Passer au contenu

CIIT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent du commerce international


NUMÉRO 052 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 9 mars 2023

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Soyez les bienvenus à la 52e réunion du Comité permanent du commerce international.
    Conformément à l'ordre de la Chambre du 23 juin 2022, la réunion adopte une formule hybride, c'est‑à‑dire que des membres sont présents en personne dans la pièce et que d'autres y participent à distance grâce à l'application Zoom. Voici quelques conseils à l'intention des témoins et des membres.
    Avant de prendre la parole, veuillez attendre que je vous y aie nommément autorisé. Ayez un débit lent, une diction nette. Si vous participez par vidéoconférence, cliquez sur l'icône du microphone pour activer votre appareil et veuillez l'inactiver entre vos prises de parole. Pour entendre l'interprétation, les participants sur Zoom ont le choix, dans le bas de leur écran, entre « parquet », « anglais » ou « français ». Ceux qui sont présents sur place peuvent sélectionner le canal voulu sur leur écouteur.
    Je vous rappelle de toujours adresser vos observations à la présidence. Les membres présents sur place qui souhaitent prendre la parole peuvent lever la main. Sur Zoom, on peut utiliser la fonction « lever la main ». La greffière et moi, nous ferons de notre mieux pour noter l'ordre de prise de la parole et nous apprécions d'avance votre patience et votre compréhension.
    Veuillez également noter que, pendant la réunion, il est interdit de prendre des photos dans la pièce ou de faire des captures d'écran sur Zoom.
    Conformément à la motion de régie interne du Comité concernant les tests techniques exigés pour le matériel des témoins, que le Comité sache que tous les témoins s'y sont pliés.
    Conformément à l'ordre de renvoi du mercredi 8 février 2023, le Comité reprend l'étude du projet de loi C‑282, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement, sur la gestion de l'offre.
    Nous accueillons un certain nombre de témoins: à titre personnel, le professeur émérite Daniel Turp, de l'Université de Montréal; les représentants de l'Alliance canadienne du commerce agroalimentaire: son président Dan Darling et son vice-président Greg Northey; les représentants de l'Association canadienne des bovins: son président Nathan Phinney et son vice-président exécutif Dennis Laycraft; les représentants des Producteurs laitiers du Canada: le président Pierre Lampron et le vice-président David Wiens; par vidéoconférence, le président des Producteurs de lait du Québec, Daniel Gobeil; et par vidéoconférence également, Jan Slomp, de l'Union Nationale des Fermiers.
    Soyez tous les bienvenus. Nous entendrons d'abord les déclarations liminaires, puis nous vous questionnerons.
    Monsieur Turp, je vous invite à commencer. Vous disposez de cinq minutes.
    Vous serez suivi de MM. Darling, Phinney, Lampron, Wiens, Gobeil et Slomp, qui disposeront tous de cinq minutes. Ne vous souciez pas de vous rappeler votre rang, le moment venu je m'en chargerai avec plaisir.
    Monsieur Turp, vous avez la parole.

[Français]

    Je salue vos collègues parlementaires et la greffière du Comité permanent du commerce international.
    Je tiens à vous saluer et à vous dire le plaisir que j'ai à être de retour à la Chambre des communes, de façon virtuelle. Comme vous, j'ai eu le privilège d'y siéger, puisque j'ai été député de Beauharnois‑Salaberry durant la 36e législature, de 1997 à 2000. Aujourd'hui, je donne suite à votre invitation à comparaître devant vous pour vous présenter mes observations sur le projet de loi C‑282.
    C'est un projet de loi très simple. Comme vous l'avez constaté, il comporte un article qui vise à ajouter le paragraphe 2.1 à l'article 10 de la Loi sur le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement. Ce paragraphe ferait essentiellement en sorte que le ministre des Affaires étrangères ne pourrait plus négocier relativement au système de gestion de l'offre du Canada ni le remettre en question par des négociations.
    Je ferai trois remarques. Il y a quelques heures, j'ai d'ailleurs soumis un document écrit à la greffière du Comité. J'espère que vous pourrez prendre connaissance de ce document.
    Ma première remarque porte sur l'opportunité de bonifier la Loi en adoptant le projet de loi C‑282. À cet égard, vous constaterez que j'ai mentionné dans mon document et dans mes notes le fait qu'il existe un large consensus sur la nécessité de protéger la gestion de l'offre. Ce consensus se reflète dans des motions unanimes de la Chambre des communes, notamment celle du 22 novembre 2005, qui a été adoptée il y a presque 20 ans dans le cadre de négociations à l'Organisation mondiale du commerce. En 2018, il y a eu des motions analogues dans le cadre des négociations relatives au Partenariat transpacifique.
    Il y a aussi des déclarations de la ministre de l'Agriculture et du premier ministre, Justin Trudeau, qui rappelait que les secteurs canadiens soumis à la gestion de l'offre sont des piliers des régions rurales. Il ajoutait que son gouvernement s'était engagé publiquement à ne pas faire d'autres concessions dans ses futurs accords commerciaux. Les conservateurs, par la voix de leur chef actuel, ont aussi dit qu'ils étaient favorables au système de la gestion de l'offre. Le Nouveau Parti démocratique l'a également fait lors des discussions entourant le projet de loi C‑216, qui a précédé le projet de loi C‑282, mais qui était le même dans son contenu. Le seul parti qui s'oppose à la protection du système de la gestion de l'offre, c'est le Parti populaire du Canada, et il n'a aucun député à la Chambre des communes.
    C'est donc pourquoi j'affirme, très humblement, qu'il y a un très vaste consensus sur la question. Devant ce large consensus, je crois que le projet de loiC‑282 devrait être adopté et que le Parlement devrait dire au gouvernement qu'il ne peut plus, lors de négociations, remettre en question le système de gestion de l'offre.
    Cela enverrait également un message clair disant aux partenaires commerciaux qu'ils ne peuvent plus s'attendre à ce que le gouvernement fasse des concessions sur ce système, et cela protégerait un certain nombre d'agriculteurs qui réclament la protection de ce système et son maintien.
    Sur la question de la légalité du projet de loi, comme je l'ai mentionné dans mes notes écrites, je suis en accord avec mon collègue de l'Université Laval, Patrick Taillon, qui a présenté son point de vue devant ce comité lorsque le projet de loi C‑216 a été examiné. Je crois comprendre que vous avez d'ailleurs en main un mémoire qu'il a présenté et dans lequel il formule des observations sur cette question. Il dit très clairement que cette modification à la loi serait légale et qu'elle ne poserait pas de problème de constitutionnalité. En effet, une loi pourrait modifier la prérogative royale et limiter les attributions du pouvoir du ministre des Affaires étrangères lorsqu'il négocie des traités commerciaux internationaux qui pourraient autoriser des concessions là où il ne devrait pas y en avoir.
    Je termine, monsieur le président, en m'autorisant à suggérer que le Parlement devrait jouer un rôle beaucoup plus important lorsqu'il s'agit de traités internationaux.
(1535)
     Il devrait se voir accorder la possibilité de limiter les attributions du ministre, comme le souhaite le député qui a présenté ce projet de loi. Le Parlement devrait pouvoir approuver des traités relatifs au commerce international, parce qu'ils sont importants.
(1540)

[Traduction]

    Monsieur Turp, vous avez pris bien plus que le temps prévu. Je peux vous donner quelques secondes pour compléter rapidement votre pensée.

[Français]

    Je vais donc terminer mon intervention, monsieur le président.
    Je vous rappelle que l'Assemblée nationale du Québec, elle, peut approuver des traités relatifs au commerce international.
    Je vous remercie de votre attention et suis disposé à répondre à vos questions.

[Traduction]

    Monsieur Darling, veuillez commencer. Je ferai à tous le signe convenu du doigt pour vous prévenir qu'il vous reste une minute quand vous regarderez dans ma direction, pour que vous sachiez à quel moment vous pouvez essayer de conclure.
    Monsieur Darling, à vous la parole.
    Mesdames et messieurs les membres du Comité, je vous remercie de votre invitation. Je me nomme Dan Darling. Je suis le président de l'Alliance canadienne du commerce agroalimentaire. Je suis également éleveur de bovins de boucherie et producteur de grains, ici, en Ontario.
    L'Alliance est la voix des exportateurs de produits agroalimentaires. Elle milite pour plus de liberté et d'équité dans les échanges internationaux de produits agricoles et agroalimentaires. Je viens très vivement conseiller aux parlementaires de ne pas appuyer le projet de loi C‑282, vu les conséquences négatives qu'il aurait pour l'économie canadienne et notre réputation chèrement acquise, celle d'être l'une des plus grandes nations commerçantes du monde.
    Cette position découle de décennies de négociations de divers accords commerciaux du Canada, soit multilatéraux, régionaux ou bilatéraux, pour lesquels nous avons montré la voie à suivre. Nous représentons 90 % des agriculteurs qui dépendent des échanges ainsi que des producteurs, des transformateurs d'aliments et des exportateurs de produits agroalimentaires qui veulent faire croître l'économie grâce a un meilleur accès aux marchés étrangers.
    Nos membres comprennent les producteurs de bœuf de boucherie, de porcins, de grains, de céréales, d'oléagineux, de légumineuses, de soja, de canola et de sucre ainsi que des producteurs d'aliments industriels transformés. Collectivement, nous assurons plus de 90 % des exportations agroalimentaires canadiennes et subvenons à environ un million d'emplois dans des communautés urbaines et rurales de partout au Canada. Une fraction importante de ces ventes et emplois n'existeraient pas sans notre accès concurrentiel aux marchés mondiaux.
    La liberté du commerce est indispensable à notre prospérité. Le Canada dépend des échanges. Les échanges internationaux représentent près des deux tiers de notre économie nationale et ils subviennent à plus d'un emploi sur six.
    Le projet de loi C‑282 menace la capacité du Canada de négocier et de conclure les meilleurs accords commerciaux pour appuyer notre réussite économique à long terme. On a dit à votre comité qu'il n'aurait pas d'effet négatif sur les principaux accords commerciaux du Canada, parce que, essentiellement, il n'en reste plus d'autres à conclure. Rien ne saurait être plus éloigné de la vérité. Avec le Royaume-Uni, actuellement notre principal partenaire commercial en Europe, nous négocions un accord colossal. Dans le domaine agricole, à l'Organisation mondiale du commerce, les négociations se poursuivent, et des clauses de l'Accord Canada-États-Unis-Mexique en autorisent explicitement l'éventuelle réouverture et renégociation, à l'improviste.
    Ce que je veux dire ici, c'est que ce n'est pas le moment de compliquer la tâche à nos négociateurs. Pour mener à bien des négociations commerciales, il faut avant tout de la souplesse et de l'équilibre, ingrédients essentiels dont nous prive ce projet de loi.
    C'est grâce au compromis et à la souplesse que le Canada a réussi les négociations de ses accords commerciaux les plus favorables et les plus significatifs, notamment l'Accord économique et commercial global, le Partenariat transpacifique global et progressiste et l'Accord Canada-États-Unis-Mexique. En deux mots, ces négociations commerciales n'auraient pas eu lieu si le Canada ne s'était pas préparé à discuter de tout sans perdre de vue l'intérêt économique supérieur de notre pays. Ce projet de loi affaiblit dès le départ notre position de négociation et il renforce celle des autres nations commerçantes, aux dépens du Canada, en privant même les partenaires de la possibilité d'envisager une victoire, grande ou modeste, dans ces secteurs.
    Le projet de loi C‑282 réduit notre possibilité de participer à diverses négociations bilatérales et multilatérales et d'acquérir, par ce moyen, l'accès à des marchés. Finalement, il nous place sur une trajectoire de collision avec les États-Unis et d'autres grands partenaires commerciaux, particulièrement au moment de renouveler, d'élargir ou de moderniser les accords commerciaux en vigueur. La perturbation des échanges serait catastrophique pour le Canada. Le secteur de la transformation des aliments est plus gros que ceux de l'automobile et de l'aérospatiale réunis.
    Le projet de loi C‑282 crée un précédent dangereux, en invitant nos partenaires commerciaux à adopter des lois semblables et à bloquer des occasions commerciales pour tous les intéressés. Le Canada a travaillé sans relâche à la promotion de la liberté du commerce fondé sur des règles pour les discussions bilatérales et les discussions dans le secteur agroalimentaire ainsi que par le groupe d'Ottawa et des organisations internationales comme le G7, le G20, l'Organisation mondiale du commerce et le Forum de coopération économique Asie-Pacifique. Ce projet de loi va directement à l'encontre de la direction imprimée par le Canada sur des tribunes internationales comme l'Organisation mondiale du commerce, où il combat le protectionnisme et appuie des systèmes d'échanges commerciaux fondés sur des règles.
    Un facteur essentiel de la croissance économique du Canada sera la diversification des échanges dans d'autres régions du monde où nous n'avons pas conclu d'accords commerciaux importants, comme la région indo-pacifique et l'Afrique. Alors que la stratégie du gouvernement pour cette première région nous fait avancer d'un pas dans la diversification, le projet de loi C‑282 vient nous faire rétrograder d'autant.
(1545)
    Bref, le projet de loi C‑282 pose une menace pour les accords commerciaux actuels et à venir, il diminue la stabilité et la prévisibilité des échanges et il met en péril la base même de la croissance économique du Canada, c'est‑à‑dire la liberté des échanges.
    Attention! L'agriculture ne sera pas le seul secteur touché par le projet de loi. Les secteurs essentiels comme l'énergie, l'industrie manufacturière…
    Monsieur Darling, je vous ai accordé une trentaine de secondes supplémentaires, mais je dois donner la parole au suivant maintenant.
    Monsieur Phinney, c'est votre tour et vous disposez de cinq minutes.
    Bonjour. Je me nomme Nathan Phinney. Je suis éleveur de bovins de boucherie du Nouveau-Brunswick et président de l'Association canadienne des bovins. Je suis accompagné du vice-président exécutif de l'Association, M. Dennis Leycraft.
    Nous remercions le Comité de nous avoir invités à venir présenter sur le projet de loi C‑282 le point de vue du secteur canadien des bovins de boucherie. Plus particulièrement, nous parlerons de nos craintes concernant les préjudices sans précédent que le projet de loi menace de causer aux négociations commerciales à venir.
    Notre association représente près de 60 000 éleveurs de partout au Canada. Le secteur est une locomotive économique importante, constituant à elle seule la deuxième source de revenus agricoles en importance au Canada, en apportant 21,8 milliards de dollars au produit intérieur brut de notre pays et en supportant près de 350 000 emplois équivalents temps plein.
    Nous, les éleveurs canadiens de bovins de boucherie, nous enorgueillissons de produire de façon soutenable une protéine nutritive de qualité en émettant, par kilo de viande, moins de la moitié de gaz à effet de serre que dans le monde. En un mot, nous produisons de la nourriture, nous profitons à l'économie tout en protégeant et en conservant des environnements, partout au Canada.
    La liberté des échanges est la clé de la réussite de notre secteur, 50 % du produit étant exportés partout dans le monde. Faisant partie d'un secteur exportateur, l'Association a toujours insisté sur le besoin de règles et de principes solides pour faciliter les échanges commerciaux dans le monde.
    Nous proposons d'exposer des éléments importants, propres aux éleveurs de bovins de boucherie du Canada et aux grands intérêts de l'économie canadienne. Nous encourageons le Comité et tous les parlementaires à étudier ces observations avant d'aller de l'avant avec ce projet de loi non amendé.
    L'accès au marché a été indispensable à la soutenabilité de notre industrie. Les éleveurs de bovins de boucherie empochent environ 1 500 $ de plus par animal en raison de leur capacité d'exporter leurs produits sur des marchés étrangers. Pour que notre secteur continue à croître et à diversifier ses exportations, nous aurons besoin d'un accès amélioré aux marchés, grâce aux négociations commerciales.
    Nous priver d'occasions commerciales à saisir, c'est empêcher la croissance économique de notre industrie. Permettez-nous de prouver l'efficacité des négociations commerciales pour assurer la réussite économique dans un secteur axé sur les exportations.
    D'abord, depuis le début du Partenariat transpacifique global et progressiste, en 2017, et la suppression des tarifs qui s'en est suivie, les exportations de bœuf du Canada vers le Japon ont augmenté de 192 %. En 2022, nous en avons exporté, en bœuf et en produits du bœuf, pour 500 millions de dollars au Japon. De plus, quand l'ALENA a été adopté, la valeur des exportations de notre secteur s'est accrue de 650 % entre 1994 et 2022. Sans ces précieux accords, la valeur de ses exportations n'atteindrait pas 6 milliards par année.
    Si le projet de loi C‑282 va de l'avant, le Canada se trouvera désavantagé dès avant le début des négociations. Nos négociateurs auront les mains liées et la capacité de négociation et de renégociation des meilleurs accords pour tout le Canada, par le gouvernement du Canada, sera gravement diminuée. D'après les témoignages d'anciens délégués commerciaux recueillis pendant l'étude de deux versions antérieures du projet actuel de loi, par exemple du projet de loi C‑216, leur capacité de négocier serait limitée, et nos propres partenaires commerciaux limiteraient également leurs offres au Canada.
    Les accords commerciaux du Canada les plus bénéfiques et les plus progressistes, comme le Partenariat transpacifique global et progressiste et l'Accord Canada-États-Unis-Mexique, ont été conclus grâce à la souplesse et au compromis. Nos négociateurs ont concilié le besoin d'obtenir des résultats ambitieux et celui de protéger les intérêts du Canada. Le projet de loi C‑282 nous prive de cette souplesse nécessaire pour conclure d'ambitieux accords commerciaux. Dans un climat d'échange déjà tendu, alors que le protectionnisme monte, il est contraire au bon sens, pour le Canada, de multiplier les obstacles aux échanges. Le projet de loi C‑282 crée un précédent dangereux en protégeant par voie législative les intérêts commerciaux de certaines industries et de certains secteurs. De plus, il pourrait entraîner un effet domino à l'échelle mondiale en favorisant, chez nos partenaires commerciaux, l'adoption de mesures protectionnistes. Ce risque ne vaut pas la peine d'exposer à des coups le secteur économique canadien, qui s'appuie sur les échanges, et les intérêts généraux des Canadiens.
    Les pertes d'accès aux marchés iront à l'encontre des intérêts économiques supérieurs du Canada. Beaucoup d'autres pays possèdent des secteurs sensibles aux importations, mais nous pensons qu'aucun n'a choisi de fixer dans un texte de loi le travail des négociateurs commerciaux. Le projet de loi C‑282 n'a pas de précédent, en ce qui concerne les principes des échanges internationaux. Les échanges sont indispensables au Canada et à la sécurité alimentaire internationale. Nous exclure des échanges à venir, c'est fermer l'accès à des sources alimentaires pour les Canadiens et pour les pays qui dépendent des exportations alimentaires.
    La liberté des échanges permet de se procurer de la nourriture à un coût inférieur. Les éleveurs canadiens de bovins fournissent au reste du monde un bœuf qui fait partie des produits les plus soutenables, à une époque où, dans le monde entier, on discute de changement climatique, de durabilité et de sécurité alimentaire. Le monde a besoin de plus de bœuf canadien, et non de moins.
    En guise de conclusion, je tiens à souligner que la croissance du secteur canadien du bœuf de boucherie dépendra des échanges internationaux. Les entraver, c'est entraver la capacité de croissance de notre industrie. Nous incitons vivement les députés à s'opposer à la version actuelle du projet de loi C‑282, pour permettre au Canada de préserver sa grande capacité de négocier des accords commerciaux globaux qui aideront notre pays à s'assurer un succès économique à long terme en ayant en tête les intérêts nationaux des consommateurs canadiens.
(1550)
    Notre association est reconnaissante d'avoir pu s'exprimer sur le projet de loi C‑282. Elle sera heureuse de communiquer les renseignements supplémentaires que le Comité voudra bien lui demander.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Messieurs Lampron et Wiens, veuillez commencer. Vous disposez de cinq minutes. Une minute avant la fin, je vous préviendrai également.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, merci de votre invitation.
    Je me nomme Pierre Lampron. Je ne suis pas seulement producteur laitier, je suis également le président des Producteurs laitiers du Canada.

[Français]

     Je suis accompagné de notre vice-président, M. David Wiens, qui se joint à moi pour cette présentation. Nous sommes heureux de l'occasion qui nous est offerte d'exprimer le soutien ferme des 10 000 producteurs de lait du Canada au projet de loi C‑282.
    Si cette loi est adoptée, elle garantira que la gestion de l'offre ne sera plus mise sur la table dans le cadre des négociations commerciales, en cours ou futures, et elle renforcera ainsi le secteur laitier canadien. Elle nous offrira une plus grande prévisibilité et une plus grande stabilité pour investir et pour planifier l'avenir. Elle nous permettra aussi de continuer de jouer le rôle vital qui nous incombe pour le bien des familles canadiennes.
    Les dernières années ont été difficiles pour tous les Canadiens et les Canadiennes. Il y a eu une pandémie mondiale et une inflation élevée causées par la pandémie, la guerre en Ukraine et des chaînes d'approvisionnement mondiales peu fiables parce qu'elles ont été fragilisées.
    Les producteurs laitiers ont été, eux aussi, confrontés à ces défis importants, et ils ont tout mis en œuvre pour s'y adapter. Cependant, nous avons aussi été confrontés à un défi supplémentaire: la répercussion des concessions d'accès au marché accordées dans le cadre de trois accords commerciaux successifs, soit l'Accord économique et commercial global entre le Canada et l'Union européenne, ou AECG, l'Accord de partenariat transpacifique global et progressiste, PTPGP, et l'Accord Canada—États‑Unis—Mexique, ou ACEUM.
    Les producteurs laitiers du Canada estiment que l'accès combiné au marché consenti par ces accords équivaut, pour les producteurs laitiers, à une perte de revenus annuels moyenne de 450 millions de dollars.
    Je cède maintenant la parole à M. Wiens.

[Traduction]

    Je voudrais faire remarquer que, pour notre pays, le projet de loi C‑282 coïncide avec un changement de direction. Depuis la pandémie, les Canadiens sont parvenus à comprendre très concrètement ce que signifie la vulnérabilité à l'égard de fournisseurs étrangers. Le système canadien, unique en son genre, de gestion de l'offre a été conçu pour répondre d'abord aux besoins des Canadiens. Il assure aux familles canadiennes un accès sûr et stable à des produits laitiers, à des ovoproduits et à des produits de la volaille. Pour les producteurs laitiers, ça signifie également produire de manière soutenable du lait nourrissant, de qualité, conformément à des normes et à des pratiques de salubrité et de bien-être animal parmi les plus rigoureuses du monde.
    Ce système propre au Canada est affaibli chaque fois que, dans le cadre de négociations d'accords commerciaux internationaux, on concède des points d'accès aux marchés de produits laitiers, de volaille et d'ovoproduits. Cela entraîne le remplacement de produits canadiens par des produits importés sur les tablettes de nos épiceries. Sur la capacité de nos producteurs de planifier et de faire des investissements nécessaires pour l'avenir de leurs exploitations, par exemple l'objectif de la carboneutralité des exploitations laitières canadiennes en 2050, les impacts sont importants.

[Français]

    Les producteurs laitiers sont conscients que certains secteurs dépendent étroitement du marché des exportations, mais la politique commerciale canadienne se doit par ailleurs de veiller à équilibrer les besoins de tous les secteurs.
    Un modèle véritablement canadien doit assurer le succès et la viabilité à long terme de tous les secteurs, sans dresser certains secteurs contre d'autres.
    L'indemnisation des producteurs laitiers et les investissements dans la transformation laitière, annoncés dans l'Énoncé économique de l'automne 2022, aideront notre secteur à faire la transition qui s'imposera au gré de la mise en œuvre de ces accords.
    L'octroi de concessions répétées d'accès au marché, suivi chaque fois d'indemnisations compensatoires, n'est pas un modèle promis à soutenir le succès à long terme de notre industrie, pas plus qu'il ne fonctionnerait dans n'importe quel autre secteur de l'économie canadienne.
    Les producteurs de lait, de volaille et d'œufs du Canada ont assez donné.
    Le projet de loi C‑282 protégerait la durabilité et la viabilité des exploitations canadiennes sous la gestion de l'offre en prévenant l'attribution d'autres concessions d'accès aux marchés dans le cadre des accords commerciaux actuels ou à venir.
    Les parlementaires ont envoyé un signal très fort dans le cadre du vote en deuxième lecture. Ils peuvent envoyer un message encore plus fort en adoptant rapidement le projet de loi et en inscrivant la protection du secteur laitier dans la loi.
    Merci, monsieur le président.
(1555)

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Jusqu'ici, vous êtes le premier de classe.
    Des voix: Oh, oh!
    Le vice-président (M. Kyle Seeback): Cinq minutes pile.
    Monsieur Gobeil, vous disposez de cinq minutes pour votre déclaration liminaire.

[Français]

     Bon après-midi, chers membres du Comité.
    Je m'appelle Daniel Gobeil, président des Producteurs de lait du Québec et producteur laitier à La Baie, au Saguenay—Lac‑Saint‑Jean.
    Il est clair pour moi et les 4 500 producteurs laitiers du Québec, répartis dans 14 belles régions, que l'adoption du projet de loi C‑282 est essentielle à la survie et à la prévisibilité des fermes laitières au Québec et au Canada.
    Mes prédécesseurs ont parlé des concessions. Ils ont mentionné ces divers accords: l’AECG, le PTPGP et l’ACEUM. Ces accords comprennent des concessions ayant entraîné une perte de marché s'élevant à 8,4 %. À ce chiffre, s'ajoutent des contingents tarifaires déjà imposés par l'Organisation mondiale du commerce, l'OMC. Aujourd'hui, 18 % du marché canadien est occupé par des produits fournis par d'autres pays.
     Le modèle de la gestion de l'offre date de 1971. Ce n'est pas un modèle d'affaires, c'est une politique agricole que le Canada a maintenue au fil des ans. Tous les pays ont des politiques agricoles et des secteurs plus fragiles, qu'ils désirent protéger quand ils s'assoient à la table des négociations. La politique agricole commune de l'Union européenne, ou PAC, en est un exemple. Les subventions importantes associées au Farm Bill des États‑Unis en sont un autre.
    Durant les négociations, chaque secteur travaille à protéger certaines politiques. Or, chez nous, à chacune des négociations, c'est toujours la même chose: le secteur laitier est sacrifié à la dernière minute. C'est très important de protéger le secteur de la gestion de l'offre, soit le lait, les œufs et la volaille qui sont produits partout au Canada. La gestion de l'offre permet d'assurer une rentabilité et un équilibre sur les fermes, tout en répondant à la demande canadienne.
    Ce modèle permet aux producteurs canadiens d'offrir un produit de qualité qui remplit les tablettes des épiceries. On l'a vu lors des derniers événements qui se sont produits à la suite de la pandémie et des bris dans la chaîne d'approvisionnement. Il est très important que notre alimentation et notre santé soient soutenues par des produits d'ici et de qualité. Il est important de protéger ces secteurs qui veulent fournir ces produits aux Canadiens.
    En protégeant le système de la gestion de l'offre, le Canada a, au fil des ans, réussi à négocier des accords commerciaux avec plusieurs pays. Sur le plan commercial, nous avons accès à plus des deux tiers de la population mondiale. Ce n'est pas le secteur de la gestion de l'offre qui a nui à ces accords.
    On entend les commentaires de certains acteurs. Nous croyons sincèrement qu'il est possible de protéger des secteurs de marchés intéressants et des modes de production comme la gestion de l'offre au Canada, tout en développant des marchés d'exportation pour certaines productions pour lesquelles il existe une demande mondiale. Nous l'avons prouvé dans les accords précédents, au Canada, on est capable de le faire.
    Nous comptons vraiment sur le soutien de tous les partis politiques au projet de loi C‑282. C'est d'ailleurs ce que nous avons vu. Les dernières semaines nous ont prouvé l'appui réel des quatre grands partis, et surtout de leurs chefs, afin de protéger les emplois partout au Canada.
     Je vous remercie de votre écoute et de l'occasion qui m'a été offerte de m'adresser à vous. Je suis disponible pour répondre à vos questions.
(1600)

[Traduction]

    Moins de cinq minutes. C'est maintenant vous le premier de classe.
    Monsieur Slomp, je vous invite à faire votre déclaration liminaire. Vous disposez de cinq minutes.
    Je me prononce en faveur de ce projet de loi.
    Je suis originaire des Pays-Bas et je suis producteur laitier. Je vis au Canada et j'y suis producteur laitier et éleveur de bovins depuis 35 ans.
    Un tel projet de loi arrive à point nommé. Nous en sommes maintenant à trois ou quatre décennies de politiques internationales axées sur des accords commerciaux. Ce sont des années importantes et, probablement, des accords importants, mais pendant ce temps, notre système s'est détérioré. Nous perdons aujourd'hui 18 % de notre marché intérieur, comme l'a dit le témoin précédent.
    Il est temps de revoir cela de près. Je pense que les circonstances ont changé. L'idée selon laquelle le libre-échange est bénéfique pour tous repose sur de faux raisonnements.
    Regardons l'AECG, qui comporte de nouvelles concessions pour l'importation de fromage. Le Canada respecte pleinement cet engagement. En échange, nous avons obtenu un meilleur accès à l'Europe pour le bœuf et le porc.
    Si nous examinons les chiffres réels, nous constatons que la situation n'est pas très bonne. Nous exportons vers l'Europe, mais même à l'époque de l'accord, les possibilités d'exportation étaient bien plus vastes, mais nous ne les avons jamais exploitées. Alors que nous nous sommes rapidement engagés à autoriser les fromages européens à entrer au Canada, nous n'avons pas constaté d'augmentation des importations de viande de porc ou de bœuf canadien par l'Europe.
    Nous devons nous montrer moins empressés à signer des accords commerciaux avec des partenaires qui ne sont pas prêts à les respecter. Je pense que le Canada est naïf quand il s'agit d'adopter une attitude positive à l'égard de l'intensification des échanges, mais nous devons nous montrer critiques à cet égard. Comme je l'ai dit, les circonstances ont changé.
    J'ai de nombreux amis en Europe qui sont producteurs de lait. Ils s'en sortent raisonnablement bien. Ils ne sont pas au courant de la quantité de fromage issu de leur production qui entre au Canada, car les décideurs politiques européens protègent leur industrie par d'autres moyens. Il est temps que nous réalisions cela au Canada.
    Il en va de même pour mes amis américains qui produisent du lait. Ils reçoivent par la poste des chèques qui viennent soutenir leurs résultats, ce qui n'est pas le cas au Canada. Nous n'en avons pas besoin tant que nous restons attachés à notre système.
    Comme je l'ai dit, les circonstances ont changé. Nous avons maintenant une économie marquée par des problèmes d'approvisionnement. Il semble que ces problèmes soient là pour rester, du moins dans un avenir prévisible. Ce qui aggrave encore la situation, c'est l'imprévisibilité des conditions météorologiques et les conditions de plus en plus extrêmes. J'aimerais rappeler ce qui s'est passé dans le Lower Mainland il y a un an et demi. Un fleuve atmosphérique venant de l'océan Pacifique nous a apporté des quantités d'eau extraordinaires.
    Depuis quatre décennies, le Lower Mainland attire de plus en plus de quotas de produits laitiers et de poulets de la Colombie-Britannique. La production est fortement concentrée dans cette région, mais cette inondation et la disparition complète des exploitations agricoles en activité n'ont pas perturbé l'approvisionnement en produits du secteur soumis à la gestion de l'offre. C'est à l'organisation, provinciale et interprovinciale, qu'il incombait principalement d'assurer l'approvisionnement régulier des consommateurs.
    Nous avons également des problèmes démographiques. L'âge moyen d'un agriculteur au Canada est très élevé, mais la situation est bien plus saine avec la gestion de l'offre. C'est grâce à notre engagement en faveur de la durabilité à long terme du système.
    J'aimerais attirer l'attention sur la possible « cupidiflation » qui se produit dans le secteur de l'épicerie. La meilleure solution est un système réglementé dans lequel les prix sont transparents et visibles.
(1605)
    Je vais conclure en disant que nous ne pouvons pas laisser le système continuer à se détériorer. Nous devons le solidifier, et cela ne doit pas se faire au détriment d'autres produits de base qui doivent faire l'objet d'un commerce plus important.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Nous allons passer aux questions.

[Français]

     Monsieur Martel, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins d'être ici aujourd'hui. Leurs témoignages sont très intéressants.
    Le Comité s'aperçoit qu'il y en a qui sont contre le projet de loi et qu'il y en a d'autres qui sont pour. Nous en saurons sûrement plus sur la question.
    Je poserai ma première question à M. Lampron.
    S'il n'y avait pas de gestion de l'offre, quelles en seraient les conséquences pour les régions rurales canadiennes?
    C'est sûr que cela aurait un impact très important.
    Le modèle agricole que nous avons conçu en matière de gestion de l'offre fait en sorte que tous se partagent les revenus, de même que les dépenses. Ainsi, des fermes plus petites peuvent survivre en région, car tout le monde a le même revenu. Ce modèle s'applique donc maintenant à beaucoup de fermes, qui sont peut-être un peu plus petites, mais qui sont tout de même très efficaces.
    Ma prochaine question s'adresse à M. Gobeil, que je connais très bien. Il vient d'ailleurs de ma circonscription, une circonscription rurale.
    On dit toujours que la gestion de l'offre favorise la vitalité des petites municipalités, en particulier en milieu rural.
    Monsieur Gobeil, quelle est la pertinence de la gestion de l'offre dans l'économie canadienne?
    Je vous remercie beaucoup de votre question, monsieur Martel.
    Quand on parle de mise en marché collective, peu importe que les producteurs se trouvent à L'Anse‑Saint‑Jean, au Québec, ou dans le Nord de l'Ouest canadien, les prix sont les mêmes partout au Canada pour le travail accompli. Cela permet de fournir un juste prix à un producteur efficace. D'ailleurs, ce dernier élément figure parmi les principes de la Loi sur la Commission canadienne du lait. On peut le constater en regardant les augmentations des dernières années.
    Malgré tout cela, des fermes ont cessé leurs activités d'un bout à l'autre du Canada. Cependant, on a pu conserver partout une productivité qui donne lieu à un modèle agricole.
    Au Québec et au Canada, on a choisi un modèle de ferme familiale pour faire vivre nos familles et nos communautés. Ce modèle de production à moindre échelle convient très bien aux consommateurs, et à vos électeurs également, et permet de fournir des revenus décents aux familles agricoles du Québec et du Canada.
    Je vais vous poser une dernière question.
    Sans gestion de l'offre, quelle serait la situation? Y aurait-il des fermes en péril? Le prix augmenterait-il continuellement?
(1610)
     Je ne veux pas être trop alarmiste, mais on sait que 10 % de la production laitière mondiale est exportée. Le Canada et le Québec y participent également.
    Nous produisons moins de lait que l'État du Wisconsin, et je peux vous dire que, sans la gestion de l'offre, les producteurs laitiers du Canada et du Québec qui sont loin des grands marchés et des grands centres urbains verraient le prix à la ferme diminuer de façon considérable en raison des distances de transport importantes.
    On assisterait alors à une consolidation des fermes, et on se rapprocherait du modèle américain, où l'on trouve de 10 000 à 15 000 vaches dans une même exploitation. Dans une région comme la vôtre, au Saguenay—Lac‑Saint‑Jean, il n'y aurait qu'une seule ferme, et elle serait de cette taille.
    Il est manifeste que cela aurait des incidences très importantes. Les derniers accords ont prouvé qu'on pouvait protéger une certaine politique agricole, tout en concluant des marchés et des accords permettant à d'autres secteurs d'exporter leurs produits.
    Ma prochaine question s'adresse à vous, monsieur Lampron.
    En date d'aujourd'hui, les compensations promises dans le cadre des ententes antérieures ont-elles été complètement versées?
     Elles ne l'ont pas toutes été, mais on a promis de les verser. Cela s'en vient. Par contre, comme je le disais plus tôt, ce n'est pas un modèle dont nous voulons à long terme.
    Nous ne voulons pas perdre un marché, puis être indemnisés. Nous voulons produire pour le marché. Nous avons nos infrastructures, et notre efficacité peut toujours s'améliorer. En l'absence de croissance, il est plus difficile d'atteindre des objectifs de rentabilité.
    Êtes-vous certains que les compensations seront versées?
    Rien n'est écrit encore, et nous ne savons pas si ce sera mentionné dans le prochain budget. En fin de compte, ce ne sont que des paroles jusqu'à maintenant.
    C'est dans l'énoncé économique qui a été présenté en septembre. Je pense bien qu'elles seront versées. Je suis confiant à ce sujet.
    Combien de temps me reste-t-il?

[Traduction]

    Il vous reste 30 secondes.

[Français]

    D'accord.
    Ma prochaine question est assez longue, et, comme il ne me reste que 30 secondes, je vais m'arrêter ici.
    Pouvons-nous utiliser votre temps de parole?
    Prenez-le; il ne reste que 15 secondes.
    C'est maintenant 10 secondes.
     Monsieur Lampron, je vais utiliser ces 10 secondes pour vous demander pourquoi un petit pourcentage de plus signifierait la fin du modèle.
    C'est comme un cheval...

[Traduction]

    Je suis désolé, mais le temps est écoulé.
    Monsieur Arya, c'est à vous, pour six minutes.
    En tant que Canadiens, nous avons la chance de vivre dans un merveilleux pays. Nous sommes prospères. La prospérité du Canada provient du commerce international: la part de notre PIB qui vient du commerce international se situe entre 60 et 65 %.
    Quand je rencontre des Canadiens pour diverses raisons, j'aime bien leur dire que le Canada, avec sa petite population et son très petit nombre d'agriculteurs, est le cinquième exportateur mondial de céréales et de produits agroalimentaires. J'en suis très fier et je ne cesse de le répéter.
    La circonscription que je représente est à Ottawa. C'est une banlieue-dortoir. Je n'ai pas beaucoup de fermes, mais je sais combien les agriculteurs canadiens et les exportateurs de produits agroalimentaires contribuent au Canada et à la prospérité à laquelle nous croyons tous et dont nous bénéficions tous. Je tiens à remercier les membres de l'Alliance canadienne du commerce agroalimentaire pour leur dur labeur.
    J'ai des questions.
    Revenons à la renégociation de l'ALENA ou de l'ACEUM, à un stade ultérieur.
    À l'heure actuelle, le Canada se tourne vers les pays de la région indopacifique pour assurer sa croissance future, car c'est dans cette région que la population et les économies connaissent une croissance. C'est là que nos exportations vont augmenter. L'un de ces pays est l'Indonésie, avec laquelle nous essayons également de conclure un accord bilatéral. Ils produisent leur propre huile de palme.
    Nous négocions également avec l'Inde. Il est évident que nous voulons un accord de libre-échange avec l'Inde, mais pour l'instant, les négociations portent sur un accord commercial préliminaire. Encore une fois, il s'agit d'un fait amusant que je mentionne souvent à mes interlocuteurs. Les lentilles constituent le principal produit d'exportation du Canada vers l'un des plus grands marchés du monde — l'un des marchés qui connaissent une croissance —, celui de l'Inde.
    Monsieur Darling, ma question est la suivante. Si ce projet de loi est adopté, alors que les négociations sont en cours avec l'Inde, et que le Canada est le principal exportateur de lentilles vers l'Inde — et précisons que l'Inde exporte également des produits laitiers, pour une valeur de plus de 400 millions de dollars, je crois —, pensez-vous qu'il n'y a pas une réelle possibilité que les négociateurs commerciaux indiens se servent de cela comme outil pour bloquer le marché que nous voulons que l'Inde ouvre à nos exportations?
(1615)
    Je vous remercie de cette excellente question.
    C'est exactement ce qui nous préoccupe, nos membres et nous. Même les pays avec lesquels nous négocions et que la gestion de l'offre au Canada ne dérange pas seraient alertés si cette loi était adoptée. Ils pourraient utiliser comme monnaie d'échange d'autres produits que nous essayons de mettre sur le marché de ces pays, comme les lentilles, et nous ne ferions pas une aussi bonne affaire que nous aurions pu le faire autrement. Il s'agit assurément d'une préoccupation sérieuse.
    J'ajouterais que cela ne concerne pas seulement l'agriculture. Ce pourrait être l'acier, l'aluminium ou les produits forestiers.
    Oui, nous allons y venir.
    Êtes-vous d'accord pour dire que les pays de l'Asie-Pacifique sont l'un des marchés en expansion pour les éleveurs de bovins et pour les exportations de viande bovine?
    Oui, c'est un marché que nous voulons absolument conquérir. Pensez à l'immensité du marché indopacifique et à ce qui pourrait s'y réaliser...
    Je tiens à rappeler au Comité que nous sommes à l'avant-garde mondiale en matière de durabilité de l'environnement et de changements climatiques. Nous avons la possibilité de développer cette industrie avec les marchés qui s'offrent à nous. La fermeture de ce marché entravera notre capacité de le faire.
    L'argument selon lequel nous devons protéger notre industrie laitière et la gestion de l'offre peut être utilisé par tous les secteurs qui ne dépendent pas des exportations. Je suis très surpris d'entendre des Canadiens affirmer que nous devrions nous engager dans la voie du protectionnisme alors que toute notre prospérité dépend de notre capacité de faire du commerce international. J'en suis très désagréablement surpris.
    L'Indonésie est également un marché en croissance et sa population est énorme.
    J'ai une question rapide à poser à MM. Phinney et Darling. Supposons que les États-Unis élisent un nouveau président ou une nouvelle présidente, et qu'il ou elle veut mettre fin à l'ACEUM et le renégocier. Si ce projet de loi est adopté, que pensez-vous qu'il adviendra des négociations avec notre plus grand partenaire commercial?
    Monsieur Darling, vous pouvez commencer. Monsieur Phinney, vous pourrez compléter la réponse.
    Vous avez environ 20 secondes chacun.
    Je ne pense même pas qu'il faudra un nouveau président pour que cela se produise. Dès que le projet de loi sera adopté, ils le sauront, et ils estimeront qu'il faut revoir l'ACEUM.
    Nous pourrions faire les frais de cette situation. Ce n'est pas une bonne chose.
    Répondez très brièvement. Le temps est écoulé. Soyez très rapide, s'il vous plaît.
    Je vais demander à M. Laycraft de répondre.
    Nous avons constaté par le passé, lors de telles négociations... Nous avons constaté une approche inhabituelle de la part de l'administration précédente, qui s'était mise à imposer arbitrairement des droits de douane. Cela peut devenir très imprévisible, mais nous savons qu'il y aura un problème.
    Monsieur Savard-Tremblay, vous disposez de six minutes.

[Français]

     Merci, monsieur le président. Vous êtes vice-président, mais président pour aujourd'hui.
    J'offre mes salutations à l'ensemble de mes collègues.
    Je remercie l'ensemble des témoins de leur présentation aujourd'hui.
    Monsieur Turp, vous êtes spécialiste en droit international, si je ne m'abuse. Vous avez enseigné, vous avez été professeur et vous avez dirigé un grand nombre de mémoires de maîtrise et de thèses de doctorat sur ces questions.
    Dans votre ancienne vie de député, vous avez travaillé à la question de la conclusion des accords commerciaux et de la reddition de comptes à l'égard du Parlement.
    Nous avons entendu aujourd'hui toutes sortes d'arguments, dans les appuis comme dans les oppositions, en ce qui concerne le projet de loi C‑282. Parmi les craintes qui ont été exprimées, on nous dit que cela pourrait ébranler la manière de conclure les négociations.
    À la lumière de votre expertise, partagez-vous cette crainte?
(1620)
    Non, je ne la partage pas, parce que ce système de gestion de l'offre, comme on l'a précisé, existe depuis 1971. Est-ce que cela a vraiment empêché le Canada de faire partie d'accords qui ont donné des avantages à toutes les industries? Je trouve un peu curieux qu'on accepte aujourd'hui de dire que ce système, qui par le passé n'a pas nui au Canada, pourrait lui nuire maintenant.
    Pourquoi lui nuirait-il? C'est parce que des États nous disent qu'il faut ouvrir nos marchés. On n'a pas accepté de le faire avant, alors pourquoi le ferait-on maintenant, surtout quand il y a des États comme les États‑Unis ou le Japon, qui protègent certaines industries? Je trouve que cet argument démontre un manque de solidarité avec nos producteurs laitiers. Il faut se rappeler que le système qui a été mis en place est un modèle unique et une politique qui devrait être maintenue.
    À votre connaissance, à l'échelle internationale, il n'existe pas de règles, écrites ou non, qui feraient que ce serait mal vu ou, du moins, que cela plomberait un pays qui viendrait négocier des accords, s'il avait un tel mandat en amont de ces négociations.
    Non. Aucune règle n'empêche le Canada, qui a créé ce système, de maintenir ce système, qui est toujours possible. Au contraire, il y a des règles qui le permettent. On devrait continuer de vouloir compter sur ces règles pour maintenir ce système, que ce soit à l'OMC ou dans des négociations plurilatérales ou multilatérales.
    D'ailleurs, un des arguments qui devraient peut-être être présentés est celui de la souveraineté alimentaire. On a bien vu pendant la pandémie qu'on se préoccupait de notre souveraineté lorsqu'il s'agit de la dépendance des exportations. Or on a une industrie qui est très bien ancrée dans son milieu et qui devrait pouvoir continuer à assumer cette souveraineté et rendre très disponibles les produits qui sont protégés par le système de la gestion de l'offre.
     Nous avons entendu à plusieurs reprises que le modèle était bon, mais que le projet de loi ne l'était pas, c'est-à-dire que de se lier les mains avant d'aller négocier et de dévoiler son jeu serait une mauvaise idée.
    Vous disiez précédemment que le Canada était tout sauf un modèle de transparence et de consultation de ses élus sur les mandats que nous offrons aux négociateurs.
    À la lumière de votre expertise, que se passe-t-il à l'international? Que se passe-t-il à l'étranger?
    On sait, par exemple, que les États‑Unis et l'Union européenne ont des mesures qui protègent le coton, le sucre. On sait que, dans l'Union européenne, on fait des débats au préalable.
    Il me semble que, dans la vie, ce ne sont pas particulièrement de mauvais négociateurs.
    Non.
    D'ailleurs, je trouve que le Parlement et vous, qui êtes des parlementaires, devriez revendiquer davantage de pouvoir dans votre rapport avec le gouvernement lorsqu'il s'agit de négociations, de transparence dans les négociations.
    Avant la signature des accords, avant leur ratification, le Parlement devrait approuver de tels accords et être informé continuellement des négociations.
    L'avantage de la proposition dans le projet de loi C‑282, en limitant la prérogative et les attributions du ministre de négocier sur des questions de gestion de l'offre, c'est de garantir qu'il n'y aura pas de négociation sur ces questions et de garantir qu'il n'y aura pas de concession.
    C'est fort et c'est durable, à moins qu'un nouveau gouvernement veuille modifier cette disposition plus tard. À mon avis, c'est une façon très certaine de garantir l'atteinte de l'objectif. Je me permets de dire, comme je l'ai dit au début de mon allocution, que dans ce cas particulier de gestion de l'offre, c'est une question de parole donnée.
    J'entends des parlementaires dire le contraire de ce qu'a dit leur chef aujourd'hui. Tous les chefs de tous les partis ont dit qu'ils protégeraient le système de gestion de l'offre.
    Je pense que les parlementaires et les partis devraient respecter leur chef et leur parole et devraient accepter que ce projet de loi soit adopté puisqu'il garantirait le respect de ce système.
(1625)
    Je vous remercie, monsieur Turp.
    Pour terminer, je laisse la parole à monsieur Perron.
    Je remercie beaucoup tous les témoins d'être avec nous.
    D'abord, je veux dire que le Bloc québécois et l'ensemble des parlementaires respectent profondément l'ensemble des productions agricoles, de même que l'ensemble des secteurs.
    Nous serons toujours là pour les aider. Les gens qui sont opposés au projet de loi le savent.

[Traduction]

    J'invoque le Règlement, monsieur le président.
    Est‑ce qu'on attribue six minutes au Bloc?

[Français]

    Non, il reste 20 secondes.

[Traduction]

    Je suis désolé. Je n'avais pas compris que vous partagiez votre temps.

[Français]

    Cela dit, si M. Virani veut présider...

[Traduction]

    Au moment de terminer sa question, il lui restait environ 20 secondes. Il a donc 20 secondes à compter de maintenant.

[Français]

    Je disais que nous respectons profondément chacune des productions et que nous serons toujours là pour vous aider, mais vous le savez puisque nous nous connaissons déjà.
    J'ai quand même des questions à vous poser.
    Monsieur Darling, ne pouvez-vous pas concevoir qu'il puisse exister des modèles différents?
    En fait, c'est une évidence. Ce sont des modèles de production différents qui ont été choisis de façon différente.
    Cela cohabite-t-il bien jusqu'à maintenant?

[Traduction]

    Répondez très brièvement.
    L'agriculture, en général, est un secteur concurrentiel. Si je comprends bien votre question, je suis constamment en concurrence avec mes voisins.
    Est‑ce que la gestion de l'offre offre un certain avantage par rapport à nous, en raison de leur secteur d'activité? Oui, mais nous gérons cela, et ce, au moyen du commerce international. Nous pouvons ainsi obtenir plus d'argent de nos produits que nous l'aurions fait autrement.
    Nous passons maintenant à M. Cannings, qui dispose de six minutes.
    Merci à tous d'être avec nous aujourd'hui.
    Je vais m'adresser à M. Slomp, de l'Union Nationale des Fermiers. Il semble que votre organisation représente l'essentiel du secteur agricole, ou qu'il en représente une grande partie, de bien des façons. Je crois que vous avez dit que vous avez de l'expérience dans la production de produits laitiers et de viande bovine, ou que vous en produisez en ce moment. Il est bon d'avoir quelqu'un qui peut probablement examiner la question sous tous les angles.
    Vous avez commencé à donner des chiffres concernant les négociations de l'AECG, l'Accord économique et commercial global. Je me demandais si nous pouvions les étudier de plus près. Selon les chiffres dont je dispose, au début des négociations de l'AECG, le Canada disposait d'un accès au marché en franchise de droits de 30 000 tonnes pour le bœuf et le porc, mais il n'exportait que 1 000 tonnes de bœuf et 100 tonnes de porc par an. Dans le cadre de l'AECG, les négociateurs ont cédé 17 500 tonnes du marché du fromage, ce qui équivaut à l'ensemble du marché laitier de la Nouvelle-Écosse. Pourtant, d'après les chiffres que j'ai, nous n'exportons toujours pas beaucoup plus de bœuf vers l'Europe.
    Je me demande si ces deux choses n'ont rien à voir l'une avec l'autre. Est‑ce qu'on a laissé aller le marché du fromage dans le cadre d'autres négociations? Il ne semble pas que le bœuf et le porc aient vraiment besoin d'une aide supplémentaire en Europe. J'aimerais simplement y voir plus clair.
    Je pense qu'il ne faut pas s'attendre à ce qu'un nouvel accord commercial assure le succès des secteurs canadiens du porc et du bœuf, parce qu'il y a beaucoup de place pour l'exportation en Europe dans ces deux secteurs. Nous devons examiner de près, au Canada, la rentabilité des exploitations agricoles dans ces secteurs. Il est évident qu'elle laisse à désirer.
    En affaiblissant la gestion de l'offre, à commencer par l'OMC — on parle tout de suite d'une perte de 3,5 % dans le secteur de la gestion de l'offre —, nous avons un meilleur accès au marché, mais nous avons en même temps permis au marché canadien de s'ouvrir à l'importation. Pour chaque succès que les secteurs du bœuf et du porc revendiquent à l'exportation, nous importons au moins la même quantité, si ce n'est plus. D'un point de vue économique, je pense que nous ne devrions pas être si enthousiastes à l'idée de multiplier les accords commerciaux si nous perdons sans cesse des marchés intérieurs.
    C'est la rentabilité qui fait défaut. Je pense qu'il n'y a qu'un seul moyen d'y remédier, et c'est de mettre moins l'accent sur le commerce et plus sur la rentabilité des exploitations. C'est exactement ce que la gestion de l'offre permet de faire.
    Le Canada rural connaît un ralentissement depuis longtemps. Seuls les secteurs agricoles soumis à la gestion de l'offre ont résisté à cette détérioration. Tout autre moyen d'améliorer la rentabilité de la communauté agricole est le bienvenu, mais je sais que la gestion de l'offre en est un.
(1630)
    Vous avez mentionné un autre facteur qui distingue le marché des produits laitiers de celui de la viande bovine. Comme vous l'avez dit, dans le secteur de la viande bovine, les exportations sont à peu près équivalentes aux importations, alors que dans le secteur du fromage, par exemple, ou des produits laitiers en général, nos importations sont cinq fois supérieures à nos exportations. Il semblerait que le secteur laitier soit plus sensible aux accords qui permettent d'augmenter les exportations sur un marché pour lequel nous nous battons déjà chez nous. Est‑ce le cas?
    En ce qui concerne l'AECG et son succès, il faut admettre que cet accord est très profitable à l'Europe sur le plan du commerce agricole. Les Européens ont réussi à exporter sans tarder 17 500 tonnes de fromage vers le Canada en échange d'exportations hypothétiques de bœuf et de porc du Canada vers l'Europe, sans que ces exportations se matérialisent réellement. Qui a été le meilleur négociateur dans cette affaire?
    D'accord.
    Je pense que l'un des accords qu'il nous reste à conclure, d'après ce que j'ai compris, est celui du Mercosur, avec certains pays d'Amérique du Sud. Il y a, entre autres, l'Argentine, d'où nous importons une bonne quantité de viande bovine. Je ne pense pas que nous exportions énormément de viande bovine vers l'Argentine. Quels sont, selon vous, les risques liés à un tel accord, au projet de loi dont nous sommes saisis et au système de gestion de l'offre en général?
    Est‑ce que c'est encore à moi que la question s'adresse?
    Oui.
    Merci.
    Je pense qu'il ne faut pas sous-estimer le potentiel de production de viande bovine bon marché des pampas argentines. Si l'accord du Mercosur va de l'avant et que nous ne voyons pas là un obstacle potentiel de taille à notre industrie de la viande bovine, nous négligeons assurément des aspects importants. Il serait terrible de...
    Je vais devoir vous interrompre. Nous avons dépassé le temps imparti d'environ 30 secondes.
    M. Jan Slomp: Merci.
    Le vice-président (M. Kyle Seeback): C'est maintenant au tour de M. Martel.

[Français]

     Monsieur Martel, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Gobeil, le 14 novembre 2022, dans un article publié sur le fil d'actualité de Radio‑Canada destiné au Saguenay—Lac‑Saint‑Jean, vous disiez que vous étiez satisfait des compensations accordées par Ottawa pour les pertes engendrées par la signature de l'Accord Canada—États‑Unis—Mexique, ou ACEUM. Vous disiez que cela mettait fin à plus de trois ans de négociation avec le gouvernement.
    J'aimerais savoir s'il y a vraiment eu des négociations avec le gouvernement en place. En effet, on entend toujours dire que le gouvernement ne négocie pas, habituellement.
    Bonjour, monsieur Martel.
    Oui, il y a eu des négociations. Nous avons fait beaucoup de représentations, lors de la première mouture des compensations, car le gouvernement devait annoncer les compensations relatives aux trois accords dans la même mouture. Finalement, il a annoncé une première compensation pour les répercussions de l'Accord de partenariat transpacifique global et progressiste, ou PTPGP, et de l'Accord économique et commercial global entre le Canada et l'Union européenne, ou AECG, puis une autre pour finaliser la négociation.
    Cela dit, oui, les producteurs laitiers du Québec et de partout au Canada ont collaboré avec le gouvernement pour annoncer ces compensations.
    J'aimerais poser la même question à M. Lampron.
(1635)
    Merci de votre question.
    Il faut comprendre que nous voulons tourner la page, et je pense que le projet de loi répond à cette volonté. Nous avons assez donné. Le Canada a conclu 15 accords de libre-échange et ce ne sont que les trois derniers qui donnaient accès à notre lait. Alors, nous sommes capables de faire du commerce sans cela, mais dans les derniers accords, cela se glissait peu à peu.
    Comme M. Gobeil l'a dit, nous sommes contents que ce soit fini, mais nous ne voulons pas que cela se répète et que chaque accord nécessite des compensations. Ce n'est pas un modèle que nous voulons. Nous avons plusieurs engagements, notamment à l'égard de la carboneutralité, mais les producteurs ont besoin de stabilité et de prévisibilité pour savoir où ils s'en vont. C'est pourquoi nous disons que nous sommes contents, mais que nous ne voulons plus de ces accords.
    Il faut être clair: ce n'est pas un modèle que nous voulons, comme producteurs de lait et producteurs assujettis à la gestion de l'offre.
    Monsieur Gobeil, les compensations que vous êtes censés recevoir totalisent 1,7 milliard de dollars et seront versées sur six ans, je crois, jusqu'en 2030. Êtes-vous certains que vous allez les recevoir? Peut-être que c'était dans l'énoncé, comme vous le dites, mais il n'y a rien d'écrit et on ne sait pas si ces compensations seront inscrites dans le prochain budget du gouvernement.
    Avez-vous une entente écrite? Cela devrait-il être inscrit dans le prochain budget?
    Oui, nous sommes très confiants. Dans le cas de l'ACEUM, il s'agit de 1,2 milliard de dollars en aide directe pour les fermes, et nous sommes certains de les recevoir. Il y a eu des annonces, comme M. Lampron l'a dit, dans l'énoncé économique.
    Ce qui est important pour nous, monsieur Martel, c'est de répondre aux besoins du marché et de produire du lait pour les Canadiens et les Canadiennes. Ce modèle ne convient ni aux producteurs laitiers ni aux autres producteurs assujettis à la gestion de l'offre. Chaque entrepreneur au Canada veut de la croissance. Certains veulent de la croissance en ayant accès à des marchés d'exportation, mais nous, nous voulons de la croissance pour répondre aux besoins des Canadiens.
    Or c'est ce que ces accords nous enlèvent. Pendant que des accords successifs sont conclus au Canada, le secteur laitier ne connaît aucune croissance pour ceux qui ont investi dans les fermes, et ce, dans toutes les régions. C'est pour cette raison qu'il faut cesser de suivre ce modèle.
     Merci, monsieur Gobeil.
    Monsieur Lampron, je suis curieux, aviez-vous des engagements de la part de la ministre des Finances pour qu'elle inclue dans le budget des compensations de 1,7 milliard de dollars en six ans?
    Aviez-vous une entente à cet égard?
    Vous commencez à me stresser en disant que nous n'aurons pas notre argent. Je croyais que nous allions l'avoir et que nous pourrions tourner la page. Or vos questions insistantes me font en douter.
    Nous allons vérifier cela pour être sûrs. Dans mon esprit, c'était garanti. Les producteurs s'attendent à le recevoir. Je pense que le gouvernement ne peut pas jouer comme ça avec les producteurs. Il s'agit d'un engagement.
    Nous allons vérifier les détails pour voir si quelque chose peut nous échapper.
    Merci.
    Monsieur le président, combien de temps me reste-t-il?

[Traduction]

    Il vous reste 20 secondes.

[Français]

    L'entrée en vigueur de ces versements est prévue en janvier 2024 ou à la fin de l'année 2024. C'est difficile à suivre. Quand le ministère va-t-il annoncer une date? Il n'y a pas grand-chose de précis.
    Comme M. Gobeil l'a dit, nous avons reçu une compensation pour les premiers accords et les paiements ont été faits, comme promis. Nous espérons que cela va continuer ainsi. Les premières années, cela s'est bien fait.
    Je vous remercie de vous inquiéter pour nous.
    Merci, monsieur Lampron.

[Traduction]

    Monsieur Virani, vous disposez de cinq minutes.

[Français]

    Je remercie beaucoup tous les témoins de leurs témoignages.
    Bon retour au Parlement, monsieur Turp.

[Traduction]

    Je vais commencer par... De toute évidence, nous parlons d'un important système de la politique canadienne, qui a été créé par le gouvernement de Pierre Trudeau en 1972.
    Je voudrais commencer par David Wiens.
    Si j'ai bien compris, vous avez parlé d'objectifs climatiques dans votre déclaration liminaire. Quand je pense à l'alimentation et à l'achat de produits alimentaires, selon ma vision simpliste... On parle d'avoir une perspective mondiale, mais d'acheter localement, c'est‑à‑dire de réduire l'empreinte carbone avec un produit que l'on peut se procurer localement, par opposition à un produit qui provient d'un autre endroit dans le monde. J'ai eu l'impression que vous parliez des cibles climatiques et des efforts déployés par les exploitations agricoles pour atteindre la carboneutralité.
    Pouvez-vous nous expliquer en quoi protéger la gestion de l'offre contribue à l'atteinte des cibles en matière de climat?
    Je vous remercie de cette question.
    Nous avons pour objectif de parvenir à la carboneutralité d'ici à 2050. Bien sûr, il faudra faire plus d'efforts pour y parvenir. Nous progressons très bien. À l'heure actuelle, notre empreinte carbone représente environ la moitié de l'empreinte moyenne des laiteries du monde entier. Nous sommes bien partis. Cela signifie que les exploitations agricoles de tout le pays vont devoir continuer à apporter des changements et à innover. Bien sûr, cela ne peut se faire sans les revenus dont nous disposons aujourd'hui, par exploitation. C'est impossible.
    La durabilité environnementale va de pair avec la durabilité économique. Si cette dernière commence à s'éroder, nous ne pourrons plus faire certaines choses que nous pouvons faire aujourd'hui de manière très proactive. C'est une préoccupation majeure pour nous. Dès que la durabilité économique se mettra à décliner, une grande partie des mesures que nous voulons prendre seront retardées. Bien sûr, cela rend plus difficile l'atteinte des cibles.
(1640)
    Je vous remercie.
    Je veux passer à ma deuxième question. Je vais l'adresser à M. Slomp, mais je serais reconnaissant si M. Gobeil et M. Turp pouvaient également donner leur point de vue.
    Monsieur Slomp, vous avez mentionné la rivière atmosphérique en Colombie-Britannique l'an dernier et à quel point les phénomènes climatiques peuvent avoir des effets dévastateurs sur la sécurité alimentaire. Malgré cette rivière atmosphérique, les habitants de la Colombie-Britannique ont quand même pu respecter et fournir les quantités qui leur étaient allouées. Cela a créé une chaîne d'approvisionnement stable. M. Gobeil l'a mentionné, et M. Turp a parlé de « souveraineté alimentaire », cette idée de sécurité alimentaire nationale, de contrôle des aliments et de capacité à nourrir son propre peuple.
    Lorsque nous sommes confrontés à des perturbations de la chaîne d'approvisionnement, qu'il s'agisse d'une guerre illégale en Ukraine ou de phénomènes climatiques atmosphériques... Pouvez-vous expliquer comment la protection de la gestion de la chaîne d'approvisionnement garantit la prévisibilité, en termes d'approvisionnement en denrées alimentaires et de prix de ces denrées?
    M. Slomp peut peut-être intervenir en premier, puis ce sera au tour de M. Gobeil et de M. Turp.
    Les offices de commercialisation provinciaux travaillent en permanence à l'approvisionnement des transformateurs et, indirectement, des détaillants. Ils disposent d'une organisation très soudée qui veille à ce que ces tâches soient accomplies quotidiennement. Le système, très prévisible, produit en fonction des besoins.
    Nous entretenons également des relations interprovinciales parmi ces offices de commercialisation qui permettent le transport interprovincial, au besoin. Ils s'entraident. Dans l'éventualité d'un événement dévastateur, nous avons un système sûr pour garantir un approvisionnement régulier aux consommateurs canadiens. Les autres secteurs qui sont toujours à la recherche d'occasions d'exportation n'ont pas cette possibilité. Ils comptent totalement sur l'épicier pour le faire à leur place dans ce processus.
    Nous avons le système en place pour gérer les phénomènes plus imprévisibles à l'avenir.

[Français]

     Monsieur Gobeil, monsieur Turp, avez-vous quelque chose à ajouter?
    J'ajouterais ce qui suit. Nous avons vu pendant la pandémie à quoi menait la dépendance envers les exportations. On s'est rendu compte qu'il fallait davantage de souveraineté alimentaire et de souveraineté médicale.
    Nous avons présentement un système de gestion de l'offre qui nous permet de ne pas dépendre des exportations, et je crois que si ce système est remis en question, il y aura de plus en plus d'exportation et des fermes vont disparaître. Nous aurons peut-être alors un problème de dépendance à l'égard des exportations et un problème de souveraineté alimentaire.
    Je vous remercie de votre question.
    Il y a eu de très bonnes réponses de la part de certains confrères.
    J'ai abordé plus tôt la gestion de l'offre. On parle de partager les coûts, mais aussi les risques. Il s'agit de risques météorologiques, mais aussi de risques liés à la productivité. On a pu constater durant la pandémie — M. Turp y a fait allusion — qu'il pouvait manquer des produits dans la chaîne d'approvisionnement. Il y a eu une inondation en Colombie‑Britannique et une cascade des répercussions dans toute la filière laitière canadienne.

[Traduction]

    Monsieur Gobeil, je vais devoir vous interrompre. Nous avons dépassé le temps imparti d'environ 40 secondes.
    Monsieur Savard-Tremblay, vous disposez de deux minutes et demie, je vous prie.

[Français]

    Je vais céder mon temps de parole à M. Perron pour ce tour-ci.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
     Monsieur Darling, reprenons là où nous étions rendus.
    Je vous ai demandé si vous ne pensiez pas que deux modèles pouvaient coexister. Vous m'avez dit que les gens couverts par la gestion de l'offre avaient les avantages de ce système. Cependant, vous avez pour vos productions un modèle différent, que nous respectons, je le répète, et vous avez accès aux programmes de gestion des risques de l'entreprise. Or les gens couverts par la gestion de l'offre n'y ont pas accès. Ce sont des modèles qui se comparent difficilement et qui ont été choisis par les producteurs.
     Ne pensez-vous pas qu'il serait plus constructif de travailler à l'amélioration des programmes de gestion des risques plutôt que de travailler contre la gestion de l'offre?
(1645)

[Traduction]

    Tout d'abord, nous ne sommes aucunement opposés à la gestion de l'offre. Nous avons coexisté et nous continuerons à coexister. Cependant, tout ce que nous disons, c'est qu'en mettant cette loi en vigueur, vous protégez effectivement la gestion de l'offre et vous devriez protéger la gestion de l'offre, mais vous désavantagez le reste d'entre nous — les 90 % restants — en leur permettant de gagner ces marchés en Europe, dont nous dépendons.

[Français]

    Il reste que nous ne sommes pas d'accord sur le fond.
    Monsieur Phinney, vous dites que vous ne vous opposez pas à la gestion de l'offre et qu'il faut la protéger. Toutefois, vous nous dites aussi, dans la même phrase, de ne pas la protéger parce que vous voulez avoir plus de parts de marché.
    C'est comme si, de notre côté, nous disions vouloir que vous arrêtiez de faire de l'exportation et que vous changiez de modèle.
    Ne trouvez-vous pas qu'il y a là une contradiction?
    Je ne m'oppose pas à vous. J'aimerais entendre votre point de vue.
    Ne pensez-vous pas qu'il est possible de protéger la gestion de l'offre et de faire quand même des ententes commerciales? Je crois que 15 ou 16 ententes avaient été conclues avant que des concessions ne soient faites.
    La parole est à vous, monsieur Phinney.

[Traduction]

    Une chose que je peux dire — sans dresser une industrie agricole contre l'autre —, c'est que nous sommes dans une position unique avec l'industrie laitière, en ce sens que leurs animaux deviendront du boeuf à un moment ou à un autre. Comme je l'ai déjà dit, 1 500 $ par animal, c'est l'augmentation de la valeur grâce au commerce d'exportation et à un commerce d'exportation solide, de sorte que sans ce marché, la valeur de ce produit est complètement épuisée des deux côtés du spectre.

[Français]

    Nous sommes rendus à 18 % dans ce marché, monsieur Phinney. Si vous connaissez un peu la gestion de l'offre, vous savez qu'on parle ici du contrôle des quantités et que cela ne fonctionnera plus.

[Traduction]

    Le temps de parole est écoulé.
    Nous allons passer à M. Cannings pour deux minutes et demie.
    Je vous remercie.
    Je vais m'adresser à M. Turp, et j'ai des questions similaires à celles que M. Perron a posées. Il semble que si nous devons protéger la gestion de l'offre, l'un des piliers de cette gestion est la quantité que nous importons. Cette quantité doit être contrôlée, et nous avons ici une mesure législative qui semble le faire. Quels sont les liens entre les industries laitière et bovine lorsqu'il s'agit de négociations, si c'est l'un de vos domaines d'expertise?
    Il semble que nous puissions faire les deux. Nous pouvons mâcher de la gomme et marcher en même temps, si vous voyez ce que je veux dire. Je ne sais pas si cette question est claire, mais quel est le lien entre ces deux secteurs lorsque nous menons les négociations? N'est‑ce pas une chose importante à faire pour contrôler l'offre d'importation et protéger notre système de gestion de l'offre?

[Français]

     C'est une bonne question.
    Elles ne sont pas nécessairement liées. Elles ne l'ont pas été par le passé. Elles paraissent liées, ou on veut les lier, comme d'autres industries le font, comme nous l'avons entendu aujourd'hui, parce que d'autres États cherchent des concessions dans ce domaine et dans leurs exportations de produits laitiers, de volailles et d'œufs.
    Maintenant, il y a quelque chose à dire. Il ne faut pas agir comme un scout, comme l'un des autres témoins l'a dit. Cela revient simplement à dire que, maintenant, le Canada protège cette industrie. Il a adopté un système. Vous avez vécu avec ce système pendant toutes ces années et toutes ces négociations; vous devrez continuer à le faire car nous ne ferons pas de concession dans ce domaine. Nous ne lions pas les choses. Négocions sur d'autres produits et d'autres concessions.

[Traduction]

    Je vais seulement poser cette question à M. Lampron ou à M. Wiens.
    Si nous voulons protéger la gestion de l'offre, il faut notamment protéger l'offre. Pouvez-vous en dire plus à ce sujet et sur cette mesure législative?
(1650)

[Français]

    Je vais résumer cela rapidement.
    C'est sûr que le système de gestion de l'offre est notre priorité. Il faut fournir le marché canadien. Nous l'avons dit et nous l'avons fait malgré les catastrophes.
    Nous ne sommes pas contre l'exportation. Nous sommes en faveur de cela. Certains pays ont besoin des produits canadiens. Nous devons être capables de les leur livrer, et nous y travaillons ensemble, comme nous travaillons au potentiel canadien de carboneutralité et d'efficacité. Selon moi, nous avons un potentiel au Canada.
    Cependant, pour la gestion de l'offre, nous avons décidé de travailler sur le marché canadien. Nous le garantissons. C'est notre responsabilité. La responsabilité du gouvernement, c'est de bloquer les frontières. C'est pour cela que le projet de loi dont il est question aujourd'hui aide à renforcer notre système et à donner une assurance aux producteurs.

[Traduction]

    Le temps est écoulé.
    Monsieur Carrie, vous disposez de cinq minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Monsieur Darling et monsieur Phinney, je suis d'Oshawa. Nous fabriquons des voitures. Notre chaîne d'approvisionnement est importante. Elle est très sensible et très précise. Nous voulons nous assurer de conclure les meilleurs accords commerciaux possibles qui servent tous les intérêts canadiens.
    Le gouvernement s'est engagé à ne plus faire de concessions sur la gestion de l'offre. C'est un point sur lequel tous les partis se sont mis d'accord. Dans la dernière mouture de ce projet de loi, qui était le projet de loi C‑216, les négociateurs commerciaux ont souligné le risque de perdre de futures occasions commerciales pour le Canada dans les secteurs qui dépendent du commerce.
    À partir de ce type de considération, diriez-vous que le projet de loi C‑282 présente plus de risques ou d'avantages pour l'économie canadienne? Nos partenaires commerciaux pourraient-ils riposter en adoptant une mesure législative semblable? Quel est, selon vous, le risque?
    Monsieur Darling, pourriez-vous commencer?
    Personne ne le sait vraiment.
    Le bon sens me dit que dans une négociation, vous allez utiliser tous les avantages que vous pouvez obtenir. Si un autre pays protège une certaine marchandise — ce que tous les pays font —, l'autre pays va également faire quelque chose pour que cette marchandise soit protégée. Cela nous désavantagera.
    Oui, je pense que cela peut créer encore plus de problèmes qu'auparavant.
    Je vais céder la parole à Dennis Laycraft.
    Je voulais vous donner quelques chiffres, car je pense que nous avons eu l'impression que nos exportations et nos importations... L'année dernière, nos exportations nettes se sont élevées à 4 milliards de dollars. C'est un record. Pendant la pandémie, nous avons augmenté notre production. Chaque année, nous avons pleinement répondu aux besoins des Canadiens et nous avons établi de nouveaux records d'exportation.
    Nous avons aidé le Japon. Nous sommes venus en aide à tous les pays dans lesquels nous exportons des marchandises pour répondre à leurs besoins en matière de sécurité alimentaire. Nous n'adoptons pas forcément la « souveraineté alimentaire ». Nous avons une obligation morale plus importante que cela, à mon avis.
    En ce qui concerne le commerce avec les États-Unis, nous avons enregistré un excédent commercial de 3,4 milliards de dollars l'an dernier. Chaque fois que vous entamez des négociations, il est question de sensibilité et de produits sensibles.
    J'ai participé aux premiers travaux visant à intégrer l'agriculture dans le GATT, comme c'était le cas à l'époque. C'est devenu l'OMC. L'objectif était d'obtenir... Les termes exacts étaient « commerce équitable et axé sur le marché », afin que chacun ne cache pas ses intérêts particuliers et que l'ensemble de l'agriculture puisse faire l'objet d'un accord global permettant des négociations et un commerce équitable.
    Nous craignons que si tout le monde commence à élaborer des mesures législatives pour tout ce qu'il juge sensible, nous allons faire régresser l'ensemble du processus en cours de route.
    Je vous remercie de ces observations et de ces chiffres. J'ignorais que vous en aviez fait autant durant la pandémie. Je crois que nous avons une responsabilité morale, car nous avons la chance, ici au Canada, d'aider le monde.
    Je m'inquiète au sujet des différents secteurs. Pensez-vous que ce projet de loi pourrait dresser un secteur contre les autres? Quelles pourraient en être les répercussions?
    Nous travaillons en étroite collaboration avec nos amis du secteur laitier. C'est la façon dont cela compromet les négociations. Au fil des ans... Nous avons des négociateurs commerciaux très compétents qui tentent d'équilibrer les intérêts établis par le gouvernement du Canada. Malheureusement, c'est la nature même d'une négociation. Les deux parties auront des intérêts qu'elles essaieront de défendre. À un moment donné, si nous entamons une autre négociation avec les États-Unis, je peux vous garantir que la question sera abordée. C'est indéniable.
(1655)
    Si le projet de loi C‑282 est adopté. les industries comme la vôtre chercheraient-elles à obtenir une compensation économique pour les possibilités d'accès au marché manquées que le projet de loi pourrait créer? Y avez-vous réfléchi?
    Le précédent a été établi. S'il y a des dommages... De toute évidence, avec la perte de quotas dans le cadre de certaines négociations, il y a eu un précédent où ils ont été indemnisés. Si l'on considère les économies d'échelle, comme je l'ai dit dans ma déclaration liminaire, 1 500 $ par tête pour trois millions et demi de têtes de bétail, c'est beaucoup plus que ce qui était versé auparavant.
    Je vous remercie de ces observations.
    Nous allons maintenant entendre M. Drouin pour cinq minutes.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je tiens à remercier tous les témoins qui sont présents aujourd'hui. Je veux aussi indiquer que je ne crois pas nécessaire de dresser un secteur contre un autre. Le secteur de l'agriculture doit parler d'une seule voix, et c'est important de le répéter.
    En même temps, je veux corriger quelques faussetés qui ont été dites par certains de mes collègues de l'autre côté de la table.
    Je rappelle que le gouvernement s'est engagé à verser 1,7 milliard de dollars. Je tiens à remercier le Bloc québécois et le NPD qui ont voté en faveur du projet de loi C‑32. Par contre, je ne tiens pas à remercier le Parti conservateur, qui a voté sur les compensations de 1,7 milliard de dollars. À titre de précision, MM. Lehoux et Martel ont voté contre le projet de loi. C'est très clair, et je tiens à le souligner pour que les gens le sachent.
    Il a été possible pour le Canada de faire avancer quand même le débat. Je sais qu'il y a eu certaines pertes dans le marché du secteur laitier. Je fais des rencontres avec les 300 producteurs de ma région, à Saint‑Isidore, et je sais que c'est un problème.
    Cela étant dit, monsieur Lampron ou monsieur Wiens, on parle souvent de la gestion de l'offre comme si cela coûtait beaucoup d'argent aux consommateurs. Je sais que vous représentez le secteur laitier. Or, il y a deux ou trois semaines, on a vu dans les nouvelles qu'aux États‑Unis, qui sont pourtant un marché libre, la douzaine d'œufs coûtait 8 $. J'étais justement en Floride, où je visitais mes parents. Ici, au Canada, je peux l'acheter à 3,29 $ chez Foodland, et ce sont des œufs qui proviennent de ma région, de la ferme avicole Laviolette.
    Certains professeurs, que je ne nommerai pas aujourd'hui, semblent toujours dire que la gestion de l'offre coûte plus cher aux consommateurs.
    Qu'avez-vous à leur répondre aujourd'hui?

[Traduction]

    Je ne suis pas du tout d'accord pour dire que c'est la gestion de l'offre qui est à l'origine de cette situation. En fait, certaines études montrent que si l'on compare, par exemple, les produits laitiers au Canada et dans d'autres pays dans le monde, le Canada se situe plutôt en milieu de peloton. Avec la gestion de l'offre, l'agriculteur se retrouve avec une plus grande part de l'argent du consommateur. Il ne s'agit pas du prix final, de sorte que la gestion de l'offre n'a certainement pas d'incidence sur les prix de détail au Canada.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Je veux parler de cette question, parce que c'est important, à mon avis. J'appuie entièrement le projet de loi C‑282 et je tiens à remercier mes collègues de l'autre côté de la table de leur appui. Nous travaillons en étroite collaboration pour ce qui est de cet enjeu.
    Nous avons aussi entendu d'autres faussetés, notamment durant la pandémie, à savoir qu'on pouvait mettre un tube sur des vaches pour qu'elles cessent de produire du lait et, soudainement, on blâmait la gestion de l'offre.
    Encore une fois, un professeur, que je ne nommerai pas, blâmait la gestion de l'offre et on savait que cela se passait aussi aux États‑Unis. Le marché a changé. Par exemple, le 24 décembre dernier, dans ma région, il y a eu une grosse tempête. Quand les camions ne peuvent pas se rendre à la ferme pour ramasser le lait, les producteurs doivent jeter leur lait. Ce n'est pas à cause de la gestion de l'offre.
     J'aimerais simplement connaître votre opinion à ce sujet.
     Merci de votre question.
    On produit le lait. On a aussi expliqué aujourd'hui qu'on mettait toutes les règles en place pour voir une production qui réponde à la demande du marché canadien. De toute évidence, il y a des choses qu'on ne contrôle pas, comme les tempêtes de neige. Les producteurs ont aussi des manœuvres à effectuer.
(1700)

[Traduction]

    Il faut simplement parler davantage de déversement de lait et de la relation entre la gestion de l'offre et le déversement de lait et du fait que, à ma connaissance, il n'y a pas de lien entre les deux, mais je vous en prie, continuez.

[Français]

    On produit le lait, mais on ne le transforme pas. On a besoin de quelque chose entre les deux.

[Traduction]

    Nous avons connu des problèmes avec la chaîne d'approvisionnement durant la pandémie. Nous sommes passés d'un équilibre entre le commerce de détail et la restauration à une absence soudaine de demande dans les restaurants, les hôtels, etc. Il a fallu un certain temps pour que la chaîne d'approvisionnement se réajuste. Dans les exploitations agricoles, nous avons dû procéder à des ajustements massifs, car la demande a d'abord chuté, puis elle a grimpé, avant de redescendre à nouveau. Nous devions réagir, ce que nous pouvions faire très rapidement.
    Tout à fait, et je tiens à dire que tous les pays protègent certains produits agricoles. Ils les protègent sous forme de subventions ou de droits de douane. Ils le font tous. Qu'il s'agisse de l'industrie du sucre ou d'un agriculteur qui gagne de l'argent ou non, mais qui reçoit des subventions par acre, chaque pays a intérêt à protéger ses produits agricoles, car nous devons nourrir les Canadiens. Je tiens à remercier tous ceux d'entre vous qui sont assis autour de la table d'avoir agi de la sorte.
    Je sais que je n'ai pas eu l'occasion durant les cinq minutes de poser une question à mes autres amis ici, mais je tiens à vous remercier de ce que vous faites.

[Français]

    Monsieur le président, je soulève une question de privilège.
     Sans enlever de temps de parole à personne, est-ce que je peux répondre à mon collègue? Il m'a interpellé directement.

[Traduction]

    Malheureusement, non, nous sommes à la période des questions.
    Sur ce, nous allons passer au troisième tour, et nous allons céder la parole à M. Baldinelli.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être ici.
    C'est plutôt intéressant. Je vais faire suite à ce que j'ai dit à la dernière réunion par souci de transparence. À la fin des années 1990 et au début des années 2000, j'ai travaillé comme lobbyiste pour une société d'experts-conseils en Ontario. L'un de mes clients était les Producteurs laitiers de l'Ontario. Je suis ravi d'avoir travaillé avec cette organisation et le programme de distribution de lait dans les écoles en Ontario. Je pense que nous reconnaissons tous l'importance de la gestion de l'offre pour nos exploitations et familles agricoles.
    Je veux donner suite à deux observations.
    Monsieur Darling, vous avez signalé dans vos remarques que vous craignez une réaction protectionniste, en ce sens que si le projet de loi C‑282 était mis en œuvre, il encouragerait, par exemple, notre principal partenaire commercial, les États-Unis, à adopter une mesure législative semblable. Quelle en serait l'incidence sur notre secteur agricole si cela se produisait dans certains secteurs comme, par exemple, le secteur bovin?
    Monsieur Phinney, vous pouvez revenir sur ces remarques également.
    Je vous remercie. Je ne vais pas répondre à la question sur le secteur bovin, mais je vais peut-être demander à mon vice-président, Greg Northey, d'y répondre.
    C'est une bonne question.
    Si vous le pouvez, imaginez que chaque pays légifère pour protéger quelque chose. Le Canada a tendance à essayer de signer des accords commerciaux exhaustifs. Les pays pourraient décider de ne pas signer le chapitre sur le travail, par exemple, ou sur l'environnement, ou sur tout autre point que nous souhaiterions voir figurer dans cet accord. Il pourrait s'agir du secteur agricole. Il peut s'agir de n'importe quoi. Ils suivront l'exemple du Canada. Parce que nous sommes si dépendants du commerce, le Canada a tendance à donner l'exemple au reste du monde.
    Nous sommes productifs à l'OMC et un peu partout pour essayer de concevoir des accords commerciaux de qualité. Si un pays avec lequel nous concluons un accord bilatéral ou multilatéral voit comment le Canada va légiférer pour protéger un secteur — la gestion de l'offre est en quelque sorte secondaire dans ce cas‑ci —, vous pouvez imaginer que nous ne parviendrons jamais à des accords fonctionnels sur le plan commercial.
    Si je peux faire suite à la deuxième observation, sur laquelle je veux simplement revenir, monsieur Lampron, vous avez parlé de la façon dont la mesure législative donnerait lieu à une plus grande stabilité et prévisibilité. Je crains que, si nous légiférons cela, si nous le codifions, cela n'aboutisse au résultat inverse.
    Par exemple, pour faire suite à ce que mon collègue a dit à la dernière réunion, regardez la production laitière au Canada. Nous sommes passés de 75 millions d'hectolitres en 2000 à 94 millions d'hectolitres en 2021. Aujourd'hui, je viens de sortir les exportations de produits laitiers par pays de destination et, vers les États-Unis, la valeur de nos exportations de produits laitiers est passée de 189 millions de dollars en 2019 à 241 millions de dollars. Elle a augmenté de 52 millions de dollars.
    J'ose imaginer que ces exportations ont été négociées, n'est‑ce pas? Cet accès au marché a été acquis par l'entremise d'une négociation commerciale, n'est‑ce pas? Si nous codifions par l'entremise du projet de loi C‑282, qu'est‑ce qui empêcherait les Américains de renégocier notre accord commercial et de dire, « Oubliez cela; les exportations de produits laitiers au Canada ne sont pas autorisées »?
    Ne pensez-vous pas que c'est un risque pour le secteur, un risque que nous voulons tenter d'éviter?
(1705)
    Je peux commencer.
    Premièrement, en ce qui concerne les exportations, l'industrie laitière canadienne ne ressent pas encore tous les effets des accords commerciaux qui ont déjà été signés. Il y a peut-être eu une augmentation progressive, mais en fait, il y en a encore plus à venir parce qu'ils sont mis en œuvre progressivement sur plusieurs années. Il faudra attendre encore trois ou quatre ans avant de ressentir pleinement les effets des accords commerciaux antérieurs dans notre pays.
    D'accord, mais y aura‑t‑il une incidence sur les exportations? Les exportations semblent être en hausse.
    En fait, avec le dernier ACEUM, nous sommes restreints dans certaines de nos exportations. Un plafond est imposé sur certains de nos produits de lait écrémé et...
    N'aimeriez-vous pas avoir un plus grand accès?
    Eh bien, c'est...
    Si vous avez dit non, qu'est‑ce qui empêchera les Américains de dire non? En fait, oubliez les 241 millions de dollars; ce n'est plus sur la table.
    Oui. Je pense qu'on a déjà dit dans le passé que tous les pays ont des secteurs sensibles à éviter. Pour les Américains, c'est le sucre, le coton, etc.
    De façon générale, quand on examine la situation, le Canada est un bon endroit pour faire du commerce, et je pense que beaucoup de pays veulent en faire. Je pense qu'il est un peu exagéré de dire qu'il y a une restriction dans un domaine et que soudainement, les gens ne sont pas intéressés à faire du commerce avec le Canada. Je n'y crois pas du tout, car je pense que le Canada est un marché très attrayant pour de nombreux secteurs de l'économie.
    Nous devons poursuivre car nous avons dépassé le temps imparti de 29 secondes.
    Nous allons céder la parole à M. Miao pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le vice-président.
    Je tiens à signaler aux fins du compte rendu que le 8 décembre 2022, les conservateurs ont voté contre le projet de loi C‑32, qui certifiait la somme de 1,7 milliard de dollars pour la gestion de l'offre. De plus, le chef de l'opposition officielle n'a pas appuyé pleinement le projet de loi C‑282.
    J'aimerais poser ma première question à M. Slomp.
    Dans votre énoncé de politique sur la version précédente du projet de loi, le Syndicat national des cultivateurs a déclaré que l'adoption du projet de loi était dans l'intérêt national. Croyez-vous que ce projet de loi, le projet de loi C‑282 aura une incidence sur la compétitivité du secteur agricole canadien sur le marché mondial?
    Je vous ai probablement mal compris, mais nous appuyons le projet de loi; nous ne sommes pas contre.
    Est‑ce que je vous ai mal compris?
    Non, ma déclaration initiale était aux fins du compte rendu, mais ma question pour vous était... Lors de la dernière législature, vous avez fait valoir qu'il était dans l'intérêt du Canada d'adopter le projet de loi. Croyez-vous qu'il aura une incidence sur la compétitivité du secteur agricole sur le marché mondial?
    Je ne sais pas trop comment répondre à cette question. Je crois que le projet de loi renforcera la position du Canada en matière de gestion de l'offre. À mon avis, cela n'aura pas d'incidence sur les autres secteurs.
    Je suis presque certain de ne pas avoir répondu à votre question, mais c'est tout ce que j'ai à dire sur le sujet.
    C'est bien. Merci beaucoup.
    Ma prochaine question s'adresse à M. Lampron.
    Pouvez-vous dire au Comité pourquoi la prévisibilité et la stabilité sont si importantes pour la gestion de l'offre au Canada, surtout dans le secteur laitier?
(1710)

[Français]

     Merci beaucoup de votre question.
    Le système de gestion de l'offre est important parce que c'est un bon système, basé sur un coût de production. Il n'est pas basé sur le marché, mais vraiment sur l'étude de notre coût de production. Les producteurs sont payés pour ce que cela leur coûte, c'est-à-dire un coût de production moyen. Ainsi, chaque ferme essaie toujours d'être plus efficace pour pouvoir baisser ses prix afin qu'ils soient moins élevés pour les consommateurs.
    Le système de gestion de l'offre n'est pas basé sur le marché mondial. Il nous permet donc de la stabilité. Nous ne réalisons pas des profits énormes, mais nous n'avons pas non plus de grosses pertes. Nous pouvons vivre longtemps sans faire trop de profits. Le système est ainsi. Il permet une prévisibilité. C'est ce que nous avons choisi comme système et les gens veulent le garder. Il garantit au consommateur la même chose, c'est-à-dire qu'il n'y aura pas de hausses ou de baisses importantes des prix. Le producteur survit et assure au consommateur que son produit sera sur les tablettes.

[Traduction]

    Je vous remercie.
    Est‑ce que M. Gobeil veut aussi répondre à la question sur la prévisibilité et la stabilité?

[Français]

     Notre marché, c'est le marché canadien qui n'est pas subventionné, comme on le dit souvent. Le consommateur paie donc le juste prix par rapport aux coûts de production. On peut difficilement comparer notre compétitivité à l'exportation, parce que les autres pays sont souvent subventionnés, comme le sont d'autres secteurs d'activité au Canada. Nous ne pouvons donc pas être compétitifs sur des marchés largement subventionnés.
    Au Canada, le principe de la gestion de l'offre vise à protéger toutes les frontières pour ne pas laisser entrer des produits subventionnés sur le marché des consommateurs canadiens.

[Traduction]

    J'ai une question complémentaire pour vous, au sujet de la mise en marché collective du lait.
    Pouvez-vous nous expliquer pourquoi cette façon de faire est unique et comment elle profite aux agriculteurs québécois?
    Veuillez répondre en 20 secondes, s'il vous plaît.

[Français]

    Comme nous l'avons dit, nous partageons les coûts et les dépenses et nous mettons en commun tous les frais de transport et de mise en marché. Les producteurs assument tous le même coût pour avoir accès aux marchés et à la croissance. C'est pour cela que nous parlons de mise en marché collective, ce qui permet qu'il y ait des fermes dans toutes les régions du Québec.

[Traduction]

    Nous allons entendre M. Savard-Tremblay, qui dispose de deux minutes et demie.

[Français]

    J'ai une question brève qui demanderait une réponse brève, qui serait idéalement oui ou non.
    Est-il vrai que, avant la signature des trois accords qui comportaient des brèches pour les producteurs de lait, la position officielle du Canada consistait à appuyer le système gestion de l'offre assortie de la promesse de maintenir ce système dans son intégrité?
    Oui.
    C'est parfait.
    Monsieur Turp, je vais vous poser une question qui va vous faire rire. Aucun de vos étudiants de première année n'aurait sans doute jamais osé vous la poser. Cependant, je crois que nous en sommes à devoir faire cette mise au point. C'est dire où nous en sommes.
    Monsieur Turp, est-ce qu'une loi a plus de poids qu'un engagement verbal?
    Bien sûr, vous devriez le savoir. Vous êtes tous des parlementaires.
    Le projet de loi C‑282 a un poids. Il propose que les négociateurs canadiens ne puissent pas faire de concessions. Il s'agit d'un engagement très formel qui limite la prérogative du gouvernement et du ministre.
    Je me permets de dire que, quand j'entends des gens dire que le système de gestion de l'offre est peut-être dépassé ou protectionniste, je me demande pourquoi ne pas plutôt proposer de l'exporter dans d'autres pays.
    Ce système a démontré ses avantages et favorise la souveraineté alimentaire. Certains États américains, par exemple le Wisconsin, commencent à examiner ce système et pensent qu'il serait peut-être la solution pour assurer la protection des agriculteurs et la souveraineté alimentaire.
     Merci, monsieur Turp.
    Vous dites que nous devrions le savoir. C'est vrai, et c'est ce pour quoi je me suis fié à vous pour nous le rappeler.
    Je vais me tourner de nouveau vers les producteurs de lait pour le peu de temps qu'il nous reste.
    Quand j'entends qu'il faut défendre la gestion de l'offre, mais qu'il faut garder la porte ouverte pour rester dans la course, j'entends qu'on pourrait encore vous sacrifier s'il y avait un avantage à aller chercher dans un autre secteur.
    Partagez-vous cette crainte?
(1715)
    C'est certain que nous la partageons. C'est que ce que nous essayons de dire: le Canada s'est bien débrouillé, mais il fait tout le temps une concession à la dernière minute. C'est fini, les concessions de dernière minute. Il doit négocier sans donner des accès supplémentaires aux marchés. Tous les pays ont adopté des mesures de protection semblables pour certains produits. Au Canada, ce seront les produits assujettis à la gestion de l'offre. Il y a de plus en plus de monde à nourrir sur la planète, alors soyons intelligents en gérant tout cela.
    Je ne sais pas combien de temps il me reste, monsieur le président.

[Traduction]

    Il vous reste 10 secondes.

[Français]

    Si on vous dit qu'on appuie une telle mesure, mais qu'on n'est pas prêt à bétonner la défense du système, il me semble que cela veut dire qu'on se garde une petite ouverture pour sacrifier le système. C'est la crainte que j'ai.
    Nous avons la même crainte, et c'est ce pour quoi nous appuyons le projet de loi.

[Traduction]

    Monsieur Cannings, vous disposez de deux minutes et demie.
    Merci.
    Ma question s'adresse à M. Phinney.
    Ma circonscription compte beaucoup plus d'éleveurs que de producteurs laitiers, alors je voulais m'assurer de vous accorder suffisamment de temps. Je ne sais pas si vous vous en souvenez, mais nous nous sommes rencontrés brièvement à Penticton lorsque les membres de votre organisation s'y étaient réunis. Je vous remercie d'être venu; c'était très important pour nous.
    J'aimerais vous donner l'occasion de répondre à certaines questions que j'ai déjà posées. En regardant les statistiques en matière d'importation et d'exportation, je suppose que le principal marché qui vous préoccupe, ce sont les États-Unis. Je crois qu'ils représentent 75 à 80 % de votre marché. Est‑ce que le lien entre ces deux éléments vous préoccupe? Ce n'est pas la même chose lorsqu'on pense à l'AECG, par exemple, où la capacité dépasse largement votre utilisation actuelle ou potentielle. Avez-vous un commentaire à faire à ce sujet?
    Oui.
    Vous avez tout à fait raison. Les États-Unis sont notre plus grand partenaire commercial: 80 % de notre production de boeuf est destinée à ce marché. Les États-Unis, le Mexique et le Canada ont créé le plus important système intégré au monde. Au Canada, nous avons l'obligation légale de contribuer à nourrir le monde. La seule façon pour nous de le faire, c'est de maintenir ces marchés commerciaux ouverts et libres.
    J'aimerais faire valoir un point. Dans mon discours préliminaire, j'ai parlé d'une protéine durable qui représentait moins de la moitié des émissions de gaz à effet de serre mondiales. Il y a un besoin mondial pour la protéine de viande. Elle sera produite. Le Canada est le mieux placé pour être un chef de file mondial en matière de durabilité et d'environnement. Si nous ne saisissons pas l'occasion, d'autres pays dans le monde se chargeront de la production, et n'auront pas les mêmes obligations morales que nous en matière d'environnement.
    Le système pleinement intégré de production de boeuf du Canada, des États-Unis et du Mexique est unique au monde.
    Il vous reste environ 30 secondes, monsieur Cannings.
    J'ai terminé. Merci.
    Nous allons donc passer à M. Lehoux, qui dispose de cinq minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie de me permettre de poser des questions au Comité permanent du commerce international. Cela me fait plaisir d'être avec vous cet après-midi.
    Puisque mon collègue d'en face M. Drouin m'a cité plus tôt, j'aimerais rectifier certaines choses.
    Des engagements ont été pris dans l'énoncé économique déposé en novembre dernier, mais j'espère seulement voir ces chiffres se retrouver dans le prochain budget. On parle de compensations qui seront versées de 2024 à 2030. Les répercussions vécues par les producteurs, actuellement, sont directes. Nos voisins du Sud n'ont pas mis beaucoup de temps à prendre leur place dans le marché. Je voudrais qu'on parle des mêmes choses, quand on en arrive à ces questions.
    J'aimerais poser une question à M. Phinney et porte sur les barrières non tarifaires. On sait qu'il y en a et qu'il pourrait s'en ajouter. Vous dites que cela pourrait nuire à la négociation d'autres ententes commerciales. Je ne pense pas qu'un pays puisse intervenir, lorsqu'il y a une barrière non tarifaire. Bien sûr, l'Organisation mondiale du commerce, l'OMC, établit des règles, mais on constate déjà certaines répercussions.
    Pouvez-vous me parler de l'incidence de ces barrières non tarifaires dans le contexte de la dernière entente entre le Canada et l'Union européenne, sur la capacité du Canada à exporter du bœuf vers l'Europe? Est-ce qu'on exporte du bœuf en Europe, actuellement?
    C'était une question qui en comportait plusieurs, mais je vous laisse répondre.
(1720)

[Traduction]

    Je demanderais à notre expert en commerce, M. Laycraft, de répondre à cette question.
    C'est une excellente question. Nous n'avons pas réalisé le potentiel associé à l'accord européen comme nous l'avions prévu. Nous tenons compte des obstacles non tarifaires associés à l'acheminement des produits utilisés en Amérique du Nord vers notre système de salubrité alimentaire. L'une des raisons pour lesquelles nous ne vendons pas plus de produits, c'est que nos entreprises de transformation ne sont pas prêtes à renoncer à notre système de salubrité alimentaire pour intégrer le marché européen. Voilà l'explication, en gros. À la même période l'année prochaine, nous allons voir si l'Europe est prête à approuver un produit qui est utilisé largement dans tout le continent; ce sera donc un véritable test.
    J'aimerais apporter des précisions au sujet de l'idée voulant qu'il n'y ait pas de négociations en cours. L'un des projets les plus importants sur lesquels nous travaillons, c'est l'accession au PTPGP. Il s'agit probablement de la référence absolue en matière d'ambition dans le domaine des accords commerciaux. Nous ne voulons pas que cette ambition s'effrite. Nous avons perdu l'accès à la Chine pour plusieurs raisons non scientifiques, mais grâce au PTPGP et à notre ambition, nous avons pu aller de l'avant avec succès et nous affichons un taux d'exportation record.
    Des négociations commerciales sont en cours. Il s'agit de vraies conversations et il est important d'avoir la meilleure occasion de négocier les accords les plus ambitieux qui soient. Nous avons exporté 85 milliards de dollars de produits agricoles canadiens. C'est assez important pour l'économie canadienne.

[Français]

     Merci.
    Ne craignez-vous pas que nos voisins, les Américains, changent la réglementation sur l'étiquetage?
    Nous en entendons beaucoup parler. Or nous n'avons pas entendu beaucoup de commentaires de la part de notre ministre de l'Agriculture sur cette question.
    J'imagine que cela pourrait vous toucher directement.

[Traduction]

    Oui, vous savez probablement que nous avons contesté la mesure prise par les États-Unis devant l'OMS et que nous avons gagné. Il y a un nouveau produit des États-Unis... une nouvelle règle qui devrait être présentée. Je dirais que nous avons de grands alliés aux États-Unis qui vont s'opposer à cette règle. Il y a deux groupes: ceux qui reconnaissent les avantages de l'intégration du marché et ceux qui adoptent une approche plus protectionniste... et nous savons que cette approche ne nous aide en rien.

[Français]

    Je suis d'accord avec vous, cela n'aidera personne, mais cela n'empêchera pas d'autres pays sur la planète de faire ce genre d'intervention.
    C'est la raison pour laquelle nous devons nous protéger nous-mêmes avant de protéger les autres.
    Je ne veux pas fermer les marchés à l'exportation, mais il faut toujours garder en tête la crainte que n'importe quel pays puisse, demain matin, mettre une barrière non tarifaire et que nous ayons très peu de marge pour réagir.

[Traduction]

    Veuillez répondre très rapidement.
    Je vais vous donner un autre exemple. Lorsque nous avons entrepris les négociations avec le Japon, la question la plus délicate était celle du boeuf. Au fil du temps, le Japon a réalisé que le boeuf Wagyu occupait une place de choix dans le monde. Il a réussi à exporter le produit tout en maintenant la viabilité du secteur, et aujourd'hui, il s'agit de notre deuxième plus important marché d'exportation. Nous avons réussi à démontrer les avantages mutuels du commerce. Si l'on avait appliqué un protectionnisme strict, nous n'aurions jamais profité de cette occasion.
    Nous n'avons malheureusement plus de temps, monsieur Lehoux.
    Nous allons maintenant entendre notre dernier intervenant, M. Drouin, qui dispose de cinq minutes. Allez‑y.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    J'interviens toujours après mon cher collègue pour qui j'ai un grand respect, mais que je tiens encore une fois à corriger.
    La ministre de l'Agriculture s'est prononcée haut et fort, avec la ministre du Commerce international, au sujet de l'étiquetage volontaire. J'invite les citoyens à lire le communiqué de presse publié le 7 mars, s'ils n'en ont pas encore eu l'occasion.
    Monsieur Lehoux, vous n'avez évidemment pas eu la chance de lire ce communiqué de presse. Je vous le recommande. Je ne le lirai pas parce que je sais que vous avez des ressources et que vous pouvez le faire.
    Un communiqué de presse a fait savoir haut et fort que le Canada défendra toujours le secteur de la viande au Canada.
(1725)

[Traduction]

    Ma question s'adresse aux représentants de l'Association canadienne des bovins. Je sais que les exportations sont très importantes et que vous avez fait un travail exceptionnel de protection de l'environnement et des prairies. Vous êtes depuis des années les champions de la protection des prairies, et on ne le dit pas assez. Je raconte votre histoire le plus possible. Je ne veux pas attaquer les médias, mais ils ne s'intéressent pas assez à ce sujet. Il faut qu'ils le fassent. Nous avons une très belle histoire à raconter sur le plan environnemental. Les producteurs laitiers font la même chose; tout le monde contribue.
    On associe souvent la carboneutralité aux consommateurs et aux possibilités d'exportation, et je crois que notre secteur joue un rôle important à cet égard. Selon vous, quelles sont les possibilités en matière d'exportation? Quel est le lien avec la stratégie indopacifique, surtout en ce qui a trait à l'agriculture?
    Oui, nous nous réjouissons des possibilités dans la région de l'indopacifique. Je crois qu'elles profiteront à toute l'agriculture canadienne. On parle de boeuf et de produits laitiers, mais le secteur des cultures fait un excellent travail dans le monde également. J'aime dire qu'il faudrait plus de Canada dans le monde. Alors que le revenu moyen dans la région de l'indopacifique augmente, la qualité des protéines consommées s'améliore également. C'est ce qui s'est passé avec tous les marchés en développement du monde.
    Nous croyons non seulement qu'il s'agit d'une excellente occasion à saisir, mais aussi que nous avons une très belle histoire à raconter sur l'environnement. J'ai été très heureux de voir les publicités du gouvernement sur les prairies la semaine dernière. Contrairement à d'autres régions dans le monde, il s'agit de notre écosystème le plus menacé. Comment pouvons-nous protéger les prairies? Nous travaillons à la question et je crois que tous les intervenants du domaine agricole canadien sont fiers du rôle que nous jouons dans le développement des produits agricoles les plus durables au monde. Je crois sincèrement qu'à long terme, nos idées seront bien reçues ailleurs et que cela augmentera la demande relative aux produits agroalimentaires canadiens.
    Tout à fait, et je me réjouis à l'idée de poursuivre le travail avec les membres de votre industrie et d'autres agriculteurs.
    Ma prochaine question s'adresse aux représentants de l'Alliance canadienne du commerce agroalimentaire.
    Je sais que vous représentez des exportateurs. Je ne parlerai pas de bovins cette fois, mais bien de céréales. Pourriez-vous nous dire ce que peut faire la stratégie indopaficique à cet égard? À quoi vous attendez-vous avec cette stratégie et comment pouvons-nous accroître nos exportations dans cette région?
    La région de l'indopacifique est très importante, pour les raisons évoquées par M. Laycraft. Ce qui compte pour nous dans cette région, c'est d'expliquer à tous les marchés potentiels — les marchés en développement — comment aborder le commerce: il faut qu'il soit prévisible, qu'il soit exempt d'irritants et qu'il soit ouvert et libre.
    Alors que nous nous dirigeons vers ces marchés, nous devons veiller à ce que les éléments du projet de loi C‑282, surtout en ce qui a trait au recours à la loi pour protéger un secteur, ne nous empêchent pas d'atteindre nos objectifs dans cette région. Si nous excluons certains éléments — et ce sans égard au secteur ou à la mesure de protection adoptée —, nous ne pourrons jamais conclure des ententes commerciales viables avec l'un de ces pays. En fait, nous ne pourrons pas discuter du système de réglementation avec les pays, parce qu'ils nous répondront: « Vous protégez un secteur. Nous allons conclure l'accord, mais de façon différente, par l'entremise de barrières non tarifaires ou d'autres mesures sanitaires et phytosanitaires. »
    Nous n'aurons pas la stature nécessaire si notre comportement démontre que nos lois protègent un secteur, une région ou un enjeu en particulier.
    Il faut comprendre que le Canada représente un marché de 38,5 millions de personnes et les États-Unis, un marché de 338 millions de personnes, par opposition à un marché de plusieurs milliards de personnes dans la région de l'Asie-Pacifique et de 500 millions de personnes en Europe. Nous savons que nous sommes un joueur important et que nous exportons déjà plus de 50 % de nos produits agricoles. L'avenir s'annonce prometteur. Je sais que nous travaillons très fort à débloquer — si je puis dire — les enjeux en matière de transport. Je ne crois pas qu'il y ait de représentants du domaine du transport à la table, mais je sais qu'il s'agit d'une question sur laquelle nous travaillons en collaboration avec votre secteur.
    Je vais finir sur une note positive et vous remercier pour votre travail. Nous vous remercions de représenter tous les membres de l'Alliance canadienne du commerce agroalimentaire, notamment ceux du secteur bovin. J'ai parlé à nombre d'entre vous déjà.
(1730)

[Français]

     Je remercie nos chers producteurs laitiers.

[Traduction]

    Voilà qui met fin à la réunion d'aujourd'hui.
    Je tiens à remercier tous nos invités pour leurs témoignages. N'hésitez pas à nous transmettre par écrit tout renseignement supplémentaire que vous jugez pertinent.
    Sur ce, je vous souhaite à tous un beau jeudi soir.
    La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU