propose que le projet de loi , soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
— Monsieur le Président, je suis fière de prendre la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi . Ce projet de loi représente un jalon important en vue d'honorer la promesse du gouvernement de moderniser le système de justice pénale, de réduire les délais et d'assurer la sécurité des Canadiens.
Depuis plus d'une décennie, le système de justice pénale est considérablement surmené. Bien que le taux de criminalité au Canada soit à la baisse, les cas judiciaires sont plus complexes, les procès prennent de plus en plus de temps et les incidences pour les victimes n'en sont que pires. En outre, les Autochtones et les Canadiens marginalisés, y compris ceux qui souffrent de maladie mentale et de dépendance, continuent d'être surreprésentés dans le système de justice pénale. Pour ces raisons, j'ai reçu de la part du le mandat de réformer le système de justice pénale, et c'est pourquoi je suis fière d'avoir présenté le projet de loi dans le cadre de la réponse du gouvernement à ces défis fondamentaux.
Le projet de loi fait également suite à la décision rendue par la Cour suprême du Canada en 2016 dans l'affaire R. c. Jordan. La décision a établi des délais stricts au-delà desquels les délais seraient présumés déraisonnables et les affaires seraient suspendues. Dans une telle éventualité, l'accusé n'aurait pas à subir de procès. Cette situation est inacceptable et elle met en péril la confiance du public dans le système judiciaire.
Le projet de loi aborde également les questions soulevées dans le rapport de juin 2017 du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, qui demandait au gouvernement de remédier aux retards judiciaires. De plus, il reflète l'engagement de notre gouvernement à apporter des réformes urgentes et audacieuses, dont bon nombre ont été identifiées comme des priorités par tous les ministres provinciaux et territoriaux de la Justice, en avril et septembre de l'année dernière.
Le projet de loi propose des réformes dans sept domaines clés. Premièrement, il permettra de moderniser et de rationaliser le système de mise en liberté sous caution. Deuxièmement, il améliorera notre approche à l'égard des infractions contre l'administration de la justice, y compris celles commises par les jeunes. Troisièmement, il renforcera notre réponse à la violence conjugale. Quatrièmement, le projet de loi limitera la tenue d'une enquête préliminaire aux infractions passibles de peines d'emprisonnement à perpétuité. Cinquièmement, il permettra de reclasser les infractions afin de permettre à la Couronne de choisir la procédure la plus efficace et la plus appropriée dans les circonstances. Sixièmement, il améliorera le processus de sélection du jury. Septièmement, il renforcera les pouvoirs des juges de gérer les affaires. Le projet de loi comprend un certain nombre d'autres réformes liées aux gains d'efficience, dont je parlerai brièvement plus tard.
Comme je l'ai indiqué, les premières réformes porteraient sur la modernisation et la rationalisation du système de mise en liberté sous caution. Conformément à la Charte, toute personne inculpée est présumée innocente tant qu'elle n'a pas été trouvée coupable. Toute personne inculpée a le droit de ne pas être privée sans juste cause d'une mise en liberté sous caution. La Cour suprême du Canada a déterminé à maintes reprises que la mise en liberté sous caution, y compris les divers types de libération et de conditions imposés, doivt être raisonnable. Or, on sait que la police et les tribunaux imposent souvent des conditions trop nombreuses, trop restrictives et visant parfois des objectifs inappropriés, notamment un changement de comportement et le châtiment.
Nous savons aussi qu'il y a plus de personnes en détention provisoire que de personnes reconnues coupables d'un crime. Autrement dit, nos établissements correctionnels sont à moitié remplis de gens qui n'ont pas été reconnus coupables d'une infraction.
De plus, l'approche actuelle en matière de mise en liberté sous caution utilise une quantité disproportionnée de ressources, qui pourraient se concentrer sur des cas plus graves. Elle perpétue un cycle d'incarcération.
Conformément à la décision rendue par la Cour suprême du Canada en 2017 dans l'affaire R. c. Antic, les réformes proposées en matière de cautionnement codifieront un principe de retenue. Cela incitera la police et les juges à envisager les moyens les moins restrictifs et les plus appropriés pour répondre aux accusations criminelles à l'étape de la mise en liberté sous caution plutôt que de détenir automatiquement un accusé. La situation individuelle d'un accusé autochtone et d'un accusé vulnérable, comme une personne sans abri ou ayant des problèmes de santé mentale et de toxicomanie, devra être prise en compte dans les décisions relatives à la mise en liberté sous caution. Cela signifie qu'il faudra tenir compte de la situation de l'accusé avant de lui imposer des conditions difficiles ou impossibles à respecter.
Le principe de retenue rendra les tribunaux de libération sous caution plus efficaces en encourageant la remise en liberté le plus tôt possible, sans qu'il soit nécessaire de tenir une enquête sur le cautionnement dans chaque cas. De plus, il donnera lieu à la prise de mesures importantes pour réduire les coûts associés à l'augmentation de la population en détention provisoire actuellement en attente de procès.
Le projet de loi viendrait également renforcer la façon dont le système de libération sous caution traite la violence entre les partenaires intimes en offrant des protections supplémentaires aux victimes. Si une personne a déjà commis des actes de violence à l'endroit d'un partenaire intime et qu'elle est de nouveau accusée de tels actes, les modifications proposées prévoient que le fardeau de la preuve serait renversé au moment de l'enquête sur le cautionnement et qu'il reviendrait à l'accusé de démontrer qu'il peut être mis en liberté en attendant son procès.
Je vais maintenant aborder la deuxième partie des réformes proposées dans le projet de loi , celles qui concernent l'amélioration de la réponse du système de justice aux infractions contre l'administration de la justice. Il s'agit d'infractions commises à l'endroit même du système de justice après qu'une autre infraction a ou aurait été commise. Les exemples les plus fréquents comprennent l'omission de respecter des conditions de mise en liberté sous caution, comme celle de s'abstenir de consommer de l'alcool, le défaut de se présenter devant le tribunal ou le non-respect d'un couvre-feu.
Partout au Canada, des accusés se voient imposer des conditions de mise en liberté sous caution complexes et inutiles qui n'ont rien à voir avec la sécurité publique et qui peuvent même être impossibles à respecter, comme lorsqu'un accusé en région éloignée ne respecte pas un couvre-feu parce qu'il a raté l'autobus. En d'autres termes, des gens se retrouvent dans des situations où il leur est pratiquement impossible de respecter les conditions. Nous créons les conditions pour qu'ils échouent.
Les Autochtones et les personnes marginalisées commettent de manière disproportionnée des infractions aux conditions, souvent en raison de leur situation personnelle, telle qu’un manque d’appui de leur famille et de la collectivité. Par conséquent, les Autochtones et les Canadiens marginalisés sont plus susceptibles d’être accusés, de se voir refuser une mise en liberté sous caution ou, s’ils sont libérés sous caution, plus susceptibles de se voir imposer des conditions plus strictes.
En outre, les infractions contre l’administration de la justice imposent un énorme fardeau au système de justice pénale, car près de 40 % de toutes les affaires concernant des adultes s’accompagnent d’au moins une infraction de ce type. Le projet de loi propose une nouvelle approche afin de régler ces difficultés. La police conserverait la possibilité de déposer une nouvelle accusation en regard de l’infraction ou de l’omission de comparaître au moment approprié. Cependant, si l’infraction n’a pas causé de préjudice physique ou psychologique à une victime, de dommages à la propriété ou de perte économique, la police aurait aussi la possibilité d’aiguiller le prévenu vers une comparution pour manquement. Cela constituerait un outil complètement nouveau pouvant servir de solution de rechange à une accusation criminelle inutile et augmenterait considérablement l’efficience des tribunaux sans nuire à la sécurité du public.
Dans le contexte des jeunes, ces propositions encourageraient les policiers à envisager d’abord un recours à des mesures informelles, comme le prévoit déjà la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, tel que des avertissements, des mises en garde et des renvois, et prescriraient que les conditions imposées aux jeunes gens soient raisonnables et nécessaires. Cela s’harmonise avec le principe général de la loi, qui est d’éviter que nos jeunes commencent une carrière criminelle, en partie en offrant des solutions de rechange à des accusations criminelles officielles ou au placement sous garde.
À la comparution pour manquement, le tribunal entendra les conditions de mise en liberté sous caution et aura trois possibilités: libérer le prévenu sous les mêmes conditions, imposer de nouvelles conditions mieux adaptées à la situation particulière du prévenu ou placer le prévenu en détention. Cette approche permettrait une résolution extrajudiciaire rapide des infractions mineures, tout en assurant que seules des conditions raisonnables et nécessaires ont été imposées. Il s’agit d’une solution plus efficiente que le dépôt d’une nouvelle accusation criminelle et qui contribuerait à empêcher que les Autochtones et les Canadiens marginalisés se retrouvent dans les portes tournantes du système de justice pénale.
Le troisième domaine de réforme du projet de loi concerne la violence entre partenaires intimes. En 2015, les Canadiens ont élu le gouvernement actuel sur la promesse de fournir davantage de soutien aux survivants de la violence familiale, des agressions sexuelles et du harcèlement sexuel et de s’assurer que davantage d’agresseurs sont traduits en justice. Je suis fier d’honorer cet engagement grâce à ce projet de loi.
Comme je l’ai déjà mentionné, les personnes accusées d’une deuxième infraction de violence ou d’une infraction subséquente contre un partenaire intime seraient assujetties à une inversion du fardeau de la preuve à l’étape de la mise en liberté sous caution. En outre, le projet de loi: 1) propose une fourchette de peines plus lourdes dans le cas des récidives en matière de violence entre partenaires intimes; 2) propose un élargissement de la définition de « partenaire intime » qui englobera les partenaires amoureux et les anciens partenaires intimes; 3) prévoit que l’étranglement est une forme aggravée d’agression; et 4) énonce explicitement qu’une preuve d’abus contre un partenaire intime est un facteur aggravant aux fins de la détermination de la peine.
La violence entre partenaires intimes est une réalité pour au moins une femme sur deux au Canada. Les femmes autochtones, transgenres, âgées, néo-canadiennes ou handicapées courent un risque accru de subir de la violence en raison des barrières et des échecs systémiques. Les conséquences personnelles et souvent permanentes de la violence à l'égard des femmes sont énormes.
Le quatrième domaine de réforme consiste à accroître l'efficacité des tribunaux en limitant la disponibilité des enquêtes préliminaires. L'enquête préliminaire est un processus facultatif utilisé pour déterminer s'il y a suffisamment de preuves pour envoyer un accusé au procès. Le projet de loi limitera leur disponibilité aux adultes accusés d'infractions très graves passibles d'emprisonnement à perpétuité, comme le meurtre et l'enlèvement.
Je reconnais qu'il s'agit d'un changement important. Ce n'est pas un changement que nous proposons à la légère. Il est le fruit d'un processus de consultation approfondie avec mes homologues des provinces et des territoires ainsi qu'avec les tribunaux, et il est fondé sur les meilleures données disponibles. Par exemple, nous savons qu'en 2015-2016, les causes devant les cours provinciales impliquant des enquêtes préliminaires ont pris plus de quatre fois plus de temps pour en arriver à une décision que les causes sans enquête préliminaire.
Il est important de noter qu'il n'existe pas de droit constitutionnel à une enquête préliminaire et qu'une telle enquête n'est pas nécessaire à un procès équitable tant que la Couronne satisfait à ses exigences en matière de divulgation. Dans l'arrêt Jordan, la Cour suprême du Canada a demandé au Parlement de jeter un regard neuf sur les processus actuels et de reconsidérer la valeur des enquêtes préliminaires à la lumière des règles générales de divulgation qui existent aujourd'hui. Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles a également recommandé qu'elles soient restreintes ou éliminées.
Les mesures proposées permettront de réduire le nombre d'enquêtes préliminaires d'environ 87 %, de s'assurer qu'elles sont toujours disponibles pour les infractions plus complexes et graves, d'aider à désengorger les tribunaux et de réduire le fardeau des témoins et des victimes de devoir témoigner deux fois, une fois lors d'une enquête préliminaire et une fois au procès. Par exemple, cette mesure éliminera la nécessité pour un témoin vulnérable dans un procès pour agression sexuelle sur un adulte ou un enfant d'avoir à témoigner deux fois.
Je suis convaincue que ces réformes ne réduiront pas l'équité des procès, que les procureurs continueront de prendre au sérieux leurs obligations de divulgation, que nos tribunaux continueront de respecter le droit de présenter une défense pleine et entière et que les processus existants, comme les enquêtes préalables hors cour, qui ont déjà été mis en œuvre dans certaines provinces, au Québec et en Ontario par exemple, continueront de jouer leur rôle.
Je vais maintenant aborder le cinquième grand domaine de réforme proposé dans le projet de loi , soit la reclassification des infractions. Le Code criminel classifie les infractions en infractions punissables par procédure sommaire, en infractions punissables par mise en accusation et en infractions mixtes. Les infractions mixtes peuvent faire l'objet d'une mise en accusation ou d'une procédure sommaire. C’est le procureur qui décide après avoir étudié les faits et les circonstances de l’affaire. Le projet de loi transformerait en infractions mixtes 136 infractions punissables par mise en accusation et normaliserait à deux ans moins un jour la peine maximale par défaut des infractions punissables par procédure sommaire dans le Code criminel.
Ces propositions ne nuiraient pas à la capacité du tribunal d’imposer des peines proportionnelles ni de changer les peines maximales pour les infractions punissables par mise en accusation. Le projet de loi propose d’offrir aux procureurs plus de latitude afin de poursuivre par procédure sommaire devant les tribunaux provinciaux pour des infractions moins graves. Cela permettrait aux affaires de se régler plus rapidement et aux tribunaux supérieurs de se pencher sur les affaires les plus graves, ce qui augmenterait considérablement l’efficience globale du système.
Soyons clairs: cette réforme ne vise en aucun cas à transmettre le message que certaines infractions sont moins graves que d’autres et devraient être assujetties à des peines moindres. Il s’agit plutôt d’accorder plus de latitude à nos procureurs afin qu’ils choisissent la procédure la plus efficiente et la mieux indiquée, compte tenu de la situation qui les occupe. Les infractions graves continueront d’être traitées avec la sévérité voulue et les infractions moindres accapareraient moins le temps des tribunaux, tout en conservant la sévérité associée à une accusation criminelle.
Le sixième domaine de réforme proposé par le projet de loi concerne la sélection des jurés.
La discrimination dans la sélection des jurés est bien documentée depuis de nombreuses années. Des préoccupations entourant la discrimination dans le cadre des récusations péremptoires et ses effets sur la représentation des Autochtones au sein des jurys ont été soulevées dès 1991 par le sénateur Murray Sinclair, qui était alors juge, dans le rapport de la Commission d’enquête sur l’administration de la justice et les Autochtones du Manitoba. Ce rapport, datant maintenant de plus de 25 ans, demandait explicitement l’abrogation des récusations péremptoires. Plus récemment, le juge la Cour suprême à la retraite Frank Iacobucci a abordé cette question dans son rapport de 2013 sur la représentation des Premières Nations au sein des jurys de l’Ontario.
Des réformes dans ce domaine sont attendues depuis trop longtemps. Les récusations péremptoires donnent au prévenu et à la Couronne la capacité d’exclure un juré sans avoir à se justifier. Dans la pratique, cela peut être utilisé de façon discriminatoire afin d’en arriver à une composition particulière du jury, et cela s’est fait. Le projet de loi propose d’imiter des compétences telles que l’Angleterre, l’Écosse et l’Irlande du Nord en les abolissant.
Afin d’apporter plus d’équité et de transparence au processus, la législation conférerait au juge le pouvoir de décider d’exclure ou pas les jurés faisant l’objet d’une récusation motivée. La loi renforcerait le pouvoir des juges d’écarter certains jurés afin d'obtenir un jury plus diversifié, ce qui en retour augmenterait la confiance du public à l’égard de l’administration de la justice. Les tribunaux sont déjà familiarisés avec la notion d’exercer leurs pouvoirs à cette fin.
Je suis convaincue que les réformes rendront le processus de sélection des jurés plus transparent, qu'elles favoriseront l’équité et l’impartialité, qu'elles amélioreront l’efficacité globale des procès devant jury et qu'elles renforceront la confiance du public dans le système de justice pénale.
Le septième domaine de réforme renforcera la gestion des dossiers des tribunaux. Comme la Cour suprême du Canada l’a souligné dans sa décision de 2017 dans l’affaire Cody, les juges jouissent d’une position unique pour encourager et favoriser le changement de culture. Je suis tout à fait d’accord. Les juges s’occupent déjà de gérer les affaires et de voir à les traiter rapidement et équitablement grâce aux pouvoirs existants prévus dans le Code criminel et les règles judiciaires provinciales. Les réformes proposées renforceraient ces pouvoirs en permettant par exemple de nommer les juges responsables de la gestion de l’instance le plus tôt possible dans la procédure.
En plus des réformes majeures dont j’ai parlé jusqu’ici, le projet de loi apportera des modifications techniques afin d’accroître l’efficacité, notamment en facilitant le recours à la technologie à distance ainsi qu'en consolidant et en précisant le pouvoir du procureur général du Canada d’intenter des poursuites.
Enfin, le projet de loi permettra de faire un meilleur usage du temps limité dont dispose le Parlement en englobant trois projets de loi qui portent sur la justice dont le Parlement est actuellement saisi: les projets de loi , et .
En terminant, le projet de loi propose des réformes constructives qui accéléreront les procédures pénales et qui amélioreront la sécurité de la population canadienne tout en offrant des mesures pour régler le problème de la surreprésentation des peuples autochtones et des Canadiens marginalisés dans le système de justice pénale.
Le système de justice pénale canadien doit être juste et équitable. Les victimes, les familles, les accusés et tous les intervenants qui y évoluent ne méritent rien de moins. J’exhorte tous les députés à appuyer cette importante mesure législative.
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Madame la Présidente, j'interviens à la Chambre aujourd'hui pour aborder certaines des graves préoccupations qu'ont les conservateurs à propos du projet de loi , Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents et d'autres lois et apportant des modifications corrélatives à certaines lois.
Cela dit, je dois souligner que nous sommes d'accord avec au moins une des parties de ce projet de loi, soit les modifications relatives à la violence contre un partenaire intime. J'aime l'idée de l'inversion du fardeau de la preuve pour les personnes qui ont déjà été reconnues coupables d'avoir agressé leur conjoint et qui demandent à être libérées sous caution. À mon avis, c'est une bonne idée.
J'aime l'idée qu'on pense à restreindre le nombre d'enquêtes préliminaires. Par contre, nous avons de sérieuses réserves sur d'autres points. Encore une fois, elles portent sur l'intention du gouvernement de réduire les peines en faisant de la déclaration de culpabilité par procédure sommaire une option en matière de poursuite, ce qui peut aboutir à une peine aussi minime qu'une amende.
Soyons clairs. Il est question ici de crimes très graves considérés à l'heure actuelle comme des actes criminels passibles d'un emprisonnement maximal de 10 ans. Je vais mentionner certains de ces crimes pour sensibiliser les Canadiens aux énormes changements prévus par le gouvernement et aux conséquences négatives qu'auront ces changements sur la santé et le bien-être de toute la population.
Certaines des infractions comprennent, sans toutefois s’y limiter, la participation à l’activité d’un groupe terroriste, quitter le Canada pour participer à une activité d’un groupe terroriste, la punition d’un émeutier, la dissimulation d’identité, l’abus de confiance, les actes de corruption dans les affaires municipales, l’achat ou la vente d’une charge, influencer ou négocier une nomination ou en faire commerce, le bris de prison, le fait d’aider un prisonnier de guerre à s’évader, gêner ou arrêter un ministre du culte ou lui faire violence, causer des lésions corporelles par négligence criminelle, la conduite avec capacités affaiblies causant des lésions corporelles, l’omission ou le refus de fournir des échantillons de sang, la traite de personnes, la rétention ou la destruction de documents, l’enlèvement d’une personne âgée de moins de 16 ans et l’enlèvement d’une personne âgée de moins de 14 ans, le mariage forcé, le mariage de personnes de moins de 16 ans, l’encouragement au génocide, l’incendie criminel avec intention frauduleuse, et la participation aux activités d’une organisation criminelle.
La simple lecture de cette liste est ahurissante. Offrir à un juge l’option d'imposer des peines plus légères ou même des amendes aura inévitablement pour conséquence que des peines clémentes seront imposées pour certains crimes très graves.
Les libéraux disent qu’ils ont présenté ce projet de loi pour répondre à la crise du système judiciaire, qu’ils ont en grande partie créée eux-mêmes en ne nommant pas le nombre nécessaire de juges à la magistrature. Je suis bien placé pour le savoir. Pendant mes six ans et demi à titre de ministre de la Justice, je n’ai jamais vu une pénurie de candidats qualifiés pour pourvoir les postes vacants à la magistrature où que ce soit, et en Alberta en particulier. Au début du mois, il y avait 11 postes vacants à la Cour du Banc de la Reine et trois à la Cour d’appel. Quel est le problème? Il y a des personnes qualifiées dans la province de l’Alberta qui peuvent et qui devraient être nommées à la magistrature. Ils ont maintenant commencé à en trouver quelques-unes en mai, mais cela doit être quelque chose de continu.
Pour en revenir au projet de loi, les Canadiens savent qu'atténuer certaines infractions criminelles très graves en offrant aux juges le pouvoir discrétionnaire de procéder par voie de déclaration sommaire n’est pas un effet dissuasif adéquat, et que les auteurs d’actes délictueux graves n’auront pas payé le plein prix de leur infraction.
Une autre Canadienne qui n'est que trop consciente du dommage que ce projet de loi pourrait causer est Sheri Arsenault, directrice pour l'Alberta de Families For Justice. Elle a perdu son fils à cause d’un conducteur aux facultés affaiblies en 2011. L’automne dernier, elle a livré, dans son témoignage devant le comité de la justice, l’histoire déchirante de la façon dont la vie beaucoup trop courte de son fils a pris fin, quand lui et deux de ses amis ont été happés et tués par un conducteur aux facultés affaiblies. Les trois garçons venaient juste de terminer leurs études secondaires et avaient évidemment un avenir très prometteur devant eux.
Récemment, elle a écrit une lettre destinée au gouvernement, où elle indique notamment ceci:
En tant que victime, une mère qui a perdu son fil de 18 ans, je travaille d'arrache-pied depuis ce temps pour défendre les intérêts de toutes les victimes d'infractions graves. Tous mes efforts semblent avoir été vains lorsque j'ai lu attentivement le contenu du projet de loi C-75. Je ne comprends pas pourquoi le gouvernement actuel estime que la conduite avec facultés affaiblies n'est pas un crime grave, alors qu'il s'agit de la première cause de décès attribuable à un acte criminel au Canada. Elle est aussi la cause d'un nombre considérable de blessures et elle dévaste des milliers de familles chaque année.
La sécurité publique de tous les Canadiens devrait être une priorité pour tous les ordres de gouvernement, peu importe leur allégeance politique ou leur idéologie. La sécurité de tous les Canadiens devrait être votre priorité, et tous les Canadiens devraient s'attendre à ce que les peines conviennent à la gravité de certains crimes pour qu'elles puissent non seulement dissuader les autres de commettre le même crime, mais aussi qu'elles dissuadent les délinquants de les commettre à nouveau et pour que les victimes et les collectivités aient l'impression que justice a été rendue. Les déclarations de culpabilité par procédure sommaire ne font rien pour dissuader les délinquants ni pour les tenir responsables et elles accablent davantage les victimes. Ce projet de loi ignore les victimes. Le système de justice devrait être renforcé et non affaibli, et les droits des victimes et des collectivités devraient avoir préséance sur le traitement des délinquants et des criminels.
Voilà ce qu'elle a écrit au gouvernement à la suite de son analyse du projet de loi , et elle a raison.
Je suis certain que nous entendrons parler de gens qui étaient gravement préoccupés par la conduite avec facultés affaiblies et toutes ses conséquences. Je vais les écouter. J’espère qu’ils se présenteront devant le comité de la justice et qu’ils diront au gouvernement comment ils se sentent à ce propos. La déclaration de cette victime n’aurait pas pu être plus claire.
Dans sa forme actuelle, le projet de loi ne protégerait pas les Canadiens. Il les mettrait davantage en péril, car des délinquants dangereux pourraient être remis en liberté sans avoir été réhabilités et sans avoir payé le plein prix de leur infraction.
Mme Arsenault a soutenu que des peines légères mènent souvent à la récidive, avec de terribles conséquences. Elle a cité par exemple un cas tragique de conduite avec facultés affaiblies en 2010 qui illustre très bien son argument.
Allan Simpson Wood, un résident de Surrey, conduisait à une vitesse presque deux fois plus élevée que la limite lorsqu’il est entré en collision frontale avec la voiture de Bryan McCron sur la route Colebrook, à Surrey, en juillet 2010, tuant M. McCron et blessant son fils de 17 ans, Connor. Il a ensuite agressé l’adolescent qui appelait le 911 pour tenter de sauver son père mourant. M. Wood avait déjà été condamné en 2002 pour conduite avec facultés affaiblies.
Si on laisse le projet de loi devenir loi dans sa forme actuelle, d’autres tragédies comme celles-là se produiront, car la peine possible prévue par le projet de loi C-75 ne constituera pas un moyen de dissuasion adéquat, à mon avis et à celui de bien des Canadiens ainsi que de tous mes collègues ici.
Il n’est pas nécessaire que les choses se déroulent ainsi dans l’avenir si le gouvernement libéral acceptait seulement d'entendre raison et de renoncer à mettre en oeuvre les dispositions irresponsables de cette législation.
Un autre problème en ce qui a trait à la conduite avec facultés affaiblies est qu’il n’y avait l’automne dernier que 800 experts en reconnaissance des drogues dans l’ensemble du pays. À l’aube de la légalisation du cannabis au Canada, les services de police de tout le pays prévoient une montée en flèche du nombre d’accusations de conduite avec facultés affaiblies. De fait, aussi récemment que l’automne dernier, le comité de la justice a entendu qu’il faudrait former 2 000 experts en reconnaissance des drogues. La police de l’Ontario a sonné l’alarme la semaine dernière, déclarant que le manque de fonds accompagnant la législation sur la conduite avec facultés affaiblies par le cannabis était inquiétant. Il est évident que le gouvernement n’a pas accordé une attention suffisante à cette grave question.
Il y a tant d’infractions troublantes que le projet de loi traiterait comme de possibles délits punissables sur déclaration sommaire de culpabilité qu’il est difficile de savoir exactement lesquelles souligner.
Le bris de prison est une de ces infractions et fait penser au cas de Benjamin Hudon-Barbeau, un ancien associé des Hell's Angels reconnu coupable de deux meurtres, de deux tentatives de meurtre et d’une série de crimes en 2012 à l’occasion d’une dispute territoriale liée à la drogue dans les Laurentides. Il s’était évadé en hélicoptère d’une prison du Québec et purge présentement une peine de 35 ans d'emprisonnement.
Cependant, aux termes du projet de loi , non seulement cette infraction serait punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, mais sa participation aux activités d'une organisation criminelle le serait aussi. Cet homme a été désigné comme étant un délinquant dangereux. Or, si les dispositions de ce nouveau projet de loi avaient été en vigueur au moment où il a commis ses crimes, sa peine aurait pu être beaucoup plus courte. L'idée que ces infractions ne sont pas suffisamment graves pour que l'on traduise ceux qui les commettent en justice et les reconnaisse coupables d'un acte criminel est totalement inacceptable. Une amende n'est pas appropriée dans un tel cas. Une amende ne convient pas pour ce genre d'infractions.
Selon nous, il est inconcevable que le gouvernement puisse mettre la santé et la sécurité des Canadiens en danger pour résoudre rapidement un problème auquel il a contribué.
Le comité de la justice a récemment parcouru le Canada afin d'étudier les effets épouvantables de la traite de personnes. Tirer un avantage matériel de la traite de personnes est un autre crime terrible. Si le projet de loi est adopté dans sa forme actuelle, il rendra le fait de bénéficier d'un avantage matériel provenant de la traite de personnes au Canada une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire. Imaginons quelqu'un qui s'enrichit grâce à la traite de personnes, et qui sait qu'il pourrait s'en tirer avec une simple amende s'il se fait prendre. Les gens dans ce milieu seraient bien heureux de payer 1 000 $.
Les libéraux ont aussi réussi à éliminer en douce les peines consécutives pour la traite de personnes. La notion selon laquelle le trafic continu d’êtres humains ne constitue pas une aggravation d’un acte criminel est complètement inadmissible. Je crois réellement que les Canadiens sont d’accord avec nous, du Parti conservateur, pour trouver cela absolument aberrant.
Comme je l’ai dit auparavant à la Chambre, des milliers d’enfants canadiens sont victimes de la traite de personnes entre l’âge de 9 ans et l’âge de 14 ans. Même si, malheureusement, nombre de ces crimes ne sont pas signalés, des organisations non gouvernementales nous ont informés que cela se produit réellement. Nos enfants, qui sont notre ressource la plus précieuse, font l’objet d’abus à un taux alarmant. Cette forme odieuse d’esclavage des temps modernes est bien réelle et ne connaît pas de limites sociales ou économiques.
Comme je l’ai mentionné précédemment, l’industrie du sexe vise des gens de plus en plus jeunes. Au fur et à mesure que la demande de rapports sexuels tarifés augmente, l’offre suit, et nos enfants ainsi que d’autres personnes vulnérables sont de plus en plus la cible de l’exploitation sexuelle.
Pendant les audiences du comité de la justice concernant la traite de personnes, nous avons entendu le témoignage d’un ancien trafiquant, Donald, selon qui si le gouvernement fait preuve de laxisme en ce qui a trait aux peines imposées à ceux qui sont trouvés coupables de traite de personnes, cela équivaut à donner carte blanche à ces trafiquants pour que cette industrie méprisable prenne de l’expansion et cause de nouveaux torts à des enfants canadiens.
Notre ancienne collègue et députée Joy Smith a témoigné que 23 000 enfants étaient victimes de la traite de personnes dans notre pays chaque année, nombre d’entre eux finissant par en mourir. Il s’agit d’une grave épidémie, et le gouvernement ne fait rien pour la contrer en offrant des peines plus clémentes à ceux qui tirent profit de ces crimes odieux. L’obligation des législateurs est de protéger les gens vulnérables, et non pas de faciliter les attaques contre eux. C’est l’obligation morale que nous avons. Le gouvernement fait faux bond aux citoyens du Canada en ne conservant pas les mesures actuellement prévues dans le Code criminel et en diminuant la protection accordée à nos enfants.
De toute évidence, le gouvernement n’a pas bien réfléchi à cette question. En offrant l’option de peines plus légères, il encourage l’exploitation de nos enfants. Comment peut-il justifier l’allégement des peines pour des crimes parmi les plus effroyables? La traite de personnes n’est pas et ne devrait pas être considérée comme une infraction mineure. Le fait d'ériger en infractions mixtes ces crimes graves est tout simplement malavisé, et il est incompréhensible que le gouvernement ne voie pas les dommages que l’adoption du projet de loi pourrait causer au bien-être et à la sécurité de tous les Canadiens.
L’élimination de l’arriéré des cas dans le système de justice pénale ne devrait jamais se faire au détriment des victimes. Elle ne devrait pas non plus compromettre la sécurité et le bien-être de nos enfants. Je veux d’ailleurs rappeler qu’il s’agit d’une crise que les libéraux ont contribué à créer.
À la veille du long week-end de Pâques, les libéraux ont déposé ce projet de loi omnibus de 302 pages. J’imagine qu’ils croyaient que les Canadiens, le public en général, ne prendraient pas le temps de le lire, mais ils se sont trompés. Les Canadiens partout au pays entendent parler de ce projet de loi et expriment leurs préoccupations. J’ai récemment mis une vidéo sur Facebook à ce sujet. Les Canadiens doivent être conscients des répercussions graves que ces dispositions législatives pourraient avoir sur leurs familles et leurs communautés.
Les conservateurs ont toujours eu la ferme conviction que les droits des victimes, de même que la protection des Canadiens, devraient être au coeur du système de justice. C'est pourquoi nous avons adopté la Charte canadienne des droits des victimes quand nous étions au pouvoir.
Parmi les quatre grands droits prévus par cette charte figure le droit à la protection des victimes d'un crime. À mon avis, dans son libellé actuel, le projet de loi n'offre pas de protection aux victimes d'un crime. Je dirais plutôt que c'est l'inverse. Au lieu de rassurer la population et de lui assurer le droit de vivre en toute sécurité dans une société sûre et stable, cette mesure législative créerait une société vivant sous la menace et avec les méfaits de contrevenants qui, bien franchement, n'auraient pas eu la possibilité d'être réadaptés en purgeant une peine proportionnelle au crime qu'ils ont commis.
Parmi les nombreuses infractions visées par le projet de loi, mentionnons celles qui concernent la participation à une activité d'un groupe terroriste et le fait de quitter le Canada pour participer à une activité d'un groupe terroriste. Il y a une question qui me chicote vraiment: pourquoi faudrait-il considérer comme une infraction mineure le fait de quitter le Canada pour participer à une activité d'un groupe terroriste? Les libéraux lisent les journaux comme nous. N'ont-ils pas remarqué que ce problème prend de l'ampleur dans le monde? Ils cherchent à le régler en faisant de ce cas une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, c'est-à-dire qu'ils pensent que les délinquants comprendront le message et qu'ils ne reviendront pas à la charge lorsqu'ils auront reçu une amende ou une peine négligeable.
Je n'y crois pas. Ces dispositions pourraient avoir une incidence terrible sur les Canadiens. Je presse le gouvernement libéral de renoncer à tout cela et de conserver les dispositions du Code criminel qui évitent aux Canadiens d'être à nouveau victimisés. Le projet de loi ne fait rien en ce sens.
J'implore les députés de se rallier à moi pour que les Canadiens soient encore pleinement protégés par le Code criminel. Nous ne tolérerons pas que les auteurs d'un crime s'en tirent avec la plus légère des peines possibles. Il s'agit d'une mauvaise mesure législative.
Par conséquent, je propose:
Que la motion soit modifiée par substitution, aux mots suivant le mot « Que », de ce qui suit:
« la Chambre refuse de donner deuxième lecture au projet de loi C-75, Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents et d'autres lois et apportant des modifications corrélatives à certaines lois, étant donné que le projet de loi non seulement ne prévoit aucune mesure pour soutenir les victimes d’actes criminels, mais qu’il a notamment pour effet de: a) modifier la suramende compensatoire; b) supprimer l’exigence selon laquelle le procureur général doit décider dans certaines circonstances s’il convient de demander une peine pour adulte; c) retirer au tribunal pour adolescents le pouvoir d’ordonner la levée de l’interdiction de publication dans le cas d’un adolescent qui est condamné à une peine pour adolescent pour avoir commis une infraction accompagnée de violence; d) retarder les peines consécutives pour ceux qui font la traite de personnes. »
J'espère que tous les députés appuieront cet amendement.
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Madame la Présidente, je suis ravi de prendre la parole aujourd'hui pour participer à un débat qui se révèle animé. Qui aurait cru que le système de justice pénale soulèverait les passions? Comme mes collègues qui se sont exprimés avant moi, au NPD, nous avons mené de vastes consultations avec des avocats de la défense, des universitaires, des procureurs, des sous-procureurs généraux et d'autres personnes occupant des postes semblables. Malheureusement, à la suite de ces discussions, nous en sommes venus à la conclusion que nous devions nous opposer au projet de loi.
Cela dit, je tiens à préciser à mes collègues que notre objectif est de collaborer avec le gouvernement, de le prendre au mot et de lui offrir notre aide pour déterminer les façons d'améliorer le projet de loi au comité de la justice. Après tout, la mesure législative compte plus de 300 pages. C'est un projet de loi omnibus qui modifie le système de justice pénale. Nous souhaitons travailler de façon constructive pour l'améliorer dans l'intérêt des Canadiens. Nous voulons donc le renvoyer au comité le plus rapidement possible à cette fin.
Évidemment, dans toute réforme de la justice pénale, il y a deux objectifs. L'efficience est clairement l'objectif déclaré du gouvernement: accroître l'efficacité des tribunaux, éliminer l'arriéré et gérer les conséquences du cas Jordan, dans lequel la Cour suprême a confirmé que nous devons avoir un système de justice rapide au Canada. L'efficience est le grand objectif avancé par le gouvernement, et j'y reviendrai. En même temps, nous ne pouvons jamais, bien entendu, perdre de vue les droits de l'accusé dans notre système de justice.
Je dois dire d'emblée que, selon nos recherches et nos consultations, il y a de bonnes mesures dans ce projet de loi, et je vais en parler, mais il y a également des aspects très problématiques qui, dans certains cas, ont été soulevés par tous ceux que nous avons consultés. C'est donc ce que nous souhaitons mettre en lumière dans le cadre de ce débat.
Par exemple, Sayeh Hassan, avocate criminaliste basée à Toronto, a résumé ce que nombre de gens nous ont dit en écrivant ceci:
Même si certaines dispositions du projet de loi C-75 pourraient améliorer le système de justice pénale, dans bien d'autres cas, non seulement les mesures proposées seront inefficaces lorsqu'il s'agit de réduire les délais, mais elles auront également pour effet d'éliminer nombre de droits actuellement accordés aux accusés.
Le problème le plus flagrant, c'est que le gouvernement a choisi de ne pas du tout tenir compte d'un aspect dont bien des gens ont parlé, c'est-à-dire la nécessité d'abolir les peines minimales obligatoires. Il était permis d'espérer que la ministre s'attaque à ce problème. Après tout, Sean Fine, auteur du Globe and Mail spécialisé dans les affaires juridiques, a écrit ceci:
Déjà en octobre 2016, la ministre de la Justice a dit, lors d'un discours devant la Criminal Lawyers' Association, qu'elle allait changer « prochainement » les dispositions législatives concernant les peines minimales obligatoires. Quelques jours plus tard, elle a dit au Globe and Mail qu'on verrait bientôt les nouvelles dispositions législatives et qu'elles seraient présentées « certainement au début de la prochaine année ».
Nous sommes maintenant en 2018, et nous sommes saisis d'un projet de loi de 300 pages qui ne dit rien sur cette initiative de réforme et qui aurait pu résoudre le problème des délais beaucoup plus efficacement. Je souligne également que cet objectif figurait dans la lettre de mandat de la ministre et qu'il n'est pas pris en compte dans ce projet de loi de 300 pages. Même si j'ai énormément de respect pour la ministre, je dois souligner que l'absence de réforme à l'égard des peines minimales obligatoires représente une occasion manquée.
Nous savons tous que le système judiciaire est engorgé et ainsi de suite. Cela a déjà été dit, mais nous sommes tous conscients des graves injustices qui ont été commises. Le mois dernier, à Calgary, Nick Chan, qui est un membre et un chef présumé de gang, dont le cas a été très médiatisé, a été acquitté des accusations de meurtre, de complot en vue de commettre un meurtre et d'avoir dirigé une organisation criminelle. Pourquoi? Parce qu'il n'aurait pas été possible de tenir un procès dans un délai raisonnable tel que le prévoit l'arrêt Jordan de 2016. Les Canadiens estiment que c'est inacceptable.
La question qu'il faut poser est la suivante: ce projet de loi résout-il vraiment ce problème? Bien des gens soutiennent que ce sérieux problème demeure. Dans son exposé de position, la Criminal Lawyers' Association affirme notamment:
Les peines minimales obligatoires entravent l'efficacité du processus de règlement des cas en limitant le pouvoir discrétionnaire de la Couronne d'offrir une peine qui réduira la capacité de la Couronne d'adopter une position favorisant un règlement avant le procès.
Voici ce qui se produit. Comme les avocats de la défense savent qu'il y a une peine minimale obligatoire, ils évitent de prendre le risque de compter sur la discrétion de la cour étant donné que les conservateurs de Stephen Harper ont essentiellement éliminé le pouvoir discrétionnaire des juges. Résultat: des gens subissent des procès où, dans le passé, ils auraient plutôt plaidé coupables à de moindres accusations. Il est inexcusable que rien de tout cela n'ait été abordé dans ce projet de loi.
Ma collègue de a aussi déclaré à maintes reprises que le Canada est aux prises avec un problème de surreprésentation des femmes autochtones, en particulier. Ma collègue a travaillé sur ce dossier en tant que membre du comité de la condition féminine. Pendant son témoignage au comité, Jonathan Rudin, des Services juridiques autochtones, a insisté sur l'inaction du gouvernement concernant l'abolition des peines minimales obligatoires et de leur effet sur les femmes autochtones. Il a dit:
Nous devons penser au fait qu'il existe encore des sentences minimales obligatoires qui empêchent les juges d'infliger aux femmes autochtones les peines qu'ils voudraient leur infliger. Certaines dispositions empêchent encore les juges de recourir à des peines avec sursis, lesquelles évitent l'incarcération aux femmes.
Avant tout, il a pressé le comité de recommander une mesure législative afin de redonner aux juges ce pouvoir discrétionnaire. C'est ce que les libéraux avaient promis de faire et, de toute évidence, ils ne l'ont pas fait. En 2015 — et c'est probablement pire aujourd'hui —, la proportion d'hommes autochtones d'âge adulte dans la population carcérale était huit fois plus élevée que dans la population générale, et douze fois plus élevée dans le cas des femmes autochtones. Toute mesure susceptible de régler ce problème doit être étudiée sérieusement. Le gouvernement a échoué dans le mandat que lui a confié le à cet égard.
J'ai promis que je m'attarderais à des aspects du projet de loi auxquels le NPD est favorable.
Premièrement, il élimine ce qu'on appelle les dispositions zombies du Code criminel, ce qui est une bonne chose. Par exemple, la criminalisation du sexe anal aurait pu être abolie il y a longtemps et nous sommes ravis que le gouvernement l'ait fait. J'aurais souhaité qu'il accorde le même sort à d'autres dispositions zombies, comme la disposition du Code criminel qui interdit le ski nautique en soirée. Peut-être le gouvernement se penchera là-dessus ultérieurement.
Deuxièmement, il est judicieux de redonner aux juges le pouvoir de décider d'imposer moins ou pas de suramendes compensatoires. Je félicite le gouvernement d'avoir agi sur ce point. Comme l'a affirmé le député conservateur, je crois, élargir la définition de « partenaire intime » est également un pas dans la bonne direction. De plus, il est bon de créer un autre processus concernant les cas de non-respect des conditions de mise en liberté et de codifier le principe dit de l'échelle, qui exige qu'on impose la forme la moins pénalisante de mise en liberté.
Je suis moi-même en faveur de l'abolition des récusations péremptoires. Je sais que la question suscite la controverse, mais je suis d'avis que c'est une bonne chose. Je tiens à le signaler.
D'un autre côté, voici quelques aspects négatifs.
Absolument toutes les personnes à qui nous avons parlé ont dit que la disposition sur l'admissibilité des soi-disant éléments de preuve de routine recueillis par la police est trop vaste et pourrait être problématique pour les personnes marginalisées en particulier. Tout le monde s'entendait pour dire que le libellé de l'élément de preuve routine doit être corrigé. Beaucoup de gens étaient heureux que l'heure à laquelle l'infraction a été commise, la météo ou les résultats de laboratoire de routine soient disponibles. Cependant, selon la façon dont la disposition est rédigée, elle pourrait même permettre à la Couronne de refuser qu'un policier vienne témoigner. Je ne pense pas que c'était l'intention du gouvernement, mais c'est un exemple de ce qui semble être un projet de loi rédigé à la hâte et qui doit être corrigé. L'ironie, c'est que la plupart des juges vont permettre le contre-interrogatoire des agents de police, de sorte que le sergent Brown devra être rappelé plus tard, ce qui entraînera plus de retard. Ce n'est certainement pas intentionnel. C'est certainement quelque chose que nous pouvons régler en travaillant ensemble.
Le professeur Peter Sankoff de l'Université de l'Alberta est allé jusqu'à qualifier cette mesure d'extrêmement dangereuse et inefficace. Ce n'est pas seulement nous qui le disons.
Nous avons beaucoup entendu parler des infractions mixtes aujourd'hui. Je suis persuadé que le gouvernement conviendra qu'il semble nécessaire de modifier l'aspect des infractions mixtes. Comme des collègues l'ont souligné, le transfert aux tribunaux provinciaux de nombreuses infractions ne fera que déplacer le problème de l'engorgement des cours supérieures vers les cours provinciales, car un plus grand nombre d'affaires seront traitées par déclaration sommaire de culpabilité. Je me demande si la consultation avec les ministres provinciaux et territoriaux a été claire à ce sujet. En Colombie-Britannique, la cour provinciale entend déjà 95 % de toutes les affaires criminelles. Je suis sûr que ce n'est pas si différent ailleurs, alors j'invite le gouvernement à réfléchir à la façon dont nous pouvons travailler ensemble pour régler ce problème de transfert de surcharge évident.
Un autre sujet de préoccupation, peut-être moins évident, c'est que le gouvernement a l'intention d'augmenter les peines maximales pour les déclarations de culpabilité par procédure sommaire. Concrètement, cela signifie que des acteurs comme les étudiants en droit et les techniciens juridiques, qui sont actuellement en mesure de représenter des personnes accusées d'une infraction passible d'une peine maximale de six mois ou moins, ne pourront pas le faire pour toute une gamme d'infractions si ces changements vont de l'avant. C'est une conséquence involontaire, mais il faut certainement s'y attarder, car non seulement nous avons déjà un problème avec les personnes non représentées dans les cours provinciales et les juges qui font des pieds et des mains, comme il se doit, pour aider ceux qui n'ont pas les moyens d'obtenir les services d'un avocat, mais maintenant ils ne pourront pas non plus obtenir les services d'un technicien juridique ni d'un étudiant en droit pour les représenter dans certains cas. Encore une fois, j'aurais cru que le gouvernement ne voulait pas que cela se produise, mais il semble que cela se produira.
En terminant, je tiens à dire que je suis conscient que le budget de 2018 augmente le financement de l'aide juridique. Je crois que tout le monde s'entend pour dire qu'il était plus que temps. Je félicite le gouvernement d'avoir pris cette décision. Or, en Colombie-Britannique, comme on a pu le lire dans le Vancouver Sun d'hier, c'est trop peu trop tard. Certes, il s'agit d'une augmentation faramineuse par rapport à ce qui se faisait auparavant, mais selon le PDG de la Legal Services Society, c'est-à-dire les services d'aide juridique de la province, Mark Benton: « De nombreux avocats qui offrent leurs services aux pauvres travaillent à perte, c'est-à-dire à des tarifs insuffisants pour que la plupart puissent gagner leur vie. Tellement bas, en fait, que la LSS a du mal à trouver des avocats et à les garder. » Il faut s'occuper de ce problème.
Mon collègue de Niagara Falls et moi avons discuté tout à l'heure de la question de l'enquête préliminaire, et je sais que nous ne sommes pas du même avis. C'est un fait: les changements proposés feraient diminuer le temps des procédures d'environ 3 % seulement. Le gouvernement est tout fier de dire que la mesure législative réduira de 87 % le nombre d'enquêtes préliminaires, ce qui peut paraître excellent, mais il se garde bien d'ajouter qu'elle n'aura à peu près aucun effet sur la durée des procédures. Pourquoi proposer une telle mesure, alors? Pourquoi courir le risque qu'il y ait davantage de déclarations de culpabilité erronées, comme le craint le président du Conseil canadien des avocats de la défense, Bill Trudell? Pourquoi retirer aux prévenus un de leurs droits? Le gouvernement répond que le droit à la divulgation établi dans Stinchcombe demeure valide et que nous sommes très loin de l'époque où les enquêtes préliminaires ont vu le jour, mais a-t-il pris le temps de peser le pour et le contre de cette mesure? Nous réduirons la durée des procédures de 3 %, mais certaines personnes pourraient être reconnues coupables à tort. Selon moi, les deux ne se comparent même pas. Les risques sont excessifs, et je crois que cela devrait nous inquiéter.
J'ai déjà parlé de la violence entre partenaires intimes et du cautionnement, alors je ne reviendrai pas là-dessus, parce que le temps file.
Des inquiétudes persistent quant à l'effet qu'aura le projet de loi sur les personnes qui ont fréquenté un pensionnat indien ou qui ont vécu un traumatisme semblable, comme les victimes de la rafle des années 1960. Voici par exemple ce qu'a déclaré la Criminal Lawyers' Association:
Malheureusement, la violence entre partenaires intimes est l'une des séquelles reconnues laissées par les pensionnats autochtones et la rafle des années 1960. L'inversion du fardeau de la preuve à l'étape de la mise en liberté sous caution et l'alourdissement de la peine des personnes reconnues coupables risquent d'empirer la surreprésentation des Autochtones dans les prisons.
C'est une préoccupation qu'ont aussi exprimée les professeures Elizabeth Sheehy et Isabel Grant. Je pense donc que nous devons nous attaquer à cette question et déterminer si nous pouvons trouver une autre solution, même si, à mon avis, celle-ci partait d'une bonne intention.
En conclusion, je veux maintenant souligner quelques mesures qui, selon nous, pourraient nous permettre de régler certains des problèmes.
Premièrement, le gouvernement prétend qu'il a nommé des juges — nous avons entendu les conservateurs faire la même affirmation —, mais il semble toujours y avoir des postes de juge vacants. Je ne veux pas dire qu'il s'agit de l'unique option, mais il faut remédier à la situation dans le cadre d'une solution globale.
Deuxièmement, comme je l'ai mentionné, nous souhaitons que le gouvernement revienne sur sa décision de ne pas revoir les peines minimales obligatoires.
Troisièmement, le NPD estime que le fait de décriminaliser la possession de petites quantités de drogues dans le contexte de la présente crise des opioïdes permettrait assurément de réduire l'engorgement actuel des tribunaux. Qui sont les gens souvent sans représentation dans les tribunaux provinciaux? Il y a un nombre disproportionné de gens aux prises avec des problèmes de santé mentale, de toxicomanes, de gens pauvres qui n'ont tout simplement pas les moyens de se payer un avocat, et l'aide juridique n'a pas la capacité de s'occuper d'eux. Voilà ce qui engorge le système.
Si on examine la situation sous cet angle, nous ferions vraiment de vastes efforts pour réformer le système. Jagmeet Singh a fait une déclaration audacieuse en affirmant qu'une partie de la solution à la congestion des tribunaux passe fort probablement par la décriminalisation de la possession de petites quantités de drogues. La bonne façon de procéder est habituellement de ne pas criminaliser ces problèmes, mais bien de les traiter comme des problèmes de santé mentale et des problèmes de santé. Nous devons trouver une meilleure solution.
À Vancouver et à Victoria, il y a des tribunaux de traitement de la toxicomanie, et on a trouvé des moyens originaux de s'attaquer à ce problème, mais ils n'ont pas été efficaces. Il y a encore de graves problèmes.
En judiciarisant les gens, ils finissent avec un casier judiciaire. Qu'arrive-t-il lorsqu'on a un casier judiciaire? Dans de nombreux cas, on ne peut plus se trouver d'emploi. Y avons-nous pensé? C'est primordial.
J'ai affirmé maintes fois à la Chambre qu'il est injuste que des milliers de Canadiens se retrouvent avec un casier judiciaire pour possession de petites quantités de cannabis. Il y a encore des gens qui ne parviennent pas à obtenir un emploi parce qu'on continue de les accuser en vertu de la loi actuelle. Cependant, les choses sont sur le point de changer. Je félicite le député de d'avoir présenté un projet de loi en vue de radier ces casiers judiciaires. Je ne crois pas que sa mesure législative aille assez loin, mais j'appuierai certes cette initiative.
Finalement, nous offririons de meilleurs soutiens sociaux. C'est là le fond du problème. Nous avons besoin de fonds supplémentaires pour l'aide juridique, ce qui réduirait sûrement le nombre de gens sans représentation et garantirait que davantage d'accusés ont accès à des ressources grandement nécessaires.
Plus tôt aujourd'hui, j'ai parlé d'un excellent résumé sur les consultations menées par le gouvernement à cet égard. Il s'agit plus précisément d'un rapport publié en mars 2018 par le ministère de la Justice, qui s'intitule « Ce que nous avons entendu — Transformer le système canadien de justice pénale ». Je veux lire sa conclusion fondamentale et demander à la Chambre si le projet de loi donnera les résultats escomptés.
Il dit ceci:
Presque tous les participants à la table ronde ont exprimé les mêmes préoccupations majeures. Ils ont dit que presque toutes les personnes qui ont des démêlés avec le système de justice pénale sont des personnes vulnérables ou marginalisées. Elles souffrent de problèmes de santé mentale, de toxicomanie, de pauvreté, d’itinérance et ont déjà été victimes d’actes de violence. La plupart des participants ont estimé que le système de justice pénale n’est pas outillé pour répondre aux problèmes qui sont à la source de comportements criminels chez ces groupes, et qu’il ne devrait pas l’être. Selon les participants, ces problèmes sont aggravés par un recours excessif à l’incarcération.
Nous sommes tout à fait d'accord. J'espère que mes collègues tiendront compte de ces préoccupations et travailleront avec nous au comité de la justice en vue d'apporter les changements dont notre système de justice pénale a évidemment grandement besoin.
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Madame la Présidente, je prends la parole au sujet du projet de loi , un autre projet de loi omnibus présenté par un gouvernement qui avait dit qu'il ne présenterait jamais de projets de loi omnibus. Or, nous voici, encore une fois, devant un autre projet de loi de quelque 300 pages.
Bien franchement, il y a des dispositions dans le projet de loi que j'appuie, mais en général je trouve que cette proposition législative présente de graves problèmes.
Avant d'en venir au fond du projet de loi , je parlerai un peu du processus qui l'entoure.
Cette mesure législative omnibus présente de nouveau quatre projets de loi dont la Chambre est actuellement saisie: le projet de loi , le projet de loi , le projet de loi et le projet de loi . Il s'agit du troisième projet de loi présenté par le gouvernement pour abroger l'article 159 du Code criminel, c'est-à-dire l'article inconstitutionnel concernant les relations sexuelles anales.
Les libéraux ont présenté le projet de loi en grande pompe. Ils voulaient s'attribuer le mérite extraordinaire d'avoir présenté le projet de loi qui propose d'abroger l'article 159. C'était une grande priorité du gouvernement, à tel point que, un an et demi plus tard, le projet de loi C-31 en est toujours à l'étape de la première lecture.
Pour ne pas être en reste, les libéraux ont ensuite présenté le projet de loi , qui éliminerait les articles inconstitutionnels du Code criminel — aussi appelé les lois fantômes —, y compris l'article 159 du Code criminel. Ce projet de loi a été présenté le 8 mars 2017 et il était tellement prioritaire pour le gouvernement que, un an plus tard, il languit toujours à l'étape de la première lecture.
Le gouvernement a maintenant présenté un troisième projet de loi, le projet de loi , pour tenter d'abroger l'article 159 du Code criminel.
Combien de projets de loi faudra-t-il au gouvernement libéral pour abroger un seul petit article du Code criminel? Cela témoigne de sa grossière incompétence et de son incapacité totale de faire progresser un projet de loi ayant trait à la justice. Vu l'incurie caractéristique du gouvernement, les Canadiens ne peuvent que finir par se demander comment ils peuvent lui faire confiance pour résorber l'engorgement des tribunaux canadiens alors qu'il n'est même pas capable de gérer son propre programme législatif.
L'objectif prétendu du projet de loi serait d'éliminer l'engorgement des tribunaux. Il découle de la décision rendue par la Cour suprême dans l'affaire Jordan, il y a près de deux ans. La Cour suprême du Canada a statué qu'il faudrait appliquer un plafond absolu au-delà duquel le délai serait présumé déraisonnable. La Cour suprême a conclu que, dans le cas d'un délai déraisonnable, les accusations portées contre l'accusé seraient suspendues; autrement dit, les poursuites judiciaires s'arrêteraient. Le plafond absolu a été fixé à 30 mois entre le dépôt des accusations et la conclusion réelle ou anticipée du procès dans les affaires instruites devant une cour supérieure et à 18 mois pour les affaires instruites devant une cour provinciale.
Près de deux ans se sont écoulés depuis l'arrêt Jordan, mais, pendant cette période, la est restée les bras croisés et n'a absolument rien fait pour remédier aux retards et à l'engorgement. La ministre est tellement incompétente qu'elle n'a même pas trouvé le moyen de prendre la mesure la plus simple qui soit, c'est-à-dire de pourvoir en temps opportun les postes de juge vacants.
Depuis que la est aux commandes, on observe un nombre jamais vu de postes de juge vacants. En effet, le nombre moyen de postes vacants se situe depuis longtemps entre 50 et 60. En Alberta, où l'engorgement et les retards sont les plus criants, le gouvernement provincial a tenté de remédier à la situation en 2016 en créant, au moyen d'un décret, dix nouveaux postes de juge, soit neuf postes de juge à la Cour du Banc de la Reine et un à la Cour d'appel de l'Alberta. Il faut reconnaître que le gouvernement, dans le budget de 2017, avait prévu des fonds pour des postes supplémentaires de juge. Tout ce que la ministre avait à faire, c'était de pourvoir ces postes.
Les députés savent-ils combien de temps il a fallu à la ministre pour nommer un nouveau juge en Alberta?
Une voix: Combien de temps lui a-t-il fallu?
M. Michael Cooper: Il lui a fallu plus d'un an, madame la Présidente. Ce n'est qu'en décembre 2017 que le juge Grant Dunlop — un ancien collègue à moi, soit dit en passant — a été nommé juge à la Cour du Banc de la Reine. Il s'agit d'une excellente nomination, mais ce n'en est qu'une. Nous sommes maintenant en mai 2018, et le gouvernement n'a toujours pas pourvu ces nouveaux postes de juge.
La ministre dit qu'elle agit, mais son bilan montre l'inverse. Il ne s'agit pas d'une simple question théorique ou abstraite. L'inaction de la ministre entraîne des conséquences graves et réelles. Des centaines de cas ont été rejetés par les tribunaux en raison des retards accumulés, et des milliers d'autres risquent de connaître le même sort. Certains de ces cas sont liés aux accusations les plus graves qui soient, notamment celles de meurtre et d'agression sexuelle. On parle ici de cas ayant fait l'objet d'un sursis ou ayant été rejetés. La personne accusée est libre de retourner dans la société, même si les preuves montrent nettement qu'elle a commis un crime.
Dans son discours, le député de a fait allusion à Nick Chan, dont le cas vient d'être rejeté à Calgary. Qui est Nick Chan? C'est un individu accusé de meurtre au premier degré. C'est un individu accusé d'avoir dirigé une organisation criminelle. Nick Chan est la tête dirigeante d'un gang appelé « Fresh off the Boat », qui est impliqué dans plus d'une dizaine de meurtres. Certains ont dit que Nick Chan était l'un des hommes les plus dangereux — voire le plus dangereux — à Calgary. Aujourd'hui, Nick Chan est un homme libre.
La ministre est en partie responsable de cette situation parce qu'elle n'a pas vu à la nomination de juges en Alberta et ailleurs au Canada. Nick Chan n'est pas le premier criminel dangereux — hommes ou femmes — à avoir retrouvé sa liberté. Hélas, comme le gouvernement n'agit pas, il ne sera pas le dernier.
Après deux ans d'inaction, le gouvernement nous arrive avec le projet de loi . Cette mesure législative est tout ce qu'il y a de plus bancal. Le gouvernement nous dit que les limites imposées sur les enquêtes préliminaires vont beaucoup contribuer à réduire les délais. Dans l'arrêt Jordan, la Cour suprême a effectivement indiqué que, compte tenu du jugement rendu dans l'affaire Stinchcombe, qui date de plus d'un quart de siècle, il était peut-être temps que le Parlement se penche sur l'utilité des enquêtes préliminaires. Depuis que ce jugement a été rendu, les avocats de la défense ont le droit constitutionnel de recevoir la totalité des éléments de preuve pertinents. Les enquêtes préliminaires constituent une forme de communication de la preuve.
Or, en même temps, dans la mesure où il est logique de limiter les enquêtes préliminaires et dans la mesure où cela va accélérer les choses, il est important, à mon avis, de tenir compte de ce qu'a indiqué le député de Victoria dans son allocution, à savoir que les enquêtes préliminaires ne représentent qu'un très petit nombre de cas.
L'Association du Barreau canadien a indiqué que la proportion d'affaires impliquant des enquêtes préliminaires est inférieure à 5 % des affaires et ne prend pas plus de 2 % du temps des tribunaux.
C'est peut-être une bonne mesure, une mesure de ce projet de loi massif qui se veut positive. Toutefois, en ce qui concerne le système plus vaste de traitement de l'arriéré et des retards, au mieux, c'est un très petit pas dans la bonne direction.
Il y a aussi des aspects du projet de loi qui, au lieu de réduire les retards et l'arriéré, y contribueront probablement. Encore une fois, je n'étais pas d'accord avec tout ce que le député de a dit, mais je pense qu'il a soulevé un bon point au sujet de la preuve policière de routine, qui fera probablement en sorte que l'avocat de la défense devra présenter une demande, ce qui entraînera des retards, une demande qui, selon toute vraisemblance, sera accordée.
En ce qui concerne la question de l'élément de preuve de routine présenté par la police, il semble qu'elle offre une solution à la recherche d'un problème qui n'existe pas et, ce faisant, crée un autre problème, un problème qui contribuera à amplifier les délais.
Ensuite, il y a la reclassification des infractions en infractions mixtes. C'est la partie du projet de loi qui, je crois, nous préoccuper le plus, mes collègues conservateurs et moi-même, car nous voyons cela comme une édulcoration des peines.
Avant de parler de la façon dont le projet de loi atténue les peines pour certains crimes très graves, j'aimerais faire des observations sur les répercussions de l'arrêt Jordan. Après tout, c'est la raison pour laquelle nous débattons du projet de loi .
La reclassification des infractions en infractions mixtes signifie que les infractions punissables par mise en accusation qui sont actuellement devant les cours supérieures pourront faire l'objet d'une poursuite devant les tribunaux provinciaux par voie de déclaration de culpabilité par procédure sommaire. Le délai prévu par la Cour suprême dans l'affaire Jordan est de 30 mois, au cours desquels une affaire doit être conclue, faire l'objet d'une poursuite avec succès ou d'une décision sur la culpabilité ou l'innocence de l'accusé avant qu'un retard soit jugé déraisonnable. Passé ce délai, l'affaire risque d'être rejetée par le tribunal. Par contre, le délai n'est que de 18 mois en cour provinciale. Cela réduit de près de moitié le temps avant que l'affaire ne risque d'être rejetée.
En quoi cela aide-t-il à satisfaire les exigences de l'arrêt Jordan? En rien. Les dossiers seront simplement transférés aux provinces. C'est semblable à ce que le gouvernement a fait avec la loi sur la marijuana. Il a dit qu'il regrouperait les mesures législatives, dont il tirera un certain crédit politique, mais quand il s'agira de relever tous les défis, quand il s'agira des coûts liés à la mise en oeuvre et à l'application de la loi, les provinces devront s'en occuper. Le gouvernement s'en lave les mains.
C'est ce que fait le gouvernement en ce qui concerne la reclassification des infractions en infractions mixtes. Il assouplit des peines pour les crimes graves punissables par mise en accusation. Il les transfère aux provinces, aux tribunaux provinciaux, qui traitent déjà la majorité des affaires criminelles qui sont portées devant les tribunaux aux quatre coins du Canada.
Cela ne réglera pas le problème soulevé par l'arrêt Jordan, mais que se passera-t-il, au juste? Sous prétexte de vouloir rendre le système de justice plus efficace, le gouvernement allège les peines prévues pour des crimes graves. En présentant ce projet de loi juste avant Pâques, il espérait que les Canadiens ne s'en rendraient pas compte.
Pour quelles infractions propose-t-on des peines moins sévères? Ce sont des infractions comme la participation aux activités d'un groupe terroriste, la conduite avec facultés affaiblies causant des lésions corporelles, l'enlèvement d'un mineur, le mariage forcé, la polygamie ou les incendies criminels avec intention frauduleuse. Cela ne ressemble-t-il pas à des infractions graves? La ministre s'est justifiée en disant que cela permettra de renvoyer les causes graves aux cours supérieures. Or, j'ai des nouvelles pour la ministre. Les kidnappeurs, les terroristes, les ravisseurs d'enfants, les incendiaires et les conducteurs avec facultés affaiblies ont commis des crimes graves qui commandent des peines sévères. Or, le gouvernement met fin à cette pratique ou ouvre la voie à son abolition. Ainsi, au lieu d'écoper d'une peine pouvant aller jusqu'à 10 ans de prison, comme le prévoit actuellement le Code criminel, les auteurs de ces infractions pourraient s'en tirer avec une amende.
Le gouvernement parle du pouvoir discrétionnaire des juges, dont il fait tout un plat. Aux termes du projet de loi , il retirerait le pouvoir accordé aux juges, aux termes de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, de lever l’interdiction de publication afin de protéger la sécurité publique, lorsqu’il a des preuves que le jeune délinquant commettra une autre infraction grave.
Le gouvernement invoque toujours le pouvoir discrétionnaire des juges lorsqu’il s’agit d’aider les criminels, mais lorsqu’il faut protéger le public, il ne veut pas en entendre parler. Cela montre encore une fois que le gouvernement fait tout pour récompenser les criminels, pour rendre la vie difficile aux victimes et qu’il n’a aucune considération pour la sécurité des Canadiens. Il témoigne de cette attitude en retirant aux juges leurs pouvoirs discrétionnaires, en ne nommant pas de juges et en atténuant les peines imposées entre autres aux kidnappeurs, aux incendiaires et aux terroristes.
Bref, le projet de loi serait favorable aux criminels et refilerait les affaires aux provinces. Il comporte des mesures qui augmenteraient, au lieu de les diminuer, les retards dans notre système de justice, avec le risque que des poursuites au pénal soient déboutées en raison de l’arrêt Jordan. Ce faisant, il sape la confiance du public dans l’administration de la justice. Il s’agit d’un projet de loi atroce qu’il faut rejeter.
Sur ce, je propose:
Que l'amendement soit modifié par adjonction de ce qui suit :
« e) réduire potentiellement les pénalités en cas de crimes très graves, en proposant d’en faire des infractions mixtes, y compris l’enlèvement d’une personne âgée de moins de 14 ans, l’obtention d’un avantage matériel tiré de la traite, le bris de prison, la participation à une activité d’un groupe terroriste ou d’une organisation criminelle et l’encouragement au génocide, parmi beaucoup d’autres. »
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Madame la Présidente, je suis ravi de prendre la parole au nom des habitants de Red Deer—Lacombe. Ils pousseraient les hauts cris s'ils se rendaient compte de ce que le gouvernement libéral propose dans le projet de loi , et voici pourquoi.
L'Alberta vit une période difficile, comme l'ont souligné les députés de et de . Les temps sont durs au point de vue économique, non seulement en raison de la chute des cours du pétrole et d'affligeantes politiques fédérales et provinciales en matière d'énergie, mais aussi en raison de la criminalité, laquelle sévit notamment dans la région centrale de l'Alberta.
La ville de Red Deer et le centre de l'Alberta font partie des milieux de vie les plus dangereux au Canada. Dans la province, la criminalité en milieu rural est un problème persistant et majeur depuis plusieurs années. En fait, il y a six mois, mes collègues et moi, qui représentons des régions rurales de l'Alberta, avons collaboré avec nos homologues provinciaux pour créer un groupe de travail sur la criminalité en milieu rural. Nous avons mené de vastes consultations auprès des intervenants. Nous avons discuté avec les Albertains. J'ai organisé trois assemblées publiques en janvier dernier. Je souffrais alors de la grippe et d'une pneumonie, mais j'y suis tout de même allé. Des centaines de personnes ont rempli les salles dans notre collectivité. Je sais que la situation est la même pour mes collègues.
J'ai rencontré des représentants de la GRC, des agents de la paix et pratiquement tous les intervenants touchés par cette question, y compris les organismes de services aux victimes, les programmes de surveillance en milieu rural et les patrouilles de citoyens. Tous ces groupes nous ont indiqué clairement la voie à suivre pour le gouvernement. S'ils lisaient le projet de loi ou s'ils apprenaient son contenu, ils réaliseraient qu'il fait presque systématiquement le contraire de leurs recommandations. Voilà le problème.
Voici certaines des choses que m'ont clairement fait comprendre les électeurs que je représente, de même que les policiers. Je me suis rendu dans tous les détachements, y compris ceux de Rimbey, de Sylvan Lake et de Blackfalds. J'ai rencontré des policiers municipaux à Lacombe, ainsi que les agents de police de Red Deer, qui sont aussi agents de la GRC. Je suis aussi allé à Ponoka. J'ai rencontré toutes les parties concernées par ce dossier.
Ce qui dérange les personnes que j'ai rencontrées, c'est ce qui se produit après l'arrestation des criminels par les policiers. Je parle ici des lois actuelles, et non des règles allégées qui entreront en vigueur au pays. Il est question des lois actuelles.
Un policier peut arrêter un particulier qui est en possession de biens volés lors d'au moins 10 différentes introductions par effraction. L'individu est détenu dans une cellule en attendant la tenue de son audience, où il obtiendra une libération sous caution. Aux termes des dispositions concernant le cautionnement, il recevra notamment la directive de ne pas fréquenter toutes les autres personnes accusées de ces crimes et de ne plus participer à des activités illégales. Ces gens se tirent d'affaire avec une simple réprimande.
Cinq jours plus tard, la GRC ou la police les arrêtent au même endroit. Ils les trouvent en possession de biens volés lors d'autres introductions par effraction qui valent des milliers de dollars. La plupart du temps, cela implique également des véhicules à moteur qui servent d'outil pour commettre le crime ou de moyen de transport pour arriver à la scène du crime. Il arrive même qu'ils soient volés, aussi. Ces personnes sont détenues et comparaissent à nouveau devant un juge. Elles font face aux accusations d'introduction par effraction qui pesaient contre elle précédemment en plus de nouvelles accusations de non-respect des conditions de mise en liberté et d'introduction par effraction. Que fait le juge? Il leur tape sur les doigts et elles sont tout bonnement libres de reprendre leurs activités.
J'ai passé beaucoup de temps en tant que technicien en pêches, pêcheur et guide de pêche. J'ai bien compris l'utilité de la politique de capture et de remise en liberté, mais lorsqu'il est question de criminalité, c'est une mauvaise politique. Cela ne fonctionne pas pour les gens que je représente et la situation ne va qu'empirer. C'est ce qu'on appelle le syndrome de la récidive criminelle. La police et la population le savent. Ce sont les mêmes personnes qui commettent les mêmes crimes à répétition sans conséquence. C'est un grave problème.
J'aurai bientôt la possibilité de présenter un projet de loi d'initiative parlementaire et je comptais présenter à la Chambre un projet de loi visant à créer une disposition d'indexation pour les vols de plus de 5 000 $ en raison de leur ampleur ainsi que des coûts et des répercussions qu'ils ont sur les collectivités que je représente. On dirait qu'il n'y a aucune conséquence à long terme pour ces infractions. Or, si on indexait les peines après la deuxième et la troisième accusation de vol de plus de 5 000 $ ou de véhicules à moteur, ainsi que les accusations subséquentes, plus les gens commettraient de crimes, plus ils en subiraient les conséquences. Leurs infractions devraient leur coûter plus cher.
Le problème est le suivant: en Alberta, le gouvernement fédéral actuel a fait preuve de négligence quant à la nomination des juges. Le gouvernement ne peut pas dire qu'il n'y a pas de bons candidats qualifiés en Alberta. Il a peut-être du mal à trouver de bons candidats libéraux qualifiés pour pourvoir certains de ces postes parce qu'il ne reste pas beaucoup de libéraux en Alberta. Il ne manque pas de personnes qualifiées en Alberta pour pourvoir ces postes.
À cause de l'arrêt Jordan, on réduit au strict minimum les accusations relatives à certains de ces crimes afin de faire avancer les travaux des tribunaux.
La ministre utilise des mots comme « efficacité », mais ce mot signifie simplement que les libéraux vont faire en sorte que les délinquants comparaîtront devant un juge, qu'ils recevront une tape sur les doigts et qu'ils franchiront la porte tournante plus rapidement. Tout ce que ce projet de loi fera pour les voleurs dans le centre de l'Alberta, c'est les étourdir en raison de la vitesse à laquelle il franchiront la porte tournante du système de justice. Si ce projet de loi est adopté, ce sera un véritable affront pour les propriétaires fonciers respectueux des lois de ma circonscription. À mon avis, ce projet de loi est absolument ahurissant.
Je reviens au groupe de travail sur la criminalité en milieu rural. Les gens des secteurs ruraux réclament des fonds pour pouvoir se débrouiller seuls, se protéger et protéger leurs propriétés. Ils veulent des conséquences plus graves. Ils veulent plus de policiers sur les routes pour faire le travail qui s'impose.
Certaines personnes vivent à 45 minutes, voire à une heure d'un poste de police. D'ailleurs, j'ai entendu parler de cas où la police ne s'est présentée que trois ou quatre jours après le signalement d'un crime pour consigner ce qui avait été volé. Cela montre la gravité de la situation et à quel point le système a besoin d'être amélioré.
Plutôt que de fournir des ressources, c'est-à-dire plus de ressources aux services de police, plus de ressources aux procureurs, plus de ressources à la magistrature et plus de ressources au système de justice pénale, le gouvernement suit son propre programme et dépense beaucoup à d'autres fins. Cet argent vient de la poche des contribuables canadiens.
La priorité de tout gouvernement doit être la sécurité des citoyens respectueux des lois. Cela ne semble pas être le cas quand on regarde le présent projet de loi. Les gens que je représente seraient très irrités de savoir cela.
Quelques détails retiennent mon attention. Je pense que mes électeurs seraient profondément choqués de découvrir les choix faits par le gouvernement à certains égards.
Premièrement, voyons la question des vols de plus de 5 000 $. Actuellement, le Code criminel prévoit deux catégories de vol. Si un individu commet un vol et que les objets volés ont une valeur nette, estimée ou intrinsèque de plus de 5 000 $, il commet une infraction punissable par mise en accusation. Le procureur doit inculper l'individu, qui subira un procès au terme duquel toute déclaration de culpabilité entraînera obligatoirement une peine d'emprisonnement pouvant atteindre un maximum de 10 ans.
Si le projet de loi est adopté dans sa forme actuelle, un vol de plus de 5 000 $ entraînera les mêmes conséquences qu'un vol de moins de 5 000 $. Actuellement, un vol de moins de 5 000 $ peut donner lieu soit à une procédure sommaire, soit à une mise en accusation, soit à une procédure hybride.
Essentiellement, le gouvernement libéral nous propose de traiter un vol de plus de 5 000 $ comme un vol de moins de 5 000 $. Une fois que les modifications proposées auront été adoptées, il y aura peu de différence entre un vol de plus de 5 000 $ et un vol de moins de 5 000 $. Un juge pourra infliger la même peine à une personne qui vole une automobile qu'à celle qui prend un paquet de gomme à mâcher sans payer dans un magasin. Voilà ce qui risque d'arriver, et c'est vraiment dommage.
Je comprends que l'on veuille laisser de la latitude aux juges, mais pourquoi affaiblir autant la loi, au point où ils seraient privés de leur pouvoir discrétionnaire? Au lieu de cela, nous devrions inclure, dans le projet de loi, des dispositions concernant les vols de plus de 20 000 $, qui viseraient, par exemple, les individus commettant des vols de voiture de luxe, ou encore les vols de plus de 100 000 $, par exemple, si un individu commet une série de vols ou s'il vole un camion de soudeur, un véhicule récréatif, une remorque, et ainsi de suite. Je ne comprends vraiment pas pourquoi ce genre de vol ne serait pas considéré comme plus grave que le vol d'un paquet de gomme. C'est un choix tout à fait malavisé.
J'ai été un peu indigné par les propos de la ministre de la Justice. Je sais que ceux qui se retrouvent dans le système pénal n'ont pas tous eu la vie facile. Cependant, la a classifié les modifications au Code criminel afin de tenir compte de beaucoup de facteurs, dont l'un est le fait d'avoir déjà été victime d'actes de violence. Jetons un coup d'oeil à ces accusations.
Premièrement, la participation à une activité d’un groupe terroriste. On ne dirait pas une personne qui ignore ce qu'elle fait et qui est défavorisée ou qui a des mésaventures dans la rue. Deuxièmement, le bris de prison. On ne dirait pas une personne qui est défavorisée. Troisièmement, les actes de corruption dans les affaires municipales ou le fait d'influencer un fonctionnaire municipal. Je n'imagine pas les sans-abri de ma circonscription avoir beaucoup d'influence sur le maire, le préfet ou quiconque en ce sens. Quatrièmement, influencer ou négocier une nomination ou en faire commerce. On ne dirait pas le crime d'une personne défavorisée ou d'une victime d'actes de violence.
Je pourrais presque toutes les nommer: extorsion par libelle, encouragement au génocide, possession d'objets criminellement obtenus, délit d'initié. Oui, voilà les crimes des pauvres et des malheureux que la a classifiés lors de son intervention. Il s'agit de crimes bien organisés qui sont perpétrés par des gens qui savent très bien ce qu'ils font, et qui le font intentionnellement. Cela m'amène à mon point au sujet du crime organisé.
Actuellement, le gouvernement a deux projets de loi à la Chambre: le projet de loi , qui propose de s'attaquer aux propriétaires d'armes à feu respectueux de la loi et de rendre leur vie encore plus misérable; et le projet de loi , qui pourrait en fait grandement faciliter la vie des criminels. L'hypocrisie et la contradiction de ces deux mesures législatives sont absolument incroyables.
Par exemple, le libéral a affirmé que le gouvernement se sert du projet de loi pour s'attaquer aux armes à feu et aux gangs. Pourtant, la propose un projet de loi qui vise à faire en sorte que les infractions prévues au Code criminel pour la participation aux activités d'une organisation criminelle deviennent des infractions mixtes. Si nous ne vivons pas dans un monde à l'envers, je ne sais pas ce qui se passe.
Le gouvernement libéral entend pénaliser les propriétaires d'armes à feu respectueux des lois avec le projet de loi . En revanche, il va modifier le Code criminel de façon à transformer en infraction mixte, pour les membres d'un gang, l'usage d'une arme à feu. Pour avoir appartenu à une organisation criminelle, il est possible que ces membres soient reconnus coupables d'une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire et reçoivent une simple amende. Cela n'a absolument aucun sens. Les propriétaires d'armes à feu respectueux des lois de ma circonscription n'y comprennent rien, de même que tous les habitants de ma circonscription qui respectent les lois.
Les criminels et les voleurs qui se trouvent dans ma circonscription regardent le programme législatif d'aujourd'hui et se disent ceci: « Mon Dieu, les possibilités viennent d'augmenter et de s'améliorer. Nous aurons maintenant des listes d'épicerie relatives aux armes à feu parce que le gouvernement obligera les propriétaires d'entreprise à mettre ces listes à notre disposition. Nous pourrons aller à toutes les maisons que nous voulons et obtenir les biens que nous voulons. » Ils se feront taper sur les doigts et passeront par la porte tournante. Aussi simple que cela. Ils remercieront les libéraux. Nous savons qui appuie les libéraux. Ce sont les criminels du Canada. Ce ne sont pas les citoyens respectueux de la loi.