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FAAE Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 065 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 11 mai 2023

[Enregistrement électronique]

(1105)

[Traduction]

     Bienvenue à la 65e réunion du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international.
    La réunion d'aujourd'hui se déroule en mode hybride, conformément à l'ordre de la Chambre du 23 juin 2022. Certains de nos membres sont présents dans la salle, alors que d'autres communiquent à distance à l'aide de l'application Zoom.
    J'aimerais faire quelques commentaires à l'intention des membres du Comité et de notre témoin.
    Veuillez attendre qu'on vous ait nommé avant de prendre la parole. Pour ceux qui participent par vidéoconférence, cliquez sur l'icône du microphone pour activer votre micro, et veuillez le désactiver lorsque vous ne parlez pas.
    L'interprétation pour ceux qui utilisent Zoom se trouve au bas de votre écran, et vous avez le choix entre le son original, l'anglais ou le français. Pour ceux qui sont dans la salle, vous pouvez utiliser l'oreillette et sélectionner le canal désiré.
    Je vous rappelle que tous les commentaires doivent être adressés à la présidence.
    Conformément à l'ordre de renvoi du lundi 13 février 2023, le Comité reprend l'étude du projet de loi S‑8, Loi modifiant la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, apportant des modifications corrélatives à d’autres lois et modifiant le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés.
    J'ai maintenant le grand honneur d'accueillir le parrain du projet de loi au Sénat, l'honorable Peter Harder.
    Nous sommes très reconnaissants de l'avoir parmi nous.
    Sénateur, vous aurez cinq...
    Monsieur le président, pourrais‑je vous interrompre très rapidement pour présenter une motion avant que le sénateur ne commence, afin que je n'aie pas à interrompre son témoignage par la suite?
    Oui, certainement, madame McPherson.
    Merci beaucoup.
    J'invoque le Règlement, monsieur le président. Le témoin est ici et vous lui avez donné la parole. Je pense que nous n'avons ce témoin que pour 45 minutes.
    Mme Heather McPherson: Je crois avoir la parole, monsieur le président.
    Mme Rachel Bendayan: Monsieur le président, c'est très inhabituel. Un député n'a pas le droit de proposer une motion...
    Pourrions-nous attendre que le sénateur ait terminé? Il est ici pour une demi-heure.
    Malheureusement, j'aimerais proposer cette motion maintenant.
     Je crois que vous m'avez donné la parole, alors j'aimerais continuer, si c'est possible.
    Certainement, madame McPherson.
    J'aimerais proposer une motion pour que le Comité étudie les mesures que le Canada devrait prendre pour favoriser la paix et le respect des droits de la personne et du droit international dans la région d'Israël et de la Palestine.
    La motion a été distribuée aux membres du Comité le 20 avril.
    Monsieur le président, cette motion est appuyée par divers groupes confessionnels, y compris le Conseil national des musulmans canadiens, de nombreuses églises chrétiennes et de juifs canadiens, ainsi que par des organisations canadiennes de défense des droits de la personne et d'aide humanitaire. Plusieurs d'entre eux nous regardent ce matin dans l'espoir que j'aurai l'appui de tous les partis pour adopter cette motion.
    Comme vous le savez, nous célébrons aujourd'hui le premier anniversaire de la mort de la journaliste palestinienne américaine Shireen Abu Akleh.
    Les derniers jours et les dernières semaines ont démontré que la région est plus loin que jamais d'une solution pacifique et qu'il y a d'énormes préoccupations au sujet des droits de la personne et du respect du droit international, y compris en ce qui a trait à la taxe imposée aux civils palestiniens et israéliens.
    Il s'agit d'un sujet très difficile, qui suscite de vives émotions et qui a de graves conséquences pour de nombreuses personnes. C'est aussi un sujet que notre Comité n'a pas étudié depuis au moins quelques décennies. Pourtant, c'est important non seulement pour de nombreux Canadiens, mais aussi pour la politique étrangère du Canada.
     Le Canada a un rôle à jouer dans la promotion de la paix et de la justice, et sa nouvelle candidature pour un siège au Conseil des droits de l'homme des Nations unies rend une étude comme celle‑ci d'autant plus importante.
    Je comprends qu'une telle étude puisse susciter un certain malaise. C'est une question difficile. Cependant, nous sommes un comité sérieux. Je pense que nous avons le devoir d'écouter et d'apprendre des experts, d'aborder le sujet avec respect les uns pour les autres et pour tout le monde, et d'aider à trouver des solutions qui mèneront le Canada sur la bonne voie.
    Je demande aujourd'hui à tous les députés d'appuyer cette motion:
Que, conformément à l'article 108(2) du Règlement et compte tenu des récents événements en Israël et en Palestine, le Comité mène une étude sur les mesures que le Canada devrait prendre pour favoriser la paix et le respect des droits de la personne et du droit international dans la région; que l'étude consiste d’au moins huit réunions; que la ministre des Affaires étrangères soit invitée à comparaître et que le Comité invite des témoins de la société civile canadienne, des organisations humanitaires internationales et des organisations israéliennes et palestiniennes de défense des droits de la personne; que le Comité fasse rapport de ses conclusions à la Chambre et que, conformément à l'article 109 du Règlement, le gouvernement dépose une réponse complète au rapport.
    Monsieur le président, je trouverais extrêmement troublant que les membres choisissent de ne pas étudier quelque chose d'aussi important pour notre politique étrangère et que le Comité décide de refuser encore une fois d'étudier quelque chose d'aussi vital.
    J'exhorte tous mes collègues à bien réfléchir à la façon dont ils voteront sur cette motion. Merci.
(1110)
     Merci, madame McPherson.
    Je vous remercie également d'avoir rappelé à tous les députés que c'est l'anniversaire de la mort de Shireen Abu Akleh.
    Nous passons maintenant à M. Genuis.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Mon estimée collègue a fait des observations de fond sur des questions de fond.
    J'aimerais quant à moi faire quelques observations au sujet du processus. Habituellement, les comités établissent leur ordre du jour au moyen de discussions au Sous-comité du programme et de la procédure. C'est la raison d'être de ce sous-comité.
    J'invoque le Règlement. C'est tout à fait conforme au Règlement. Il s'agit essentiellement de présenter une motion en public. C'est tout à fait la pratique habituelle du Comité. Comme le député le sait, il l'a fait lui-même à maintes reprises. Je ne demande pas mieux que de nous rencontrer au Sous-comité pour discuter du calendrier, du nombre de réunions, et des témoins à convoquer.
    Je trouve cependant qu'il est malhonnête de prétendre que ce n'est pas une pratique habituelle au sein de ce Comité.
    Ce n'est pas un rappel au Règlement, monsieur le président.
    Merci, madame McPherson.
    Nous revenons à M. Genuis.
    Merci, monsieur le président.
    En ce qui concerne les rappels au Règlement, je ne remets pas en question le droit des députés à proposer des motions. Ça arrive des fois, surtout quand le Sous-comité ne siège pas pendant un certain temps. À mon avis, la meilleure façon d'établir un ordre du jour c'est de passer par le Sous-comité.
    Le sénateur Harder est ici pour une demi-heure. Écoutez, je pense que cette proposition soulève d'importantes questions, mais je ne pense pas que l'idée que nous... Il y a beaucoup de questions qui pourraient être réglées, mais je...
    J'invoque le Règlement.
    Puis‑je terminer mon commentaire, madame McPherson? Le...
    J'invoque le Règlement. Oui, allez‑y, madame McPherson.
    Je serais heureuse de passer directement au vote pour que nous puissions faire gagner du temps au sénateur. Nous pourrions passer au vote sans plus tarder.
    J'invoque le Règlement, monsieur le président.
    Mme McPherson n'a pas le droit de faire un rappel au Règlement pour proposer de passer au vote alors qu'il y a encore des députés qui voudraient parler de la motion.
    Merci, madame Bendayan.
    Nous revenons à M. Genuis.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'ai parlé pendant 60 secondes et il y a déjà eu trois rappels au Règlement. Je pense que cela démontre notre volonté de trouver un meilleur processus pour tenir ce débat à l'interne.
    Cela dit, je propose l'ajournement du débat.
(1115)
    Est‑ce la volonté du Comité?
    Oui, allez‑y, monsieur Zuberi.
    J'invoque le Règlement, monsieur le président. Le Canada et le monde suivent ce qui se passe à l'étranger, au Moyen-Orient.
    Le président: Monsieur Zuberi...
    M. Sameer Zuberi: Je pense que nous pouvons tous convenir que nous sommes très troublés par la violence qui se produit là‑bas.
    Le président: Monsieur Zuberi, je suis désolé, mais ce n'est pas...
    M. Sameer Zuberi: J'aimerais avoir la parole.
    M. Garnett Genuis: [Inaudible]
    M. Sameer Zuberi: Je parle un peu lentement, et c'est peut-être pour ça...
    M. Garnett Genuis: [Inaudible]
    M. Sameer Zuberi : Vous m'interrompez. Vous n'avez pas la parole non plus.
    Monsieur Zuberi, je suis désolé, mais il a présenté une motion d'ajournement.
    Monsieur le président, j'invoque le Règlement.
    C'est bien, mais ce n'est pas le moment d'invoquer le Règlement, parce qu'il a présenté une motion d'ajournement.
    Ce que je veux dire, c'est qu'il s'agit d'une étude importante et que nous devrions nous y mettre.
     Merci.
    Le Comité souhaite‑t‑il ajourner le débat?
    Des députés: Non.
    Le président: Nous allons devoir passer au vote.
    (La motion est adoptée par 7 voix contre 3.)
    Le président: Nous revenons maintenant au sénateur Harder.
    Sénateur, je vous remercie d'être parmi nous aujourd'hui. Vous avez cinq minutes pour votre déclaration préliminaire. Lorsqu'il ne vous restera que 30 secondes, je vous ferai signe comme ceci. Je le ferai pour votre allocution d'ouverture, mais aussi lorsque les députés vous poseront des questions.
    Sénateur Harder, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président. J'espère ne pas utiliser la totalité de mes cinq minutes, mais j'apprécie que vous me fassiez signe.
    Il s'agit d'un projet de loi « S », ce qui signifie qu'il émane du Sénat. C'est un projet de loi d'initiative ministérielle, et il arrive que ces projets de loi soient déposés en premier au Sénat, bien que ce ne soit pas une pratique courante. Ce projet de loi a été présenté pour la première fois le 17 mai de l'année dernière au Sénat et a franchi l'étape de la deuxième lecture le 19 mai. Il a été renvoyé au Comité pour étude les 3 et 9 juin.
    Nous avons entendu quelque 19 témoins, des fonctionnaires et d'autres groupes intéressés, et nous avons renvoyé le projet de loi avec un amendement de forme, ce qui a permis de coordonner ce projet de loi avec un autre dont le Sénat était alors saisi, le projet de loi C‑21. La dernière lecture a eu lieu le 16 juin, et le projet de loi S‑8 a été adopté à l'unanimité au Sénat et, par conséquent, a été envoyé ici.
    Le projet de loi dont vous êtes saisis est considéré par le Sénat comme une mesure législative urgente, une mesure nécessaire qui permet de traiter de façon uniforme et cohérente les motifs d'interdiction de territoire liés aux sanctions. Il renforcera les dispositions législatives sur l'interdiction de territoire que nous avons déjà en place, ce qui rendra inadmissibles les personnes désignées qui font l'objet de sanctions du gouvernement du Canada.
    De plus, il comporte d'autres mécanismes de coordination qui sont importants aux yeux du gouvernement. Je crois que vous avez reçu les fonctionnaires des ministères concernés. J'exhorte le Comité à étudier rapidement ce projet de loi afin de combler cette lacune en matière d'admissibilité. C'est non seulement urgent en ce qui concerne les ressortissants russes, mais c'est universel, alors il s'agit des ressortissants d'autres régimes sanctionnés, y compris, évidemment, l'Iran.
    Je suis prêt à répondre à vos questions.
    Encore une fois, le rôle du parrain du projet de loi au Sénat est de faire adopter le projet de loi au Sénat et au Comité, et de travailler avec ses collègues et, au bout du compte, avec le gouvernement, pour veiller à ce que le Sénat du Canada traite le projet de loi de façon succincte et appropriée.
    Je vous remercie de l'occasion qui m'a été donnée. Habituellement, nous avons le bénéfice de la réflexion de la Chambre des communes avant de recevoir un projet de loi. Vous avez maintenant la possibilité de faire un second examen objectif.
(1120)
     Merci, sénateur.
    Nous allons maintenant passer aux questions des députés.
    Monsieur Hoback, vous êtes le premier.
    Au cours de ce tour, chaque député disposera de quatre minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci, sénateur Harder, d'être ici aujourd'hui.
    Sénateur Harder, d'après ce que je peux voir, il s'agit essentiellement d'une question d'ordre administratif et de nettoyage pour mettre les choses en ordre, mais il y a un aspect qui semble être un oubli. Il y a peut-être quelque chose qui m'échappe, alors je vais vous poser une question à ce sujet.
    C'est à la page 2 du projet de loi S‑8. Vous enlevez les alinéas 35(1)c) à e), et le sous-alinéa 35(1)c.1) se lit comme suit: « ayant eu un comportement qui, de l'avis du ministre, constituerait une infraction en vertu de l'article 240.1 du Code criminel ». Or, l'article 240.1 du Code criminel porte sur le trafic d'organes humains et le prélèvement sans consentement éclairé.
    Pourquoi supprimer cela? Est‑ce couvert ailleurs?
    Je crois comprendre — et je ne suis pas le fonctionnaire responsable — que l'interdiction est incluse dans la loi de coordination dont j'ai parlé, qui ajouterait la criminalité transfrontalière aux motifs existants d'interdiction de territoire ou de détention. Par conséquent, cela fait partie de l'approche de coordination que ce projet de loi vise à atteindre.
    C'est logique. C'est ce que je pensais. Je voulais simplement le confirmer.
    Monsieur Epp, voulez-vous prendre le reste de mon temps?
    Merci, monsieur le président.
    Encore une fois, merci, sénateur Harder.
    [Le député s'exprime en allemand.]
    [Le témoin s'exprime en allemand.]
    [Anglais]
    Pour la gouverne des autres, c'est un dialecte bas-allemand que le sénateur et moi partageons.
    Vous avez dit que vous aviez 19 témoins devant le Sénat. De toute évidence, vous êtes maintenant à l'aise avec certaines critiques du projet de loi, par exemple celles qui portaient sur la définition, ou l'absence de définition, de « sanctions ».
    Le Sénat estime‑t‑il que les définitions sont suffisamment décrites dans d'autres lois?
    Heureusement que vous n'avez pas répété toute la question en bas-allemand. Ma réponse aurait été un peu plus tardive.
    Le Sénat entend que ce projet de loi vise à combler les lacunes dans les mesures existantes. C'est le point de vue qu'ont adopté tous les sénateurs, y compris de nombreux ardents défenseurs de la protection des réfugiés.
    Le Comité sénatorial des affaires étrangères vient de terminer un examen de la loi de Sergueï Magnitski, comme l'exige le processus d'examen quinquennal, et nous publierons très bientôt un rapport qui traitera de certaines des questions plus générales, y compris celles que vous avez soulevées. J'espère que cela donnera au Comité et au Sénat lui-même l'occasion de réfléchir aux recommandations que nous avons formulées.
    Je suppose donc que cette préoccupation concerne également la définition d'« entité » ou d'« entité étatique »?
    C'est cela, mais je dois dire que nous voulons une loi qui permette au gouvernement d'agir rapidement en vertu d'un règlement pour traiter avec des entités émergentes.
    Merci.
    Le projet de loi transfère également le pouvoir discrétionnaire du ministre de l'Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté au ministre de la Sécurité publique. Pouvez-vous nous dire pourquoi le Sénat est à l'aise avec ce changement?
    C'est parce que l'accès à la frontière relève du ministre de la Sécurité publique. Par conséquent, nous essayons de nous assurer que le personnel de première ligne s'occupe adéquatement des questions dont il est responsable.
    Des préoccupations ont été portées à notre attention au sujet du coût du recours ou de la possibilité de recours si les personnes visées par une interdiction de territoire sont passibles de sanctions. Avez-vous des commentaires?
(1125)
    Les recours sont offerts par le ministre des Affaires étrangères, qui est responsable de la désignation des personnes, et ce mécanisme de recours est disponible.
    Merci. Je crois que mon temps est écoulé.
    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à M. Sarai.
    Vous avez quatre minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci, sénateur, d'être venu témoigner devant nous au sujet de ce projet de loi très important.
    Sénateur, nous savons que le projet de loi a d'abord été présenté au Sénat, comme vous l'avez mentionné plus tôt, avant d'être présenté à la Chambre. Le Sénat a‑t‑il apporté des amendements importants au projet de loi initial?
    Le Sénat a apporté un amendement de forme, un amendement de coordination, au projet de loi C‑21, pour faire en sorte que, peu importe le projet de loi adopté en premier, il y ait une complémentarité d'action. Cependant, aucun autre amendement n'a été proposé, ni au Comité ni au Sénat.
    Le Sénat était d'avis que c'était urgent et nécessaire, mais qu'il fallait prendre notre temps, ce que nous avons fait il y a un an.
     Merci.
    Sénateur, nous commençons l'étude de ce projet de loi. Selon votre expérience, contient‑il des éléments auxquels nous devrions prêter attention?
    Je crois que la responsabilité de... Je ne peux pas affirmer quelle est la responsabilité de la Chambre des communes, mais, de l'avis du Sénat, nous avons l'obligation d'éliminer les échappatoires qui ont été repérées et d'instituer le régime d'interdiction de territoire que nous avons mis en place et qui est mis à l'épreuve. Nous serions très favorables à une mise en œuvre rapide.
    Merci.
    Dans le discours que vous avez prononcé à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi S‑8 au Sénat, vous avez dit qu'en vertu de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, la plupart des personnes sanctionnées en vertu de la Loi sur les mesures économiques spéciales peuvent néanmoins avoir un accès sans entrave aux voyages pour entrer au Canada ou y demeurer s'ils ne sont pas autrement admissibles. Pourquoi les personnes visées par la Loi sur les mesures économiques spéciales peuvent-elles toujours se rendre au Canada, y entrer ou y rester, et comment le projet de loi S‑8 aborde‑t‑il précisément ce problème?
    Ces personnes ne sont pas inadmissibles en vertu de la loi telle qu'elle existe sans cet amendement, alors ce que nous cherchons à faire — ce que le gouvernement cherche à faire —, c'est de nous assurer que l'interdiction de territoire a lieu en première ligne, tôt dans l'éventuel processus d'admission. Comme vous le savez bien, une fois qu'une personne a réussi la première vérification de sécurité et la vérification à la frontière, de nouveaux processus de renvoi sont en place. Nous voulons donc nous assurer que l'interdiction de territoire est renforcée en première ligne.
    Connaissez-vous une personne qui a voyagé au Canada, y est entrée ou y est restée?
    Non, mais j'ai posé la question aux fonctionnaires à ce moment‑là, et ils m'ont dit qu'un petit nombre l'avaient fait. Je n'ai pas insisté davantage pour obtenir des chiffres précis.
    Dans votre discours, vous avez également expliqué que le projet de loi vise à retirer la dispense ministérielle pour les personnes interdites de territoire en raison de sanctions, ainsi que leur capacité d'interjeter appel auprès de la Section d'appel de l'immigration. D'autres, dont l'Association du Barreau canadien, ont fait valoir qu'il devrait offrir un recours légitime, compte tenu des conséquences graves de l'interdiction de territoire fondée sur des sanctions.
    Comment réagissez-vous à cela et qu'en pensez-vous?
    C'est le point de vue exprimé dans ce projet de loi, et donc par le Sénat, que les personnes sanctionnées devraient passer par le processus d'appel, c'est-à-dire le processus de sanction, où le ministre responsable est le ministre des Affaires étrangères, et non par les processus d'immigration existants, qui passent devant la Commission de l'immigration et du statut de réfugié.
    M. Randeep Sarai: Merci.
    Merci, monsieur Sarai.
    Nous passons maintenant à M. Bergeron. Vous avez quatre minutes, monsieur.

[Français]

    D'abord, monsieur le président, j'aimerais vous dire à quel point je suis complètement dépassé par ce qui vient de se produire. Il y a des gens qui meurent en Palestine, il y a des gens qui meurent en Israël, et ce comité a choisi d'ajourner le débat sur une motion qui demande que nous nous penchions sur cette question. Je ne m'explique pas qu'on ait pris une telle décision. Je ne m'explique pas que le Comité permanent des affaires étrangères et du développement international ait pris la décision d'ajourner le débat sur ce qui se passe présentement en Israël et en Palestine.
    Je suis complètement bouleversé, monsieur le président. Je sais que vous allez me rappeler à l'ordre, et vous aurez raison de le faire, mais je suis outré de voir que celui-là même qui a proposé cette motion d'ajournement et qui trouvait si important d'entendre le témoin d'aujourd'hui a sacré son camp immédiatement après le vote. Je trouve cela inadmissible. Je suis totalement...
(1130)
    Monsieur Bergeron...
    Je sais, monsieur le président, vous avez tout à fait raison de me rappeler à l'ordre, mais je n'avais d'autre choix que de le dire. Je trouve cela inadmissible, totalement inadmissible.
    Je suis complètement bouleversé, mais je vais poursuivre malgré tout, puisque c'est la décision du Comité.
    Monsieur le sénateur, je suis désolé que vous ayez dû subir cela pendant quelques secondes. Je vous remercie d'être des nôtres.
    La première chose que j'ai demandée au ministre, lorsque nous l'avons rencontré cette semaine, c'était pourquoi on avait décidé de passer par le Sénat. Il m'a alors expliqué qu'il s'agissait d'une question mécanique et que cela facilitait la progression du projet de loi.
    Vous voudrez peut-être m'éclairer sur le processus, monsieur le sénateur. Depuis qu'il n'y a plus de sénateurs libéraux au Sénat, tout m'apparaît un peu byzantin. J'ai un peu de difficulté à comprendre la mécanique. J'avoue que la mécanique me trouble d'autant plus que c'est vous qui êtes devant nous ce matin, alors que, selon le site du Parlement, c'est le sénateur Marc Gold qui est le parrain du projet de loi.
    Pourriez-vous éclairer ma lanterne? Qu'est-ce qui se passe pour qu'aujourd'hui vous soyez considéré comme le parrain de ce projet de loi du gouvernement, bien que vous ne soyez pas un sénateur du gouvernement? Expliquez-moi.

[Traduction]

     Avec plaisir.
    Il est bon que nous ayons la possibilité de nous engager rapidement dans un processus bicaméral, surtout que le Sénat du Canada a évolué vers une approche moins partisane et plus indépendante.
    Tout d'abord, il est rare que le gouvernement présente un projet de loi au Sénat pour qu'il y soit étudié en premier. C'est pourquoi les projets de loi « S » sont peu nombreux. Il ne peut pas s'agir de projets de loi assortis d'obligations financières. Ils sont souvent utilisés pour des questions qui sont considérées comme importantes, urgentes et non controversées. Par exemple, les accords de libre-échange ont d'abord été présentés au Sénat.
     Ce projet de loi a été présenté au Sénat il y a un an. Le gouvernement a jugé que le programme de la Chambre des communes était chargé et que le projet de loi était nécessaire pour indiquer l'orientation qu'il voulait prendre en matière d'interdiction de territoire. Il a donc utilisé le Sénat. Encore une fois, ce n'est pas souvent que cela arrive, mais ce n'est pas sans précédent.
    Au Sénat, nous avons un représentant du gouvernement, comme je l'ai été moi-même pendant quatre ans, de 2016 à 2020. C'est le sénateur qui est responsable de la gestion du programme du gouvernement au Sénat. À titre de membre du Conseil privé, le représentant travaille directement avec le Cabinet pour ce qui est du programme législatif, surtout lorsqu'il est question du Sénat. Ce n'est pas mon rôle. Je ne l'ai pas fait depuis 2020.
    Pour chaque projet de loi présenté au Sénat, le représentant du gouvernement cherche un parrain. Exceptionnellement, il pourrait s'agir d'un employé de son bureau. Habituellement, ce n'est pas le cas. J'ai été le premier directeur général de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. J'ai été le premier sous-ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration. Avant de quitter le gouvernement, j'étais sous-ministre des Affaires étrangères. J'avais une certaine connaissance des outils et des mécanismes dont il est question ici. En raison de mon intérêt pour cette question, j'ai pensé qu'il serait approprié et intéressant de parrainer ce projet de loi.
     Comme je l'ai indiqué dans ma déclaration préliminaire, le rôle du parrain est de faire avancer le projet de loi et de travailler avec ses collègues pour s'assurer que les témoins appropriés sont entendus et que le projet de loi progresse à un rythme qui sait mériter l'appui de ses collègues. Dans le cas qui nous occupe, le projet de loi a été étudié assez rapidement, ayant été présenté le 17 mai et ayant franchi l'étape de la troisième lecture, je crois, le 16 juin.
     Il est tout à fait normal que nous cherchions des parrains de l'autre côté de la Chambre. À mon époque, même un sénateur conservateur a parrainé un projet de loi d'initiative ministérielle, ce qui montre à quel point notre Chambre est moins partisane. Je ne fais aucune comparaison, sauf pour affirmer que nous sommes à l'aise avec cette approche.
(1135)
    Merci, sénateur.
    Monsieur Bergeron, vous avez dépassé votre temps de deux minutes et 20 secondes.
    Madame McPherson, vous avez quatre minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci beaucoup d'être ici, sénateur.
    Avant de vous poser des questions, je dois dire que, tout comme mon collègue M. Bergeron, je suis extrêmement déçue par la décision de ce Comité. Pour être tout à fait honnête, je suis dégoûtée de voir que des gens partout au pays et dans le monde attendent du Canada qu'il fasse preuve de leadership et qu'il cherche à établir la paix. Or, le Comité des affaires étrangères refuse de se pencher sur cette question. Le député de Sherwood Park—Fort Saskatchewan a...
    J'invoque le Règlement. Le président pourrait‑il préciser ce que signifie ajourner le débat et préciser que cela ne signifie pas que la motion a été rejetée, mais qu'elle peut être présentée de nouveau? Le président pourrait‑il préciser ce que nous avons fait aujourd'hui?
    J'ai comme l'impression que nous avons rejeté la motion, ce qui n'est pas le cas.
    Monsieur le président, pourriez-vous clarifier cela, s'il vous plaît?
    Votre interprétation est tout à fait correcte, monsieur Oliphant. Cela ne veut absolument pas dire qu'elle a été rejetée. Elle peut certainement être présentée de nouveau.
    C'est un excellent point, monsieur le président. Je tiens à ce que tous ceux qui sont si intéressés à lutter pour la paix pour les Israéliens et les Palestiniens, pour les gens du monde entier qui ont demandé que le Comité se penche sur cette question, sachent que je présenterai cette motion à chaque réunion, afin que nous puissions l'adopter.
    Je vous demanderais de vous en tenir au projet de loi S‑8, s'il vous plaît. Le sénateur Harder est parmi nous.
     Merci.
    Une dernière chose que j'aimerais dire très rapidement, c'est que le député de Sherwood Park—Fort Saskatchewan est parti tout de suite après parce que, j'imagine, il voulait participer au rassemblement pro-vie, ce qui est un autre sujet où il s'est arrangé pour faire de l'obstruction au Comité.
    J'invoque le Règlement. Primo, c'est une question de pertinence. Secundo, il n'est pas approprié de mentionner si le député est présent ou non au Comité.
    Il n'y a pas d'article du Règlement à ce sujet.
    Tertio, nous avons M. Strahl, qui remplace M. Genuis. C'est prévu depuis le début. Nous savions que M. Genuis avait d'autres engagements.
    On ne peut pas nommer un député. On ne peut pas dire leur nom. On peut parler de leur circonscription, bien sûr.
    Quoi qu'il en soit, j'estime qu'il est inapproprié de chercher noise à un député de la sorte alors qu'il n'est pas ici pour se défendre parce qu'il était autrement occupé. Ce n'est pas approprié.
    Il devrait alors être ici.
    Non, il a du travail à faire et il le fait selon son propre horaire.
    Monsieur Hoback, je dois dire que c'est une question de pertinence.
    Madame Fry, pourriez-vous attendre d'avoir la parole?
    J'invoque le Règlement, monsieur Ehsassi.
    C'est bon, mais vous devez attendre d'avoir la parole, madame Fry.
    Je sais que je dois attendre que vous me donniez la parole, mais je ne savais pas si vous pouviez m'entendre avec tout le monde qui parle à la fois.
    Madame Fry, voulez-vous invoquer le Règlement?
    J'invoque le Règlement, monsieur le président.
     Nous avons discuté de ce que signifiait l'ajournement du débat. Cela ne veut pas dire que les gens ont voté contre la motion. Je crois que nous avons des témoins qui sont venus nous parler du sujet dont nous sommes censés discuter aujourd'hui, c'est‑à‑dire le projet de loi S‑8. J'aimerais que l'on continue. Je pense qu'il est inapproprié à la Chambre, comme nous le savons tous, de mentionner l'absence de quelqu'un ou de suggérer qu'il devrait être là, alors qu'on ne sait pas ce qui l'en empêche. C'est vraiment injuste.
    Merci.
    Merci, madame Fry.
    Monsieur Strahl, invoquez-vous le Règlement?
    Oui, monsieur le président. Je suis invité à ce comité, mais il y a toujours des substitutions entre députés.
    M. Genuis siège au comité des transports, mon comité habituel, où il fait le travail d'un parlementaire. Il est scandaleux qu'une députée se serve de son programme pour s'en prendre à la réputation d'un autre député, et j'espère, monsieur le président, que vous ne permettrez pas que cela se poursuive dans ce comité. Ce n'est tout simplement pas vrai qu'il est ailleurs...
    Monsieur Strahl, ce n'est pas un rappel au Règlement, mais merci.
    C'est absolument un rappel au Règlement, monsieur le président. Vous ne pouvez pas dire où se trouve un député, même si c'est le fruit de votre propre imagination. J'espère que vous allez rappeler la députée à l'ordre.
(1140)
    Merci, monsieur Strahl.
    J'invoque le Règlement. Je tiens à vous remercier, monsieur le président, de gérer ce comité qui ne mâche pas ses mots et de nous aider à étudier un projet de loi aussi important.
    Merci, monsieur Zuberi.
    Nous revenons à Mme McPherson.
     Je vous rappelle encore une fois de rester pertinente au sujet à l'étude. Merci.
    Absolument, et comme je l'ai mentionné, je soulèverai cette question lors des prochaines réunions pour que nous en discutions.
    Sénateur, je m'excuse. Je sais que c'est votre temps de parole, et je tenais à le dire pour que nos téléspectateurs comprennent à quel point ce comportement était atroce. Je pense que nous en avons discuté. C'est un projet de loi très important. Je pense que c'est une bonne chose que vous l'ayez présenté et j'en suis heureuse. Je pense que notre régime de sanctions doit avoir plus de mordant, plus de capacité pour obliger ceux que nous sanctionnons à rendre des comptes.
    Je n'ai que quelques brèves questions à vous poser.
    Si j'ai bien compris, le Sénat n'a apporté qu'un petit amendement de forme à ce projet de loi. Pendant le témoignage au Sénat, avez-vous entendu des préoccupations semblables à celles qui ont été soulevées dans les mémoires présentés au Comité et que nous entendrons sous peu de l'Association du Barreau canadien, du Centre pour les réfugiés et d'autres? Nous nous demandons pourquoi vous avez renoncé à accepter davantage d'amendements.
    Merci beaucoup.
    Bien sûr, ce n'est pas à moi de décider si des amendements sont proposés ou acceptés, mais c'était la volonté collective du Comité — qui a entendu ces témoins parmi les 19 que nous avons accueillis en tout — que nous n'étions pas disposés à proposer des amendements, comme ils l'avaient suggéré, et nous avons estimé que le projet de loi, à l'exception de l'amendement de forme dont j'ai parlé plus tôt, devait être adopté rapidement, car il était nécessaire et la raison d'être du projet de loi restreint dont nous sommes saisis. Notre comité a estimé que l'examen de la loi de Magnitski, que nous étions sur le point de lancer, serait le véhicule approprié pour examiner les questions de politique plus générales, ce que nous avons fait.
    J'ai une dernière petite question.
    Étant donné qu'on se demande si certaines choses devraient être modifiées, seriez-vous en faveur d'insérer un mécanisme d'examen dans ce projet de loi?
     Les parlementaires peuvent faire ce qu'ils veulent. À mon avis, ce projet de loi a été renvoyé du Sénat il y a maintenant près d'un an. J'aimerais qu'il soit adopté le plus rapidement possible et, par conséquent, sans amendement, afin que les garanties dont nous parlons aux Canadiens au sujet de l'interdiction de territoire et de l'intégrité de nos frontières puissent se refléter dans la loi que le gouvernement a présentée.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup, madame McPherson.
     Cela met fin aux questions des députés.
     Sénateur, merci beaucoup d'être venu témoigner devant notre comité. Nous sommes très reconnaissants pour ce projet de loi et pour tout ce que vous avez fait.
    Nous allons suspendre la séance pendant quelques minutes. Les membres en ligne n'ont pas besoin de faire quoi que ce soit. Nous allons suspendre la séance pour permettre au prochain groupe de témoins de prendre place.
     Merci.
(1140)

(1150)
     Nous reprenons nos travaux.
    J'ai maintenant le grand plaisir d'accueillir divers témoins qui sont ici pour l'étude du projet de loi S‑8.
    À titre personnel en ligne, nous avons M. Mario Bellissimo, avocat et spécialiste agréé au sein de Bellissimo Law Group Professional Corporation, et M. Marcus Kolga, agrégé supérieur à l'Institut Macdonald-Laurier. Nous accueillons M. Ihor Michalchyshyn, directeur général, et M. Orest Zakydalsky, conseiller principal en politiques, du Congrès des ukrainiens-canadiens. Nous avons aussi Mme Lisa Middlemiss, présidente de la Section du droit de l'immigration, de l'Association du Barreau canadien, et enfin M. Abdulla Daoud, directeur général du Centre pour les réfugiés.
    Nous allons maintenant entendre les déclarations préliminaires des divers témoins. Chacun disposera de cinq minutes. Lorsque vous aurez presque terminé, je vous ferai savoir que vous devriez conclure vos observations en vous montrant ceci. Cela s'applique non seulement à votre déclaration préliminaire, lorsque vous avez cinq minutes, mais aussi lorsque les députés vous posent des questions.
    Cela étant dit, je vais maintenant donner la parole à M. Bellissimo, qui se joint à nous virtuellement.
    Monsieur Bellissimo, vous avez la parole. Vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président et membres du Comité. Merci de l'invitation.
    Dans le mémoire que nous avons présenté au Sénat l'an dernier, nous avons formulé cinq recommandations, que nous reprenons ici. Nous appuyons les préoccupations soulevées par l'Association du Barreau canadien et le Centre pour les réfugiés. Pourquoi ces recommandations? Le contexte est toujours important.
    La loi actuelle est puissante. Comme le Comité le sait, le pouvoir de rendre des personnes interdites de territoire en vertu de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés pour des sanctions internationales et des droits de la personne est en place depuis une vingtaine d'années. Sur les milliers de personnes qui figurent actuellement sur la liste des sanctions, nous ne trouvons personne qui serait actuellement interdit de territoire en vertu de la loi canadienne sur l'immigration.
    Quel mal y a‑t‑il à ajouter d'autres sanctions? Les mauvais joueurs ne devraient pas avoir accès au Canada. Nous sommes d'accord. Pourtant, c'est beaucoup plus compliqué. L'intégrité de la compétence de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, entre autres, est en jeu. Pourquoi? L'harmonisation de l'ensemble du paragraphe 4(1.1) de la Loi sur les mesures économiques spéciales avec la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés introduit notamment des sanctions économiques; lorsque des recommandations de sanction entraînent automatiquement une interdiction de territoire; et où les enquêtes sur les sanctions pourraient constituer des motifs de détention sans contexte juridique et sans recours à des arbitres tiers comme la Section de l'immigration. Cette disposition sera maintenant abrogée.
    Bref, la nouvelle loi, ne vous y trompez pas, est trop générale. Elle peut toucher les citoyens, les résidents permanents et les ressortissants étrangers qui ne sont coupables d'aucun acte répréhensible. C'est frappant. Les demandeurs, leur conjoint et leurs enfants auraient peu d'options, voire aucune, en vertu de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés. Cela aurait un impact générationnel.
    La première recommandation porte sur l'exigence de clarté législative. Nous en avons beaucoup entendu parler. Le mot « sanction » n'est toujours pas défini, mais il a également été dissocié des « motifs d'atteinte aux droits humains ou internationaux » — il s'agit maintenant d'un motif d'interdiction de territoire distinct et non défini — qui existe actuellement dans la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés. Pourquoi? N'est‑ce pas là le mal que nous ciblons — les mauvais joueurs qui violent les droits de la personne ou les droits internationaux? L'article 35.1 proposé doit être lié aux personnes qui violent les droits de la personne ou les droits internationaux. Des termes clés comme « sanction » et « entité » doivent être définis dans la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés.
    Tout cela est très important, car des spécialistes du régime de sanctions comme Andrea Charron et une étude antérieure du Sénat ont soulevé plusieurs questions importantes. Il y en a trop pour qu'on puisse les énumérer, mais je vais en mentionner quelques-unes au sujet des sanctions. Il s'agit de la nécessité d'une surveillance parlementaire, d'une meilleure cohérence et conformité, de recours opportuns et indépendants, de la reddition de comptes, de la transparence et d'autres enjeux d'ordre pratique.
    Par exemple, le Canada a continué de maintenir les sanctions contre des États étrangers comme le Libéria et la Sierra Leone longtemps après que les Nations unies les aient levées, un purgatoire légal en vertu du projet de loi S‑8. Le Comité devrait se pencher sur ce régime — je crois comprendre qu'il va l'étudier — avant l'adoption de ce projet de loi.
    Autrement dit, la vie d'une personne pourrait être considérablement modifiée par une loi qui pourrait ne pas s'appliquer à elle. Ce qui est tout aussi troublant, c'est que cela n'exclut peut-être pas certains mauvais joueurs, parce que le droit est plongé dans l'ambiguïté législative et les limites d'application, ce qui entraîne des préoccupations en matière de procédure et d'équité pouvant aller jusqu'à des questions constitutionnelles.
     La deuxième recommandation, c'est que la Loi sur la citoyenneté et la Loi sur les mesures d'urgence doivent être claires. Cela n'a pas encore été discuté. Les Canadiens ne devraient pas risquer de perdre leur citoyenneté canadienne en raison d'un fondement juridique précaire.
    C'est la même chose pour la recommandation trois concernant l'indépendance. La Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés ne peut pas perdre son intégrité juridictionnelle en se limitant à accorder une dispense lorsque cela est justifié dans les limites de sa propre loi. Ironiquement, dans le régime de sanctions, il y a des exemptions prévues par la loi, mais en réalité, il n'en reste plus pour ceux qui doivent s'y retrouver dans la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés.
    La quatrième recommandation souligne la nécessité d'une portée excessive et d'exclure les personnes qui n'ont commis aucun acte répréhensible ou qui n'ont aucun lien avec des transgressions.
    Pour ce qui est de la cinquième recommandation, nous nous appuyons sur le mémoire que David Matas a présenté au Sénat. L'octroi du statut de réfugié devrait entraîner le retrait immédiat de la liste. L'accès au statut de réfugié devrait être uniforme au Canada et à l'étranger.
    Nous proposons de convoquer David Matas et Mme Charron. Il est essentiel que nous maintenions l'indépendance juridictionnelle de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés et son lien harmonieux avec d'autres lois nationales et internationales pour que les objectifs de la loi et l'intention claire du Parlement soient menés à bien. Pour y arriver, le projet de loi S‑8 doit être étudié plus à fond et amendé.
    Merci.
(1155)
    Merci beaucoup, monsieur Bellissimo.
    Nous allons passer à notre deuxième témoin. M. Kolga est ici à titre personnel.
    Monsieur Kolga, je vous remercie d'être de nouveau parmi nous. Vous avez la parole pour cinq minutes.
     Merci, monsieur le président et distingués membres du Comité, de m'avoir invité à témoigner aujourd'hui au sujet du projet de loi S‑8 et du régime des sanctions du Canada.
    J'ai eu le privilège de diriger la campagne de la société civile canadienne en faveur de la loi de Magnitski, au cours de laquelle j'ai eu l'honneur de travailler avec la sénatrice Andreychuk, l'ancien juge Irwin Cotler, le député James Bezan et bon nombre d'entre vous ici présents.
    Ce travail comprenait également la collaboration avec de nombreux militants russes des droits de la personne de l'après-guerre froide, comme Boris Nemtsov et Vladimir Kara-Murza, qui sont tous deux venus à Ottawa pour défendre la loi de Magnitski. Bien sûr, Boris Nemtsov a été assassiné en février 2015 pour son leadership et sa défense des droits. Vladimir Kara-Murza a été empoisonné à deux reprises et est passé à un doigt de mourir. Il y a deux semaines, il a été condamné à 25 ans de prison pour avoir critiqué le régime de Poutine et son invasion barbare de l'Ukraine.
    Mon activisme et mon plaidoyer en faveur des sanctions de la loi de Magnitski ont également attiré l'attention du gouvernement russe et de ses complices moralement corrompus ici au Canada. J'aimerais profiter de l'occasion pour souligner l'intimidation dont le député de Wellington—Halton Hills a fait l'objet en raison de son leadership et de ses efforts pour lutter contre les régimes autoritaires étrangers. Son expérience a fini par attirer l'attention du pays sur la menace de la répression transnationale et sur les efforts des régimes autoritaires pour faire taire les défenseurs canadiens des droits de la personne et de la démocratie. Pour ceux d'entre nous qui ont fait l'objet de menaces de violence, de campagnes visant à nous discréditer et à déshumaniser la marginalisation en fonction de nos origines ethniques, nous frissonnons et nous partageons l'anxiété de nos concitoyens qui sont victimes d'intimidation étrangère.
    L'application de sanctions est une conséquence douloureuse pour les fonctionnaires corrompus et les oligarques dont les biens volés servent à financer des modes de vie luxueux et à payer pour la protection de dirigeants totalitaires comme Vladimir Poutine. Leurs menaces et l'intimidation qu'ils font peser sur ceux qui les défendent constituent une bonne mesure de leur efficacité. Au cours des 15 derniers mois, depuis que la Russie a envahi l'Ukraine, nous avons été témoins d'une intensification rapide et bienvenue de notre application de sanctions contre des personnes et des entités liées au régime de Poutine. Tous les parlementaires canadiens méritent d'être félicités pour leur appui unanime aux sanctions, qui ont fait du Canada un chef de file pour ce qui est de demander des comptes au régime de Poutine. Des sanctions ont été imposées à des oligarques influents de Poutine qui ont des actifs au Canada, dont Roman Abramovich. Evraz, l'entreprise de M. Abramovich, est propriétaire de cinq grandes usines sidérurgiques dans l'Ouest canadien, vaut des milliards de dollars.
    Des médias de propagande contrôlés par le Kremlin qui polluent notre environnement de l'information et fournissent des plateformes aux extrémistes d'extrême gauche et d'extrême droite du Canada, comme RT, Sputnik et Channel One, ont fait l'objet de sanctions et ont été retirés de nos ondes publiques.
    Cependant, il reste des lacunes. Le projet de loi S‑8 contribue à régler l'une d'entre elles en veillant à ce que celles et ceux qui sont inscrits sur nos listes de sanctions ne soient pas autorisés à entrer au Canada. Il s'agit d'une modification très bien accueillie à la LIPR et à notre régime global des sanctions.
    Une autre lacune importante concerne les médias d'État russes et leur accès continu à la diaspora russe du Canada. Malgré nos sanctions contre les médias d'État russes, les appareils multimédias et les services de diffusion en continu, comme ceux offerts par Amazon et Google, sont vendus au Canada par des entreprises canadiennes et donnent accès à de multiples chaînes russes expressément interdites par notre gouvernement. Ces chaînes sont Russia‑1, Channel One, NTV, Russia‑24 et les nombreuses autres chaînes contrôlées par la All-Russia State Television and Radio Broadcasting Company, qui figure également sur notre liste des sanctions. Des extrémistes canadiens d'extrême gauche et d'extrême droite continuent de participer à des émissions de la télévision d'État russe RT, où ils légitiment les récits de la Russie. S'ils reçoivent un avantage quelconque, cela pourrait aussi constituer une violation des lois canadiennes régissant les sanctions.
    Enfin, l'acquisition de services liés au tourisme dans la Crimée temporairement occupée contrevient à la législation canadienne régissant les sanctions. Un Canadien d'extrême gauche, un extrémiste pro-Kremlin, a récemment déclaré sur les médias sociaux qu'il avait rencontré des représentants du ministère des Affaires étrangères de la Russie à Moscou et qu'il s'était rendu en Crimée avec un visa de touriste. Les Canadiens sont libres de voyager comme bon leur semble, mais cela ne veut pas dire qu'ils sont à l'abri des conséquences de contrevenir à nos sanctions.
    En conclusion, j'appuie fermement l'harmonisation de la LIPR avec la loi de Magnitski canadienne et la LMES.
    Encore une fois, merci beaucoup de m'avoir invité à comparaître aujourd'hui. Je serai heureux de répondre à vos questions.
(1200)
    Merci beaucoup, monsieur Kolga. J'ajouterais que vous avez parfaitement respecté le temps qui vous était imparti.
    Nous passons maintenant au Congrès des Ukrainiens Canadiens.
    Monsieur Michalchyshyn, c'est un grand plaisir de vous accueillir de nouveau parmi nous. Je suis heureux de vous voir aujourd'hui. Je pense que vous êtes l'un des visages les plus connus au Comité. Nous sommes très heureux de vous revoir.
     J'accumule des milles de récompense AIR MILES. Merci de l'invitation.
    Vous avez la parole pour cinq minutes, monsieur.
    J'aurais aimé que nous n'ayons pas à être ici aussi souvent, mais aujourd'hui, nous en sommes au 441e jour de l'invasion à grande échelle de l'Ukraine par la Russie. Je suis donc heureux de m'entretenir avec vous aujourd'hui.
    En ce qui concerne le présent projet de loi, le projet de loi S‑8, et les amendements concernant les personnes sanctionnées par le Canada et par la LMES, nous appuyons fermement le projet de loi tel qu'il a été rédigé par le Congrès des Ukrainiens Canadiens. Nous croyons qu'avec le gel des biens détenus au Canada et, espérons‑le bientôt, la saisie de ces biens, l'interdiction de territoire des personnes inscrites en vertu de la LMES sera un élément clé du solide régime des sanctions du Canada contre les dirigeants étrangers dont les régimes, comme nous le savons et l'avons entendu, se livrent à de graves violations des droits de la personne et à d'importantes activités de corruption contre des personnes qui soutiennent financièrement et politiquement ces régimes.
    Nous croyons que les modifications proposées à la LIPR constituent une étape, comme vous l'avez entendu, dans la démarche visant à combler les lacunes législatives de notre loi afin d'harmoniser la LMES avec la loi sur l'immigration et de contribuer à rendre les sanctions canadiennes plus efficaces.
    Nous demandons au Comité d'adopter rapidement le projet de loi. Pour notre communauté, cela fait partie des efforts continus visant à renforcer considérablement le régime des sanctions du Canada.
    Je vais céder la parole à mon collègue pour qu'il parle de deux questions précises qui, selon nous, peuvent être réglées.
    Merci.
    Monsieur Zakydalsky, il vous reste quatre minutes.
    Le premier problème que nous voyons avec le régime des sanctions du Canada, c'est la méthodologie par laquelle notre gouvernement décide de sanctionner ou non quelqu'un. Nous n'avons jamais vraiment compris ou on ne nous a jamais expliqué les raisons pour lesquelles, par exemple, quelqu'un est sanctionné dans d'autres pays, mais pas au Canada, ou la façon dont la décision est prise de ne pas sanctionner quelqu'un ici s'il a été sanctionné par nos alliés.
    Par exemple, le 6 avril 2022, le Royaume-Uni a sanctionné Viatcheslav Kantor, le plus important actionnaire de la société d'engrais Acron qui, comme l'a déclaré le Royaume-Uni, a « une importance stratégique primordiale pour le gouvernement russe ». Le 8 avril 2022, il a été sanctionné par l'Union européenne. Il n'a pas été sanctionné par le Canada, et nous ne savons pas pourquoi.
    Le deuxième problème, c'est l'application des sanctions existantes. Selon la GRC, en juin 2022, 123 031 000 $ avaient été gelés au Canada en vertu de la LMES à l'encontre de la Russie. En décembre 2022, soit les données les plus récentes que j'ai pu trouver, la GRC a déclaré 122 245 000 $ en biens gelés.
    Dans l'intervalle de sept mois, entre juin et décembre 2022, Affaires mondiales Canada a annoncé des sanctions contre 302 Russes et 83 entités. Ou bien aucune de ces personnes ou entités ne détient des actifs au Canada, ou bien nous n'avons tout simplement pas été en mesure de trouver ces actifs.
    Quoi qu'il en soit, 122 000 000 $, c'est une somme dérisoire par rapport aux avoirs que la Russie détient probablement au Canada. En fait, dans un seul cas connu, l'oligarque russe Igor Makarov a transféré quelque 121 millions de dollars d'actifs quelques jours avant d'être sanctionné par le Canada, en avril 2022. La somme qu'un seul oligarque russe a pu retirer est essentiellement égale au total des actifs russes que le Canada a pu geler.
    M. Makarov avait été sanctionné par le Trésor américain en 2018. Nous ignorons pourquoi notre gouvernement n'a pris aucune mesure contre lui avant qu'il ne déménage ses actifs.
    Nous croyons savoir que le Comité a l'intention de mener une étude plus vaste de la politique canadienne en matière de sanctions, que nous accueillons favorablement et à l'égard de laquelle nous serions honorés de formuler d'autres recommandations. Entretemps, le CUC réitère son appui ferme au projet de loi S‑8 et notre appui unanime pour veiller à ce que les personnes sanctionnées par le Canada ne puissent pas voyager ici. Les auteurs de violations des droits de la personne et les dirigeants corrompus n'ont pas leur place au Canada.
    Merci.
(1205)
    Merci beaucoup, monsieur Zakydalsky.
    Nous passons maintenant à Mme Lisa Middlemiss, de l'Association du Barreau canadien.
    Vous avez la parole pour cinq minutes.
    Mesdames et messieurs les membres du Comité, je m'appelle Lisa Middlemiss, et je suis la présidente actuelle de la Section du droit de l'immigration de l'Association du Barreau canadien. L'Association du Barreau canadien est une association nationale qui regroupe 37 000 avocats, juges, notaires, universitaires et étudiants en droit et qui a pour mandat, depuis 120 ans, de chercher à améliorer le droit et l'administration de la justice.
    Merci d'avoir invité l'ABC à présenter ses observations sur le projet de loi S‑8.
    Notre section croit que les échappatoires suivantes devraient être éliminées pour éviter que des personnes innocentes soient visées par le libellé général du projet de loi S‑8.
     Le projet de loi stipule qu'un ressortissant étranger est interdit de territoire pour sanctions internationales imposées non seulement à l'égard d'un pays, mais aussi à l'égard d'une entité ou d'une personne. L'élargissement de la portée de l'interdiction de territoire pour sanctions internationales risque d'occulter le processus de radiation de la liste.

[Français]

    Il existe des exemples préoccupants de cas où des individus disent avoir été sanctionnés par erreur. Mme Andrea Charron, experte en sanctions et directrice du Centre d'études sur la défense et la sécurité de l'Université du Manitoba, a soulevé l'exemple où un prénom ou un nom de famille orthographié différemment, même s'il ne s'agit que d'une seule lettre, peut entraîner une sanction pour une autre personne.
    La liste consolidée des sanctions autonomes canadiennes contient plus de 3 500 noms de personnes ou entités sanctionnées en vertu de la Loi sur les mesures économiques spéciales et la Loi sur la justice pour les victimes des dirigeants étrangers corrompus (loi de Sergueï Magnitski), qui s'ajoutent aux personnes sanctionnées en vertu de la Loi sur les Nations Unies.

[Traduction]

     Prenons le cas récent d'un homme d'affaires qui figure sur la liste des sanctions imposées aux consultants canadiens pour avoir collaboré avec le régime de Poutine, même s'il a quitté la Russie il y a plus de 20 ans et prétend n'avoir aucun lien avec la Russie. Son épouse travaillait dans un autre pays et prétend ne pas avoir non plus de liens avec la Russie.
    Étant donné que le processus de demande de radiation est complexe et long, ceux qui soutiennent être sanctionnés par erreur ont peu de recours. Lorsque le projet de loi S‑8 élargit la portée de l'interdiction de territoire pour sanctions, cela est particulièrement préoccupant.
    En ce qui concerne l'absence de définition des sanctions, il est essentiel de définir le mot « sanctions », auquel le projet de loi fait référence à la place de sanctions pour atteinte aux droits humains et internationaux, comme il est actuellement mentionné au paragraphe 35(1) de la LIPR.
    Le projet de loi S‑8 élargit l'interdiction de territoire fondée sur les sanctions de façon à inclure tous les décrets et règlements pris en vertu de l'article 4 de la LMES. L'article 4 fait référence au gouverneur en conseil qui impose des sanctions dans un large éventail de circonstances qui, dans certains cas — voir le paragraphe 4(1.1) de la LMES — peuvent se fonder uniquement sur une décision, une recommandation ou une résolution. Étant donné la portée potentielle de l'interdiction de territoire fondée sur des sanctions, il est vraiment important d'adopter des définitions dans la LIPR et le RIPR.
(1210)

[Français]

    Quant au manque de définition du terme « entité », le projet de loi S‑8 crée une interdiction de territoire sur la base de sanctions imposées à un pays, une entité ou une personne; pourtant, le terme « entité » n'y est pas défini. La Loi sur les mesures économiques spéciales, par exemple, définit « entité » au sens large dans la section 2, comme « personne morale, fiducie, société de personnes, fonds, organisation ou association non dotée de la personnalité morale ainsi qu'un État étranger ».
    Il est difficile d'imaginer ce que ce concept d'entité n'inclurait pas. Nous recommandons que le projet de loi S‑8 mette en œuvre le cadre réglementaire pour s'assurer que le terme « entité » est clairement défini dans le contexte de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés. De plus, le degré de propriété et de participation dans une telle entité doit être précisé afin d'éviter des conséquences involontaires sur les personnes cherchant à être admises au Canada ou à y rester.

[Traduction]

     Il y a la gravité des conséquences pour les personnes interdites de territoire. Les processus de radiation varient d'une organisation internationale à l'autre. Cela complexifie et obscurcit le processus.
    Nous croyons qu'il est essentiel que les personnes faisant face à une interdiction de territoire pour motif de sanctions soient évaluées de façon indépendante et impartiale.
    Enfin, nous tenons à souligner que les demandeurs du statut de réfugié au Canada continuent d'être invités à présenter leur demande en vertu du projet de loi S‑8. C'est une exception que nous appuyons. Cependant, nous recommandons que le projet de loi S‑8 soit modifié de manière à ce qu'une conclusion, au Canada ou à l'étranger, selon laquelle une personne est un réfugié au sens de la convention ou une personne à protéger soit immédiatement radiée de la liste. Autrement, les chances des réfugiés de demander la résidence permanente et de s'intégrer à la société seront compromises.
    Merci beaucoup, madame Middlemiss.
    Nous passons maintenant à notre dernier témoin. Du Centre de réfugiés, nous accueillons M. Abdulla Daoud.
    Vous avez cinq minutes. La parole est à vous.

[Français]

    Je suis Abdulla Daoud, directeur du Centre de réfugiés, situé à Montréal.

[Traduction]

     Notre organisation est enracinée dans la communauté des nouveaux arrivants et offre un éventail de services, notamment la seule clinique d'aide juridique aux réfugiés à service complet à Montréal. Depuis le début de l'année, nous avons aidé plus de 9 000 réfugiés et demandeurs d'asile. Je tiens à remercier le Comité de nous donner l'occasion d'aborder cette question cruciale aujourd'hui.
    Premièrement, nous applaudissons les efforts déployés par le gouvernement pour empêcher les personnes malveillantes, notamment des oligarques russes, d'entrer au pays, comme nous l'avons constaté de première main au Centre de réfugiés, où des réfugiés ukrainiens nous ont parlé de la brutalité du régime russe. Il est essentiel que le gouvernement maintienne un équilibre entre la protection de la sécurité nationale et le maintien de notre démocratie, y compris les droits et libertés fondamentaux des personnes touchées par des mesures législatives comme le projet de loi S‑8. Le projet de loi ne se limite pas aux oligarques russes et introduit des dangers potentiels et des conséquences néfastes pour des personnes ou des familles non visées. Nous croyons que des modifications doivent être apportées au projet de loi.
    L'un des aspects les plus inquiétants du projet de loi S‑8 est qu'il dissocie actuellement le terme « sanctions » des violations des droits humains ou internationaux, créant ainsi une grande ambiguïté quant à la façon dont les sanctions seraient appliquées en ce qui concerne l'interdiction de territoire.
    Le projet de loi S‑8 relie en outre les sanctions à l'ensemble de l'article 4 de la LMES, comme les mesures économiques imposées à des États étrangers. Ainsi, le fardeau des sanctions économiques incombe uniquement aux particuliers qui présentent une demande en raison des actions d'un gouvernement étranger. Par exemple, un ressortissant vénézuélien qui a investi son argent dans l'État, ce qui est typique des entreprises d'État comme au Venezuela, pourrait être tenu de rendre des comptes ou être jugé interdit de territoire au Canada. Voilà pourquoi la solution la plus importante que nous proposons consiste à bien définir le mot « sanctions », surtout en ce qui concerne les modifications du projet de loi S‑8 au nouveau paragraphe 35.1(1) proposé de la LIPR.
    Nous croyons que le libellé devrait se lire comme suit: « l'étranger est interdit de territoire aux fins de sanctions pour les motifs suivants […] violation des droits humains ou des droits internationaux pour... » Cela rejoint les termes pour violation des droits humains ou internationaux. On évite ainsi toute mauvaise utilisation ou ambiguïté par rapport à des sanctions économiques vastes dont les personnes ne peuvent être tenues responsables.
    Un autre problème est que le libellé actuel du projet de loi S‑8 cause un fardeau disproportionné aux groupes déjà vulnérables. Pour que leur nom soit retiré d'une liste des sanctions, les personnes protégées devraient avoir recours à une procédure juridique complexe et compliquée qui relève d'Affaires mondiales Canada. Cette liste a un précédent historique de mises à jour peu fréquentes et est souvent mal harmonisée avec les actions de nos partenaires internationaux. En l'absence de dispositions précises adaptées aux circonstances particulières de ces personnes, la loi peut par inadvertance compromettre leur sécurité et leur bien-être. Par conséquent, nous proposons de modifier le projet de loi S‑8 pour indiquer que tout demandeur d'asile qui a été déclaré personne protégée au Canada soit immédiatement rayé de la liste des personnes visées par les sanctions.
    Le projet de loi S‑8 soulève une autre préoccupation en ce qui concerne l'abus potentiel de pouvoir accordé au ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile et à l'ASFC. Il y a un risque important que les agents d'application de la loi outrepassent leurs pouvoirs et prennent des décisions arbitraires liées à l'interdiction de territoire sans avoir à rendre de comptes ou à peine. Cette situation est attribuable à l'absence d'un cadre décisionnel bien défini et élimine l'accès aux appels par l'entremise de la Section de l'immigration et la dispense ministérielle.
    Il n'y a pas d'historique réel de formation en matière de renvois pour sanctions à l'ASFC, car l'infrastructure actuelle d'immigration et de sécurité répond déjà efficacement à ces préoccupations au sein de la Section de l'immigration. Le témoignage du directeur général de l'ASFC le réitère également. Lorsqu'on lui a demandé quelle était l'expérience de l'ASFC en matière de sanctions, il a déclaré ceci: « Cependant, relativement aux cas d'interdiction de territoire pour sanctions, jusqu'ici, il n'y a eu aucun renvoi, parce que le système s'est avéré extrêmement efficace pour empêcher les gens d'arriver au Canada en premier lieu. »
    Notre solution consiste à modifier le projet de loi S‑8 en ce qui concerne l'ASFC. Dans les cas où une personne est déclarée interdite de territoire pour sanctions pour atteinte aux droits humains ou internationaux, l'ASFC ne devrait pas avoir le pouvoir unilatéral de refuser l'entrée de quiconque ou d'entamer des procédures de renvoi contre une personne sans renvoyer le cas à la Section de l'immigration de la CISR.
    Enfin, les amendements proposés au projet de loi S‑8 pourraient donner lieu à des contestations en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés. Le refus de l'accès à certains processus d'immigration et l'élimination de la capacité d'interjeter appel ou de demander une dispense ministérielle peuvent porter atteinte aux droits des personnes touchées, ce qui ouvre la porte à des batailles judiciaires longues et coûteuses pour équité procédurale.
    En conclusion, en tenant compte attentivement des recommandations formulées dans notre mémoire, nous pouvons atteindre le double objectif de protéger la sécurité nationale et de défendre les droits et libertés fondamentaux des personnes touchées par nos lois sur l'immigration.
    Merci.
(1215)
    Merci beaucoup, monsieur Daoud.
    Nous allons maintenant passer aux questions des députés.
    Pour le premier tour, chaque membre aura cinq minutes, et nous commencerons par M. Epp.
    Merci, monsieur le président, et merci à tous les témoins de leurs témoignages.
    Je vais commencer par le Congrès des ukrainiens-canadiens.
    Vous avez entendu les témoignages de tous les témoins. Comme l'ont dit les témoins précédents, le projet de loi S‑8 a franchi toutes les étapes du processus législatif au Sénat il y a près d'un an. Je vais vous demander de me dire ce que vous pensez de la rapidité, de l'urgence et des préoccupations qui ont été soulevées dans les témoignages que vous avez entendus, et je suppose aussi au Sénat. Le Sénat a pris sa décision. C'est aussi ce que notre comité soupèse.
    Pouvez-vous nous parler de l'urgence de la situation? L'invasion illégale de l'Ukraine par la Russie en est un exemple. Nous appuyons tous les objectifs du projet de loi. Pouvez-vous nous aider dans nos délibérations?
    Comme nous l'avons entendu, des témoins et des points de vue semblables ont été entendus au cours des audiences du Sénat. Je dois donc croire que les sénateurs ont réfléchi à la question et qu'ils en ont tenu compte lorsqu'ils ont élaboré le projet de loi et vous l'ont présenté.
     Je dirais que dans un contexte plus large, les régimes de sanctions internationales évoluent rapidement. Nous voyons chaque semaine — chaque jour, parfois — entre le Canada et nos partenaires qu'il y a des mises à jour de la liste et des contre-sanctions de la part de la Russie. Je pense que le nom de la plupart d'entre vous, le mien et celui de beaucoup d'autres dans cette salle figurent sur des listes de sanctions.
    Pour ce qui est de l'application de la loi, nous avons vu des tactiques comme le changement d'adresse et le transfert de propriété de la part de personnes. Ces choses évoluent très rapidement. Dans ce contexte, la dynamique du temps n'est pas de notre côté. Nous devrions éliminer les échappatoires au fur et à mesure qu'elles sont repérées et de toute évidence le faire le plus rapidement possible.
    Merci.
    Pouvez-vous nous parler plus précisément des oligarques russes et de leurs systèmes? J'avoue que je ne connais pas très bien leurs modèles d'affaires. Dans quelle mesure est‑ce lié à la famille? L'une des préoccupations que nous avons entendues, c'est que les membres de la famille seront pris. Pouvez-vous nous donner des précisions à ce sujet?
    L'un des problèmes, c'est que les modèles utilisés par ces entreprises sont complexes et conçus précisément pour éviter les régimes de sanctions. Ils établissent une fiducie, et cetera. Il y a toutes sortes de mécanismes que les gens peuvent utiliser pour s'assurer que les biens détenus par quelqu'un qui est sanctionné ne sont pas en réalité sanctionnés.
    Nous avons évidemment vu des cas où des oligarques russes ont demandé au Royaume-Uni d'annuler les sanctions à l'égard de leurs actifs ou de les leur rendre. À mesure que notre loi évolue, il en va de même des moyens de la contourner. Je pense que l'une des choses que nous devrons faire, c'est de suivre les méthodes que les personnes et les entités que nous cherchons à sanctionner utilisent pour éviter les sanctions une fois qu'elles sont imposées.
(1220)
    Merci.
    Monsieur Daoud, je vais vous demander ce que vous en pensez, parce que vous avez soulevé la préoccupation selon laquelle le fait de déclarer automatiquement une interdiction de territoire par l'entremise des sanctions de la LMES rend la portée trop vaste pour exactement... Pouvez-vous répondre aux préoccupations que vous venez d'entendre au sujet des tactiques d'évitement utilisées par les oligarques? Comment réagiriez-vous à cela?
    Bien sûr. Écoutez, je ne suis pas juriste en la matière, mais pour ce qui est de ce à quoi ils font référence, ils parlent des actifs de certaines personnes, et c'est une tout autre discussion.
     On parle ici de ressortissants étrangers et de leur interdiction de territoire au Canada. Ce qui nous préoccupe au sujet du projet de loi et de la loi, c'est que nous ratissons trop large. Nous allons toucher beaucoup d'innocents. Nous ne parlons pas ici d'actifs. Nous parlons de l'interdiction de territoire au Canada. Nous parlons de leurs relations et de la façon dont elles pourraient être mal représentées en ce qui concerne leur origine.
    Compte tenu de notre population et des gens avec qui nous traitons, il y a beaucoup d'innocents qui essaient de venir au Canada et qui font partie de... Il y a une longue liste de pays sur notre liste des sanctions. J'ai donné l'exemple du Venezuela, mais il y a la Syrie et le Yémen. Toutes ces personnes font partie d'États où elles pourraient être liées à titre d'actionnaires. Elles pourraient être liées par le simple fait d'avoir de l'argent dans leur banque. Elles pourraient être liées à d'autres personnes simplement parce qu'elles ont mal orthographié leur nom, comme je l'ai mentionné plus tôt.
     Cela jette un filet beaucoup trop grand. Il nous manque beaucoup de nuances, et je pense que c'est assez flagrant, compte tenu de la rapidité avec laquelle le projet de loi a été adopté par le Sénat.
    Êtes-vous préoccupé par la vitesse?
    Je m'inquiète de la rapidité sans avoir passé en revue le projet de loi lui-même. Comme nous l'avons vu dans le témoignage précédent de l'honorable Peter Harder, il a dit que c'était l'une des mesures les plus rapides qu'ils ont adoptées. Habituellement, lorsque vous adoptez des mesures aussi rapidement, cela signifie que vous avez oublié deux ou trois choses.
     Nous vous faisons part de nos préoccupations, et je pense que cela est bien appuyé par l'ABC et par le témoignage de Mario Bellissimo — il est un expert de premier plan dans ce domaine — selon lequel nous devons modifier certaines choses. Nous ne demandons pas un changement majeur. Nous demandons des définitions simples qui, à mon avis, permettraient d'atteindre les deux objectifs de façon très efficace.
    Merci.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Epp.
    La parole est maintenant à M. Zuberi.
    Vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci aux témoins d'être ici en personne et par Zoom.
    J'aimerais commencer par Mme Middlemiss, de l'Association du Barreau canadien, qui est avocate spécialisée en droit de l'immigration. Je tiens à confirmer que si le projet de loi reste tel quel, une personne qui est inscrite sur une liste des sanctions et qui devient également interdite de territoire par les voies d'immigration en raison du projet de loi aura toujours la possibilité de recourir à l'examen des risques avant renvoi.
     Oui. Il reste une mesure très limitée pour l'ERAR, l'examen des risques avant renvoi, comme nous l'appelons. Il supprime un mécanisme de discrétion ministérielle ainsi qu'un mécanisme de surveillance par la Section de l'immigration qui existerait actuellement pour ceux qui sont assujettis à une sanction internationale. Cette disposition serait supprimée. La personne aurait à traiter avec Affaires mondiales Canada, à tenter de faire retirer son nom de la liste ou à demander ce qu'on appelle un « certificat d'erreur d'identité ». D'après ce que je comprends, c'est un processus très complexe.
    Pour confirmer, les gens auraient toujours accès à l'examen des risques avant renvoi.
    C'est ce que je crois comprendre, oui.
    D'accord. De plus, ils peuvent toujours demander à la ministre des Affaires étrangères de retirer leur nom de la liste des sanctions.
    Oui, mais comme je l'ai dit, je pense que cela pose problème. J'ai remarqué que le Comité avait mené une étude en 2017. On a dit que ce processus est très obscur, je suppose.
    Essentiellement, le Comité a demandé un processus administratif plus indépendant, parce qu'il est difficile de savoir pour quelle raison on vous sanctionne. Il y a des partenaires de sécurité comme le SCRS qui expliquent pourquoi votre nom figure sur la liste. Il y a des questions d'équité procédurale pour les personnes qui pourraient alléguer qu'elles ont été inscrites par erreur.
    Pensez-vous que ces mécanismes devraient être plus accessibles aux demandeurs qui veulent être retirés de la liste des sanctions, disons par la ministre des Affaires étrangères?
(1225)
    Le problème avec le projet de loi, c'est qu'il fait relever l'interdiction de territoire d'Affaires mondiales Canada plutôt que de la LIPR.
    Nous avons tout un régime pour régir l'interdiction de territoire qui est en place depuis 20 ans avec la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés. Il est très habile à traiter les gens et à leur accorder l'équité procédurale tout en gardant les mauvais joueurs à l'écart.
    Nous avons les alinéas 35(1), c), d) et e). Il s'agit principalement de la Loi sur les mesures économiques spéciales, de la loi Magnitski et des sanctions internationales pour les violations des droits de la personne.
    Étendre ce régime d'interdiction de territoire au‑delà des sanctions économiques internationales ratisse très large.
    Je veux revenir brièvement sur ce que vous avez dit.
    M. Daoud et vous, vous avez tous deux mentionné la portée trop vaste du terme « entité ».
    Que recommandez-vous pour restreindre cette définition afin qu'elle englobe ceux que nous voulons vraiment...? Lorsque ce sont des personnes qui sont sanctionnées, il y a une limite ferme qui peut comprendre, comme vous l'avez dit dans votre témoignage, « un pays » ou un gouvernement. L'éventail est très large.
    Comment pouvons-nous en restreindre la portée afin que, lorsque nous étudions le cas d'une personne, cette définition corresponde à l'entité, à un gouvernement, par exemple? Parle‑t‑on des dirigeants, des cadres intermédiaires ou de simples citoyens? Qu'en pensez-vous?
    Je pense qu'il faudrait consulter un expert en sanctions pour la définition. Peut-être Mme Andrea Charron.
    Le plus important, à mon avis, c'est de définir ce terme dans le contexte du droit de l'immigration, afin que les gens sachent ce qui s'applique à eux, et s'ils peuvent venir au Canada et y rester. Il existe peut-être une définition un peu moins large qui exclut quand même les personnes que nous cherchons à exclure.
    En terminant, je voudrais confirmer que le terme « sanctions » est défini dans d'autres textes législatifs. Nous savons qu'il ne l'est pas dans ce projet de loi, mais il l'est dans d'autres lois pertinentes. Est‑ce exact?
    Il l'est dans d'autres lois... vous avez raison.
    Quant aux personnes inscrites à une liste de sanctions des Nations unies, elles...
    Je crains que votre temps soit écoulé, monsieur Zuberi.
     ... ne peuvent retirer leur nom [Inaudible]. Est‑ce exact?
    Vous pouvez répondre brièvement.
    Je suis désolée. Je n'ai pas compris.
    Les personnes inscrites sur une liste de sanctions des Nations unies ne peuvent pas retirer leur nom au moyen d'un mécanisme canadien. Elles doivent faire appel aux instances internationales. Est‑ce exact?
    C'est exact. Elles doivent s'adresser à un ombudsman — c'est un processus assez complexe — ou à une instance compétente, selon le type de sanction qui est imposée au niveau international. Je le répète, c'est une démarche assez complexe.
    Merci.
    Nous passons maintenant à Mme Vignola.
    Vous disposez de cinq minutes, allez‑y.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Pour commencer, je m'adresserai à M. Michalchyshyn et à Mme Middlemiss.
    Selon nous, il est important de s'assurer que les bonnes personnes sont sanctionnées de sorte à protéger les victimes de certains régimes, qui sont aussi ici, et de ne pas encourager ces régimes.
    Mon collègue a soulevé une question au sujet des articles 5 et 6. Ces deux articles redéfinissent les interdictions de territoire et prévoient un élargissement de la définition du terme « sanction », selon ce que nous comprenons. Plusieurs témoins ont déjà laissé entendre que le fait de simplement parler de sanctions sans définir ce terme pose des problèmes.
    Quelle serait l'incidence de mieux définir le terme « sanction » et quelles seraient les conséquences de ne pas le définir? Pourquoi est-ce important de définir ce mot?
    On tente de définir le mot « sanction » pour que l'on comprenne exactement ce dont on parle. En ce qui concerne la Loi sur les mesures économiques spéciales, le projet de loi S‑8 prévoit élargir les sanctions à quatre types de sanctions possibles: les sanctions économiques, les sanctions pour violation de la paix internationale et des droits de la personne, ainsi que les sanctions contre la corruption. Les personnes qui font déjà l'objet de sanctions pour une infraction aux droits de la personne sont interdites de territoire au Canada.
    Il serait important de définir les types de sanctions. Je suis d'accord avec mes collègues, MM. Daoud et Bellissimo, sur le fait qu'il faut garder les sanctions dans le contexte des infractions aux droits de la personne. Il faut comprendre qu'il y a différents types de sanctions. Les sanctions économiques visent parfois à forcer un État à changer son comportement. Il pourrait aussi s'agir d'une personne innocente qui se trouve au Canada et qui s'oppose au régime. Cette personne peut avoir réussi à faire sa demande d'asile, mais son nom reste inscrit une liste de personnes visées par des sanctions. Dans ce cas, on ne peut pas traiter sa demande de résidence permanente.
(1230)

[Traduction]

    Merci.
    Comme je l'ai dit, nous croyons que les sanctions sont bien définies dans d'autres lois, et nous examinerons la portée de ces prochaines audiences. Nous sommes d'accord sur le fait que nous voulons protéger les victimes, mais parmi les tactiques que nous observons, il y a l'évasion et le transfert de biens entre membres d'une même famille et entre des sociétés-écrans. Nous pensons que l'évolution rapide de la situation nécessite une définition élargie de ce terme pour le moment.

[Français]

    Vous disiez tout à l'heure que certains de nos alliés appliquent des sanctions à des personnes et que le Canada ne le fait pas.
    Le projet de loi S‑8 modifierait-il cet état de fait? Est-il nécessaire pour le Canada d'emboîter le pas aux alliés concernant les sanctions imposées à certaines personnes ou devons-nous conserver cette autonomie d'analyse qui est la nôtre actuellement?
    Ma question s'adresse à M. Daoud et à Mme Middlemiss.

[Traduction]

    Je ne pense pas que l'objectif de ce projet de loi soit de précipiter l'inscription de personnes à la liste des sanctions.
    En ce qui concerne le processus actuel, comme l'a fait remarquer M. Bellissimo dans son mémoire, des experts en sécurité ont dit que le régime de sanctions du Canada accuse un retard assez important. Par exemple, nous avons maintenu certains pays sur la liste des sanctions, alors que nos partenaires et nos alliés les avaient déjà retirés. Le Libéria et l'Érythrée en font partie. Si jamais nous décidions d'adopter ce projet de loi et d'appliquer ce vaste éventail de sanctions économiques, certains ressortissants de ces pays, qui ont déjà eu des liens financiers avec ces pays en raison de la façon dont ils fonctionnent, auraient été réputés interdits de territoire.
    Si l'intégralité de notre projet de loi S‑8 repose sur un régime de sanctions qui est lent à réagir et qui, selon vos propres recommandations de 2017, nécessite beaucoup d'améliorations, je pense que nous nous engageons sur une pente dangereuse.
    Je reviens à nos recommandations. Ce sont des correctifs très mineurs qui permettraient quand même d'atteindre notre objectif, tout en dissipant les inquiétudes de mes collègues ici présents concernant les personnes qui transfèrent des actifs et qui devraient être étiquetées et ciblées. Comme nous travaillons en collaboration avec nos partenaires internationaux, ces personnes seraient probablement d'abord identifiées par nos alliés plutôt que par nous, compte tenu de la façon dont nous fonctionnons. Nous pourrions toujours utiliser ces listes, parce que nous travaillons de concert avec nos partenaires internationaux, ce qui est actuellement prévu dans la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés. Même là, nous serions encore en mesure de cibler ces personnes.
    En terminant, je pense que dans le cadre des débats au Sénat, l'Agence des services frontaliers du Canada a fait savoir que 25 personnes qu'elle avait identifiées avaient présenté une demande pour venir au Canada. Ces 25 personnes ont fait une tentative pour venir, mais leurs demandes ont toutes été rejetées. Nous pouvons donc dire que notre régime actuel d'interdiction de territoire couvrirait ces personnes.

[Français]

    Merci.
    Je pense que nous voulons nous aligner sur nos alliés. C'était aussi une recommandation de ce comité en 2017. Entre-temps, pour les gens qui pourraient devenir interdits de territoire en vertu de ce projet de loi, qui définit l'interdiction de territoire...
(1235)

[Traduction]

    Madame Middlemiss, il vous reste une dizaine de secondes pour conclure.

[Français]

    Les sanctions pourraient être très longues et très sévères pour ces personnes. Entre-temps, la situation est très difficile.

[Traduction]

    Merci.
    Madame McPherson, c'est à vous. Vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président, et un grand merci à tous les témoins de leur présence aujourd'hui. Cette discussion est très intéressante et je pense que nous voulons tous nous assurer que ce projet de loi atteindra le but que nous souhaitons. Il semble que nous soyons tous sur la même longueur d'onde — nous voulons nous assurer que les personnes que nous ne voulons pas accueillir au Canada ne puissent pas venir ici. Ce que nous essayons de faire actuellement, c'est d'éviter que des personnes irréprochables se retrouvent prises dans ce filet.
    J'ai compris ce que vous vouliez dire, monsieur Daoud, lorsque vous avez parlé de la dispense ministérielle... de la possibilité que le ministère outrepasse son pouvoir. Dans le passé, l'ARC s'est déjà servi des vérifications comme arme. Pour nous, cela pose un risque considérable.
    Madame Middlemiss, j'ai aussi pris note de votre commentaire selon lequel la démarche pour faire retirer son nom de ces listes, s'il y a été inscrit par erreur, est très complexe. Les témoins que nous avons entendus mardi ont aussi dit que ce processus était extrêmement coûteux, compte tenu de la précarité dans laquelle vivent de nombreux réfugiés.
    Je vais commencer par vous, monsieur Daoud. Pouvez-vous nous expliquer plus en détail l'expérience d'un réfugié qui pourrait être confronté à des difficultés à cause de ce projet de loi? En particulier, pouvez-vous nous dire si les mécanismes de recours, par exemple la révision judiciaire, sont coûteux? Que font les réfugiés vulnérables face à ce défi?
    Je pense que la population à laquelle nous avons affaire n'est pas très au courant de l'existence de ces mécanismes. Il faut avoir un certain niveau de connaissances pour savoir ce qui est disponible.
    Prenons l'exemple d'un Vénézuélien ou d'un Iranien qui, en tant que ressortissant d'un pays étranger, est entré au Canada, a présenté une demande d'asile et a franchi toutes les étapes du processus. Il a été déclaré personne à protéger. Cependant, au moment de faire sa demande de résidence permanente, à cause d'un lien économique quelconque avec l'État... Prenons le cas d'un Iranien qui a été forcé de fréquenter une école religieuse. Bon nombre de ces écoles religieuses sont considérées comme des entités inscrites à ces listes. Par conséquent, même s'il n'a commis aucune faute, cet Iranien pourrait être ciblé, interdit de séjour et se voir refuser la résidence permanente.
    Le recours juridique dont disposent ces personnes pour corriger la situation, comme une révision judiciaire, est... Je travaille dans une clinique d'aide juridique. Avec mes collègues avocats, nous essayons de traiter le plus de cas possible. Nous travaillons bénévolement la plupart du temps, pour ne pas dire presque toujours. Une allocation de 500 ou 600 $ est versée à un avocat pour l'équivalent de 120 heures de travail, ce n'est pas raisonnable. Je ne crois pas que ces personnes peuvent se permettre cette dépense. Je vais laisser mes collègues répondre à ces questions d'ordre juridique.
    Il est très difficile de faire retirer son nom de la liste des sanctions. De plus, notre régime de sanctions n'est pas toujours à jour et il accuse un retard. Je crois que l'Érythrée est encore sur notre liste, par exemple. Si ce pays essayait de faire retirer son nom de la liste des sanctions, même si tous nos alliés ont accepté de le faire... Si nous le gardons sur notre liste, il n'arriverait jamais à le faire retirer.
    Bon nombre de nos mécanismes de travail ne sont pas à jour. Même si nous tenons compte de ces problèmes, l'utilisation de mécanismes qui ne sont pas à jour pourrait poser beaucoup de problèmes.
    Merci.
    Je ne veux pas oublier nos collègues qui participent en ligne.
    Monsieur Kolga, ma prochaine question est pour vous. Je tiens à exprimer à nouveau mes sympathies pour votre ami, M. Kara-Murza, ainsi qu'à sa famille, pour la cruelle décision de le condamner à 25 ans de détention pour un crime qu'il n'a pas commis.
    Monsieur Kolga, pouvez-vous nous parler davantage de la nécessité de renforcer notre engagement et nos échanges avec des groupes de la société civile canadienne qui défendent les droits de la personne et la démocratie, notamment avec ceux qui sont les mieux placés pour identifier les entités étrangères qui devraient être inscrites aux listes du Canada? Selon vous, quels amendements faudrait‑il apporter au projet de loi pour faciliter cela?
    Je crois que le gouvernement pourrait collaborer plus étroitement avec les organisations de défense des droits de la personne et les groupes de la société civile qui dénoncent les atteintes aux droits de la personne dans le monde. Il devrait aussi travailler sur la scène internationale pour harmoniser nos sanctions avec celles de nos alliés, dont certains entretiennent des liens étroits avec ces organisations de la société civile. Ce sont les gens les mieux placés pour savoir qui devrait être visé par ces sanctions. Je le répète, une coordination plus étroite serait très bien accueillie.
     Je pense que des amendements précis... Ce point ne concerne pas forcément le projet de loi S‑8, mais notre régime de sanctions en général... il faudrait veiller à ce qu'il y ait une certaine forme de transparence et de reddition de comptes...
    Aux États-Unis, par exemple, la loi sur les sanctions, la loi de Magnitski, exige que le gouvernement américain, le pouvoir exécutif, produise un rapport annuel pour démontrer comment les sanctions américaines ont été appliquées, qui elles ciblaient et pourquoi certaines personnes et entités ont été ciblées.
    Je pense qu'une mesure semblable serait extrêmement utile au Canada pour nous guider dans l'imposition de sanctions et les rendre plus efficaces à long terme.
(1240)
    Nous y réfléchirons dans le cadre de notre étude des sanctions.
    Merci beaucoup.
    Merci.
    Nous allons maintenant commencer notre deuxième tour de questions. Chaque député disposera de quatre minutes.
    Nous allons commencer par Mme Kramp-Neuman.
    Excellent. Merci, monsieur le président, et merci également aux témoins.
    J'aimerais commencer par M. Kolga. Je siège également au comité de la défense nationale dont vous êtes un habitué.
    Ces derniers jours, en tant que membre du comité de la défense nationale, j'ai rencontré des délégués de nombreux pays d'Europe de l'Est, notamment de la Pologne, de la Lettonie, de la Lituanie et de la Moldavie. Ils ont tous réitéré l'importance d'avoir une armée forte pour contrer l'agression russe.
    À votre avis, dans quelle mesure est‑il important pour un pays de se doter d'un régime de sanctions rigoureux afin d'obliger les pays agresseurs à répondre de leurs actes et d'assurer la sécurité de notre pays?
    Il est extrêmement important que nous ayons un régime de sanctions solide. Pour être honnête, je pense qu'au cours des 15 derniers mois, depuis l'invasion barbare de l'Ukraine par la Russie, le Canada a exercé son leadership sur la scène internationale en imposant des sanctions aux membres du régime Poutine et, de façon plus générale, au gouvernement russe.
    À l'instar de nombreux autres experts, je crois que les sanctions ont été efficaces. Elles ont certainement eu un effet dissuasif, notamment en ce qui concerne l'exportation de technologies à double usage. Elles ont réduit la capacité de Vladimir Poutine de réparer les armes endommagées sur le front et de moderniser et de construire de nouvelles armes. Cela a certainement donné un avantage à l'Ukraine au cours des 15 derniers mois.
    En ce qui concerne la dissuasion, je pense que nous voyons déjà les effets des sanctions. Des fissures apparaissent au sein du Kremlin. De nombreux rapports indiquent que des oligarques proches de Vladimir Poutine commencent à remettre en question sa logique et sa décision d'aller en guerre et d'envahir l'Ukraine.
    Au début du conflit, je pense que les sanctions ont été perçues comme une sorte de panacée susceptible de mettre fin au conflit, mais ce n'est pas le cas. Elles se comparent plutôt à un médicament. Nous devons les maintenir. Nous devons continuer à les appliquer, parce qu'elles exercent une forte pression et, comme je l'ai dit, cette pression se fait sentir dans certaines régions de la Russie et au sein même du Kremlin.
    Comme je viens de le dire, des fissures commencent à apparaître. Nous devons donc maintenir la pression, travailler avec nos alliés, mieux coordonner les sanctions et éliminer les échappatoires qui existent dans notre régime de sanctions. Quant aux sanctions dont j'ai parlé dans ma déclaration préliminaire, notamment à l'endroit des médias d'État russes, nous devons nous assurer que les échappatoires seront supprimées.
    Excellent. Je vous remercie.
    Ma prochaine question s'adresse au représentant du Congrès des Ukrainiens Canadiens.
    Il va sans dire que ce projet de loi est extrêmement d'actualité, en raison de l'invasion illégale de l'Ukraine par la Russie, et je suppose que cela a été pris en compte dans l'élaboration du projet de loi. Et voilà où nous en sommes, un an après l'adoption du projet de loi au Sénat.
    Avez-vous l'impression que l'évolution du conflit justifie le renforcement du projet de loi? Y a‑t‑il un moyen de le renforcer?
(1245)
    Je n'ai pas de recommandations précises à faire concernant le renforcement du projet de loi.
    Nous avons toutefois plusieurs recommandations à faire visant le renforcement de notre régime de sanctions, et nous sommes impatients de les présenter au Comité. Je peux en parler maintenant, mais je pense que nous sommes...
    Mme Shelby Kramp-Neuman: Non, vous pourriez simplement les faire parvenir au Comité. S'il me reste un peu de temps, je poserai alors une question à Mme Middlemiss.
    Votre temps de parole est écoulé, mais posez‑la quand même, à condition qu'elle soit brève et la réponse aussi.
    Elle n'est pas très brève, je vais donc attendre le prochain tour.
    Merci.
    Je vous remercie.
    Nous passons maintenant à M. Oliphant.
    Vous avez quatre minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais demander à Mme Middlemiss et à M. Bellissimo de nous parler de leur expérience de conseillers juridiques auprès de personnes qui demandent le retrait de leur nom de notre liste de sanctions.
    Vous vous êtes tous les deux attardés longuement sur les failles du système. J'aimerais simplement savoir quelle est votre expertise en la matière et combien de noms vous avez réussi ou échoué à faire retirer de ces listes.
    Je vais laisser mon collègue, M. Bellissimo, répondre à cette question.
    Monsieur Bellissimo, veuillez répondre.
    En fait, les avocats en immigration ne font pas affaire avec des personnes visées par des sanctions, comme vous pouvez le constater d'après les témoignages. Cela n'est jamais arrivé en 20 ans.
    Le système est assez robuste maintenant. Les dangers dont je parle sont... Depuis 26 ans, nous voyons quelles lois sont contestées en vertu de la Constitution ou pour d'autres motifs, et finissent par être invalidées. Ce qui se passe, c'est qu'il y a presque une chambre d'écho. Il y a beaucoup d'émotion et d'énergie. Le problème, c'est que nous pouvons nous retrouver dans une situation où, en ciblant les mauvais acteurs — ceux que nous voulons éliminer, nous sommes tous d'accord là‑dessus — et en allant aussi loin, ces mauvais acteurs auront soudainement des options juridiques à leur disposition parce que la portée du projet de loi est trop vaste et trop floue. Soudainement, la loi...
    Je vous remercie. Mon temps de parole est limité.
    Madame Middlemiss, avez-vous un commentaire à faire à ce sujet?
    Je pense que cela arrive très rarement, comme l'a dit M. Bellissimo.
    C'est aussi ce qu'ont dit les témoins que nous avons entendus hier. Au Sénat, je pense que l'un des représentants du gouvernement a dit que seulement 25 demandeurs de visa avaient été jugés interdits de territoire pour cause de sanctions.
    Cette situation s'est rarement présentée, mais si jamais elle se présentait — étant donné que nous parlons d'un régime élargi d'interdiction de territoire —, je pense que le processus serait très obscur et que nous ne connaîtrions pas les éléments de preuve présentés, ce qui ressemble au processus de traitement des cas liés à la sécurité.
    Je vous remercie.
    Je vais profiter de la minute qu'il me reste pour féliciter les fonctionnaires d'Affaires mondiales Canada. Ils ont peut-être eu l'impression d'être malmenés aujourd'hui. Le régime de sanctions canadien, je pense que c'est M. Kolga qui l'a dit, est l'un des plus exhaustifs au monde. Il est différent. Chaque province ou territoire a ses propres lois. Nous avons trois textes de loi et nous avons un groupe de fonctionnaires dévoué qui mène des enquêtes avec diligence.
    Ces fonctionnaires travaillent en partenariat avec nos alliés, monsieur le président. Ils tiennent aussi compte des recommandations de la société civile, mais ce n'est pas un vote majoritaire. Ce n'est pas comme s'ils étaient des joueurs neutres qui décidaient subitement qu'une certaine personne devrait figurer à la liste et qu'ils l'inscrivaient à la liste. La fonction publique ne travaille pas ainsi. Les fonctionnaires prennent leurs responsabilités très au sérieux et ils doivent agir avec le même sérieux lorsque le nom d'une personne est retiré de la liste.
    Je pense que l'étude sur les sanctions que nous entreprendrons nous permettra d'examiner ce processus, mais je voulais simplement m'assurer que les fonctionnaires n'avaient pas l'impression que le Comité disait qu'ils ne s'acquittaient pas bien de leurs responsabilités. Les mesures que nous avons prises — surtout depuis l'invasion illégale de l'Ukraine par la Russie — à l'égard des autocrates bélarussiens et russes sont fantastiques.
    Je voulais seulement que mon commentaire soit consigné au compte rendu.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Merci, monsieur Oliphant.
    Nous passons maintenant à Mme Vignola.
    Vous avez deux minutes.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Il a été question d'interdiction de territoire pour sanctions liées à une personne, à une entité ou à un pays. Le mot « pays » semble avoir une portée très vaste.
    Le fait de limiter les sanctions aux entités et aux personnes serait-il un moyen d'éviter que cette portée soit trop vaste, monsieur Daoud?
(1250)

[Traduction]

    Je pense que nous devons simplement suivre les recommandations formulées par M. Bellissimo, par l'Association canadienne du Barreau et par moi-même, c'est‑à‑dire définir les termes de manière à ce que nous ciblions des personnes. Concernant le nouveau paragraphe 35.1(1), j'ai dit que la définition, dans la mesure où nous croyons qu'elle devrait être formulée, doit désigner les ressortissants étrangers interdits de territoire pour sanctions liées à « l'atteinte aux droits de la personne ou internationaux ». Cela correspond à la définition actuelle du terme et en réduit la portée, ce qui nous évite de ratisser trop large. J'espère que cela fera avancer les choses.
    De plus, je poserais également la question à mes collègues.

[Français]

    Merci.
    Ma prochaine question s'adresse à Mme Middlemiss.
    Dans la loi de Sergueï Magnitski et dans la Loi sur les mesures économiques spéciales, on définit « État étranger » de façon similaire. Voici la définition de la première de ces lois:
Pays autre que le Canada. Sont assimilés à un État étranger:
a) ses subdivisions politiques;
b) son gouvernement, ses ministères ou ceux de ses subdivisions politiques;
c) ses organismes ou ceux de ses subdivisions politiques.
    Faut-il modifier cette définition? Le simple fait d'être un ressortissant d'un pays étranger, tel que cela est défini actuellement, pourrait-il suffire pour être déclaré interdit de territoire?
    Si vous n'avez pas le temps de répondre, je vous prierais d'envoyer votre réponse par écrit au Comité, s'il vous plaît.

[Traduction]

    Veuillez répondre brièvement, je vous prie. Je suis désolé. Les deux minutes sont écoulées, pourriez-vous vous en tenir à une réponse de 20 secondes?

[Français]

    On pourrait quand même nommer les sanctions. Selon le projet de loi S‑8, tous les types de sanctions contre un pays sont visés, même les sanctions économiques.

[Traduction]

    Merci.
    La parole est maintenant à Mme McPherson. Vous avez deux minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président, et merci encore à nos témoins de leur présence.
    J'ai une question pour le Congrès des Ukrainiens Canadiens. Nous savons pertinemment qu'il est difficile d'empêcher des personnes sanctionnées de venir ici, mais c'est tout aussi difficile de s'occuper de celles qui sont déjà ici. Nous avons appris que 81 diplomates russes, je pense, sont toujours au Canada, tandis qu'il n'y a que 25 représentants de l'Ukraine.
    M. Oliphant a dit que notre régime de sanctions est parmi les meilleurs au monde, mais je n'en dirais peut-être pas autant de son application, de sa transparence... La clarté n'est pas son point fort. Qu'en pensez-vous?
    Je vous remercie.
    Concernant l'expulsion dediplomates russes, nous préconisons la fermeture de toutes les missions russes — l'expulsion de ces 81 personnes —, mais il revient au Canada de décider du nombre d'espions russes que nous voulons avoir au Canada. Nous avons insisté sur le fait que ces personnes ne sont pas ici pour travailler bénévolement. Nos alliés de l'OTAN et de l'Union européenne ont expulsé des centaines de ces « diplomates ». Nous savons qu'ils fomentent la haine en ligne envers des parlementaires et envers nos institutions démocratiques et notre communauté.
    Et aussi contre des membres de divers groupes communautaires.
    Monsieur Zakydalsky, qu'en pensez-vous?
    En ce qui concerne la méthode d'application des sanctions, la réponse courte est que nous ignorons pourquoi certaines personnes ne figurent pas sur nos listes. Je pense que ce serait une question à poser aux fonctionnaires et à la ministre. Nous n'arrivons pas à comprendre pourquoi certaines personnes, qui ont pourtant été sanctionnées par nos alliés, sont passées sous le radar ici.
    En ce qui concerne l'application de la loi, nous espérons que vous vous pencherez, dans le cadre de votre étude, sur les ressources dont la GRC et d'autres organismes d'application de la loi ont besoin pour repérer les biens qui se trouvent ici, les geler et, espérons‑le, les saisir rapidement et les remettre à l'Ukraine pour sa reconstruction.
    Merci. C'est pour cette raison que j'ai proposé cette étude, afin que nous puissions vraiment aller au fond des choses.
    Je vous remercie.
    Merci.
    Nous passons maintenant à M. Epp.
    Monsieur Epp, vous avez quatre minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je vais commencer par notre témoin en ligne, M. Bellissimo, concernant la cinquième recommandation que vous avez présentée. Je crois que c'est l'Association du Barreau canadien qui l'a proposée. Elle précise que la « détermination du statut de réfugié canadien, au Canada ou outre-frontière, doit entraîner automatiquement le retrait du nom de la personne de toutes les listes de sanctions ».
    Selon vous, quelle incidence cette recommandation pourrait-elle avoir sur l'immigration irrégulière au Canada? Est‑ce que cela la ralentirait? Nous sommes tous, autour de cette table, en faveur de l'immigration, mais d'une immigration ordonnée.
    Quel est votre avis à cet égard?
(1255)
    C'est une recommandation de M. David Matas.
    L'incidence sur les arrivées régulières, compte tenu des modifications apportées à l'Entente sur les tiers pays sûrs, serait minime, au mieux. Le problème que posent les retraits de la liste, c'est que même si la personne est admissible au statut de réfugié, elle ne peut obtenir aucun statut, qu'il soit temporaire ou permanent, tant que son nom ne sera pas retiré de la liste. Ces personnes se retrouvent donc dans un vide juridique. Sur le plan pratique, les choses seront très difficiles pour elles à l'avenir. Selon moi, cette partie du projet de loi ne tient pas compte de l'étape suivante, c'est‑à‑dire de ce qui se passe lorsqu'une personne peut présenter une demande, mais qu'elle ne cherche à obtenir aucun statut, tout en restant au Canada.
    Je vous remercie.
    Merci.
    Je vais céder le reste de mon temps à mon collègue, M. Hoback.
    Mais avant, je tiens à souligner que j'ai beaucoup de difficulté à concilier les enjeux de sécurité avec certaines des préoccupations légitimes que nous avons entendues ici aujourd'hui.
    Ce matin, le sénateur nous a parlé du sentiment d'urgence qui a motivé l'adoption du projet de loi S‑8 et il a dit que c'était pour cette raison qu'il avait été déposé au Sénat. Comme cela fait maintenant un an que ce processus est en cours, je me demande pourquoi nous sommes maintenant en train d'en discuter. Je ressens un sentiment d'urgence face à la situation en Ukraine, mais je tiendrai compte de certaines des préoccupations exprimées par d'autres intervenants.
    Allez‑y, monsieur Hoback.
    Il vous reste deux minutes, monsieur Hoback.
    Il y a quelque chose qui m'intrigue. J'ai posé une question au sénateur concernant l'abrogation de certains paragraphes relatifs au trafic d'organes humains et il m'a répondu qu'ils étaient inclus dans une autre partie du projet de loi.
    Madame Middlemiss, vous êtes peut-être la mieux placée pour répondre.
    Est‑ce que la terminologie a changé quelque chose en ce qui concerne la traite de personnes? Y a‑t‑il une raison valable de retirer ces articles du projet de loi?
    D'après mon interprétation du projet de loi, je ne crois pas que cela aurait une incidence sur la traite des personnes, l'interdiction de territoire pour motif de traite des personnes.
    Êtes-vous à l'aise avec l'abrogation de ce paragraphe?
    Oui.
    Monsieur Daoud, vous avez dit que vous souhaiteriez que certains amendements soient apportés, des amendements mineurs qui, selon vous, seraient utiles.
    Pourriez-vous déposer ces amendements auprès du Comité afin que nous puissions en avoir une copie?
    Oui, volontiers. Je vous les donnerai dès la fin de la séance.
    Nous pourrons ainsi déterminer s'il y a matière à les examiner ou non.
    J'ai remarqué que la loi ne contient aucune disposition relative aux résidents permanents, en ce sens que ce ne sont pas des citoyens canadiens, mais ce ne sont pas des touristes non plus.
    Comment accorder un traitement équitable aux personnes ayant un statut de résident permanent en vertu de ce projet de loi?
    Je pense que nous n'avons pas étudié ce cas de figure en profondeur dans le projet de loi. Nous ne comprenons pas toutes les implications pour les citoyens en vertu des dispositions de révocation qui sont proposées.
    Les droits des résidents permanents sont évidemment très importants au Canada. Il est donc important de savoir comment ils seront touchés. Ce serait bien qu'il y ait des dispositions plus étoffées à cet égard dans les règlements actuels ou proposés afin que nous puissions comprendre le mécanisme.
    Le problème avec les règlements, c'est que nous ne pouvons pas revenir en arrière pour les examiner ou les modifier ici, en comité. Comme c'est le gouvernement et les fonctionnaires qui les ont proposés, nous pouvons seulement les critiquer et les étudier après coup, mais cela ne nous permet pas de modifier la loi en raison d'un mauvais ou d'un bon règlement.
    Avez-vous d'autres préoccupations concernant la mise en oeuvre de la loi?
    Monsieur Hoback, votre temps est écoulé, je vous remercie.
    C'est Mme Fry qui posera la dernière question.
    Madame Fry, vous avez quatre minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je tiens à remercier tous les témoins d'être venus et de nous avoir signalé beaucoup d'écueils. Comme l'a dit mon collègue, nous devons vraiment trouver un équilibre entre la sécurité, les droits de la personne et les droits individuels.
    Merci. Ces échanges sont fort intéressants.
    Je tiens à saluer M. Kolga, avec qui j'ai travaillé sur la loi de Magnitski, il y a longtemps.
    Je veux m'adresser à l'Association du Barreau canadien. L'Association a signalé qu'il fallait éviter d'élargir exagérément la notion de pays d'origine. Il va sans dire que nous nous débattons avec cette définition ici quand nous regardons ce qui se passe en Chine, la désinformation et la question de l'ingérence étrangère. Nous ne voulons pas dire que les Chinois sont interdits de territoire au Canada. Comment pouvons-nous trouver une définition pondérée? Je sais qu'il faut inscrire des noms sur la liste des sanctions, mais comment éviter que, par inadvertance, des citoyens ordinaires soient pris dans ce piège pour la simple raison qu'ils sont originaires d'un grand pays, comme le Bélarus, la Chine ou la Russie? Ils peuvent avoir des noms qui se ressemblent ou entretenir une relation avec quelqu'un qui n'a absolument rien à voir avec la distinction que fait le gouvernement ni avec ses délibérations. Comment pouvons-nous y arriver?
    J'ai entendu les suggestions de beaucoup de gens. Est‑ce que l'un de vous a une recommandation claire et nette à ce sujet?
    Monsieur Bellissimo, vous semblez prêt à lever la main.
    Nous vous écoutons.
(1300)
    Merci. C'est une excellente question.
    Je le répète, la sanction doit être liée à des motifs d'atteinte aux droits de la personne ou internationaux. Dans le cas de toute personne sanctionnée, ce lien direct doit exister. Il ne peut y avoir de motif de sanction distinct ou autonome lié à un lieu géographique ou à un pays. Je pense que la loi en vigueur constitue un pas en arrière. J'encourage quiconque s'engage sur cette voie à faire preuve de prudence, car il risque de reculer au lieu d'avancer.
    Recommandez-vous que nous améliorions la définition énoncée dans la loi?
    Oui. Nous recommandons que la sanction continue à être liée à la violation des droits de la personne ou des droits internationaux. Pour une raison quelconque, dans ce projet de loi, ces notions ont été séparées. Elles ont été découplées, comme l'a dit mon ami du Centre de réfugiés, et je pense que cela pose un risque sur le plan de l'application de la loi.
    Merci beaucoup.
    Les témoins ont beaucoup parlé du recours dont dispose une personne dont le nom a été inscrit à la liste par inadvertance et dont elle souhaite le retrait parce qu'elle s'appelle John Smith et qu'il existe des centaines de John Smith dans le monde. La ministre nous a dit à une réunion précédente qu'il y avait des façons de régler ce problème. La personne peut s'adresser à Affaires mondiales Canada. Elle peut aussi s'adresser à la Cour fédérale pour obtenir réparation. De plus, pour les personnes qui n'ont pas les moyens de régler ce problème, les services d'aide juridique reçoivent de l'argent pour les aider à avoir accès à ce genre de justice.
    À votre avis, est‑ce suffisant? Faudrait‑il mettre en place un autre mécanisme? Ma question s'adresse à M. Bellissimo, mais j'aimerais également avoir l'avis de M. Kolga.
    Très rapidement, j'ajouterais qu'il faut laisser des soupapes de sécurité en place pour les personnes qui n'ont rien à se reprocher. La Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés devrait prévoir un recours plus immédiat, comme la dispense ministérielle et l'accès à la Section de l'immigration. Je pense que ces soupapes de sécurité sont importantes, tant pour la constitutionnalité des dispositions que pour la facilité d'utilisation. Je le répète, ce sont les mauvais joueurs que nous voulons attraper.
    Merci.
    Je vous remercie, monsieur Bellissimo.
    Je vais céder à M. Kolga le peu de temps qu'il me reste.
    Je suis désolé, mais il ne vous reste que huit secondes, madame Fry.
    Monsieur Kolga, allez‑y.
    Nous devons faire très attention à ne pas créer, par inadvertance, des échappatoires qui seront exploitées par les oligarques russes et d'autres personnes visées par ces sanctions.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup.
    Je profite de l'occasion pour remercier tous nos témoins de leur présence, de leur témoignage et de leurs réponses à toutes les questions posées par les députés.
    Monsieur Bellissimo, monsieur Kolga, madame Middlemiss, monsieur Michalchyshyn, monsieur Zakydalsky et monsieur Daoud, nous vous remercions.
    Vous avez toute notre reconnaissance.
    Plaît‑il au Comité de lever la séance?
    (La motion est adoptée.)
    Le président: Je rappelle à tous que mardi, nous commencerons l'étude article par article du projet de loi S‑8.
    Merci.
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