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ACVA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des anciens combattants


NUMÉRO 038 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 13 décembre 2016

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Conformément au paragraphe 108(2) et à la motion adoptée le 29 septembre, le Comité poursuit son étude sur la santé mentale et la prévention du suicide chez les vétérans.
    Aujourd'hui, nous accueillons M. David Pedlar, directeur de la recherche, Direction de la recherche, ministère des Anciens Combattants, qui se joint à nous par vidéoconférence de Charlottetown, à l'Île-du-Prince-Édouard. Nous recevons également Dr Don Richardson, psychiatre, Parkwood Operational Stress Injury Clinic et Département de psychiatrie de l'Université Western.
    Nous allons commencer par les exposés des témoins. Vous avez droit à 10 minutes.
    Je donne d'abord la parole à M. Pedlar. Bonjour, monsieur Pedlar.
    Je tiens d'abord à mentionner que je souffre d'une extinction de voix aujourd'hui. Je vous demande donc votre patience. Aussi, pour compenser, j'ai pris la mesure inhabituelle de demander à une collègue de m'accompagner; ainsi, si je perds complètement la voix, quelqu'un sera là pour répondre. Dre Linda Van Til, une épidémiologiste, est avec moi, et elle a la même expertise que moi. Notre objectif est de donner des réponses complètes à toutes vos questions.
    Cela dit, je vais commencer mon exposé.
    Je m'appelle David Pedlar et je suis directeur de la recherche à Anciens Combattants Canada. Cette année, j'ai également occupé la fonction de titulaire invité de la chaire de recherche Fulbright sur le travail social militaire à l'Université du sud de la Californie, à Los Angeles.
    Merci de m'avoir invité à venir vous parler d'un sujet très important. Mon but est de vous faire part de ce que nous savons sur la santé mentale des anciens combattants des Forces armées canadiennes et sur le suicide chez ces derniers, ainsi que de mon point de vue sur certaines conclusions à tirer des résultats de recherche. Mon exposé s'appuie sur une base de données probantes découlant des études de recherche, notamment des enquêtes menées auprès d'un large bassin de population, des études de recherche publiées, des rapports techniques issus de la recherche, des analyses documentaires et des examens de dossiers d'anciens combattants.
    Entrons dans le vif du sujet. Je vais d'abord parler de l'état de santé mentale des anciens combattants des Forces armées canadiennes. J'ai pensé que la façon la plus simple d'aborder le sujet était de présenter trois comparaisons.
    Comparaison numéro 1: comment l'état de santé mentale des anciens combattants des Forces armées canadiennes se compare-t-il à celui des autres Canadiens? Voici la réponse: bien que la majorité des anciens combattants au Canada jouissent d'une bonne santé mentale, selon les résultats de deux enquêtes d'envergure menées par Statistique Canada, la prévalence des problèmes de santé mentale courants, comme les troubles de l'humeur, les troubles anxieux et les troubles de stress post-traumatique, était généralement deux à trois fois plus élevée chez les militaires des Forces armées canadiennes libérés depuis 1998 qu'au sein de la population canadienne. Nous sommes remontés jusqu'à 1998 parce que les premiers dossiers datent de cette année-là.
    Comparaison numéro 2: comment l'état de santé mentale des anciens combattants de la Force de réserve se compare-t-il à celui de la population canadienne? La réponse est que la prévalence des problèmes de santé mentale courants chez les réservistes ayant servi à temps plein durant une période prolongée est plus élevée que chez les membres de la population canadienne qui ne sont pas des anciens combattants. Leur taux de problèmes de santé mentale était similaire à celui que je viens de mentionner relativement aux anciens combattants de la Force régulière — c'est-à-dire qu'il était considérablement plus élevé que celui de la population générale. Toutefois, notez que l'état de santé mentale des réservistes n'ayant pas servi à temps plein durant une période prolongée était très semblable à celui des Canadiens du même âge et du même sexe qui ne sont pas des anciens combattants.
    Comparaison numéro 3: comment l'état de santé mentale des anciens combattants des Forces armées canadiennes se compare-t-il à celui des anciens combattants à l'échelle internationale? La réponse n'est pas très claire parce qu'il est impossible d'établir une comparaison directe des taux entre pays. Or, de façon générale, les constatations émergentes montrent que la prévalence des problèmes de santé mentale est la même ou plus élevée chez les anciens combattants du Canada, des États-Unis, de l'Australie et du Royaume-Uni que chez les membres de la population qui ne sont pas des anciens combattants. Autrement dit, la situation au Canada ressemble à ce qui se passe ailleurs.
    J'ai deux observations finales concernant la santé mentale.
    Premièrement, veuillez noter qu'aucun facteur unique n'explique à lui seul le taux plus élevé de troubles de santé mentale chez les anciens combattants des Forces armées canadiennes. En fait, de nombreux facteurs entrent en jeu, notamment les expériences de vie antérieures, le service militaire, les facteurs génétiques, la santé physique, l'emploi, les finances et le soutien social.
    Deuxièmement, pour comprendre l'état de santé mentale des anciens combattants, il est très important de prendre conscience du lien qui existe entre la santé mentale et la santé physique chez les anciens combattants des Forces armées canadiennes. La prévalence des problèmes chroniques de santé mentale et physique est plus élevée chez les anciens combattants des Forces armées canadiennes. En fait, 90 % des anciens combattants aux prises avec des troubles de santé mentale souffrent également d'un problème de santé physique chronique. La prévalence des affections musculosquelettiques et de la douleur chronique est de deux à trois fois plus élevée que dans les populations civiles. Ceux qui souffrent à la fois d'un trouble de santé mentale, d'un problème de santé physique et de douleur chronique sont plus susceptibles de faire face à des défis majeurs sur le plan de la qualité de vie. Il est donc essentiel de ne pas cloisonner les troubles de santé mentale et les troubles de santé physique pour répondre aux besoins des anciens combattants. Il faut absolument les considérer conjointement pour bien les diagnostiquer, les traiter et les gérer.
(1535)
    Je vais maintenant changer de sujet et aborder la question du suicide. Je vais encore commencer par une question: le taux de suicide chez les anciens combattants des Forces armées canadiennes est-il plus élevé que chez les autres Canadiens? La réponse est qu'il apparaît que le taux de suicide est plus élevé chez les anciens combattants des Forces armées canadiennes de sexe masculin. Une étude à grande échelle réalisée en 2011 sur les taux de mortalité par suicide chez les membres des Forces armées canadiennes qui se sont enrôlés entre 1972 et 2006 a révélé que, sur cette période de 35 ans, le taux de suicide chez les anciens combattants était 1,5 fois — ce qui équivaut à environ 50 % — plus élevé que chez les autres Canadiens de sexe masculin.
    Comme prochaine étape, veuillez noter qu'Anciens Combattants Canada s'est engagé à diffuser publiquement des statistiques annuelles sur le suicide chez les anciens combattants des Forces armées canadiennes d'ici décembre 2017. C'est moi qui suis responsable de ce travail. Ces statistiques nous permettront de surveiller le taux de suicide chez les anciens combattants au Canada, et les résultats contribueront aux efforts de prévention du suicide. Il s'agit d'un travail complexe; c'est pourquoi cela exige beaucoup de temps.
    En outre, pour comprendre les statistiques sur le suicide, nous avons également entrepris des analyses de données et des examens de dossiers. Voici certaines constatations générales importantes. Dans la plupart des cas, le suicide résulte d'une interaction de plusieurs facteurs plutôt que d'un seul facteur. Les troubles psychiatriques, en particulier la dépression, contribuent au suicide chez les anciens combattants, mais de multiples facteurs de stress entrent en jeu: les problèmes de santé physique, comme je l'ai déjà dit; la difficulté à assumer les rôles de la vie; l'emploi; les problèmes financiers; les facteurs sociaux; les problèmes relationnels ou l'impression d'être un fardeau pour les autres; les problèmes de logement et la toxicomanie. Enfin, certains ont des prédispositions au suicide, notamment en raison de facteurs liés à la personnalité et de styles de résolution de problèmes.
     Fait important, nous avons aussi noté que les anciens combattants très âgés avaient des profils suicidaires distincts, notamment le stress causé par l'isolement social, les transitions en matière de logement, la présence de multiples problèmes de santé physique chroniques et la santé précaire.
    J'ai deux observations au sujet du suicide. Premièrement, je voudrais revenir sur le fait que, outre les troubles psychiatriques, un certain nombre de facteurs sur le plan du bien-être et sur le plan personnel contribuent aux décès par suicide. Par conséquent, tous les services qu'Anciens Combattants Canada et d'autres organismes offrent en matière de santé mentale, de santé physique, d'emploi, de réadaptation, de soutien social et d'avantages financiers ont un rôle important à jouer dans la prévention du suicide.
    Deuxièmement, je tiens à mentionner, pour conclure, que la période de transition du service militaire à la vie civile est, dans une certaine mesure, une période difficile pour tous les militaires, en plus d'être une période de vulnérabilité pour certains. Nous entreprenons actuellement une étude à grande échelle afin de mieux comprendre comment la transition du service militaire à la vie civile peut avoir une incidence sur la santé mentale des anciens combattants, ainsi que les mesures de soutien qui sont les plus efficaces et la meilleure façon d'atténuer le genre de problèmes qui peuvent contribuer à pousser les anciens combattants au suicide.
    Merci de m'avoir permis de présenter un exposé.
(1540)
    Merci.
    Docteur Richardson.
    Je vous remercie de m'avoir invité à participer à la discussion concernant la santé mentale et la prévention du suicide chez les anciens combattants, un sujet très important. Mon exposé sera bref, car je crois qu'il pourrait être plus intéressant de répondre à vos questions.
    Permettez-moi de me présenter. Je suis psychiatre consultant à la Parkwood Operational Stress Injury Clinic. Côté académique, je suis professeur agrégé à l'Université Western et professeur adjoint à l'Université McMaster. Depuis 20 ans, mes travaux cliniques et de recherche portent principalement sur les membres actifs et anciens des Forces canadiennes.
    Par rapport au sujet à l'étude aujourd'hui, comme nombre de témoins vous l'ont probablement déjà dit, une minorité considérable d'anciens combattants souffre de problèmes de santé mentale. Un de mes collègues, Dr Jim Thompson, a publié des données à ce sujet. Près de 25 % des anciens combattants canadiens sont atteints d'un trouble de santé mentale, le plus courant étant la dépression, suivi du trouble de stress post-traumatique, puis des troubles anxieux.
    En général, il est rare qu'une personne soit atteinte d'un seul trouble psychiatrique isolé. C'est ce qu'on appelle la comorbidité: si vous souffrez d'un trouble, quelles sont les probabilités que vous soyez aussi atteint d'un autre trouble? C'est particulièrement vrai pour le TSPT. Les problèmes qui l'accompagnent le plus souvent sont le trouble dépressif majeur, d'autres troubles anxieux et une vaste gamme de troubles de toxicomanie.
    Parmi les gens ayant demandé des soins à la clinique TSO Parkwood, près de 80 % des personnes atteintes d'un TSPT avaient aussi des symptômes de trouble dépressif majeur et environ 40 % souffraient d'alcoolisme.
    Les troubles de santé mentale, en particulier le trouble dépressif majeur, sont souvent accompagnés de comportements suicidaires, de pensées suicidaires et de tentatives de suicide. Au sein de la population générale — selon d'autres recherches menées par mon collègue, Dr Jim Thompson —, au cours de la dernière année, environ 6,6 % des anciens combattants auraient eu des idéations — des pensées — suicidaires. Chez les anciens combattants qui étaient des clients d'Anciens Combattants Canada, la prévalence d'idéations suicidaires durant la même période était beaucoup plus élevée: elle était de 12 %.
    Selon nos recherches, 17 % des gens nous ayant demandé des traitements ont admis avoir eu des pensées suicidaires plus qu'une journée sur deux durant les deux dernières semaines. Ce taux est beaucoup plus élevé chez les gens ayant demandé des traitements.
    Je tiens aussi à souligner que de nouvelles recherches établissent un lien entre les troubles du sommeil et les idéations suicidaires. Des données probantes récentes montrent que les troubles du sommeil sont un signe précurseur important des idéations suicidaires, même chez les personnes ne souffrant pas de problèmes de santé mentale. Or, lorsqu'on considère la comorbidité — nous nous sommes penchés là-dessus chez les gens nous ayant demandé des traitements —, une fois que la personne est atteinte d'autres troubles de santé mentale, surtout de dépression, les troubles du sommeil ne sont plus un signe précurseur important.
    De manière générale, comme vous pouvez sans doute l'imaginer et comme d'autres vous l'ont déjà dit, la question de la prévention du suicide est très complexe, et il n'existe probablement pas de solution simple. On vous a sûrement déjà dit qu'il fallait plus de recherches et de données non seulement sur les idéations et les pensées suicidaires, mais aussi sur les tentatives de suicide et les décès par suicide. Cela aiderait probablement à concevoir des programmes et à élaborer des stratégies de santé publique.
    En outre, nous savons que le traitement des troubles de santé mentale, surtout de la dépression, est une façon efficace de prévenir le suicide. Il est donc très important d'offrir des soins en temps opportun aux anciens combattants et de mener une campagne de sensibilisation afin que les anciens combattants sachent qu'ils ont accès à des traitements.
(1545)
    À l'Université Western, nous travaillons actuellement à l'élaboration d'une stratégie visant à ce qu'il n'y ait aucun suicide, fondée sur la conviction que les décès par suicide chez les personnes bénéficiant de traitements offerts par les systèmes de santé et de santé comportementale sont évitables. L'adaptation de cette stratégie faisait partie des recommandations formulées par le Groupe consultatif sur la santé mentale d'Anciens Combattants Canada.
    Mes observations finales porteront sur les résultats des traitements. De nombreuses recherches ont été publiées à ce sujet. Il faut faire la distinction entre le TSPT chez les civils et le TSPT chez les anciens combattants, ou le TSPT lié au service militaire. En général, on obtient de piètres résultats en tentant de traiter le TSPT lié au service militaire en employant la psychothérapie, c'est-à-dire la thérapie par la parole, et aussi le traitement médicamenteux, ou la pharmacothérapie.
    De façon générale, environ 40 à 60 % des personnes qui reçoivent des traitements fondés sur des données probantes se rétablissent. Les études que nous avons menées à notre clinique ont donné les mêmes résultats. Or, cela signifie qu'une proportion importante de personnes continuent à présenter des symptômes considérables de TSPT et de dépression après avoir reçu des traitements fondés sur des données probantes.
    Merci.
    Merci.
    Nous allons commencer par une série de questions de six minutes. Je donne la parole à M. Kitchen.
    Merci à vous deux de votre présence. Les renseignements que vous nous fournissez contribueront à notre étude.
    Docteur Richardson, je vais m'adresser à vous en premier parce que j'ai encore vos données en tête et je ne veux pas les oublier. Je vais m'adresser ensuite à M. Pedlar, si vous voulez bien patienter.
    Docteur, vous avez dit qu'environ 40 à 60 % des personnes vont se rétablir. Les études que vous avez faites à Parkwood ont donné les mêmes résultats. Pouvez-vous nous donner des explications concernant l'ensemble, c'est-à-dire 40 à 60 % de combien ou 40 à 60 % de quoi? Pouvez-vous nous fournir plus de détails, s'il vous plaît?
    Certaines données ont été publiées dans l'American Journal of Psychiatry. Dans les recherches qui portaient précisément sur les données relatives aux résultats de nos traitements sur un an et sur deux ans, il s'agit des personnes ayant reçu des soins psychiatriques — de la pharmacothérapie en plus de la psychothérapie. Dans la plupart des cas, ce sont des personnes atteintes d'un TSPT chronique, et la grande majorité — près de 80 % — souffre aussi de trouble dépressif majeur.
    Lorsque je déclare qu'elles se sont entièrement rétablies à la suite du traitement, je veux dire qu'elles ne présentaient plus de symptômes de TSPT ou de dépression au moment de l'évaluation.
    Cette réponse vous aide-t-elle?
    Cela me donne une meilleure idée.
    Lorsque vous parlez de pharmacothérapie, de quelles sortes de médicaments est-il question?
    Les inhibiteurs spécifiques du recaptage de la sérotonine sont à peu près le seul traitement médicamenteux indiqué dans le TSPT.
    En tant que cliniciens, normalement, nous tenterions d'attaquer les comorbidités, y compris la dépression majeure et les autres troubles anxieux. Nous aurions recours aux protocoles généraux établis pour traiter la dépression. Nous commencerions par un antidépresseur et nous surveillerions les résultats. Si l'antidépresseur n'avait pas d'effet, nous pourrions en augmenter la dose. S'il n'y avait toujours pas d'effet, nous pourrions ajouter un autre type d'antidépresseur. Si cela n'aidait toujours pas, nous pourrions ajouter un normothymique ou un antipsychotique atypique.
    Est-ce le genre de détails que vous cherchiez?
(1550)
    Oui. Merci beaucoup.
    Monsieur Pedlar, j'aimerais que vous nous en disiez plus sur les défis que les soldats doivent surmonter durant la période de transition de la vie militaire à la vie civile. Vous avez abordé le sujet à la fin de votre exposé. À quoi ces défis sont-ils liés?
    Je crois avoir dit que presque tous les vétérans éprouveront des difficultés, car pour bon nombre d’entre eux, presque tout change en même temps au cours de cette période de transition: le fait de quitter la culture militaire, le logement, l’endroit où ils vivent, les réseaux sociaux, leur source de revenus, et bien d’autres. Ils ont peut-être également un problème physique ou de santé mentale lorsqu’ils quittent les forces. Donc, par définition, il y a un élément de vulnérabilité dans cette période de changement.
    Certains vétérans éprouveront des problèmes particuliers au cours de cette période. Certains de ces problèmes sont associés à la façon dont ils vivent le changement s’ils n’ont pas réfléchi au sentiment qu’ils allaient éprouver au moment de ne plus revêtir l’uniforme. Plusieurs vétérans à qui j’ai parlé m’ont soulevé ce problème. Ils ont perdu leur sentiment d’utilité. Dans un sens, ils perdent leur estime de soi. Certains sont en colère. Ils avaient prévu finir leur carrière dans les forces, mais celle-ci a été écourtée inopinément. Ils sont donc parfois en colère ou ils se sentent trahis lorsqu’ils quittent les forces.
    Il y a tant de facteurs qui entrent en ligne de compte tous à la fois qu’il faut procéder correctement, notamment pour ceux qui risquent de se sentir coincés ou d’emprunter une voie qui pourrait aggraver leurs problèmes de santé mentale ou même les mener vers le suicide.
    J’espère que ma réponse vous est utile.
    Merci.
    J’aurais une très brève question à vous poser. Vous avez parlé de la recherche et des statistiques sur le suicide au Canada et ce sujet m’intéresse. Nous savons que beaucoup de vétérans lorsqu’ils quittent les forces, s’ils ne veulent pas être retrouvés, vous ne les retrouverez pas. C’est la question que j’aimerais aborder. Pourriez-vous nous expliquer comment vous allez procéder pour tenir compte de toute la population de vétérans dans le cadre de votre étude épidémiologique? Que ferez-vous pour trouver ces vétérans qui se cachent ou qui sont sans abri, par exemple?
    Nos statistiques concernent les suicides réussis et non les tentatives de suicide. Ces statistiques sont compilées grâce à un couplage de données avec Statistique Canada. Nous remontons aussi loin que possible dans les dossiers de vétérans des Forces armées canadiennes et traçons un lien entre ces dossiers et la base de données sur la mortalité de Statistique Canada, une base de données alimentée par les provinces et territoires. Nous utilisons la même norme pour mesurer le taux de mortalité que nous utilisons pour tous les Canadiens, y compris pour le suicide. D’ailleurs, il s’agit d’une méthodologie très rigoureuse et fiable qui nous évite de devoir retrouver les gens.
    Merci.
    Monsieur Fraser, vous avez la parole.
    Merci, messieurs, d’avoir accepté notre invitation et d’être venus nous partager ces informations importantes. Nous vous en sommes reconnaissants.
    Monsieur Pedlar, après avoir comparé les statistiques relatives, vous dites qu’il y a deux à trois fois plus de problèmes de santé mentale dans les Forces armées canadiennes et chez les vétérans que dans la population générale et que cela est comparable à ce que l’on retrouve à l’échelle internationale. Vous dites également que les taux de suicide dans les Forces armées canadiennes et chez les vétérans sont une fois et demie plus élevés que dans la population masculine. Toutefois, vous n’avez pas établi de comparaison avec les taux à l’échelle internationale. Auriez-vous aussi ces données?
(1555)
    Non, je n’ai pas ces données avec moi, mais nous pourrions vous les faire parvenir. Il est difficile d’établir des comparaisons directes, car les populations de vétérans diffèrent d’un pays à l’autre.
    Je comprends.
    Il est difficile de faire des comparaisons vraiment directes.
    Il est difficile de faire des comparaisons vraiment directes.
    Une des choses qu’on nous a dites, c’est que l’identification précoce des problèmes de santé mentale pourrait nous aider à définir le traitement nécessaire et disponible pour les membres et vétérans des Forces armées canadiennes. Je crois que nous comprenons cela. Que pouvons-nous faire pour encourager les gens à s’auto-identifier plus tôt ou à suivre un traitement pour leurs problèmes de santé mentale afin que nous puissions leur fournir le traitement qui convient et les aider à lutter contre ces problèmes avant qu’ils n’empirent?
    Je crois que la Dre Courchesne, qui est venue témoigner la semaine dernière, serait mieux placée que moi pour vous répondre, elle qui travaille dans les domaines de la prestation des services en santé mentale et de la prévention du suicide. Ce n’est pas mon domaine d’expertise, alors, si vous n’y voyez pas d’inconvénient, je vais m’abstenir de vous répondre.
    Dans ce cas, je vais adresser ma question au Dr Richardson.
    Outre les TSPT, quels troubles traite-t-on régulièrement dans les cliniques TSO? Si je ne m’abuse, vous avez parlé de quelques autres troubles, y compris l’alcoolisme. Quels autres troubles traitez-vous?
    À notre clinique, et je crois que c’est ainsi dans toutes les cliniques TSO du réseau, nous n’avons aucun critère d’exclusion. Si une personne est aux prises avec un trouble de santé mentale, nous pouvons l’évaluer et la traiter.
    Selon nos statistiques — je ne les ai pas avec moi, mais nous pourrons vous fournir nos statistiques démographiques —, les patients qui viennent nous voir pour être traités nous sont recommandés par leur gestionnaire de cas d’ACC ou leur médecin militaire de la Défense nationale. Le trouble principal est le TSPT, suivi du trouble dépressif majeur, du trouble d’anxiété généralisé, du trouble de panique et de l’alcoolisme.
    Au sujet des cliniques TSO elles-mêmes, selon votre expérience, est-ce difficile de trouver du personnel ayant l’expérience nécessaire pour intervenir dans ce genre de situation? Si oui, auriez-vous des recommandations à nous faire sur les solutions possibles à ce problème?
    Je ne suis probablement pas au courant de tous les problèmes de recrutement et de maintien en poste de cliniciens à l’échelle du réseau, mais nous n’avons pas beaucoup de problèmes à cet égard. Nous offrons beaucoup de formation à notre nouveau personnel et, en collaboration avec l’Association des psychiatres du Canada et la Société canadienne de psychologie, donc mes collègues psychologues, nous offrons de la formation à l’intention des cliniciens civils.
    Docteur Pedlar, on nous a souvent dit que la période de transition est difficile. Pourriez-vous nous dire, en particulier, ce qui affaiblit la santé mentale des vétérans ou membres des FAC en période de transition et ce que nous pouvons faire pour améliorer leur bien-être psychologique et apaiser certains de ces problèmes? Pourriez-vous nous fournir des détails à ce sujet?
    Je reviendrais à ce que vous avez dit plus tôt, soit l’engagement précoce. Il faut aussi encourager les membres à élaborer un plan réaliste avant de quitter les forces. Selon la plupart des études réalisées sur le sujet, ceux qui établissent un plan réaliste réussissent presque toujours mieux. Il est essentiel également de mener des entrevues de transitions et d’utiliser d’autres mécanismes qui nous permettent de rencontrer les vétérans et d’évaluer comment ils se portent. Dès qu’ils quittent les forces, il faut leur offrir la possibilité de communiquer avec quelqu’un et s’assurer que la transition pour les vétérans qui font l’objet d’un suivi se fasse sans heurts, mais il faut aussi encourager les gens à se manifester et faire en sorte qu’ils n’ont pas honte de demander de l’aide.
(1600)
    Selon vous, serait-il utile d’effectuer une vérification proactive de leur santé mentale tout au long du processus?
    Brièvement, s’il vous plaît. Merci.
    J'ignore la réponse à cette question. Je pense que quelques-uns des processus de groupe que suivent les anciens combattants aident également. Lorsqu'ils peuvent échanger ensemble et raconter leurs expériences, c'est également bénéfique, et certains programmes leur permettent de le faire.
    Merci beaucoup.
    Merci.
    Madame Mathyssen, vous êtes la prochaine intervenante.
    Merci à nos témoins. Nous vous sommes très reconnaissants de nous faire part de votre expertise et de prendre le temps d'être ici. J'espère pouvoir vous poser de nombreuses questions.
    Monsieur Pedlar, vous avez dit dans vos remarques que vous vous êtes penché sur le taux de suicide chez les anciens combattants des forces armées, et vous avez dit que le taux de suicide chez les anciens combattants de sexe masculin est plus élevé que dans la population en général. Avez-vous eu l'occasion d'examiner les taux de suicide chez les anciennes combattantes et, si vous ne l'avez pas fait, pourquoi?
    Nous l'avons fait, mais les taux sont peu élevés. Je pense que le problème était le nombre de cas, qui était peu élevé, ce qui a rendu les analyses beaucoup plus difficiles à mener.
    Oui, désolé, le taux chez les femmes était semblable à celui des hommes, n'est-ce pas?
    Non, il était semblable à celui de la population en général.
    Semblable à celui des Canadiens, je m'excuse. Le taux global chez les femmes était semblable à celui chez les Canadiens. Ma collègue vient de me corriger.
    D'accord, merci.
    C'est intéressant et cela nous amène à nous demander comment les femmes gèrent leur situation différemment que les hommes, mais c'est peut-être une étude ou une question différente qui ne se rapporte pas à l'étude en cours.
    Quoi qu'il en soit, je veux également parler des médicaments qui sont utilisés pour traiter les personnes qui souffrent de dépression, de problèmes, de troubles paniques ou du trouble de stress post-traumatique. En ce qui concerne ces cocktails de médicaments, j'ai entendu dire que certains anciens combattants prennent de 8 à 12 pilules par jour. Avez-vous étudié cette situation? Étant donné qu'ils prennent un nombre important de médicaments, cela n'aggrave-t-il pas leur incapacité d'interagir socialement et d'avoir des interactions plus saines avec les membres de leur famille et leurs amis? Si cette question a été examinée, je me demande quels sont les coûts associés à tous ces médicaments et comment ils se comparent à la marijuana à des fins médicales. Cette analyse a-t-elle été effectuée?
    La réponse est que, dans mon unité à tout le moins, nous n'avons pas mené d'études à grande échelle sur l'utilisation de médicaments, que ce soit des médicaments utilisés en psychiatrie ou la marijuana à des fins médicales. Je n'ai rien à signaler sur cette question.
    Est-ce une analyse qu'AAC, Santé Canada ou une autre entité devraient envisager de faire?
    Oui, une étude sur l'utilisation pourrait être utile.
    J'ai en fait effectué une étude sur l'utilisation de médicaments par les anciens combattants il y a de cela de nombreuses années, et l'un des problèmes auxquels nous nous heurtions, c'est que nous ne sommes pas le seul fournisseur. Nous sommes souvent le fournisseur complémentaire, si bien que nous n'avons pas le dossier médical complet dont disposent souvent les régions sanitaires ou les provinces. Nous sommes donc limités dans ce que nous pouvons faire en tant que copayeur ou deuxième payeur des médicaments. Cela ne veut pas dire que nous ne pouvons pas le faire, mais cela rend beaucoup plus difficile la réalisation d'une étude sur l'utilisation de médicaments chez les anciens combattants, par exemple, dans un contexte provincial.
(1605)
    D'accord, merci.
    Merci, madame Van Til, de votre intervention.
    Docteur Richardson, j'aimerais commencer par dire à quel point nous sommes fiers à London du travail qui est effectué aux instituts Parkwood et Western pour nos anciens combattants. Merci de ce que vous faites.
    Je m'interroge sur le rôle des professionnels de la santé mentale dans le cadre de la transition. Devraient-ils jouer un rôle plus central? Devraient-ils être plus présents durant la transition afin d'aider les anciens combattants?
    Simplement pour m'assurer que je comprends la question, parlez-vous d'une personne qui fait la transition des Forces canadiennes vers la vie civile?
    Oui, la transition vers la vie civile, car nous avons entendu dire, et on l'a mentionné ici aujourd'hui, que c'est une perte de l'estime de soi, une perte d'identité et une perte d'appartenance à une communauté. Je me demande si les professionnels de la santé mentale pourraient jouer un rôle plus important pour assurer une transition moins stressante, moins pénible et moins difficile.
    C'est une question fascinante et intéressante. Tout d'abord, je ne pense pas que j'ai les données pour fournir une réponse à cette question, mais je peux vous faire part de mon opinion, en guise d'éclaircissements. Les membres qui quittent les Forces canadiennes n'ont pas tous forcément besoin d'un professionnel de la santé mentale. Si une personne souffre d'un problème de santé, elle aura probablement plus de mal à faire la transition. Je pense que si vous prenez votre retraite de la vie militaire — et je parle ici à partir de mon expérience clinique — et que vous le faites par choix, alors je pense que c'est une situation différente à un cas où une personne est obligée de prendre sa retraite à cause d'un problème de santé.
    Dans ces cas-là, je pense que le plus grand défi auquel se heurtent de nombreux anciens combattants et membres actifs est la façon d'accéder à des services et de les coordonner. Comme vous pouvez l'imaginer, lorsque vous êtes un membre actif, des soins de santé vous sont offerts. En tant que civils, en n'étant pas militaires, nous sommes habitués de nous organiser nous-mêmes pour accéder à des services. Pour un militaire, c'est un défi. Nous avons discuté, à d'autres comités, de la nécessité d'avoir un navigateur, quelqu'un qui peut les aider à coordonner les services et à apprendre comment accéder aux soins. Pour un civil, c'est un défi. Imaginez ce que c'est pour quelqu'un qui ne l'a jamais fait dans le passé et qui souffre d'un problème de santé mentale; c'est particulièrement difficile.
    Désolé d'avoir dépassé mon temps de parole.
    Ce n'est pas un problème.
    Merci.
    C'est bien. Je vais toujours dépasser mon temps de parole.
    Monsieur Eyolfson.
    Monsieur Pedlar, je connais quelques-uns des enjeux liés au suicide. J'ai pratiqué la médecine pendant 20 ans. L'un des éléments que nous avons découverts... C'est peut-être difficile de répondre à cela, car vous avez dit en réponse à la question de Mme Mathyssen au sujet du suicide chez les femmes que les taux étaient beaucoup moins élevés et plus difficiles à analyser.
    L'une des tendances qui étaient devenues apparentes au fil des ans dans les statistiques sur le suicide que nous avions examinées, c'est que dans les cas de tentatives de suicide, les hommes ont plus de chances de réussir que les femmes. Habituellement, c'est parce que les hommes choisissent des moyens plus instantanément mortels tandis que les femmes choisissent des moyens moins mortels et peuvent se rétablir.
    Vous avez dit que vous avez surveillé les taux de suicide. Si vous avez surveillé les tentatives de suicide, avez-vous constaté une différence entre les hommes et les femmes?
    Nous avons examiné des dossiers en 2014 où nous nous sommes penchés sur 80 cas de tendances suicidaires, et nous avons couvert une assez longue période de temps, de 1960 à 2013, je pense. Nous avons des données sur les circonstances entourant le suicide, mais je ne me rappelle pas qu'on ait analysé la situation des femmes de façon détaillée. Les conclusions ont été utiles pour comprendre les facteurs précis associés au suicide dans les cas des anciens combattants.
(1610)
    Très bien, merci.
    Vous avez dit que la prévalence des troubles de santé mentale est plus élevée chez les réservistes que dans la population en général. Le taux plus élevé est semblable à celui chez les anciens combattants de la Force régulière. Les réservistes qui sont déployés reçoivent-ils les mêmes services de santé mentale auxquels ont droit les membres de la Force régulière lorsqu'ils deviennent des anciens combattants?
    Tout d'abord, je veux seulement revenir sur ce que j'ai dit, à savoir que la population de la réserve dans son ensemble peut être divisée en deux groupes. Il y a des réservistes qui sont à temps plein pendant de longues périodes. Ce peut être environ trois ans ou plus. Lorsqu'ils travaillent à temps plein pendant trois ans ou plus, les troubles de santé mentale et les autres conditions dont ils souffrent ressemblent beaucoup à ceux dont souffrent les anciens combattants de la Force régulière, tandis que la situation des autres réservistes ressemblera beaucoup à celle d'autres Canadiens de leur âge et de leur sexe.
    Je suis désolé, mais quel est le reste de la question? Je ne m'en rappelle plus.
    La question était si, en tant qu'anciens combattants, ils reçoivent les mêmes services de santé mentale que les membres de la Force régulière.
    Vous devez poser cette question aux Forces canadiennes. Je ne suis pas absolument certain.
    Je parle lorsqu'ils sont des anciens combattants cependant. Les anciens combattants de la réserve reçoivent-ils les mêmes services de santé mentale que les anciens combattants de la Force régulière?
    Oui, lorsqu'ils deviennent des anciens combattants, qu'ils sont libérés des forces armées. C'est la question? Lorsqu'ils sont libérés des forces, ils ont le même accès à ces services.
    Très bien, merci.
    Docteur Richardson, en ce qui concerne les cliniques de traitement des traumatismes liés au stress opérationnel, à votre avis, ont-elles les ressources, le financement, les effectifs, etc., dont elles ont besoin pour venir en aide aux anciens combattants, ou pensez-vous que l'on pourrait faire plus avec les ressources dont ces cliniques disposent en général?
    Avons-nous suffisamment d'argent pour faire ce que nous devons faire? C'est une bonne question. Vous devriez la poser à mon gestionnaire.
    L'une des difficultés... Ce qu'il faut probablement, ce sont de meilleures statistiques sur le lieu de résidence des anciens combattants. Je crois savoir que l'Institut canadien de recherche sur la santé des militaires et des vétérans se penche actuellement sur la question. Il y a un moyen d'identifier les anciens combattants en Ontario, et c'est la carte-santé. Elle peut fournir de meilleures statistiques pour savoir où les anciens combattants vivent, si les cliniques et cliniques satellites sont bien situées et si elles ont un personnel suffisant pour offrir des services faciles d'accès aux anciens combattants. C'est probablement ce que je ferais.
    Partout au Canada? C'est une bonne question.
    Merci.
    Monsieur Pedlar, il vaudrait peut-être mieux que je pose ma prochaine question directement à un représentant du ministère de la Défense, mais vous pourriez avoir observé de tels cas dans vos interactions avec les anciens combattants. Vous avez parlé des taux de maladie mentale chez les anciens combattants. Seriez-vous en mesure de dire à quelle étape de sa carrière un membre des Forces armées canadiennes risque le plus de souffrir de problèmes de santé mentale?
    Je pourrais plutôt vous parler un peu du profil des anciens combattants qui sont plus susceptibles de souffrir de problèmes de santé mentale. Cela vous serait-il utile?
    En fait, je me demande si les anciens combattants vous ont dit avoir commencé à éprouver des problèmes lorsqu'ils servaient dans les forces armées. Au moment de recevoir des soins, vous ont-ils indiqué quand ils avaient remarqué leurs symptômes pour la première fois? À quel moment dans leur carrière — ou ces problèmes se manifestent-ils lorsque...? Vous ont-ils dit à quand remontent leurs symptômes, ou est-ce que le tout commence généralement lorsqu'ils deviennent des anciens combattants?
    Cela dépend. Certains pourraient présenter des symptômes bien avant leur carrière dans les Forces armées canadiennes; autrement dit, ils pourraient avoir des troubles de santé mentale préexistants. D'autres développeront des troubles pendant leur service ou encore après leur départ. Cela peut donc se produire à n'importe quelle étape. Grâce aux analyses que nous avons effectuées, nous pouvons déterminer, grosso modo, quels anciens combattants sont les plus susceptibles de souffrir de troubles de santé mentale. Dans bien des cas, ce sont ceux qui souffrent d'affections physiques chroniques, notamment de douleurs, ceux qui viennent d'un milieu socioéconomique peu favorisé, etc. Ils sont également plus à risque s'ils quittent les forces armées en mi-carrière, disons après un service de 10 à 19 ans. Pour ceux qui ont un faible niveau de scolarité, ils présentent certaines des mêmes caractéristiques que d'autres Canadiens qui ont des taux plus élevés de troubles de santé mentale, mais ce serait dans un contexte militaire.
(1615)
    Merci.
    Monsieur Bratina.
    Ma question s'adresse à M. Pedlar, et peut-être au Dr Richardson.
    La réussite de tout programme de traitement dépend souvent de l'attitude du patient. Nous avons entendu beaucoup de témoignages d'anciens combattants qui pensent que nous devrions tout simplement démanteler notre groupe. Ils estiment que nous ne savons pas ce que nous faisons, etc. Je me demande si vous observez une certaine résistance de la part des gens que vous traitez sur le plan de leur ouverture à l'égard des soins.
    En tant que clinicien, le Dr Richardson a l'occasion de voir ces gens au jour le jour. Pour ma part, je suis surtout un chercheur. Je serais donc moins bien placé que lui pour vous parler des résultats cliniques. Je pourrais peut-être faire une réflexion là-dessus, mais...
    D'accord. J'allais adapter ma question aux deux contextes.
    Docteur Richardson, pourriez-vous dire un mot sur la façon dont les gens réagissent au traitement qu'ils reçoivent?
    Je devrais faire mes propres recherches, mais si je me fie aux données dont nous disposons, l'attitude du patient ou du client par rapport au traitement a une incidence sur son rétablissement. D'après certaines recherches qui ont été publiées, le choix des patients permet de prédire le résultat du traitement. En tant que cliniciens du secteur civil, nous devons considérer l'attitude du patient comme quelque chose de fluide. La vaste majorité des gens qui viennent me voir ne me font pas nécessairement confiance dans mon rôle de clinicien. La confiance s'installe avec le temps. C'est quelque chose que nous tenons pour acquis au début. L'objectif de la plupart des cliniciens serait donc de faire en sorte que le patient prenne un deuxième rendez-vous et revienne les voir. À partir de là, vous aurez de quoi travailler.
    Je crois que l'attitude est un facteur important. De plus, dans le cadre de notre travail clinique — et c'est ce que nous essayons d'enseigner aux autres cliniciens —, il est important de faire preuve de respect envers les militaires et le service qu'ils ont rendu; on ne devrait pas prétendre connaître la culture militaire et, si on a des questions, il faut les poser. Voilà ce que nous essayons d'enseigner... d'ailleurs, pour qu'une clinique soit couronnée de succès partout au Canada, elle doit offrir un environnement accueillant pour les anciens combattants; nous devons faire savoir aux gens que nous soignons uniquement les anciens combattants et les militaires. La compétence revêt une grande importance pour les anciens combattants. Bref, avoir de l'expérience et traiter les gens avec respect: voilà ce que je recommanderais. Est-ce que cela répond à la question?
    Oui.
    Nos délibérations mettent en évidence les problèmes. Nous avons entendu des témoignages directs de la part d'anciens combattants qui, comme je l'ai dit, n'aimaient tout simplement pas le système ou qui ne se sentaient pas respectés, comme vous l'avez laissé entendre. J'espère que nous pourrons formuler des recommandations qui permettront de rehausser l'image d'Anciens Combattants Canada et d'intégrer davantage les fournisseurs de soins, comme vous, dans le cadre de son travail afin de mieux faire comprendre que nous sommes tous là, avec une nouvelle approche, une nouvelle énergie, etc.
    Nous avons visité la clinique pour blessures liées au stress opérationnel à London, et nous avons été très impressionnés. Dans le cadre de votre travail, à quoi ressemblent les séances de compte rendu? Combien de temps passez-vous à vous consulter entre vous sur les problèmes qui ont surgi au cours de la journée ou de la semaine?
    Pour ce qui est des séances officielles de compte rendu, je n'en suis pas certain. Histoire de mieux nous comprendre, si nous examinons les aspects cliniques, nous tenons une réunion d'équipe interdisciplinaire au cours de laquelle nous discutons des patients et du plan d'évaluation et de traitement.
(1620)
    Bien entendu, vous devez réexaminer constamment vos processus afin de maintenir votre excellente réputation; c'est ce qui explique votre bon bilan. Comment vous y prenez-vous pour les examens et les discussions à l'interne?
    Je ne sais pas si votre question porte sur les pratiques de ressourcement des cliniciens et du personnel. Est-ce bien de cela que vous parlez?
    C'est là une autre question.
    Commençons donc par celle-là, et nous pourrons ensuite nous occuper de l'autre.
    D'accord. À mon avis, tout professionnel du secteur des services cliniques dont le travail consiste à traiter des personnes souffrant de traumatismes — et cela vaut aussi bien pour le contexte militaire que le contexte civil — doit bien se connaître et être conscient de ses limites. On doit être entouré d'une bonne équipe clinique et d'un réseau de pairs fiables. On doit également savoir prendre soin de soi — c'est ce que j'appelle des soins personnels génériques — et trouver d'autres intérêts à l'extérieur du travail. Il s'agit d'un travail difficile et éprouvant, mais combien gratifiant.
    Il y a aussi le revers de la médaille. Supposons qu'un clinicien fasse une percée dans le dossier d'un patient. En ferait-il part à ses collègues pour leur expliquer ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas?
    Au sein de notre équipe à Parkwood, et je suppose qu'il en va de même dans les diverses cliniques, nous discutons régulièrement des résultats positifs, c'est-à-dire des exemples de réussite, ainsi que des cas épineux afin d'en tirer des leçons.
    Y a-t-il des questions imminentes...
    Je suis désolé. Nous y reviendrons au prochain tour.
     Madame Wagantall.
    Merci beaucoup, à vous deux, de votre présence.
    Docteur Richardson, vous avez parlé de nouvelles recherches. En ce qui concerne toute la question du suicide, les études révèlent que les troubles du sommeil ont un effet sur les pensées suicidaires. Vous avez ensuite évoqué les résultats obtenus auprès des militaires qui suivent des traitements et, si je ne me trompe pas, vous avez dit que la thérapie par la parole et le traitement médicamenteux pour le trouble de stress post-traumatique affichent un taux de réussite de 40 à 60 %. Ai-je bien compris?
    Oui.
    Si 40 % des patients se rétablissent, alors cela signifie que 60 % échouent, et vice versa. Bref, le taux de réussite varie de 40 à 60 %. Par curiosité, je me demande si, au moment de poser le diagnostic de trouble de stress post-traumatique... Ces temps-ci, vous avez sans doute entendu parler de la toxicité de la méfloquine et des lésions du tronc cérébral. Trouvez-vous que le diagnostic est complet? Autrement dit, tenez-vous compte d'autres possibilités au-delà du trouble de stress post-traumatique? On nous dit que les deux affections sont très différentes. L'une est une maladie physique et l'autre, une maladie mentale, mais on les traite sans faire cette distinction. En ce qui a trait à la toxicité de la méfloquine, comme vous le savez, à l'heure actuelle, pratiquement tous nos alliés considèrent ce médicament comme une solution de dernier recours, au point de l'avoir mis sur la liste noire. L'Allemagne en a carrément interdit l'utilisation, que ce soit pour les militaires, les anciens combattants ou les civils. On rapporte des cas d'amnésie et des comportements suicidaires. Voilà autant d'effets secondaires possibles de ce médicament.
    Devant ce constat, envisageons-nous la possibilité de pousser plus loin les recherches? Donc, si certaines personnes ne parviennent pas à se rétablir à la suite de leurs traitements, n'est-ce pas parce que nous avons peut-être rendu le mauvais diagnostic?
    J'aurais dû prendre des notes. Vous avez posé plusieurs questions.
    Je suis désolée. Choisissez-en une.
    Je vais commencer par les statistiques. Quand je parle d'un taux de réussite de 40 à 60 % en ce qui concerne les résultats de traitements, je m'appuie sur différentes études qui ont été publiées sur le sujet. Cette estimation ne repose pas nécessairement sur des cas précis, mais plutôt sur de nombreuses études. Je crois d'ailleurs que, selon une des études publiées dans l'American Journal of Psychiatry, environ 50 % des personnes qui reçoivent des traitements fondés sur des données probantes se rétablissent complètement.
    En tant que cliniciens, nous avons tendance à diviser les choses en « tiers ». Dans le cas de presque tous les troubles de santé mentale, un tiers des patients se rétabliront entièrement, un tiers iront beaucoup mieux et un tiers continueront de présenter des symptômes chroniques.
(1625)
    Parlons maintenant du diagnostic de trouble de stress post-traumatique. À la lumière de ce que nous apprenons et entendons dire actuellement un peu partout dans le monde, entrevoyez-vous la possibilité, voire la nécessité, même en matière de recherche, d'envisager un autre diagnostic éventuel? Dans les cas de trouble de stress post-traumatique, examine-t-on le tronc cérébral et ce genre de choses? Je ne sais pas.
    En notre qualité de cliniciens et de psychiatres — cela vaut aussi pour les psychologues, mais dans une moindre mesure —, au moment du diagnostic, nous examinons la personne dans sa globalité et nous faisons une évaluation complète de ses antécédents médicaux. Il s'agit, entre autres, d'examiner les substances ou les situations auxquelles elle aurait été exposée. Je ne suis pas un expert en méfloquine, mais j'ai lu sur le sujet. Évidemment, certains de mes patients en ont pris ou, devrais-je dire, s'en sont fait prescrire durant leur service.
    En règle générale, toutefois, dans le domaine médical, nous essayons de déterminer le trouble le plus probable dont souffre la personne, au lieu d'évaluer une multitude de probabilités. Par exemple, un militaire pourrait avoir pris de la méfloquine, mais il pourrait aussi avoir été déployé dans une région où il a été exposé à d'importantes situations traumatisantes, qu'il revit aujourd'hui. Personnellement, à titre de clinicien, j'aborderais son cas en lui disant: « Vous semblez présenter des symptômes qui sont associés, selon toute vraisemblance, au trouble de stress post-traumatique. Cependant, d'autres facteurs pourraient aussi entrer en jeu. Essayons de nous en tenir aux traitements qui ont fait leurs preuves et voyons comment vous vous sentirez. » Si la personne se rétablit complètement grâce aux traitements habituels, alors cela signifie fort probablement que nous avons rendu le bon diagnostic. Par contre, si la personne ne réagit pas à un traitement au bout de six mois, je commencerai alors à m'inquiéter et à me demander s'il s'agit du bon traitement.
    Compte tenu de ce que nous savons aujourd'hui, pensez-vous que nous devrions désormais mettre davantage l'accent sur ces symptômes et les considérer comme un trouble potentiel?
    J'essaierais, pour ma part, de prendre en considération tous les problèmes potentiels, parce que nous n'avons pas trop parlé ici de la question du traumatisme cérébral léger. En tant que clinicien, je ferais faire également un examen de la fonction thyroïdienne pour m'assurer que cet organe n'est pas en cause, parce qu'il s'agit d'un autre facteur qui contribue à la dépression.
    Est-ce que cela répond à la question?
    Oui, en quelque sorte.
    D'accord.
     Je suis désolé.
    Non, ce n'est rien. Tout cela est bien compliqué, j'en suis consciente.
    Monsieur Pedlar, lorsque vous nous présentez les résultats de vos recherches, vous précisez bien qu'une multitude de facteurs entrent en jeu dans les troubles auxquels font face les anciens combattants.
    Quand je lis la liste des divers problèmes pouvant les toucher, je vois que vous mentionnez les problèmes de santé physique, la difficulté à assumer les rôles de la vie, l'emploi, les dépendances et tout le reste. Tenez-vous compte des types de médicaments qu'ils prennent et de la façon dont cela pourrait également influer sur leur état de bien-être?
    Toutes mes excuses, monsieur Pedlar.
    Vous allez devoir répondre en 30 secondes ou presque, si possible, je vous prie.
    La réponse est oui. Je veux dire par là que les médicaments peuvent également influer sur le bien-être et contribuer à la santé physique et mentale. La réponse serait donc oui.
    Merci.
    Nous allons maintenant répartir le temps qui reste.
    Je crois que c'est d'abord au tour de M. Rioux.

[Français]

     Merci, monsieur le président
    Je remercie les témoins de leur présence parmi nous aujourd'hui.
    Nous avons consulté des statistiques sur la transition des anciens combattants à la vie civile qui, comme on le sait, est difficile. Vous nous avez dit que les anciens combattants ont trois fois plus de problèmes de santé mentale et que leur taux de suicide est de 1,5 fois plus élevé. Avez-vous des chiffres sur la période où ils étaient dans les Forces armées? Pendant cette période, ces taux étaient-ils aussi importants? Je suis porté à penser que non et que la transition à la vie civile est ce qui a une influence à cet égard. De plus, ces taux diminuent-ils par la suite, soit quatre ou cinq ans après que les gens ont retourné à la vie civile?
(1630)

[Traduction]

     Ce n'est pas l'échéancier exact, mais nous observons que la fréquence de problèmes de santé mentale est plus élevée chez les anciens combattants que chez les militaires actifs. C'est ce que nous savons.
    Nous pensons aussi que le taux de suicide est probablement plus élevé, même si les représentants des Forces canadiennes ont indiqué durant leurs témoignages, si je ne me trompe pas, que le taux de suicide est à la hausse, surtout chez les membres de l'armée. C'est une des dernières tendances.

[Français]

    J'ai été surpris par une chose lors de votre présentation. Vous nous avez dit qu'il y avait un lien entre les problèmes de santé physique et de santé mentale. On est quand même surpris à cet égard, parce que nos soldats sont bien entraînés et sont censés être en bonne forme physique.
    Comment se fait-il que ce problème existe? On dit qu'il y a un esprit sain dans un corps sain. Nos soldats devraient-ils donc être davantage entraînés sur le plan physique?

[Traduction]

    Les Forces armées canadiennes offrent un excellent entraînement, et cela ne fait aucun doute, mais il est également certain qu'il s'agit, dans une certaine mesure, d'un travail qui entraîne une usure progressive. Le corps n'est pas conçu pour porter des charges de 125 livres pendant des années sans subir de conséquences. Nous en voyons les répercussions dans le cadre de notre programme de prestations d'invalidité. Il s'agit surtout de problèmes musculosquelettiques, ce qui comprend les chevilles, les genoux, le dos et le cou. En fait, du point de vue des prestations de pension, les problèmes de santé physique constituent, de loin, les facteurs les plus importants.
    Voilà pourquoi j'ai tant insisté sur ce point dans mon exposé. Je considère la santé physique et la douleur chronique comme des vecteurs extrêmement importants de l'apparition de troubles de santé mentale chez les anciens combattants, en plus des expériences traumatisantes auxquelles ils auraient pu faire face. Il est très important d'examiner la santé physique des anciens combattants si nous tenons à comprendre comment traiter les problèmes de santé mentale.
     Merci.
    Madame Lockhart.
    J'aimerais poser quelques petites questions. Un témoin américain nous a déjà parlé de la thérapie cognitivo-comportementale. Je me demande si cette méthode fait partie des traitements utilisés au Canada. A-t-on mené des recherches à ce sujet? On nous a dit que cette thérapie donne des résultats positifs.
    Je crois que la réponse simple serait oui. La thérapie cognitivo-comportementale est un des traitements offerts partout au Canada, surtout dans les cliniques du réseau.
    Très bien. Merci beaucoup.
    Toujours dans le cadre des témoignages, nous avons entendu parler des retards durant la période de transition des soins médicaux militaires aux soins administrés par le ministère des Anciens Combattants. S'agit-il d'une source d'irritation dans le traitement des troubles de santé mentale? Le cas échéant, quelles sont les conséquences des retards dans les soins? Par exemple, si une personne n'est pas en mesure d'avoir accès à un médecin de famille pour être orientée vers un spécialiste, quelles en seront les conséquences?
    C'est une bonne question. Des retards dans les soins ont-ils des conséquences sur le résultat global du traitement? Autrement dit, la chronicité — ou le temps qui s'est écoulé depuis que vous avez votre maladie — a-t-elle une conséquence sur le résultat du traitement? Notre recherche sur le résultat du traitement ne nous a pas permis de conclure que la chronicité était une variable qui influait sur le résultat du traitement. Mes collègues du Royaume-Uni, qui ont également examiné la question, n'ont pas non plus conclu que la chronicité était une variable qui influait grandement sur le résultat du traitement.
    Voilà pour ce qui est du résultat du traitement. Cela dit, nous entendons souvent nos patients et nos clients nous dire que c'est un défi. Lorsqu'ils me consultent, ils ont un médecin de famille, et tout est en place, mais se rendre jusque-là peut être un défi, en particulier s'ils s'installent dans une région où il n'y a aucun médecin de famille disponible. Cela devient un obstacle en vue d'obtenir des soins spécialisés.
(1635)
    Serait-il donc juste de dire qu'il y a des gens que vous auriez souhaité voir plus tôt?
    Oui. C'est certain, mais ce n'est pas seulement moi. Si ces patients avaient besoin de soins et étaient en attente, cela va de soi.
    Merci.
    Merci.
    Monsieur Brassard, allez-y.
    Premièrement, monsieur Pedlar, vous semblez avoir passé du temps auprès du ministre Dion. Il a la même voix aujourd'hui à la Chambre des communes.
    L'un des défis au Comité est d'être le dernier intervenant, parce qu'il arrive souvent que les sujets aient déjà été abordés ou que nous ayons une longue liste de témoins qui ont traité de nombreux éléments au sujet desquels nous avons des questions.
    Le Comité est chargé d'examiner la santé mentale et la prévention du suicide chez les vétérans. Je vais donc vous céder mon temps de parole. Vous avez chacun 2 minutes et 15 secondes pour nous formuler des recommandations éclairées.
    Que nous recommanderiez-vous de faire en vue de prévenir les problèmes de santé mentale et le suicide chez les vétérans?
    Vous avez maintenant chacun deux minutes.
    Docteur Richardson, allez-y.
    Il y a un élément que j'ai déjà mentionné, et c'est d'adopter, comme nous essayons de le faire à l'Université Western, une stratégie pour éliminer le suicide. Il y a un excellent site Web où vous pouvez trouver de plus amples renseignements. Je pourrais vous envoyer le lien pour que vous puissiez le consulter. Je crois vraiment que tout le monde est d'accord pour dire que le suicide est évitable, et les stratégies qui permettent à chaque personne de communiquer avec une autre personne jouent un rôle important.
    L'autre aspect que je considère comme important est l'accès aux soins. Y a-t-il suffisamment de cliniques? Ces cliniques sont-elles situées aux bons endroits? Voilà des questions auxquelles nous n'avons pas encore répondu. Quel est le temps d'attente pour avoir accès aux services? Les vétérans sont-ils conscients que des traitements sont offerts?
    Il faut ensuite élaborer une campagne de sensibilisation, à l'instar de ce qui se fait ailleurs: « Si vous êtes un vétéran et que vous revivez vos expériences ou que vous avez de la difficulté à dormir, nous pouvons vous aider. Appelez-nous à ce numéro sans frais. » Il faut également expliquer comment avoir accès aux services.
    Au cours de la période de transition, est-ce mieux coordonné? Y a-t-il un pilote? J'appelle cela un pilote, mais c'est une personne qui peut contribuer à coordonner les services.
    Nous pourrions dire que c'est une sorte de service de conciergerie, docteur. Merci de vos commentaires.
    Monsieur Pedlar, vous avez deux minutes. Quelles sont vos recommandations auxquelles vous aimeriez que nous donnions suite?
    Je vais tout simplement souligner certains éléments que j'ai mentionnés dans mon exposé.
    En ce qui concerne le suicide, je crois que c'est important... Je ne considère pas le suicide comme seulement un problème de santé mentale. Je crois que c'est un problème de bien-être. Par « bien-être », je veux dire que, si nous examinons les histoires qui se trouvent dans les dossiers des vétérans qui se sont suicidés, nous constatons qu'ils ont toujours un certain nombre de problèmes dans leur vie. Il faut vraiment adopter une approche complète qui cerne tous ces facteurs et qui en tient compte pour la suite des choses.
    La santé mentale est très importante en vue de lutter contre le suicide, mais nous devons également examiner les problèmes sociaux, les problèmes financiers, les problèmes de fonctionnement concernant les rôles sociaux et les problèmes que j'ai mentionnés au sujet de la douleur et de la santé physique.
    Au sujet de la santé mentale, je me dois de revenir au point que j'ai fait valoir plus tôt. Les traumatismes et l'ESPT sont souvent perçus comme ce qui mène aux problèmes de santé mentale, en particulier dans le cas des vétérans, et les discussions portent le plus souvent sur ces aspects. Cependant, lorsque vous faites le travail que j'ai fait, vous vous rendez normalement compte qu'il y a réellement un effet multiplicateur si une personne a un problème de santé mentale, un problème de santé physique et de la douleur chronique. Les vétérans sont plus susceptibles que les autres Canadiens d'avoir tous ces problèmes en même temps.
    Nous avons besoin d'une telle complexité, si nous voulons le faire le plus efficacement possible.
(1640)
    Merci, messieurs.
    Madame Mathyssen, allez-y.
    Docteur Richardson, j'aimerais revenir sur la clinique pour blessures liées au stress opérationnel à London, parce qu'elle est très importante pour le rétablissement.
    Nous avons entendu certains vétérans dire qu'ils doivent sentir qu'ils sont à un endroit où ils ont le contrôle, et ils sont très souvent perplexes. J'aimerais vous entendre à ce sujet en ce qui concerne la clinique pour blessures liées au stress opérationnel à London. Comment arrivez-vous à créer une atmosphère où le vétéran sait qu'il est en contrôle de la situation et qu'il n'est pas vulnérable ou à la merci d'autrui?
    Je n'y ai jamais pensé de cette manière, mais ce sont une question et un commentaire très intéressants.
    Je crois que, dans le cas de beaucoup de vétérans, le besoin de contrôler leur environnement découle souvent de leurs symptômes. Parmi les symptômes de l'ESPT, il y a l'hypervigilance, le besoin de constamment vérifier s'il y a des menaces et la sensation de ne pas se sentir en sécurité. La présence d'un environnement que nous pourrions qualifier d'adapté aux vétérans est probablement liée à leurs propres attitudes ou aux expériences qu'ils ont eues dans d'autres établissements de santé mentale. La création d'un environnement où la salle d'attente est plus vaste ou la présence de symboles ou d'images qui ont un rapport avec les vétérans ou l'armée...
    Je crois qu'il ne faut pas négliger le pouvoir ou l'influence du soutien par les pairs. Si des vétérans ont une expérience positive, ils le diront à d'autres vétérans. Dans le même ordre d'idées, s'ils ont une expérience négative, ils le diront aussi aux autres vétérans sur les médias sociaux, par exemple. Je crois que l'établissement doit se forger une réputation dans un tel contexte.
    Par ailleurs, à l'instar de la majorité des organismes, nous réalisons des sondages auprès des vétérans et leur posons des questions. Lorsque je dirige des patients vers un établissement pour y recevoir des traitements, je leur demande comment ils ont été traités lorsque je les revois; cela me permet d'avoir leurs impressions. Je leur explique que je leur pose cette question, parce que c'est utile de savoir comment ils ont été traités si je dirige un autre vétéran vers cet établissement.
    C'est intéressant. C'est très évident, mais c'est peut-être un élément qui échappe parfois à ceux qui prennent soin non seulement des vétérans, mais aussi de la population en général.
    Nous avons grandement entendu parler de l'importance du soutien de la famille pour la santé mentale du vétéran qui espère se rétablir. Que pouvons-nous mieux faire? Y a-t-il quelque chose que nous pouvons mieux faire pour soutenir les familles qui prennent soin de vétérans qui ont des blessures liées au stress opérationnel? Au sujet des membres de la famille ou des aidants, certains nous ont dit qu'ils n'avaient pas la formation ou qu'ils ne savaient pas quoi faire. Ils ne pouvaient pas soutenir leur proche, parce qu'ils n'ont tout simplement pas d'expérience en la matière.
    L'ombudsman du ministère de la Défense nationale nous a dit que la sécurité financière est la clé. Si nous pouvons régler ces problèmes financiers, comme je crois que vous y avez fait allusion, monsieur Pedlar, cela nous aidera énormément à obtenir de meilleurs résultats sur le plan de la santé.
    Pouvez-vous faire la lumière en partie ou en totalité sur cette question?
    Je commenterai quelques aspects, et je comprends que je devrai le faire très rapidement.
    En ce qui a trait au soutien familial, je crois qu'il est évident que, si une personne a un problème de santé mentale ou un problème médical important, cela touche non seulement le malade, mais aussi tous les gens autour de lui. Ce que nous appelons la famille dans le cas des vétérans plus âgés — pas nécessairement très âgés — peut inclure les conjoints. Pour de nombreux jeunes vétérans, il peut s'agir des parents ou des conjoints. C'est important lorsque nous réalisons l'évaluation, et nous recommandons de rencontrer la personne et ceux qu'elle considère comme faisant partie de sa cellule familiale en vue d'offrir du soutien.
    L'autre élément sur lequel nous essayons de mettre l'accent est que nous offrirons des soins aux conjoints et évaluerons les enfants et les orienterons, au besoin, vers les ressources appropriées. Nous donnerons également des renseignements aux membres de la famille et aux enfants d'âge adulte pour éviter qu'ils deviennent des aidants naturels. Nous essayons notamment au cours des traitements de faire comprendre aux gens qu'ils doivent être des conjoints et non des aidants ou des infirmiers. Nous nous occupons des traitements et de la collaboration entre les diverses parties. Cela signifie notamment que la conjointe doit être une conjointe. C'est sa principale tâche.
(1645)
    Merci.
    Voilà qui met fin à la réunion d'aujourd'hui.
    Je vous accorde chacun deux ou trois minutes pour faire une conclusion, si vous le souhaitez. Monsieur Pedlar, allez-y en premier.
    Je tiens seulement à vous remercier de m'avoir donné l'occasion de prendre la parole aujourd'hui. Si nous avons d'autres documents de recherche, nous serons tout à fait ravis de les communiquer au Comité pour l'aider dans ses délibérations et la rédaction de son rapport.
    Parfait. Merci.
    Docteur Richardson, allez-y.
    Je ne sais pas de combien de temps je dispose, mais j'aimerais seulement dire, si vous me le permettez, qu'il y a eu de nombreux commentaires sur le nombre de médicaments que les patients doivent parfois prendre. Je crois qu'il est important de ne pas nécessairement mettre l'accent sur le nombre de médicaments, mais vraiment sur les risques et les avantages. Si un patient a besoin de beaucoup de médicaments pour se rétablir complètement, les avantages l'emportent peut-être sur les risques. Je considère comme important de le préciser. Il ne faut pas regarder les chiffres et dire que c'est maintenant trop ou pas assez.
    Je vous remercie encore une fois de m'avoir invité à témoigner devant le Comité. Si vous avez besoin d'autres renseignements, la clinique ou moi-même serons en mesure de vous communiquer ces renseignements ou d'autres détails.
    Merci.
    C'est parfait.
    Je rappelle encore une fois aux témoins que, s'ils souhaitent ajouter quelque chose par rapport aux questions ou à leurs réponses, ils peuvent faire parvenir leurs commentaires au greffier qui se chargera de les remettre aux membres du Comité.
    Au nom du Comité, je tiens à vous remercier tous les trois de votre présence aujourd'hui et de l'aide que vous apportez aux hommes et aux femmes qui ont servi notre pays.
    Nous suspendrons quelques minutes nos travaux, puis nous poursuivrons à huis clos.
    Merci.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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