de sa décision.
Il a ajouté que cela nuit aux relations patronales-syndicales.
Cependant, les représentants syndicaux ne sont pas les seuls à s'élever contre les mesures prises par le gouvernement. Je vais citer George Smith, ancien directeur des relations avec les employés chez Air Canada, qui est maintenant professeur à l'Université Queen's. Il a parlé de l'ingérence du gouvernement dans l'actuel conflit de travail et dans ceux survenus dans le passé. Il était souvent assis à la table de négociation et il a participé à plusieurs négociations au fil des ans. Il a fait valoir que si les conflits de travail sont mis entre les mains d'arbitres, il est peu probable que la partie patronale obtienne ce qu'elle veut. C'est un fait.
Comme il le dit lui-même:
Au cours des 10 années que j'ai passées à Air Canada, il y a eu des grèves et des lock-out et le gouvernement n'a jamais eu besoin d'intervenir.
En apparence, le gouvernement fédéral agit dans l'intérêt du Canada, mais son intervention est vraiment désastreuse [...] Alors qu'une convention collective difficile est en cours de négociation, le gouvernement prend le contrôle de la situation pour dicter les termes de l'entente. On élimine du processus un affrontement qui fait mal à court terme, mais qui permet d'en arriver à un règlement équitable. L'intervention du gouvernement fera en sorte que les conventions collectives ne seront pas concurrentielles.
Ces propos viennent d'une personne respectée, quelqu'un qui a été de l'autre côté de la table et qui a représenté la partie patronale au cours de nombreuses négociations.
Nous savons que l'élaboration des conventions collectives est un processus difficile. Dans le contexte économique mondial actuel, il est certain que de nombreuses entreprises tentent seulement de survivre. Cependant, la plupart des Canadiens qui travaillent pour une société qui a été capable de poursuivre ses activités et de se redresser, et qui a connu une réelle croissance au cours des dernières années, comprennent qu'ils ont participé au bon travail qui a permis que cette société soit concurrentielle et se maintienne à flot.
Les travailleurs qui ont contribué à cette réussite doivent avoir la possibilité d'agir. Ils doivent avoir la possibilité de participer à cette réussite. Cependant, le gouvernement leur a même retiré cette possibilité. Voilà ce qui est grave et vraiment regrettable dans cette affaire.
À maintes reprises, les représentants des parties négocient et pensent en être arrivés à une entente. Un représentant syndical qui négocie au nom de travailleurs, que ceux-ci soit 8 000 ou un autre nombre, peut quitter la table des négociations en pensant que tous les aspects du conflit ont été réglés. Cependant, ce n'est pas au dirigeant syndical d'affirmer qu'une entente est conclue. Son rôle consiste plutôt à présenter une entente aux syndiqués.
Lorsqu'un dirigeant syndical conclut une entente au terme d'une séance de négociation, il sait assez bien si les syndiqués l'accepteront. Ce n'est toutefois pas un fait accompli et l'affaire n'est pas réglée. Il doit soumettre l'entente aux syndiqués. Dans le cas présent, l'entente a été rejetée. Ce faisant les syndiqués l'ont chargé de retourner à la table de négociation et de soulever les lacunes de l'entente proposée. Voilà la responsabilité du représentant syndical et ce qui devait se produire dans le cas présent.
Cependant, étant donné que le gouvernement présente un projet de loi, la partie patronale connaît déjà la fin de l'histoire. Certains diront qu'une entente était en place et que tout était déjà conclu, mais ce n'est pas le cas. Les syndiqués doivent approuver toute entente provisoire. On les appelle des ententes provisoires parce qu'elles doivent être acceptées par les syndiqués. La direction du syndicat soumet l'entente à ses membres et, si elle est rejetée, les parties passent alors à l'étape suivante du processus. Dans ce cas-ci, elles n'en ont même pas eu la possibilité.
Telle est la situation dans laquelle nous nous retrouvons. Je suis certain que le gouvernement a déjà sur ses tablettes un projet de loi tout prêt où il peut insérer le nom de n'importe quelle société actuellement prête à écarter les travailleurs du processus; un tel projet de loi forcerait la partie patronale à proposer des mesures sérieuses. Cependant, de toute évidence, le gouvernement ne s'est pas montré vraiment favorable à une négociation collective équitable et ouverte. Le gouvernement a plutôt compromis ce type de négociation et je ne pense pas qu'il soit possible d'y revenir. Les jeux sont faits. Les syndicats de la fonction publique au pays savent qu'ils sont dans la mire du gouvernement et qu'ils connaîtront des moments difficiles. Ils attendent certainement le prochain budget avec beaucoup d'impatience. Cependant, ne vous méprenez pas: le gouvernement s'apprête sûrement à s'en prendre à eux aussi.
Pour conclure, je trouve regrettable qu'on se retrouve de nouveau dans une telle situation. Il est dommage que le gouvernement ait retiré au syndicat le juste droit de négocier une convention collective équitable. Le gouvernement fait pencher la balance en faveur de la société. Depuis son arrivée au pouvoir, le gouvernement conservateur a porté un dur coup au mouvement syndical et celui-ci n'est pas au bout de ses peines.
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Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour parler de la nécessité d'adopter le projet de loi dont la a donné préavis, c'est-à-dire la mesure législative visant à assurer le maintien et la reprise des services aériens.
Les services aériens sont essentiels pour les voyageurs et l'économie du Canada, c'est pourquoi il faut qu'Air Canada continue de les assurer. Plus d'un million de Canadiens, dont des travailleurs et des familles, ont prévu utiliser les services d'Air Canada pendant la semaine de relâche du mois de mars. Ces gens comptent sur le gouvernement. Nous estimons que la grande majorité des voyageurs espère que le gouvernement agira. Nous aurions vraiment aimé que les trois parties intéressées puissent régler elles-mêmes le conflit, mais nous jugeons qu'il est essentiel que le gouvernement prenne les mesures nécessaires pour que la compagnie aérienne continue d'assurer ses services afin que les Canadiens puissent voyager. Nous ne laisserons pas la compagnie aérienne interrompre ses services sans réagir. Il faut faire en sorte que les services aériens d'Air Canada soient toujours assurés.
Nous ne cherchons ni à prendre parti, ni à punir l'une ou l'autre des parties en cause. Il ne s'agit pas d'une solution facile à un problème complexe. Nous agissons ainsi parce que c'est la meilleure chose à faire et parce qu'il faut protéger les Canadiens et la reprise économique, sur laquelle nous comptons tous pour que le Canada soit prospère et connaisse une période de croissance au cours des prochaines années. Le temps presse. Il faut donc agir dès maintenant.
Il faut qu'Air Canada continue d'assurer les services voulus en période de pointe avant que l'économie du Canada ne subisse de graves préjudices. Il faut agir avant que les entreprises canadiennes en souffrent et aient recours aux services d'autres compagnies, et avant que les projets de vacances des voyageurs canadiens tombent à l'eau. Dans les circonstances actuelles, ce n'est certainement pas ce dont l'économie du Canada et les voyageurs ont besoin.
Le gouvernement aurait-il préféré que les parties en arrivent d'elles-mêmes à une entente? Évidemment. Ma collègue, la , a répété à maintes reprises que, pour résoudre un conflit de travail, rien ne vaut une entente entre les parties sans qu'il y ait arrêt de travail. En fait, 94 p. 100 des négociations collectives au Canada sont réglées de cette manière. Ces statistiques n'échappent ni aux employeurs, ni aux syndicats. Il existe un meilleur moyen de régler ces différends, et c'est la voie retenue par les parties dans la grande majorité des cas. Malgré tous nos souhaits et, bien entendu, malgré ce qui fonctionne dans la majorité des cas, nous nous retrouvons aujourd'hui aux prises avec ces deux conflits de travail.
Nous devons tenir compte des éléments suivants. Le 10 février dernier, l'AIMTA et Air Canada ont conclu une entente de principe. Toutefois, le 22 février, le syndicat a informé l'employeur que ses membres avaient rejeté cette entente. Le 17 mars 2011, l'Association des pilotes d'Air Canada a conclu une entente de principe avec l'employeur. Le 19 mai, le syndicat a informé l'employeur que ses membres avaient rejeté cette entente. Air Canada a donc conclu deux ententes de principe avec deux unités de négociation distinctes, que les membres des deux syndicats respectifs ont rejetées.
La menace d'un conflit de travail peut servir de moyen de négociation. Grâce à cette prérogative légitime, les travailleurs peuvent exercer pression sur l'employeur. Toutefois, les effets de ces pressions peuvent être ressenties non seulement par Air Canada, mais aussi par tous ceux qui dépendent de ce transporteur et qui peuvent souffrir d'un arrêt de travail, qu'il voyagent par affaires, dans le cadre de leurs études, pour aller explorer d'autres possibilités, pour rendre visite à leur famille ou qu'ils partent en vacances.
Comme chacun le sait, le bilan d'Air Canada en matière de sécurité est excellent. La société respecte scrupuleusement les règles et les procédures à ce chapitre. L'Association internationale des machinistes et des travailleurs de l'aérospatiale représente les employés d'Air Canada chargés des services techniques, de maintenance et d'exploitation. Cela comprend notamment l'entretien cabine, le nettoyage des appareils, la manutention des bagages et la distribution des pièces et des fournitures. Ces employés font en sorte que les activités d'Air Canada se déroulent sans heurts, efficacement et en toute sécurité. Ce sont des travailleurs qualifiés difficiles à remplacer.
De surcroît, les pilotes d'Air Canada sont responsables du fonctionnement de l'avion, de la sécurité des passagers et des membres de l'équipage et de toutes les décisions à prendre en cours de vol. Les pilotes sont de toute évidence un élément clé et fondamental de la sécurité des opérations d'Air Canada. Je répète que ce sont des travailleurs hautement qualifiés et difficiles à remplacer. Par conséquent, des arrêts de travail chez l'un ou l'autre de ces groupes de précieux travailleurs auraient d'importantes répercussions économiques. Ils pourraient remettre en question l'avenir même d'Air Canada. Leurs effets directs sur Air Canada pourraient être graves à un moment où la société est aux prises avec des contraintes financières.
Nous devons penser aux répercussions sur les voyageurs et les entreprises qui utilisent les services d'Air Canada. Pour bien comprendre la portée de ces répercussions, il est utile d'examiner la taille des opérations de la société. Air Canada est le plus grand transporteur aérien et le plus grand fournisseur de services réguliers sur les marchés intérieur, transfrontalier avec les États-Unis et international au départ et à destination du Canada. Air Canada sert plus de 32 millions de clients chaque année et offre des vols directs vers 170 destinations réparties sur cinq continents.
Un arrêt de travail à Air Canada pourrait coûter jusqu'à 22,4 millions de dollars par semaine à l'économie canadienne. Les données financières ne représentent toutefois qu'un des moyens de mesurer le coût d'un conflit de travail. Il y a aussi le coût des pertes d'emplois, du temps perdu et des occasions ratées pour toutes les entreprises qui dépendent d'Air Canada. Il y a le coût des voyageurs coincés dans un aéroport ou des gens d'affaires cloués au sol.
Nous devons également penser aux conséquences pour d'autres employés d'Air Canada. Les quelque 25 000 personnes directement employées par Air Canada et les 250 000 travailleurs dont l'emploi est indirectement lié à la société seraient touchés. Un grand nombre d'entre eux ont des familles. En cas d'arrêt de travail, tous ces travailleurs employés directement ou indirectement par Air Canada et leurs familles seraient touchés.
Comme nous le voyons, chaque action amène son lot de réactions. Les pertes auraient un effet d'entraînement et toucheraient tous les intervenants. Le ralentissement des activités d'Air Canada nuirait aux aéroports canadiens et aux tiers fournisseurs de l'entreprise. Pensons également aux passagers, qui ne peuvent pas toujours emprunter une autre compagnie aérienne. Même s'ils optaient pour un autre moyen de transport, comme l'a proposé le député de l'autre côté, ce serait franchement malcommode en plus de leur occasionner des dépenses supplémentaires, et ceux qui ne pourraient pas le faire risqueraient d'être en mauvaise posture en se retrouvant coincés dans un aéroport ou ailleurs.
Comme nous l'avons déjà dit, plus d'un million de passagers doivent voyager sur les ailes d'Air Canada au cours de la semaine de relâche de mars. C'est un nombre considérable. Un arrêt de travail pourrait donc obliger des centaines de milliers de familles canadiennes à modifier ou même à annuler leur voyage. Il n'y a qu'une certitude: ces deux conflits de travail ne concernent pas seulement Air Canada, ses machinistes, ses travailleurs de l'aérospatiale et ses pilotes, car tous les Canadiens, qu'ils le veuillent ou non, sont des parties intéressées. De toute évidence, il en va de l'intérêt public. Voilà pourquoi nous devons agir pour assurer le maintien et la reprise des services aériens d'Air Canada.
En voyant les mesures proposées aujourd'hui, certains pourraient être tentés de s'interroger sur l'état de la négociation collective au Canada. Permettez-moi de leur répondre. Le Code canadien du travail établit un équilibre entre les droits et les intérêts des employeurs et ceux des travailleurs. Le code perpétue une longue tradition de collaboration patronale-syndicale et reconnaît les principes de la liberté d'association et du droit à la libre négociation collective. Il encourage la négociation des conditions de travail et le règlement positif des différends.
Le Code canadien du travail ne préconise pas l'intervention du gouvernement. Il est plutôt conçu pour aider les parties patronale et syndicale à trouver un terrain d'entente d'elles-mêmes. Il offre un cadre pour le règlement des différends qui touchent les milieux de travail sous réglementation fédérale et il suffit habituellement à la tâche. Comme je l'ai dit plus tôt, la très grande majorité des conventions collectives sont négociées avec succès grâce aux compromis que font les deux parties. Si celles-ci ne réussissent pas à s'entendre d'elles-mêmes, le code prévoit un processus de conciliation et de médiation.
La première étape du processus consiste pour les parties à faire parvenir un avis de différend au — à la ministre dans ce cas-ci —, qui peut alors nommer un ou plusieurs conciliateurs. Si ceux-ci ne réussissent pas à dénouer l'impasse, la ministre peut faire appel à des médiateurs, qui collaborent activement avec les parties en cause pour éviter un arrêt de travail. Si cette étape échoue, le Code canadien du travail permet à l'employeur et au syndicat de recourir à l'arbitrage, dans la mesure où les deux parties y consentent. Si aucune entente n'a été conclue dans les 21 jours qui suivent la fin du processus de conciliation, le syndicat acquiert le droit de déclencher la grève et l'employeur, celui de mettre ses employés en lock-out. Le syndicat qui opte pour la grève doit alors donner un préavis de 72 heures à l'employeur et à la ministre. L'employeur qui compte déclencher un lock-out doit faire de même.
J'aimerais donner à la Chambre plus de précisions au sujet de ces deux conflits de travail, pour montrer comment le gouvernement du Canada s'est efforcé d'aider chacune des parties à toutes les étapes du processus. La convention collective régissant le travail d'environ 8 200 employés du soutien technique, de l'entretien et des opérations a pris fin le 31 mars 2011. Ces employés, qui sont représentés par l'AIMTA, sont sans entente de travail depuis cette date. Le 21 décembre 2011, un commissaire-conciliateur a été nommé pour aider les parties pendant les négociations. Bien que les parties en soient venues à une entente de principe le 10 février grâce à l'appui d'un commissaire-conciliateur, cette entente a été rejetée par les syndiqués lors du vote de ratification tenu le 22 février. Depuis le 12 mars, les parties ont le droit légal de déclencher une grève ou un lock-out.
Du côté de l'Association des pilotes d'Air Canada, la convention collective, qui touche 3 000 pilotes, a pris fin le 31 mars 2011. Le 17 mars 2011, les parties ont conclu une entente de principe, qui a toutefois été rejetée le 19 mai 2011 par un vote de l'APAC. Dans ce cas aussi, une entente de principe conclue entre Air Canada et des agents négociateurs a été rejetée par les membres du syndicat. Un conciliateur a été nommé le 10 novembre 2011 pour aider les parties. Puis, le 16 février 2012, deux comédiateurs ont été nommés pour travailler avec les parties pendant une période de médiation de six mois.
Malgré tout l'appui qui a été fourni, notamment lors de rencontres avec la , les parties n'en sont pas encore venues à une entente.
La ministre s'est prononcée très clairement à ce sujet. Voici quelques-unes de ses remarques:
Notre gouvernement est conscient qu’une grève à Air Canada aurait des répercussions très néfastes pour les familles et pour notre économie nationale. [...] Nous incitons les deux parties à éviter un arrêt de travail et à rétablir la confiance des voyageurs et des créateurs d’emplois canadiens qui comptent sur les services aériens commerciaux.
Notre gouvernement croit au principe des négociations collectives libres. Nous avons mis à la disposition des deux parties toutes les ressources du Service fédéral de médiation et de conciliation, dans l'espoir qu'elles pourraient ainsi en arriver à des ententes négociées. Mais malgré ces efforts, les parties envisagent toujours de déclencher des arrêts de travail.
Ces conflits de travail ont assez duré. Nous n'attendrons pas de voir quels effets désastreux un arrêt de travail pourrait avoir sur notre économie fragile. Nous devons nous souvenir des graves leçons du passé, qui nous ont montré les dangers de l'inaction.
Depuis 1984, il y a eu 35 arrêts de travail dans l'industrie du transport aérien. Six de ces arrêts — soit environ le cinquième d'entre eux — ont mis en cause Air Canada. Le plus important a eu lieu en 1998, quand 2 100 pilotes ont fait la grève pendant 13 jours. Selon des analystes financiers, l'annulation des vols a fait perdre environ 300 millions de dollars à Air Canada. Cela se passait il y a 13 ans; l'économie était alors florissante, ici et à l'étranger. L'ampleur des dommages causés cette fois-ci serait inimaginable.
Les marchés n'aiment pas l'incertitude. Les entreprises non plus. Il y aurait un prix à payer chaque jour où nous laisserions l'incertitude planer sur le système de transport aérien.
Air Canada éprouve déjà des difficultés. Il y a quelques semaines à peine, elle signalait des pertes de 80 millions de dollars pendant le quatrième trimestre, un montant plus élevé que prévu. Maintenant, elle doit faire face au coût d'une grève organisée par ses machinistes et ses travailleurs de l'aérospatiale.
On a épuisé tous les autres recours pour régler ce conflit. Le gouvernement doit agir immédiatement pour résoudre ce problème. Cela mettra fin à l'incertitude dans cet important secteur de notre économie. Le Canada compte sur nous, pas uniquement l'industrie, mais aussi les citoyens. Les Canadiens comptent sur le gouvernement du Canada pour faire ce qui s'impose. Ils s'attendent à ce que nous agissions pour protéger l'économie, les emplois, la croissance et la prospérité. Assurer la reprise et la continuité des services aériens d'Air Canada contribuerait à rétablir la confiance.
Il faut maintenir les services aériens. Il faut maintenir la croissance et le roulement de l'économie sans perdre l'élan que nous nous sommes efforcés de créer au cours des derniers mois. Par conséquent, j'exhorte les députés à appuyer le gouvernement afin qu'Air Canada poursuive ses activités. Travaillons ensemble pour faire ce qui s'impose pour les Canadiens.
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Monsieur le Président, je ne suis pas très heureux d'avoir à parler de nouveau d'un tel sujet, et de devoir faire face à une motion visant à limiter le temps de parole dont nous disposons pour déterminer si nous devrions appuyer la mesure législative forçant le retour au travail, parrainée par les conservateurs.
J'ai écouté le discours de la . Elle a dit que les enjeux ne se limitent pas à ceux qui font l'objet de négociations. Elle a tout à fait raison. Quels sont les enjeux liés à la mesure législative et à l'approche particulière adoptée par les conservateurs?
D'abord, en ce qui concerne la procédure parlementaire, nous voilà saisis d'une motion visant à éliminer toute discussion à ce sujet. C'est une évidence. Nous sommes très mal à l'aise à l'égard de cette mesure.
Les conservateurs se justifient en prétextant que cet arrêt de travail, ce conflit de travail, aura de très graves répercussions sur l'économie canadienne. Les propos de la députée de ont laissé entendre autre chose. Selon elle, l'arrêt de travail et les interruptions pourraient coûter à Air Canada 22 millions de dollars par semaine. Sur un an, cela correspondrait à un coût d'environ 1 milliard de dollars. Par rapport à l'économie canadienne, qui représente 1,5 billion de dollars, ce coût ne semble pas si élevé. Si l'arrêt de travail durait deux ou trois semaines, les coûts pour l'économie canadienne seraient de moins de 100 millions de dollars, si on se fie aux données fournies dans le discours qui vient d'être donné.
Nous sommes saisis d'une mesure législative qui, de toute évidence, n'a qu'un seul objectif: mettre fin au conflit de travail, sous prétexte qu'il a des répercussions sur l'économie, alors que les données fournies pour justifier cette mesure sont ridicules.
Des craintes ont aussi été formulées au sujet de l'impossibilité d'apporter des vaccins dans le Nord et les régions éloignées du pays. Quiconque vit dans une région éloignée sait que ce n'est pas Air Canada qui y fournit les services de transport aérien. La grève devrait toucher également First Air, Canadian North et bien d'autres petits transporteurs qui assurent le transport partout au pays. Ces transporteurs ne font pas partie d'Air Canada. Ce conflit de travail n'affectera pas beaucoup les régions éloignées du pays. Cela n'arrivera pas.
Pour ce qui est des liaisons importantes au pays, une autre compagnie aérienne les assure parfaitement: c'est WestJet. WestJet n'a pas de classe affaires. C'est peut-être ce qui préoccupe le Parti conservateur. Quand je voyage au pays sur les ailes d'Air Canada, je passe à côté de beaucoup de ministériels pour me rendre à ma place en classe économique. Je pense qu'il s'agit là d'une question très grave.
L'enjeu du projet de loi est plus vaste que les seules questions débattues à la table de négociation. Depuis qu'il est majoritaire, le gouvernement s'emploie à écraser les travailleurs. Il considère le mouvement syndical comme la principale opposition à son emprise constante sur le pays. Le gouvernement intervient très fermement dès le début pour écraser ce qu'il estime être un problème, c'est-à-dire le droit légitime à la négociation collective, qui a une place légitime dans la société canadienne. Voilà ce qui se passe. C'est une autre mesure. La situation n'est peut-être pas aussi grave que l'arrêt de travail à Postes Canada dont nous avons dû nous occuper en juin, mais elle est de toute évidence du même ordre.
Parlons de ce que le gouvernement conservateur n'a pas fait pour l'industrie du transport aérien, pour aider les sociétés de ce secteur de sorte qu'elles aient les moyens de rémunérer convenablement leurs travailleurs. L'un des problèmes est qu'il considère cette industrie comme une vache à lait.
Si nous regardons ce que le gouvernement américain demande comme loyer pour ses installations aéroportuaires par rapport à ce que le gouvernement canadien exige pour ses aéroports, nous voyons une différence notable. D'une part, le gouvernement dit qu'il ne veut pas se mêler d'un conflit syndical et, d'autre part, il perçoit de l'argent de la compagnie aérienne même qu'il soutient, ce qui a réduit sa compétitivité dans le monde. Un grand nombre de Canadiens traversent la frontière pour prendre l'avion aux États-Unis. Nous perdons des clients dans le secteur du transport de voyageurs.
Toutes ces choses ensemble nuisent à la compétitivité des compagnies aériennes. Ce n'est pas le coût des salaires. Un grand nombre de facteurs entrent en ligne de compte dans les difficultés que connaissent actuellement les compagnies aériennes.
Est-ce le nombre de passagers sur les vols? Non. En fait, le nombre de sièges occupés est plus élevé qu'il ne l'a été depuis longtemps. En d'autres termes, l'achalandage est plus grand qu'il ne l'a été depuis longtemps pour les vols intérieurs. À cet égard, l'industrie du transport aérien se porte bien.
Là où les choses vont moins bien, c'est relativement aux suppléments et aux frais de sécurité. Ce que nous devons payer pour la sécurité au Canada, un pays où la sécurité n'est pas...