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PROC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre


NUMÉRO 028 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 14 juin 2016

[Enregistrement électronique]

(1105)

[Traduction]

    Bonjour. Nous entamons la séance 28 du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, en cette 1re session de la 42e législature. La séance est ouverte au public.
    Nous accueillons Pierre Paul-Hus brièvement. Il restera jusqu'à l'arrivée du membre attitré.
    J'ai un ou deux points à signaler au départ. Notre rapport sur les initiatives visant à favoriser une Chambre des communes plus propice à la vie de famille sera déposé demain, nous l'espérons. La visite de l'édifice de l'Ouest aura probablement lieu le mardi 21 juin. En prévision de cette visite, la greffière fera passer une feuille pour que vous indiquiez votre pointure. Les pantalons, vestes et casques de sécurité iront à tous, mais pour les bottes, il faut connaître votre pointure. Il y aura une présentation de 10 à 15 minutes le mardi 21, dans une semaine précisément.
    Mardi? Nous siégerons la semaine prochaine?
    Oui.
    Cela dépend du moment où nous recevrons le projet de loi C-14.
    Que nous sachions, la rencontre à l'édifice de l'Ouest aura lieu à cette heure-ci, soit 11 heures.
    Madame la greffière, avez-vous appris quelque chose au sujet de la séance d'information?
    Globalement, je crois que la visite et la séance d'information se suivront.
    La greffière va se renseigner. Elle n'est pas encore sûre.
    Restez aux aguets. Vous recevrez un courriel à ce sujet. Il semblerait que ce soit mardi, à l'heure habituelle des séances du Comité, peut-être à la fois pour la visite et la séance d'information. La greffière nous informera lorsqu'elle aura arrêté les détails.
    Je crois comprendre que tout le monde est d'accord pour étudier la motion de David.
    Arnold, voudriez-vous...?
    Oui. J'allais céder la parole à David.
    Ce que j'ai proposé, David, c'est que nous retirions votre version de la motion et la mienne. Nous allons lire la version modifiée que vous allez proposer.
    Merci, monsieur le président, et merci à vous, monsieur Chan.
    Je tiens à féliciter M. Chan et les autres membres du Comité. Vous vous rappellerez que j'ai fait une petite histoire au début, lorsque nous établissions les règles, et nous avons laissé cette question de côté pour adopter toutes les autres règles. Nous négocions depuis, car les mots pèsent lourd dans ce genre de choses. Je rappelle aux députés que nous avions un énorme problème, pendant la dernière législature, car le gouvernement proposait constamment des motions pour siéger à huis clos, sans excuse ni débat. C'était le huis clos et les députés ministériels pouvaient agir à leur guise. Il s'agit ici d'un effort en vue d'établir un certain cadre qui prévoit des critères à respecter pour que le Comité puisse légitimement siéger à huis clos. Une ou deux questions connexes se greffent à cela.
    Merci encore à tous. Je crois que nous avons un accord, mais nous verrons bien.
    Monsieur le président, j'entends lire la motion. Je retire officiellement tous mes documents antérieurs à celui-ci, et je présume que M. Chan fera de même. Nous repartirons à zéro. Il y a eu des consultations avec le gouvernement et l'opposition officielle. J'espère que nous réglerons enfin cette question avant de partir. Allons-y donc.
    Un instant, David, un instant.
    Désolé. Oui, je suis d'accord.
    Y a-t-il consentement unanime pour retirer toutes les motions antérieures qui portent sur ce sujet?
    D'accord.
    Très bien.
    Merci, monsieur le président, je vous suis reconnaissant.
    Voici la motion:
Que le Comité ne puisse se réunir à huis clos que dans les circonstances suivantes :

a) pour examiner la rémunération et les autres avantages offerts au personnel;
b) pour examiner les contrats et les négociations contractuelles;
c) pour examiner les relations de travail et les relations personnelles;
d) pour examiner un projet de rapport ou un ordre du jour;
e) pour participer à des séances d'information sur la sécurité nationale ou parlementaire;
f) pour examiner des questions nécessitant le respect de la vie privée ou la protection des renseignements personnels;
g) pour mener une enquête conformément au Code de conduite pour les députés de la Chambre des communes : harcèlement sexuel;
h) pour recevoir des conseils en matière de droit, administrateur ou de procédure de l'Administration de la Chambre des communes;
i) pour toute autre raison, avec le consentement unanime du Comité;
Que le président puisse prévoir la tenue à huis clos d'une totalité ou d'une partie d'une réunion pour les raisons susmentionnées;

Que toute motion portant sur une séance à huis clos soit soumise a un débat au cours duquel le motionnaire et un membre de chacun des autres partis reconnus seraient autorisés à intervenir sur celle-ci pendant un maximum de trois minutes chacun; que le motionnaire ait alors une minute pour répondre.
    Voilà la motion, monsieur le président.
(1110)
    Très bien.
    Pour cette motion sur le débat... S'agit-il des séances tenues à huis clos pour toutes ces raisons?
    Y a-t-il toujours débat?
    Conformément au dernier paragraphe, oui. Un débat de trois minutes.
    Par le passé, une motion pour siéger à huis clos était présentée, et le président... Lorsque j'étais président des Comptes publics, je n'avais d'autre choix que d'accepter la motion et de la mettre directement aux voix. Ce qui est proposé ici permet des échanges et l'opposition a la possibilité de tirer la sonnette d'alarme si elle pense que le gouvernement essaie de tricher.
    D'accord.
    Débat?
    Arnold, à vous.
    Je n'ai rien à ajouter, sinon que je suis disposé à procéder par appel au consentement unanime, à moins que l'opposition officielle n'ait quelque chose à ajouter.
    D'accord.
    Ceux qui sont en faveur?
    (La motion est adoptée.)
    Enfin, une vraie démocratie.
    Monsieur le président, j'ai une dernière chose à ajouter, si je peux.
    Je ne voulais pas soulever la question dans le cadre du débat, mais verbalement... La règle que nous venons d'adopter... Soit dit en passant, j'espère que d'autres comités vont s'inspirer de ce modèle. S'ils ont quelque chose de mieux, très bien, mais s'ils ne peuvent atteindre cette barre, j'espère qu'ils reprendront ce modèle, car ce comité-ci joue un rôle de premier plan au Parlement.
    Je vous signale, monsieur le président, que la motion dit:
Que le président puisse prévoir la tenue à huis clos d'une totalité ou d'une partie d'une réunion pour les raisons susmentionnées;
    J'espère seulement que, lorsque vous le ferez, vous indiquerez dans l'avis pour quelle raison nous devons siéger à huis clos, de façon que le public et nous aussi sachions quelle partie de la motion justifie que nous siégions directement à huis clos.
    Pour le reste, je tiens à remercier mes collègues.
    Pour ceux d'entre nous qui ont connu le dernier régime... Je ne vais pas m'éterniser, sinon pour dire que la démocratie était sacrifiée. C'est un vent de fraîcheur. Je tiens à remercier le gouvernement. Il a dit qu'il essayait de faire les choses différemment. Il nous a fallu un certain temps pour en arriver là, mais nous y sommes parvenus, et je remercie le gouvernement d'avoir accepté de considérer cette proposition et d'apporter un peu plus de démocratie dans nos délibérations. C'est tout à son honneur.
    Merci.
    Monsieur Chan, à vous.
    Je tiens également à remercier M. Christopherson d'avoir collaboré avec le gouvernement à ce propos. En fin de compte, nous pensions vraiment ce que nous avons dit.
    Je suis d'accord avec M. Christopherson au sujet du dernier point qu'il a fait valoir: la présidence devrait préciser la disposition sur laquelle il s'appuie pour proposer de siéger à huis clos. Il serait convenable que cela soit su avant que nous ne siégions à huis clos.
    Merci.
    Monsieur Richards, à vous.
    Merci, monsieur le président.
    Comme tous les membres du Comité doivent le savoir, j'ai présenté les avis d'un certain nombre de motions qui portent sur notre étude de la divulgation prématurée du contenu du projet de loi C-14.
    Pour situer le contexte, je vais lire mes motions. Ensuite, je passerai à l'une d'entre elles, monsieur le président:
     Voici la première:

Que, relativement à son étude sur la question de privilège relative à l’affaire de la divulgation prématurée du contenu du projet de loi C-14, Loi modifiant le Code criminel et apportant des modifications connexes à d'autres lois (aide médicale à mourir), et conformément aux directives sur la manipulation et la sauvegarde des renseignements et des biens classifiés et protégés et à l’exigence de maintenir une liste de distribution de tous les renseignements SECRETS, le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre demande que le gouvernement remette au Comité, au plus tard le 21 juin 2016, une liste de distribution complète de toutes les personnes qui ont eu accès à tout exemplaire du projet de loi C-14, Loi modifiant le Code criminel et apportant des modifications connexes à d'autres lois (aide médicale à mourir) avant son dépôt.
    Les autres motions se lisent ainsi: Que le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre invite la ministre de la Santé à se présenter au plus tard le 21 juin 2016 afin de répondre à toutes les questions liées à son étude sur la question de privilège relative à l'« affaire de la divulgation prématurée du contenu du projet de loi C-14... » La motion donne ensuite le reste du titre du projet de loi.
     Ensuite: Que le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre invite le chef de cabinet dupremier ministre à se présenter au plus tard le 21 juin 2016 afin de répondre à toutes les questions liées à son étude sur la question de privilège relative à l'« affaire de la divulgation prématurée du contenu du projet de loi C-14... ».
     Et encore: Que le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre invite le leader du gouvernement à la Chambre des communes à se présenter au plus tard le 21 juin 2016 afin de répondre à toutes les questions liées à son étude sur la question de privilège relative à « l’affaire de la divulgation prématurée du contenu du projet de loi C-14... ».
    Enfin: Que le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre invite le premier ministre à se présenter au plus tard le 21 juin 2016 afin de répondre à toutes les questions liées à son étude sur la question de privilège relative à « l’affaire de la divulgation prématurée du contenu du projet de loi C-14... ».
    Je voulais lire toutes ces motions intégralement pour situer le contexte de la motion que je vais proposer, monsieur le président, et je vous remercie de m'avoir permis de le faire.
    Je voudrais prendre quelques minutes pour m'expliquer. Il sera plus facile aux membres de comprendre la raison d'être de toutes ces motions avant que je ne propose la première. Puis, nous pourrons avoir quelques échanges et, je l'espère, faire une étude correcte de la question pour assurer une diligence raisonnable.
    Il a été dit clairement, lorsque la ministre de la Justice a comparu devant le Comité et a mentionné le fait à de nombreuses reprises, que son ministère n'était pas le seul ministère ou organisme qui connaissait le contenu du projet de loi avant sa présentation à la Chambre des communes. Cela n'a rien d'étonnant, mais elle a mentionné très précisément un certain nombre de fois la ministre de la Santé et son ministère et le Cabinet du premier ministre. Ces deux personnes ont été mentionnées très clairement.
    À ceux-là, j'ai ajouté le leader du gouvernement à la Chambre des communes simplement parce que nous savons tous que les leaders à la Chambre et leurs collaborateurs dirigent ou contrôlent ce qui est proposé à la Chambre des communes. De toute évidence, ils sont consultés et sont dans le cercle des initiés pour tout ce qui est inscrit au programme législatif du gouvernement. Mon choix semble donc logique.
    Je crois que, lorsqu'elle a comparu devant nous, la ministre a aussi parlé une fois ou deux du président du Conseil du Trésor, mais, en étudiant la question, je me suis dit que le Cabinet du premier ministre semblait celui qui était indiqué le plus souvent. Et en toute honnêteté, si je considère ceux qui sont le plus directement en cause, ce sont bien sûr le ministère de la Santé et le Cabinet du premier ministre, en plus du ministère de la Justice, qui ont dû s'occuper le plus du projet de loi.
    De plus, s'il s'agit des relations avec les médias et les journalistes, l'endroit le plus évident doit être un service de communication, je le soupçonne, car il traite souvent avec les médias et étudie les stratégies de communication. S'il y a eu une stratégie délibérée de divulgation, elle doit avoir été l'oeuvre de l'un de ces services.
(1115)
    Voilà pourquoi ni moi ni qui que ce soit d'autre dans l'opposition officielle ne donnons quelque indication que des personnes en particulier sont la source de la fuite, mais il y a certainement des gens qui ont des comptes à rendre pour ces ministères. Il conviendrait donc que, comme la ministre de la Justice, ces gens-là disent si un constat a été fait, si une enquête a été réalisée pour trouver la source de la fuite dans leur ministère ou organisme. Voilà pourquoi nous choisissons d'appeler ces témoins.
    La ministre a dit quelques fois qu'un certain nombre de personnes ont eu accès au projet de loi avant qu'il ne soit rendu public. L'article 502 des directives sur la manipulation et la sauvegarde des renseignements et des biens classifiés et protégés, ce qui englobe assurément les projets de loi avant leur présentation à la Chambre des communes, dispose qu'un des critères de la manipulation des renseignements secrets est qu'un numéro doit figurer sur chacune des copies. Il aurait dû y avoir un numéro sur chacune des copies et une liste de distribution. Clairement, il y a une liste de distribution pour ces documents, et c'est pourquoi nous croyons qu'elle doit être remise au Comité pour qu'il sache qui d'autre a pu avoir accès au projet de loi.
    À l'évidence, le travail que la Chambre des communes nous a confié par l'entremise du Président est de faire de notre mieux, avec toute la diligence voulue, pour trouver la source de la fuite, prévenir tout autre incident de cette nature et prendre toute mesure nécessaire à cet égard. Il est important que nous fassions de notre mieux pour apprendre qui a eu accès aux documents et faire témoigner les personnes qui ont des comptes à rendre — quiconque est honnête devrait dire quelles sont les sources les plus probables —, étant donné qu'il s'agirait de gens qui ont le plus de contacts avec les médias. Nous les convoquerions comme nous l'avons fait pour la ministre de la Justice. Les députés ministériels ont accepté que la ministre de la Justice comparaisse, et le même principe s'appliquerait certainement.
    Je ne peux comprendre que quiconque refuse que ces autres ministères et organismes qui ont eu pleinement accès au contenu du projet de loi comparaissent pour défendre leurs actes et rendent compte des efforts déployés pour enquêter et trouver la source de la fuite. Je serais porté à penser que personne, du côté gouvernemental, ne veut que des doutes planent au sujet du premier ministre ou de son cabinet ou de la ministre de la Santé, ou ne souhaite que nous fassions autre chose que convoquer un responsable du Cabinet du premier ministre, la ministre de la Santé et leurs ministères et cabinets. Nous tous, y compris les députés ministériels, devons souhaiter donner à ces personnes l'occasion de venir nous rendre compte des mesures prises, des enquêtes menées, de ce qu'elles ont fait.
    Si nous agissions autrement, nous laisserions planer des doutes au sujet du premier ministre, de son cabinet et de celui de la ministre de la Santé. Ce n'est certainement pas souhaitable et nous tenons à faire de notre mieux pour que ce genre d'incident ne se reproduise pas. Ceux qui n'ont rien à cacher s'empresseront de comparaître, et j'espère que c'est ce qui se produira.
    Monsieur le président, nous proposerons ces motions une à la fois, comme cela doit se faire, mais celle qu'il faut présenter d'abord est celle qui demande la production des listes de distribution. Voulez-vous que je la lise de nouveau? Elle a déjà été lue. Elle a fait l'objet d'un avis. Dois-je la lire encore une fois?
(1120)
    Non, ça va. Tout le monde a le texte.
    Tout le monde connaît l'idée contenue dans la motion. Je la propose donc. Comme je l'ai déjà expliqué, il est important que le Comité connaisse la liste de distribution pour savoir comment poursuivre son enquête.
    Cela a été très clair quand la ministre de la Justice a comparu. Elle a dit à plusieurs reprises pendant l'heure qu'ont duré son témoignage et les questions et réponses qui ont suivi, qu'un certain nombre d'autres organismes et ministères avaient accès au projet de loi, notamment le Cabinet du premier ministre et le ministère de la Santé. Il semblerait très logique, comme on l'a alors dit au Comité, que les prochaines étapes nous mènent de ce côté. Le travail du Comité serait beaucoup facilité s'il avait la liste de distribution. Voilà pourquoi je propose la motion.
    Très bien.
    J'ai les noms de M. Chan et de M. Schmale sur ma liste, mais avant de leur donner la parole, je répare un oubli. Je n'ai pas dit que, pour la visite de mardi, comme il s'agit d'une zone de construction, nos hôtes préfèrent que les membres du personnel ne viennent pas. L'invitation est réservée aux membres du Comité et à Joël. Ils ne veulent pas d'un groupe imposant à l'édifice de l'Ouest.
    Monsieur Chan.
    Je remercie M. Richards de son explication des cinq motions dont le Comité est saisi. Voici la réponse du gouvernement à ces motions.
    Je comprends votre position. Elle a été la mienne par le passé, monsieur Richards, comme député de l'opposition. Quand on se fait renvoyer une tâche comme celle-là, on a beaucoup de plaisir. C'est une occasion de... Même si nous prenons cette affaire extrêmement au sérieux, je comprends que vous veuillez chercher un peu partout à l'aveuglette
    Un rappel au Règlement, monsieur le président. Je trouve cela particulièrement déconcertant, pour dire le moins.
    Je me rétracte.
    Je n'aurais pas cru que le député décrirait ce travail comme une partie de plaisir. Il n'est certainement pas agréable pour les députés de l'opposition ni pour les députés ministériels de laisser planer des doutes sur le Cabinet du premier ministre.
    Très bien.
    Je retire ces propos.
    Nous essayons simplement de faire notre travail et il est très décevant que le député parle de plaisir à ce propos-là. Le Comité essaie de faire son travail et j'espère que les députés ministériels voudront participer.
(1125)
    Très bien. Ce n'est pas un rappel au Règlement, cependant.
    Monsieur Chan.
    Je retire ces propos.
    Je présente aussi des excuses pour mon absence de jeudi dernier. Malheureusement, je n'étais pas disponible pour assister à la comparution de la ministre de la Justice et procureure générale. Je tiens à remercier le collègue de M. Christopherson, Murray Rankin. J'ai dû rentrer dans ma circonscription pour une assemblée publique avec Murray sur l'aide médicale à mourir, et comme je ne peux pas prendre l'avion, il m'a fallu du temps pour revenir. Désolé, donc, de n'avoir pas été présent jeudi pour la déclaration de la ministre et les questions qui ont suivi. J'ai pu prendre connaissance de la transcription et suivre les délibérations en direct sur CPAC.
    Depuis qu'elle lui a été renvoyée, le Comité a consacré cinq séances à cette affaire. Nous avons entendu non seulement la ministre de la Justice et procureure générale, mais aussi le greffier intérimaire et le légiste et conseiller parlementaire. Jusqu'à maintenant, je n'ai rien vu qui donne à penser que le projet de loi comme tel a été divulgué avant sa présentation aux Communes.
    C'est précisément là où je veux en venir, monsieur Richards. La seule personne qui sait si elle a eu connaissance du contenu du projet de loi est la journaliste du Globe and Mail, Laura Stone. Pour quelque raison, vous ne l'avez pas convoquée. Elle doit bien savoir si elle avait le projet de loi ou non.
    Je le répète, nous prenons des détours pour arriver à la question de savoir si le projet de loi a été communiqué avant sa présentation à la Chambre des communes, après qu'il en a été donné avis.
    Dès le départ, j'ai dit que, pour qu'il y ait atteinte au privilège du député, le contenu du projet de loi a dû être en la possession d'une personne non autorisée à le connaître avant la présentation à la Chambre des communes.
    Comme vous l'avez entendu dans le témoignage de la ministre de la Justice, d'après l'article de Laura Stone publié dans le Globe and Mail, il pouvait s'agir d'une hypothèse éclairée. En réalité, certains reportages n'étaient pas forcément un reflet fidèle du contenu réel du projet de loi. La ministre a affirmé que son ministère avait respecté des protocoles très stricts et que, du côté du ministère, aucun manquement n'avait été signalé.
    À mon point de vue, rien ne prouve jusqu'à maintenant qu'il y a eu divulgation prématurée. Pour l'instant, je ne peux pas appuyer ces motions.
    À propos de deux motions en particulier, celles qui prévoient la convocation du chef de cabinet du premier ministre et de la directrice des communications, je m'oppose énergiquement à la convocation de quelque membre du personnel à moins de preuve directe qu'il soit en cause de quelque manière. Au bout du compte, ce ne sont pas eux qui ont des comptes à rendre, mais les responsables politiques. Pour moi, ces deux motions sont complètement et absolument inadmissibles.
    Voilà pourquoi je ne peux pas appuyer ces motions pour l'instant.
    Monsieur Schmale.
    Je suis déçu d'entendre cela. Je comprends ce que vous dites, mais je suis un peu déçu. Je sais que vous n'étiez pas ici, mais ces motions ont été rédigées directement à cause du témoignage de la ministre de la Justice.
    Nous sommes passablement convaincus que la ministre n'a pas été la source de la fuite. Mais elle nous a donné une indication pour poursuivre l'enquête. Il ne me semble pas acceptable de dire: « La ministre de la Justice a dit que ce n'était pas elle. Fin de l'histoire, passons à autre chose. » Nous devons poursuivre le travail, surtout à la lumière de son témoignage. Elle a dit en somme que d'autres gens avaient eu ce document, en dehors de nous.
    Nous acceptons ce témoignage. Voyons donc la liste. Voyons ce que nous pouvons vérifier par ailleurs. Comme ancien journaliste, je peux dire que le texte de l'article est plutôt direct. La journaliste affirme des faits plutôt que de se livrer à des spéculations. Cela m'indique qu'elle a eu une conversation avec quelqu'un. Comme ancien journaliste, je peux dire que, d'habitude, il s'agit de quelqu'un des services de communication. Nous reconnaissons qu'il y a une erreur mineure dans l'article, mais, comme M. Reid l'a fait remarquer — et je sais que vous n'étiez pas présent, monsieur Chan —, il pouvait s'agir d'une erreur qu'un journaliste peut facilement commettre. Il est possible que cette partie de l'article ait été mal notée, surtout si la journaliste a pris des notes manuscrites pendant la conversation.
    Ce qui me semble plus évident dans l'article, c'est que la journaliste énonce des faits, précise que certains détails ne se trouvent pas dans le projet de loi. J'en déduis qu'il y a là beaucoup plus de détails que ce que permettent des conjectures de journaliste. D'une façon ou d'une autre la journaliste a obtenu cette information, et il semble... Je le répète, il s'agit là d'éléments qui n'ont pas été retenus dans le projet de loi, que le projet de loi a exclus. C'est un détail très important. Le style est différent. Clairement, il y a anguille sous roche.
    La ministre dit qu'elle n'est pas la source de la fuite. Très bien, mais alors qui? Selon elle, il existe une liste. Voyons qui y figure. Peut-être n'y a-t-il rien de répréhensible, mais peut-être que oui. Il reste que cette affaire nous a été renvoyée, et il ne me semble pas acceptable de se contenter d'entendre un témoin avant de conclure. Il y a d'autres choses à vérifier. Vous voyez de quoi il s'agit. À mon sens, il serait très dangereux de ne pas creuser davantage. Nous devons voir s'il y a eu atteinte au privilège. Le texte de la journaliste donne clairement à penser qu'il y a un problème.
    En mettant un terme à l'enquête, surtout après avoir entendu un seul témoin, les députés ministériels ne lanceraient pas le bon message. Voyons d'abord la liste et prenons une décision en conséquence, voyons sur quoi il faut faire porter nos efforts. Mais dire non, nous en avons terminé, c'est refuser d'aller au fond des choses. C'est renoncer à savoir s'il y a eu atteinte au privilège.
    Faisons la lumière sur cette affaire, qui est très grave. Je trouverais très troublant que les députés ministériels rejettent cette motion. Nous sommes censés faire une enquête sérieuse. Agissons en conséquence. Faisons une enquête correcte et entendons les témoins qu'il faut. Voyons s'il y a un problème. Mais nous en tenir là et dire que c'est terminé après avoir entendu un seul témoin... Ce serait une grave erreur.
    Merci.
(1130)
    Sur ma liste, j'ai maintenant MM. Richards, Reid et Christopherson et Mme Sahota.
    M. Richards a la parole.
    Je voudrais réagir à certaines observations des députés ministériels.
    On dirait que trois arguments sont invoqués pour s'opposer à tout effort du Comité visant à accomplir le travail qui lui a été confié: examiner à fond une question de violation de privilège en faisant tout ce qui s'impose et en prenant l'affaire très au sérieux. À entendre les députés dire que nous y prenons plaisir, par exemple, je n'ai pas l'impression qu'ils prennent l'affaire au sérieux. Il est évident qu'ils ne le font pas, et cela m'inquiète.
    Les députés ministériels semblent invoquer trois arguments. Je vais réagir à chacun. Premièrement, il n'y aurait aucune preuve de la divulgation prématurée d'une partie importante du contenu du projet de loi. Comme mon collègue, M. Schmale, vient de le dire, il fallait que la journaliste en sache beaucoup plus long pour pouvoir dire très précisément ce que le projet de loi contenait ou non. Il fallait une connaissance approfondie du contenu du projet de loi. Cette personne était au courant. Voilà pourquoi il est tellement important de creuser l'affaire pour tirer une conclusion sur ce qui s'est passé.
    Le deuxième argument des députés ministériels semble être le suivant: « Le ministère de la Justice a respecté le protocole. » On dirait que c'est probablement le cas, mais la ministre a dit clairement dans son témoignage que d'autres entités et ministères étaient au courant. Elle a notamment parlé du Cabinet du premier ministre un certain nombre de fois et de la ministre de la Santé et de son ministère. Je ne vois pas pourquoi nous refuserions de leur donner pareillement l'occasion de dissiper les doutes qui planent sur eux. La seule raison que je peux déduire, si le gouvernement veut éviter ces témoignages, c'est qu'il a quelque chose à cacher. Je ne peux en concevoir aucune autre. Je voudrais croire, avec tous les Canadiens, que ce n'est pas le cas. Si les députés ministériels ne veulent pas faire de leur mieux pour trouver la source de la fuite et savoir ce qui s'est passé — c'est notre travail, c'est la tâche qu'on nous a confiée —, s'ils n'y sont pas disposés et ne veulent pas accorder la même courtoisie au personnel du Cabinet du premier ministre, ou encore s'ils s'opposent à ce que l'on convoque les membres du personnel, alors nous pouvons toujours accepter que le premier ministre comparaisse, si c'est ce qu'ils préfèrent. Il faut que quelqu'un rende des comptes pour ces ministères et organismes. Agir autrement, ce serait laisser planer des doutes, donnant l'impression qu'il y a quelque chose à cacher. C'est la seule chose qu'ils puissent faire.
    Le troisième argument qu'on semble avancer — il ne s'appliquerait pas à la motion à l'étude, mais il pourrait valoir pour les autres motions que j'ai indiquées —, c'est que le chef de cabinet et la directrice des communications du Cabinet du premier ministre ne doivent pas comparaître pour répondre aux questions. Quelqu'un doit venir répondre au nom du Cabinet du premier ministre. Comme je l'ai déjà dit tout à l'heure, le service des communications d'un ministère ou du Cabinet du premier ministre est celui dont le personnel a le plus de chance d'avoir des contacts avec les médias. Voilà pourquoi il y a lieu d'inviter des membres de ce personnel. Et le chef de cabinet doit répondre de ce qui se passe au Cabinet du premier ministre.
    Il nous a semblé qu'il était probablement acceptable de convoquer le chef de cabinet plutôt que le premier ministre lui-même. Nous comprenons qu'il a un horaire chargé et qu'il a beaucoup de fers au feu. Si les députés ministériels préfèrent que le premier ministre comparaisse, puisqu'ils ont dit qu'il fallait un représentant politique, alors, la seule possibilité, c'est le premier ministre. Si c'est ce qu'ils préfèrent, plutôt que la comparution du chef de cabinet ou de la directrice des communications, alors nous sommes d'accord, si le premier ministre doit rendre les comptes.
    J'espère que les députés ministériels ne voudront pas laisser planer des doutes au sujet du premier ministre ou de son cabinet, en refusant de donner à quelqu'un ou au premier ministre lui-même l'occasion de comparaître devant le Comité pour répondre au nom de son cabinet et donner l'assurance qu'il y a eu enquête ou qu'on a pris les mesures voulues pour trouver la source de la fuite au cabinet. S'il n'y a aucun effort pour faire la lumière, alors il semblera qu'il y a quelque chose à cacher, et je crois que personne ne veut laisser planer des doutes au sujet du premier ministre.
    Je voudrais revenir sur ces thèses et passer un peu de temps à les réfuter.
(1135)
    Premier point: rien ne prouverait qu'il y a eu divulgation prématurée. L'article du Globe and Mail contient des passages très précis qui traitent expressément d'éléments qui ne se trouvent pas dans le projet de loi, le premier étant, et je vais citer textuellement que « le projet de loi laissera de côté les personnes qui éprouvent des souffrances d'ordre psychologique, comme celles qui ont des troubles mentaux ».
    Voilà un des éléments. Il y en a un ou deux autres, mais je vais parler brièvement du premier d'abord, car la ministre de la Justice en a dit un mot lorsqu'elle a comparu. Selon elle, le projet de loi n'exclut pas explicitement ces personnes. Bien des gens soutiendraient que même si, en toute rigueur, elle a peut-être raison, ce serait là la conséquence concrète du texte législatif. C'est même l'une des raisons qui ont motivé l'opposition de certains contre le projet de loi. De façon générale, c'est ce que ferait normalement un journaliste dans un article, c'est-à-dire traiter des résultats concrets, puisque c'est ce que ses lecteurs veulent savoir. C'est de cela qu'il parlerait. Il peut s'agir dans ce cas-ci d'une interprétation de la journaliste à partir de faits ou de quelque chose que la source de la fuite lui a dit explicitement.
    Les deux autres points de l'article étaient les suivants:
Le projet de loi ne permettra pas le consentement anticipé, les demandes d'aide à mourir pour l'avenir, pour les personnes atteintes de maladies débilitantes comme la démence. Il n'y aura pas non plus d'exceptions pour les « mineurs matures » qui n'ont pas 18 ans mais souhaitent mettre fin à leurs jours.
    Et voici le troisième:

Le projet de loi du gouvernement adopte une approche beaucoup plus étroite que celle recommandée par un comité parlementaire mixte mis sur pied pour étudier la question pendant deux mois cet hiver.
    Il y a eu aussi un reportage de la CBC au National, le lendemain, qui donnait des détails précis encore inconnus des parlementaires et disait que le plan du gouvernement était de retarder l'étude des questions difficiles avant d'aborder le cas des personnes qui souffrent de maladies mentales et non de maladies physiques.
    Cela semble indiquer qu'il y a eu plus qu'une simple conversation. C'était peut-être une sorte de stratégie, et c'est pourquoi je pointe du doigt les gens des communications. Ce sont eux qui appliquent ou conçoivent ou mettent en oeuvre les stratégies médiatiques, qu'il s'agisse ou non des responsables des communications au Cabinet du premier ministre. La ministre de la Justice a dit clairement dans son témoignage que le Cabinet du premier ministre intervenait très directement dans ce dossier. Elle a été très claire. Il semble donc logique de supposer qu'il est intervenu très directement dans la stratégie de communication aussi. S'il s'agissait d'une fuite délibérée, elle faisait probablement partie de cette stratégie, au moins officieusement, et quelqu'un devait être au courant. La personne la plus probable serait la directrice des communications au Cabinet du premier ministre ou, au moins, c'est elle qui aurait à répondre des fonctionnaires ou employés qui se seraient livrés à ces activités.
    Je n'explique ces points que pour réitérer ceux que mon collègue, M. Reid, a fait valoir lorsque la ministre de la Justice a comparu, mais aussi le point de vue que mon collègue, M. Schmale, a exprimé aujourd'hui à propos de cette motion: pour que quelqu'un ait une connaissance aussi intime de ce qui ne se trouve pas dans le projet de loi... Ce n'est pas qu'un coup de sonde à l'aveuglette, une sorte de devinette. Ce sont des points très précis qui ne se trouvent pas dans le projet de loi. Cela semble indiquer qu'il fallait être au courant du contenu du projet de loi et pour cela, il fallait être sur la liste de distribution ou bénéficier d'une fuite. Comme toutes les copies étaient numérotées pour qu'on sache à qui elles appartenaient, il est évident qu'on peut retrouver des traces. Nous pourrions savoir si les choses se sont passées ainsi. Nous pourrions retrouver le propriétaire de la copie. S'il y a eu communication verbale avec un journaliste, nous pourrions au moins voir s'il y a eu des efforts pour vérifier si cela s'est produit au Cabinet du premier ministre, au bureau de la ministre de la Santé ou encore, comme une motion le dit, au bureau du leader du gouvernement à la Chambre, qui devait être aussi au courant du projet de loi, bien entendu.
(1140)
    Cela dit, si nous voulons savoir quels sont tous ceux qui avaient accès aux documents, cette motion est importante. Je remarque que les députés ministériels n'ont pas dit un mot de cette motion lorsqu'ils ont expliqué pourquoi ils s'opposent à ce que le Comité vérifie qui figure sur la liste de distribution pour savoir s'il a quelque chance d'aller au fond de cette affaire et pour voir quels témoins il pourrait convoquer, quelles avenues il pourrait emprunter et de quel côté il doit regarder. Chose certaine, j'espère qu'ils se raviseront et voudront s'efforcer le plus possible de faire preuve d'ouverture, de responsabilité et de transparence, qu'ils feront un effort pour déterminer ce qui s'est passé.
    L'affaire est très grave. C'est une question de privilège, et le Président de la Chambre des communes a établi qu'il y avait présomption d'atteinte au privilège. L'affaire est très sérieuse. Il ne faut pas la prendre à la légère ni en rire, comme les députés ministériels semblent vouloir le faire. Il ne faut pas la balayer du revers de la main, comme ils semblent essayer de le faire.
    La ministre de la Justice a été convoquée et s'est fait demander si elle ou son cabinet avaient fait des efforts pour vérifier si la fuite était venue du ministère. Elle a répondu que oui, mais elle a clairement indiqué au Comité où il devait chercher ensuite. Pourquoi les députés ministériels se refuseraient-ils à suivre ses indications? Bien sûr, elle a dû chercher à se protéger elle-même, mais je crois que nous devrions vouloir donner la même occasion de s'expliquer à ceux dont elle a parlé et qu'elle a peut-être même impliqués.
    Si les députés ministériels agissaient autrement, ils donneraient à tout Canadien raisonnable qui suit cette affaire l'impression que le gouvernement a quelque chose à cacher. Je ne crois pas qu'il veuille donner cette impression à qui que ce soit, à moins que, effectivement, il n'ait quelque chose à cacher. J'espère que ce n'est pas le cas.
    J'ai vraiment du mal à comprendre pourquoi ils refuseraient de prendre connaissance de la liste de distribution, pourquoi ils ne voudraient pas donner à ces autres personnes la même occasion de s'expliquer.
    Les députés ministériels ont dit qu'ils répugnaient à convoquer le chef de cabinet ou la directrice des communications, ajoutant qu'un représentant politique devrait être convoqué à leur place. Dans ce cas, il est évident qu'il faudrait alors convoquer le premier ministre.
    Je serais tout à fait disposé à examiner un amendement ou une motion des députés ministériels portant que le premier ministre soit convoqué à la place des responsables de son cabinet, mais assurément, quelqu'un doit répondre, pour le Cabinet du premier ministre, à des questions identiques à celles qui ont été posées à la ministre de la Justice. Qui cela doit-il être? Je suis ouvert à des échanges, à une discussion à ce sujet, mais il faut que quelqu'un rende des comptes. Le gouvernement ne veut certainement pas donner l'impression que le Cabinet du premier ministre refuse d'être ouvert, transparent et comptable aux Canadiens. Nous donnerons aux députés ministériels toutes les chances de prouver le contraire, et j'espère qu'ils le feront. Je ne crois pas qu'ils veuillent donner cette impression à quiconque. J'espère ne pas me tromper.
    Ce n'est sûrement pas une attitude raisonnable pour quiconque de soutenir: « Nous avons convoqué un témoin, la ministre de la Justice, et elle a dit que son ministère avait fait tout ce qu'il fallait. Par conséquent, nous devrions simplement classer l'affaire. » Pourquoi se donner la peine de faire le moindre effort? Ce n'est qu'une occasion pour l'opposition de s'amuser. Personne, en tout cas de ce côté-ci, ne trouve cela très drôle.
    L'affaire est très grave, les députés du Comité doivent la prendre au sérieux et ils doivent faire leur travail de leur mieux. Aller prétendre: « Nous avons entendu un témoin, la ministre, et même si elle a très explicitement dit qu'il y avait d'autres personnes que nous voudrions évidemment convoquer pour leur donner l'occasion de répondre aux mêmes questions, » mais nous pensons avoir fait notre travail, alors que la ministre de la Justice a dit très explicitement un certain nombre de fois que le Cabinet du premier ministre et la ministre de la Santé...
(1145)
    La conclusion qui semble évidente, c'est que la prochaine étape est de convoquer les personnes mentionnées et de leur poser les mêmes questions. S'il n'y a rien à cacher, ces personnes répondront qu'elles ont fait enquête et pris les mesures voulues, et elles pourront se justifier. Autrement, il y aura toujours un nuage de suspicion au-dessus de leur tête: les Canadiens douteront de leur intégrité et de leur honnêteté. On pensera qu'elles ont quelque chose à cacher. Je ne peux imaginer pourquoi les députés ministériels voudraient laisser les Canadiens dans ces doutes et cette suspicion au sujet de l'intégrité du premier ministre et de leur collègue, la ministre de la Santé. J'espère vraiment qu'ils y réfléchiront à deux fois et nous livreront une autre réaction, car ils ne donnent pas l'impression de prendre l'affaire le moindrement au sérieux. C'est très inquiétant. Si vous professez l'ouverture, la transparence et la responsabilité, alors il faut joindre le geste à la parole et ce n'est pas ce que vous semblez faire en ce moment. J'espère que les députés ministériels reconsidéreront leur opposition à ce que le Comité fasse son travail et nous donneront la possibilité de dissiper l'ombre et les doutes qui planent sur le premier ministre et son cabinet, sur la ministre de la Santé et son cabinet.
    La ministre de la Santé a dit que son cabinet avait fait ce qu'il fallait et n'avait pas ménagé ses efforts. La plupart des gens ont été assez convaincus que c'était sans doute le cas. Pourquoi refuser la même occasion à la ministre de la Santé, au Cabinet du premier ministre et au premier ministre lui-même de dissiper les doutes qui existent. Je ne peux imaginer aucun motif raisonnable de le faire.
    J'en reviens à l'idée du chef de cabinet et de la directrice des communications et au refus des députés ministériels de les convoquer. Monsieur le président, j'aimerais garder la parole, mais je vais peut-être demander aux députés ministériels, à M. Chan ou à quelqu'un d'autre qui voudrait réagir, qui ils proposent de convoquer, du Cabinet du premier ministre, pour donner au cabinet cette occasion. Si ce n'est pas le chef de cabinet, si ce n'est pas la directrice des communications... Ils disent que ce doit être un responsable politique. Le seul à qui je puisse penser, c'est le premier ministre. Préféreraient-ils que le premier ministre comparaisse devant le Comité. Qui proposent-ils comme témoin pour que le premier ministre et son cabinet aient la possibilité de se blanchir?
    Un député ministériel voudrait-il — si je peux poser la question et garder la parole, monsieur le président — répondre à la question et nous dire qui devrait rendre des comptes pour le Cabinet du premier ministre, si ce n'est pas le chef de cabinet ni la directrice des communications qui doivent être appelés à dire d'où vient la fuite? Veulent-ils que le premier ministre comparaisse? Un député ministériel voudrait-il répondre?
(1150)
    Quelqu'un voudrait répondre tout de suite?
    Ou préférez-vous attendre votre tour sur la liste, monsieur Chan?
    Non. Il y a une liste à suivre.
    Ce silence montre clairement que les objections ne portent pas tant sur le choix des personnes, mais plutôt sur l'idée que le premier ministre et son cabinet rendent compte de ce qui a pu se passer ou pas. Tirer toute autre conclusion... Il serait raisonnable de conclure qu'il y a quelque chose à cacher, à moins que quelqu'un ne réponde. Je n'arrive absolument pas à comprendre pourquoi le gouvernement voudrait laisser planer ces doutes ou ces suspicions.
    Je vais peut-être conclure là-dessus pour l'instant. À moins qu'il n'ait quelque chose à cacher, pourquoi le gouvernement voudrait-il laisser subsister chez les Canadiens le doute et la suspicion, des questions sur l'intégrité du premier ministre du Canada ou de son cabinet et de la ministre de la Santé ou de son cabinet? Je ne comprends pas. J'espère vraiment que le gouvernement se ravisera pour que nous ayons la possibilité d'écarter les soupçons ou que le Comité puisse aller au fond des choses. Autrement, il aura toujours dans l'esprit des Canadiens des doutes au sujet de l'intégrité du premier ministre.
    Monsieur Reid.
    Je voudrais expliquer pourquoi la motion à l'étude est si importante et pourquoi je suis d'avis que les membres du Comité devraient l'appuyer.
    Je reviendrai d'abord à ce que le Président a dit dans sa décision voulant qu'il y ait présomption d'atteinte au privilège. Lorsqu'il s'est prononcé, en avril, il répondait à une question de privilège soulevée le 14 avril par suite de la publication de l'article de Laura Stone dans le Globe and Mail du 12 avril. Le Président a pris grand soin d'indiquer que la question de la « source » — c'est le terme qu'il a employé — c'est-à-dire la provenance de la fuite devait être au centre de notre enquête, au lieu de ce dont nous discutons maintenant.
    À peu près au milieu de sa décision, il a dit, à propos d'un cas antérieur que: « qu’il n’y avait aucun doute quant à la source de la fuite ». C'était une fuite survenue en 2010. Il a souligné que la source de la fuite revêtait une importance clé. Je remarque dans les décisions d'autres présidents que, dans une situation semblable, en 2001, le Président Milliken a aussi insisté sur le fait qu'il était important de trouver la provenance, la source de la fuite. À l'époque, il s'agissait aussi d'un projet de loi C-36, la Loi antiterroriste.
    Monsieur le Président, vous étiez tout comme moi à la Chambre lorsque ce cas a surgi.
    C'était à l'époque aussi important aux yeux des Canadiens et ce projet de loi occupait autant de place dans leurs préoccupations que le projet de loi C-14 aujourd'hui. Le député de Winnipeg—Transcona, ce devait alors être Bill Blaikie, a soutenu que le Président devrait faire enquête.
    Le Président, tout en appréciant ce point de vue, a corrigé M. Blaikie en ces termes:
Dans ses remarques, le député de Winnipeg—Transcona a tenté d'aider la présidence en disant que c'était à la présidence de faire enquête sur cette affaire pour trouver le coupable et ainsi de suite. Je respecte évidemment son opinion à tous les égards, mais, dans ce cas précis, je crois qu'il a peut-être tort. Il y a un organe qui est bien équipé pour mener de telles enquêtes, soit le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre [...] Ainsi, je suis d'avis que cette question doit être renvoyée à ce comité.
    Bien sûr, il a ensuite conclu que comme il y avait présomption d'atteinte au privilège, le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre, le nôtre, devrait faire enquête sur l'affaire.
    Le point à souligner est qu'il y a un organe qui convient idéalement — j'aurais préféré qu'il ne dise pas, en anglais, « commit active inquisition », car notre objectif n'est pas de mener une inquisition à l'espagnole — pour faire enquête, pour prendre en charge les affaires qui nécessitent une enquête plus poussée.
    C'est le Comité qui fait les enquêtes. Lorsqu'un projet de loi fait l'objet d'une fuite, nous faisons enquête pour en connaître la source. Pour mieux souligner importance des enquêtes, j'en reviens encore au projet de loi C-36. Je pourrais peut-être attirer l'attention des membres du Comité sur les propos de Don Boudria, qui était alors leader libéral à la Chambre. Soyons clairs: les libéraux étaient au pouvoir, il était leader à la Chambre et un projet de loi de son gouvernement avait fait l'objet d'une fuite.
(1155)
    M. Boudria a eu les propos suivants avant que le Président ne se prononce. Il a dit, à propos du projet de loi C-36:
Samedi, j'ai vu des extraits du projet de loi dans la presse. Ils n'étaient pas tous exacts, mais certains l'étaient suffisamment pour que je m'inquiète, comme le député...
    ... il s'agissait d'un autre député qui avait soulevé la question...
... lorsqu'il a soulevé cette question à la Chambre. Je ne peux pas en dire beaucoup plus, si ce n'est que je présente mes excuses au nom du coupable. J'emploie ce terme parce que c'est celui qui me vient à l'esprit, étant donné le respect que j'éprouve à l'égard de notre institution. À mon sens, quiconque porte atteinte à ce respect est coupable d'une infraction. Le problème, c'est que nous ignorons qui est le coupable.
    Voilà donc le leader du gouvernement à la Chambre qui venait de constater une fuite, et il dit qu'il juge normal de trouver l'identité de l'auteur de la fuite.
    Voilà le premier point. Notre travail est de trouver cette personne, et c'est notre travail parce que les privilèges de la Chambre ont été violés. Cela ne fait pas partie de l'enquête qui vise à prédéterminer si la fuite a été délibérée ou non intentionnelle. J'ai ma propre opinion sur le sujet et je l'ai déjà expliquée au Comité. Cela ressemble beaucoup trop au genre d'information que j'aurais mise dans une fuite délibérée si j'avais voulu faire ce genre de choses. Autrement dit, ce qui a été publié dans les médias est une histoire très bien tournée. L'accent était mis sur le fait que le projet de loi n'allait pas assez loin plutôt que trop loin. C'est le genre de choses qu'on fait lorsqu'on utilise une fuite pour réorienter le débat et influencer le discours public.
    Cela dit, cela ne nous aide pas encore à orienter l'enquête. Nous savons, d'après le témoignage de la ministre de la Justice, que celle-ci a déclaré fermement et absolument... Quand je lui ai demandé simplement si elle était la source de la fuite, elle a répondu que non. Nous la croyons sur parole. Je la crois sur parole. Il m'a semblé que le reste de son témoignage indiquait très clairement... Je dois peser mes mots. Ce témoignage m'a indiqué, d'une façon qui m'a convaincu, selon mon jugement subjectif... C'est un peu différent de ce qu'on peut qualifier de clair, mais, subjectivement, j'ai acquis la conviction qu'elle n'était pas la source de la fuite.
    Sa volonté de comparaître, à un moment où elle est peut-être la personne la plus occupée au Canada, me dit qu'elle tenait à laver sa réputation et à faire valoir un point: quelle peut être la source, ce n'est pas moi et je ne sais pas qui c'est; autrement dit, la fuite ne vient pas de quelqu'un qui aurait agi avec mon autorisation active ou passive.
    J'accepte cette position, mais cela ne veut pas dire que l'acceptation, active ou passive, de quelqu'un d'autre n'est pas en cause. C'est même le scénario le plus probable. Lorsque l'on constate qu'il y a une répugnance à permettre la comparution de quelqu'un ou même à chercher les personnes qui sont peut-être responsables, qu'il s'agisse de fonctionnaires ou d'élus, cela indique une volonté de cacher la vérité.
    Pourquoi en irait-il ainsi, monsieur le président? De façon flagrante — c'est même la seule explication plausible à laquelle je peux penser —, il s'agissait d'une fuite délibérée. De plus, la recherche de la vérité a révélé que ce n'est pas une fuite qu'on peut reprocher à une personne qui se situe aux échelons inférieurs. Il n'y a pas de bouc émissaire qu'on puisse sacrifier. C'est la fin de l'histoire. Lorsqu'on ne peut trouver un simple soldat à sacrifier si un général est en cause, on commence à faire de l'obstruction. Voilà la situation, à mon sens.
(1200)
    J'en reviens au point que M. Chan a fait valoir. Il a dit que le texte du projet de loi n'avait pas fait l'objet d'une fuite, qu'il y a eu de l'information négative, des renseignements sur ce que le projet de loi ne contenait pas. Par conséquent, il ne faudrait pas attacher d'importance aux décisions antérieures dans les cas où le texte était en cause.
    Soyons clairs. J'en reviens à la décision du Président Milliken, le 4 octobre 2010. Prenons la page 4711 des Débats de la Chambre des communes— je sais que nous avons tous le texte sous les yeux — où on lit les propos suivants du Président Milliken: « Le fait que la Chambre des communes ait le droit de prendre connaissance en premier du texte des projets de loi qu’elle étudiera est une pratique bien établie et une convention acceptée. »
    M. Chan soutient qu'il faut donner une interprétation très étroite à cette convention. Pourvu que je n'utilise pas les mots lorsque je communique des renseignements, si je suis par exemple un ministre ou un responsable des communications d'un ministre, il n'y a pas atteinte au privilège parce que, selon cette interprétation très étroite et technique, la Chambre a toujours la primeur du texte. Si j'utilise les mots dans un ordre différent de celui du projet de loi, dans un ordre qui n'est pas le bon, le texte n'a pas fait l'objet d'une fuite.
    Bien sûr, monsieur le président, cette interprétation étroite et formaliste est fausse. On peut parfois interpréter la loi de cette façon. Ce n'est pas la doctrine d'interprétation que la Cour suprême applique le plus souvent, en ce moment, que ce soit pour la Constitution ou un texte ordinaire, mais ce fut une doctrine respectable par le passé, dans des situations où l'interprétation trop large de la loi risquait d'entraîner une injustice.
    Je reviens brièvement en arrière pour que vous puissiez saisir la distinction que je veux faire. Dans une affaire célèbre du XVIIIe  siècle citée dans Blackstone, le Parlement a adopté une loi prévoyant la peine de mort pour tout vol de bétail.
    Dans la langue du XVIIIe  siècle — l'anglais a évolué, tout comme le français et d'autres langues — le terme « cattle » avait parfois le sens actuel, désignant les vaches et les bovins, mais il désignait aussi tous les animaux d'élevage. Saisi d'une affaire dans laquelle le prévenu avait braconné ou volé un autre animal — je crois, sans en être sûr, que c'était un mouton —, le tribunal a décidé de donner une interprétation étroite au terme « cattle », l'interprétation la plus étroite possible au sens de vache. C'était un mouton. Le prévenu a donc échappé à la potence.
    Je ne sais pas très bien ce qui est arrivé à ce type. Il a probablement été transporté en Australie ou il a eu une peine moindre, mais ce n'était peut-être pas enviable.
    Le Parlement a adopté une nouvelle loi dans laquelle il a dit que « cattle » désignait tous les animaux d'élevage, faisant comprendre clairement qu'il voulait que les braconniers soient pendus.
    La pratique générale de l'interprétation étroite et technique en droit pénal, bien qu'elle se soit un peu effritée pendant ces dernières décennies, reste un moyen d'aborder les situations où l'application de la loi pourrait aboutir à des injustices si on se ralliait à la pratique opposée, c'est-à-dire une interprétation large et libérale. La Cour suprême parle d'interprétation « téléologique »: nous interprétons les mots, quels qu'ils soient, pour obtenir les résultats qui étaient recherchés.
    C'est la loi. Il s'agit ici d'une convention ou d'un usage. Il n'existe pas d'interprétation étroite d'une convention ou d'un usage. C'est une question d'intention. Il n'est pas question de donner une interprétation étroite d'une convention en ne tenant aucun compte de son esprit. Tout réside dans l'esprit de la convention. Et interpréter l'esprit de la loi, d'une pratique ou d'une convention, cela suppose inévitablement une interprétation large.
(1205)
    Cela s'exprime de manières diverses dans les débats des Communes et notamment dans les décisions du Président. Il dit par exemple qu'on ne peut pas faire indirectement ce qu'il est interdit de faire directement. De la même façon, si je pose une question au premier ministre, je dois le désigner comme « le premier ministre » et non l'appeler « premier ministre Trudeau » ou « M. Trudeau ». Je peux dire « mon honorable collègue » ou « le très honorable député » pourvu que je n'utilise pas son nom. C'est la règle directe. Je ne peux pas la contourner. Je ne peux la circonvenir en disant: « Aujourd'hui le Globe and Mail dit que le premier ministre Trudeau... », prétextant que je cite quelqu'un d'autre. Ce n'est pas moi, c'est lui. J'ai essayé de contourner, de faire indirectement ce que je ne pouvais pas faire directement. J'ai donné une interprétation étroite à une pratique qui doit être interprétée largement.
    Très bien. Vous voyez maintenant où je veux en venir. Nous avons une pratique, un usage: le texte ne doit pas faire l'objet d'une fuite. La pratique est bien établie. Elle vaut pour des mots qui ne reprennent pas de grands passages du texte, mais qui ont le même effet. Je voulais faire ressortir ce point très clairement, mais j'irais plus loin. À propos de cette information négative et positive, je dirai que, à moins que tout le texte des articles pertinents du projet de loi C-14 n'ait été communiqué à Laura Stone, il aurait été impossible de résumer ce qui en avait été exclu, si vous me suivez. Cela se résume ainsi: « Voici ce que le gouvernement ne fera pas. Voici pourquoi ceux qui sont profondément convaincus que le projet de loi devrait aller plus loin devraient s'indigner. Voici pourquoi ceux qui pensent que le projet de loi ne devrait pas aller aussi loin que le comité parlementaire le recommandait devraient avoir l'impression que le gouvernement répond à leurs préoccupations. » C'est tout un travail de communication qui utilise une fuite.
    Cela peut se faire seulement en indiquant ce qui ne se trouve pas dans le projet de loi. Comme je l'ai signalé à la ministre lorsqu'elle a comparu — elle a dit elle aussi qu'il y avait eu seulement de l'information négative —, c'était en fait une divulgation d'information beaucoup plus large. Je peux connaître uniquement une partie des plans du gouvernement et communiquer cette information positive sur le projet de loi. Mais pour dire que tel ou tel élément ne s'y trouve pas, je dois connaître la totalité du texte.
    Je vous dirais que seules des personnes relativement haut placées au gouvernement, qu'il s'agisse d'élus ou de leurs collaborateurs, avaient accès à toute cette information. Nous n'avons pas vérifié qui sont ces personnes. La liste n'est pas interminable. Elle est limitée. Le gouvernement pourrait nous la fournir si la motion à l'étude était adoptée. Le gouvernement serait tenu de nous fournir cette information. Il ne faut pas faire de procès d'intention, mais je soupçonne que c'est la vraie raison pour laquelle les membres libéraux du Comité ont reçu instruction de bloquer cette motion. Leur objectif, c'est de faire en sorte que les « coupables » pour reprendre le mot du leader libéral à la Chambre Don Boudria, il y a 15 ans, ne soient pas découverts.
    Cela leur donnera la liberté de refaire exactement la même chose. Si l'approche retenue veut que, lorsque ces affaires lui sont renvoyées, le Comité les fait discrètement disparaître, alors il fait en sorte que, lorsqu'il y a outrage au Parlement, les coupables s'en tirent indemnes.
    Une fois ce modèle établi, une fois qu'il sera clair qu'il n'y aura pas de sanction pour ce genre d'outrage, les coupables pourront refaire la même chose la prochaine fois que cela sert leurs objectifs de communication au mépris du Parlement et ils communiqueront de l'information de la même façon ou d'une manière semblable. C'est très inquiétant.
(1210)
    Monsieur le président, j'aborderai maintenant la question de savoir si la fuite a été délibérée ou accidentelle. Vous savez que j'ai déjà tenu quelques propos à ce sujet, mais je me suis dit que j'entrerais un peu plus dans les détails pour expliquer ce qui fait l'importance de la motion et le point que je vais faire valoir va montrer pourquoi il est important de l'adopter.
    J'ai dit que le fait même que les libéraux veuillent clore l'enquête donne à penser que l'auteur de la fuite est assez haut placé et que la fuite est délibérée. Après tout, si c'était un accident, nous pourrions savoir en quoi il a consisté, nous pourrions prendre des mesures pour l'éviter et quelqu'un ferait son mea culpa et exprimerait ses regrets.
    Les libéraux pourraient avoir des propos semblables à ceux de Don Boudria. Je reviens en arrière pour vous en dire un peu plus long sur sa réaction, en 2001, car c'est frappant. Il avoue ne pas avoir eu une maîtrise complète et s'en irrite. Le 15 octobre 2001, Don Boudria a dit:
Vendredi dernier, dans l'après-midi, j'ai reçu une copie du projet de loi C-36. En tant que leader du gouvernement à la Chambre des communes, je dois procéder à un examen du projet de loi. J'ai pris des mesures de précaution à ce moment-là, et plus tôt, avec la ministre et tout son personnel, pour faire en sorte que le projet de loi ne soit pas communiqué aux médias ou à d'autres personnes. Tout le monde avec qui je me suis entretenu m'a donné cette assurance.
    C'est le passage que j'ai déjà cité, mais je reviens en arrière pour voir ce que le leader à la Chambre a dit de la façon dont les choses se passent.
    Le leader du gouvernement aux Communes examine le projet de loi. Peu de temps avant la présentation aux Communes, il en reçoit une copie. Comme dans le cas du projet de loi C-14, il s'agit d'un texte urgent qui mobilise beaucoup d'attention. Il a été élaboré à toute vitesse.
    Il le voit donc quelques jours avant la présentation. Une partie de son travail, il le souligne, est de s'assurer que ni la ministre ni ses collaborateurs ne révèlent quoi que ce soit aux médias. Il fait allusion à la ministre de la Justice à l'époque, Anne McLellan et à son personnel, et il a reçu des assurances à ce propos. Il avait obtenu cette assurance, comme l'actuel leader à la Chambre l'a reçue: il n'y a pas eu de fuite. À moins que quelqu'un n'avoue avoir divulgué le projet de loi.
    Ici, plusieurs possibilités. D'abord, le leader à la Chambre, Dominic LeBlanc, a reçu de tout le monde l'assurance qu'il n'y avait pas eu de fuite, mais quelqu'un lui a menti. Deuxièmement, il a été informé par quelqu'un, mais les autres ne savaient pas qu'il allait y avoir une fuite ou qu'elle avait déjà eu lieu — elle était en préparation, et il y a été mêlé. Troisièmement, lui et son bureau ont participé à la stratégie de divulgation de l'information.
    Des trois scénarios, j'ignore lequel est le bon. J'accepte que la ministre de la Justice et ses collaborateurs, à moins que ceux-ci ne lui jouent dans le dos, ce dont je doute, ne sont pas la source de la fuite. Mais il doit bien y avoir une source, puisqu'il y a une fuite, comme en témoigne le Globe and Mail du 12 avril. La fuite a été délibérée, à moins d'un scénario que j'ai du mal à imaginer, et le leader à la Chambre était très probablement au courant.
    Le leader à la Chambre devrait comparaître devant le Comité pour tirer l'affaire au clair. Tout comme nous l'avons fait pour la ministre de la Justice, nous le croirons sur parole s'il dit n'avoir été au courant de rien. Nous ne l'accuserions pas de mentir. Nous comprenons tous que, s'il mentait, ce serait en soi un outrage au Parlement, le genre d'outrage qui met fin à une carrière s'il est établi qu'il a menti.
(1215)
    C'est notamment parce qu'elle sait qu'il est grave de mentir délibérément et ouvertement à un comité parlementaire que je crois la ministre de la Justice. Je prends ses mots très au sérieux parce qu'elle est une personne très intelligente, comme nous pouvons tous le constater, qui soit stupidement autodestructeur.
    Le leader devrait comparaître. Il sera sûrement sur la liste de distribution. Il devrait témoigner devant le Comité. Il pourrait plus que quiconque, je crois, nous apprendre où et quand cette fuite délibérée a été préparée, avec la participation de qui et selon quelle stratégie. Je garantis que, en faisant la lumière là-dessus — ne dit-on pas que la lumière est le meilleur désinfectant? —, nous éviterons toute fuite semblable à l'avenir, car personne ne voudra revivre cela. C'est pourquoi nous voulons l'entendre, ainsi que les autres personnes de la liste, ou du moins savoir de qui il s'agit pour décider qui devrait être convoqué.
    Un dernier point à propos de la volonté des membres libéraux du Comité ou du whip libéral de rejeter cette motion qui est essentielle si nous voulons trouver l'origine de la fuite. Comme nous l'avons constaté grâce à la dernière question de privilège sur le contact entre le premier ministre et la députée de Berthier-Maskinongé, le Comité peut se prononcer et faire rapport à la Chambre sur les outrages au Parlement: les faits se sont-ils produits ou non et, si oui, comment — ce sont les détails — et que pouvons-nous recommander pour que cela ne se produise plus?
    Nous pouvons aussi dire qu'aucun rapport n'est nécessaire. C'était pour moi une information nouvelle que j'ai apprise à cette réunion. On sait quelle a été mon interaction avec M. Christopherson, dans laquelle j'ai essayé de trouver la marche à suivre, et mon interaction avec la greffière, dans laquelle j'ai essayé de trouver les règles applicables.
    Si on décide que rien ne s'est passé, non seulement la possibilité d'un rapport à la Chambre est-elle éliminée, mais avec elle aussi celle de formuler une opinion dissidente. Je dirais donc que cela a pour conséquence pratique de donner une approbation, de dire au gouvernement: « Vous vous en êtes tirés. Il y a eu une petite audience insignifiante qui n'a donné aucun résultat, et tout s'est terminé parce que le gouvernement a utilisé sa majorité pour rejeter toute nouvelle motion visant à faire comparaître des témoins. » C'est le seul châtiment qu'il y aura. Le gouvernement s'en tirera donc indemne.
    L'idée qu'une convention ou une pratique est permanente et qu'elle ne peut s'effriter est inexacte. Normalement, il n'est pas garanti que les conventions, constitutionnelles ou autres — et c'est mon champ de spécialisation —, les usages et les pratiques de la Chambre sont permanents et verrouillés. Normalement, ils sont permanents. D'habitude, une convention ou une pratique est un acte d'autodiscipline qui n'est pas consigné dans les règles, mais elle est acceptée comme norme de comportement et est sanctionnée par l'instance dirigeante, qui signifie sa désapprobation. Normalement, ces choses-là deviennent plus strictes et solides avec le temps. Si on considère la situation actuelle avec celle d'il y a 50 ans, celle d'il y a 50 ans avec celle d'il y a un siècle et celle d'il y a un siècle avec celle d'il y a deux siècles, on constatera que, dans l'ensemble, les conventions se renforcent avec le temps.
(1220)
    Ces conventions nous imposent à tous les contraintes des normes d'un comportement civilisé — il serait peut-être plus juste de dire les normes d'un comportement « respectueux ». Nous nous imposons des contraintes qui ne sont pas prévues dans les règles. Elles se renforcent avec le temps, généralement, mais l'inverse peut aussi se produire. L'un des rôles du Comité devrait être de l'éviter pour que nous ne nous retrouvions pas à affaiblir des conventions et à tolérer un comportement jugé jusqu'ici irrespectueux ou inacceptable.
    Je dirai que, dans le grand ordre des choses, cet effritement de la modération est l'une des choses qui se produisent en temps de guerre, par exemple. On dit toujours que « la vérité est la première victime de la guerre ». Comme il faut être moins ouvert pour des raisons stratégiques, c'est là une des conséquences de la guerre même dans les meilleurs pays et dans les plus civilisés, et même quand nous luttons pour la plus juste des causes, comme au cours de la Seconde Guerre mondiale. Au milieu de cette guerre, nous avons fait des choses dont nous ne sommes pas fiers et dont nous reconnaissons maintenant qu'elles sont condamnables. Je ne veux faire aucune analogie avec la situation présente, mais l'objet de l'analogie est de montrer comment les conventions peuvent s'affaiblir. Je signale que notre comportement envers un segment de notre société à l'époque a été inacceptable.
    On pourrait signaler d'autres conventions, peut-être moins lourdes de conséquences, mais je voudrais donner l'exemple d'une convention constitutionnelle aux États-Unis. Elle a débuté par George Washington et s'est développée pendant des décennies: aucun président ne devait exercer plus de deux mandats. La convention a été respectée par tous les présidents jusqu'à Franklin Roosevelt qui, en 1940, a postulé un troisième mandat. Le pays était en crise à cause d'une guerre imminente et n'était pas encore sorti de la Grande Crise. Personne ne prétend que Franklin Roosevelt n'était pas un grand homme, mais, après son décès, il a été décidé, avec l'approbation des deux tiers des membres des deux chambres du Congrès et des assemblées législatives des trois quarts des États que personne, désormais, ne pourrait occuper la présidence pendant plus de deux mandats, et cette disposition a été inscrite dans la Constitution.
    Une exception mineure était prévue dans le cas d'une personne qui aurait terminé moins de la moitié du mandat d'un président précédent. Elle pouvait exercer deux mandats en plus de cette moitié de mandat. Lyndon Johnson a songé à se prévaloir de cette disposition en 1968, avant de renoncer à se présenter à l'élection de cette année-là,
    Je veux donc dire que, en matière de conventions, on peut revenir en arrière et que c'est tout aussi vrai pour les pratiques parlementaires que pour les conventions constitutionnelles.
    Nous voyons ici les députés ministériels essayer de faire reculer une pratique et de dire qu'une pratique qui a toujours été comprise et interprétée de façon robuste devrait... Mais le terme « devrait » n'est pas le bon, parce qu'il suppose qu'ils lui reconnaissent une certaine valeur. Ils essaient de dire qu'ils peuvent s'en tirer en faisant les choses comme il faut, en restreignant une pratique respectueuse de la Chambre, en en donnant une interprétation plus étroite. Ils peuvent dire: « Tant que ce n'est pas dans le texte » ou: « Si nous nous faisons pincer, nous renverrons l'affaire au Comité et nous l'y ferons disparaître discrètement. »
    On nous a confié la tâche de trouver un « coupable », pour reprendre le mot de Don Boudria, de chercher la source de la fuite, pour employer les mots des Présidents Milliken et Regan. Leurs mots, ceux des libéraux et de M. Chan, disent que ce n'est pas nécessaire. Dans la pratique passée, l'affaire était prise très au sérieux, mais ils disent que ce n'est pas nécessaire en invoquant un argument formaliste: le texte même n'a pas été révélé même si, clairement, la fuite est plus importante que si le texte lui-même avait été communiqué.
(1225)
    Ils ont peut-être raison. Peut-être peuvent-ils s'en tirer. C'est ainsi que les choses se passent. On laisse tomber la garde parce qu'on a l'impression qu'il y a urgence, comme en temps de guerre, ou, comme dans le cas de la Loi antiterroriste, s'il y a une crise nationale.
    Pour en revenir à ce projet de loi, monsieur le président, j'ai voté contre. Je l'ai fait parce que j'ai tenu un référendum dans ma circonscription, semblable à celui qui a porté sur le projet de loi C-14, et la majorité de mes électeurs m'ont dit de voter contre parce qu'il ne contenait pas de disposition de caducité.
    Nous avons dit que, en temps de crise, nous étions disposés à suspendre certaines de nos libertés civiles traditionnelles pour pourchasser les terroristes, ceux qui sont prêts à commettre une chose horrible comme les attentats du 11 septembre, comme le massacre d'Orlando, perpétré le week-end dernier avec une arme différente, comme tant d'incidents survenus depuis une quinzaine d'années. Ceux d'entre nous qui ont connu les attentats du 11 septembre et toutes les horreurs qui nous ont été infligées depuis — que ce soit à Londres, avec les attentats dans le métro, à Paris, dans un club ou à Orlando, avec cet acte scandaleux contre l'humanité, ou tant d'autres crimes qui m'échappent, tellement ils sont nombreux — peuvent accepter avec sympathie qu'on dise qu'il y a du gros gibier à prendre, quitte à mettre de côté certaines garanties que nous avons mises en place.
    Même là, dans le comté de Lanark, rural, conservateur et respectueux de l'ordre public, la majorité de gens ont dit que c'était trop cher payé et m'ont donné instruction de voter contre.
    J'ai voté non seulement contre le gouvernement, mais aussi contre mon parti. Quatre membres de l'Alliance canadienne se sont dissociés de leur parti et ont voté contre, avec les députés néo-démocrates. Cela m'a paru important.
    Il n'y a pas de crise semblable qui justifie un manquement aux pratiques de la Chambre. Comprenez-moi bien. Il y avait une date limite qui approchait, le 6 juin, et qui est maintenant dépassée: si une nouvelle loi n'était pas en place, les dispositions pertinentes du Code criminel cesseraient de s'appliquer. En ce sens, il y avait une date limite qu'il était urgent de respecter.
    Comme cette date est dépassée, nous n'avons pas à faire face à la perspective que des médecins euthanasient des gens dans les rues, ce que semblaient redouter des alarmistes. Mais cette fuite n'avait rien à y voir. Cette fuite a été conçue pour aider le gouvernement à gérer une crise imminente, réelle ou inventée de toutes pièces.
    Il s'agissait d'influencer le débat, de manipuler l'opinion publique, d'agir sur la façon de penser des gens, de donner une orientation fausse, d'abuser du discours public. Une personne a dit qu'elle avait tout un ensemble de renseignements, qu'elle allait en publier une partie, sélectivement, et qu'elle allait le faire de façon que personne n'en puisse confirmer la véracité ou l'exactitude, qu'elle allait les publier dans un journal national, qu'elle allait orchestrer cette fuite pour qu'elle soit reprise par tous les médias, de façon que le débat en soit influencé.
    Ce n'est pas de l'information, mais de la désinformation. Même si à peu près tout était vrai, c'était de la désinformation.
(1230)
    Monsieur le président, il est frappant pour moi, et ce doit l'être pour tout observateur objectif, qu'une des défenses de la ministre — et cela ne doit pas être pris terriblement au sérieux — est que, après tout, une partie des renseignements divulgués était inexacte. Le fait qu'il y ait des erreurs constituait donc une défense acceptable. Vous devez connaître ma réponse. C'est que l'information a probablement été communiquée verbalement. Laura Stone aura reçu un courriel ou un appel téléphonique l'invitant à une rencontre. Je présume que les deux personnes se sont rencontrées quelque part ou ont eu une conversation téléphonique. Laura Stone a pris des notes, mais n'a pas reçu le texte du projet de loi et personne n'a écrit le texte ni pris la dictée.
    L'explication la plus probable est que Laura Stone... Je peux me tromper. Elle est peut-être une spécialiste des éléments détaillés, retenus ou exclus, du dossier de l'aide au suicide. Mais même si elle l'était, elle a très probablement commis une légère erreur dans ses notes. Il suffit d'une correction mineure pour que tout soit exact jusqu'au moindre détail.
    Voilà ce qui s'est passé. Il est très regrettable qu'on nous dise que ce n'est pas important, que nous devrions laisser tomber. Mais aussi, pour être clair, c'est une chose qui risque fort de se reproduire.
    Le grand poète T.S. Elliot disait que la liberté mourrait avec la civilisation, non pas dans un grand éclat, mais dans un murmure. Un millier de murmures, de refus de réagir vigoureusement. L'un de ces murmures, c'est notre échec à poursuivre les séances du Comité à cause du mur qui se dresse devant nous. Voilà pourquoi, monsieur le président, nous essayons d'utiliser la seule arme que nous ayons de ce côté-ci, l'opinion publique, en étirant le débat pour faire savoir qu'on va l'interrompre, qu'on va mettre un terme à une enquête ouverte, qu'on va se taire au sujet de la façon de traiter un outrage au Parlement.
    Personne ne doute qu'il y ait eu outrage au Parlement. Il reste à se demander maintenant s'il vaut la peine d'utiliser le temps précieux du Comité — ou quel que soit l'argument invoqué — pour examiner cet outrage. Les questions de privilège sont le principal sujet que le Comité doit étudier. Elles sont parfois de nature technique, et parfois non, mais elles sont le sujet principal et elles ont la priorité. C'est une pratique depuis longtemps établie et elle est consacrée par nos règles. C'est que nous comprenons que l'effritement de ces privilèges, petit à petit, et parfois avec la bénédiction de quelqu'un qui a des cotes très élevées dans les sondages d'opinion, compromet néanmoins les normes d'un comportement respectueux qui sont le fondement de la réussite de notre institution.
    Pour gérer ce genre d'affaire à long terme, si le gouvernement s'en tire cette fois-ci, il faudra à un moment donné insérer dans des règles écrites la norme de comportement. C'est difficile à faire, car, une fois qu'on passe d'une norme à un texte rigide, tout devient très mécanique, ce dont nous sommes très conscients. C'est une question que nous abordons par consensus dans le code de conduite des députés en ce qui concerne les cadeaux, par exemple. Dans ce cas, on a tenté d'inscrire quelque chose dans un code formel. Mais la nécessité d'être pointilleux pour faire respecter le moindre détail du code a suscité une série de problèmes. Mais c'est ainsi qu'il faut faire lorsqu'on ne peut plus compter sur les usages, les conventions et les pratiques pour guider les comportements.
(1235)
    Je ne voulais pas prendre tout le temps du Comité. Je voulais simplement exposer les arguments invoqués. Il m'a semblé préférable d'être le plus complet possible.
    Monsieur le président, je pourrais peut-être m'arrêter là. J'ai hâte d'entendre ce que d'autres ont à apporter au débat.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Les exemples du passé sont très éclairants. Il a été très intéressant de les écouter.
    Monsieur Christopherson.
(1240)
    Je vais appuyer les motions de l'opposition officielle.
    Je n'ai pas été particulièrement enchanté des réponses du gouvernement. Il me semble que M. Richards a raison de se demander si le gouvernement prend la question de privilège au sérieux. Je suis ici depuis assez longtemps pour avoir remarqué que, d'habitude, c'est le gouvernement qui minimise l'importance du privilège et l'opposition qui veut l'amplifier. C'est simplement que l'opposition n'a pas beaucoup de droits. Et les quelques-uns qu'elle a, elle veut les défendre coûte que coûte.
    L'un de ces droits est celui de siéger à un comité et de convaincre celui-ci d'étudier des questions qui semblent importantes. Je ne veux pas que cette question de privilège soit escamotée. Le whip en chef du gouvernement a jugé l'affaire assez importante, à première vue, pour réagir comme il l'a fait. Chose certaine, le Président a dit que l'affaire méritait un certain examen.
    Ce qui s'est passé à la dernière séance a été non un simple commencement, mais aussi le déclencheur d'une multitude d'autres questions. Pour rappeler l'une de celles auxquelles je me suis intéressé, la ministre a dit et répété que bien des gens, aux termes de la Loi sur la protection de l'information, étaient au courant. Elle a soulevé cette question.
    Pour moi, cela n'a fait que relever la barre: s'il y a eu un manquement, il y a de bons risques que quelqu'un ait violé son serment. Outre les députés, le personnel prête aussi serment lorsqu'il doit s'occuper de questions confidentielles au gouvernement. La question peut être grave à ce point et mettre en cause le serment du secret. On prête allégeance au pays et on promet d'agir avec justice.
    Pour ces seules raisons, j'appuie les motions à ce stade-ci. J'espère que le gouvernement, en donnant son aval, ne va pas faire traîner les choses plus que nécessaire. J'ai l'impression que l'opposition officielle s'apprête à s'installer... Je reconnais les premiers stades de l'obstruction systématique. Les députés ministériels pourraient nous éviter bien des peines en faisant preuve d'ouverture et en tenant des discussions sur les témoins que nous pourrions accueillir. Il pourrait y avoir une sorte d'accord. S'ils entendent bétonner, ce ne sera pas une solution.
    Merci.
    Merci, monsieur Christopherson.
    C'était d'une brièveté peu caractéristique.
    Oui, cela peut arriver.
    Madame Sahota.
    C'était étonnant.
    Mon personnel en est bouleversé.
    Trêve de plaisanteries. Je tiens à réaffirmer que l'affaire est très sérieuse. Comme les privilèges des députés sont une question aussi sérieuse, nous devons cerner de quoi il s'agit ici. Il faut qu'il y ait un critère pour décider ce qu'il y a lieu de faire. Y a-t-il eu divulgation prématurée du projet de loi?
    Il se trouve qu'il n'y a pas eu divulgation prématurée. Même la ministre l'a attesté dans son témoignage de l'autre jour.
    Les conservateurs, quelques collègues ici présents, MM. Schmale et Richards, ont dit que la journaliste en savait plus long qu'elle n'aurait dû grâce à ses seules déductions ou aux rumeurs à partir desquelles elle pouvait connaître le contenu du projet de loi. L'article, en fait, était partiellement inexact. Je ne suis pas d'accord. Ce n'est pas là une connaissance plus étendue du projet de loi. Si la journaliste avait connu le projet de loi, monsieur le président, elle en aurait fait figurer le contenu dans son article.
    Dans les reportages de la CBC et du Globe and Mail, nous ne voyons rien du contenu du projet de loi présenté à la Chambre. Ce sont peut-être des hypothèses éclairées, des éléments dont il avait été abondamment question au préalable dans les médias, des rumeurs et des conjectures. Le contenu du projet de loi ne s'y trouve pas.
    Il importe de rappeler que la ministre a dit que quiconque aurait travaillé au projet de loi ou l'avait eu en sa possession en aurait eu une meilleure connaissance que ce qu'on trouve dans l'article. Il aurait su que l'affirmation au sujet des personnes atteintes de problèmes psychologiques était inexacte. Ces personnes sont visées dans le projet de loi et ne constituent pas une exception.
    Je ne suis pas d'accord pour dire que la journaliste avait une connaissance intime du projet de loi. Ce n'était pas une connaissance intime, et ce n'était pas le contenu du projet de loi. Le Comité doit prendre la question au sérieux, mais il ne doit pas se livrer à une chasse aux sorcières ni à une inquisition. M. Reid a joliment fait valoir ce point, et je commence à pressentir aujourd'hui que c'est ce qui s'annonce.
    Comme c'est très sérieux, nous devons nous en tenir, je le répète, à la question de la divulgation prématurée, à la question de savoir si des éléments essentiels ou d'autres éléments de fond ont été mentionnés. Nous n'avons rien de tel aujourd'hui. J'estime qu'il faut être très prudent avant de mettre en cause des centaines de personnes, peut-être, pour n'aboutir à rien. Le Comité a déjà consacré cinq séances à la question. Il l'a donc prise très au sérieux. Nous n'avons aucunement bétonné face à l'opposition. Nous avons accepté de convoquer la ministre de la Justice et procureure générale, le greffier intérimaire et le légiste et conseiller parlementaire. Ils ont tous comparu pour parler de cette affaire. Nous avons donc pris la question très au sérieux. Toutefois, nous n'avons pas recueilli beaucoup d'éléments de preuve jusqu'à maintenant. Comment justifier la poursuite de ce travail alors que le Comité a tant d'autres questions importantes qui l'attendent.
    C'est une démarche vaine. Il est question de quelques rumeurs, de conjectures qui se retrouvent dans un article, sans aucun élément du projet de loi. Nous nous saisissons de cela et nous essayons de trouver les centaines de personnes qui, à un moment donné, ont pu connaître le projet de loi ou y avoir accès. Le fait demeure que si une personne renseignée qui avait accès au projet de loi l'avait communiqué aux médias, nous aurions eu une meilleure source, nous aurions eu des renseignements réels sur le projet de loi.
    En conclusion, je demanderais: quelle fuite? Il n'y en a eu aucune.
    Nous parlons de fuite comme si c'était un fait avéré. L'opposition dit sans cesse qu'il y a eu une violation comme si c'était un fait. Le travail du Comité est de trouver s'il y a eu une violation. Il y a eu une présomption et nous ne sommes parvenus à aucune conclusion. Nous essayons de faire enquête, non d'accuser quiconque ni de lancer une inquisition. Nous essayons d'enquêter et jusqu'à maintenant, après cinq séances, nous n'avons toujours pas trouvé de preuve solide qu'il y a eu une violation.
(1245)
    Comme l'affaire est très importante, je propose que nous la traitions comme telle au lieu de nous laisser emporter à gaspiller le temps précieux du Comité et à tenir d'autres séances qui seront probablement stériles, puisque nous n'avons toujours rien de concret.
    Voilà tout ce que j'avais à dire. Merci.
    Merci.
    Monsieur Chan.
    Je tiens à remercier Mme Sahota.
    Je suis peut-être légèrement en désaccord avec vous sur quelques points.
    Je n'ai peut-être pas été assez clair dans ma déclaration d'ouverture. Aussi, je voudrais revenir sur certains points que M. Richards a fait valoir.
    Je remercie M. Reid de sa longue dissertation. Cela m'a rappelé mes cours sur l'interprétation des lois avec Elmer Driedger. Votre connaissance de l'histoire est toujours très éclairante, et je vous en remercie.
    J'en reviens à ce qui est vraiment la question dont le Comité est saisi. Comme je n'ai pas été assez clair, je vais répéter.
    Il ne s'agit pas de savoir s'il y a eu communication non autorisée de renseignements. C'est sur ce point que je suis en léger désaccord avec Mme Sahota. Il faut plutôt savoir s'il y a eu atteinte au privilège des députés. C'est pourquoi, au début, j'ai proposé au Comité de convoquer le greffier intérimaire et le légiste et conseiller parlementaire pour établir la nature du privilège. Je crois que nous savons ce que c'est: les parlementaires ont-ils été désavantagés parce que le projet de loi a été divulgué avant sa présentation à la Chambre des communes?
    La question suivante, à mon sens, est de savoir si le seuil a été franchi et s'il y a eu atteinte aux privilèges des députés. Notre position, depuis le départ, est que, pour qu'il y ait atteinte aux privilèges, il faut que la divulgation soit importante, que, après le dépôt de l'avis de motion à la Chambre annonçant le projet de loi C-14, quelqu'un ait eu le projet de loi en sa possession sans autorisation avant qu'il n'ait été présenté aux Communes par la ministre de la Justice et procureure générale du Canada. Je dis que, jusqu'à maintenant, rien ne prouve que cela se soit produit. L'article ne révèle aucunement que cela s'est produit.
    J'ai essayé de dire plus tôt que la seule personne qui sache si elle avait le projet de loi est Laura Stone elle-même. À mon sens, elle est le seul témoin qui puisse vraiment répondre à la question, qui est fort simple. Elle n'a pas à donner ses sources, mais simplement à dire si elle avait le projet de loi.
    Je reviens au point précédent. Nous avons posé des questions au greffier intérimaire et au légiste et conseiller parlementaire sur la nature du privilège des députés. Honnêtement, je ne crois pas que nous ayons obtenu une réponse satisfaisante. C'est là qu'il y a divergence entre l'opposition officielle et le gouvernement. Bien sûr, comme M. Christopherson l'a expliqué, vous avez une interprétation plus large de vos droits et privilèges, surtout dans les rangs de l'opposition, mais je réitère mon opinion: nous devons avoir une définition claire et savoir à quoi nous en tenir sur la nature du privilège des députés.
    À mon sens, il ne peut y avoir violation des privilèges dans cette affaire que si le projet de loi a été entre les mains de quelqu'un avant sa présentation à la Chambre. C'est mon opinion depuis le début, et c'est pourquoi, monsieur Richards, je ne considère pas du tout d'un oeil favorable les motions proposées. Si Mme Stone est disposée à répondre à la question par un simple oui ou non, avouant qu'elle avait une copie du projet de loi, je considérerais peut-être d'un oeil plus favorable certaines de ces motions. Mais ce n'est pas ce que disent les éléments que nous possédons. Et c'est exactement ce que je veux dire, et c'est pourquoi le gouvernement ne peut pas appuyer ces motions pour l'instant.
    J'affirme très clairement que notre rôle est de vérifier s'il y a eu violation du privilège des députés. Pour moi, ce seuil n'a pas encore été atteint. Lorsqu'il le sera, nous en arriverons au rôle et à la responsabilité du Comité, qui est d'enquêter.
    À propos des motions initiales dont nous sommes saisis, je dois dire que, selon moi, on s'y prend de façon détournée. On se lance dans des recherches à l'aveuglette au lieu d'aller au coeur de l'affaire: la journaliste avait-elle le projet de loi en sa possession? Une personne non autorisée a-t-elle connu le contenu du projet de loi avant nous, députés? Si la réponse est oui, alors ces motions ont une certaine valeur.
    Merci.
(1250)
    Monsieur Schmale.
    Il y a un ou deux points dont je voudrais parler encore.
    Désolé...
    Vous avez sept minutes.
    Parfait. Ce ne sera pas aussi bien que ce que d'autres font, mais je vais voir si je peux commencer.
    Nous nous demandons s'il y a matière à enquête. Creusons un peu plus. La ministre a dit que, lorsqu'elle est rentrée dans son ministère après que l'affaire eut été rendue publique à la Chambre, elle a demandé à son personnel politique s'il était possible qu'il y ait eu une fuite: oui ou non? Elle a demandé à son sous-ministre de vérifier auprès des fonctionnaires qui avaient eu accès au projet de loi s'ils étaient la source de la fuite. La réponse a été négative. Très bien, la réponse est non.
    Dans une vie antérieure, quand j'étais un peu plus jeune et en forme, j'étais arbitre au hockey. Lorsque je décernais une punition, peu importe à quel joueur, il disait toujours que ce n'était pas lui. Je crois que j'étais un assez bon arbitre. Ici, un témoin accepte la parole de je ne sais combien des gens: ils ne sont pas la source de la fuite. Faut-il s'en tenir là? J'aime à penser que non.
    Je reviens à l'article du 12 avril. Voyez la formulation. J'invite les anciens journalistes d'en face à considérer cette formulation: « d'après une source qui est au fait du projet de loi ». Les mots « d'après une source » disent tout. Voyez d'autres particularités du texte: le projet de loi « va exclure » et aussi « selon des sources, le Cabinet libéral », a-t-on dit à la CBC le 13 avril. C'est très clair.
    Je vais même citer mon collègue Andrew Scheer, de Regina—Qu'Appelle, une belle région j'en suis sûr. Il a dit ceci: « J'espère que la Chambre appuiera le renvoi de cette question au Comité de la procédure et des affaires de la Chambre. Le comité pourra ainsi revoir les faits et possiblement déterminer qui est responsable »— c'est ce que nous espérions faire, mais il semble que nous nous heurtions à un mur — « ou proposer un système en vue d'éviter qu'un incident semblable se reproduise. Par ailleurs, si le comité identifie le coupable, il pourra en faire rapport à la Chambre pour que celle-ci décide des mesures à prendre. »
    En ce moment, nous n'avons rien, vraiment, mais nous voulons trouver. Nous voulons prendre des mesures pour arriver à la prochaine étape, mais nous ne pouvons pas le faire si nous ne savons pas qui avait accès au projet de loi, et si celui-ci nous donne une indication. Cette liste nous donne une amorce, un point de départ. À mon avis, c'est la prochaine étape à franchir. Pourtant, certains pensent que nous avons entendu un témoin et que cela suffit.
    Non, cela ne suffit pas. Voici ce que disait le Président Lamoureux en 1971: « Le privilège est la disposition qui distingue les députés d’autres citoyens, leur conférant des droits dont ne jouissent pas les autres... » Ils ont le droit de voir le projet de loi en premier. Ce qui nous ramène à la formulation limpide de l'article: « ... d'après une source qui est au fait du projet de loi... »
    Comment en arriver là? À propos de la question de privilège et de l'outrage, le légiste a fait remarquer que la violation de privilège se rapporte directement à la violation d'un droit, d'une immunité ou d'un pouvoir particuliers que la Chambre ou ses membres jugent nécessaires à l'exercice de leurs fonctions parlementaires. Par contre, l'outrage au Parlement est une atteinte à l'autorité ou à la dignité de la Chambre qui entrave son travail ou celui de ses membres.
    Monsieur Chan, cela se trouve là, dans une citation de 1971.
    L'affaire est très claire. Dire qu'un témoin suffit... Nous avons discuté de choses diverses, dont la source de la fuite. Cherchons-la. Mais essayer de tirer une ligne, c'est inacceptable, car cette fuite a sûrement une source. Trouverons-nous cette personne? Peut-être, qui sait? Mais nous ne pouvons y arriver sans poursuivre l'enquête.
    Le Président nous a confié l'affaire. Puis, on dirait qu'elle va s'escamoter, disparaître de l'écran radar, que ce n'est pas grave. Eh bien oui, c'est grave. Assurément, ce l'est. Puis, vous dites: « Je ne sais pas si c'est vrai. Je l'ignore. » Mais comment peut-on obtenir autant de détails? Comment une journaliste peut-elle en savoir autant sur ce qui se trouve ou pas dans le projet de loi? On n'invente pas à ce point. Peut-être si on travaille pour le Beaverton ou The Onion, mais il s'agit ici du Globe and Mail. On n'invente pas tout cela, on n'écrit pas de cette manière si on ne fait que regarder en l'air en espérant que les mots viendront. Ça ne marche pas de cette manière.
    Comme journaliste, quand j'y repense, comment est-ce que je trouvais mes sources? En parlant avec le personnel subalterne. Avec les gens du service des communications, parfois avec des hommes et femmes politiques, mais rarement ou jamais. Et c'est pourquoi le personnel des communications du CPM est sur la liste. Comme M. Richards l'a dit, si les députés d'en face veulent que nous convoquions le premier ministre, nous serons enchantés de le faire.
    Combien de temps me reste-t-il, monsieur le président?
(1300)
    Pas une seconde.
    Pas une seconde? Très bien.
    Merci. Nous devrons poursuivre...
    Je voudrais continuer.
    ... cette discussion une autre fois. Tout le monde aura sûrement la chance d'y participer
    La séance est levée.
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