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Monsieur le Président, je suis ravi d'appuyer mon collègue, le député de , et la motion présentée par les libéraux dans le cadre de leur journée de l'opposition.
Il s'agit d'une motion plutôt technique, que je ne lirai pas ici. Elle met en lumière une faille très importante de la démocratie canadienne, mise en évidence par le comportement du gouvernement conservateur pendant l'étude du projet de loi , la Loi sur l'intégrité ou le manque d'intégrité des élections, selon le nom que préfèrent les députés. On a pu voir comment le régime imposait sa volonté sans tenir compte des autres points de vue. C'est l'une des raisons pour lesquelles la motion d'aujourd'hui est nécessaire.
J'ai écouté attentivement le député de York-Centre, un peu plus tôt. Il a fourni beaucoup de détails sur l'utilisation de la clôture, de l'attribution de temps et des débats depuis les débuts du Parlement canadien. Il ne fait aucun doute qu'un gouvernement doit parfois avoir recours à ces mécanismes pour traiter les affaires ministérielles et voir aux besoins du pays.
Nous devons toutefois être conscients de ce qui se passe depuis quelques années. Le gouvernement a présenté des projets de loi omnibus de 400 pages, dont certains portaient sur une quarantaine de mesures législatives sans lien avec le budget. Par le passé, la plupart de ces mesures auraient été traitées dans des projets de loi séparés. Elles auraient donc été renvoyées au comité approprié, et elles auraient bénéficié d'un débat à la Chambre et d'un examen approfondi.
Il faut mentionner que la motion d'aujourd'hui porte seulement sur la Loi électorale du Canada et la Loi sur le Parlement du Canada. Quels travaux du Parlement pourraient avoir plus d'importance que ce qui touche à ces lois, qui sont à la base même de notre démocratie?
Nous devons nous assurer qu'un gouvernement à peine majoritaire ne puisse imposer sa volonté à la Chambre des communes, du moins en ce qui concerne ces deux lois. Il s'agit de l'une des faiblesses de notre démocratie. Le gouvernement doit faire progresser les choses, mais il n'a pas obtenu la majorité des voix au pays.
Le gouvernement conservateur, en particulier, n'agit pas en tenant compte de tous les Canadiens, mais seulement en fonction d'une certaine base idéologique. Par conséquent, les lois ne sont pas débattues et analysées de manière adéquate, ouverte et transparente, à la lumière des témoignages nécessaires. Comme je l'ai dit, le gouvernement impose sa volonté au peuple sans qu'il en soit débattu adéquatement.
La raison d'être de la motion d'aujourd'hui est la suivante: les lois fondamentales de notre démocratie ne doivent être modifiées que par processus consensuel. Les conservateurs traitent le projet de loi comme tout autre projet de loi partisan qu'ils cherchent à faire adopter à toute vitesse par le Parlement comme bon leur semble. Or, il faut empêcher que cela se produise, aujourd'hui et dans l'avenir. Voilà le but de la motion. Celle-ci ferait en sorte qu'un débat adéquat soit tenu.
Le député de York-Centre a dit que si chacun de nous participait au débat sur tous les projets de loi présentés, nous n'étudierions que huit projets de loi par session. Il n'a jamais été question de tous les projets de loi. Nous parlons de la façon dont les ministériels mènent leurs affaires. Ceux-ci tentent de déformer les faits et d'induire les gens en erreur en proférant des exagérations qui semblent liées au sujet de la motion mais qui ne s'y appliquent pas vraiment.
De combien d'heures la Chambre des communes serait-elle privée si le comité chargé d'étudier le projet de loi parcourait le pays pour entendre ce que les Canadiens en pensent? N'est-ce pas ainsi que les choses devraient fonctionner en démocratie? Le comité ne devrait-il par se rendre d'une région à l'autre, accompagné de représentants de tous les partis, pour entendre de vive voix ce que les témoins ont à dire du projet de loi, directement là où ils vivent, au lieu de les faire venir à Ottawa ou de les faire comparaître par vidéoconférence? Au lieu de rester dans l'espèce de bulle qu'est Ottawa, le comité devrait se rendre jusqu'aux gens, notamment ceux qui habitent en campagne, afin qu'ils puissent assister à ses réunions.
La Loi électorale et la Loi sur le Parlement du Canada sont essentielles au bon fonctionnement de notre démocratie; les modifications qui leur sont proposées doivent donc reposer sur un vaste consensus et sur des données à toute épreuve. C'est ce que propose mon collègue par sa motion: qu'on organise un débat en bonne et due forme, qu'il ait lieu sur la bonne tribune et qu'on nous laisse le temps nécessaire pour discuter de ces deux lois. C'est dans cette optique que notre parti a proposé la motion d'aujourd'hui, qui va modifier le Règlement de la Chambre des communes de telle sorte que plus aucun gouvernement ne puisse invoquer l'attribution de temps pour couper court aux débats portant sur les modifications à la Loi électorale et à la Loi sur le Parlement du Canada.
En ma qualité de député libéral, j'aimerais rappeler que, si le gouvernement continue de se moquer des Canadiens en forçant l'adoption de son projet de loi à toute vapeur, le chef de notre parti a promis d'abroger les modifications antidémocratiques que les conservateurs veulent apporter à la Loi électorale du Canada. Vous pouvez en être sûrs.
En quoi ce projet de loi est-il si important? Ce matin paraissait sur iPolitics un article d'Anita Vandenbeld qui décrit de manière assez vitriolique ce qui va arriver si la Loi sur l'intégrité des élections est adoptée et qui affirme que cette dernière plonge le Canada dans l'embarras aux yeux du reste du monde.
Mme Vandenbeld a travaillé un certain nombre d'années à l'étranger dans le domaine du développement démocratique. Elle a notamment oeuvré au Programme des Nations Unies pour le développement, au National Democratic Institute, à l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe et au Centre parlementaire. Elle possède une vaste expérience et d'incroyables connaissances sur les démocraties du monde.
Je ne vous ferai pas la liste de tous ses arguments, car je dois aussi parler de certains des témoins qui ont comparu devant le comité. J'invite cependant les députés, et plus particulièrement les députés conservateurs d'arrière-ban, à lire cet article au lieu de s'en tenir bêtement aux arguments fabriqués d'avance que leur transmet le Cabinet du premier ministre. Mme Vandenbeld énumère les principaux défauts du projet de loi et explique que le Canada est pointé du doigt sur la scène internationale à cause de la manière dont le gouvernement actuel agit et cherche à miner sérieusement les fondements mêmes de notre démocratie.
Elle fait valoir un argument important qui révèle ce qu'elle pense réellement de ce projet de loi et de la façon dont le gouvernement gère son étude:
La dernière fois que j'ai travaillé dans un pays où un gouvernement profitait de sa majorité pour faire adopter à la hâte des modifications à une loi électorale sans consulter la population, c'était en République démocratique du Congo, en 2011. Je ne me serais jamais attendue à cette pratique au Canada.
Cela nous révèle ce que ceux qui ont observé les démocraties du monde entier pensent des gestes du gouvernement.
Je tiens à le dire, puisque j'entends des députés d'arrière-ban murmurer là-bas.
Les députés d'arrière-ban doivent comprendre que ce ne sont pas eux qui forment le gouvernement, mais les membres du Cabinet. Ils sont membres du parti au pouvoir. Ils ont le droit, s'ils le désirent, de prendre la parole au nom de leurs électeurs et des Canadiens. Ils n'ont pas besoin de suivre la ligne de parti imposée par le Cabinet du premier ministre.
Ils peuvent exprimer leur propre opinion, et puisqu'il est question de lois aussi fondamentales que la Loi électorale du Canada et la Loi sur le Parlement du Canada, je serais ravi qu'ils appuient cette motion ce soir, ou lorsqu'elle sera mise au voix. Nous les féliciterions de démontrer que la démocratie peut fonctionner sous ce régime, y compris à la Chambre. Ce serait absolument incroyable, et j'en serais ravi.
Un projet de loi qui touche nos institutions démocratiques est trop important pour qu'un gouvernement le fasse adopter à la hâte et de manière partisane. Un tel projet de loi devrait obtenir l'appui d'au moins un autre parti à la Chambre. Nous sommes tous ici pour représenter des électeurs. Nos avis ne peuvent diverger à ce point sur des questions comme la démocratie.
On aurait pu s'attendre à ce que le gouvernement soit capable de convaincre au moins un parti d'appuyer cette mesure législative. Hélas, puisqu'il n'y est pas parvenu, nous sommes témoins d'un abus de procédure dans le cadre du débat sur le projet de loi , qui est, à mon avis, une mesure législative horrible. Il semble que seul le Parti conservateur appuie ce projet de loi, mais il a tout de même l'intention de le faire adopter à toute vitesse par le Parlement.
Je considère donc qu'il s'agit d'une atteinte à notre démocratie. Le Canada a déjà été considéré comme un modèle par les démocraties émergentes: on a demandé à des représentants d'Élections Canada et du gouvernement ainsi que des porte-parole d'expliquer comment le Parlement canadien fonctionne et comment les élections se déroulent au pays.
Tout cela est appelé à disparaître, parce que la perception qu'on a du Canada a grandement changé, notamment au sein des Nations Unies. Nous ne sommes plus considérés comme des chefs de file mondiaux en matière de paix et de démocratie. Cette perte de réputation est attribuable à la façon dont le gouvernement fonctionne.
Le député d'en face dit que c'est à cause du projet de loi . Non, c'est à cause de l'attitude du gouvernement et de la façon dont le gouvernement fonctionne depuis huit ans. Le gouvernement a accédé au pouvoir en prônant la reddition de comptes et la transparence; or, il refuse de rendre des comptes sur quoi que ce soit.
Le ministre n'a manifestement pas l'intention d'assumer ses responsabilités et de s'excuser auprès du directeur général des élections, c'est on ne peut plus évident. Le ministre est à blâmer, et si le faisait preuve d'un tant soit peu de leadership, il l'obligerait à s'excuser pour la façon dont il traite les agents du Parlement.
Voilà comment tous les ministériels se conduisent depuis qu'ils sont au pouvoir, et c'est ce qui explique que les autres pays aient perdu tout respect pour le Canada.
On tente, au Canada, d'étouffer les débats sur les projets de loi; nous en sommes tous témoins. J'ai entendu des gens dire qu'il faudrait que des observateurs des Nations Unies viennent observer les prochaines élections au Canada, et je pense aussi que cela pourrait s'avérer nécessaire.
Les députés d'en face rigolent. Pourtant, compte tenu de ce projet de loi, nous aurions peut-être besoin de pareils observateurs, car il s'agit d'une attaque en règle du gouvernement contre la démocratie. En outre, comme nous pourrons le constater lorsque cette mesure législative sera mise aux voix, aucun de ces députés d'arrière-ban ne défendront les intérêts des Canadiens. Il n'y a que leur qu'ils sont prêts à défendre.
Jamais gouvernement n'avait déployé autant d'efforts pour empêcher les Canadiens de voter que le gouvernement actuel, au moyen du projet de loi , la soi-disant Loi sur l'intégrité des élections.
Ce projet de loi vise à exclure les gens du processus démocratique, ainsi qu'à manipuler et entraver le fondement de notre démocratie: notre système électoral. Le a bien fait son travail. Il a présenté, pour son chef, le genre de mesure législative qui ne ferait que rendre les Canadiens encore plus désabusés à l'égard du processus politique. Les conservateurs espèrent que cela servira à exclure encore plus d'électeurs du système électoral, en particulier les jeunes.
Nous n'avons qu'à écouter quelques-uns des témoins qui ont comparu devant le comité et écouter ce que certaines personnes disent dans les médias. Le gouvernement ne croit pas que tous les partis à la Chambre doivent participer à part égale dans les efforts visant à assurer le bon déroulement des élections fédérales au Canada. Il perçoit plutôt le système électoral comme un outil qu'il peut manipuler à son avantage. Les conservateurs croient que ce type de comportement est parfaitement acceptable.
Selon le gouvernement conservateur, il existe seulement deux types de Canadiens: les bons conservateurs et les mauvais Canadiens. D'après lui, ceux qui s'opposent au gouvernement sont moins Canadiens que les autres. Ils sont anticanadiens, des éléments subversifs, l'ennemi. Cette mesure législative révèle aux Canadiens le genre de gouvernement qui dirige le pays actuellement. Il y a quelque chose de suspect à propos d'un gouvernement qui tente de manipuler le processus démocratique afin de priver les Canadiens de leur droit de vote, tout en craignant d'autoriser des audiences publiques exhaustives à l'échelle du pays pour entendre le point de vue des Canadiens. Un gouvernement un tant soit peu intègre aurait collaboré avec tous les partis sur cette mesure législative ou aurait eu au moins l'intégrité de mener des consultations partout au pays pour entendre ce que les Canadiens ont à dire à ce sujet. Le gouvernement peut encore consulter la population, s'il le souhaite vraiment.
Comme je l'ai dit plus tôt, les députés d'arrière-ban ont la possibilité de faire entendre leur voix pour s'assurer qu'il y a un débat en bonne et due forme, un débat à long terme, et des audiences pancanadiennes où tout le monde pourra se prononcer sur la Loi sur le Parlement et la Loi électorale du Canada.
Il faut situer cette mesure législative — le projet de loi , sur lequel porte la motion d'aujourd'hui —, dans un contexte plus large. L'ancienne vérificatrice générale, Sheila Fraser, a déclaré que le gouvernement minerait la crédibilité de presque tous les organismes indépendants du gouvernement qui exercent une quelconque surveillance. Selon le Globe and Mail du 9 avril, Mme Fraser a déclaré que l'attaque contre M. Mayrand l'avait profondément « troublée », qu'elle était « totalement inappropriée » et que ce genre de commentaires « minent la crédibilité de ces institutions ». Elle a également averti que le projet de loi limiterait indûment le pouvoir du directeur général des élections, menacerait l'indépendance d'Élections Canada et empêcherait les gens, y compris sa propre fille, de voter en raison du resserrement des exigences liées à l'identification. Nous respectons tous Sheila Fraser. Elle a déjà été vérificatrice générale. Lorsqu'elle fait ce genre de commentaire important, nous devons écouter.
Permettez-moi de dresser la liste provisoire des critiques du projet de loi: M. Mayrand; le commissaire aux élections fédérales, Yves Côté; deux de leurs prédécesseurs; Mme Fraser; l'ancien chef du Parti réformiste, Preston Manning; les directeurs provinciaux des élections; Harry Neufeld, l'auteur d'un rapport faisant autorité sur Élections Canada; et des recteurs de facultés de droit. Le 11 mars, on a publié une liste de plus de 100 professeurs d'université qui s'opposent à l'adoption du projet de loi dans sa forme actuelle.
Je terminerai en disant que cette motion exige que nous débattions, en bonne et due forme, des projets de loi modifiant la Loi électorale du Canada et la Loi sur le Parlement du Canada. J'encourage tous les députés d'arrière-ban à prendre la parole, comme ils ont le droit de le faire, pour l'appuyer.
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Monsieur le Président, je suis honoré de prendre la parole aujourd'hui. Juste pour être certain qu'il comprenne bien, je signale à mon collègue d'en face que, à notre retour dans cette vénérable institution dans deux semaines, le simple député que je suis votera contre la motion dont nous sommes saisis.
Après avoir fait quelques recherches, j'ai réfléchi à la motion présentée. J'ai plus ou moins divisé mon exposé en deux ou trois sections, et j'espère pouvoir les aborder toutes.
Tout d'abord, pour que le public comprenne bien, permettez-moi d'expliquer ce qui se passe aujourd'hui.
Nous débattons aujourd'hui d'une motion de l'opposition. Les jours réservés à l'opposition ont été créés en 1968 sous le gouvernement libéral. Ils existent donc depuis longtemps. Auparavant, le budget des dépenses, c'est-à-dire les fonds réels alloués, était entièrement étudié à la Chambre. Celle-ci y consacrait énormément de temps et ne disposait pas de temps, sinon de très peu de temps, pour élaborer des mesures législatives. De concert avec les députés de l'opposition, le gouvernement libéral alors au pouvoir en est venu à la conclusion que le fonctionnement des travaux pourrait gagner en efficacité et en efficience si on consacrait 25 jours dans l'année à l'étude des crédits.
Durant ces journées, les partis d'opposition peuvent présenter n'importe quelle motion sur un sujet de leur choix. Ce n'est qu'une hypothèse, mais, à mon avis, l'idée était que les partis d'opposition puissent présenter des motions de défiance, critiquer les politiques ou les programmes du gouvernement ou même proposer une solution de rechange. C'est pour cette raison fondamentale que des jours ont été alloués à l'opposition, et c'est aujourd'hui un jour désigné.
Je trouve plutôt curieux que les libéraux utilisent de cette façon le temps précieux qui leur est accordé. Puisqu'ils forment le troisième parti, le nombre de jours désignés dont ils disposent est moindre. Et puisque les jours désignés sont alloués selon la taille du parti, l'opposition officielle a évidemment plus de jours que le Parti libéral. Pourtant, les libéraux se servent aujourd'hui de l'un des deux seuls jours désignés dont ils disposent au cours du printemps pour parler de procédure. Je trouve leur choix très curieux, mais je suis heureux de parler de procédure si c'est de cela qu'ils veulent parler.
J'aurais pensé qu'ils auraient voulu définir ce qu'est la classe moyenne. Mes recherches ont notamment porté sur cette question. Le chef du troisième parti parle beaucoup de la classe moyenne, alors il doit bien connaître ce sujet. Comme son père a été premier ministre du Canada, son enfance a été plutôt aisée, mais j'ai pensé que cette notion lui venait peut-être de son grand-père.
J'ai donc consulté l'Encyclopédie canadienne. Je sais que ma famille et celle de la majorité des Canadiens ne figurent pas dans l'Encyclopédie canadienne, mais la famille Trudeau, oui. J'y ai découvert que le père de l'ancien premier ministre, soit le grand-père du chef actuel du Parti libéral, était un riche homme d'affaires du Québec et que les Trudeau faisaient déjà partie de l'élite à cette époque.
Je trouve très étrange que les libéraux utilisent leur journée d'aujourd'hui pour parler de procédure. Peut-être est-ce parce qu'ils auraient de la difficulté à parler de ce qu'ils souhaitent accomplir, parce qu'il ne faut pas se le cacher, ils n'ont pas encore dit grand chose aux Canadiens concernant ce qu'ils veulent faire.
Cela me ramène à la motion à proprement parler, laquelle porte sur l'attribution de temps.
Les libéraux ont choisi de parler de deux aspects précis concernant l'attribution de temps. Je veux que tous comprennent bien que c'est de l'attribution de temps dont ils parlent. Permettez-moi de vous présenter les trois contextes dans lesquels elle peut survenir.
Il existe une différence entre la clôture et l'attribution de temps. L'attribution de temps consiste à désigner une période déterminée pendant laquelle la Chambre pourra débattre d'un sujet quelconque. Il est ainsi beaucoup plus facile et pratique de déterminer combien d'orateurs prendront la parole, quand cela se fera et quels jours seront consacrés au débat sur ce sujet. C'est purement une question d'organisation.
À ma connaissance, l'attribution de temps peut survenir dans trois contextes différents.
Premièrement, le public devrait savoir que les leaders à la Chambre de tous les partis se réunissent. Ils discutent de l'ordre du jour, c'est-à-dire de ce dont il sera question à la Chambre, du moment où les diverses questions seront soumises au débat et du temps qui leur sera accordé.
À ce que je sache, dans le passé, la méthode d'attribution de temps la plus courante a été un accord entre les leaders à la Chambre. Par exemple, un leader à la Chambre accepte que 20 députés de son parti puissent prononcer un discours, tandis qu'un autre leader accepte que ce soit 5 députés dans le cas de son parti. C'est ainsi qu'on s'entend pour décider combien de temps sera consacré à une question donnée. C'est ainsi que les choses se faisaient dans le passé et c'est ainsi qu'elles peuvent encore se faire à l'avenir.
Une fois que les partis se sont entendus, les leaders communiquent les paramètres aux whips et aux responsables du dossier. Dans notre cas, le responsable est le secrétaire parlementaire chargé du domaine en question. Ces personnes organisent les discours des députés sur la question. Les autres partis et leurs porte-parole procèdent de la même manière.
Deuxièmement, l'attribution de temps peut se faire au moyen d'une entente entre la majorité des partis officiellement représentés à la Chambre. Il y a trois partis reconnus à la Chambre, alors deux des trois partis peuvent convenir ensemble de la façon de procéder. Techniquement, ils sont autorisés à décider combien de temps sera consacré à chaque débat dans un domaine donné.
Troisièmement, l'attribution de temps peut se faire par le moyen que nous avons malheureusement dû utiliser et qui est tout de même parfaitement légal et équitable. Le gouvernement a le droit d'attribuer le temps qu'il veut à un débat. Ce n'est ni une motion de clôture, ni un refus de tenir un débat.
J'ai pris la parole cette semaine dans le cadre du débat sur notre projet de loi d'exécution du budget. J'étais le 69e député à prononcer un discours, et il y en a eu un autre après moi. En tout, 70 députés ont prononcé un discours à l'étape de la deuxième lecture, et cinq jours de séance ont été consacrés à ce débat.
Le projet de loi est ensuite renvoyé à un comité. S'il est amendé, le débat reprend à la Chambre à l'étape du rapport, une étape que je ne connaissais pas avant d'être élu député. Elle n'était pas vraiment mentionnée dans les livres de sciences politiques que j'ai lus à l'université. Mais il y a bel et bien un débat à l'étape du rapport. Encore une fois, une durée est attribuée à ce débat, soit par le leader à la Chambre, soit au moyen d'une négociation et d'une discussion lors des réunions des leaders. Quoi qu'il en soit, il y a attribution de temps pour débattre du projet de loi et des amendements proposés.
Comme les députés le savent, il pourrait y avoir beaucoup d'amendements. Le Président pourrait décider de regrouper les amendements et nous pourrions par la suite tenir un débat sur chaque série d'amendements. Je ne parle pas du nombre total d'amendements, mais bien de chaque série d'amendements. Le débat pourrait durer un bon moment. La Chambre devrait par la suite étudier le projet de loi à l'étape de la troisième lecture. Il y aurait encore une attribution de temps à l'étape de la troisième lecture à la Chambre.
Malheureusement, il se trouve que nous ne sommes pas en mesure d'obtenir l'accord des députés de l'autre côté en ce qui concerne l'attribution de temps, et donc, le leader du gouvernement à la Chambre doit dire à la Chambre le temps qui doit être alloué pour le débat. Il y a toujours une discussion de 30 minutes sur les motions d'attribution de temps du gouvernement.
En ce qui concerne le projet de loi d'exécution du budget, par exemple, nous avons alloué cinq jours. Certains diront que ce n'est pas beaucoup, cinq jours. Cela dit, j'ai fait quelques recherches à ce sujet, et j'aimerais que les gens comprennent le plan que nous suivons compte tenu du temps dont nous disposons dans cette enceinte.
Cette année, la Chambre siégera pendant 27 semaines pour s'occuper des affaires du Canada. Bien entendu, nous accomplissons beaucoup de travail dans nos circonscriptions, mais à la Chambre, nous nous occupons des mesures législatives. J'ai ensuite compté tous les jours de la semaine et j'ai réparti le tout.
Je ne sais pas si les gens comprennent bien la situation, mais une période de 20 minutes est allouée pour le discours, tandis qu'une période de 10 minutes est accordée pour les questions et réponses. Techniquement, les députés peuvent partager leur temps de parole. Aujourd'hui, des périodes de 20 minutes ont été allouées, mais question d'optimiser le temps dont nous disposons, il peut s'agir de discours de 10 minutes suivis d'une période de questions et réponses de cinq minutes.
Par exemple, le lundi, nous sommes à la Chambre de 11 h à 18 h 30. Nous devons retrancher une heure pour les initiatives parlementaires et une heure pour la période de questions. Beaucoup d'autres aspects occupent une bonne partie de notre temps, mais je me montre prudent en parlant de ces deux aspects, car ce sont ceux que la Chambre aborde automatiquement. Il y a également les affaires courantes, qui occupent environ 15 minutes de notre temps. En fait, le lundi, nous disposons d'environ cinq heures et quinze minutes, ce qui correspond à environ 21 interventions, si nous divisons le tout par intervention.
Le mardi, nous disposons de six heures et quinze minutes pour les débats. Il y a donc de la place pour 25 interventions. Le mercredi, il n'y a que deux heures et quinze minutes de temps réel, ce qui correspond à neuf interventions. Or, cette durée est réduite par le laps de temps qui s'écoule lors des changements d'interlocuteur. Le jeudi, nous avons le même nombre d'heures que le mardi, ce qui représente 25 interventions. Le vendredi, nous disposons de deux heures et quinze minutes, soit la même chose que le mercredi, avec neuf interventions.
Si tout se déroule sans anicroche, qu'il n'y a pas d'interruptions ni de recours au Règlement et que les périodes allouées sont bien respectées, on dénombre environ 89 ou 87 créneaux par semaine.
Il y a quelques minutes, j'ai entendu quelqu'un dire que les députés sont élus pour parler des enjeux. Imaginez si tous les députés — ils sont 308 — étaient tenus d'intervenir sur chacune des questions. Nous disposons d'environ 88 créneaux par semaine. Nous siégeons environ 27 semaines par année. Il faut aussi tenir compte des jours désignés. Nous devons nous occuper des autres affaires. Nous devons voter. Selon mes calculs, si tout se déroulait comme sur des roulettes, nous pourrions adopter deux projets de loi par année.
Le budget et les projets de loi d'exécution du budget sont exclus puisque, en un sens, ils sont automatiques. Le ministre des Finances présente un budget, et nous en débattons. Par la suite, deux projets de loi d'exécution du budget sont déposés, l'un à l'automne et l'autre au printemps. Un certain temps est également consacré à l'étude de ces projets de loi.
Selon mes calculs, si nous respectons la règle voulant que les 308 députés aient la possibilité de s'exprimer sur chaque sujet, la Chambre étudierait tout au plus deux mesures législatives.
Les comités ne sont pas pris en compte dans mes calculs. Le public doit le savoir. Comme je le disais cette semaine, j'étais le 69e intervenant à l'étape de la deuxième lecture. Après cette étape, le projet de loi est renvoyé au comité. Au comité, les députés entendent des témoins et participent au débat et à la discussion sur le projet de loi qui leur est soumis. Ce dernier revient ensuite à la Chambre pour l'étape du rapport et l'étape de la troisième lecture.
Selon moi, si l'attribution de temps n'existait pas, les députés n'accompliraient rien. Je ne crois pas que les Canadiens nous élisent pour les représenter à Ottawa pour n'accomplir absolument rien. Le public s'attend à ce que nous adoptions des lois.
La population s'attend à ce qu'il y ait des discussions, et c'est le cas. Il y a des interventions des deux côtés, d'un côté ou de l'autre, et il y a souvent des sujets de préoccupation ou des domaines d'intérêt. Les députés ministériels font habituellement un travail de promotion, tandis que les députés de l'opposition, eux, manifestent leur désaccord. Ce sont des discussions qui continueront à se produire.
Les gens remarqueront que certaines remarques sont répétées à maintes reprises. Je ne dis pas que ce sont seulement les députés de l'opposition qui agissent ainsi. Nous faisons la même chose. Nous répétons les mêmes propos, ou des commentaires d'une nature très similaire. Je sais que le Règlement précise que nous ne pouvons pas dire la même chose que quelqu'un d'autre. Je n'utilise pas vraiment de discours préparé, comme les députés peuvent s'en apercevoir. J'ai quelques notes sous la main, mais je n'ai pas vraiment de discours.
Ce que je veux dire, c'est que l'attribution de temps n'empêche pas les débats. Elle les facilite. Elle permet d'avoir des discussions franches sur les enjeux, et il est nécessaire de recourir à l'attribution de temps en raison du peu de temps dont dispose la Chambre pour étudier les mesures législatives.
On nous critique, notamment dans cette motion, parce que nous recourons à l'attribution de temps, comme si cette pratique n'existait pas avant et que nous l'avions inventée. À ma connaissance, elle a toujours existé à la Chambre parce qu'il ne serait pas logique de ne pas l'utiliser.
On rapporte que Stanley Knowles, qui a été député néo-démocrate il y a de nombreuses décennies, aurait dit que les attributions de temps sont importantes, qu'il importe de savoir combien de temps sera consacré à discuter d'un sujet particulier et avant qu'on en arrive à une décision quant à l'appui ou au rejet d'une proposition.
La motion libérale d'aujourd'hui vise deux types de projet de loi en particulier. Selon moi, les libéraux ont procédé ainsi parce qu'ils connaissent l'importance accordée à l'attribution de temps. Ils visent ces deux articles pour des raisons politiques, et non pratiques, comme l'amélioration du fonctionnement de la Chambre. Nous sommes saisis d'un projet de loi de réforme présenté par l'un de mes collègues. À mon avis, si nous souhaitons réellement entreprendre une réforme, il existe de meilleures façons de fonctionner à la Chambre, qui tiendraient compte du peu de temps dont nous disposons pour débattre des différents enjeux, étant donné celui qu'il faut prévoir pour les travaux des comités, entre autres. J'ai fait des propositions concernant le nombre de comités et leur horaire, et le temps consacré aux travaux de la Chambre. Bref, pour ce qui est du déroulement de nos activités, nous pourrions utiliser notre temps plus efficacement.
Mon inquiétude, c'est que l'opposition affirme n'avoir pas eu le temps de débattre du projet de loi, alors que, dans les faits, les discours que font ses députés sont répétitifs et illustrent clairement leur opposition à la mesure. C'est de bonne guerre. C'est leur travail en tant que députés de l'opposition. Toutefois, ils devraient être disposés à passer à autre chose après avoir présenté leurs arguments. Mais ce n'est pas ce qui se produit.
L'attribution de temps et la clôture sont deux choses distinctes. On présente une motion de clôture lorsqu'un projet de loi doit être adopté dans un certain délai, que ce délai soit imposé par la loi ou par une décision de la Cour suprême exigeant que la Chambre en fasse rapport avant une certaine date. Le compte rendu montre bien que la clôture est un outil rarement utilisé.
À part le débat sur la , on entend également parler dernièrement des projets de loi omnibus. L'opposition a des réserves quant à la taille des projets de loi, et elle se plaît à citer des chiffres faramineux. Cette semaine, elle affirmait que le projet de loi comptait 489 pages. Je conviens avec les députés qu'il compte effectivement 489 pages, mais il est en anglais et en français; le projet de loi fait donc environ 250 pages. La Loi sur l'intégrité des élections n'est même pas aussi longue, et est elle aussi rédigée dans les deux langues.
Disons qu'on doive lire quelques centaines de pages; je n'ai aucun doute que les Canadiens pensent les députés capables de lire quelques centaines de pages. Qui plus est, ce que je trouve formidable avec le processus législatif, c'est qu'en plus d'être rédigés en jargon juridique, les projets de loi dont nous sommes saisis sont accompagnés d'un sommaire qui figure en tête du document et qui résume la raison d'être et les points saillants de chaque section.
En ce qui me concerne, quand je reçois un projet de loi, j'en lis le sommaire et je consulte ensuite les articles qui m'intéressent ou qui me préoccupent. Je lis ensuite plus attentivement les articles que j'ai du mal à comprendre. Et après, j'ai l'occasion de parler au ministre. Tous les députés peuvent parler au ministre. Normalement, celui-ci organise une séance d'information à laquelle tout le monde, y compris le personnel, peut participer. Les employés des députés sont informés du contenu des projets de loi afin qu'ils les comprennent.
Compte tenu du temps dont nous disposons, je ne pense pas que nous devrions appuyer la motion; d'ailleurs, mon temps de parole achève. L'attribution de temps a une mauvaise réputation parce que les gens comprennent mal sa raison d'être et son fonctionnement. C'est un outil qui facilite le bon déroulement des travaux de la Chambre. Les Canadiens ordinaires pensent déjà que le processus législatif est beaucoup trop lent.