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HUMA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées


NUMÉRO 048 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le vendredi 10 mars 2017

[Enregistrement électronique]

(0805)

[Traduction]

    Je souhaite la bienvenue à John Brassard qui remplace, aujourd'hui, M. Zimmer à notre comité.
    Je voudrais accueillir officiellement Mme Sansoucy au Comité. Elle remplace sa collègue qui, comme vous le savez, aspire à de plus hautes fonctions.
    Bienvenue aussi à toutes les personnes présentes. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion que le Comité a adoptée le lundi 13 juin 2016, le Comité reprend son étude des stratégies de réduction de la pauvreté.
    Nous allons tenir aujourd'hui notre dernière journée de témoignages pour cette étude qui dure depuis près d'un an. Nous avons sillonné le pays et rencontré un certain nombre d'organismes et de personnes de haut calibre. Je suis très heureux de pouvoir dire que nous déposerons bientôt un rapport sur ce sujet très important.
    Je voudrais souhaiter la bienvenue parmi nous aujourd'hui à plusieurs témoins qui vont prendre la parole. Pamela McConnell, mairesse suppléante, représente la Ville de Toronto. Michael Bach est vice-président à la direction de l'Association canadienne pour l'intégration communautaire. Magda Barrera et Mary Todorow parleront au nom du Centre ontarien de défense des droits des locataires. Pedro Barata représente l'United Way Toronto and York Region. Donald K. Johnson, membre du conseil d'administration, Banque de Montréal, Marchés des capitaux, témoignera à titre personnel.
    Nous avons un groupe assez nombreux. Chacun d'entre vous va d'abord faire une déclaration préliminaire. Comme vous êtes nombreux et que notre horaire est serré, je vais vous demander de limiter votre exposé à sept minutes. Si vous voyez la lumière rouge s'allumer, ce sera ma façon très polie de vous dire que votre temps est écoulé.
    Pour commencer, Pamela McConnell, de la Ville de Toronto, les sept prochaines minutes sont à vous.
    Merci, monsieur le président, et je remercie le Comité de m'inviter à prendre la parole sur un sujet aussi important que les stratégies de réduction de la pauvreté.
    Je sais que vous avez déjà entendu des membres de notre personnel vous parler des aspects techniques de notre stratégie de réduction de la pauvreté qui s'intitule « TO Prosperity ». Je vais donc centrer mon propos sur mon point de vue en tant que mairesse suppléante chargée de cette mission, et je parlerai aussi de l'innovation et de la collaboration qu'il est possible d'avoir entre les différents niveaux de gouvernement, car c'est un élément très important.
    Je vous rappellerai simplement que le 4 novembre 2015, il y a près de deux ans, le conseil municipal a adopté, à l'unanimité, la stratégie TO Prosperity. Il s'agit d'un plan de prospérité s'étalant sur 20 ans qui vise à promouvoir l'équité, les opportunités et, bien entendu, la prospérité pour tous les résidants de Toronto, ainsi qu'à bâtir un filet de sécurité pour préserver les gens de la pauvreté ou les en sortir s'ils en sont victimes.
    Notre stratégie s'articule autour de cinq thèmes différents qui entrent tous dans notre champ de compétence; nous centrons uniquement nos efforts sur nos champs de responsabilité. Il s'agit de la stabilité du logement, de l'équité en matière de transports en commun, de l'accès aux services, de l'accès à l'alimentation et d'emplois de qualité assortis de salaires acceptables — un peu comme les doigts de la main — des principes d'équité et des changements systémiques.
    Nous avons trois principaux objectifs qui guident notre travail.
    Le premier est de répondre aux besoins immédiats avec ce que certains appellent « les solutions à portée de la main ». Pour bien des gens, ce sont des choses qui peuvent vraiment apporter immédiatement un grand changement dans leur vie. Par conséquent, je tiens à m'assurer que les services essentiels sont bien financés, bien coordonnés et répondent aux besoins immédiats de nos concitoyens qui vivent dans la pauvreté. J'ai travaillé avec la FCM, et je peux vous dire qu'il y a un énorme écart entre la situation à Toronto et ailleurs en ce sens qu'un de nos enfants sur quatre vit dans la pauvreté contre 8 % dans l'ensemble du pays.
    Deuxièmement, nous devons créer des nouveaux chemins vers la prospérité. Nous voulons faire en sorte que les programmes et tous les services municipaux soient intégrés, centrés sur le client et axés sur une intervention précoce.
    Le troisième thème est le changement systémique. Nous voulons exploiter la puissance économique de notre ville pour stimuler la croissance de l'emploi grâce à des choses comme les marchés publics à caractère social qui représentent un élément très important de notre politique; pour soutenir les entreprises locales qui cherchent à apporter leur aide; et pour stimuler une croissance économique inclusive et s'attaquer aux iniquités sociales profondément enracinées.
    Bien entendu, il y a des domaines dans lesquels notre ville dispose d'un grand nombre d'outils, de ressources et de possibilités et nous pouvons nous en servir pour prendre les choses en main et agir de façon efficace. Dans d'autres domaines, la ville compte sur une collaboration avec les autres niveaux de gouvernement et c'est vraiment ce que je suis venue plaider aujourd'hui. Nous travaillons aussi avec le secteur privé. Les emplois de Bay Street ont une grande importance, de même que le ministère du Travail qui a aidé certains de nos services d'emploi pour les jeunes et organismes communautaires avec lesquels nous travaillons.
    Nous trouvons très encourageant que le gouvernement fédéral se soit engagé à établir une nouvelle stratégie de réduction de la pauvreté, et de plus en plus de municipalités — comme je l'ai dit, je siège au conseil de la FCM — et de provinces établissent également des stratégies. Je tiens à vous dire qu'il faut les coordonner. Cela me semble être une obligation étant donné l'énorme potentiel économique que représentent la collaboration et la coordination.
    Pour que ce soit parfaitement clair, sans les ressources et l'appui du gouvernement fédéral, les efforts des villes — la nôtre et les autres — et les efforts des autres parties prenantes de Toronto ne pourront pas avoir l'effet escompté. Il y a trois domaines dans lesquels une collaboration s'impose entre les gouvernements; la coordination est absolument nécessaire et présente un énorme potentiel pour nous. Ces domaines sont le logement, la garde d'enfants et le transport en commun. Vous en avez certainement entendu parler un peu partout au Canada. Ce sont les principaux éléments sur lesquels sont axées la plupart des stratégies actuelles de réduction de la pauvreté dans notre pays et je suggère au Comité de les examiner très attentivement.
(0810)
    À mon avis, la stratégie fédérale de réduction de la pauvreté en matière de logement devrait être parfaitement coordonnée avec la stratégie nationale de logement qui sera publiée, je l'espère, plus tard en 2017 et qui devrait inclure des investissements importants dans la construction de logements abordables pour les locataires et les propriétaires-occupants, ainsi que l'entretien et la réparation des logements sociaux — je tiens à le souligner.
    Comme l'a mentionné le maire Tory, la pénurie de logements locatifs et pour propriétaires-occupants abordables à Toronto, conjuguée au délabrement d'une bonne partie de nos logements sociaux, nuit à la qualité de vie de nos concitoyens, leur refuse des droits fondamentaux et a des conséquences négatives pour l'économie de Toronto et sa capacité d'attirer des nouvelles entreprises et des nouveaux investissements commerciaux.
    Comme nous l'avons dit, en ce qui concerne la stratégie nationale, le gouvernement fédéral pourrait prendre plusieurs mesures qui auraient un effet immédiat. Par exemple, la Ville de Toronto estime, comme la FCM, qu'il devrait maintenir son niveau de financement existant et réinvestir les économies réalisées sur les ententes concernant le logement social qui arrivent à expiration. C'est une chose que nous demandons depuis un certain temps.
    Dans notre ville, comme dans d'autres, nous essayons d'aider les gens à ne pas tomber dans la pauvreté. Par conséquent, il est important que nous investissions dans la remise en état des logements de la TCHC, notre société d'habitation. Le besoin est urgent et massif, si bien que nous avons besoin d'un soutien important de votre part, de la part du gouvernement fédéral, pour réparer cette infrastructure essentielle. C'est une dépense de 864 millions de dollars, nous savons que c'est beaucoup, mais nous avons fourni notre part et nous demandons maintenant au gouvernement fédéral et aux gouvernements provinciaux de faire la leur. Bien entendu, comme chacun sait, notre population continue de croître et nous devons donc construire davantage de logements abordables.
    Nous avons quelques investissements à long terme à vous suggérer. La fédération partage nos vues à l'égard de l'un d'eux.
    Nous demandons 12,6 milliards de dollars pour la phase 2 de l'infrastructure sociale au cours des 8 prochaines années. Nous avons déployé de très gros efforts pour appuyer cette demande et nous plaçons nos espoirs dans le budget du 22 mars. Néanmoins, nous avons aussi ce que nous appelons le programme « porte ouverte » du maire. Il comporte divers incitatifs tels que des exonérations fiscales qui nous aident à développer notre programme. Nous pensons que vous pourriez le faire.
    Le deuxième et le troisième projets seront, je pense, plus évidents à vos yeux. Cela comprend les services de garde d'enfants. Le cadre national d'éducation préscolaire et de garde d'enfants doit bientôt voir le jour et nous espérons que vous allez y travailler. Peut-être aimeriez-vous savoir qu'à Toronto, si vous avez un enfant que vous faites garder sans subvention, cela vous coûte 2 350 $ par mois. C'est extrêmement coûteux.
(0815)
    Oui, si vous pouvez trouver une place.
    C'est exact.
    La dernière question est celle du transport en commun. Bien entendu, il ne s'agit pas seulement de construire une infrastructure, mais aussi de la rendre accessible. Je sais que Calgary vient de réduire le prix de l'abonnement mensuel à 5 $. Nous avons mis en place une carte d'abonnement. Elle ne coûte pas 5 $, mais nous espérons pouvoir la mettre à ce prix.
    Pour conclure, je vous invite à poursuivre votre réflexion sur ces enjeux d'un bout à l'autre du pays, à penser à nous, à Toronto où nous avons la plus forte population de pauvres, à penser à notre stratégie sur 20 ans et à la nécessité d'unir nos efforts pour la réaliser.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup.
    C'est maintenant au tour de Michael Bach, vice-président à la direction de l'Association canadienne pour intégration communautaire.
    Les sept prochaines minutes sont à votre disposition, monsieur.
    Merci, monsieur le président et membres du Comité, de m'avoir invité à venir ici aujourd'hui.
    L'Association canadienne pour l'intégration communautaire est une fédération nationale de plus de 200 associations locales, provinciales et territoriales, en plus de notre organisation nationale. Nous avons pour mission de promouvoir l'inclusion des personnes ayant des déficiences intellectuelles, et nous travaillons en collaboration étroite avec l'ensemble de la communauté des personnes handicapées.
    Nous avons trouvé très encourageant que le Comité étudie les stratégies de réduction de la pauvreté. C'est une question qui nous intéresse au premier chef étant donné que plus de 70 % des adultes ayant des déficiences intellectuelles qui ne vivent pas avec leur famille vivent dans la pauvreté. Au début de votre étude, nous vous invitons à tenir compte de ce que signifie la « pauvreté ». J'ai apprécié les observations de la mairesse suppléante quant à la nécessité d'une approche multisectorielle.
    Qu'entendons-nous par pauvreté? Dans une étude que nous avons réalisée avec la communauté des personnes handicapées intitulée « Pauvreté invalidante et citoyenneté habilitante » pour combattre la pauvreté et l'exclusion sociale, nous nous sommes guidés sur la définition de la loi du Québec. Je voudrais vous lire cette définition. La pauvreté est définie comme:
la condition dans laquelle se trouve un être humain qui est privé des ressources, des moyens, des choix et du pouvoir nécessaires pour acquérir et maintenir son autonomie économique ou pour favoriser son intégration et sa participation à la société.
    Il faudrait d'abord établir une définition détaillée et complète de la pauvreté qui nous amènerait à réfléchir aux investissements qu'il faut faire pour donner aux gens les capacités et les opportunités dont ils ont besoin pour participer à la société. Comme cadre principal, nous suggérons l'approche élaborée par Amartya Sen que l'indice de développement humain des Nations unies a adoptée. Avant d'entrer dans les détails, précisons bien ce que nous cherchons à accomplir. Il s'agit de donner aux gens plus de pouvoir sur leur propre vie afin qu'ils puissent participer à la vie sociale, économique et culturelle de leurs collectivités d'une façon qui leur procure du bien-être.
    Je n'ai pas besoin d'entrer dans les détails. Vous trouverez dans notre mémoire la description des réalités auxquelles sont confrontées les personnes ayant une déficience, et surtout une déficience intellectuelle. Je vais seulement mentionner quelques faits saillants.
    Nous parlons d'environ 13 % à 14 % de la population, soit 4 millions de Canadiens. Sur ces personnes, 7 sur 10 ont besoin d'aide pour leurs activités quotidiennes. Plus de 8 millions de Canadiens prennent soin de personnes handicapées.
    Les parents d'enfants handicapés ont davantage tendance à devoir réduire ou cesser leur participation au marché du travail. En conséquence, nous constatons que les familles dont des membres ont des handicaps ont également davantage tendance à vivre dans la pauvreté. Cela ne touche pas seulement les personnes, mais aussi les familles.
    Près de 700 000 personnes handicapées prennent également soin d'autres personnes handicapées. Ce sera de plus en plus le cas étant donné le vieillissement considérable de la population et l'augmentation de la proportion de gens ayant des déficiences cognitives, des traumatismes cérébraux, etc. Tous ces chiffres vont en augmentant. Voilà ce que nous allons devenir. Malgré l'image que nous avons de nous-mêmes, notre idéal intellectuel et physique, nous serons de plus en plus nombreux à ne pas pouvoir l'atteindre et il arrivera à un moment de notre vie que ce soit impossible pour nous. Nous sommes une population de plus en plus handicapée et nous devons donc accepter que le handicap fasse partie de notre vie personnelle, de nos familles et de nos communautés.
    Comme votre étude porte sur les stratégies de réduction de la pauvreté, même si nous avons notre propre idée de ce que pourrait être une stratégie pour les personnes handicapées, nous préférons pour le moment vous adresser quelques suggestions pour articuler la problématique. En commençant par une définition large de la pauvreté et l'établissement d'un cadre de réflexion sur ce que signifie la pauvreté et comment elle survient, il est très important de considérer d'abord quels sont les résultats pour les groupes vulnérables. J'apprécie le fait que dans votre mandat, vous parlez de mettre l'accent sur les communautés vulnérables.
    Que signifie la « vulnérabilité » à l'égard des personnes ayant des déficiences intellectuelles? Nous avons mis en lumière les six principales dimensions de l'exclusion. Si nous commençons par une définition, voyons ce qu'est l'exclusion. Qu'entendons-nous par « exclusion »? Les gens sont seuls, ostracisés et isolés.
(0820)
    Jusqu'à 50 % des personnes ayant des déficiences intellectuelles souffrent de solitude et d'isolement chroniques par comparaison avec 15 % à 30 % de l'ensemble de la population. Plus de 50 % des personnes ayant des déficiences intellectuelles souffrent de troubles mentaux. Si l'isolement est conjugué à un faible revenu ou à un handicap, le problème s'aggrave. Si vous ajoutez à cela le sexe, le statut de réfugié ou d'immigrant, un statut racialisé ou le statut d'Autochtone, les problèmes d'exclusion augmentent.
    Les personnes ayant des déficiences intellectuelles et cognitives risquent quatre fois plus que l'ensemble de la population d'être victimes de violence. Tout cela s'additionne. Sur le plan du revenu, comme je l'ai mentionné, plus de 70 % des adultes ayant des déficiences intellectuelles ont un faible revenu. Une autre dimension est que ces personnes manquent de soutien personnel et d'aide à la communication chez elles. Plus de 50 % des enfants handicapés n'ont pas accès aux aides et aux dispositifs dont ils ont besoin.
    Pour ce qui est de l'itinérance et de la pénurie de logements abordables et adéquats, nous savons que chaque nuit, 35 000 personnes sont sans abri au Canada et il y a parmi elles une forte proportion de personnes ayant une déficience intellectuelle ou d'autres handicaps. Près de 30 000 adultes sont actuellement placés dans des établissements d'hébergement en commun, ce qui veut dire qu'ils n'ont aucun pouvoir sur leur propre vie. Dans un certain sens, ces établissements répondent peut-être à leurs besoins fondamentaux, mais si nous partons du principe que la pauvreté signifie l'exclusion sociale et le manque de pouvoir sur sa propre vie, ces personnes doivent faire partie d'une stratégie de réduction de la pauvreté parce qu'elles n'ont aucun pouvoir sur leur propre vie.
    Rien qu'en Ontario, les services d'hébergement ont 10 000 à 12 000 personnes sur leurs listes d'attente. Selon un rapport que l'ombudsman de l'Ontario a publié l'année dernière, ne sachant pas vers qui se tourner, les familles doivent recourir au placement en foyer d'hébergement parce qu'elles n'ont aucun soutien. Nous avons au Canada un système d'infrastructure qui compte sur les familles pour assumer tous les soins et cela devient de plus en plus insoutenable.
    La dernière dimension de l'exclusion est que les gens sont impuissants. Pas plus tard qu'hier, la Commission du droit de l'Ontario a publié son rapport sur la capacité juridique, la prise de décision et la tutelle et même si l'on propose, depuis des années, de reconnaître la capacité juridique des personnes ayant des déficiences intellectuelles et l'aide dont elles ont besoin, la Commission du droit a refusé de suivre cette voie et a continué de préconiser des régimes de tutelle alors que les Nations unies ont demandé au Canada de n'en rien faire.
    Notre approche consiste à se pencher d'abord sur l'exclusion et ses réalités et à réfléchir ensuite aux domaines dans lesquels nous devons investir pour comprendre quels sont les principaux obstacles qui engendrent l'exclusion. En cas de déficience, les perceptions et l'attitude des autres revêtent une importance cruciale. L'accès à une aide à la communication est essentiel. Au Canada, les malentendants n'ont pas accès aux services d'interprétation essentiels dont ils ont besoin pour avoir accès à des soins de santé.
    Pour ce qui est de l'infrastructure sociale, nous avons dit que l'infrastructure et la stratégie de logement jouent un rôle crucial, comme c'est le cas également pour les communautés autochtones et les Premières Nations. Nous vous exhortons à élargir le concept de l'infrastructure sociale au service des familles et à investir dans l'aide à la famille.
    En dernier lieu, nous devons veiller à ce que les personnes aient un statut juridique de base dans notre pays. Le gouvernement fédéral a un rôle à jouer à cet égard, tout comme les gouvernements provinciaux et territoriaux.
    Je vais m'arrêter là.
(0825)
    Merci beaucoup, monsieur.
    Nous allons maintenant passer à Magda Barrera et Mary Todorow, du Centre ontarien de défense des droits des locataires.
    Je vous remercie de nous avoir invitées, ma collègue Magda Barrera et moi-même, à participer à cette discussion importante.
    Le Centre ontarien de défense des droits des locataires, ou ACTO, est une clinique juridique communautaire financée par Aide juridique Ontario. Nous défendons les Ontariens à faible revenu et nous leur fournissons des conseils juridiques. Nous travaillons aussi à la promotion des droits de la personne et de la justice sociale sur le plan du logement au moyen d'initiatives de réforme du droit, d'organisation communautaire et d'éducation. Nos efforts portent principalement sur la prévention de l'itinérance et l'amélioration des conditions de logement des locataires à faible revenu.
    Les frais de logement représentent le principal poste de dépenses des ménages à faible revenu. Toute stratégie fédérale visant à réduire la pauvreté doit être entièrement coordonnée avec une stratégie nationale de logement à la fois robuste et efficace qui devrait, selon nous, se fonder sur les droits, être suffisamment financée et être enchâssée dans la loi. Il y a un nombre disproportionné de locataires et de sans-abri dans l'ensemble du pays, près d'un ménage de locataires sur cinq consacre plus de 50 % de son revenu au loyer et risque sérieusement de devenir sans-abri. Ce groupe comprend un nombre disproportionné de femmes, surtout monoparentales, de ménages autochtones, d'aînés, d'immigrants récents et de personnes handicapées, comme vous venez de l'entendre.
    Pour assurer le succès de la stratégie visant à réduire la pauvreté dans ces communautés vulnérables, il est crucial de s'engager fermement d'abord à remédier à la pénurie de logements locatifs abordables, deuxièmement, à préserver le parc existant de logements abordables, troisièmement, à remédier au fossé grandissant entre le faible revenu des ménages et les loyers du marché et quatrièmement, à améliorer la protection juridique des locataires.
    L'Ontario doit construire environ 10 000 nouveaux logements locatifs chaque année pour répondre à la demande de population qui s'accroît. Au cours des 20 dernières années, on a construit en moyenne environ 3 200 logements locatifs par année, soit moins de la moitié de ce dont nous avons besoin. Le marché privé a produit un grand nombre de nouveaux logements pour propriétaires-occupants, mais peu de nouveaux immeubles locatifs et encore moins de logements locatifs abordables.
    Les logements construits dans le cadre du programme de financement à frais partagés entre le Canada et l'Ontario offrent des logements locatifs abordables dont les loyers moyens ne dépassent pas 80 % des loyers du marché de la SCHL, mais ces loyers en dessous du prix du marché restent inabordables pour les personnes qui sont sans-abri ou qui sont sur la liste d'attente du logement social. De plus, les propriétaires privés à but lucratif possèdent 35 % des logements locatifs qui ont été construits en Ontario grâce au financement de ces programmes. Nous trouvons scandaleux que la durée de l'obligation d'offrir des loyers abordables soit limitée à 20 ans pour les projets approuvés dans le cadre du volet locatif du programme de logements abordables. Cela veut dire que plus du tiers des logements construits jusqu'ici ne constitueront pas une infrastructure publique permanente offrant des loyers abordables à long terme malgré un investissement important de deniers publics.
    Nous avons besoin d'un programme de construction de logements abordables assorti d'un financement adéquat et d'objectifs annuels rigoureux. De plus, nous recommandons vivement que seul le secteur sans but lucratif puisse posséder et gérer les nouveaux logements locatifs construits à l'aide des fonds publics et que ces logements restent abordables à long terme et pas seulement pendant 20 ans.
(0830)
    La Loi sur la location des locaux d'habitation de l'Ontario exige que les fournisseurs de logements sociaux, comme tous les propriétaires de logements, maintiennent leurs immeubles en bon état et propres à servir d'habitations. Le coût de remplacement du parc actuel de logements sociaux de l'Ontario est estimé à 40 milliards de dollars tandis que le déficit sur le plan des réparations, rien que pour la Toronto Community Housing Corporation, le plus grand propriétaire de logements sociaux du pays, est évalué à 2,6 milliards de dollars pour les 10 prochaines années. Le manque de financement et le mauvais état des logements qui en résulte nuisent aux intérêts des locataires et donnent un mauvais exemple aux propriétaires du secteur privé.
    La stratégie nationale de logement devrait tenir compte de l'investissement massif que le gouvernement fédéral fait dans ce type de logements et de la nécessité d'un financement suffisant pour préserver les normes minimales d'habitabilité de ces logements, d'un bout à l'autre du pays.
    En raison de l'écart entre ce que les locataires à faible revenu peuvent se permettre de payer pour leur logement et les loyers du marché privé, le nombre de ménages inscrits sur la liste d'attente pour obtenir un logement à loyer indexé sur le revenu dépasse maintenant 170 000. Nous savons qu'on envisage actuellement une prestation fédérale pour le logement qui pourrait aider les locataires à combler l'écart entre un loyer abordable et leur loyer réel. Nous sommes certainement en faveur d'une initiative qui mettrait plus d'argent entre les mains des locataires à faible revenu. Néanmoins, il faut examiner de près toute prestation pour le logement de façon à éviter des conséquences négatives comme le risque d'une inflation des loyers, un manque de choix de logements pour les locataires si le taux d'inoccupation est faible et la possibilité que les locataires de logements sociaux soient perdants si la prestation de remplacement est moins importante que la subvention du loyer indexé sur le revenu.
    L'Ontario mène actuellement un programme pilote de prestations de logement d'une durée de deux ans qui s'adresse aux victimes de violence familiale. Les prestations de logement peuvent être surtout utiles lorsqu'une aide rapide est requise et il serait possible d'étendre ce genre de programme aux personnes qui connaissent une perte de revenu à court terme.
    Nous avons constaté que les locataires à faible revenu sont désavantagés sur le marché du logement parce que les lois provinciales qui régissent leurs relations avec leurs propriétaires sont inadéquates. Le gouvernement fédéral devrait favoriser des politiques provinciales énergiques pour la protection des locataires. Cela devrait inclure une régulation efficace des loyers, la protection du parc de logements locatifs, la garantie de maintien dans les lieux ainsi qu'un mécanisme de règlement des différends juste et accessible, et des mesures de prévention de l'itinérance.
    Une bonne réglementation des loyers peut empêcher une hausse abusive des loyers en cas de forts rebonds du marché, favorise la stabilité du marché locatif et empêche que de fortes hausses de leur loyer ne chassent les locataires du logement et du quartier où ils résident depuis longtemps.
    Nous voudrions faire quelques brèves observations au sujet de Logement d'abord que beaucoup considèrent comme une solution au problème de l'itinérance. Logement d'abord s'adresse aux personnes qui vivent habituellement dans la rue ou dans des refuges. La plupart d'entre elles sont du sexe masculin. Dans bien des cas, elles ont des toxicomanies souvent associées à des troubles mentaux. Néanmoins, Logement d'abord ne règle pas la situation des sans-abri invisibles, qui ne vivent pas dans la rue ou dans des refuges, mais qui sont sans logement sûr, permanent et stable et dont le nombre est estimé à 50 000 au cours de chaque nuit, au Canada. Également, Logement d'abord ne fait rien pour prévenir l'itinérance.
    Pour réduire la pauvreté, nous avons besoin d'idées innovantes, mais nous ne pouvons pas oublier ce qui a fonctionné par le passé et donne encore des résultats pour des centaines de milliers de Canadiens. Il s'agit des subventions au loyer indexées sur le revenu, des logements locatifs détenus par des organismes publics et des lois protégeant les locataires contre un comportement injuste ou opportuniste des propriétaires et des promoteurs.
    Nous vous remercions de votre attention.
    Merci beaucoup à toutes les deux et j'ai hâte d'entendre certaines de ces idées innovantes au cours de la période de questions qui commencera bientôt.
    Néanmoins, avant cela, nous allons entendre Pedro Barata, de United Way Toronto and York Region.
    Vous disposez de sept minutes, monsieur.
    La dernière fois que nous étions censés nous réunir dans ce même hôtel, la réunion a dû être annulée. Pour ceux d'entre nous qui vivent ici, c'était un petit inconvénient, mais pour vous et toute l'équipe qui vous accompagne, c'était un jour de plus loin de votre famille, à vivre dans votre valise, à réorganiser vos réunions, vos horaires, et à passer beaucoup de temps au téléphone. Nous tenons à vous remercier pour le service public que vous-mêmes et votre personnel de soutien rendez au sujet de cette question très importante qui préoccupe beaucoup les Canadiens et qui exige un dialogue multipartite pour retenir les bonnes idées, peu importe d'où elles viennent.
(0835)
    Je vous en remercie.
    Mais surtout, le pire est que nous avons dû rester dans sa circonscription pendant deux jours de plus. Il est rentré chez lui de bonne heure.
    Des voix: Ah, ah!
    Je suis certain qu'il a été un bon hôte.
    Il est bon également que vous terminiez vos délibérations, ou du moins cette partie de votre étude, dans un endroit comme Toronto. Tout le monde ne sera peut-être pas d'accord autour de cette table, mais Toronto est un endroit assez formidable et peut-être l'un des meilleurs endroits au monde où vivre. Une chose dont nous sommes particulièrement fiers, à Toronto, c'est que nous avons effectivement beaucoup de grues et que nous sommes une ville prospère, mais que nous sommes aussi un lieu où la diversité est notre force et notre devise. Notre ville se fonde sur des valeurs comme l'équité, l'appartenance, l'opportunité et le genre de choses qui réunissent vraiment notre collectivité.
    Ces valeurs et toutes les choses qui nous rendent vraiment fiers de la ville dans laquelle nous vivons — Toronto n'est pas la seule, car ce sont les mêmes valeurs qui unissent le Canada — sont compromises par des problèmes comme la croissance de l'emploi précaire dans notre ville; l'écart grandissant entre les quartiers, entre les gens prospères et ceux qui le sont moins; et les véritables défis auxquels la prochaine génération est confrontée. Que se passe-t-il sur le plan de l'accord intergénérationnel et des possibilités que nous laisserons derrière nous pour la prochaine génération? Un plan de réduction de la pauvreté est vraiment l'idée maîtresse pour renforcer les valeurs qui font du Canada le meilleur pays au monde et vous avez donc une grande responsabilité que nous apprécions vraiment.
    Une stratégie de réduction de la pauvreté doit répondre à des critères qui, nous l'avons constaté, sont vraiment importants. Il faut d'abord avoir un plan. Ce n'est pas une mesure ponctuelle. Ou une cérémonie d'inauguration. Ce doit être un effort pluriannuel. Il est utile d'avoir des cibles et des échéanciers de façon à ce que nous poussions tous dans la même direction. Cela aide aussi à comprendre qu'il n'y a pas de recette magique. Ce n'est pas l'affaire d'un seul secteur. Le gouvernement ne peut pas agir à lui seul, pas plus que le secteur privé ou United Way Centraide. Nous devons tous contribuer à la solution. Si nous avons un plan avec un objectif, cela nous aidera tous à pousser dans la bonne direction.
    Vous entendez beaucoup parler des investissements et de la nécessité de faire de nouveaux investissements. C'est absolument essentiel. La prestation canadienne pour enfants est une réalisation historique qui va certainement améliorer les choses sur le plan de la pauvreté infantile au Canada. Nous allons commencer bientôt à en constater les résultats.
    Aujourd'hui, j'aborderai un sujet différent en parlant, en plus de ces investissements, de cinq idées que le gouvernement fédéral pourrait mettre en oeuvre. Leur coût serait très modeste ou nul et on pourrait commencer à les appliquer immédiatement. Je vais les passer en revue très rapidement.
    La première concerne les investissements très importants que le gouvernement fédéral est en train de faire dans l'infrastructure. En plus de construire des routes, des ponts, des égouts et le genre de choses qui font fonctionner nos collectivités et notre économie, je vous exhorte à réfléchir aussi au rôle de l'infrastructure communautaire et des pôles communautaires. Chez nous, à Toronto, nous constatons que la ville et la région se transforment. Certains quartiers qui étaient au départ des quartiers surtout résidentiels sont en train de changer. Ils accueillent maintenant des nouveaux arrivants. Ce sont les endroits où il y a des logements abordables. Le problème est que ces quartiers n'ont pas d'infrastructure communautaire. À United Way, nous travaillons avec un grand nombre de nos partenaires, nous avons construit des centres communautaires, et des pôles communautaires, des guichets uniques où les gens peuvent obtenir les services dont ils ont besoin. Je vous invite à faire une place aux pôles communautaires, dans le cadre de l'investissement dans l'infrastructure.
    Deuxièmement, également sur le plan de l'infrastructure, la Chambre de commerce de Toronto vient de publier une étude montrant que 147 000 nouveaux emplois vont être créés dans le secteur des métiers et ce sont des gens qui auront besoin de nouvelles fournitures. Vous pouvez voir que les investissements dans l'infrastructure et la collectivité permettent non seulement de construire des réseaux de transport en commun et les autres infrastructures requises, mais aussi de relier les gens, surtout les jeunes à la recherche d'un emploi, à des carrières dans les métiers auxquelles ils n'auraient jamais songé autrement. Nous pouvons utiliser chaque dollar non seulement pour construire les choses dont nous avons besoin, mais aussi pour offrir des opportunités aux jeunes. Grâce aux projets que nous entreprenons ici, à Toronto, nous expérimentons et pilotons certaines approches qui pourraient stimuler des partenariats offrant des possibilités de carrière tout en stimulant notre économie.
    Troisièmement, les jeunes sont confrontés à des difficultés, mais elles ne sont pas les mêmes pour tous. Le gouvernement fédéral a mis en place une stratégie d'emploi pour les jeunes. C'est chose faite. C'est en marche. Des investissements sont faits. Pour ce qui est des jeunes les plus éloignés du marché du travail, qui font face aux plus grands obstacles, nous devons vraiment diriger les ressources vers eux dans le cadre de la stratégie d'emploi pour les jeunes. Si nous n'agissons pas, ils risquent de passer à travers les mailles du filet et de nous coûter cher sur le plan de la santé, de la justice pénale, de la perte de productivité et de toutes sortes d'autres coûts qui, en plus de compromettre nos valeurs, nuiront aussi à nos finances.
(0840)
    Quatrièmement, les infrastructures des services communautaires sont absolument essentielles, mais comment les Canadiens contactent-ils ces services? Le service 211 est une solution. C'est un guichet unique ouvert 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, multilingue, pour lequel le taux de satisfaction est très élevé et qui peut relier les gens aux services dont ils ont besoin.
    Enfin, le gouvernement investit dans une stratégie nationale de logement et nous espérons qu'il va l'accompagner prochainement d'un cadre financier. Nous pensons qu'il est temps de mettre en place une prestation de logement transférable en plus de la construction de nouveaux logements, des réparations et de l'aide aux sans-abri. Cela pourrait changer la donne en ce qui concerne les besoins des Canadiens. Nous avons la preuve que lorsqu'elles sont bien conçues, ces prestations ne font pas gonfler le prix des loyers, elles complètent le logement social en libérant des places pour ceux qui en ont le plus besoin et elles sont rentables. Il y a actuellement cinq ou six provinces qui s'apprêtent à les établir.
    Oui, nous avons besoin de construire de nouveaux logements, mais cela prendra du temps. Oui, nous devons faire des réparations, mais cela n'augmentera pas l'offre de logements. Les prestations de logement sont le moyen le plus efficient et le plus important de commencer à aider les Canadiens immédiatement et nous vous invitons à l'envisager dans le cadre d'une stratégie nationale de logement et d'une stratégie de réduction de la pauvreté.
    Merci beaucoup de votre attention. J'ai hâte de participer à la discussion.
    Merci beaucoup, monsieur.
    Comme j'ai travaillé avec des bénévoles et milité dans le secteur de la philanthropie pendant la majeure partie de ma carrière, c'est un honneur pour moi de vous présenter notre prochain témoin. Il a fait sa marque dans notre pays pour son travail philanthropique dans le secteur du bénévolat.
    Les sept prochaines minutes sont à votre disposition, monsieur Johnson.
    J'aimerais tout d'abord remercier le Comité de m'avoir invité à témoigner et à présenter quelques propositions pouvant permettre d'atteindre les objectifs sur cette importante question d'intérêt général.
    Je suis ici à titre personnel, mais je suis membre du conseil d'administration de la BMO, Marchés des capitaux, et membre bénévole du conseil d'administration de quatre organismes sans but lucratif. Je suis vraiment ici pour parler au nom des organismes de bienfaisance qui soutiennent les personnes sur lesquelles votre comité centre son attention.
    Il existe une mesure fiscalement intéressante pour remplacer le financement public et direct des organismes qui offrent des services de formation aux travailleurs canadiens et des services de soutien aux personnes handicapées. Ces organismes, notamment les collèges, les universités et les organismes de services sociaux comme l'United Way Centraide pourraient être plus efficaces grâce à une simple modification des lois fiscales.
    Au nom des organismes sans but lucratif oeuvrant dans les domaines de l'éducation, de la santé, des services sociaux, des arts et de la culture, j'ai présenté un mémoire au Comité permanent des finances de la Chambre des communes durant les audiences prébudgétaires de l'automne dernier. Un exemplaire de mon mémoire est joint à mes notes en anglais et en français. J'y mets en avant la possibilité d'augmenter les dons de bienfaisance de 200 millions de dollars par an, au profit de tous les Canadiens qui reçoivent des services des organismes de bienfaisance.
    Nous recommandons que le gouvernement abolisse l'impôt sur les gains en capital pour les dons d'actions de sociétés fermées et de biens immobiliers dans le budget fédéral de 2017 qui sera déposé le 22 mars.
    D'un point de vue fiscal, les dons de bienfaisance à des organismes sans but lucratif sont bien plus efficaces que le financement direct par le gouvernement, puisque le coût budgétaire est partagé entre le gouvernement et le donateur. Une partie des dons de charité serait destinée aux collèges et aux universités qui permettent à notre main-d'oeuvre, y compris aux personnes handicapées, d'acquérir des compétences et de suivre des formations. Une autre partie serait aussi remise aux organismes de bienfaisance comme United Way Centraide, qui offrent un soutien social.
    Le budget de 2015 prévoyait qu'un particulier qui vend des actions de sociétés fermées ou des biens immobiliers à une partie sans lien de dépendance serait exonéré de l'impôt sur les gains en capital pour la partie ou la totalité du produit en espèces qui fait l'objet d'un don à un organisme de bienfaisance enregistré dans un délai de 30 jours. Bien que présente dans le budget, la mesure n'a malheureusement pas été incluse dans la loi budgétaire votée en juin 2015, quelques mois avant les élections. Elle n'a par conséquent pas été adoptée. Comme vous le savez, le gouvernement a déclaré qu'il n'avait pas non plus l'intention de l'adopter dans le budget de 2016.
     Même si c'est le gouvernement conservateur qui a déposé le budget de 2015, cette mesure recueillait l'appui des trois partis. Scott Brison, alors porte-parole du Parti libéral en matière de finances et actuel président du Conseil du Trésor, avait publiquement exprimé son soutien. Thomas Mulcair alors chef par intérim du NPD, y était également favorable. On peut donc raisonnablement supposer que le Parti conservateur et le NPD donneraient tous deux leur aval à cette mesure si elle faisait partie du budget de 2017.
    Plusieurs arguments plaident en faveur de son inclusion. Premièrement, le manque à gagner en recettes fiscales que représenterait l'élimination de l'impôt sur les gains en capital pour ces dons n'est que de 50 à 60 millions de dollars par an, et le crédit d'impôt pour don de bienfaisance est le même que pour un don d'argent.
    Deuxièmement, le fait que le donateur doit vendre le bien à une partie sans lien de dépendance garantit qu'il recevra la juste valeur marchande au moment de la vente du bien et élimine tout risque d'abus dans l'évaluation.
    Troisièmement, l'adoption de cette mesure permettrait de remédier à une disposition inéquitable de la Loi de l'impôt sur le revenu. Elle assurerait que les dons d'actions de sociétés fermées et de biens immobiliers bénéficient du traitement fiscal qui s'applique actuellement aux dons d'autres biens qui ont pris de la valeur, soit les actions cotées en bourse.
    Ainsi, les entrepreneurs qui choisissent de ne pas faire appel public à l'épargne seraient traités de la même façon que ceux qui introduisent leur entreprise en bourse.
    Enfin, la grande majorité de ces dons s'ajouteraient aux dons en argent et ne les remplaceraient pas.
(0845)
    L’exemple de United Way Toronto and York Region illustre parfaitement la façon dont les plus démunis de notre société profiteraient de cette mesure. Je suis heureux que mon collègue Pedro, de United Way Toronto and York Region soit ici pour participer en tant que témoin ce matin.
    Sachez que United Way Toronto a grandement profité de l’élimination de l'impôt sur les gains en capital pour les dons de titres cotés en bourse. De 1956 à 1996, United Way Toronto n’a reçu que pour 44 000 $ de dons de titres cotés en bourse. De 1997 à 2016, ces dons ont dépassé 176 millions de dollars par suite de l’élimination de l'impôt sur les gains en capital pour les dons de titres cotés en bourse. United Way Toronto and York Region fournit des fonds essentiels à plus de 200 organismes de la région du Grand Toronto et de York. Cette mesure pourrait donc être un important outil de perfectionnement des compétences et de progrès social.
    Comme votre comité ne remettra son rapport à la Chambre des communes qu'après le dépôt du budget de 2017, qui aura lieu le 22 mars, nous vous serions très reconnaissants de faire connaître le plus tôt possible votre appui à cette mesure au ministre des Finances Bill Morneau et au premier ministre Justin Trudeau.
    Voilà qui conclut mon allocution. Si vous avez des questions, je me ferai un plaisir d’y répondre.
    Merci monsieur.
    Nous allons maintenant commencer la période des questions. Pour commencer, nous accueillons le député Poilievre.
    Vous disposez de six minutes, monsieur.
    Merci beaucoup et merci aux témoins.
    J'aimerais commencer par vous, monsieur Johnson. Pouvez-vous répéter les chiffres sur les dons à Centraide de titres cotés en bourse avant l’élimination et après? Vous avez souligné un fait intéressant. Je pense que vous avez dit que les dons ont totalisé 44 000 $ sur 40 ans avant, et quelque chose comme 170 millions de dollars après?
    C'est 176 millions.
    Et 44 000 $ pendant quelle période?
    Les 44 000 $ ont été étalés sur plus de 40 ans, depuis la création de Centraide à Toronto en 1956 jusqu'à 1996. Pendant ces 40 ans, les dons de titres cotés en bourse n’ont totalisé que 44 000 $. Centraide est le seul organisme que j’ai pu trouver à avoir gardé une trace des dons de titres cotés en bourse effectués avant 1997.
(0850)
    C’est donc 176 millions à partir de quand?
    De 1997. En 1997, lorsque Paul Martin était ministre des Finances, le gouvernement a réduit de moitié l'impôt sur les gains en capital pour les dons de titres cotés en bourse. En 2006, le reste de l’impôt sur les gains en capital a été aboli pour les dons de titres cotés en bourse.
    C’est donc 176 millions entre 1996 et aujourd’hui?
    Oui, c’est de 1997 à aujourd’hui, en fait à 2016.
    D'accord. C'est beaucoup d'argent.
    Comme vous le savez, nous parlons beaucoup de la façon dont les gouvernements peuvent transférer la richesse des bien nantis aux moins fortunés. Votre proposition permettrait d’effectuer ce transfert de façon volontaire et efficace en abolissant effectivement l’impôt sur les contributions philanthropiques volontaires. À l'heure actuelle, si une société privée donnait des actions ou le produit d'actions de sa société à un organisme de bienfaisance, le gouvernement retiendrait une partie de ce don et la détournerait des mains de l'organisme de bienfaisance, ce qui semble contraire à l’objectif universellement reconnu qui consiste à favoriser une plus grande générosité.
    Vous avez indiqué dans votre allocution que les dons qui ont résulté de l’élimination de l'impôt sur les gains en capital pour les dons de titres cotés en bourse sont différentiels, c'est-à-dire qu'ils ne remplacent pas les dons en espèces qui auraient autrement été effectués. Pouvez-vous le prouver?
    De façon générale, les gens qui ont la capacité de donner n’ont pas des tonnes d'argent dans leur compte bancaire. Leur richesse a été créée soit en démarrant une entreprise et en la faisant grandir ou en investissant dans l'immobilier. Je pourrais vous donner des exemples.
    Je n’aime pas parler de mes propres dons de bienfaisance, mais j'ai donné en tout environ 25 millions de dollars à des organismes de bienfaisance. Tous ces dons ont été sous forme de titres cotés en bourse. Si j'avais eu à payer l'impôt sur les gains en capital pour ces dons lorsque j'ai transféré les titres à des organismes de bienfaisance, je n'aurais donné qu’une infime fraction de ces montants en espèces.
    Je vois.
    En ce qui concerne ces dons, M. Barata peut peut-être nous parler de la valeur de ce genre de geste de philanthropie pour son organisme.
    Avec plaisir. J’aimerais aussi faire écho aux commentaires de M. Johnson et parler de son leadership incroyable en matière de philanthropie, qui a fait une énorme différence dans notre ville et dans notre région. En fait, en ce qui concerne ses nombreuses contributions, j'ai parlé plus tôt de carrefours communautaires. Le véritable leadership qui nous a permis d’investir et de tirer profit des fonds publics au moyen d’un investissement dans les carrefours communautaires nous a permis de réaliser de bien beaux projets dans des quartiers qui en avaient réellement besoin.
    Pour ce qui est de cette mesure, et en réponse à votre question précédente, ce qui a été très encourageant, c'est que parallèlement à l'augmentation des dons de titres cotés en bourse, l'augmentation de la campagne Centraide a également suivi le rythme de ces dons à même hauteur. Aujourd'hui, la campagne de United Way Toronto and York Region est la plus grande campagne Centraide au monde. Nous vivons dans une ville très généreuse. C’est une campagne d’environ 100 millions de dollars. Si vous faites la moyenne des dons de titres pour les 20 ans, ils représentent environ 8 % du total de notre campagne chaque année.
    Je dirais donc que les deux vont de pair. Parallèlement, les dons de titres constituent un très solide fondement de notre campagne. Les autres dons en argent sont également très importants, ce qui nous permet d'investir dans un réseau de 200 organismes et initiatives communautaires et ainsi aider des gens à réussir.
(0855)
    Cela représente donc en moyenne 8 millions de dollars en dons de titres, et environ 92 millions de dollars en espèces?
    Je ne fais que la moyenne directe de 176 millions de dollars dans les 20 dernières années, et c’est le chiffre que j’obtiens.
    Merci beaucoup.
    Monsieur le député Long, je vous prie.
    Merci à tous nos témoins ce matin. C'était un témoignage très intéressant. Nous préparons toujours des questions, mais après vous avoir écouté, je pourrais vous poser des questions toute la journée.
    Tout d'abord, monsieur Johnson, je tiens à vous féliciter pour l'Ordre du Canada que vous avez reçu en 2004, c’est bien cela?
    C'est exact.
    Je vous en félicite. Je ne m'en étais pas rendu compte. Je suis honoré de vous accueillir ici ce matin.
    Je vais commencer par vous, madame McConnell, en ce qui concerne vos idées pour réduire la pauvreté. Je me souviens avoir déjà reçu un appel me disant que ma ville de Saint John, au Nouveau-Brunswick avait un point en commun avec Toronto, manchette du National Post à l’appui, et que les deux villes étaient malheureusement sur un pied d’égalité pour la mesure du faible revenu et de la pauvreté infantile au Canada. C'était une distinction dont les deux villes auraient sûrement pu se passer.
    Quand on examine vos différentes initiatives, en commençant par Breaking the Cycle en 2009 et 2013, Realizing our Potential en 2014 et 2018, et maintenant TO Prosperity, il semble que les villes et les provinces ont toutes sortes d'initiatives différentes, mais il est décevant de constater que les choses ne bougent pas. Ce n'est pourtant pas faute d’essayer. J'aimerais simplement que vous me rappeliez à quel point il est important d'arrimer les trois ordres de gouvernement à l'élaboration d'une stratégie nationale de réduction de la pauvreté.
    C'est essentiel. Je ne pense pas qu’il puisse y avoir de succès sans la collaboration de tous. Nous nous établissons des objectifs annuels de nombre d'initiatives dans un plan de travail. Nous avons prévu 76 initiatives cette année. Près du quart d'entre elles sont menées en collaboration avec d'autres ordres de gouvernement ou avec des organismes communautaires, comme celui dont vous avez aujourd'hui entendu le représentant, des commerçants et des gens d'affaires, en particulier avec des gens d'affaires, assez étonnamment, de Bay Street qui emploient une centaine de jeunes chaque année. Nous en sommes à la cinquième année de cette initiative, qui a été créée sous l’impulsion d’une seule personne.
    Sans ce genre de collaboration, il est impossible de passer à travers toutes ces listes et de financer tout le monde. Toutes ces listes figurent dans le budget cette année.
    Pouvez-vous me dire comment ce décalage, si je peux dire, a nui à Toronto?
    Je peux vous dire comment il nous a aidés…
    D’accord, très bien.
    … et ce serait au chapitre de la nutrition des enfants. La province, le secteur privé, la Ville de Toronto et les conseils scolaires se sont mis ensemble, et nous avons réussi à nourrir plusieurs centaines de milliers d'enfants. Nous avons augmenté les pourcentages, non seulement des enfants, mais aussi de la contribution. Ce n'est qu’un exemple.
    Il y a un domaine où cela ne fonctionne pas actuellement, selon moi, et c’est celui du logement, où nous appliquons une politique de porte ouverte, qui prévoit à la fois des mesures fiscales et la possibilité de donner des terrains excédentaires de notre ville. Nous n'avons pas encore observé cela au niveau du gouvernement fédéral.
    Le dernier point que j'ai souligné, c'est celui de notre logement social. En Ontario, la situation est très différente, si je puis dire, de partout ailleurs au pays. Comme nous sommes les seuls à composer dans le domaine du logement abordable avec l’assiette de l’impôt foncier, c'est donc un peu différent. C'est un problème qui se pose partout en Ontario, et pas seulement à Toronto, même si nous avons le tiers des logements abordables.
    Ce ne sont que quelques exemples.
    Merci beaucoup.
    Mesdames Barrera et Todorow, dans la circonscription de Saint John—Rothesay, nous déployons à mon bureau de grands efforts en matière d’itinérance et de refuges. Nous traitons avec Outflow, qui est le refuge pour les hommes itinérants. Pouvez-vous me dire ce que nous pourrions faire de plus, du point de vue fédéral, pour aider les refuges et les sans-abri?
    Nous n'avons pas une grande connaissance des refuges. Nous plaidons davantage pour des solutions plus permanentes.
(0900)
    D'accord.
    Les refuges ne sont qu'une mesure provisoire. Nous estimons que la meilleure façon d’aider les gens qui se trouvent dans des refuges consiste à mettre l’accent sur le programme Logement d'abord.
    La plupart des gens ne restent pas au refuge. Le programme Logement d’abord doit se concentrer sur les résidents chroniques de ces refuges. Ce qu’il faut avant tout, ce sont des mesures de soutien. Il faut un bon système de soutien pour maintenir ces personnes dans un logement.
    Cela ne fonctionne pas toujours, mais cela fonctionne très bien, comme en fait foi le résultat du projet pilote, et c'est pourquoi nous investissons beaucoup d'argent dans le programme Logement d'abord.
    Je sais qu'à Toronto, et peut-être que la conseillère McConnell pourra nous en parler, les refuges sont surchargés. Cela tient en grande partie au fait que nous n'avons pas de logements abordables permanents accompagnés de mesures de soutien pour des gens qui, en général, ont beaucoup d'autres problèmes qui les empêchent de conserver un logement et font qu’ils se retrouvent à la rue.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Bach, vous avez parlé dans votre allocution d'élargir l'infrastructure sociale aux familles. Pouvez-vous préciser ce que vous entendez par là?
    Très rapidement, je vous prie.
    Nous préconisons une sorte d'approche résiduelle en faveur d’un soutien social élargi, dont la famille est au centre. Un nombre de plus en plus élevé de familles sont elles-mêmes des aidants naturels. Comme elles n’ont pas de source de soutien auxiliaire, elles finissent par s’épuiser. Nous comptons un nombre extrêmement disproportionné d'enfants handicapés dans les services de protection de l'enfance, et ainsi de suite.
    Notre approche consiste à mettre sur pied des systèmes de soutien communautaire qui procurent un répit aux aidants familiaux. Nous devons aider les familles elles-mêmes à se constituer des réseaux et à développer leur propre leadership dans leur collectivité pour provoquer le changement. Nous avons besoin de systèmes de relève qui offrent aux familles un répit en cas de besoin. Les familles doivent avoir accès à des intervenants-pivots afin de pouvoir s’orienter dans la collectivité.
    Le gouvernement fédéral a clairement pour rôle de soutenir l'infrastructure clé qui permet aux familles de se constituer des réseaux et qui fournit ces systèmes d’orientation. Ce n'est pas qu’un service social. Si les familles deviennent l'infrastructure sociale sur laquelle nous comptons de plus en plus, le gouvernement fédéral doit investir dans la capacité qu’ont les collectivités de permettre aux familles de jouer ce rôle. Ce n'est pas un service social. C'est une infrastructure sociale. En ce qui concerne cette façon d’aider les familles qui sont des aidants naturels et des chefs de file de leur collectivité dans ce domaine, le gouvernement fédéral a un rôle vraiment légitime à jouer, et les modèles sont nombreux à cet égard.
    Je vous remercie.
    La parole est maintenant au député Sansoucy.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je remercie l'ensemble des témoins de leur contribution à notre étude.
    Plus particulièrement, j'aimerais vous remercier, monsieur Bach, d'avoir insisté sur le fait que nous devons d'abord nous doter d'une définition claire de la pauvreté. Étonnamment, le gouvernement fédéral et tous ses ministères ne se sont pas entendus sur une définition de la pauvreté au Canada. Dans le rapport que notre comité doit produire, une telle définition doit être la base de toute stratégie et de tout objectif concernant la pauvreté.
    Mes premières questions s'adressent au représentant du Centre ontarien de défense des droits des locataires. Selon vous, le programme Logement d'abord est « la » solution. On sait qu'il vient en aide aux personnes très vulnérables et qui vivent déjà dans la rue. Or, des organismes locaux qui travaillent actuellement en prévention ont vu leur budget réduit quand il a été décidé que, dans les grandes villes, une proportion de 60 % du budget de la Stratégie des partenariats de lutte contre l'itinérance serait investie dans l'approche Logement d'abord.
    Vous savez peut-être qu'au Québec, on demande depuis un bon moment déjà de laisser aux gens qui travaillent sur le terrain et qui connaissent les conditions et les solutions possibles le choix de l'approche à utiliser. La SCHL examine la possibilité de laisser les gens concernés choisir leur approche, soit une approche plus généraliste ou l'approche Logement d'abord, selon les besoins sur le terrain.
    J'aimerais connaître votre opinion là-dessus. Selon vous, est-ce qu'on devrait permettre aux organismes ou aux communautés de choisir leur approche, c'est-à-dire une approche centrée sur l'initiative Logement d'abord ou une approche plus généraliste?
(0905)

[Traduction]

    Je dirais qu'en Ontario, nos 47 gestionnaires de services municipaux ont mis sur pied des plans décennaux en matière de logement et d'itinérance. Ils ont mené des études, des recherches et des consultations communautaires approfondies sur les besoins de notre collectivité et sur la façon d’y répondre dans les 10 prochaines années.
    Oui, je pense que les collectivités locales sont les mieux placées à l’heure actuelle. Nous attendons avec impatience les résultats de ces plans, sur lesquels le ministère du Logement se penche. On y examine les besoins de la collectivité et on y fixe des objectifs et des cibles. Un grand travail de fond a été effectué. Je dirais donc que cela se produit au niveau local, mais que ce ne serait pas possible, comme le disait Pam McConnell, conseillère à la Ville de Toronto, sans la collaboration et le financement des autres ordres de gouvernement, à la fois, ici en Ontario, avec le gouvernement provincial ainsi qu’avec le gouvernement fédéral.

[Français]

    Merci.
    Je vais passer à un autre sujet.
    Nous discutons de logement social en ce moment parce qu'il y a des ententes qui prennent fin et que les logements touchés par ces ententes seront loués à des personnes qui peuvent se permettre de ne pas recourir au Supplément au loyer du Québec.
    Vous avez souligné que les listes d'attente sont longues et que, de ce fait, il est important de construire des logements sociaux. Comment le gouvernement fédéral doit-il réagir par rapport à ces ententes qui prennent fin?

[Traduction]

    Nous considérons cela comme une énorme initiative de prévention de l’itinérance, parce qu’il pourrait y avoir des centaines de milliers de ménages qui ne pourraient pas autrement payer leur loyer. Je sais que le gouvernement fédéral a conclu une entente de financement provisoire, et qu’il a l'intention de trouver une solution à long terme, ce qui est absolument essentiel. J'habitais autrefois dans une coopérative d'habitation financée par le gouvernement fédéral dans le cadre d'un programme fédéral. Le quart de nos logements étaient subventionnés. Bon nombre des personnes qui y habitaient ont réussi à reprendre leur vie en mains, ont continué, et n'ont plus eu besoin de vivre dans un logement subventionné, mais quelqu'un d'autre a pris leur place.
    Quand je pense qu'aujourd'hui, la coopérative ne serait plus en mesure de fournir un logement à ces gens afin qu'ils puissent avoir de l'argent pour subvenir à leurs autres besoins de base dans la vie et ainsi échapper à la pauvreté, je trouve cela stupéfiant. Il doit y avoir une solution, et elle devra être financée.

[Français]

     Je vous remercie.
    Ma prochaine question s'adresse à vous, madame McConnell.
    Vous avez souligné à juste titre qu'il est important d'avoir une collaboration entre les différents ordres de gouvernement. Ma collègue Marjolaine Boutin-Sweet, députée d'Hochelaga, qui est notre porte-parole en matière de logement, propose de permettre aux municipalités d'élargir leur pouvoir de taxation en instaurant une taxe sur les matériaux de construction ou une taxe de ce genre. Cela permettrait de réduire les coûts de construction et les coûts liés à l'entretien des bâtiments.
    Mme Boutin-Sweet a avancé qu'une stratégie nationale du logement devrait avoir trois critères. D'abord, elle devrait être flexible afin de permettre aux communautés de définir elles-mêmes les cadres qu'elles veulent mettre en avant. Ensuite, on devrait leur donner les moyens financiers de le faire. Enfin, il faudrait que la stratégie soit basée sur un partenariat des groupes sur le terrain avec les différents ordres de gouvernement.
    Selon vous, ces trois critères sont-ils essentiels? Je vous pose la question, car je trouve que cela recoupe différents éléments de votre présentation.

[Traduction]

    Nous n’avons malheureusement plus de temps, mais je vais vous donner environ 30 secondes pour répondre à cette question.
    Oui, c'est essentiel. En plus des impôts qui nous reviendraient, il y a aussi les impôts que le gouvernement fédéral pourrait prélever, surtout avec le refinancement hypothécaire visant à faire baisser les paiements hypothécaires.
    La collaboration avec la collectivité, en particulier les secteurs des organismes sans but lucratif et coopératif, a été extrêmement importante ici. Lorsque j'étais présidente de cet organisme, nous ouvrions une coopérative par mois, et je pense que nous n'en avons pas ouvert une en 10 ans.
(0910)
    Merci.
    Monsieur le député Sangha, je vous prie.
    Merci beaucoup à tous nos témoins de leur présence et de leur très précieuse contribution.
    Ma question s'adresse à vous, monsieur Barata. Vous avez parlé de cinq types de mesures que vous proposez pour le Comité. Je ne suis pas sûr de bien comprendre ces mesures. Pourriez-vous expliquer au Comité ce que vous entendez par « infrastructure communautaire »?
    À l'heure actuelle, lorsque nous pensons aux investissements du gouvernement dans l'infrastructure, nous avons tendance à réfléchir aux déficits que nous avons en ce qui concerne les ponts, les égouts et d’autres types d'infrastructure. Ce que nous avançons, c'est qu’il faut également considérer cette infrastructure d'un point de vue social.
    Les carrefours communautaires sont essentiellement des centres communautaires où les organismes et les divers programmes peuvent se regrouper et offrir, sous forme de guichet unique, des services de garde d’enfants, des services d'emploi et des soins de santé primaires, le tout sous un même toit. Il faut investir pour construire ces carrefours. Nous croyons que cet investissement est aussi important qu'un investissement dans les ponts, les égouts et autres infrastructures lourdes, parce qu’il constitue essentiellement un moyen d’offrir aux gens des possibilités et des services directs.
    Mon autre point porte sur les avantages pour la collectivité. Si le gouvernement fédéral investit un dollar pour construire les mêmes choses, il pourrait également réfléchir à la façon de faire en sorte que ce dollar serve à offrir des débouchés à ceux qui sont le plus loin du marché du travail. Nous savons que dans les corps de métiers et dans le secteur de la construction, il y aura une forte demande, et une demande croissante, pour construire tout ce qu’il y a à construire. Nous pouvons envisager cela de deux façons. Nous pouvons continuer de faire venir ici des professionnels formés à l'étranger et d’offrir des programmes de travailleurs étrangers temporaires pour combler les besoins en main-d'œuvre, ou nous pouvons maximiser la contribution de notre population, qui ne demande pas mieux, dans le cadre de partenariats qui permettront de leur offrir des débouchés.
    Vous est-il possible de fusionner la réflexion dont vous nous faites part ici avec les idées de M. Bach?
    Tout à fait. En fait, nous menons actuellement la construction de l'Eglinton Crosstown, en partenariat avec Metrolinx, le gouvernement de l'Ontario et la Ville de Toronto, non seulement pour les métiers de la construction, mais aussi pour les métiers administratifs et techniques, ainsi que pour optimiser l'approvisionnement social. Metrolinx et ses partenaires vont consacrer beaucoup d'argent à la photocopie, aux services de messagerie et à toutes sortes de besoins commerciaux, et nous avons pour objectif de faire en sorte que les entreprises sociales, qui emploient en grand nombre des personnes ayant une déficience intellectuelle, puissent leur permettre d’occuper certains de ces emplois, de commencer sur le marché du travail et de développer ainsi un sentiment d'appartenance à leur collectivité.
    Monsieur Bach, serait-il possible de fusionner à ce système ce qu’a dit M. Barata au sujet des liens sociaux et familiaux?
    Tout à fait. Les familles ont besoin de savoir où aller dans leur collectivité pour obtenir des ressources, un soutien auxiliaire et de l'aide pour leur permettre de s’orienter dans la collectivité. Elles doivent se débrouiller dans les divers services de santé, les services sociaux et divers programmes de prestations. Elles ne trouvent pas à qui s’adresser, et c’est comme cela que leurs enfants aboutissent dans les services de l’aide à l’enfance ou des soins de longue durée. L'idée de carrefours communautaires comme lieux de soutien aux entreprises sociales et lieux de rassemblement des familles et de développement d'initiatives pour leur procurer un soutien social est la pièce manquante du casse-tête. Il ne s'agit pas de fournir des services directement, mais d’établir un lieu dans la collectivité où les gens peuvent se réunir pour trouver des solutions créatives dans leur collectivité locale.
    Nous avons besoin de stratégies adaptées au contexte local et il faut que le gouvernement fédéral ait des interactions avec les collectivités locales. Même si les transferts aux provinces sont importants, que ce soit pour le logement, les soins de santé ou les soins à domicile, nous avons besoin d'une relation directe entre le gouvernement fédéral et les collectivités locales pour les aider à trouver des solutions communautaires à l’échelle locale.
(0915)
    Merci.
    Je m’adresse à Mme Barrera ou à Mme Todorow, vous avez parlé du programme Logement d’abord, et vous avez parlé des locataires en ce qui a trait aux loyers fondés sur le revenu et au logement abordable. Croyez-vous que ces éléments ont directement affecté la situation du logement, et quelles précieuses idées votre organisation pourrait-elle proposer au Comité en matière de logement abordable? Je sais que vous avez parlé du programme Logement d’abord. Que suggérez-vous?
    Nous ne nous opposons pas au programme Logement d’abord. Nous disons qu'il ne répond aux besoins qu’en partie. Bon nombre de personnes qui ne sont pas à la rue ni dans les refuges ont également besoin d’un logement. Il y a des gens qui consacrent une part beaucoup trop grande de leur revenu à leur loyer. Il existe un écart entre ce qu'ils paient et ce qu'ils peuvent se permettre de payer. La SCHL affirme que le loyer ne devrait pas dépasser 30 % du revenu total d’un ménage. Un ménage qui doit consacrer 50 % de son revenu à son loyer risque de perdre son logement. Il va sans dire que le programme Logement d'abord est l’un des outils conçus pour faire face à la crise de l’itinérance et de l’abordabilité du logement au Canada, mais ce n'est pas le seul.
    Pour ce qui est de la prévention de l’itinérance, par exemple, notre clinique administre un programme d'avocats au service des locataires en Ontario. Nous fournissons des conseils sommaires et représentons parfois des locataires qui se retrouvent pour la plupart devant la Commission de la location immobilière parce qu'ils font face à un avis d’expulsion pour cause de loyer en retard. Dans de nombreux cas, la seule chose que nous pouvons faire consiste peut-être à négocier un plan de remboursement si le logement peut être durable. L’écart financier qui existe peut n’être qu’à court terme, et ainsi de suite. Dans la plupart des cas, cela ne fonctionne pas. Le locataire n’a tout simplement pas les moyens de payer son loyer et de subvenir à tous ses besoins de base. C'est la raison pour laquelle une prestation pour le logement pourrait représenter une bonne approche, mais nous ne pensons pas qu’elle constitue une solution à elle seule. Nous préférerions que les prestations pour le logement soient rattachées à la construction de logements locatifs afin que les gens puissent effectivement avoir les moyens de payer leur loyer.
    Les logements abordables qui sont construits dans le cadre du programme d'investissement dans le logement abordable ne sont pas abordables pour les personnes sur la liste d'attente qui sont sans abri, à moins qu'elles n’obtiennent une subvention supplémentaire pour le logement. Nous parlons ici des personnes les plus vulnérables de nos collectivités. Les gens qui sont admissibles à ces logements abordables construits au moyen de ces investissements doivent gagner environ 40 000 $ par année. À titre d'exemple, la moitié des locataires de TCHC ont des revenus inférieurs à 15 000 $ par année. La majorité des locataires de TCHC sont des bénéficiaires de l'aide sociale.
    Savez-vous ce qui est vraiment effrayant? La majorité des gens qui participent au programme Ontario au travail vivent dans des logements du secteur privé. Or, la composante d’allocation au logement de l'aide sociale est insuffisante pour payer un loyer moyen dans pratiquement toutes les collectivités de l'Ontario.
    Je vous remercie.
    Monsieur Long, la parole est à vous.
    Monsieur Bach, nous proposons à Saint John un projet pilote d'entreprise sociale en collaboration avec les banques alimentaires, qui accueillent des personnes handicapées en formation en entrepôt pour leur apprendre à contrôler les stocks. Tout le monde y trouve son compte, en commençant évidemment par les banques alimentaires, qui obtiennent ainsi un certain soutien, en plus d’aider les personnes handicapées qu’elles accueillent. Nous avons déjà entendu les témoignages de Mark Wafer, de Tim Hortons, et de Randy Lewis, de Walgreens, qui sont de remarquables exemples de personnes qui ont réussi à faire tomber ces obstacles.
    Encore une fois, nous sommes ici pour proposer des initiatives fédérales qui nous aideront à mettre au point une stratégie nationale de réduction de la pauvreté. Je reviens à vous: du point de vue du gouvernement fédéral, comment pouvons-nous contribuer à éliminer ces obstacles? Comment pouvons-nous aider les employeurs? Mark Wafer et Randy Lewis ont tous deux des enfants handicapés, et je pense que Mark lui-même est malentendant. Je vous demande quels sont les programmes qui pourraient vraiment aider ces gens.
    Je pense à un exemple très réussi dans le domaine de l'emploi, qui porte sur les infrastructures sociales, et c’est une initiative que nous menons pour les personnes autistes, avec l’aide du gouvernement fédéral, en partenariat avec l'Alliance canadienne des troubles du spectre autistique. Nous avons ciblé 20 collectivités de partout au pays où il manque une infrastructure qui assurerait la liaison entre les employeurs, du côté de la demande, et l'offre de main-d'œuvre. Une grande partie du rôle du gouvernement fédéral en matière d'emploi est axée sur l'offre, avec de nombreux programmes de formation, un fonds du gouvernement provincial, des programmes d’aide à l'emploi, et tout cela est très bien. Par contre, il y a un décalage entre les employeurs, qui cherchent des employés, et les stratégies en faveur de la diversité pour l’embauche de personnes handicapées dans les collectivités où elles se trouvent. Cette initiative, intitulée Ready, Willing and Able, permet d’assurer cette liaison. C'est l'infrastructure sociale entre les employeurs et les organismes d’aide à l'emploi. Cette initiative permet d'embaucher des personnes handicapées. Nous invitons les employeurs à produire, à travailler et à exécuter leur demande, et nous assurons ensuite la liaison avec le secteur de l'offre dans la collectivité. En moins de trois ans, nous avons ainsi facilité 2 000 embauches. Le coût par emploi pour le gouvernement fédéral représente la moitié du coût des autres programmes fédéraux d'emploi pour les personnes handicapées.
    C'est ce que j'entends par « pièces manquantes ». Nous avons besoin du gouvernement fédéral pour financer cette infrastructure, parce qu’il y a maintenant des employeurs des collectivités locales intéressés à embaucher des gens en raison de cette stratégie axée sur la demande, qui nous disent: « Vous savez, il y a notre employeur national ». Nous comptons maintenant près de 10 employeurs nationaux. Costco est l’un de ceux-là, et parce que nous sommes en mesure de travailler du côté de l'employeur, ils embauchent dans des collectivités de partout au pays. Si nous avions divisé nos efforts entre 13 stratégies provinciales-territoriales, cela n'aurait pas fonctionné. Il faut assurer une liaison entre les collectivités locales qui alimentent l'infrastructure nationale, afin de pouvoir partager les leçons apprises et échanger les renseignements de manière latérale. Il faudrait une conférence fédérale et interprovinciale de très grande envergure pour en arriver aux mêmes résultats. S'appuyer sur les collectivités pour assurer la liaison, partager les pratiques exemplaires et construire l'infrastructure dont elles ont besoin à l’échelle du pays. L'exemple des carrefours communautaires locaux est idéal.
(0920)
    En effet, nous en avons un à Saint John.
    Comment allons-nous relier les carrefours communautaires locaux dans l’ensemble du pays pour partager un modèle de pratiques exemplaires?
    J’aimerais poursuivre avec vous, si vous le voulez bien. Lorsque M. Sangha vous a interrogé, vous avez dit que le gouvernement fédéral avait besoin de relations directes plus étroites avec les collectivités locales. Je pense que c'est un thème dominant tout au long de notre étude. Dans mon cas à Saint John, lorsque je venais d’être élu député, j'avais un tas de bonnes idées, puis j’ai constaté qu’une grande partie des fonds fédéraux iraient à la province et qu’une fois-là, je n'avais plus beaucoup de contrôle sur la destination de ces fonds. Quelle est la solution selon vous? Comment voyez-vous le gouvernement fédéral s’harmoniser directement et établir des liens avec les collectivités locales, les municipalités et les villes?
    Il faut pour cela redéfinir la relation avec le secteur des organismes nationaux sans but lucratif, qui a été sous-financé et qui est confronté à d’incroyables difficultés. Il existe une infrastructure qui assure ce fonctionnement. Par exemple, une de nos initiatives à Saint John concerne la prévention de la violence dans les familles de réfugiés immigrants, chez les personnes ayant une déficience intellectuelle et les femmes ayant des problèmes de santé mentale. C'est un énorme problème. Grâce à nos liens avec d'autres organismes nationaux sans but lucratif, appuyés par Condition féminine Canada, nous avons créé des lieux pour les femmes des Premières Nations, les Autochtones, les immigrantes et les réfugiées, ainsi que les femmes ayant des problèmes de santé mentale et intellectuelle, afin de mettre en place des stratégies novatrices pour lutter contre la prévention de la violence à Saint John, en lien avec d'autres collectivités du pays.
    Madame McConnell, vous avez parlé des priorités et de l'accent mis sur le logement, le transport en commun et les services de garde. Il est important de travailler en amont de la pauvreté. Pouvez-vous brièvement nous parler de l'importance d'un programme national d'apprentissage précoce dans cette optique? Il nous arrive, en tant que gouvernements, de préconiser des solutions qui visent à régler les problèmes sans s’attaquer aux causes. Nous ne travaillons pas en amont. Pouvez-vous nous parler rapidement de l'apprentissage précoce?
    Je crains qu’il ne vous ait pas laissé beaucoup de temps. Répondez très rapidement, je vous prie.
    C'est l'un des plus gros problèmes. Je dirais qu'il est essentiel, pour faire grandir une population en bonne santé, d'avoir des enfants qui apprennent au même niveau pour qu'ils puissent traiter avec leurs pairs et apporter leur contribution, tout au long de leur enfance. Cela signifie qu’il faut se doter dès le début de services de garde abordables et de bonne qualité. Je vous rappelle simplement qu'en Suède, le jour de votre accouchement, vous pouvez savoir où se trouvera votre garderie, et qu’au Québec, les services de garde sont offerts à un coût raisonnable.
    Nous avons 4 000 places en garderie à offrir à Toronto. Nous avons des places, mais personne pour se les permettre, parce qu’elles coûtent trop cher pour ceux qui ne reçoivent pas de subventions et que nous n'offrons pas assez de subventions. Voilà comment vous pourriez nous aider.
(0925)
    Merci beaucoup.
    Pour le mot de la fin, la parole est à M. Brassard.
    Merci, monsieur le président.
    L'un des problèmes, quand vient le temps d’élaborer une stratégie de réduction de la pauvreté, consiste à penser à long terme. De mon point de vue du moins, j’entrevois une crise imminente. L'éléphant dans la pièce que les gens remarquent mais dont ils ne veulent pas vraiment parler, c'est le niveau d’endettement des ménages au pays à l’heure actuelle. Il se situe actuellement à environ 1,70 $ pour chaque dollar.
    Si je me fie aux travaux de ce Comité et à certaines de mes recherches, les besoins du présent occupent une grande part de nos préoccupations actuelles. Comment pouvons-nous faire face aux besoins de l'avenir dans les circonstances actuelles? Beaucoup de gens vivent en situation de précarité financière. Si les taux d'intérêt augmentent, ils vont se retrouver dans des positions extrêmement délicates.
    Monsieur Barata, vous avez parlé de la prestation fiscale pour enfants. Un sondage mené par Nanos Research a récemment permis de constater que seulement 15 % de la prestation fiscale pour enfants est consacrée à des dépenses, et que 85 % de cette prestation va au remboursement de la dette des ménages. Nous nous leurrons donc peut-être si nous croyons qu’elle permettra à des gens d’échapper au cycle de la pauvreté.
    J'aimerais faire un tour de table. Il ne me reste que quatre minutes ou moins maintenant, mais comment pouvons-nous faire face à la crise imminente?
    Je vais vous soumettre quelques propositions très concrètes. Le gouvernement fédéral précédent a mis en place un régime enregistré d'épargne-invalidité pour assurer la sécurité économique future des personnes ayant un handicap important, mais un très grand nombre de ces personnes ne pourront pas en profiter. Ce que nous proposons, c'est que le gouvernement fédéral permette aux gens de se servir de ce régime comme d’un actif pour accéder au marché du logement. Certaines personnes ont déjà des actifs. Cela pourrait améliorer la sécurité de certaines des personnes les plus vulnérables. C'est un excellent instrument, mais pour de nombreuses personnes handicapées, il ne servira pas et l'actif ira aux membres de leur famille.
    J'aimerais faire de la publicité gratuite à Prospérité Canada. Je pense que l'inclusion financière et la littératie financière sont des éléments essentiels qui aident vraiment les familles à acquérir les outils dont elles ont besoin pour accéder d'abord à tous les programmes et prestations offerts par le régime fiscal et autrement. Il est également important de leur fournir des outils de planification financière et de leur donner accès à des outils financiers. Normalement, ce sont des produits qui s’adressent à des familles à revenu moyen et supérieur, tandis que ceux-ci doivent cibler davantage les familles à faible revenu. Je pense qu'il existe des moyens très rentables de tirer profit des partenariats communautaires de manière à aider les familles à reprendre le dessus.
    Je donne un exemple, et c'est une plus grande part des dons à des organismes comme Jeunes entreprises du Canada, qui offre des cours aux étudiants, leur procure une éducation en littératie financière afin qu'ils comprennent qu’il est très utile de garder leur situation financière en ordre. Notre proposition visant à stimuler davantage les dons de bienfaisance serait utile pour régler ce problème.
    Nous n'avons pas beaucoup parlé de gratuité du transport en commun. J’estime que c'est une importante composante des dépenses des familles. Je prendrais la taxe fédérale sur le transport en commun et je l’affecterais à un fonds pour des tarifs accessibles. Cela coûtera cher. Dans notre ville seulement, c'est 46 millions de dollars, mais c’est très utile pour bon nombre de gens, comme le fait que les enfants puissent voyager gratuitement dans les transports en commun, et c’est donc ce que nous avons fait.
    Eh bien, la clientèle avec laquelle nous traitons vit dans la pauvreté, et ces gens n’obtiennent en général pas de prêt pour l’achat d’une maison.
    J'ai suivi tout ce dossier personnellement, tout ce problème d’endettement, et je sais qu’une grande partie de cet endettement à Toronto est attribuable au prix élevé des logements qui force les gens à trop emprunter. Si les taux d'intérêt devaient augmenter de 2 % ou 3 %, bien des gens pourraient devoir renoncer à leur maison. Ces gens chercheront alors des logements locatifs, et il n'y en aura pas assez.
(0930)
    Je vous remercie.
    Monsieur Johnson, les chiffres que vous avez donnés au sujet des gains en capital ont été étonnants. Vous avez parlé en particulier des avantages pour Centraide. Pouvez-vous me donner des exemples d'autres organismes qui ont bénéficié de cette situation au regard des dons de bienfaisance?
    Je pense que tous les secteurs du secteur de la bienfaisance en ont profité, principalement dans les secteurs des soins de santé, de l'éducation des services sociaux, ainsi que les hôpitaux, les universités, les collèges, les organismes artistiques et culturels, les organismes de services sociaux comme Centraide et les organisations religieuses.
    Les bienfaits ont été globaux.
    Oui.
    Madame McConnell, vous avez brièvement parlé du programme « portes ouvertes » du maire. Pouvez-vous nous donner un exemple? Les frais d'aménagement, par exemple…
    Oui. Cela se produit au niveau des frais de raccordement, des redevances d'aménagement et un allégement d'impôt est parfois accordé pendant un certain temps. Cela a permis d’amasser environ 106 millions de dollars, et ces fonds iront à la construction de 1 750 unités locatives et de 641 propriétés immobilières. Vous pouvez constater que certains de ces incitatifs fiscaux nous permettent véritablement de livrer des maisons.
    Cela nous encourage à utiliser nos propres terrains, mais des promoteurs immobiliers travaillent en partenariat avec nous. Cette formule a été très fructueuse. Regent Park, que je représente, est peut-être le projet de réaménagement de terrains publics le plus réussi au Canada et même dans le monde. C'est assez remarquable.
    Merci beaucoup, tout le monde. Tout cela a été très instructif. Je suis très heureux de notre décision de reporter notre réunion et de revenir ici. Je tiens à vous remercier tous d'avoir passé du temps avec nous ce matin.
    Chers membres du Comité, nous allons nous interrompre quelques instants et reprendre nos travaux à 9 h 45 précisément.
(0930)

(0950)
    Bonjour. Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le lundi 13 juin 2016, le Comité reprend son étude des stratégies de réduction de la pauvreté.
    Nous y sommes. Nous en sommes au dernier témoignage que nous entendrons. Cette étude a été longue.
    Je vous remercie d'être ici. Je sais que nous avons dû refaire les horaires de plusieurs d'entre vous parce que nous étions bloqués à Saint John, au Nouveau-Brunswick, à cause de Wayne Long.
    M. Wayne Long: Ce n'était pas si mal.
    Le président: Non, ce n'était pas si mal, parce que vous étiez chez vous.
    Bienvenue à tous.
    De la ville de London, nous accueillons Sandra Datars Bere, directrice générale, Logement, Services sociaux et résidence Dearness. Bienvenue. En passant, j’ai fait mon cours secondaire à London.
    Du Parkdale Activity-Recreation Centre, nous accueillons Victor Willis, directeur exécutif. Du Social Planning and Research Council de Hamilton, nous recevons Deirdre Pike, planificatrice sociale principale, et Alana Baltzar, bénévole pour le projet Hamilton Organizing for Poverty Elimination. De Good Shepherd, nous accueillons Alan Whittle, directeur aux relations communautaires et à la planification.
    Bienvenue à tous. Nous avons un groupe complet et de nombreuses questions pour vous tous. Nous allons limiter les observations préliminaires à sept minutes. Si vous voyez ce témoin s’allumer, c'est ma façon pas très subtile d’annoncer que le temps est écoulé, pendant l'introduction comme pendant les questions. Nous offrons des services d’interprétation simultanée à ceux qui le désirent.
    Nous allons commencer tout de suite avec Sandra Datars Bere, de la ville de London.
    Bonjour et merci, monsieur le président, monsieur le vice-président et honorables membres du comité permanent de la Chambre des communes. Je suis heureuse d'avoir l'occasion de participer aux discussions de ce groupe et de poursuivre la réflexion sur les moyens de réduire la pauvreté.
    Comme vous le savez, je m'appelle Sandra Datars Bere et je suis directrice générale du Logement, des services sociaux et de la résidence Dearness, qui est un établissement de soins de longue durée installé dans la municipalité de London. Aujourd'hui, je voudrais vous parler d'un processus communautaire important qui s'est déroulé à London au cours de la dernière année et qui a mené au projet intitulé « London for All: A Roadmap to End Poverty ». C'est à mon avis une perspective communautaire novatrice de la lutte contre la pauvreté et qui met directement en jeu les personnes directement touchées par la pauvreté.
    Plus de 62 000 personnes vivent dans la pauvreté à London, de sorte que la municipalité affiche un taux de pauvreté supérieur à la moyenne nationale et à la moyenne provinciale. Le taux de pauvreté parmi les enfants et les jeunes de London a augmenté considérablement. En 2015, un enfant sur quatre vivait dans la pauvreté. Depuis 2006, le nombre d'habitants de London recevant de l'aide sociale a augmenté de 10 000 personnes. Les deux groupes sont particulièrement vulnérables: on parle de 24 % de nos enfants et d'environ 41 % des jeunes Autochtones.
    Ces chiffres sont évidemment désespérants. Notre maire, Matt Brown, a donc convoqué en septembre 2015 un groupe consultatif sur la pauvreté, qu'il a chargé, dans un délai de six mois, donc très vite, d'élaborer une série de recommandations axées sur l'action pour donner à la collectivité de London des moyens de régler plus efficacement les problèmes liés à la pauvreté. Les recommandations du rapport s'appuient sur la perspective adoptée par le groupe, qui a consisté à tenir compte des déterminants sociaux de la santé, des meilleures études disponibles, du bon travail déjà accompli dans la municipalité et de l'engagement profond de plus d'un millier de résidents.
    Le groupe s'est efforcé de regrouper des résidents de London pour mieux comprendre les répercussions collectives de la pauvreté et les possibilités de changement. Les membres du groupe ont participé à près d'une centaine de réunions et pris l'avis de plus d'un millier de résidents, surtout parmi les personnes de la municipalité vivant dans la pauvreté. Ils ont employé de multiples méthodes pour faire participer les résidents, notamment ceux qui avaient une expérience directe de la pauvreté, grâce à des conversations collectives, des sondages en ligne, des conversations organisées par des partenaires communautaires, et des délégations officielles auprès du groupe. L'objectif des 112 recommandations énoncées dans ce document est de permettre à London de réaliser son potentiel en mettant fin à la pauvreté en une génération.
    J'aimerais souligner la façon dont la pauvreté a été définie par la collectivité.
     La pauvreté est un problème communautaire. La pauvreté nous touche tous puisqu'une collectivité vit dans la pauvreté et ne peut atteindre son plein potentiel quand ses membres n'ont pas accès aux ressources économiques, sociales ou culturelles requises pour être des participants à part entière.
    La pauvreté est une question qui relève de l'équité. La pauvreté se répercute sur tout le monde, mais de façons différentes et pour des raisons différentes, dont la discrimination, le racisme et le sexisme.
    La pauvreté est une question qui relève des droits de la personne. Le principe des droits humains universels nous fait obligation, légalement et moralement, de garantir une société équitable et inclusive qui fournisse le nécessaire à chacun.
    La pauvreté relève aussi de la durabilité économique. À l'échelle collective, la pauvreté a des répercussions économiques, parce que les personnes et les familles vivant dans la pauvreté sont moins susceptibles de travailler et plus susceptibles d'avoir besoin de services d'urgence et de services sociaux.
    Les recommandations énoncées dans « London for All » passent par huit axes: la transformation des mentalités, le revenu et l'emploi, la santé, la prévention de l'itinérance et le logement, le transport, l'apprentissage précoce et l'éducation, la sécurité alimentaire, et la transformation du système. Le succès de la mise en oeuvre de ces recommandations suppose l'appui de toute la collectivité. Et cet appui sera organisé par le biais d'un organisme de mise en oeuvre, qui poursuivra la conversation en regroupant les partenaires, en dressant des plans et en supervisant leur application, et en veillant à une évaluation régulière du travail et à l'imputabilité de ses participants.
    À la base de cette perspective, il y a que chaque groupe de travail lié à la mise en oeuvre du plan sera composé d'au moins un tiers de résidents de London qui ont une expérience personnelle de la pauvreté. Des résidents ayant une expérience directe feront partie des principaux décideurs à chaque niveau de l'organisme de mise en oeuvre. La mise en oeuvre sera coordonnée par une personne ayant une expertise dans le travail communautaire et une autre qui aura une expérience vécue.
    Je prends quelques minutes de plus pour conclure mes remarques en vous expliquant que tout cela traduit le travail que vous faites dans le cadre de votre étude et en vous transmettant certaines réactions.
    Les recommandations énoncées au titre du logement dans « London for All » prévoient le développement d'une « culture de la pratique » autour de la mise en oeuvre d'une perspective axée d'abord sur le logement. Il s'agit d'encourager les propriétaires à garder leurs locataires, d'investir dans des « allocations de logement permanentes et souples favorisant la stabilité du logement » et de concrétiser des stratégies visant à « aider les femmes exposées au risque de l'itinérance à trouver un logement ».
(0955)
    En matière d'emploi, les auteurs de « London for All  recommandent que London devienne un site pilote pour le revenu de base garanti. Le personnel municipal a invité la population à des consultations à ce sujet, et les résultats en ont été communiqués à l'administration provinciale. Le plan prévoit également que la collectivité s'appuie sur le travail déjà accompli pour accélérer les programmes de formation et de perfectionnement des compétences pour répondre aux besoins du marché local.
    Le transport des résidents pour aller à leur travail, à leurs rendez-vous et à la garderie est un thème qui s'est révélé important. Parmi les recommandations, il a été question de réduire les frais de transport pour les personnes à faible revenu et de permettre aux enfants de moins de 12 ans de voyager gratuitement dans les transports en commun.
    Je suis heureuse de vous annoncer que, en décembre 2016, notre conseil municipal a appuyé cette recommandation et que, depuis le 1er janvier 2017, tous les enfants de 12 ans et moins prennent gratuitement les transports en commun. Par ailleurs, le conseil a également appuyé l'idée de fournir un laissez-passer d'autobus subventionné pour les résidents de London à faible revenu. Cette mesure entrera en vigueur en janvier prochain.
    Les auteurs de « London for All » recommandent également l'élaboration d'une stratégie locale coordonnée en matière de santé mentale et de toxicomanie qui soit fondée sur la promotion de la santé et sur des données probantes, mais aussi, j'insiste, élaborée par des membres de la collectivité ayant une expérience vécue. Cette recommandation a également été appuyée par le conseil municipal de London.
    Aujourd'hui plus que jamais, nous comprenons mieux les causes et les répercussions de la pauvreté. Le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux ont commencé à s'intéresser de plus près aux questions liées à la pauvreté, et, qui plus est, ils reconnaissent le rôle important que jouent les municipalités dans la vie quotidienne de leurs électeurs.
    La pauvreté affecte des personnes individuelles, mais le problème n'est pas seulement individuel. Nous en payons tous le prix, à la fois en coûts réels de services de santé et de services sociaux, mais aussi en fardeau psychologique et spirituel. Une grande ville et un grand pays sont des endroits où tout le monde a sa place, riches et pauvres, jeunes et vieux, nouveaux arrivants et résidents de longue date. Ce sont une ville et un pays où nous pouvons tous avoir un véritable sentiment d'appartenance et où tous les citoyens rassemblent leurs forces en direction d'un objectif commun.
    Ce n'est qu'en travaillant ensemble que nous saurons plus efficacement combler les fossés, supprimer les obstacles et mettre fin à la pauvreté pour les prochaines générations de Canadiens.
    Merci.
(1000)
    Merci beaucoup.
    Du Parkdale Activity-Recreation Centre, accueillons M. Willis, son directeur exécutif.
    Bonjour et merci à vous, monsieur le président, ainsi qu'aux membres du Comité de m'avoir invité aujourd'hui.
    Mes remarques et observations au sujet des effets de la pauvreté sur les personnes souffrant de troubles mentaux s'appuient sur mon expérience personnelle et professionnelle.
    Un revenu insuffisant est une expérience qui isole beaucoup de gens souffrant de troubles mentaux. Trop souvent, la débilitation attribuable aux symptômes et/ou au traitement est exacerbée par la pauvreté, au point que ce que l'on croit être un handicap invisible devient très évident en raison des conséquences manifestes et discernables de l'extrême pauvreté.
    J'ai une expérience directe de trois générations frappées par des traumatismes liés aux troubles mentaux. Ma mère a reçu un diagnostic de schizophrénie à l'âge de 22 ans et elle a été traitée jusqu'à sa mort à l'âge de 67 ans. Mon frère, âgé de 50 ans, a lutté presque toute sa vie sans être diagnostiqué ni traité et il vit actuellement dans la pauvreté, dans la rue. Mon fils a connu un premier épisode avant d'entrer à l'université, il a obtenu un diplôme et il vit maintenant seul et travaille.
    En tant que directeur exécutif du PARC depuis 1999, j'ai vu de mes yeux les effets de la pauvreté sur plusieurs centaines d'adultes souffrant de troubles mentaux. Le PARC est un organisme communautaire qui vient en aide aux personnes souffrant de troubles mentaux en leur fournissant des logements supervisés, un soutien individuel pour la gestion des cas graves, un soutien à l'emploi et des activités sociales de loisir pour réduire leur isolement. J'ai également été témoin de guérisons remarquables après une vie de traumatismes, de stigmates et de discrimination grâce à des activités utiles, à l'insertion sociale, à l'emploi et, surtout, à la possibilité de vivre dans un logement supervisé et sécuritaire.
    Lorsque j'y suis arrivé en 1999, le PARC employait l'équivalent d'une quinzaine de personnes à temps plein, dont quatre avaient une expérience vécue. Aujourd'hui, nous employons près d'une centaine de personnes, dont les deux tiers ont une expérience vécue.
    Il y a deux voies distinctes pour les personnes souffrant de troubles mentaux: un logement abordable et sûr, ou rien. En tant que Canadiens, je crois que nous voulons que les gens se rétablissent, vivent une vie constructive et participent à la vie sociale et économique. Nous avons des lois prévoyant des mesures d'accommodement pour les personnes handicapées, mais, comme l'a demandé ma collègue Lana Frado, directrice générale des services de soutien Sound Times, « À quoi peut bien ressembler une rampe d'accès pour la santé mentale? » Je propose que cette rampe permette de redonner espoir et dignité aux personnes souffrant de troubles mentaux.
    L'intersection entre déficience mentale et pauvreté se présente sous bien des formes. En Ontario, le système d'aide sociale fournit un soutien au revenu à deux égards: une allocation couvrant les frais nécessaires à une vie autonome et l'accès à des ordonnances médicales permettant une vie autonome. Dans le cadre du soutien au revenu, il y a une allocation de logement. L'allocation de logement de l'Ontario est de 479 $, ce qui, dans beaucoup de municipalités, est largement insuffisant pour obtenir un logement sûr et abordable. Au PARC, toutes les personnes que nous aidons à vivre dans un logement privé utilisent 90 % de leur revenu mensuel pour payer le loyer. Et, malgré cela, si l'une d'elles n'a pas payé son loyer à temps, elle est souvent expulsée et se retrouve à la merci d'un marché où les logements abordables sont extrêmement rares.
    Et le logement abordable ou supervisé, me direz-vous? À l'heure actuelle, la liste d'attente est de sept à dix ans. À Toronto, elle est de quatre à cinq ans.
    La crainte ou le risque de tomber dans l'itinérance donne le sentiment d'être piégé dans un système de logement peu favorable du point de vue de l'accessibilité en raison de la nature du marché privé où les logements abordables peuvent être insalubres ou dangereux. Des centaines de bâtiments dans la ville devraient depuis longtemps faire l'objet de réparations majeures, qu'il s'agisse des systèmes de chauffage, des ascenseurs, de la pression de l'eau, de trous ou de parasites. Par ailleurs, le choix limité en termes de logements abordables privés fait en sorte qu'on peut être éloigné de services de soins de santé, d'alimentation et de loisirs comme de possibilités d'emploi, et cela signifie donc d'autres frais pour utiliser le transport en commun.
    À Toronto, une carte de transport mensuelle coûte 147 $, et un simple ticket coûte 3 $. Cela suppose évidemment qu'il vous reste de l'argent après avoir payé vos aliments et les frais d'une ligne téléphonique ou d'un cellulaire.
    C'est cette corrélation de circonstances qui fait du tort et qui s'inscrit clairement dans le fossé de pauvreté que vivent les personnes souffrant de troubles mentaux et leurs familles.
    Quelle est la réponse? Je sais que cette réponse passe par un engagement central en matière de logements abordables et supervisés pour que les intéressés puissent compter sur une stabilité du logement comme point de départ d'autres gains du côté des possibilités sociales et économiques.
(1005)
    J'ai un exemple précis. Terry est arrivé au PARC en 1992. Il était sans abri et présentait les signes d'une crise psychologique majeure. Il a commencé à fréquenter notre centre d'accueil et à participer à des activités sociales. Un travailleur lui a trouvé un logement supervisé. Terry a commencé à faire du bénévolat au PARC. Par la suite, il a suivi une formation qui lui a permis d'obtenir une rémunération sous forme d'honoraires, ce qui lui a redonné confiance en lui et atténué sa pauvreté tout en perfectionnant ses compétences. Il a ensuite présenté sa candidature pour un poste à temps partiel et a fini par devenir un employé à temps plein, syndiqué. L'année dernière, il a déménagé de son petit studio à prix abordable pour s'installer dans un grand appartement privé à une chambre, où il y a de la place pour son chien et ses chats.
    Il y a un an, le Conseil consultatif pour le leadership en santé mentale et en lutte contre les dépendances a fixé un objectif minimum de 30 000 unités de logements supervisés. Les structures de soutien du revenu des personnes handicapées ne doivent pas enchâsser le droit de ne pas avoir assez pour vivre.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup, monsieur Willis.
    Passons au Social Planning and Research Council of Hamilton.
    Mesdames Deirdre Pike et Alana Baltzar, les sept prochaines minutes sont à vous.
    Merci, monsieur le président et honorables membres du Comité, de nous permettre aujourd'hui de vous proposer des idées et des recommandations dans le cadre de votre étude nationale sur les stratégies de lutte contre la pauvreté. Nous espérons ainsi alimenter la stratégie nationale dont notre pays a tant besoin et que ce gouvernement semble certainement déterminé à élaborer.
    Je sais que vous avez déjà entendu certains de nos partenaires à Hamilton. Vous avez reçu Laura Cattari, de la table ronde d'Hamilton pour la lutte contre la pauvreté. Très bientôt, vous entendrez un autre de nos partenaires importants, Alan Whittle, du plus important organisme de services sociaux d'Hamilton, Good Shepherd. À Hamilton, nous savons depuis des décennies qu'il est indispensable de collaborer avec des partenaires si l'on veut obtenir des résultats tangibles en matière de lutte contre la pauvreté. Le Social Planning and Research Council, ou SPRC, où je travaille depuis 15 ans à mener à bien des projets de lutte contre la pauvreté — 15 des 50 années d'existence de l'organisme en fait —, s'est toujours attelé à rassembler le maximum de partenaires autour de la table pour trouver des solutions à ces questions sociales complexes ou pernicieuses dans notre collectivité.
    C'est ici, je crois, que je peux vous présenter notre première recommandation. Toute stratégie de lutte contre la pauvreté ne peut réussir que si elle s'appuie sur la collaboration de tous les secteurs, et parfois sur des partenaires imprévus. Ma collègue Sandra ne vous a pas dit que, à London, les Soeurs de Saint-Joseph sont parmi les principales partenaires de la stratégie de lutte contre la pauvreté. C'est un exemple de partenaires imprévus qui ne sont pas toujours à la table.
    Quand il s'agit de lutte contre la pauvreté, comme on vous l'a dit, les premiers à inviter à la table sont ceux qui ont une expérience vécue. Les planificateurs sociaux et d'autres professionnels sont appelés des experts dans ce domaine, mais ce n'est pas notre point de vue. Nous savons que ce sont les personnes ayant une expérience directe qui sont le plus nécessaires pour réformer nos politiques et nos pratiques de lutte contre la pauvreté. C'est en écoutant attentivement ces personnes que nous pourrons acquérir l'empathie nécessaire pour trouver des solutions qui tiennent compte de leur dignité et de leur humanité malgré leur situation de faible revenu.
    Voici une deuxième recommandation: il faut s'assurer que les initiatives de lutte contre la pauvreté sont alimentées par l'expérience de ceux qui la vivent. C'est pourquoi je vous présente Alana Baltzar. Elle est coprésidente de HOPE, l'organisme d'Hamilton pour l'élimination de la pauvreté. Elle s'occupe de la production d'un journal de quartier. Elle est diplômée d'un collège privé. Cela n'a pas été un grand succès de ce côté-là, et voici une autre recommandation à examiner, à propos de l'éducation dans ces collèges privés. Alana est ici pour vous faire profiter de son expérience.
    Je vais commencer par la routine du matin. Nous en avons tous une: boire un café, un thé, prendre sa douche, etc. La plupart des gens trouvent ça normal. C'est une expérience agréable. Le matin, je me lève, je mets un café sur la table, et, même pas 30 secondes plus tard, je vois une coquerelle qui nage là-dedans, et vous pouvez imaginer ma réaction. C'est ce qui arrive quand on vit dans la pauvreté et qu'on habite dans un logement abordable, mais pas nécessairement très propre du point de vue des parasites.
    J'ai grandi dans la pauvreté à Hamilton. Ma mère recevait de l'aide sociale. Je suis inscrite au POSPH pour troubles mentaux, et, franchement, je pourrais vous faire la liste des diagnostics que j'ai reçus, mais ce serait trop long.
    Je voudrais dire aussi que, au sujet des collèges privés, je suis d'accord. J'ai dépensé 14 000 $ pour obtenir un diplôme qui ne me sert strictement à rien. Le papier vaut plus que le diplôme. Je ne peux obtenir aucun emploi avec ce diplôme. Personne ne va reconnaître un diplôme de collège privé. Là encore, ça frappe les personnes qui vivent dans la pauvreté, parce que ces écoles visent les personnes qui vivent dans la pauvreté. Elles leur disent par exemple « venez nous voir », « on vous donnera accès au RAFEO » et « on vous trouvera un emploi ». À ce sujet, je recommanderais de vérifier le taux de succès de ces collèges. Très franchement, vous verrez que les gens qui ont un emploi ne sont pas dans le domaine où ils ont étudié ou pour lequel ils ont obtenu l'aide du RAFEO, et ils doivent maintenant rembourser pour un diplôme qui ne sert à rien.
    La pauvreté est inexcusable. On fait tout pour avancer. Et on ne peut pas. Je me couche tous les soirs en ayant faim parce que, le plus souvent, je n'ai pas assez à manger. Le POSPH ne me donne pas assez pour vivre correctement une fois les factures payées, le téléphone, etc. J'aurai de la chance si j'ai assez pour m'acheter des tickets de bus pour aller du point A au point B faire mon travail de bénévole. Si je n'avais pas de l'aide communautaire pour faire mon travail de bénévole, je serais dans un état psychologique bien pire que maintenant.
    Il faut mettre fin à la pauvreté, parce que les enfants ne devraient pas aller à l'école tous les jours et être incapables d'apprendre parce que leur estomac n'arrête pas de gargouiller et qu'ils sont trop gênés pour dire à leur professeur qu'ils ne peuvent pas se concentrer parce qu'ils n'ont rien mangé depuis trois jours. Et c'est en partie à cause des parents. Quand on vit dans la pauvreté, les parents nous disent de ne rien dire au professeur, parce que, sinon, ça finit toujours par un appel à la DPJ.
(1010)
    Merci, Alana.
    Il y a deux ou trois autres choses que j'aimerais mentionner.
    Nous vous avons remis un excellent rapport que nous venons de terminer à Hamilton. Il s'agit d'un « bilan social ». L'occasion nous a été fournie de recueillir le témoignage de 29 personnes qui vivent la pauvreté au quotidien et qui ont profité de l'oreille attentive de gens influents dans notre communauté, notamment l'évêque catholique de Hamilton, le président de St. Joseph's Healthcare et la chef du département de journalisme du Mohawk College. Ces personnes ont eu le privilège de prendre connaissance de l'histoire de ces gens et d'interagir avec eux de façon différente. Par suite de cet exercice, nous avons des recommandations très solides à vous soumettre, que vous apprécierez, je crois.
    Parmi les éléments clés que nous avons notés figurait évidemment le lien entre la pauvreté et la santé mentale. L'une des recommandations était d'augmenter de façon significative les investissements dans le logement abordable, avec des mesures de soutien pour les personnes ayant des problèmes de santé mentale et des handicaps intellectuels, ainsi que des dépendances et d'autres troubles. Parmi les exemples dont j'aimerais vous faire part aujourd'hui figure la chorale que nous avons lancée en janvier. Nous l'appelons « Singin' Women ». Il s'agit d'un choeur de femmes sans-abri ou à risque de le devenir. Il est essentiel d'aborder ce débat en tenant compte des spécificités des genres. Ce faisant, nous reconnaissons la nécessité de mesures de soutien réellement essentielles comme celle-là.
    La mère d'Alana et moi-même chanterons dans la section des altos ce soir, pour notre premier spectacle dans le cadre d'un événement au centre-ville de Hamilton. Nous allons présenter trois pièces. Le choeur compte environ 15 femmes qui ont été sans-abri et qui présentent encore des risques très élevés à ce chapitre. Le fait d'unir leurs voix dans ce choeur est synonyme d'espoir, de passion, de paix et d'autonomie pour elles. Il s'agit du genre de soutien innovateur qui, à mon avis, peut faire une différence importante, mais ce n'est pas là l'objectif ultime. Ce qu'il faut en réalité, évidemment, ce sont des options de logement approprié et abordable et, encore une fois, les mesures de soutien nécessaires pour y parvenir.
    Enfin, j'aimerais que vous jetiez un coup d'oeil à la Stratégie des partenariats de lutte contre l'itinérance, à laquelle je participe comme coordonnatrice de Women's Housing Planning Collaborative à Hamilton. Je crois que chaque collectivité au pays doit pouvoir profiter des services d'un coordonnateur pour l'itinérance des femmes, capable d'envisager ce problème dans une optique non sexiste, les nouvelles directives comprises dans la Stratégie ayant déstabilisé à quelques égards le système de lutte contre l'itinérance des femmes à Hamilton. Les définitions utilisées font en sorte qu'il arrive souvent que les femmes ne respectent pas les critères particuliers de l'« itinérance chronique ou épisodique ». L'approche Logement d'abord laisse par conséquent de côté de nombreuses femmes. Je vous incite à envisager cela comme quelque chose de concret.
    Il y a de nombreux autres endroits dont nous pourrions parler plus tard, mais il vaut peut-être mieux réserver ce temps à des questions.
    Merci beaucoup de votre attention.
(1015)
    Merci à vous deux d'être ici aujourd'hui et de nous avoir fait part de votre expérience. Au sein de ce comité, nous essayons d'avoir une attitude d'ouverture, afin de bien nous imprégner des enjeux. L'une des raisons pour lesquelles nous nous déplaçons, c'est que nous pouvons voir concrètement des lieux et des programmes qui fonctionnent, plutôt que de seulement en entendre parler. Merci à toutes les deux.
    Je vais vous obtenir un billet pour le concert de la chorale de ce soir, si vous le voulez. Brian May, de Queen... vous devez vous y connaître en musique.
    Ce n'est pas la première fois que j'entends cela. La chose est maintenant consignée dans le procès-verbal, merci beaucoup. Lorsque je reçois des appels de télémarketing, je m'amuse à imiter l'accent britannique. En voyant mon nom, ceux qui appellent disent « Le Brian May...? » Je prends un très mauvais accent britannique et je leur dis « Oui », et ils raccrochent, confus.
    Nous allons passer immédiatement à M. Alan Whittle, directeur aux relations communautaires et à la planification de Good Shepherd.
    Merci beaucoup de me recevoir ici ce matin. C'est un grand plaisir pour moi d'être présent parmi vous, et j'espère que mon témoignage complétera bien les observations de ceux qui m'ont précédé.
    Il y a quatre choses en particulier dont je voudrais parler ce matin, à savoir: la disponibilité à long terme de logements véritablement abordables, l'importance de mesures de soutien appropriées pour résoudre le problème de l'itinérance, le rôle essentiel que jouent les refuges d'urgence dans notre communauté, et la notion qu'il n'existe pas de solution universelle.
    Tout d'abord, j'aimerais parler brièvement des organisations que je représente ici aujourd'hui. Good Shepherd vient en aide à toute une gamme de populations vulnérables et fournit des services et du soutien qui répondent aux besoins de ceux qui n'ont pas de logement approprié et qui manquent de nourriture, de vêtements et de nombreuses autres choses.
    Dans la région de Hamilton-Toronto, Good Shepherd comprend trois organismes de bienfaisance. À Toronto, nous avons les Good Shepherd Ministries et à Hamilton, le Good Shepherd Centre. Dans ces deux collectivités, nous avons aussi les Good Shepherd Non-Profit Homes. Aujourd'hui, je représente principalement les deux dernières, mais je sais que nombre de mes réflexions rejoignent celles des responsables de l'organisation à Toronto.
    Collectivement, les deux organismes que je représente aujourd'hui exploitent cinq refuges d'urgence à Hamilton: un pour les familles, un pour les jeunes, un pour les hommes seuls, un pour les femmes seules, et un pour les femmes et leurs enfants qui ont été victimes de violence familiale. Par ailleurs, nous offrons une vaste gamme de services, y compris des programmes de distribution de nourriture et de vêtements d'urgence, des services de conseils, des soins palliatifs, des services parentaux pour les jeunes mères, ainsi que du soutien individuel pour les personnes âgées et fragiles. Nous offrons en outre l'un des plus importants programmes communautaires en santé mentale dans la province.
    Outre les 392 logements abordables que nous possédons et que nous gérons nous-mêmes, nous avons des partenariats avec des propriétaires du secteur privé concernant 435 autres logements, surtout aux termes de baux principaux.
    Lorsque je parle de logement abordable, je tiens réellement à préciser dès le départ que je parle de cet aspect particulier de ce que j'appellerais, si je peux me permettre, le programme de logement abordable Canada-Ontario. Une partie de ce programme vise la construction de logements abordables, et c'est sur cela que je mettrai l'accent en premier.
    Je crois que depuis la Deuxième Guerre mondiale, il est évident que le logement abordable vient toujours au deuxième plan. La plupart du temps, il a joué le rôle de soupape, lorsqu'il y avait une crise, ou lorsque notre économie était en récession et avait besoin d'être relancée. À mon avis, les décisions qui sont prises le sont rarement à long terme et, comme dans le cadre du programme actuel, ne répondent pas aux besoins de ceux qui ont le plus besoin de logements réellement abordables.
    Laissez-moi illustrer cela au moyen de quelques exemples. Pendant toutes les décennies où je me suis occupé de logement, je n'ai jamais vu de programme dans ce pays qui exigeait que les logements construits au moyen d'une forme ou d'une autre de subventions, grâce à des contributions fédérales ou provinciales, demeurent à perpétuité dans le système de logements abordables. Certaines organisations, comme la nôtre, ont cela dans leur mandat, et elles continueront de veiller à la disponibilité de tels logements. Toutefois, dans le cadre du programme actuel, après 20 ans, il est possible dans nombre de cas de transformer ces logements abordables en logements en copropriété ou quelque chose d'autre.
    Le programme actuel est-il réellement abordable? Je crois que non, malheureusement. Il permet de fournir des logements réellement convenables, à des coûts légèrement inférieurs à ceux du marché, mais il ne répond pas, comme on l'a souligné précédemment je crois, aux besoins de ceux qui doivent absolument trouver un logement. Si je ne me trompe pas, un peu plus tôt ce matin, la représentante de la ville de Toronto mentionnait le fait que nombre des personnes qui participent au programme Ontario au travail ou au Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées sont essentiellement écartées du système, à moins qu'elles ne soient capables de trouver d'autres formes de soutien.
    Les subventions au logement et les allocations de logement sont-elles la réponse? Je crois qu'elles font partie de la solution, parce que, ne serait-ce que cela, elles apportent un élément de choix et de souplesse dans le système. Toutefois, elles ne sont pas suffisantes en soi. Par exemple, pendant des années, nous avons pu collaborer avec les propriétaires de nos logements locatifs du secteur privé pour y accueillir nombre des personnes que nous servons, partout dans la ville, des personnes qui autrement n'auraient jamais pu réussir à se loger, tout simplement parce que nous n'avons pas construit suffisamment de logements abordables.
    Dans le marché actuel du logement locatif et compte tenu des taux d'occupation, de nombreux propriétaires nous disent que même si nous avons eu un excellent partenariat par le passé, pendant des décennies dans certains cas, ils souhaitent se tourner vers un marché plus haut de gamme parce qu'ils peuvent en tirer plus de revenus. Cela fait en sorte que nous ne pouvons plus fournir suffisamment de logements, même pour les personnes pour lesquelles nous recevons des subventions, et que nous perdons dans les faits des logements pour lesquels nous pourrions payer les prix du marché grâce aux subventions.
(1020)
    Que faut-il faire? Je crois qu'il est maintenant temps pour les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux de collaborer avec les municipalités et les organismes comme le mien et d'autres similaires, en vue de créer dans ce pays un secteur du logement sans but lucratif qui est autosuffisant pour une large part. Je crois que, depuis trop longtemps, nous consacrons de l'argent pour résoudre ce problème, sans avoir réellement réfléchi à la question du logement abordable à long terme. Je crois que cela devrait être une priorité pour nous.
    Je vais maintenant me pencher sur la Stratégie des partenariats de lutte contre l'itinérance. Good Shepherd fonctionne de façon générale selon le modèle Logement d'abord depuis le début des années 1990. Grâce au financement qui provient principalement du gouvernement fédéral — merci —, nous avons pu élargir assez considérablement nos activités à ce chapitre. Toutefois, dans le cadre du programme actuel, aucun crédit ne peut être utilisé pour fournir des services de santé, et les mesures de soutien connexes sont limitées à une période de deux ans. Cela semble reposer sur l'hypothèse que ces mesures sont du ressort de la province. Quoi qu'il en soit, il est très difficile de coordonner les services à un seul palier de gouvernement, et lorsqu'il s'agit d'assurer la coordination entre les divers paliers de gouvernement, la tâche est encore plus grande pour une organisation. Nous sommes prêts à relever ce défi. Nous continuerons de le faire, mais je crois que lorsque nous créons ces programmes, nous devons réellement garder à l'esprit les personnes auxquelles les services sont destinés en fin de compte.
    J'aimerais donner un exemple des répercussions de certains des programmes de soutien du logement. Au cours de l'exercice précédent, nous avons intégré 30 nouveaux locataires dans notre programme destiné à contrer l'itinérance. Au cours des deux années précédant leur participation au programme, ces personnes et leur famille ont ensemble passé plus de 3 700 jours à l'hôpital à Hamilton. Cela représente plus de 5,5 millions de dollars en frais hospitaliers pour ces deux années à Hamilton, soit un peu plus de 2,75 millions de dollars pour les séjours en hôpital psychiatrique, sans parler des autres types de services et en se limitant uniquement aux séjours en hôpital psychiatrique. Depuis qu'elles participent au programme, ces mêmes 32 personnes ont passé au total 190 jours à l'hôpital, soit un coût annuel de 285 000 $ pour le système. Il s'agit d'une économie d'environ 2,5 millions de dollars pour cet aspect du système. Cela ne tient pas compte de tous les autres coûts d'hospitalisation, ni non plus des coûts des services de police, des tribunaux, des banques alimentaires et de toute la gamme de services normalement liés à ce genre d'intervention.
    J'aimerais maintenant parler rapidement des refuges d'urgence. Je sais que dans le cadre du programme actuel, l'accent est mis sur le logement d'abord, ce qui est la chose à faire, mais je crois que nous avons peut-être tendance à jeter le bébé avec l'eau du bain dans ce cas particulier. Lorsque cela est possible, oui, nous devons installer les personnes rapidement dans leur propre logement, mais pour nombre d'entre elles, cela n'est pas possible, ne serait-ce qu'en raison du nombre insuffisant de logements abordables disponibles. Nous avons besoin des refuges, et nous devons nous assurer qu'ils sont financés, particulièrement au chapitre des immobilisations. Il doit être possible de les améliorer. Si vous avez l'occasion de nous rendre visite à Hamilton, nous serons heureux de vous montrer certaines des améliorations importantes que nous avons pu faire, en nous éloignant de ce qui était essentiellement un système de maisons de travail, un système pénal, hérité du XIXe siècle.
    J'aimerais terminer en soulignant qu'il n'existe pas de solution universelle. Je vais vous donner un exemple dans le cadre d'un programme que nous menons dans la ville de Hamilton. Une famille allait se retrouver sans-abri parce que sa cuisinière ne fonctionnait plus. Généralement, les lignes directrices du programme ne permettent pas quelque chose d'aussi simple que l'achat d'une nouvelle cuisinière, même si cela pourrait faire en sorte que des personnes puissent demeurer chez elles. C'est donc dire que si nous disposons d'une telle souplesse, que ce soit pour résoudre les problèmes au chapitre des spécificités des genres, pour surmonter d'autres obstacles auxquels les gens font face, ou même quelque chose d'aussi simple que pour remplacer une cuisinière, il nous sera possible de prévenir l'itinérance dans nos communautés plutôt que de la provoquer.
    Merci.
(1025)
    Merci beaucoup, monsieur, et merci pour tout le bon travail que vous faites.
    Nous allons maintenant passer aux questions. Monsieur le député Poilievre, vous avez la parole.
    Merci beaucoup.
    Nous avons entendu différents points de vue d'organismes qui prétendent que notre filet de sécurité sociale est sous-financé, particulièrement dans le secteur du logement, et je m'interroge. Lorsque j'ai été élu pour la première fois, le gouvernement Martin a commencé à augmenter le financement au titre du logement. Le gouvernement Harper a par la suite maintenu ce financement, et pendant la grande récession mondiale, nous avons mis en place des mesures de stimulation économique, entre 2009 et 2011, qui ont permis d'injecter de façon ponctuelle des sommes massives, en plus du financement qui existait déjà. À l'échelle provinciale, en Ontario, il est souvent question de l'augmentation du financement qui va au logement. Les administrations municipales font des annonces similaires.
    Parlant d'administrations municipales, leurs revenus ont augmenté à un taux représentant deux fois et demie le taux combiné de l'inflation et de croissance de la population, pendant environ une décennie et demie, alors que les deux tiers des coûts des projets d'immobilisations ont été transférés aux administrations provinciales et fédérale. Il y a tout cet argent qui est injecté et qui fructifie, mais jamais personne ne vient nous dire « Nous avons suffisamment d'argent maintenant. Nous avons finalement réussi à combler nos besoins. » En fait, j'entends tout le contraire. Ces budgets semblent augmenter à des taux qui dépassent largement la croissance de la population et du coût de la vie, et il en va de même de la pénurie de fonds.
    J'ai de la difficulté à comprendre ce qui se passe, c'est-à-dire que malgré les budgets qui augmentent considérablement, les besoins semblent aussi en progression et loin de diminuer. Est-ce que quelqu'un peut m'expliquer ce paradoxe?
    Si je peux me permettre, ce qui est intéressant, c'est qu'en 1992, lorsque Paul Martin s'est serré la ceinture, je crois qu'il a du même coup limité la stratégie nationale de logement. Par la suite, en 1995 et plus tard, le dossier du logement a été transféré aux diverses provinces, puis aux municipalités, et les programmes qui devaient s'inscrire dans le prolongement de ces programmes de logement social n'ont pas vu le jour dans les faits. Toronto est un bon exemple à ce chapitre.
    Je crois qu'il y a un autre aspect que nous ne devons pas perdre de vue, en ce qui a trait aux personnes dont nous parlons, qui sont les plus vulnérables... Au départ, l'Accord sur les soins de santé compensait 50 % des coûts. Je crois que la proportion de financement du fédéral est maintenant d'environ 21 %, le reste étant principalement assumé par les provinces. Nous avons un réel problème de reddition de comptes et de suivi des sommes qui sont dépensées, du financement, et évidemment, de l'impact.
    Vous avez raison de dire que beaucoup d'argent est investi dans le système. Il y a aussi l'autre aspect, celui de l'argent qui sort du système et de l'endroit où il va. Je crois que nous avons eu certains exemples aujourd'hui d'investissements qui, lorsqu'ils ont été faits, étaient très appropriés, mais qui, lorsque nous avons abandonné l'idée de perpétuité, d'abordabilité, ont perdu de leur pertinence.
    Un autre aspect de la question du logement abordable est réellement désolant, à savoir que les logements qui sont offerts à 90 % de la valeur du marché sont considérés comme abordables, même si nous savons pertinemment bien que ce n'est pas le cas dans la plupart des municipalités.
    Vous abordez là le problème de la fongibilité, c'est-à-dire qu'il est difficile de savoir où va un dollar lorsqu'il est transféré d'un palier de gouvernement à un autre. Lorsque vous versez un verre d'eau dans une piscine, vous ne pouvez pas prendre le verre et récupérer la même eau. L'eau que vous avez versée s'est mélangée à celle de la piscine. Je me demande souvent où aboutissent tous ces transferts fédéraux.
    Nous avons, encore une fois, augmenté massivement les paiements de transfert fédéraux, depuis maintenant plus d'une décennie et demie. Il est vrai que certaines compressions ont été effectuées dans les années 1990, mais cela remonte à deux décennies. Depuis le début des années 2000, chaque année, le gouvernement fédéral a augmenté les transferts aux provinces plus rapidement que le taux combiné d'inflation et de croissance de la population; toutefois, les besoins des programmes financés à l'échelle provinciale semblent augmenter, toujours et toujours. Chaque fois qu'il y a un manque, les politiciens des divers paliers de gouvernement pointent du doigt les autres en disant « Ah, vous savez, vous ne me donnez pas assez » ou « Il y a eu des compressions il y a 25 ans et c'est pourquoi nous n'avons pas suffisamment d'argent aujourd'hui ».
    M. Whittle a soulevé un point très intéressant lorsqu'il a parlé de la complexité des différents paliers de gouvernement participant au même projet. Napoléon disait qu'il préférait avoir un général incompétent que deux compétents, parce qu'au moins il savait qui dirigeait les troupes. Croyez-vous que c'est là que se situe le problème? Y a-t-il trop de paliers de gouvernement qui participent au même effort, avec toutes les complications que cela entraîne, et qui nous empêchent de produire les résultats auxquels les personnes dans le besoin ont droit?
(1030)
    Pour répondre à votre question, je pense que nous sommes peut-être face à un problème. Je suis parfois appelé à parler à divers intervenants. Il y a l'intervenant A, qui s'attend à ce que vous respectiez certaines pratiques, et il y a l'intervenant B, qui s'attend à ce que vous vous conformiez à des pratiques en grande partie semblables, mais les pratiques ont leurs propres nuances. Pour un organisme comme le nôtre, il s'agit parfois de devoir reprendre la même information, mais de raconter l'histoire différemment. C'est ce genre de problème que nous avons.
    J'aimerais revenir rapidement sur le point que vous avez soulevé au sujet de l'écart. Si on examine la question — et je vais le faire sous l'angle des unités de logement qui ont été construites dans ce pays pendant la période qui a suivi la Seconde Guerre mondiale —, on constate qu'il s'agit très clairement de vagues. Parfois, il y en a passablement et parfois, il n'y a peut-être rien ou presque rien, très peu.
    Prenons comme exemple Hamilton. Il y a quelques années, la ville d'Hamilton a déterminé qu'elle devait produire en moyenne 300 unités de logement abordables par année. Pendant la majeure partie des années 1990 et des années 2000, elle n'y est pas parvenue. En fait, pratiquement aucune unité n'a été bâtie pendant cette période. Plus récemment, peut-être au cours des cinq dernières années, 300 unités pourraient avoir été construites. Nous sommes parvenus à faire sur une période de cinq ans ce que nous devions faire en une seule année.
    Oui, je me réjouis que des ressources supplémentaires puissent être affectées à ce dossier, mais nous sommes partis de si loin avec un déficit si énorme, et nous accusons un si grand retard.
    Merci.
    Ramesh, s'il vous plaît, vous avez six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à vous, les témoins, d'être venus aujourd'hui nous faire part de vos idées réfléchies pour aider le comité.
    Ma question s'adresse à Sandra Datars. Vous avez parlé du taux de pauvreté chez les enfants et des problèmes de transport associés aux problèmes de santé qui les touchent. Étant donné que le rapport comporte 112 recommandations, il y aurait lieu, à mon avis, que vous en remettiez une copie au comité.
    Ma question porte sur le coût de la vie ici, dans la région du Grand Toronto et à Peel, dans la région du Golden Horseshoe, partout. Le coût de la vie y est parmi les plus élevés au pays et il augmente. Les personnes à faible revenu ont plus de difficultés à joindre les deux bouts. Le coût des transports en commun a grimpé de 30 % entre 2009 et 2015, et vous avez déjà indiqué que le service est gratuit pour les enfants de moins de 12 ans depuis 2015. Quelles mesures votre association prend-elle pour régler les problèmes avec lesquels vous êtes aux prises et dont vous avez discuté aujourd'hui? Estimez-vous que ces problèmes puissent être éliminés?
(1035)
    Le transport est un énorme problème dans une collectivité comme la nôtre qui est dotée d'un réseau de transport. Les moyens de transport ne conduisent pas nécessairement les adultes à leur lieu de travail et les enfants, aux écoles.
    Notre conseil s'est engagé à débloquer des fonds dans son budget pluriannuel pour le développement des transports pour les enfants. Notre système de transports en commun était déjà gratuit pour les enfants de moins de cinq ans. Nous avons ajouté une somme de 150 000 $. Je sais bien que cela peut paraître peu, mais cette somme couvre la différence pour les enfants entre cinq et 12 ans. Nous avons aussi ajouté environ 1,2 million de dollars à notre budget pour nous pencher sur les personnes à faible revenu et les transports.
    Notre capacité à nous déplacer est l'un des plus grands enjeux dans notre collectivité. Cela empêche les gens d'avoir accès notamment à du soutien, à des services, à de la nourriture et à des vêtements. Nous continuons à devoir faire des transports... Dans une collectivité que beaucoup considèrent peut-être « riche », il y a des poches de pauvreté. Il y a des îlots de réalités difficiles. L'écart de plus en plus grand entre les nantis et les démunis dans notre collectivité ne nous laisse pas d'autre choix que d'injecter de l'argent dans les transports en commun pour soutenir les familles, y compris les enfants qui font partie de ces familles.
    Quelles mesures le gouvernement fédéral devrait-il, à votre avis, prendre pour régler ces problèmes et pouvez-vous faire des suggestions au comité?
    Je pense que le gouvernement fédéral nous a très bien appuyés en injectant l'argent de la taxe sur l'essence dans nos organisations de transports en commun. À mon avis, pour revenir sur une question déjà soulevée, on s'entend sur le fait que le concept des transports en commun ne se limite pas à bâtir l'infrastructure. Il s'agit aussi d'offrir des services, de s'assurer que les gens sont au courant que leur laissez-passer n'est pas que cela; c'est un outil qui les conduit là où ils peuvent avoir accès à des mesures de soutien.
    Outre dans le domaine du transport, avez-vous d'autres suggestions à faire concernant le logement?
    Bien sûr. J'ai apprécié les questions et réponses de mes collègues ici à la table.
    Pour revenir à une question soulevée par le député plus tôt, c'est dans nos collectivités que commence la réalité du logement. Dans la nôtre, nous avons besoin de logements sûrs, abordables et supervisés. Dans ma collectivité, beaucoup de logements sont construits en haut de l'échelle. Il s'agit de maisons très dispendieuses et de propriétés dont le loyer est élevé. Des logements se bâtissent dans notre collectivité et une partie du défi pour les gouvernements municipaux consiste à trouver un équilibre entre appuyer les membres de la collectivité qui veulent ce genre de logements — avec les services de soutien et l'infrastructure associés — et tenir compte du fait que la plupart des logements locatifs à l'extrémité inférieure de l'échelle du marché ne sont pas sûrs et pas nécessairement abordables et ne sont pas vraiment des milieux accueillants et formidables pour y vivre.
    Dans l'avenir, il faudra se pencher sur cette division dans les collectivités qui ne cesse de prendre de l'ampleur.
    Quelles mesures proposez-vous pour améliorer la situation de ceux qui vivent dans la pauvreté?
    Dans la ville de London, nous avons mis sur pied une société de développement des logements, la Housing Development Corporation, qui est indépendante. La ville de London en est l'actionnaire, mais c'est pour nous l'occasion de collaborer avec les partenaires du secteur privé et le secteur sans but lucratif pour construire des logements autrement que conformément aux « règles » — je le dis avec le plus profond respect — en la matière dans une structure municipale et de travailler en dehors des règles, ce qui nous permet de pousser un peu plus le développement et de publiquement contourner un peu les règles. Je ne devrais probablement pas parler ainsi — je me sens comme Deirdre en ce moment —, mais nous le ferions de façon à aborder les problèmes d'abordabilité ou la fin des ententes d'exploitation, dont il a été question ici, dans le cadre desquelles on devait fournir un logement plus longtemps et non seulement le transformer en copropriété une fois qu'on en avait fini.
    Notre capacité de le faire, et avec le soutien de notre conseil, veut dire que notre mode de collaboration avec les intervenants de nos collectivités est sans précédent. Il nous ferait plaisir de pouvoir partager cette expérience, dans l'avenir.
    Merci beaucoup.
    Madame Sansoucy, s'il vous plaît.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de contribuer aux travaux de notre comité.
    Ma première question s'adresse à la représentante de la Ville de London.
    Dans la Stratégie de réduction de la pauvreté de l'Ontario, on parle d'un programme de revenu de base. Dans votre présentation, vous avez dit que London souhaitait faire partie de ce projet pilote.
    Pourriez-vous me dire pourquoi vous envisagez le revenu de base comme une solution possible à la pauvreté?
(1040)

[Traduction]

    Comme je l'ai dit, bien des membres de notre collectivité vivent dans la pauvreté. Une personne célibataire bénéficiaire du programme Ontario au travail, le programme de soutien offert par la province de l'Ontario, que nous appuyons, touche 8 000 $ par année. C'est nettement insuffisant. Une garantie de revenu de base ou un projet de revenu de base envisagé par la province pourrait doubler ce montant et offrir aux personnes d'autres mesures de soutien. Il ne s'agit pas seulement de majorer le revenu, mais aussi d'appuyer les possibilités d'accès aux logements. Nous l'avons mentionné ici, le logement, c'est le premier morceau. Une fois le logement assuré, de l'aide sous forme de financement aide les personnes à s'occuper d'autres aspects.
    Pour la ville de London, c'est une question de s'assurer, et nous en avons parlé, que les gens vivant dans la pauvreté puissent choisir, avec du soutien, la façon de s'en sortir. Le système d'aide sociale, bien que j'en sois responsable dans ma collectivité et que je crois fermement au soutien qu'il offre, fait en sorte qu'en réalité les gens font des choix dans le cadre d'un certain système, et non d'un système qui leur accorde de l'argent ou du soutien pour faire leurs propres choix.
    Nous essayons d'intégrer ce concept dans notre système, mais je vais vous dire que nos systèmes sont fondés sur la bureaucratie. Je ne devrais probablement pas l'affirmer haut et fort, mais ils le sont. Ils sont fondés sur la bureaucratie et les règles et encadrés par des lignes directrices et diverses réalités. Un revenu de base permet aux gens de prendre l'argent qu'on leur remet et de l'utiliser pour aller chercher le soutien qu'ils veulent. Il ne vise pas seulement les bénéficiaires du programme Ontario au travail ou du Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées. Il vise à venir en aide à d'autres personnes, des gens qui sont des sources de soutien pour les enfants à la maison ou les parents âgés, des gens qui font partie de cette génération sandwich et qui doivent faire les deux en même temps. Le problème global ne se limite pas à l'aide sociale; il s'agit plutôt d'offrir des mesures de soutien du revenu à des gens qui en ont besoin et qui pourraient en profiter.

[Français]

     Effectivement, c'est une question de dignité humaine.
    Le gouvernement du Québec envisage de mettre en place un revenu minimum garanti. Plusieurs organisations, notamment les organisations qui représentent les personnes handicapées, craignent que ce soit une façon de couper dans les programmes actuels et, qu'au bout du compte, cela appauvrisse les gens, car ils perdraient certains avantages liés aux programmes actuels.
    Selon vous, comment ce revenu minimum garanti serait-il une amélioration et un complément par rapport aux programmes et aux services actuels?

[Traduction]

    Vous avez dit qu'il ne faut pas désavantager les gens en leur imposant un système, et ce point est très important; nous avons commencé à y réfléchir. Une partie du défi de faire part de notre intérêt à l'égard du projet pilote, en 2016, c'est que nous avons dû réfléchir à ce qu'est la réalité; en fait, le revenu, même s'il sera utile, ne tient pas nécessairement compte des mécanismes de soutien qui sont nécessaires pour aider une personne à aller de l'avant, qu'elle soit handicapée, qu'elle soit...
    C'était dans nos collectivités. À mon avis, la province de l'Ontario, si elle met en oeuvre le projet pilote, devra examiner la façon dont elle entoure les personnes qui bénéficient de mesures de soutien. Je ne pense pas qu'il suffit d'octroyer des fonds aux gens et de s'attendre à ce qu'ils s'en servent et agissent différemment. Loin de moi l'idée de manquer de respect ici. Ce que je veux dire, c'est qu'en réalité, nous avons tous encore besoin des mesures de soutien dans l'ensemble de nos interventions dans nos collectivités. Pour un projet pilote élaboré au sein de la collectivité, il faut collaborer avec les partenaires de la collectivité, respecter les besoins des gens et ne pas les désavantager. Les gens ne doivent pas être désavantagés; ils ne doivent rien perdre dans la foulée de la mise en place du projet pilote.

[Français]

    Merci.
    Ma prochaine question s'adresse aux représentants de la Ville d'Hamilton.
    Vous avez parlé de la Stratégie des partenariats de lutte contre l'itinérance, notamment en ce qui concerne les femmes. La stratégie actuelle accorde 60 % du budget au programme Logement d'abord. Au Québec, de plus en plus de gens qui travaillent sur le terrain pensent qu'il faut leur laisser le choix de l'approche à utiliser.
    Selon vous, une prochaine stratégie devrait-elle donner le choix aux communautés d'aller vers une approche plus généraliste ou vers une approche comme Logement d'abord?

[Traduction]

    Je pense que l'option est toujours bonne, et que les collectivités ont besoin de réponses adaptées à leur propre expérience et pourtant nous constatons, en particulier quand on applique l'égalité entre les sexes à cette question... À Hamilton, le financement novateur exceptionnel consenti par l'entremise de la SPLI nous a permis de demander à un coordonnateur d'examiner le système; nous avons échangé les résultats avec nos partenaires de London, car ils constatent qu'ils sont aux prises avec le même problème. À Waterloo et Niagara — ce sont toutes des villes ontariennes qui sont dans une certaine mesure rapprochées... Nous avons communiqué avec Deb Matthews, l'un de nos élus provinciaux, et lui avons demandé si nous pouvions mettre cette initiative en oeuvre en tant que région. Nous nous sommes entendus pour dire que les femmes ont besoin de certains moyens et mesures de soutien importants et nous en avons convenu.
    Je ne pense donc pas qu'il faut procéder collectivité par collectivité, mais j'estime que nous devons veiller à ce que chaque collectivité ait l'occasion de vraiment se concentrer sur les particularités des besoins des femmes quand il est question d'itinérance. Je pense que nous pouvons mettre cela sur pied. Ces projets pilotes, comme celui sur le revenu de base, ne sont pas aussi utiles s'il est impossible d'en augmenter l'efficacité d'une façon ou d'une autre. Je pense que cette approche régionale nous permettra de vraiment faire avancer les choses. J'espère que mes propos vous aident à comprendre la situation. C'est important.
(1045)
    Merci beaucoup.
    Nous cédons maintenant la parole au député Long qui dispose de six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à nos témoins.
    Je viens de Saint John–Rothesay dans le sud du Nouveau-Brunswick. Malheureusement, même si nous sommes deux villes au succès éclatant, nous détenons le palmarès de la pauvreté parmi les enfants, des enfants qui naissent avec une dépendance, de la violence envers les filles de moins de 12 ans, des femmes célibataires à faible revenu, de l'alphabétisation et de l'obésité. Nous avons nos défis. Nous parcourons le pays, de toute évidence, pour parvenir à élaborer une stratégie nationale permettant d'atténuer beaucoup de ces problèmes.
    Monsieur Whittle, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt vos propos au sujet de bien des aspects. Commençons par les refuges. Notre bureau sert des déjeuners aux hommes du refuge Outflow à Saint John. Je suis beaucoup attaché au refuge et aux hommes qui le fréquentent. Dans la perspective du gouvernement fédéral, ce qui me frustre, c'est qu'il nous est impossible d'obtenir beaucoup de fonds directs pour aider ces refuges, les gens qui ont échappé au filet de sécurité. Je vous demande de formuler une recommandation sur ce que le gouvernement fédéral devrait améliorer pour s'assurer que les plus vulnérables soient pris en charge dans nos refuges.
    Je vous remercie de la question. Je pense que c'est une question incontournable qui comporte manifestement des enjeux à plusieurs niveaux.
    En fin de compte, c'est le gouvernement fédéral qui a la capacité de déterminer comment il veut dépenser l'argent.
    À votre avis, à quoi cela ressemble-t-il? Comment en envisagez-vous la mise en place?
    Par exemple, dans le cadre de la SPLI actuelle, tout comme vous l'avez fait avec Logement d'abord, vous pourriez simplement dire que telle part des fonds doit être affectée au maintien d'un genre de système de refuges. À mon avis, cette démarche serait la plus simple. Vous pourriez aussi intervenir directement, et je sais que d'autres personnes en ont déjà parlé, auprès des organisations et solliciter des propositions d'une façon ou d'une autre.
     Vous avez dit qu'il n'y a pas de solution universelle et cela me parle. Je pense qu'il est possible de travailler directement avec chacune des collectivités, car les collectivités savent ce dont elles ont besoin et chacune est différente.
    Vous avez aussi parlé d'une stratégie du logement sans but lucratif. Pouvez-vous préciser comment, à votre avis, cela fonctionnerait et serait financé?
    Je ne prétends pas avoir la réponse, mais je sais qu'ailleurs, des pays à économie développée ont trouvé des solutions. Malheureusement, trop souvent au Canada, nous avons essayé de régler le problème à coup de programmes comme les sociétés en commandite à dividendes et ceux en application du paragraphe 56.1 et de l'article 95. Ces programmes ont connu leur heure de gloire, mais beaucoup de ces logements font maintenant partie du parc de logements. Cela ne s'inscrit pas nécessairement dans une stratégie permanente visant à tenir compte des besoins des plus vulnérables de nos collectivités. Est-ce que nous tenons compte de cet aspect?
    Il y en a tellement, en particulier ceux d'organismes sans but lucratif, qui injectent des capitaux propres dans leurs projets. Nous pourrions peut-être trouver une façon de mobiliser cela. Ceux d'entre nous qui sont créatifs se feraient un plaisir de relever ce défi et de trouver une façon de construire plus de logements sans solliciter plus d'argent aux échelons supérieurs du gouvernement.
(1050)
    Merci.
    Madame Datars Bere, votre plan de réduction de la pauvreté comporte huit piliers dont le dernier vise à changer le système. Pouvez-vous préciser ce que vous entendez par changer le système?
    À London, même si d'autres municipalités cherchent à rectifier la situation, si une personne a besoin d'aide au titre des programmes de logement, d'assistance sociale, de soutien à la garde d'enfants et de sécurité alimentaire, elle devra probablement frapper à sept portes. Dans les faits, il faut que les collectivités commencent à songer à tout intégrer, à faire passer le client, la personne, la famille en premier et à discuter de ce que cela signifie pour la personne en cause et du processus auquel elle doit se plier.
    Il est question d'intégrer les systèmes, celui du logement à celui de l'aide sociale. Logement d'abord est un principe auquel nous réfléchissons; donc, si nous nous attaquons d'abord au problème du logement, nous pourrons ensuite aborder les volets notamment de l'aide sociale et de la garde d'enfants. Beaucoup d'intervenants des collectivités viennent en aide en dehors du système, que ce soit par l'entremise d'organisations qui regroupent des gens ayant la foi ou des organismes locaux sans but lucratif. Il y aurait lieu de mettre au point un système qui éviterait aux gens de passer d'une banque alimentaire à l'autre à un repas communautaire.
    Tout tourne autour du système qui est excellent. Loin de moi l'idée qu'il n'est pas bon. Il est coordonné de bien des façons, mais les personnes au sein des systèmes qui vivent dans la pauvreté sont probablement les meilleurs coordonnateurs pour nous. Elles savent exactement à qui s'adresser pour accéder aux services dont elles ont besoin. Nous devons emboîter le pas.
    Merci.
    Je pense qu'il est indéniable que les trois paliers de gouvernement doivent être alignés pour assurer efficacement la prestation des stratégies de réduction de la pauvreté. Pouvez-vous illustrer à mon intention, par un exemple ou une histoire à succès, la façon dont la concordance entre les trois paliers de gouvernement a été fructueuse?
    Je peux vous donner un bon exemple, récent de plus. Notre collectivité est la sixième plus grande en Ontario et nous sommes la troisième en liste à avoir accueilli le plus grand nombre de nouveaux arrivants syriens. Nous avons constitué un groupe de travail composé de 40 représentants de divers organismes, des parties prenantes, des organisations communautaires et des trois paliers de gouvernement — les gouvernements provincial, fédéral et municipal. Nous avons accueilli 1 600 nouveaux arrivants en moins de trois mois et demi.
    Merveilleux.
    Comment s'assure-t-on à la ville de London que l'argent dépensé va aux bons organismes? J'ai connaissance d'un problème à Saint John où nous avons mené une approche collaborative avec Living Saint John. Le problème, c'était qu'il y avait de nombreux doublons. Des organismes similaires cherchaient tous les mêmes financements, si vous voulez. Si vous aviez une baguette magique, vous régleriez certainement cela.
    Comment la ville de London établit-elle les priorités?
    Très rapidement Sandra, je vous prie.
    Je peux répondre en quelques mots: en demandant à la communauté ce qu'elle veut et ensuite en décidant comment mettre cela en oeuvre.
    La difficulté c'est de demander aux organismes de céder ou de changer et très franchement c'est compliqué pour certains d'entre eux. C'est compréhensible étant donné qu'ils ont des employés, un statut et ce genre de choses, n'est-ce pas?
    Merci beaucoup.
    Monsieur Sangha, vous avez six minutes, je vous en prie.
    Merci, monsieur le président.
    Merci encore aux témoins d'être parmi nous aujourd'hui et pour la qualité de leurs témoignages.
    Ma première question s'adresse à vous, monsieur Willis. Vous avez parlé d'une maladie invisible, ou plutôt d'une invalidité invisible. Vous en avez une expérience à la fois personnelle et professionnelle. En tant qu'avocat, j'ai travaillé sur des demandes d'indemnisation liées à des accidents de véhicules automobiles et des préjudices corporels et ce genre de choses et je voyais beaucoup de gens atteints de dépression, d'anxiété et de trouble de stress post-traumatique, mais ceci — la schizophrénie — c'est vraiment très difficile comme type de... J'ai aussi eu la chance de représenter un patient schizophrène.
    Est-il préférable de maintenir ces personnes qui souffrent de schizophrénie dans des logements abordables, des logements sociaux, ou doivent-ils être avec leurs familles pour reprendre pied dans leur vie...?
(1055)
    Bien entendu, la véritable question c'est de savoir ce qui est le mieux pour chaque individu. Il me semble que plusieurs personnes autour de la table ont insisté sur la notion d'individu. Quel est son choix? Il y a aussi ceux qui sont concernés, les soignants de l'entourage, je me considère d'ailleurs comme tel. Que pensons-nous pouvoir faire pour soutenir cet individu?
    Je crois que l'idée, cependant, que... J'ai d'autres histoires que celle que j'ai déjà racontée, l'histoire d'une personne souffrant d'une maladie mentale grave qui a pu guérir, sortir du logement abordable ou du logement supervisé, qui a un coût, et qui a pu se remettre sur pied et devenir un membre productif de la société.
    L'autre aspect, je crois, de la réduction de la pauvreté c'est l'augmentation des possibilités pour les personnes d'accomplir leur potentiel. Il y a de nombreux obstacles. Pour vous donner un rapide exemple du point de vue de la réduction de la pauvreté, il y a en Ontario plus de 840 ou 850 règles pour l'aide sociale. Il est certainement très difficile au quotidien pour les travailleurs et pour les individus de comprendre la manière dont s'appliquent toutes ces règles. Et puis nous pouvons avoir des règles municipales et pourquoi pas des règles fédérales aussi.
    Je crois que l'un des sujets du jour c'est de savoir comment nous pouvons rationaliser ou intégrer nos actions pour qu'elles aient le plus d'effet possible. Comment les gens peuvent-ils faire les choix qui s'imposent pour exploiter au mieux les occasions et réaliser leur potentiel, ce qui constitue le désir de tous les Canadiens? Cela nécessite plusieurs choses: que la bonne porte soit ouverte au bon moment, ou que le bon programme soit accessible à la personne, ainsi que de disposer du temps nécessaire pour franchir ces étapes. Beaucoup de programmes sont très limités dans le temps, mais les gens ne vivent pas une trajectoire qui dure six ou neuf mois. Il leur faut souvent des années pour mieux comprendre ce qu'ils font, surtout pour des gens ayant un passé complexe en matière de santé mentale, des personnes qui peuvent avoir des déficiences de perception et avoir perdu des relations humaines.
    J'en reviens au traumatisme, la chose la plus importante à ce sujet. Vivre une crise de la santé mentale, ne plus comprendre comment la réalité vous affecte, comment elle affecte les membres de votre famille et ce que cela veut dire sur votre compréhension de vos droits en tant que personne, parce qu'il se peut que ces droits vous aient été retirés pendant un certain temps — on vous a mis à l'hôpital et on vous a soigné — toutes ces choses sont très traumatisantes. Vous avez parlé de TSPT, mais on peut y ajouter une sorte de psychose.
    Pour dénouer cela, pour commencer à reprendre confiance et à retrouver petit à petit de vraies bonnes relations, il faut davantage qu'un programme de neuf mois. Cela va prendre du temps. Il faut pour cela le genre de ressources communautaires dont nous disposons ici, qui permettent de véritablement entourer la personne et qui l'accompagnent dans la recherche de la voie qui lui permettra de reprendre pied dans la vie. L'horizon doit être la possibilité de guérison, c'est indispensable et nous devons concevoir des programmes qui permettent de faire de cet objectif un indicateur de réussite. Il ne s'agit pas de soins de garde. Il ne s'agit pas de s'occuper des gens. Il s'agit de donner aux gens des outils qui leur permettent de guérir et de devenir des membres productifs de la société.
    Lorsque vous pensez qu'ils ont atteint ce stade, qu'ils sont prêts à chercher un emploi. Pensez-vous qu'il soit mieux pour les employeurs d'embaucher ce genre de personnes, désormais prêtes pour le travail et qui seront très utiles et très loyales parce qu'elles savent que si elles obtiennent un emploi cela sera bon pour elles? Est-ce la meilleure manière de nous débarrasser de la pauvreté et s'agit-il d'une stratégie de réduction de la pauvreté? Est-ce celle qui peut fonctionner?
    Si vous voulez une recommandation, oui. Assurez-vous que les programmes permettent effectivement de sortir de la pauvreté, d'entrer dans l'emploi et de permettre de faire des choix et de participer pleinement à la société.
    Nous savons que d'avoir une activité ayant du sens et un emploi, cela fonctionne. Nous avons aussi évoqué le revenu garanti et quelques-uns des autres outils dont nous disposons. Ces outils contribuent à la création des plateformes ou des rampes dont j'ai parlé tout à l'heure, mais il nous faut décrire la rampe en question. Les ingénieurs ont conçu une rampe pour les fauteuils roulants. Il nous faut mettre au point la rampe pour la santé mentale afin que les gens ne retombent pas dans la pauvreté, surtout si elles connaissent des difficultés occasionnelles. Cela implique un système d'assurance approprié. Cela signifie que le système de soins de santé doit être en mesure de venir en aide aux personnes de façon adaptée, de les remettre sur pied et de leur permettre de guérir.
(1100)
    Merci beaucoup.
    Nous allons passer à M. Brassard, pour six minutes.
    Merci, monsieur le président. Je suis un invité dans ce comité. Je n'ai pas eu l'occasion de voyager dans le pays comme les autres membres du comité. Je sais que nous arrivons à la fin de notre temps de discussion. Souvent lorsque des gens comparaissent devant un comité — c'est en tout cas mon expérience au comité des anciens combattants — ils vous disent ensuite qu'ils auraient aimé dire quelque chose.
    Vous pouvez vous disputer le temps de parole, mais je vais vous donner l'occasion de dire ce que vous regrettez de n'avoir pas encore dit à ce stade. Je vais commencer par M. Whittle.
    Vous savez, je crois que je suis venu ici principalement pour parler de logement et de mon expérience dans ce domaine et je crois avoir dit à peu près ce que je voulais dire à ce sujet. Je crois que la seule chose que je voudrais ajouter, c'est que l'existence des sans-abri n'est pas un défaut, ce n'est pas un état permanent. C'est quelque chose que nous pouvons résoudre pour chacune de nos familles, de nos voisins ou des membres de notre communauté.
    Je veux dire clairement que lorsque je parle des femmes sans-abri, je parle de femmes seules — pas de violence contre les femmes — 86 % d'entre elles ont des enfants mais n'y ont pas accès. Le logement permettrait de rassembler les familles. Soyez clairs sur ce point. Il nous faut un salaire de subsistance et le gouvernement du Canada doit s'attaquer à la question de l'emploi précaire en soutenant un salaire de subsistance avec des augmentations liées au coût de la vie. Enfin, il nous faut des logements avec des services de soutien afin que les hommes, les femmes, les personnes transgenres et les personnes LGBTA puissent reconstruire leur vie.
    Je voudrais rapidement ajouter deux choses. Je me suis exprimée lors du bilan social que nous avons eu à Hamilton en février. Je suis également l'une des conteuses. C'est l'une de mes meilleures expériences, les gens qui écoutent sincèrement et qui veulent savoir ce que c'est de vivre dans la pauvreté. L'une des meilleures recommandations que je pourrais donner à quiconque veut un aperçu de ce qu'est la pauvreté, c'est d'accompagner quelqu'un à une banque d'alimentation. De les aider pour s'y rendre. Cela vous prendra la moitié de la journée. Il y a énormément d'attente.
    Je voudrais aussi parler du logement. Je vis dans un logement social, CityHousing Hamilton. Il m'a fallu trois mois pour obtenir une réparation, simplement pour qu'un plombier vienne voir pourquoi mon évier refoulait. Il a fallu que je me rende par deux fois à la direction de la maintenance pour demander pourquoi cela n'était pas résolu. J'ai été obligée de passer un accord avec eux disant que si le chef de la maintenance acceptait d'envoyer un plombier, il faudrait que je m'adresse à une autre personne de la maintenance pour les prochaines réparations, ce qui veut dire qu'ils en avaient marre de voir ma tête et de m'entendre revendiquer mes droits de locataire.
    Je vais être directe. Je sais que c'est du logement social, mais légalement, en tant que locataire, j'ai le droit à un logement sûr, un logement dans lequel je ne suis pas obligée de porter un masque sur le visage pour traverser mon couloir parce que ça empeste; je ne veux pas savoir ce qu'il y a dans cet air. J'ai ce droit et s'il le faut, je n'aurais pas de problèmes pour convoquer CityHousing à la Commission de la location immobilière.
    Le logement est un autre point crucial lorsque vous travaillez avec des personnes vulnérables. Avant j'étais dans le programme HOMES, dont Alan Whittle a parlé aujourd'hui. La principale raison pour laquelle j'ai quitté ce programme, c'est que mon directeur me harcelait. Ce harcèlement permanent a duré deux ans et demi. Good Shepherd n'a rien fait malgré mes demandes — sans vouloir vous offenser —parce que la relation, c'est ce dont il a parlé, avec les gestionnaires de propriété doit être maintenue. Si vous perdez cette relation, vous perdez le logement abordable, pas seulement pour ce locataire mais pour tous les locataires qui en dépendent.
    J'ai grandi dans une petite ville du sud de l'Ontario. Je suis contente de la réalité de ma vie dans une grande communauté urbaine depuis maintenant 30 ans, mais si vous me demandez où se trouve mon chez-moi, je vous dirais que c'est dans cette petite communauté, cette petite ville du sud de l'Ontario.
    J'utilise le mot « communauté » spécifiquement. Nous avons de formidables communautés qui font de grandes choses, mais nous avons perdu ce concept de communauté. Il y a eu beaucoup de débats sur ce dont nous avons besoin dans nos communautés, qu'il s'agisse de logements abordables ou d'aides pour les gens, mais nous avons besoin d'empathie dans nos communautés. Nous avons besoin d'aides pour les gens qui rencontrent des difficultés.
    J'ai récemment hébergé un événement communautaire très stimulant, lors duquel nous avons commencé à vraiment voir les différences de points de vue des gens. Dans notre communauté c'est difficile. Qu'il s'agisse de préoccupations au sujet du racisme ou ce genre de choses, elles s'expriment davantage. Le manque de communauté...
    Je suis consciente que ce n'est pas nécessairement une responsabilité fédérale ou provinciale. C'est davantage une responsabilité municipale. C'est à nous de nous emparer des ressources que nous recevons du gouvernement fédéral — comme vous l'avez dit, elles augmentent — et de les utiliser afin de soutenir l'approche communautaire par laquelle les gens aident les autres au sein de nos communautés et s'attaquent aux problèmes de pauvreté de la façon dont nous l'avons toujours fait, mais que nous avons oubliée. C'est ce que nous devons retrouver.
(1105)
    Monsieur Willis, ils vous ont laissé environ 30 secondes. Prenez donc une minute.
    C'est un groupe formidable.
    Très rapidement, je siège en tant que membre au Conseil consultatif pour le leadership en santé mentale et en lutte contre les dépendances de l'Ontario. Nous avons eu l'occasion d'examiner certains systèmes et les liens qui existent entre eux, donc je vous remercie pour ce que je n'ai pas pu dire.
    Je pense que l'occasion pour le gouvernement fédéral réside dans la manière dont les gens participent par le système des impôts et peuvent prétendre à des allocations. Une aide au logement serait immensément utile.
    L'autre partie c'est de reconnaître que lorsque les gens ont des revenus et selon la manière dont ils gagnent ces revenus, il doit y avoir une norme minimale qui nous permet de décider l'existence de la pauvreté. L'essentiel de nos systèmes d'aide au revenu est bien en deçà de tout seuil de faible revenu reconnu. Vous êtes en capacité de faire ce genre de recommandations — c'est dans vos compétences —, d'augmenter le seuil et d'améliorer les possibilités pour les individus qui vont s'en sortir et qui ont besoin de pouvoir utiliser les outils dont ils disposent. Une partie de cela réside dans le système des impôts. J'espère que vous y réfléchirez.
    Merci beaucoup.
    Vous alliez partager votre temps. Vous n'avez pas vraiment le temps. Je suis désolé mais vous avez dépassé...
    Pardonnez-moi, mais je voulais donner aux témoins cette possibilité, je vous demanderais donc d'avoir l'indulgence de permettre à M. Poilievre...
    Vous avez dépassé d'environ une minute, mais si vous avez une question très brève, je peux vous donner environ 30 secondes. Allez-y.
    Alana, je voulais vous interroger à propos des programmes d'aide aux personnes handicapées. Vous avez parlé du programme d'aide aux handicapés de l'Ontario. Lorsque les personnes concernées par ce programme trouvent un emploi et commencent à travailler, elles commencent à perdre ces aides, pas seulement des revenus, mais aussi des prestations pharmaceutiques et des aides au logement. Est-ce quelque chose qui pour vous a rendu le retour à la vie active plus difficile?
    Oui, tout à fait, lorsque vous passez de l'aide sociale à un travail rémunéré. Le POSPH est un peu meilleur en ce qui concerne les baisses d'aide sociale, mais vous ne recevez que 200 $. Une fois que vous atteignez les 200 $, vous commencez à avoir des déductions.
    Une fois que vous avez un revenu fixe, vous n'êtes plus éligibles pour les programmes médicaux et dentaires. C'est un problème et un obstacle, mais je dois dire que le plus grand obstacle pour moi en ce qui concerne le travail, c'est que bien que j'aie un diplôme de travailleuse sociale, si je veux un emploi dans le travail social, il y a des politiques de conflit d'intérêts qui vous empêchent de travailler dans les organismes dont vous dépendez pour les aides.
    J'aimerais beaucoup travailler pour Good Shepherd, mais puisque je suis une ancienne cliente de cet organisme, je n'ai pas le droit d'y postuler à un poste pendant encore neuf mois. Cela fera deux ans en tout.
    C'est un élément intéressant. Merci.
    Pour terminer, la parole est à Wayne Long.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie à nouveau tous ceux qui ont fait des exposés.
    Monsieur Whittle, pouvez-vous nous dire quelques mots des logements de transition et de leur importance? Je poserai la même question en ce qui concerne la ville de London.
    À Saint John, nous avons des refuges, les SPLI et les logements abordables, mais il n'y a pas de logements de transition. Pouvez-vous nous parler de l'importance des logements de transition et ce que nous pouvons faire au niveau fédéral, selon vous, pour mettre au point un robuste programme de logements de transition?
    C'est une question importante, car il me semble qu'il est dit dans le nouveau type de SPLI que les logements de transition ne pouvaient être aidés.
    Je crois que ce qui est important en matière de logements de transition c'est qu'ils ne sont pas nécessaires pour tout le monde, mais que pour certains groupes en particulier ils sont indispensables. Je vais prendre pour exemple les femmes de la rue, qui peuvent arriver avec des problèmes de dépendances et de santé mentale et qui ont été l'objet d'un commerce sexuel. Il peut y avoir tout un ensemble de difficultés qui nécessitent du temps pour réapprendre à vivre avec d'autres gens dans un contexte communautaire. De la même façon, les dépendances sont un autre domaine dans lequel je pense que les logements de transition peuvent être déterminants.
(1110)
    Deirdre, pourriez-vous me donner votre avis sur les logements de transition et leur importance?
    Bien sûr.
    Actuellement, à Hamilton nous avons, je crois, 69 unités dans l'une de nos installations de logements de transition pour femmes. Ce n'est pas financé par Priorité au logement. Ce n'est pas considéré comme un pilier de cette démarche, alors que c'est l'endroit où les femmes vont pouvoir recevoir toutes les aides dont nous avons parlé. La faible contrainte est l'élément le plus important. Nous venons de mettre en place un hébergement de nuit qui est encore moins contraignant en matière d'accessibilité. La tension constante à laquelle, je crois, vous serez confrontés, nous le sommes tous, c'est de savoir combien il faut investir dans les logements de transition afin qu'ils puissent vraiment héberger des gens, tout en ayant des contraintes d'accès faibles. Les deux sont nécessaires. Ce n'est pas l'un ou l'autre.
    Je suis frappé, alors que je parcours le pays et que je me rends dans des refuges et que je parle d'investissement dans les logements abordables, par le manque de logements de transition.
    Madame Datars Bere, pouvez-vous me parler de la ville de London et de vos ressources en matière de logements de transition et la nécessité selon vous que nous participions davantage au niveau fédéral?
    Comme l'ont dit mes collègues, nous avons un programme de SPLI. Nous avons des refuges. Nous sommes en train de réduire le nombre de lits en refuge parce que nous voulons les attribuer à une approche donnant la priorité au logement. Je crois que je vais reprendre les mots de ma collègue qui a dit qu'il s'agit de s'assurer qu'il y ait un lieu pour que les gens puissent y vivre et de les entourer d'aides à la transition qui prennent en compte les différentes situations personnelles.
    Je n'ai pas de doute sur le fait qu'il y a des gens qui ont besoin de logements de transition pendant un certain temps. Il y a aussi des gens qui choisissent de ne pas forcément s'installer dans un logement abordable parce qu'ils ne savent pas gérer la réalité de ce quotidien. Payer un loyer et toutes ces choses est plus difficile pour certaines personnes, donc il y aura toujours des personnes qui auront besoin de logements de transition. Nous essayons de parvenir à un modèle dans lequel les gens ont accès à Priorité au logement, ensuite nous les aidons et les entourons.
    Parfait.
    Monsieur White, en ce qui concerne Priorité au logement et Chez Soi, notre travail est-il satisfaisant? Y a-t-il des services enveloppants? Là encore nous faisons passer les gens dans les refuges puis dans les logements de transition puis dans des logements, mais sans ces aides, ils peuvent déraper et revenir en arrière. Est-ce que nous faisons ce qu'il faut au niveau fédéral pour nous assurer qu'il y a suffisamment de services enveloppants?
    En matière de programmes fédéraux? Non.
    Que pouvons-nous améliorer?
    Je prendrais pour exemple le fait que les services de soins de santé ne sont pas financés dans le cadre des SPLI. Ils sont limités à deux ans. Je crois que ma collègue a évoqué le problème des durées. Pour une personne, reprendre pied dans la vie est un parcours et il ne dure pas forcément deux ans.
    D'accord.
    Madame Pike, vouliez-vous parler des services enveloppants?
    Nous parlons de femmes qui s'installent dans un premier appartement après avoir vécu dans un refuge et un logement de transition. Elles sont tellement habituées à vivre dans des institutions que la compétence de cuisiner, par exemple, est perdue. Elles vivent un nouveau départ, comme une feuille blanche et ne savent pas où se trouve leur communauté naturelle. Les services enveloppants permettent de créer des réseaux, ils sont sociaux, ils sont encourageants et s'appliquent de façon très large. Je crois vraiment que nous devons élargir leur portée.
    Madame Datars Bere.
    La population qui connaît actuellement la plus forte hausse sur nos registres d'aide sociale dans la vile de London, ce sont les hommes âgés de 45 à 65 ans. Je comprends, Deirdre, votre argument sur les femmes, mais pour nous, savoir comment venir en aide à des individus qui travaillaient dans des secteurs qui ne leur offrent plus d'emplois aujourd'hui constitue un problème immense. Ce sont des célibataires qui n'ont pas forcément fait appel aux aides de la communauté auparavant et se trouvent désormais confrontés à de grandes difficultés.
    Je crois que nous devons aussi penser à la population vieillissante. Il y a aussi des aînés qui ont des problèmes de santé mentale qui ne leur permettent pas forcément de s'intégrer correctement dans des établissements de soins de longue durée ou qui ne peuvent pas y entrer. Ces personnes ont absolument besoin d'aide au logement et je pense qu'elles ne s'intègrent nulle part dans notre système.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Cela a été une très longue étude. La plus longue réalisée par ce comité jusqu'à présent. Les deux groupes de témoins de ce matin ont été absolument remarquables. C'est formidable de terminer de cette façon.
    Je crois pouvoir parler au nom de tous en disant que nous avons appris énormément de choses en parcourant le pays, en rencontrant des gens à Ottawa et en écoutant davantage que nous n'avons parlé. Je viens du secteur sans but lucratif et j'ai travaillé auprès d'organismes de bienfaisance comme la UCJG et le Club Garçons et Filles. J'ai fait cela pendant environ 10 ans, mais je peux dire que j'ai appris davantage de choses au cours de cette année en ce qui concerne les réalités de ce pays grâce à des gens comme vous. Merci d'avoir été parmi nous.
    Merci au comité pour son unité et sa compréhension de l'aspect non partisan de ces questions. C'est un sujet canadien avant tout. Et c'est un sujet dont nous espérons qu'un jour nos enfants ne connaîtront que dans les livres d'histoire.
    Merci à vous tous qui rendez possibles ces réunions et à ceux qui font tout pour que toutes ces informations soient conservées et organisées. J'ai hâte de lire le rapport que nous allons rendre très bientôt.
    Merci à tous.
    La séance est levée.
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