propose que le projet de loi , soit lu pour la deuxième fois et renvoyé au comité.
Monsieur le Président, à ce jour, plus de 45 000 Canadiens ont perdu la vie à cause de la COVID, et des millions de personnes dans le monde sont mortes à cause de la COVID. Cette maladie a bouleversé nos vies de multiples façons, de l'isolement à la fermeture des écoles. Elle a déstabilisé les entreprises et causé d'importantes perturbations économiques, des répercussions que nous ressentons encore avec l'inflation et les hausses de taux d'intérêt difficiles à supporter pour de nombreux ménages. L'impact global sur les taux de pauvreté et le bouleversement de l'éducation dans le monde entier auront des effets négatifs à long terme.
Il y a eu l'augmentation de la dette que les gouvernements du monde entier ont, à juste titre, contractée pour faire face aux nombreuses répercussions de la crise. Les dettes publiques et privées ont également des conséquences. Cinquante-sept pour cent des Canadiens qui ont vu leurs dettes augmenter attribuent cette hausse à la pandémie. Comme l'a dit un stagiaire parlementaire de mon bureau, même après l'avoir vécu directement, il est difficile de se faire une idée de ce que nous venons de vivre.
Que pouvons-nous et devons-nous faire à propos de tout cela? Quelles leçons devons-nous tirer? Je pense que nous devons être précis et clairs, et mettre en place un cadre pour nous assurer que nous ne perdons pas ces acquis. En bref, le message de ce projet de loi est que nous devons tirer les leçons de cette pandémie afin de prévenir et de préparer la prochaine. Non, nous n'en avons pas fini avec la COVID, mais nous avons aussi traversé suffisamment d'épreuves pour faire le point sur les mesures qui ont été prises par tous les ordres de gouvernement en réponse à la pandémie, et ces leçons devraient guider notre approche pour l'avenir.
Que prévoit le projet de loi pour prévenir les pandémies et s'y préparer? Il prévoit trois choses. Premièrement, il permettrait de procéder à un examen des mesures prises en réponse à la pandémie, non seulement du point de vue du gouvernement fédéral, mais aussi de tous les ordres de gouvernement. Le but est d'être exhaustif. Pour expliquer brièvement la portée de cet examen, le projet de loi précise ce qui suit:
Dans le cadre de son examen, le comité consultatif est tenu, entre autres:
a) d’évaluer la capacité de l’Agence de la santé publique du Canada et du ministère de la Santé de prendre des mesures en réponse à la pandémie causée par la maladie à coronavirus 2019 (COVID‑19) avant et durant la pandémie;
b) en collaboration avec les gouvernements provinciaux et les administrations municipales, d’évaluer la capacité d’intervention de ceux-ci en matière de santé publique et en cas de pandémie;
c) d’évaluer l’efficacité de l’exercice des pouvoirs prévus par les lois fédérales applicables avant, pendant et après la pandémie et la coordination des mesures prises au titre de ces lois;
Et surtout, car il s'agit là de l'élément le plus important à mettre en avant pour tirer des enseignements:
d) d’analyser les facteurs sanitaires, économiques et sociaux qui ont eu une incidence sur la pandémie au Canada.
Pour tirer des leçons des mesures prises par le gouvernement fédéral et tous les autres pouvoirs publics, il doit y avoir un examen.
Comment pouvons-nous utiliser ces leçons pour établir un cadre qui offrira reddition de comptes, transparence et prise de mesures à partir de maintenant? Le projet de loi exige également du ministre de la Santé qu'il établisse un plan de prévention et de préparation en matière de pandémie. Cette exigence s'inspire de la mesure législative sur la responsabilité climatique.
Sauf erreur, la première mesure législative sur la responsabilité climatique que j'ai passée en revue était celle d'un gouvernement conservateur du Royaume‑Uni qui date de 2006. Le Canada a maintenant mis en place un tel cadre. Ce projet de loi adopte une approche similaire: il prévoit un cadre assurant la transparence et la reddition de comptes qui oblige le gouvernement à présenter un plan au Parlement, à la population canadienne, et à l'actualiser de façon régulière. Le projet de loi propose que le plan soit mis à jour tous les trois ans. J'ai hésité longtemps entre trois et cinq ans. Je pense qu'une mise à jour tous les cinq ans serait aussi appropriée.
Le projet de loi oblige le ministre de la Santé à établir un plan de prévention et de préparation en matière de pandémie et à déposer un rapport. Il énonce une longue liste de facteurs. C'est la partie qui a été assez difficile en fait parce que je m'appuyais sur une grande quantité d'expertise, sur le rapport du Programme des Nations Unies pour l'environnement sur la prévention des pandémies futures, sur la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques et ses rapports d'ateliers liés au risque de pandémie et à la façon dont nous prévenons les pandémies futures, et sur le groupe indépendant, qui a publié une série de rapports sur la préparation et l'intervention en cas de pandémie à l'échelle nationale, mais aussi à l'échelle mondiale, et la façon dont nous pourrions améliorer les interventions à tous les échelons.
À partir de ces rapports d'experts, et en consultation avec certains des chercheurs à l'origine de ces rapports et aussi des experts canadiens de la santé, on a établi dans le projet de loi une série de facteurs que le ministre de la Santé doit prendre en compte pour élaborer un plan. Je suis sûr d'avoir oublié certains éléments, ce qui explique en partie pourquoi il est si important de renvoyer un projet de loi comme celui-ci à un comité. Le comité pourrait, de manière non partisane, j'espère, dire ce qui n'a pas de sens, indiquer si un élément a été oublié ou établir comment nous pourrions faire en sorte que le projet de loi soit le meilleur possible pour ce qui est des éléments qui doivent faire ou ne pas faire partie d'un plan soumis à l'examen du ministre de la Santé.
Pour commencer, de toute évidence, le ministre de la Santé doit énumérer les facteurs clés de risque de pandémie et décrire comment les activités du Canada, au pays et à l’étranger, contribuent à ce risque.
Dans cette enceinte et, bien honnêtement, dans la population, l'accent est mis sur les stratégies de préparation, et c'est également en partie l'objet de ce projet de loi. Nous ne parlons pas suffisamment de prévention. Cependant, nous savons que les coûts associés à la prévention sont infimes comparativement aux pertes humaines et économiques durant une pandémie. Par conséquent, il est nécessaire de centrer des efforts considérables sur la prévention.
Il faut aussi veiller à ce que tous les pouvoirs publics s'engagent à collaborer, et ce, parce que les mesures du gouvernement fédéral à elles seules ne suffisent pas au sein de notre fédération. Tant au chapitre de la lutte contre les changements climatiques que dans la préparation aux pandémies, et certainement dans l'atténuation des risques liés à une pandémie, nous savons maintenant que le fardeau ne repose pas uniquement sur les épaules du gouvernement fédéral. C'est incontestablement une leçon que nous avons apprise dans le cadre de notre réponse à la COVID‑19. Ainsi, le projet de loi obligerait le ministre de la Santé à veiller à ce qu'il existe une collaboration ininterrompue entre son ministère, les gouvernements provinciaux et les collectivités autochtones pour développer un plan dans le but d'harmoniser les approches et de remédier à toute querelle de champ de compétence.
J'aurais probablement pu employer un langage plus clair, mais le projet de loi offrirait aussi des programmes de formation, y compris des activités de collaboration avec les autres pouvoirs publics. Ce que j'avais à l'esprit — et je pense qu'un comité pourrait mieux définir cette idée —, c'était un exercice de simulation et des discussions en table ronde. Il ne suffit pas d'avoir un plan rédigé sur une feuille de papier. Nous devons mettre ce plan en œuvre et repérer les lacunes. Si des problèmes liés aux champs de compétence surviennent, on peut en traiter dans un exercice de simulation, plutôt qu'au moment de traverser une vraie pandémie.
Lorsque nous puisons dans la documentation, il sera crucial que le plan soit basé sur une approche Une seule santé. Pour ceux qui ne savent pas ce qu'est une approche Une seule santé, c'est une idée relativement simple, bien qu'elle puisse parfois être un peu difficile à appliquer à cause de son caractère holistique. Il s'agit de l'idée que nous ne pouvons pas séparer la santé humaine, la santé animale et la santé environnementale comme si elles étaient distinctes; il faut les considérer comme étant des idées interreliées qui constituent une seule santé.
Nous savons cela, et si nous lisons la documentation du Programme des Nations unies pour l'environnement, de la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques ou de n'importe quels autres experts, y compris les experts canadiens en zoonoses, ils nous diront que les zoonoses représentent le plus important risque en ce qui a trait aux pandémies. Si l'on prend la déforestation, par exemple, le fait que les humains sont de toute évidence en contact plus étroit avec les animaux en raison de la déforestation crée un problème non seulement pour la santé de l'environnement, mais également pour la santé des humains, en raison du risque de saut d'espèce. Si nous examinons tous les facteurs — et cela fait l'objet de différents rapports —, force est de conclure qu'il faut adopter une approche Une seule santé.
Je cite le Programme des Nations unies pour l'environnement. Il dit:
Ce rapport confirme et s’inscrit dans les conclusions de l’alliance tripartite FAO‑OIE‑OMS et de nombreux autres experts qui affirment que l’approche « Un monde, une santé » est la méthode de prévention et de réponse la plus efficace aux épidémies et pandémies de zoonoses.
Par conséquent, il faut mettre l'accent sur l'approche Une seule santé.
Il faut aussi, bien sûr, une approche pangouvernementale. Il ne suffit pas que le ministre de la Santé élabore un plan. Il doit travailler avec d'autres ministres, éliminer des cloisonnements au sein du gouvernement fédéral et nous mettre dans la meilleure position possible pour prévenir de futures pandémies et y réagir. Le ministre de l'Industrie a un rôle à jouer sur le plan de notre capacité de fabriquer des vaccins et de mettre au point des traitements et des tests essentiels. Le ministre de la Sécurité publique et le ministre des Transports ont un rôle à jouer en ce qui concerne les contrôles frontaliers. La ministre des Affaires étrangères a évidemment un rôle à jouer en ce qui concerne l'équité en santé à l'échelle mondiale, un objectif que les pays riches dont nous faisons partie n'ont malheureusement pas du tout réussi à atteindre au cours de cette pandémie. Il devrait également y avoir une collaboration avec la ministre de l'Agriculture et le ministre de l'Environnement, ce qui s'inscrit dans l'idée d'une approche Une seule santé.
Donc, si l'on pense à un cadre qui existe déjà au sein du gouvernement du Canada, une approche Une seule santé relative à la résistance aux antimicrobiens, c'est un partenariat entre le ministère et le ministre de la Santé et le ministère et la ministre de l'Agriculture, car nous savons que, certainement dans d'autres pays du monde, l'utilisation accrue et l'utilisation abusive des antibiotiques peuvent créer un risque de superbactéries. Il y a des chercheurs à l'Université McMaster qui appellent cela la « pandémie silencieuse », faisant allusion au nombre de vies déjà perdues à cause de la résistance aux antimicrobiens. Comme je l'ai dit, il s'agit d'une approche pangouvernementale.
L'une des choses sur lesquelles le comité devra se concentrer lorsqu'il examinera la série de facteurs est l'importance de veiller à ce qu'il y ait des stratégies de préparation aux situations d'urgence pour les services de santé publique qui comprennent la protection des populations vulnérables et marginalisées. À cette fin, la collaboration continue avec les provinces est cruciale. Cette question relèvera tant des provinces que du fédéral. Les conditions de travail des travailleurs essentiels dans tous les secteurs sont une question qui relève tant des provinces que du fédéral.
La gestion de la disponibilité des stocks pertinents, notamment le matériel de dépistage et l'équipement de protection individuelle, relève davantage du fédéral, mais il est déjà arrivé que les provinces éprouvent des difficultés à ce chapitre.
Il y a la capacité de recherche des ressources humaines qui est nécessaire pour le dépistage et la recherche des contacts, étant donné que les ressources humaines ne peuvent pas toujours être prêtes à intervenir. Nous devons être capables de les mobiliser pour répondre à l'augmentation de la demande, et, encore une fois, les provinces et le gouvernement fédéral devront travailler main dans la main dans ce dossier.
Il y a une série d'autres facteurs, mais je ne les passerai pas tous en revue. Je tiens à mentionner les sept principaux vecteurs de maladie ciblés par le Programme des Nations unies pour l'environnement.
Le premier facteur est la demande croissante pour les protéines animales, car nous comprenons le risque de propagation et les lacunes en matière de biosécurité, notamment en raison de l'augmentation de la demande dans les pays à faible et moyen revenu. C'est un véritable problème auquel il faut trouver une solution.
Le deuxième facteur est l'intensification non durable de l'agriculture.
Le troisième facteur est l'utilisation et l'exploitation accrues de la faune. Les marchés d'animaux vivants partout dans le monde posent problème, comme l'illustre vraisemblablement le rôle qu'ils ont joué dans la crise que nous venons de connaître.
Le quatrième facteur est l'exploitation non durable des ressources naturelles, accélérée par l'urbanisation et le changement d'affectation des terres.
Le cinquième facteur, ce sont les déplacements et les transports.
Le sixième facteur est l'évolution des chaînes d'approvisionnement alimentaire. Les problèmes de traçabilité en sont l'enjeu central.
Le septième facteur est le changement climatique.
ll s'agit de deux risques majeurs qui vont de pair. Le changement climatique est un risque qui menace notre existence même, mais il contribue aussi au risque de pandémie. Cela ne veut pas dire que nous pouvons éliminer les déplacements et l'agriculture. Cependant, nous devons nous pencher sur ces secteurs pour trouver les meilleures façons de réduire et de limiter le risque de pandémie pour éviter que cela ne se reproduise. Comment nous assurer que la réglementation nécessaire est en place pour nous préparer à d'autres pandémies éventuelles?
Enfin, je crois que le dernier point que j'aimerais souligner est la nécessité de s'assurer que tous les intervenants sont tenus de rendre des comptes.
Tout d'abord, le projet de loi vise à dresser un bilan et à tirer les leçons qui s'imposent.
Ensuite, il faut y inscrire les éléments à inclure dans le plan. J'ai déjà expliqué cela en détail, et le projet de loi offre encore plus de précisions à ce sujet. J'ose espérer qu'on pourra en faire un exercice de collaboration au comité, car je veux que ce soit un exercice non partisan afin qu'on fasse les choses correctement.
Enfin, nous devons nous assurer de nommer un coordonnateur national de la prévention et de la préparation en matière de pandémie pour superviser et mettre en œuvre les plans, afin qu'il y ait une reddition des comptes adéquate et un bureau responsable de mener le tout jusqu'au bout.
Pour terminer, j'aborderai un point qui me semble pertinent. Dans le monde politique, nous avons tendance à oublier les crises. Quand une crise se présente, nous nous en occupons puis nous l'oublions. C'est ce qui s'est produit avec l'épidémie de SRAS. Il ne faudrait se retrouver, dans 20 ans, dans une situation où les débats que nous avons actuellement ont été oubliés et où les plans de prévention et de préparation en cas de pandémie établis en 2022 ou en 2023 dorment sur une tablette et n'ont pas été mis en œuvre ni mis à jour. Il s'agit vraiment d'une question de reddition de comptes: il faut voir à ce que les futurs gouvernements de tout horizon politique prennent cet enjeu au sérieux, travaillent sérieusement à la prévention et à la préparation en cas de pandémie, et voient à ce qu'on n'oublie pas les leçons apprises pendant la pandémie de COVID et à ce que la société canadienne ne vive jamais plus une expérience pareille. Je ne pourrai jamais trop insister sur le fait qu'une pandémie comme celle que nous venons de traverser a d'énormes coûts, et que la prévention et la préparation coûtent très peu en comparaison.
J'espère que tous les partis seront d'accord pour renvoyer ce projet de loi au comité, lequel pourra l'améliorer, y apporter des amendements et le mener à bien.
Je suis heureux d'avoir pu parler de ce projet de loi à la Chambre aujourd'hui.
:
Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole à la Chambre ce soir.
L'enjeu à l'étude est important, et je remercie le député de d'avoir présenté un projet de loi à ce sujet pour que nous puissions en discuter aujourd'hui. Je peux certes comprendre que, après avoir dû composer avec la COVID ces deux dernières années, il y a des personnes qui estiment que nous devons adopter immédiatement une telle mesure. Personne ne souhaite que les Canadiens soient de nouveau aux prises avec la COVID ou avec quelque chose de pire. En tant que parlementaires, la sécurité de nos concitoyens est notre priorité absolue. Nous devons prendre le temps de réfléchir convenablement à ce que nous venons de traverser, d'examiner ce qui s'est passé, si nous voulons avoir un dialogue constructif sur les mesures à prendre lors d'une pandémie future.
Le projet de loi propose que le et d'autres ministres fédéraux mettent sur pied ou, même, forment le comité consultatif chargé d'examiner les mesures qu'ils ont prises en réponse au coronavirus, ce qui, franchement, est tout à fait ridicule. C'est comme demander au loup de garder la bergerie parce qu'ils sont tous directement concernés par les résultats de cet examen. Les Canadiens n'obtiendront jamais les réponses auxquelles ils ont droit si les ministres qui sont responsables de bon nombre des échecs, des abus et des violations des droits garantis par la Charte observés au cours des deux dernières années, ou qui les ont encouragés, sont les personnes chargées d'examiner la réponse de leur propre gouvernement.
Soyons réalistes: la transparence, la reddition de comptes et, bien franchement, l'honnêteté ne riment pas avec le gouvernement actuel. Nous avons pu voir de nos propres yeux toutes les faussetés répandues par les ministres. Voilà pourquoi, avant d'aller de l'avant avec les mesures prévues dans le projet de loi , je propose que nous tenions une enquête nationale sur la manière dont les pouvoirs publics ont géré la pandémie de COVID‑19, car, en songeant aux deux dernières années, je constate qu'il y a trop de questions. Il s'agit de questions auxquelles le gouvernement n'a jamais répondu et, dans bien des cas, que personne au sein du gouvernement ou dans les médias n'a jamais osé poser publiquement.
C'est là que se situe le premier problème majeur dans la gestion de la COVID par le gouvernement. Il s'agit de l'approche « c'est à prendre ou à laisser et il est interdit de poser des questions sur ce que nous faisons parce que nous savons mieux que quiconque » que les gouvernements du Canada ont adoptée. Nous ne cessions d'entendre qu'il fallait s'appuyer sur les données scientifiques et que nous nous appuyions sur des données scientifiques. Il s'agit de science politique, mais la dernière fois que j'ai vérifié, une étape importante des véritables travaux scientifiques consiste à poser des questions, à analyser les données et à faire preuve d'un scepticisme rigoureux. Nous faisons une observation, nous recherchons le sujet, nous formulons une hypothèse, nous mettons à l'essai les expériences, nous analysons les données et nous présentons les conclusions aussi objectivement que possible en nous fondant uniquement sur les données empiriques. C'est la méthode scientifique.
Dans le cas de la COVID, le gouvernement n'a jamais vraiment dépassé le stade de l'hypothèse. Les libéraux ont fondé leur intervention sur les hypothèses qu'ils ont formulées dans les premiers jours de la pandémie et celles de nombreux membres du domaine médical, ce qui a mené à la collecte et à l'utilisation de données sélectives et souvent trompeuses pour étayer ces hypothèses.
Les médias ont également manqué d'objectivité en ne posant pas de questions et en choisissant plutôt de répéter les éléments de langage du gouvernement comme s'il s'agissait d'une vérité, semant la peur et la division alors qu'ils empochaient silencieusement des centaines de millions de dollars de subventions gouvernementales. Le gouvernement a refusé d'admettre des points de vue différents. Il n'a pas posé les questions difficiles et a réduit au silence ou a ridiculisé ceux qui l'ont fait.
Les Canadiens ne devraient pas avoir à craindre les répercussions sur leur lieu de travail, dans leur collectivité et leurs associations professionnelles, en ligne ou dans les médias. Pourtant, c'est ce qui s'est passé. Quiconque a remis en question quoi que ce soit en rapport avec la gestion de la pandémie par le gouvernement, à quelque échelon de gouvernement que ce soit, a été dénigré, intimidé et censuré. Dans une société libre et démocratique, cela devrait tous nous préoccuper profondément. Les gouvernements ont fait d'énormes demandes aux Canadiens, et il incombe aux gouvernements à tous les échelons de fournir des données empiriques pour soutenir leurs actions. Nous devons cela aux Canadiens.
Je me suis assis l'autre soir alors que je me préparais à prononcer ce discours et j'ai commencé à écrire certaines questions qui m'embêtaient. On ne peut pas compter sur le gouvernement pour poser ces questions parce qu'il a cherché avec tant de diligence, pendant deux ans et à ses propres fins politiques, à dissimuler les réponses des Canadiens. Je vais prendre le temps qu'il me reste ici pour poser certaines d'entre elles.
Tout d'abord, pourquoi le gouvernement a-t-il pris la décision en 2019 de fermer notre système d'alerte rapide en cas de pandémie? Nous avions connu le SRAS et le H1N1, et nous étions conscients de la possibilité d'une épidémie au Canada. Qui a choisi de démanteler le système? Qui, au sein du gouvernement, est responsable d'avoir laissé les Canadiens sans défense?
Pourquoi y avait-il tant d'informations contradictoires de la part du gouvernement et des responsables de la santé publique? Il y avait des jours où l'Organisation mondiale de la santé disait une chose, la Dre Tam en disait une autre et le Dr Roussin, du Manitoba, ma province, disait quelque chose de complètement différent, tout cela sur la même question.
Cela a engendré la confusion, la peur et la méfiance. Je pense que c'est le type de problème que le projet de loi tente de régler, du moins en partie, mais, encore une fois, nous ne pouvons pas régler ces questions avant de savoir parfaitement ce qui s'est passé et qui était responsable, et nous ne pouvons pas faire confiance au gouvernement pour nous fournir ces réponses.
Nous avons appris que l'Agence de la santé publique du Canada, le ministère responsable de la réponse du gouvernement à la COVID, a laissé le Laboratoire national de microbiologie de Winnipeg, l'une des installations les plus sécurisées du pays, être infiltré par des espions chinois ayant des liens directs avec le laboratoire de Wuhan et le programme d'armes biologiques de l'Armée populaire de libération. Pourquoi?
Le gouvernement a poursuivi le Parlement pour étouffer l'affaire. Il a refusé de jouer franc jeu, puis il a fait volte-face et conclu un accord avec la Chine, qui devait devenir le seul fabricant des vaccins fournis au Canada. L'accord a finalement échoué, mais il y a beaucoup de questions qui demeurent sans réponse. Pourquoi le gouvernement refuse-t-il de publier les détails relatifs à l'approvisionnement, comme le prix par dose, alors que d'autres gouvernements ont fait preuve de transparence?
Des questions légitimes demeurent sur la sécurité et l'efficacité des vaccins. Pourquoi le gouvernement a-t-il accepté de ne pas divulguer les données sur la sécurité du vaccin de Pfizer pendant 75 ans? Au total, 51 714 Canadiens ont jusqu'à présent subi un préjudice physique lié à leurs vaccins contre la COVID‑19, ce qui comprend 10 501 réactions graves, 874 réactions anaphylactiques, 1 342 myocardites, 140 thromboses et 382 décès signalés à la suite d'un vaccin. D'où proviennent ces données? Elles sont tirées du propre site Web du gouvernement. Tout le monde y a accès. On rapporte aussi de nombreux cas où des médecins ont carrément refusé de déclarer, au moyen du protocole prévu, les effets secondaires manifestés suivant l'immunisation.
Combien de ces personnes ont été dédommagées à ce jour par l'entremise du Programme de soutien aux victimes d'une vaccination? Il y en a huit. Pourquoi les médias gardent-ils le silence sur ces renseignements? Pourquoi le était-il plus intéressé par ses succès politiques que par la santé publique?
Le nous l'a montré en choisissant de déclencher une élection générale non nécessaire l'automne dernier. Il nous l'a montré non seulement avec ses inacceptables discours démagogiques qui diabolisaient les gens qui avaient choisi de ne pas se faire vacciner, mais aussi avec ses méthodes musclées pour gérer les manifestations contre la vaccination obligatoire. D'abord considérés comme des héros parce qu'ils permettaient au pays de continuer à tourner, les camionneurs ont soudainement été réduits au rôle d'ennemis si terribles qu'il fallait invoquer la Loi sur les mesures d'urgence pour les déloger. L'enquête et, ultimement, l'histoire montreront à quel point cette réponse était injustifiée et motivée par des considérations politiques.
Par ailleurs, les dépenses du gouvernement soulèvent de sérieuses questions. Le gouvernement libéral a fait des dépenses sans précédent, qui se chiffrent en centaines de milliards de dollars, pour lutter contre la COVID‑19, mais le directeur parlementaire du budget a indiqué qu'au moins 40 % de ces sommes, soit 205 milliards de dollars, n'ont pas servi à combattre la COVID‑19. Où est allé cet argent? Nous savons que des dizaines de millions de dollars sont allés dans les poches de gens proches du Parti libéral et que le gouvernement a dépensé des sommes colossales pour des respirateurs et d'autres équipements médicaux qui n'ont jamais été utilisés et qui accumulent maintenant la poussière dans des entrepôts.
Qui s'est enrichi pendant que des Canadiens souffraient? Pourquoi le gouvernement a-t-il refusé de mettre en place des mesures de sauvegarde à l'égard de la Prestation canadienne d'urgence, si bien que trois millions de personnes, y compris des criminels en prison, l'ont reçue? Pourquoi le gouvernement a-t-il renvoyé des fonctionnaires fédéraux chez eux, alors que cinq millions de Canadiens qui avaient perdu leur emploi et qui étaient obligés de recourir à des programmes gouvernementaux étaient incapables d'accéder à ses services? Pourquoi sont-ils encore chez eux?
Dans les deux dernières années, mon bureau est resté ouvert tous les jours pour aider les Canadiens. Nous avons fait les choses de façon sécuritaire et nous n'avons eu aucun problème lié à la COVID‑19. Je ne vois pas pourquoi il en serait autrement pour d'autres fonctionnaires et organismes gouvernementaux. Les Canadiens paient leur salaire, alors les fonctionnaires doivent retourner au bureau et recommencer à travailler à temps plein pour les Canadiens.
Nous pourrions en discuter toute la soirée à la Chambre. Nous pourrions parler des exigences sanitaires qui n'avaient aucune justification scientifique et qui semaient la division. Nous pourrions parler de la désastreuse application ArriveCAN. Nous pourrions parler du fait que les actions du gouvernement ont détruit des villes frontalières et séparé des proches. Nous pourrions parler des agressions subies par des Canadiens dans les hôtels de quarantaine. Nous pourrions parler des décisions prises par les provinces et des mesures draconiennes qui, à mon avis, ont causé beaucoup plus de mal à long terme que de bien. La liste de questions est interminable. Les Canadiens méritent des réponses.
Au cours des deux dernières années, les pouvoirs publics ont imposé d'énormes exigences aux Canadiens. Chaque fois, les Canadiens ont répondu à l'appel, puis ils ont vu leurs espoirs anéantis par les échecs et les promesses brisées du gouvernement alors que les règles ne cessaient de changer. Les Canadiens méritent des données empiriques justifiant les exigences sanitaires. L'histoire montrera que ces exigences étaient fondées sur des considérations politiques et non sur la santé publique.
Après deux années passées sous le signe de la maladie, des restrictions, de la division et de la peur, les pouvoirs publics doivent répondre de leurs actes. Le projet de loi est insuffisant parce qu'on ne devrait pas faire confiance au gouvernement, peu importe lequel, pour qu'il enquête sur lui-même.
:
Monsieur le Président, je tiens d'abord à remercier mon collègue de pour le dépôt de ce projet de loi. C'est un collègue, je dois le dire, que j'apprécie très particulièrement. Je pense qu'il est un libre penseur et un parlementaire de très haute qualité. Je reconnaissais cela avant même d'être au Parlement. J'attendais le moment pour le lui dire, alors voilà.
Le projet de loi vise, dans son essence, à assurer que le gouvernement du Canada, du moins en principe, est mieux placé pour faire face à de futures crises sanitaires et à de futures pandémies, et, dans une certaine mesure, qu'il en tire des leçons.
De plus, comme je l'ai dit tout à l'heure dans ma question, c'est un projet de loi qui est très prospectif. On parle de mettre en place un comité consultatif, de mettre sur pied un plan pour l'avenir et d'avoir des fonctionnaires affectés à la préparation de plans de contingence pour de futures pandémies, quoique le projet de loi laisserait beaucoup de liberté pour que cela évolue éventuellement d'une façon ou d'une autre. Cela mettrait aussi à contribution, de façon importante, Santé Canada, le ministère de la Santé, et ainsi de suite.
J'éprouve un malaise avec ce projet de loi. Même si je suis convaincu que l'intention est bonne, j'ai l'impression que le gouvernement du Canada a déjà — et avait déjà — à sa disposition un grand nombre d'outils qui ont été peu ou pas utilisés. Je me pose sérieusement la question à savoir si on n'est pas en train de rajouter encore une couche de bureaucratie, de comités et de toutes sortes de choses, alors qu'on a déjà vu les lacunes importantes de la machine fédérale pendant la dernière pandémie.
Je pense que, ce dont on a besoin pour l'instant, c'est d'une enquête publique. En effet, si on n'est pas capable d'apprendre d'une enquête indépendante et sérieuse quelles ont été les lacunes profondes de la gestion fédérale de la pandémie au cours des derniers mois et des dernières années, on ne sera pas en mesure d'utiliser quelque nouvelle institution que ce soit, comme celles qui sont présentées dans ce projet de loi, à bon escient.
On est un peu dans une drôle de situation. On a un gouvernement minoritaire, et on est présentement dans une situation où les conservateurs ont demandé une enquête publique indépendante et où le Bloc québécois est en faveur d'une enquête publique et indépendante. J'ai également entendu mon collègue du NPD, dans une question fort bien posée tout à l'heure, réitérer qu'on devrait avoir une enquête publique et indépendante.
Qu'est-ce que le nous répond? Le ministre nous dit que c'est très important qu'il y ait un mécanisme pour faire enquête, mais il ne veut pas nous dire comment ni quand.
C'est typique. C'est comme dire: il y a quelqu'un de très malade, mais je ne dirai pas si j'appelle l'ambulance ni quand, et on espère que tout ira bien. C'est comme dire: on sait que des armes à feu illégales circulent à Montréal et on trouve cela très important, mais on ne veut pas dire quand ni comment on va travailler pour les sortir des rues. C'est comme dire: on sait que le français est menacé à Montréal et on trouve cela très important, mais on ne veut pas dire quand ni comment ni si on va faire quoi que ce soit pour la protection du français. C'est ce qu'on a de la part du gouvernement, de la part du ministre de la Santé.
Je sais que ce n'est pas de la faute de mon collègue qui dépose le projet de loi. Toutefois, en tant que parlementaires, cela nous met dans une espèce de mauvaise situation. On se dit qu'ils veulent nous faire siéger jusqu'à minuit, qu'on aura donc moins de temps en comité, et qu'il faut alors mieux sélectionner les projets de loi qu'on envoie en comité à cause du comportement des libéraux avec leurs amis du NPD. Cela nous force un peu à voter contre. Cela nous force à voter contre et à dire au gouvernement d'utiliser les outils qu'il a déjà à sa disposition. S'il n'a rien à cacher, qu'il montre patte blanche sur la gestion de la pandémie.
Quelle est la solution au volet 1 qui est proposé dans le projet de loi, soit la création d'un comité? C'est une enquête publique, immédiate et indépendante. Il y a ensuite les volets 2 et 3, que je trouve problématiques, particulièrement comme souverainiste, comme Québécois et comme bloquiste, où on parle d'un plan de prévention avec un coordonnateur national.
Je commence à avoir passé beaucoup de temps au Comité permanent de la Santé et je sais que, quand cela commence par « que le fédéral coordonne » ou par « que le fédéral utilise son rôle de leadership », cela finit avec de la législation fédérale, du pouvoir de dépenser et des conditions sur nos transferts. Je sais que si on ne fait pas ceci ou cela, ils vont nous coordonner en tenant la bourse bien comme il le faut et en retenant le cash. Voilà ce qu'est la coordination et voilà ce qu'est le leadership fédéral.
Je sais que mon collègue est bien intentionné, mais je ne peux croire que les outils proposés dans ce projet de loi seront utilisés à bon escient. Une enquête publique doit être menée de façon prioritaire.
En ce qui concerne les compétences, on peut lire ceci dans le texte du projet de loi: « en collaboration avec les gouvernements provinciaux et les administrations municipales, [il faut] évaluer la capacité d’intervention de ceux-ci en matière de santé publique et en cas de pandémie ». Évaluer la capacité des provinces et des administrations municipales, cela veut dire ne pas se mêler de ses affaires. On a les deux pieds là-dedans. Puisqu'on a de la difficulté à faire de l'introspection, on dénonce les autres et on pointe les autres du doigt. On est un peu là-dedans.
Il faut faire une enquête publique, car il y a eu 45 000 morts au Canada et il y a eu de nombreux manquements fédéraux. Mon collègue a dit qu'il ne fallait pas utiliser la pandémie pour marquer des points politiques et pour pointer les autres du doigt. Il a raison, sauf que cela fait déjà un bon moment que nous demandons une reddition de compte, et il n'y en a jamais eu. Alors, je ne vois pas comment tous ces nouveaux comités et toutes ces nouvelles institutions vont être utilisés de façon permanente.
Mon collègue conservateur a parlé tout à l'heure du réseau mondial d’information en santé, un réseau d'alerte qui a été modifié en 2018 sans que nous sachions comment. Cela a été changé par on ne sait quel fonctionnaire, de telle façon que, à un moment donné, en 2019, il a complètement arrêté de fonctionner, 400 jours avant la pandémie du siècle. Il s'agit d'un réseau d'alerte qui permet d'en apprendre sur les pandémies mondiales. Or le projet de loi à l'étude propose d'établir un petit comité pour évaluer comment les provinces et les municipalités ont fait leur travail.
Mon collègue de disait tout à l'heure qu'il fallait être prêt pour les 10, 20 et 30 prochaines années. En 1950, on a établi la réserve nationale d'urgence, qui sert à entreposer des produits pharmaceutiques, des fournitures, du stock pour les pandémies, et ainsi de suite. Or, cette réserve a été négligée de façon systématique et, depuis 2015, on a même détruit des masques N95 parce qu'on était tanné de les entreposer. Il faudrait maintenant qu'on fasse de la planification pour l'avenir alors qu'on ne sait pas ce qui s'est passé avec cela.
Nous avons parlé récemment des fameux respirateurs. Il y en avait 27 148 dans la réserve, mais on en a commandé plus de 27 000. Évidemment, le nous dit qu'il fallait faire attention aux gens et être prévoyant. Je deviens bon pour imiter le ministre de la Santé. Selon le pire des scénarios modélisés par le fédéral, on avait besoin de 13 500 respirateurs. Un contrat de 237 millions de dollars a été accordé à l'entreprise FTI Professional Grade, une coquille vide qui est la propriété d'un ancien député libéral. Cette compagnie a produit la moitié du surplus, soit 10 000. On en a désormais 13 000 de trop, mais il faudrait qu'on fasse des petits comités.
Parlons de la gestion des quarantaines. Montréal a été obligé de dépêcher son propre personnel à l'aéroport parce que le fédéral était trop incompétent. De plus, il manquait 30 % des tests de dépistage dans les endroits où on dépistait la COVID‑19 dans les aéroports. Il n'y avait pas de registre automatisé pour les isolements. Parmi ceux qui avaient besoin d'un suivi prioritaire, 59 % étaient sans réponse malgré les signalements. Parmi les gens déclarés positifs à la COVID‑19 par le fédéral, 14 % n'avaient pas de suivi et n'étaient pas contactés. Du dépistage n'était pas fait dans les deux langues officielles. Je ne parlerai même pas des travailleurs temporaires étrangers, car ce mécanisme fonctionne déjà tout croche au fédéral et le gouvernement n'a pas été capable de l'adapter.
On peut penser aussi à la capacité vaccinale. Le gouvernement va dire qu'il a commandé des tonnes de vaccins, mais depuis le rapport Naylor de 2003, qui tirait des leçons du SRAS, on sait que la capacité de production au Canada est insuffisante. On sait qu'il faut que nous soyons plus indépendants et que nous soyons en mesure d'en produire plus. Ce rapport date de 2003.
Le gouvernement ne veut pas d'enquête publique et le nous dit des phrases creuses. De surcroît, le gouvernement ne veut pas financer les provinces, qui seront les premières au front si jamais il y a une autre pandémie.
J'aimerais dire sincèrement que j'estime mon collègue. Cela vient du fond du cœur. Toutefois, je pense qu'il est bien malvenu de déposer ce projet de loi à ce moment précis. La balle est dans le camp du gouvernement: qu'il utilise la loi et les mécanismes qui sont à sa disposition et qu'il nous montre qu'il a bien géré la pandémie. Après cela, il sera peut-être un peu plus gêné de donner des leçons de gestion au Québec et aux provinces.
:
Monsieur le Président, c'est toujours un privilège de prendre la parole à la Chambre au nom des citoyens de Vancouver Kingsway et à titre de porte-parole du Nouveau Parti démocratique du Canada en matière de santé.
Ce soir, j'aborderai le projet de loi qui, à notre avis, représente une tentative inacceptable de donner l'illusion de promouvoir la reddition de comptes et la surveillance en ce qui concerne la réponse du Canada à la pire pandémie du siècle.
Je passerai rapidement en revue les mesures prévues par le projet de loi. S'il était adopté, le projet de loi exigerait du qu’il établisse un comité consultatif chargé d’examiner les mesures prises au Canada en réponse à la pandémie de COVID‑19. Il exigerait aussi du qu’il établisse, en consultation avec d’autres ministres, un plan de prévention et de préparation en matière de pandémie.
Il modifierait la Loi sur le ministère de la Santé afin de prévoir que le nomme, parmi les fonctionnaires de l’Agence de la santé publique du Canada, un coordonnateur national de la prévention et de la préparation en matière de pandémie chargé de coordonner les activités prévues par la Loi.
Depuis le commencement de la pandémie, au début de 2020, les néo‑démocrates demandent que l'on effectue un examen exhaustif, indépendant et approfondi de l'état de préparation et de la réaction du Canada dans le cadre de la COVID‑19. Malheureusement, les mesures énoncées dans le projet de loi sont loin de satisfaire cette demande.
Pour donner un peu de contexte, le Comité consultatif national sur le SRAS et la santé publique avait été créé en mai 2003 par la ministre de la Santé de l'époque, Anne McLellan, dans la foulée de la flambée du SRAS. Le mandat du comité était « d’évaluer — à titre d’organe tiers indépendant — les efforts actuels et les leçons de santé publique tirées de la flambée du SRAS, et d’étudier des approches à long terme sur la façon de mieux préparer le Canada à lutter contre d’éventuelles maladies infectieuses ».
L'année suivante, en 2004, l'Agence de la santé publique du Canada a été créée en réponse aux recommandations du Comité. On avait confié le mandat précis à l'Agence d'être l'organisation responsable de la planification et de la coordination de la réponse nationale aux maladies infectieuses qui présentent un risque pour la santé publique.
Les Canadiens croyaient que le gouvernement fédéral allait accroître et maintenir sa capacité à les protéger contre la menace d'éventuelles pandémies. Au contraire, autant les libéraux que les conservateurs ont laissé cette capacité s'effriter au fil des gouvernements successifs.
Les autorités canadiennes ont appris l'existence du SRAS‑CoV‑2, le virus responsable de la COVID‑19, le 31 décembre 2019, mais l'Agence de la santé publique n'a pas fait d'évaluation du risque pandémique du virus ou des impacts potentiels de son introduction au Canada.
Par conséquent, l'Agence a sous-estimé le danger potentiel de la COVID‑19 et, jusqu'au 15 mars 2020, soit près d'une semaine après que l'Organisation mondiale de la santé eut déclaré que nous étions en situation de pandémie, elle a continué d'estimer que le virus présentait un risque faible. Il y avait déjà à ce moment plus de 400 cas confirmés au Canada, et la transmission communautaire avait déjà commencé.
Alors même que l'appareil de santé publique s'est attelé à la tâche, il est devenu évident que le gouvernement fédéral était mal préparé en cas de pandémie et que sa réponse laissait beaucoup à désirer. Les évaluations de l'intervention du gouvernement face à la pandémie qui ont été menées au Canada à ce jour font état de graves lacunes.
Une vérification interne accablante de l'Agence de la santé publique du Canada publiée en janvier 2021 conclut que l'agence disposait d'« une expertise limitée en santé publique, ce qui comprend les épidémiologistes, les psychologues, les spécialistes du comportement et les médecins aux échelons supérieurs ». La vérification conclut également qu'« [i]l y a également un manque d'expertise et de capacités en matière de gestion des interventions d'urgence au sein de l'Agence », celle-là même qui est chargée de préparer le Canada en cas de pandémie.
La communication de renseignements par l'Agence de la santé publique du Canada était lamentable. Selon les vérificateurs internes, l'agence « ne dispos[ait] pas de compétences et de capacités suffisantes en matière de communication ». Le bureau de notre administratrice en chef de la santé publique, la Dre Theresa Tam, « a noté qu'elle recevait souvent de l'information dans le mauvais format, avec des inexactitudes ou des lacunes relativement à la “voix” appropriée nécessaire pour transmettre l'information [au] public [canadien]. »
Les Canadiens se souviendront des problèmes concernant la soi-disant réserve stratégique d'urgence du Canada. Un rapport de la vérificatrice générale daté de mai 2021, soit un an complet après que le Canada a déclaré la pandémie, confirme que la gestion négligente de la réserve d'urgence du Canada a entraîné des pénuries d'équipement de protection individuelle lorsque la pandémie de COVID‑19 a frappé.
De graves problèmes entourant la réserve avaient été soulevés pendant plus d'une décennie avant cela et rien n'a été fait. Les Canadiens se souviendront que nous avons dû jeter des millions de pièces d'équipement de protection individuelle dans ce pays parce qu'elles étaient périmées étant donné que l'Agence de la santé publique du Canada n'assurait pas de suivi adéquat à leur égard.
Un rapport de la vérificatrice générale daté de mars 2021 signale que l'agence ne vérifiait la conformité aux ordonnances de mise en quarantaine que pour le tiers des voyageurs entrant au pays et ne signalait pas toujours ceux qui posaient un risque de non-conformité aux forces de l'ordre pour un suivi.
Plus tard la même année, en décembre 2021, la vérificatrice générale a constaté que, « de février à juin 2021, 30 % des résultats des tests de dépistage de la COVID‑19 manquaient dans les dossiers de l’Agence ou n’avaient pu être associés à un voyageur ».
En outre, comme l'agence ne disposait pas des registres de séjour de 75 % des voyageurs entrés au Canada par avion, elle ne savait même pas si ceux qui étaient tenus de rester en quarantaine dans des hôtels autorisés par le gouvernement s'y étaient effectivement conformés.
Pour ce qui est des soins de longue durée, en mai 2020, un rapport des Forces armées canadiennes a fait état de conditions choquantes et inquiétantes dans des foyers de soins de longue durée où environ 1 600 militaires formés ont dû être déployés. Ce rapport a mis en lumière de graves préoccupations concernant le manque d'équipement de protection individuelle, les niveaux de dotation en personnel et le non-respect des procédures de base de contrôle des infections pour assurer la sécurité des résidents et du personnel.
Voilà un aperçu de ce que nous savons à ce jour. Les représentants de l'Agence de la santé publique du Canada ont déclaré qu'ils remédieraient aux lacunes identifiées en intégrant « les leçons tirées de la pandémie dans [leurs] plans et en les mettant à l'essai au besoin ». En réponse au rapport de la vérificatrice générale, l'Agence de la santé publique du Canada a promis de mettre à jour ses plans dans les deux ans suivant la fin de la pandémie.
Je veux simplement m'arrêter là un instant. Ce projet de loi voudrait que le , qui est responsable de l'Agence de la santé publique du Canada, nomme un comité consultatif, même pas un comité indépendant doté de pouvoirs, mais un comité consultatif, pour évaluer son rendement et celui de l'agence, qui est sous l'égide du ministre de la Santé. Voilà un bel exemple de conflit d'intérêts. C'est comme si un accusé désignait lui-même son juge. En soi, c'est totalement inadmissible.
En avril 2021, la ministre libérale de la Santé qui était alors en poste a affirmé qu'une enquête complète sur la réponse du Canada à la COVID‑19 serait requise au moment opportun. Elle a précisé ceci:
Nous sommes encore en situation de crise. Notre priorité pour l'instant demeure donc d'aider les Canadiens à […] surmonter cette crise sanitaire mondiale […] [A]u moment opportun, le gouvernement sera tout à fait disposé à examiner très soigneusement la réponse de notre pays à la crise de la COVID‑19.
En septembre dernier, l'actuel a dit, dans une entrevue, qu'il faudrait mener un examen général de la façon dont la pandémie de COVID‑19 a été gérée. Il a précisé que le gouvernement pourrait « bientôt » prendre une décision à ce sujet, sans préciser quand un examen officiel devrait avoir lieu et sous quelle forme. Toutefois, quand on lui a demandé si l'examen devrait être mené indépendamment de l'Agence de la santé publique du Canada, le ministre a uniquement répondu qu'un examen robuste était requis.
À ce jour, le a évité de répondre à toutes les questions sur la tenue d'une enquête ou d'un examen concernant la réponse à la pandémie, en disant qu'il y aurait un exercice sur les leçons apprises, mais que celui-ci devrait attendre la fin de la pandémie.
Les néo-démocrates veulent que le Cabinet fédéral lance immédiatement une enquête publique indépendante sur la réponse du Canada à la COVID‑19, au titre de la Loi sur les enquêtes. Depuis le début de la pandémie, nous réclamons une telle enquête, et le moment est maintenant venu de la mener. La phase d'urgence de la pandémie est terminée. Nous approchons le troisième anniversaire de l'apparition de la COVID dans notre pays. Le temps est maintenant venu de procéder à cette enquête exhaustive.
Le projet de loi ne permettrait pas un examen exhaustif, transparent et indépendant des mesures prises par le Canada en réponse à la COVID‑19. Les dispositions ne respectent pas la norme. Ce projet de loi représente plutôt une tentative inacceptable de fournir un semblant de reddition de comptes et de surveillance en ce qui concerne les mesures prises par le Canada en réponse à la plus grave pandémie à laquelle nous ayons jamais eu à faire face.
Le recours à la Loi sur les enquêtes permettrait de nommer un président indépendant qui serait chargé de l'enquête. Aux termes de cette loi, les personnes responsables de l'enquête peuvent convoquer des témoins, ordonner la divulgation de documents et entendre des témoignages publiquement et sous serment. Elles pourraient retenir les services de spécialistes, y compris d'experts techniques et d'avocats pour les conseiller.
Plus important encore, l'enquête se déroulerait de façon indépendante du gouvernement et publiquement. Tous les Canadiens ont été touchés par les mesures que l'ensemble des pouvoirs publics ont prises en réaction à la pandémie. Les Canadiens doivent avoir confiance que toute enquête sur les décisions qui ont été prises et les erreurs qui ont été commises est menée avec honnêteté et intégrité.
Je souligne que des experts de partout au pays ont la même position que le NPD. Le Dr David Naylor, président du Groupe de travail sur l'immunité face à la COVID‑19 et ancien président de l'examen fédéral de l'épidémie de SRAS en 2003, a demandé un examen indépendant. Richard Fadden, l'ancien conseiller à la sécurité nationale du , a fait de même. Adrian Levy, le Dr David Walker et le Dr David Butler-Jones ont aussi demandé une telle enquête.
Nous n'avons pas besoin d'une enquête des citoyens réclamée par Preston Manning, car nous ne voulons pas en faire un cirque politique. Nous ne voulons pas d'un projet de loi libéral qui dirigera cette enquête vers des eaux sûres pour y opérer un camouflage. Nous ne voulons pas de cirque politique ni de camouflage.
Les néo-démocrates et les Canadiens veulent une enquête en profondeur — indépendante, objective et exhaustive — sur tous les aspects de la préparation fédérale et des interventions pour lutter contre la COVID‑19, et nous ne nous arrêterons pas tant que les Canadiens ne l'auront pas obtenue.
:
Monsieur le Président, le projet de loi d'initiative parlementaire dont nous sommes saisis est substantiel. C'est un projet de loi qui aurait un effet positif et qui reflète ce qui s'est passé au cours des deux dernières années et demie. Je ne veux pas me livrer à de petits jeux. Je veux reconnaître le projet de loi pour ce qu'il est. Il reflète un besoin très réel et authentique, et donne une orientation précise aux mesures que le gouvernement pourrait prendre — non seulement le gouvernement, mais aussi la Chambre des communes.
En laissant entendre qu'il s'agit en fait d'une initiative du gouvernement, on cause du tort aux simples députés. En essayant de jouer le jeu du quorum lors du débat sur un projet de loi d'initiative parlementaire, on nuit à l'heure réservée aux initiatives parlementaires. Je le crois vraiment, sincèrement, et j'espère qu'à tout le moins, nous interromprons ce petit jeu jusqu'à ce que l'heure réservée aux initiatives parlementaires soit terminée.
Il y avait des questions telles que les contrôles aux frontières, les problèmes d'approvisionnement, les problèmes de stocks et le soutien aux gens ordinaires pendant les pandémies. Pensons aux ressources humaines qui sont nécessaires, sans parler des intervenants externes comme la Croix-Rouge ou les Forces canadiennes. Beaucoup de facteurs entrent en ligne de compte.
Nous sommes saisis d'un projet de loi d'initiative parlementaire qui cherche des réponses pour l'avenir. Y a-t-il des leçons à tirer des deux dernières années et demie? Tous les députés du caucus libéral nous diront que oui, il y a des leçons à tirer du processus. J'aimerais croire que tous les députés de tous les partis en reconnaissent l'importance.
Mettons la partisanerie de côté un instant. Convenons qu'il serait bien que ce projet de loi soit renvoyé à un comité. Je repense aux nombreuses fois où j'ai participé au débat pendant l'heure réservée aux affaires émanant des députés, et ce n'est pas arrivé souvent que je propose de renvoyer un projet de loi à un comité. Cependant, je crois que le projet de loi est pertinent par rapport à ce que nous vivons aujourd'hui.
Cela n'empêcherait pas d'autres formes d'enquête. Cela n'empêcherait pas d'autres comités permanents d'examiner ce qui s'est passé. Je suis l'un des nombreux députés à avoir reconnu qu'il fallait prendre des décisions plutôt rapidement. J'ai aussi déjà reconnu, et je maintiens cette position, que tout n'était pas parfait. Des erreurs ont été commises. Or, quand un gouvernement dépense littéralement des milliards de dollars additionnels et qu'il crée des programmes à partir de zéro, il est normal que des erreurs surviennent. Nous pouvons tous tirer des leçons des choses qui se sont passées pendant la pandémie.
La situation n'est pas unique au fédéral. Les gouvernements provinciaux, les municipalités, les conseils scolaires, les leaders des communautés autochtones et nous tous en général avons participé à la prise de ces décisions. La tenue d'une enquête exhaustive est une mesure responsable, tout comme l'idée de la production d'un rapport aux trois ans ou aux cinq ans. Dans le projet de loi, il est question de trois ans, mais le député dit être prêt à ce que cela soit changé.
Je ne vois pas pourquoi des députés s'opposeraient à ce projet de loi. J'ai bien hâte à la mise aux voix, parce que je crois que, si nous le demandions aux habitants de nos circonscriptions respectives, ils nous diraient qu'ils veulent que nous appuyions ce projet de loi à l'unanimité.